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Sommaire

Sommaire p.2

Préfaces p.3

Avant propos p.4

Les précurseurs p.5

Air France prend le relais p.15

Mérignac, escale de transit p.25

Air Inter s'impose p.39

Air France et Air Inter se rapprochent p.51

Naissance d’un groupe dans la douleur p.61

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Mérignac, escale de transit. 1944-1957

Reprise des vols.

L’aérogare de Mérignac en 1944 (collection René

Lemaire) Bordeaux est libéré à la fin du mois d’août 1944. Le port aérien de Mérignac est fortement endommagé. Il a subi un violent bombardement anglo-américain le 24 août, puis, les troupes allemandes, en se retirant, ont achevé le travail de destruction. L’aérogare est détruite alors que le terrain est parsemé de près de 4.500 trous de bombes. Il faut remettre en état l’aérodrome rapidement car les opérations militaires ne sont pas terminées en Gironde. Les Allemands occupent toujours la pointe du Médoc. L’urgence de la reprise des vols se justifie également par la pénurie des moyens de transport routiers et ferroviaires. Des prisonniers de guerre allemands sont immédiatement affectés aux travaux de remise en état partiel du port aérien. Sans attendre la fin des travaux, M. Rouaix, nommé chef d'escale des Transports Aériens Militaires (TAM), à Mérignac organise la reprise de l'activité aérienne au départ de la zone militaire. Les TAM ont été créés par une ordonnance du 24 février 1944. Ils ont regroupé en une seule entité l’ensemble des moyens de transports aériens français réquisitionnés : les Lignes Aériennes Militaires (LAM), le Réseau Aérien Militaire Français (RAMF) et le Service Militaire de

Transport Léger (SMTL), créés en Afrique du Nord et au Levant en 1941 et 1942. Dès le 14 septembre 1944, les TAM ouvrent la ligne N°403 : Bordeaux – Toulouse – Marseille. Le service est opéré en Caudron Goéland trois fois par semaine, le lundi, mercredi et vendredi. Il est en correspondance à Marseille avec la Ligne Paris – Lyon – Marseille et Marseille – Alger. Quatre jours plus tard, les liaisons avec Paris reprennent au départ de Bordeaux. Cette ligne, baptisée ligne 401, fonctionne via Limoges le mardi, jeudi et samedi en LeO-45, d’anciens bombardiers français reconvertis en transport de passagers. La régularité de ce service est insuffisante. La pénurie de pièces détachées retarde les opérations de remise en ligne des Leo-45. Le 26 octobre 1944, M. Schumaker succède à M. Rouaix nommé à Toulouse. Là, ce dernier rédige son rapport sur le redémarrage des vols à Mérignac. Il trace les perspectives des TAM à Bordeaux : « Les liaisons aériennes créées pour desservir Bordeaux ont été appréciées de tous les organismes (plusieurs demandes de places de particuliers). Il n’est qu’une chose à regretter, c’est que la liaison Bordeaux – Paris ne puisse être journalière (appareil constamment plein, nombreux refus de place, fret postal en forte augmentation). La place de Bordeaux est un centre qui a des possibilités énormes d’extension pour l’avenir. En effet, c’est une ville très industrielle et très commerçante : térébenthine et dérivés, vin, liqueur, conserves, verreries, raffineries de sucre et d’huile, grands ateliers de réparations autos et constructions navales, etc. J’avais commencé à faire quelques démarches commerciales pour l’après guerre, Ets Bardinet, gros producteur de liqueurs et rhum, Ets Louis, gros fabricant de chocolat, fabricants d’huile de table et huile industrielle, usines de conserve et grossistes de vins de la rue des Chartrons. J’avais également projeté l’ouverture d’une agence Air France en ville,

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le local pourrait actuellement être trouvé sans trop de difficultés, vue la quantité d’entreprises commerciales fermées ou abandonnées depuis la grosse épuration et la suspension de certaines d’entre elles. Cette agence pourrait également effectuer, en attendant son aménagement futur moderne pour l’après guerre, le service régulateur et réservation, en accord avec les services officiels de la place. L’ouverture d’une agence à Bordeaux est d’autant plus à considérer que le port et les installations portuaires de Bordeaux n’ont pas du tout souffert. Ce sera, après guerre, le premier port français de l’Atlantique qui pourra fonctionner dès l’élimination de la poche de résistance de la Pointe de Grave. »

Le Caudron Goéland F-ARTR des TAM (collection

Philippe Ricco) Le 1er décembre 1944, le Goéland F-BAAD est endommagé au roulage après être passé sur un trou de bombe récemment comblé. Le train d'atterrissage droit du bimoteur est fauché. Dans son rapport du mois d’octobre 1944, le chef d’escale de Bordeaux donnait des précisions sur l’état du terrain : « Il est prudent de recommander aux équipages de ne pas quitter les pistes cimentées de circulation, la majeure partie du terrain gazonné est impraticable, celui-ci ayant été truffé de bombes et les canalisations de drainage abîmées. Les apports de matériaux et de terre pour boucher les trous après les fortes pluies ressemblent à des fondrières. » Le réseau des TAM est modifié le 18 décembre 44. La tête de ligne de la ligne 403, opérée en Caudron Goéland, est transférée de Bordeaux à Toulouse. Parallèlement, le service Bordeaux – Paris devient quotidien et le temps de vol est diminué par suppression de l’escale intermédiaire à Limoges.

Air France reprend ses marques. Le 9 février 1945, le Réseau des Lignes Aériennes Françaises (RLAF) succède aux Transports Aériens Militaires : « Le Réseau des Lignes Aériennes Françaises est constitué pour l’ensemble des lignes aériennes de nationalité française qui relie des points de la métropole et de l’Empire, soit entre eux, soit à l’étranger. Sauf décision expresse contraire, le Réseau dispose pour son fonctionnement de tous les moyens et ressources réquisitionnés. » Tout comme les Transports Aériens Militaires, l’appellation Réseau des Lignes Aériennes Françaises est peu usitée au profit d’Air France, que ce soit dans les échanges quotidiens entre services ou encore dans les courriers officiels. A Bordeaux, le courrier est écrit sur du papier à en-tête Air France. Comme le suggérait M. Rouaix, une agence Air France est ouverte dans les locaux du Commissariat de la République, au numéro 2 de la place Pierre Laffitte. Cette installation est provisoire, le temps de remettre en état les locaux d’avant-guerre au numéro 25 des allées de Tourny. Ils sont investis au mois d’octobre 1945. La pénurie de moyens perturbe l’exploitation courante de la compagnie qui est contrainte, pour l’acheminement de ses passagers entre son agence et l’aéroport, d’avoir recours aux autocars militaires de la 3ème région Aérienne. A l’aéroport, la compagnie est logée dans des locaux loués à la Chambre de Commerce de Bordeaux : un emplacement de 1.575 m² dans le hangar HN2 pour abriter les avions, 4 appentis de 25 m² chacun pour abriter le matériel et un bureau de piste. Au cours de l’année 1945, Air France prend possession de locaux supplémentaires dans la "baraque provisoire" : un bureau pour le chef d'escale et un bureau pour son service trafic. Le hangar sera en partie restitué en 1949, seul un tiers de la surface sera gardée pour abriter les véhicules de la compagnie. Le 1er août 1945, les horaires de la ligne Bordeaux – Paris sont modifiés. Le service fonctionne aux horaires suivants : � Départ de Paris centre à 9h.05 ; Décollage

du Bourget à 9h.50 ; Escale à Poitiers de 11h.35 à 11h.50 ; Atterrissage à Mérignac à 13h.05 ; Arrivée à Bordeaux devant l'hôtel Splendid à 13h.55.

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� Départ de Bordeaux devant l'hôtel Splendid à 13h.40 ; Décollage de Mérignac 14h.30 ; escale à Poitiers de 15h.45 à 16h. ; Atterrissage au Bourget à 17h.45 ; Arrivée à Paris à 18h.30.

Junkers 52 F--BAJC (collection Musée Air France) Sur les 16 places disponibles à bord de l'appareil, un trimoteur d'origine allemande Junkers 52, seules 10 places sont réservées aux bordelais, les six autres sont réservés aux poitevins. Les conditions de transport sont très rudimentaires. Le 10 octobre 1945, répondant à une réclamation de la Chambre de Commerce de Bordeaux sur cette question, Air France justifie ses choix : « Lorsque nous avons ouvert aux passagers la ligne Paris – Bordeaux, ainsi que d’autres lignes, nous nous sommes trouvés devant l’alternative ou, de ne pas accepter de passagers en raison du manque de confort des avions ou bien de les accepter avec un confort nettement insuffisant. La pénurie actuelle des moyens de transport nous a fait adopter la seconde solution, que nous désirons améliorer aussitôt que nous le pourrons, d’abord, en dotant les avions de sièges normaux, ensuite en les remplaçant par des avions plus modernes. » La compagnie améliore progressivement l’aménagement intérieur de ses Junkers. Elle remplace les banquettes latérales par des fauteuils, au fur et à mesure du passage en atelier des trimoteurs pour la visite des 400 heures. Rétablissement des liaisons postales nocturnes. Si les liaisons postales ont été rétablies dès 1944, le ministère des Postes, Télégraphes et Téléphones souhaite développer au plus vite

le réseau aérien postal pour diminuer les délais d’acheminement. Pour cela, il faut compléter par des services nocturnes les services aériens existants : Paris – Bordeaux, Paris – Rennes – Angers, Toulouse – Paris, Paris – Lille et Toulouse – Nice. Il doit composer avec le ministre de l'Air, Charles Tillon qui ne veut pas entendre parler d'une compagnie dédiée uniquement aux vols postaux, comme Air Bleu avant guerre. Il veut que toutes les lignes aériennes, qu'elles soient commerciales ou postales, soient opérées par un seul et unique opérateur, le Réseau des Lignes Aériennes Françaises (RLAF). De leur coté, les Postes veulent garder le contrôle de l'exploitation des vols postaux. Un compromis est trouvé entre les deux ministères. Un département postal est créé au sein des RLAF. Il jouit d'une flotte et d'un personnel spécifique. La direction de ce département est confiée à deux pionniers de l'aviation postale : Didier Daurat et Raymond Vanier. L'appareil retenu est encore le Junkers 52. « La vitesse de croisière du Junkers ne dépasse pas 205 à 210 km/h, c'est-à-dire qu’elle est à peu de choses près celle du Goéland. Cette faible vitesse est un handicap sérieux pour les liaisons entre points éloignés du territoire et elle peut être une cause d’irrégularités dans les correspondances par suite de la grosse influence du vent sur les temps de parcours. La charge utile qui est de 2.300 kg sur des étapes de 700km (avec marges de sécurité) pourrait être portée à près de 3 tonnes sur des étapes de l’ordre de 300km... » (Air France, 28 février 1945) La compagnie n'a d'autre choix que d’utiliser cet appareil désuet. La charge marchande des Goéland utilisés jusque là est insuffisante alors que le bimoteur postal SO.90 est en cours de développement et ne sera disponible au mieux qu’en 1947. Un autre appareil allemand, le Siebel 204, un instant envisagé, n’est finalement pas retenu. Le 26 octobre 1945, Charles Tillon, ministre de l'Air et Eugène Thomas, ministre des Postes, Télégraphes et Téléphones assistent au Bourget à l'inauguration de la première ligne postale d'après-guerre : Paris – Bordeaux – Toulouse – Pau et retour. Deux avions décollent, l'un de Paris, immatriculé F-BAKK, l'autre de Pau, immatriculé F-BALD.

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Le service fonctionne tous les jours de la semaine sauf le samedi. Le trimoteur fait escale à Mérignac de 0h.25 à 0h.35 dans le sens Pau – Paris et de 2h.10 à 2h.25 dans le sens Paris – Pau. Le 13 janvier 1946, peu avant minuit, le Junkers 52 du vol postal Pau – Bordeaux – Paris, immatriculé F-BANP, accroche le clocher du couvent "Les sœurs du bon pasteur, maison de Sainte Germaine" à Bruges, à 8 km au nord-est du seuil de piste de Mérignac. L'avion s'abat au sol sur des maisons. L’équipage (pilote Perrin, radio Le Corroler et mécanicien Morin) est tué dans l’accident. Recouvert par un brouillard intense, l’aéroport de Mérignac était fermé. L’équipage, en décollant de Toulouse, connaissait cette information mais par mesure de sécurité, il avait décidé de suivre l'itinéraire habituel, équipé de moyens de guidage supérieurs à l’itinéraire direct. La cause de l’accident ne sera jamais vraiment élucidée. Air France est ambitieuse Le 16 janvier 1946, Air France qui a pris la succession du RLAF depuis le 1er janvier vient à Bordeaux présenter ses projets d'ouverture

de lignes. La compagnie ambitionne d'ouvrir 6 lignes au départ ou en transit à Mérignac : � Paris – Bordeaux � Bordeaux – Clermont-Ferrand – Lyon –

Genève � Paris – Bordeaux – Casablanca � Bordeaux – Madrid – Lisbonne � Bordeaux – Pau – Toulouse – Londres � Bordeaux – Barcelone.

Ces lignes seraient opérées à raison d'un service quotidien. Malheureusement, la flotte d'Air France n'est pas à la hauteur des ambitions de la compagnie. Les projets sont donc revus à la baisse. Seules deux lignes sont ouvertes au printemps 1946 : Bordeaux – Nice, le 13 mai, suivie de Paris – Bordeaux – Lisbonne deux jours plus tard. La ligne Bordeaux – Toulouse – Montpellier – Marseille – Nice et retour (ligne N°381/382) fonctionne du lundi au samedi en Junkers 52 aux horaires suivants : � Décollage de Mérignac à 8h.00 ;

Atterrissage à Nice à 13h.00 � Décollage de Nice à 14h.00 ; Atterrissage

à Mérignac à 18h.50. Le 7 octobre 1946, le Junkers de la ligne Bordeaux – Nice sera remplacé par un vétéran de la flotte Air France, survivant de la

26 octobre 1945, chargement de la poste dans le Junkers 52 F-BAKK (collection Musée Air France)

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guerre, le trimoteur Dewoitine 338. Le désintérêt de la clientèle pour cette ligne entraînera sa fermeture le 3 février 1947. Entre Bordeaux et Toulouse, seuls deux passagers en moyenne ont embarqué sur ce vol au cours des cinq mois d’exploitation.

Dewoitine 338 F-ARID, un des survivants du second conflit mondial (collection Bruno Vielle) Le 15 mai 1946, la ligne Paris – Bordeaux – Lisbonne est inaugurée. Le service fonctionne deux fois par semaine en DC-3 : mardi et jeudi dans le sens Paris – Lisbonne, mercredi et vendredi dans l'autre sens. L’ouverture de cette ligne est destinée à satisfaire les autorités portugaises. Air France, avec l’aide du gouvernement français, négocie avec le gouvernement lusitanien des droits d’escale aux Açores pour ses vols transatlantiques. Au départ, les Portugais conditionnaient leur accord à l’obligation faite aux vols transatlantiques de faire également escale à Lisbonne. L’ouverture d’un service direct Paris – Lisbonne lèvera cette exigence. La ligne Paris – Bordeaux – Lisbonne sera endeuillée le 1er février 1947. Le Douglas DC-3 F-BAXQ, assurant le service Paris – Bordeaux – Lisbonne, s'écrase sur le massif montagneux de Cintra, à 10 kilomètres au nord-ouest de Lisbonne. L’équipage et 10 des 11 passagers sont tués. L'appareil est entièrement détruit. Le 11 juin 1947, Air France inaugure, en présence des édiles locaux, sa nouvelle agence bordelaise. Les travaux d'aménagement de l'immeuble Gobineau, cours du 30 juillet, ont débuté le 15 janvier 1947.

L’agence de 1947, les locaux sont aujourd’hui occupés par l’office du tourisme de Bordeaux (collection Musée Air France) Sur la route du soleil Même si elle ne concerne pas directement l’aéroport de Mérignac, la ligne France – Antilles impacte tout de même la vie d’Air France à Bordeaux. A la fin des années trente, les constructeurs aéronautiques français ont entrepris le développement d'hydravions multimoteurs capables de traverser l'Atlantique pour les besoins de la compagnie Air France Transatlantique. La construction des prototypes, débutée avant guerre, a été freinée par quatre années d'occupation. Dès la libération du territoire, le Gouvernement Provisoire de la République relance l'industrie aéronautique française et commande, entre autres, plusieurs hydravions hexamoteurs Latécoère 631. Mais, dopés par les besoins militaires, les progrès technologiques font que ces hydravions sont supplantés par des multimoteurs terrestres

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comme le Douglas DC-4 ou encore le Lockheed Constellation. Air France, qui met justement en service ces deux modèles d’appareils, ne sait que faire des Laté-631 mis à sa disposition par les pouvoirs publics. Elle suggère de les utiliser en appoint des appareils terrestres sur l’Atlantique Nord. Le ministère de l’Air propose alors de les affecter à une ligne France – Antilles à créer. Les hydravions décolleront du lac de Biscarosse où Air France Transatlantique a aménagé une hydrobase aux Hourtiquets avant la guerre. Dès la libération, Air France a demandé la remise en état de l'hydrobase, détruite par les Allemands au moment de leur départ. La pénurie de matériau et de main d'œuvre a retardé les travaux. La compagnie ne reprend possession de l'aérogare des Hourtiquets qu'en 1946. Cent cinquante agents sont employés sur place. Biscarosse était avant guerre l'hydrobase provisoire française. De nombreuses études avaient été entreprises en 1937 par le ministère de l'Air français sur la meilleure localisation de cette base transocéanique. Bordeaux, par l'intermédiaire du président de sa Chambre de commerce était candidate :

« Je veux également dire quelques mots de la traversée aérienne commerciale de l’Atlantique Nord, dont toutes les grandes nations se préoccupent. Aux transatlantiques aériens de demain, notre région offre des havres particulièrement favorables et nous devons le souligner. Les tracés méridionaux, dont tout le monde reconnaît la supériorité sur les lignes orthodromiques, aboutissent tout naturellement dans le Golfe de Gascogne, et Bordeaux est admirablement placé pour distribuer les voyageurs transatlantiques et les acheminer d’une part vers Paris et toutes les destinations desservies par le Bourget, et, d’autre part, vers l’Europe Centrale, les liaisons méditerranéennes et l’Orient, et, enfin vers l’Espagne, le Maroc, l’AOF. » (avril 1937, Paul Desse, président de la Chambre de Commerce) La fin programmée des paquebots de l'air ne justifiait plus à la fin de la seconde guerre mondiale la construction d'une nouvelle hydrobase. Le vol inaugural est réalisé le samedi 5 juillet 1947. Le "Guillaumet", nom de baptême du Latécoère 631 N°3 F-BANU, quitte son ponton à 3h.15. Il s'élance avec 58 passagers à bord vers les Antilles. Après une escale de 4

Laté-631 N°3 F-BANU Guillaumet (collection Musée Ai r France)

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heures à Port Etienne en Mauritanie, il amerrit à Fort de France le lendemain à 10h.25. Max Hymans, secrétaire général à l'Aviation Civile et futur président d'Air France participe au vol inaugural : « La route commerciale France – Antilles que nous venons d’inaugurer mérite de porter le nom de Route du Beau temps. C’est pour cette raison que cette route fut adoptée pour leurs caravelles par les premiers navigateurs du 16ème et 17ème siècle. » Le service régulier est ouvert officiellement le 25 juillet suivant. Les passagers prennent le train à la gare d'Austerlitz à Paris le jeudi à 17h.20. Arrivés à la gare Saint-Jean à Bordeaux, ils sont transportés au bon soin d'Air France jusqu'à l'hydrobase de Biscarosse d'où ils décollent le vendredi matin à 3h.30. Ils arrivent aux Antilles après un périple de plus de trente heures dont 26h.30 de vol. Dans l'autre sens, l'hydravion amerrit à Biscarosse le mercredi à 22h.30. Les passagers sont transportés à la gare St Jean d’où le train pour Paris part le jeudi à 2h18. Il arrive à la gare d'Austerlitz à 9 heures.

Laté 631 F-BDRA amarré devant le ponton

d’embarquement (Collection Musée Air France) La disparition corps et biens du Laté F-BDRC et de ses passagers le 1er août 1948 au milieu de l’océan Atlantique entraîne la suspension de vol immédiate des Laté-631 et par là même la fermeture de la ligne Biscarosse – Fort de France. Si les hydravions peuvent revoler, ils ne sont plus autorisés à transporter des passagers. Les pouvoirs publics les confient à la SEMAF (Société d’Exploitation du Matériel Aéronautique Français) fondée uniquement pour exploiter les Laté-631. Air France quitte définitivement l’hydrobase des Hourtiquets dans les mois qui suivent.

Une aérogare provisoire. Les travaux de remise en état de l'aéroport, entrepris en urgence dans l'immédiat après-guerre franchissent une étape supplémentaire avec l'ouverture d'une aérogare provisoire au printemps 1947. La Chambre de Commerce, tout comme l'État, ont préféré dans un premier temps construire un bâtiment temporaire. Les travaux définitifs, nécessitant des investissements importants, ne seront réalisés qu'après de nouvelles études prospectives et l'élaboration d'un nouveau plan de masse. L'aérogare provisoire est construite à l'emplacement du bâtiment d'avant guerre. Cette nouvelle construction, œuvre de l'architecte M. Mothe, est réalisée en bois et couvre une surface au sol de près de 1.500 m².

Deux vues de l'aérogare provisoire (Collection Bruno Vielle) Le journal Les Ailes, dans son édition du 7 juin 1947, vante les qualités de l'aérogare provisoire : « Situé au centre du groupe des nouveaux bâtiments qui ont été édifiés le long de l'aire de stationnement, magnifique aire bétonnée d'environ 300 mètres sur 100, cette aérogare de style landais, à simple rez-de-chaussée légèrement surélevé, a été conçue avec un souci recherché de grouper tous les services passagers en circuits intérieurs très étudiés. Qu'il s'agisse de passagers en transit,

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et les lignes anglaises en comptent beaucoup, ou de passagers au départ ou à l'arrivée à Bordeaux, les circuits de distribution de billets dans un hall d'accès assez vaste comportant recette auxiliaire des postes, cabines téléphoniques reliées à Bordeaux, kiosque à journaux, enregistrement des bagages, contrôle douanier et sanitaire, service de police, etc., tout a été réalisé dans le but de rendre le moins désagréable possible le passage forcé dans ces services. Les formalités imposées aux passagers se rendant à l'étranger sont ainsi acceptables parce qu'elles n'exigent pas de vaines recherches, parce qu'on s'est efforcé de grouper tout ce qui pouvait l'être : bureaux des chefs d'escale d'Air France, de la B.E.A, de la Chambre de Commerce, etc. A ce point de vue, l'aérogare de Bordeaux est sans doute, actuellement, l'une des mieux conçue. A sa droite, dans le prolongement a été édifié le restaurant, bien approvisionné, d'accès facile, comportant salle de lecture, restaurant pour les passagers avec vue sur la piste et sur les jardins. La décoration intérieure, signée Marty, rappelle les richesses du terroir de l'Aquitaine. » Elle est inaugurée par le ministre des Travaux Publics et des Transports, Jules Moch, le 3 août. Bordeaux aux portes du Maroc

Débarquement des passagers d’un Douglas DC-4 (collection Bruno Vielle) Le mercredi 20 août 1947, Air France inaugure une nouvelle ligne Bordeaux – Casablanca. Le service fonctionne le mercredi en DC-4 de 44 places. Parti à 11h.15 de Casablanca, le bimoteur atterrit à Mérignac à 16 heures. Il re-décolle pour le Maroc à 18 heures. Cette ouverture de ligne répond aux demandes des bordelais. Jusqu’ici, pour se

rendre au Maroc, ils devaient transiter par Toulouse ou Marseille. Quelques privilégiés avaient pu se rendre directement de Mérignac à Casablanca ou encore Dakar en empruntant les lignes militaires. Au mois d’octobre 1945, les Groupe de Bombardement 1/25 Tunisie et II/23 Guyenne arrivent à Mérignac leur nouveau terrain d’affectation. Ces deux unités, créées en Afrique du Nord en 1943, sont équipées de bombardiers britanniques Halifax. Après la guerre, quelques Halifax sont modifiés à Mérignac par la SNCASO (Société Nationale de Construction Aéronautique du Sud Ouest) pour le transport de passagers. Les postes de mitrailleurs sont supprimés et des sièges en osier sont installés dans le fuselage. Un Halifax ouvre au mois de mars 1946 la ligne Bordeaux – Rabat – Casablanca – Dakar. Ce service fonctionne un jour sur deux et complète les rares moyens aériens du Réseau des Lignes Aériennes Militaires. Les bombardiers assurent le rapatriement et la relève des fonctionnaires bloqués dans les colonies françaises du fait de la guerre. Le service est réduit à un service hebdomadaire au mois de novembre 1946. Il est fermé le 1er janvier 1947. Cette mission achevée, l’escadre retrouve ses missions militaires.

Halifax PP165 du 1/25 Tunisie basé à Mérignac (Collection Philippe Ducastelle) Air France, de son côté, envisageait depuis plusieurs mois d’ouvrir un service reliant Bordeaux au Maroc. Mais elle a du ajourner cette ouverture, le temps d’obtenir les autorisations de survol du territoire espagnol. Le service Bordeaux – Casablanca est amélioré le 21 octobre 1947. Un second service hebdomadaire est ouvert. Les horaires et jours de passage sont modifiés. Les services fonctionnent le mardi et vendredi aux

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horaires suivants : atterrissage à Mérignac à 11h.35, décollage à 14 heures. Par contre, la ligne Paris – Bordeaux- Lisbonne est fermée au mois d'octobre 1947 "pour des motifs impérieux d'ordre technique et diplomatique". La suspension du service sur Lisbonne est de courte durée. La capitale portugaise est à nouveau reliée à Bordeaux le 5 février 1948 par introduction d’une escale intermédiaire sur la ligne Bordeaux – Casablanca. Le service fonctionne en DC-4 le mardi et le jeudi. L’escale à Lisbonne se fait alternativement au cours du vol aller ou retour, le mardi, vol Casablanca – Bordeaux, le jeudi, vol Bordeaux – Casablanca.

Le parking de Mérignac dans les années cinquante : 2 Douglas DC-4 d’Air France côtoient 2 Vickers Viking de British European et un Boeing Stratocruiser d’Aigle Azur (collection Bruno Vielle) Le réseau bordelais ne subit plus de modifications au cours de l'année 1948. Air France profite de cette pause pour structurer ses services commerciaux. Trente-six délégations régionales sont créées à travers le monde. L'une d'elles, la Délégation France pour l’Ouest et le Sud Ouest s’installe à Bordeaux. Elle chapeaute trois représentations locales sises à Toulouse, Nantes et Bordeaux. Son domaine d’activité couvre 30 départements et comporte 8 escales : Bordeaux, Biarritz, Dinard, La Baule, Lourdes, Nantes et Toulouse. La Délégation Régionale, tout comme la représentation locale bordelaise, est logée au 25 des Allées de Tourny. Après le Maroc, l'Afrique Occidentale Française et l'Algérie Le 4 avril 1949, la desserte de Lisbonne est à nouveau modifiée. L'escale intermédiaire entre Bordeaux et Casablanca est supprimée

au profit d'une liaison directe, prolongement de la ligne Paris – Bordeaux. Le service fonctionne dans le sens Paris – Bordeaux – Lisbonne le samedi, le dimanche dans l'autre sens. Quant aux deux vols Casablanca – Bordeaux, ils sont désormais prolongés sur Nantes. A ces deux vols opérant le lundi et le jeudi, s'ajoutent deux services supplémentaires directs pour l'été à compter du 4 juin 1949. Ils fonctionnent dans la nuit du mardi au mercredi pour le premier et dans la nuit du samedi au dimanche pour le second. Le fret transporté sur ces vols est traité dans de nouveaux locaux depuis le 20 janvier 1950. Air France loue à la Chambre de Commerce de Bordeaux 4 boxes grillagés d'une surface totale de 36 m² et d'un bureau dans un nouveau bâtiment dédié au traitement du fret. Au printemps 1950, Air France renforce ses services au départ de Bordeaux. Deux nouvelles lignes sont ouvertes, une vers Dakar en Afrique Occidentale Française, l'autre vers Alger en Afrique du Nord. Le service Dakar – Bordeaux – Dakar est inauguré le 16 avril 1950. Il fonctionne le dimanche en Douglas DC-4 aux horaires suivant : atterrissage à Mérignac à 14h.05, décollage de Mérignac à 15h.50. Quelques semaines plus tard, le 29 juin, est inaugurée la ligne Bordeaux – Alger. Elle fonctionne le jeudi en Douglas DC-4 aux horaires suivants : arrivée à Bordeaux à 20h.30, départ de Bordeaux à 21h.45. Le service est suspendu fin septembre, après seulement quelques semaines d'exploitation. Les liaisons entre Bordeaux et l'Algérie reprennent le 26 juin 1951 au rythme de deux services hebdomadaires en Douglas DC-4, le mardi et le vendredi. La baisse de trafic les mois d'hiver, d'octobre à mars, oblige la compagnie à fusionner ses lignes entre la métropole et l'Union Française en lignes multi tronçons. Les services directs sont ensuite rétablis au printemps. Ainsi, au programme hiver 1951-1952, Air France exploite à Bordeaux trois lignes multi tronçons : le lundi, Alger – Toulouse – Bordeaux – Nantes, le mardi, Nantes – Bordeaux – Toulouse – Alger et le mercredi, Paris – Bordeaux – Casablanca – Dakar. Au printemps 1952, la compagnie nationale propose deux nouvelles destinations marocaines au départ de Mérignac, Rabat et Tanger, en introduisant une escale

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intermédiaire entre Bordeaux et Casablanca. Le service trihebdomadaire Casablanca – Rabat – Bordeaux, opéré en SNCASE SE-161 Languedoc, fonctionne le lundi, jeudi, dimanche. Les vols retours fonctionnent le mardi, vendredi et dimanche. Le service hebdomadaire Casablanca – Tanger – Bordeaux, également opéré en Languedoc, fonctionne le jeudi. Le vol retour s'effectue le lendemain. Le 26 avril 1953, le service dominical Orly – Bordeaux – Casablanca – Dakar (AF256/257), opéré en Lockheed Constellation, est prolongé sur Abidjan en Côte d'Ivoire via Robertsfield (Libéria) et Conakry (Guinée). Cette ligne est baptisée Flèche d'ivoire. Un autre service Orly – Bordeaux – Casablanca – Dakar fonctionne le mardi. A l'automne 1953, les services africains transitant par Bordeaux sont réaménagés : � Le vol Abidjan – Bamako – Casablanca –

Bordeaux – Orly (vol AF252-253) opère le mardi à l'aller, le vendredi au retour.

� Le vol Abidjan – Robertsfield – Conakry – Dakar – Casablanca – Bordeaux – Paris (AF256-257) opère le vendredi à l'aller, le mercredi au retour.

� Le vol Orly – Bordeaux – Casablanca – Dakar (AF219/218) opère le lundi à l'aller, le mardi au retour.

L'année suivante, le 24 juin 1954, Air France inaugure une nouvelle ligne Bordeaux – Oran. Le service fonctionne en Breguet 763 Deux-Ponts le mardi et le jeudi aux horaires suivants : atterrissage à Mérignac à 12h.30, décollage à 14h.30. En octobre 1959, la compagnie ouvrira un service en Douglas DC-4 au départ de Mérignac vers Bône et Philippeville. Le quadrimoteur atterrira à Bordeaux (AF2508) le mercredi à 12h.30. Il redécollera (vol AF2509) le jeudi à 13h.20. Emergence des compagnies privées De nombreuses initiatives privées françaises se lance dans le transport aérien international dès la fin du second conflit mondial. Même s’ils autorisent la création de près de soixante entreprises de transport aérien, les pouvoirs publics dressent de nombreux obstacles administratifs devant ces compagnies privées pour protéger les intérêts de la compagnie

SNCASE SE-161 Languedoc F-BCUG au roulage à Mérignac. Les plans centraux des Languedoc ont été assemblés à l'Atelier Industriel de l'Aéronautique à Bordeaux, quai de la Souys puis transportés par péniche à Toulouse (collection Bruno Vielle)

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nationale. Pour Air France, la concurrence arrive à Bordeaux dès 1947. La compagnie TAI (Transports Aériens Intercontinentaux) ouvre le 23 septembre 1947 une ligne Orly – Casablanca via Bordeaux. Le service via Mérignac fonctionne 3 fois par semaine. Les avions qui opèrent sur cette ligne sont des Douglas DC-4 achetés d'occasion à la KLM par une filiale de la TAI, TAI Maroc. La compagnie privée, fondée en 1946, a été contrainte d'utiliser cet artifice juridique pour contourner l'interdiction du ministre de l'Air d'acheter ces avions d'occasion. Les DC-4 ont été révisés et aménagés à Mérignac par la SFERMA (Société Française d'Entretien et de Réparation de Matériel Aéronautique). Le 14 avril 1948, la société navale Delmas Vieljeux, agent général de la TAI à Bordeaux ouvre un bureau sur l'aéroport. Au mois de novembre 1949, un service hebdomadaire fonctionne entre Bordeaux et Casablanca. Une semaine sur deux, le vol est prolongé sur Agadir et Dakar. Le passager, parti de Bordeaux le lundi 18h.30, arrive à Dakar le mardi matin à 9h.30 après un périple de 13 heures.

Douglas DC-4 de la TAI sur le parking de la

SFERMA à Mérignac (collection Etienne Simon) Le réseau de la TAI, suivant l'expansion de la compagnie, reçoit de continuelles modifications. Ainsi, au printemps 1952, deux services entre Orly et Abidjan font escale à Bordeaux. Ils utilisent deux trajets différents en AOF :

� Ligne TI295 : Orly – Bordeaux – Casablanca – Ténériffe – Dakar – Abidjan et retour.

� Ligne TI315 : Orly – Bordeaux – Casablanca – Bamako – Abidjan et retour

Au mois de septembre 1952, la TAI met en service sur sa ligne Paris – Bordeaux – Abidjan un nouvel appareil, le SE-2010 Armagnac, pouvant transporter 106 passagers. Au mois de mai 1953, la mise en service des nouveaux quadrimoteurs Douglas Super DC-6 permet de supprimer l'escale intermédiaire à Casablanca sur la ligne Orly – Bordeaux – Bamako – Abidjan. (TI 037/038). La desserte de la capitale marocaine n'est pas pour autant abandonnée. Un service direct est maintenu en Douglas DC-4. Le 5 septembre 1954, la société navale Delmas Vieljeux transfère son service aviation au numéro 15 du quai Louis XVIII.

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Bordeaux semble l'escale de transit idéale pour les lignes vers le Maroc et l'Afrique Occidentale Française. Ainsi, après la TAI, Aigle Azur s'installe en Gironde en 1948. Créée deux ans auparavant par Sylvain Floirat, un fabricant d'autocars, cette compagnie a acquis 5 Douglas DC-3 en 1947, avions avec lesquels elle opère des services charters vers l'Afrique du Nord, l'Afrique noire et le Liban. Elle ouvre une succursale au numéro 62 du cours Pasteur à Bordeaux au mois d'avril 1948. Le premier vol charter Bordeaux – Tanger – Casablanca au départ de Mérignac est effectué en DC-3 le samedi 12 juin 1948. Le vol retour est réalisé le lendemain. Il transporte 14 passagers. Un second vol opère avec du fret le 14 juin pour Dakar via Casablanca. Au mois de juillet, l'exploitation devient régulière. Le jour de départ de Bordeaux est fixé au lundi. Le 2 juin 1951, Aigle Azur met en service un nouvel appareil, le Boeing 307 Stratoliner, sur ses lignes Paris – Bordeaux – Tanger – Casablanca et Paris – Bordeaux – Casablanca – Villa Cisneros – Dakar. Le Stratoliner est aménagé pour transporter 42 passagers. Ils relient Dakar à Bordeaux en douze heures. Le 2 juillet 1951, la compagnie déménage sa succursale au numéro 10 de la rue Voltaire. La mise en service des nouveaux bimoteurs Boeing permet de prolonger la ligne au-delà de Dakar vers Conakry, Abidjan et Bamako à partir du 26 décembre 1951. En 1953, seule l'escale de Casablanca subsiste entre Bordeaux et Dakar. Le service opère le mardi dans le sens Le Bourget – Bordeaux – Dakar (vol AAZ62) et le jeudi dans l'autre sens (vol AAZ63) La chute de Diên-Biên-Phù et la fin du conflit indochinois mettent Aigle Azur en fâcheuse posture. L'arrêt des transports entre la métropole et l'Extrême Orient est fatal à sa filiale Aigle Azur Indochine. Elle ne lui survit que quelques mois. Le 1er mai 1955, l'Union Aéromaritime des Transports absorbe Aigle Azur. L'Union Aéromaritime des Transports (UAT) est la dernière compagnie aérienne privée française à s'installer à Bordeaux. En 1945, le réseau de l'Aéromaritime d'avant guerre a été concédé aux Transports Aériens Militaires puis Air France. Le 13 octobre 1949, les Chargeurs Réunis et Air France s'associent aux deux fondateurs de la Société Aérienne

de Transports Internationaux (SATI), Roger Loubry et Jean Combard, pour ressusciter l'Aéromaritime. La compagnie est représentée à Bordeaux par la Compagnie maritime des Chargeurs Réunis, compagnie installée au numéro 1 des allées de Chartres. Le premier avion de l'UAT, un Douglas DC-4, en provenance de l'AEF, atterrit à Mérignac le 30 avril 1950. L'escale à Bordeaux de la ligne hebdomadaire AEF, Pointe Noire – Brazzaville – Libreville – Douala – Kano – Alger –Paris, n'est que facultative et encore uniquement dans le sens Afrique – métropole. Quatre jours plus tard, le 3 mai, UAT ouvre la ligne UAT 41/42 Paris – Bordeaux – Casablanca – Dakar. Le service fonctionne toutes les deux semaines. Les jours de passage à Mérignac sont le mercredi dans le sens métropole – AOF et le vendredi dans le sens AOF – métropole. Interrompu pour l'hiver, le service reprend le 7 avril 1951 avec de légères modifications quant aux jours de passage, le samedi soir vers l'AOF, le lundi au retour. La ligne est prolongée sur Abidjan et Conakry en 1952.

(collection Musée Air France)

Le 7 février 1953, l'UAT et la communauté aéronautique bordelaise sont endeuillés par l'accident du DC-4 F-BFGR. Lors de son

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approche sur Mérignac, le quadrimoteur de l’UAT, en provenance d'Abidjan via Casablanca, accroche la cime de pins à 5 km du seuil de piste, au lieu-dit La Forêt sur la commune d’Eysines. L’avion désemparé s’abat au sol et prend feu. De l’épave, les pompiers extraient les corps des six membres de l’équipage technique et de trois passagers. Ils portent secours aux blessés : six passagers, l’hôtesse et le steward. Quatre passagers sont indemnes. La visibilité sur la pente d’approche était limitée par la présence importante de brouillard. Le 1er mai 1954, l'UAT met en service le DC-6 sur la ligne Paris – Bordeaux – Dakar. L'appareil est aménagé pour transporter 66 passagers, 12 en première classe, 44 en classe touriste. Sa plus grande autonomie permet de supprimer l'escale de Casablanca. En 1956, la TAI propose aux bordelais deux nouvelles escales africaines : Niamey puis Ouagadougou. La desserte de Niamey, escale intermédiaire de la ligne Orly – Bordeaux – Abidjan, est ouverte le 15 mars 1956. Le service fonctionne au départ de Bordeaux le dimanche. Le 21 août, la desserte de Niamey est suspendue au profit d'une autre escale Ouagadougou. Le service Abidjan – Ouagadougou – Bamako – Bordeaux – Orly fait escale à Mérignac le mardi matin entre 4h.30 et 5h.45. Dans le sens France – Afrique, il passe à Bordeaux le mercredi entre 22h.45 et 23h.45. Partage du trafic entre la France et le Maroc En 1955, la Compagnie Chérifienne des Transports Aériens, née de la fusion des compagnies Air Maroc et Air Atlas, hérite de la moitié des droits de trafic entre la France et le Maroc après l’accession à l’autonomie du royaume marocain. Air France et la compagnie marocaine décident de coopérer sur les relations aériennes franco-marocaines. Air France a d'ailleurs souscrit 30 % du capital de la compagnie marocaine. Au programme été 1955, les deux compagnies apposent leurs numéros de vol sur toutes les liaisons aériennes entre Mérignac et le Maroc. Une nouvelle escale marocaine sera ouverte au printemps 1958, Mekhnès, par introduction d'une escale intermédiaire entre Bordeaux et

Casablanca. Le vol, en provenance de Casablanca et Mekhnès (AF-AT 2024) atterrira à Bordeaux le samedi avant de repartir pour Paris après une escale de cinquante minutes. Le vol retour (AF-AT 2025) opèrera le lundi. Le 24 mai 1955, Max Hymans, le président d’Air France inaugure la nouvelle agence bordelaise de la compagnie nationale, sise au 37 des Allées de Tourny : « La magnifique perspective des allées de Tourny qui s’ouvre devant notre immeuble, les sites urbains renommés qui l’entourent, assurent à notre compagnie nationale une présence de qualité digne de votre cité. » Le vol postal accidenté Le 21 septembre 1955, le Douglas DC-3 immatriculé F-BCYU, du département postal d'Air France, est accidenté à l'atterrissage à Mérignac. Le bimoteur assure la liaison postale Pau – Paris – Bordeaux. L'aérodrome est enveloppé d'un brouillard très dense. Le pilote effectue une première approche et estimant que l'atterrissage est possible se prépare à atterrir. A la deuxième approche, le Douglas heurte des arbres puis s'abat au sol devant l'entrée des Etablissements Dassault. Le choc avec le sol est très violent. L'avant du Douglas est en grande partie détruit et un moteur se détache. Par chance, seul le pilote est blessé, le mécanicien et le radio ne sont que contusionnés. « Le pilote jugeait certainement être très près de l'axe d'arrivée, et s'attendait, à apercevoir, d'une seconde à l'autre, le balisage d'entrée de piste, alors qu'il se trouvait de plus en plus éloigné. » (Commission d'enquête Air France)

Le Douglas DC-3 F-BCUY en fâcheuse position sur le parking des Ets Dassault (collection René Lemaire)

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