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I M P E T U S Sous-projet B4 03/2008 Fouad Elame et Abdessamad Farah Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants : Application d’un modèle intégré de bassin versant (Loukkos et Tadla) Adresse: Institut de l’économie agro-alimentaire et des ressources naturelles Université de Bonn Nussallee 21 D - 53115 Bonn [email protected] Internet: http://www.impetus.uni-koeln.de http://www.ilr1.uni-bonn.de/agpo/rsrch/impetus/impetus_e.htm

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Page 1: Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants ... · côte atlantique et à l’est par une ligne qui suit, du Nord au Sud, les pieds des crêtes du Massif de Jeballa,

I M P E T U S Sous-projet B4

03/2008 Fouad Elame et Abdessamad Farah

Gestion économique de l’eau au niveau des bassins

versants : Application d’un modèle intégré de bassin

versant (Loukkos et Tadla)

Adresse:

Institut de l’économie agro-alimentaire et des ressources naturelles

Université de Bonn

Nussallee 21

D - 53115 Bonn

[email protected]

Internet: http://www.impetus.uni-koeln.de

http://www.ilr1.uni-bonn.de/agpo/rsrch/impetus/impetus_e.htm

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 2

Liste des Abréviations et des acronymes

ABA_ : Demande agricole Béni Amir

ABME : Demande agricole Béni Moussa Dir

ABMO : Demande agricole Béni Moussa

AGRU : Agrumes

ARAC : Arachide

AUTRM : Autre maraîchage

BOUR : Cultures Bour

FOUR : Cultures fourragères

FRAS : Fraise

HARI : Haricot

HWHE : Blé dur

IND : Demande industrielle

KBC : Demande agricole Ksar-Basse colline

KS : Demande municipale ‘ksar kebir’

LA : Demande municipale ‘Larache’

MAIZ : Maïs

MBM : Demande municipale Béni Mellal

MDL : Modèle du Loukkos

MDT : Modèle du Tadla

MELO : Melon

MFBS : Demande municipale Fkih Ben Saleh

MSS : Demande municipale Souk Sebt

NIOR : Niora-piment

ONE: Office national de l’électricité

ONEP: Office national de l’eau potable

ORMVAL: Office régional de mise en valeur du Loukkos

ORMVAT: Office régional de mise en valeur du Tadla

PMP : Programmation mathématique positive

POMT : Pomme de terre

RADEEL: Régie autonome de distribution de l’eau et de l’électricité du Loukkos

RADEET: Régie autonome de distribution de l’eau et de l’électricité du Tadla

RD : Demande agricole Rive droite

RM : Demande agricole Rmel

RUR : Demande rurale

SAU : Superficie agricole utile

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SUGB : Betterave à sucre

SUGC : Canne à sucre

SWHE : Blé tendre

TOMA : Tomate

TOUR : Tournesol à huile

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 4

Abstract

Last years statistics show a clear downward trend in global and per capita availabilities of water. In

addition to the recurring droughts that the country experienced during the last two decades, this

tendency is accentuated by an unceasingly increasing demand, in particular under the effect of the

demographic pressure and the economic development.

In a context of scarcity and a limitation of potential resources not yet mobilized, Morocco is

confronted with the need of moving from a supply policy to a demand management one. The

implementation of such policy requires the adoption of new management instruments and new

institutional forms of organization. Accordingly, the present study proposes a tool of modeling and

decision-making support which integrates the economic, institutional, hydrological and agronomic

aspects.

The proposed approach is based on optimization techniques and positive mathematical programming

to calibrate an empirical model. Using simulations, this model is tested for two rivers basins, Loukkos

and sub-basin of Tadla, that differ by levels of demand and climatic and hydrological characteristics.

The conducted simulations covered changes in water availability and economic conditions, as well as

demand of management policy.

The study results show that the demand management policy at the river basin level should take into

account the regional specificities. The basin’s water resources are substitutable and water management

policy cannot ignore this aspect and should integrate surface and underground water resources at the

same time. In drought conditions, marginal value of water increases considerably such that water

pricing policy alone cannot result in a rational and a durable use of the resource.

Key words: water, river basin, Loukkos, Tadla, simulations, integrated model, optimisation, positive mathematical

programming, demand management, liberalization, drought.

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 5

Résumé

Les statistiques des dernières années montrent une nette tendance à la baisse des disponibilités

globales et par habitant en eau. En plus des sécheresses récurrentes qu’a connu le pays durant les deux

dernières décennies, cette tendance est accentuée par une demande sans cesse croissante, notamment

sous l’effet de la pression démographique et le développement économique.

Dans un contexte de rareté et d’une limitation des ressources non encore mobilisées, le Maroc est

confronté à la nécessité de passer d’une politique d’offre à une politique de gestion de la demande. La

mise en place d’une telle politique nécessite l’adoption de nouveaux outils de gestion et de nouvelles

formes institutionnelles d’organisation. Le présent travail s’insère dans cette optique et propose un

outil de modélisation et d’aide à la décision qui intègre les aspects économiques, institutionnels,

hydrologiques et agronomiques.

La démarche proposée est basée sur les techniques d’optimisation et fait appel à la programmation

mathématique positive pour la calibration d’un modèle empirique. Le modèle ainsi élaboré, est testé à

l’aide de simulations au niveau de deux bassins versants, contrastés par les niveaux de demande et

leurs caractéristiques climatiques et hydrologiques. Il s’agit du bassin du Loukkos et du sous bassin du

Tadla. Les tests conduits ont portés sur des simulations de changements dans les conditions

économiques et de disponibilités en eau, ainsi que des politiques de gestion de la demande.

Les résultats de cette étude montrent que la politique de la gestion de la demande doit être nuancée par

bassin pour tenir compte des spécificités régionales. Les ressources en eau au niveau d’un bassin sont

substituables et toute politique de gestion de l’eau ne peut ignorer cet aspect et doit intégrer à la fois

les ressources en eau de surface et souterraine. En situation de sécheresse le prix économique de l’eau

devient si élevé, que la politique de tarification de l’eau reste insuffisante pour une rationalisation de

l’utilisation et une préservation de la ressource à long terme.

Mots clés : eau, agriculture, bassin versant, Loukkos, Tadla, simulations, modèle intégré, optimisation, programmation

mathématique positive, gestion de la demande, libéralisation, sècheresse.

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1 Introduction et problématique

La ressource en eau au niveau des deux bassins (Tadla et Loukkos) est partagée entre plusieurs

secteurs, à savoir, l’agriculture, l’eau potable, l’industrie et l’énergie. Ces secteurs expriment chacun

une demande en eau pour le bon déroulement de ces activités ce qui mène à une certaine concurrence

pour les disponibilités limitées en eau de la région. De ce fait, une analyse minutieuse des demandes

des différents secteurs s’impose pour mieux cerner les problèmes complexes liés à l’allocation

efficiente de la ressource dans les deux bassins.

La sécheresse est un phénomène qui touche les différents secteurs de l’économie nationale, entrave le

développement agricole et rural et ralentit la croissance économique du pays. Plusieurs régions du

Maroc, notamment Souss, Al Haouz et Doukkala ont surexploité leurs ressources en eau. Le bassin

d’Oum Er Rbia connaît déjà une situation de déficit chronique. La rationalisation de la consommation

s’avère nécessaire.

La demande en eau d´irrigation au niveau de la zone du Loukkos s’élève à 200 Mm³/an dont 190 Mm³

est assurée par le barrage oued El Makhazine. Tenant compte des infrastructures, d’apport d’eau

d’irrigation, mobilisées et en cours de mobilisation, le secteur agricole prévoit une demande de plus en

plus importante en eau. La situation pourrait être plus critique si la demande accrue des différents

secteurs en eau s’accroît avec l’augmentation de la fréquence des années de sécheresse. La demande

en eau potable et industrielle des centres urbains du bassin du Loukkos s’élève actuellement à 15,4

Mm³/an et évoluera à 20,6 Mm³/an en 2020. La région est appelée à connaître un développement

industriel et touristique important surtout que le Maroc est en phase de mobilisation de toutes ses

capacités humaines et naturelles pour un développement touristique régional.1

En ce qui concerne le secteur agricole dans le sous-bassin du Tadla, les besoins totaux en eau

d’irrigation sont de l’ordre de 925 Mm³ dont 260 Mm³ sont les besoins du périmètre du Béni Moussa

et 305 Mm³ sont ceux du Béni Amir, lesquels besoins qui sont prévus à augmenter et atteindre en total

1148 Mm³ en 2020 (Débat national sur l’eau, Novembre 2006). L’alimentation en eau potable du

milieu rural s’élève à 2,3 Mm³/an et celle du milieu urbain à 30,14 Mm³/an, ces demandes sont

appelées à croître d’après les prévisions du Plan National de l’Eau qui montrent que la demande

globale en eau potable du bassin entier d’Oum Er Rbia passera de 89 Mm³ en l’an 2000 à 111 et 134

Mm³ respectivement en 2010 et 2020. Quant au secteur industriel, la demande est de l’ordre de 1,72

Mm³ qui aussi évoluera dans les années avenirs (Plan National de l’Eau).

1 Agence du Bassin Hydraulique du Loukkos. Les ressources en eau au niveau de la zone d’action de l’agence

du bassin hydraulique du Loukkos : état des lieux et perspectives de leur développement et leur sauvegarde. Novembre 2006.

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Tenant compte aussi des changements climatiques que connaît le Maroc ces dernières années et la très

forte irrégularité des précipitations, le bassin du Loukkos a connu un déficit au niveau des apports en

eau de surface, notamment pour la zone de Tadla.2 Au vu de ce constat, une modélisation de la gestion de la demande en eau au niveau des bassins du

Loukkos et du Tadla s’impose. Cette étude intègre la demande en eau des différents acteurs dans le

cadre d’un modèle dynamique afin de gérer au bien l’allocation de la ressource en eau, cela d’une part.

D’autre part, le MBL et le MBT permettront la valorisation et l'efficience de l'utilisation des

ressources en eau mobilisées pour le secteur agricole, l’étude de la problématique autour de la gestion

de l’eau à l’échelle des deux bassins.

Le MBL et le MBT permettront d’évaluer les réserves en eau des barrages et des différentes nappes

des deux bassins à temps réel et à différents moments de l’année et sous multiples scénarios de

demande et d’offre de l’eau. En outre, les modèles simuleront les apports et les réserves en eau des

bassins tout en tenant compte de l’irrégularité du régime hydrologique sujette aux variations

climatiques de plus en plus prépondérantes ces dernières années. En effet, les scénarios des modèles

permettent de simuler l’impact d’une année de sécheresse sur la demande en eau des différents

usagers, sur les apports et les réserves en eau des bassins. Finalement, le MBL et le MBT simuleront

l’impact d’une libéralisation d’une culture sur les assolements optimaux et la demande en eau dans ce

contexte.

2 Présentation de la zone d’étude

2.1 Bassin versant du Loukkos

2.1.1 Introduction du périmètre de Loukkos

La zone du Loukkos est localisée au niveau de la zone Nord-ouest du Maroc entre les régions du

Tangérois et du Gharb. Couvrant une superficie de 256.000 ha, ce périmètre est limité à l’ouest par la

côte atlantique et à l’est par une ligne qui suit, du Nord au Sud, les pieds des crêtes du Massif de

Jeballa, la vallée de Tahraout et le pied de Djebel Sasser.3

Cette région est caractérisée par une superficie agricole utile totale de 147.300 ha. Les forêts

représentent 53.000 ha et les parcours 55.700 ha. (Voir figure 4)

L’aménagement du périmètre et l’encadrement technique des agriculteurs ont permis une mise en

valeur intensive des terres agricoles. En effet, le périmètre connaît une diversification assez large des

2 Ministère de l‘Aménagement du Territoire de l’Eau et de l’Environnement, Secrétariat d’Etat Chargé de l’Eau.

Atelier National sur les changements climatiques et les ressources en eau. « Les changements climatiques et les ressources en eau au Maroc : Evolution des ressources en eau durant les dernières décennies ». Novembre 2006.

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cultures et une amélioration substantielle des productivités végétales et animales, qui génèrent des

recettes financières importantes.

Figure 1: Carte de la zone du Loukkos

Le bassin du Loukkos est d'une superficie totale de 3730 km² recouvrant les bassins hydrologiques des

oueds Loukkos, Ouarour et Makhazine qui prennent naissance dans la chaîne rifaine.

2.1.2 Les eaux de surface

Les principaux cours d'eau traversant le bassin du Loukkos sont oued Loukkos, avec un apport moyen

de 1200 Mm³/an, et une superficie de 2100 km², et ses principaux affluents qui sont oued Ouarour

(200 km²) et oued El Makhazine (880 km²).4

Le barrage d'oued El Makhazine permet de régulariser un volume de 540 Mm³.

2.1.3 Les eaux souterraines

Les principales nappes présentes au niveau de la zone sont la nappe de Rmel, la nappe d’Oulad

Ogbane et la nappe alluviale de l'oued Loukkos.

La nappe de Rmel s'étend sur une superficie de 240 km² environ, avec un volume de 120 Mm³ et est

située dans le bassin du Bas Loukkos au sud de la ville de Larache.

La nappe d’Oulad Ogbane est située au Sud de la ville de Ksar El Kébir. Elle s'étend sur une longueur

de 16 km environ du Nord-ouest au Sud-est avec une superficie de 58 km² et ayant un volume de 32

Mm³. La nappe alluviale de l'oued Loukkos s’étend le long de l’oued Loukkos sur une superficie de

200 km² dont le volume d’eau est de 52 Mm³.

3 Les données et informations utilisées dans ce chapitre proviennent en grande partie de l’Office Régional de

Mise en Valeur Agricole du Loukkos (ORMVAL) et de l’Agence du Bassin du Loukkos (A.B.H.L.). 4 El Kellouti, M. (2004) : Modernisation de la gestion de l’irrigation dans le périmètre du Loukkos (Maroc).

Rabat.

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2.2 Sous bassin versant du Tadla

2.2.1 Présentation du sous bassin du Tadla

La plaine du Tadla est limitée au Nord par le plateau des phosphates et à l'Est la plaine se rétrécit en

coin entre le plateau de oued Zem et la retombée atlasique et à l'Ouest, le cours de l'oued El Abid en

constitue la limite régionale ; elle couvre une superficie d’environ 3600 km² avec une longueur

d’environ 125 km et une largeur au centre de 50 km.

Le sous-bassin du Tadla couvre une superficie totale de 320.000 ha. La superficie agricole utile est

d'environ 300.000 ha dont 124.600 ha irrigué et 207.700 ha de Bour divisé en Bour cultivé qui

représente 135.205 ha, Forêts avec une superficie de 10.325 ha, Parcours à hauteur de 38.950 ha et une

superficie de 16.220 ha incultivée.

2.2.2 Les ressources en eau de surface

L’eau utilisée pour l’irrigation dans le périmètre du Tadla provient essentiellement des eaux de

surfaces. Cependant, la proportion des eaux souterraines devient de plus en plus importante ces

dernières années avec la baisse générale du régime pluviométrique.

- Le principal cours d’eau dans la plaine de Tadla est l’oued Oum Er Rbia, l’un des plus important

cours d’eau du Maroc. Il traverse la plaine dans le sens ENE-WSW sur environ 160 km jusqu’à

l’amont de sa confluence avec oued El Abid. L’oued Oum Er Rbia prend naissance à partir des sources

qui jaillissent au pied de la falaise calcaire de Khedoud située à 26 km au NE de Khénifra. Le débit

moyen annuel d’Oum Er Rbia est de 38.6 m³/s avec un maximum de plus de 1400m³/s lors des crues

consécutives

- Le complexe sourcier du Dir est constitué par un ensemble d’une quarantaine de sources karstiques

qui se situent au Nord-Est de Béni Mellal dont le Débit moyen annuel est de 3000 l/s.

2.2.3 Les ressources en eaux souterraines

La nappe phréatique des Béni-Amir est située sur la rive droite de l'Oum Er Rbia et Couvre une

superficie de l'ordre de 600 km².

La nappe phréatique des Béni Moussa Est ( Dir) est située sur la rive gauche de l'oued Oum Er Rbia et

Couvre une superficie de l'ordre de 500 km².

La nappe phréatique des Béni Moussa Ouest (périmètre) est située sur la rive gauche de l'oued Oum Er

Rbia et couvre une superficie de l'ordre de 885 km².

La nappe profonde de l'éocène est l'une des plus importantes nappes de la zone, c'est le support

d'importants projets d'AEPI et d'irrigation au niveau de la Province. Elle couvre une superficie de

l'ordre de 7000 km².

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Figure 2: Carte de la zone de Tadla

3 Méthode d'approche

3.1 Le modèle du bassin

Ce travail développe deux modèles hydrologiques-économiques intégrés de bassin versant basés sur la

simulation des flux d’eau, les équations d’équilibre des ressources-emplois de la retenue d’eau et des

nappes, les flux d’eau au niveau des différents nœuds des cours d’eau et l’allocation des ressources en

eau. En plus de refléter la dynamique d’interactions entre les différentes composantes, hydrologique,

agronomique et économique, ces modèles permettent de simuler le développement des cultures sous

différents scénarios de disponibilité et de choix de politique d’allocation de la ressource eau.

Une fois établis, les modèles constitueront un outil de prise de décision en matière de choix de

politique concernant l’allocation de la ressource eau dans les deux bassins. Ces modèles ont été conçus

de telle manière à répondre à des questions telles que : la compétition et la demande en eau, devenue

de plus en plus forte du secteur agricole, du secteur industriel et des ménages et la gestion durable et

l’allocation efficiente et équitable de la ressource eau.

3.2 Intérêt du modèle

Le modèle permet le calcul de la valeur de l’eau ainsi que la projection de différents scénarios de

l’utilisation de l’eau. Il représente l’utilisation de l’eau dans un système interdisciplinaire.

Il s’agit d’un modèle interdisciplinaire qui demande des donnés de la plupart des sciences.

Il permet une représentation simplifiée du bassin à l’aide d’un réseau de nœuds.

La fonction d’objectif du modèle hydrologique-économique est de maximiser le revenu net des

agriculteurs et l’utilité d’usage de l’eau tout en simulant le bilan des rivières, des barrages et des

nappes phréatiques.

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 11

Il s’agit d’un modèle numérique d’optimisation non-linéaire utilisant la ressource eau de telle façon

à maximiser le revenu net agricole tout en tenant compte d’un ensemble de contraintes qui sont

réparties en contraintes hydrologiques, agronomique et de disponibilité des ressources.

- les superficies, l‘hydrologie des nappes phréatiques (balances, ressources)

- l‘agronomie (formation de rendement, la ressource terre)

- la physique (production d‘électricité), comportement des consommateurs etc.

Le modèle englobe cinq blocs d’équation à savoir :

- le système d’équation de la fonction d’objectif

- le système d’équation de la formation du rendement

- le système d’équation des processus hydrologiques liés à l’eau

- le système d’équation d’équilibre des nappes, des barrages et des nœuds de la rivière

- le système d’équation de la demande non agricole

3.3 Structure du modèle de bassin

Thématiquement, la structure des deux modèles comporte trois composantes, hydrologiques,

économiques et agronomiques, ainsi que les flux qui relient les différents nœuds.

Le développement d’une structure de modélisation économique-hydrologique intégrée à l’échelle du

bassin est complexe puisqu’il implique :

- Une estimation logique des flux et des réserves d’eau au niveau du bassin, la demande en eau

de chaque secteur au niveau des différents sites, les infiltrations et les retours d’eau et leurs

flux vers la rivière.

- Une représentation à l’amont et à l’aval de la demande des ménages, la demande dérivée des

secteurs économiques, ainsi que la demande pour la génération de l’énergie hydro-électrique.

- L’incorporation des règles institutionnelles qui gouvernent l’allocation de la ressource eau

pour les différents secteurs, tout en incluant les droits, les prix et les restrictions imposées par

les institutions en place.

Les modèles développés pour cette étude s'inspirent d'une précédente étude économique-hydrologique

faite pour la vallée de Drâa (MIVAD)5 qui elle-même basée sur un modèle élaboré par l’IFPRI6, en

particulier, pour le Bassin du Maipo au Chili7.

5 Heidecke, C., Kuhn, A., (2006): Calculating Feasible Charges for Irrigation Water in the Drâa Valley in

Southern Morocco. In: Journal of Agriculture and Marine Science. Oman. http://www.ilr1.uni-bonn.de/agpo/rsrch/impetus/doc/mivad-docu.pdf.

6 Cai, X., Ringler, C., Rosegrant, M.W. (2006): Modeling Water Resources Management at the Basin Level.

Methodology and Application to the Maipo River Basin. International Food Policy Research Institute Washington, D.C. Research Report 149.

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 12

Les modèles intégrés proposés pour les bassins du Loukkos et du Tadla sont deux modèles

d’optimisation économique ainsi que hydrologique se basant sur les rapports réels entre les différents

nœuds du réseau hydrologique. Ces nœuds représentent des entités physiques pouvant être soit des

afflux, des barrages, des nappes, soit des sites de demande en eau. Les liens entre les différents nœuds

et les sites de demande simulent le flux d’eau entre ces différentes entités le long de la rivière (voir

figure 1 et 2). La distribution de l'eau distingue entre les différents usages agricoles, industriels et

municipaux. Alors que pour le secteur agricole l’allocation de l’eau d’irrigation se fait selon les

besoins et la rentabilité de chaque culture, pour le reste des secteurs cette allocation est déterminée de

façon exogène dans les modèles.

Figure 3: Le réseau de nœuds du bassin du Loukkos

7 Rosegrant, M.W., Ringler, C., McKinney, D.C., Cai, X., Keller, A., Donoso, G. (2000) : Integrated

economic-hydrologic water modeling at the basin scale. The Maipo River Basin. In : Agricultural Economics, Vol. 24, No.1, p.33-46.

Nappe Ouled Ougbane

Nappe.Rmel

Nappe A.Loukkos

Plaine ksar, basses collines

(Agriculture)

Rive droite

(Agriculture) Secteur Rmel

(Agriculture)

Ksar ElKebir (ville)

Larache (ville)

Barrage oued Elmakhazine

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 13

Figure 4: Le réseau de nœuds du bassin du Tadla

Barrage Ahmed El Hansali

Complexe sourcier Dir

Barrage Bin El OuidaneVille Beni Mellal

Ville Souk Sebt

Ville Fkih Ben Saleh

Périmètre Béni Amir

Périmètre Béni Moussa

Périmètre Béni Moussa Dir

Nappe Béni Amir

Nappe béni Moussa Périmèt

Nappe Béni Moussa Dir

Nappe Turonien

4 Spécification du modèle

4.1 Introduction

Le modèle économique-hydrologique intégré présenté ici est fait sur la base d'un réseau de nœuds. Les

éléments spatiaux (nœuds de demande et de source) sont tracés afin que la variabilité spatiale des

ressources en eau et l'allocation à divers sites de demande d'eau puissent être bien reflétées.

L'allocation d'eau et les balances sont simulées à plusieurs échelles spatiales: les champs de cultures,

les sites de demande, les nœuds de source (réservoirs, aquifères, portées de rivière), et pour la totalité

du bassin. Le profit d'usage d'eau d'irrigation est calculé au niveau de la parcelle et puis agrégé au

niveau des sites de demande et du bassin entier. Les diverses échelles spatiales permettent la

génération de résultats raisonnables en comparaison aux données réelles observées, incluant les flux

d'eau en aval, les pertes d'eau, l’eau potable, les flux de retour, les surfaces irriguées, les rendements,

la production, et le retour des différents usages.

Pour ce travail de modélisation, les entrées liées à des mesures qui ont été faites antérieurement et aux

estimations empiriques sont collectées en collaboration avec les services régionaux et locaux

concernés (Agence du bassin du Loukkos, ONEP, RADEEL, RADEET, ORMVAL, ORMVAT,

Agence du Bassin Oum Er Rbia...) et intégreront des données exogènes, des paramètres techniques et

économiques, les variables endogènes et les équations.

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 14

Paramètres exogènes :

Cette partie englobe les principaux paramètres de la production végétale ainsi que d’autres paramètres

qui se présentent pour les différents secteurs.

- Paramètre agronomique : les rendements par culture, le prix de vente des productions, prix des

intrants, besoins en intrants, les superficies par cultures, la pluie effective, prix de vente de

l’eau d’irrigation, évapotranspiration maximale par culture, coefficient de réponse du

rendement par culture.

- Paramètre non agronomique : prix de vente de l’eau municipale, prix de vente de l’énergie,

quantités consommées par secteur.

- Paramètre technique et hydrologique: Efficience de production des stations d’énergie, capacité

de production des station d’énergie, taux de perte d’eau agricole, taux de perte d’eau

municipale, taille de la population demandant eau par site, évapotranspiration du barrage,

volume maximale de chaque nappe, coefficient de stockage de chaque nappe, le gradient de

chaque nappe, profondeur des nappes, perméabilité des nappes, volume régularisée du

barrage.

Paramètres endogènes :

Différents variables agronomiques, hydrologiques et économiques sont calculés par le modèle,

notamment, les flux d’eau au niveau des nœuds du bassin, entrées et sorties des nappes, balance du

barrage, demande en eau par culture, déficit hydrique des cultures, demande en eau d’irrigation par

secteur agricole, les coûts marginaux de l’utilisation de l’eau et de la terre.

4.2 Intégration des composantes des modèles

Les composantes décrites ci-dessus sont intégrées dans une structure cohérente d'allocation de l'eau

qui, tout en tenant compte du fonctionnement hydrologique des différents systèmes et des règles

d’allocation de l’eau au niveau des sites de demande, permet d'évaluer les conséquences

environnementales et de rentabilité économique d'une telle allocation (voir figure 3).

La demande en eau est déterminée de façon endogène en se basant sur les rendements agricoles

empiriques et les fonctions de production des cultures. A l’échelle de chaque secteur agricole, l’eau est

allouée aux cultures en fonction de leurs caractéristiques et leurs stades de développement.

L’offre de l’eau est obtenue de l'équilibre entre l'offre et la demande, résultant d'un comportement de

maximisation du revenu net global à l'échelle du bassin sous les contraintes physiques, techniques et

les choix politiques.

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 15

Figure 5: Structure de base des deux modèles d’optimisation

Processus hydrologique du bassin

Usage externe

Usage interne- Production

d’énergie

Municipal IrrigationNappe

Distribution au niveau de l’exploitation

Processus hydrologique du bassin

Usage externe

Usage interne- Production

d’énergie

Municipal IrrigationNappe

Distribution au niveau de l’exploitation

Maximisation du revenu net

Production agricole par culture/ revenus irrigation

Bénéfice municipal

Revenu énergie hydraulique

Usage environnemental

Maximisation du revenu net

Production agricole par culture/ revenus irrigation

Bénéfice municipal

Revenu énergie hydraulique

Usage environnemental

Normes institutionnelles et objectifs économiques

4.3 Cas du bassin du Loukkos

Le MDL englobe 15 cultures agrégées selon leur besoin théorique en eau (betterave à sucre, maïs,

cultures fourragères, haricot, fraise, tournesol à huile, niora-piment, tomate, pomme de terre, melon,

arachide, canne à sucre, agrumes, autre maraîchage).

Dans les zones irriguées, on retrouve toutes ces cultures alors que dans les zones Bours, il y a 10

cultures (betterave à sucre, céréales, cultures fourragères, haricot, tournesol à huile, tomate, melon,

arachide, autre maraîchage).

Le bassin a été partagé en quatre secteurs de demande agricole (demande agricole Ksar-Basse colline,

demande agricole Rmel, demande agricole Rive droite, cultures Bour), en trois secteurs de demande

municipale composé de deux demandes urbaines et une demande rurale (demande municipale

‘Larache’, demande municipale ‘ksar kebir’, demande rurale), une demande industrielle (IND) et en

neuf nœuds répartis le long de la rivière. Les nappes du bassin du Loukkos sont représentées par la

nappe alluviale du Loukkos, la nappe d’Ouled Ougbane et la nappe Rmel. Au niveau de l’amont du

bassin, le barrage d’oued El Makhazine est alimenté par le nœud ‘UPLOUK’ qui représente l’apport

en eau superficielle du oued Loukkos. Le nœud SPK1 reçoit l’eau à partir du barrage et alimente le

secteur de demande agricole ‘Ksar et basse colline’ ‘KBC’. De même, le nœud ‘SPC1’ alimente le

secteur ‘KBC’. Le nœud SPR alimente le secteur Rmel ‘RM’. Et finalement les deux nœuds ‘SD3D4’

et ‘SD1D2’ approvisionnent le secteur Rive droite ‘RD’. Notant que le nœud ‘SD1D2’ reçoit l’eau à

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 16

partir des apports des deux oueds Makhazine et Aourour. Les flux d’eaux entre les différentes unités et

les différents nœuds sont représentés dans la figure 1. Vers l’aval du bassin, l’eau provenant de la

rivière et des affluents est évacuée au niveau du dernier nœud du bassin ou l’aval (downstream)

‘DSTR’.

4.4 Cas du sous bassin du Tadla

Le MDT englobe 8 cultures, dans les secteurs irrigués, agrégées selon leur besoin théorique en eau

(betterave à sucre, céréales, maïs, cultures fourragères, citrons, maraîchage, légumes, olives). Dans les

zones irriguées, on retrouve toutes ces cultures alors que dans les zones Bours, il y a 3 cultures

(céréales, cultures fourragères, légumes).

Le sous bassin a été partagé en quatre secteurs de demande agricole (demande agricole Béni Amir,

demande agricole Béni Moussa, demande agricole Béni Moussa Dir, cultures Bour), en trois secteurs

de demande municipale constituant 3 villes (demande municipale Béni Mellal, demande municipale

Fkih Ben Saleh, demande municipale Souk Sebt), une demande industrielle (IND) et en neuf nœuds

répartis le long de la rivière. Les nappes des sous bassin du Tadla sont représentées par la nappe du

Béni Moussa Périmètre, la nappe du Béni Amir, la nappe du Béni Moussa Dir et la nappe profonde du

Turonien. Au niveau de l’amont du secteur agricole du Béni Moussa, le barrage de Ben El Ouidane est

alimenté par le nœud ‘UPBEO’. Le nœud BENMOU reçoit l’eau à partir du barrage et alimente le

secteur de demande agricole ‘ABMO’. De même, au niveau de l’amont du secteur agricole du Béni

Amir, le barrage de Ahmed El Hansali est alimenté par le nœud ‘UPAEH’. Le nœud BENAMI reçoit

l’eau à partir du barrage et alimente le secteur de demande agricole ‘ABA_’. Et finalement le nœud

‘BENDIR’, alimenté par ‘UPDIR’ qui représente l'apport du complexe sourcier du Dir, approvisionne

le secteur agricole ‘ABME’. Les flux d’eau entre les différentes unités et les différents nœuds sont

représentés dans la figure 2. Vers l’aval du bassin, l’eau provenant de la rivière et des affluents est

évacuée au niveau du dernier nœud du bassin ou l’aval ‘DSTR2’.

4.5 Hypothèses du modèle

- Droit d’usage de l’eau de surface : L’eau est distribuée selon les surfaces allouées aux cultures

et selon les besoins en eau de ces cultures.

- Pompage : dans le cas des deux bassins étudiés, le pompage de l’eau à partir des nappes est

illimité. Les agriculteurs peuvent pomper l’eau sans contrainte limitante.

- Contrainte de la terre : la surface totale au niveau du bassin (Bour + Irriguée) est entièrement

utilisée. Notant que la surface irriguée ne peut pas dépasser la surface totale irriguée alors que

les terres Bours peuvent dépasser la surface totale consacrée aux cultures non irriguées et

peuvent même être cultivées sur les terres irriguées. Ce qui permettra une substitution entre les

surfaces irriguées et non irriguées.

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 17

- La demande non agricole est supposée être fixe.

4.6 Détermination du rendement

La détermination des rendements du modèle diffère entre cultures irriguées et Bour. Pour les cultures

irriguées, en plus du choix des surfaces des cultures, la décision des agriculteurs est faite pour l’eau et

aura donc une influence sur la formation du rendement de la culture. En effet, le rendement est calculé

en multipliant le rendement maximum par un coefficient de diminution du rendement qui est une

fonction non linéaire du ‘déficit saisonnier’. Le ‘déficit saisonnier’ est calculé en fonction de

l’évapotranspiration de la culture et du ‘coefficient de réponse du rendement’ ‘ky’.

L’évapotranspiration est calculée selon l’eau appliquée, la pluie effective et la percolation. Concernant

les cultures Bour, le rendement est une fonction du ‘déficit saisonnier’ calculé lui même en fonction de

l’évapotranspiration de la culture qui sera influencée principalement par les pluies.

4.7 Calibration du modèle :

Avant l’utilisation du modèle, il faut s’assurer qu’il reproduit bien la réalité. Le calibrage consiste à

trouver les bons paramètres et à vérifier la cohérence interne et les relations algébriques du modèle. La

calibration est faite avec la programmation mathématique positive selon la part de chaque culture dans

la SAU totale ‘CROPMIX’. Avant la calibration, la part de chaque culture a été fixée et donc les

surfaces choisies par le modèle doivent être inférieures ou égales au ‘CROPMIX’. Ensuite le modèle

utilise le CROPMIX comme variable et choisira l’allocation optimale pour cette variable. Les valeurs

marginales des contraintes d’utilisation de la terre et de l’eau sont introduites dans la fonction

objective. Ainsi, les paramètres de calibration (PMPA, PMPB et PMPC) sont calculés et permettront

de calculer la nouvelle fonction d’objectif avec le terme non linéaire.

5 Résultats et simulations des modèles

5.1 Résultats

L’objectif des modèles du Loukkos et du Tadla (MDL, MDT) est de maximiser la fonction du revenu

net à l’échelle du bassin sujette à un ensemble de contraintes. Plusieurs équations sont intégrées dans

les deux modèles exprimant les différentes demandes en eau, les flux d’eau à partir des barrages et des

nappes, les flux d’eau entre nappes, des équations de formation du rendement tenant compte des

contraintes de la disponibilité en eau et de la terre. Notons que l’eau d’irrigation est distribuée par les

Offices Régionaux de Mise en Valeur Agricole du Loukkos et du Tadla.

Les modèles sont calibrés de façon à reproduire la situation de base observée de la part de chaque

culture dans la SAU totale. Ils optimisent la fonction d’objectif tout en tenant compte des valeurs

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 18

l'assolement au niveau des terres irriguées du Loukkos

Betterave sucrière Fraise Maïs

Arachide Tournesol Tomate

Pomme de terre Niora Melon

Canne à sucre Agrume Céréales

Haricot Fourrage Autre maraîchage

l'assolement au niveau des terres Bour au Tadla

85%

11% 4%

Céréales Fourrage Légumineuse

l'assolement au niveau des terres Bour au Loukkos

fourrage Haricot Tournesol

Tomate Melon Arachide

Autre maraîchage Betterave sucrière Céréales

Maïs

l'assolement au niveau des terres irriguées au Tadla

37%

10%19%

7%

4%7%

15% 1%

Céréales Betterave Fourrage Maraîchage

Légumineuse Agrume Olivier Maïs

marginales des contraintes d’utilisation de l’eau dans cette fonction. Ainsi nous avons les superficies

agricoles par secteur et par culture dans les figures suivantes.

Figure 6: Occupation de la terre dans le Loukkos

Les zones irriguées au Loukkos sont très diversifiées de point de vue du nombre des cultures qui y

sont pratiquées. L’arachide reste la culture la plus cultivée dans cette zone avec 26% de la totalité des

terres irriguées, suivie par la cane à sucre avec 15% puis le tournesol et les céréales cultivées

respectivement sur 12 et 11% de la totalité de la superficie irriguée du Loukkos. Pour le Bour, c’est les

céréales qui ont la part du lion en occupant 65% de la totalité des terres Bour suivie par le tournesol et

les fourrages avec respectivement 12 et 8% du total de la superficie non irriguée, alors que l’arachide

ne représente que 7%.

Figure 7: Occupation de la terre dans le Tadla

Pour le Tadla, se sont les céréales qui dominent avec 37% de la superficie totale irriguée, puis les

cultures fourragères qui occupent 19% des terres totales irriguées et l’olivier avec 15%. Le Bour est

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 19

largement dominé par les céréales avec 85% de la totalité des terres Bour au niveau du sous bassin du

Tadla. Le bassin du Loukkos est une zone où l’eau est très abondante. La valeur marginale moyenne de

l’utilisation de l’eau d’irrigation au niveau du bassin est de 0,45 DH pour le mètre cube. Si on suit

l’évolution de la valeur marginale ‘shadow price‘ de l’utilisation de l’eau au cours de l’année, on

constate que cette valeur marginale est relativement stable sauf qu’elle connaît une augmentation

importante pendant le mois de mars suite à la diminution des précipitations pendant ce mois et

l’augmentation des besoins des cultures. A partir du mois d’avril, on note une augmentation

progressive et significative, surtout aux mois de juin et de juillet, du prix économique de l’eau vu que

les précipitations deviennent moins abondantes pendant cette période. Le tableau 1 présente la valeur

du prix implicite de l’eau par secteur de demande agricole et le graphe illustre l’évolution de cette

valeur marginale au cours de l’année.

Tableau 1: La valeur du coût d’opportunité de l’eau par sous secteur agricole au Loukkos

Rmel Rive droite Ksar et basse colline Privé La valeur marginale

du prix de l’eau d’irrigation (DH/m³) 0,84 0,56 0,53 0.40

On marque le faible coût d’opportunité de l’eau au niveau du secteur privé par rapport aux autres

secteurs, ce qui parait contradictoire à la réalité puisque le privé ne s’investit que s’il est sure de la

rentabilité économique de son projet, mais ceci peut s’expliquer par le fait que le secteur privé se situe

dans une région où l’eau est relativement disponible dans la nappe comparée aux autres secteurs.

Figure 8: Evolution de la valeur marginale mensuelle de l’eau d’irrigation au Loukkos

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

SEP NOV JAN MAR MAY JUL

Shadow ag water price (DH/cbm)

Shadow ag water price(DH/cbm)

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 20

Au Tadla le coût d’opportunité de l’eau pour une année pluviométrique moyenne est de l’ordre de 0,44

DH/m³. Ce coût est variable d’un secteur agricole à l’autre selon plusieurs facteurs à savoir, les

disponibilités de la ressource eau dans ces secteurs, les cultures pratiquées par les agriculteurs de ces

secteurs, les besoins en eau mensuels des cultures. Le tableau suivant présente la valeur du coût

d’opportunité de l’eau d’irrigation par secteur agricole.

La figure 4 présente l’évolution mensuelle du coût d’opportunité de l’eau à l’échelle du bassin. En fait,

d’après la figure, ce dernier est relativement bas en janvier et février puis augmente progressivement

pour atteindre son maximum pendant la période de juillet à octobre où l’eau devient rare et précieuse.

Tableau 2: La valeur du coût d’opportunité de l’eau par sous secteur agricole au Tadla

Béni Moussa Béni Moussa Dir Béni Amir Coût d'opportunité de l'eau d'irrigation DH/m³ 0,49 0,55 0,62

Figure 9: Evolution du coût d’opportunité mensuel de l’eau d’irrigation au Tadla

0,00

0,10

0,20

0,30

0,40

0,50

0,60

SEP OCT NOV DEC JAN FEB MAR APR MAY JUN JUL AUG

Evolution mensuelle du cout d'opportunité de l'eau

Cout d'opportunité de l'eau Dh/m3

Ressources en eau du bassin

Le graphe suivant montre les flux d’eaux mensuelles entre les différents nœuds principaux du réseau.

La quantité d’eau totale annuelle apportée par l’oued Loukkos est de 1200 Mm³. La quantité d’eau

totale qui sort du barrage vers le nœud qui suit est de 703,69 Mm³. Une partie de la quantité totale

provenant de l’amont du bassin sera stockée au niveau du barrage.

Les apports d’eau du oued Loukkos sont très importants à partir du mois de novembre jusqu’au mois

de février ; cette période correspond à des mois où la pluviométrie est importante. Alors que cet apport

diminue progressivement et devient faible à partir du mois de mai.

L’évolution du niveau d’eau au niveau du barrage suit l’évolution des précipitations dans le bassin. En

effet, le stockage de l’eau dans le barrage se fait à partir des eaux de pluies. Le volume d’eau du

barrage commence à augmenter à partir du mois d’octobre jusqu’à ce qu’il atteint le niveau maximum

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 21

en mois de janvier et reste relativement stable. Ensuite, on assiste à un abaissement de ce volume pour

atteindre un volume final qui représente 30% du volume maximal. Cette diminution du volume du

barrage est due à la diminution des eaux de pluies et à l’augmentation des besoins en eau des secteurs

agricoles qui seront comblés par les lâchers du barrage.

Figure 10: Entrées-Sorties du barrage El Makhazine

Entrées-sorties du barrage

0,0020,00

40,0060,0080,00

100,00120,00

140,00160,00

SEPOCT

NOVDEC

JAN

FEBMAR

APRMAY

JUN

JUL

AUG

0,00

100,00

200,00

300,00

400,00

500,00

600,00

apport du oued Loukkoslâchers du barragevolume d'eau du barrage

Au niveau du Tadla, le modèle retient deux barrages, Ahmed El Hansali qui irrigue le Béni Amir et

Bin El Ouidane irriguant le Béni Moussa Périmètre. Ainsi, pour le premier, les entrées totales pendant

toute l’année sont de l’ordre de 350 Mm³ alors que les sorties totales sont de 380 Mm³, ce qui fait que

le barrage marque un déficit à la fin de l’année agricole de l’ordre de 30 Mm³. Pour Bin El Ouidane,

les entrées et les sorties totales sont plus ou moins équilibrées et tournent autour de 690 Mm³.

Figure 11: Les entrées, les sorties et la réserve du barrage Ahmed El Hansali

les entrées, les sorties et la réserve du barrage Ahmed El Hansali

0

20

40

60

80

SEP OCT NOV DEC JAN FEB MAR APR MAY JUN JUL AUG

Entré

e/So

rt

0

200

400

600

Rése

rve

les sorties en Mm3 les entrées en Mm3 la réserve en Mm3

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 22

Figure 12: Les entrées, les sorties et la réserve du barrage Bin El Ouidane

les entrées, les sorties et la réserve du barrage Bin El Ouidane

0

40

80

120

160

SEP OCT NOV DEC JAN FEB MAR APR MAY JUN JUL AUG

Ent

rée/

Sor

t

0

200

400

600

800

1000

Rés

erve

les sorties en Mm3 les entrés en Mm3 la réserve en Mm3

Les deux barrages ont la même période de déficit, où les sorties du mois dépassent les entrés, qui est

de 6 mois allant de mai jusqu’à octobre, c’est la période où les précipitations sont faibles et les besoins

en eau des cultures sont élevés. Les autres mois de l’année constituent la période de surplus, où les

entrées dépassent les sorties du mois, elle s’étend sur la période allant du mois de novembre jusqu’en

avril et qui coïncide avec la période où les précipitations deviennent abondantes.

5.2 Simulations

Le tableau suivant présente le récapitulatif des simulations menées au cours de cette étude et qui seront

développées dans ce chapitre.

Tableau 3: Tableau récapitulatif des scénarios des deux régions

Loukkos Tadla

Normal Sèche Normal + prix

Sèche + prix

Normal Sèche Normal + prix

Sèche + prix

Utilisation de l’eau de la rivière en Mm³ 183,7 79,3 177,8 79,2 779,8 236,1 779,2 236,1

Utilisation de l’eau de la nappe en Mm³ 21,9 25,5 21,6 25,1 124,3 318,9 112,6 318,9

Valeur marginale de l’eau (DH/m³) 0,45 2,11 0,55 2,16 0,44 3,94 0,47 3,95

Utilisation totale de l’eau d’irrigation en Mm³ 205,7 104,8 199,5 104,4 904,1 555,1 891,9 555,0

Revenu net agricole en MDH 1116,6 510,7 1084,7 495,5 3791,3 1860,9 3721,3 1799,1

Utilisation de la superficie irriguée (%) 100,0 69,4 100,0 69,4 100,0 77,2 100,0 77,1

Utilisation de la superficie Bour (%) 100,0 111,5 100,0 111,5 100,0 121,8 100,0 121,9

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 23

5.2.1 Simulation de l’augmentation des prix de l’eau dans une année moyenne

L’objectif dans cette première simulation (SIMU1) est de voir l’impact d’une augmentation de 20% du

tarif d’eau appliqué à l’eau de surface au niveau du bassin combinée à une taxation de 20% simultanée

imposée sur le pompage de l’eau souterraine. Ce couplage d’augmentation dans le prix d’exploitation

à la fois de l’eau de surface et souterraine est dans le but de la protection de l’environnement. En effet,

si on procède à une augmentation isolée du prix de facturation de l’eau de surface on risque d’avoir

une exploitation excessive de l’eau souterraine qui peut aller jusqu'à l’épuisement de la nappe ce qui

constituerait une catastrophe écologique et environnementale.

Au Loukkos, on constate qu’il y a une diminution de l’eau destinée à l’utilisation agricole au niveau

du bassin de 11,39 millions de m³ passant de 205,71 à 194,32 Mm³. Notons aussi que la valeur

marginale de l’eau d’irrigation a augmentée pour atteindre une valeur de 0,55 DH/m³.

Simultanément à l’augmentation de la valeur marginale de l’eau, on enregistre une diminution de la

quantité d’eau provenant de la rivière de 10,77 Mm³. Cette réponse sensible au changement du tarif de

l’eau est due au fait que le prix financier de l’eau de surface devient supérieur au prix économique de

l’eau qui est de l’ordre de 0,55 à l’échelle du bassin, ce qui rend les agriculteurs sensible à toute

augmentation du prix de l’eau. Les agriculteurs auront donc tendance à diminuer et à rationaliser

l’utilisation de l’eau puisque le prix du mètre cube d’eau devient plus cher.

Cependant, la diminution de la quantité pompée à partir des nappes reste négligeable, environ 0,62

Mm³, et donc le niveau de taxation du pompage n’a pas un grand effet sur le comportement des

agriculteurs. On ne peut pas expliquer cela que par le fait que le prix financier du pompage reste

inférieur au prix économique de l’eau. Dans ce cas l’augmentation du prix de l’eau n’est pas aussi

importante afin de ramener son prix financier à la valeur du prix économique de l’eau. Les agriculteurs

dans le Loukkos ne changeront donc pas leur attitude en réaction à une éventuelle augmentation du

prix de l’eau.

Au Tadla, on note que l’augmentation du prix d’eau de surface n’a pas eu un grand impact sur

l’utilisation de cette ressource par les agriculteurs puisque la quantité d’eau de surface utilisée pour

l’irrigation n’a sensiblement pas changé d’environ 780 Mm³, ceci peut s’expliquer par le fait que les

agriculteurs produisent très au-dessous du prix d’opportunité et donc cette augmentation du prix de

l’eau de surface n’est pas assez conséquente pour ramener le prix de l’eau de surface à la hauteur de

son prix économique qui sont respectivement 0,24 et 0,47 DH/m³, ce qui fait que les agriculteurs

gardent la même attitude vis-à-vis de l’eau de l’office malgré l’augmentation de son prix. Cependant,

la quantité d’eau souterraine utilisée pour l’irrigation dans le bassin a tendance à baisser suite à la

taxation de son exploitation. En effet, le bassin utilise 12 Mm³ d’eau souterraine en moins pour

l’agriculture par rapport à l’année moyenne. Cette réponse sensible à la taxation de l’eau souterraine

est tout à fait attendue vu que le prix financier de l’eau souterraine, qui est de 0,74 DH/m³, est de loin

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 24

supérieur au prix économique de l’eau dans le bassin, qui est de 0,47 DH/m³, ce qui rend les

agriculteurs très sensibles à toute augmentation, quelque soit petite, de l’eau souterraine.

On peut donc dire que le prix de l’eau de surface au Tadla est très bas par rapport à ce que les

agriculteurs sont vraiment prêts à payer et une redéfinition des tarifs appliqués à la hausse s’avère

intéressante pour une meilleure valorisation de la ressource par les agriculteurs. De même, la taxation

de l’usage de l’eau de surface jouera un rôle important dans la préservation des nappes de la

surexploitation.

Les résultats par secteur de demande agricole (tableau 3) confirment les résultats agrégés à l’échelle

des deux bassins. Pour le Loukkos, la diminution de l’utilisation de l’eau de surface suite à

l’augmentation du tarif de l’eau est plus importante comparée à la diminution de l’utilisation de l’eau

souterraine vu que le prix financier de l’eau dépasse son coût d’opportunité dans le cas de l’eau de

surface alors qu’il est inférieur au coût d’opportunité dans le cas de l’eau souterraine.

Pour le Tadla, dans les trois secteurs agricoles, les quantités d’eau de surface utilisées pour

l’agriculture ont tendance à rester stable, à cause d’un prix financier de l’eau de surface très inférieur

au prix économique de l’eau, alors que les quantités d’eau souterraines ont tendance à baisser dans les

trois secteurs, vu le prix financier de la ressource qui dépasse son coût d’opportunité.

5.2.2 Simulation d’une année de sécheresse

La présente simulation reflète le cas d’une année de sécheresse, exprimée par une diminution de 70%

des disponibilités en eau de surface, de la recharge des nappes et des précipitations à l’échelle du

bassin. Au Loukkos, on constate une nette diminution de l’utilisation des eaux destinées à l’irrigation estimée

à 100,90 Mm³, se traduisant par un inter-changement des terres cultivées entre secteurs irriguées et

Bour. D’après les résultats obtenus, on note que la conversion des terres irriguées en terres Bour est

importante. En effet, les terres irriguées ont diminuées de 30,25% alors que l’augmentation de la

superficie occupée par les terres Bour est de 11,36% (voir tableau 3). Signalons aussi que le profit net agricole avant amortissement a diminué considérablement passant de 1611 à 511 millions de DH. La valeur marginale de l’eau a augmenté considérablement passant de 0,46 à 2,12 DH/m³ expliquée

par la rareté de la ressource dans une éventuelle situation de stresse hydrique causée par les années de

sécheresse. Cette valeur élevée représente le rôle important que joue l’eau dans la formation des

rendements des cultures, dans la rentabilité des cultures et dans le profit net agricole.

En analysant le tableau 3, on constate que le secteur de l’irrigation privée n’a pas connu de

changement concernant la superficie cultivée puisque l’eau des nappes est suffisante pour permettre

d’irriguer toute la superficie agricole utile au niveau de ce secteur. Toutefois, on enregistre une

diminution importante de la SAU avoisinant 50% dans les secteurs ‘ksar et basse colline’ et une

diminution de 22,51% de la SAU du secteur ‘Rmel’. Cette réaction des agriculteurs est une adaptation

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 25

à la sècheresse permettant de substituer les terres irriguées par des terres Bours qui ont augmentées de

11,55%. Le tableau 4 présente le pourcentage d’utilisation de la terre dans les quatre sous secteurs

irrigués plus le Bour, dans le Loukkos, par rapport à l’année de base où la SAU est exploitée à 100%

dans tous les sous secteurs.

Tableau 4: Pourcentage des terres utilisées dans chaque secteur agricole dans le bassin du

Loukkos pendant une année sèche

Secteur

Rmel

Privé

Rive droite

Ksar-basse colline

Bour

Année sèche 77,49 100,00 52,89 47,21 111,60

D’après le tableau 3, la quantité d’eau de surface utilisée pour l’irrigation, au Tadla, chute de prêt de

70% pendant une année sèche par rapport à une année moyenne alors que les eaux souterraines ont

augmenté leur part dans l’irrigation de prêt de 200 Mm³. La rareté de l’eau de surface pendant l’année

sèche poussera à plus de pompage d'eau souterraine pour compenser pour la rareté de l'eau de surface.

Le coût de pompage de 0,74 DH/m³, qui paraissait élevé pendant l’année moyenne ne l’ai plus

maintenant puisque le prix d’opportunité de l’eau est devenu égale à 3.94 DH/m³. D'après les résultats

obtenus, l'agriculture serait prête à payer presque 4 DH pour un mètre cube supplémentaire de l’eau

pour une eau souterraine ne coûtant que moins de 1 DH le mètre cube, ce qui explique l’augmentation

exponentielle des quantités d’eau souterraines utilisées pour l’irrigation. C'est résultats montrent que

l’eau de nappe joue un rôle complémentaire pour l’eau de surface. La valeur très élevée du coût

d’opportunité de l’eau implique que la ressource eau devient très contraignante à la production dans le

sous bassin du Tadla lors d’une année sèche. On signale aussi la diminution de la superficie des terres

irriguées de prêt de 13% de la superficie totale irriguée et l’augmentation des superficies des terres

Bour d’environ 20%. Selon le tableau 5, c’est surtout dans le secteur Béni Moussa et, en degré

moindre, le Béni Moussa Dir (ABMO, ABME) où on obtient ce genre d’adaptation à la sécheresse,

c'est-à-dire la diminution des superficies irriguées au profit des superficies Bour. Dans le secteur Béni

Amir (ABMA), le modèle retient une utilisation de 100% du potentiel de terre irrigable même lors une

année de sécheresse. En effet, le Béni Amir est irrigué à partir des eaux de l’oued Oum Er Rbia à

travers le barrage Ahmed El Hansali qui fourni des volumes d’eau annuels relativement réguliers, et

on peut dire que le débit d’étiage de l’Oum Er Rbia supporte les besoins en eau du périmètre, alors que

pour le périmètre des Béni Moussa, les volumes annuels fournis sont variables selon les périodes de

sécheresse ou pluviosité moyenne. La dotation est tributaire du remplissage du barrage de Bin El

Ouidane qui est le fournisseur du périmètre en eau d’irrigation. De ce fait, on peut dire que le

périmètre des Béni Amir est moins sensible à la sécheresse que celui des Béni Moussa. Le tableau 5

présente le pourcentage d’utilisation de la terre dans les quatre sous secteurs irrigués plus le Bour,

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 26

dans le Tadla, par rapport à l’année de base où la SAU est exploitée à 100% dans tous les sous

secteurs.

Tableau 5: Le changement des pourcentages des terres agricoles utilisées pendant une année

de sécheresse

Secteur Béni Moussa Béni Moussa Dir Béni Amir Bour

Année sèche 66,02 81,86 100 121,8

5.2.3 Simulation d’une augmentation des prix de l’eau dans une année sèche

Il s’agit de la même simulation concernant le prix de l’eau de surface et souterraine, mais cette fois ci

dans des conditions de sécheresse où le disponible en eau de surface est réduit de 70% par rapport à

l’année moyenne, la recharge des nappes ainsi que les précipitations seront 70% de moins de ce

qu’elles étaient en année de base. Cette simulation permettra de voir à la fois l’impact de la sécheresse,

l’effet de l’augmentation du prix de l’eau de surface et la taxation de l’eau souterraine.

Si on évalue les résultats de la simulation d’une augmentation du prix de l’eau dans le cas d’une année

de sècheresse au Loukkos, on constate que la diminution de la quantité d’eau utilisée pour l’irrigation

à partir des eaux de surface reste faible et est estimée à 70.000 m³, alors que la diminution est

importante pour l’eau souterraine qui est estimée à 810.000 m³. La valeur marginale de l’eau n’a pas

connu un grand changement puisque l’augmentation n’est que de 0,09 DH/m³. Cette faible variation

de la valeur marginale de l’eau dans le cas d’une année sèche montre que la décision des agriculteurs

n’est pas trop influencée par une augmentation de 20% du tarif appliqué à l’eau de surface ainsi que la

taxation du pompage de l’eau souterraine (voir tableau 3). Cependant, une augmentation importante du

tarif appliqué à l’eau souterraine et superficielle, estimée à plus de 30%, provoquera des changements

importants dans la diminution de l’eau utilisée pour l’irrigation ainsi qu’une augmentation

considérable de la valeur marginale de l’eau.

L’effet de la sècheresse est plus important que le changement du prix. Le prix économique de l’eau est

devenu très élevé par rapport aux prix financier de l’eau de surface et souterraine ce qui fait que les

petites élévations dans la valeur de ces derniers n’ont pas d’effet conséquent afin de rendre sensible la

décision des agriculteurs qui produisent très au-dessous du coût d’opportunité de la ressource eau.

Dans le cas du Tadla, cette simulation reproduit les mêmes résultats obtenus pour la simulation de

l’année sèche, c'est-à-dire que le changement dans les prix de l’eau de surface et souterraine n’a aucun

impact sur l'utilisation de l’eau de surface ou souterraine. C’est surtout l'effet de la sécheresse qui

masque celui de la redéfinition des tarifs des eaux de surface et la taxation de l’eau souterraine. La

sécheresse a fait que le coût d’opportunité de l’eau devient très élevé par rapport aux prix financiers de

l’eau de surface et souterraine, ce qui fait que les petites élévations dans la valeur de ces derniers n’ont

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 27

pas été assez conséquentes pour déstabiliser les coûts de production qui sont très au-dessous du coût

d’opportunité de la ressource eau (tableau 3).

Conclusion

Cette étude consiste en la formulation de deux modèles de ‘bassin versant’ qui ont permis de simuler

les effets des chocs externes tels que les changements dans les apports d’eau et leurs effets sur les

réserves à l’échelle du bassin, l'offre en eau du bassin, notamment dans le cas d’une année de

sécheresse, ou les changements dans l'environnement économique ainsi que l’analyse des déterminants

de l’allocation de l’eau d’irrigation dans les deux bassins.

Les résultats du modèle et des différentes simulations de changement de tarif de l’eau et l’utilisation

des ressources eau et terre, nous ont révélés que les tarifs actuels de l’eau d’irrigation ne sont pas

toujours déterminants. En effet, dans le cas du Loukkos, les agriculteurs sont sensibles à une

augmentation des tarifs de l’eau de surface alors que la taxation de l’eau souterraine semble d’une

importance négligeable. Si les tarifs augmentent et s’approchent des coûts d’opportunité de l’eau, les

agriculteurs seront plus conscients de la valorisation et l’usage efficient de l’eau d’irrigation ainsi que

le choix de cultures qui, économiquement, valorise au mieux le mètre cube d’eau d’irrigation. Dans le

cas du bassin du Tadla, la taxation de l’eau souterraine s’impose si on aimerait augmenter le prix de

l’eau de surface afin de préserver au mieux les réserves en eau et éviter un recoure massif de

l’agriculture de la région à l’eau souterraine, ce qui peut avoir des conséquences graves sur le plan

écologique. Concernant l’eau superficielle, le tarif actuel de cette dernière s’est avérer très bas au

Tadla, puisqu’il ne représente qu’environ 50% du coût d’opportunité de la ressource eau au niveau du

bassin et donc la révision de ce tarif à la hausse est nécessaire pour que le m³ d’eau d’irrigation puisse

être valorisé le mieux possible.

La réduction des apports en eau (de surface et souterraine), suite à une éventuelle sécheresse, a eu des

conséquences très importantes en entraînant une diminution des terres irriguées qui seront converties

en terres Bour et une augmentation du prix implicite de l’eau. Dans le Loukkos, la diminution de la

quantité d’eau utilisée pour l’irrigation à partir des deux sources (superficielle et souterraine) à

l’échelle du bassin est de l’ordre de 50% par rapport à la quantité utilisée pendant une année moyenne,

alors qu’elle est plus importante au niveau du bassin du Tadla atteignant 60% de réduction.

La sècheresse a causé la réorientation de la ressource terre au niveau des deux bassins suite à

l’insuffisance des disponibilités en eau d’irrigation en provoquant la conversion de certaines terres

irriguées en terres Bour. Ainsi, 30% des terres irriguées, au Loukkos, sont devenues Bour, alors qu’au

Tadla, cette conversion a concerné 25% des terres irriguées.

Concernant l’augmentation du prix de l’eau d’irrigation dans le cas d’une année de sècheresse, on note

que l’effet de la sècheresse est plus important masquant l’effet du changement du prix. Le prix

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Gestion économique de l’eau au niveau des bassins versants 28

économique de l’eau devient très élevé dans les conditions de sècheresse par rapport au prix financier

de l’eau de surface et souterraine ce qui fait que les petites élévations dans la valeur de ces derniers

n’auront pas d’effet conséquent afin de rendre sensible la décision des agriculteurs qui produisent très

au-dessous du coût d’opportunité de la ressource eau.

Signalons que le revenu agricole avant amortissement diminue pour toutes les simulations conduites

dans des conditions de sècheresse. Cependant, cette diminution reste exagérée puisque le modèle ne

tient pas compte des augmentations des prix de vente des cultures pendant les années sèches,

lesquelles augmentations permettent d’alléger les pertes occasionnées par les réductions de

rendements.

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