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Médecine palliative — Soins de support — Accompagnement — Éthique (2009) 8, 229—237 ÉTUDE ORIGINALE Fonctions cognitives et vigilance des patients hospitalisés dans une unité de soins palliatifs : enquête un jour donné Cognitive function and vigilance of patients in a palliative care unit: A 1-day survey Frédéric Guirimand a,1,,b , Isabel de Prémorel a a Maison médicale Jeanne-Garnier, 106, avenue Émile-Zola, 75015 Paris, France b Hôpital Ambroise-Paré, Assistance publique—Hôpitaux de Paris, 92104 Boulogne, France Rec ¸u le 6 octobre 2008 ; accepté le 1 er ecembre 2008 Disponible sur Internet le 18 mars 2009 MOTS CLÉS Vigilance ; Fonctions cognitives ; Soins palliatifs ; Score de Rudkin ; Test Telecom Résumé Les unités de soins palliatifs (USP) sont très attachées à préserver au mieux la vigi- lance et les fonctions cognitives des patients qui leur sont adressés. Une enquête a été réalisée sur les 59 patients présents un jour donné à la maison médicale Jeanne-Garnier (USP). Elle a évalué la vigilance des patients (score de Rudkin) et leurs performances cognitives (test élémentaire de concentration, orientation et mémoire [Telecom]) et questionné les médecins sur l’intentionnalité des médicaments utilisés. Des corrélations ont été recherchées entre ces données, la durée de séjour et la survie. Résultats. — Les patients sont majoritairement éveillés (score de Rudkin : 1,9 ± 1,3) mais 73 % des patients présentent une altération des fonctions cognitives (test Telecom: 19 ± 10). Une atteinte cérébrale (39 % des patients) altère nettement les performances cognitives sans réper- cussion sur la vigilance. Les doses administrées de morphine ou de benzodiazépines n’ont pas de corrélation avec les scores de vigilance ou des fonctions cognitives. De même, la durée de vie n’est pas liée à la consommation de ces médicaments. Dans notre hôpital, le recours à une sédation n’est pas fréquent: aucune sédation selon la définition de la SFAP n’est instaurée ce jour-là. Notre enquête met également en évidence des disparités interservices et un défaut dans l’information du patient à propos des effets indésirables des médicaments utilisés. Elle a aussi permis que les équipes se familiarisent avec des outils simples et utilisent un même langage pour évaluer la vigilance et dépister précocement une confusion trop souvent sous-estimée. © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (F. Guirimand). 1 Photo. 1636-6522/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.medpal.2008.12.004

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Médecine palliative — Soins de support — Accompagnement — Éthique (2009) 8, 229—237

ÉTUDE ORIGINALE

Fonctions cognitives et vigilance des patientshospitalisés dans une unité de soins palliatifs :enquête un jour donné

Cognitive function and vigilance of patients in a palliative care unit:A 1-day survey

Frédéric Guirimanda,1,∗,b, Isabel de Prémorela

a Maison médicale Jeanne-Garnier, 106, avenue Émile-Zola, 75015 Paris, Franceb Hôpital Ambroise-Paré, Assistance publique—Hôpitaux de Paris, 92104 Boulogne, France

Recu le 6 octobre 2008 ; accepté le 1er decembre 2008Disponible sur Internet le 18 mars 2009

MOTS CLÉSVigilance ;Fonctions cognitives ;Soins palliatifs ;Score de Rudkin ;Test Telecom

Résumé Les unités de soins palliatifs (USP) sont très attachées à préserver au mieux la vigi-lance et les fonctions cognitives des patients qui leur sont adressés. Une enquête a été réaliséesur les 59 patients présents un jour donné à la maison médicale Jeanne-Garnier (USP). Ellea évalué la vigilance des patients (score de Rudkin) et leurs performances cognitives (testélémentaire de concentration, orientation et mémoire [Telecom]) et questionné les médecinssur l’intentionnalité des médicaments utilisés. Des corrélations ont été recherchées entre cesdonnées, la durée de séjour et la survie.Résultats. — Les patients sont majoritairement éveillés (score de Rudkin : 1,9 ± 1,3) mais 73 %des patients présentent une altération des fonctions cognitives (test Telecom : 19 ± 10). Uneatteinte cérébrale (39 % des patients) altère nettement les performances cognitives sans réper-cussion sur la vigilance. Les doses administrées de morphine ou de benzodiazépines n’ont pasde corrélation avec les scores de vigilance ou des fonctions cognitives. De même, la durée devie n’est pas liée à la consommation de ces médicaments. Dans notre hôpital, le recours à unesédation n’est pas fréquent : aucune sédation selon la définition de la SFAP n’est instaurée cejour-là. Notre enquête met également en évidence des disparités interservices et un défaut dans

l’information du patient à propos des effets indésirables des médicaments utilisés. Elle a aussipermis que les équipes se familiarisent avec des outils simples et utilisent un même langagepour évaluer la vigilance et dépister précocement une confusion trop souvent sous-estimée.© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (F. Guirimand).

1 Photo.

1636-6522/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.doi:10.1016/j.medpal.2008.12.004

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KEYWORDSConsciousness;Palliative care;Dying patient;Rudkin score;TELECOM scale;cognitive function

teams to familiarize themselves with simple tools and to speak a same language when assessingthe level of consciousness to detect early delirium which is too often underestimated.© 2009 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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ntroduction

ffirmer que l’homme est un être de relation nécessite deréserver autant que possible sa vigilance et ses fonctionsognitives. Les unités de soins palliatifs (USP) sont attentivesu maintien de cet état relationnel, fréquemment mis à malar la maladie elle-même ou par les traitements entrepris.e recours à une sédation pour atténuer ou faire dispa-aître la perception d’une situation physique ou psychiqueécue comme insupportable par le patient est une pra-ique largement décrite [1,2]. En France, les professionnelse réfèrent aux recommandations de la Société francaise’accompagnement de soins palliatifs (SFAP) [3]. Malgré laiffusion de ces recommandations, la surveillance cliniquees fonctions cognitives d’un sujet ou de sa vigilance auoyen d’échelles d’évaluation n’est pas encore une pra-

ique courante : les soignants parlent volontiers de patientconfus » sans quantifier la baisse des performances cogni-ives ou « plus endormi » sans préciser mieux cette baisse deigilance.

Pourtant, ces outils existent et sont validés en francais :e test élémentaire de concentration, orientation etémoire dit test Telecom (Tableau 1) s’est révélé aussierformant qu’un mini-mental test (mini-mental statexamination [MMSE]) et beaucoup plus simple et rapide’utilisation [4]. Le delirium est un symptôme très fréquenthez des patients ayant un cancer et dont la prévalencetteint 83 % en fin de vie [5,6]. C’est aussi le symptômeui nécessite le plus souvent le recours à une séda-ion [2]. Son dépistage systématique, notamment avant etprès modifications de prescriptions, devrait permettre uneeilleure surveillance des effets indésirables des médica-ents. L’altération cognitive (trouble de la mémoire à court

erme, désorientation, défaut de concentration) est un desléments princeps du syndrome confusionnel ou deliriumui associe aussi une perturbation fluctuante de la consci-nce (au sens prise de conscience de l’environnement), uneésorganisation de la pensée, des troubles du langage, des

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allucinations visuelles ou auditives ou de simples illusions ;a variabilité dans le temps avec une prédominance nocturneend difficile le diagnostic [5]. Le test Telecom n’explore quees troubles cognitifs (orientation, mémoire, concentration)ais sa spécificité (95 %) et sa sensibilité (83 %) sont suffi-

antes pour le proposer comme dépistage de delirium chezes patients atteints de cancer : le seuil retenu est classique-ent de 10/28, 28 étant le score le plus mauvais (Tableau 1)

4].L’état de conscience des patients comateux est quoti-

iennement surveillé dans les hôpitaux avec un score delasgow. Ce score est trop complexe pour une utilisationourante en soins palliatifs. L’échelle modifiée de Rudkin eninq points est plus simple d’utilisation et mieux adaptéenotre pratique clinique (Tableau 2). La comparaison avec

e score de Glasgow, réalisée chez 37 patients hospitalisésn USP, montre une excellente corrélation [7]. D’après unetude longitudinale de 91 patients, il est aisément utilisableu quotidien [8].

L’objectif de la présente étude est de réaliser unenquête un jour donné auprès de tous les patients hos-italisés à la maison médicale Jeanne-Garnier (MMJG),e quantifier leur vigilance et leurs fonctions cognitives,’interroger les médecins en termes d’intentionnalité ete rechercher des corrélations entre ces évaluations, lesédicaments administrés et la durée de séjour. C’est aussi

’occasion d’analyser et de comparer les pratiques des sixervices de l’établissement.

atients et méthode

’audit consiste à évaluer tous les patients présents à

F. Guirimand, I. de Prémorel

Summary The palliative care units attach much importance to maintain the awareness andcognitive functions of the patients. A 1-day assessment was performed on the 59 patients atthe ‘‘maison médicale Jeanne-Garnier’’ (palliative care unit). Its purpose was to evaluate theconsciousness of the patients (Rudkin score) and their cognitive abilities (TELECOM test, Frenchversion of the blessed orientation memory concentration test); a physician questionnaire wascompleted about the intention behind the use of drugs. Correlations were sought between thesedata, the length of stay and survival.Results. — Most of the patients were awaked (Rudkin score: 1.9 ± 1.3) but 73% of the patientssuffered from delirium (TELECOM test: 19 ± 10). A cerebral dysfunction (39% of the patients)altered significantly the cognitive performances without repercussion on consciousness. Mor-phine or benzodiazepine doses were correlated with neither the awareness scores, nor thecognitive functions, nor the life expectancy. In our hospital, the use of sedation is not frequent:no sedation according to the SFAP definition was administered the day of the study. Our studyshows the discrepancies between the practices of different units and that the patients were notalways properly informed of the adverse effects of the drugs. The study enabled the different

a MMJG un jour donné. Pour chaque patient, le méde-in du service note le score de vigilance selon l’échellee Rudkin, le score des performances cognitives au testelecom, l’heure de l’évaluation et le délai depuis la der-ière prise d’un médicament pouvant interagir avec la

Fonction cognitive et vigilance des patients en USP

Tableau 1 Test élémentaire de concentration, orienta-tion et mémoire (Telecom) de Davous et Lamour.French version of the blessed orientation memory concentrationtest.

Questions Juste Faux

1. En quelle année sommes-nous ? 0 42. Quel mois ? 0 33. Faire répéter l’adresse suivante :

« monsieur Jean Dubois, 42 ruedu marché à Bordeaux »

4. Quelle heure est-il ? 0 35. Comptez à l’envers de 20 à 0 0 2 ou 46. Dites les mois de l’année à

l’envers0 2 ou 4

7. Répétez l’adresse que je vous aidite

0 De 2 à 10

Score normal : 0 ; score avec le maximum d’erreurs : 28 ; confu-sion : score supérieur à 10. Instructions pour la passation duTelecom :• avant de commencer, indiquez au sujet que vous allez

l’interroger sur ses capacités de concentration et de mémoire.Pour les items 1 et 2, aucune erreur n’est admise ;

• pour l’item 3, demander la répétition immédiate qui doit sefaire sans erreur. Renouveler la présentation en cas d’erreur ;

• bien préciser au sujet qu’il doit retenir tous les termes del’adresse et que vous la demanderez ultérieurement ;

• enchaînez immédiatement les items 4, 5, et 6. Pour l’item 4,on tolère une erreur d’une heure. Pour les items 5 et 6, onpeut tolérer un oubli ou une erreur spontanément corrigée.On compte deux points en cas de réalisation de l’épreuve avecdes erreurs ou si elle nécessite une sollicitation, quatre pointslorsqu’elle est irréalisable ;

• pour l’item 7 on compte deux points par item oublié (prénom,

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nom, numéro, nom de la rue et de la ville).

vigilance ou les fonctions cognitives. Il répond en plusà un questionnaire, inspiré de l’enquête longitudinaleréalisée récemment [8]. La première question concernetous les patients et porte sur les symptômes justifiantl’administration de traitements ayant une action sur lavigilance : agitation, insomnie, angoisse, douleur, dyspnée,delirium (confusion—hallucination), encombrement, autres.

Les questions suivantes ne concernent que les patients àvigilance altérée dont le score de Rudkin est supérieur ouégal à 3 (Tableau 3) : le médecin donne son avis sur larelation entre la baisse de vigilance observée et les médi-

Tableau 2 Échelle de vigilance modifiée de Rudkin.Consciousness score (Rudkin).

1 : patient complètement réveillé et orienté2 : patient somnolent3 : patient les yeux fermés, mais répondant à l’appel4 : patient les yeux fermés, mais répondant à une

stimulation tactile légère (traction sur le lobe del’oreille)

5 : patient les yeux fermés et ne répondant pas à unestimulation tactile légère

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231

aments prescrits ; il délivre ses intentions en termes deédation. Pour éviter toute équivoque, le questionnaire rap-elle la définition de la sédation de la SFAP, d’après lesecommandations publiées en 2002 [3].

À la MMJG, chaque patient a un dossier informatisénique ; cela facilite le recueil des données administrativesservice d’hospitalisation) et médicales. Les prescriptions etes observations des soignants (infirmiers, aides-soignants etutres intervenants), la durée de séjour et le devenir desalades cinq mois après l’enquête sont colligés à partir de

a base informatique.

nalyse statistique

es variables quantitatives sont décrites en termes deoyenne et écart-type (variables normales) ou médiane

valeurs extrêmes). Selon la normalité ou non de la distribu-ion, les comparaisons font appel à des tests paramétriquesanalyse de variance) ou non (test de Mann et Whitneyour variables non appariées ou test de Wilcoxon pourariables appariées). Les variables qualitatives sont décritesn termes de proportion et pourcentages ; les tests de rangsChi2 pour deux groupes ou Kruskal-Wallis pour plusieursroupes) permettent de les comparer. Les corrélations entreariables mesurées dans une échelle ordinale (exemple :core de Rudkin, score Telecom) sont testées au moyen duoefficient tau de Kendall. Statview (version 4.5) est le logi-iel de statistique utilisé, le seuil de significativité choisitant p < 0,05.

ésultats

e jour de l’audit (19 juin 2007), aucune admission n’a lieuour privilégier le recueil des données auprès des 59 patientsrésents (taux d’occupation de 73 %). Leurs caractéristiquesémographiques et leur répartition par pathologie sontécrites dans le Tableau 4. Trente-neuf pour cent des sujetsnt une atteinte cérébrale pouvant interférer avec leurigilance ou leur fonction cognitive. Tous les patients hos-italisés sont en phase avancée de maladie, avec un indicee performance status selon l’échelle OMS de 4 à 5. Aucunatient n’est exclu pour incompréhension du francais.

core de Rudkin et Telecom

e score de vigilance de Rudkin (moyenne ± S.D.) est de,9 ± 1,3. Soixante-quinze pour cent des patients ont uncore de Rudkin inférieur à 3 (Fig. 1). Le test Telecom’échelonne de 0 (meilleur score) à 28 (score le plus mau-ais). Lorsqu’il n’a pu être réalisé (patient insuffisammentigile ou non communiquant), le score maximum de 28

été attribué. Ce test n’a pas été fait chez les troisatients atteints d’un cancer ORL, porteurs d’une trachéo-omie et ne pouvant parler. Compte tenu de ces corrections,e score Telecom (moyenne ± S.D.) est de 19 ± 10. Seul7 % des patients (n = 15) ont des performances cognitives

uasi normales (Telecom inférieur ou égal à 10). Pour 73 %es patients, le score Telecom est supérieur à 10, ce quieprésente déjà un trouble cognitif confusionnel importantFig. 1). Le score de vigilance de Rudkin est bien corréléu score Telecom (tau de Kendall : 0,377 ; p < 0,0001) : les

232 F. Guirimand, I. de Prémorel

Tableau 3 Questionnaire médecin pour les patients à vigilance altérée (score de Rudkin supérieur ou égal à 3).Physician questionnaire completed when patients were drowsy (Rudkin score greater than or equal to 3).

Oui Non Autre

Question 1L’état de vigilance actuel est-il la conséquence non

souhaitée d’une prescription médicamenteuse (effetindésirable d’un médicament) ?

5 10 0

Le malade a-t-il été informé du risque de trouble de lavigilance ?

0 15 0

Question 2L’état de vigilance actuel est-il celui recherché par les

medicaments (effet désiré) ?1 13 1

Question 3L’état de vigilance actuel va-t-il être volontairement

prolongé ?1 12 2

Souhaitez-vous modifier l’état de vigilance ? 7 6 2Si oui, souhaitez-vous améliorer la vigilance ? 7 0 0Ou souhaitez-vous diminuer la vigilance ? 0 7 0

Question 4Il y a-t-il eu une décision de sédation au sens de la

définitiona de la SFAP ?0 15 0

Si oui, a-t-elle été discutée avec le patient ? La personnede confiance ? La famille ? En équipe ?

a La sédation pour détresse en phase terminale est la recherche, par des moyens médicamenteux, d’une diminution de la vigilancepouvant aller jusqu’à la perte de conscience, dans le but de diminuer ou de faire disparaître la perception d’une situation vécue commeinsupportable par la personne malade, alors que tous les moyens disponibles et adaptés à cette situation ont pu lui être proposés oumis en œuvre sans permettre d’obtenir le soulagement escompté.

meilleures performances cognitives se retrouvent bien chezles patients les plus réveillés. La présence de métastasescérébrales altère nettement les performances cognitives(test de Mann et Whitney : p = 0,004) mais sans modifier lavigilance. L’âge, le sexe, le service n’interviennent pas dansces scores.

Tableau 4 Caractéristiques des 59 patients inclus.Description of the 59 included patients.

Âge : moyenne ± écart-type(min—max)

71 ± 13 (37—95)

Sexe : % homme/% femme (n) 41/59 (24/35)% patients atteints de cancer (n) 97 (57)

Étiologie des cancers primitifs% sein (n) 25 (14)% poumon (n) 19 (11)% digestif (n) 18 (10)% vessie (n) 7 (4)% cerveau (n) 5 (3)% orl (n) 5 (3)% autres (prostate, rein,

thyroïde, utérus, ovaire,inconnu) (n)

21 (12)

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% atteintes cérébrales autres(démence, AVC) (n)

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nfluence des médicaments

oixante et un pour cent des patients (n = 36) recoivent unpioïde avec des doses s’échelonnant de 10 à 1296 mg équi-alent morphine orale par jour. Cette dose quotidienne deorphine n’est corrélée ni au score de vigilance (tau de Ken-all : −0,30 ; p = 0,74), ni au score des fonctions cognitivestau de Kendall : 0,082 ; p = 0,37). Cinquante neuf pour centes patients (n = 35) recoivent des benzodiazépines ou deseuroleptiques ; en particulier, la prise de benzodiazépine lauit concerne 22 % des patients (n = 13). La prise de ces médi-aments en journée ou la nuit ne paraît altérer ni la vigilancep = 0,92 et p = 0,32), ni le test Telecom (p = 0,88 et p = 0,90).’une facon plus générale nous avons compté pour chaqueatient le nombre de médicaments pouvant potentiellementnfluencer la vigilance et les fonctions supérieures (opioïdes,enzodiazépines, neuroleptiques, antiépileptiques, antidé-resseurs, antisécrétoires type scopolamine). Ce nombre deédicaments varie de zéro à cinq, sans corrélation avec les

cores de vigilance (tau de Kendall : 0,041 ; p = 0,50) ou lesonctions supérieures (tau de Kendall : 0,19 ; p = 0,07).

Il était important de vérifier la corrélation entre lesymptômes notés par le médecin et la prise effective deédicaments : certains médicaments sont donnés systéma-

iquement alors que d’autre sont administrés en « si besoin »u ponctuellement avant un soin par exemple. Le Tableau 5ontre que la prise d’opioïde n’est étroitement corréléeu’à la présence douleur, les benzodiazépines qu’à cellee l’angoisse, la prise de scopolamine à l’encombrement

Fonction cognitive et vigilance des patients en USP 233

Figure 1. Pourcentage de patients par catégorie selon le scorede vigilance de Rudkin et selon le score au test élémentaire deconcentration d’orientation et mémoire (Telecom) d’évaluation desfonctions supérieures.

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Distribution of the consciousness score (Rudkin) and cognitive

impairment score (TELECOM: French version of the blessed orien-tation memory concentration test).

bronchique, la prise de neuroleptiques au delirium. Lacorrélation entre l’item « autre symptôme » et la prised’antiépileptiques correspond à un traitement anticomitial.De facon surprenante, l’insomnie n’est pas corrélée à laprise de benzodiazépines la nuit. La prise d’antidépresseursest liée à l’angoisse mais aussi au delirium. Notons qu’il n’ya pas de corrélation entre l’âge et la prescription de tel outel médicament.

Effet « service »

On retrouve nettement un effet « service » avec despratiques différentes concernant le recours aux benzodia-zépines la nuit (midazolam en continue ou midazolam enadministration ponctuelle en cas d’insomnie) (p = 0,016). Laseule autre différence entre les services est, ce jour-là, unemoyenne d’âge plus élevée dans un service.

Vigilance et intention des médecins

Pour les 15 patients dont la vigilance est altérée (scorede Rudkin supérieur ou égal à 3), les médecins ont touscomplété le questionnaire (Tableau 3) : ils répondentcinq fois que cet état résulte d’un effet indésirable des

traitements (question 1). L’information délivrée n’est paspertinente puisqu’aucun patient n’est prévenu du risque detrouble de la vigilance. Une fois sur 15, l’état de vigilance estcelui recherché par les médicaments : il s’agit d’un patientqui recoit 5 mg de midazolam en continu de 21 h à 8 h (ques-

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brée entre les six services ; pour des unités de taille plus

34

ion 2). Sauf dans un cas, les médecins ne souhaitent pas nonlus poursuivre volontairement cette baisse de vigilancequestion 3). Mais ils ne souhaitent améliorer la vigilanceue dans sept cas sur 15 (question 5) ; cela tient probable-ent au fait que cette altération de la vigilance n’est liéeue pour une faible part aux médicaments et qu’un chan-ement de molécule ne pourrait apporter l’améliorationscomptée. Ce jour-là, il n’y avait aucun patient sédaté auens de la définition de la SFAP (question 4), ce que confirme’examen des dossiers et des prescriptions médicales.

nfluence de la durée de séjour

u jour de l’enquête, les patients séjournent depuis un à 127ours dans l’établissement avec une médiane à 20 jours ;e chiffre est plus élevé qu’habituellement du fait qu’il’y a pas eu de patient entré ce jour-là. Cinq mois après’enquête, dix patients (17 %) sont sortis : six pour un retour

domicile, quatre pour un transfert dans une autre struc-ure. Deux malades sont revenus pour un second séjour. Deuxatients sont encore présents et 49 sont décédés (88 %) dansn délai de un à 133 jours avec une médiane à 16 jours.

Les malades présents depuis longtemps n’ont pas pluse baisse de vigilance que ceux admis plus récemment,ais leurs fonctions cognitives s’altèrent ; autrement dit, laurée du séjour depuis l’admission n’est pas corrélée à uneaisse de vigilance (tau de Kendall : −0,47 ; p = 0,49) mais estiée à une dégradation des fonctions cognitives (p = 0,002 ;au de Kendall : 0,24). La présence de métastases cérébrales’est pas liée à une durée de séjour prolongée (p = 0,28). Laouleur est d’autant plus fréquente que les patients sont làepuis longtemps (p = 0,0021) et la consommation de mor-hine s’accroît en parallèle avec la durée depuis l’admissionp = 0,01 ; tau de Kendall : −0,20). Aucun autre symptôme ouraitement n’est corrélé à la durée depuis l’admission. Enfin,n note un effet « service » car un des services rassemble ceour-là plusieurs patients présents depuis longtemps.

Lorsqu’on considère les 49 patients décédés, la vigi-ance et les fonctions cognitives s’altèrent d’autant plusue le décès est proche (Rudkin : p = 0,003 ; tau de Ken-all : −0,23 ; Telecom : p = 0,001 ; tau de Kendall : −0,28).n décès proche n’est pas corrélé à une augmentation duombre de symptômes (p = 0,51 ; tau de Kendall : −0,065).e nombre de patients douloureux (Mann-Whitney : p = 0,99)’augmentent pas à l’approche du décès. Les patients trai-és par benzodiazépines n’ont pas de durée de vie pluséduite, y compris lorsque ce médicament est donné lauit pour insomnie ; la survie est aussi indépendante dea consommation de morphine (tau de Kendall : 0,048 ;= 0,59). D’un point de vue plus général, aucun médicamenti, aucune association médicamenteuse n’est corrélé à laurée de vie. La survie est indépendante des traitementsecus et du service d’accueil. On ne retrouve pas non pluse corrélation entre la durée de séjour depuis l’admissiont la survie.

iscussion

ette enquête un jour donné réalisée dans le cadre de’évaluation des pratiques professionnelles (EPP) a atteinton premier objectif : familiariser les médecins et équipes

F. Guirimand, I. de Prémorel

oignantes à l’utilisation des scores de Rudkin et Tele-om. Elle s’est poursuivie par l’utilisation périodique de ceschelles, chaque soignant parlant ainsi le même langageans les six services de soins palliatifs de l’établissement.’enquête révèle des divergences quant aux pratiques cli-iques des services sur lesquelles les équipes doiventéfléchir. Enfin c’est aussi l’occasion d’un questionnementthique sur l’intentionnalité de prescription d’un traitementédatif ou sur le manque d’information délivrée au patientt de recueil de son consentement.

es patients sont majoritairement confus. . .

es résultats au test Telecom révèlent le pourcentage trèslevé de patients confus : 73 %. Ce symptôme, trop souventéconnu, est difficile à diagnostiquer, passant inapercu en

’absence d’un dépistage systématique [5]. C’est d’ailleurse que traduit notre enquête : lorsque les médecins sontnterrogés à propos des symptômes nécessitant un traite-ent interagissant avec vigilance ou fonctions cognitives,

e delirium n’est cité que 11 fois sur 59, soit dans 18 % desas ; soit le médecin a fait le diagnostic et décidé de ne pasraiter, soit plus probablement ce symptôme a été largementous-estimé. Pourtant, ce taux élevé de 73 % reste celui habi-uellement décrit dans une population comme la nôtre, enhase terminale de maladie : 88 % de décès dans les cinqois avec une médiane de survie à 16 jours. Une récente

tude prospective sur le delirium chez des patients en phaseerminale d’un cancer [9] confirme une prévalence de 50 %,lors que des études plus anciennes avaient rapporté desaux jusqu’à 85 % [10] ; le delirium est d’ailleurs un facteure mauvais pronostic [5]. Notre enquête le confirme : d’uneart, les performances cognitives sont d’autant plus mau-aises que le patient séjourne depuis longtemps ; d’autreart, une altération cognitive est corrélée avec une survieéduite ce qui confirme l’importance de ce facteur. Ce tauxlevé doit nous inviter à quelques réflexions :la préservation d’une bonne communication fait partiedes principes mêmes d’une USP. Le dépistage d’un troublecognitif est donc fondamental afin d’en rechercher si pos-sible la cause ou à défaut de proposer un traitementsymptomatique adapté. Cela doit être le cas comme lemontre la corrélation très forte entre neuroleptiques etdelirium ;le recrutement des patients a aussi une influence car nosrésultats retrouvent le lien entre localisation cérébrale etaltération cognitive. Lorsqu’un jour donné, nous obser-vons que 39 % des patients ont une atteinte cérébrale(tumorale ou autre), nous savons dès l’admission que lacommunication sera difficile. Cela a des répercussions nonseulement auprès des équipes soignantes mais aussi pourles bénévoles largement présents dans notre hôpital, leséquipes d’aumônerie ou tout autre intervenant. Pour unhôpital de forte capacité comme le nôtre, se pose aussila question d’une répartition géographiquement équili-

réduite, on peut concevoir un pourcentage maximum depatients atteints dès l’admission d’altération des fonc-tions cognitives au-delà duquel les équipes risquent des’épuiser par défaut de communication verbale avec lespatients ;

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Fonction cognitive et vigilance des patients en USP

• pour diagnostiquer un delirium, le test Telecom a faitpreuve de son utilité en soins palliatifs [5]. Mais faut-il encore que les équipes se l’approprient et l’utilisentau quotidien. À la suite de cette enquête, dans le cadrede l’EPP, notre établissement a choisi de réaliser un testTelecom systématiquement avant toute prescription ouchangement de molécules pouvant altérer les fonctionscognitives (opioïdes, benzodiazépines, neuroleptiques,antidépresseurs, antiépileptiques. . .). Seul ce dépistagepourra authentifier le lien entre l’apparition d’une confu-sion et la modification du traitement. Le dépistage peutaussi être infirmier : à cet égard, il paraît particulière-ment utile que les équipes soignantes prennent l’habituded’utiliser l’échelle Nu-DESC validée en francais [6]. Ils’agit d’une échelle observationnelle simple en cinqitems, portant sur le comportement, l’orientation, lacommunication, les hallucinations et le ralentissement ;la cotation (hétéroévaluation) est en trois points. Un testcognitif type Telecom (ou MMS) vient ensuite confirmer lediagnostic ;

• lors de l’enquête en 2007, nous ne disposions pas encorede la forme injectable d’oxycodone ; cet opioïde pour-rait améliorer les fonctions cognitives altérées par lamorphine. Le dépistage d’une confusion sous morphinesystémique est d’autant plus important que nous dispo-sons maintenant de cette alternative. Il serait intéressantde voir si ce médicament a modifié les habitudes de pres-cription et le pourcentage de patients confus.

Les patients ne sont paspharmacologiquement sédatés

Les trois quarts des patients présents, ce jour-là, ont unscore de vigilance de Rudkin à 1 ou 2. En 2002, une enquêtefrancaise auprès de 400 patients hospitalisés en USP avaitdéjà montré que la majorité des patients (62 %) gardaitune vigilance correcte [11]. Les réponses des médecins auquestionnaire ainsi que l’examen des dossiers confirmentque la sédation au long cours n’est pas une pratique cou-rante dans notre hôpital. Les médecins font chez un tiersdes patients sédatés un lien entre l’altération de la vigi-lance et un effet indésirable des médicaments. Mais entermes d’intentionnalité, une altération de la vigilance n’estrecherchée qu’une fois, et encore s’agissait-il d’une séda-tion nocturne transitoire et non d’une sédation profondecontinue. Il n’y a pas non plus d’intention de poursuivrecet état de baisse de vigilance. Ce résultat diffère notable-ment des enquêtes effectuées en Europe et dans le monde[12—14]. Dans une analyse rétrospective systématique de157 patients décédés en USP entre 2001 et 2005, Miccinesiet al. rapportent une fréquence de 43 % de patients séda-tés. La sédation démarre dans 87 % dans les deux jours quiprécèdent le décès. Le jour de notre audit, sur les cinqpatients qui allaient décéder dans les deux jours suivants,trois avaient encore un score de Rudkin à 1. La pratiquefrancaise, en application des recommandations de la SFAP

(http://sfap.org), n’est-elle pas plus celle d’une sédationpour détresse en phase terminale ? La sédation pour compli-cation aiguë à risque vital immédiat est en général biencodifiée : il s’agit le plus souvent d’un contexte d’urgence(hémorragie massive, dyspnée asphyxiante. . .) qu’il est

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235

ecommandé d’anticiper par des prescriptions adaptéesrecommandations SFAP). Mais notons que le groupe deravail de la SFAP est resté peu loquace sur ces situa-ions singulières et complexes de détresse persistante vécueomme insupportable par le patient, aboutissant alors à desédations profondes prolongées rapportées dans l’enquêteuropéenne avec une fréquence variant de 8,5 % (Italie etelgique) à 2,5 % (Danemark et Suède) [13] ; mais ces tauxaibles augmentent d’autant plus qu’il s’agit de patientstteints de cancer, d’âge inférieur à 65 ans et décédant à’hôpital [13]. Différentes hypothèses peuvent être formu-ées quant à ce faible recours à la sédation : certains auteursuggèrent que les USP diffèrent le recours à une séda-ion, par une meilleure pratique des traitements palliatifs14]. Ce résultat doit aussi nous interroger sur le recrute-ent des patients en USP dont la vocation est justement’accueillir les patients les plus complexes, notamment aulan symptomatique avec en corollaire un recours poten-iellement plus fréquent à la sédation profonde prolongée.l serait, à ce titre, paradoxal que les indications de séda-ion soient plus fréquentes en dehors des USP. . . À ceitre, il serait souhaitable de refaire ce type d’enquêtee facon plus large, à un échelon régional, par exemple,our observer ce qui se passe dans les différents lieux oùe pratiquent des soins palliatifs, USP, lits identifiés, hos-italisation classique, domicile. L’enquête large de 2002érite à ce titre d’être périodiquement refaite, à une

chelle régionale ou nationale et en incluant non seulementes USP mais aussi les autres structures de soins palliatifs11].

Nos résultats mettent en évidence un défaut dans’information des patients à propos des effets indésirableses médicaments utilisés. Malgré le pourcentage élevé deatients recevant des benzodiazépines (59 %), aucun n’estverti du risque de sédation. Même si l’étude statistique neet pas en exergue de relation entre baisse de vigilance

t recours aux benzodiazépines, cela ne veut bien évidem-ent pas dire que, chez un patient donné, un tel effet ne

era pas observé ! Treize patients avaient notamment recuu midazolam la nuit ; d’autres en recoivent en avant-soin,vant la toilette par exemple ; d’après les questionnairesmédecin », aucun patient n’avait été informé du risque deomnolence. C’est donc un point d’amélioration en termese pratique professionnelle et d’autres audits seront néces-aires pour vérifier si l’information a bien été délivrée et. . .

ecue. Ce dernier point n’est pas acquis dans une populationù 73 % des patients sont confus !

a survie reste indépendante desédicaments recus

l existe un large consensus sur le fait que les médecins ontne obligation éthique de soulager les douleurs du cancert de prendre en charge les symptômes en cas de détresse.ais l’utilisation d’opioïdes et de sédatifs type benzodia-épines a la réputation de réduire la durée de vie et ces

ituations sont souvent mal vécues par les équipes [15,16].otre enquête est, sur ce point, intéressante, montrant

’absence de corrélation entre la consommation de mor-hine ou de benzodiazépines et la durée de vie. L’autreonnée importante à mettre en exergue est l’absence de

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ien statistique entre la dose de morphine ou de benzodiazé-ines et l’altération de vigilance et de fonctions cognitives.es résultats vont à l’encontre de beaucoup de préjugés nonondés : Billings et Block parlent « d’euthanasie lente » envoquant un traitement de morphine [17]. Dans un jugementpropos d’un suicide médicalement assisté, la Cour suprêmees États-Unis décrit l’utilisation de ces produits comme unraitement antalgique qui avance la mort ! Dans un édito-ial de Pain publié en 1997, Wall a largement combattu ceythe supplémentaire qu’en soins palliatifs, la morphineouvait abréger la vie [18] ! D’ailleurs, la terminologie par-ois abusivement employée de « sédation terminale » prêteargement à confusion et laisse penser que c’est bien le trai-ement qui abrège la vie. . . Le risque de déviance via unescalade inappropriée de doses de médicaments mérite bien’être évoqué [2]. Une enquête comme celle que nous avonsratiquée permet de vérifier rapidement que nous sommesien dans de la bonne pratique clinique et non dans unescalade abusive de dose : la dose de morphine n’est pasorrélée à la survie. Nos résultats confirment ainsi toutes lestudes déjà publiées montrant qu’en soins palliatifs ni lespioïdes, ni les benzodiazépines, ni même une sédation neodifiaient la survie [2]. En complément, la survie ne paraîtas non plus dépendre du taux d’augmentation de la dose’opioïdes [19]. Le recours à la théorie du double effet danses circonstances ne fait qu’ajouter un peu plus de doute ete confusion dans les équipes soignantes et parfois, faut-ile dire, de justifier certains dérapages de prescriptions oune mauvaise utilisation des médicaments [2,20,21]. Notrenquête confirme qu’opioïdes et benzodiazépines sont desroduits sûrs même s’ils sont souvent difficiles à maniern fin de vie pour s’adapter aux défaillances multiviscé-ales et rechercher la dose minimale efficace de chaqueroduit.

Certaines questions demeurent toutefois débattuesomme celle de l’augmentation des symptômes et donces doses requises à l’approche de la mort. La réponsen fait doit dépendre pour une large part de la qua-ité de l’évaluation des symptômes : nous rapportons quea consommation de morphine s’accroît en parallèle aveca durée depuis l’admission de même que la douleur est’autant plus fréquente que le patient est hospitaliséepuis longtemps. Une interprétation possible est la sous-valuation de la douleur des patients à l’entrée en USP eta nécessité d’augmenter rapidement les doses d’opioïdes :ne USP maîtrise-t-elle mieux le maniement des morphi-iques que les services d’origine ? Une revue généraleécente confirme que sur six études, cinq rapportent uneugmentation des doses de morphine entre l’admission à’hôpital et le décès [2].

onclusion

ette enquête a permis la diffusion d’outils de mesureimples pour quantifier la vigilance (test modifié de Rud-in) et évaluer les fonctions cognitives (test Telecom).

es 73 % de patients confus doivent inciter à un dépistageystématique et précoce de ce symptôme trop souvent sous-stimé ou passé inapercu ; pourtant, la recherche d’unetiologie facilement accessible, la correction d’un troubleétabolique ou encore une rotation d’opioïdes pourraient

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F. Guirimand, I. de Prémorel

’améliorer. La variabilité interservice des prescriptionsédicales incite à confronter nos pratiques cliniques.

’information des patients concernant les effets indésirablesnotamment la somnolence induite par les benzodiazépines)st un point à améliorer. Ce jour-là aucun patient n’estédaté selon la définition de la SFAP. Nos résultats renforcent’idée que les médicaments bien prescrits en USP n’ont pas’incidence sur la durée de vie.

onflits d’intérêts

ucun.

emerciements

es auteurs remercient les docteurs C. Pouchepasdass, I.riol, A. Jonot, N. Consoli, B. Denoyel, F. Chudacet, S. Bare-aud, D. d’Hérouville, B. Huerre, M.-P. Perrin, J.-F. Richard,. Rivoire pour leur collaboration à cette enquête.

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