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Introduction - Définitions Conflit : Antagonisme entre individus ayant des points de vue ou des intérêts divergents Action collective : mobilisation, mise en œuvre de moyens par des groupes ou des individus dans un objectif commun de défense de leurs intérêts ou d’un idéal Un mouvement social désigne toute action collective visant à changer les comportements et/ou les institutions en un sens favorable à un groupe actif et organisé . On parlera donc de mouvements sociaux pour qualifier toute action collective revendicative visant à transformer l'ordre social existant. Le mouvement social ne se limite pas au monde du travail, surtout à notre époque. Conflit social : antagonisme entre des groupes sociaux aux intérêts matériels ou symboliques divergents qui veulent modifier le rapport de force en leur faveur. Pour les plus motivés pour aller plus loin : La notion de conflit social Plusieurs éléments généraux permettent caractériser le conflit. L’antagonisme et l’interdépendance des acteurs sociaux Le conflit social nécessite deux conditions apparemment opposées mais qui sont en réalité complémentaires : le conflit est une relation d’opposition entre au moins deux acteurs sociaux ( classes sociales, syndicats, classes d’âge,...). Le conflit n’est donc jamais solitaire. Ces deux acteurs entrent en lutte, cherchent à l’emporter l’un sur l’autre afin de dominer le champ social de leur rapport. mais en même temps, pour qu’il y ait conflit social, il faut que les acteurs sociaux soient interdépendants et appartiennent au même système social . Ils ne luttent pas seulement l’un contre l’autre ; ils luttent parce qu’ils ont des conceptions opposées sur le fonctionnement de la société. Quand ils luttent, ils entrent donc dans un jeu qui les lient. Le conflit, une lutte pour la domination et le pouvoir II – Intégration, conflit, changement social Fiche 1 - La conflictualité sociale : pathologie ou facteur d’intégration ? Sociologie 2 - La conflictualité sociale: pathologie, facteur de cohésion ou moteur du changement social Acquis de première : conflit Notions : Conflits sociaux, mouvements sociaux, régulation des conflits

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Page 1: fiche 221- comment analyser les conflits socaiux.doc

Introduction   - Définitions Conflit : Antagonisme entre individus ayant des points de vue ou des intérêts divergents

Action collective : mobilisation, mise en œuvre de moyens par des groupes ou des individus dans un objectif commun de défense de leurs intérêts ou d’un idéal

Un mouvement social désigne toute action collective visant à  changer les comportements et/ou les institutions en un sens favorable à  un groupe actif et organisé. On parlera donc de mouvements sociaux pour qualifier toute action collective revendicative visant à  transformer l'ordre social existant. Le mouvement social ne se limite pas au monde du travail, surtout à  notre époque.

Conflit social : antagonisme entre des groupes sociaux aux intérêts matériels ou symboliques divergents qui veulent modifier le rapport de force en leur faveur.

Pour les plus motivés pour aller plus loin   : La notion de conflit social

Plusieurs éléments généraux permettent caractériser le conflit.

L’antagonisme et l’interdépendance des acteurs sociaux

Le conflit social nécessite deux conditions apparemment opposées mais qui sont en réalité complémentaires   : le conflit est une relation d’opposition entre au moins deux acteurs sociaux ( classes sociales, syndicats, classes

d’âge,...). Le conflit n’est donc jamais solitaire. Ces deux acteurs entrent en lutte, cherchent à l’emporter l’un sur l’autre afin de dominer le champ social de leur rapport.

mais en même temps, pour qu’il y ait conflit social, il faut que les acteurs sociaux soient interdépendants et appartiennent au même système social. Ils ne luttent pas seulement l’un contre l’autre ; ils luttent parce qu’ils ont des conceptions opposées sur le fonctionnement de la société. Quand ils luttent, ils entrent donc dans un jeu qui les lient.

Le conflit, une lutte pour la domination et le pouvoir

Comme l’indique Alain Touraine : le conflit ne peut être assimilé seulement à la tension qui existe entre les acteurs sociaux pour la possession de biens. Il a une dimension plus fondamentale ; le conflit suppose une remise en cause du pouvoir de domination qu’exerce un

acteur social sur un autre acteur social.

J.Padioleau peut alors en conclure que le conflit correspond   : à une remise en cause de la légitimité dont dispose les institutions ou les autorités. Ainsi, par exemple, le risque d’un conflit est d’autant plus fort que les acteurs sociaux observent que la circulation des

élites dirigeantes est insuffisante (cf. ; critique de la thèse de Pareto dans le chapitre précédent); ce qui génère des sentiments de frustration et d’injustice qui amènent des individus à remettre en cause les mécanismes de distribution du pouvoir

Le conflit à l’origine du changement social

II – Intégration, conflit, changement social

Fiche 1 - La conflictualité sociale : pathologie ou facteur d’intégration ?

Sociologie

2 - La conflictualité sociale: pathologie, facteur de cohésion ou moteur du changement social

Acquis de première : conflit Notions : Conflits sociaux, mouvements sociaux, régulation des conflits

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Même dans les cas où le conflit semble répondre à des revendications purement économiques (hausse des salaires), cette dimension n’est jamais suffisante pour comprendre le conflit. En effet, même dans ce cas-là, ce sont deux conceptions antagonistes du développement économique et social qui s’opposent, donc deux visions du monde alternatives :

Le conflit n’a pas seulement pour but de remettre en cause une forme de domination, de détruire une société que l’on refuse il se caractérise toujours une seconde dimension : proposer un autre modèle de développement. Le conflit n’est donc pas seulement destructeur et pathologique, il est à l’origine du changement social et donc de

l’évolution de la société.

I. La conflictualité sociale, pathologie ou facteur d’intégration ?

Le tableau de synthèse conçu par JF Freu :

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Introduction : 2 conceptions antagonistes du conflit

Comme l’indique R.Aron dans « la société américaine et sa sociologie » : les sociologues américains ont comme objectif central l’adaptation de l’individu à son milieu. Ils ont donc tendance à

considérer que toute insatisfaction, toute révolte contre le milieu est un phénomène pathologique. Pour l’Américain, l’état normal correspond à l’intégration de l’individu dans le groupe.

Au contraire, le Français pense, selon Aron, que pour être bien né, il faut être révolté. Ceci relève donc d’une autre conception du conflit, beaucoup plus positive qui considère que dans le conflit la société s’exprime et évolue.

A. Le conflit ,vu comme une pathologie sociale

1. Le conflit social vu comme le résultat d’un défaut d’intégration

Dans cette conception, le conflit social résulte d’un défaut d’intégration sociale (cf Fiche 1 – Quelle actualité pour l’analyse de la solidarité de Durkheim ? 2.1 - Quels liens sociaux dans les sociétés où s'affirme le primat de l’individu ?)

Le conflit social est alors perçu comme :• évitable (si l’intégration sociale n’avait pas été défectueuse, il n’y aurait pas eu de conflit), • négatif (le conflit est l’expression d’un défaut d’intégration et peut en lui-même nuire à

l’intégration sociale)

Des mesures doivent alors être prises pour renforcer l’intégration sociale et éviter la survenance future de nouveaux conflits).

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2. et d’une situation d’anomie

Le concept d’anomie n’est pas défini de la même manière par Durkheim et Merton

a. L’analyse de l’anomie de Durkheim ( cf Fiche 1 – Quelle actualité pour l’analyse de la solidarité de Durkheim ? 2.1 - Quels liens sociaux dans les sociétés où s'affirme le primat de l’individu ?)

Durkheim, contrairement à Marx, ne considère pas que le développement et la multiplication des situations conflictuelles, débouchant sur une révolution économique soit souhaitable.

Durkheim  considère que le conflit est, comme le crime, un phénomène normal dans la société. Mais la multiplication des conflits traduit l’apparition d’une situation d’anomie conjoncturelle, c’est à

dire d’une remise en cause provisoire des règles et des valeurs fondant et structurant une société qui évolue. Il lui paraît donc illusoire d’espérer une disparition du conflit et l’avènement d’une société consensuelle. En particulier, il ne croit pas que la croissance et le développement économique se produisant dans une économie de marché assureront la suppression du conflit.

Durkheim peut donc en conclure que l’absence de solidarité entre les individus ne résulte pas de l’imposition d’un trop grand nombre de règles mais au contraire d’une absence ou d’une insuffisance de réglementations qui peut déboucher sur un état d’anomie. Toute la difficulté est alors de forger des règles qui reposent sur le consensus social. Dès lors que ce n’est plus le cas, les règles peuvent faire plus de mal que de bien et même : «  parfois ce sont ces règles même qui sont la cause du mal ». Durkheim prend en particulier l’exemple de l’opposition existant entre les classes sociales : l’organisation de la société en classes est réglementée, mais ce n’est pas consensuel ; les classes inférieures considérant qu’elles sont injustement maintenues en bas de la hiérarchie sociale, elles aspirent à s’élever mais pour y arriver, elles doivent remettre en cause le « rôle qui leur est dévolu par la coutume ou par la loi ». Ceci donne lieu à la lutte des classes qui selon Durkheim est une forme pathologique.

b. L’analyse de l’anomie de Merton

Merton dans son analyse distingue deux éléments : La société définit des objectifs légitimes qui sont hiérarchisés en fonction de la valeur que la société

leur accorde, les individus cherchent donc à atteindre ces objectifs mais alors se pose le problème des moyens que l’on peut utiliser pour y arriver

Comme pour les objectifs Merton considère que la société définit des moyens légitimes pour atteindre les buts valorisés, moyens qui ne remettent pas en cause l’équilibre de la société.

Se pose alors le problème de la congruence entre les objectifs légitimes et les moyens légitimes dont disposent les individus :

soit les individus peuvent atteindre par des moyens légitimes les buts valorisés par la société et l’équilibre eors maintenu

soit la société n’est pas capable d’assurer la congruence entre moyens et objectifs légitimes, alors les individus qui peuvent atteindre les objectifs légitimes par les moyens légitimes vont adopter un comportement qui les conduits à utiliser les moyens les plus efficaces pour atteindre leurs buts même si cela doit se faire en dehors du cadre défini par la société . La société devient alors instable et présente des phénomènes d’anomie : tous les groupes partagent les mêmes objectifs, m’ais n’utilisent pas les mêmes moyens pour les atteindre, ce qui peut générer de l’anomie.(attention la définition de l’anomie au sens de Merton est différente de celle de Durkheim).

Merton va alors être conduit à différencier 5 types d’adaptation des individus : le conformisme : la majorité des individus accepte les buts et les moyens légitimes, l’équilibre

de la société et sa continuité peuvent être maintenus, cela correspond au cas que l’on rencontre le plus fréquemment.

L’innovation : ceci correspond au comportement déviant selon Merton : - la société incitant les individus à valoriser plus les objectifs légitimes (la réussite sociale par

exemple) que les moyens légitimes pour les atteindre l’individu va utiliser les moyens qui lui semblent les plus efficaces, seul le résultat final étant pris en compte.

- Ce comportement selon Merton est caractéristique de la société américaine qui valorise tellement la réussite sociale qu’elle conduit les individus à contourner les normes qu’elle a pourtant définies.

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Le ritualisme : dans ce cas l’individu respecte les moyens légitimes fixés pour atteindre les objectifs légitimes. Mais l’individu sait très bien qu’il n’est pas forcément capable de réussir, de s’élever dans la société, il va donc réduire ses aspirations pour ne pas avoir à se remettre en cause en cas d’échec.

L’évasion. : les individus qui adoptent ce comportement sont dans la société, mais sont des étrangers pour les membres de la société qui ne comprennent pas leurs motivations car ils rejettent aussi bien les objectifs que les moyens légitimes. Cette attitude interpelle pourtant les membres de la société qui se rendent compte que ce comportement trouve son origine dans la société, qu’il traduit souvent un malaise social.

La rébellion : ces individus comme les précédents rejettent les moyens comme les objectifs, mais ils n’adoptent pas une attitude passive de fuite, au contraire ils cherchent à transformer la société à définir de nouveaux objectifs auxquels correspondront de nouveaux moyens légitimes qui seront moins arbitraires , plus conformes à la justice.

3. Les émeutes urbaines de 2005 un signe de l’affaiblissement du lien social ?

Les émeutes dans les banlieues, en 2005, ont pu être interprétées comme le résultat d’une anomie : au sens de Merton : les jeunes de banlieues désirent avoir le même mode de vie que les autres citadins mais les moyens

économiques, culturels et sociaux leur font défaut) au sens de Durkheim : les jeunes de banlieues ont été insuffisamment socialisés par leur famille ou par l’école

B. Le conflit, facteur de cohésion sociale

1. Les limites des analyses du conflit, vu comme une pathologie sociale

a. Rappel   : Les limites de l’analyse durkheimienne

Selon P.Besnard, Durkheim est particulièrement optimiste quand il considère que ces formes pathologiques vont disparaître, car ses arguments sont peu développés :

Ces problèmes sont selon lui rares et dus à des circonstances exceptionnelles qu’il ne précise pas Ces problèmes sont transitoires car ils proviennent du passage des sociétés traditionnelles aux

sociétés modernes. Ces crises de transition devraient donc disparaître de manière automatique

Cet optimisme s’explique car Durkheim fait une analogie entre « normal » : ce qui est la majorité et « idéal » : ce qui va finir par arriver. Selon lui :

l’égalité des chances est un phénomène extrêmement rare mais c’est un phénomène normal car :

o les inégalités tendant à disparaîtreo la réduction des inégalités des chances est positive pour le bon fonctionnement de la solidarité

organique

b. Les limites des théories structuro-fonctionnalistes

Les analyses qui considèrent le conflit comme pathologique ont une conception idéale de la société : des sociétés qui n’évoluent pas et qui développent un consensus autour des valeurs

Or ces sociétés ne correspondent pas aux sociétés actuelles d’après Dahrendorf. Dahrendorf considère que la caractéristique des sociétés modernes est d’être basée sur des rapports de domination. Les individus appartiennent à des structures différentes et ils peuvent donc être tantôt dominants, tantôt dominés.

2. Les analyses du conflit comme facteur de cohésion sociale

Pour les plus motivés   : Le fondateur Simmel

Simmel rejette la conception matérialiste de Marx : le conflit met en relation des acteurs sociaux (non des structures) qui s’opposent pour des raisons économiques, mais Simmel considère que les

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conflits ne peuvent être limités à cette seule dimension, ils concernent toutes les dimensions de la vie sociale (scientifique, culturelle, etc.). Mais Simmel s’oppose aussi à l’école américaine qui considère le conflit comme pathologique. Simmel lui pose au contraire que le conflit permet de traiter les causes de dissociation (de perte du lien social) telles que la haine, l’envie. En effet, dans le conflit les individus s’opposent, mais ils recréent du lien social, même s’il est nécessaire que pour assurer l’unité de la société l’un des acteurs disparaisse. Simmel a donc une vision très positive du conflit, le conflit est vital pour assurer un bon fonctionnement de la société.

a. Le conflit, facteur d’intégration au sein du groupe

Le conflit social peut contribuer à l’intégration de chacun des groupes en conflit, pour les raisons suivantes :

Le conflit renforce l’identité du groupe c'est-à-dire les façons dont les individus ou les groupes se définissent par eux-mêmes et sont définis par les autres. De façon générale, l’identité collective « se pose en s’opposant » (Bourdieu). L’opposition avec un autre groupe social permet de mieux définir les traits caractéristiques du groupe et de mieux en délimiter les frontières.

Le conflit renforce la cohésion du groupe comme le montre la forte syndicalisation pendant le mouvement de 1936. Le sentiment d’appartenance des membres du groupe est renforcé. Le conflit renforce la nécessité d’être solidaire au sein du groupe.

Le conflit renforce les liens sociaux au sein du groupe : le conflit conduit à des actions collectives (grèves, débrayages, manifestations, occupation d’usine…) qui créent des liens de sociabilité entre les membres du groupe.

b. Le conflit, facteur d’intégration entre les groupes

Le conflit social contribue également à créer davantage d’intégration sociale entre les groupes en conflit, pour plusieurs raisons :

Le conflit social rapproche les groupes en conflit en créant une interaction entre eux

Le fait qu’il y ait un conflit social signifie que les groupes sociaux s’entendent sur la légitimité de l’enjeu, ce qui constitue un point commun entre eux.

Le conflit social peut créer des rapports entre les deux groupes, qui peuvent de ce fait apprendre à mieux se connaître. Ils deviennent des « partenaires sociaux ». Le conflit de 1936 a donné lieu aux accords Matignon qui instituait les conventions collectives obligeant patrons et syndicats à négocier.

c. Un exemple : le mouvement des indignés

Le mouvement des indignés peut être vu comme un conflit porteur de cohésion sociale : Il rassemble des individus aux profils très différents : d’abord la jeunesse éduquée puis des chômeurs, des précaires, des

personnes plus âgées. Ceux-ci développent des valeurs et une culture commune : égalitarisme, goût du partage, sacralisation de l’autonomie ; des modèles d’action basés sur l’occupation de lieux symboliques sur une durée plus ou moins longue et la forte visibilité sur les réseaux sociaux

il y a une légitimité sur l’enjeu entre les deux groupes en conflit: les jeunes souhaitent un emploi

II. La conflictualité sociale: moteur ou résistance au changement ?

A. Le conflit, moteur du changement social…

Le conflit n’est donc pas seulement destructeur et pathologique, il est à l’origine du changement social et donc de l’évolution de la société.

1. Le conflit, facteur du changement et de l’intégration sociale

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Le conflit est donc est perçu comme positif puisqu’il contribue à l’intégration sociale et il peut conduire au changement social, c’est-à-dire d’une transformation durable de l’organisation et/ou de la culture d’une société. :

ce changement résulte d’un compromis entre les groupes en conflits ce changement permet une meilleure intégration d’un groupe jusque-là marginalisé Le conflit n’a pas seulement pour but de remettre en cause une forme de domination, de détruire une société que l’on

refuse il se caractérise toujours une seconde dimension : proposer un autre modèle de développement.

2. Rappel : l’analyse de Marx (cf Fiche 1 – Les analyses théoriques des classes, 1- 1 – Comment analyser la structure sociale?

Selon Marx : les différents modes de production se succèdent inéluctablement et sont donc condamnés à disparaître

quand les forces productives qui leur avaient donné naissance sont concurrencées par de nouveaux moyens de production plus performants.

l’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’est que l’histoire de la lutte des classes . Cette lutte s’est caractérisée par l’opposition entre les deux classes fondamentales dans tous les modes de production. Elle conduit soit à une transformation révolutionnaire de la société toute entière, soit à la disparition des deux classes en lutte.

Le premier cas est celui de la lutte qui a opposé la bourgeoisie et la noblesse dans la société féodale. Cela conduit à l’effondrement du mode de production féodal et à l’instauration du mode de production capitaliste.

Celui- ci n’a pas fait disparaître l’exploitation et l’antagonisme de classes. Il n’a fait que le transformer. Marx écrit que « la société bourgeoise moderne élevée sur les ruines de la féodalité, n’a pas aboli les antagonismes de classe. Elle n’a fait que substituer aux anciennes de nouvelles classes, de nouvelles conditions d’oppression, de nouvelles formes de luttes »

En revanche, le mode de production capitaliste a introduit une simplification des antagonismes de classe. Dans la société féodale il existait une pluralité de classes (les serfs, les compagnons, les maîtres de jurandes, les seigneurs, etc.) .Dans le mode de production capitaliste on va vers une bipolarisation de la lutte : « «  la société se divise de plus en plus en deux grands camps opposés, en deux classes ennemies, la bourgeoisie et le prolétariat ». Il poursuit «  de toutes les classes actuellement adversaires de la bourgeoisie, le prolétariat est la seule classe vraiment révolutionnaire, les autres classes se désagrègent et disparaissent par le fait de la grande industrie : le prolétariat au contraire est son produit particulier.

B. Ou résistance au changement

Les évolutions récentes montrent que certains conflits visent plus particulièrement à s'opposer à des transformations sociales jugées défavorables ou peu souhaitables par certains acteurs. Ces conflits défensifs prennent pour enjeux la résistance au changement, en particulier lorsque ceux-ci s'incarnent dans la « modernisation » des entreprises ou de l'État, présentée comme « nécessaire » mais qui viendrait menacer le statut et l’identité conférés aux personnes par la société au travers du travail.

Pour aller plus loin   (pour les plus motivés)   : les explications de l’évolution des conflits   : entre remise en cause et mutations

Le tableau de synthèse conçu par JF Freu :

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Partie 1 - Les théories contemporaines du conflit

A. L’analyse des conflits de R.Dahrendorf   : la prise en compte de l’autorité

Dahrendorf s’oppose à Marx car   : ici

Dahrendorf cherche à trouver aux conflits sociaux une autre origine que la seule propriété des moyens de production. Pour cela il va faire appel à la sociologie de Weber en particulier à deux concepts qui occupent une place importante chez Weber : le pouvoir et l’autorité :

« Le pouvoir est la probabilité pour qu’un acteur engagé dans une relation sociale soit en position d’imposer sa volonté, en dépit de toute résistance , et ceci indépendamment des raisons qui fondent cette probabilité   » (Weber). Le pouvoir s’attache donc à la personne

L’autorité est «   la probabilité pour qu’un ordre ayant un contenu spécifique soit suivi par un groupe donné de personnes »(Weber). L’autorité contrairement au pouvoir n’est pas attachée à la personne mais à un rôle ou à une position sociale.

Dahrendorf va donc redéfinir la notion marxiste de classe sociale en expliquant les conflits de classe :

non plus par la seule propriété des moyens de production, mais par le contrôle pour l’exercice de l’autorité. En d’autres termes la cause des conflits sociaux doit être recherchée dans cette distribution

inégale de l’autorité qui se traduit par des relations de domination-soumission.

Conséquences   : Cette opposition crée à son tour un autre type de conflits : les conflits d’intérêts entre ceux qui exercent le pouvoir et ceux qui y sont soumis. Dahrendorf va distinguer deux types d’intérêts:

les intérêts latents qui sont des intérêts communs mal explicités qui provoquent des conflits, mais ne correspondent pas à un degré de conscience collective suffisante pour donner lieu à des groupes d’intérêts. Ils ne constituent que des catégories sociales composées d’individus dont les intérêts sont identiques, mais qui ne sont pas capables de les défendre de façon organisée.

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Les intérêts manifestes , eux, donnent naissance à des groupes d’intérêts organisés et capables d’agir sur ces bases .

Conséquences   : De la sorte : il existe une pluralité de conflits sociaux. Les conflits entre groupes étant de nature très variée, on ne peut plus les ordonner comme chez

Marx entre deux grandes classes sociales . C’est une des erreurs de l’analyse de Marx que de penser que la domination industrielle implique

nécessairement la domination dans les autres domaines de la société, Etat, Eglise, organisations, etc.

B. Le modèle d’Inglehart

Inglehart relativise l’actualité de la pensée de Marx : en montrant qu’une fois ses besoins matériels immédiats satisfaits, l’homme tourne ses

préférences vers des besoins non matériels, de nature intellectuelle ou esthétique. Or, l’évolution de nos sociétés développées en serait justement à ce stade du passage des

valeurs matérialistes aux valeurs post-matérialistes, sous l’effet conjugué de la croissance économique, de l’innovation technologique, du développement de l’éducation, des changements dans la répartition sociale .

Conséquences   : On passerait ainsi d’une société de classes à une société caractérisée par une

stratification complexe. Il en découle une augmentation générale du niveau de compétence politique et une demande accrue de participation au processus de décision .Les citoyens n’accorderaient plus leur confiance aux organisations traditionnelles ( parti, syndicat )censées assurer dans le modèle pluraliste une médiation efficace entre le pouvoir et eux.

Dans le même temps , on assiste parmi les nouvelles générations de la classe moyenne à l’apparition de nouveaux enjeux qui proviennent plus de différences dans le style de vie que de besoins économiques. On peut citer par exemple la protection de l’environnement, le rôle de la femme, la redéfinition des valeurs qui se substitueraient au conflit entre la bourgeoisie et la classe ouvrière.

C. L’analyse des conflits sociaux d’A.Touraine

Les apports de Touraine à la sociologie du conflit sont nombreux :

1. Des conflits caractéristiques d’une société

Il va s’efforcer de montrer que les conflits sociaux sont caractéristiques d’un type de société et donc, que quand les sociétés se transforment, les conflits sociaux évoluent :

Dans la société industrielle les conflits sociaux tournent autour de l’industrie comme chez Marx.

Pour en savoir plus   : ici

Dans la société postindustrielle , caractéristique selon Touraine de notre époque, les conflits sociaux qui se forment sont d’une autre nature que dans la société industrielle.

o « Ils opposent moins le capital au travail que les appareils de décision économique et politique à ceux qui sont soumis à une participation dépendante ».

o En effet, dans la société postindustrielle qui est une société technocratique ( caractérisée par le développement d’appareils de gestion et d’information, tendant à modeler les conduites sociales et culturelles), le pouvoir appartient à ceux qui détiennent le savoir , l’information. Les conflits sociaux qui étaient autrefois concentrés dans l’entreprise, se diffusent aujourd’hui dans la société toute entière, opposant à ces appareils leurs consommateurs et leurs usagers.

2. La diversité des conflits

Dans une société , les conflits sociaux sont très divers. Touraine distingue ainsi : les conflits d’intérêts qui cherchent à modifier la relation coûts-bénéfices en leur faveur. Les mouvements sociaux qui mettent en cause ,au-delà de l’organisation sociale et du

système de décision, les relations de domination au niveau de la société.

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Les mouvements révolutionnaires qui sont plus globaux encore puisqu’ils identifient une domination sociale à un régime politique.

Remarque   : Ces différents types de mouvements sont largement autonomes mais en même temps ils portent la marque du conflit social central de la société

Exemple   :T ouraine prend l’exemple du mouvement ouvrier qui occupe dans les sociétés industrielles une place centrale :

même quand les ouvriers revendiquent pour des augmentations de salaire, pour la reconnaissance d’un droit syndical, pour une reconnaissance institutionnelle,

derrière se trouve la marque du mouvement ouvrier basée sur la lutte des classes.

Conclusion   : Il faut donc pour Touraine rechercher derrière tout conflit le conflit social central caractéristique de la société dans laquelle il se déroule.

3. La signification des conflits

Constat   : Comme l’indique Touraine : «  la formation d’un conflit de pouvoir, de la lutte des classes en particulier n’est pas une rupture

de la société. (...) Au contraire, plus la lutte des classes est forte, plus les adversaires se réfèrent explicitement à

un modèle intégré de société, parlent au nom de l’intérêt général ».

Conséquence   : Le conflit entre les classes n’a donc rien d’une guerre: les entreprises et les syndicats partagent des valeurs communes, celles de l’industrie, du travail,

du progrès technique. C’est cette toile de fond qui rend visible les disparités, qui permet à un groupe social de percevoir

qu’un autre groupe est en train de s’approprier le produit du travail collectif.

Conclusion   : Pour qu’il y ait conflit, il faut donc que : les acteurs sociaux partagent des valeurs, une culture, mais qu’ils aient des conceptions différentes sur l’intérêt général de la société, et qu’ils cherchent

à transformer l’organisation de la société pour la rendre plus juste. Le conflit d’après Touraine ne remet pas en cause l’intégration sociale, au contraire il la renforce.

Partie 2 –Une remise en cause des conflits sociaux traditionnels   ?

I. Une remise en cause des conflits sociaux traditionnels

A. Les mutations de la classes ouvrière ( p 148 à 150)   : repris du manuel en ligne Brises Les transformations du travail et les mutations de la classe ouvrière remettent-elles en cause la division de la société française en classes sociales antagonistes ? C’est ce que pensent certains sociologues, et nous allons présenter leurs principaux arguments.

1. La diminution de la part des ouvriers dans la population active

Le recensement de mars 1999 en France met en évidence la poursuite du mouvement amorcé dès le milieu des années 1970 : les ouvriers étaient encore plus de 7 millions en 1982, ils étaient 6.5 millions environ en 1990 et 5.9 millions seulement en 1999. Cela représente une diminution de plus de 15%  des effectifs ouvriers entre 1982 et 1999, alors que, dans le même temps, la population active occupée augmentait. Résultat : la part de la P.C.S. “ ouvriers ” dans la population active occupée a encore plus nettement diminué que ses effectifs : elle est passée de 32.8% de la population active occupée en 1982 à 25.6% en 1999 (Insee, recensements de la population), soit une diminution de 22% environ.  Aujourd’hui, la part des ouvriers dans la population active est inférieure à celle des employés

2. La transformation de la nature du travail des ouvriers

la première grande transformation est que les ouvriers travaillent de plus en plus souvent dans les services, comme les chauffeurs routiers, par exemple. Ainsi, en 2001, il y a plus d’ouvriers travaillant dans le tertiaire que d’ouvriers travaillant dans le secondaire

La deuxième transformation touche la qualification des ouvriers : la qualification personnelle des ouvriers s’est plutôt élevée (il y a davantage de diplômes professionnels) mais ils exercent souvent un emploi dont la qualification est

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inférieure à celle qu’ils possèdent (31% des salariés embauchés pour un emploi ne nécessitant pas officiellement de qualification sont titulaires d’un CAP ou d’un BEP). Le nombre des emplois d’ouvriers non qualifiés avait beaucoup diminué entre 1982 et 1994 mais il a réaugmenté entre 1994 et 2001. Au total, la part des emplois d’ouvriers qualifiés dans l’ensemble des emplois ouvriers progresse cependant.

Taille des entreprises et du collectif de travail : parce que la nature du travail a changé, la taille des entreprises dans lesquelles travaillent les ouvriers a beaucoup diminué. Cela s’explique d’une part par l’automatisation des tâches de production proprement dites : certaines usines sont aujourd’hui quasi “ désertes ”, d’autre part par le fait que les ouvriers travaillent de plus en plus souvent dans des entreprises du tertiaire qui sont traditionnellement, en moyenne, de taille inférieure à celle des entreprises industrielles. Le cadre de travail des ouvriers a donc été bouleversé : les grands rassemblements ouvriers à l’ouverture des grilles de l’usine ne font bien souvent plus partie de l’expérience vécue par les ouvriers. Mais le fait que la taille de l’entreprise diminue ne signifie pas que les ouvriers seront plus proches du patron : en règle générale, ces petites entreprises appartiennent à de grands groupes industriels et financiers et le pouvoir est en général bien loin du lieu de production.

Les transformations récentes du travail et de l’emploi (précarisation du travail, suppression de certains emplois non qualifiés, par exemple d’ouvriers, individualisation de la carrière des salariés, etc…) agissent aussi sur l’identité professionnelle : les frontières de l’emploi sont plus floues, les métiers se transforment, les horaires sont “ à la carte ”, l’individu semble triompher et les collectifs de travail semblent moins englobants, moins contraignants pour les individus, mais aussi moins protecteurs. L’identité professionnelle semble donc moins “ imposée ” à l’individu qui doit bien davantage trouver ses repères seul pour la construire. Dans ces conditions, on voit bien que la mobilisation en vue d’un conflit sera sans doute plus difficile à obtenir.

3. La transformation de la culture ouvrière

La précarisation du travail et l’expérience du chômage (qui touche proportionnellement plus les ouvriers que les autres P.C.S.) dévalorisent le travail ouvrier, tandis que le changement de la nature du travail ouvrier (moins directement en contact avec la matière et la production) attaquent directement sa spécificité.

De même, les conditions de vie des ouvriers se sont transformées, semblant rejoindre celles d’une vaste “  classe moyenne ” : d’une part, les revenus, et donc la consommation, se sont élevés rapidement durant les années 1960 et 1970, permettant aux ouvriers d’accéder aux biens de consommation durables comme la télévision, la machine à laver ou l’automobile ; d’autre part, les modes de vie des ménages ouvriers se sont également transformés par le développement du travail des femmes d’ouvriers, l’allongement de la durée de scolarisation des enfants d’ouvriers et le développement de l’accession à la propriété grâce au crédit.

Au final, les conditions de vie semblent s’égaliser avec celles d’autres groupes sociaux et les éléments qui contribuent à forger et à transmettre la culture ouvrière semblent peu à peu disparaître.

Un dossier de libération traduit très bien la crise de la classe ouvriere : ici

B. Une crise du syndicalisme ( p 166-168)

L’échec des grandes grèves de la fin des années 40, les répercussions de la guerre froide, le manque de cohérence de l’action syndicale qui hésite entre l’action directe et la négociation par branche vont entraîner un tassement des effectifs qui seront divisés par deux durant les années 50, avant de se stabiliser jusqu’à la crise actuelle.

Constat   : une perte d’audience

Le taux de syndicalisation passe de 25 % en 65 à 7-9 % aujourd’hui Pour l’évolution du taux de syndicalisation   : ici

Une présence syndicale et un taux de syndicalisation très inégaux suivant la taille de l’entreprise : la présence syndicale sur le lieu de travail varie de 8%(entreprises de moins de

50 salariés) à 81%(entreprises de plus de 500 salariés) suivant le statut de l’individu : un salarié en CDI sur 10 est syndiqué, un salarié en CDD sur 25 est syndiqué suivant le statut : le taux de syndicalisation des fonctionnaires est 3 fois plus élevé que celui des salariés du

privé

Le taux de syndicalisation varie énormément entre pays   : Il est supérieur à 70% dans les pays scandinaves Pour tomber à moins de 20 % dans les pays du Sud de l’Europe et en France

C. Les explications théoriques

a ) le paradoxe d’Olson

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Constat   : Il montre que l’existence d’un groupe non organisé d’individus aux intérêts communs , dotés de moyens d’action et conscients de leurs intérêts n’implique pas automatiquement , contrairement aux intuitions de type marxiste , l’apparition d’une action collective .

Explications   : En effet, quand le produit obtenu par une telle action est un bien ou un service collectif ( ex : une augmentation de salaire pour tous ) et lorsque le groupe est assez large pour que des pressions ne s’exercent pas sur les individus afin de l’inciter à l’action , alors se produit le phénomène du passager clandestin ( lson construit son analyse dans une perspective libéral puisqu’il adopte le modèle de l’homo-oeconomicus égoiste et rationnel) :

Chaque individu va se dire que puisqu’il peut profiter de l’action sans avoir à agir lui-même, il aura intérêt à laisser les autres dépenser de leur temps et de l’énergie pour se procurer les biens publics.

conséquences   : Ceci doit , selon Olson , permettre d’expliquer l’absence de mouvements collectifs : en France et en Allemagne , les résultats de l’action de la grève s’appliquent à tout le monde ( syndiqués et non syndiqués ) ; il est interdit de faire une discrimination , ce qui n’est pas une incitation à la syndicalisation .Conclusion   : Pour que la syndicalisation se développe , il faut que les syndicats offrent à leurs membres des incitations sélectives

soit pénaliser le refus de participation à l’action ( ex : dans un petit groupe , rompre la solidarité peut entraîner une mise à l’écart ) .

soit accorder des avantages spécifiques : protection juridique du salarié , postes dans l’organisation , ...

b ) le modèle d’OBERSHALL .

remarque   : Son analyse se situe explicitement dans la perspective de celle d’Olson mais elle est enrichie par une approche sociologique qui cherche à définir quelles sont les conditions sociales susceptibles de favoriser l’émergence de mouvements sociaux au sein d’une collectivité.

Présentation de l’analyse : Obershall croise deux dimensions pour expliquer la probabilité d’une organisation et d’une mobilisation d’un collectif :

Première dimension : la dimension horizontale qui renvoie à la nature des lien sociaux existant au sein de la collectivité , c’est-à-dire la cohésion sociale du groupe . Obershall distingue 3 cas :

relation de type communautaire : famille , village , clan , comme dans les sociétés traditionnelles . relation de type associatif : groupe professionnel , religieux , économique comme dans les sociétés industrielles . contrairement au troisième cas où les relations sociales sont peu développées .

Remarque   : Dans ces 2 premiers cas , le sentiment de solidarité du groupe et son potentiel de mobilisation sont élevés

Deuxième dimension : la dimension verticale renvoie au degré d’intégration sociale et politique entre les différents groupes . Il est possible de mesurer ce niveau d’intégration par l’étendue des liens entretenus avec les groupes supérieurs au sein de la pyramide sociale et politique .

2 types sont alors distingués : dans les sociétés segmentées où les groupes sont peu intégrés , là où la mobilité ascendante est faible , les groupes devront

compter sur eux-mêmes pour faire entendre leur voix , leurs revendications . La segmentation est donc propice à la mobilisation.

dans les sociétés où l’intégration est forte, les groupes peuvent faire entendre leurs voix qui seront prises en compte , ce qui réduit la probabilité de la mobilisation .

Obershall croise alors les deux dimensions et essaye d’expliciter les modalités de mobilisation des groupes.

II. Ces conflits du travail restent présents mais sous une forme différente

A. Le changement de rôle des syndicats   : une institutionnalisation des syndicats

On assiste aujourd’hui à une situation paradoxale : le taux de syndicalisation en France n’a jamais été aussi faible. Pourtant les syndicats n’ont jamais été aussi reconnus comme interlocuteurs privilégiés des patronats et de l’EtatComment expliquer ce paradoxe ?

jusqu’aux années 30 , les syndicats n’étaient pas reconnus comme interlocuteurs privilégiés . Pour faire entendre leurs voix, les syndicats devaient mobiliser un nombre important de salariés , en particulier dans des manifestations . Le syndiqué était un adhérent qui militait et participait à la vie du syndicat . Le syndicat développait une contre-culture qui avait pour objectif de détruire la société capitaliste .

au contraire , à partir des années 30 mais surtout après 45 , avec la création de la Sécurité Sociale , des comités d’entreprise, des ASSEDIC , enfin avec les lois d’Auroux en 82 , on va observer une évolution qui se caractérise :

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par une reconnaissance institutionnelle des syndicats qui ont contribué à les légitimer et à les intégrer à la société civile , qui ont donné aux syndicats une audience plus large , des ressources financières en les liant étroitement à toutes les institutions de la société .

Une autre conception du syndicalisme s’est développé : le syndicalisme essaye d’économiser la grève ; il l’utilise comme un moyen de pression , il la brandit comme une menace .

conséquences   : Ceci traduit une évolution de la stratégie syndicale : conformément à l’analyse de Simmel : jusqu’aux années 30 les conflits sociaux opposaient patronat et syndicats qui chacun développaient une culture et c’était

deux modèles de société qui s’opposaient . A partir des accords de Matignon au contraire , on passe de la dyade à la triade : de l’affrontement binaire où chacune

des 2 parties en présence pouvait avoir le sentiment qu’elle triompherait totalement et imposerait sa manière de voir à l’adversaire terrassé , on passe à des rencontres tripartites où la grève n’est plus qu’un moment de la négociation .

La grève n’est plus alors qu’un signal avertisseur qui demande une intervention des pouvoirs publics .

Conclusion   : dès lors les syndicats recourent de moins en moins à la mobilisation sous forme de grève ou de manifestations : la grève est vue comme pathologique , comme l’échec d’une négociation ( ex : le modèle allemand de référence ) .

Conséquence   : Mais alors le syndicat a de moins en moins besoin de syndiqués . P.Rosanvallon pose même la question : qu’arriverait-il si les syndicats n’avaient plus d’adhérents ?:

«  La légitimité syndicale serait-elle remise en cause ? Pas forcément : un taux marginal d’adhésion n’entraînerait pas de basculement qualitatif par rapport à la situation actuelle , l’adhérent a en effet cesser de jouer un rôle déterminant dans le phénomène syndical . »

Dans la perspective d’une disparition des adhérents , la forme syndicale tendrait à se confondre avec la forme politique , seul le domaine d’intervention de chacune d’elle les distinguant .

La légitimité syndicale deviendrait , comme celle des partis d’essence purement électorale ( le parti politique n’a pas besoin d’adhérents , le nombre d’adhérents n’est pas le critère de sa représentativité , seuls comptent les résultats électoraux )

Apparition d’un nouveau modèle   : On assiste d’ailleurs selon P Rosanvallon à une nouvelle conception du syndiqué qui : n’est plus considéré comme un adhérent, partageant avec les autres membres du syndicat des valeurs, une culture, mais qui devient un client .

conséquences   : dans ce contexte , étudier la crise du syndicalisme par rapport à la chute du taux de syndicalisation n’est pas un bon choix , car l’indicateur n’est pas bon . Pour étudier la représentativité syndicale , il faut étudier les résultats des syndicats aux différentes élections .

mais cela entraîne une nouvelle conception du syndiqué auquel le syndicalisme français n’est pas encore complètement préparé :

On aurait d’un côté le délégué syndical qui siégerait dans de multiples commissions , le syndicalisme devenant un métier à temps plein ;

et de l’autre côté , le syndiqué qui ne serait plus qu’un client qui adhère pour obtenir des services . Ceci n’est pas sans danger car les délégués qui siègent dans les différentes commissions , ne sont plus sur le terrain avec

les salariés , ce qui engendre une coupure entre le mandant ( le syndiqué , l’adhérent ) et le mandataire ( le délégué) . Conclusion   : Dès lors plus que de disparition du syndicalisme ou de crise du syndicat , il faudrait parler d’une évolution structurelle du syndicat qui s’adapte à une nouvelle forme de société plus complexe et c’est cette adaptation qui fait la crise .

Pour les dangers de la désyndicalisation   : iciUn article des Echos   : Les conflits sociaux prennent des formes de plus en plus ...

B. De nouvelles formes d’action   : la coordination

Constat   : Depuis quelques années , on observe une montée des coordinations qui mettent en cause le monopole de défense des droits des travailleurs dont disposaient jusqu’alors les syndicats . Les coordinations se sont multipliées dans les années 80 : infirmières , cheminots , instituteurs , routiers , ...

Comment expliquer ce phénomène ? 6 raisons semblent l’expliquer selon F.Duchamps : la probabilité de constitution d’une coordination est d’autant plus forte qu’il n’y a pas de tradition syndicale

( infirmière) mais il existe des contre-exemples (les cheminots ont un taux de syndicalisation traditionnellement élevé). la coordination est catégorielle , elle défend les intérêts des membres d’une profession sans chercher à élargir le conflit

à des revendications plus globales ( telles que la lutte des classes ) qui semblent dépassées . la coordination apparaît généralement dans des professions dans lesquelles les salariés sont isolés (prof ,

cheminot ) .

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les coordinations s’implantent le plus souvent dans des professions dont l’image sociale , les traditions sont solides . Mais , en même temps , les coordinations sont aussi le fait de professions apparues récemment qui ne sont pas reconnues à leur juste valeur

la coordination , contrairement aux syndicats habitués aux arrangements , est jusqu’au boutiste . Elle refuse le compromis , ce qui rend les conflits longs et durs sans véritable porte de sortie , d’autant plus que les mandataires doivent sans cesse se référer aux mandants .

les coordinations résultent de la désyndicalisation , qui est elle-même le fait de deux tendances convergentes : volonté du patronat d’affaiblir les syndicats individualisation croissante du monde de travail

Conséquences   : Les salariés n’ayant plus de structures collectives qui le représentent, se constituent alors des mouvements puissants mais éphémères qui sont corporatistes , c’est-à-dire qui ne mesurent pas les retombées de leurs revendications .

Un exemple : les infirmières : ici

Partie 3 - Vers de nouveaux enjeux, de nouveaux mouvements sociaux   ?

Introduction   : Définition du mouvement social Selon Touraine les mouvements sociaux correspondent à une action collective organisée par laquelle un acteur de classe lutte pour définir les grandes orientation culturelles de la société (ce que Touraine appelle l’historicité ). Sa définition suppose donc la conjonction de trois éléments :

un acteur de classe (ex: la classe ouvrière): c’est le principe d’identité. un adversaire de classe (ex: la bourgeoisie) : c’est le principe d’opposition. un enjeu : c’est le principe de totalité.

I. Les caractéristiques communes des nouveaux mouvements sociaux (NMS)

Constat   : Comme l’indique F.Dubet , «  le thème des nouveaux mouvements sociaux émerge au milieu des années 60 au moment où le mouvement ouvrier qui était situé au cœur de la société industrielle ne semble plus avoir le monopole des grandes mobilisations » . Ces nouveaux mouvements sociaux présentent plusieurs caractéristiques :

ils désignent les objets les plus divers , du moment qu’ils se distinguent de la figure classique du mouvement ouvrier : mouvement noir , luttes étudiantes aux USA , et partout mouvements écologistes ,féministes , regroupements pacifistes .

ils mettent en scène de nouveaux acteurs comme les femmes , les jeunes , les classes moyennes .

ces mouvements ne concernent plus directement les problèmes de la production et de l’économie ; ils se situent dans le champ de la culture , de la sociabilité , de la ville , des valeurs et paraissent bousculer les formes classiques de gestion du conflit social et de la représentativité politique .Les NMS mettent l’accent sur l’autonomie, la résistance au contrôle social

les NMS inventent de nouvelles formes d’organisation et d’actions. Ils sont très méfiantsà l’encontre des structures traditionnelles auxquelles les individus devaient déléguer l’autorité à des états majors constitués de permanents très eloignés des préoccupations de la base

Les NMS n’ont pas pour objectif de prendre le pouvoir , ils visent au contraire à se protéger de l’influence de l’Etat (cf., les mouvements régionnalistes) et à construire des espaces d’autonomie protégeant les individus.

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Conclusion   : la sociologie des nouveaux mouvement sociaux est associée à une critique des paradigmes jusque là dominants, principalement le marxisme

Pour l’exemple du mouvement antinucléaire   : iciPour l’exemple du mouvement étudiant   : iciDes articles de Sciences humaines   :

Les théories du mouvement social et de l'engagement Peser sur les décisions Devenirs militants

II. Les limites de l’analyse des nouveaux mouvements sociaux

O Fillieule a étudié les formes actuelles de l’action collective et il a constaté que certains caractéristiques ressortent qui semblent relativiser l’intérêt d’une analyse en termes de nouveaux mouvements sociaux , il remarque certes que :

l’activité manifestante se diffuse aujourd’hui très largement dans toutes les CSP, que les acteurs des conflits interpellent directement les politiques , faute de croyance en l’efficacité des représentants.

Ceci semble bien traduire une crise de la représentation (cf. coordination).

Mais, contrairement à ce qui s’écrit le plus souvent, la période n’est pas marquée par un changement de nature de la participation politique :

l’analyse des revendications portées par les manifestations actuelles ne vient pas corroborer l’hypothèse d’une modification des valeurs défendues : les valeurs matérialistes sont très largement dominantes : Emploi, hausse du revenu.

Voir les valeurs développées aujourd’hui par les français   : ici

Les mobilisations porteuses de revendications post-matérialistes ( environnement, mœurs ) ne font pas vraiment recette à l’exception des questions internationales et de l’antiracisme.

l’hypothèse d’une modification des modes d’engagement politique n’est pas confirmée . Selon elle , la participation aux mouvements de protestation serait marquée par une extrême fluidité , les individus s’engagent et se désengagent en fonction du contexte . Il en résulterait un refus net des organisations . La réalité des manifestations françaises vient infirmer ces considérations puisque plus des deux tiers d’entre elles ( hors Paris) sont organisées à l’appel des centrales ouvrières . Cela laisse peu de doute sur la domination de la stratégie de la rue par les syndicats . En revanche , il est vrai que les partis politiques ( surtout les partis de droite et le parti socialiste ) appellent fort rarement à manifester .

Le tableau de synthèse conçu par JF Freu :

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Conclusion : La carte mentale sur la conflictualité de P de Oliveira

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Des ressources complémentaires

Exercices de remédiation Sur le net, articles et vidéosDe base Approfondissement

I. La conflictualité sociale, pathologie ou facteur d’intégration ?

Deux exercices sur les définitionsExo 1Exo 2 - Les principaux faits et mécanismes Un texte à trous Pathologie ou facteur de cohésion

- Le sujet corrigé du bac 2013l

Le cours du CNED Intégration, conflit, changement social Résumé

sonore

Une vidéo de séko éco Un article de Sciences humaines   : Du côté des cheminots   : la grève identitaire

II. La conflictualité sociale: moteur ou résistance au changement ?

Un texte à trous Moteur ou resistance au changement

social

3 activités sur l’analyse de Marx

CHANGEMENT SOCIAL   ET   CONFLITS   – une vidéo de séko éco