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Gouesnac’h EXPOSITION DE FAUSSE MONNAIE AU PARDON SE SAINT CADOU (1728) Commentaires sur une procédurecriminelle La série B des Archives Départementales contient une liasse relative à une "exposition de fausse monnaie" au pardon de Saint Cadou du 26 septembre 1728. Précisons d'abord que cette expression ne doit pas être prise au pied de la lettre; il s'agit tout simplement de l'utilisation par deux "particuliers" de faux écus pour régler des consommations prises dans une auberge foraine lors de cette fête traditionnelle. Les faits ont donné lieu à une procédure criminelle, instruite devant le Présidial de Quimper, et composée d'une quarantaine de pièces dont il n'apparaît pas opportun, dans le cadre de cet article, de faire l'énumération. L'aspect juridique de l'affaire sera évoqué lors de l'examen rapide des sentences. Il a paru intéressant, par contre, d'analyser certains des documents à ans la mesure où ils apportaient quelques connaissances supplémentaires sur la paroisse de Gouesnac'h et venaient préciser des points d'histoire locale. Ces commentaires suivront l'ordre chronologique des pièces retenues. l – Sur le procès-verbal du 26 septembre 1728 rapportant les faits. Ce procès-verbal, dressé sur les lieux par Joseph GEFFROY, sieur de STANGMARTINN, Sous-brigadier à la maréchaussée de Bretagne, accompagné de François David MARIANALLA, cavalier à la dite maréchaussée, nous dit : "Ce jour 26 septembre 1728, avoir de compagnie monté à cheval pour nous rendre à une chapelle nommée chapelle Saint-Cado…. a informé que le "détachement de la dite paroisse commandé par le sieur TANIOU leur capitaine, avait arrêté deux certains particuliers accusés de débiter de la fausse monnaie, mesme de les avoir dessaisi d'un certain nombre, de les avoir conduits à un appartement attaché à la dite chapelle servant de sacristie au-dessus de laquelle il y a une chambre". Des termes même du document, les représentants de l'ordre public ne se sont déplacés ni à la demande des autorités locales ni sur information; c'est, en effet, sur place qu'ils apprennent les agissements des "deux certains particuliers". Il apparaît qu'ils se sont trouvés là à l'occasion d'une ronde; il était normal qu'ils visitent un endroit où se faisait un grand rassemblement de badauds et de lutteurs dont beaucoup fréquentaient les débits de boissons installés sur place et provoquaient de nombreuses rixes, tradition constante du pardon de Saint Cadou. 1/8

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Faits divers du Pays de Fouesnant -

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Page 1: Faits divers du Pays de Fouesnant -  c3jqg

Gouesnac’h EXPOSITION DE FAUSSE MONNAIE

AU PARDON SE SAINT CADOU (1728)

Commentaires sur une procédurecriminelle La série B des Archives Départementales contient une liasse relative à une "exposition de fausse monnaie" au pardon de Saint Cadou du 26 septembre 1728. Précisons d'abord que cette expression ne doit pas être prise au pied de la lettre; il s'agit tout simplement de l'utilisation par deux "particuliers" de faux écus pour régler des consommations prises dans une auberge foraine lors de cette fête traditionnelle. Les faits ont donné lieu à une procédure criminelle, instruite devant le Présidial de Quimper, et composée d'une quarantaine de pièces dont il n'apparaît pas opportun, dans le cadre de cet article, de faire l'énumération. L'aspect juridique de l'affaire sera évoqué lors de l'examen rapide des sentences. Il a paru intéressant, par contre, d'analyser certains des documents à ans la mesure où ils apportaient quelques connaissances supplémentaires sur la paroisse de Gouesnac'h et venaient préciser des points d'histoire locale. Ces commentaires suivront l'ordre chronologique des pièces retenues. l – Sur le procès-verbal du 26 septembre 1728 rapportant les faits. Ce procès-verbal, dressé sur les lieux par Joseph GEFFROY, sieur de STANGMARTINN, Sous-brigadier à la maréchaussée de Bretagne, accompagné de François David MARIANALLA, cavalier à la dite maréchaussée, nous dit : "Ce jour 26 septembre 1728, avoir de compagnie monté à cheval pour nous rendre à une chapelle nommée chapelle Saint-Cado…. a informé que le "détachement de la dite paroisse commandé par le sieur TANIOU leur capitaine, avait arrêté deux certains particuliers accusés de débiter de la fausse monnaie, mesme de les avoir dessaisi d'un certain nombre, de les avoir conduits à un appartement attaché à la dite chapelle servant de sacristie au-dessus de laquelle il y a une chambre". Des termes même du document, les représentants de l'ordre public ne se sont déplacés ni à la demande des autorités locales ni sur information; c'est, en effet, sur place qu'ils apprennent les agissements des "deux certains particuliers". Il apparaît qu'ils se sont trouvés là à l'occasion d'une ronde; il était normal qu'ils visitent un endroit où se faisait un grand rassemblement de badauds et de lutteurs dont beaucoup fréquentaient les débits de boissons installés sur place et provoquaient de nombreuses rixes, tradition constante du pardon de Saint Cadou.

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La suite du procès-verbal laisse d'ailleurs penser que les autorités locales étaient plutôt embarrassées de la présence des deux cavaliers. Le sieur de STANGMARTIN et le cavalier MARIANANALLA rapportent, en effet, que s'étant "transportés pour nous saisir des deux dits quidam" et ayant constaté qu'ils n'étaient plus là, ils avaient interpellé le recteur ( alors Messire Vincent PIERRE) qui reconnaissait les avoir renvoyés "à quoy obligés de lui dire qu'il avait grand tort "d'avoir fait évader gents accusés de crime de lèse-majesté". Le recteur informé que son comportement serait noté au procès-verbal déclare ne s'en pas soucier et refuse de signer. On peut s'étonner du comportement de Vincent PIERRE, mais il faut le replacer dans le contexte de l'époque: la population, en général, ne collabore pas avec la maréchaussée. En tout cas, le dossier ne comporte pas mention de poursuites contre le recteur pour entrave à l'action de la justice; il ne sera même pas entendu comme témoin.

GOUESNAC’H Saint Cadou le placître

Ce procès-verbal confirme, d'autre part, qu'aux siècles passés, le pardon avait lieu le quatrième dimanche de septembre, et non le premier comme la tradition s'en est établie depuis. Notons également que le local qui jouxte la chapelle, composé de deux grandes .pièces superposées avec cheminée dans chacune, et qui fait aujourd'hui l'étonnement des visiteurs, n'avait pas d'affectation plus précise que celle qui lui est donnée de nos jours: "appartement attaché à la dite chapelle servant de sacristie avec chambre au-dessus". Du moins, savons-nous maintenant que ce local a servi, au moins une nuit de l'année 1728, de prison; disons plut~t de chambre de sûreté.

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2 Sur la déposition de Laurent TANIOU (27 septembre 1728) Dès le lendemain, 27 septembre, le cavalier MARIANALLA se rend à KERGARADEC, en Gouesnac 'h, où résidait Laurent TAINIOU "capitaine de la paroisse", qu'il trouve au lit "malade de la fièvre" et auquel il fait sommation de : "remettre les pièces de fausse monnaie dont il avait dessaisi "les dits particuliers, de donner leurs noms, résidences et "professions". Laurent TANIOU remet alors trois pièces façonnées comme des écus de trois livres. Invité à signer le dépôt des pièces et ses déclarations, il ne refusa pas expressément mais "déclare ne pouvoir le faire attendu qu'il tremblait de fièvre". Ce personnage est mentionné dans la procédure à plusieurs reprises, sous des appellations diverses: "Capitaine de la paroisse" (présente sommation), "capitaine du détachement de la paroisse" (P.V. du 26 sept.) "Capitaine garde-côtes" (assignation à témoins des 22 et 23 févr.1729), "capitaine du guet" (déposition de témoins des 27 et 28 déc. 1729). C'est lui qui est chargé d'assurer l'ordre; il est, en fait, le chef de la milice locale. Le titre de capitaine garde-côtes semble le plus exact; Gouesnac'h se trouve, en effet, dans la zone côtière des deux lieues, à l'intérieur de laquelle se recrutait la milice garde côtes. 3 - Sur le premier interrogatoire de Charles Le. Co-accusé (7 octobre l728) Charles Le G. est capturé dès le 29 septembre au cours d'une perquisition effectuée à Elliant, sa paroisse. Ses déclarations apportent quelques précisions sur le déroulement des faits; nous apprenons que les consommations, réglées avec un faux écu de trois livres (une livre valant 20 sols), ont coûté 30 sols, le cabaretier ayant rendu 30 sols de monnaie que l'accusé affirme lui avoir restitué après que la fausseté de la pièce eut été reconnue. Cet interrogatoire précise, en outre, les conditions de l'arrestation et de l'élargissement le jour du pardon. La rumeur s'étant répandue que les deux compères étaient des faux-monnayeurs, le capitaine garde-côtes et le recteur les avaient arrêtés et enfermés dans la sacristie. Ce n'est qu'après qu'une boulangère de la même paroisse d'ELLIANT eût prêté les 30 sols des consommations dues au cabaretier, qu'ils furent libérés. 4 - Sur les dépositions des témoins ( 22 et 23 février 1729,27et 28 décembre 1729). Ces .documents nous fournissent la liste complète des témoins entendus dans cette affaire; la plupart sont de Gouesnac'h. Tous, à deux exceptions près, (L. TANIOU et le cabaretier) s'expriment en langue bretonne, ce qui nécessite le recours à des interprètes qui, en général, n'appartiennent pas au personnel judiciaire, mais sont de simples particuliers; il suffit qu'ils présentent toutes garanties de compétence et de conscience et qu'ils sachent écrire (les dépositions portent leur signature). Deux de ces interprètes interviennent dans la procédure : messire Tanguy Hyacinthe BOTVAREC " Praticien" et Guillaume LE BLANC.

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L'intérêt de ces dépositions est double : - en précisant l'activité, le domicile et souvent l'Age des témoins, elles permettent de sortir de l’anonymat une dizaine d'habitants de la paroisse ; - leur contenu nous apportent, en outre, quelques détails sur le déroulement du .pardon, ce qui n'est pas sans intérêt, en raison de l'absence d'archives sur le sujet. Les témoins sont les suivants : - Jean LE BLONS, ménager, demeurant à PENFRAT et présent au lieu de KERAUTRET, Agé d'environ 50 ans , - Grégoire MERRIEN, ménager, COSFORN, environ 40 ans, - Laurent TANIOU, capitaine de la paroisse, KERGARADEC (âge non précisé), - Jacques QUILVEN, laboureur, KERDUDAL (âge non précisé), - Jacques COSQUERIC, laboureur, KERDROUALAN, âgé de 32 ans, - Paul NEDELEC, ménager, KERAIN, environ 38 ans, - Guillaume LALAISON, laboureur, KERBOLORE, environ 30 ans - Yves COTTEN, laboureur, Feunteunlouan, - François NEDELECLEC, laboureur, PENANCREACH tous de GOUESNAG 'H et : - François FLOCH, dit NAUGAT, laboureur à SAINT-ROHAN, Pluguffan, débitant occasionnel de vin , - Marie Josèphe GALIOU (ou CADIOU) , femme d'Augustin ROUET, boulanger à Elliant, environ 25 ans, -. Henri GALLES, tailleur d'habits, rue Neuve, paroisse du St-Esprit QUIMPER, environ 54 ans, tenant un débit de boissons ambulant le jour du pardon.

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a) Sur les faits, les déclarations recueillies ne sont pas toujours absolument concordantes. Cela résulte du "coefficient personnel" et, sans doute aussi, de la date tardive à laquelle les témoins sont entendus: 5 mois après pour les uns, 15 pour les autres. Jean LE BLONS donne la composition du détachement de la milice : Grégoire MERRIEN, Jacques QUILVEN, Jacques COSQUERIC et lui-même sous le commandement de Laurent TANIOU, rassemblés "pour faire le guet pendant l'assemblée du pardon" . On apprend par ce témoin, que "l'exposition" de fausse monnaie eut lieu la veille, samedi 25 septembre, et que Jacques QUILVEN fut mis en sentinelle pour garder les deux prisonniers. Et lorsque le recteur voulut les remettre en liberté, le dimanche matin, LE BLONS s'y opposa jusqu'à ce que le capitaine fût présent. Pour sa part, Grégoire MEERRIEN fait savoir qu'il s'est rendu à Saint-Cado pour faire le guet et empêcher les désordres qui arrive ordinairement au pardon et que vers minuit les forces de l'ordre arrêtèrent en l'auberge du nommé GALLES "qui débitait du vin au lieu-dit St-Gado", deux particuliers de la paroisse d'Elliant, "lesquels furent mis dans la sacristie par le dit TANIOU qui fit "Voir au déposant trois écus faux qu'il disait avoir trouvé sur "les dits particuliers". Le témoin donne quelques détails supplémentaires sur la libération des 9 heures du matin à l'initiative du recteur en présence de TANIOU "qui leur donna quelques bourrades de son fusil, que le dit sieur "recteur et le dit TANIOU dirent à haute voix devant une quantité de "personnes qui étaient venues au pardon de St-Gado, qu'il fallait "faire grâce aux dits deux particuliers". b) sur le déroulement du pardon et son aspect commercial, la procédure sort de l'ombre trois marchands forains: deux débitants de boissons occasionnels (l'un est laboureur et l'autre tailleur d'habits: et un boulanger, tous trois venant de communes proches (Quimper, Pluguffan, Elliant). Sans doute étaient-ils plus nombreux, et on peut penser que les débitants de Gouesnac'h y dressaient également boutique, pour tirer quelque profit de la venue de nombreux pèlerins et curieux dont les plus éloignés couchaient sur place sous des tentes (ou même à la belle étoile), installées sur une distance de deux kilomètres de Lesquidic à Saint-Cadou. La tradition orale en a d'ailleurs conservé le souvenir. Le témoignage de François FLOCH (dit NAUGAT) révèle que l'activité ne cessait pas à la tombée du jour; les deux accusés étaient, en effet, venus lui demander, vers les 10/11 heures du soir une bouteille de vin, ce qu'il leur refusa étant donné l'heure tardive, mais sur leur insistance, il la leur donna avec de la chandelle pour aller consommer sur l'herbe. Au moment de régler la note, l'aubergiste s'aperçut que la pièce présentée était fausse et demanda à ses clients "du bon argent" l'un d'eux remit alors une pièce de 24 sols. Hervé GALLES, qui s'exprime en français, déclare s'être rendu à Saint-Cado dès le vendredi 24 septembre avec deux barriques de vin. Les à eux accusés sont venus consommer chez lui le samedi 25 ; l’un d’eux

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"lui donne une pièce de 3 livres qui lui parut être fausse ce qui l'engagea à faire voir la pièce à plusieurs personnes qui "buvaient en son auberge lesquels l'ayant assuré qu'elle était bonne, il la garda et donna aux dits deux particuliers de retour 30 sols en monnaie " . Mais la rumeur s'étant ensuite répandue que deux hommes avaient fait quelque dépense dans une autre auberge, qu'ils avaient essayé de régler en fausse monnaie, et s'apercevant alors que l'écu qui lui avait, été remis était faux, il se rendit a l'auberge NAUGAT, en ramena les deux hommes et, pour se payer, prit à l'un deux vestes, "l'une de "toile, l'autre d'étoffe sur ce qu'ils n'avaient pas de bon argent à "lui donner", et remit le faux écu à Laurent TANIOU. La femme du boulanger d'Elliant, venue vendre au pardon du pain et de la pâtisserie, déclare que deux femmes inconnues d'elle étaient venues lui demander en prêt la somme de 30 sols pour retirer les hardes des deux hommes arrêtés par le guet. Elle refusa, mais les deux autres lui ayant dit qu'elles connaissaient son mari, étant aussi du bourg d'Elliant, elle finit par accepter de leur prêter la somme demandée. 5 –Sur les interrogatoires des deux accusés (7 octobre 1728, 19 mai, 8 juillet, 28 novembre 1729 et 14 janvier 1730 . Les accusés ont été entendus à plusieurs reprises, notamment après leur arrestation (dès le 7 octobre 1728 pour Ch. Le G., et seulement le 19 mai 1729 pour Sébastien C.), ensuite après que le Tribunal se soit reconnu compétent et, une dernière fois, en fin d'instruction (interrogatoire "fait sur la sellette»). Ces divers documents donnent quelques informations sur leur aspect physiques et leur tenue vestimentaire. Ainsi Ch. Le G. est présenté comme un : "homme de haute stature, cheveux noirs crépus, barbe grise, vêtu de trois camisoles, l'une brune, l'autre blanche, les deux de aine, la troisième de toile, guêtres de toile, sabots aux "chapeau sous le bras". Lors de l'interrogatoire du 14 janvier 1730, il porte deux camisoles, l'une de laine blanche, l'autre bleue garnie de petits boutons d'étain, culotte de bèrlingue, bas de laine ...

Règne de Louis XV Ecu « vertugadin » de 1718, au buste enfantin à

droite. Au revers écu royal couronné

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Il en sera de même de l’attestation de moralité du clergé d’Elliant, certifiant que « les nommés Sébastien C. et Ch. Le G. ont satisfait au devoir pascal … et n’ont jamais passé, du moins de notre connaissance, pour voleurs ni fripons ».

Règne de Louis XV Écu dit ¨de Navarre¨ de 1718, au buste drapé

Et lauré, tourné à droite. Au revers écu de France Navarre écartelé.

8 –Sur la sentence (14 janvier 1730) L'affaire est instruite devant le Présidial de Quimper. Rappelons, à cette occasion, que la nécessité d'une réforme judiciaire ne date pas d'aujourd'hui; déjà, sous l'Ancien Régime, les plaideurs se plaignaient des lenteurs de la justice et de sa chèreté. Pour remédier en partie à ces inconvénients, un édit royal de 1552 avait institué les sièges présidiaux. La sentence définitive avait été précédée, le 6 juillet 1729, d'une autre sentence, aux termes de laquelle le Présidial s'était reconnu compétent. Ces documents nous donnent des indications précises sur le personnel judiciaire du moment. Nous y trouvons notamment la signature de Michel René BOBET, lieutenant civil et criminel au présidial, qui résidait au manoir de LANHURON en GOUESNAC'H. Le jugement est rendu sur son rapport. Les deux accusés sont reconnus coupables; le jugement déclare Sébastien C. "convaincu d'avoir exposé" de la fausse monnaie, et Charles Le G. "d'avoir été participant à la dite exposition". Il n'a donc pas été établi que ces deux individus avaient fabriqué de la fausse monnaie; aucun matériel (morceaux d’étain ou de plomb "moules, creusets, "lismes doulces",...) n'avait été trouvé lors des perquisitions : pour réparation de quoy avons condamné le dit C. de servir comme forçat sur les galères du Roy pendant cinq ans et avons banny ledit Le G. hors du ressort du siège présidial aussy pendant cinq ans, condamné ledit C. en cent livres d'amende au Roy, les dits C. et Le G. aux dépens du procès". Ces peines paraissent relativement légères; certes, cinq ans de galères comptent dans la vie d'un homme; le principal accusé échappait à la peine capitale. Sous l'Ancien Régime, en effet, la fabrication de fausse monnaie, qui portait atteinte à un privilège royal, constituait

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Un crime de lèse majesté et était sévèrement réprimée. Selon l'ancienne coutume de Bretagne, les faux-monnayeurs étaient condamnés à être bouillis, puis, ensuite, pendus. Si la peine de la marmite semble, à l'époque des faits, abandonnée, la difficulté de trouver le récipient adéquat en est peut-être la cause. Dans d'autres affaires de fausse monnaie jugées devant le Présidial de Quimper, les faux-monnayeurs sont condamnés "à être pendus et, étranglés".

Règne de Louis XV Écu dit « au bandeau » de 1767, émis pour Six livres, à la tête tournée à gauche,

Ceinte d’un bandeau. Au revers, écu royal ovale, Couronné, entre deux branches de laurier.

Les informations contenues dans ce dossier apportent à la connaissance de l'histoire de la paroisse de Gouesnac'h une contribution trop modeste pour que nous puissions en tirer une conclusion générale; celle-ci nous sera inspirée par le procès-verbal d'expertise des orfèvres : les faux écus du pardon étaient très mal imités. Cela ne fait que confirmer l'opinion générale selon laquelle les faux-monnayeurs bretons de l'époque étaient très malhabiles et mettaient en circulation des imitations très grossières.

Jean VARENNE

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