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Extrait de Charles-Ferdinand Ramuz et Matthieu Berthod de la Bande dessinée "l'Homme perdu dans le brouillard"

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extrait

L’Homme perdu dans Le brouiLLard

C.F. ramuz - m. berthod

LES I M P R E S S I O N S N O U V E L L E S

Cet ouvrage a été publié avec les soutiens du Service de la culture du canton du Valais, de la fondation Ernst Göhner à Zoug et de la Fondation C.F. Ramuz à Pully.

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Connu surtout comme romancier, C. F. Ramuz (1878-1947) a également été, depuis ses débuts, un nouvelliste fécond et hors pair. En partie motivée par des raisons matérielles, dans la mesure où les textes publiés dans la presse et dans les revues garantissent à l’écrivain des revenus réguliers, cette production est aussi un véritable laboratoire esthétique, au sein duquel s’élabore une poétique originale et audacieuse. Des volumes emblématiques rythment ce parcours en contrepoint des grands moments de l’écriture romanesque de l’auteur : en 1910, Nouvelles et morceaux ; en 1921, Salutation paysanne ; en 1944, Nouvelles.

La fiction brève permet de condenser, sur quelques pages, des situations drama-tiques, en se concentrant sur les éléments essentiels. Elle offre aussi la possibilité de tester des manières de raconter, par l’adoption de perspectives différentes, ou par la quête d’un équilibre entre le récit assumé par un narrateur omniscient et celui, confié à des personnages, reposant

sur leur point de vue restreint et marqué par l’oralité. Le texte court est enfin le lieu privilégié d’une réflexion sur la relation entre la description et la narration, entre le « tableau » et l’intrigue : d’où le recours à la double appellation de « nouvelles » et de « morceaux », par laquelle Ramuz indique explicitement les deux directions que prend sa pratique du genre.

Les nouvelles que Matthieu Berthod a adaptées appartiennent à la première période de la création ramuzienne, celle qui aboutit en 1910 à la publication du recueil Nouvelles et morceaux, dans l’édition originale duquel figurent « L’homme perdu dans le brouillard » et « La grande Alice », rédigés au printemps de cette même année, ainsi que « La paix du ciel », datant de 1908. « Le tout-vieux », paru en revue en 1905, est republié en 1908 à la suite de Jean-Luc persécuté, mais Ramuz l’insérera en 1940 en tête de la reprise des Nouvelles et morceaux dans ses Œuvres complètes, dont la version est celle que Matthieu Berthod a utilisée comme référence.

Toutes ces histoires s’inscrivent dans un microcosme montagnard et campagnard suisse romand que Ramuz explore, au fil

avant-propos

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de sa jeunesse, avec l’application d’un ethno-graphe attentif aux personnages typiques – bergers, faucheurs, boisseliers –, aux activités rurales, aux traditions et aux légendes. Mais ce monde clos sur lui-même, en contact étroit avec la nature et soumis à ses rythmes, n’est pas pour l’écrivain l’objet d’une curiosité de folk-loriste, ou le support d’une nostalgie empreinte de passéisme. Demeuré en marge du progrès, isolé, centré sur une économie de subsistance, régi par une organisation sociale ancestrale, cet espace est propice à la mise en scène des attentes, des passions et des questionnements élé-mentaires, qui peuvent s’y exprimer sans fard, sans écrans et sans médiations. La peur, l’élan amoureux, la mort, le rap-port aux forces obscures se manifestent dans ce contexte avec une intensité quasi instinctive, dans l’immédiateté des sen-timents non réprimés par l’éducation ou par les convenances. Ramuz flirte tantôt avec le fantastique, comme dans « Le tout-vieux » ; tantôt, il passe le seuil du merveilleux, comme il le fait dans la rêverie du paradis possible que dessine « La paix du ciel ». Ici, il cède la parole à « La grande Alice », la « putain de vil-lage » (ainsi la nomme-t-il dans une de ses

lettres) qu’il se garde bien de juger selon les normes de la morale courante ; là, c’est au tour d’un vieillard qui a jadis frôlé la mort en s’égarant sur la montagne de restituer son souvenir (« L’homme perdu dans le brouillard »).

Les émotions qui traversent ces récits, les points de vue qu’ils développent, les atmosphères qu’ils dégagent tendent au lecteur du début du XXIe siècle un miroir inattendu, dans lequel il se recon-naît. Cette sensation de ressemblance a sans doute guidé le travail de Matthieu Berthod, qui a cherché à la capter par son dessin, et qui y est parvenu avec bonheur, réalisant ainsi un livre qui, du côté de chez Ramuz, constitue une première à saluer.

Daniel Maggetti Directeur du Centre de recherches

sur les lettres romandes de l’Université de Lausanne

L’Homme perdu dans Le brouiLLard

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DIFFUSION/DISTRIBUTION : HARMONIA MUNDIEAN : 9782874491115ISBN : 978-2-87449-111-580 PAGES - 15 €

OUVRAGE PARU EN AVRIL 2011

Et brusquement, j’entrai dans le brouillard. J’allais à sa rencontre, et, lui, il venait à la mienne ; alors, derrière moi, le soleil s’éteignit ; et il me sembla que toute la terre avait été tout d’un coup recouverte, alors qu’il n’y avait que moi qui avais été recouvert.

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