evaluation de l'éclairage naturel par simulations informatiques

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Les Dossiers du CSTC 2011/3.18 | 1 CT Architectes L 1 INTRODUCTION Pour des bâtiments tertiaires typiques, il est possible de réduire la consommation énergé- tique due à l’éclairage d’environ 40 % grâce à une conception intelligente de l’enveloppe du bâtiment et à un système de gestion de l’éclai- rage artificiel. Ce dernier permet un contrôle du flux lumineux en fonction de l’apport d’éclairage naturel. Pour estimer le confort visuel et/ou le poten- tiel d’économie d’énergie, il importe de (pré) déterminer correctement la pénétration de l’éclairage naturel à l’intérieur d’un bâtiment. Les simulations informatiques offrent cette possibilité d’évaluation dès la phase concep- tion. 2 APPORT D’ÉCLAIRAGE NATUREL DANS LES BÂTIMENTS L’apport d’éclairage naturel à l’intérieur d’un local est constitué d’une composante directe et d’une composante indirecte. La composante directe est la lumière qui atteint un point d’ob- servation en ligne droite depuis la source de lumière. La composante indirecte est l’apport de lumière par réflexion ou transmission sur les différentes surfaces présentes dans la pièce. Dans le cas d’une étude d’éclairage naturel, la composante directe résulte de l’exposition au rayonnement lumineux de la voûte céleste (skylight) et du soleil (sunlight). La compo- sante indirecte résulte de multiples interac- tions entre les rayons de lumière – réfléchis ou transmis sans direction préférentielle (ré- flexions diffuses) – et l’ensemble des surfaces d’un environnement. Un grand nombre de facteurs influencent l’ap- port d’éclairage naturel dans un bâtiment : la localisation géographique le climat et les conditions météorologiques (distribution et intensité des luminances du ciel) l’environnement (effets de masque et ré- flexions sur des bâtiments, végétation avoi- sinante, …) La lumière naturelle est primordiale pour assurer le confort visuel et le bien-être. De nombreuses études démontrent que nous avons un besoin physiologique et psychologique de lumière naturelle. L’éclairage naturel permet également de réaliser d’importantes économies sur l’éclairage artificiel. Evaluation de l’éclairage naturel par simulations informatiques B. Deroisy, ir., chef de projet, laboratoire ‘Lumière et Bâtiment’, CSTC A. Deneyer, ir., chef du laboratoire ‘Lumière et Bâtiment’, CSTC la géométrie du bâtiment la forme, la surface et la disposition des ouvertures l’orientation des ouvertures le type de remplissage des ouvertures (vi- trages ou autres matériaux translucides) les propriétés des surfaces (coefficient de réflexion des parois, sols, plafonds, …) les protections solaires et leur système de gestion la maintenance du bâtiment, … 3 MÉTHODOLOGIES DE PRÉDÉTERMI- NATION 3.1 MÉTHODES SIMPLIFIÉES Avant la large diffusion des outils de calculs informatiques, seules les méthodes simplifiées étaient utilisées pour prédéterminer l’éclairage naturel. Ces méthodes ne permettent d’esti- mer l’éclairement intérieur que sous un type de ciel bien précis. Pour des raisons évidentes de simplification, ce sont généralement des va- leurs ponctuelles ou des valeurs moyennes de facteur de lumière du jour qui sont calculées. Des coefficients de correction sont parfois uti- lisés pour tenir compte de certains paramètres tels que la transparence et l’encrassement du vitrage ou l’influence des obstructions exté- rieures. Il est à noter qu’une approche basée sur une grandeur relative telle que le facteur de lu- mière du jour n’évalue l’apport d’éclairage naturel que sous une distribution théorique des luminances du ciel conforme au modèle du ciel couvert. Par conséquent, il ne faut pas perdre de vue que lorsque l’on compare des exigences exprimées par un facteur de lumière du jour, ces dernières sont élaborées pour une région connaissant des conditions climatiques bien particulières. 3.2 MODÈLES RÉDUITS L’étude de l’apport d’éclairage naturel sur modèles réduits nécessite des infrastructures spécifiques (ciels et soleils artificiels) pour simuler l’éclairage naturel. Le laboratoire ‘Lumière et Bâtiment’ du CSTC est équipé de l’appareillage nécessaire pour les mesures et les études sur des modèles réduits. Cette méthode permet de visualiser directe- ment la distribution de lumière dans un espace, ce qui est très utile dans le cadre d’une ap- proche qualitative de la conception et de l’éva- luation comparative de différentes options ou interventions. Des mesures sur modèles réduits sont égale- ment pertinentes dans le cas de configurations complexes, par exemple lors de l’utilisation de matériaux ou de surfaces dont les pro- priétés sont insuffisamment précises ou aty- piques. 3.3 MODÈLES NUMÉRIQUES Les logiciels de simulation informatique de l’éclairage ont connu et connaissent encore une évolution très rapide. Ces outils de modé- lisation numérique permettent de réaliser une géométrie en 3D des espaces et des objets, d’introduire différentes sources et de calculer ensuite la distribution de la lumière. Les logi- ciels les plus performants offrent également la possibilité de rendre des impressions visuelles photo réalistes. Grâce à l’intégration du calcul de l’éclairage artificiel et naturel, il est pos- sible de réaliser, dès la phase de conception FACTEUR DE LUMIÈRE DU JOUR Le facteur de lumière du jour est une grandeur qui exprime la quantité de lumière relative en un point pour une condition de ciel couvert normalisé. Plus précisément, le facteur de lumière du jour est le rapport entre l’éclairement naturel reçu en un point intérieur et l’éclairement reçu au même moment sur une surface horizontale extérieure en site parfai- tement dégagé et sous un ciel couvert normalisé.

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Les Dossiers du CSTC 2011/3.18 | 1

CT

Architectes

L1 INTRODUCTION

Pour des bâtiments tertiaires typiques, il est possible de réduire la consommation énergé-tique due à l’éclairage d’environ 40 % grâce à une conception intelligente de l’enveloppe du bâtiment et à un système de gestion de l’éclai-rage artificiel. Ce dernier permet un contrôle du flux lumineux en fonction de l’apport d’éclairage naturel.

Pour estimer le confort visuel et/ou le poten-tiel d’économie d’énergie, il importe de (pré)déterminer correctement la pénétration de l’éclairage naturel à l’intérieur d’un bâtiment. Les simulations informatiques offrent cette possibilité d’évaluation dès la phase concep-tion.

2 APPORT D’ÉCLAIRAGE NATUREL DANS LES BÂTIMENTS

L’apport d’éclairage naturel à l’intérieur d’un local est constitué d’une composante directe et d’une composante indirecte. La composante directe est la lumière qui atteint un point d’ob-servation en ligne droite depuis la source de lumière. La composante indirecte est l’apport de lumière par réflexion ou transmission sur les différentes surfaces présentes dans la pièce. Dans le cas d’une étude d’éclairage naturel, la composante directe résulte de l’exposition au rayonnement lumineux de la voûte céleste (skylight) et du soleil (sunlight). La compo-sante indirecte résulte de multiples interac-tions entre les rayons de lumière – réfléchis ou transmis sans direction préférentielle (ré-flexions diffuses) – et l’ensemble des surfaces d’un environnement.

Un grand nombre de facteurs influencent l’ap-port d’éclairage naturel dans un bâtiment :• la localisation géographique• le climat et les conditions météorologiques

(distribution et intensité des luminances du ciel)

• l’environnement (effets de masque et ré-flexions sur des bâtiments, végétation avoi-sinante, …)

La lumière naturelle est primordiale pour assurer le confort visuel et le bien-être. De nombreuses études démontrent que nous avons un besoin physiologique et psychologique de lumière naturelle. L’éclairage naturel permet également de réaliser d’importantes économies sur l’éclairage artificiel.

Evaluation de l’éclairage naturel par simulations informatiques

� B. Deroisy, ir., chef de projet, laboratoire ‘Lumière et Bâtiment’, CSTC A. Deneyer, ir., chef du laboratoire ‘Lumière et Bâtiment’, CSTC

• la géométrie du bâtiment• la forme, la surface et la disposition des

ouvertures• l’orientation des ouvertures• le type de remplissage des ouvertures (vi-

trages ou autres matériaux translucides)• les propriétés des surfaces (coefficient de

réflexion des parois, sols, plafonds, …)• les protections solaires et leur système de

gestion• la maintenance du bâtiment, …

3 MÉTHODOLOGIES DE PRÉDÉTERMI-NATION

3.1 Méthodes siMplifiées

Avant la large diffusion des outils de calculs informatiques, seules les méthodes simplifiées étaient utilisées pour prédéterminer l’éclairage naturel. Ces méthodes ne permettent d’esti-mer l’éclairement intérieur que sous un type de ciel bien précis. Pour des raisons évidentes de simplification, ce sont généralement des va-leurs ponctuelles ou des valeurs moyennes de facteur de lumière du jour qui sont calculées. Des coefficients de correction sont parfois uti-lisés pour tenir compte de certains paramètres tels que la transparence et l’encrassement du vitrage ou l’influence des obstructions exté-rieures.

Il est à noter qu’une approche basée sur une grandeur relative telle que le facteur de lu-mière du jour n’évalue l’apport d’éclairage naturel que sous une distribution théorique des luminances du ciel conforme au modèle du ciel couvert. Par conséquent, il ne faut pas perdre de vue que lorsque l’on compare des exigences exprimées par un facteur de lumière du jour,

ces dernières sont élaborées pour une région connaissant des conditions climatiques bien particulières.

3.2 Modèles réduits

L’étude de l’apport d’éclairage naturel sur modèles réduits nécessite des infrastructures spécifiques (ciels et soleils artificiels) pour simuler l’éclairage naturel. Le laboratoire ‘Lumière et Bâtiment’ du CSTC est équipé de l’appareillage nécessaire pour les mesures et les études sur des modèles réduits.

Cette méthode permet de visualiser directe-ment la distribution de lumière dans un espace, ce qui est très utile dans le cadre d’une ap-proche qualitative de la conception et de l’éva-luation comparative de différentes options ou interventions.

Des mesures sur modèles réduits sont égale-ment pertinentes dans le cas de configurations complexes, par exemple lors de l’utilisation de matériaux ou de surfaces dont les pro-priétés sont insuffisamment précises ou aty-piques.

3.3 Modèles nuMériques

Les logiciels de simulation informatique de l’éclairage ont connu et connaissent encore une évolution très rapide. Ces outils de modé-lisation numérique permettent de réaliser une géométrie en 3D des espaces et des objets, d’introduire différentes sources et de calculer ensuite la distribution de la lumière. Les logi-ciels les plus performants offrent également la possibilité de rendre des impressions visuelles photo réalistes. Grâce à l’intégration du calcul de l’éclairage artificiel et naturel, il est pos-sible de réaliser, dès la phase de conception

Facteur de lumière du jour

Le facteur de lumière du jour est une grandeur qui exprime la quantité de lumière relative en un point pour une condition de ciel couvert normalisé. Plus précisément, le facteur de lumière du jour est le rapport entre l’éclairement naturel reçu en un point intérieur et l’éclairement reçu au même moment sur une surface horizontale extérieure en site parfai-tement dégagé et sous un ciel couvert normalisé.

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d’un projet, une estimation assez précise du potentiel d’économie d’énergie pour différents systèmes de gestion de l’éclairage artificiel.

La qualité d’une modélisation numérique dé-pend de différents éléments :• la modélisation du ciel• la caractérisation photométrique des maté-

riaux• la méthode de calcul utilisée• la maîtrise du logiciel par l’utilisateur.

3.3.1 Modélisation du ciel

Vu l’extrême variabilité de la brillance (lumi-nance) du ciel et du soleil en fonction des conditions météorologiques locales, quinze ciels normalisés ont été définis. Pour cha-cun d’eux, la Commission internationale de l’éclairage (CIE) a caractérisé la répartition des luminances sur la voûte céleste.

Les quatre types de ciel le plus couramment utilisés pour des études d’éclairage naturel sont : • le ciel uniforme • le ciel couvert • le ciel clair (sans soleil) • le ciel clair avec soleil.

Le ciel couvert est utilisé pour déterminer le facteur de lumière du jour et représente, en réa-lité, des conditions de ciel entièrement voilé par des nuages élevés.

Les différents logiciels permettent au mini-mum de modéliser un ciel couvert CIE. Cer-

tains outils informatiques peuvent également prendre en compte des ciels clairs avec ou sans soleil, mais seuls les outils les plus avancés offrent la possibilité de définir une distribution quelconque des luminances d’un ciel.

La méthode de calcul utilisée détermine la manière dont le ciel est modélisé (comme une vaste source de lumière en forme de dôme). La distribution des luminances est décrite soit par une relation mathématique en fonction de l’altitude et de l’angle d’orientation de chaque point, soit par un grand nombre de surfaces élémentaires ou ‘disques’ formant des sources de lumière à luminance constante. La modé-lisation du ciel ayant un impact considérable sur les résultats des simulations, il est impor-tant de bien comprendre et de bien contrôler ce paramètre.

3.3.2 caractérisation photoMétrique des Matériaux

La description précise des propriétés photomé-triques des surfaces est essentielle pour pou-voir déterminer correctement la distribution de la lumière dans un espace.

La plupart des revêtements utilisés dans la construction se comportent comme des sur-faces qui peuvent être considérées comme parfaitement diffuses. De telles surfaces réflé-chissent la lumière dans toutes les directions et l’intensité du rayonnement réfléchi varie suivant le cosinus de l’angle sortant mesuré par rapport à la direction normale (loi de Lambert). Pour ces surfaces, la distribution du

rayonnement réfléchi est identique quelle que soit l’incidence du rayonnement.

Les propriétés photométriques dépendent non seulement du matériau, mais aussi de la texture de sa surface. La rugosité d’une surface peut influencer fortement la distribution des rayons réfléchis. Il est bien connu qu’une pierre fine-ment polie présente un aspect et une couleur différents qu’une même pierre dont la surface est brute.

La plupart des logiciels considèrent toutes les surfaces du modèle comme parfaitement diffuses pour calculer la distribution de la lumière. Certains intègrent toutefois la possi-bilité de définir la réflexion spéculaire de cer-tains matériaux, ce qui permet, par exemple, de prendre en compte les effets de réflexion sur des surfaces très spéculaires (métaux).

3.3.3 algorithMes de calcul pour la siMulation inforMatique

En théorie, si on pouvait isoler un seul rayon de lumière, il serait parfaitement possible de ‘suivre’ son trajet depuis la source jusqu’à son atténuation totale due aux réflexions, trans-missions et absorptions sur les différentes sur-faces d’un environnement, et de simuler ainsi les phénomènes physiques en jeu. Cependant, la multitude de rayons lumineux rendent une parfaite simulation impossible à réaliser en pratique, car le temps et la puissance de calcul nécessaires pour évaluer les trajets individuels de chaque photon sont trop importants.

C'est la raison pour laquelle des méthodes se basant sur des algorithmes de calcul spé-cifiques ont été développées afin d’obtenir des résultats dans des délais raisonnables. Les algorithmes les plus répandus utilisent la technique de radiosité ou du lancer de rayon. D’autres se basent sur la split flux formula. Il existe également des algorithmes combinés comme le photon mapping, par exemple.

3.3.3.1 Split flux formula

Le premier algorithme, split flux formula, se base sur une méthode de calcul établie par le BRE (Building Research Establishment) initialement pour un calcul manuel. Cette méthode part du principe que l’éclairement global en un point défini résulte de trois composantes distinctes (cf. figure 3) : la composante directe (sky component ou SC), la composante des réflexions sur les surfaces extérieures (externally reflected component ou ERC) et la composante des réflexions sur les surfaces intérieures (internally reflected component ou IRC). Chacune de ces composantes est calculée séparément. Elles sont ensuite additionnées pour obtenir l’éclairement global pour chaque point identifié.

Sp

ecu

lar

Fig. 1 Réflexion parfaitement spéculaire. Fig. 2 Réflexion parfaitement diffuse (loi de Lam-bert).

Fig. 3 Composantes de la méthode split flux.

ERC

IRC

SC

IRC

Internally reflected component

Externally reflected component

Sky component

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La composante des réflexions sur les surfaces intérieures est déterminée sur la base d’une équation prenant en compte le coefficient moyen de réflexion des surfaces intérieures, la surface totale de vitrage et un coefficient de correction pour les obstructions extérieures. Vu ces approximations, les logiciels utilisant cette méthode de calcul surestiment ou sous-estiment (selon le cas) l’apport d’éclairage naturel. Il est d’ailleurs conseillé de n’utiliser cette méthode que pour des configurations d’espaces pour les-quelles les ouvertures sont parallèles aux sur-faces des parois.

3.3.3.2 Radiosité ou radiosity

Les algorithmes de radiosité se basent sur une méthode de simulation par éléments finis développée à l’origine pour l’étude des transferts thermiques et fondée sur la loi de la conservation de l’énergie. Cette méthode implique la discrétisation par un maillage de toutes les surfaces d’une scène en surfaces élémentaires ou ‘facettes’. Le bilan des flux de rayonnement émis et reçus depuis toutes les surfaces visibles dans l’environnement est établi pour chaque surface élémentaire. L’éclairement de chaque point du maillage est déterminé en additionnant les flux lumi-neux reçus depuis toutes les surfaces envi-ronnantes et la lumière émise par la surface élémentaire (cf. figure 4). Le pas ou la finesse du maillage est évidemment un facteur qui influence considérablement la précision des simulations. Les logiciels les plus avancés intègrent un module qui affine automatique-ment le maillage autour des discontinuités pour optimiser les résultats.

Dans la pratique, cette méthode de simulation est principalement utilisée par les logiciels développés pour la conception et le calcul de l’éclairage artificiel (Dialux, Relux, p. ex.). Ces applications informatiques intègrent,

dans leurs versions récentes, la possibilité d’évaluer l’apport d’éclairage naturel, indé-pendamment ou en combinaison avec un système d’éclairage artificiel. Mais, vu les contraintes de cette méthode pour l’étude de l’éclairage naturel (limitation à des surfaces parfaitement diffuses et modélisation précise du ciel plus complexe), ces outils ne devraient être utilisés que pour des configurations rela-tivement simples.

3.3.3.3 Lancer de rayon ou raytracing

Les algorithmes de lancer de rayon se basent sur une méthode de calcul des trajectoires d’un nombre important de rayons lumineux dans une scène. Chaque rayon interagit par ré-flexions, transmissions ou réfractions avec les différentes surfaces du modèle (cf. figure 5). Deux approches sont possibles : • le rayon est suivi depuis la source de lumière

jusqu’à ce qu’il atteigne le point d’observa-

tion ou qu’il soit atténué (forward raytra-cing ou lancer de rayon direct) (cf. figure 6)

• le rayon de lumière est tracé depuis le point d’observation et suivi jusqu’à ce qu’il atteigne une source de lumière (backward raytracing ou lancer de rayon inverse) (cf. figure 7).

Le lancer de rayon inverse offre l’avantage de réduire le nombre de rayons à tracer puisque seuls ceux qui atteignent le point d’observa-tion sont calculés. Par conséquent, un nombre limité des rayons de lumière réfléchis de ma-nière diffuse entre les surfaces du modèle est calculé. Ainsi, en fonction des paramétrages utilisés, ces interréflexions diffuses (compo-santes indirectes) ne sont pas toujours évaluées avec autant de précision.

Fig. 6 Principe de la méthode du lancer de rayon direct (forward raytracing).

Fig. 7 Principe de la méthode du lancer de rayon inverse (backward raytracing).

Fig. 4 Principe de l’algorithme de radiosité.

Fig. 5 Principe de la méthode du lancer de rayon.

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Cette méthode est moins performante lorsque des sources lumineuses fortement masquées sont utilisées (puits de lumière étroit, p. ex.). Il est toutefois possible de modéliser des surfaces ayant des modèles de réflexion ou de transmis-sion spéculaire, semi-spéculaire ou diffuse ainsi que des effets de réfraction, à condition qu’une expression analytique permette de décrire ces propriétés. Contrairement à la méthode de radiosité, cette technique de simulation ne re-quiert pas la réalisation d’un maillage de divi-sion pour l’ensemble des surfaces de la scène.

A l’origine, les méthodes de simulation par lancer de rayon ont été développées pour la création d’images de synthèse. Si l’interface du logiciel le permet, cette technique autorise des simulations pour des configurations géo-métriques complexes incluant des composants modélisés avec beaucoup de détails. La com-plexité des paramétrages et le temps de calcul relativement long sont les principaux désavan-tages de la méthode du lancer de rayon.

3.3.3.4 Photon mapping

Les développements les plus récents en matière

de logiciels informatiques tentent d’atténuer les désavantages de chaque méthode de simulation en utilisant des algorithmes combinés. Les algo-rithmes utilisant la technique du photon map-ping sont des méthodes de simulation optimi-sées qui réalisent le calcul en deux phases. Un lancer de rayon direct combiné à une structure de stockage des données (photon map) est uti-lisé lors de la première étape. La seconde étape consiste en un lancer de rayon inverse.

Un photon map est comme une cartographie mémorisant l’apport de lumière de premier ordre reçu par toutes les surfaces d’un espace et sert à affiner la prise en compte des multiples interréflexions de lumière dans une scène lors de la seconde étape du calcul.

Cette méthode, en fonction des paramétrages utilisés ainsi que du type configuration, donne généralement les résultats les plus satisfaisants. Elle permet également de calculer et de visuali-ser des effets optiques complexes tels que la ré-fraction par des surfaces courbes ou la diffusion à travers des matériaux translucides minces.

Le photon mapping, comme d’autres méthodes de simulations combinées, est un moyen d’éva-

luer l’éclairage naturel dans un espace avec un bon degré de précision et dans un temps de calcul raisonnable.

3.3.4 Maîtrise du logiciel

Pour chaque logiciel (cf. tableau 2, p. 6), il convient de maîtriser l’interface et les données d’entrée afin d’obtenir des résultats fiables et de pouvoir les interpréter. Dans le cas de la modélisation géométrique, des interfaces graphiques permettent généralement de créer des modèles directement dans le logiciel. Il est aussi possible d’importer et de convertir des modèles réalisés à partir de logiciels 3D spécialisés tels qu’AutoCAD, SketchUp, Rhino, …

Radiance est le seul programme dans lequel les données sont entrées sous un format de fi-chier texte, ce qui permet une grande flexibilité mais rend sa manipulation assez complexe. Il n’importe pas seulement de modéliser rigou-reusement la géométrie du modèle, il faut aussi assigner précisément les propriétés des surfaces et choisir les paramétrages de calcul. Certains permettent d’adapter l’algorithme de calcul utilisé pour la simulation en fonction des confi-gurations à étudier. L’expérience de l’utilisateur est un atout pour bien choisir ces paramétrages.

4 ETUDE CODA-LIGHT

Dans le cadre du projet de recherche CODA-Light (energy consumption of COntrol systems and Daylight Access in LIGHTing installations) financé par le SPF Economie, le CSTC a réalisé une étude détaillée des possibilités de simulation numérique de l’éclairage naturel. Différentes configurations ont été testées, notamment pour des bureaux types. Les résultats des simulations effectuées pour quelques configurations avec ouvertures verticales sont donnés à titre d’exemple (cf. figures 12 et 13, p. 5). Les dimensions intérieures du module testé s’élèvent à 3,60 m en largeur et à 6 m en longueur. La hauteur libre intérieure est de 2,80 m et l’épaisseur des parois de 0,40 m. Trois types d’ouvertures en

Fig. 9 Scène réalisée par backward raytracing (au-teur : Per H. Christensen).

Fig. 10 Scène réalisée par backward raytracing en intégrant un photon map (auteur : Per H. Christensen).

Fig. 11 Scène réalisée par photon mapping (auteur : Per H. Christensen).

Fig. 8 Principe de la méthode du photon mapping.

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façade sont présentés. Les configurations sont nommées en fonction de la surface d’ouverture par rapport à la surface intérieure de la façade.

La figure 13 représente la distribution des valeurs du facteur de lumière du jour sur une surface de calcul placée à 0,85 m du sol pour les configurations avec 37,5 %, 50 % et 62,5 % de la surface vitrée en façade. Si l’on considère un maillage carré de 20 cm, le facteur moyen de lumière du jour sur la surface de calcul est

Fig. 12 Vue extérieure de trois configurations géométriques.

Surface vitrée équivalant à 37,5 % de la façade. Surface vitrée équivalant à 50 % de la façade. Surface vitrée équivalant à 62,5 % de la façade.

Fig. 13 Visualisation des facteurs de lumière du jour intérieurs des trois configurations géométriques (type A 37,5, A 50,0 et A 62,5).

Surfaces modèles ρv (%) (*) τv (%) (**)

Plafond 70 –

Mur 50 –

Sol intérieur 20 –

Sol extérieur 20 –

Encadrement baie 50 –

Menuiseries 50 –

Vitrages 10 70

(*) Coefficient de réflexion lumineuse(**) Coefficient de transmission lumineuse

Tableau 1 Propriétés photométriques des matériaux des modèles simulés. inFormations utiles

Au niveau belge, la norme NBN L 13-002 [3] décrit une méthode de prédétermination simplifiée de l’éclairage naturel. Cette méthode s’applique aux espaces parallélépipé-diques possédant des ouvertures verticales, des vitrages transparents courants, ainsi que des coefficients de réflexion moyens pour les parois (c’est-à dire ne s’écartant pas trop des valeurs types suivantes : plafond 70 %, murs 50 % et sol 15 %). Un facteur de lumière du jour pour un point précis est déterminé à l’aide d’une série de graphiques et de facteurs de correction tenant compte notamment de l’effet des obstructions extérieures. La méthode graphique approchée de la norme NBN L 13-002 ainsi que toutes les mé-thodes simplifiées (graphiques ou numériques) offrent la possibilité de faire une première approche de l’apport de l’éclairage naturel, mais uniquement pour quelques configurations typiques. Pour une étude plus détaillée ainsi que pour l’étude de modèles plus complexes, des mesures sur modèles réduits ou des simulations numériques sont nécessaires.

respectivement de 2,35 %, 3,35 % et 4,38 % (simulations réalisées à l’aide du logiciel Ra-diance 3.7).

5 CONCLUSION

Les simulations informatiques permettent de prédéterminer assez précisément l’apport d’éclairage naturel. Dans le but d’assurer la qualité des résultats, il est avant tout nécessaire

de choisir l’outil le plus adapté, ce qui est sur-tout fonction du type et de la complexité de la configuration à étudier. La précision des résul-tats dépendra de la maîtrise, de l’expérience et du degré d’application de l’utilisateur. Une simulation performante de l’éclairage naturel se traduit notamment par une bonne connaissance de la modélisation du ciel, par la maîtrise de la modélisation photométrique des matériaux ainsi que par le choix de l’algorithme de calcul et des paramétrages. n

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Logiciel Editeur Méthode Modélisation Types de ciel Résultats

Ecotect Autodesk Split flux formulaGéométries simplesSurfaces diffusesMaillage paramétrable

Ciel couvert CIECiel uniforme CIESoleil direct

Eclairements [lux]Facteurs de lumière du jour (%)Visualisation des ombrages

Dial-Europe Estia Split flux formulaGéométries simplesSurfaces diffusesMaillage fixe

Ciel couvert CIEFacteurs de lumière du jour (%)Visualisation des ombrages

Dialux DIAL GmbHRadiosity(raytracing pour les visualisations)

Géométries complexesSurfaces diffusesMaillage paramétrable

Ciel couvert CIECiel intermédiaireCiel clair CIE (soleil direct)

Eclairements [lux]Facteurs de lumière du jour (%)Luminances (cd/m2)Visualisation des scènes

Relux ProRelux Infor-matik

Radiosity(raytracing pour les visualisations)

Géométries complexesSurfaces diffusesMaillage paramétrable

Ciel couvert CIECiel clair CIE (sans soleil direct)

Eclairements [lux]Facteurs de lumière du jour (%)Luminances (cd/m2)Visualisation des scènes

3DS max AutodeskRadiosity +raytracing

Toutes géométriesSurfaces diffuses, spécu-laires ou mixtesMaillage paramétrable

Tout type de ciel

Eclairements [lux]Facteurs de lumière du jour (%)Luminances (cd/m2)Visualisation des scènes

Velux Daylight Visualizer

VeluxRaytracing + photon mapping

Géométries complexes (via import fichiers 3D)Surfaces diffuses, spécu-laires ou mixtesMaillage non paramétrable

15 types de ciels, dontciel couvert CIE,ciel intermédiaire etciel clair CIE

Eclairements [lux]Facteurs de lumière du jour (%)Luminances (cd/m2)Visualisation des scènes

Radiance LBNLRaytracing(extension photon mapping disponible)

Toutes géométriesTout type de surfaceMaillage paramétrable

Tout type de ciel

Eclairements horizontaux, verti-caux, cylindriques, … [lux]Facteurs de lumière du jour (%)Luminances (cd/m2)Visualisation des scènes

Tableau 2 Propriétés des principaux logiciels informatiques étudiés et leurs applications.

BiBliographie

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