etude d'un corpus de contes oraux au maroc oriental (volume 2)

292
UNIYER§ITE MOHAMMED I FACULTE DE§ LETTRES ET I}ES §CIENCES HUMAINES ouJn.q. Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental Lexique, configuratians et énonciation ïfêse paur l'abtentian du Doctorat d'Etat en Linguistique Présenté par: Sous la direction de : Abdelkader BEZZAZI MM. Les Professeurs Jean - Claude COQUET Miloud TAÏFI Yol.II .4., t '. . vi I 1993

Upload: asedres-azurag

Post on 22-Jul-2016

276 views

Category:

Documents


9 download

DESCRIPTION

Thèse : Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental, Lexique, configurations et énonciation par Abdelkader BEZZAZI. rif, amazigh, ait iznassen

TRANSCRIPT

Page 1: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

UNIYER§ITE MOHAMMED I

FACULTE DE§ LETTRES

ET I}ES §CIENCES HUMAINES

ouJn.q.

Etude d'un corpus de contes orauxau Maroc oriental

Lexique, configuratians et énonciation

ïfêse paur l'abtentian du Doctorat

d'Etat en Linguistique

Présenté par: Sous la direction de :

Abdelkader BEZZAZI MM. Les Professeurs

Jean - Claude COQUETMiloud TAÏFI

Yol.II .4., t '.. viI

1993

Page 2: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

DEUXIEME PARTTE

CO.NTER:

{IN ACTE .D^ËE-TNZTO-THE -DE ./-7- -ntHa j ya./

Page 3: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

255

COIITER: UII ÀCTE DÉEIilITOIRE DE /l-nHaiva/

Deux angles retiendront notre attention pour l'étude de

"f information" ou de 1a communlcation du savoir, telle qu'e11e

apparal.t dans Ie conte. Le premier décrira, en s'appuyant sur

les ef f ets de cett,e communication -par un destinat,eur- sur un

sujet, destinaÈaire, la manière dont 1es stat,uts ies actants se

fixent paraIlèlement à des agencements d'événements narretifsdont 1a cohérence et 1es axiologies sont reflétées par une

structure dont I'ordonnance est programmée par 1e faire-savoir

d'une façon générale.

Le second tent,era, étant donné que Ie conte est lui-même

objet de communication, de définir partiellement ce genre par

1es mêmes procédés de communicatlon du savoir sel-on 1e premier

angle; 1e conte se définira, selon cette optique, pâr 1ui-même:

il dit lui-même ce qu'il est.

r

ilü

§#

l|

]F*

iI

IItt'

fl

#

ilt{û

ll

IT

i

Page 4: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

üft!ïtllI

Ir

.l

rl

l

t+

I

256

CHAPTTRE

LE FÀrRE-SÀVOIR: üHE FIGIIEE DE HÀ§IFU]IÀTIOII

Le conte oral, à 1'exemple d'un grand nombre de texteslittéraires écrits, comporte dans ses ressort,s discursifs etnarratifs des procédés communicat,ifs qu,i1 fait servir à des

fins de mise en rapport entre partenaires. Dans ce sens? on ne

s'étonnera pas devant 1'utirisation de " la lettre " dont. La

place qu'e11e occupe dans 1e conte n'a pas besoin ,1, êtrereprise à 1a suite de 1'ét.ude gu'en a faite J. courtès1. cecidit, i1 rrous sembre possible d'exarniner d'autres motifs qui se

rapprochent de celui de " 1a lettre " §an§ pouî autantrestreindre 1e faire-savoir à un "soubassemenL syntagmatique":

nous voudrions prutôt élargir le débat en citant tout ce gui,dans notre corpus, signif ie une commun j.cat,ion du savoir, que

ce soit, par 1e biais de 1a lettre ou de la,parole (ora1e) ou

encore par 1e simple "signe" gui vise ra communicaiion d,un

savoir donné.

1 voitmvtholoqie,

J. COURîESop. cit. pp.

,Le conte populaire: poétique41- 58 .

Page 5: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

257

Le dire, d'une façon générale, apparait sous forme de

diverses occutrrêrlcês: par exemple /1-heDra/ (ar: parole) dans

C231 désigne un secret sur f identité du héros et que

1'héroine ne doit en aucun cas divulguer. Ceci peut aisément

laisser enlendre que ce secret serait divulgué et que 1a

construction du conte s'appuierait sur 1a lransgression de

i'interdiction de dévoiler 1e secret. En outre, sachant que 1e

conLe est 1'histoire d'un mariage, nous pouvons présumer que

/1-heDra/ fonctionne comme ce qul règ1e 1'ordre conjugal2, son

dévoilement implique un désordre constitutif de 1'un des

paramètres de construction du récit (voir C23).

Sous des formes lexicalisées par /1-heDra/, /1-kLam/ (ar),

/awal/ (ber: Ia parole, 1e dlre), la prise Ce parole devlent

un acte qui agil sur 1'auditeur: 1a communication d'un savoir

est porteuse d'un jeu sous-jacent à un rapport entre des

actant.s. La parole est dot,ée d'un pouvoir qul s'exerce sur

1'auditeur. Celui-ci n'est pas seulement, en position de sujet

informé car cette information 1e met en position de "sujet de

faire" sous 1a contrainte du pouvoir de 1a parole. Ceci esÈ

confirmé par C1 et C36 dans 1e sens où 1e sujet, après

1'acquisition du savoir, se trouve manipulé sous 1a contrainte

du pouvoir de ce dont i1 n'était pas au courant (secret).

1 /*in jat eend-ha waHed l-farfa galet I-ha bGit ngul I-kwaHed 1-heDra/ (ar: la femme dit à Ia vieille qui est venuechez elle! je voudrais te dire un secret,).

2 L'"*p.ession berbère /ggin x-s awal / eL arabe /daru e11-ha 1-heDra/ signifient que le context.e d'utilisation de1'occurrence soullgnée se rapporte au Iien conjugal au sens de;cette fille est promise, la main de cette fille a été demandéepar...

Page 6: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

258

Dans cet ordre d'idées, /1-k1an/ ( ar: parole, discours,propos) est ut11isé dans un rapport contextuel entre re juifet /sensri dehbi/; 1e discours situe cett,e dernière dans une

position de sujet, manipulé, après guoi e11e subit1'empoisonnement dès que la bague est mise dans sa bouche.

Enfin, guê 1a communicat,ion soit, orale ou écrite , Le

savoir comme objeL y est toujours à 1'orlglne d'un faire-faire:l'exemple de 1a lettre dans Ci, CZ4, C32.,. en témoigne dans

1a mesure où 11 fonctionne dans 1es configurat,ions soit pour

déclarer 1a guerre (forme de provocation) soit pour rétabllr1'ordre conjugal, soit enfin, pour interdire un mariage

incestueux et permettre 1es ret,rouvairles du père et ses

enfants.

En gros, 1es configurations dans lesquelles apparaissent

les motifs qui se rattachent à 1a communication cl'un savolr,permett,ent de retenir 1' j-dée de mise en relation entre contenus

par des transformations dont rend compte une structure de

manipulation. Tout,efois, précisons que les contextes

configuratifs où apparaissent /1-heDra/, /1-klam/, /awa1/ et

d'autres que nous verrons, ne se limitent pas à manifester des

rapports entre actants dans 1e sens où Ie destinat,eur agit sur

1e destinat,aire pour lui faire faire quelque chose: certainsde ces cont,extes montrent que 1e dest,lnataire du savoir, s'il-est indlf f érent à ce que 1'on att,end de 1ul ).orsque son être

est remls en cause par f insulte par exempre, ou aux exigences

de garder secret, 1e savolr (cf. c23), i1 devient conparable au

"mort" dans le sens de "ce1ui qui n'a plus de place morale, de

dignité".

Page 7: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

259

Dans cette optigue, 1'expression figée dans C151 esL

révélatrice de cette forme de "morL". Dans les contextes de nos

récits, 1e savoir non appréhendé ou, plus précisément., r-Ion

saisi suivant f impact qu'i1 a sur cerui à qui il est cestiné,

est i 'é1ément qui valorise par " f ignorance " so:'i dest.i-nataire :

ce dernier est comparabre à un mort ou, en d'autre termes, iamort de ce dernier serait préférable à sa vie (c'es]: d'ailreursdans ce sens qu'i1 faudrait comprendre tAaryaz?t (ber:

bravoure, courage, coeur, dignité, noblesse) dans c1 et /ki_yya/( ar: douleur morale ) dans C3ê ) .

L'aEir est, en -Lous cas, un ef f et du savoi-r reÇu par 1e

destinataire: de ce fait,, 1e non-savoir "décrypt,er,' ce savoi::

communiqué, dest,lné à provoquer ou à moLiver i,agir, est

assimilé à ce qul retire à ce destinataire un statut morai

déf ini culturellement,.

cette forme de manipulation suppose que 1a contrainre

d'agir est en même temps dépendant,e et indépendante du sujet

destinataire . D'un côté , pour prétendre à i'identité selon " : e

suis quelqu'un. . . " , il se soumet volontairement à ia

contrainle; mieux encore, i1 construit 1e programme qui 1ul

permet 1'acquisition du savoir dans C1 et C36. De l,auf,re,

cette :-dentité ne lui esl reconnue par 1e destinateur,

notamment sociar, que s'i1 agit conformément à ce qui actualiseculturellement f iderrt,ité en question. sans 1a soumission à

cette contrainte , cê ne serait, même pas la négation d'une

I* /11i ma/at-u mut-u xirde celul qui- neni égorger son

yeqra brat,-u t^r

m Hyat-u/ (ar:sait nl lire sa

nouton ) .

ma yxlyyeT ksat-u w ma yedbeHIa mort, est préférab1e à Ia vielett.re ni coudre ses vêtements

Page 8: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

260

compétence que le social 1ui accorderait,, ce serait plutôt 1a

négation de son être: rrofl seulement i1 sait et i1 n'est rienpuisqu'i1 n'agit, pas (i1 ne réag1t pas), mais, bj.en plus, i1est hors de question qu'i1 puisse (se) dire "je ne suis rien"dans le sens de pouvoir prendre acte pour se définir comme ter;ceci s'explique par 1e sens de 1a mort te1 que nous l,avons

signalé ci-dessus.

A ce st.ade, i1 devient posslble de préciser que 1a

communicatlon d'un savoir dans une configuratiori discursive,slgnif ie plus que ce qu'e11e dlt littéral-ement; d'où J.e pouvoir

qui Ia caractérise au point de décider, par 1, aEir chez ledesti-nataire, du droit à 1'existence (ou sa négation).

Relativement, proche de cet,te dernière 1dée , /l-xbar/ (ar.

et ber.: savoir secret) entre en jeu dans un contrat d'échange

dans c31. Par cet exemple, 11 apparait que 1a vareur du savoir

communiqué accorde 1a vie au héros car sans ce savoir( information ) , 1e programme de 1'ogresse peul se réaliser;f ignorance esL au héros 1'équivalent de sa mort. Autrement

dit,, selon 1e cont,rat d'échange de 1a nourriture contre le

savcir, 1a vie du héros dépend de ce qu'i1 cesse d'ignorer;para11èlement, nous pouvons supposer que ce11e du lapin dépend

non pas de ce qu'i1 détient pour lu1-même comme savoir, mais

de 1a valeur qu'i1 y investit en échange de la nourriture. De

manière é1émentaire, ce contrat s'articule autour de:

L tilt n teqnennikê $used Ger-s 0enna-s u/-yi /wiya a la-kiniG ift- 1-lHaje 0 ( idj 1-Ixbar) / (ber: un lapin s, approcha duhéros et lui dit: donne-moi un peu de ce gue tu manges et jete diraj- un secret,) .

Page 9: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

267

lapin 1a

nourrlture;

- la nourriture est au héros Ie moyen d'obtenir un savoir

pour s'assurer Ia vie (pour ne pas être dévoré par I'ogresse).En d'autres termes , Ia vie pour 1'un et 1'autre , est

condltionnée par la nourriture et le savoir sj-non:

nourriture (-savoir) : héros r I savoir (-nourriture) : 1apln1

A 1a suite ces quelques remargues sur t": contextes

configuratifs vus sous 1'ang1e des rapports entre actants lcis

en scèrre narralive, nous pouvons conclure que 1a régularitésyntaxj-que sous-jacente à ces contextes peut, être exploitée sinous considérons que Le conte, comme nous 1'avons annoncé, est

aussi un savoir qui se communique. La représentation de cette

commurlicat.ion rre se confond pas avec ce11e du recueil des

récits par des conteurs à des auditeurs; c'esL urre

représentation qui se construit, dans et par certaj_ns contes que

nous citerons pour voir quel est 1'effet gu'e11e produil sur

1e destirrataire représenté dans ces mêmes contes. Autrement

dit,, nous garderons 1e principe que nous avons développé à

propos de /1*heDra/, /1-klam/, /awal/ , /1-xbar/ pour essayer

de 1'appliquer au conte en tant qu'objet-savoir communlqué par

un récitant à un auditeur ( destirrateur / destinataire )

- Ie savoir est au le moyen d'obtenir de

e1Ie seule sans Ie savoir est auseul sans Ia nourriture est au

1 Li =on=,héços ce que1apin.

1a nourriture àle savoir à lui

Page 10: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

représentés dans une

contes.

262

conf iguration di scurs ive de que lques

L. Comuent l.e cont,e se déf init par lui*même

L'essentiel de nos propos se résume pe.î' 1a question

suivante: comment l-e conLe se déf inirait par cJes crif,èrEs qui

lui sont irrterrres?

Le terme qui nous lntëresse le plus pour entamer ce volet

sera celui de /1-mHa)ya/ (ar), tAnaiiQt (ber) qui seri: è.

déslgner 1e conte. Étant donrré que ce terme apparait, comme

occurrence dans noLre ccrpus, nous proposons f id.ée qu'au iieu

de répertorier des Céfinitions que nous pourrions relever dans

les divers travaux faits sur 1es contes, i1 vaudraj-t, m:-eux rlous

L imit.er à noire corpus seion 1es moyens qu' i1 f orirnit pour

c1éf inir l-e produit /1-mHa jyat/.

Pret:ons comme texte de référence une verslon arabe oe

C381 qui rejoint cel1e de C2!2. Ces deux textes ccmportenl:

une même configuration où apparaissent, sou§ lorme de verbe

/ i[a)i/ , /yetHa jai , et l'occurrence de /1-mHaiya/ , En out-l:e,

1 /bd.t hiya tHaii Gl eIa ruH-ha gae wa/ta SRa l-ha/ (ar:1a femme se mit, à raconter sa propre histoire ( son propreconte ) ) .

2 /mmi-s n tmeTTu0 nni yenna-s a yemma Haja-yi iwa 0eqqimtflaja-yas x imalt n,t'r-s/ (ber: 1e f ils demanda à sa mère de luiconter; Ia mère se mit à 1ui raconter sa propre histoire)'

Page 11: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

263

/}-mHa)ya/ est dite par Ia mère qui raconte en falt sa propre

histoire te11e qu'e11e est racorrtée par 1e conteur. c'est, 1à

que 1e dire <ie 1a mère devienl intéressant puisqu'i1 est Llne

/mHa j ya/ au mêrne tit.re sr.l,e Le conte-.cacre racontd paï -ie

conteur. ,s partir rle 1à, La straLégie d'analyse der,'ra

considérer cetie " instancl: " rrcnnée et qr-ri qualif ie son rér:1t

de /mHa jya/ d<- rrt l.es traits déf initoires scnt, à nos yeux,

ceux-1à mêmes qui y sorlt relevai:1es: r'énonciaticn du ccnte se

fait suivant deux voix que nous alLons essayer de préciser-

Le parcours du su j et représen'Lé pa..r ra mère r-larrs ncs

récils, est ce dont nos contes parJ,ent. C,est L,cb;et rle

t:arration dont f i-nstanee énonciatrice se corts Iitue selon deux

voix: cel1e de f informateur-récitant et ceiie de l.a nère

parlant à travers ce dernier. A ce niveau, i1 se L:couve qlrÈ iamère est 1a seule détentrice de ia vérité ues événements relque 1es contes 1es racont,ent,. Nous vc'yo]ls bien ciu'une fcrrme

d'imbricat,ion entre ces deux voix se 16alise comme l-ieru cjui

peut, fournir des rerrseignemerrt,s sur 1-es premières ébauches pôur

cerner 1'ob jet dit /mHa)ya/ . Pour ce f aire, :.1 f aut exa.miner,

dans un premier t.emps Le comrnent de cetle irnb::ication d'un

seeond récit pax rapport à un premier, qui sont en fait

identiques à 1a seule dif f érence qu'il-s ne présupposent pas Llne

même voi:: de narration. Retenons 1a constetation que 1e seeond

récit est prls en charge -à la manière d'un discours rapport.é

par f informateur- par 1a mère, sujet, concerné dj-rectement par

res faits du conte; dans un second temps, i1 faut situer cette

imbrication au ni-veau de I'énonciation.

Page 12: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

264

Pour 1e premier volet, i1 est clair que 1e vrai et 1e

faux, en Lant que modalisateurs sur les faits ou les événements

de 1'histoire, sont les déclencheurs du réclt raconté par Ia

mère1. Puisque ce récit vise essentiellement à d.évoiler 1a

vérité, il devient cl.air que 1a remise en cause du croire-vrai

exige que Ia prise err charge de ce récit soit assumée par cell-e

qui détient 1a vérité et qui est en même temps victime c1e ia

fausseté ou, plus exactemerrt, du mensonge.

Dans le C2L, une iecture à rebours dont f intérêt

opératolre est suffisarnmerrt justifié par 1es approches des

récits peul, à juste tii:re, Èenir compte des moCalités de 1a

véridictlon qui expliquent Ia réalisation de ia condamnatiorr

à tort de 1a f111e par 1e père (cf. note ci-dessus).

Résumons: 1a <iésobéissance de 1a f i11e au père sel-on la

letLre envoyée par 1'esclave, amène ce père, se)-on un croire-

vrai , à ordorrner 1'égorgemerrt de sa f 11ie. Or, f instance

observatrice et narratrice qu discours-hi-stoire de ce rapport'

( 1e premier récit ) accorde 1e pouvoir au père même s'i1

s'exerce à tort sur la fille; car i'égorgement semble au fond

dlct.é par une valeur qui con§iste à affirmer que la

désobéissance par Ia fil1e au père est récompensée de la sorte.

Partant de ce constat, nous pouvons dire que 1e conte falt

1 La vérité dans l'une des variantes de "1'histoire de IafilIe répudiée par son père" est que I'esclave a trompé Ie pèrede Ia femme-mère en 1ui faisant croire que cel1e*ci arransgressé 1'ordrez /L-eebd SafeT waHed 1-briya 1-bba-ha gaI1-u bent-k ra-ha xurjet T-Trig/ ( ar: 1'esclave envoya uneIeltre au père lui disant que sa fil1e n'était plus dans "1edroit chemin" ) . Dans C21, la vérité est que Ie père est indignec1e ce statut puisqu'i1 a répudié ses f il1es sans mot'ifcomparable à celui de 1a transgression du droit chemin.

Page 13: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

265

valoir 1e pouvoi.r du père quel1e que soit, la sanction de son

faire pourvu que ce faire soit conforme à 1a valeur culturelle:une f i1le ne ciolt pas déshonorer son père.

Para11èlement à ce récit, dans 1'univers du conLe se

construit. forcément un autre récit -celui de 1a fille-mère- qui

ne cherchera pas à remett.re en c:ause 1e pouvoir du père seion

le croire-vrai qui soumet ce dernier à agir conformémenL à lavaleur cu1ture11e, mais à rendre justice à 1a victj.me au nom

même de cette valeur. lious tor:chons ici à un point relativement

sensible en essayarrt <i'articuier cieux points de vue distinct,s;1a structure du Çont,e ùst, une combinaison entre re rnaintien du

pouvoir du père (prenier réclt ) en tant gue valeur êt, par 1à

même, 1e conte devient en quelque sorte une val-eur de justicepar 1e second récit de 1a f111e deverrue mère, pour: dénoncer La

traîtrise et 1e mensonge.

ceci permet déjà de ret,enir une constatation préliminaire:

1e conte, €D tanL que discours narratif, construit, un

enseignement sur 1a sanct,j.cn de f in justicel Êt sur 1'équit.é

d'une façon générale.

Sous cet angle, si /1-nHajya/ est dite récit fictif, e11e

ne 1'est qu'au niveau de son langage dénoLatif ou lorsqu'elleest dite hlstoire racorrtée et sous-tendue par f imaqinaire. Le

1 Si f in3ustice vis-à-vis de la fi1le n'a pas de raisond'être (cf. CZL), Ie père est alors condamné dans 1e conte, pârcontre, si e11e a une raison d'être (1e croire-vrai), Ie pèren'est pas condamnéi au contraire, i1 rend justice à sa fi11een la réintégrant dans 1'univers sous-jacent au 11en de parentéet en punissant 1'esclave destinateur de la lettre.

Page 14: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

266

sens pé j oratif qu'on lui att.ribue général-ement,1 est illusoiredans la mesure où "1a noblesse" de son enseignement réside non

pas clans ce gu'e11e dit littéralement, à t,ravers des États eL

des transf ormations, mais dans f intention ce son d-i scours

suivant des codes culturelsconf igurations discursirres.

dits implicitement, dans des

Les effets de sens de cel ordre se réalisent cians ncs

textes de référence par urre organisation discr-irsive qui es.t

possible à éclairer par cette espèce de mise en abyme sous*

j acente à l-a construction du conte en ccmbinant, per:

enchâssement entre deux récits sel-on 1es deux voix dont nous

verrons de parler.

Schématisons cet enchâssement en déslgnant 1e conteLlr par

"narrateur: N* en tanl qu'abstraction qui serait -Loutesproportions gardées- 1a somme de tous 1es récitants d,'un conte

appelé /mHa)ya/ et par n1, Le narra.teur individuel-récitant qui

spécifie, lors de 1a narrat,ion, {ü'i1 rapporte 1'histoire d.'une

fi11e à laque1le, une fois devenue mère dans le conte, il cède

1a parole comme sl e1Ie parlait à travers 1ui pour raconter son

histoire dlte /mHasya/. cette voix de 1a rnère sera dés1gnée par

n2. De manière plus claire, di.sons gLle nL récite deux f ois l-e

même récit et que 1e second, à 1a différence du premier, estattrlbué à la mère. A ce niveau, nous pouvons dire que nous

sommes devant deux plans d'énoncia.uion distlncts mais reLiéspar Ia mise en abyme:

1 Nou" nous basons sur certains comportements de nosinformat.eurs, notamment les hommes, dont nous reproduisons uneévaruation sur /1-mHajyat/: ceci se raconte pour amuser lesenfants (au sens péjoratif du terme "enfants").

Page 15: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

267

: Récit1

Nr Conteur( narrateur

Conte':/mHa jyatL

1 Pulsque 1essemble tout, à faitseconde.

i mise en abyme

: Récit2 âppelé/mHa Jya/t

I

l--

I1 est intéressant, de préciser que 1e récit 2 a les mêmes

"accessoires" que 1e réclt 1 mais selon deux représentations

à distinguer: 1a mère (n2) raconLe une /mHa)yat a ses enfants

tout comme 1e récitant (rr1) raconte /1-mHajya/ aux enfants.

L'invariance au niveau de ces accessoires comporte tout de même

une différence capit,ale: n1 et 1es enfants auditeurs ne sont

pas concernés par 1a question relative à 1a réalité construj-te

par Ie conte de 1'histoire, coutrairement à 1a mère et à ses

enfants. L'effel de 1a mise en abyme au niveau énonciatif se

résume par le rapprochement entre n1 et n2 par rapport aux

événements racontés et qui sont "externes" à n1 et "internes"

à n2 comme si par 1a seule extériorité / intériorité se

distinguaient 1a modalité ciu croire (ou ne pas croire) de n1

en ce qu'iI dit, et, sait et ce1le du croire de n2 en ce qu'il

dit, car |1 1'a "vécu". Toutefois, pris pour témoin par n2, rt1,

sachant que 1'hist,oire qu'i1 raconte esÈ vécue par n2 (cf.

Czt) , iI ne peut en principe ne pas adhérer sinon à Ia réa1ité,

dénominations sont, identiques, iI nous1égit.ime de définir 1a prenière par 1a

Évén 1

fvén2

Page 16: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

268

du moins à Ia vérité du code sous-jacent à 1a valeur culturelle

construite par 1e conte.

. L. notion de réa11té dans ce cadre est sans 'mportance;

car, au fond, nous ne cherchons pas à définir 1e conte sous

1'ang1e des effets de réalité. C'est plutôt 1e vrai qui nous

intéresse dans le sens où Ie conte dlt vrai par 1e témoignage

même de cel1e dont i1 raconte 1'histoire ot:, encore, de celulque cette dernière prend pour témoin à propos de l'intention

des événements qu'i1 raconte. Ceci nous invite à préciser

plusieurs plans par 1es instances qui s'y inscrivent:

i.. n1 est un énonciateur individuel qui est auss j-

" délégué " Lraversé par 1e collectif en 1e représentan'i:

lorsqu'i1 raconte un conte: i1 est 1e récitant à proprement

parler;

2, n2 est un énonciateur de statut particulier car i1

délègue nL en Le chargeant de rapporter son discours: la voix

abserrte de n2 (}a mère se fait préserrte par le discours qu'e11e

ciii à propos d'e11e-même en emprunlanl la voix de son

reprêsentant: n1). Icl, on peut dire que n2 parle à travers n1.

Ce n'esL pas ce dertrrier qui qualifie ce qu'il dit de /mHa)ya/ i

c'est, n2 par 1a voix de fl1, qui est en fait, responsable de

1'exercice de cette dénomination.

3. En considérant 1 et 2, i1 nous semble que 1e rapport

entre 1e conte et f instance appelée N dans un cadre qui

int,erroge 1a réa11t,é / non réalité des événements, peut, être

à la limite sans intérêt; mais, selon 1e rapport entre n1

supposé représentant de N et en même temps déIégué de n2 pour

Page 17: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

269

qui l'histoire racontée est "vécue", donc rée11e1, i1 s'avère,

de fil en aigu111e, que N est une instance qui n'est pas

indifférente à celte réa1ité du conte dit, /mHajya/ qui §e

raconte par tout récitant qui accepte implicitement un conlraL

de narrati-on avec N.

4. Pour revenir au problème <ie définition, /l-mHaiya/

devrait être entendue clans le sens d' "histoire" dont

f intention du dlscours est cautionnée par 1'effet d'un rée1

int,rinsèque à l'univers du conte , pour être dit,e vraie. C'est-

à-dire que "les actants de Ia narration"2 entretiennenc des

rapports de te1le sorte que n1 soit complice de 1'assomption

du "vrai-rée1" du récit 2 enchâssé dans 1e récit 1; êt, étant,

donné que 1e récit. 2 est appelé /mHa)ya/ , nous pouvons, dans

une certaine limite, admetlre que toute /mHa)ya/ comporte

implicitement des aspects du "vrai-rée1". Soulignons toutefors

que ceci est tributaire d'une guestion: qu'est-ce qui esL conte

et qu'est-ce qui ne 1'est pas dans notre corpus ?

1Nou" errtendons par "réa1j-té" un effet intrinsèque à

I'univers du conte: cette réa11té est ceIle du conte au senslarge du terme.

1O J. COURTES , Analyse sémiotique du discours; de 1'énoncéop. cit. p. 249 .à l'énonciation,

Page 18: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

27A

A. te conte un univers de valeurs

Essayons de présenLer 1a question sous une autre forme qui

nous rapprochre de 1'objectif visé pour proposer des traits

ciéfinitoires de /1-mHa)ya/ .

J. -C. Coquet nous dit 3r"'?n q." conço.it guère un univers

séniotique qui ne soit égaTenent univets de vaLeurs"l. Prenons

à notre compte ce point de vue dans Ie sens où l'univers des

valeurs dans 1e conte est susceptible d'êLre soumis

1'évaluat ion. L'évocat,ion de 1'évaluation provoque une

question! qui Jva1ue, ou plutôt, gul peut se donner le droit

d'évaluer ?

. Pour nous, c'est au niveau de N qui est la somme de tous

ies récitants d'un conte que 1a vérité cie ce produit en tant

qu'univers de valeurs, peut être examinée. Seulement, ce N ne

se constilue pas à Ia manière cl'un sujet qui "ptocèd{e) â la

doubLe prise en charge et de Lui-mêne ( , . . ) et, de san dire, de

ason faire"'i i1 se constitue par paliers de rapports enLre,

d'un côté, ïr2 et nL et, de 1'autre, entre n1 et N selon les

plans précisés ci-dessus. Notre texte de référence propose ici

1 r. -c. coQUET ,

155

2 ruia. p. 163

Le discours et son suiet , T.1, op. cit. P

Page 19: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

27L

une particularité définitoire du discours sous 1'ang1e d'une

forme, encore particulière, du "dire-vrai".

Retenons cet enseignement pour y intégrer un autre: " est

donné pour vrai ce qui a 1a caution du tée1"1, gui va nous

permettre de préciser queiques détai1s: dans notre texte de

référence, 1e réel- procède quant à sa représentation par 1e

recours à n2 dont le récit 2 est. une reproduction du récit 1

de n1 à 1a manière de produits qul se reflètent 1'un 1'auLre

sous forme d'une "relation enchâssante" qul définit, 1e conte.

Dans un autre sens, le vrai est tel dans le r.écit 2 si on

considère que ce récit est, avant d'être rapporté par o1, un

ciiscours dit et assumé par 1a mère: n2. Ce discours rapporté

comporte, par exemple, des traces de débrayage actantiel:

JE débrayage -> iI, pour qu'i1 y ait, conformité

à ce qui caractérise le récit. A ce niveau, i1 appara1t que l-a

mère représente un sujet qui procède à "7a doubTe prise en

charge de lui-nêne"

Faisorrs un pas de plus: n1" en rapportant 1e discours de

ce sujet appelé n2 n'affecte pas par cette opération le statutde ce dernier; au contraire, i1 se 1'attribue d'une certaine

manière en adhérant au dire-vrai de n2. Ensuite, par ce rapport

qul s'établit entre n2 et D1, 1e conte, dans sa totalité en

tant qu'univers, ne peut qu'être considéré sous 1'anq1e du v::ai

qul est en fait une modallsation attrlbuée par N qui se confond

avec les valeurs investies dans 1e produit.

1 ruia.

Page 20: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

272

§uivons pas à pas cette expllcation pour I',appliquer

rapport père / fLlle dans c2L après avoir vu celui qui appara

dans sa variante (cf. p.â6L n. 1). Situons ce rapport selon

- dr.l point de vue de 1a fille représentée par n2t

raconte mon histoire et je dis vrai;

- du point de vue du père en tant qu'énonciataire: je

t'écoute et je me rends compte que tu dis vrai;

-.Cerapportentrejeettuêstrapportéparn1:1e

réci1ant du conte. Notons ici 1'opération de débrayage;

- à ce stade, N surgit err tarrt que valeur de justice

rapportée par nl- -chose qui nous a permis de dire que nl- est

un représentant de N- pour rendre compte de l',effet du discours

selon 1e dire-vrai de n2 sur 1e père-énonciataire: ce dernier

est englouti (ii s'enfonce) au fur et à mesure qu'iI écoute

/I-mHa)ya/ de sa fille par Ia terre'

concluslon t /1-mHajya/ est bien 1e discours de h2, dont'

1,effet, donné pour vrai, a o'la caUtion du rée1" de 1'univers

des valeurs qu'eI1e construit'

CommenLons cette conClusion en nOus rePOrtant aux textes

de référence. Du point de vue communicatlf, Ie discours émis

par n2 à I',énonci-at.aire représenté par le père {et 1',esclave )

apparait comne réclt dont 1'ênonciateur est comme s'it parlait'

d,un absent. ce procédé dans c21 assure l',exclusion d'une

conjonctlon part,icipative des enfants au vrai-rée1 de

1'histoire de leur nère. Le rapport de parenté qui se greffe

sur 1a relation représentée: énonciaLeur / énonciataire, esÈ

celui de père / fl1le plut,ôt que celui de mère / enfant (on a

f impression que la mère satisfalt la demande de se§ enfants

au

Lt

je

Page 21: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

273

alors qu'en fait., e11e satisfait sa propre intent,ion d'agir par

son dire sur Ie père). Ceci se confirme par 1'histoire du père

manipulé par 1'esclave, avec 1a nuance que 1a f111e, n'étantpas mère, vise par son dire le père en f incitant à lui rendre

justice: chât.ier 1'esclave et 1a réintégrer dans 1'univers

familial "

Ceci montre que n2 représenLe un actant d'énonciaticn

suivant une pri-se en charge de: 1) j'affirme par 1'histolre que

tLi écoutes que je suis cel1e dont parle cette histoire; 2)

ceLte affirmaLion, je 1a réalise par 1e di-scours que je tiens

en t.e proposant des indications pour m'y reconnaîLre. La

superposition de f identité de celui qui parle (discours) et

de celui dont ce dernier parle (récit.) peut être paraphrasé

comme suit! en te faisant écouter (faire-faire) une histoire,tu sauras qu'en fait, -paraitre: histoire fictive ; ôtre:

hist,oire rée11e- ceLte hist,oire, c'est moi-même.

Ce cadre énonclatlf est explolté par 1e conte suivant des

techniques appropriées de construction d'un univers de valeurs.

Sous ce vo1et, nous avons accordé au vrai et au réel un impact

sur 1a définition de ce qui esL dé§igné par /1-mHa)ya/ parcea

eu€, apparemnent,,ils sont 1es seuls à pouvoir, au niveau de

1a sancL:.on, faire concevoir comme " juste" 1'effet de

l'histoire de n2 sur 1'énonciataire, êrl tant gu'exemple

conforme à un univers de valeurs culLurelles.

Cette sanction semble fixée par une autorité de 1'univers

du récit en tant gu'objet culturel ou "document de 1égislation"

sur 1e rapport père / fi11e qui n'est, à notre sens, qu'un

exemple utilisé dans une configuration dont 1a portée dans les

Page 22: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

274

contes est beaucoup plus 1arge. Cette autorité externe au père

dans C2L, puisqu'i1 en subit 1a sanction, est figurativisée par

1e père qui rend justice à sa fille après 1'avoir répudiée à

tort. Cette remarque issue de la comparaison de deux micro-

récits valorise même le statut du "père" injuste face à celui

du "Pàre " juste: 1'évaluation morale du premier s'oppose à

ce1le du second. Cet aspect moral est dfun registre qui se

corrfond avec ce que nous appelons "univers de valeurs" et que

nous rapprochons nettement de N en tant qu'instance présupposée

par 1a somme des variantes d'un conte et en tant qlle

clestinateur de la sanction du père auquel conv-'i endra

1'expression: n'est dlgne d'être père que celui qui assume 1e

rôIe de père envers ses enfants (ses fi11es), à en croire 1e

dire de plusieurs de nos informateurs. Cet univers de valeurs

ne se prête pas à une évaluation sauf si 1'évaluateur est plac6

darrs une structure égalitaire à ce1le de N. Le pouvoir

transcendant qui caractérise Ie conte focalise 1e discours ver§

1'exacte justice dont 1e support est une histcire-prétexte d'un

père et de sa f111e.

A notre avis, 1'analyse devrait retenir les modalités de

cette justlce qui, en tant que sanction, ne revient ni à n2 par

son discours -idée qui semble contredire ce que nous avons dit'

plus haut,- ni même à la reconnaissance par 1e père de la

réalité-vérité de son acte -jugé négatif- envers sa fi11e, mais

au pouvoir d'un tiers actant, relativemenl compréhensible par

l'effet des événements de 1'hiStoire racontée par 1a f111e mais

insaisissable quant à sa manière d'agir en amenant le père dans

C21 à nier son existence sur terre pour se situer dans 1'espace

Page 23: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

275

qu'il mérite (il s'enfonce par terre...). En plus, ceLle fin

semble dans un certain sens assumée par 1e père comme s'i1

devait 1'accepter comme te1le pour gue 1'univers du conLe

1'utilise comme représentation qui assure 1'exemple aux pères.

C'est ici que réside 1e pouvoir du tiers actant assumant la

construction de valeurs pour définir 1e conte oral Qui, dans

ce sens , n'est j amais un discours d' investissements dont

1'assomption est indlviduelle. Arrivé à ce point précis, nou§

pouvons avê.ncer I'idée que ce critère sera l'un des traits

définitoires du conte qualifié de populaire ( /1-mHajyat/ ) .

Faire usage de "1'enfoncement par terre", comme si de

drolt i1 s'imposait de lui-même, montre que rien de cela ne

pouvait arriver au père si 1e tiers actant n'était Pas 1à à

être 1e seul à user du pouvoir qui réalise une transposltion

cle 1'histoire de 1a f ille , réeIIe de son point, de vue , en un

univers de valeurs vrai et représenté par 1'état final du père.

L'ordre des choses selon 1'expression de J.-C. Coquet est ainsi

corrstitué: irrdépendamment du père et de sa f i11e qui ne sont

dans 1'univers ciu conte que des " figurants-exemp1es " , 1e

destinateur.saisit un type de rapports qu'i1 juge, sanction à

laquelte se soumettent aussi bien 1e père que 1a fi11e.

D'ailleurS, nous noUs Sommes valnement aCharné à trouver une

version de ce conte où i1 se pourrait qu'aPparaisse un autre

type de sanction: que1le que soit 1'attitude du père envers sa

f111e, cê11e-ci serait encline à 1ui pardonner 1e t'ort. À

présent, nous comprenons pourquol 11 est inpossible de trouver

cette version, sinon el1e sera dite non attestée Parce que Ie

Statut du tiers actant sera Par cette version remis en cause,

Page 24: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

276

chose qui est difficile voire impossible à admettre dans 1e

conte. L'ordre des choses est, à prendre comme te1 sans chercher

à lui Lrouver des justifications car i1 véhicule une véritédont, 1e pouvoir n'est pas susceptible d'être soumis à la

discussion. Pour être plus c1air, empruntons à J.-C. Coquet ce

qu'i1 symbolise en utilisant la formuler p est IL vrail, avec

quelques précisions dues aux spécificités de /1-mHajyat/ en

général et en particulier à nos textes de référence.

p sera pour nous -au risque de nous répéter- une

proposition dont, 1a caractéristique qui 1a rend int,e11igj.b1eIest 1a valeur sous-jacente à 1'enfoncement drr père en tant que

sanction "1oya1e", Là, nous posons 1e IL sous 1e rapport duquel

1e conte, présupposant N du point de vue énonciatif., dit que

1a proposit,ion telle que nous venons de 1a résumer, est vraie.

Cette vérit,é est/ bien entendu, comme 1e sr:uligne son auteur,

indépendante de 1'appréciation des hommes qu'i1s soient

représentés par des récitants ou par des au<ilteurs ou même pari

des personnages impliqués dans 1a configuration discursj.ve.

Évaluons notre étude en essayant de ia ramener à 1'angle

de déflnition oe /1-mHa)ya/r 1e conte, dont 1e pouvoir réside

exactement dans sa capacité d'être un prodult, qui construit des

"affaires" dont 1es aspects sont culturels en utilisant des

formes d'habilLage narratif dorrt, 1es accessoires sont de

1'ordre du fictif. Les procédés qui y sont utilisés pour

parvenir à des représentations socio-cu1ture11es sont d'une

origlnalit,é particulière: 1a preuve est que nos contes

1 r. -c. coQUET,163- 193.pp

Le discours et son suiet,

Page 25: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

27'1

s'adressent essent,iellement, aux enfants, sê font racontergénéralenent, par des mères ou grand-mères êt, enfinr pâr 1es

efforts de connexion ent,re deux pLans de significat,ions(/1-mHajya/ au sens de récit, histoire fictlve et /1-mHa)ya/au sens d'univers de vareurs), i1s arrivent à intéresser d,unpoint de vue éducatif tout 1e monde. Autant dire que

/1-mHaiya/, en tant que type de dlscours narratif comportantdans ses ressorts internes des objet,s cognitifs et curturelsauxguels Ie croire est forcément sans réserve, est un p selonla formule p est rL vrai. A ce niveau, re critère de réalitédont nous avons parlé n'a même pas de fondement pulsque le vraiest 1à pour modaliser p sous Ie rapport, du IL.

En tenanr compte de /1-mHajya/ comme univers d, objet.scognit,if s sous le paraphe du f L , port,ant sur 1e s vareurs dont

1a caution est socio-cu1iurer1e, nous comprenons mieux que

cette évaluatlon en Lermes de /kdub/ (ar: mensonses) cians une

formule finalel n'est pas à prendre au sérieux car,la relaticnentre 1e récitant-énoncialeur de la formul_e et 1e conLe dans

un cadre de relation . binai-re porte sur le premier pran de

signlfication au moment où re second p1an, pour êtreintelliglbl-e, s€ sitile dans une reLatlon ternaire où 1e

récltant n'est rien par rappcrt au dest,inateur; i1 n,est même

pas censé appréhender l'unive::s de valeurs du conte. D,autantplus que nous sommes face à deux plans t1e relat,ions différentes

1 citons Ia formule: /)iL men temma w /rit juj duru Helwamen temma w hlya ddub ÿÿ hiya ddub Hett,a wel1a ku1l fi kdub/(ar: je suis revenu de 1à-bas, ie me suis acheté deux Duru debonbons qui se sont mis à fondre et à fondre jusqu,à ce quetout soit devenu mensonge ) .

Page 26: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

278

eL à deux évaluations différentesdif férent,es de 1'objet /mHa)ya/.

sur deux acceptions

Nous pouvons aller prus loin: 1a relat,ion récitant I conte

ne se pose comme te1le que dans 1a mesure où 1e conte n'abesoin du récitant, que pour être dit sans exiger de 1ui une

quelconque efficacité pour appréhender 1e savolr qu'i1 véhicule

en profondeur. Dans ce sens, nous pensons que re rô1e du

récitant darrs sa relation au conte, en mesure d'appréhender ce

savoir, est rarement at,teint; s'i1 est atteint, nous

désignerons alors ce récitant par "corrleur" qui va au de1à de

1a tittéra1ité du proarit qu'i1 récit,e. En d,autres termes,

/iHaji/ (ar), /yetHaja/ (ber: conter) est 11é à une mai.tri-se

de I 'histoire à réc iter et de f int,ention de cett,e histoire en

tant que discours narratif: /1-mHajya/ est en effet un récit,mais e1le n'est pas seulement -ou e1le est beaucoup plus gue-

un récit. Nous y arrivons: il importe peu que 1,on dise qu,un

conte est un récit car:

1. ce que le récitarrt

des cas, 1'histoire du

seulement les faits ou 1es

soumettre à 1'évaluation

"histoire fictive " ;

peut évaluer est, dans 1es meilleurs

conte { 1e récit ) dont 1} saisitévênements qu'i1 peut éverrtuellement

pour ne rien dire de plus que

2, étant donné que 1e corlLe ne peut être conçu comme

simple hist,oire-récit de f ait,s et événements (il est

essentiellement un langage qui est sous-tendu, pâr

f intermédiaire de I'histoire-récit, par des codes et des

valeurs socio-cu1tureIles), f informateur-récitant, llê

Page 27: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

279

-.dtspssant pas d'un savolr tà-dessus, . eSt dans l'impossibilit'é

de pouvoir 1'éva1uer.

Pour arriver à distlnguer entre récit / conte et récitant-

informateur / conteur seLon deux plans de représentations, i1

nous a fa1lu distinguer entre /mHaiya/-récit (histolre) et

/mfla )ya/ -conte , en tant qu'obj ets soumis à I'évaluation.

si /1-mHajya/ n'est pas clairement, saisie en langue selon

Ies deux acceptions ci-dessuS, i1 ne reste pas moins net que

Ie vrai sous le rapport du IL y est par le refus de S'inscrire

dans des ancrages énonciatlfs que11e que soj-t leur nature' Ceci

explique pourquoi 1e conte d'une façon générale , pour se

constru j-re, procède en ut.ilisant le f ictlf à t,itre d'une espèce

de projection sur 1'être-homme pour affirmer 1e vrai de

1'éthique gui donne le modè1e de conduite de cet être-homme qui

le raconte ou 1'écoute.

Les valeurs que 1'analyse reconnait dans les contes sont

t,rlbut,aires de 1'élaboration de ces dernie'rs en convoquant 1e

t,1ers actanl construit par effacement d'évaluations

individuelles au niveau de ce que nous pourrions appeler

" énonciation connunicative" que nous distinguerons de

" 7'énonciation naîrative" en considérant 1e cOnte comme objet,

darrs une relation ternaire où Ie tiers actant prend place quels

que soient les niveaux du débat autour de cet objet.

Cetie Cistinction peut être é1ucidée par les diverses

réponses que les analyses prévoient pour "qui parle ?",

L'effacement dont nous venon§ de parler S'explique par une

confirmation dans Ies formules inaugurales dont nous citons Ia

Page 28: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

280

plus connue: /Haji-t-k/ 1itt.: je t'ai conté1, qui, en

définitive, montrent que 1e conte populaire oral s'intègre dans

une classe de discours où 1a parole n'appartient pas en propre

à celui qui 1a profère2. Dès lors, "gui parle ?" est à

reconstruire 1à où 1a relation n'est pas ce1le du sujet. de

récitation et de 1'objet, récité -niveau d'une énonciation

communi.cative- mais 1à où la relat,ion se situe à un niveau où

1'on tiendra compte du fait que ce sujet, même s'il se prononce

sur 1a véracité des f ait.s et événements des récits, j-1 demeure

ciépossédé de 1a possibilité de réaliser cet, acte sur le conLe,

chose qui nous ramèrre à 1a notj-on du tiers actant dans 1a

relation ternaire que réclame 1a propriété du vrai dans

1' énonciation r:arrat,ive.

Enfin, Pêr 1e changement de plarrs d'énonclation Selon deux

niveaux: " 7'arJtonofiie" et " 7'hétérononie" que nou§ empruntons

à J.-C. Coquet, ce qui est qualifié de flctif d,ans 1e premier

sera un point, de vue dont 1'objeL d'évaluation en lermes de

mensonges, n'est pas 1e même que celui du second bien que ces

cleux objets, pour une lecture. superficielle, concernent 1e même

produit (1e conte au sens large et non défini).

Cet,t.e étude nous a permiL.d'articuler entre t,rois paliers:

- 1e premier a tenté de distlnguer entre " récit" et

"conLe", termes utilisés pour déslgner /1-mHaiya/ selon deux

cas d'acceptions;

- 1e second, entre "récitant" et "conteur"; et enfin,

1 voit notre thèse de 3e cYcle,d'énonciation dans 1e conte oral".

2 e,. J. GRErMÀs, D-u sens, op. cit. P.

notamment "Procès

309.

Page 29: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

28L

1e t.roisième, entre "énonciation communicative,, et"énoneiation narrative", distinct,ion qui a en fait, été motivéepar 1'enseignement de J.-c. coquet, dont nous avons retenu un

"espriL" de rai§onnement sur les relations binaire et ternai-re.cet esprit nous a permis d'émertre le point, de vue selon requel"1es origi-nes" du tiers actant trouvent, leur fondement dans

1'univers de valeurs du conte que personne ne peut remettre en

guestion, cela même qui dorrne une position forte au vrai sous

1e rapport ciu rL et qui évince et même vide de sens touteterrt,at,ive irrdividuelle de se cons"truire en " su jet" évaluateurciu ccnt.e . ce su j et - il convient de re ciire après J. -c. coquer-" est en queTque sorte dépossédé de son acte au prctf it, de

7'instance hiérarchiquenent supér-l eure, Je tiers act,ant,,1.

Essayons de sélectionner dans ces paliers des conditionsde définition de /l-rnHalva/. D'abord, l,informateur dans 1a

relation binaire gu'i1 ent,retient avec 1e conte , E€ peuc

prétendre à un statut, qui correspond, selon un syncrétisme par

exempre, à celui du t,iers act,ant dans 1a relation ternaire.Ensuite, s'i1 est permis à ce récitant de réaliser un acte, i1se falt à 1a façon de 1'effet du conte sur lul comme s,i1revenait -selon ses propres propos- d'un long voyage (voir lafornule finale citée ci-dessus).

ces "propos" dans 1a formule finale prise en charge par

le récitant,, précisent une délimitat,ion de son ,, chanp

1 .1. -c.1'événement ,

COQUET, Sémiotique et Histoire: 1e fait ÀtProtée, L987 , p. 5.

Page 30: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

282

.-"p@§itionne 1" L t 1e s paramètre s de s relatlons de personnes,

d'espace et de temps, étudiés par E. Benveniste , sont des

contraintes qui 1e privent de 1a capaclté ou possibllité de se

dire sujet. à proprement parler, car i1 ignore que le conte

récuse en quelque sorte ce par quoi les discours siEnés sont

contrainLs: 1es ancrages Lemporel et spatial sont si fortement

récusés dans/par 1e conte que le tiers actant y occupe une

fonction d' "univers-a1ité" . En 1'absence de ces conditions

définitoires du conte, tout autre discours évaluatif se situe

au niveau du "paraitre" s'i1 porte sur 1a vérlté sous 1e

rapport du IL, Ceci permet de résoudre les confuslons chez les

partenaires du conte entre 1e fictlf du récit et "Le réel--

vrai"2 du conte.

B. t'être et Ie paraitre , Ie réeI-vrai et f irréel-

nensonCIer

TNous avons nentj-onné quelques é1éments qui justifient 1e

niveau dans 1eque1 s'opère I'entrée du tlers actanL pour

préciser que le pouvoir du conte ne l-ul provienL pas de

l'extérieur; i1 est en lui et passe bien avant celui de §es

1 ,1. -c . coQUET , Le discours et son su i et, T. 1 , op. cit. p.L64.

2 rUi.a. p. 170: " (un) couple dont 7es é1énents sont sibien soudés et si étroitenent ajustés 7'un à 1'autre gu'iJ n'ya place ni pour L'erreur ni pour le nensonge",

Page 31: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

283

récitant,S. Ses Lhèses, si 1'on peut dire, choisisSent 1e

Support qui leur est Ie plus favorablenent efficace; p est ÏL

vrai, indépendammenL des appréciations des uns et des autres;

car ces appréciations sont souvent 1e produit de confusions

entre 1'être et ie paral.tre du conte chez les récitants et Ies

auditeurs (peut-on 1e leur reprocher ?).

Mais, rêlativemenL au support, discursif du conle, ces

confusions ne sont évidemment pas pertinentes même si,

e f fectivement , le non-réel (ou le fictif) est ce qu1

caractérise 1es faits du récit: Le réCitant se met en une

position qui établit une distance entre 1e rée1 et 1e non-rée1;

i1 distingue entre les deux en précisant Son "retour" (cf'

formule finale ) de 1'univers imaginaire où l-e conle L'a

entrainé. Ce retour lui falt ressaisir une réa1ité -ou

inversement, sâ réa1ité lui falt faire un retour- qui évacue

celle de 1'uniVers imaginaire dU conte: de "non-Sujet", ne

serait-ce que parce que son acte de réciter e§t comme

i.ndépendant de Iui, i1 passe, par son discor.lrs dans 1a f ormule

f i.nale, à un autre statul pour rappeler la dj-stance êt, par 1à

même, distinguer entre le rée1 et le non-rée1. A ce niveau, ce

réc j-t,ant privilégie 1e non-réeI (1e paraltre du conte ) ar:

détriment du rée1 (1'êt,re) du "discour§-intention" du conte,s

ou encore, du "pauvoir signifiant, (du Tangage du conte) qui

passe bien âÿall t,, ceJui de dire quelque chose"L'

1 E BENVENISTE, Problèmes de linquistique qénéra1e, \.2,Gallimard, Paris, l-97 4 , P. 229 ,

Page 32: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

La perspect,ive de

284

1'acte de "parler" et "a,ssumer"

indlssociablesl portant sur /1-mHajya/ s'explique par

1'êvidence que 1'évaluation en termes de /kdub/ port,e sur le

caractère fictif du récit.. Cecl est un lieu de confusion entre

1'être du conte (/beSSeH/ = rée1-vrai) et son parait.re (/kdub/

= non rée1-merrsonger) gui, iustement, réduit 1a déflnition du

conte, selon 1'être, à ceIle qul caractérise' précis'ément, 1e

récit-histoire de ce conte.

En fait, 1'évaluation du récltant, indlque que 1a distance

entre 1e rée1-vrai et te non rée1-mensonger, est parfaitement

saisiÊ par 1ui du moment qu'i1 n'assimile pas 1e premier âu

s€corrd dont i1 ne sait rien parce qu'11 s'agit de f intentior-r

cachée du conte, et dont i1 sait, tout lorsqu'i1 1'appréhence

comme paramètre pour se définir comme présence phvsique ou

inst,ance "dialogale" ou C,ommunicative en relation avec une

histoire-réclt inaginaire qu'i1 raconte.

2- ?arler, réciter, assuner

Nos propos peuvent sembler ambigus; les passages d'un plan

ou niveau à un autre y sont déjà pour quelque chose. !Ious

parlons d'un même objet /1-mHajya/ mais sous des angles

distincts. Ce qui pourrait,, nous semble-t-i1 , éclairer

1 -y. -c. coeuET etLanqages N" 103, L992,

J. PETITOT, "L' objet, sens et réa1ité",p. 31.

Page 33: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

285

davantage noS propos en neutralj-sant, -si comne tel1es elles

sont ressenties- 1es évenLueIles ambiguités, est Ia distinction

qpe ;1OUS aIlOnS faire entre "parlerg réCiter" eL "aSSpmer",

"locuteur-récitant" et "sujet" à proprement parler.

Pour ce faire, QU'i1 nous soit permis de préc1ser que nous

ne voulons servir aucun apparelllage ni faire une cause de la

Lerminologle qui pose déjà un problèmet doit-on considérer

comme enseignement "dêfinitif" celui qui dit, que celui qui

parle assume dans 1e Sens de f indis§ociabililé de "parler et

assumer" ? En d'autres termes, 1e locuteur est-i1 suiet qul se

définit par ce dont it tire une position de "celui qul par]e"

en assumant ce dont iI parle ? Pour revenir à notre problème,

réciter dans 1e sens de raconler quelque chose qul n'appartient

pas en propre au locuteur qui n'y a pas investi un effort

personnel de construction créatrice pour viser une intenLion

particulière, est-i1 un acte qui lmplique 1'assonption ?

Brièvement, 1'acte linguistique doit-il être considéré sur

1e même plan que l',acte dit "logico-sémanliQUê", celui

cl'assumer lorsgue 1e chamP du débat porte ..sur le conte

papulaire oral ?

Nous SommeS conscient, que 1'évocation de te11eS questions

n'a aucune chance d'être prise au sérieux; généralement, 1es

coUrants linguistiques utllisent "par1er" et "asSumer" sUivant

une relation d' inclissociabilité1.

1 r.-cconfirmant

. coquet nousIa pensée d'E.

1'apprend dans ses divers travaux enBenveniste.

Page 34: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

286

Tout,ef ois, -posons naive'ment 1a guestion- comment, situerces actes dans les plans d'analyse du cont,e ? Et f aut,-i1 l_es

considérer à un seul niveau d,analyse ?

s'i1 f aut, qu'i1 n'y ait qu'un seul ni-veau où "parler', et"assumer" se situent en allanl de pair, i1 n,y aura pas lieude marchander à propos de 1'assomptionr quel que soit ce à

propos de quoi 1'act,e se réaLise, le paraLtre ( /kdub/) serâvalabre pollr tout ce dont parle 1e rocuteur-récit.ant,. 0r, nou§

avons vu que 1e non rée1-mensonge (1e paral.tre) ne s,appliquequ'à 1'histoire, qu'aux évérrements racontês, eü,à ce dont parleIe récit et, non à ce dont parre 1e conte dont i,interriglbilit.ése fait, et se réalise par Le seuL univers suivant 1e râpportque nous avons précisâ. un détournement sous un aut,re volet:ce non rée1-mensonge ( 1e paraitre ) est 1ui-même quelque chose

à concevoir relat,ivement au rée1-vrai (1, êt,re ) qul serajust.ement ce dont parle 1e conte -au sens st,rlct du terme- qui

ne se réduit nullement, à une hlstoire-récit. r1 s,avère ici que

1e paraitre se situe dans ra sphère du rocuteur-récitant et1'êLre dans celle clu cont,eur. Soit,:

paraî tre parl e r histoire-16n i +

ê tre "parler"1 (OnLe

1 ocuteur-récitânt

1 L" lecteur qui nousces guillernets ("parler" ):par f intermédiaire de 1informateurs. T1 y a 1à unde parler et "parIer".

aura suivi peut aisément, comprendre1e conte "par1e" (parole du conte)'histoire dite par 1es récltants-jeu assez sournois sur 1'utilisation

Page 35: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

28'1

ceci montre, nous semble-t-iI, de manière assez crairepourquoi 1e l0cut,eur que nous assimilons au récitant-informat.eur, ne peut, être en mesure de transformer le je qu,i1s'approprie dans /Haji-t-k/ eL dans /ii-t men Èemma/ en un i1pour prélendre à ]'acte d'assumer 1a parole du conte selon

1'être, eui est en quelque sorte une parole qui se parle à

travers ce récitant. parler et assumer, précisément dans 1e eas

de i'ob j et, de notre étude , sont à si'uuer dans deux plans

dist,1nc1:s d'énonciation. ï1s sont r ên ef f et, indissociables,mais 1a prat.ique anaLytique , sui-vant 1'ob j et, d'étude qu, e11e

considère, cloit être en mesure de concrét,iser les pJ-ans de

cet,te re lation qu' i1s errtretiennent. Au f ond , pour nous , âu

lieu de parler d'indissociabilit,é de parler et assumer, nous

dirions plutôt que ce sont ces plans qui sont indissociables,lans 1a mesure où i1s sont -toutes proportions gardées- res

seurs à pouvoir rendre compt,e des mécanismes narratifs etcliscursif s du conte.

L'être, dans 1a présentatiôn schématisée ci-dessus, rend

impropre 1'utilisation du t.e.rme.."conteur" dans le sens de ceruiqui parle pour raconter ou réciter un conte. ce terme, bienqu'i1 soi.t en généra1 utilisé dans ce s"ns1, .dolt être

"'l.

1 Voir entre autres, G. JEAN, op. cit.; C. VELÂY-VALLÀNTIN, op. cit. Pour nous, 1e conte n'est, ni modiflable nifalsifiabre; ce sont les récits-versions et variantes quisubissenl des modificatlons mais tout à fait 1imlt,ées par desexigerrces du conte sous 1e rapport du rL. sinon, si cesmodificatlons ne répondent pas à ces exigences, 1e produit seratout ce qu'on veut sauf un conte. c'est dire que 1e cont,eexist.e indépendamment des récitants particuliers, raison pour1aque11e, en ce qul nous concerne, nous ne croyons guère à lacrainte prétendue par nonbre de chercheurs, que 1e conte soiten voie de dlsparltiCIn.

Page 36: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

288

réévalué au même tit,re que celui de "conte". Ceci dit, i1 esti

vraisemblablement exact -du moins selon f impression que nous

gardons de 1'expérience de noS enquêtes pour constituer notre

cOrpuS* qge les conteuses et les conteurs sont des "gens de

mémoire" non pas de "1a parole-1eçon" puisque celIe-ci leur esL

extérieure mais des histoires-récits par lesquelles §e dit

cette "parole-1eçon". Sur ces hist,oires-récits ils peuvent

effectivement "broder" et produire des variations mais ces

"brodd*rÉes" convergent toutes, quelles qu'e1les soient, vers

ce qui dépend du conte pour produire et construire un univers

de valeurs, A ce propos, précisons que ce n'est pas parce gu'un

récitant-informateur esL qualif1é pour "broder" QUê,

raisonnablement, i1 peut, prét,endre avoir atteint eL acquis 1e

Statut de "conteur". L'art de réciter -d'autres diront 1'art

de conter- ne permet pas à cet acte de parole d'être totalement

dépendant, de qui en est 1e sujet. Et si un récitant-informateur

-cas très rare à noLre connai*".n""1- atteint 1e statut de

"èonteur" , 1'univers de son produit rejoint inévitablement

celui des contes d'une façon généra1e. C',est-à-dlre qu'un

informateur, plus 11 donrre f impression d'être partiellement

créateur d'hlstoires dites /nHaiyaL/, plus son ancrage, dans

1e sens d'i-rrscription, s'af f irme dans 1a t,radition -1'univers

de valeurs- fondant 1'existence du conte: i1 ne fait qu'ajout,er

de 1'eAu au moulin du conte. Mieux, nouS y VoyonS une Sorte

1 Nou= avons eu 1a chance de connaltre parmi nosnombreuses informatrices une seule dame âgée d'envi-ron quatre-vingts anS, qul avait 1a capacit,é d'improviser des rêeits avecbeaucoup d'ai-sance. Chaque fols qu'e11e 1e faisait, e11e nousen informait; d'autant plus que nous n'avons Pu retrouver ceSrécits nulle part ailleurs dans I'aire de nos enquêtes.

Page 37: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

289

d'espace dans 1equel 1e langage du conte est simplement recréé;

de ce fait,, 1e langage sous-jacent à son acte demeure celul du

conLe dont nous pourrions dire qu'i1 échappe à 1a "conscience".

En gros, f informateur a un statut en généra1 amblgu que

1a dlst.inction nécessaire, à nos yeux, entre ce gue les uns

appellent "conteur" et ce que nous appelons "réci.tant", permet

de résoudre en nous appuyant, sur 1a distinction entre "conte"

et "récit", justlfiée par 1e niveau que convoque 1a mise en

discours du conLe, ceJ.ui de 1'énonciation selon deux plans:

communicatif et. narratif. Âussi, /1-mHaiya/ couvre plusieurs

composantes dont celle du récilant-informateur qui, dès qu'i1

accepte 1e contrat qui consiste à conter, 11 se soumet aux

règ1es d'énonciation et d'organi.sation syntactico-sémantique

pour n'être vu qr-re du poirrt de vue Ce sa fonction! parler sous

les contraintes des rênes (règles) du conte. L'assomption qui

se traduirait par "ul-t paraphe" dans une f ormule f inale n'estvalable que pour "par1er" soumis aux cont,raintes de mise en

discours et de mise en fonct,ionrrement de 1a langue {cf.notrepremi.ère partieir qui dépendent, en tout, éLat de ceuse, de

f instance hiérarchiquement

l- ' inf ormat,eur.

supérieure ce]1e de

Essayons de préciser certains détails sur 1e récitant en

nous servant de 1'énonciation que nous avons appelée

communicative et de 1'autre, eüê nous avons appelée narrative.Grosso-modo, pour argumenter notre point de vue, nous nous

sommes appuyé sur Ia manière dont le récitant fixe son point

de vue (évaluation): c'est par une voix qui consiste à dire sa

position ou à la déclarer vls-à-vis du narré qu'il cherche à

Page 38: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

29A

rendre compte de son identlté personnelle. La recherche de

cette ldentité semble s'imposer au récit,ant pour se justifierdevant, r'auditeur. r1 doit, y avoir des facteurs descriptiblesqui posent ce récit,ant, comme traversé par la volx du ïL et quilui dictent un besoin de justifier son identlté non pas pourcont'redlre 1'univers de valeurs du conte mais, bien plutôt,pour signifier gu'il s'y intègre sl on interprète son acLe

comme suit,: c€ci n'est, pas de moi, je ne fais que ,,ré-citer,, 1

mais prenez cet,te récitation, euoique j,en dise, comme déja 1a

preuve que je m'intègre dans 1'univers de mon conte. Autrementdit, Ie récitant se trouve au carrefour de ce qui relie, d,unpoint de vue définitoire, le conte et le réclt suivant:

1. âprès avoir raconté 1'histoire-récit, i1 est invitésel0rr une double contrairrte: La sienne et ce1le de 1,audiLeur,à se fixer une ldent,ité , chose qu, i1 fait avant même de

commencer à raconter en proférant, une des formules inaugurales;2, 1'établissement de cette identité se fait par des

opérations auxquelles i1 recourt: 1es débrayages actantJ_e1,spatial et temporel pour entamer la narrationl, suivis à lafin du récit par ra réappropriatlon du je dans un discours de

véridict,ion selon le paraitre;3. les effets de ces opérations dlscursives montrent que

"1e contenu" de cet,te ident,ité s'app11gue à une évaruationrestrictive du conte car, si r'évaluation port,ait sur p (dansp est ïL vrai ) , i1 serait exact de conclure que le récitant,juge mensongères 1es vareurs de 1, univers du conte comme

1 Po,rtsémiotique. . .

-

plus de détaiIs, volr, op. cit., pp. ZSS-273,

J. COURTES, Ànalvse

Page 39: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

29L

investissements clu Socio-cuIturel, dont 1'analyse, disposant

d'une force descriptive d'argunentation, peut rendre comptel.

Atler jusqu'à prendre au sérieux cette remise en cause de

1'univers de valeurs par un récltant se dlsant je, nous amène

à abandonner 1a. possibilit,é d'accorder à 1'hisLoire racontée

par ce locuteur le titre de /mHajya/ parce que p est IL vrai

ne s'y applique pas. Le retour à 1'ordre des choses sou§-jacent

aux valeurs dont rend compte 1e conte populaire oral -critère

sur 1eque1 nous avons suffisamment insisté pour définir ce

dernier- s'accomplit.

Ce volet que nous avons privilé91é au détriment de

certains autres tels que }a ficti-on dans Ie conte, Pâr exemple,

^'als'avèreï' tout compte fait, c€ que 1'étude devait approcher:

"(1e conLe) pernet d'aborder 7es qüestions Jes pJus graves"2.

L'implicite de notre étude va dans ce sens; i1 nous semble,

d'ailleurs , gü€ c'est cela qui permet de ridiculiser 1es

jugements péjoratifs sur /1-mHajyat,/ et 1es jugements sur l-es

produits des études sur 1'objet en guestion.

De fil en aiguille, notre étude est amenée à t,raduire un

de SeS effets que nous fornulons soUS forme d'une renargue: }e

. et à son aud att"it""conte offre à son récitant et à son auditeur des "pol

d'images socio-cuItureIles qui sont des représentations comne

possibilit,és "rée1les" socialement. Ceci explique partiellement

1'utilisation de "populaires" (cf." .contes populaires oraux).

1 L" but d" la première partie de notre Lravail va dans cesens; c'êst aussi ce qui justifle dans un certain sens le lienorganique entre nos deux Parties.

1t2 D, PAULME, La mère dévorante, Gallimard, Parls, L976, p.

Page 40: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

292

Dans cette ut11isation1, retenons

explicitement dans /mHa)ya/ et gue

certaine évidence! selon nous, ces

par 1e peuple pour y dénoncer

auLrement.

"peuple" qul n'est pas diL

nous reconsLrui_sons par une

contes oraux sont utilisésce gu'i1 n'ose pas dire

Oue dénonce 1e conte ?

r1 est, bien entendu, difficlle de répondre à cettequestion; mais, pour ne pas dépasser les limites du cadre de

notre étude, nous pouvons quand même reprendre 1es rapport.s quise tissent, entre 1e cont,e, 1e. récit,ant et 1, audii,eur. prenons

comme textes de référence l-e C27 et Ie C2l2

A travers 1'analyse de ces t,extes, i_1 apparait, que Iecont,e dénonce 1e portrait d'une iniage qu, il const,ruit, et auquel1e récltant et 1'auditeur s'identlfient: d, une certainemanière, 1e conte ciénonce une projection de portrait dans 1a

relation qui s'ét,ab11t, ent,re rui et ses partenalres. Donc, au

f ond, i1 dénonce ces clerniers non pas tels qu, i1s se voud,raientmais tels qu'i1s se disent au fcnd d'eux-mêmes gu,i1 pourralt.leur arriver c'être à r'image du père injuste ou, toutsimprement, usant. d'un pouvoir et subissant une sanction, ou

à f image de 1'enfant gui, par le fait gu,iI a subl 1e pouvoirdu père, se trouve mê1é au sort que Ie récit rés".r" à ce père,

1 Nors sommes conscient du falt, que re terme ,,popu1aire,,est problémat,iquer voir entre autres, G. JEAN, or. "lt-. p. 40iselon Iui, certains pensent que les contes ont é[E-Eïiç,rs dans" des couches popuJaires, taut particuJièrenent ( , . . ) rurales( , , . ) , Pour d'aut,res, iJs seraient un héritage déforné derécits (, , .) fort en honneur dans re nonde aristocratique,, .

2 Nou" pourrions prendre d,autres t,extes de rëférence mals1a liste serait longue, de plus, cela ne change rien au point,de vue de 1'analyse.

Page 41: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

293

raison pour 1aque11e ces partenaires qualifient de mensongère

1'hist,oire racontée. Ce type de rapports peut parfaitement être

exploité pour tenter de comprendre f intérêt, du conte du point

Ce vue éCr-rcatif et. selon des voies l:elativement nouvelles par

rapport, à cel1es étudiées par B. Bett,e-Lheim par exemp1e1.

Ces nouvelles j-rrdications rrous amènent à rect j-f ier, voire

corriger, certains point-s qu'ii faut reprendre selon deux

di-rections:

1. Considérer 1es parterraires du conte dans 1e contexte

cie 1'énonciation communicative, sous i'angle de Ia vérioiction:

1'histoire du conte est objet éva1ué comme mensonÇer; ceci

signifie que 1 'acÈe n'esl pas gratuit: un queique chose

concerrle directement ces partenaires, "ça", les concerne et i1s

reconnaissent'ce quelque chose d'eux-mêmes au point. de refuser

de 1'admettre soit de manlère explicite soit de naniè::e â ne

pas oser .1e dire. Ce refus se t,raduit par 1a projection du

mellsonge sur 1'histoire , alors qu'en fait, le nerlsonge en

question ne devrait pas s'appliquer à 1'histoire mais à 1a

propre reconrraissance par Ies partenaires d'urr ie-ne-sais-quoi

d'eux-mêmes clans l'histcire que 1'un récit,e et que 1'autre

écoute. Le pouvoir du conte réslid", selon nous, dans ta"tr

subtllité de procéder par gi-issements sémantigues sous forme

de codes sous-tendus par une organisation syntaxique

appropriée, Êt destinés à cles invest,issements d'ordre mora1.

L'univers de valeurs qu'i1 enseigne s'actualise par un langage

a11usif, terme que nous empruntons à D. Paulme, sans pour

1BLaffont,

BETTELHEIM,Paris, L976.

RPsÿchanalyse des contes de fées,

Page 42: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

294

autant amener ses partenaires à avouer 1a culpabilité du

portrait de f inage du père par exemple, qu'i1s construisent

et qu' ils se font d'eux-mêmes par proj ection suivant 1a

représentativité, permise par ia fiction, dês portraits des

images tracés par 1e récit eui, à ce momenL là, sera dit

"conte"; J

2. compte tenu de ce poirrt de vue, il nous est possible

d'améliorer notre description pour répondre aux revendications

de 1'argumenÈation de déflnition: le conte, indépendamment du

récitant et de 1'auditeur dans un contexte sj-tuationnel, est

en fait ur1 véritable document dont 1es strates sônt

inépuisables; f idée selon laquelle 1'enseignement qu'i1 assure

est supposé non appréhendé par ses partenaires sous prét,exte

qu'i1s jugent mensongères /1-mHajyat,/ , e' avère discutablel.

Nous venons de 1e voir, c'est plus une question de

reconnaissance de soi "sans oser 1e dire crtnent"2 qu'une

question de dlscours véridictoire sur 1e conte. L'artj-culation

de ces deux questions montre que la vérité du conte est

tributaire de deux voletsr

e11e est reconnue et e11e se reconnait dans/Par 1e

sileûce;

- elle est n1ée

Ia haute voix- dans

t

et e1Ie se fait nier dans/par 1a parole

l'histoire" qui lui sert de récit à défaut

1 c'est maintenant qu'i1 nous est possible de rêviser ceque nous avons dit plus haut: 1e réciÈant n'est pas censéappréhender ou comprendre 1'enseignement du contei en fait, cepoint de vue nous a servi pour asseoir l'argumentation à sondébut. Disons que 1'erreur relative nou§ a permis de maltriserles questions avancées pour réaliser 1'étude.

a'D. PÀULME, op. cit. p. 11.

Page 43: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

295

de ne pouvoir faire admet,tre 1e fictif pour vrai-rée1. Sinon,

1a vérité du conte à proprement parler, est modalement

silencieuse, 1e conte tire sa force, son pouvoir, du silence.

Ce silence s'explique: rrous avons dlt que le conte est une

espèce de solution que la société t.rouve à son éternel besoin

de dire à voix basse ce que ses constituants ne peuvent dire

à haute voix, Dê peuvent avouer les uns -aux autres sans

détournement. ce manque est donc collectif et non individuel;it ne peut, être liquidé qu'en silence car, dès que 1a voix de

1'un, oü même de plusj-eurs parmi 1es constituants , s'é1ève ,

e11e risque d'être remise en cause comme s'i1 devait y avoir

une entente -un contrat- implicite qul regroupe tous et en même

temps autour d'un même besoin; d'où 1'universalité du conte.

A ce stade d'exploit,atlon des divers horizons et des

indications qui nous semblent définitoires du conte popuiaire

oral, nous sommes assez proche du mythe -dont nous avons déjà

vu que 1'univers s'actualisait nettement dans 1es

confiEurat,ions étudiées- selon au moins 1a caractéristiquequ'on lui attribue! "co11ectif" par opposi-tion à "individue1"

attribué au.conte. Ceci ne veut pas dire que nous assi.milons§

théoriquement le conLe au myt,he, chose qui ne relève pas du

champ actuel de nos préoccupatj.ons. Toutefois, comme 1e mythe,

1e conLe dit /mHajya/ , lorsgu'i1 est pris comme objet de

description, ne peut., à nos yeux, être situé au niveau de

1'énonciation / audit,ion-réception, situé dans 1e seul plan de

1' énonciation conmunicative.

Décrire un conLe exige qu'on Ie définisse préalablement,;

cette déf i.nition doit être capable d'orienter 1a descript,ion

Page 44: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

-!r§r^--..

296

dans 1e but d'éclairer de l'intérieur l',objet /mHaiya/ au

niveau de fa transmission et de Ia construction de valeurs

socio-cu1turelles, êfl tenant compte de f invariant et non du

variablel. pour tout dire, nous pensons que c'est seulement

par Ies conseils des compétences et performances analytiques

dont 1es outils sont ceux-1à mênes qui ont amené J.-C. Coquet

à précj-ser 1a portée de 1a relation ternaire, que 1a

description sera capable de proposer "une sémant,ique du conte

populaire oral" à condition, bien str, que les acquis de 1a

sémantique, toutes tendances confondues, soient expl-oités.

Aussi, tout discours véridictoire qui se situe dans 1a relation

birraire oùr 1) 1es récltants varient tout en constituânt un

paradigme dont 1a somme théorique, avions-nous dit, êst 1e

conteur êt, 2\ 1es récits varient aussi tÔui en ëonstituant Lln

ensemble de versions dont la somme théorique est le conte, sera

eXclu par 1'exclusion même du niveau dit "de 1a réceptiÔn"' Ce

niveau peuL à la limite être pris en considération lorsque 1" i

conte eSt réduit. à 1'expression de récit comme " StruCture i

i

simple". i

or, tant que "1e niveau de 7a strÜcture hiérarchique du

contenu"2 n'esL pas visé, on ne peut dire ni prétendre que it:

rlescription a ramené son discours à un an91e, Qui consiste à

proposer des procédures et des techniques de lislbilit'é de

/1-mHalyat/. ceci explique pourquoi nous avons opté pour la

1 l. J. GRETMAS , Du sens , op. cit" P' 185 , !*" nous

rejoignons par 1'ét,ude "ür t" rô1e du texique dans Ies

"ontigurations discursives (première partj-e ) et par 1a

tentaiive de définir /1-mtla)yat/ (deuxième partie).

2 lEid, P-18?

Page 45: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

297

distinction à faire entre "/mHajya/-histoire,, et ,,,/mHa)ya/-

conte", entre relation binaire et relation ternaire, aprèsavoir vu gue la première telIe que nous l,avons manipulée pour1es proPres -iutérêts de notre étude n'offre aucune possibilitéd'introduire une méthode opératoire servant à lire 1e cont,e telque ltous 1'avons déf ini.

Nous avons dit que le conte vu sous les angles que nous

avons essayé de dével0pper, intersecte avec 1e mythe dans 1a

mesure où des univers mythiques s'y actualisent en coordonnantentre des att,ributs appart,enant, à des isot,opies contradictoires( cf. notre première partle ) . Dans une perspeciiveinterprétative, nous dirions que 1'homme a adopté 1e conr_e etcontirruera à 1'adopt,er en y investissant des valeurs mythiguessous des formes peut-être non identiques mais, du moins,analogues à ce1les que nous eonnaissons actuellementl pou,

assurer 1a vérité d'un univers de valeurs. cett,e adoption es.L

en soi une qarantie suffisant,e de ra vérité du savoir sur cetunivers de valeurs gue Ie cont'e véhlcu1e.

Dans ce rapport interprétatif, i1 apparart, etrê, quellesque soient 1es versions d'un conte et quelles gue soient 1es

différences relatives et 1es ressemblances enlre ces versionspour qu'y soient retenues, en fin de eompte, des configurations

1 D" manière a1lusive, ceci nous rappelle 1es mythescontemporaj-ns d'4. SAUVY, mvthologie de notre temps, petitebibliothèque payot, paris, 19r à "i déesconnunénent reÇues, Çui disparaissent â l,exanen,,, cetterécept,ion s'explique par une raison que nous emprunt,ons à M.Mc Luhan, disant après E. T. Hali , Çluê ', Jes hànnes ne sontjanais conscients des rêg7es fondaneniales des systêmes et descuLtures qui constituent le niiieu oû ils vivent,,, volr M. McLUHAN, Pour compr.endre les média, Mame / seuil, cor1. points,Paris, L968 , p. 14.

Page 46: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

298

discursives, seule 1a modalit.é selon 1e sav,oir-vrai devient

importante à retenir pour déflnir ce produit, sous 1'ang1e de

ce qui 1e re11e aux usagers. Pourtant, fe conte n'obIige, si1'on peut dire, pêrsonne à croire ce qu'i1 dlt; par contre,

celui qui Ie dit ne 1e dit et redit que parce qu'i1 y a investiquelque chose qui contribue à une constitution vue comme valeur

de son identité , de son être ; d'où, la vérité du savoir

transmis et véhlculé par 1e conte.

Récupérons 1es é1éments qui nous ont servi à défi.nir/ 1-mHaj ya/ :

(voir page sui.vante )

Page 47: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

299

-mHa jyal-conte:;:-livers de-.'aleurs

)

--1. .. "relation:ern a ire "::quet )

-'structure-- -érarchique'e contenu"l:eimas )

ett e

savoir adopté,r --L coLlectrf j :

/beSSeH/ - vrai- réel

^non-paraltresavoir non- rejeté;

I collectif ] :

/ma-(i kdub/ -)non-mensonger,non - irrée1.

parattresavoir rejeté,L lndlvrd.ueL I :

/Kdub/= mensonser-irréê1

non- êtresavoir non-adoptéi inaiviauel ] :

/ma-ît beSSeH/ -J..non-reeI, non- vral

lr/ I-mHalya//- I1\51-i

( réclt )

-h"]..."relatiorbinai.re"

- "structuresimple"

NB. L'objet d'évaLuation, en tant que "struct,ure hiérarchiquede cantenü" sous 7e rapport, du IL:

p est IL vrai,est /l-nHajya/-cante et non 7'histoire du récit, Paral1èlement,7'objet d'éval-uation, en tant gue "strücture sinpTe" sou,s 7erapport du (des) récitant(s) individueT(s) est, /J-nÜajya/-récit,(histoire d'événements ) et non 7e cante qui e.5Ê -tel que celaapparaît ici de manlère cJaire- 7'ensenbLe des ressenbTancesconfiguratives entre les récits-histoires du point de vue de7' arganisation syntactico-sénantique,

Page 48: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

300

CHÀPTTRE IÏ

/l*rnHhaiva/ ET SA STRUCTURE HIÉRARCHIOUE DË CONTEI{U

La récupération des éléments dont nous nous sommes servi

pour définir notre objet, laisse entendre que les contes sont

Lous semblables 1es uns aux autres: un discours pour 1equel

s'applique p est IL vrai, euê11es que soient les valeurs

véhicu1ées par ces contes comme univers.

Ceci sera un objet de débat en considérant p dont nous

savons gue 1es contenus peuvent varier. Une simple comparaiscn

entre conLenus vus sous des angles différents dans une

configuration discursive, peut éclairer 1'horizon de ce ooi-nt

de vue.

Reprenons ie C21 et rappelons ce sur quol nos propos vont

porter.

Toules 1es versions du CZI- nous apprennent que 1e père

manipulé par 1a marâtre répudie ses filles et rentre chez lui.

Le tenps s'écoule jusqu'au jour où i1 devlent un mendiant que

le hasard conduit chez 1'une de ses fi1les... / après quoi, i1

subit une sanetion: l'univers de valeurs du conte condamne 1e

père à f image de son acte vis-à-vis de ses filles.

Page 49: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

301

D'autres versions de 1'une de sa variante nous apprennent

que le père, après avoi-r pris pour vrai Ie dire mensonger de

1'esclave: "ta fil1e s'esL écartée de 1a vole (morale ) " ,

répudie sa fille en demandant à 1'un de ses fils d'égorger sa

soeur... Transformat,ion: lorsque ce propos s'esL avéré

mensonger, 1e rapport père / fille se rétablit; 1'esclave est

pun i

Dans ces deux textes, nous assistons à une ressemblârrcê:

1e père répudie sa (ou ses) f111e(s), et à une sanction selon

deux cas de contenu. Dans 1'un, le père est condamné; dans

1'aut,re, 1e père condamne son propre acte vis-à-vis de sa

f111e: cette forme de rachat par 1e rétablissement de 1'ordreciu rapport père / fi11e et la punition de 1'esclave retiennentnot,re attention. Tout Laisse entendre que ce conLenu sert en

même t,emps 1a satisfact.ion et 1e refoulement du rapport père

/ fille comme valeur; sinon, pourquoi dans un cas, le père est

condamné; dans 1'autre, il ne 1'est pas ?

Peut-êt.re nous reprochera-t-on cette comparaison établieentre nos deux cas, en disant qu'eI1e'n'est pas fondée car les

strat.égies de manipulation n'y sont pas les mêmes. S'ii ne

s'agit que de ce1a, nous pouvons reconstituer Les données

comparées comme suit:1. 1e père, aussi bien dans 1e premier cas que dans Ie

second est, manipulé: dans un cas, pâr J_a marâtre; dans l,auLre,par 1'esclave. Syntaxiquement, Ies moyens util1sés par 1e

manipulateur importent peu i

2, Par cette manipulation,

programme le rôle de "répudier sa (

père assume dans son

ses) filIe(s)"i

1e

ou

Page 50: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

3.

302

en principe, les contenus des sancLions dans ce

ce qui n'est Pas 1e casprogramme, devraient être lsotopes '

comme nous venons de Ie voir.

Toutefois, Pour Peu qu'on s'Y

rô1e de la marâtre et de 1'esclave

arrête, utr regard sur 1e

devrait <ionner une Piste

intéressante.pour manipuler 1e père, l'esclave joue sur une vatreur

morale (négativei qu'iI attribue à 1a fil1e comme si un certain

discours d'évaluation étalt assuré pour que la manipulation

jouant sur 1e paraltre et 1e non-êLre (}e mensonge) se réa1ise

dans 1e sens programmér 1a répudiation, et après transformation

du mensonge en fausset,é selon ie non-être et 1e non-paraitre

pour impliquer 1a vérit,é selon 1',être et, 1e paraitre, 1e

rétablissement de 1'ordre se réaIise.

Quant à la marâtre, pour manipuler le mari, e11e joue sur

une valeur immorale non saisie comme te11e par 1e père

( mari ) 1. Ceci tlent lieu d'un certain discours d'évaluation

pour QUê, en principe, 1a manipulation ne doive pa§ déboucher

sur te programme de 1a répudiation des fi11es. Aussi, notons

guê, dans ce programine, 1a transf ormation du mensonge à met'tre

sur le compte de Ia marâtre ne se réalise pas pour inpliquer

un rétablissement de 1'ordre, mais pour assurer son maintien,

chose qui n'est pas assumée par 1e pèrer ce dernier, après

avcir adhéré au mensonge en 1'appréhendant comme véritê, e§t

en syncrétisme avec la marât.re dans le sens où iI accomplit ce

1 /yeGleb x(ber: 1es tempSpourquoi retenir

neG lHaI mahmi neTTef yessi-k ruH t'e11ee-0ent/sont durs, nous sommes réduits au besoin;tes filIes ? va et égare-les quelque part/

Page 51: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

303

qu'elle lul demande, ce qui n'esl pas le cas pour le Père (cf.

ci-dessus ) et 1'esclave à 1'état fina1. L'effet de cette

distinction est 1a sanction selon 1es deux cas de conLenu

signalés.

D'un point de vue comparatif, i1 apparal.t que 1a

proposition (p) dans ce dernier caS relève d'un univers dont

1a valeur propose quelques observations par rapport à ce11e de

1'univers c1u premier cas.

Certes, dans Les meilleurs des cas, ces observations

re1èvent ci'une interprétation, néanmoins , i1 semb'l e que

t.hémat.iquement parlarrt, 1'ordre dy choses dans 1a propositian

évaluative dans un cas retient, le rétablissement, du rapporl

père / fi11e par 1 'union ( conj onction du point de vlle

syntaxique ) à 1'état fina1. Dans I'autre cas, cet ordre de

choses dans 1a proposition retient 1e refoulement de ce même

rapport par la disjonction enLre le père et 1a fi1le à L'état

final.

On dirait bien que les deux propo§itions sont i.ssues de

soubasSements culturels différents:, 1es deux discours

év*i.uatifs de 1'acte du père selon deux cas sonL "restrictils"t

I'un à 1'autre. Là où 1'un donne une 1eçon sur Ia condamnatlon

du père au profit de Ia rupture du râpport parental (père /

filIe), 1'autre donne une 1eçon sur 1e pardon au profit du

rétablissement de 1'ordre parerrlal

En tous les cas, ce phénomène de "restriction" peut être

paraphrasé de 1a manière suivante: 1'univers du pardon semble

une "révj.sion" de celui de Ia condamnation (ou f inverse). Ni

"Ia vérité" de 1'un ni celle de 1'autre ne sont à prendre dans

Page 52: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

304

1 'absolu; et voilà qu'une ouverture serait possibl-e à exploit,er

par celui qui s'intéres§e à 1a typologie des dlscours en

reprenant cette idée sur 1'aspect concurrentiel dtt conte et

d'autres discours dont nous pouvons maint,enant dire qu' j-l-s ne

sorit pas aussi- " indif f érenls" qu'i1s en donnent 1'air vis-à-vis

du conte populaire oral, /l-mHalya/'

Comme nous nous y atte::diorrs , à ce niveau d'essê'i sur une

déflnition du conte populaire orai, nous vcyons que nous ne

sommes plus; en présence d'un riestinateur symbolisé par 1e f L,

suirrant deux cas de figures qui, chacune, à sa manière, par des

disccurs dont les formules varient, cherche à imposer 1a nûrme

du vrai. Ce qui assure " 1a vérité" dans 1a proposilion

t-hématrsable par le pardon, est Le f ait que Cette "vérité" sci.t

crLle oLl partagée par 1a. communauté où règne l-'rdée; quei que

soit 1'acte du père vis-à-vis de sa f i1.1e, 1e pa::don serÊ. cit-t

côté du père sauf oans des circonstances part:-culj-ères que 1e

discours rel-igiei:x par exemple, préci.se al-1 même titre, mais

dans une autre vi sée , que 1e qiscours narraLif Cu C2t pal:

exemple. Le croire ou I'admissi]:i1it.é collmune eË colLective de

cette "vérité" s'avère ,,,,',à restricti-on (1e ïerme n',est pas

péjoratif ) par rapport à f idée que nous reteno"= en

reproduisant 1es ressota" *ot"u* du C21r n'est ilit père que 1e

Père .et s'i1 n'est pas Père , qu'i1 accepte de s'enfoncer par

terre et que les poils de sa barbe pousseni. sLlr Ies coilines

oll dans 1es déserts à 1a manière de 1'aLia'

Avec ceS nouvelles données, i1 nous est aisé de conclure

que ce qui fut posé comne p est IL vrai ne peut être retenu

compte t,enu de 1a confrontation comparat,ive entre nos deux

Page 53: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

305

discours traitant d'un même cont,enu "thématigue". Ni l'un ni

1'autre ne peut imposer sa norme du discours vrai dans

1'absolu; en outre , iI suffiL de relever gue cette

confrontaiion impose qu'apparaisse 1a modalité du croire pour

que " 1a vérité" devienne relative. Sinon, 1a précaution à

prendre ici, selon nous, serait ce1le du cas où un spécialiste

des contes soi-t en mesure d'exclure 1'un de nos iextes de

référence d'un "répertoire" théorique des contes, suivan-u un

type de disrcours d'évaluationr ceci est une autre question sur

l'établissement, nous semble-t-i1, d'une typologle ies conies

gLle nous ne sommes pas en mesure d'approcher.

Deux points essentiels peuvent être retenlls dans

rapporL:

CE

1 . Ce qui ét,ait " ob j ectivité f orte " dans l-'un et 1 'autre

de nos textes de référence par I'intermédiaire du IL, sans

qu'aucune référence de 1'un à 1'autre ne soit faite, assurai-t

le vrai de 1a proposition (p) relevant de "1'universel" r en

fait, ce discours se veut universel;

2. "1'ob ject,ivit,é f orte" qui assure au discours 1e "dêsi r"

d'être universel, à 1a suite d'une comparaison dont i1 aurait

fallu définir 1es principes si cela avait, été 1'obiet direct

de notre travail, entre des conLenus de proposilions

rapprochables, devient objectivement "faib1e"; du même coup,

1a confrontation impose 1e croire et un changement de formule:

Page 54: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

306

IL

ON

p

p

est

est

vra]- , passe

vrai.

NB. RappeTons que nous cantinuons J'enprunter à J.-C. Coquet,les fornuJes que nous utiTjsons.

L'apport de ces données peut être senslblement fructueux

s'il est réévalué et remis aux soins d'une analyse

anthropologique ou d'une description de 1'univers socio-

culturel proprement dit, pour voir le type de discours adopt,é

socialement à divers titres et aspects caractérisant notre

communauté.

Dans cet ordre d'idées, constatons que ce que nous avons

appelé "savoj-r dans 1e conte" n'est plus. Para11èlement au

passage du p eS IL vrai à p est ON vrai, f isotopie modale

selon 1e savoir sera à placer selon croire: tout dépend du

niveau suivant Ie point de vue de 1'analyse.

Ce jeu parait avoir un effet' définitoire de /1-mHaiya/-

conte que nous voudrions formuler avec prudence. Si un Contenu

dans 1'univers de valeurs du Conte s'actualise par "une norme"

donnée, les exemples du père condamnable et du père non

condamnable seront tels, suivant une relation de contradiction

qu'ils entretiennenL. Autrement dit, 1'univers du conte joue

sur un contenu de relation entre é1ément,s de catégories suivant

1e principe enseigné par 1e conte: la différence ou

1'opposition entre 1es deux é1éments ( condamnable / non

condamnable) dans 1'univers de /1-mHaiya/.

Page 55: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

307

ceci permet de reprendre cet aspect définitoire du conte

sous I'ang1e de p est TL vrai en tenant compte d'un nouveau

critère; p y sera appréhendé par des effets relationnels d'une

organisat.ion sémantique (1'exemple du père condamnable / père

non condamnabre, en tanl que " structure hiérarchique de

contenu" en témolgne). Ce constat ne s'applique pas au seul

exemple que nous venons de prendre; le corpus permet d,en

relever d'autres dont les investissements sémantiques

diffèrent,. cet,t.e nouvelre voie considère que dans nos textesde référence se réa1ise une organisation de 1'univers de

valeurs suivant des relations entre at,tributs dont 1es

isotopies sont contradicLoires.

Débrayons: ce sont 1à les mêmes termes que nous avôns déjà

utilisés dans 1'élude des configurations dj.scursives à propos

de ce gue nous avons nommé "univers mythique"; el bien que

1'angle d'ét,ude, ici, soit distinct du premier, nous voyons que

tous deux convergent vers un même point de vue qul montre gue

nos critères de déflnition peuvent surgir à t.out moment du

pareours cie 1'étude.

Revenorrs à nos textes de réf érence et au terme / 1-mlia jya/pour ressaisir f idée que 1a vérité universelle n'est jamais,

celle d'un univers particulieL d'un conte corresponciant à 1a

somme des ressemblances entre ses histoires-récits dans 1e sens

approximatif qui correspond à nos configurationsl, et à une

1 C" sens dit, approximatif exige que les ressemblancessoient déterminées par 1'organisation syntactico-sémantique desconfigurations qui " s'intègre(nt) dans des unit,és discursivespJus larges", A. J. GREIMAS et J. COURTES, op. cit. art."Configuration" .

Page 56: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

308

abstract,ion faite à propos des différences particulières, ou

"VarianteS" SeIon Ies termes du cé1èbre "Aarne-ThompSon". a1

sont plutôt Ies différences entre les univers particuliers des

divers corrtes, même quand i1s semblent se contredire, qui

assurenL 1a vérlté universelle. Sinon, cette vérité, lorSqu'un

univers de Valeurs particuller prétend 1'asseoir comme te11e,

ne peut, objectivement être que celle d'une communauté. Si à

f intérieur d'une communauté, c'est du moins ainsi que nous

voyons 1es choses , deux univers part icul iers d'attributs

auxquels esL sous- jacente une contradietion, tentent

para1lèlement d"'asseoir" cette vérit,é, non pas comme commune

mais urriverselle, c'est qu'il y a deux discours dont chacun

cherchera des stratégies de pouvoir pour faire taire 1'autre

pour:

1. que n'émerge socialement et culturellement aucun aspect

de contradiction êt,

2, que 1'universalité ou 1e vrai sous le rapport cu ÏL

retenu initialement, s'impose à 1',hisLoire sociale et

culturelle dans 1'absolu. Disons les choses de manière un peu

plus claire en reprenant 1e fameux "rée1": quand un discours

idéologiQUê, au sens large du lerme, l',emporte face à d'autres

discours qUi 1e "côtOient" maiS sans effet,s à noÈer

manifestement sur 1a scène socio-cu1ture11e, il sera dit vrai

à f image de la norme qu'iI impose et qui Sera considêrée comme

" 1'exact îef|et du rée7"1.

1 L" lecteur de J.-Ccette idée aux résultats d'depuis environ vingt ârls:

Coquet voit bien que nous devonsune recherche que 1'auteur a entamée

1e rapport de ces résultats est(suite... )

Page 57: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

309

Ce ne sonL 1à que quelgues indicat,ions qui méritent plus

d'attention pour expliquer 1e pouvoir, en 1'occurrence celuidu conte.

Mais, guê signifie ce vo1et, où nous venons de parler de

c1iscours qui " se côtoient" pour t,enter d'asseoir 1a vérltéselon te1 ou te1 autre procédé ?

Nous sommes bien part,i de I'idée qu'i1 fallalt, définir/1-mHa)ya/ de f intérieur; eL enfin, i1 semble que ce n'estplus de f int,érleur que nous 1a déflnissons. I1 n'en est rien.Nous sommes resté fldè1e au principe initial; et dire 1e

contraire mérite quelques rappels. Le c21 et sâ variante, comme

exemples de t,extes de référence auxquels not,re coi:pus intègre

d'autres exemples, sont dans ce sens des preuves à 1'appui:pet:sons à -entre autres- ces contes où L'univers porte sur 1e

mariage endogamique vs exogamique, 1e départ vs retour du héros

à f ici social, 1'exi1 du héros dans un ai1leurs... Dans ces

contes, les attributs que comportent 1es univers, sont lous

coordorrrrés bien qu'i1s appartiennent à des isotopies

contradictoires, Le conle est alors r-tn lieu qui regroupe et

coordonne entre 1es tendances d'uniformités isotopes en

contradiction avec d'autres. Pour nous, i1 se situe au-dessus

de tout discours où , est mis en garde un univers de valeursparticulier au détriment d'un autre. C'est 1à 1'un des Iieux

1(...suite)publié en 1984, date de parution de Le discours et son slr:tet,T.1, op. cii. ,. en retraçant rapidement 1e parcours de recherchede notre auteur, i1 apparaLt, c1air, selon nous, euê sacontribution à 1'analyse sémantique du discours par SémiotiqueIittéraire, op. cit., étalt déjà une voie qui devait aboutirà l'élaboration d'une sémlotique dont nous retenons ce rapportsur " 1'évaluation" .

Page 58: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

310

où réside 1e pouvoir du conte en tant que genre de l-a

littérature orale. C'est aussi ce qui nous permet de dire que

1e cont,e- si on essaie de 1e définir par ce qu'il n'esL Pâs,

en prenarrt des textes de référence que nous ne considérons paS

comme contes, et où 1'univers de valeurs eSt à quelque lieu

comparable à ce lui des /mHai yat/ , non pas au niveau de la

véridictlon mais seulement à celui de l'objet évaiué (p)* dit

déjà ce qui semble nouveau dans ces textes de référence.

Prenons maintenant 1es choses tel1es qu'elles se

nanifesient socialement d'après nos enquêtes. Nous venons cie

voir que /1-mHaiya/ n'est pas auss:- " /mHai\la/" gu'on 1e drti

et pourtant, dans 1e langage courant, lê verbe / i|'a)t / ,

/yet|asa/ signifie "raconter n'importe quoi ou quel-que chose

d'irrsensé r eui n'a aucun f orrdement" . Çuestion: y a-t- ii

derrière cette réduction à un sens péjora|if de /1-mHa)ya/ une

tendance qui terrte d'acculer 1e conte en tant que tradition

orale ?

Er: fait I nous sommes ep présence d'une hypothèse: 1a

tendance dont venons ae parler, serait celle d'un discours

qt1 'urre analySe que nOUS ne SaUrionS nomme r mai S qUi S ' OCctlpe

de phénomènes socio-historico-cuIturels, peut affiner. Dans 1e

caclre de notre étude, cê discours se charge de transformer

p est ON vrai en p est IL vrai. Cecl est largement suffisant

pour que soit mise en évj-dence l.a nécessité pouI. lui

d'atteindre "1'obiectivit.é forte" par 1'opération d'un

trarrsfert pour aboutir à une relation ternaire: ce qui est

"croire" puisque restreint à 1a communauté est visé poul être

modalisé selon 1e " savoir" fortement objectlf.

Page 59: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

3L1

ces considérations peuvent, apparemment être soumises à une

vérification par des analyses qui contribueraient à

1'élaboration d'une socio-sémiotigue et d,une sémiotique ctes

cult.ures dans 1e sens des services que 1'une peut apporter à

1'aut,re. serrons 1a main du socio-sémiotlcien et disons qu,à

travers nos enquêtes, rrous nous sommes posé des questions à

propos des "couches sociales" chez lesquè11es 1e conte conna1t

encore urre place dans 1a vie quotidienne.

En général, c'est beaucoup plus chez les ruraux ou issusdirectemerrt de milleux ruraux suite à 1, exode que connai.t 1e

l'laroc oriental comme d'autres régions du royaume, gue nous

avons eu 1a posslbilit.é de recueillir Ies textes de notrecorpus. on dirait bien que ces contes sont affaire de ces

ruraux et non de leurs concitoyens citadins comme sithéoriquement puisque ceci est relatif- les uns étaientdisposés à acquérir un type de savoir qu,on ne retrouve pas

chez 1es autres, et comme si, aussi, les uns étalent moins

compét.ents que 1es autres en matière de ce t,ype de savoir.Jusque 1à, i1 sembre qu'i1 n'y a pas de problèmes, mais Lout

devient sérieux lorsque 1es uns évaluent le type de savoir qui

caractérise les autres: 1e discours des uns, se10n nos

enquôtes, pour asseoir 1e savoir de leur univers de valeurs,use d'une évaluation négative de t,out support langagier de

1'univers de valeurs des autres, Que reste-t,-11 à dire de

/1-mHa)ya/ selon 1e sens péjoratlf déjà signalé et des "ruraux,,

Page 60: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

relat,ivement aux " citadins "

sur 1es autres ne sont pas

d'être, du moins parce que

constatat,ions relativemerrt

définition de /1-mHa)Va/.

3L2

? Les discours évaluatif§1 d"= uns

aussl innocents qu'i1s onL 1'airce qui nous a amené à faire ces

rraives, était un problème de

Serait-ce ià encore 1'une des raisons pour lesquelles dans

1a réalité sociale une projection de "f ignorance du savoir"

se fait par 1es citadirrs sur les ruraux. Peu importe ,

1'essentiel- est, comme nous pouvions 1e prévoir, f intérêt, à

appréhender /1-mHajya/ comme oiscours qul construit 1e social

et 1e culturel par son univers de valeurs. Sinon, pour peu

qu'on adopte une prise de distance, i1 apparait que 1es

condit,ions sociales, qu'une sociologie pourrait prendre cômme

critère de différence entre nôs deux milieux sociaux, ne sont

pas suffisantes et ne peuvent non plus être omises: ia

dlfférence esL d'abord culturelle suivant, ies techniques dont

1es uns usent à 1a différence des autres pour se représenter

"ie morrde" par un savoir sous un rapport de vérlt,é. En d'auLres

termes, 1à ce ne sont pas primordialement les condit,ions

sociales à elles seules qui sont, responsables de 1a différence,

ne serait-ce que d'un point de vue d'effeLs péjoratifs

d'évaluation, mais surtout les discours véridictoires en t,ant

qu'issues de représenlations du monde de chaque milieu (1'un

utilise davaritage 1e conte pour ne parler que de ce prodult

comme enseignement de valeurs; 1'autre utilise plutôt un

1 Nou*apparaissenLdomaine queéventuelles

songeons essentiellement aux discours quiabondamment dans les chants populaires commenous évoquons à titre occasionnel pour des

recherches dans 1'avenir.

Page 61: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

313

discours gui use moins du langage allusif approprié, semble-t-

i1, culturellement, parlant, au traitement des affaires 1es plus

graves seLon 1'expression de D. Paulme, 9uê d'un langage que

rrous appe l le rions " dén otatit diîect" ) .

Bien sûr, cette schématisation est exagérée, mais elle ne

nous empêchera pas de ré1térer 1e constat que le conte

populaire oral- est nettement plus courant chez les ruraux que

chez 1es cltadins, termes à saisir aussi dans un sens de

qualification des uns par les auttres ou encore de

reconnaissance deS uns ou des autres comme appartenant à lel

m1l-ieu et non à tel autre. Toulefois, sous un autre volet, nolls

SAvonS que 1e corrte en tant qu'UniverS de valeurs rte tienL

compte de manière exclusive nl du discours des uns ni de ceiu:

des autres; i1 se sit,ue au-dessus de ces considérations'

Ceci semble contradictoire; néanmoins, pour surmonter

cette contradiction apparente, rappelons 1es deux sens du terme

/mHa )ya/ t univers de valeurs qui ne peut être soumis à

1'évaluatiorr individuelle et hi-stoire-réclt f ict,ive en relatiot:

avec 1e récit,ant..

L',unlvers du conte est irroif f érent. à tout ciscoLlrs qui

tente d'exclure les ef f ets ,l'un autre i on peut même y repérer

des codes qui vont jusqu'à a<iopter ceux oes discours qui

toutes proportions gardées- sembl-ent 1e " récuser" d'une

certaine façon1 tout en Ie récupérant d'après nous, pour

1 L'ide" doit être prise avec précaution et distance carelle s'appuie sur une réaction que nous avons simplement notéedarrs un rapport personnel d'enquête après avoir contactéséparément t.rois /fuqha/ (plurie1 de /fqih/) dont nous nepouvons tout de même pas dire qu'ils représentent une

(suit,e... )

Page 62: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

314

utillser ses techniques d'asseoir 1a vérité sous un rapport

universeli mais, qui saura que Ie conte est (ou n'est pas) un

produit plus "ancien" que ces discours utilisant des contenus

thématique s sous- j acents non seulement à leurs codes

sémantiques mais aussi à ceux de contes particuliers ?

Résumons. I1 f al1ait expliquer dans quelles corrditions l.e

discours véri-dictolre posé au début pouvait, êt,re soumis à une

révision par I'apparition, oü plus exactement, par 1e déjà-1à

d'autres dlscours avec lesquels i1 entretient des relationspour que 1e traitement port,e sur une même proposition (p). Pour

ce faire, nous avons tout naturellement opté pour Ia voie qui

consist,e à considérer 1e conte comme unlvers de valeurs. Â

présent, i1 faut rendre compte de notre proposition et de notre

posit,ion globales portant sur une définition que nous pensons

posslble à faire sur 1e conte comne discours et univers de

valeurs sui-vant 1es rapports entretenus entre les ressôrts

cléflnitoires que nous reformulons de 1a manière suivanLe:

soienL deux attributs d'un uuivers supposé théorique {A et non*

A) appartenânt à deux isot,opies (a et non-a) coordonnées dans

cet univers suivant deux discours ( disc. 1 et disc. 2 )

1(...sulte)quelcorrque tendance sous 1e rapport de leur statut rlis-à-vlsde /1-mHajyat/r pour voir ceË ang1e, i1 faudrait trouver destextes attestés qui t,raitent de 1a quest!'on' En attendant,disons seulement que cette réact.ion se résume chez cespersonnes contactées par un étonnement manifeste qui signifiequ'i1 est j-nconcevable qu'un homme sensé -pour désigner1'enquêteur que nous ét.ions- puisse s'occuper de /1-mHaiyat/(sens péjoratif). Or, nous 1e savons (cf.notre t.hèse de 3ecycle et particulièrement 1e code figuratif spatial conme formedu mythj-que, op. cit.), dans Ie conte, il se peut que soitconstruit un univers dont le code sémantlque est tout à faitrapprochable de celui du discours reli-gieux.

Page 63: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

comparables par notre

articulations par un

315

relation de contradiction.

schéma:

Illustrons les

Eonction coordonnatrice

,/\ Univers de valeurs

n-a p est IL vrai

dlsc. L

p est ïL vral- ------è

{, (*)

p est, N VTAI

,! {*) p est fL vrai

,/Fonction coordorrnatrice

Faisons un bref commentaire de ce schéma en partant de

(*), nous supposons que le disc.1 et le disc.2, à saisir selon

p est ON vrai, "cohabltent" socialement, et se manifestent

suivant un rapport de concurrence provisoire en attenoant que

1'un s'i-mpose pour l'emporter et déclaret " tJn état de choses".

Dans ce cas:

1. si Ie pouvoir du dlsc,1 1'emporLe sur celui prétendu

par 1e disc.2, p est, ON vrai passe à p est TL vrai: c'esL au

disc. 1 que revient 1a vérité sous 1e rapport du IL, êt,

no

dl

v

o

Page 64: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

316

paral1èlement, 1e disc.2 perd toute prétention à cette vérité(un discours dont 1e pouvoir est, si 1'on peut dire, "nu1"

(ô));

2, si 1e pouvoir du disc.2 1'emporte sur celul prétenciu

par 1e disc,L, ce sera au disc.2 que revient cette vérité.Ce rapport se justifie par 1a fonct.lon non coordonnatrice

entre À et non-4. ces discours ne peuvent se confondre avec

celui du conte proprement dit,; et s'11s sont dlts contes qui

se manifestent sous forme de récits particuliers auxquels eslsous-jacent ce rapport d'exclusion par 1a fonction non

coordonnaLri.ce, les attributs qui reur sont sous-jacents se

coordonnent dans 1'univers du conte en tant que "st,ructuîe

hiérarchique de contenu". Selon ces propos, la fonctioncoordonnatrice attribue immanquabrement à 1'unive::s du conLâ

sa caractéristique d'être un discours à recevcir sr:irratri p esi,

IL vrai.

Ceci revient à dire que les structures oes r6c:_Ls

(/1-mHajyat/) cloivent êt,re modelés par un niveau srimaniique qr:i

puisse leur faire correspondre des struc-r-Lires hiérarchiques d.e

contenu. Ce modelage est une affaire d'approches qui. visenL les

récits comme univers sémlr:tique de valeurs. Ceci ncr:s para-ît

une ouverture qul promet 1'exploitat,lon de tous 1es acquis du:

aux "Autorités" sur f inquiétarrte quest.ion au sens ie plus

large: qu'est-ce qu'un conte?

En qualifiant, d'inquiétante cette guest,ion, nous voudrions

préciser gue notre t,entative de définir /1-mHa)ya/ est à coup

str lacunalre. Toutefois, 1es quelques aspects que nous avons

considérés dans ce but montrent f intérêt qu'il y a à éclairer

Page 65: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

317

1e Iangage allusif du conte et. .à abandonner 1es voies qui

considèrent ce produit comme récits-histoires: les abandonner

non pas dans 1e sens de les renier -inutile de le dlre- mais

dans Ie sens de reconnaltre ce qu'on leur ooit en essayant de

contribuer à une élaboration de perspeetives qui puissent 1es

féconder1. Ce principe nous a amené à tqnir compte de la

manière dont Ie conte franchit,1es frontières qu'il y a entre

discours qui organisent leurs Lissus par 1'absence de toute

fonction coordonnatrice ent,re att.ributs opposés au même iitreque les isotopies auxquelles ces derniers appartiennenL.

C'est en cela et par sa soumj-ssion à ce proqramme de

11sib11ité que 1e conte populaire oral ressemble au mythe. Le

prix de cette position est cetle confusion flagrante, ou du

moins, {üi peut. être jugée comme tel1e si on ne 1a remet pas

au soin des divers textes de référence que notre corpu§

présente en partie, et qul peuvent être analysés dans ce sen§.

Sinon, nous en sommes conscientr cette confusion peut nous

cotter cher à moirrs que nous précisions que le conte n'a jamals

ét.é pour nous autre chose qu'uni.vers sémiot,ique de valeurs, et

que s'i1 doit être distingué du mythe, nous formuletons un

critère clans 1e cadre du programme de lisibi11t,é.u nir*uo des

résultats auxquels tel1e ou te1le autre lecture peui aboutir:

ceci concerne 1es angles et 1es procédés de saisie de

f intention de chacun des produits.

1 Nou= ne pouvons trouver dece11e de " féconder" , util1sée bienStrauss dans ce même ordre d'idées§tructure et la forme".

me111eure expression queavant nous par C. Lévi-

, êD s'intéressant à "1a

Page 66: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

318

De façon préméditée, nous, ,venons de faire le Lour de 1a

question de confusion en peu de mots car ceci nous semble moins

problématique que 1a nécessité d'introduj-re, êfl termes de

t.echniques, des possibiliLés d'approcher /1-nHajya/, eui est

d'abord et avanL tout une "parole silencieuse". L'expression

est anLit.hétique mais, en gros, si on demande au conle de quci

i1 parle, il gardera Ie silence en détournant, Ia question pour

donner f impression qu'i1 parle en racontant des histoires"mensongères" ou plus exacLement "fictives". A-t,*i1 répondu à

1a question de "de quoi i1 parle?". C'est pour ceite raison que

1e conLe, êt à plus forte raison s'i1 est populaire et ora1,

const,itue à 1'état actuel,

d'énonciation "marginale " .

à notre connaissance, ufl type

Le conte populaire oral sembl-e s'arracher au regard

analytique qui accorde au récitant ( ou f i.nformateur) un

irrtérêt sans tenir comle du niveau sémiotique orgânisateur desI

structures synt,actico-sémantiques. Sous cette condi,tion, 1a

forme ora1e, selon qu'e11e est mise à jour non pas par un

informateur-locuteur mais par des informateurs-locuteurs dans

un paradigme, sera récupérée et considérée comme contrainte qui-

s'emboite à ce niveau de transmission du conte oral! pour

emprunter un terme à D. Maingueneau, nous dirons gue c'est

cette " vocalité" , comme voie spécifique du conLe que nous

considérons pertinent,e pour être 1'une des contraintes des

positions d'énonclat,ion dit,e "merginale" dans un réseau où les

correspondances qu'e11es entretiennent sont emboltées 1es unesl

dans 1es auLres. Dès lors:

J

Page 67: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

319

1. Ie conte oral dit populaire ne peut être déflni par le

recours à 1'acte individuel de sa rëcltat,ion;

2. même sl 1'on admet que cette forrne orale est une

multiplicat,ion de voix implicit,ement présente en même temps que

ce1le des récit,ants, i1 faudrait que ces voix soient prises

dans un serrs qui corresporrd à une vocalité spéciflque d'où 1e

conte tire son aulonomie par rapport aux récitants, chose gui

1e rapproche dans une certaine perspective du mythe;

3. Ia voix multiple -si on peut 1'appeler ainsi- sera dans

ce cadre 1'ensemble des récitations et des conditi-ons Ce

produclion, attribuabl-e au socio-culturel par f intermédiaire

du "populaire" dans un langage capable d'admettre au conte 1e

statut de pouvoir être auLonome et être indépendant de ses

récit,ants chaque fois individuels, quelles que soient 1es

traces de subject,ivit,é que chaque version peut comporLer.

Tenant compte de cela, i1 apparait que les récitations

introduisent,, dans les meilleurs des cas, des pseudo-formes

nouvelles qui n'entrent pas en vigueur au niveau des conditions

profondes d'acLualisation des investissements socio-cultureLs

dar:s 1e discours narratif . Ces corrditions que nous qualif ions

cle profondes jouent un rôl-e contraignant etlou neutraLisant des

traces de sub j ectivit,é:

1". si ces traces sous-tendent des positions évaluatrices,

1a modalité sous laquelle )-'objet est vu est contrainte à

rester corrjoinLe à celui qui 1a profère; e11e ne peut a1Ier au

delà de cette instance pui-sque 1'univers de valeurs du conte

ne se reconnait en aucun cas sous la signature de ce suiet;

Page 68: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

320

2. si ces traces re1èvent de modificat,ions dans la reprised'une version, e11es ne peuvent, enqore une foj"s, permettre une

prétention à 1'appréciation de 1'obj et: les modificationsdoivent être isotopes dans 1e dispositlf d'ensemble. Dans 1e

cas contraire, nous dirons que 1e savoir que communigue le

conte n'est pas const,it.ué chez les su jets responsâbles des

modifications, et que 1e pouvoir - prorluire un, discours

d'évaluat.ion est illusoire car on ne peut pas dire qu, i1

s'applique au disposit,if d'ensemble.

Partant, de ces point,s , nous re j oi-gnons une remê.rque

quelgue peu traditionnelle: iI esL grand temps que soit,

revendiquée 1'évict,ion de f indifférence utilisâtrice de

/mHa )val au sens d'histoire pour signif i-er 1'unil'ers de valeurs

socio-cultureJ-1es; et de manière paralrè1e , " on ne peüt direque tous 7es^réc!t,s soient. des contes"1. Nous estimons gu,une

analyse qui se prononce sur 1e conte, euê1 que soit 1, angle

auquel e11e essaie rle 1e ramener, a tout intérât, à ne pâs ierédulre à des strucl:ures linguistigues ou à des st,ructures

narraLives; à nos yeux, e11e peut êt^re plus prometteuse pour

peu qu'elIe f asse ut1 ef f ort, pour exploiter 1es ouvert,ures des

études qui traitent du ciiscours rerativement au sujet etqu'eI1e y accède en rapportant Ie conte à sa " Ëource

1égitinante"2. I1 est évident. que pour ce falre, 1e niveau de

1'énonciation doit être pris en compte au premier rang et guê,

G. JEAN, gJ:. cit. p.2A.

Nous faisons nôtre cetLe expresslon de D.

1

)" ( un ) t,exte n'est accessible gue rapport,é1égitinante" , "Le tour ethnolinguistique dediscours", Langaqes, No 105, p. 118.

Maingueneau:â sa source1'analyse du

Page 69: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

32L

vu 1es particularit,és du .conte populaire oral , un autre ef f ort,

est à faire par rapport aux enseignements 1es plus connus.

Pour limiter ces propos à notre recherche, i1 apparait que

même 1'étude des quelques corrfiguratiorrs consldérées peut être

réévaluée suivant une double mise en oeuvre de notre recours

à 1'évaluation, sans 1aquel1e i1 ne nous aurait pas été

possible de comprendre 1a notion de " 1égit.imit,ê" ( source

1égitlmante ) :

1. le llnguistique sera lu à travers ce gu'i1 présupposê:

"I'ethno-" au sens de peuple, siège d'un univers de valeursi

2. par cette lect,ure du linguist,i.que, 1e langage du conte

s'avère sous-tendu par une espèce de "générateur" qui indique

sa Iégltimité er1 guise de réponse à Ia questiorr que nous nous

permettons de formuler à 1a manière de M. Eoucaultt "qui esf

fondé â tenir cette sorte de langage ?"

Ceci nous ramène à 1'une de nos prenières tent,atives de

cerner une déflnition possible de /I-mHajya/: d'une façon ou

d'une autre, 1'analyse de celle-ci ne peut, t j-rer d'exploit, à

partir de restrictions du présupposé à un sujet, d'énonciation

cians un cadre vu sous 1'angle de " 1'unicité " et de

"1'événementie1". S'i1 nous est accordé que ce niveau

présupposé de 1'énonciation peut êt"re considéré opératoire dans

1a pratique analytique du conte, il ne reste plus qu'à dire que

"1'ethno-" est au dessus de tout, i1 êst tout pour 1e conte

oral de même que ce dernier s'avère 1e langage utilisé pour ces

fins.

Le linguistique et 1e narratif dans /1-mHalya/ ont cette

fonctlon de préclser f intérêt du niveau présupposé avant même

Page 70: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

322

qu'i1s servent à une mise en discours. Là réside, à juste

tit.re, nous semble-t-i1, 1e choix d'une conjugalson de /iïa)i/à un passé accompli qui inaugure "Ie faire", 1'acLe

correspondant au "verbe" (1a narratiorl en tant qu'acte ou prise

de parole ) .

Tout compte fait, 1es conditions comme modalités de

1'énonciation narrative du cont,e populaire oral peuvent

bénéficier d'une meilleure saisie para1lèlement à

f identificat,ion de l'Àutorité fondée à assumer re langage

allusif du conte et de son univers de valeurs. par 1a même

occasi-on, 1e souci d'être économique dans cette tâche se rend,ra

compte que ce n'est plus seulement 1e vo1et. de 1'oralité qul

int,éresse son attitude de repenser 1'énonciation, c'êst plutôtl"'activité langagière tel1e qu'e11e se manifeste socialement

et se rapporte directemenL à une gestion de discours du conLe,

discours qui est au fond une aspiration à faire une

clémonstration du fonctionnemenl culturel: une partie prenante

de 1'organisation d'un univers dont, 1e pouvoir.Lente

d'organiser "1e village" et 1es conduites des êtres du vi11age.

De fil en aiguil1e, et même si nous nous somnes

rerativemenÈ élolgné de 1a t.âche de décrire nos contes, nous

avons été amené à repérer -en essayant d'a11er vers un niveau

c1e lisibilitë gui puisse rendre compte de f intérêt à prat,iquer

une recture sous-tendue par un angle homogène- une démarche qui

consiste à faire du "rituel'énonclat,if un plan qui exige que

ces modalités t,iennent compte de "1'ethno-" avec toutes 1es

strates qui 1e définissent particurièrement, à travers 1'universde valeurs r guê 1'activité discursive du conte prend en charge

Page 71: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

:i

I

323

pour 1e dire, 1'exprimer, ou plus grossièrement, le traduirepar des représentations. ce niveau est alors apte à fournir 1es

propriétés de f inslance " fondée à tenlr cette sorte de

1angage", Err outre, 1es invest.issements sémantigues darrs 1e

conte, même s'i1s se rapportent au niveau de 1a manifest,ation

à des parcours qui présentent des cifférences reiatives,peuvent être ressaisis, pour êt,re étu<iiés, du point. de vue des

composant,es du conte à Ia manière du mythel ".rr non seulement

i1s dépendent du conte, mais i1s y " sont. déjà des contenus

constitués"2,

A ce propos, nous avançons I'idée que

sémiques dans 1'uni-vers sémantique importent

noLre démarche err posant comme "compl_ice" des

conte, 1e recours à 1'énonciation narrative.

1es câtégorles

énormérnent dans

composanLes du

Dans cet, ordre d'idées, nous comprenons Ia nécessité

d'élaborer un " dictionnaire mythologique " 3 car Éb serait,1'outi1 par excellence qui proposera 1es meilleurs servicespour rendre économique , d'un po1nt. de vue sémantierlê , l_a

narration sous-jacente à 1a dlversit,é des récits. En p1us, i1

1 R"pp"lons que ces propos rejoignent ceux tenus par A. J.Greimas à propos des "composantes structurales du mythe", Dusens , op. cit. pp. 1"86- 196 ; en out,re , la distinct,ion conte /mythe cesse d'être opératoire du point de vue "génétiguê",voir D. PauIme , op. ci-t. p. 45.

2 e. J. GREÏ}{AS , Du sens , op. -Jit " , p, j.93.

3 g. J. GREIMAS, Du sens, op. cit. pp. 192-Lg1i en ce quiconcerne les horizons de recherche sur 1a tradltion ora1e, enparticulier 1e cont,e, i1 est peut-êt,re préf érabre de parlerd'un dict.ionrraire anthropologique; signalons qu, à défautci'existence d'un tel dictionnaire, 1a réalisation projetée duDictionnaire de langue et de culture au Maroc oriental par IeGroupe de Recherches en Lexicographle d'oujda / Aix-en-Provence, sera vraisemblablement ut1le dans ce sens.

Page 72: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

324

fournira des critères', de base au gros problème gui se pose

encore, celui de f identification assurée de ce genre

IiLtéraire qu'on appelle conmunément conte "populaire" sans

Lrop savoir ce qui ne l'est pas.

L'intérêt essentiel qu'i1 y a dans cette tâshe réside

darrs r

1. un projet de recherche comme l-e nôtre n'aura aucune

raison d'êLre, sinon iI n'aura aucune raj.son de procéder par

tâtonnements dus à 1a nature de 1'objet quand on a 1a

convi ction

soumettre

chez nous i

1 'ob

tort ou à raj-son, qu'i1 y aurait des risques à

jet-conte aux modèIes déjà éLaborés ailleurs que

) méthodologiquement, parlant, 1'élaboration ae

Èechniques, si bien même que ces technlques soient dj-fférentes

les unes des autres sulvant, 1es angles d'étude, serait possible

de sorte que 1a lisibifité bénéficie d'une cohérence,

partlculièrement au niveau des descriptions des contenus et des

articulations qul les structurent et établissent, entre el1es

des rapports de "modifications".

Ces t,echniques auraient, eomme crit,ère d'élaboration un

consensus sur ce qu' i1 faut privilégier et ce qu'iI faut

négliger dans L'analyse propremenf, dite. Nous nous souvenons

de notre propre point de départ,: un dépou11l-ement lexlcal du

recueil cle nos contes oraux sans,trop savoir au juste vers où

1'aventure allait nous conduire.

A présent, il est temps de dire gue si nous devons

reconnal.tre un mérite aux conditions pénibles de cette tâche,

e'est parce qu'i1 nous a été possible de convertir 1'objectif

Page 73: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

325

de 1'étucle lexicale en une ouverture sur la manière

d'appréhender Ies utilisations lexicales en contextes

configurat,ifs comme paramètre de construction d'un univers de

valeurs; et tout ce que nous avons dit jusqu'à présent à propos

de 1'évaluation, de I ',énonciation. . . est un effet de cette

ouve rture .

si nous disposions d'un dicticnnaire qui indique 1es

investissements, les charges ou les effets de Sens cult'urels

des ut,ilisations lexicales dans 1e conte populalre, nouB n'en

serions pas 1à à essayer de trouver et à rechercher les

affectations par ces effets de Sens de termes à des dimensions

culturelles du conte dont les manifestations narratives

construisent des représentations sur 1e social'

1. /1-rnHaiYa/, /1-Hkava

Nous avons vu que 1a notion de /1-mHajya/ devalt' être

conçue sous deux volets pour distinguer entre 1es deux

aCCeptionS de "COnte", et de "réCj-t" oU "hiStOire de faiis OU

d'événements". À préSent, nous ainerions intégrer dans 1'étude

un autre point: à quelles condit'io11S,, s8 sounet 1a désignat'ion

de /1-mHa)ya/ Par /1-HkaYa / ?t

1 l,t. Beaussier signale le sens dehistoriette"; quant à H. Mercier,narraLion, mythe". Notons que nos deux

" anecdot,e , récit, conte ,

iI signale: " anecdote ,auteurs ne signalent, Pas

(sulte...)

Page 74: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

326

.. Ce nouveau t.erme (/1-Hkayal) est, utilisé dans notre textede référencer dans Ie sens de "récit d'un rêve", ce sens nous

amène à étab11r un rapport entre /1-mHa)ya/ et /r-Hkaya/, un

rapport qui engage un débat, autour du conte et du rêve: ce qui

est rêve devient, conLe selon noLre texte de référence ou,

autrement, 1e conte est. issu d'un rêve; Ia phase du passage du

rêve à /1-mHajya/ est 1a seule indication qul distingue 1es

deux, sinorr 1'un est solidaire de 1'autre. Àussi 1e conte a-t-i1 un critère définitoire qui 1e rapproche du rêve au même

t,itre que le retour du récitant de 1'ai1leurs selon Ia formule

finaler je suis revenu de 1à-bas... ce rapproehement nous amène

en effet à penser que 1e récitant d'un conte pendarrt 1a

narration ressemble à un rêveur qui s'évei11e et fait de son

rêve un récit qui s' j.ntègre dans 1'ensemble du disposit,if de

I,hist.oire du conte. En d'autres termes, de }a même manière que

1e récitant déc1are sa dist,ance ou sa dlsjonction selon ra

formule finale de 1'univers du réclt, pour effectuer un retrurà "sa réa1ité", 1e rêveur -en 1'occurrence 1e roi dans C"j*

extériorise son rêve dans 1'évei1.

Ajoutons guê, dans notre conte, le rêve fait, agir Ie roicomme si le disposltif globar de ce cont,e était, un discours où

un jeu de mlse en abyme sert à sa constructionr le récit du

rêve est non seulement reproduit tel quer dans 1e cont,e nais,

1(...suite)1e sens de "récit d'un rêve" relevable dans notre t,exte deréf érencelr C7 et conf irmé par nos inf ormateurs

1 /naD I-maIik mexlue w f-S-SbaH eawed Hkayt-u L-L-wzLr/{le roi se réveilla en sursaut (après avoir fait, un rêve); êt,le matin, i1 se mit à raconter le rêve à son minist,re).

Page 75: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

327

aussi et surtout, i1 se laisse saisir sur deux plans: 1e rêve

proprement dit (/1-mnam/) et 1'évei1 où Ie roi demande à sorr

ministre son avis1. En ce qui concerne ce dernier p1an, i1 est

intéressant dans 1a mesure où on voit blen que c'estprirrcipalemenL à une modalité qul fait. défaut, chez 1e roi que

1e rôve se raÈ.uache. Notre texte dit que le rêveur, étant

démurri du pouvoir avoir urr enfanl, s'adresse à Dleu en

i'invoquanË de lui en accorder un; ensuite, pâr f intermédiaire

du rêve, i1 1ui devient possible de réaliser son vouloir selon

une condit,ion qui porte sur " f intégrité moral_e " <ie 1 'enf ant

désiré. Dans urr certain sens, 1e rêve manifeste un programme

par lequeI 1e sujet, (1e roi) apparait en conjonction avec 1e

pouvoir-liquider son manque: âvoir un enfant ou, en ci'auLres

termes, 1e rêve actualise 1e pouvoir du sujet pour réaliser son

programme et, pâr 1à même, iI rappelle Ie pouvoir de Dieu. La

structure actanti-eIle montre que Ie roi perd son pouvoir devant,

celui de Dieu; mieux, i1 doit. choislr entre un garÇon et urle

fille sous Ia contrainte de ce pouvoir suprême êt, qui plus

est, 1e chaix de 1'un n'est pas moins, amer que celui de

l-'autre. Àutrement dit, 1e pouvolr de Dieu n'est pas marqué par

le posit,lf à f image de 1'atterrdu ou f invoqué par le roi du

momenL que ce dernier, en recevant 1'enfant demandé à Dieu,

doit aussi recevoir et, subir Ies tares de 1'objet reçu. Serait-

ce une façon dont Ie pouvoir de Dieu s'affirme en faisant du

L/yTle -kau roi:t'obéirapouvoir )

l-wzir gal 1-l-ma11k 1-we1d ma Leqder / teHHekm-u \^r ma

f w 1-bent teqder t,eHkem fi-ha/ (ar: 1e mlnisLre ditun garçon, tu ne pourras pas Ie maLtriser et 11 ne

.pas; par contre, une fiI1e, Lu peux Ia soumettre à ton

Page 76: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

328

roi quelqu'un qui dolt recevoir un don et subir les défauts,au sens moral, qul y sont "inject,és,' ? Sl c,est 1e cas, nous

penserons bien que ce don cherche moins à satisfaire 1e sujetdestinataire (1e roi) qu'à affirmer 1a hié::archie du pouvoir:

Dieu, dans ce cas, accorde un don part,le1 pour affirmer son

pouvoir hiérarchique à celui du roi.Toutefois, pour peu qu'on prenne au sérieux cette voie de

lecture, i1 apparait que ce rapport entre Dleu et 1e roiprésuppose un autre rapport -supposé égalitaire entre l_es deux

prot,agonist,es- que 1e contrat du don remet en cause pour que

s'y installe 1a hiérarchie. cette isotopie religieuse est 1,un

des ressorts sémantiques que sous-Lend 1a structure actantiel"lepar L'intermédiaire du rêve, /l*Hkaya/, comme récit ci'un rêve,

est alors dotée, au niveau discursif , d'une f onct,ion qr:i assure

1'aboutissement et 1a réalisatj-on d'une Lransformat,icn déjà

programmée: 1e devenir du sujet est déjà programmé par 1e

rêve1. ce devenir qui ne dépend pas du sujet comporte err Lui

une sanction toute tracée avant même que 1a performance dans

1'évei1 ait, lieu.

Partant de ce dernier constat,, /1-Hkaya/ semble entretenirun rapport de sens étroit avec celui du discours de prédiction.A ce stade, i1 apparal.t que /l-Hkaya/ se distingue de

/1-mHajya/ 9ui, elIe-même, se distingue de /l-qSLytTa/2 p". au

moins le t,rait suivant: dans /1-Hkaya/, comme récit d'un rêve,

1 /rak Gadl tewled merra L-z-zmanl (ar: Lu engendreras unseul enfant dans ta vie ) .

. 2 Entre autres contes, citonsnatet mm-na. . , / ( ar: quelle est. t,onsoeurs, notre mère est mort,e... ).

C38: /ki qSlyyt-kfHna sebeahistoire ? I{ous sommes sept

Page 77: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

329

le sujet, est en position d'impliqué dans un programme déjà

étab1i par le destinateur. Ainsi, cette manière dont 1e rêveur

n'a en quelque sorte aucune mainmise sur son rêve ressemble à

ce11e dont le récit,ant rr'a non plus aucune mainmise sur le

conÈe proprement, dit. Par un rapprochement, cle ces données, nous

pourrions conclure pâr:

- /l--mnam/ (rêve) est au rêveur pendant Ie sommeil

/1-mHa)ya/ (cont,e ) est, au récit,ant pendanÈ 1a narration

- /L-mnam/ (rêve) est au rêveur pendant 1'éveil/1-mHajya/ (récit,, hist,oire) est au récitant lors de son

ce quq -

à "la réaIité" selon la formule finaIe. : -

i

ce que

re tour

Retenons de cela ce point de vue qui semble osé en

apparence! 1e rêve pendant 1e sommeil s'avère homologabie au

conte; et 1e récitant, cie ce dernier, au rêveur. De même,1e

rêve raeonté par 1e rêveur évei11é devient homologable.au récitdu réclt,ant énonciat,eur cle Ia formule f inale,

.Ceci nous éclaire sur les condltions de vérité du conte:

à Ia manière du rêveur qui- est en quelque sort,e "traversé" par

son rêve suivant des déterminatlons qui lui sont extérieures,

1e récitant est aussi t,raversé par 1e conte. f1 nous semble que

c'est à ce titre que 1'objectivité est fortement présente aussi

bien dans le rêve que dans le conte, ne seraj-t-ce que parce que

1'un et 1'autre "refoulent" à 1'extérieur de leurs univers

toute personne, âü sens linguistique, gui se donne f illusionde pouvoir émet,tre une évaluation: y adhérer ou ne pas y

adhérer ne change rien au fait qu'i1 y a du pain sur 1a

planche. Par 1à même s'explique Ia manière dont le conte faltvaloir, pâr ses propres moyens langaglers, des données qui Ie

Page 78: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

330

définissenL suivant " ( ses ) Sources dans 7es conportenents

cultureJs et sociaux des honnes qui ( J' ) ont produit"T. Aussl,

i1 devient clair que c'est nolns 1'aspect de /zj-k/ (ber),

/bekrL/ , /qaclim z-zaman/ (ar: temps anciens) qui fait, du cont'e

un produit sOuvent attribuable d'une manière ou d'une autre au

passé, euê I'aspect "contemporain" dans }e sens où, à nos yeux,

i1 n'y a pas de sociét,é Sans préoccupations dont, entre autres

formes, cel1e du conte rend conppte. N'est-ce pas 1à une

fonction du conte qu'on ne peut mettre Sur 1e compte du seul

temps ancien?

Il est vrai que ce qui frappe, âü deIà de 1a troisième

personne du récit,, est }e temps dlt passé, mais suivons

E. Benveniste: ce temps est celui du récit, êt étant cionné

gu,on ne peut dlre que tout récit soit. un conte, oh ne pourra

pas confondre le temps du conte et celul du récit. De ce fait -

bien que f idée soit excessivement schématisée- Se laisser

entralner par cette "p1ongée" dans 1e passé qui semble aller

cle SOi lOrsqU'on parle dU cgnte, est Une erregr en Soi: si Ie

conte rappelle "14 sage§§e des anciens", iI ne se réduit

nullement à " 1',ancienneté " au Sens pé j oratif ( ce qui est

révoIu2) , puisque cette Sagesse résu]t,e de 1'ensernble des

comportements Iiés aux préoccupations de }a sociét,é

indépendamment de dét,erminations temporelles. A 1a limite, nous

pourrlons supposer que deS récit,s ne Soient plus en usage soit

I c. JEAN, op. cit. p. L57.

2 Citon= des expressions péjoratives comne/yen n zLk.../ (berr les gens d'autrefois, des1es anciens).

ziBbab n zLk/ ,

t,emps anciens;

Page 79: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

331

part^iellement soit, totalement, et que d'autres soient, "créés,'

en §'apparentant aux premiers, mais tant, qu'i1 y a société, i1y aura toujours un besoin de raconter des récits dont, lesthèmes re1èvent de préoccupations socio-cu1ture1les. De ce

point de vue, le conte serait plus intéressant à étudier en

tentarrt d'y saisir 1a manière dont 1'homme façonne son

" caractère " en fonction de ses aspirat,!ons , besoins , -

circonstances, conditions, au cours de son histoire, que d,yvoir une "circularit,é" formerle de ses ,mises en discours.Essayons de récapituler:

1. /1-mHa)ya/, selon notre texte de référence c2L, relat,eun parcours que Ie su jet (1a mère des enf ants ) aurai_t.

effectlvement vécu i /r-Hkaya/ pose à un niveau virtuel_ une

valeur investie dans un devenir qui correspond à une

transformation, or) 1'actualisation de Ia relation disjonctlvedu sujet avec l'objet de vareur, est suivie d'une réalisationde Ia reration conjonct,ive dans 1'évelr. Autrement dit, "lerée1" du sujet, dans /1-mHa)ya/ ne peut être comparable à celuidu sujet dans l1-Hkaya/ que si"'nous tenons,compte du point,

suivant: 1e premier récit. témolgne d'un regard rét.rospect,if sur

1a réalisation de 1a relation conjonctive entre 1e sujet etI'ob j et de valeur; 1e seconcl , cl, un regard prospectif à lamanière d'une "pré-dlction" gui ant,icipe sur " ce qui va avoirlieu" , y compris la sanct,ion;

2, /1-mHa)ya/, avions-nous dit, est un discours modalisé

selon le vrai-réel gue seul re père de Ia fllle racontant sa

propre hlstoire, à 1'exclusion des enfants, saislt comme te1.

Page 80: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

332

Cet,te caractérist,ique qui vise un destinataire particulier

n'entre pas en jeu dans /L-HRaYa/ i

3. enfin, /L-qSiyya/ est à certains égards visiblement

proche de /1-mflaj ya/ i toutefois, en tant que discours modalisé

selon 1e vrai-rée1, e11e ne s'adresse pa5 à un destinataire

particulier dans 1e sens où e11e ne vise 'pas 1'excluslon

d'auditeurs particuliers représentés dans 1e récit.

/I-I{kava/. Ie récit d'un rêve

Qui dit rêve dit sommeil et aussi évei1: le rêve fait

pendant 1e somrneil Se reProduit, clans 1'éveiI du rêveur. Ceci

est ce que notre conte, }e C7 , donne comme indication

11'utilisation de /1-Hkaya/ qul esl 1e récit d'un rêve i €tr

étant, donné que ce réciL eSt en quelque sorte Ia matriee de

notre conte, son contenu nous amène à retenir Ie sommell et

1'éveil comme é1émerrts de 1'élaboration du conte.

Pour éclairer ce point de vue, nous nous propo§ons de

faire une comparaison entre deux contextes d'utilisation du

rêve dans deux contes diffërents: C7 et CL2L. Dans Ie prenier,

1e sommeil est utilisé comme notif de 1a configurat,ion où 1e

1 laix I-bsira bdat tgul eini-ya €ini-ya gal l-ha mulayeebdelqader b-'idn Ilah ywe1l1w 1-k w f-I-Hin bdat t,/uf bHalIli dak î-fi kan Gi mnam (HuIn selon 1es versions)/ (ar; laviellle se mit à dire: IItês yeux, mes yeux. Moulay Abdelqaderlui ditr euê Dieu te rende 1a vue. Subitement, }a vieille ievitIa tumière du jour conme si c'était un rêve).

Page 81: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

333

roi se voit, attribuer 1'objet demandé à Dieu: 1'engendrement

d'un enfant. Dans le second, ce n'est plus le sommeil qui est

utilisé mais 1'éveil dans un contexte où Ia viei11e, présentée

comme aveugle, se voit attribuer 1a vue demandée au saint

dé1égué de Dieu. Ce rapprochement, comme on peut 1e constat,er

s'appuie sur 1e fait que 1e sommeil et 1'éveil n'a1tèrent en

rlen 1'utilisation du rêve dans un contexte où apparalü,'à un

niveau sémantique , une isotopie religieuse sous- j acent,e à

f invocation de Dieu ( ou son délégué ) . Sous "ul angle ,

l' j.nstance divine, représent,ée par des dé1égués (anges,

sainls ) , assume un rôIe qui consiste à pïoduire I'archétype de

f irréa1isab1e indlviduellement: d'un point de vue thématique,

1a configurat,ion comporte un enseignement sur Ia manlère dont

1e sujet (roi, voyante) peut se 1ibérer de 1a persécution de

f impuissance à liquider un mangue (avoir un enfant, retrouver

1a vue). Toutefois, une distinct,lon éIémentaire est à souligner

encomparant nos deux contes: le rêve dans le sommeil, dans C7,

nous 1'avons assimilé au rêve dans 1'éveil dans et2 comme si

l'ét,at, de cécité pouvait dans une certaine mesure êt,re

rapproché de 1'état de sommeil dans Ia mesure où Ie roi est en

quelque sorLe "aveug1e" Iorsqu'i1 dort et 1a voyante est en

quelque sorte en état. de somneil bien qu'elle soit éveillée1.

En tous cas, i1 nous semble que 1'univers de nos contes

coo.rdonne entre Ie sommeil et Ia cécité et entre I1êveil et Ia

1 t" a"pprochement sémantique entre "cécité" et "sommei1"est attestê dans l'expression berbèrer /DDerGleG zeg iDeS/r jesui.s aveugle de sommeJ.l, et de manière moj-ns courante dansl'expression arabe pour signifier à peu-près 1a même chose:/rani Éna b-n-neas/.

Page 82: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

334

vue. ceci n'a probablement pas d'intérêt mais si nous reprenons

nos contextes narratifs, nous verrons que 1a vue et1'engendrement d'un enfant sont corré1és à l'éveir-rée1 et, que

1a cécité et 1a st,éri1ité sont, corréIées au sommell-rêve. ces

corrélations sont, d'un point de vue discursif, responsables

de 1'utiLisat,ion du rêve par 1e eonte dans un sens de

conclit,ions d'évaluation: ce qui accorde au rêve d'avoir un

enf ant, ou de revolr 1a 1umlère du jour la modallté du vrai. est

1e rée1 dans 1'éve11 du sujet en conjonction avec li objetinvoqué. Dès lors, à /1-Hkaya/ convient le vrai sous le rapport

du IL; ce n'est plus Ie récit, d'un rêve au sens commun du terme

(f irrée1) qui rapperle 1a notion de /mHa)ya/ comme histoireévaluée par /kdub/, c'est plutôt un univers de valeurs.

/l-Hkaya/ et 1e eonte

Nous verrons de voir que 1a constitution de /1-Hkaya/

suppose que le conte qui 1'utilise pour produire un univers de

valeurs tient compte du sommeil et de I'éveil, non pas selon

une relation opposit,ive mais selon des corrélat,ions qu'au noins

la comparaison que nous avons établie entre C7 et CLZ a pu

monLrer. rI est vrai dans un sens que nos deux élément,s sont

contraires, mais I'univers du conte ne vise pas 1'un des

éIéments de cette relation puisgue le niveau configuratif n'yest pas senslble: 1'organisation syntactico-sémantique de 1a

Page 83: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

335

configuration ut,ilisat,rice du rêve ne ciépenci ni du sommeil à

lui seul nl de 1'évei1 à 1ui seu1, mais des deux comme

coordonnés dans Ie sens où 1e contexte de l'un ne diffère pas

de celui de l'autre. Néanmoins , ce point de vue s, avè::e

discut.able à certains égards: 1e sommeil sembre pLus adéquat

que 1'évei1 à Llne commlrnication de savoir au roi par' 1'ange

dont les traits se distinguent de ceux de 1'humain si bien que

ce process\ts sembie conf orme au " sens commun" . Autrement d j.t,

cette communication semble jugée trop sàcrée pour qu,eLLe

puisse se produire dans 1'éveiL du.roi et, encore moins pendant

Ie jourr sêul 1e rêve pendant re sommeil pendant la nuit semble

propice à 1a réalisation d'une te11e communicationl.

considérons ce point de vue et essayons d'y voir plus

clair. Tcut compte fait, guê ceÈte communication soit jugés

suffisammerrt sacrée pour n'avoir pas lieu dans 1'éveiL du suletreprésenté par 1e roi, ceci ne nous empêche pas de dire que

noLls sommes en présence d'un univers de corrte dont 1a narration

exige un "riLe". De ce point de vue, ce qui est supposé sacré

pour n'avoir lieu que 1a nuit pendant 1e sommeii est discutabl-e

car notre corpus conne 1'exempre de dé1égués de Dieu qui

communiquent avec des sujets humains pendant 1'évei1 (cf. c33),

1 Nous avons ét.é frappé par 1a récurrence de /garji0/(ber), /1-mnam/ (ar: rêve dans 1e sommeil) dans 1es versionsde c7 , comme si e11e était particulièrement forcée par desdéterminat,ions investies dans 1e rô1e de /1-ma1ak/ (ar: ange)communiquant un savo j-r au roi. cet,te communication -selon nosinformateurs- ne peut avoir lieu que dans ce contexte de rêve.ceci dit, si un tel contexte est dét,erminé par 1e seul statutde /1-ma1ak/,1e C33 donne 1'exemple des sept, djinns dont 1erô1e apparaLt dans un contexte de communication avec 1e roisans que 1e rêve y entre en jeu' /Tlee l-malik r-j-jbel w jbertemma sebea dyal 1-junun/ (ar: le roi a1la dans 1a montagne ety trouva sept djlnns).

Page 84: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

336

La conparaison de nos deux contes (C7 et C33), à ce niveau

contextuel de 1'éveil et, du somnej-I, que nous essayons

d'orienter pour 1a ramener à un sens de représentation du

',rite" de CommUnication-réeitatiOn du COnte, n'eSt peut*être

pas justifiée car nous sommes en présence de deux plans

distincts, l"tais 1e passage d'un plan à un autre nou§ paraLt

possible si nous faisons abstraction du rêve de manière

provlsoire pour retenir 1'aspect dU "sacré" Sous-iacent à 1a

communicat,ipn entre 1es dé1éguéS de Dieu et 1e roi. Dans ce

cadre, i} apparal.t que dans un cas (C7), nous avons }e Sommeil,

dans 1, autre ( c33 ) , nous avons 1',éveil et une iSot<lpie

rellgieuse à travers laquelle seul "1e sacré" nou§ intéresse.

Ce sacré s'actualise dans nos contes par le statut, des dêi.égués

de Dieu indépendamment de 1'un ou de 1'autre des éIéments:

éveit et sommeil. Partant de cette idée, il nous semble que ces

deux é1éments sont coordonnés pour produire un effet proPre au

conte par f inLermédiaire de noS textes de référence (C7 ei

C33) dont 1a comparaison Signifie que nous avons une §eule

configuration sous-jacente à:

- C7: " ange , roi , nuit, sommeil" ,

- C33: *djinns, roi, montagne, évei1"1

1 ,Aucune de nos versions de C33 ne précise Ie temps (nuitou jour) de }a renconlre du roi avec les djinnsi par contre,1e moti f de Ia montagne y apparal.t syst,ëmatiquement. De cefait,, nous pourrions supposer que l'espace de la montagnerévèle I'aspect du sacré puisqu'il est habité paI des djinns;ainsi, la montagne se rapproche de Ia nuit si on leS considèrecomme 1'espace et 1e temp§ de 1a communlcation entre Ie roi etIe cié1égUé de Dieu dans C7 t I'espace-temps est à consi-dérercomme un tout auquel est sous-jacent 1'aspect du Sacré parf intermédiaire de l'isot,ople religieuse.

Page 85: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

337

Cet effet, corresponci -c'est ce sur quoi s'appuie notre

comparalson- à une représentation de communication d'un savoirpar L'ét,ablissement d'un rapport. entre I'humain et le divin;et à f image c1e eette communication, tenant compte du fait que

1'évei1 et. 1e sommeil sont coordonnés, nos textes de référence

produisent une représent,ation du "rite" de 1a communication du

conte. -.

A ce stade, si nous admettons cet aspect du sacré que nous

venons de retenir dans 1a communicat,i.on entre 1e roi et re

dé1égué de Dieu, i1 ne nous reste plus qu'à justifier1'orientation de notre hypothèse: 1'aspect du sacré est ra

représentaLiorr d'une condition de communicatlon du conte.

Pour ce faire, rappelons la comparaison qui nous a amené

à rapprocher 1a montagne de 1a nuit et à considérer que resommeil et 1'éveil sont coordonnés dans 1'univers de ra

configuration de communication dans nos deux textes de

référence. Retenons à présent, le sacré sous- j acent à lamontagne et à la nuit êt, enfin, au sommeil et à 1'éveiI1 pour

rrous rendre compte que la montagne et la nuit n'ont d'int,érêt,pour nous, que par 1e sacré qui leur est sous-jacent,. Àjoutons

à ce sacré le sommell et 1'évei1 qui se rattachent nettement

à Ia nuit gui, à son Lour, se rapproche par ce même sacré à Iamontagne, pour comprendre enfin que "sacré, sommeil, éve11"

constitue 1a pièce du "rite" de 1a récltation d'un conte. cette

1 Re*arquons que nous venons d'abandonner ,, 1e religieux,,pour ne considérer, comme nous 1'avons annoncé, gü€ 1e sacré:1e rellgieux n'est gu'une réalisat,ion particulière dans nostextes de référence; 1e sacré apparait de diverses manlèresdans /1-mHajyat / et i1 n'est pas condlt,ionné par1'actualisation du rel j-gieux.

Page 86: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

338

récitation ne peut se faire que le

at,tendant que 1e dLner soit prêt ou

les enfants::éclament les contes à

soeur alnée1.

soir; en généra1, c'est en

encore après 1e dLner, que

leur mère (grand-mère) ou

De fi1 en a.igu111e r nous nous apercevons que si une

caractéristique relevant du sacré peut être att.ribuée au conie,e11e tient lieu. du fait que ce dernier se racorlte 1a nuit dans

1es rnoments de 1'éve j.i précédant le sommeil. Àussi 1a nuitapparaLt-e-1le comme ce qui coordorrrre ent,re nos <ieux é1éments

pour produire cette caractéristique du conte te1 qu, il se

1'attribue 1ui-même en tant que représentatiorr 1ui ét,ant

lnt.rinsèque et, irrdépendante de toute évaluation qui puisse 1uiparvenir de l-'exïérieur. D'un auLre point <ie vue I nous

comprenons mi-eux pourquoi 1e s contes ne peuvent êt,re raconté s

qLle 1e soir2. En d'autres termes, 1e trcontage* exige que sa

réalisation se fasse cle sorte que 1e temps dont r,éveil eL 1e

sommeil rendent compte soit perçu comme L'unité d'une dualiié

1 D"n" 1es milieux ruraux des Béni-Znassen, i1 estgénéraLement de cout.ume que 1es fi1s, devenus pères defami11es, cohabitent, et vivent dans une même maison répartieen pièces dont. chacune est réservée à chacune des "fami11es".L'ensemble est ce qui constitue 1a famirle au sens généra1 duLerme. L'une des pièces est réservée aux parents; ceci permetaux enfants d'êlre proches de leur grarrd-mère généralementcompétént.e en matière de récitation des contes. Dans certainesfamilles, i1 est même courant que 1es enfants dorment chez leurgrand-mè re .

2 S"lon nos informateurs, lorsque quelqu,un raconte unconle 1e jour, ses enfanÈs seraient atteints de calvitie; aufond, i1 sembre que ceci est dit,, voire cru, dans 1e seul butd'exprimer "1a crainte" de raconter un conte Ie jour car,justemerrt, cette crairrte ne peut, être neutrarisée que par rerespect, du rite d.u rcontage" 1e soir impliquant 1a nuit suivant1'aspect du sacré qui ne peut, êt,re teI si on raconte un conteIe jour.

Page 87: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

pour produire un

repré sentati ons

l'univers est le

339

effet: Ie conte,

de valeurs dont

vrai.

eomme produit

1a cautlon

, construit des

évaluatrice de

Page 88: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

340

CHÀPITRE IIT

LE CO}ITE , UI{ U§IVERS D'U}IION DES CO}ITRAIRfi§

D'un point, de vue sémantique , ret,enons f idée de L'union

des contraires qui caraetêrise l-e temps du contage comme plan

de 1'énonciation communicatlve du conte eL essayons de voi:' sice principe s'applique à des cas précis au niveau clu produit,

et non seulement du présupposé du produit.

Dans ce cas, un regard relativement rapide sur quelgues

exemples montre que les invest.issements sémantiques de ces

derniers s'appuient sur f insêparabj-1ité des contraires. Le

pouvoir du savoir chez Ie pet,it, nommé /mqldeJ/ ou, de manière

plus explicite, 1' exemple récurrent du motif de 1'ogre (ou

1 'ogresse ) 1e mont,re assez clalrement,. Dans un cas , en ./mqLdel /

s'unissent 1'absence du pouvoir présumée comme te11e et 1e

pouvoir actualisé dans 1e conte: les traits "petit de tai1Ie"

et "qrand par la ruse" rendent compte de 1'att,ribution de "Ia

force" au "petit". Cette forne d'union entre cette force eÈ Ia

faiblesse qui convient -selon 1e sens commun des frères de

/mqide// - au petit, est I'effet de sens de f image représentée

dans Ie conte par Ie parcours de notre sujet. Dans 1'autre cas,

Page 89: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

341

l'ogre (ou 1'ogresse) a un caractère parfaitem'ent paradoxalr

un sujet qui ne devrait pas avoir 1a seule "réputatj-on" de

donner 1a morL en dévorant 1es vict,imes humaines, mais aussi

ce11e de donner en quelque sorLe Ia vie. t'exemple qui rend

compte de ce dernier trait et qui est probablement 1e plus

sigrrlficatif, est celui de 1'adoption de Leila par L'ogresse

dans C1. Là-dessus 1e conte est explicit,e: Leila est devenue

1a fi11e adoptive de 1'ogresse au point où cett,e derniêre Iaconsidère cqmne si e1Ie ét,ait sa propre fille, En outre, Ie

paral.tre-f emme et 1'être-ogresse nous semble 1'exemple t,ypique

pour dire gu'en ce personnage s'unissent des contraires t,els

{uê: beauté / laideur (cf. C2 par exemple}, amour / haine {cf.C1 et C2), st,ér11j-t,é / fécondité (cf. C1 et C2...).

De manière plus gênérale, il nous semble que "la eulture"

incarnée dans 1'exemple de 1'ogresse dans C1, que nous

pourrlons comparer à un autre dans C231 est symbolisée par un

lien de parenté (adoption et mariage) qui s'établit entre

1'humain et 1e non humain et qui "humanise" en quelque sorte

Ie non humaj-n sans pour autant reLirer à l'ogre (ou 1'ogresse)

ce dernier trait, d'où, l'unj.on des contraires dont nous venons

de parler. De même, 1'humain cesse d'être totalement humain par

le lien qul s'établit entre 1ui eL Ie non humain. En d'autres

termes, "1'humanisation" du non humain et 1a "déshumanisation"

de 1'lrumain' 'lncarnent des f orces obscures en même temps

cuIt,urel1es et naturelles du caractère de L'humanité et de son

1 Rapp"lons gueentre /Seffar thwa/,( filIe humaine ) .

1e C23 raconte 1'histoire d'un mariagedescendant d'une ogresse, avec 1'héroine

Page 90: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

? â,)

contrai-re chez ce qui est communément appelé',homme,,et "non

homme".

Pour prr.rs d'écrairc j.ssements, considérons nos te:{tes de

réf éreflce r c1 et c23. L'adoption dans 1e pr:ernier et le mariage

cians 1e second, en tant gue relations étab1i-es entre I , humair:

et 1e non humain, mont.rent comment ra juxtaposition eL 1, r_rnion

de conlraires sont exploit,ées par les contes et comment laculture et la nature coexistent en ce §ens que 1e natureLrelatif à 1'ogr,e (ou i'ogresse) est curt.uralisé et le culturelrelat.if à r'humain est naturalisé dans un même universnarratif : 1es attributl0ns de conlrail:es par 1es rappc::ts entre1'humain et 1e non humain sont, nertement relatives. cecimontre, dans une certaine mesurerque "1,urrité" est sous-jacenLe

à 1'univers de nos conLes comme forme d,une conception sur"1'origine". cette conception d'ordre mythique exploit,e t,unitépar ''l 'union des contraires pour montrer, sous un autre ang1e,que 1'homme réinstaLle "civilisationnellement " ( culture1lement )

1es écarts au moment même où iI sort à peine du monde naturelou "sauvage": 1',unlté est si inquiéiante que l,homine ne peutse contenter de naitre, i1 1ui faut, comprendrel et connaitrepour pouvoir saisir, dominer et mal.t,riser son entourage. r1nous semble gue ceci explique 1es écart,s en termes de

contraires rencontrés inlassablement dans la vie.

1 L'acte de comprendre, nous dit J.-C. Coquet, ,, forne Lapièce e,sser t,ielle du dispositif de ia cannais,sance',. pourconnaître, i1 faut savoir utiliser 1es moyens qu,i1 faut pourdominer; 1a réalisation rie la connaissance etr pâr conséquànt,de 1a domination, se réarise par 1e savoir.- pour prus dedétai1s, voir J.-c. coQUEt, Le discours et son suiet, T.1r op.cit. p. 82.

Page 91: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

343

C'est en gros ce cadre d'actualisation de contraires et

d'union de cont,raires que 1e conte permet de relever. Àutrenent

dit, l-e conte relrace et reconst,ruit, une représenLation de

I'unité initiale comme si cette dernière était un fondement

d'origine sous forme des premières lueurs d'un feu qui

coordonne entre 1a vie et 1a mort, uû feu que nous réclamons

pour nous réchauffer et dont nous nous éloignons de crainie

qu'i1 nous brtle. Cet,te :nétaphore re joint 1e rétablissement des

contraires qui sont inltialement inséparables pour fr:rmer

1'unité.

A ce propos, précisorrs que 1e conl:e ne construi-t pas

exclusivement 1a nutation nature / culture par des personnages

intermédiaires tels que 1'ogre ( ou l'ogresse ) , Lei1a, l"a femme

que 1e descendant de 1'ogresse épouse...; i1 ne rend pas compte

du seul aspect de 1'union des contraires car 1a configuraticrn

du "combat" dans notre corpus, êf, tant que relaiion

conflictuelle entre 1'humain et 1e non humain ( 1'homme et

1'ogre ( ou 1'ogresse ) ) t.e11e qu'elie est récurrente dans

plusieurs récits (cf. C2, C3, C4, C6, C11... ), précise que ce

que nous venons d'appeler "mutation" est valorisé narrativement

par 1'éviction de la.nature en ce sens que l-a modalité de

domination par I'homme est mise en chef par 1e conte en

rabaissant au rang du dominé 1'ogre ( ou 1'ogresse ) et son

univers (i-e ce'que nous avons appelé nature). Le caractère

mythieuê r dans ce cas précis, en tant que discours où

s'unissen! 1es contraires, s'affaiblit déjà en posant I'ogre(ou 1'ogresse) et I'homme dans une relation conflictuelle où

I'un des protagonistes tente de nier *1'être" de 1'autre: 1e

Page 92: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

un

1',

cle

344

vieil homme et 1'ogre en est un exemple typique (cf. c11) au

delà des exemples déjà pris et, que nous pouvons maintenant

mieux explolter dans un cadre plus généra1.

Pour ce faire, nous a11ons, par souci d,économie, ut,iliser"graphe d'interaction" entre nos actanls: x (1,ogre ou

ogresse), y (1'humain: Lei1a, 1a femme épouse du oescendant

1'ogresse, 1e vieil homme...):

ce graphe nous amène à réexaminer nos t,extes de référencepour voir commenL se réa1ise narrativement ses contenus:

1. x n y: cet,te relation con jonctive situe 1, ogre et l_a

femme qu' i1 épouse ( cf. C23 ) comme parÈenaires par

f int,ermédiaire desquels se réalise 1'exclusion de iaconfrontat,ion. Le c2 où sonL mis en scène une ogresse et un

humain (/mHend themm/) va aussl dans ce sens. Toutefois, cetterelation ne tarde pas à se transformer: 1a femme, épouse du

descendant de 1'ogresse trahit ce dernier en dévoi1ant, son

secret à une vieille femme; et /mHend rhemm/ irouve 1e moyen

de se séparer de sa femme-ogresse en Ia tuant; d,où,

2, x ) ( yt comne relation signifiant des formes

d'éloignement par 1'acte de t,rahir (cf. C23), l,acte de tuer

1 Pour atteindre l'objectif de notre étude, nousempruntons à J.-c. coquet un "espriL" de raisonnement que nousutllisons pour décrire 1es rerations de "confroni,ation" etd"'absence de confrontat,ion" entre x et y en comparant desrécit,s différents met.t,ant en scène les mêmes figuresreprésentant x et y. pour plus de dét,airs sur Les sourcesde motivation de notre idée, voir J.-c. eoQUET, Le discours etson suiet, op. cit. p. 75 et, s.

-->" iÿ

\____*/

Page 93: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

( cf. C2) ou, de

345

manière plus explicite dans C1, 1'acte

d'abandonner réalisé par Leila vis-à-vis de sa mère adoptive -

( f ici social )n T lorsqu'elie reLourne au village

accompagnée de son cousin

rV.E. lious préférons utiTiser La notaxion ) ( au Tieu ae ü, carelle noüs pernet de rendre conpt,e de 1'éToignenent, dans un sensdu continu (seJon -Zes prapres terrûes de J. -C, Coquet, lanotation reJève de 7a séniotique du continu) et de rappeTer 1arelation conjonctive préalabLe (nariage dans C2 et C23 etadoption dans C1) qui se naintient conne "némoire" quoiqu'i1en advienne par Ja sujte. L'utiJjsation de cette notation noüssembJe nécessaire car en eJle résident, -Ies traces de 7'aspectnaturaTisé de l'hunain et de 1'aspect, hunanisé oü cuJturai.iséde 7'ogre (ou L'oqresse) en tant que nari (ou épouse) ou-nèreadoptive. Pour ne prendre que ce dernier exempJe, noussaisissors cet.te notation dans ie sens où nême si Leilaabandonne 1'ogresse, celle-ci deneurera sa nère adoptive.

3. x U ÿ: cett,e relat.ion ciis jonctive signif ie un conf 1it

ou, mieux, une confrontation dans 1a mesure où des modalltés

de domination y sont mises en j eu: est vaincu par y, 1a

nature est en quelque sorte convoitée par yr le vieil homme est

vainqueur de 1'ogre, Leila abandonne définitivement sa

adoptlve en épousant son cousin, /mHend themm/ tue sa

mè re

f enme -ogresse. Inversement dans C23 | 1a femme renonce déflnitivement

/Seffar thwa/à sa condition humaine en prenant pour époux

descendanL d'une ogresse

Nos indi-cations sur ces relations peuvent être

schémat,isées sous forme d'un tableau:

Page 94: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

345

Exemples de configuration Nature VS culture

4

1: x adopte y (xfl y) -y;

C23: xépousey (x=y)x et y s'unissent: naturecult,uralisée et culturenatural isée

z 1 x et y s'éloignent 1'unde 1'autre: nature ) (

culturey renonce à x (x )( y)

,)-

3 11:x et(x u

vv)

sont en conflit; domine x t*fculturenature

v ,

Comme ce t,ableau récapitulat,if 1e Iaisse entendr-e-,- _.1a

comparaison entre nos exemples montre qu'un aspect d'ordre

selon 1 , 2 , 3, prend pour point de départ une origlne où

cohabitent 1es humains et les ogres (ou ogresses), ra cultureet, 1a nature. Sous cet angle, i1 semble que l,anthropophagie

att,ribuée aux ogres n'esL pas moins at,tribuée aux humains êt,paral1è1ement, res humains ne seraient, pas plus humains que 1es

ogre s .

Eaisant de 1'anthropoph.agie une raison, 1es humains, selon

une représentation de Ia rdnonciation à 1'union (adopt,lon et

mariage ) avec les ogres ( ou ogresses ) semblent affirmercurturerlenent une différence par 1e pouvoir-dominer 1a nature

(cf. C11). Toutefois, si les C1, C2 et. C11 vont dans ce sens,

1e c23 réhabilite ra retativité de cett,e forme de différencepar domlnation, étant donné que 1a représentation du mariage

de i.a . femme humaine avec /seffar thwa/, descendant d'une

ogresse, se caractérise par yunion des contrai.res (femme

humalne VS ogre non humaln).

Page 95: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

347

Nous venons de repérer et de souligner deux aspect,s dans

nos contes de référence: 1'un explique comment s,effectue 1a

mutation nature / cult.ure à travers d"F représentations <ie

rerations entre te non humain et l,humain; r,autre représentei'unité "iriiiia1e" des contraires séparés eL explique commenc

cette " indivisi.on" rend posslbl-e 1'entente (cf . c23 ) .

ceci dit., d'un autre point de vue, cette indivisioncomporte t,out de même des unit.és discrètes (des actantsreprésentés par x et y) en int,eractions par production dans iesparcours narratifs de 1'éloignement, et de 1a dlsjonction, donr,

x et y sont ensembies responsables. Entendons-nous bren pour.

mieux saisir 1a reration entre ra nature et 1a cuiture car1'humain n'esr pas seui à être responsable de 1a réalisationde Ia dominati --orl: {É-) , ne serait-ee que parce que 1, ogre (ou

J-'ogresse) est t,ou;+ours présenté(e) comme actant doié d,unsavoir et, pâr conséquent., d'un pouvoir dont l-,homme ne disposepas. Dé jà, 1e pouvoir-se métamorphoser en hurnain est at,irlbuéexclusivement à 1'ogre; contrairement à I'humaln qui n,apparaicnul1e pârt dans notre corpus comme sujet, dot,é du pouvoir se

méiamorphoser en ogre. En outre, cêrtains secrets sont1'attribut de 1'ogre=""1. cet acLant est donc ,,insLruit,,; 11

est même doté du pouvoir prédire et percevoir Les choses.

cette instructi.on de l'ogre (ou 1,ogresse) met ilhumaindans une position où 11 ne peut. pas ne pas contract,er avec lui(ou e1le). En d'autres ternes, f instruction de 1,humain, seron

1 voirdes nuages1'ogresse,

entre autres C1: 1es secrets du vent,, des profondeurs des mers. . . sontmère adoptive de Lei1a.

de la p1uie,dé t,enus par

.!r,,É.rr]i%

Page 96: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

348

nos contes, doit passer par ce11e des ogres comme si ees

derniers étaient Ies ancêtres pour se procurer 1'enseignement

adéquat pour "comprendre" et "dominer". Dans ce rapport,

1 'humain se présente comme suj et " s' instruisant" sous 1a

direction c1e " f instruit," en clotant. son savoir acquis par une

proîression qui accorde au nouveau savoir un trait supérat,if,

un passage à un degré supérieur pour pouvoir dominer: "7e sujet

instruisant donine t,ou jour,s 7e su jet instrujt" l, raison pour

1aque11e, selon nos considérations, nous pouvons conë1ure que

dans:

nature vs culture

ogre ( sse ) humain

1a nature par rapport à 1a culture est déjà régie par " ure

logique de force"2 prisque 1'ogre (ou 1'ogresse) détient, un

pouvoir du savoir que 1'humain s'acquiert pour en construire

un autre qui lui permet de doniner au lieu d'être dominé.

Partant de ces quelques remarques, nous voyons que 1a

conjonction et f indivision initiale sont culturelles dans 1a

mesure où 1'union entre x et y enLreti.ent une relation avec Ia

disjonction entre x et y et Ia rend indispensable comme

réalisation pour en tirer sa propre signification. Désornais,

liunit,é réconf ortante ou sécurisante dans C23 n,'y sera que pour

rendre nécessaire 1'établissement en quelque sorte motivé de

1 r. -c. coQUET,p. 82.

2 ruia. p. 84

Le discours et son suiet , T.1, 9-P-:--cit.. ,

Page 97: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

. 1ois,

349

d'un ordre , d'un classement. lra reconnaissance par

1'homme d'avoir Iui-même établi cet ordre lui fait ressentir

1e besoin cie comprendre ses propres actes en les r:amenant au

point, de départ qu' j-1 articule à son ét,at culturel et en les

c()ntant à travers des récits qu'i1 utilise justement pour

justifier et ses actes et ses états, après avoir int.ériorisé

1e principe de 1a oomination par f insiruction et 1a

construct j-orr du savoir pour pouvoir dominer,

, L€ conte a l-a faculté de produire toutes ces indications

avec une économle frappante au niveau même de ses énoncés

introductifs à 1'acte de conter. I1 suffii, Ce prendre quelques

exemples pour s'en rendre compte:

- /Hajit,-k waHed 1-ma1ik (w ma malik Gj.r 1lah)/ (ar; je

'u'ai conté qu'il y avait, un roi (et i1 n'y de roi que Dieu ) ) ;

- /Hajit-k waHed r-raje1 Gani (w ma Gani Glr ReBBi)/ (ar:

je t'al conté qulil y avait un rj-che (et il n'y a de riche que

Dieu));

- /Hajit-k idj n weryaz 6 ameqranl ur yemGir Gir ReBBi/

(ber: je L'ai conté qu'iI y avait un grand homme et iI n'y a

cle grand que Dieu) ;

- /yekker yun uryaz ur iGi aryaz Gas ReBBi/2 (ber, litt.:

iI ét.ait. une fois un homme e§ n'est, homme (puissant) que Dieü1.

Dans ces exemples, i1 est aisé de repérer 1es figures de

"roi", "riche", "grand", "puissant" auxquelles convient 1e

Lrait de dominant par 1e pouvoir et qui se définit par sa mise

1 En berbère, /ameqran/ signifie "grand, viêux, ancien,âgé, puissant".

2. RecueiIli dans les régions d'Errachidia.

Page 98: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

350

en relation avec 1e t,rait de dominé qui convient aux gouvernés,

aux pauvres, aux petits et aux démunis de tout pouvoir. En

somme, 1es contraires sont nettement tracés et leur union estsous-tendue par le pouvoir de Dieu. Dès rors, nos énoncés

lndiquenL en même temps l-es contraires séparés et leur union;

1'usage de 1'unité de la dr-ralité et de la dual-ité

indépendamment, de 1'unit,é est 1e savoir organisateur de l_a citéhumaine clont 1e principe est 1a "classification" présl11ée par

"1'U?-ique" en tant que "Repère" sécurisant coritre lacomplexité de 1'ordre présumé et, prétendu comme te1 par 1,homme

à 1a recherche de Ia domination.

Dans ce cadre, 1e conte comme 1e mythe, sert à produire

un sens du " rzilTage planétaire" seron 1'expression de l,lc Luhan,

en justif iant ses f ondement,s par 1'éviction de cett,e espèce de

f rontières entre 1es é1ément.s constitut,if s de l'interacti_onentre x et Y et par sa réhabllit.ation pour 1es besoi.ns du

fonct,ionnement du "vi11age". c'est par ce moyen de 1'union

entre 1es contraires qLle 1a dominat.ion par 1e puissant devient

moins écrasante qu'e11e .l'est, vis-à-vis du dominê.

Laissons de côté ce point, pour ne pas nous éloigner <iu vifde nos préoccupations et essayons de mettre 1'accent sur l'idéesuivante: 1es signiflcations susceptibles d'être retenues par

une lecture qui considère 1a binarité suivant des reiat,ionsd'opposition entre unités dans 1e conLe , pour peu qu, on y

regarde de près, s'avèrent actuarisées comme te11es non pas

fondamentalement pour rendre compte des seuls positlf et.

Page 99: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

351

négatif , mais surt,out, pour rendre com,pte d'un continu qui

caractérise ce qui est appréhendé comme opposés1.

11 est vrai que Ia perception Ia plus immédiate de la mise

en relation entre, pâr exemple 1a nuit et le jour, consiste à

dire gue Ia nuit est ee que Ie jour n'est pas et que 1e jour

est ce gue Ia nuit n'est pâsr ou eneore, pour prendre un aut.re

exemple, que 1'ogre ( ou 1'ogresse ) esL ce que 1'humain n, est

pas et que 1'humain est ce que 1'ogre (ou 1'ogresse) n,est pas.

Toute autre est 1'actualisation dans nos contes de ces exeiûp1es

clonnés comme séparés. somne toute, nous dirons que le continuest prévisible comme angre de saisie des significations des

opposés. Cet angle tient compt.e du fait que ce n,est pas 1e

caractère discont,inu des é1éments opposés qu'i1 faudraiiconsidérer, mais plut,ôt, de 1a pertinence de ra relationopposit.ive comme plan axiologique qui unit entre 1es séparés

ou opposés. c'est à ces conditions que se soumet }a dualité au

sens large, pour permettre à la notion de "valeur" de prendre

place dans 1'univers sémant,ique du conte.

Ce point, de vue, s'iI mérite d'être retenu, 11 faut qu'i1

soit southis à une vérification par des analyses concrèt,es qui

ne solent pas restreintes aux quelques exemple§ que nous avons

pris. En attendant que 1'analyse réponde à cette exigence, dans

une visée plus large que la nôt,re, nous faisons nôtre f idée

de'T.,. .Yacine: «-tês opposit,ions binaires (.,. ) qui constituentles référents du Tangage noderne et sont aux principes de nos

voirParis

Pour plusPOTTIER,

1987 , pp.

1

B.,

de détails sur 1a "binarité' et 1e "contj.nu" ,Théorie et analvse en llnquistlque, Hachett,e,20-43.

Page 100: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

352

jugenents, troûvent, Teur fondenent dans 7a myt,hologie. Les

nyt,hes enseignent 7es principes de fonctionnenent du nonde

aatour de 1'unité des contraires (,..) [pour] just,ifier 7e

pouvoir de la cultuie sur 7a nature.»1.

C'est dans ce sens, pensons-nous, eüe Ie conte-mythe

construit des représentat,ions socio-culLurelles intériorisées ;

ces représent.ations semblent aller d'ef1es-mêmes comme si elles

avaient toujours été là pour exercer leur fonction de poser des

contrai,res, des séparés ou opposés suivant 1e continu ou

1'unité pour évincer, ou du moins, atténuer 1es effet,s de 1a

contrariété dont les manifestations sont courantes socialement

parlant.

Essayons d'éclairer quelques aspects. Souvenons-nous que

1e CL4, par exemple, propose un jeu assez curieux: faire

semblant de dormir pour voir -que Ie sommeil ne peut rendre

possible- est Ia ruse ut,ilisée par les frères pour parvenir à

découvrir "l'étrangère' (1'hérotne) appelée /sensli dehbi/.

Dans notre conte, cette ruse ne permet à aucun des frères de

parvenir à 1'objectif, au savoir sur I'identité de "f intruse":

Ie sommeil joue ici Ie rôIe d'anti-sujet. Et pourtant, i1 faut

bien gue Ie programme des frères se réalise.

À ce niveau, il devient difficile d'expliquer comment 1e

conte réaLise une forme d'arrangement en faisant conjoi-ndre 1e

somme,il', de I'un des f rères qui tente de découvrir "f inconnue"

à 1'acquisit,ion du savoir par "1e voir" (Ia percepLion),

1

uythesp.105.

T, YACI§E, 'La fonction des récitsdans 1'organisatlon sociale kabyle"

d'orlgine et des(dactylographlé ) ,

Page 101: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

353

puisque nous venons de dire que le sommeil joue le rôle d'anti-

su3 et et qu'en tous cas , 1e savoir ( 1a découverte ) est

conditlonné quant à son acquisition par "le voir". Seul 1'évei1

permet "le voir" (Ia perception). Or, le conte pel:siste à faire

valoir 1e sommell tout en rendant possible "1e voir" comme si

ce dernier était utilisé pollr unir 1'évei1 et 1e sommeil ou

plus généralement, 1e j our et 1a nuit, la lumière et

1'obscurité: 1e conte semble jouer sur une contradiction.

Nor-rs s;ommes en présence d'une caractéristique en générai

courante dans 1e conte dans 1a m_esure où ce dernier donne

tcujours cies issues en produisanl et en récupérant, à parti:

de contraires, un effet qul lul permeL de résoudre ce qui est

à nos yeux contracliction. Du même coup, i1 canalise ou

" focalise" ]a narration, d'un point de vue discursif et

narratif, en actualisant un plan axiologique qui tient, compte

de 1'union entre 1e sommeil et 1a perception (cf. noLre cas dtt

C14 ) . Pour s'en rendre compte, i1 sufflt, de s'entendre sur

ceLte union teLle qu'e11e s'actualise par 1'utilisation des

termes: sommeil et vue , dans 1a configuration. C'esl- à ce

niveau que nous touchons de pras à la quest,ion du rô1e du

lexique dans 1es configurat,ions discursives.

Faisons une lecture même superficielle de Ct4 -toutes

versions confondues- pour nous apercevoir que seul Ie frère

(1'aLné), dont Ia vue nécessaire au savoir est qualiflée de

"défai11arrte"1, peut savoir qui est "I'étrangère". Ainsi, ce

t h"d 1-wlad xu-hum 1-kbirtraduisons faute de mieux pêr:relativement "défaillante" .

/wiya ma y-luf-f, que nousl'ainé des frères a une vue

Page 102: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

354

trait, dit, "défai1lant", caractérisant 1a vue chez Ie frère,s'avère 1'é1ément qui coordonne entre Ie sommeil qui empêche

"Ie voir" et 1'évei1 qui le rend possible.

La vue "défai3.lante", dans ce cas, se rapprocheralt du

sommeil comme e11e se rapprocherait, de I'évei1. Pour être plus

précis, rrous dirions que 1a vue "défai1lante" met en place la

mutation int.ermédiaire du sommeil à 1'éveil selon:

Sommeil veil

vue )

II

I

I

I

ôn- somme i 1

non-cécité )

6

(

n

(

( cécité )

1I

I

I

non- éve

( non vu

i1

e)

"défai11ance" relative de 1a vue

En considérant, 1e non-éveil et 1e non-sommei1, i1 apparait

que 1'union des séparés: éveil et sommeil impliqués

respect,ivement par 1es premiers, est construit,e comme

"modalité" qui rend possible 1'acquisition du savoir. sur

I'identité de /sensli dehbi/.

Dans un sens plus 1arge, nous pourrions retenir de ces

considératj,ons que 1e somneil et 1'éveil devraient, avoirquelques af f init.és sémant,iques particulières dans 1'un j.vers des

contes. À ce propos, rappelons qu'en effet.r le somneil dans C7,

univers du rêve du roi, se rapproche, par ce même univers, de

1'éveil dans C12i et que, pâr al1leurs, Ia cécité, conçue comme

Page 103: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

355

te11e dans 1'évei1 -de toutes 1es façons, dans re sommeil, elrene peut être ressentie comme t.e11e- rappelle 1e sommeil pour

1égitimer 1a signification du rêve dans 1 , éveir1. L, évei1 ,

conjoint, à 1a cécité, apparalt ici comme un profond sommeil que

1a vue annule; 1e sommeil apparaît comme un profond évei1 quipermet Ia communication (cf.c7) ent.re le roi et 1,ange pour que

f invocation d'engendrer un enfant se réaIise justement dans

1'évei1.

Nous ne prétendons pas avoir produit des vérifications surtous 1es aspects relationnels de sommeil et évei1 comme

contraires séparés mais, au moins, 1es exemples que nous venons

cie donner semblent intéressanls à retenir pour expliquer 1e

point de vue avancé. A déf aut de cette justif icat.i.on

approfondie par des données plus convaincantes, nous pourrionsquand même élargir "1'esprit" d'une telre ébauche à 1a manière

iiont 1a représent,ation de 1'unité se réalise en coordonnant

entre des eontraires ters que 1e pouvoir (1a puissance) vs 1e

devoir (la f aibiesse ) , Ia richesse vs la pau.rreLé, ladominat,i.orr VS 1a soumission. . .

Nous avons pris ces exemples car 1a cont,rariété y est siflagrant.e que 1e conte ne 1a récuse jamals. Au contraire, lesexpressions tel1es que: "autrefois i1 y avait un roi et il n,ya de roi que Dieu", sont si courantes dans 1es formules

1 C12, grâce à 1'hospitalité vis-à-vis des Saints,1'i-nvocation de retrouver 1a vue se réalise chez ra femmeaveugle: 1-mra bqa-t t-luf bHar 11i dak f-lL kan Gi Hurm (mnam,selon res versions) (ra femme retrouva la vue comme sl cen'était qu'un rêve).

Page 104: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

356

inaugurales gu'eIIes peuvent serv j-r d'exenple t,ypique du j eu

de l'union entre contraires.

La formule que nous venons d'évoquer rend compte de:

1. 1e roi n'est roi que par le pouvoir (ta pulssance qui

lui est communément admise selon un contrat implicite entre 1ui

et les gouvernés);

2, ces gouvernés sont bien une collectivité qui se sounet,

à ce pouvoir même si etle est à 1'origine de son attribution

au roi.

Ces deux points nous amène.nt à réécrire ce que 1e conte

pose par ceËte formule iniLiale: roi VS gouvernés, dans 1e sens

où 1e pouvoir est forcément une modalité qui s'exerce sur un

sujet qui se Lrouve en position hiérarchiquement infêrieure;

d'où, 1'opposition dans 1a hiérarchie: supérieur ( pui.ssant ) V§

inférieur (faibte).

Toutefois, étant donné que cette relat,ion est en termes

franchement exprinés par l'opposit,ion et 1a contrariété, i1

faut bien, encore une fois, qu'e1Ie soj-t ramenée à I'union dans

le sens où si le pouvoir du roi s'exerce et est reconnu comme

te1, i1 s'annule devant, celui de Dieu. La hiérarchie s'annule

pour céder la plaee à "1'un-ité" à laquel1e 1'opposition se

soumet, pour lui être relat,ive. Le conte articule alnsi entre

cleux plans:

Page 105: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

ro].

357

VS sujet,s gouvernés: 1. 1e conte pose 1'opposition

(pouvoir) (devoir)

Ie conte relativise 1'oppo-

sit,lon en retirant au roi

1e pouvoir

pouvoir de Dieu

11 apparalt. clair que Ie type de rapport par

I'intermédiaire du pouvoir, entre Ie roi et les sujets qu'i1

gouverne n'est plus en vigueur devant 1e pouvoir divin dont

nous avons déjà parlé. C'est par ce dernier que se réalise

1'unité. A ce niveau, il senble que 1'union par Ia figure de

Dieu, figure du discours religieux, rejoint 1e même

fonct,ionnement que celui de 1'union des contraires dé j à

évo{ués. Ceci a tout 1'air d'avoir une port,ée qui se répèt,e

suffisamment pour que 1'étude questionne cette technique qui

consiste à ramener 1'oppositj.on ou 1a contrariété entre

éléments à l'union: cette dernière n'est-e1Ie pas posée

essentj.ellement pour 1égit,imer les contraires ?

Page 106: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

358

1. /r-rezq/, un don de Dieu

cette questlon ne nous semble importante que dans ramesure où elleinous a permis d'insister sur 1a manière dont des

contraires séparés peuvenL être repensés par leur "ré-union,,.

Et pour écarter de notre itinéraire re débat sur ra notion de

dominatlon et de hiérarchie pour permettre, semble-L-i1, une

certaine organisatj.on, nous aimerions retenir 1a seute iaee aes

représent,ations de 1'unité qui re1èvent,, seron nous , d'une

dimension mythique dans le cont,e populaire oralLes diverses ut,ilisations par le conte de figures

investies du pouvoirl d'un roi par exemple, sont en

occurrences nombreuses en relation opposit"ive avec 1e devoir

d'un sujet subissant ce pouvoir. cette relation sert à rendre

admissible ilunit,é par 1'lnstance hiérarchlque dite Dieu, 9uiinstaure un sens de richesse dans ra pauvreté et de pauvreté

dans 1a richesse. Nombreux sont 1es contes où Dieu enrichit lepauvre (en lui falsant. acquêrir un statut, de gendre du roi par

L tt-Lw!z/ (p1èces de monnale en or), /d-dheb / (ar: 1,or),/r-rezq/ (ar: res biens), /1-yaqut/ (ars plerres précieuses),/s-suldi/ (arr p1èce de monnale), /s-sruea/ (ar: chaine en orornée de 1-lwtz ) , /n-nugra / (at: 1'argent) , /I-flus/ ( ar:1'argent, la monnaie), /D-Duru/ (pièce de monnaie).

Page 107: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

359

exemple)'et où Dieu appauvrit, le roi ne serait-ce que par le

fait que ce dernier est présenté sans progéniture (cf. C7).

Prenons cette configuration où 1e motif de 1a richesse est

récurrent par plusieurs unit.és comme nous venons.de 1e dire.

Pour commencer, nous saisirons ce moLif pour 1e sit,uer

dans 1'environnement syntaxique et sémantique du contexte

configuratif: objet, accordé par Dieu à qui fI veut, i1 n'est

soumis pour être communi-qué à aucune modalité cont,raignante

sinon -comme on peut s'y at,tendre- s'11 y en a une, e11e

rel-èvera d'une sorte de contrat unilatéraI dont dépend 1a

réconpense divine. A Ia soumission à la volonté de Dieu (1a

foi ) peut répondre le don-récompense au profit d'un

bénéficiaire ( cf. C12 ) .

Vu sous cet angIe, /t-rezq/ (ar: Ies biens) qui devait en

principe prévoir, d'un certain point de vue culLurel, un aspect

social par une structure économique, n'est pas à un niveau

cl'abstract,ion " f interlocuteur" d'un syst,ème de relat,ions basé

sur I'échange dans Ie sens que M. Maussl at,t,ribue à ce t,erme.

C'est bien Dieu qui accorde /r-rezq/ et 1e retire à qui It

veut. ta richesse et, 1a pauvreté dépendent, de ce fai.t, d'une

organisation suffisanment, programmée par 1e vouloir et 1e

pouvoir de Dleu dont le statut est supérieur même à celui dont,

une image t,héoriquement représentée par le conte, t.end à Ie

confondre avec 1e Puissant,. Mieux, même si /t-rezq/ s'avère,

à quelque nuance près, 1e résuItat, du travail d'un sujet

1980.I u. l,lÀUSS, Soclolosie et ant,hropoloqie, P.U.F. Paris,

Page 108: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

360

hunain, iI.n'est conçu comme te1 que s'i1 est admis qu'i1 est

obtenu par 1a bênédiction de Dieu.

Par ces indications banales

que 1e motif de /r-rezq/ s'avère

eIles-mêmes, nous voyons

don accordé par Dieu: 1a

en

un

ccnfiguration est intéressante dans 1a mesure où 1e

bénéficiaire de ce don y est mis en scène de sorte que sa

conjonction avec /r-rezq/ ne dépende nullement de lui mais de

celui qui coordonne par son pouvoir entre 1a richesse et 1a

pauvret,é te 11e s qu'e,1 ies sont d'ailleurs conçue s

culturellement. En d'autres termes, !'opposit,ion qu'i1 y a

entre 1e positif et 1e négatif, invest,is respectivement dans

1a rlchesse et 1a pauvreté, est rendue relative par I'excluslonciu négat,if pour ne retenir que 1e positif à titre supératif

chez Dieu. A ce niveau, i1 se peut effectivement qu'i1 y alt

une confusion entre Ie posit,if de Ia richesse et Ie négatif de

1a pauvreté socialement parlanL, face au positif de la richesse

dlvlne; mais, finalement, Ia richesse divine est de n'être ni

richesse ni pauvreté semblables à celles de 1'humain puisque

Dieu, conne nous 1'avoàs vu dans C ? et CJ"z , accorde non

seulement 1a richesse dite /rezq/ et 1a pauvreté inais aussi

1'appauvrissement par 1a rj-chesse et I'enrichissement par 1a

pauvreté (ta femme aveugle est pauvre et dès qu'e11e offre

I'hospitalité aux Saint,s, 1e volune de 1a pâte gu'e11e se met

à pétrir augmente). De ce point de vue, i1 s'avère, enfin, que

seule 1a foi compte et gue c'est cela même 1a richesse de

1'homme qu'i1 soit pauvre ou riche mat,ériellement parlanL.

De fj-1 en aiguille, nous sonmes arrivé à montrer gue

/r-rezq/ est t,ributaire du don-récompense matérieI (des biens)

Page 109: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

361

dans un sens moins important que lorsqu'iI est vu sous 1'angle

moral. Car c'est par ce dern|er sens, nous semble-t-i1, que

I'union entre richesse et pauvreté se t,rouve fondée. L'intérêt

ici est, de voir commerrt 1'union se réalise par I'invest,issement

d'une valeur cult,urell-e sous-tendue par une isot'opie

religieuse. Dans ce même' ordre d'idées, nous pensons que

1'union des contraires assure 1a fonction de coordonner entre

Séparés pour rendre compte de valeurs peu perceptibles à un

niveâu de lecture superficielle. Nous pouvons mênê al1er

jusqu'à dire que cette union est, sémantiquement parlant, 1a

trace par excellence d'une actualisat,ion de valeurs dans 1e

discours narratif, en I'occurrence 1e conte.

Le sens moral , comme valeur invest,ie dans / t-rez9./ ,

apparaLt clairement dans divers récit,s comme don divin: des

expressions comme t / rezq-u lIah 1-'iman/ ( ar: Dieu lui a

accordé Ia fol), /rezq-u Ilah bent (weld)/ (arr Dieu lui a

accordé une fille (un garçon)) et même Ie faire séducteur de

1a beauté de 1a femme (cf.c14, c18, C24) en témoignent. Le

discours à caractère religieux donne ainsi une justificat,ion

"réconfortante" de ce qui distingue les riches des pauvreS par

une unl-on suivant un sens moral qui expulse la hiérarchie basée

sur la séparation et 1a classification sur terre.

Ceci dit, il semble, d'un autre point de vue, que cette

union devient e1Ie-même, ce. qui justifle Ia séparation pour 1a

rendre Iégitime culturellement parlant. Car nomner 1'union

d'une manière ou d'une autre suivant une valeur actualisée dans

un discours, ne consiste pas à reproduire cette union de telle

Page 110: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

362

sorLe qu'e11e représente une "réaIité" socialer flornmêr l,unionassure plus Ia fonction de classer gue celre d,autre chosel.

sous cet ang1e, i1 semble que 1es contes int,roduit.s pardes fornules te11es eue: 11 y avait, un roi (un richer ürl

/aryaz/) et ir n'y a de roi (de ri.che, d,laryaz/) que Di_eu,

construi§ent, une conceptlon sur la séparatlon et, larelativisent en même temps en privilégiant explicit.ement1'appréciation selon 1e positif des éIément,s: richesse ,

pouvoir, royauté; un énoncé te1 ,eue "iL y avait un homme

pauvre..." pour inaugurer un conte, n'est jamais suivi par".,. et iI rr'y a de pauvre que Dieu". par cette remarque, nous

voyons comment, dans un conte où une isotopie religiieuse estdéc1arée dès son ouverture, 1'union entre séparés est orientéevers une appréciation admise culturellement suivant 1e posi.f,1fde 1'un des deux é1ément,s séparés, En l, absence de cetteisot,opie dans un conte , 1 'appréciat.ion n'entre guère en j eu:

1a valeur dans 1'unlon des contraires dans ce conte n'estcomparée nl à 1'un ni à 1'autre des éléments séparés.

Nous venons de distinguer entre deux types d,union entreséparés €t, par 1à nême, entre deux valeurs par l, union dans

les contes. Dans un cas, nous avons not,é une formed'appréciat,ion: "iI n,y a de grand, de riche... que Dieu,,; dans

1'autre, une absence d'appréciatlon conme si ilunion enLreI 'humain et 1'ogre ( ou 1'ogresse ) par exempre , était,indépendante de Loute appréciatlon dans 1e discours narratif.Par cette distinction, chaque fois qu'ir y a appréciat,lon, iI

1 Drrr= ,rnnais classer" ,

sens plus général, "nonnet n,est pas reproduire,C. HAGEGE, L'homm,e de parole , op. cit. p. l-2g .

Page 111: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

353

sembre qu'el1e est à mettre sur le compte de 1'homme en tantqu'être cu1ture1, ce dernier ne peut émettre d'appréciation que

sur ce à quoi i1 aspire à f image de ce qui lul convient, etqu'i1 tente de s'approprier en justlf iant. son ac:t.e par 1e

pouvoir de Dieu qui coorrlonne entre les opposés: ét,ant donné

que 1a riehesse est jugée posit,ive par cet homme producteur rju

ccnte, ce11e que ce conte, comportant une isotopie rerigieuse,ât,t,ribue à D j.eu pour 1égitimer celre de 1'homme , ne peut êtreque positive sinon -et indépendamment de 1'homme et de sa

culture- 1a richesse, comme 1a pauvreté, ne serait ni positiveni négative . Nous re j oignons par 1à 1a seconde valeur de

1 'union dans 1e second " lype " de contes. Autremerrt d j-t , ]a

construction d'une appréciatj-on dans 1e conte est fortement

cu1t.urel1e partlculièrement lorsque ce conte comporte une

isotopie religieuse.

De manière explicite r nous voyons que re discours

religieux intégré dans 1e conte au niveau de certaines

ouvertures te11es que ce11es que nous avons citées, pfésente

une certaine st,ratégie culturelle pour coordonner entre 1es

flagrantes "dis-harmonies" (opposit,ions) selon un principe:rendre 1égit,imes et faire assumer les différences ou 1es

conlraires en 1es faisant reconnaltre passivement. Ce discoursémane pour ainsi dire de 1'homme et est mis sur re compte de

Dieu, instance nécessaire à 1'homme en guestion pour réari-ser

sa strat,égie. C'est comme si nous clislons, en ef f et, que 1es

gros problèmes sur terre sorrt créés par rhommei €t, incapable

de les résoudre, c€ dernier res expédie à Dieu pour res

résoudre. cette visée, ou si 1'on préfère, cette façon de voir

Page 112: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

354

les choses, est, différente cie celle du conte-mythe, en ce sens

que ce dernier éta1e " les cartes" floues de 1'homme en

proposant des solutions d'unification avant gue ces cartes

soient problématigues. Nous avons vu dans ce sens 1'exemple de

1a mutation "évoluLive" dans les relaLions: humain VS ogre (ou

ogresse), sommeil VS évei1 ou encore vie VS mort.

Cette idée nous amène à penser que L'homme dont traite le

mylhe semble encore à Ia recherche d'explications pour

s'organiser dans son univers; 1'homme dont traite Ie discours

religieux semble avoir acquis 1'enseignement du mythe dont

f instruction motive la dominat,ion en se référant à Dieu Pour

1égltimer 1e statut qui aspire au pouvoir sr:r terre. C'est cela

même que nous appelons culturalisat.ion de 1a nature pour gue

se produise I'homme dit "civilisé" et naturalisation Ce ia

culLure pour rendre celle-ci justifiée en 1a rattachant par

f intermédiaire de 1'enseignement-instruction acquis, à une

instanee unifiante.

Partant de ce point, de vue, i1 semble -toutes proportions

gardées- que 1e religieux a une certaine parenté avec

1'enseignement du mythe, La différence à noter dans ce cadre,

concerne l'appréciation du pouvoir de 1'humain individuel

dominant, appréciation négative exclusivement face au pouvoir

de Dieu. Pour ce cas, Le mythe ne poserait pas 1a domj.nat,ion

en termes de h1êrarchie issue de' positions de dominant /

dominé, mais en termes de mutation à partir et par une

conjonction initiale. Ceci explique pourquoi iI est courant

dans 1'univers des contes qu'une ogresse adopte une fi1le

Page 113: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

365

humaine (cf . C1) ou qu'u,n descendant d'Une ogresse épouse une

f emrne humaine ( cf . C23 ) .

Nous assistons donc à deux procédés narratifs. L'un

s'appuie sur une vision culturelle; 1'autre, sur une vision

rrat,urelle qu'i1 f audrait resituer dans 1a neutralité du mythe

pour tenir compte du rePport relatif entre 1a nature et 1a

culture. C'est par ces indications gue s'explique 1e- falt gue

le conte ne peut, à nos yeux, être comparable à un discours qui

comporte des traces de validation de contrariété comme celle

cle puissant VS f aible, grand VS pet,it. . . , dans Le sens où ie

puissant est ce que le faible rr'est pas et ]e grand est ce que

1e petit n'est Pas ; pour ne prendre que cet exemple , l-e

puissant, ou iuppose comme te1 dans le conte, est souvent

faible devant 1e pet,it, (cf . les versions de lmqide//, par

exemple ) . Par ceS actualisations du pouvoir et de la grandeur

attribués au petit, ou, plus génêralenenL, Pâr 1'union entre

séparés comme "grand par Ie pouvoir de la ruse" eL "petit", }e

conte re j o LryTz Le mythe dans 1a mesure où , comme nous Ie d j-t

Lévi-St,rauss, " i7 ne s'agit pas (.., ) de choisir entre conte

et nythe, nais de conptendre Eue ce sont, deux pô1es d'un

en

danaine qui

intermédiaire s,

Reprenons

jà considérée

suspens.

1 cite par r. CotoNNA,22, L976, p. 18.

comprend «tautes sortes de formes

"1.

cette question à propos du mythe que nous avons

(cf . p. ?9,7.) pour complêt,er ce qui a été laissé

Revue de 1'Occident musulman, No

Page 114: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

366

Si C. Lévi-Strauss affirme qu'il n, y a pas de mot,if

sérieux d'isorer mythe et conte et qu'une même analyse devrait1es appréhender1, c'est qu'urre tentative de res isoler a vu 1e

.)jour". 0r, s'i1 y a un problème à propos d'une distinct.ionentre 1es deux, i1 peut être résoru par la constatationsuivarrte: tout conte qui corrstruit des représentaiionsculturelles est une référence à du dé j à-dit <iont 1e rô1e

instructif réa1isé d'une manière ou d'une autre et que

l'analyse se charge d'appréhender, est largement, communiqué par

les discours qui coordonnent entre des contraires ( 1es mythe§ ) .

Dans ce sens, 1a parenté qu'i1 y a entre le conte et re mythe

permet 1a construction de discours narratifs à l,image d.'uil

sens désiré à êt,re donné à 1'existence au sens large du terme.

La caractéristique é1émentaire du cont.ê dit individuel etce1le du mythe dit co1lectif3, tiennent compte, selon nous, c1e

f inscription d'lsotopies dans des dlscours narrat ifsconstruits sur une struÇture du myther f isotopie religieusepar exemple est 1e produit de 1'effort d'un discours qui

con§iste à 1a mettre en oeuvre pour 1ês fins dorrt nous avons

évoqué quelques aspects et dont f intention est en quelque

sorte "camouf 1ée". cett.e interrtion esL partiellement à l, inage

de 1a construction organisatrice d'i-sotopies dont la portée

sémantique est 1'errsemble des codes figurat,ifs sous-tendus par,les "mythèmesi' selon 1'expression de Lévi-Strauss.

1 c. lrvt-srRAUss1,973, pp. 157-153,

, Ànthropolsqie structurale , P1on, Paris,

N. FARES, Revue de 1'Occident musulman , op. ciL.

p. 11.

Z

3 Voir, entre autres, D. PAULME , op. cit.Nô 22.

Page 115: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

367

Toutefois, 1e premier discours où une isotopie franchemenL

religieuse est relevable, n'est quand même pas superposable au

myt,he. Entendons par 1à que 1'analyse devrait, tenir compt,e de

discours distlncts dans 1e sens où même si ces discours

coexistent dans un seul produit narratif, 11s sont construitssuivant deux voies qu'i1 conviendrait, de distinguer. ce point,

de vue consiste alors à voir f individuel ( le cont,e ) comme

proche d'un soubassement dt à f intégration de f isotopiereligieuse dans 1e conte-mythe. Dès lors, 1e collectif sera

valable aussi bien pour 1e conte que pour 1e mythe si '1 'on

admet que 1e religieux, conme nous Iavons laissé enterrdre,

assure une fonctlon d'uni.on comparable à celre du mythe. Ainsi," La description des iltythes ou des contes n, est que Je

détroiTenent du niveau idéologique caché sous fes apparences

d'un faire anthroponorphe"L,

Précisorrs quelques points de détai1s. L'appréciatlon dont

nous avons parlé ci-dessus porte sur f int,égration de

f isotopi-e dite religieuse et, adoptée par 1e conte-mythe. C,est

1à que réside, pour nous, 1e collectif étant donné que

1'appréciation en question esÈ assurée par 1a valeur tle 1a

négat,ion: i1 n'y a de roi que Dieu, êt par 1'exclusivit.é du

règne à Dieu, faisant 1'unanlmité d'une corlectivité externe

et indépendante de t,out individu. En outre , cet,t,e appréciation"objective" intèqre f isotopie dans les axiologies du conte-

mythe de manière cohérente et conforme à un consensus socio-

1 e. J. GRETMASParis, L976 , p. 203.

, §émiotique et sciences sociales , Seuil,

Page 116: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

cu1ture1, sinon, notre

assomption individuelle.

368

produit n'admet pas qu'i1 alt

Nous sommes parti de f idée que 1'union entre contraires

est 1'une des spécificités du conLe-mythe et que tout discours

qui exploite cette caractéristique comporte une dimension

mythique. De ce fait,, nous estimons que ce discours n'apporte

rierr de nouveau quarrt aux stratégies de sa construêtion sou§

.1'angle de 1'union entre contraires. Mieux encore, cette union

errLre contraires propose un modè1e qui donne au discours non

mythique ou supposé comme te1, les moyens de s'intégrer dans

1e conte-mythe. Sinorr, d'un autre polnt de vue, ce discours

s'enracine dans Ie conte-myt.he par au moins la fonetion

déclarée et tente de s'en éloigner pour produire des effets

dont 1e but est d'agir autrement que le conte-mythe. Rappelons

à ce propos que ce dernier, lorsqu'i1 est dlt /mHa)tla/, est

marginalisé notamment quand i1 est jugé sur son caractàre

fictif et irrée1.

La valeur dans 1'échange

Nous avons exploité /r-tezq/ et ses investissements en

récupérant une hypothèse émise à propos d'indicat'ions sur

1'union des contraires pour décrlre 1a manlère dont f isotopie

dite religieuse eSt inscrite dans 1'ouverture de eertains

conLes. Nous avons aussi vu que /r-rezq/ étaiË 1'une des

Page 117: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

369

manifestations du pouvoir et qu'il n'était

1'échange entre Dieu et Ie bénéficiaire.

pas sounis à

A présent, i1 est temps de préciser que ceci ne veut pas

dire que notre corpgS ne comporte pas d'ocCurrenCes danS une

conf iguration où 1'échange intervient po,ur valoriser

socialement 1es obj ets échangés. Toutefois , nous 1'aurions

constaté si nous avions évoqué 1a quest,ion du rapport entre

/r-rezql et ses autres expansions lexicales (cf.p. 35S, n. f)î

avant qu'une représent.ation de 1'échange fasse 1'objet d'une

narration, i1 faut que 1es objets d'échange soient soumis à une

espèce de rappel: seul Dieu accorde aux humains ce qui l-eur

permet d'orgariiser des contrats d'échange sur terre.

La notion de valeur est spécifiée dans 1e C31; e11e est

dlte /qima/ suivant un système d'échange qui invente 1a monrraie

conLre 1a maison à vendre. Dans CLg, /l-flus/ (ar: 1'argent),

pour désigner cette monnaie, sert pour 1'achat d'habits et de

préparatifs par 1'homme à sa fiancée (/z-zha)/). Enfin, nous

voyons que 1a monnaie est un molif qui apparait dans des

configurations d'échange et gue jusque 1à, rien p'a 1'air

d'attirer notre curiosité.

Ceci dit, quelques unes de noS occurrences Pourraient êlre

intéressantes à certains égards des représenLations de

1 'échange .

On sait que /l-\wiz/ (arr pièces de monnaie en or).

/n-nuqra/ (ar: ârgent) et /1-yaqut/ larr pierres précieuses)

sont utilisés dans le conLe pour désigner particullèrement 1a

rareté et "Ia haute" valeur des objets contre Iesquel" ii" sont

échangés. Ces objets sont invest,is d'une te1le valeur car iIs

Page 118: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

370

sont exclusivement à Ia portée de ceux qui disposent d'un

pouvoir pour Ies avoir; iIs sont utilisés dans des parcours

figuratifs qui s'éloignent de la sirople " 1ittéra1ité " d'une

opération d'échange comme ce1le de Ia maison vendue contre une

certaine somme d'argent dans C31.

Dans CL4t /T-Tbeg/ (ar: VâD), servant de mesure pour l-a

quant.ité de /L-:..wiz/ qu'i1 faut pour être échangée contre une

bague/ propose un lnvestissement par son contenu qui n'est pas

entendu dans le sens d'r-lne simple circulat,ion à valeur

d'échange d'un objet contre un autre. A ce niveau, i1 faut,

nous semble-t-i1, s'entenclre sur la valeur de /L-Lwiz/ et de

1a bague. Pour ce faire, faisons appel à un autre contexte

d'utilisation de /L-Lwiz/, celui de C15 où /1-qurdiya/ (ar:

boisseau, comme mesure pour 1a quant,ité de /:-.-LwLz/), est

donnée à ce1le qui arrive à déchiffrer la devinette proposée

par 1e roi. Notons euê, jusque 1à, on ne peut pas parler

d'échange proprenent dit,. Ceci dit, rappelons que 1e don de

/L-l-w|z/ à celle qui détient, 1e savolr-déchlffrer 1a devinette,

est au fond ce qui habilite Ia sélection de Ia plus

int.elligente des f emmes pour êt.re promise au f i1s du roi.

S'agissant de 1a fille d'un btcheron dans notre conte, i1

serait, possible d'admettre que 1'1ntégration de cet,te fi1le

dans 1e rang unique reconnu comme tenu par 1e prince, sê

réa1ise par f intermédiaire du savoir-résoudre 1a devinette.

I1 apparaLt, ici que ce mariage se réalise à Ia manière d'un

échange:' i1 a fallu utitiser /L-l-wiz/ pour découvrir 1a filte

du btcheron comme femme qui convient au prince du point, de vue

du père de ce dernier. Par ce mariage qui rejolnt 1'échange,

Page 119: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

371

i1 semble possible de récupérer Ia bague dans C14 gui, elleaussi, entretient un rapport avec le mariage. Nous y

reviendrons (p. 486). De même, la valeur de /l-LwLz/ s,expliquepar f intégration de Ia descerrdante d'un btcheron au rang

é 1evé .

Par cette intégration qui nér j-te plus d; atterrt.ion, i1s'avère que Ie conte précise les voies de séparation entre deux

rangs sociaux, celui de 1a fi11e du bûcheron et celui du

prince, êt de 1'union entre les rangs séparés par Le mari.aEe.

C'est-à-dire que si d'un certain point, de vue, notre cont,e

propose de voir en 1a temme ce gue nous pourrions reprendre

comme "fi11e d'un btcheron"l, i1 ne demeure pas moins vrai

eüê, par 1e pouvoir du savoir, f intégration dans le rang élevé

est prévue par/dans Ie conte. Dans ce cadre, i1 semble gue lamosaique relative à ce qui est, appelé "classes sociales" régiespar 1e rapport des dominants aux dominés, est représentée dans

1e conte par une dimension coordonnatrice enLre 1es différences

des rangs. Pour ce faire, le conte choisit 1es extrêmes, à

savoir Ie rang représenté par 1e btcheron par f intermédiaire

de sa fille et le rang représenté par le roi par

f int,ermédiaire de son f i1s.

De manière moins évidente, nous pourrions examiner le faitque /sensli dehbi/, dénommant 1a fi1le du btcheron, propose du

point, de vue f ormel un dét,aiI2: 1l est con'struit, sur une f orme

1 Nous avons déjà vu (cf.comporte culturellenent, un t,rait

2 Nou" remercions À. Sabia dsur Ie détail en quest,ion.

p. 9+ ) que "le bûcheron"dépréciatif.'avoir att,1ré notre att,ention

Page 120: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

372

du masculin tout en désignant une femme. ceci peut êtresignlficatif dans 1a mesure où par cette forme, cetteconstruction désignant. une femme réfère -toutes proportionsgardées- implicit,ernent, à un sens de passage de 1a femme

"assimilée" généralement au ma1, au bien caractérisant ilhomme.

ce passage serait renforcé par /r-LwLz/ dont ld trait. "en or"esÈ une itération dans /dehbi/ si l'onr à-dmet que ce terme estdérivé de /d-dheb / lar: or) . En outre, souvenons-nous que

/L-Lwiz/ est objet de valeur dans 1'échange tel que nous en

avons parlé ci-dessus

Darrs ce sens, i1 apparait que /l--twiz/ ou, d'une façon

plus générale /ci-dheb/, comporte lorsqu'ir est communiqué par

1'homme à 1a femme une vareur relative au bien. En d,autresLermes, r'attrlbution du bien à Ia femme se réalise par le don

de /d-dheb/. cet acte est en soi ce qui coordonne entre le bien

et le rnal chez Ia femme, en ce sens que ilunion entre Ihomme

et ra femme ne deviendrait possibre gue par cet acte

coordonnateur. Dans un certain sens, nous comprenons mieux

pourquoi /d-dheb/ est culturellement port,able exclusj.vement par

ra femme: 1'homme n'a pas besoin d'en porter puisqu'i1 est, déjà

" assimi-lé " au bien; i1 est, le bien êt, dans ce cas, s, ilport,ait des bijoux en or i1 contredirait, la vision mythiquel.c'est peut-être aussi une raison pour 1aque1le cert,ains noms

de personnes ne se prêÈent, pas à une cons,truct,ion fornelleselon: masculin / féminin. D'airleurs, nous ne connaissons pas

c1e noms de /d-dehbi/ pour désigner un homme et encore moins

1 Nou= nous référons ici au récit d,Eve et Adan.

Page 121: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

373

pour désigner une fenme (nous y reviendrons chaP. I. ). Par

contre, /dehbiya/ est courant. De même, /1wiza/ qui n'admet pas

de masculin pour désigner un homme. Nous voulons dire gue 1es

noms à proprement parler de personnes, quand i1s comportent un

trait. relatif à " 1'or" /cl-dheb/ , sont clestinés à désigner des

femmes eL non des hommes. Car, comme nous venons de te dire,

si " 1'or" est homologable au bien, c€ dernier est déjà en

1 'homme qui rr'a, pour ainsi dire , rrullement besoin de porter

un nom qui comporte linguist,iquement, un quelconque trait,

relat.if à "1'or".

Ces considérations, même sl e11es sr:nt dlscut,ables à plus

d'un titre, montrent tout de même que 1a valeur du motif de

/d-dheb/ dans nos contes est loin d'être réduct,ible à une

équivalence par rapport à 1'objet, contre leque1 i1 est échangé.

Sa charge culturelle rend compte d'une communication de cocies

qui engage 1'analyse à tenir compte de tout l'univers cuIturel.

/l.-l.wiz/ , associé à des figures dont 1e support sémantique

comporLe un trait positif accordé au bien, se confirine comme

utilisation context,uell-e par une thématisatlon dans C25 r 1e

prince demande à son père cie 1ui accorder sept mules

transporteuses de /L-l.wiz/ avant de parLir à 1a recherche de

/11i mGeTTya b-feerha/.

Àutour de ce trait dit, posit,if , /l-Lwiz/, Pour êt,re reçu

par un bénéficiaire, indique que 1e rang de ce dernier est

particulier; sinon, i1 est exigé que ce bénéflclaire ait une

compéLence particulière. Le C27 donne un exemple précis à ce

propos: 1e choix entre 1e silo contenant /l--Lwiz/ et 1e silo

contenant 1es reptiles, est détermlné par cette compétence

Page 122: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

374

s€Ion qu'e1le est conjointe ou non au sulet, soumis au choixl.

Nous pensons que cet exemple du choix tient, compte just,ement

cle la valeur de / L-Lwiz / en t ant qu ' ob j et qui ne peut entre ren relation conjonctive avec un sujet que si ce dernier saitque Ia transformation est régie par une forrne révélée par 1a

valeur même de /:---Lwiz/, Ce n'est que si 1e sujeL représenté

dans noLre C27 par une fi1le, rêconnaît son propre statut de

"femme" face à Ia valeur de /l-LwLz/ qu' 11 peut. prétendre à une

conjonction avec cet objet,. En d'autres termes, ce sujet doit,

reconnaltre et admet.tre qu'on ne peut obt,enir comme ob jet de

valeur que ce qui est à f image de soi à molns qu'on

reconnaisse explicitement f image de soi par 1a demande, à La

suite du choix, de ce qu'on "mérite". On ne peut avoir que ce

qu'on mérlte relat,ivement à un statut dé j à tracé

culturellement., raison pour 1aque11e 1'héroine de notre conte

choisit. ce qui est de t,rait négatifr 1e silo contenant des

serpents, uD 1it fait d'épines et une mule "borgne " , pour

réaliser une transformation conjonctive qui fait valoir 1e

positif investi dans /L-Lwiz/ auquel s'ajoutent et s'associent

toutes 1es f igures thérnatisables par 1 'é1évat,ion. Àinsl , La

compétence du sujet se résume par: demander 1e contraire de ce

qui est désiré cofime moyen pour obtenir ce dernier. C'est 1à

que réside 1a reconnaissance de soi conforrnément au "conLraire

1 Ce phénomène est connu dans 1es cont,es; citons entreautres, 1e silo contenant des vipères (ou des serpents), Ie litfait. d'épines de jujubier, 1'accès à l'espaee intérieur par unefenêtre, Ia mule (cheval) "borgne"..., considérés commecomport,ant le trait négatif auquel fait écho dans le cadre duchoix, 1e positif par 1a chambre au Iieu du silo, 1e 11t,confortable au IIeu d'épines, I'accès par Ia port,e au Ileu de1a fenêLre...

Page 123: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

375

du désiré", eL 1'éIévation qui présuppose nécessairemenL cette

reconnaissance.

Le C31 est particulièrement significatif dans cette voie

de lecture: 1a femme mise en scène comme personnage susceptible

d'être con joint à 1'é1évat j-on au rang évalué posit,ivementl,

s'avère à Ia fin du récit. indigne de ce st,atut, La

transfornation qui se réaIise cians 1e C27 n'est pas de rigueur

dans 1e C31, raison pour 1aque11e 1a fin de ce récit tierrtconte de Ia révélat.ion comme sanction de 1'être du personnage

en 1ui attribuant un trai-t négat,if qui re j oint celui att,ribr:é

à 1'héroine par e1le-même dans C27.

I1 est évident, que Ia présentat.ion que nous venons de

faire peut être revue par une lecture comparative entre deux

contes de notre corpus. Le premier est 1e C25 qui raconte

1'histoire du prince pour qui 1a conjonction avec /7-LwLz/ est

un état qui va de soi comme si ce prlnce n'avait pas besoin de

subir une épreuve avant d'être conjoint à cet objet, de valeur.

Le second est 1e C4 et ses variantes (C6 et C34) où Mqide/

(Hemmu lHrami, Hdidnan) est conjoint à /1-lwizl à 1a suite

d'une transformation qui a exigé que notre sujet, soit doté d'un

pouvoir ciu savoir acguis à 1a suite d'une épreuve. Ce n'esiqu'à cette corrdition que ce sujeL acqulert, 1e statut de héros.

Les détai1s de cette lecture auront confirmé notre

interprétation. Car, dire que 1e conte de Mqide/ et ses

variantes font, valoir 1a nécessité de mériter 1e caracLère

1 Cett" femme paraît exceptionnelle ou du moinsdes autres dans 1a mesure où son beau-père luivaleur de /L-lwiz/ par 1e don de 1'objet (/L-]-wlz/

di f férenteaccorde Ia).

Page 124: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

376

positif invest,i dans le statut de héros, revient à dire que ce

caractère se réa1ise effectivement dans 1e conte non pas parce

que l,lqide/ aurait pu ne pas avoir ce statut, mais parce que,

par cetle figure actorielle, les récits proposent une morale

qui dira de manière tautologique qLr'un homme est un homme et

quel que soit 1'homme, ie positif lui est, attribué par 1e faitmême cl'être homme.

Toutefois, ce caractère conjoint à 1'homme d'après cette

morale, peut être remis en quest,ion dans certains cas que les

contes développent. Le point,,de vue qui consiste à présenter

1'homme selon un caractère négatif, est intrinsèque à Ces

ef f et,s à reterrir darrs des parcours bien précis. Présenté comme

ayant un trait, poslt,if à son état initial , 1e su jet, représenl.é

par 1'homme Lransforme sa "positivité" en "négativité" par son

propre f aire jugé inadmi-ssible cult.urellement. La conf iguration

de 1a répudiat,ion par 1e père de ses propres filles est un

exemple qui développe ce cas cie Lransformation: le négatif se

construit parallèlemerrt à 1'acte inadmissible du père.

Par cet exemple, la mcrale consiste à rappeler que

1'homme , âü de1à du fait qu'i1 est père , est foncièrernent

con joint, au pos j-t,if ; par son f aire qui t,rahlt. en quelque sorte

ceLte valeur, iI sublt une dégradation pour se situer dans le

négatif. N'est-ce pas tà un moyen ut11isé par 1e conte poLlr

élire 1e positif en condamnant celui qui n'en tlent pas compte?

L'actualisation du négatif y est, à juste titre pour renforcer

1e positif lmplicite.prenons un autre exemple de conte: le père de LeiIa (cf.

C1) est à 1'origine de l'état que nous paraphrasons par 1a

Page 125: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

3'7 7

conjonction de sa fille avec 1'ogresse. En remontant le récitdans un sens de lecture à rebours, on peut aisémenl se rendre

compte que de "1a renconLre" des deux femmes avec l'ogresse,programnée par 1e mari, résulte la perte de Lei1a. Ceci est

3ustement ce qui situe ce sujet ( te mari ) dans 1e négatiflcomparable à celui du père que nous avons déjà relevé dans ta

configuration de 1a répudiation des fi11es.

Pour donner une ouverture à ce rapprochement par 1e

négatif entre , 1e mari dans C1 et 1e père qui répudie ses

fi11es, nous pouvons nous appuyer sur 1e falt explicite darrs

C!, que 1e mari, êû refusant de planter 1es fèves, progranme

sa disjonction avec sa fami1le. cet acte de rejet de 1a famiLie

est manifesté par le départ vers Ia grott,e pour s'y installeret marrger 1es fèves au lieu de 1es planter. C'est dire qu'à lafertillté (ou la fertilisation) de ce qui est donné pour êtreplanté, 1e mari préfère 1a stérilisation (manger les fèves etprogramner "La renconLre" des femmes avec 1'ogresse). Le mari,

s'i1 avait, planté 1es fèves aurait, ét,é plus une figure qul se

rapproche d'une coneeption de la continuité de 1a vie que de

sa dégradation pour êLre conjoint. au négatlf. A ce stade, i1

devient net que 1e positif sert à valoriser 1a fertilitécontrairemerrt au négatif qui valorise 1a stérj.lisation assumée

par 1e mari. En somme, t€nter de rendre stérile ce qui est

donrré pour être fertile, ou encore, terrter de rendre négatif1e positif, se retourne contre I'homme qui dolt, dans ce sens,

affronter et assumer les conséquences irrémédiables des forces

1 voir c LACOSTE-DUJÀRDïN, op. cit,. p 279

Page 126: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

qul lui sont extérieuresl.1e positif reste sacré en

1'homme te1 que la culturecont e ,

378

Morale: auLant faire en sorte gue

ce sens qu'i1 est I'incarnation de

1'enseigne par f intermédiaire du

Faisons un pas à 1a suiie de ces remarques reratives d,une

part, âu positif que les contes s'appriquent à faire valoircomme trait qui caractériserait 1'homme dont les actes sont

définis culturellement; et d'auLre part, au négatif qui sembie

at,tribué à 1a femme et qui est suscept.ible de se transformeren positif selon les conditions que nous avons développées.

Notre point de départ, était bien une terrtative de r.roi::

commenl 1a récurrence de /:--LwLz/ eomporte une valeur. À

présent, nous allons essayer de reprendre ce mot,if en tanL que

désignation de "bijoux" que La femme porte pour entretenir son

aspect esthétique. Blen entendu, cette indlcation superficlelLen'esl pas 1a valeur invest,ie dans 1e motif tel qu'i1 estut,11isé dans les corrf lgurat.ions discursives. Dé jà, 1e f alt, que

généralement les bijoux, comme figure, s'associent dans

1'univers de nos corrtes à /lihudl/ (ar: juif) -personnage à

titre de marchand qui procure ces bijoux aux femnes- nous

sembre assez curieux. cette fonctiorr de / lihudi/ semble

parfait.ement admj-se même socialement comme si ce personnage

ét,ait une figure "neutre" relativeroent à ce qui sépare 1es

1 Pré"isons que c1 -toutes versions confondues- ne nousrenseigne même pas sur ce gu'iI advient du mari: les effets deson "devenir" sont dits dans la perte de sa filre et dans sadisjonction avec sa canne au sens mét^aphorique de /xizrana/(ar: canne) ou, de manière plus renforcée, de /0aGriyg/ (ber:canne). ce sens métaphorique comporte 1es traits de virilit,éet de courage que 1'on retrouve par ailleurs dans d'autresproductions orales.

Page 127: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

379

"éternels ennenis" selon 1'expression de c. Lacoste-Dujardin(1'homme et 1a femme). Mieux, pâr 1,int,ermédiaire de /l-ihud1/clans 1a configuration de 1a vente des bljoux, l,opposit.ionHomme / lemme est relativisée en ce sens que / lihudi/ estprésenté comme celui qui est généralement le prus au couranLparmi les hommes du morrde des f emmes. T1 peut même êt.re"messager" de femmes disjointes par les espaces de chacune

d'e11es. Dans ce cas , 1'ob j et de vente ( 1es bi- joux ) seralt,1'é1ément qui rend possible 1'1ntégration parti.elle de l,homme

dans le morrde féminin: r'histoire du roi dans c19 va dans ce

="n"1,/l'ihudi/, qu'i1 soit prls pouï "paraître" d,un roi or-i pour

" être " du vendeur par excellence de /d-dheb/ cians l_ , univers des

cont'es, est urre f lgure actorierle qui tient son statut, rlans

1e parcours de 1a vente, de deux tralt,s séparés: posirif etnégatif; positif parce qu'i1 est homme et négatif parce qu,i-1

contracte avec 1a femme par 1e choix de ra fonction2 que lulattribuent, les contes. c'est dire gue /l-ihudi/ a un statutmodar déflni essentiellement par le pouvoir du savoir qui n,estpas 1e commun de tous. Le f ait gue son stat.ut réunit entre repositlf et,1e négatif 1e montre clairement. Dans ce sens, 1e

fait que /I-ihudi/ est prls pour "conseirler" à propos d,énigmesou de problèmes dont 1a sorut,ion exige un savoir cognlt,if de

haul niveau (cf . 1a figure de /r-mujerrib/ (ar: 1,expérimen-ué)

1 Prendre pour paral.tre /lihudi/ dont ra fonction est detravailler sur de l-'cr et de 1'argent, est ce qui permet au roide connal.tre 1a femme dit.e sainte.

Jusqu'à une date récente au Maroc, Ie métier de marchandambulant était exercé essent,ierlement par des julfs.

Page 128: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

380

dans C6)1, rI'êst pas étonnant,. Par ce statut, 1e juif apparait

comme personnage dont une main tient }e négat,if (1e ma1) et

dont I'autre tient, 1e positif (1e bien).

Une autre voie pour réexaminer ces données est possible:

/Lihucli/ seraiL réduit, au trait négatif du f ait même qu'i1

ccntracte aveC 1a femme, maiS, par Son Savoir,. i1 transforme

aussi un état dysphorique (stérilité par exemple dans C6) en

euphorique ( fertllité ) . De ce point de vue, iI devient aj.sé de

reprendre 1'association du juif à /d*dheb/. Nous avons dit que

/t1-dheb/ pouvalt entretenir un rapport avec 1e positif /

négatif; à présent, ajoutons que cette même calégorie est

investie dans 1e motif de /Lihudl/, Dès 1ors, i1 n'esL plus

étonnant gue /d-dheb/ apparaiSse dans 1a configuration

d'ensemble comme unité à rapprocher de /ldhudi/.

Dans le C38, les bijoux sont un é1ément d'ornement, que les

fil1es demandent à leur père pour assister à un mariage: c'esL

ce que le conLe explique. Néanmoins, nous ne devrions pas nous

arrêLer 1à car, quand les fitles descendent dans 1e puits où

1e prétendu mariage a lieu selon 1e dlre du père, 1', aLnée

ramasse tous 1es bijoux que seS soeurs ont déposés avant de

descendre darrs Le puits et les y jette. Apparemment, il s'agit

1à d'un acte fait, par 1'ainée après avoir compris f inLention

du père mais, âs forrd, il est surtout question d'un acte qui

consiste à ce que les soeurs ne doivent surtouÈ pas se séparer

des bijoux. C'est en ceS bijoux que réside leur devenir puiSque

1 Citon" 1a configuration où 1e juifvieillard pour assurer le rôle d'adiuvant:femmes sont st,éri1es demande conseil au jindique Ia solution.

est substitué au1'homme dont les

uif I celui-ci lui

Page 129: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

38t

nous avons dit que 1es bijoux /d-dheb/ sont investis du traitposlt,if . ceci morrtre que re père, en of f rant, ces bl joux à ses

fi11es, leur a en fait accordé sans 1e savoir ce qui devaitmodaliser ler-ir sort dans un sens positif (euphorique ) tout en

croyant qu'i1 s'esL débarrassé c'elles. c'est aussi dans ce

sens qu'il- sera dit que l-e père en prôgramma.nt 1a répudiationde ses fi11es, sera conjoint au trait négatif. Nous assistonsdonc à au moins deux angles de iectr:re de cette conf iguratlorr r

1e premier considérera 1e mot.if des bijoux en conjonction avec

Les soeurs pour assurer leur deverrir; ]e second, 1e mot.if du

père, âSsoc1é à ceLui des sept soeurs par 1e programme de tarépudiation qui at,tribue au père 1e trait, négatlf.

Supposons maintenant" que Ies filies aierrt rendu ies bijouxdans c38. si cera avait été dit dans ce corrte/ toLlte autreaurait été notre lecture. cet,te lecture aurait été étonnanre

car e11e signlf ierait que 1e père darrs 1, urrivers du corrte i

s'accorde 1e droit de répudier ses fil_res sans qu, aucune

évaluation négative ne lui soit, attribuée, et f isotopie du

sacré cie 1a parenté (cf.noLre première partie, p.eaû) ne se

serait, pas actualisée dans re conte.oï, i1 suffit de regardernotre corpus pour se rendre compte qu'aucun cont.e qui traitedu rapport père / fi1le(s) ne fait exception pour "prophétiser,'

Le sacré de 1a parenté.

Page 130: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

382

Conclus ion

Not,re tentati-ve de déf inir /1-mHa iya/ , en nous appuyant.

sur le fait que ce produit n'est pas seulenentdivertissementl, ne prétend pas apporter une clé pour Ieproblème de définition du conte. ceci dlt, sa parent,é du point.

de vue " génétique" 2 aue" le mythe, eu€ nous soutenons au pointoù nous avons utilisé 1a composition "conte-mythe,,, nous sembie

tout, à f ait intéressarrte. cette parenté donrre beaucoup à gagner

en 1a posant comme fondamentare pour exploiter 1es acquis des

études sur 1es mythes. c'est, d'eilreurs, pâr cette parent,é

qu'i1 serait possible, nous semble-t-iL, de mieux appréhen<ier

1e corrte; sinorr 1e consensus sur cette question éternelie:gu'est-ce que 1e corrte?3, serait difficire à réaLiser.G ' Jean, entre aurres chercheurs4, a 1e mérite d, avoir

D. PAULME, op. cit. p. 46.

Ibid. p. 45.

Lors d'une visite de courtoisie que nous avons rendue à1'une de nos infornatrices -que Dieu ait son âme- nous noussommes trouvé en situation favorable pour poser cette question:quand f informatrice nous a dit: "tu veux probablJment queje te raconte^ urre /mHajya/", nous avons répondu par "mayenteena &amHaji0 (berr qu'Lst-ce qu'un cont.e?). A 1a suit.e decette question, notre informatrice a répondu en entamant, une/mHajya/ qu'e11e a choisie erle-même sans aucune justificationdes raisons de ce choix.

4 voir G. JEAN, op. cit. pp. r'l-sL. cett.e question se posepour tous les chercheurs qui s'intéressent aux contes; reur1lste étant longue, nous nous contenterons de citer l_escollaborateurs de Front.ièrls _dff___§_q0-te, op. cit. , et 1esintervenanls des ".fo térature orale du 23-26 mars L982" autour de ? Ed.CNRS, Paris, 1984

1

2

3

Page 131: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

383

regroupé un certain nombre de définitions pour conclurequ'e11es part.ent dans tous 1es serrs et qu, e11es vont même

jusqu'à se conLredire. une chose est certaine: ,, 1,honne,avant de pensert a déjà su reconter des histoir*r"1; elle ces

hist.oires soient dites /mHa jyat/ oi-r mythes, 1e f ait est rà, et1a distinction seralt un lrait cLassificatoire sans autreirrcidence sur 1'enchevêtrement possibie des contes er

mythes cians une seule nerration.

En p1us, êû partarrt de ceite idée, la quest.ion sur1'crigine de /1-mHa)va/ serait moins importante -raison pcurI-aquerie nous i'avons évitée- que ra recherche par des

technLques de description de ses fondements cians ie sens de ce

qui y est transmis. Entre Lln débat autour des crigi-nes de

/1-mHajyat/ que nous sommes, d'airleurs, incapable d,approcher,et une autre autour des "origines-traces', cl ans /l-mi{ajyat,/ en

vue de ies rendre intei.liEibles, i1 y a une grande dlfférence.Étarrt conscient des dif f icu1t,és pour traiter ce produit.,

et convaincu que son étude, faite de i'intérieur2, sêralt 1a

plus apte à permettre 1'analyse à proprement parler des universsémantiques, nous estimons qu'i1 est, légitime d,admetÈre que

1e mode d'êt re du conte oral peut êt,re priv11égié daiis rlotreapp roche .

Darrs ce s pe rspecLive s , rrou

Lraitement de not,re produit

exploration de l'irrtérieur poLlr

s avolls fait en sorte que Ie

prenne comme princlpe une

éviter que le faire analytique

1 t. cALvrNo , cité parop. cit. p.sciences sociales,

A. J. GRETMÀS ,

205.

pp. 11-1-5.2 volr N. FARES, op. cit.

Sémiotique et

Page 132: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

384

sombre ,dans des consiciérations "i;apJiquIant] (,,, ) une certaine

ext,ériorité"L. Par ce choix méthodologique, il nous semble -à

moins que nos connaissances n'aient pas encore atteint 1e degré

qu'i1 faudrait. pour en juger- que les appréciations sur le

conte populaire ora12 f^ites de 1'extérleur ne sont pas

suffisamment renseignées par ce11es faites de f intérieur.

L'ang1e dont les orientations ont étê développées par

1'auteur de "Pour une t,héorie de f interprét,ation du récit

mythique"5 et dont 1'enseignemerrt consiste pour nous à étudier

le conte de 1'lntérieur montre que toute autre approche Ce

1'extérieur ne verrait dans 1e conte qu'une fonction qui se

trouve au dernier rang cle ce qu'e11e transmet r

divertissement.

1e

1 c. LACosrE-DUJARDTN, op. cit. p. 111.

2 No,r= pensons essentiellement à certaines appréciationsen termes de dési.ntérêt et de disqualification de /1-mHaiyat/et des recherches qui se font, sur ce produi-t par un certaindiscours "élitiste" que nous avons S6uvent entendu commequalification de notre propre travail: /1-mHajyaL/ c'est faitpour 1es enfants et les femmes eL non pour 1es hommes ( lesadultes ) .

pp. t&.5-230'3 A. J. GRErMÀs, Du sens, op. clt.

Page 133: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

TROTSTEME PARTIE

<T CO ITAGE » . -æ)VOIVC-æ,TTON

.î{T,S.E ElV EOATCTZOATATETæ.NT .D " LITT }4OT^TE

Page 134: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

385

CHÀPITRE

L'ÀNTHROPO§Y},ITE ET L'ɧO§CTATTON

Dans 1a partie précédente, nous avons évoqué quelques

suppositiotis relatives à 1'anthroponyme de /sensll dehbi/ ea

considérant /d-dheb/ supposé 1'unit.é dont /dehbi/ est dérivé"

En fait, ce point de vue pose plus de questions que de répr:nses

à propos de la f ormat.ion de cet. ant,hroponyme. Dès lors, i1 ncus

semble rrécessaire d'y revenir ne serait-ce que pour éclairer

1a mise en fonctlonnement de cet anthroponyme à f instar de

certains autres que nous ét,ud j.erons dans ce chapitre.

D'ores et déjà, quelques questioru s'imposent d'el1es-mêmes

pour orienter notre réflexion:

1, dans 1'espace du conte, y a-t,-i1 des règles de

fonctiorrnement de 1'anthroponyme ? Si 1a réponse est positive

sous un certain angIe, c'est qu'i1 y a aussi des règIes qui

sous-tendent sa mise en fonctionnement d'un polnt de vue

énonciatif, et dans ce cas,

2. jusqu'à que 1 po int

1'anLhroponymie dans 1e conLe d'un

sous 1'angle de 1'énonciation, peut

1'hypothèse d'étudlerpoint de vue discursif et

êt,re fondée?

Page 135: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

386

It est évident que cet, angle d, analyse ne vaut, pournous1, que par 1'étude du conte populaire oral à un niveau quiporte sur 1e présupposé du produit, celui de 1,énonciat.ion.cette afflrmation est en erle-même ce qui se trouve à l,originedu choix de 1'anthroponymie gui permeL, dans une certainemesure, de voir commerlt on peut parler d,énonclation l0rsqu,onprend pour ob jet, d'étude /L-mHa jyat/. A ceci_, a jout,ons que

1'anthroponymie serait construite dans res contes suivant une

tyPologie qui ret,iendrait, des noms d'acteurs qui se présententcomme représentation d)un" significat.ion en tant qu, , acteproducteur" dans re contexte narratif; et d,àutres qui ne seprésentent, pas de cette manière. ce seront 1es premiers quii-ntéresseront notre ét.ude car i1s nous amèneront à tenir compt,e

de 1'activité cognitive soutenue par l, intent,ionnari_té de

1'énonciateur.

Faisons un pas en arrière. cett,e dernlère idée esL, au

fond, problématique. ce serait facile et, même trop facile de

dire qu'i1 y a eonstruction dans re sens d,,urre motivation de

1'anthroponyme. r1 faudra, pour s'y accoutumer avec prudence,prévoir 1es cas où 1'ar:throponyme ne se soumet à aucun

fonct,ionnement de ilordre de 1a motivation selon ce que nousposeri-ons comme rapport entre 1a condensation et l,expansion2( condensation assurée par 1'arrthroponyme dont 1 , acLeur qu, i1

1 voir notre article "Jeux d'anthroponymes dans 1e cont,eora1. Étude de cas,' , Revue de 1a FacUltsci"qcus Humaln"" de rffiB, éd. al-maarif a1_jadida, Rabat , lgg2.2 voi.r A. J. cRErMÀs er J.

"Condensat,ion" et,'expansion',.COURTES , op. cit. , art

Page 136: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

387

désigne sera mis en scène narrative, et expansion par cettemise en scène de ilacteur porteur de Ianthroponyme). Déjà, 1e

rapport entre nos deux p1ans, celui de 1a mise en discours de

1'arrthroponyme et celui de 1a scène narrative dans laque1lenous privi 1êgions 1e parcours du suj et pôrteur de cetanthropcnyme, n'est pas tout à fait c1air.

Le mi-eux dans ce genre de situat,ions est de se réf érer,nous semble-t-i1, à au moins un exempre qui puisse éclairer leproblème même s'il n'offre pas de réponse. Le c2g nous paraltint,éressant, à cet égard: chaque f ois qu, i1 y a un nouvealr-né ,

un nom 1ui est, accordé conf ormément au. rite d,it / s-sabee,z (ar r

baptême cé1ébré le septième jour). Au bout de deux ou troisans, dit 1e récit,, ce nouveau-né meurr. ce qui sernble

intéressant à retenir est que 1e récit vide par 1e sort du

nouveau-né dénommé, de son sens Ie rite qui consisteculturellement à dénommer, raison pour raquelle une lectureé1émentaire du récit fait valoir 1,annulat.ion du rite pris en

charge gé'éraleme.t par 1e père afin de faire préserver 1a vieau nouveau-né. c'est comme si on mettait 1a mort. du nouveau*né

sllr le compte du rite et sa vie, sur le ccmpte de 1.annurationdu rit,e.or, i1 faut, bien que 1e nouveau-né, dans 1e récit,soit dénommé. Pour cet.te exigence, tout dépend des modalitésrelatives à ce sujet auquel i1 revient 1e droi_t de se dénommer.

si cet acLe est réalisé par 1e père selon 1e rite, i1 en

découlera la mort du nouveau-né. Dès 1ors, i1 sera dlt que ce

droit revlent au nouveau-rré en att,endant qu, i1 assi_mite ranécessité d'avoir un nom. c'est ce que nous retenons d,une

Page 137: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

388

première lecture du récit et c'est, aussi, ce qui trace 1,écartpar rapport au statut du dénommé et de celui qui dénomme.

Le rit.e semble ainsi demeurer dépracé dans le tenps; i1sera vu comme assumé par 1e nouveau-né (i1 s,agi-t d,une fi1ledans notre conLe) et, non par 1es parent,s ou, prus généra1ement.,

par 1e socio-culture1.

Le déplacement, dans 1e remps et re transfert du rôte du

sujet donateur du nom (1e père) à celui du concerné par re nom,

aurorrt forcément un effet: 1a particularité de ce nom de te1lesorte qu'i1 soit spécifique à son porteur (1a filre) dans rascène narrative , ccûstituera 1'une des st,rates essentiellesdans 1e statut du dénommé. De ce fait,, il est inconcevable que

1'on tente d'appréhender 1e fonctionnement de /1-getb b-1ahemm/ (arr 1e coeur sans soucis) de 1a même manière que celuide /eifal ou /He11uma/, qui ne présentent pas grand intérêt à

1es relier à une quelconque forme d'expansion dans 1es récitsoù i-1s apparaissent pour désigner tel ou te1 autre acteur.

Posons donc cette distinction entre anthroponymes motivéset anthroponymes non motivés darrs 1es discours narratifs.

comme critère provisoire qui permettrait de distinguer 1es

uns des autres, nous pensons que la référence au "registre,'linguist,ique dont dépendent les premj-ers, esL suf f isamment mis

eli relief, contrairement aux seconds qui sont vidés de

1'évent.uel1e technique de 1es ramener à des significations en

l arrgue .

Page 138: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

389

En effet, il est plus 1égit,1me de dire gue /1ge1b b1a

hemm/ 1 serait const,ruit selon une assoëiation d, unitésIinguistigues: /l--geïb/ et /1-hemm/ par l,intermédiaire de

/b1a/ pour produire ce qui sera dit anthroponyme particuli_er,unique et spécifique au personnage du conte, que de se référerà ce même registre pour y ramener /ei!a/ ou /Hellumal, Le

premier est donc une création dont 1a mot.ivation tient, compte

des t.raits définitoires du statut du personnage qui re porte;1es seconds seronL dits repris dans le regist,r,e des noms connus

socialement, i1s ne sont pas destinés à leurs porteurs par

1'exigence de traits qui définissent. l-eurs statuts. Le premler,

isolé de son contexte " cantoJogique", ne peut en aucun cas êtreint,égré dans 1e registre des noms reconnus socialemenL et

culturellement. c'est 1à, nous semble-t-i1, que 1e conte eslcréateur de noms par Ie biais de ce qu'il s'empl"oie à

communiquer comme sens dont 1es mécanismes de production sont

à décrire para11èlenent aux règles de moLivation de

1'anthroponyme selon une référentialit,é interne.celte concept.ion n'est peut-être que théorique mais 11

semble qu'e11e s'applique pour r'ét.ude des anthroponymes

mot.ivés. Par cette supposit,ion, nous pouÿons au moins retenirf idée que ces anthroponymes tirent leur fonctionnement par

leur rapport de désignation du personnage dont 1a mise en scène

tient, pour critère celui qui est cléjà investi dans re nom à

condition gue ce dernier solt créé par 1e conte et qu,i1

1 Nors ciLons cetnous servir d'appuiitrtégrerons 1es autres r

u1té rieurement, .

anthroponyme à titre d'exemple qui vapour éclairer notre démarche; rorls/sensli dehbi/, / eila xeDDar/ , /mqi def /

Page 139: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

390

n'appartienne pas au registre social. Le second pas gue nous

pourrions faire dans ce sens est que ce critère de dénommer

n'est pas innocent; i1 n'a pas la seule fonction de servir au

conteur comme stratégie de "mise en histoire" d'un personnage

selon ce qu'i1 1ui aurail dé jà at,t,ribué par f intermédiaire de

1'anthroponyme. T1 est. plutôt intéressant de supposer que 1a

formation de 1'anthroponyme, à partir d'unités de

signification, soit en soi une voie possible qul consiste à

investlr cet anthroponyme de val-eurs autres, que ce11es qui 1e

caractérisent sous 1'ang1e de 1'association des unités qul 1e

prodult; auLrement, pourquo i /ï-gelb I eL /1-hemm/, en tantqu'unités de 1a langue mises en fonctionnement, {üê /b- 1a/

modalise, pour produire 1'anthroponyme, Dê sont fonctionnels

comme tels qLre darrs 1e conte dit. /1-gelb b-la henrm/ ?

Nous pouvons, à présent, _intêgrer les cas de /eLfal eL de

/He1luma/ à 1a lumière des quelques conclusions que nou§

retiendrons de 1a conception dont, nous avons dit, qu'e11e étaitpeut-être t.hêorique

1. 1a créatiorr de 1'anthroponyme par 1e conte est, en

fait,, ur effet du discours narratif. Ce dlscours narratif,

relativement à 1'anthroponyme, fonctionne dans un cadre

circulaire suivant un renvoi réciproque

anthroponymi e discours narratif

condensation e xpans 1 on

Page 140: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

391

2, La règ1e de constructi-on de l'anthroponyme t,ient, compLe

ici du lingulstique comme nécessité r re lien qul unitI'opération de recourir à 1a langue pour sélectionner des

unités de significat,lon et les mettre en fonctionnement pour

dénommer, et l'anthroponyme 1ui-même, n'êst pas arbitraire. or,pour / eiJa/ , /He11uma,/ , 1e recours à 1a langue est perdu de

vue; on ne retiendra gue La fonction de désignationindépendamment des effets de signification de 1' ( ou des )

unité(s) qui 1e constitue(nt,).

ceci permet de relever un premier critère qui consiste à

clistinguer ent,re 1e premier anthroponyme qui est const.ruit, et1es seconds qui sont acquis. ce critère (construit vs acqulsiest ce clont. justement 1e c28 s'emploie à met.t,re en oeuvîe.

chaque fols que 1e nom est acquis, i1 en résu1te la mort du

nouveau-né; euand 11 est construit,, i1 en résu1t.e l"a

préservatiorr de 1a vie du nouveau-né.

De cette dernière remarque, nous pouvons déduire que l-a

mort déperrd de 1'acqulsition de 1'anthroponÿme; et 1a vie, de

ra construction de 1'anthroponyme: 1a mort du personnage dépend

de ce qui lui est extérieur (1es parents et 1e ri.t.e du pointde vue socio-culturer) t,out en ét,ant quelque chose qui est en

1ul si on admet eüê, n'ayant pas de nom qul Ie désigne, iI ne

peut prétendre appartenir à 1a communauté socio-cu1turer1e. sa

vle dépend de 1ul-même quand ëe qul 1ui est extérieur luiaccorde 1a modallté de pouvoir ramener 1a fonction de dénommer

vers 1ui-même.

Àvarrt de faire un pas de p1us, signalons que nous nous

heurtons icl à un problème que nous résumons par cette

Page 141: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

392

question: faudra-t-i1 comprendre par nos suggestions que si un

acteur reÇoit un nom repris au registre socio-cu1turel, c'est-

à-dire non motivé, i1 est voué à la mort ou à un quelconque

état, similaire ?

Nous ne pouvons faire cette projection ni généraliser car

les plans d'analyse ne sont plus les mêrnes: nous essayons de

voir en quoi consiste 1a raison de créer un anthroponyfle. Seul

1e récit particulier donne une réponse à cette question, sinon

Ia syntaxe narrative sous-jacente à 1a question qui vierrt

d'être posée ne tient pas compte de 1a moËivation de manière

directe. Autrement dit, qu'11 soit nommé /eifa/ ot /1*ge1b b-l-a

hemm/, 1e personnage sera mis en scène selon des rapports qui

1e définissent relativement à son parcours êt, aussi, selon

" 1'armature" dans 1aque11e s'actuallse au moins i'un des

aspects qui rejoignent implicitement 1es contenus inversé e-L

posé 1 duns 1e conte . Cet aspect est susceptible d'être

récupéré pour être rattachable à la valeur de 1'anthroponyme

motivé dans 1e discours narratif.

Pour éclairer ce poinl de vue, rappelons qu'i1 y a une

homogér-réisatiorr de signification déjà actualisée par

1'associat.ion des unités constitutives de 1'anthroponyme. Cet,te

association productrice d'un effet de nature thymique dans la

mesure où /l-hemm/ semble pour ainsi dire prendre Pour siège

/l--gelb/, rejoint ladite création par le conre d'un

anthroponyme. Par cette création, 1'acteur mis en scène est

"héroisé" par ce qui Ie relie et le condamne à /I-hemm/, assuré

1 A. J. GREIMAS, Du sens, op. cit. pp. 187-188.

Page 142: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

?q?

du point de vue discursif par l'utilisation métonymique .de

/1-ge1b/ pour le désigner. son état de conjonction avec

"/1-hemm/', susceptible de se Lransformer, puisque nous savons

que 1es contes onl une structure qui rejoint "re renversement

de 1a situatioR", permet d'anticiper sur 1'histoire du récit,avant même d'être racontée.

 1a suit,e de cette "schénatisation" qénéra1e du cont,e de

/L'ge1b b-1a hemm/, gui a essayé d'expriquer 1'armature par des

indications explicites dans 1'anthroponyme, i1 revient à 1a

lecture de 1'errsemble du récit de voir dans quel1e mesrjre

1'anticipatlon se vérif ie. cet,t,e tâche est ce qui explique

1'exparrsion dans le récit, et la conderrsat j-on dans

1'anthroponyme, eui présupposent une instance organisatrice de

1a relation qu'el1es elitretierrnent.

En somme, 1a mise en discours s'appuie sur des traitssupposés pertinerrts linguistiquement dans 1'anthroponyme par

1'association de ses unit,és de signif icat.ion; 1a st,ructure

narrative sert, sans t,enir eompte de ces traits , à fairesignifi-er 1'anthroponyme relativement aux contenus de

1'armature. ces contenus re1èvent alors d'un niveau portanL sur

ce à quoi 1'anthroponyme motivé, en 1'occurrence /r-gelb b-rahemm/, sert dans 1a mise en discours de 1'histoire du conte.

Ces considération révè1ent que 1'anthroponyme est, au

f otrd, 1e support de deux opérations: d'un côté , i1 est mot,ivé

par ce à quoi i1 sert comme é1ément de condensat ion; de

1'autre, sâ motivation sert de stratégie dont 1es récitsbénéficient pour être mis en discours. ces récits sont générés

par 1e processus anticipant, et programmat,eur des séquences où

Page 143: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

394

s'inscrit le dénommê comme "centre d'intérêt" du déroulement

narrat,i f .

D'un autre point de vue, 1'anthroponyme motivé sera dit

produit, ou généré par 1es séguences narratives eui, selon une

référerrtialité interner renvoient au "champ" définitoire du

sujet. En définitive, ces séquences sonL tel1es parce que leur

thématisation est déjà prévue par les associations sigrriflanïes

entre les unités qui constituent 1'anthroponyme.

Nous pensons avoir,suffisamment insisté sur 1e caractère

de motivaLion de 1'anthroponyme dlt /L-gelb b-1a hemm/. Ceci

dit,, 1e plus important, à notrê sens, est de situer ces

consldérations à un niveau qui nous paraLt essentieL pour

1'analyse. I1 s'agit. du niveau que nous concevons comme ce que

la mise en discours convoque pour se réaliser,

En ef f et, les apports de 1'érronciation nous seraient ri'une

grande utilité pour mieux éclairer 1a manière dont -se1on

1'expression d'8. Benveniste- 1a mise en fonctionnement de 1a

langue, donl on sélectionne des unités pour produire un

anthroponyme motivé, se réa1ise dans 1e conte.

Si, à première vue, l'anthroponyme semble en généra1

choisi arbltrairement ( cf. / eifa/ , /Leila/ , /Hel1uma/ ) par

celui qui dénomme et met en discours Ie dénommé, quand i1

g'avère 1'une des composantes constitutives des ressorts

internes du discours, i1 cesse d'être arbitraire comme nous

1'avons déjà dlt. Selon cette idée, l'anthroponyme motivé

indique qu'i1 est, à un n j-veau présupposé , un out,il

"modulateur" ou "modeleur" du discours narratif qui lui sert

de t.émoin pour êLre édifié à sa juste valeur,

Page 144: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

395

11 est aussi intéressant de remarquer qu'à f instar de ce

" jeu" , un certain arrcrage du récit est opéré par

1'anthropon:/me. Cet anthroponyme ne sert plus seulement à

dérrommer mais surtout à permett,re 1a facilité de mémorisation

du conte. Ceci explique pourquoi nous avons osé dire que 1a

st,ructure du conte, en tant qu'organisation généra1e, peut être

clite dans 1'anthroponyme mot.ivé. 0uand i1 ne s'agit que de

1'étude de 1'organisation qénérale du conte en indiquant

" 1'ordonnance syntaxique" ( 1'expression est de J. Courtès ) ,

l'anthroponyme motivé s'avère souvent intéressant pour rendre

compte de la même approche. L'exemple de /1-gelb b-la hemm/

peut largement en témoigner dans 1a mesure où 1a catégorie

thymique " joUIant] un rô7e fondanentaJ dans La transfornation

des nicro-univers sémantiques en axioTogies" (c'est nous qui,l

soulignons )' y est déjà inscrite.

En plus, chose qui rrous senble originale dans 1e

fonctionnement de 1'anthroponyme , L'organisation selon les

états initial et final correspondant au renversement de 1a

situation, devient 1'affaire d'une sémantique qui considère 1es

unités linguistiques et leur associat,idn dans ledit /1-geLb

b-1a hemm/. Ce travail doit, bien entendu, être en mesure de

privilégler son objet en fonction de 1'obiectif. Pour notre

anthroponyme (/1-ge1b b-Ia hemn/), i1 nous paral.t évident que

1'unité à privilégler sera /!-hemm/ dont I'étude intégrera 1es

résultats à l'ensemble de ce qui constitue I'oblet

anthroponyme.

1 A. J. cRErMAs et, J.(catégorie)".

COURTES, op. cit. art. "Thymique

Page 145: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

396

Pour cela, i1 suffit' d'intérioriser 1a structure fornelleen tant gu'organisation générale du conte, pour savoir dans

quel sens ( visée ) les significat,ions des unités constituant

1'authroponyae vont être orientées. Dans 1e cas où f irrtéressé

ne dispose d'aucun renseiqnement sur cette structure formelle

du cont,e, i1 lul suffira de recourir à une analyse de /1-hemm/

dans 1e sens que nous offre ce que 1es sémioticiens appellent" structure éJénentaire de la signification" z

/1-hemm/

( soucis - dysphorie )

/r- na/

( paix = eElîËE )

Cette voie d'ét,ude de

s'appuie, comme nous venons de

1-hna/

( palx = euphorie )

(sîuEîs

- hemm /

= aÿsElôrie )

/l

pour prévoir la mise en oeuvre de ces é1éments dans Le dlscours

narratif et, pêr corrséquent, retrouver 1'organisation générale

du récit,. Les résultats de cette tâche peuvent proposer une

autre ouverture puisqu'i1s sont susceptibles d'être rêcupérés

pour mener r-1ne analyse clu conte sous 1'angle de 1'énonciation

rtarrative.

I

1e

'organisation générale, eui

voir, sur cies dét,ai1s propres

Page 146: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

397

au motif de 1'anthroponyrnel, rejoint à plusieurs égards la1eçon du père fondat"u12 des grandes ouvert.ures qui ont permis

la mise à jour de méthodes d'analyse du conte en général. ces

ouvertures permeLtetlt actuellement de faire un raccourci au

point. où le conte, êD tani que structure morphologique, nous

semble avolr bénéflcié d'étucles suffisamment é1aborées pour ne

pas y revenir. Par conlre, J-es problèmes qul se posenl à propos

du sujet du discours narratif dit /1-mHaiya/, ne nous semblent,

pas suffisamment posés, pour approcher 1e champ qui spécifie ce

sujet par 1a nature même de ce prodult narratif en tant quê

slructure, De deux choses 1'une: soit nous sommes en traind'enfoncer une porte déjà ouverte; soit 1a porte est à peine

entrouverte et i1 nous faut tout de même faire l,effort de

1'ouvrir. Nous voulons dire que les approches qui t.iennentcompte des conversions dans 1es niveaux de génération des

discours ont prévu une place importânte à cette composante quise situe non pas à 1'un des niveaux de la génération mais à

tous les niveaux pour leur servir de " fiitre,, seron

1'expression de Greimas, à savoir L, énonciation.

1 Nous eonsidérons 1'anthroponyne comme motif dans 1amesure où, étant créé et mot,ivé, son fonctionnement est sous-teudu par une strLlct,ure syntactico- sémarrt ique dans laconfiguration où i1 est récurrent.2 11 ,a de soi que nous pensons à v. pRopp, l.{orpholoqi.e duconte, seuil, co11. Point.s, paris, L97a , dont i'en,se.ignementsLlr 1'organisatlon du conte merveilleux du point de vue formela été repris par A. J. Greimas pour donner des ouvertures quis'inscri-vent dans 1e cadre de 1a sémiot,ique di_te ob jectaie,

dont les acquis ont reçu d'autres ouvertures par la sémiotiquedite subject,ale développée par J.-c. coquet (voir dans l,ordreses publications , L976, L992, lgï4 et 19g5).

Page 147: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

398

ce plan d'analyse n'a pas bénéflcié, à notre connaissance,

d'efforts comparables à ceux qui ont été investis dans lesrecherches sur 1es contes au niveau de 1a narratlvit,é. pour

cette " 1acune " , i1 rrous semble qu' i1 f audralt. réf 1échir sur l_es

conditions d'utilisation de 1a langue, conformémeni à

1'enseigrrement d'E. Benveniste, en commençant, par saisir toutce qui est linguistique et ut,ilisé de manière récurrente dans

les environnemerrts syrrt,actlco-sémantiques des dispositifs riu

conte. Notre t,entati.ve d'étudier 1e rô1e du rexique dans 1es

corrfigurations discursives à part.ir de quelques exemples, sans

atrer jusqu'à affirmer des résultats parfaitemenL fiables -i1rre s'agi-t que de premières ét.udes- va dans ce sens.

Pour éviter 1a reprise cle 1'héritage sur 1'énonciatlon etson appareil formel que E. Benverriste offre au chercheur,

revenons à notre hypothèse pour 1'éclairer par quelques aspects

rle cet héritage.

L'utilisatiorr d'urr anthroponyme mot.ivé est, d, urr point de

vue linguistique , soumis à des conditions d'utilisation. par

cette 1dée et pour que notre étude r:'aii pas I'air d'êtreorientée vers 1a motivation, nous serons amené à élargir notre

débat ,err conmençant par ne plus considérer 1es seuls

anthroponymes motivés. Nous aurons dans cette perspective une

classification selon 1es critères suivants:

1. 1a désiEnation d'acteurs par des anthroponymes qui ne

peuvent être examinés ni selon un processus de motivation niselon un registre social; Ie seur ef f et à not.er sembl_e indiquerque ces arrthroponymes ne provienrrent nl d'une sélection

Page 148: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

399

d'unlt.és signifiantes dans ta langue ni d'une référence comme

fonction de désignat,ion ailleurs que dans 1'univers du conte.

2. L'absence de motivat,ion indigue gue certains de nos

anthroponymes sont repris êu registre social.3. La motivation comme processus du fonct,ionnement de

1'anthroporryme (quand i1 est net,tement motivé ) exige,comparativement à 1 et à z, que luj. soii réservée une mét,hode

de traitement par 1a descr3.ption des discours narratifsparticul ie::s

Pour chacune de ces classes, nous dorrnerons des exemples

t,irés du corpus; ensuite / à 1'rint.érieur de chaque classe, nous

essaierons de voir s'i1 n'y a pas d'autres classemenls à

p révoir par f indécidabillté d'intégrer c e rtain s

anthroponymesl dans 1'urie ou I,autret,ableau qui suit résume ces points.

1r A côté de cesponctuation: '? {

de ces classes. Le

ant,hroponymes, nous metürons le signe de

Page 149: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

400

!!tr-)

ô-.

- \\+'ê'q >;>>l.r-!llH!È!!

LU)r!Jrtr\\\\\

al'91.itploir!

-tHIolàlrl.(J

I

>l.Èlplol-tLI

U]

-oL0

(,)

dlê,

Licd.H:(,,C

U').o.il

o

o

UliP

d

a)

I

l-r !qr!l=

Eo

:\\aJl\ \ -- ococ#l\_=rtr tr Ç I T*:_1 > e,- I

-!ô roL_-i:<;L,utcdicOalÈ<XIr-cr -.-- L' L,-'È*#\ oi rd 9 (J+

Ë *-\À]Hu1 l

.ÈE '-. I I I êr ç wi-u1 v

\19\ nnY \\ \:)l

^-.:\îni iu ldv-!^-X 'O -r r: 2-,

, oJl^.rr,, .Ê + tr CIJ--*r^

! o cJ arÊ-.]:c E 6reur0J I I \qJrl j j\\\\§.

a'c.)

Po

Ào!

p

§. c!'

I

I

It;i!l!t-

ldloI c.)

ll.lP

t;

rd

\xc6+ cd

.i 0J d\lJ'!

-

.rd

\'i.d'-ry1 I.-1)

--!) r'ui'-.I\c''.il !TJ u'- L aJ.'rG ar - U\\ *)Ë:ri-uau -- cl= \). 1n r rtk-> ?.r O'.- Y

V)- à.J rI d) 'e .^ Jr".pv/ÈC,ô 'sJp Cô à\\\\\

*iIo3c/ r:

!(.)

Cbr9aç,'(.) À

Itr-

oJO.

!U

3rg.iÊU)E.o6'd (H

!r(J-Co3P.

Page 150: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

401

Les anthroponymes qui semblent, ne pas se soumeLtre au

princlpe de la motlvation forment une classe assez difficileà appréhender. Dans c15 el czg, dans lesquels nous repérons une

même configuration avec cett,e différence gue dans un cas lamère est appelée / l-gelb b-la hemm/ êL, dans 1, autre ,

/1-meHgura f-gae ]-meTmura/ (ar: 1a sous*estimée au fond du

silo), ies noms attribués aux enfants (sur, Dur et Nur (ou Hur

selon les versions)), bien que nous ayons essayé d,expriquer1a nature de leur motivation intra-textue11e, ne se rattachentà aucun effet producteur de i,raits par des régularltésrelevables dans des anthroponymes t,els que ceux de ra mère.

Nous savons que sur, Dur et Nur désignent en même tenps

1es enfants nés dans 1e silo et 1es espaces où i1s ont. ét.é

corlçus. seure une réf érerrce int,ra-textuelle reiie ces

anthroponymes aux Loponymes. ces anthroponymes sont alorsmotivés par 1es naissances de reurs porteurs après avoir été

conçus, selon 1e conte, dans des espaces portant des noms dont

1es urrit,és particulières ne sont apparemment pas porteuses de

significations pour s'assurer une motivation comparable à ce11e

de /1-mHgura... / et /1-gelb. .. /1.

L'opération de motivation pour ces noms désignant et lesenfants et les espaces, s'appuient sur 1e principe de laréférerrt,ialité spatiale sans exiger que 1es t,oponymes soientmotivés à 1a manière des ant,hroponyme s /t-meHgura. . . / et/l-9e7b.,. /, si nous pouvions forger des t,ermes pour exprimer

1 tout en ayant untlans une certaine mesure(à I'exception tout,ef oisêtre dits motivés.

usage en langue qui les rapprocherait,des espaces dont, iI est question ici

de Nur et Hur), /S:ur/ et /Dur/ peuvent

Page 151: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

402

de manière assez exacte notre pensée, nous dirions gue /sur/,pour ne prendre que cet exemple comme espace, comporte un

"anthroposème", sème investi dans 1'anthroponyme qui sert à

désigrler 1e premler enfant dals nûtre conte; et eue /sur/ comme

anthroponyme comporte un "toposème" pour rappeLer -donc motiver

el: quelque sorte- 1a référent,ialité à 1a corrception des enfarrts

et à leur reconnaj-ssance par 1e père-roi. Par ces points, 1e

cont,e est à peu-près résumé, et toutes ses versions comporterrt

ces mêmes ilonnées pour construire 1'univers sémantique qr-li est

1e sien. Ce qui assure 1a corrst.ruçtiorr d.e cet univers est, à

un niveau discursif , 1a jonction cies toponymes aux

anthroponymes par des dénominations communes pour assurer l-a

référence rêciproque des enfants aux espaces. L'effet de cetrejonction, à un niveau " thématico-narrat,if" (nous empruntons 1e

terme à J. Courtès ) , est justement 1a reconnaissance des

etifarrts comme 1égit,imes et de leur mère cornme épouse par 1e

roi.

De marrière explicite, comme on peut s'en rerrdre compte,

nous sommes en train cie c1évciler les axes autour desquels les

parcours de conception, de naissance et de recorrnaissance des

enfants, gui impliquent, 1'union définitive du roi et de

/1-meHgura.../, sonL organlsés narrativemerrt. Ceci permet de

résoudre 1e problème de différence quant aux aspects du

processus de motivatiorr de /Sut / , /Dur / et /Hur/ , Êt

/I-meHgura... / eL /L-gelb... /.

I1 suffit de rappeler que 1e conte exploit,e /1-meHgura.,./

eL /L-9e1b.../ comme anthroponymes motivés et qui désignent -ne

1'oublions pas- Ia mère de /Sur/, /Dur/ et /Hut/, pour pouvoir

Page 152: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

403

intégrer dans 1e schéma d'ensemble de nolre étude le processus

complet de mise en discours de rros figures actorielles.

Ce nouveau pas nous apprend gue 1'opération de cette mise

en discours est à peu près assurée par une certaine récursivitédes anthroponymes motivés comme mot,ifs dans 1e discours

rrarratif . Telie relation de motivation entre 1'anthroponyme et

le discours est sous-iendr:e par des significations en langue

dans cet anthroponyme pollr fonctionner dans ce discours comme

ce qui assure une autre fonction dont le caractère de

motivation ne peut être perçu comme te1 qr-re parce qu'auparavant

i1 y a eu ce principe de motivation. Expliquons-nous. Nous

avorls admis que nous ne pouvior:s parler de motivalion dans la

correspondance entre 1es toponymes et Les anthrr:ponymes

qu'après avoir ret,enu qu'iJ. y avait, 1à une réf érential"it.é

intra-textuelle; toutefois, cette motivat,ion n'est pas soumise

à cette seule référentialité car 1e principe de motivation 1ui-

même est si f aci-le à reconnal.tre dans / l-meHgura. . / ,

/i-9e1b.../ que si on sait que ces derniers désignent, 1a mère,

on en conclura que ceux qui désignent les enfants seraient

aussi motivés. Dans ce cadre , rappelorrs que , d'un point de vlle

de mise en discours, 1e lien de parenté entre 1es aeteurs pour

lesquels les noms des espaces sont destinés, et l'acteur appeié

/I-neHgura.../ ou /L-gelb,,,/, est révélateur de cette

récursivité dont, nous avons parlé et gue nous pouvons formuler

au prix d'une construction que 1'usage rejetterait facilement:

1'anthroponyme -étant mot.ivé- de la mère des enfants qui

reçoivent les mêmes noms que les espaces où i1s ont, ét.é conçus,

Page 153: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

404

permet de supposer possible 1a motivat,ion des anthroponymes des

enfants correspondant aux t,oponymesl.

I1 est évident que ce quê nous venorrs de dire n'estvalable que pour les anthroponymes que nous avons pris comme

exemples dans 1a configurat,ion repérée dans CL5 et C28. Encore

faut-i1 que nous y revenions pour souligner que 1a récursivitéte1le que nous verlons d'en dlre quelques mots n'est pas

tcujours évident.e dans l-e sens où e1le explique les passages

d'uile mot,ivat,ion " exp,lic j-te " à une autre d'un degré moins

"exp1icite". Pour éviter tout engagement susceptible d' être

retenu comme généralisant, nous rrous contenLerons d'admettre

que 1es anthroponymes qui ne présent,ent pas de phénomène de

motivation à base de signlfications en lanque, sont tout de

même porteurs d'investissements en termes de composantes de

rrarration exploitées par 1e récitant du conte. ceci monLre,

t.out compte fait,, euê les contes exploitent, souvent une trace

mise en condensation pour permettre leur narrat,ion. Ceci est

révé1at,eur d'un eertain type d'énonciation narrative qui pose

I Not,re ob ject,if par 1'utilisation de 1a récursivlt.é n'estpas de montrer qu'e11e est à 1'origine de f inaccept,abilité de1a construction; ceci n'a d'ailleurs aucun sens car notreapproche esL Lransphrast,ique. Nous 1'utilisons pour t,enter demontrer que 1es motivations de /sor/, /Nur/ eL /Dur/ seraientconstruites ét,ant donné que /1-meHgura... / et / 1-ge1b.../ sontmotivés: cette supposition nous est dictêe par 1e falt que 1esdêsignés ent,retiennent, une relation de parenté dont. 1'effet, estde rendre mot,ivés 1es noms qui les désignent. cetle lecture sesit.ue sur deux plans d'isotopie: l'un, discursif, spéclfie Iamotivat,ion de /l-meHgura... / eL de /L-gel-b,,./i 1'autre,narratif, spéclf1e 1a relat,ion de parenté. A un niveauh1érarchique, apparalt 1a relation entre 1a motlvation du pointde vue discursif et 1a parenté du point de vue narratif; ceniveau est ce dont rend compte notre ut,ilisation de larécurslvlté pour la rattacher à celui de 1'énoncj_ation (cf.notre deuxième chapitre ci-dessous).

Page 154: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

405

comme point de départ et d'ancrage des axes condensés pour être

mis err expansion dans 1'architecture du conte.

La réalisation de cet acte s'appuie sur un processus qui

relie 1es récits particuliers à des traces qui sont en fait des

motifs Qui, dans un temps, orienLent 1a narrat,ion êt, dans un

autre, pâr cette narration, 1éqitiment leur fonct.ion discursive

selon 1e rô1e que 1e produit Ieur at,tribue.

On Sait qU'une variarrte oU une verSion d'Une variante d'un

conte sont 1e résultat d'une récitation selon deux Sens: "ré-

citatlon" (acte de citer une autre fois) et "rêcit-at,ion" (acte

de mise en " récit" selon 1e SenS que E. Benveniste at,'L,rlbue à

ce terme) d'événements relativement actualisés dans des traces

qui assurent, 1a narration. Ces deux sens de récitation §ont

inséparables, et toute récitatiou retient Ces deux sen§ pour

s'assurer une technique cle mémorisat,ion. Les anthroponymes

motivés ne servent-i1s pa5 1a mise en discours des acteurs

er:'ils désignent dans des parcours déterminés par la

mo t ivat i orr ?

Nolre réponse à cette question nous permet de mettre

encore une fois 1'accent sur I'idée que "1e gardien" qui as§ure

au conte sa pérerrnité n'est pas tout à fail ce facieur de

Lransmission-récitaLion de personne à personne à 1a manière

d'un objet qui Se transmet. I1 est vrai que cette transmissicn-

récitation joue son rô1e mais e1le ne c,onstitue pas tout à fait

1e facteur primordial pour mémoriser 1e conte. Ce produit ne

se donne pas comme objet à apprendre par coeur; bien au

contraire, Sa pérennité est due à ses propres capacitéS de

rendre possible Sa transniSsion-récit,ation par des Lechniques

Page 155: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

405

comne ceIles de 1a motivation des anthroponymes, qui accordent

au récit,ant-conteur des moyens mnémotechniques. A Ia manière

d'une prise de notes par 1'auditeur d'un discours, 1e conte

of f re à son audit.eur " les rrotes" nécessaires pour 1e reproduire

s'il se propose de }e récit,er. 11 suffil pour ce faire que cet

auditeur intériorise ies principes morphologiques du contel,

sinon son effort personrrel dans 1a rêcitation refèvera plus

d'un certain style d'agencements, d'enchâssements et

d'organisat,ion de son produit, {ua de créat,ion de ce dont 1e

conte par1e.

1. Ànthroponvnes non moti-vés

Les quelques remarques que nous venons de faire sur 1es

ant,hroponymes pour lesquels i1 a été relativement difficile

d'admettre une motivat,ion comparable à ce11e de /1-meHgura.../

et de /1-geJ,b,.,/, nous ont amené, non sans quelques détours,

à y reconnaître des voles de mise en discours de contenus qul

s'y rapportent pour être dit.s motivés.

1 D.ns 1e but de vérifier ce point de vue, nous avonsasslsté à un atelier de travail sur Ie conte, adressé à ungroupe d'enfants âgés de dix à treize ans (Éco1e du Port deGennevilliers, 1986 ) ; au bout de quelques séances que nousavons assurées, les enfants sont arrivés non seulement àreproduire 1'essentiel des contes que nous avions vus ensemblesmais à proposer d'autres "histoires" qui ont témoigné d'uneintériorisation int,éressante du schéma formel par ces enfants.

Page 156: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

401

Ce point de vue devient, sans aucune utilité, en

particuller dans Ie cas où l'anthroponyme ne se soumet à aucun

principe de motivation; i1 se présente comme ne correspondant

à aucun reglstre d'usage €t, partat:t, 11 comporte une forme

"vide" quant à son utilisation dans les séquences où i1

apparalt,. Cet arrthroponyme , nous 1'avons classé dans une

rubrique à part (cf. tableau ci*dessUS): i1 s'aqi"t précisément

de /rrima/ (ou /sinya/ selorr 1es versions ) et de /1unia/ (ou

/lil-a/ \ .

Çuelques terrtatives de ramener ces anthroponymes à un

fonds qui puisse 1es faire signifier par f intermédiaire de

1'usage nous été soumises: /1un1a/ serait lG'an)a/ ou /Genia/

(ber: aGenja = louche, cuil1ère); ce terme semble aussi, selon

L1n inf ormateur , dé signer 1es rogations . Enf in , "uotlt compce

fait, ceci ne nous avance en rien puisque 1a tentalive de

rapprocher ce terme d'un usage pour essayer de voir dans que11e

mesure cet usage est explolté par 1e conte, n'est guère à

1'a1:ri du manque de critères suffisammenl soLides pour

approcher 1a motivation proprement dite.

Ces problèmes se posenL encore plus dans /nima / ot / sinya/

car nous ne disposons d'aucun moyen pour y voir aUtre ChOSe gue

sa fonction de dénommer 1'héroine de notre conte C10. Les

tentatives vaines pour en savoir plus auprès des informaLeurs

reçoivent une réponse qui eSt souvent un résumé du C10 quand

i1 s'aqit d'informaLeurs qui connai§sent 1e conte; 1es autres

avouerrt leur ignorance.

Comparativement à cet anthroponyme, celui de /1unja/ esL

relativement moins mystéri-eux car i1 a un usage assez connu

Page 157: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

408

rlans 1e langage couranL par cies formulation"l qui se disent à

propos d'une fille ou d'une femme qui prend de grands airs.

Ces formulations sont vraisemblablemenL un témoignage sur

1a popularité du conte de /lunja/; ceci permet de dire que par

e1le, Ie procédé mnémotechnique assure partiellemenl 1a mise

err discours de 1'histoire selon au moins 1e t,rait de beauté

particulier à /lunja/ et selon ta désignation métonymique par

"ehevelure"2 de cette héroirre dans Ie conte, Sur 1a base de

ces indications, il est possible de reproduire 1'histoire quand

on 1'a déjà entendue. Cette posslbilité ne s'appuie évidemment

pas sur les seules indications dit,es dans /1unja/ eui, de ce

point de vue, s'avère motivé à 1a manière d'une flgure

symbolique, mais aussi sur d'autres facteurs dont Ia fonction

est comparable à cel1e de 1'anthroponyme (cf. chapitre 2\,

2. tes nons propres utili,sés çomme anthroponvrEes

Paral 1 è lement,

/sinya/, une autre

à ces anthroponymes de /1unja/, /nima/ et

classe apparaÎt avec des caractéristiques

l Reproduisons une sit,uat,ion dont nous témoignons parnotre présence! une jeune fi11e passe à côté d'un groupe dejeunes; 1'.un de ces jeunes dit au moment où 1a f ille passe !

/balaktr lunja ra-ha fayta/ (ar: cédez La placelLunja passe).Cette expression a retenu notre at,tent,ion et i1 nous sembleavoir compris que Ia jeune fille prenait de grands airs.

2 L'"*pression courante /swalef Iunja/ (ar: Iongs cheveuxrle lun j a ) est utilisé dans le sens du trait, de 1a beauté .

Page 158: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

409

qui leur sont proches dans Ia seule mesure où i1 n'est pas

possible d'y relever un processus de mot,ivation propre à 1a

condensation / expansion. Dans Ie C13 par exemple, /s-siyyed

eali / eL / eelqma/ proposenL urre référence extra-textuelle à

partir de données qui les situent dans 1'histoire du début de

1'Is1am. l^Ious écartons de rlotre approche cette considération

pour ne pas nous éLoigner de notre objectif" A ce choj-x, nous

accordorrs 1e fait que 1a référence extra-textueIIe, dans 1a

mesure oùr l.'image que 1es récits d'aspect religieux attribuenlà nos acteurs, rr'est pas forcément saisissable comme ce dorrt

1e récepteur-auditeur du conte tiendrait, compte. D'ai1leurs,

1e lecteur non averti sur cette référence extra-textuelLe dans

nos récit,s ne peut pas être absolument attentif au non-dit qul

consiste à préciser que i s-siyyed eali/ et /eelqma/ entrent en

scène narrative essentiellement pour que Le récit netie en

valeur une isotopie reliqieuse.

ComparativemenL à ces anthroponymes, nous voyons gue ceux

que 1a motivation caractérise selorr une référence intra-

textuelle, sont percept.ibles comme t.e1s indépendamment de toutsavoir cogni.tif ext,erne aux récits et suscept,lble de nourrir

la compréhension cies univers sémantlques. Dans ce sens,

/ s-siyyed eali / et / eelqma/ f orictiorrnent comme / 1un j a/ ê*,.,

/nima/. Sur un aulre p1an, i1 faudra, bien entendu, distinguer

entre 1es deux sous-classes car, contrairement à 1a seconde

sous-classe, 1a première comporte tout de même /s-siyyed/ comme

trait pour désigner 1'attribut de "saint" accordé à /ea1-i/ et

à /eelqma/, eui est largement attest,é dans 1e discours

religieux. C'est dire que la trace de cet aspect est inscrlte

Page 159: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

41_0

clans, I'anthroponyme, mais dans quel sens va-t-e11e être

exploitée ? Aucune indication n'est véritablement offerte à ce

propos. Or, la motivation, comme nous 1'avons vu dans

/1-meHgura.,. / eL /1-geLb.../, est un processus dans Le sens

cù ces anthroponymes proposent des indications anLicipantes sur

1es récits qui 1es utj-lisent et sur 1es univers sémantiques.

De 1'extra-textuel que nous venons d'attribuer à /s-siyyed

eal1 / eL à / eelqma/ darrs C13, relativement à une ère

hist,orique, nous reLenons f idée que. nos per§onnages fornenl

une espèce de "pro jecteur-régqlqteu1" de 1a. c_onstruction d'une

vision religieuse selon une visée parLiculièrement ancrânte.

Cet arrcrage historique du récit par ceS anthroponymes esi ce

qui distingue C13 du C1 et C10 où l'ancrage est absent.

Etr outre, si /mHend/ datis /mHend }-hemm/ (ber: mHend des

soucis, mHend 1e soucieux, 1e malheureux) ou /eifa/ dans /eLfa

1-fahma/ { ar; ei/a 1a savante), peuverlt recevoir des

substiÈutions comme cela nous a ét^é confirmé du moins pour 1e

cas de /eiîa 1-fahma/1, i1 sera aisé d'affirmer que 1e plus

importanL dans un anthroponyme n'est pas 1e nom propre, c'est

plutôt, ce qui assure 1a motivatiorr darrs 1'approche en

privilégiant, les unités qui s'y rapportent ( cf. ci-dessus,

/1-hemm/ dans /1-ge1 b-1a hemm/).

Dans cet ordre d'idées , i1 apparaî.t clair que

I'inposslbilité de substituer à /s-slyyed eali/ et à /eelqma/

1 No= informatrices1'autre des noms proPres:nous avons recueilli uneut,11isé /bu-lhemm/ (1itt.

ut ilisent indifféremment I'un oueifa, Helluma; pour /mHend 1-lhemm/,seule version où I'informatrice a1e père des soucis).

Page 160: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

4L7

d'autres noms est due à Ia réalité situant ces personnages dans

1'histoire.

Cet ancrage nous évite I'effort d'expliquer pourquoi ces

anthroponymes ne sont pas motivés même si, du point de vue de

1'usage des urrités qui les constituerrt,, ils correspondent à des

significations.

Par cette idée, i1 nous est posslbl,e d'expliquer 1e faitque les contes n'utilisent 1es noms propres que s'i1s 1es

associent à autre chose comme par exemple, une quaLiflcation

( cf. / €,ifa 1-fahma/ ) pour leur attribuer un caract.ère de

mot.ivation. Dans 1es cas où 11s ne leur associerrt aucune

attribution, i1s ne peuvent en aucun cas êt,re pris au registre

social r ce rre sont pas des rloms propres ( cf . / 1un j a/ , /nimai

et /si-nya/) i ce sont des noms créés. Par cette création, nous

ret,rouvons au moins un aspect de motivation (cf . ci-dessus, sr.

40S) particulière et propre à 1'univers de C1 et de C10.

Nous voyons bier: que rros anthroponymes dans C 13 ne sont

pas une création par /1-mHaiya/ qui Ies utilise. Du iait même

que ceite /mHa)ya/ n'esl pas "auto-régulatrice" des séquerrces

qul se rapportent à ces personnages puisqu'e11e est, elle-même,

un produit construit sur des récits de caractère religieux, ces

anthroponymes sont utilisés à f image de ce qul prédomlne dan-s

1e récit. pour produire les effets voulus par 1e sujet

producteur suivant ce que cela présuppose d'un point de vue

religieux.

Dans cette sous-classe des noms propres, 11 est à prése::

possible d'intégrer d'autres anthroponymes tels que /nu}-air

Page 161: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

412

eebdelqader j-jf1a1i/1, /si muHemmed l-lergL/, /t-Lai ben

eemmur/, guê nous considérons comme non mot,ivés au même ti-tregue les premiers.

Ce critère nous parait intéressanL dans 1a mesure où, dans

un cas, 1es anthroponymes ne sont pas une crêation par les

récits; et dans 1'autre, ils sorrt urle création totale (cf .

/1-meHgura.../, /L-ge1b.../) ou partielle (cf. /mHend 1-lhemm/,

/ eifa 1-fahma/ ) par les récit,s selon un processus de

motivation. A ce titre, nous estimons que 1es premiers sont

ut,ilisés dans des récits qui cessent d'être contes en

comparaison avec les seconds qui sont utilisés dans 1es récit,sque nous considérerons comme contes.

Par ce critère, i1 y aurait lieu de proposer une Lypologi.e

des récits selon qu'on p"Tt admettre exclusivement l-e tlt.re rle

conte aux récits créat,eurs d'ant,hroponymes ; quant aux autres ,

on peut leur admett,re d'autres titres (épopée, 1égende ? ,.. )

que nous ne pouvons formuler faute d'analyses concrèLes d'un

corpus plus large que le nôtre. En tous Ies cas, avec ce

critère, i1 nous semble que 1'utilisation du terme "conte" pour

désigner Lln récit pourrait être revue pour ne pas en user

innocemment sans trop savoir ce qui caractérise

fondamentalement 1es récits qui s'y rapportent.

Pour 1e corpus que nous présent,ons dans cette ét,ude, êD

attendant que des analyses u1t,érieures soLls d'autres angles que

celui de 1'anthroponymie, y apport,ent des éclaircissements,

nous pourrions provisoirement émettre f idée que les processus

I' Pour quelques renseignement,s sur ceSTODDÀRT, Le soufisme, éd. T.C., Lausanne

personnage, voir, L9-79, p. 47.

Page 162: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

413

de mise en discours cl'une histoire , selon des techniques

relevables ou non dans 1e discours narratif lui-même (cas des

rnotivations, des expansions, des condensations et des

élast.icités du discours en généra1) , serait un crit,ère

distinet,if suivant 1es cas où 1es facteurs de mémorisation sont

internes ou externes à ces récits.

Si ces facteurs sont externes au récit1, f intérêt des

stratégies de construct,ion du discours narratif que nous

trailerions sous 1'angle de 1'énonc j.at.ion narrative, s'avèrera

nul si rrous faisons valoir Ie principe qu'un cont€ sera teI

s'i1 se donne 1es moyens d'aut,f -construct,ion et de mise en

discours par f irrLermédiaire d'un récitant qui 1es met en

fonctionnement.

Le conte est, selon ce poirrt. de vue, 1e résu1t.at-produit,

de cléterminations qui lul sont intrinsèques. ContrairemenL à

ces déterminations, ce11es que nous avorrs relerrées notamment

dans //uyue f-fems/ , /ssi muHemmed !-fergl/, /t-taj ben

6emmur/, /s-siyyed eali/, / eeLqina/, rre sont guère int.rinsèques

aux réci-ts qui. l-es ut,ilisent, Certains (cf . I f uyue ,r-lems/ ,

/ssi muHemmed /-fergi/, /t-taj ben eemmur/) sont repris au

registre soclal sans effet particulièrement frappant; d'autres,

tout en étant repris à ce même reglstre, sont porteurs d'une

1 Ceci veut dire que 1e récit est construit sur d'autresrécits qui présupposenL que le sujet énonciateur parle d'un"quelque part", facile à déterminer historiquement etspatialement, pour réaliser une implication dans 1e sens où ceréclt rr'est intelliglble que dans ce cadre spatlo-temporelconstruct,eur de représentations données dans 1'universsémant,ique.

Page 163: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

414

référence particulière (cf. /s-siyyed eaLi. / , /mulay eebdelqader

j-jilali/, /eelqma/).

Les distinctions sommaires que nous venons d'établir en

proposant un critère qui fait reconnaitre un conte comme

urtivers particr:1ier, repose sur 1a remârque Çuê, dans une

première classe de récits, les anthroponymes sont soumis à des

règ1es d'att,ribution dont, 1es ef f ets sorrt repérabl-es darrs 1a

mise en discours des hist,oires qul concernenL 1es porteurs de

ces anthroporrymes i alors que dans la seconde classe, 1es

anthroponymes sont peut-être révélateurs des histoires où i1s

apparaissent, si on se réfère à 1'extra-textue1, mais on rre

peut y retenir des rè91es sous-jacentes à 1'att,ribution de ces

noms aux personnages dans 1es récits. En pIus, nous ne pouvons

en aucun cas affirmer que ces noms sont desti-nés exclusivenent

aux personnages qui les portent puisqu'ils sont issus du

reglstre commun des appellatifs dont 1a fonction essent.ielle

est de désigner des personnes.

Selon cett,e dernière inscript ion de ces noms dans ce

registre , nous pouvorrs reprendre / lunj a/ , lnima/ et / sinya/

pour rectifier un détail: i1 est peut-être vrai que ces

ant,hroponymes ne sont soumis à aucune règ1e d'at,tribution mais

nous ne pouvons les mettre dans 1a seconde classe puisqu'i1s

ne servent à désigner que 1es personnages des C1 et C10; et de

ce fait, i1s servent comme références imnrédiates à ces récits.Faisons un pas pour proposer une première ébauche

partielle pour voir 1a distribution possible qul rend compte

de nos distinctions en ne considérant que les registres social

eL non social comme traits qui caractérisent les anthroponynes.

Page 164: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

4L5

(r)Q-: .d-rd: '-: >CL--

a ,l c.G

,5v

L-:0)'; .\)

lir!='ao aJ E

Üo'- E'- il.g'- q 1 tl:).xl ç6S{ h'cü 9€:1'..j>X qr

ô a.o i->-"r'!O.- ^O n 'AE Ü;\) 6 '?o l-: vJ ;:U (J^)E e

(9.rf.oot,

o

ô,CJ

,d

Uo(n

o0C)

(.,

E()

(H

()

o,l(r)

.a.)

tLDË,IJ

t

--:-

\x)-:J

(r)

oÈE

U\

U

o"

a

oop.

oU

tooe

oiÈo!+r

Uo(,)

o

oJ](.)

o

.o13

rd

Uo(r}

bDOJ

Page 165: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

416

D'après cette récapitulat,ion, 11 apparaît que 1es

ant,hroponymes issus int,égralement du registre social sont

utilisés dans des récit,s que nous ne consj.dérons pas comme

contes; ceux qui n'appartienr:ent pas au registre social

apparaissent dans des récits que nous considérons comme contes

que nous avons déjà essayé d'analyser pour y déceler 1e code

figuratlf comme forme du mythiquel *t pour examiner 1e motif

du mariage2.

En somme, les exemples que rrous venons de prendre montrent

qu'a priori , 1'anthroponyme est ,un

é1ément par 1eque1 un réci.tserait considéré comme corrte lorsqu'i1 est adéqrrat au

personnage qui 1e porte conformément aux divers rô1es qu'i1

assume sur la scène narrative. Le rapport, entre les fonctions

appellative et désignat,lve dans ce cadre, se précise selon deux

volets qui s'int,er-déflnissent:

1. 1'anthroponyne a un contexte narrat,if d'ut,llisation et

11 est sous-tendu par une structure syntactico-sémantieue;

2. Ie contexte narratif sert à dénommer le p"r"onn*g*3.

Ces points sont tout à fait justlfiés par le

fonctionnement des anthroponymes pour lesquels 1e registre

social ne s'applique pas. I1 s'agit de / 1-meHgur a. . . /, de

/l*ge1b.../ et d'auLres que nous verrons et qui ne figurent pas

dans 1e schéma ci-dessus. Ces derrriers comport.ent généralement

1 Voir particulièrement "Le code flguratif spatial commeforme du mythigue", notre t.hèse de 3e cycle, op. cit.

2 C"tt" étude a fait 1'objet, d'une conférence que nousavons présentée au B.E.L.P., Centre Ibn Khaldoun, Oujda, 1988.

3 Porr plus de détai1s, voir G. KLEIBER, "Dénomination etrelations dénominatives", Lanqages, N" 76, 1984, pp. 87-88.

Page 166: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

4t7

en eux-mêmes leurs att,ributs. Ces attributs sont 1'origine et

1'effet de Ia constructiorr des récits. Le cas typique qui rend

compte de cette idée esl celui de /11i /eer-ha Twil/ (ar: ce11e

dont les cheveux sont lorrgs ) . A première vue, i1 est

sensiblement difficile de parler ici d'anthroponyme, ctpourtant, dans cette proposition, 1a relative en tant qLle cas

de déterminationl forrctionrre bel et bien pour désigner un

acLeur. Mieux, cett.e désiqnation est ce sur quoi se fonde à

certairrs égards 1a r:arratiorr, de 1'histoire de "ce11e dont 1es

cheveux sont 1ongs". Cett,e fonction de désignat.ion serait alors

1'urrique tralt qul nous permet de parler d'anthroponymi-e darrs

1a mesure où "le destin" de notre personnage est comme inscritdans ce qui sert à le désigne12 par f intermédiaire de la

valeur sémantique de " cheveux 1ongs" ( cf. notre première

partie ) . En Lous les cas , 1'univers de notre conte est

fortement 11é à cette "anthroponymisatiorr"; d'autant plus que

si nous y retenions 1a fonction de déterminatlon, nous verrions

qu'e11e ne peut en principe être te11e que par rapport à

1'actorialisation dans 1e discours. Ce serai-t une forme de

condensatiorr désignatrice d'une figure actorielle suffisamment

connue (dét,erminée) pour être mise en expansion par 1e ccnte.

Ceci se confirme davantage dans les conditions

d'attribution à juste t,itre des ant,hroponymes des acteursr 1e

C33 énumère des noms auxquels 1l accorde des adjectifs tels que

1 Nou= remercions A. Sabia d'avoir attiré notre attentionsur ce phénomène de détermination et de nous avoir écIairédessus.

2 voir C. BROMBERGER, "Pour une analyse anthropologiquedes noms de personnes", Lanqaqes, No 66, 1982, p. 111.

Page 167: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

4L8

/kHeL/ (ar: noir, cf. /j-jenn 1-kHel/ = re génie noir), /Hmer/(ar: rouge, cf, /j-jenn l-Hmer = 1e génie rouge) et,c. pour ces

couleurs fonctionnant comme adjectlfs, i1 apparai.t gue 1es

effets y déslgnent. 1a construction de parcours de sujets dontle Lrait n'est pas de 1'ordre du commun mais du "sLlr-naturel,,.D'ail1eurs, notre corrt,e est une histoire de conf lits entrepersonnages humains et personnages non-humains ( sur-humalns ? ) .

Les premiers sont mis en scène essentiellement, pour réaliserune é1évation au rang des seconds par 1, intermédiaire de

1'ascension des montagnes, espace habité par 1es seconds (cf.le motif de Ia montagne dans noLre première partie).

ctures ticale

motivé s

Faisons un pas de plus en reprenant les deux exemples

d'anthroponymes motivés: /l--gerb... / eL /1-meHgura... / pour

exploiter 1'ensemble des idées avancées jusqu'à présent.

Pour ces deux anthroponymes, nous voyons bien qu,i1s sontconstruits comme syntagmes dont les unités sont"transmutées"1: par 1e déterninant /]--/ déflni, l,obtention à

part,ir de /meHgura/ qui est un adjectif, est ut.ilisée pour

1 voit1i eu , t,hè se

A. SÀBIA, L'espace en arabe marocain: I,adverbe dede Doctorat, d'EÈat, (dactylographiée), Fès, L992.

Page 168: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

419

désigner 1e p"t"onnagel;1e reste du syntagme vtent, renforcer

par la spat,ialisation 1'effet sémantique par 1'adj ectif

relativement à "1a transmutation catégorie11e":

Ad j ecti f ->

Nom

meHgura -)

1-meHgura.

Ce même procédé est utilisé dans /L-eebda/ (at r 1'esclave)

et /I-Hurra/ ( ar: litt,. Ia libre; }a maîtresse ) ; de la

catégorie d'adjectifs, i1s passent à celIe du nom par

1'adjorrction du déterminarrt /l-/ pour servir d'anthroponyme

dans 1a conflguration de 1a recherci:e des sept frères par leur

soeur ( cf. C35 ) .

Nous repérons par ces exemples une régularité grammaticale

dans les synt,agmes qui servent à 1 'ant,hroponymisation: 1a rèEJ-e

généra1e est de ramener 1es noms aux rapports qu'i1s

entreti.ennent avec les adjectifs dans 1es §yntagmes. I1 ne

reste plus qu'à entretenir ces adj eetifs selon leur effet

sémantique de "qualifiant" pour la mise en discours. D'un autre

point de vue, i1 est toujours intéressant de préciser que 1a

formation de 1'anthroponyme pour ces caS précisément, Se soumet

à 1a règ1e grammaticale qui exige que 1e dét.erminant défini

entre en J"r2.

1 C'"st selon ce critère que le porteur de 1'anthroponymesera considérê comme personnage " principaT par 7e f ait q.u' Ii'7]nérite 7es honneurs du portait, par son caract'ère, sa position,son inf luence sur Jes faits (. .)" , Ph. HAMON, Introduction a.u

descriptif, Hachette, Paris, pp, L9-20.) _-z Tl y a d'autres cas où Ie syntagme nominal, tout en

entretenant un rapport avec 1'adiectif, ne convoque pas Iedéterminant défini; précisons toutefois que 1a déterminationy est inscrite par d'autres procédés grammaticaux (cf. /mHend1-lhemm/ et /wekkalt wlid-ha/ (ar: la dévoreuse de son fils).

Page 169: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

420

Prenons maintenant 1e cas de /1-gelb b-1a hemm/. Nous

voyons bien que le syntagme comporte deux noms: N1 /L-gel-b/ et

N2 /1-hemm/, qui n'ont aucun rapPort avec la catêgorie dite

adjectif; mais, pâr 1'utllisation de 1a préposition /b'/, nous

retenons dans 1e syntagme que sl N1 déterminé e§t suivi d'une

préposition, N2 construit, irrdirecteftent un effet qualifiant N1

en ce sens que ce dernier ne sera dét,erminé qLle par 1'effeL qui

1e "contamine" en quelque sorte par /La/ (arr non) suivi de

/hemm/. Ceci nous permet de t.raduire littéralement notre

syntagme pâr: "1e coeur avec non soucis"; Ie second nom /hemm/

a ainsi une position grammaticale qui rejoint cel.le de

1'adjecLif.Ces précj.sions que 1a grammaire phrastique nous a permis

cle retenir ne renseignent peut-être pas sur leur raison

d'apparal,t.re dans natre travail. Toutef ois , el1es nolls sont

c1'une grande utllité dans la mesure où elles nous intéressent

pour éclairer 1a nature de formaLion des arrthroponymes motivés.

I1 nous a été pcssible de résoudre par 1'étude des règ1es

quelques problèmes tels que celui de l-a notation de /mHend

themm/1. Avec un peu de recul, nous nous sommes demandé s'i1

f allait ou non t,enir compte de Ia gémination /. . .l-lhenrn qui

est à peine perceptible chez certaines informatrices

berbérophones -1es plus âgées- lors de narrations de C2,

contrai-rement aux informatrices arabophones. Eaute de moyens

adéquat,s pour expliquer ce que "à peine percepti-b1e" signlf ie,

i1 nous semble posslble de recourir à ]a règ1e grammaticale qui

1 ct notre thèse de 3e cycle

Page 170: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

427

consiste en Ia concaténaLion dans un même segment de deux

é1éments nominaux en rapport de quallflcation; i1 faudrait donc

rechercher 1a Lrace de cette qualification dans 1e segment'

sl nous tenorls compte du phérromène phonologique de

1'assimilation: /n + 1 ->

L!/L, nous éctairerons 1e segment

de telle sorte que /n/ y soit une préposition êt, par

assirnilation, 11 devient /1/ daus /mHend 1-lhemm/ (1itt" mHend

de /l-hemm/ mHend rles soucis). Par cette précision

s'expliquerait 1a motlvation basée sur 1a qualification d'un

point de vue sémantique dans 1e syntagme servant cl'anthroponyme

et ayant comme structure cel1e que rlous avons déià relevée dans

/1-qeIb bIa hemm/: N1 dét.erminé Prép. N2, construeteur ie

1'ef f et. qualif iarrt N1. Si 1a gémirration rt'est pas à prendre el)

considéralion, i1 s'agira d'une autre rëqt1e: N1 N2, de sorte

que leur concaténation soit une trace de qualification'

Nous déduisons de ces remarques que les syntagmes qui

servent dans 1es conies comme anthroponymes pour déslgner des

acLeurs sont soumis à des règIes grammaticales pour assurer

leur fouctiorr darrs 1e discours' De fi1 en alguille, nous nous

rendons compte que Ia motivation dans 1es anthroponymes, bien

avant qu'on y repère 1'opération de condensation / expansion,

n'esL possible que si les syntagmes qui constituent ces

anthroponYmes sont "filtrés" par des règles qui leur sont sous-

j acentes. A défaut d'une étude approfondie , donnons notre

exemple de 1a structure N1 Prép. N2 où 1a connexlort de N1 et

1 Voir M. HÀMDAoUI Description phonétique et phonoloqiqued'un parler amaziqh du Rif, thèse de 3e cycle ,

( aà"tvfographiée ) UniversiLé ci'Aix-en-Provence , 1985 '

Page 171: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

422

c1e N2 re joint en ciéf initive 1'essentiel de 1a construction cles

anthroponymes faisant partie de 1a classe déterminée par cette

même structure (cf. /l-meHgura... / , /L-gelb... / , /mHend... /).

La corrstructiori de ceLte classe permet de tenir compte de

1a manière dont 1a condensat,ion se réalise au niveau des

anthropoilymes et, aussi, de 1a manière dont 1'expansir:n retlertt

êL, en même temps, assure 1'enseignement, de 1a structure

grammaticale de ces segments.

Nous venons de voir que "1a vedette" catégorie11e dans nos

segments était celle qui r:joint par son effet 1'adjectif.

L'expansion dans le discours est alors une mise en séguences

narratives qul tient, sa réalisation de ces effets de notre

catégorie. Les exemples des anthroponymes <iont La structure des

segments qui leur serverrt de support (cf . ci-dessus ) soni:

convaincants à cet égard. En p1us, cette structure nous amène

à repérer 1a régularité donl dépendent 1es itinéraires de

formaticn des unités qui composent ces exemples au profit des

courrexions et des relations dans les segments.

Au niveau de leur conceptualisation par ces connexions

errtre urrités du lexique (cf. ll-meHgura.,./, /:---gel-b.../,

lsensli dehbi/, /wekkalt wlici-ha/, /bu 1-hemm / (auire

déslgnation de mHend (1-)lhemm) ), dans 1es contes d'expression

arabe, ces anthroponymes formenL une classe qui ne se distingue

de celle où la formation convoque des noms propres associés à

des unités en position d'adjecti.f, que par f intégration du

registre social par f intermédiaire de ces noms propres. La

structure grammaticale dans Ie sens où elle exige

gu'intervienne 1a qualiflcation reste 1a même pour permettre

Page 172: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

423

1'opération d'expansion dans 1e discoursl. Dans ce cadre, nous

avons déjà une réalisation en /mHend 1-lhemm/ d'une connexion

entre /mHend/ , prononcé comme tel chez 1es berbères, et

/1-hemm/ pat /n/. L'autre exemple à citer e§t celui de /eifa

1-fahma/ où /eLfa/ est un nom propre auquel- /L-fahma/ sert de

qualifiant,

Pr:ur peu que nous regardions ces exemples de près, i1

apparait que les noms propres /mHend/ et /eifal sont un choix

arbitraire sans fondement: rée1 relat,if à 1'expansion2; i1s ne

se soumettent à aucune exigence de leur attribuer 1a fonction

rJes unités qui leur sont associées. Ceci s'expllque par Le fait

que 1es natures grammaticales des unS et des autres dans -l-es

segments sont différentes et, de manière superficiel"le, Pâr ]e

faiL que ce sont des noms propres dont,1'unique fonctiou est

de clénommer sans que leur soient att,ribuées des valeurs

immédiatement perceptibleS comme c'esL 1e cas dans /1-meHgura/

par exemple. Nos exemples puisenL d'un fonds culturel des noms

propres ar:xquels sont attribuées des qualifications dont Ies

valeurs proposent des sèmes qui les affectent. Ces

anthroponymes, comparativement à ceux de /l-meHgura.,. / ,

1 Nous sommes conscient du fait que nous nous situons icisur deux plans distincts, 1'un phrastique et 1'autretransphrastique; en fait, nous essayons justement, de démontrerque 1es synt,agmes vus sous 1'angIe grammatical proposenL à 1atextualisation les traits susceptibles d'être retenus dans1'adjectif ou ce qui fonctionne comme t,e1 pour être mis endiscours.

2 "(.,,) une marque canventionneJle d'ident,ificationsocjale te77e qu'e77e puisse désjgner constafifient et de )nanièreü]1ique ulr individu ünigue" , E. BENVENISTE, P-{ob1èmes delinquistique qénérale, t. II, GalIimard, Paris, L974, p.200;voir aussi, C. LEVI-STRÀUSS, La pensée sauvaqe, P1on, Paris,L962 , p. 244.

Page 173: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

424

peuvent être dits partiellement,/L-geLb... / ,

motivé s .

/wekkalt

41

À,

Nous pouvons à

5 ) sous forme de

anthroponyme s:

présent compléter rrotre

récapitulation par cette

ébauche ( cf. p.

nouvelle classe

(Voir page suivante )

Page 174: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

-GC r.o;U)

+foE

425

\U(Hqrd)

(n

dap!T CJÈd-!uô!+

(l)oO*

d?

I

(,)

tJo

CdlioF

(n.o(r)

o

EoU

pcdç

-\u (d

l^cd

(d \)I

\À)

\o.tpoE

p!

.cd/^/

x 'd1o§XLlaJoE l-rx€L oD^

À-\v+cd AJ aJ.O (,t' E on\cU I IUCJ- .i -. uJrzr

I le(,rlÈ':\cr i i {.r

U)oÀ

(n

,(I)

(r,oÊ.

oU

CJ

Etso-!

J

ü,t(,,

-o/U

tîlulEI>/çto\o\!\

\ 6-,1

EEoq<

q.)

t4J

ü'/(,.o.tl

Page 175: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

425

Ce que Ies anlhroponymes composés, (que leur motivation

soit totale ou partielle ) ont en commun quant à leur

fonctionnement dans 1e discours, est d'être ce par quoi se

marrifestent les isotopies par f itératiorr de sèmes darrs 1es

cliscours narratifs qui s'y rapportent selon 1a référentialité

interne dont nous avorls d6jà parlé. Ce qui 1es distingue est

1a distribution, au niveau de leurs unités constitutives, des

sèmes itérés darrs 1e discours: au moment où ces sèmes sont

actualisés dans 1e discours selon 1a référentiallté interne au:<

unités constitut.ives des anthroponymes composés totalement

mct,ivés, pour 1es anthroponymes composés partieLlement motivés,

ces sèmes rre s'actualiserrt pas dans 1e discours par 1'ensembie

des unités qu'i1s constit,uent,' seule la qualif icat,ion est,

comme nous 1'avons vu, sous-jacente à cette motivation. Si un

int.érêt, quelconque est attribué aux noms propres /mHend/,

/ eLf a/ , /He11uma/ , i1 rre peut être pris err corrsidération qu'à

tiLre facultatif par rapport à 1a qualification commê é1ément

opérat.oire pour 1'expansior:. A 1a limite , rrous pouvorrs admettre

que l-es ant,hroponymes otl /mHend/ , / eLf a/ , /He1luma/ sont

utilisés, renvoient à 1'urrivers culturel arabo-berbère, mais

sans ouverture possible à moins que nous fassions usage d'un

traitement des noms propres par des considérations extra-

1:extuelles, cê dont nous ne pouvons tenir compte étant donné

qu'i1 s'agira d'urr déplacement de notre objectif 1nitia1, celui

d'étudier 1es contes de f int.érieur.

Dans cette même optique, /1-ealya bent, l-menSur 11i feïgsebe bHur/ (ar: 1-ea1ya fi1le del-menSur qul est (réside) au

de1à des sept mers) fait valoir f idée que 1a quallfication par

Page 176: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

427

1a relative /I1i f esg sebe bHur/ entre en raPport avec /l--ea1ya

bent 1-menSur/ pour produire un effet qui joue sur 1'espace

"sept mers" dont l-e caractère merveilleux est déjà une trace

par 1e chiffre au-detà de 1a disjonct.ion par rapport à 1'espace

"terre" (vi11age) du personnage présent,é dans 1a configuration

(cf. C24) comme sujet qui doi-t faire 1e voyage pour réaliser

1a quête de 1'objet. de valeur (Ie médicament, qui sert à guérir

le roi).

mairle f et Hdirlwan

Aux cas qlle nous avoris éludiés , irrtégrons ceux de /mqi def /

et de /Hd|dwan/, dont 1'emploi Par Le conte (cf. C4 et C34)

s'avère géré par une formatiorr particulière. Sans essayer de

les ramener à 1'une des classes ci-dessus, nous Lenterons de

1es examiner en relevant des traces d'ordre morphologique et

en nous appuyant Sur Ieurs uSageS en langue pour déterminer ce

qui fait d'eux des anthroponymes motivés.

Prenons le cas de /mqidef/ qui nous invlte d'ores et déjà

à nous demander avec irudenc" s'j-1 s'agit d'un diminutif ou

d'une f ormation sur 1a base cl'un ad j ect.i-f f onct.ionnant comme

riom/ 1ui-même construit sur 1a base d'un verbe qui serait

/qeddef/ signalé par M. Beaussier el H. Mercier d'un côtê êt,

de 1'autre, attesté par nos informateurs berbérophones comme

Page 177: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

SE

424

dit, pour signifier "jouer un tourverbe rare qui

quelqu'un" . 1

Sarrs entrer dans une discussion sans issue autour de

I'éventuelle question d'emprunt du terme /qeddefl de 1'une des

larrgues (parlers arabe et berbère ) à I'autre , noLls préf érons

1'examiner selon ce trait modal "le pouvoir", 9uê nous relevons

clans 1a définition donnée par H. Mercie12 et dans ce11e gue

nous retenons dans 1es irrf ormations qui nous ônt ét.é données.

Dans 1a définition de H, Mercier, "1a tromperie", que nous

pouvorr§ soumettre à une sémarrtique 1exlca1e, nous pêrmet de

retenir Ia modalité nécessaire à Ia réallsation de "lromper

quelqu'urr": }e savoir qui s'articule au pouvoir (1e pouvoir du

savoir). Par cette indlcation facile à relever dans 1'acte de

tromper, rrous proposons de revenir sur 1a définltion de

/qeddef/ (ber: jouer un Lour à quelqu'un) que nous pouvons

reformuler en termes de "tromper" qui est justement ce qui

incarne 1e pouvoir de /mqidef/, retenu en fait comme traiL

modal dans 1'unité qui aurait, servi sa formation. Voyons

cômment cette mocialité est dite en arabe, Dans 1e cas où 1e

verbe est dit /qedd,/ 1'adjectif serait /qadd/i s'i1 est dit

lqder/ 1'acljectif serait, /qader/. Supposon§ que 1'unité qui

aurait lnitialemerrt servi à 1a formation de /mqi del / solt

1 L' .xpression comme contexte d'utilisation de / qedd,ei /par 1'unanimité de nos informateurs est / $qedde/-6/ (ber:e11e-qedde/-lui) de te11e sorte que ce verbe admette commesuj et 1'animé humain féminin ; 1'obj et est animé humainmasculin; /qedde// est aLors utilisé dans ce contexte quiaccorde à Ia femme 1'acte de jouer un tour à 1'homme et nonf inverse.

2 / qd,el / , briller, étlrrceler; mentir, tromper (c'est nou§qui soulignons ) .

Page 178: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

429

/qedd/ (supposit,ion tout à f ait f ortuit,e ) . Dans ce cas, nous

seriorrs parti du trait modal (1e pouvoir) sans nous soucier de

1a formation dr; nom /nqLdef /. Pour peu que nous y regardions

de près, rious constatons que ce rrom ne peut pas être corrstruit

sur la base cie /qedd/i i1 est construit sur ce11e de /qdef /

dont 1'Lrn des trait,s sémiques se rappori.e à /qedd/. Nous auron§

ainsi rectifié f idée selon laque1le /mqidef/, pâr 1e tiait du

pouvoir, a ull rapport avec /qedd/ en nous appuyant sur un

critère lexico-sémantique et

morphologique.

négligeant 1e plan

Si rrous persistions poLlr a11er jusqu'au boul de 1a

supposition qui dirait que /qedd / serait, à 1a base de la

construction de /mqldel/, nous verrions que de notre verbe,

1'obtention possible de /qadcl/ ne prévoit comme diminutif que

/qwider/ attesté dans 1e registre social. Par 1e fait que seul

/qwider/ peut être obtenu cL, aussi, par 1e fait que /qtrider/

est at,testé dans 1e registre soci-a1, notre supposition

s'effonclre d'e11e-même non seulement pour 1es raisons de

formation régu1ière d'un poirrL de vue morphologique mais, aussi

et surtout, parce que nous savons que Ie conte n'utilisera pas

cette f ormation étant donrré qu'i1 s'écarte du registre =o"i'rfdans le sens où même quand il emprunte un nom propre, il assure

une adjonction à ce nom propre par une qualification pour lui

appliquer la règ1e de construction de 1'anthroponyme motivé de

te1le sorte que 1e destin de son porteur y soit -se1on

1'expression même de C. Bromberger- "pré-dit". Le conte aurait-

i1 alors construit 1'anthroponyne /mqldel/ sur 1a base d'une

unit,é linguist.ique tombée en désuétude: / qdef / ? S i 1a réponse

en

Page 179: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

430

est positive, nous consLat,erons que même dans ce cas, de /qdef/1a description devrait nous faire retenir 1a formation /qedda//

signalée par M. Beaussier, et /qdidi// comme diminutif, ce qul

n'a tout de même rien à voir avec /mqldef/.

Une autre voie de traitement est-e11e possible: de /qdef/,1'obtentiorr de /m-qda// serait prévisible; ensuite, un emploi

du diminutif pourrait. être retenu dans /inqide// ? Dans ce cas,

nous aurons retenu /qdel / attesté par H. Mercier et /mqldef/

s'appuiera sur une réguLarit,é de f ormation en langiue.

Examinons maintenant 1a définition de M. Beaussier. Dar:s

cette définitionl, nous relevons un effêt.: /qedda// aurait'. un

st.atut dévalorisé par 1es t,âches qui 1ui sont attribuées, i1

serait celui qul est en quelque sorte dévalorisé socialemerrt

et eui , en même t,emp§ , dispose d'une compétence selon 1e

pouvoir du savoir ( cf. 1a défirrition de H. Mercier ) pour

transformer ce qui est considéré en lui comme négatif(dévalorisé ) en posit,if , ce dont le conte t,émoigne " L'isotopienarrative semble ainsi construit,e par ces traits caractérisantle personÏtage dit, /mqidef/; i1 ne nous reste plus qu'à intégrerdans ce cadre /qedde// attesté en berbère par nos informaleurs.

Àvec Lous ces détai1s, noa""n'avons pas encore apporté une

réponse exhaustive à 1a question de 1a formation du diminutif/mqi def /. si rrous rrous basions sur 1es déf lnit,ions que nous

avons citées, nous obtienclrions sur 1a base de /qdef /, par

f int,ermédiaire de son transitif /qeddef /, comme formation

1' / qeddafl:1'eau, fait, lesd'un conte ; nain

dome stiquecommissions, pygmée.

qui fait 1es menus services, va à; /mqi def / : IIofi propre , personnage

Page 180: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

431

ce11e de /mqeddef/, formation régu1ière en arabe. Ceci nous

ramène au point de départ, de /qeddaJ/ (cf. M. Beaussier),

1'obtention de /mqedde// semble ne pas permettre par une

formation réguIière ce1le de /mqi del /. Cette formatiorr,

attest,ée du moins dans 1e ccnte, s'avère un écart par rapport

à 1a langue. Cet écart, peut êt.re vu dans deux selis: soit, 1e

conte, utilise une formation tombée en désuétude pour' obtenir

I'effet d'anthroponymisatiorr, chose qui nous paraît assez

disculable car, en principe, cetie formation aurait pu être

productrice, ce qui n'est pas le cas; soit, par cette fornation,

1e conte utilise 1a "1acune" de cet,te f orm.ation non productrice

dans 1a larrgue, êt de ce fait, i1 devienL 1e proCult par

excellence quj- se charge d'actualiser ce qui n'est attesiéqu'en 1ui €t, du même coup, permet des ouvertures d'évolut,ion

de la langue.

Une autre interprétation serait posslble: ifn sait que 1e

berbère utillse /f/ dans certains cas d'expressivité1. À ce

tit.re, il serait posslble de suivre 1a voie qui consiste à voir

dans /mqidef/ un nom construit sur la base de /qedd/ eL l-'unité

/qde// serait, construite sur /qedd / eL 1'adjonction de / I /

propre au berbère. Ainsi, /cldel/ sLgnalé par H. Hercier aura

été formé à partir de /qedd + f/. Err fait, 1a réalisation

exacte aura été celle qui nous a été donnée par nos

irrformateurs ( /qeddel / \ .

1ll.ÀZCIUcAGH, Lexlque berbère: structures et siqnif ication( étude sur Ie tarnazlqht du Haroc cent,ral ) , D. E. S. ,(dact,ylographié), Eaculté des Lettres, Oujda, 1992, pp. LL4-L25

Page 181: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

432

Par cette nouvelle indication, i1 semble gue /mql deî /

serait, obtenu sur 1a base de rt-QOl dont nous pouvons ret,enir

/mqedde// déjà sigaalé, /meqdu// non attesté par 1es

dictiorrrraires que nous avons consult,és mais ciont 1a formation

est régulière et, enfin, /qdLfl cornme nom dont 1a formation est

po§5ib1e mais gue 1 'usage arabe ne ret ient pas. cont,raireinent

à ceL usage arabe, 1e berbère retient /aqeddef / q.ui est

1'équivalent comme formatiorr de /qdil/. Le fait que Ie berbère

utilise /aqedd.ef/, rare mais attesté par nos lnformateurs, se

comprer:d parf aitement bien pu j,sque 1 'opérat,iorr d'ad j r:rrctiorr de

/ i t à /qedd/ est réalisée par Iui pour perrnettre'1'actualisatior: de 1'expressivité.

À ce nj-veau, si nous considérons que 1a formation est

tiormale et que 1'usage est attesté, l'écart qui caractérise 1a

conslrucf-icn de 1'anthroponyme se réa1ise par I'emprunt de

./qedd / à 1'arabe par 1e berbère , emprunt " f açonné " patr

1'adjonction de /f/, Nous voyons ici que 1'opération n'est pas

partlculièrement curieuse: e11e se réaIise par deux techniques,

1'emprunt qui cesse, dans une certaine mesure, §',être emprunt

par 1 'ad j onction de / f / qui produit urre f orme parlite ulière/qdef/ productrice de /mqidef / .

Enfin, essayons d'explolt,er cette approche sur y'-QOJ pour

1e propre compte de nos préoccupations. Remarquons gue toutês

1es déf init,lons que rrous avons essayé d'examiner d'un pcint de

vue de formation de 1'unité qui sert au conte comme formation

d'anthroporryme, retierrnent 1e trait du pouvoir. La manière dont

1e pouvoir est ciit. clans ces c1éf initions semble s'ouvr j_r sur une

possibilité d'étudier Ia concept,ualisation de 1a modalité pour

Page 182: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

433

être mise en fonctionnement dans le discours et pour indlquer

les voies d'ét,ude du sujet dans ce discours sous 1'ang1e des

champs modaux.

Cette voie est vraisemblablement i-ntéressante à suivre ne

serait-ce que par 1e fait gue nous venons de monLrer gue 1e

por-rvoir subsume / qedd/ , / qdel / (f acLitif /qedde// ) . Nons

pouvons même aLler j usg'1'; soutenir que 1e conte auraitsélectiorrr-ré une construction de 1'anthroponyme sur 1a base de

/qde/ / en usant de / I / comme acl jonct.ion à /qedd/ pour assurer

ulr écart par rapport à 1'usage de /qdef/ en arabe et un écart

par rapport à 1'usage de /qedd/ en berbère par 1'emprunt du

terme à 1'arabe. C'est cela même qul falt, nous semble-t- il_ ,

I'originalité fonctj.onnelle du conte pour prévoir 1a motivation

darrs L'arrthroponyme err ne sélectionnant que 1a modalité du

pouvoir comme t,rait caractérisant 1e personnage appelé /nqidef I

construiT comme dimirrutif dont, 1'expansiorr est aussi assurée

dans le conte.

L'écart dont nous venons de parier est en fart une

condition de construction de 1'anthroponyme par 1e conte car,

par 1'utilisatiorr de /qedd/, la formation aurait forcément

donné /qadd/ et /qwider/ que 1e conte rejetterait, sans nuances

comme nous 1'avons déjà souligné. De toutes 1es façorrs, si 1e

conte utilisait cette formation de noms propres/ i1 ne pourraity investir 1e sème modal qui sert à la mise en discours du

personnage selon ce trait.

Page 183: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

434

Prenons 1e cas de /Hdidwan/1 dont le procédé d'emploi

diminutif peut être rapproché à certains égards de celui

/nqLdel / .

En effet, I'emploi du dlminutif est en soi assez

révélateur du procédé de construction de nos anthroponymes qui

désigrrent err fait 1a même représentation du personnage du conte

clont les variantes gue propose notre corpus sont C4, C6 et C34.

Selon une interprétation posslble, /Hdidwan/ serait

consLruit sur la base de .f tlOt't où ,i1 nous est aisé de

reconnaitre des formations tel1es que /Hiddan / en tant que

déslgnation rare sous forme de surnom chez les Béni-Znassen

berbérophones; cette formation assure ce11e du dimirrutif

Hcliddan. A supposer que nous admettions ces formations, 1a

question que nous ne pouvons éviter dans ce sens est La

suivante : que11e est 1'unité lexicale relative à 1a

construction de /Hdiddarr / ( /Hdidwan/ ) dans 1e conle ?

À défaut. d'informations précises pour répondre à cet,te

question, nous pourrons rrous appuyer sur f idée suivante:

/ildidr*an/ est un anthroponyme qui désigne 1e personnage d'une

variarrte du conte dont une autre variarrte utilise /mqi d,el /. Le

conte ut.ilise indifféremnent, ces deux anthroponymes sans que

1es récits où ils apparaissent perdent leur t.it,re de variantes"

Ceci nous permet de retenir f isoLopie qui e'actualise

forcément dans 1'une ou 1'autre des variantes. C'est dire que

cette isotopie est inscrite dans 1e conte conformément à

1 Slgnalons au passage que cette formation est aussi dlte/Hdiddan/, voir H. MERCfER, op. cit., Hdiddan: Hdlddan Ie-Hrami, nain, malicieux (personnage de légende).

du

de

Page 184: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

435

f inscription du pouvoir clans res unit.és qui ont servi à 1a

formation des deux anthroponymes. cette idée nous permet de

déplacer 1a guestion sur le comment de l,inscription du pouvoir

dans 1a f ormation de /Hdidwan/. urre chose est certairre: 1e

pouvoir est ber et bien investi dans l'ut,il-isation en question,sinon comment, expliquer ra substitution de 1,un des

anthroponymes par 1'autre dans Ie conte ?

Essayons quand même de proposer quelques cas de traitementc1e /Hdidrvan / . En supposânt -t,out en admet,tant 1es risgues d,une

t.e11e supposition- que 1e tralt qug /Hdidlvan / f ait valoir, estcelui de "g1ori eux" 1 comme t.rait à partir duquel 1e regist.resocial aurait construit, 1e nom propre /Hemclun / d.Lt aussi

/Heddu/ cirez l-es berbères-jba1a des Arrgads. Le diminutif qul

serait, à notre sens, f ormé sur /Heddu/ esi /Hdi<1du/; et à ce

stade, i1 f aut expliquer 1e rapport, s, i1 y a rapport, qu, i-l_

y a entre /Hdiddu/ et lHdidcian/.

r1 semble, 1à aussi, eu'à 1a manière de 1'utilisatiorr de

/ f / par }e berbère dans les expressions expressive s , /n/ comme

adjor:ctlon que nous venons de voir dans /Hemdun/ construit, sur

/Hamid/, est ut,i11sé dans /Hdiddan/. ce /n/ est en fait d6jà

récupéré sur /Hemdun/. Dans une cert,aine mesure, nous sommes

alors en présence d'un phénomène déjà actualisé dans /nqid,ef iiet la notion d'écart dont nous avons parlé, reste valable pour

1'utilisation de /Hdlddan/ qui comporte aussi 1e pouvoir mis

err expansion dans 1e conte.

1 voir M. BEAUSSTER,d'é1oges, qlorieux ( c'est

op. cit. , /Hamid/: 1ouab1e, dignenous qui soulignons ) .

Page 185: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

436

A ce niveau, i1 apparalt clair que /Hdidwan/ et /nqLdef/

ne Sont pas construits cornme diminutifs de noms propres puisque

Ie registre soeial use cie cette formaLion. Pour produire

1'effet d'écarl, le conte opère par adjonction d'un "quelque

chose" (/f/, /n/\ êt, par 1à même, ouvre Ces voies d'évolution

des parlers arabe et berbère, auxquels iI emprunte les moyerls

qu,il lui faut pour produire des anthroponymes dont 1a

caractéristique essentielle esl d'être des diminutifs qui ne

se confondent pas avec ceux Cu registre socia]. Ceci explique

l-a manière dont ces anthroporrymes sollt porteurs d'urt trait

modal tout en ayant 1a fonction de désigner ou,-errcore; 1a

marrière dorrt leur fonction de désigner dépend du trait auquel

ils servent d'investissement.

-sérions 1es problèmes car Ies divers rapprochements

interprétatifs auxquels nous avons fait appel, doivent

bénéficier d'une réorganisationr

L. la formation des diminutifs dans 1e conte pour produire

cies atithroponymes se caractérise par i'écart en ut,ilisant ce

qui n, est pâs prévu pa.r. 1',usage pour permettre 1',opération

d'expausiori daus les discours;

2. les rapprochements effectués en procédant par les

lectures des définit.ions qui Sont offertes, nous conduisent

vers une supposition fortuiter à partir de /qedd/, i1 serait

possible d'émettre de marrière intuitive un polnt de vue qui

consiste à dire que /qdef/ et /qder/ sont, d'un point de vue

de 1a conceptualisation de 1a modalité du pouvoir, subsumés par

/qedd/ comme si ce terme, appréhendé comme modalité, était'

régulateur du lexicat ou, si 1'on préfère, les réalisations

Page 186: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

437

lexicales dont.1a racine {'eOt, tout coTnme c'est 1e cas pour

/-HOt't, sont sous-tendues, lorsqu'elles sont ut.ilisées pour des

fins cl'anthroponymie, pâr 1e modal (1e pouvoir et les autres

modalités dont les articulations sont définies par les plans

et les horizôns d'analyse, une ouverture que rerrdent aisénent

posslble les développement,s réaIlsés par J.-C. Coquet dans ce

domaine ) . A titre de repère, pour voir de manière à peu*près

claire comment, se présente notre point de vue, prenons laracine ./-QDR et la racine ,t-çOl :

Le pouvoir

( modaliré )

/QDR {Ao;

/ qacle r / I qada/ /neqda/ /

/qwider/

soc i alreg i stre

Comme iI est aisé de Ie constater, le trait modal perd sa

fonction dans les noms propres. Ceci rejoint les trait,sdéfinitoires mêmes du nom propre dont la seule fonction est de

nommer et désigner de manière unique un individu unique. Cette

/nqide/ / Jregistre du conte

Page 187: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

438

perte du modal est récupérée par le conte à sa manj-ère: notons

que relativement à /qder/, dans /qedd/, 1a suppression de /r/

seraiL aËsez curieuse si nous comparions fes deux réa1j-sations

lexicales au rrom de 1a modalité subsumante. Ceci deviendrait

encore plus curieux par 1'effacement de /r/ et 1'apparit,ion de

/Tt i/qder/, /qdel/).

S'i1 y a quelque idée à reterrir darrs cette comparaison,

ncus pensons qu'e11e résicie dans I'investissement modal perdu

par 1'usage social du rrom propre , que 1e conte s'emploie à

réinstaller par 1a forme cie /qdef / êt, partant, de /mqid.eî/

selor-r toute lecture posslble de saisie de ce pouvoir da:is

/qdeï / par 1e biais de /qder/ et /qedd/.

Nous avons telité de voir comment 1e conte propose des

possibilités de production d'anthroponymes de tel-1e sorte

qu'ils rre se confoudent pas avec les noms propres du registre

social. Cette production repose sur une formation rée11e et

propre au conte de sorte que 1'effet distinct,if par rapport au

regist,re social y soit privilégié.

Si nous terrtions d'évaluer cette technique, nous pourrions

y voir un effet "il1usoi-re" clans la mesure où e11e consisle à

faire admettre qu'effectivement 1'anthroponYme s'écarte du

registre social mais, aussi, à faire admettre que /mqide/ / eL

/Hdidwan/ rejoignent, par 1e t,rait modal qui y est investi, 1e

nom propre diminut,if / qwider / et /Hdiddu/ sans que ces clerniers

réclament f irrvestissement du tralt modal pour servir 1a

fonction à 1aque11e i1s sont destinés. I1 seinble en effet que

1a construction de /mqidel/ repose sur une illusion en tant que

format,ion référentielle au nom propre pour privilégj-er une

Page 188: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

439

allusion aux investissements sémantiques que 1e conte récupère

en vue de 1es mettre en discours par 1'opération d'expansion.

Cette iclée permet d'approcher 1e niveau cl'énonciation sous

deux volets:

1. f illusioti serait relative à 1a comparabil j-té trompeuse

cle 1a f orme du diminut.if cIe 1'anthropon]/me /rnql def / et ce11e

du dlmirrut j- f en tarrt qu' emploi du nom propre / qwi det / . La

distinction éventuelle dans 1e cadre de cette illusion

tiendrait compte à }a limite du fait que la première forme est

construite sur 1a base de /qdel/ eL l'autre, sur 1a base de

/qd,er/ comme si les deux formes n'étaient pas révéIatrices

sémantiquement du même t,rait modal (1e pouvoir);

2, f illusiorr de cette possibilité de comparer entre Les

Ceux formes, comme a]lusion à des procédés d'emplci du

diminutif en larrgue, n'est pas gratuite car e11e permet à

/mqicle// de franchlr 1e seuit de 1a simple désignation à la

manière du nom propre. L'intérêt que sorr énonci.atiorr se charge

de mettre en évj-dence est ce sur quoi Ie récit repose en gros

pour êt.re dit.

Pour nieux approcher ce "retournement" dû, d'un côté, à

f illusion r1e comparabilité de 1a formation du diminutif du nom

propre ( reqistre social ) eL ce11e du diminut.if de

1'anLhroponyme (registre du conte), et de 1'autre, à 1a valeur

sémantique comme irrvestissement dans /mqLdef / , que 1e registre

social ne retient, pas car i1 n'en e§t pas conditionné, nous

pourrons recourir à une schématisation qui tiendra compte: 1 )

clu lexical (trQDR ou ,,]-QD et .fQDl) selon Ie trait, du pouvoir

qui 1es caractérise lors de leur mise en discours; 2 ) des noms

Page 189: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

440

propres et 3) des diminut,ifs formés à partir de ces formes.

Nous constaterons ensuite que 1a modalité du pouvoir n'est

investie gue dans 1 'anthroponyme f ormé sur ,t*çOt. t'allusion

au modal dont nous venons de parler réside dans ce qul permet

1a formation du nom propre du registre social et de

1'anthroporryme dans 1e conte par 1'usage lexieal en langue.

Plus précisément, 1e modal qui se manifeste par ./-ODR ou ./-QD

ne peut faire l'objet d'une actualisation dans 1e conte par 1e

nom propre (cf. nos propos sur mulay eebdelqader j-jila1i et

eelqma) . Donnot:s notre schématisalion:

,IIl!1k

Page 190: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

q41

Usage parIe regtstresocial

| 1e conte

i Usage parlr^ -^^-:-L-.i 1" ::r ist..o

Usage par

(") Signalons que ,/qader/ ne sert pas à désigner unest 1'un des attributs de Dieu; vidé de ce sens lorsqu"francisé", i1 peut désigner un individu; /qada/ estberbères de Béni-Znassen pour désigner 1e dénommé /1ièrement lorsque ce dernier est dit par une personneun membre de 1a famille ou par une personne intime.

individu puisqu'i1'i1 esi notammentassez courant chez 1eebdelqader/ particu-nettement âgée, par

Page 191: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

442

Ce qui nous senble assez têvélateur des constatations

faites jusqu'à présent, est 1a 11berté apparente du choix dans

1a langue entre 1'un des deux termes /qô,er/ et /qd.ef /, qui

s'annule inévitablement lorsque 1'usage sert à former un

anthroponymer 1a sélect,ion de /qde// où 1'on notera lî/ comme

s'i1 servait à /qdel/ de se distinguer de /qder/ (?), est

prévue par 1e lexique pour assurer f inscription du pouvoir

dans Ie conte par 1a formation de /mqidef/.Or, ce pouvoir est

déjà reconnu dans 1'unité du parler arabe /qedd/ comme si cette

unité devait être retenue comme ce qui assure et fait,

enLretenir un rapport linguistique entre /qdertL et /qd,ef/.

L'esprit de ce procédé réapparal.t dans 1e cas de /!idldrv'an/

en admet,tant que la fornaLion de ce diminutif remc,nte à

/Hemdun/ comme nous 1'avons noté. Pour réaliser cette

formaLion, i1 apparait que 1e conte a usé de 1a récupéraLion

de /n/ à 1a suite de 1a formation possible de /Heddu/ sur l-a

base de /Heddun/ qui, êÊ principe, devait, produire /HdLddu/.

Cette récupération de /n/ apparaÎt justement dans notre

anthroponyme /Hdldwan/ qu' une description phonologique pourralt,

parfaitement expliquer par des règ1es é1aborées pour cette fin.

Dans ce cas, nous serions tenté de penser que 1e procédé

de formation utilise /n/ au même titre que /lt de /'l QDI/. Par

ce procédé, D'étant pas concurrencé pâr autre chose à notre

connaissance dans I'usage, 1a formation de I'anthroponyme se

fait sur /Hemclunt (cf. ci-dessus p. 436) relativement perdu de

1 voir TBN/qadr/ , /qtdra/,

MÀNDUR,/miqdar/

Lisan a1 e arab, g!.:_g_i!. : /qadara/,: /quwwa/ (Ia force, Ie pouvoir).

Page 192: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

443

vue lors de Ia formation de /Hciidwan/ comme"si ce dernier était

formé sur Ia base de y'-HpN qui n'est attestée ni en berbère ni

en arabe.

A ce stade, i1 est possible d'ouvrir une parenthèse: soit

nous sônmes sur une mauvaise piste, chose que nous allons

essayer de vérif ier; soit rHDN est tombée en désuétude; soil

l-e conte inrllque une ouverture vers une évolution possible de

la langue. Nctons aussi güê, contrairement à 1/-ttON , {Q»f esl

attestéq bien que ses réalisations (/qeddaf/, /qdef/ et

/qedde// ) soient dit,es rares. L'intérêt de c9.s poirrts montre

que nous sommes arrivé à démontrer 1a nécessité de vérif:-er nÙ5

sLlppo§itions et que 1e trait "glorieux" inscrit dans iridiowanl

SeréaliseaussiblenparlerecoursàIaformationparticulière du dimilutif sur 1a base de /Hemdun/ que par

1'écart vis-à-vis de 1'usage du terme qui a servi à sa

f ormation. ces deux eorrtrailltes, sans lesquelles 1a motivat'ion

ne pÊut avoir lleul,SODL dues au fait que /Hdiddu/, diminutif

de /Heddu/, fait déjà partie du registre social. Le conte doit'

ainsi recourir à une âuL.re formation tout en privilégiant ce11e

du diminutlf; i1 dispose de deux possibilités ! construire

/Hdiddan / de telle sorte qu'i1 soit reçu dans 1e sens où i1

n, est en f ait que /Hdiddu/ auquel /rr / de /Hemdun/ est' ad j oirtt

or-r bien 1e construire sur 1a base d'une f ormation possible

mais non att,estée /Heddun/. 0f , 1a première f ormatiorr, en

consiç1érant ceIle attestée /Hcliddu/, est en soi dé jà le

résult,at d'une opération d'emploi d'un diminutif ; 1a secorrde ,

en considérant, celle attest,ée /Heddu/ est aussi une opération

d,emploi d'un certain diminutif ou du moins d'un emploi qui se

Page 193: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

444

rapproche du ciiminutif du point de vue des effets de son

utilisation. Dans ce cas , 1l y a lieu de se poser deux

questions:

1. le conte aurait-il construit 1e diminut.if /Hdidwan/ sur

un autre diminutif /Hdiciclu/, iui-même construit. sur /Heddu/

attesté, 1u1-même corlstruit sur /Heddurr/ non attesté, lui-même

construit, sur /Hemclunl attest,é ?

2. Étant donrré quê ta construction d'un diminutif sur urr

ciiminu,tif nous paraLt tout de même dif f icile à adnettre, i1

reste à nous rendre à 1',évldence: ne devrions-nous pas admettre

que /Hendun/ est soumi.s à deux procédés de construct'ion de

diminut,lf s, 1'urr est utilisé daris 1e registre social; l'autre ,

par Ie conte pour marquer 1',écart vis-à-vls du premier ?

Pour mier-ix Situer ceS questions, nous poUvorts recourj-r à

1'enseignement de Ia Phonologiel,

1. pretlons /Hemdurr/ pour voir 1es passages irrtermédiaires

qui ont permis 1'obtention cle /Hedclu/:

a)

b)

c)

/ Hemdut: /!

Ii

II

zuerldunzI

I

I

i

/ He ddun /I

I

I

I

I

/Heddu ë /

/Heddu / -

(n -r

d d)

1 Nors tenons à remercier M. Hamdaoui pour nous avoir aidéà préciser Ies règles.

Page 194: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

445

2. Nous remarquons que Ie diminut,if /Hdiddu/ ne peut pas

être celui que 1e conte utilise; 1'anthroponyme qu'i1 construit

n'est pas f ormé sur /Hdidciu/ att,esté dans 1e registre social;

i1 est corrstruit sur /Heddun/ norr attesté mais dont notre

descriptiCIn ne peut pas ne pas tenlr compte. Ce dimirrutif sera

dit /Hdidwarr/ selon: /Heddurr / * > /Hdidwan/ . Les règ1es sous*

jacentes à cette formation sont:

a)

b)

c)

1

w(a), 1a

d-rcl

géminatiorr dans dd ( /Hdiddan/ )

1e diminutif est dit /Hdiddan/, ncus pouvons3. Lorsque

nous baser sur

a)

b)

/Heddu 4 /

/

-

p/(non at.test,é)

_> /Hdlddu/

/HdLddein /

1'usage

( att,e sté par

du conte )

Par cet,te description, nous espé

indications nécessaires. Exploitons ces

récapitulation à 1a manière cle ce 11e que

1'étude de /nqLdef / :

rons avo]-r

données en

nous avons

donné les

faisant une

faite pour

Page 195: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

446

-l En tant que support dont les réalisations lexicaLes comportentletrart "glorieux" relevé dans la définltion de M. Beaussier.

*:! Notre description phonologique*montre q,-r" VÉOU est 1e résultatde règles de trànsformations-ae ÿUtvt» (cf / Hemdun/ et /Heddun/)

Page 196: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

441

L'orientation que nous venons de donner à notre étude

montre que 1es anthrCIponymes traduisent des t,endances

dominantes dans la miSe en discours des contes. Les

rapprc)Chements et eomparaisons que nous avons essayé de faire

entre anthroponÿmes différents clans des contes différent's et

dans urr même conte par des variarrtes différenteS, nÔus ont

amené à considérer 1e regisLre social et 1'univers des récits

pollr mieux voir en quoi les arrthroponymes peuvent être vus sous

i'angIe de 1a motivation.

Par ces tendances que 1es anthroponymes manifestent, êt

par un simple regard si superficiel soit-i1, nous nous rendÔns

compte que 1e ConLe Use d'ancrages cognitifS Sous forme

d"'étlqueltei" virtuelles en mesure d'être mise en OiscÛurS par

rles expansiorrs productrices de séquences rlarratives ' Dans rjer-te

optique, 1',élaboration d'un récit, dit conte, sêrail externe

avant d'être interne au producteur-énonciaLeur parce que Ia

mise en forme, 1â prociuction et 1a textualisati n sonï

suffisammerrt dirj.gées et orientées par 1es opérations de

ccn.Jensation / expansion par cles unités dont les t'raits sont

suffisammest sigrrificatifs pour être err mesure de fonctj-oI'iIler

comme Supporits, dans Ie sens de moLif s, de thématisat j-ons dans

1e discours rtarratif. Ce qui reste interne au producLeur-

énonciateur individuel- résicie exactement dans cette esPèce de

StyLe quj- consiste à opérer sur "1'élastlcitê du discours" où

1e récitant use d'une liberté apparente car i1 esL soumis aux

corrtraitites qui lul sollt indiquées voire imposées par I'univers

du conte. Rappelons-nous les fonctions des anthroponymes

Page 197: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

ce1les des

448

motifs dans les configurationsmotivés et

discursi-ves.

Si nous suivons jusqu'au bout 1'ouverture permise par 1a

motivati-on dans Les anthroponymes, notre ét,ude sera à coup sûr

erl mesure de mieux appréhender 1es questions d'éncnciation dans

1a mesure où / 1-mHajya/ ne peut être soumise à cet anql-e

d'analyse que si nous Ienoris compte d'une f orme d'ob jectiv j"té

qui doit, être reçue comme tel1e par 1'énonciateur indivi-duei.

Cette ob je,:tivit,é est assurée justement par 1'ensemble des

règIes qui permett,ent 1a mise en discours de contenus par des

techniques de motivatiorr structurées par les organisations

syntactico-sémanliques cies configurat,ions.

Err dehors de ces conditiorrs , ce11es qui re1èvêrrt d'urre

relative subjectivité chez 1'énonciateur individuel résiCenL

dans 1a manière de conter, dans 1a manière dont 1e récitant

fait état de son talent, de ses compéLences de mise en

fonctionnemenL de ce qui 1ui est exter.,"1. I1 y a 1à un

véri+.ab1e contrat qui s'établit entre I'énonciateur eL 1e

conte; 1es modalltés de ce contrat sont transmises par 1e conte

et non par son récitant. Le cÜnte, après établissement de ce

1 I1 n'est pas rare qu'une lnformatri-ce décide d'e11e-mêmed'arrêter de conTer pour ciire qu'e11e n'est pas en état. depouvoir continuer; dans d'autres cas, bien que 1e cont,e soitrécité et qu'i1 y ait une cohérence irréprochable dans 1eproduit, 1e sentiment qu'i1 s'agit d'une "mauvaise narration"est net, vraisemblablement -c'est du moins notre avis- parceque le style de conter n'est. pas à Ia hauteur du conte. Faut-i11e dire ? conLer n'a jamais été 1'affaire de ce qui est ditoralement par des mots, dês phrases... enfin, pâr 1a bouchemais plutôt. de ce qui se dlt par 1e corps: ce n'est pas par labouche qu'on corrte mais par le corps tout entier. A défaut de1'ensemble du "corps-parIanL" si l'obscurité empêche 1e conteurde parler par sorr corps , 1a voix assure cette f onctiotr.

Page 198: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

449

contraL, fait surgir son pouvoir évaluateur sur son récitant:

ce dernier est-il ou non à 1a hauteur d'assurer le contrat ?

C'est dire que 1a prise de parole n'est jamais facile: i1

suffil d'en taire l'expérience pour s'en rendre compte.

Ceci montre, ʀ seraiL-ce que par 1a fonctlon des

anthroporrymes, qu'ils so j-errt partiellement ou totalement

motivés, que 1e conte dispose des moyens de fournir à son

récitarrt 1a compétence rrécessaire à 1a narration de tel1e sorte

que cette ,compét,ence ne se confonde pas avec ce11e qui serait

propre et j.r:dividuelle à tout récit,ant pour pouvoir inscrire

des traces qui rendent compte d'une construction individueiie

du prodult. En tous 1es cas, cette compétence n'émarie de ce

récitant que par 1e fait, qu'i1 se propose de réciter un conLe

ou de produire urr récit dorrt, les structures sont déjà données

par 1e schéma g1oba1 du conte ! une compétence acquise et, non

construite par ce su j et, énorrciateur.

Nous sommes en présence de deux volets qui s'inter-

déf ir:issent tout en étant distirtcts: 1es traces d'énonciation

qui sign j.f ient que 1e cont,e , comme univers de valeurs , n'est

paS assumé par 1e récitant, sorrl dé jà dites dans 1es énoircés

inlroductifs (ou formules inaugurales) pour gue soit prévue une

énonciation nalrat,ive qui s'emploie à met.tre en fonctionnement

la langue pour produire des obieLs posés préalablement à 1a

narration- éttonc iation,

Pour ne tenir compte que du produit lui-même,

inclépendafiiment du niveau présupposé, celui de 1'énonciation,

i1 est aussi clair que les séquences narratives dont 1e support

d'expansion est 1a motivation dans 1es anthroponynes, sont

Page 199: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

450

réa1isées de par leurs manifestations en"'vue d'exiger que Ie

macro-texte ( te récit) les adopte selon un principe de

cohérence. A ce niveau, 1ê moins que nous puissions dire est

de rendre justice à 1a motivation dans 1'anthroponymie en tant

que procédé énonciat,if organisateur du récit au*de1à des

fonct,ions que nous avons déjà essayé de montrer par l'étude des

cas ciÈés.

Leconte,commenousl,avonsdéjàdit,sembleproduire'ses

propres moyens de "se faire". si ce genre de la tradition orale

prévolt par ses propres moyens des techniques organisatrices

de sa narration, i1 ne se souciera guère de la manière dont 1e

récitant indivlduel organise les événements de 1'histoire '

cett,e organisatlon, pour peu que ce récitant ait acqui§ 1e

principe de cohére.nce et d,un certain St,yle pour pouvoir

communiquer,sefait.d'elle-mêmepuisquecequiluiest§ous-jacent comme enseignement sur les message§ à communiquer par

unlangageallusif,estdéjàfixéparlesprocédésdemiseendiscours du conte. ceci explique, d'ailleurs, 1ês mises en

expansion de ces messa.ges dans des récits différents et qui

communiquententre",*enéchangeantdesconfigurations

diseursivesl.

Àproposdecettecomposanteduconte,précisonsqueles

différences à not.er dans 1'utilisatlon d'unités lexicalement

différentes ne 1e sont qu'à ce niveau dit Iexical sans pour

autant faire perdre aux différents récits qui 1es inLègrent

1 Ct. notre corpus pour noter les configurations quipassent d,un conte à un autre bien que ces contes aient étéracontés par des informatrices différentes, dans des Iieuxdifférents et à des intervalles relativement é1oignés'

Page 200: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

451

clansuneconfiguraLiondiscursivelesprocédésdemiseen

discoursdesmessagesetdescont'enusdel,ensembledu

clispositif narratif. La construction de ces contenus par des

i nve sti ssemen Ls s émant i que s rendu s po ssible s par

l,actualisation de traits figuratifs dans les configurations,

peut, se réaliser même en présence d'utilisations qui se

manifestent lexicalement par des unités différentes ' pourvu

qu, el1es soient isotopes au niveau sémantique et qu'el1es

soient en posit,ion structurée du point de vue syntaxiqu" ' La

notion de motif dans ce sens est régie par ceLte organisarion

syntactico.sémantiquedelaconfigurationquil,utilise'di 1^â différences en queslion doivent êt're prlses enilI J-eb (lLlLsrçrÀvus

considératicn,c'estqu'ellessontdotéesdecharges

sémantiquessuffisammentjustifiéesdanslecadredeleurs

organisations eL environnements syntactico-sémantlques Pour

"détourrrer" une lecture première en une autre' C'est dlre que

1'énonclation narralive est le plan auquel se §oumeL le

"détournement" d'Une leCture Par une autre; Ce qui filtre les

lectures en question, est 1e conte lui-même par Ses procédés

demiseendiscoursjustifiéepardestraceSquiorientent]-a

narration et qul sont ces mêmes moyens offerts au récitanl-

érronciateur. ceci peut. être éc1airé par 1e point de vue que

nous avons c1éveloppé sur la motivation dans I',anthroponynie:

l,itérationdelaqualificationquenousavonssouLenue

n,aurait rien apporté à cette tentative de lire les contes de

1,intérieurpourdécrirelamarrièredontlaformationdes

anthroponymes est mise en fonctionnement si nous n'avi'ons pas

ramené notre description au niveau de I',énonciat'ion narrative'

Page 201: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

452

Avouons à présent que 1'ét,ude de 1'anthroponymie n'est

qu'un prétexte. Pour faire valoir son impact, sur notre

démarche, i1 sufflt, de rappeler que par 1es fonctions de 1a

motivation, nous sommes arrivé à mettre 1e doigt sur 1es

fonctions mnémotechniques d,:rrt 1es Lraces sont inscrites dans

les récits auxquels 1'énonciatlon narrative sert de filtre. La

caractéristique de ce filtre est, en giros, 1'ensembie des

opérations de condensation / expansiorr et d'écarts dont nous

avons parlé. Par cette caractéristique, 1a prépondérânce de 1a

motivation dans 1'arrthroponymie accorde au conte sa capaciié

de se construire par "un exLraordinaire" dans 1a langue

relativement au nom propre du registre social. Par cet,re même

caractéristique s'inscrit 1e merveilleux dans Ies réc:-ts pa:'

"1'étrangeté" (1e non ordinarre) des anthroponymes. Ce qui rerrd

étranges ces anthroponymes motivés est justement, le falt, que

Ie corrte utilise des unités de langue, dorrt 1'une des f orrctions

dans 1a construction anthroponymique, est d'autoriser 1a

désiguation en 1'augmenlarrt par 1e procédé de mise en discours

quri tient son originalité de la spécificité de 1'énonciat,ion

narrative. Cette nise en discours suppose en effet que darrs

L'anthroponymie, i1 y a une signification postulée comme

articulée au processus de 1'organisatiorr narrati-ve et

discursive sous-jacente au récit et, manifestée par des traitsmcdaux caractérisant 1e sujet représerrLé par 1e personnage

porteur de 1'anthroponyme mot,ivé.

Ut: derrrier dét,ai1: 1'éventail de

consLruction des anthroponymes motivés

contraintes des règles que nous n'avons

possibilités de

se soumet aux

pas suffisamment

Page 202: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

453

développées du poi-nt. de vue syntaxique et dont 1'effet est de

marquer 1'écart par rapport au registre social. Si 1a

rnot.ivaticn ne dépend pas de I'anthroponymie dans un conte, i1

revierrt à 1'analyse de rechercher ce procédé darr.s d'auLres

motifs.

Notre proposition en utilisant 1'énorrciation narrative

responsable de 1a constructicn cl'un conte par les propres

moyens qu'iI offre à son récitant r à en croire 1'u.u111téune

cpératoire , s'ouvre quand même sur /question embarrassante: s'i1

est fondamerrtal de terri-r compte de 1'aspect externe ar-l sujet

de cette énonciation, sur quelles traces peut-on se fonder ilour

en parler ? Nous avorls parié de Ia motivation, de f intérêc d'.t

nctif. eL des configurations discursives de manière généra1e,

darrs 1es pro jets d'étude du corrte sous cet arrgle; mais, âu

fond r comment saisi-r ces traces ré-rélatrices de cetLe

énonclation ?

Ces traces ne peuvent, err tous cas, être relatlves à Llii

processus de création irrdiviCuelle dans 1e sens d'une

assomption sub3ective; dès j-ors, cetie éviderrce oriente 1a

saisie de ces traces vers 1'ensemble des efieLs décLencheurs

de 1a discursivisation cie te11e sorte que seuLs les effets

rrb j ectivement f onctionnels tlans le sens où ils ne dépendeni pas

dn su jet, peuverlt êt,re considérés. Pouvons-rlcus | à présent,

dire de manière concrète guels sont ces effets ?

Que11e que soit notre réponse -rlous ne nolls faisorrs pas

tf il1r-rsions- e11e sera cliscutable, et pour éviter de donner des

fragmenLs de réponse sarrs utilité pour 1'analyse du conte pour

peu que nous sachions que, déjà, le terme "conte", du point de

Page 203: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

^ËÀ

vue de sa définition, ne fait pas 1'unanimité de tous, i1

serait préférable de reprendre 1'utilisation de 1'énonciation

narrative pour 1a situer par rapport à une autre énonciation

que nous appelierons commullicative, La première est externe au

sujet; 1a seconcie esL interrre au sujet. L'exemple qui peut nous

servir à distiuguer ces deux formes d'énorrciation esL à juste

t,itre ceLui de 1'écart que nous avons relevé dans 1a motivation

de 1'anthroporrymie. C'est de cet écart que sera déduite 1a

ciouble esquisse définitoire des facteurs dont dépend 1a

constrr:ction d'un corrte. Ces facteurs dépendent d'un sujet

indivlduel appe]é à tort, à notre avis, "conteur" et d'un aulre

sujei qui ne se eonfond pas avec Ie premier pulsqu'j.1 est 1e

dont nous avons déjà parlé et qui oriente 1e sens de ia

narration par 1es traces mêmes qui sont communiquées

iinguistiquement à travers tout registre à retenir selon ce que

Il0US pourr]-ons appeler " corlstrult" et " compo sânLe

construcLri'ce " . Le conLeur sera alors celui qu1 aura su

conjuguer errtre soll statut de sujet-récit,at:t <iont i1 ne peut

user pour prétendre à '1 'assomption de son dire et 1e I1 sera

conÇu comne garant du vrai du corrte. Est, conteur darrs ce serrs

celui qui sait, faire "cohabiter" sôn Je au I1 selon La juste

expression de laisser parler Ie 11 à travers le Je en tant qlle

" corps-parlant" ; d'or-l 1a nécessité , nous semble-t- iJ-, de

défiriir li-mHajya/ sous cet, angle de 1'énonciation nerralive

pour pouvolr appréhender 1es mécanismes de son langage. L'acte

de produire ull conte est, à ce ttiveau, soumis à des modalités

conditionnant 1a réalisation et de I'acte de récit,er et de

1'acte de mettre en fotrctionnement La langue de tel1e sorte que

Page 204: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

455

cet acte vise des objets à communiquer déjà soumis à des

colditiorrs cle commullicatiorr; d'où 1'énonciation interne

( communicative ) et l-'énonciation exLerne ( narrative ) au sui et

de 1'érroriciatiou ou conte '

Page 205: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

456

CHÀPTTRE ÏI

/aHaii/, /aeaweô/ {ber: lrcontaqei', rëcitation}

D'une capacité d'exprimer des pensées, 1e conte utilise

des techniques certes, mais qul ne peuvent être ramenées à

LeurS seules formeS narratives. En se laissant "imprégner" par

Ie conte et ses techniques,11 est aisé de se rendre compte que

1'utilisation de Ia langue par 1e sujet est, comme nous 1'avon§

dit, soumise à un contrat énonclatlf.

On sait que 1e récit-conte est de prime abord "objectivé",

1es traces énonciatives qui apparaissent, entre autresi danS

les formules inaugurales en t'émoignent' En outre, les

situations d'énonciation sont particulièrement caractérisées

par un embrayage partiel portant sur une certaine forme

d'il1usion dans 1e Sens où le Je apparaLt comme s'i1 étalt

utilisé pour être mis en rel-ation avec 1'énonciateur à

proprement parler, lieu d'assomption de

récit,.

1a profération du

Or, 1e conte falt, usage d'une fonction narrative qui est

1a sienne et qui utilise ce récltant-énonciateur selon un

contrat, un jeu déterminé par f imaginaire.

Page 206: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

45'7

ce contrat tient ses modalit.és d'un code qui permet au

récit,ant de "saisir 7a fiction à distance du rée7"t' C'est

dire que Ie récitant ne Se préoccupe pas du "vrai" de ce dont

i1 dit gu'i1 ne correspond pas à Ia réa1ité selon 1'une des

formules finales:

/ )i-L merr temna ,f ri-t iu j Duru Lielwa men temma iv hiya d-dub !f

hiya d-dub Hetta wel1a kul-Ji kdub/ (ar: je suis revenu de ià-

bas; j 'avais acheté avec deux Duru des bonbons qui se sont mis

à foncire jusqu'à ce que tout soit devenu mensonger (irréel)).

/kdub/ (ar: mensonges ) est l-a négat.ion de 1a tentative rie

projeter une réa1it,é sur l',histoire du récit. I1 Y a ià un

procédé de "déguisement" du vrai en fictif qui rejoint aisérnent

1a transposition du contenu du conte par 1e jeu atlégorique de

son langage en histoire dont les fails et 1es événements eu

sens littéra1 de leur déroulement, sont /kdub/ ( mensongers ) .

Toute 1'ambiguit,é réside dans 1a mise en forme allégorique du

récit et " La couverture figurative" 2 ptopt* au conte en tant

que significat,ion qui "habite" aussi bien 1e récltant que

1'auditeur.

11 semble gue le conte oral , tollt comine 1',écrit

d'ailIeurs, Pose des guestions sur 1'émergence des indices et

des traces de 1'énonciation énoncée, non paS en tant que traceS

visées pour clist,inguer entre 1'orai et 1'écrit, mais en tant

que question sur 1'énonciatiorr de façon globale '

1

1989,

2

cit. ,

M. MATHIEU-COLASp. 391

A. J. GREIMAS,p. 208.

, "Récit et vérité", Poétique No a^

op.Sémiotique et sçiences sociales,

Page 207: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

^ co

Cette question se pose pour décrire comment Le conte oral

produit des contenus et commerrt 1a pensée externe à I'individu

récitanL tout en l'habitant -rappelons qu'ii n'en est pas 1e

paraphe- 1e "domestique" selon une conduite, une croyance/ une

ad.hésion au socio*cultureI représenté comme univers dans 1e,1

conte. A peine 1e Je est-iL inst,allé dans Le discours qu'il-

cède la place à la voix qui parle à travers lui. Cett.e

opération marque 1e récit dès son J-nauguration: 1'embrayage

initial- n'a d'autres f onctiorrs que celIe d'embrali er 1e récii

]ui -même 1.

Plus explicite et même conforme eux sitr:ations de

communicat,ion d'un conte, esL 1e cas où i'embrayage énoncia'L:-f

inar:gure le récit par /gal- 1*k... / (ar), /yenna-ÿ;.... i (ber):

i1 t'a clit, où s'installe Ie Je en ce sens que 1a reiation

d'inter-subjectlvité y est repérab1e; mais 1e pius importani

y est 1a manif estat.ion du I1, su jet du dj-t.: 1e dit, est, ici ce

qui rend possible -puisque pré*existant- 1a récitation; de

même, le f1 étant 1e rée1 sujet du dit, sera du même coup 1e

su jell de ce que Je récite. C'est-à-dire qu'âu Je et au I1 son-L

att,ribuées des positions qui 1es distinguent au même ti-tre que

" 1e maltre" et son "disciple dé1êgué" .

A partir de 1à, nous comprenons que 1e sujet qui se dlt

Je dans /Hajit-k.../, formule courante pour inaugurer L1n conte,

n'a pas d'identité de sujet au sens propre du terme quand nous

1e meltons en rapporl avec Ie 11 dont iI dét.ient le dit. C'est

dans ce rapport que le récit "s'object,ive" que11e que soit la

1 Pour plus de détai1s voir J. COURTES, Analvse sémiotiquedu discours, de 1'énoncé à 1'énoncj-ation, op. ciL. pp. 255-259.

ffil$,1ffirI]x1ffiî{lâÏ{iiiiili:lil.j:i';liilmi1ii.;j,.i1.i-..iî]iffiiï$i.lfiff'].M

Page 208: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

459

dans ce rapport, que 1e récit. "s'objective" quel1e que soit 1a

position que 1e Je tient, dans 1e conte ora1. D'ai-11eurs, nous

pensons qu'i1 suffit que ce Je tente de ne pas respect,er 1e

cont.rat énonclatif qui Ie rattache au I1 pour que son produit

cesse d'être un conLe populaire oral. C'esL aussi sous ce

rapport que 1e conte sera vu comme p esl ILvrai. Au cas où une

substitutlon du I1 par 1e Je se réa1isait, 1e vrai seraitsoumis à 1'évaluation, en un mot, à une révision.

Cette mise au polnt nous amène à attribuer au f1 Ia

position de "sujet narratif" destinateur du conte; au Je, ce11e

rle "sujet discursif" qul est en fait, un destinataire du conte

qu'i1 met en discours. Par ces rôIes assumés comme tels, 1a

sit,uati-on de cornmunication ne se confond nullemenl avec 1e

procès d'énonciation du conte populaire ora1, Le Je est utiilsé

selon un jeu d'enjeux énonciatifs comme destlnataire avant

d'être récitant du conte i 1e conte se manifeste sous forme de

réclt où Ie Il et le t,emps se maintj-ennent. Le Je est dès lors

une trace illusoire signifiée par 1'embrayage partiel-.

L'analyse est ainsi invitée à déceIer Ie jeu de f illusion

dans 1'énonciatlon narrative et 1e faire slgnifier au niveau

des invest.issemenls sémantiques de tout ce qui est mis en

fonctionnement dans 1e conte. Nous rejoignons 1cl certains

aspects que nous avons déjà rencontrés; en t,ous les cas, 1e

statut du Je Iu1 est accordé part,iculièrement, en vertu de

1'autorité du conte que nous symbolisons par IL. Cette autorité

du conte provient, nous'semble-t-i1, de cette corrélation (Je

/ Tl-), clont 1e contrat énonciatif pose 1es règles ci-dessus, pour

réaliser un pouvoir sur 1e récitant par 1e savoir qu'i1 détlent

Page 209: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

450

et communique en tant que pensée représent,ée dans son unlvers.

Alnsi, 1e récltant est, plus que n'importe quel sujet, parlant,

un sujet qui écoute ce qu'i1 récite, qui "s,écoute" en lenant

compte de 1a voix du ï1 qui le traverse, cie f intention de

cette voix qui guide la sienne de *re11e sorte qu'en f in de

compte, 1es deux voi:< n'en f assent gu'une seu1e, ce1le rlr: IL.

ceci dépend particulièrement des procédés de constructlon du

récit tel que le cont.e 1'enseigne par des procériés

mnémotechniques de mise en discours.

La particularlté dans tette énonciation narratlve réside

dans 1a forme de "crlstallisation' d'att.ltudes dcn.L Ies

fondements chez les récltants sonL 1e souvenir qui parl-e à

travers le Je, 1e souvenir d'une parole et non construction de

paroles st,imulées par des faits dont Le supporl_ de

réactualisation est vécu par ce Je récilant ou dont 1es Lrace-q

seraient. prétextes de reconstructlon d'un discours qu..i" peut,

être dit, pris en charge et produit, au sens de créer, par cet

énonciateur.

Dans cet,te perspective, 1e conte est en quelque sorte 1e

s{)uvenir d'un discours (ou de discours) sui construit un récildé j à dit et dé j à profêré r si , dans 1a formule inaugurale

/Ha j it,-k, . . / , le verbe /Ha3a/ est à 1'accompli, i1 conlaminera

aussi bien cerui qul énonce Ia formule inaugurant son récit, que

celui qui reçoit eL écoute en attendant, gue 1e récit soiiracont,é 1.

1 À défaut d'un"contamination" pour1'assomption, du point

terme plus adéquat, nous utilisonsessayer de montrer que par Iui

de vue de celui qui énonce Ia formule,(suite... )

ïi{ffi

Page 210: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

461

En ef f et,, 1es part,enaires du récit dit /nHa jya/ ,

s'enracinent dans 1'univers du conLe: 1e temps de 1'énonciation

commun j-cative , quand i I e st rat,taché à ce 1ui qui se raconte ,

marque selon un procédé d'embrayagre dans les formules

inaugurales et conclusives d'une façon qénérale r une

"bifurcation" dans le rapport corrélatif entre le Je et, le 11 i

i1 margue aussi un rapport de dépendance ou, du moins,

d'intégrat,ion (con jonctive) du Je dans 1e I1 selon au molns deux

voies:

1. ce11e des formules inaugurales dont 1'effet consiste

à ret,enir un Je du paradigme constituarrt un actant collectif

représenté par des récitant,s dont chacun se reconnait sous

1'autorité du IL. Ici, c'est 1e conte proprement di

s'annonce comme production non signée ou, si L'on peut

}a signature y est ceIle du fL;

2. ce11e des formules conclusives où 1'actant indivldt:eI

prend place relativement à lui-même en tant que récitant d'urr,e

version et non du conte i cette place est déterminée par

1'énonciation de certains énoncés tels que celui que nous avons

déjà citét /ii1. men temma /rit. juj Duru Helwa men tenna !r

hiya daun w hiya daul Hetta wella kul-/i kdub/.

/kdub/, qui est une évaluatlon qui rejoint, cel1e posslble

à faire à propos du fictif, porte évidemment sur le langage du

1(...su1te)est négative dans 1e sens où e11e lndique 1a position dansIaquelle se reconnaLt 1e récit,ant relativement à I1; cetteposition sera alors dlte négat,ive par rapport, à 1'autorité duI1. Cette position est reconnue (reconnaissance) comne tellepar 1e destinataire-audlt,eur du récit sous forne d'une entente,d'une complicit,é , d'un contrat, impliclt,es entre 1espartenalres du rëcit.

t gL1

dire

Page 211: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

462

conte en t,ant qu'histoire dont les fait,s, guand ils sont soumls

à 1'appréciation du sujet énonciateur, seront dits ftctifs.Concernant ce polnt,, nous pourrions saisir 1a formule

comme jugement assuré par 1e terme /kdubl, cofime si c'ét,ait.

i'acte d'une conscience dét,erminée par des condit ions qui l_a

font surgir. Ces condit,ions peuvent être résumées sel-on deux

cas de figures:

1. 1e premier re1ève du "gustatif" , manlfesté par

"bonbons" ,Cans 1e sens de "sucrerie" l,/lj,ei-wa/), qui est

infailliblement ce qui assure 1e caractère irrésistible du

conte ( 1e pouvolr ) au sens que C . Lévi-St rauss donne à

1'expression d'intention structuraliste;2. 1e second re1ève de "1a véridict,ion" assurée par /kdubi

et assurnée par 1e Je après avoir été pris au piège des

sucreries dont i1 a payé le prix (deux Duru) sans les avoj-r

consommées, c'est-à-dire sans Les avoir "prises en charge "

exactement, comne i1 ne peut prendre en charge, prendre à son

compter 1e récit, chose annoncée dé j à dans 1a formule

inaugurale. Ainsi, 1es bonbons achetés et non consomrnés sont,

nous semble-t.-i1, une allégorie de "1'aventure" réa1isée dans

un espace-t,emps qui se raconte indépendamment du récitant. Plus

exactement, si 1e réciLant est, impliqué dans 1'espace-temps du

conte, 11 ne 1'est que le Lemps de la narration; une fois que

ce temps-espace est "vécu" par 1ui, i1 débraye pour réaliserune espèce de retour vers 1e Je-Ici-Maintenanü (cf. je suis

revenu de 1à-bas ) , 1'unique cadre dans lequeI la prise de

conscience pour juger produit, son effet.

Page 212: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

463

Ces opérations rejoignent aisément, nous semble-t-i1, des

univers de "rêves": nous imaginons que 1'espace-temps du rêve

ne se soumet pas à une conscience; seul 1e révei1, le retour

de "Là-bas" (1e conte,1e rêve) permet, de faire intervenir ia

part.ie actlve qui juge en s'appropriant, 1e je, sinon dans

1'espace-temps du conte, cette part,ie active se retirep.rovisoirement, pour céder 1a place à 1a partie passive que nous

ne saurons dénommer sans provoquer des malentendusl.

Arrêtons-nous un moment sur " 1à-bas" : 1'activit,ésubjective' se réduit, à " je suis revenu de 1à-bas" et ia

construction d'une pensée voit. 1e j our par 1 'énonc j-ation <ie

cette formule. Cette pensée devient fixée par 1'espace dit, cians

/men temma/ par opposition à "ici" et par 1e temps dit dans

/bekril , /qadim z-zamanl (ar) , /zik/ (ber) : autref ois, jaciis,

par opposition àomaintenant". L'ici-maintenant de 1'énonclatlon

proprement' dite convoque 1'appropriat.ion du Je par 1e récitant,

qui précise les conditions qui lui permettent 1a réal-isation

d'une transformation (passage du récit, au discours). "Le retour

de ià-bas" est narraÈivement ce qui explique 1e débrayage

énonciatif et /kdub / sera assumé dans ce cadre qui est en fait

f illusion du pouvoir-se prononcer en termes de jugement: ên

aucun cas, ce jugement ne peut lnÈervenir dans 1'un des moments

de 1a narration du conte. Le contrat énonciatj-f s'explique

ainsi par Ie fait que s'iI est accept,é par les partenaires du

1 Notre point de vue ne porte pas sur une comparaison duconte au rêvei c'est par souci d'éclaircissement que nous avonsrecouru à ce rapprochement, probablement, discutable, pourdlstlnguer entre " 7a conscience juqeante" , que nous empruntonsà E. Husserl, dans 1a formule concluslve et. I'évictlon de toutjugement, lorsque Ie Je est en rapport avec le 11.

Page 213: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

464

conte, implicitement t,oute appréciatlon sera réf ut,ée ; ce n'estqu'au moment où /1-mHa)ya/ est dite 1ntégralement que 1e droitde se retirer de son espace-temps esL accordé au récitant,.

Dans cette optieuê, i1 devienL assez clair que 1e conte

est un produit, où deux fornes d'énonciat,ion sont à pi'endre en

considératlon. A présent, qu'iL nous est possible d'en parierfranchement, nous alrons Les formuler en nous appuyant sur 1a

distinction suivante:

,1. 1'une est narrative: "1à*bas - autrefois" rêfère à

univers construit, dans 1e conte par un sujet. collect,if qL!i

se confond pas avec 1e réeitant-énonciateur individr:e1;

2, 1'autre est communlcative: "ici-maintenant,,' réfère

un

ne

un univers qui n'est pas celul du conle; il s'agit de l,espace-

t,emps cù se const,ruit 1e retour et où s'achève 1'aventure ou

le voyage.

Dans cetLe aventure, euêlque part 1'adhésion à un certainrée1 par 1e récltant est posslble à reconstruire à travers "1e

devenir" (cf. /we11a/ dans "... et devint mensonger, irrée1).L'ut,ilisation du devenlr suppose une transformation d'un rée1-

vrai du conte, {ui dure 1e temps de l_a narratl-on, en un

"irrée1-mensonger" qui se greffe sur 1e retour du récitant, à

sa réarité selon une énonciation qul tient de f ident,lté par

1'appropriation du Je pour juger.

Par ce double mouvement du sujet, indivlduel énonciateur

du conle, 1a modalit.é du derienir explique 1e phénomène de

f illusion du rée1 et celui de la véridiction: le rée1 est

1'effet de f illusion du voyage dans 1'espace-temps du conte;

le retour modarisera ce réel en le niant, pour lui faire céder

Page 214: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

466

partlcullère car, d'une part, cet, énonciateur ne peut prétendre

au pouvoir prendre siège dans 1'ambiguité qul définit 1e conte

par son temps de narration et les effet,s illusoires du rêe1 el

du fictlf qui sous-tendent ses fonctions langaglères et

1'aLLusif de son langage; d'auLre part, Puisque 1'énonciateur

individuel se confond avec Ie récitant selon des cocrdonnées

spat,io-temporelles de 1'énonciat,ion proprement dite, i1 I1'y a

d'autre moyen pour l-ui que celul d'opérer pâr un

embrayage/débrayage énonclat,if qui 1'évacue de toute prise en

charge du conte proprement dit. Ainsi, 1a nature même du conte

exige que la description du point de vue de 1'énonciaLion ( 1es

plans d'énorrclation ) distingue nettement entre 1'énonciation

communicati-ve et L'énonciation narrative.

Les quelques remarques que nous avons fait.es sr-ir Les

formules inauçiurales et conclusives c1tées, montrenL que

1'engagemerr! du suj et fait valoir son rapport à un obi et

ciétermlné. Cet objet s€ reconstruit selon 1'évaluation par

1'acte d'appréciation. Ceci nous amène à considérer 1e fait que

1'usage dans Ie conte semble élaborer un libre j eu de

f imaginaire; 1'atteinte du plus haut degré de ce ieu est Ia

fiction. Toutefois, on saiL aussi que 1'usage dans 1e conte est

1'l1Iusion en ce sens qu'i1 dit vrai- en usant du fictif et que

le paraphe du fict,if est ce vrai lndépendant de toute instance

lndivldue1le. C'est dans ce jeu subtile et relati':ement

"sournois" que réside 1e conLrat énonciat,if quj- tient compte

de 1'apparente tiberté d'user du fictlf saisissable à distance

du rée1, êt de f immanence selon un niveau profond du plan

Page 215: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

46s

1a place à un autre rée1 qui sera I'effet de conjonction du

récitant, avec f ici-maintenant. Àinsi, 1'énonciation narratlve

consiste essent,iellemenl à installer 1e "1à-bas - autrefols"qui dénigre toute appropriation du Je.

Ces quelques remarques rejoignent une autre condition de

narratiorr des contes r poirrt, n'esL besoin de rappeler ce que

personner parni 1es habitués de / 1-mHa )yat /1 n' iEnore

(/1-mHajya/ est proférée 1e soir et uniquement 1e scir). Le

rée1,, en tant qu'effet du conte, dépend étroitenent de ce t,emps

de narration r ce temps dont dépend 1a communication rlu conte,

est en soi dé j à ce qui éclalre 1'aspect du fictif des

événements du rêci-t quand iIs sont soumls à 1'évaluatlon. Par

ce temps, 1e réel et Ie fictif se soumettent à une âppréhension

ambiguë dans 1e ses où i1s s'enchevêtrent et s'j"nter-

définlssent au même titre que 1e soir qui n'est ni jour ni

nuit. Le eonte n'est ainsi ni réel ni fictif; sêuls 1es angles

auxqueis i'énonciateur tenle de les ramener, privilégieroni

1'urr ou 1'autre par la profération même de "tout devint, irréeL

(mensonger) " après avoir été "rée1-vrai".

Ce qui demande plus de précisions est comment à cÔt,é de

1'énonciation narrative où "7'énanciateur n'a pas de place

assignée"1, 1a communication de /1-mHa iya/, êD tant

qu'énonciati-on , se maintient.

11 est évident, que cette place ne peut pas être réclamée

par un énonclateur dans Ie cadre d'une communication

1 "-L"s contes sont considérés conne récits proférés lorsde connunications Tangagiêres dans JesqueTles 1'énonciateur n'apas de place assignée" , voir D. REY-HULHA§, "Procèsd'énonciation des contes", Llttérature, No 45, L982, p. 36,

Page 216: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

467

isotope sur lequel se dérouIe Ie récit producteur

réflexion de 1a société qui pense sa propre cuIture1.

d'une

Dans Ie contrat énonciatif, i1 semble qu'i1 y a un double

code . L'apparente liberté d'user de f imaginaire- fict,if est

celle qui rend possible la prise en consldération de 1a voix

du récitant à tous Les niveaux même celul qui enrichit une

version donnée par des digressions ou, t,out, simpl-ement, par des

effor1:s de t,raduction à condition qu'i1s solent investis de

va] eurs qui vont darrs le sens du tissu conf iguratif du conie.

Ce qui vient, ci'être dlt libert,é sera ainsi soumis à une

contrainte , celle du "paraphe" comme <iimension rl'univers de

valeurs en tant que langage, objet d'une "assomption de 7a

cuJture et de 7'intégration de ]-'individu dans 1a société"2.

Nous y sommes: 1e code qui règ1e L'apparenie i:-berté

d'agir chez 1e réc j-tant du conte est celui de l-'énonciat:"on

narrative. Cette dernière pose, selon une hiérarchie, 1e

récitant comme sujet qui tire 1'enseignement du savoir-conter

d'un su j et qui est 1a somme de "co-énonciat,i-ons" particulières

et multiples, en plus des conditions nécessaires pour 1a

récitation d'un eonte (cf. par exemple, le terops pour conter,

1e soir ) . C'est, nous semble-t-i1 , sous ce rapport que 1a

Lransposition d'une sit,uat,ion de communication d'une lmHa jya/

en un jeu allégorique du conte, falt valoir 1'énonciat,ion

narrative, Ce rapport serait 1e résultat d'une conversion

toutes proportions gardées quant à L'utillsation de ce terme-

1-- A. J. GREfHAS, Sémlotique et sclences sociales, op. cit.p. 204.

2 (eentnasca cité par), Ibid. p. 208.

i]1i]lltwiiti:lê iL, fill,li .,,fl'ir,à. i,riil . 'r'ii " ;i]i{iiffiiT

Page 217: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

468

d'une forme d'énonciation en une autre selon deux plans int,er-

déflnlssables.

Ce qui nous semble assez osé dans f idée que nous venons

d'avaneer est 1e fait que nous appllquons 1a conversion aux

f ormes d'énonciation; ii serait plus exact d't-ttiliser 1e terme

de " convocation" des procédures énonci.aLives par 1e producteur-

énonciateur. A ce propos, devons-nous prévolr un nouveau palier

où 1e principe de 1a convocat,ion devrait tenir compte des deux

formes d'érronciat,ion dont nous avons parlé et, ensuite, décrlre

ia manière dont ils s'inter-définissent par une conversion

propre aux processus de génération ?

L'utilisaLion de "canvocation" per A. J. Greimas en

parlant de f instance de 1'énonciationl, peut nous aider à

préciser ce problème comportant, nous sembl-e-t--i1, une

ambiguité qui se trouve au coeur même du rapport qu'j.1 l'a

errtre 1'énonciat ion narrative et 1'énoneiation communicative ,

par 1a possibilité de considérer nos deux formes d'énonciation

comme sous-tendues par une forme conciliatrice par " un lien de

va-et-vient" entre 1a convocation d"'universaux séniotjques

r-tt,i7isés en discaurs" et de " structure,s généraTjsa,bl es Cans 7es

discours réaJisés"2.

Ce llen nous permet de mieux expliquer f inauguration et

Ia clôture des /mHajyat/ en ce sens gue 1'évaluation en t,ermes

rle /kdub./ apparait dans les f ormules f lnales dont 1'énonciation

est assumée par 1e récitant, qui déclare son identité par 1e

1

chose sA. J. GREIMAS,aux états d'âme

Sémiotique des passlons. Des états de, Seui1, Paris, 1991, pp. 9-13.

2 ruta. pp. Lt-Lz.

iiiffi'$$iitrliiffi i§$fiiiliIll§ffiffi Ærilri|,WilIIiM

Page 218: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

469

faire évaluateur, et non dans les inaugurales. La fonction de

celIes-c1 n'est pas d'émettre une appréciation mais de se

situer par rapport au rl par f intermédiaire de ilaccompli dans

/Hajit-k/, au de1à de 1'utilisation du verbe dans 1e sens d,e

/ eawed/ (ar r réclt.er ) ,

Nous voyons bien que les formules inaugurales

conclusives ne rendent pas compte d'une même représent,atlon

f ident,ité du su jet récitant,, raison pour laquelJ.e i1 Êous

fallu tenir compte de nos deux plans d'énonciation.

A préserrt, êt à 1a suite de cette mise au point sur Le

lien ent,re 1es formes d'énonciat,ion dans /i-mËfaiya/, i1 seraitrentable d'esquisser un projet d'étude orienté ver§

1'r:t.ilisation des modalités, êD 1'occurrence ce1le du croirepuisqu'i1 s'agit, bien cle cela lorsqu'on parle de véridictionl,

et

de

a

1 En fait, nous retiendrionsclépart, qui éclaire partiellement laici , sinon " -1,e,5 f ornes djscursj yeséviclemment pas être réduites au sesous 1'angle du croire ; voir J. -C.suiet, T. !, op. cit. p. 163 et s.

le croire pour un point dequestion qui nous intéressede 7'évaJuation" ne peuvent,ul examen de 1a vérldlctlonCOQU§T, Le dlscours et son

Page 219: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

470

Énonc lation

/1-mHajya/ =

communicative

/kdub/ :

cro]-re récuser

/1-mHa)ya/ = vrâi-rée1: objectivitéÉnonclation narrat,ive

V

: (i1-1à-bas*autrefols )

Le eonteur et 1'audlteur

Ce sur quoi nous voudrions mettre 1'accent à travers ce

carré, est Ia manière dont se réalise f inscrlptlon de

1'énonclateur (informateur) dans ce qui est proféré par luitout en ne dépendant pas de lui. cette inscription se sounet

à une condltion d'absence d'assomption de ce que 1e ditvéhicule par Ia formule lnaugurale. Rapperons que /Ha)L-t/ est

à 1'accompli et que 1'acte de narration proprement dlte n,estpas entamé. on penserait blen çlue Ie récitant se soit raconté

Ie conte bien avant de se nettre en relatlon de communlcation

subject,lvité du récitant( je-ici-maintenant,)

I

I

I

I

embrayage / débrayage

Page 220: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

477

avec le Tu ( /Haj it-k/ ) . ce cadre d'énonciation apparemnent

surprenant, est dt à une forme de déguisement assuré par 1e

lien enLre 1'énonclation narrative et cerle communicati';e.

Ret,errons f i.dée gue 1e su j et récitant ( inf ormateur ) est

un "reiais" de transmission du conte: singrularité et en même

temps pluralité sont à 1'crigine de cette transmission qui

exige que l'accompli soit utilisé dans /HajiL-k/, cecl semble

assurer 1e déguisement comme si 1e récit,ant vouLait,

s'approprier 1a voix p1urie11e.

Selon ce déguisement, 1e Tn auqrlel semble s'adresJ:er 1e

récitant est moins un partenaire "dialogal" nu'un é1ément de

1'actant coLlectifr f inter-subjectivit,é apparente n'esl pag

ie propre ciu partenariat en sit,uation de communlcation; c'est-à-dire, 1e Je et ie Tu ne sont pas tout à fait uni.s par leurs

rô1es de destinateur et desti.nataire dans une situat,ion de

commurricat.ion; il-s sont unis par 1e conte et au conte dans 1e

sens où leurs rô1es respectifs sont dét,erminés par 1e conte.

ce point peut expriquer partiellement 1e lien dont nous venons

de parler entre 1'énonciation narrative et 1'énonciation

communicative.

De ce 1ien, nous pourrions retenir 1a possibilité de voirdans 1e conte une parole intériorlsée: reÇue eL avant d'êtretransmise, e11e serait d'abord monologuée; 1e conte n'est alorspas "parole de dialogue" ou, d'une autre manière, sa

Lransmission consiste à faire parler un réciLant eui, tout en

parlant, sait qu'on parle à travers lui. La parole individuelleest un "événement" occasionnel qui n'est pas détermlnant au

sens strict du terme pour l'énonclatlon narrative. Par contre,

W

Page 221: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

celle-cl est

occaslonnelle.

472

détermlnante pour parole -événement1a

une sémantique adéquate de /r-mHajyar-/ devrait, compteLenu de ces considérations, sê sit.uer à un niveau quiappréhende 1e langage part,icur.ier du conte comme

hypot,hét,lquement "carrulâble" relativement, à r,énonciationrrarrative où f intentlonnalit.é est 1o{n d, être cerle d,unesituat,ion de communication ordinalre.

du conte

sur 1e plan de Ia mise en discours, l,effet de l,embrayage/ débrayage semble permettre au récitant de s,approprier 1e

pouvoir du conte. ce pouvoir se fait, signifier pârr entr:eautres, Ia manifestation de 1'accompl1 dans le verbe de 1a

formule inaugurale, dont, 1a valeur, dirions-nous, esë

surprenânte. Par cet accompli, 1'énonclateur-réclt.ant prend non

seulement, conscience de son identité mais ra rapport,e et racléclare. cet,te déclaratlon devient, à notre sen§, une ,, fonctiondu discours"1 qui mërlte d,être questlonnée.

Donnons quelques détairs sur 1a communication de 1,une des

versions du c16 comme exemple de sltuat,ions contextuelres

98.1 P. RTCOEUR, La métaphore vive, Seu11, paris, 1975, p.

Page 222: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

473

courantes dans la recherche de terraln en vue d,élaborer un

corpus. cet,te version a été recueillie par une enquêteusel

dont 1e prérrom esL Hayat. Lors de sa récitation, r,informatricea inauguré son récit. par /Hajit-k a Hayat. a bent-ii (ar: je

t'ai conté, Hayat ma fi11e); f interpellation de 1,enquêteuse

par son prénorn importe bien dans 1e cadre sit,uationnel de l_a

communication du récit, or, à prendre au sérleux cetleinterpellation, on dlrait gu"'un schéma" de communlcat,ion

s'irrstaure pour faire assumer, d'un point de vue êncnciatif,1'ob jeL r:ommuniqué à 1'lnf ormatrice et à 1, enquêteuse.

Toutefois, dès que 1e récit (1'histoire) èst. entafré , ce n,es!plus "Hayat ma fi1le" qui est repris par l'informatrice.curi"eusement, cette <ierrrière , chaque f ois qu'e11e dcnne

f impression ci'utiliser ra fonction phatique pour réclamer en

pri:rcipe i'at.tention de 1'auditrice-enquêteuse, dit, / a sidi/.Le paracloxe est qu'aucun /sid/ (aucun homme) n'a pârticipé à

cette séance de narration; / a sldi / n' a plus la fonctionprêsunée puisqu'en tous les cas, 11 est ét,ranger au contexte

de L 'errquête . A ce niveau, i1 nous semble qu'un " éclatement,'

se rÉarise dans 1e sens où 1'absent, est rendu présent;

1'activité de narration assurée par ilinf ormat,rice f ait appel-

à un absent, L'infornatrice a alors réalisé une inaugurationde 1'objet à communiquer dans re cadre d'un "schéma" qui ne

correspond pas à celui de 1a communication dans 1e contextepropre au rapport inf ormat,rice / enquêt,euse. Àutrement dit,

1 n. Yousrr, Recueil de contes. Transcrlption, traductionet annotations, mémoire de licence, ( dactylographié ) , Facurtédes Let,tres et des sciences Humaines d'oujda, 19g0-1991.

Page 223: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

474

f informatrice refuse volontaireme.nt -peut - e11e faire

autrement?- de réduire 1'objet qu'e11e communique (1'histoire

du récit) à un obiet communicable uniquement à son

interLocutrice. Le pouvoir du conte se Sit,ue donc au dessus de

loute morlal- it,é qui inscrit f irrf ormatrice et I 'enquêteuse cians

Ies posit.ions de sujets individuels partenaires du conte: c0

dernier véhicule ce que ni 1'une ni 1'autre n'assume à un

niveau d'énonciat ion narrative .

ceci dit, i} y a quand même dans 1'enquête cetle situajl j.6n

de communicatlon dorrt ii faut tenlr compte. En fait, si 1e ie

place en face de lul Ie Tu dans ie contexte situationnel de

narration, C'eSt esSentiellement pour s'a§Surer u.]1

accompagnement c,ù les rô1es de chacun sont une projeclion dans

I'instance qui exerce son pouvoir aussi bien sur 1e Je que sur

ie Tu. Cett,e i-nstance serait, le conte 1ui-même. La hiêrarchie

des placeS proPose alors une SOrte d't'axiologie " sous l"es

effets d'un champ modal où le conte est défini par le pouvoir.

qui s'exerce §ur seS partenaires. dès que 1e contrat énonciat'if

,lont nous avons parlé, est en quelque sorté mis en marche.

La communication de /1-mHajya/ est ainsi construite en

posanL 1es partenaires comme sirnple§ accompagnateurs de 1'un

pour 1'autre. L'informateur qui Se dit Je dans Ies formules

inaugurales et conclusives n'Y est que pour re-dire (/y'eawed/)

quelque chose dont il a été lui-même destlnataire. De ce fait,

avant de dire Jê, i1 se voit destinataire du discours qu'i1

rapporte, raison poul 1aque11e 1t falt signifier 1e Je qu'i1

s'approprie en évlnçant 1a représentation par 1e prénom de son

interlocuteur (ou interlocutrice, voir 1'exemple ci-dessus de

Page 224: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

1'enquêteuse ) : au prénom, 11

êt, par là même, i1 déclare

dépositaire esl Ie fL sous le

vrai.

475

substit,ue /sidi/ externe-absent,

qu'i1 rapporte un obSet dont }erapport duquel le conte est diL

Dans cette perspective, l' activi-té de narration et de

réception d'un conte est soumise à des règ1es lssues de

f instance externe aux partenalres. Le 'schéma" de

communication d'un conte est en quelque sorte "doub1é" par lesrléterminations de la structure modale qul dote 1es partenaires

c1e rô1es dont 1es statuts sont définls par f instance qu_.,_

détient 1e pouvoir.

Résumons; 1. La communication du cont,e pose un cadre idéa1

où l-e Je et le Tu prennent, place;

2. toutefois, c'est par I'itlnéraire du souvenir rendr:

présent par 1a parole exploratrice d'effets référentiels à

1 'univers de valeurs du conte que cette première relat ion

s'avère non assumée par le Je et 1e Tu dont le mérile, si 1'on

peut dire, n'est pas à proprement parler primordlaJ. pour 1a

"transmlssibilité" des messages du conLe.

Ceci peut sembler cont,radictoire. En effet, comment peut-

on con'5idérer que 1e partenariat dans 1a communication du conÈe

est " secorrda j-re" si 1'on tient compte du f air- que 1e conte

appauvrit modalement, son énonciat,eur individuel ? Rapperons à

ce propos gue 1e contrat énonciatif se base sur, entre autres,cette condit,ion car 1e vrai du cont,e ne peut, être prétendument

pris en charge par les partenaires de 1a communication;

ajout,ons que 1e conLe ne gère pas des affaires personnelles.

Page 225: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

476

L'opération d'embrayage I débrayâgê, te1le que nous en

avons parlé, est un lieu qui assure au Je un rôIe de médiateurià I'égard clu réclt; le Je y est un représentânt qui se met en i

scèrre d'inauguralion pour se donner une naissance -dans un i

ciiscours qui n'est pas Ie sien- qui est en e1le-même une fin.Ceci se réaIj-se de manière explicit,e dans 1es formules

inauguralesr /gal L-k/ (ar) ou /yenna-k/ (ber): i1 t,'a dit,; 1e

ie se met en rapport avec Ie 11, lieu d'assomption du conte qui

accorde à ce Jê, en vertu de son autorité, 1e statut qul luiest réservé.

De façon généra1e , i1 semble que 1e récitânt d'une

/mlla )ya/ n'assume de f onction représentative de conteur eür:

s'i1 active son rô1e comme étant capable de 1e faire"coincider" avec celui du I1.

D'une certaine manière, 1e récitant, serait porieur d'un

"masque" qui aspire à une position de conteur. L'énonclation

du eonte réside alors dans cette tentative de réaliser une

"coiRcidence" où f image est doublée dans 1a mesure où

f individualité se détruitl.r', profit, de 1'adhésion au IL. Le

conte, eu tant quê genre, ramène alors les partenaires de sa

narration à une structure visée par le stat,ut, qu'il leur

att,ribue. Le jeu consiste ici à produire une corrélation entre

les partenaires du conte et 1e Il, Derrière 1'apparente inter-

sub j'ectlvité, se cache le I1 ob ject,ivant, 1es propos du Je reçus

pâr Tu.

1 c. LÉvI-sTRAU§s, La voie- des massues, À. Sklra, col1"Les sentiers de la créatior1", Genève, L975, p. 88.

Page 226: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

477

CHÂPTTRE ïïT

ÉIIO§CIÀTTO§ ET LISIBTLITE DE /1-NHAiVA/

L'analyse des /mHajyat/ ne peut pas être indiffêrente à

1a notion de "représentation"l que nous utiliserons pour voir

comment exploiter L'acquis selon lequeI sans énonclation, i1

n'y a pas cie lisibilité possible du produit.

Situons nos propos au niveau de la compétence sans

1aque11e 1'assise de 1a narration d'un conle pâr des

récilat,ions dont 1e nombre dépend de celul des récitant,s

énonciateurs, ne peut se réa1iser.

Orr sait egê, d'un cÔté, les récitations sont e1les-mêmes

ce qui présuppose ehez chaque sujet récitant uRe compétenee qui

est 1a sienne et {uê, d'un autre côté, Puisque toutes les

récitatlons sont des reproductions de réclts, ces compétences

se résumeraierrt en une seu1e. CommenL alors une même compétence

d'un sujet énonciateur du conte serait-e11e relativemenL

iderrtique à ce11es de tous 1es récit,ants et comment plusieurs

t " L^ représentation insinue -de nanière pTus ou noinsexplicit,e- que 7e Tangage aurait pour fonctian d'être lâ â 7apiace d'autre chose, de représenter une "réalité" autre.", A.J. GREIMAS et J. COURTES, op. clt. art. "Représentatlon".

Page 227: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

478

compétences individuelles recouvrent-e1res une seu1e, cerre

c1'un act,ant collectif ? 1

Selon un point de vue initial, nous pouvons poser gu'un

conte a du sens et que ce sens est susceptible d'être formuré

par plusieurs réalisations discursives. or, pour peu que noLls

prenions les choses de manière assez superficielle, 1l s'avère

que ces réalisat,ions discursives ne seralent nullement tenues

cl'utiliser des technlques d'expression êtroitenent, semblables.

Sans entrer dans des dét,ails de définit,ion du terme

" thème " gue nous allons utiliser / nous supposons qu'ur1 t,htime

au sens courant, peut être dit de plusieurs manières rlans l-e

sens même où, dans 1a langue mise en discours, 1'énünciateur

effectue urr choix d'organisation de son discours seLon un styieclonné, pour y inscri-re ses propres apports et point,s de vue

persorrnels.

De tout ceIa, nous ne pouvons rien retenir de si personnel

clans 1a thématisation lorsqu'il s'agit de ,r1-mlla jyat / ear si1a compétence ét.ait indivi.duelLe quant à ta mise en

fonctionnement, de 1a langue pour produire /1-mHa)ya/, 1e sens

résiderait dans un "contenu représentatif". Or, on sait que 1a

production du sens dans 1e conte n'est pas une mince affairelaissée aux soirrs d'un utilisateur improvisateur. conter exige

que 1es récitants d'un conte forment une collection dotée d'une

compétence commune à tous ses récitants. Le commun dans cettecompétence joue à tous les niveaux de mj-se en discours; 1a

{' Ibid. art. "actanL collectif"

Page 228: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

479

compétence en question est, en soi déjà, ce qui détermine

l'appartenance au même paradlgme constitutif de 1a collection.Par cette compét,ence, 1e conte comporte des régularités

qui 1e font produire pour des fins sémant.iques particulières.c'est bien de cela qu'i1 s'agissait lorsque nous nous étions

rerrdu compte que certaj-ns phénomènes de motivat,ion ne

dépendaient pas d'un sujet énonciateur indivlduel. c'estvraisemblablement aussi ce pour quoi nous avons dlt que 1a

référentiallté intra-text,uel1e est, un facteur important dans

1a narration du conte. Même darrs les cas où i1 semblalt que le

choix de certaines unit,és substituées à d'auires dans des

configurations discursives, dépendait d'une certaine 11berté

des lnformateurs, s'avère illusoire puisque, pâr laprototyplcalité, 1a récupératiorr de ces unit,és dans ie sens où

e11es assurenL une même couverture figurative, va de soi.Ceci nous amène à penser qu'une sémantique de /1-mHalyati

clevralL tenir compte des régularités dans les procédés de mise

en discours où se réf1échit, I'énonciation narrative par 1e lienqu'elle entreti.ent avec i'énonciation communicative. I1 ne

s'agit pas seulement d'une forme à enregistrer mais de ioute

1.à compétence présupposée par 1e produit dont 1es "consignes"

sont dictées par les traits définitoires que nous avons eu

1'occasion de traiter (cf. notre deuxième partie).

Citons par exemple 1'une des caractéristiques de

/1-mHajyaL/ à travers des détournements que les dégulsements

réalisent, pour senslbiliser 1'énonciateur du conte à 1a notion

de valeurr la beauté (cf.C1: lalIa est une lune) est mise en

valeur par rapport à "e1Ie s'est dégulsée en chlenne"; de même,

Page 229: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

480

1a monstruosité (cf. C2: 1'ogresse torturait mHend rhemrn) par

rapport à "celte femme est be1Le".

Cet exemple indlque ]'intérêt de la "convocation" au

rriveau de L'énonciation d'un conte ciont, les part-enaires sont

préparés à une sorte rle conceptualisation pour pouvoir réciterLrne /mHa)ya/. Tous Les ef f ets t.)rl,miques par exerûp1e, sont, sous-

tendus par cet,te conceptr.:alisation sous f orme de retournement,s

qui organlsent "1es dif f érerrces". La narration, /a1aji/ , esil

ainsi soumise à un savoir pédagogique et méthodique qui assure

urr j eu de relations teLles que ra beauté ei 1a l-ardeur, 1a

beautê de la laideur et 1a lai-deur de Ia beauté1.

urre chose est, nous semble-t-i1, certaine r i'énr:nciaticnindlque des traces possibles à exploiter d'un po1nt, de ÿue

sémantique; ces traces se rapportent à ces présomptj-cns

d'isotople selon 1'expression de I'. Rasti_er: par exemple , iabeauté quaJ-ifiant. te1 acteur, s'avère laideur; 1a fcrceprésumée comme trait de tel autre acteur (1'ogresse i s'avè.re

faiblesse devant " La petitesse" de /mqide//. Nous pourricns

mulliplier 1es exemples dans ce sens eL ce qui restera vaiable

tcmme poirrt commun est 1a posslbiLit.é de reconstruire par une

ét,ude de f intérieur des contes, un processus de

conceptualisation qui agit au nj.veau cognitif lors de

1 "L" beauté de 1a laideur" pose deux observateurs selondeux cas: 1a laideur attribuée à 1a chienne (cf. c1) dont. seuL1e héros connaÎt 1'être (une be11e femme); en dehors du héros,cetle beauté est investie dans une autre chienne (cf. 1'un desj eunes du village est victime de 1a laideur, âu plus hautdegré, d'une chlenne). On peut aisément reLrouver dans CZ uncas semblable à celui-ci: 1'ogresse est dlte be1le par 1es gensciu village (beaut,é de 1a laideur, de 1a monstruoslté ) dans 1esens où ce paraLtre est trompeur.

ffi''

Page 230: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

481

réceptions des contes à f instar des effets de 1a référence

intra-textuelle: ce que renvoie comme inage la laideur d'une

chiennel est une autre qui s'y reflète tôut en s'y opposant

(1a beauté d'une femme en 1'occurrence /lunja/ dans C1).De

même, f image qui renvoie }e ma1 attribué à 1'ogresse, est 1a

vengeance par /mqLdef / i au pouvôiT présumé j.rréversible chez

le prince dans C10 , répondra }e devoir - se soumettre à La

prohibition de f inceste.

Cet,te autre image qui "se contemple" dans 1a première, est

une réalisation inspirée de son corollaire dans Le texte. Cette

opération de transformation d'un contenu en un autre, est

assurée par un devenir selon un procèS auquel se greffe

1'acquisition d'un savoir su1' 1a mani.ère dont 1e conte est

construit (cf . compétence commune à tous les réc j-t,anis ) .

Grosso - modo , L'énonciation narrative esl âffaire de

1'acquisition d'un savoir dont use Ie récitant pour produire

1es /mtiajyat/; ce savoir est ce qui caractérise celui qui donne

1-'impressiOn d'être auteur d'Un conte. Le cOnteur eSt, enfin,

Celui-1à même qui est capable de produire (eL non seul-ement

réciter) un réeit, dont on ne peut, dire "ceci n'est pas un

Conte" Car, d'Une manière OU d'Une autre, On repère à tous ses

niveaux une construction à f inage de ce1le des contes

exisLants. Le récitant, dans ce Casf n'eSt pas forcément un

conteur: réciter, en tant, qu'acte,/a€awed/ , n'étant pas sous-

1 Le terme " ch j-enne " eSt ut111Sé comme motif (VOit Iaconfiguration à 1a fin du C1)probablement parce qu'i1 est,paral.t-i1, d'un usage courant particulièrement dans 1e sens ducontexte suivant: le mari, s'adressant à sa femme, utilise ceterme dans un sens de compliment.

Page 231: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

482

tendu par une compétence du sujet collectif, même si le produit

est dit, /mHa)ya/, n'est pas conter (cf. /aHaii/),Conter serait

une performance qui présuppose un savoir qui porte sur les

mécanismes de mise en discours et non, comme nous 1'avons déjà

dit, sur ia récitation à 1a suite d'un apprenLlssage. Nous

sommes loirr des discours rapportés comme 1e laisse entendre 1a

f ormule inaugurale / gai I-k/ , /yerrna-k/. Ce qui f ait devneurer

la compéterrce de 1'actant collectif réside dans 'l es canevas les

plus apLes à maintenir 1e commun ,et ies ressemblances entre les

versions d'un conte et entre des contes différents. C'est

cl'ai11eurs dans ce sens que 1'énonciation d'une version n'estqu'une "co-énonciation" et une "énonciation-écho" de celle qui

ne se réa1ise jamais comme étant, "1a perfect,ion" de toutes;

cette dernière échappe au connaissable et est archét,ypa1e. Le

fait que des versions distinct,es à un niveau de saisie

superficielle réclament leur parenté à un conte, réside dans

leur mise en discours au nlveau de 1'énonciat,ion.

Nous arrivons enfin à mettre 1e doigt sur 1e point.

suivant: aussi élolgnées qu'e11es puissent être en tant que

virtualités, 1es unités lexicales utilisées comme figures dans

des parcours comparables par leur organisation syntactico-

sémantique, sofit toujours susceptibles d'être ramenées à un

consensus sémarrtique que régit 1e llen entre 1'énonciation

narrative et communicative. Ceci ne veut pas dire qu'on peut

uLiliser n'importe quel1e unité à la place d'une autre par Ie

seul princlpe d'invest.issement pris en charge par 1e récitant.

La parenté sémantique entre unités subst,it,uables les unes aux

auÈres dans des parcours d'un conte, suppose que quels que

Page 232: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

483

soient les plans d'analyse auxquels

ramenées, ils sont isotopes par Ia

sous-jacente à ces unités.

ces unités peuvent êt,re

prot,otypicalité qul est

Ces cas de subst,itution sont relativement courants dans

les contes. Cit,ons quelques exemplesr dans 1'une des versions

de C34, Ie mari après acquisitlon des pommes et des bâtonnets,

se met en rouLe pour rentrer chez lui,; sur son chemin, i1

rencontre un mendiant à qui 11 offre 1a moitlé d'une pomme;

ensuite, i1 se fait attaquer par pn chien et, pour se défendre,

i1 utilise 1'un des bâtonnets qui se casse en deux. L'autre

version n'utilise pas 1e mendiant; elle se contenLe de racontei

que Ie mari, manipulé par la gourmandise, finil par mangÊr Ia

moitié d'urre pommei ensuite, iI se fait attaquer par u! serpent

et pour se défendre il utilise 1'un des bâtonnets qui se casse

en deux.

Nous voyons bien gu'au mendiant se substitue 1a

gourmandi-se et qu'au chien se substitue le serpent.

Apparemrnent, Ies deux versions semblent tenir compte de figures

manifestées par des lexèmes différents. Or, pour traiter la

configuration, i1 faut tenir compte du niveau selon lequel il-,<tt!ne s'agit pas d'une question de lexiceip#té mais

d'j-nvestlsBements sémantiques quels que soient les supports

lexicaux.

A ce niveau, Ies moyens lexicaux sont des prot,otypes qui

assurent, un investissement particulier en ce sens que toutes

1es versions que nous avons recueillles retiennent 1e résultat:

la moit,ié de la pomme et 1a moit,ié du bâtonnet se mettent en

rapport avec 1a naissance d'un /mqlde// (nain, pygmée) et Ia

Page 233: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

484

nalssance d'un poulain qui fait, à peine 1a moitié d'un poulain

normal,

Nous devrions peut-être prendre un autre exemple que nous

consldérons c6mme "marginal" dans 1a mesure où nous 1'avons

relevé en urre seule occurrence dans une seule version dtl C36.

Cet, effort de traduction qui a produit la figure de /tirifun/

(t.é1éphone) est surprenant dans 1e conte, et pourtant, notre

version raconte que 1e moyen (1'adjuvant) utilisé pour

mairrtenir 1e contact entre 1a fi1le (1'héroine) et sa mère est

un téléphone. I1 se trouve que les versions que nous avons

recueillles ut,ilisent toutes /1-menGaz/ (ar: alguilLon pour 1es

ânes) qui est mis sous 1es bâis par Ia mère afin que sa fi11e

s'en serve pour demarrder son secours chaque fois que /i"-eebda/

Lente de 1'obliger à descendre oe l'âne pour 1ui céder La

place. La prototypicalité as§ure icl 1a fonction des

instruments (/1-menGaz/ eT- 1e té1éphone) dans La configuration.

Dans ce sens, i1 apparalt que 1es efforts de traductlon

de manière généra1e, sont tout à fait possibles sl leur

utilisation est soumise à 1'organi-sation synt,actico-sémantique

de leur contexte configuratif. Toutefois, i1 est peut-êt.re

exact que ces efforts vi-dent erI quelque Sorte 1es figureS de

certains traits culturels (anthropologiques?) dans 1a mesure

où /}-menGaz/ par exemple, est porteur d'un quelque chose

culture1, mais rlen non plus ne nous dit, gue 1e téléphone ne

Sera pas investi de ce quelque chose culturel qui serait en

train de se constituer. Pour que cetLe Constitution soit'

possible, i1 suffit que 1e té1éphone reçoive un investissement

prévisible qui soit à peu près identique à celui de /L-men?az/.

Page 234: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

ir

485

De toutes les manières, 1'énonciateur-utllisat,eur de cet

instrument a une position ldentique à celIe de celui qul ",se

contente de constater au Tieu d'asserter rée77enent"L €L, par

1à même, sorr effort de traductiorr ne Lul retire rien du fait

que c'esL un " Locuteur I qui ] abandonne voTontairenent ,sa voix

et en enprunte üne autre pour proférer un segnent de la paroTe

qui ne Lui appartient pas en propre , qu'i1 ne fait gÜe

citer"2.

Les efforts de traduction sont "présidés" pa:

1'énonciation du conte qui ne -slexerce . pas i.1" manière d'une

démonstration dans 1e sens où eIle n'est pas quêteuse en vue

cl'être créatrice d'un Sens à donner au conte puisque ce sens

est , en fait,, dé j à 1à ; sinon , de deux choses 1'une: si 1a

clémonstration est, parf aitement, externe au récltant, 1e produi-t

aUra 1e titre de verSion d'un conte; danS Ie ces Contraire, 'ls

"CeCj- n'eSt paS Un C6nte" SUrgira immédiatenenL COmIne

Évaluation sur 1e produit,.

Autant dire que /aHaj1/ n'utilise pas 1es efforts de

traduct.ion pou\ en faire des indicateut"3 qu'une observation

hâtive saislrait pour les faire signifier comme traces d'une

subjectivit,é, Les investissements sémantiques forment un

l-angage alluslf que fait valoir ]e I1 face aux partenaires de

1a communication des versions. Une certaine coincidence entre

1 D. MATNGUENEAU, Approche de 1'énonciation enlirrquistlque f ranÇaisê, Hachette, Paris, 1981, p. 55.

2 A. J. GRErMÀs, Du sens, op. clÈ. p. 309.

3 Voir entre autresr H. PARRET, "Lâ mise entant que déictisaLlon et modalisatlon", Lansaqespp. 86-87.

discours enNo 70, 1983,

Page 235: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

uratio

486

re culturel que construit le conte cL ce à quoi ce dernieraspire en tant que const,ructeur d'une éthlque, s,avère assez

fac11e à étudler pourvu qu'i1 soit. possibre d,admettre que 1es

représentations socio-culture11es sont construites conforménent

au principe du recours aux formes de 1'énonciat,ion narrativeet communicative dont les ressorts de conditionnement de

production des versions dépendent du ï1.

une approche comparative entre verslons de contes

clifférents qui vise Ia manière dont le mariage est représenté

dans un dispositif d'ensemblel peut nous alder à éclairercertains points sur 1'énonciation. Notre object,lf n,est pas

tout à fait de faire une analyse des séquences du marlage ni.

même d'étudier les représentations du mariage dans le conte

car, au fond, nou§ aurions pu prendre d'autres exemples sans

que 1e choix détourne en quolque ce soit L'object,if du travair.Pour ce faire, nous essaierons de voir comment, des

représentations socio*cu1ture1les sur I'union, sont dites dans

un langage géré par une confrontation de sens transposés à du

sens dont les ressorts au rriveau de 1a mise en discours,présupposent I,instance énonciat,rice. cecl rejoint, à quelques

1' Prenonsdans 1e corpss:

comme point de départ les verslons présentéesC1, C2 et C3.

Page 236: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

487

égards ce que nous avons déjà traité en termes de relation

ternaire: (D, S, 0 ) .

Cette relatiorr, avions-Ilous dit, a I'avantage de spécif ier

la hié::archie du destinateur par rapport au su j et1, ce dont, l-e

CXÔ rend ccmpte de manière claire: 1e Cestinateur y*uptesenté

par 1'autorité des règ1es socio*cu1lurel1es dans 1a mesure où

1e mariage où les liens de parenté Sont excessivement proches

pour se réaliser entre sujets concernés, est prohlbé2. Face à

ce mariage prohibé, i1 semble que ceLui qui est aussi

errdogamique3 mais entre concernés à peine éloignés quant à

leur lien de parenté, esL :ugé comme mariage préféré: C'esl

justement celui dont 1e C1 construit 1'hisloire, Enfin, si ie

premier mariage est prohlbé, celul où 1es liens de parenté scnt

complèt,ement absents (exogamie) est jugé possible. Par contre,

celui que caractérise 1'excès dans 1e sens de 1'absence totaie

au plus haut degré, du trait humain des concernés, s'avère

inefficace et, inadmissible (cf. C2); par conséquent., ce mariage

peut être rapproché du premier dans le sens où 1'excès que ce

soil dans le lien de parenté (cf.C10) ou dans 1'absence au plus

haut degré du trai.t humain entre concernés (cf . C2) , orierrte

1'union vers la prohibition. Quelques distinctions sont

! "C'est par rapport à D que 7'actant 5 se déternine",J.-C. COQUET, Le discours eL son suiet, T. L, op. cit. p. 49.

2 'ILa prohibition de 7'incesteJ, universeTTenenL présentesj 7'on s'en tient, à son expression négraËive, constitue (... )une forne (, . ,) indispensable pour que devienne à 7a faispossibJe et nécessaire 7'articulation de groupes bioTogiquesdans un réseau d'échanges qui 7es net en comnunication", C.LÉVT-STRAUSS, Le reqard éloiqné, Plon, Paris, 1983, p. 196.

3 ruia p. 135

Page 237: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

488

possibles à faire dans la comparaison de ces deux mariages;

ceci dit., l',orientation générale comme effet de 1a mise en

hist,oire des deux unions, indique qu'iI y a lieu de relever des

expressions négatives qui les caractérisent"

Nous voyons bien que le conte pose sous le rapport du IL

1es posslbilité§ virtuelles du mariage e-L propose sous fr:rme

d'éthique des évaluations sur chacune de ceS possj'bi1ités' Ces

évaluatj"ons sont alors à mettre §ur 1e compte du destinateur

qui garantit I'organisation structurelle de 1a société par un

système de parerrté, de f iliat'ion et d'a11iance '

Selon C. Lévi-Strauss dans Les structures é1émenÈai-res de

1a parenté, le mariage fonctionne comne moyen de communiquer

enLre membres d'une communauté et entre communautés distinctes'

I1 a aussi pour f onction d'éviter 1a const,ilut,ion d'un univers

clos qui va à 1'enconlre du système social1. Ces fonctions

sont construites dans les récits comme représentalions dont les

modalités de réalisations sont nettenenL précisées comme

éthlque pour articuler enlre 1e socio-cuiturel eL les contes

dans 1e sens déjà cit,é de " réf Texion f igurat,ive de 7a société

qui pense sa Propre cu7ture"2 quu voyalt A' J' Greimas i1 y a

déjà près de vingt ans.

Limitons-nous à un point de départ, celui du mariage dans

C10, démesuré culturellemenL et, prohibé'

1 voitafricaine s ,

2 n. J.p.204.

D. ZAHAN, Rellqion, spiritualité e-t pensée2e éd. PaYot, Paris, 1980, PP. 20-2L'

GREIMAS, Sémiotique et sciences sociales, op' cit'

Page 238: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

489

Dans ce conLe , toutes versions confondues , 1'héroine

réaIise une dlsjonction avec 1'espace des slens pour êt,re à

1'abri du désir de son frère. Cet état dont 1a source

transformatrice est 1a décislon du frère sous 1e serment

cl'épouser ceIle à qui appartient 1e cheveu qui empêche L'eau

de couler, propose un jeu moda1. D'un côté,1e conte fait. en

quelque sorte parler ce qui empêche chacun de dire ce que

personne ne peut direr "1a possibllité" t,héorlque du nariage

dit incestueux bien que nous en soyons tous 1e produit, de

1'autre, i1 rétablitr en niant cette "possibllité'i ce à quoi

chacun adhère, à savoir 1a prohibition de f inceste en l-ui

substituant d'autres t,ypes de mariage, notamment celul qui

s'apparente au premier ( cf. 1'endogamique dans C1 ) .

Dans C10, rrous pouvons préciser que 1e j eu est cie nature

conflictuelle représentée par la mise en scène du prince et de

sa soeur seLonr

1. devoir-faire (ou ne pas pouvolr ne pas faire): "je jure

d'épouser ce1le à qui ce cheveu appartient". A ce serment qui

prend pour lémoin 1'honneur en tant que eode facile à repérer

dans d'autres contes t,e1s que C1, doit en principe correspondre

un acte qul t,ient eompte de 1'engagement modalisé par ce

serment (devoir épouser /nlma/). Or, si cet acte se réalisait,

i1 s'agirait de la remise en cause de la valeur socio-

cultureller une violation de Ia Lol interdisant ce marlage.

Dans ce cadre, 1'histoire semble aller droit, vers une "impasse"

où Ie conte sous Ie rapport du IL intervient pour orienter 1e

devenir des protagonlstes en 1e ramenant vers 1'autorité du

clestinateur modalisé par Ie pouvoir suprême. I1 s'avère qu'à

Page 239: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

490

ce niveau, 1'énonciation convoque 1a volx de la Raison dans 1e

sens où la consLruct,ion du réclt ne tlent pas compte de

f implication du sermenL individuer même s'i1 émane d, un

prirrce. c'est la logique du rL qui rendra nulle f implicationbasée sur la parole incliviciuelle sous prétexte du serment.

cette corrvocat,ion, au niveau de i'énonciation, sê eharge

justement, de falre valoir la voix du TL; le Je n'a aucun droi.tà 1a parole eL s'i1 err a un au moment où i1 est conforme à

celui ciu rL, f illusion que 1'assomptlon 1ui est due estparfaitemenL significatlve dans le sens

foncièrement, f1ltrée par la voix du IL.

où elle est

2, Devoir ne pâs falre (devoir ne pâs épouser sa soeur):ce mariage est, avions-nous dit, posé comme possibilitédiscursive où 1a trace de 1'énonclation énoncée, Jê / estrelevable comme susceptlble d'être appropriée pour que 1e sujetprétende à 1'union avec 1a fille au cheveu qui empêche 1'eau

de couler. cette possibilité est comme censurée par 1e TI", que

convoque 1'érronciation du conte et dont 1a trace est relativeà 1'éthique qui se pose comme destinateur irréversible. c'esiainsi que f identité du sujet lndividuer revient, sur "le un et

1e Tout"t, en somme, sur 1e IL;et quel que solt 1,arrangenentprévu pour résoudre le probrème rle f impasse par ra relationconflietuelle dans C10, i1 sera toujours issu de déterminations

extérieures au sujet individuel. cet arrangeaent, se présente

dans notre conte de 1a manière suivanLe:

1 L'ldé" a été formulée en ces mêmes termes (le Un et 1eTout,) par A. Khatibi en évoquant 1a notion d'ident,ité dans Lamémolre tatouée, Denoê1, corl. 1o-18, paris, tg7g, lors d'uneentrevue qu'iI nous a accordée à 1'EHESS en 19g3.

Page 240: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

r

\

49\

mariage incestueux

- Prohibltion: devolr ne pas faire

Je:

ReLation

hiérarchique:

D

s

- Annulation ("an-rru1-ation")

disjonction spatiale: /nima/

village et se met en corrj

haut, d'un arbre (le sommet d'

du serment

quitte 1e

onction avec 1e

1une montagne ) *

L'irréversibilité du destinateur apparal,t comme Loi qui

léqlfère de mani.ère à ce que 1e mariage incestueux ne se

produise pas êt, aussi, de manière à ce que " Ia pièce de

rechange " solt proposée: l' interdiction est réso1ue par l-a

permissivité du mariage exogamique. Si nous regardons de près

1e récit,, nous assisterons à une structure organisatrice de ses

séquences. Faisons urre lecture à rebours:

1. troisième séquence: S3 (roi promenêur): 32 n S3 (o'

mariage ) et maintien du lien de parenté enLre 51 et 52;

2, cleuxième séquence r S2 t /nima/ ) : devoir-f alre -p

disjonction spatiale / devoir ne pas faire > annulation du

se rmenL ;

3. première séquence: S1 (prince): devoir*faire (= serment)

/ devoir ne pas f alre (= prohibit,ion de l'inceste).

1 Noton" "Ie haut" commenler 1a valeur at,tribuable àépouser une soeur.

trait signiflant 1'éIévat,lon pourl'espace "royaume" par Ie voulolr-

Page 241: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

492

Le conte est résumé du point de vue narr,atlf par latranstormation du contenu correspondant à la séquence lnlt,ialeau contenu correspondant à 1a séquence finale. A t, lnterdict,iondarrs notre corrte, §'oppose 1a permissivit,é indiquée dans 1a

t,ransformation comme conception sur 1a représentation du

rnariage posslble. Le conte est ainsi résumé de sorte que toutesses versions alent ce fonds commun. Àussi , r, énonciat.ion

communicative se trouve d'ores et déjà programnée de manière

à ce gu'il y ait comme convocation cerle qui porte sur ce qui

se rapporte au champ modar dont, 1e f11tre des artlculat,ions eËt

cerui de 1'énonciation narrative. tes déterminatlons par re TL,

êxternes au sujet. de 1'énonciation par 1e Je et 1e st,atut du

clest,inat,eur dont, 1e pouvoir dans 1a relat,ion ternaire sltue 1e

sujet dans une posltlon où i1 doit se soumettre à laprohibit,ion de f inceste, montrent que 1e récit,ant dispose

d'une compétence qul 1ui est communiquée de 1'extérieur pour

orient,er sa performance. Dans ce cas, nous voyons que par cett,e

performance, i1 y a attribution au sujet d,un rô1e

"fonct.ionne1". D'ai1leurs, les apparentes contradictions dont

1'univers des contes fait usage pour unir entre séparés (cf.notre deuxième partie), peuvent constituer un témoignage sur

1a f onetlonnarlté des récit,ant,s. Dans ce même ordre d, idées,

d'un point de vue narrat,if, ra disjonction spatiaLe dans Iaséquence qui raconte que /nima/ quitt,e son virlage vers un

ail1eurs, est jugée conforme à ce qu'ir falrait fai-re, étantdonné que 1a valeur socio-cult,urerle relat,ive au nari.age, est

renlse en cause par 1e frère. cett,e disjonction spatiare est

Page 242: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

493

prlse dans C11 comme contenu dont Ia vieille Se Sert pour

humilier le jeune homme et remettre en cause son honneur.

En somme, dans c10, 1a disjonction §patiale est jugée

positivement au profit de 1a valeur de 1a prohibition de

f irrceste2; danS Cl-, e11e eSt jugée négativement parce que

Leila ne se trouve pas 1à où elie devait être (son milieu

natal). De cette disjonction qui présenle deux cas différemment

jugés, 1'univers du conte produit, une représentation issue de

deux types de mariage: par }e premier, 1e conte fait signifier

" 7'ef f et. d'instinct, destiné à prévenir -Zes unions

biologiquenent nocives entre proches parenÛ,5" 3, par 1e second,

i1 dénorrce 1e premier en ce sens que 1e second "e,st protecteur

à 7a façon d'une arnure"4.

Ces remarque§ montrent que 1e conte propose un univers où

f interdit eL 1e pelmis Sont nettement tracés comme codes

responsables de 1a mise en récits du mariage. La Raison qui

gouverne/ en produisant ces codes, Se confOnd avec 1e

rlestinateur de 1a relation ternaire; du même coup, i1 devient

l Voir particulièrement 1a figure de f insulte /aryaz/;/ lukan all/ t,tuGa ô aryaz lukan yelli-s e€emmi-K ur 0eIli GerlGwal O thwal/ (ber: si tu étai§ un homme ta cousine ne seraitpas chez les ogres ) .

2 " Pr, 7a prohibit,ion de 7'inceste s'exprinent ets'acconplissent 7es structures fondanentaTes sur TesqueT-les sefonde 7a société humaine conme te77e", voir S. de BEAUVOIR,"L'être et 1a parenté", Maqazine littéraire, N" 233, 1985, p'36.

3 c.1969, p.

4 c.Voir aussiGalllmard,

LEVT-STRAUSS,11ËIJJ r

LÉVI-STRÀUSSG. DUMEZÏL,Pari.s, L977

Le totémisme Sruiourd'hui , PUF, Paris,

, La voie des

, P. 96

masques,

Page 243: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

494

clair que 1es affaires de mariages ne sont pas laissées aux

soins de f individu, leur mise en réclt, dépend du IL qul les

organise comme représentations socio*culture1les selon:

l.fariages jugés rrocif s, interdit.s {rappor"[ du I],)t-*--..=**

a

mariage enciogamique

démesuré, incestueux

(C{*, séq. initlale )

mar].age exogamlque

rron déme surê

(C-'10, séq. finale )

marr"age exogam].que

démesuré, inefficace

(c2 )

mariage endogamique

ncn c1émesuré, nûn incestueuz

/^1 \(u.t))

mariages jugés posltifs (rapport du IL)

En gros, toutes les séquences du mariage peuvènt être

ramenées à 1'un ou à 1'autre des cas indlQtlés dans ce carré.

Indépendamment des versions particulières, poLtr que 1e motif

du mari.age soit ut.iLisé dans 1a configuration, 1e récitani doit

se référer à 1'une ou à 1'autre des articulations errtre, d'une

part, 1'endogamie et I'exogamie êt, d'autre part, I'endogamie

démesurée et 1'exogamie démesurée.

Par ces articulations, iI nous est pos§ible de préciser

comment le conte produit par nombre de verslons des hist.oires

Page 244: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

495

cie mariage. Ces articulations comportent une sorte d'aspect qui

va du t,otalement démesuré au partlellement, démesuré aussi bien

pour 1'endoqamie que pour 1'exogamie. Àppelons -faute de mieux-

"AeSUre" 1e trait SouS*iacent aU mari-age danS SeS diver§e§

actualisations dans 1es réciLs. Part,ant de ce t::ait, i1 est

possible de résumer les représentations offerte§ par notrê

corpus:

endog. total. démesurée /ni-ma / et son f rère (C{O)

endog. pârt déme surée / \"Lia/ et son cousin (C1 )

2 , exog . t,otal . déme surée 1e serpent, et la filLe (C26)

exog. part. démesurée 1'ogre et 1a fil1e ( C23 )

1'hom. et ia fi11e du

génie (c22j

L'endogamie et 1'exogamie mises en rapport par 1e

totalement VS partiellenent rlêmesuré, nous amènent à t'railer

1'autre volet selon 1e totalement VS partiellement mesuré, ce

rlont 1e carré suivant peut rendre compter

Page 245: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

-

-496

mariage s

lnte rdits

car nocifs (

II

Ll

"l)

non -démesur

, c22, C23

)

I

L

\

Ia démesure

c2 , c40

1a mesure

C ( séq. finalel

1a

ut

drf;t

rru[lr

la non- mesure

c2, c26

Faisonsquelquesremarques.Contrairementànotreculture,

nous savons que d'autres rejettent Ia permissivité de

1'endogamie qui rr'est pas totalement démesurée (non-démesure

clanslecarré,Cf.C1).ol,dansl,universdenoscontes,"L,humanisation" (cf. notre deuxième partie) rend possible Ie

mariage clu descendant de I, ogresse avec la fiIle dans c23 et

celui de l'homme avee la fille du génle dans c22' Tenant comPte

de ces rnarlages possibles selon nos contes, nous voyons que Ia

permissivlté de 1'endogamie non démesurée a une raison d'être

représentée conme t,e11e du point de vue culturel. SeIon ee

point,devue,llsemblequenotreculturet,ientcomptedusens

del,humanisatlonparlemariagequ,ilsolt,endogamlqueou

exogamique.Cesen§del,humani§attonnes,accomplitpaspar

I'lnceste et SOn équivalent dans Ie sens contraire de l',excès

Page 246: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

49'7

dans l',absence du trait. humain entre concernés. Pour que ce

dernier cas propose ta possibilité d'un mariage, i1 faut que

l,un des concernés soit humanisé pour se conloindre au même

t.rait (humain) de son partenaire. Dans ce sens, l',endogamie non

démesurée se range rians 1e tirpe des mariaEes non interdj-t's

conformément à ce facteur de constitr-rtj-on da 1a société humaine

tell-e gu'e1le est représentée cuiturellement dans 1es conLes '

De ces remarques nous Ietiendrons "'la Ieçon" qui porte

principatement sur l',aspect qui concerne 1a démesure qui va à

1'eticontre des structures sur lesquell-es se f onde l-a société

humaine (cf , p. 4g3 , note 2) clans l-e sens où iouL marlage

caractéri-sé par 1a démesure §'avère i-nef f icacel.

La permissivit,é et I'interdiclion, une fois esquissées

ccmme moclal-ement porLeuses sur deS parcourS où 'La ihélnatisarj-on

retient 1e mariage , supposeiit un autre volet d'anaiyse ;

I 'humanisation e st , syntaxiquement parlant , une c'rndltiOn qt-ti

permet 1a réalisation du mariage. une s'uructure de passage en

termes de transf ormations doit être é1r-icidée à ce niveau '

En effet, l, énonCiateur du Cont,e, pour faire valoir 1a

réaLisation du mariage dans l-'histoire qu'i1 raconte, doii

procéder en tenant compte de cette ccndition pour que La

représentation soit consLruite conformêmerrt à 1a Règ1e donL le

garant est 1e IL. Celte concition est à 1a base de Ia

construction des histoires du mariage et acquiert, sur fe plan

1 Nous r:tilisons Le terme " inefficace" pour nuancerf interdiction car 1es mariages entre /mHend 1-hemm / eL

1'ogresse, entre 1e serperrt et ta fille sont réalisés dans les

"onius mais jugés inefficaces par leur échec dans l-es séquences

finales: f inefficacité impliquerait dans ce cas un effet quiconsiste à poser 1'échec comme ce qui iustifie I'interdiction'

ilmTfl',-qrtfr§ir

Page 247: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

498

heuristlque, une force dont dépend 1'horizon de 1a narration.

Cet horizon vient d'être tracé: i1 s'agit d'investir 1e mariage

dans Ies contextes configuratifs d'un effet représentant 1e

socio-cLtlture1, ensuite, de dét,erminer 1es statuts des acteurs

qui seront mis en scène. L'actorialisation exige que soit

convoqué un processus où les percours fi-guratifs seront en

mesure de sous-tendre une thémat.isation à l'image du vrai du

conte sous le rapport du IL.

En somme, nous pensons que 1es transformatj-onS dont I'état

firral est 1'union permise et que ce11es dont 1'ét.at final

rejoint f interdiction et/cu f inefficacité, peuvent être

étudiées au niveau de ce qu'e11es présupposent sur 1e plan

énonciatif et, qul programme leur mise en récits.

Les traces de cette programmation peuvent être relevées

dans 1e produi-t. Comme exemple pour prendre au sérieux 1a

possibilité de relever ces traces, prenons C1, toutes versions

COnfondUeS, qUi UtiliSe Une COmbinaison entre "1'eât1 ", "§e

laver,, et "cé1ébrer 1e mariage"l. Notcns que 1a figure de

1'eau est utilisée au moment où 1a fête a11ait être cé1ébrée

comme si e11e condit,i-onnait 1a cé1ébration de cette fête2.

Prenons 1'eau dans 1e sens où etie assurÈ l-e rôle de

1 Àvant que 1a fêt,e soit céIébrée, dit le conte, 1e jeunehomme <lemande à sa mère de préparer de 1'eau pour que 1achienne se lave (ou pour laver Ia chienne).

2 çuand une union se réalise dans les contesindépendamment de quelque condition, généralement e11e estprorisoirement rompue avant d'être déflniLivement rétab11e (cf.1a configurat,ion relevable dans, entre autles, C5; au monentoù /DDawya/ Pose ses pieds sur un t,apis -que les autres femmesdu roi avaient préparé spéclalement pour elIe- e11e Èombe dansun puits (dans un slIo) ).

,{w"

Page 248: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

499

purif icat,ion pour rendre possible Ie rlt,e, Ce sens permet de

faire une interprétation qui reloint Ie prlncipe de laprogrammation: sans 1'utilisation de 1'eau, 1e mariage lte peut

être cé1ébré.

Par ail1eurs, dans notre configurat,ion utilisatrice de 1a

figure de l'eau, le sujet représenté par 1e jeune homme

apparalt ccmme celui qui semble exiger cett.e purification comme

s'i1 assumait 1e rôIe de 1'autorité du rite. Or, cê point de

vue ne va pas dans le sens de ee que nous disions: toute valeur

socio-culture11e présuppose pour être dit,e valeur à strictement

parler urr destinateur qul assure au conte son vrai sous 1e

rapport du fL.

Pour surmonter ce problème, nous pouvons émettre

1'hypot,hèse suivante: 1e sujet représenté par Le hércs est

parfaitement irrtégré darrs 1e socio-culturel au point où i1 en

devient 1e porte-parole ou 1e dé1égué. La relation entre ce

sujet et 1e destinateur est, dès 1ors, une relation qui "vjse

( , . , ) un point, idéal où s'annuTeraient des forces

antagonistes"l selon S - D; mais, alors, pour que ce héros

entretienne cette relat,1on avec 1e destlnateur, i1 faut d'abord

qu'11 subisse une épreuve qui f initie à cette prét,ention.

Remontons dans Ie texte pour volr qu'effectivement ce héros

s' inscrit dans un . parcours dorrt I'ef f et. est 1'1ni'tiat,ion: un

aigle l'a avalé et s'est, ensuite, envolé...

L'é1évation à retenir dans 1a conjonction du héros avec

1'espace cé1este serviralt comme point de départ pour just.lfler

55.1 r. -c COQUET, Le discours et son. su'iet, T.1, op. cit. p.

Page 249: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

500

cette forme d' initlationl, sachant que 1e conte déveloPPe

toute une séquence qul raconte Ie retour du héros au village:

rappelons gue le père égorge un mouton Près de !-A-*Ui:ti-È-fg qui

repréSente généralemerrt 1e seuil du vi.11age. Tout un parcours

figuratif est à retel)ir ici pour lndiquer f initlation par

1aquel1e le héros est réintégré dans 1e vlilage ' A ces

conditions, i1 semble que 1e sujet, est en droit, de prétendre

à § = D. L'ensernble de ces considérations est résumé dans 1a

sé,quence finale: 1e héros n'a nullement besoin de se soumettre

à un destinateur en mesure de lul refuser la demande d'épouser

sa cousille. Àinsi, 1a nécessité pour i"ei1a de se purif ier par

1'eau, sembie se ratLacher au slatut. du héros selon § = D/ pour

permett,re 1a réalisation du marlage.

Prenons à présent le C'10. Si 1e mariage inces'Lueux ne s'y

réaIise pâs, c'est parce que 1e conte iait signif ie:: du poinl:

de vue discursif ceci: aucun des sujets représentés par /ninai

et par 1e frère, n'est initié. De même, si on admet que ie

héros dans C1 rêa1ise le mariage avec sa cousine, c'est parce

que ce héros eSt modalement caractérisé par sa prétention à

g = D2. La lransformation réalisatrice du mariage est une

"mutation" pér111euse sanctlonnée par 1e pouvoir de 1'acLant

irréversible.Récapitulons. Nous avons essayé de donner 1'exemple du

mariage pour éclairer f idée que 1',énonciaticn, comme plan

1 Volr notre thèse de 3e cyc1e, op. cit.2 Nous envisageons dans une étude ultérieure la

récupération de cette dinension du pouvoir en développantessentiellement une idée autour du pouvoir construit par 1e

héros dans Cl contrairement à celui du prlnce dans CrO.

r lli,,i ,il{l': :

jË,, r};i',iiriflTdiffi

Page 250: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

501

d'analyse du conte, est Ia convocation d'un substrat gue nous

avons rat,taché à f initlation et dont les manifestat,lons

discursives sont tout à fait comparables pour constituer une

corrfiguration discurslve . L'étude de cette configurat lon

devient posslbie par I'utllisation des articulations glle nous

avons données ei-dessus. Par ces articulations, 1e mariage

s'acquiert une fonction de motif; mieux, iI devlent, "récit

appris et repris par celui dont 7a fonction sociaTe est de

garder 7a némaire co7lective"L.

Cette voie de lisibilité des motifs en générai, Fêrmise

par 1e recours au plan présupposé, peut être exploiiée pour

construire des lnterprétations dont 1a cohérence est, à nôs

yeux, assurée par ce même plan qul 1es meL en exercice. Dans

1'espace des questions qul nous préoccupent dans f immédiat,

nous estlmons que les motifs, du moins les plus répandus dans

/1-mHa)yaL/, ne sont pas seulement, des formes récurrentes et

repérables par des comparaLsons entre récits; ces comparaisôns

peuvent, sous cet arrgle, conduire à une réductlon des contes

à une matrice dont, 1es fonctions seraient dites mtses en

.)expansr,on-.

Les recherches err

rendre possibles des

énonciatives du conte;

termes de morphologie sont en nesure de

ouvertures vers 1'étude des forraes

i1 nous semble même qu'e1Ies sonL sl

1 s. DEMERSoN, "un motif deDES PERIERST 1es cris bestiâux",p. 35.

conte dans Les nouvelles de B.I'rontières du conte, op. clt.

2 voir c. BRÉMOND, "Les bons récompensés et les méchantspunis", ln C. CHâBROL (éd. ), Sémiotique narrative et textuelle,Larousse, Paris, 1973, pp. 96-LZL.

Page 251: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

502

"sécurisanLes" qu'i1 nous faudrait oser supposer que du point

de vue énonciatlf, les mlse§ en récits des motifs dans des

contextes configuratifs, proposent des posslbilit,és de

description intéressantes pour considérer les contes comme

univers de valeurs représentant des dimensions culturelles dans

des sociétés qui se distinguent selon des vlslons propres à

chacune sur telle ou teIle autre valeur' L'exemple de

1'endogamie / exogamle eSt peut-être insigniflant §ur ce pIan,

mais i1 permet au moins de rendre compte du droit, à l-a

différence des visiorts culturelles: cheZ l-es unS, 1'endogaAie

au premj-er degré est un incesLe; chez les autres, eLle

constitue 1a préférée1 de toutes les unions posslbles,

Enfin, pâf ce plarr d'analyse des contes, i1 nou§ senble

que Ia sémiot,ique des cultures a tout à gagner en prenant en

considératlon Les ressemblances flagrantes, au niveau formel

entre les contes, et 1es distlnctions à êtudier en vlsant les

investissements sémantiques régls Par 1a manlère donÈ 1es

motifs sont mis en contextes conflguratifs'

1 C"tt" préférerlce est largement répandue chez 1es Béni-ZnasSen; pgur nogs en asSUrer, dévoilons notre recours agxregistres du Bureau d'État Civ11 de Taforhalt: les mariagesenàogamiques au sens d'unlons enfre constituants d'une même

Jmaea sont nettement courants; ils commencent à pelne -depuisune quinzaine d'années- à cohabit,er avec leS exogamiques'

Page 252: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

ÜÜNTLU§ TC}-T

Page 253: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

503

COilCLÜSIO}T

Le ' long de cette recherche, noLre souci ét,é ia

descriptlon de contes, organisée en trois parties. La première,

nous 1'avons consacrée à 1'étude du rô1e du lexique dans ies

configurations discursives; 1a seconde, à un essai de

définit,ion de /1-mHajya/ en nous servant, des résu1ïats de 1a

première partie; enfin, 1a troisième, à des questions sur

1'énonciation de /1-mHa)ya/ ,

Ce rappel que nous faisons en nous épargnant 1a t.âche

bien qu'en principe nécessalre dans une conclusion- d'énumérer

en déta11 1es questions constitutlves de chaque partie, lndique

dé j à le désir de considérer 1 'ensemble du travail p,:ur 1e

conclure dans un but, évaluatif suscept,ible de donner des

ouvertures posslbles pour des approfondissements u1térieurs.

Dans notre première partie, nous avons essayé de montrer

comnent se réalise 1a construction de contenus qui se chargent

de construire des invest.issements actuallsés dans nos conLes

par des utl1isat,lons lexicales appropriées. A litre de faits

divers, nous aimerions rapporter un déta11 dont nous nous

servons 1ci pour résumer en partle noLre parcours de recherche

sur 1e lexical et ce qu'iI a provoqué comme itinéraire qui nous

Page 254: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

l

504

a amené à juger nécessaire de prévoir: 1) la deuxième partie

dorit f intérêL a été d'essayer de définir /1-mHaiya/ êt, 2) la

troisième partie qui a été 1e plan de 1'énonciation, êt plus

exact.emerrt, 1'lrrstance qui convoque 1a composanLe lexicale pour

1a mettre en fonctionnemenL"

Ce détail n'étonnera probablement pas 1e sémarrticien;

résumons son conL.exte: 1a dizaine Ce versions du C1, que nous

avons pL1 recueillir, disent que 1e mari, après avoir accept-é

d'aller pla.nter des f èves (rnode du paraitre ) , se rend dans une

grotte pour manger 1es fèves. qu' i1 devait planter ( mode de

l'être ) . Toutefois, dans une version que nous avons récemment

recue111ie, est utilisée 1a montagne au iieu de 1a grotte; en

dehors de cette substitution -notre détail- 1e micrc-récit,

darrs Son ensemble, reste 1e même dans toutes 1es versions, Nous

nous sommes demandé à quel1e condition cette substitution est.

due sans affecter 1e disposit,if d'ensemble de 1a coufiguration,

s'i'l f aut mettre cela sur le compte d'une f orme de prototype ,

ceci cloit tout de même être éc1airé. Après une t,entative de

revoir cette substit.uLion, nùus nous sommes vu obligé de

reprendre 1es étapes de notre étude en concluant: 1) Ie sens

de 1a verticalité du bas vers 1e haut correspond narrativement

à une ascension tout en comportant un effet prévisible

d'é1évation du sujet par 1a réalisalion d'une relatj-on

conjonctive avec 1'obiet. de valeur. En généra1, 1a montagne

apparait, comme nous L'avons déjà vu, dans des contextes

configuraLifs qul se résumenL à peu près par 1'éIévation que

nous tenons pour trace thématique d'une épreuve que 1e sujet

subit pour prétendre à une conjonction avec 1'objet de valeur.

Page 255: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

50s

Néanmoins, cet effet ne semble pas pertinent pour peu qu'on

sache que darrs 1a même configuration, Ia groLte cède la place

à 1a montagne; la descente du sujet dans 1a grotte est le juste

contraire de 1'ascension.

Ceci rnontre que 1e motif, de façon générale, ne peut être

réduit à lui-même. Son fonctionnemenL dépend des reLatlons

err.tre des traits comme Haut, / Bas, sans tenj-r compie de manlère

1so1ée de 1'orientatlon de 1'ascension ou de celle de 1a

descente. Ce f onct,ionnement est alors celui que §ous-i,enri

1'organisation syntacLico-sémantique de Ia configuratlon comme

rrôus avolS essayé de 1e montrer à traver§ plusieurs exemples.

Ceci rejoint 1e plan de 1'énonciation te1 que nous en avons

parlé: s'iI faut tenir compte de 1'ascension, i1 faut, la relier

à 1a descente; par cette relation, )-e sens qui s'actualise dans

la confiquration n'est ni celui de 1a montagne ni ceLui de la

grotte, nais celui visé par I'opération quj" coordonne entre 1a

descente et 1'ascension pour actualiser une signification.

A cet égard, f incompatibilit,é enLre unit,és que rien ne

rapproche en apparence, impose que nous alLlons au de1à du

1exical, si 1'on note dans une configuratlon donnée une

subst,lt,ution d'une unlté par une autre. De même, 1a récurrence

d'une même unité doit être prudemment soumise à 1'examen de

1' organisation Syntactico-sémantlque de 1a configurat,ion, sinon

1e critère d'utilisation d'une unlté dans deux cadres (ou plus)

d'organisations conflguratives distinctes ne peut sensiblement

êt,re retenu pour que 1'unité soit considérée sur un même plan

de conceptualisation, car Ia question n'esL plus celIe de

réallsatlon dans 1e dlscours d'un motif mais de substitut'ion

Page 256: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

506

dans Ie même discours d'une unit,é par une autre sans que

I'organisation syntactlco-sémantique de 1a configuration en

souffre. Les unltés substit,uables les unes aux autres

deviennent alors des réalisations d'un moüifi et 1a notion de

récurrence se trouve 1e critère fondamental qui déflnit 1e

motif, même si, à un niveau 1ex1ca1, 1es manifestations

cliffèrent partiellement, ou même totalenent dans 1e discours

conf igurat,lf .

Tenant compte de ces points, cê que nous aimerlons

souligner dans cette concluslon est que ce débat devrait nous

t,enir par la main pour nous souffler i'intérêt à sttuer Les

substitutions à un niveau de représentations lexicales sous

1'apport d'une sémantique du prototype r 1'une et 1'autre des

unités "montagne " et " grotte " peuvent être lndifféremment

utilisées dans 1a configuration intêgrée dans Ct. L'essent,ieL

est d'y être utilisées pour servlr de représenLant ou

"d'instance centrale" sous-jacent,e à 1a catégorie Hâut I Bas.

Précisons tout de même que la prototypicalit,é est assez

partlculière dans notre cas. E11e permet d'inté'grer dans 1es

techniques de certaines utillsatlons de figures conme 1a

montagne et 1a grotte dans 1e conte , une forne d'" inter-catégoriaIlté' dont 1'écho permet d'étudler 1'organisation

lexicale qul ne tlent pas compte de 1'exclusivité des

propriét,és de t,e11e unité au dépens ou àu profit de t,e11e

autre, Sur ce point, 1a référence dans 1e sens de "te1Le

dénomination réfère à... " n'est plus de rlgueurt I'étude doit,

opérer par cat,égorlsat,ion tout en essayant de détermlner 1a

relation qui existe entre Ies unit,és considérées par Ie recours

Page 257: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

t

507

à 1a dimension isotopique du message de 1a configuration.

Autrement dit, i1 faudralt voir dans 1'uti"Iisation du

vocabulaire du conte le niveau sémique lorsque les unit,és

lexlcales sont darrs une structure qul permet la comparaison des

séguenceB sous 1e crit,ère de 1a récurrence. Ainsl, une unité

en une occurrence lexicale dans 1e corpus comme "le té1épirone"

utilisé à 1a place de "1'aiguillon" redondant dans toutes 1es

versions de C36 à 1'exception d'urre seule, s'avère en apparence

seulement possible à mettre sur 1e, compte du récj.tant

inf ormateur, car son ut,ilisation est soutenue et même régie Fâr

1'énonciation narrati.ve. L'utilisation de 1'une ou de 1'autre

des flgures de "té1éphone" et "d'aigui11on" importe par ie seuL

maintien de 1a possibilit,é pour la mère de communiquer avec sa

f111e pour 1a protéger contre 1a servante. Enfln, si ce n'es1-

que cela 1a f onction de 1'aiguillon dans 1a conf igu.ration, de

toute évidence, 1e té1éphone est 1ê mieux apt,e pour un récitant

et des enfants citadins pour assurer ce rô1e. Et, s'iI y a un

auLre trait de signification dans "aiEui1lon" qui se fait

perdre par 1'utilisat,ion du té1éphone, 1'unlvers du conte saura

à coup str en rendre compte par d'autres techniques.

L'essentiel, avions-nous dit, esL que 1a mise en fonctionnemenL

de ces figures n'a1tère en rien 1'organisation syntact,ico-

sémantique de 1a conflguration et que 1a distance entre 1es

sens latent et manifest,e demeure parfaitement tracée pour que

1es contenus investis dans 1es contes ne solent pas réduits au

second sens. Ceci explique relativement Ia manière dont

1'utilisatlon du vocabulaire dans une conflguration se fait par

sélection de catégories.

Page 258: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

508

Situons le cadre de débats autour de ces données: 1) les

catégories sous-jacentes aux unités figuratives d'un ensemble

configuratif sont à retenir par 1'analyse pour faire ou ne pas

faire valoir 1'utilisat,ion d'une donnée lexicale susceptible

d'être nommée mot,if;2) 1e cholx dans la lanque d'une donnée

lexicale plutôt qu'une autre, 9u'une lect,ure superficielle peut

mettre sur le compte du récitant au cas où e1le apparal.t, dans

ulle ou deuX versionS d'une même Conf igUratiOn, Se soumet, aU

sens latent qui porte en 1ui des représentations sou§ forne

d'objets culturels; 3) nous voilà revenu au point de départ:

1es val-eurs investies dans 1es utilisations iexi-r:a1es

s'actuaLiserrt par Les catégorieS qui déterminent Le choix.j.'une

unité 1exica1e. Si ce choix peut se faire entie piusj.eurs

unités, chose courante dans les narrations particulièreS d'un

même conte, i1 se soumet à I'organisation syntaxique et

sémar:tique de 1'ensemble du disposit.if narratj.f . Dans ce casr

peut-on réellement, parler de choix puisque condit,ionné par ies

régularités Syntaxiques et sémant,iques orgdnisâtrices de ia

conf igurat,lcn c1i scurs ive ?

En tous 1es cas, 1es actuâlisations lexicales et 1es

substitutions des unes aux autres dans une même configuration

rre peuvent être traitées que par le recours aux plans isotopes

suivant des catégories qui articulent des contenus sous-tendus

par 1e dispositif d'ensemble dans 1a configuration.

Les grandes complj.cations, à nos yeux, résident dans 1e

fait que les sens latent et manlfeste ne Sont pas isomorphes.

Partant de ce constat, i1 apparait, que 1e niveau sémique

Page 259: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

509

propose une ouverture vers une approche qul consiste à

appréhender 1e conte par 1a diverslt.é de ses versions pour

L'éclairer êt, en même Lemps, 1e définir de f intérieur, Le

système dénotat,if y sera bel et bien " un objet CIpaque porteur

des si gnificat,ions secondes qu'i7 s'agit. de déchiffrer"L, Aussi

dirorrs-nous franchement gue 1e conte est bien autre chose

qu'une suite d'étaÈs et de transformations, ou du moins, qu'i1

y a un intérêt à le situer à un niveau où 1es effets de manque

dont, i1 raconte 1es événements ne peuvent, êLre côntournés par

1e seul recours à 1'ordonnance sous-jacente au parcours de 1a

quête.

Ces indications ne dolvent pas non plus laisser entendre

que les pérlpêties de l'analyse s'occupent du seul champ

positionnel des manifestations lexlcales. Peut-être faut-ii

rappeler que Ia t,âche descriptlve ne part pas du seul prodult

pour se constituer en positlon réceptrice; e11e prévoit aussi

1'attitude du soclal qui adopte un comportement en vue

d'irrvestir 1e lexical en contextes conflguratif§ par

I'intention de rendre signlfiants 1es actes Iangagiers dans 1e

sens des sens du conte. À cet égard, 1'énonclatlon est 1a mieux

approprlée pour lndlquer les lieux où réside 1a production du

sens comme univers de valeurs.

Une nuance est à prendre en considératlon: i1 est

nécessaire de distinguer entre "représentations" construj-tes

par le discours et "réa1lté". Si cett,e nuance est admlse comme

condition d'entente et même de reconnaissance mutuelle entre

1 e. J GREIMÂS, Du gens, op. cit. p 95.

Page 260: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

510

partenalres du débat, nous adnettrons que 1'énonciatlon est un

lieu qui gère 1a f orme d'Àutorlt,é instit,uant des contenus

propres à la culture à travers lesquels le conLe se donne les

moyens de présupposer "1'Instj-tution" qui se trouve au coeur

du dispositlf de 1a construction des représent.ations socio-

cu1ture1les, câr 1e corlte "se pense" par une voix "blanche",

selon les termes de D. Maingueneau, pour garantir ia

corrstruction d'un univers de valeurs dont 1e ilssage n'esI pas

1a reproductlon du sens dénotatif. Cette voix désigne iadist.ance entre 1e plan de manifestation et celui du conLenu

proprement dlt du conte, À ce nlveau, 1a stéri1ité des études

de 1a forme peut être récupérée non p3.us dans un sens qui

bloque 1a démarche analytique rnais qui 1a sensibillse à 1a

nécesslté de charrger de plan d'étude: 1'énonciation iiu conte

se consti.tue comme niveau qul assure 1a mise en discours de

contenus concevables culturellement, Ces eontenus sont assurés,

quant à leur mise en discours, pâr une double articulation du

social et du langagier. Cette double articulatj.on est, en soi,

un complexe qui rejoint la voix à 1aque11e se xâpporte

1'énonciatlorr qu1 aura 1a spécificité de ses propres jeux et

cessera du même coup de donner f impresslon de rédulre le conte

à 1'lmpersonnalité ob ject,1ve.

Enfln, cc point 1" vue offre, nous semble-t-i1, un

avantage d'économie dans les anaLyses concrètes dans le sens

où 1es éventuelles distlnctions à falre théoriquement entre

conte et mythe, euê nous avons évoquées, devlennent

secondalres. En Lous cas, si ces distinctions s'avèrent

pertj.nentes pour ne pas être secondaires pour certains, notre

Page 261: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

511

humble connaissance nous détournera du débat t " Dunézi7 ( . . . )

{aurait.l passé toute sa vie â conprendre 7a différence entre

7e nythe et te conte sans y être parvenu"2,

2 M. DETIENNE,symboli<rue, Galllmard

"Repenser 1a mythologle", Parls, L979, p. 7L

in La fonction

Page 262: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

BTBLTCGRAPHTE

Page 263: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

512

BIBLI9.GRAPHTE

AARNE, A. et THOMPSON, S. The tvpes of the folktales, FE

Communications No 184, Helsinki, 195L.

ADAH, J. -H. Linquistique et discougq 1j-tt érgjt::e , tarousse ,

Paris, 1976.

ADÀH, J.-M. Le récit, P.U.f., Cot1. gue sais-je ? Paris, 1984.

ADA!{, J.-il. Le texte narratif . Traité d'anaJ.vse Lg-r!.::S!!e- des

réclts, Nathan, Paris, 1985.

ÀDAM, J.-M. et, DURRER, S. "Les avatars rhétoriques d'une forme

textuelle: 1e cas de 1a description" lianqu.q f ranÇais_e,

No 7g, 1ggg.

ADAM, J.-H. et, PETITJEÀN, A. Le texte descriptif , Nathan,

Paris, 1989.

ADÀU, J.-H. et, REVÀZ, f. "Aspects de 1a structuration du texte

descriptif: 1es marqueurs d'énumération et de

reformulation" , Langue franÇaise, No 81, 1989.

ÀDAH, J.-H. et a111 Le dlscours anthropoloqique, Klincksieck,

Paris, 1990 .

Page 264: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

513

ÀrÀNÀSSIEV, Contes russe§, Maisonneuve et Larose, Paris, L978.

ÀLEXANDRESCU, S. "Sur 1es

Lanqêgeê N' 43 , !97 6 .

modalités «croire, et « savolr» " r

ÀLEXÀNDRESCU, §, "Métadiscours et théorle de f interprétation;

la critique litt,éralre" il'I GREIUAS, À. J, (éd' )

IntrodJrction à I'analvse du discours en sciencÊs soqiales,

Hachette, Paris, L9'79.

AHROUCH, H. -t. "Conte kabYle:

Â1qéria No 6 , mai 1949,

loundja: f i. 11e de Tserie1",

ÀRKOUN, It. La pensée arabe , P. U. F. co11. Que sais- je ? Par j-s ,

1915.

ARKOUII, M. et GARDET, L. L',Islam , hier-dena.iq, Buchet.,rchasiel ,

Paris, 1978

ARRTVÉ,

No

ÀRRIVÉ,

No

M

25

"Le concept de symbo1e", Àctes sémiotiques-DocumenLq

, 1981 .

"Le concept de symbo1e", Actes sémiotiques*Documents

, L982.

M.

36

ARRIVÉ, M. Llnquislique

Hielmslev, Lacane et

psvchanal-vse: Freud ' Saussure,

autres, Klincksieck, Paris , 1986.

et

les

ÀRRIVÉ, M. et COQUET, J.-C. (Sous 1a direction de), sémiotique

en t eu ; à partir et auto-r1r de I'oeuvre d'À. J ' GREIMÀS ,

Hadès-Benjamin, Paris-Àmsterdam, 1987.

ÀUSTIN, J. t. Ouand dire c'est falre, Seu11, Paris,1970'

Page 265: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

514

APOTHÉLOZ, D. "É1éments pour

du raisonnement spatia1",

une logique de }a description

Deqrés N" 36, 1983.

et

BÀCHELÀRD, G. Poétique de

BÀLIY, Ch. Trait.é de

Klincksleck, Paris,

1'espace, P. U. f. Paris , L967

st.vlistique fran§alse

1951.

(3e éd1t,ion ) ,

BAI{NOUR, A. "A propos du conte populaire dans la théorie de

littérature" , IBLA No 155, 1985.

BÀRTHELEUY, M. "Le conte, mode d'expression artistique

service de f identité culturel1e" , in CÀLAME-GRIÀULE,

(éd.) Le renouveau du conte, éd. CNRS, Paris, 199L.

BARTHES, R. "Rhétorique de l'image" CommunicaËions_ il" 4, 1964.

BARTHES, R. "Introduction à 1'analyse structurale des récits"

Communications No 8, 1966.

BâRTHES, R. S L Z-, Seui1, co11. Points, Paris, 1970

BÀRTHES, R. Le dpqré zéro de 1'écriture, Seuil, co11. Points,

Paris, L972.

BA§SEÎ, À. Egsai sur. Ia 11ttérature des berbères, Carbonnel,

Alger, L92O .

BÀ§SET, A. "Les noms de parent,é en berbèrê", GLECS, T. VI, 1953

BÀSSET, A, Textes berbères du Maroc, parler des Avt Sadden,

Geuthner, Paris, 1963.

la

au

Page 266: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

515

BEAUSSIER, H. Dictlonnaire pratique arabe

J. Carbonnel, A1ger, 1931.

BEÂUVOIR de, S. "t'être et la parerrté",

lIô 233, 1985.

- francals,

Maqazine. lit!éraiFe

J. Les contes et leurs f ant,asmes , P. U, f . Paris,

"Àpproche rythmique de quelques devinettes

et de Khernan iBousaada-Algérie ) " , Iatéqiauxsudarabiques, nouvelle séri-e 3, GELLÀ§, Travaux

CNRS, Parj-s, 1991

Problèmes de Ilnquis_t1que qênéra.le, mJ..

Paris, 1966.

Problèmes de linquistlque qénéra19,

Parls, 197 4.

BELLEUT§-§OEL,

1983.

BENSÀIAH, Y.

d'Ed-dis

arabes et

de 1'URA /

BENVENISTE, E.

Gallimard,

BE§VEITISTE, E.

Gallimard,

BERQUE, J. L'islam au défi, Gallimard, Parls, 1980.

2,T.

deBERTRÀND, D. "Sanction

sorcellerie", Àctes

de la croyance dans

sémlotiques-Bu11etin No

1e procès

21, L982.

BERTRÀ§D, D. "Avant-propos" à

comnunlcation parabolique "

38, 1982.

DELORME , J. " savoir, croire

, Actes sémiotiques-Documents

et

No

BERTRÀND, D. "C'est vrai ? C'est bien vrai ? Les nots de la

conversatlons" , Actes sémiotiques-Bu11etin §" 30, 1983.

Page 267: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

516

BERTRAND, D. "Du figUratlf à 1'ab5traiL CheZ zoLa" , Actes

sémiotiques-DocumenLs- No 59, 1984.

BERTRAND , D. L.'espace et le sen§.-- §"SrmJæÀ d'E. Zola , essai de

sémiotique discurs.ive , Hadès-Be j amin, Paris-Amsterdam ,

1985.

BERTRAilD, D. "Conte et thérapie", in cÀLÂME-GRTAULE, G. (éd.),

Le renouveau du conte, éd. CNRS, Paris, 1991.

BETTELHEIU, B. Le psvclraneJ.yse des g-ontes de f Ées , R. Laf f ont ,

Co11. P1urie1, Paris, 1979,

BIEBUYCK, B. "Conter, raconter, badiner" ln CA]IÀI'{E-GRTÂULE

(éd.), Lê renouveau du conte, éd. CNRS, Paris, i99L,

BLÀNC, t.-R. "El-Maâni, conte en dialeCt.e narocaln", Archives

m?rocaines, T. VI, No L-2, 1905.

BOON, J. A. Other tribes, other scr j-bes- §ÿmbolic ant,hropoloqy

in the comparative studv of cuLt'+res. hist,oriç§-, reliqions

and texts, Cambridge University Press, 1982.

BOREL, il,-J. "DiScourS descriptlf et référence", Travaux dg

centre dg Lecherches sémioloqiques, No 53, Neuchâte1

universit.é, 1987.

BOREL, M.-J. "Le discours descriptif, 1e savoir et ses signes"

alii Le dlscours anthroPologique,in ADAM, J.-M. et

Kllncksleck, Paris, 1990.

Page 268: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

5L7

BORDROII, J. f. "te titre de Ia légende; le discours philoso-

phique de Maurice Merleau-Ponty" in GREIMAS, A. J, (éd'),

Introducti-gn à 1'analvse du discours en sciences sociales,

Seui1, Paris, L979,

BORDRON, J. "éthique de véridictlon",

31, 1-984.

Actes sémioti"que s-

BOUACHA, À

Acte s

Bu let,tin

F.

No

. A. 'Classe de locuteurs et actants collectifs",

1985.sémiotiques-Bu1letin No 34,

BOUÂLIT, r. "L'ogresse farésienne: de I'oralité du conte à

1',oralité de l'écriture ( ou du fabuleux au sémiotigüê ) " ,

Écriturg et oralité, Revue de la Faculté des Let,tre§ e!

des Sciences Humaines de f'ès, numéro spécial 8, 1992'

BOUDOT-LÀUOTT§, À. "L'expression de la malédiction ei- de

f insulte dans 1es dialecLes arabes maghrébins. Recherches

lexicoEraphiques et phraséologiques" &rablcq N" 2!, 1"974.

BREMOIID, C. Loqique du récit, Seuil , Paris, L973 '

BREI{OND, C. "Les bons récompensés et, les méchants punis" in

CHÀBROL, e. ( éd. ) Sémlot,ique narrative et- textuelle,

§eui1, Paris, 1973.

BROHBERGER, C.

personnes",

BRU§OT, L, Àu

re lations

Casablanca,

"Pour une analyse anthropologique des noms de

Langaqes N" 66, 1981

seuil de. 1a vle marocaine. Les coutumes et les

sociales chez 1es marocains, tib. Farraire,

1950.

Page 269: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

518

CÀDI , K. te verbe en t.arlf 1t (Maroc Nord ) r f ormes , struct,ures

et valences, Thèse de 3e cycle, EPHE et paris rrr, 1gg1.

cÀrI,I,or§, R. L'homme et 1e sacré, §arrimard o col1. rdées,

Paris, 1976.

cÀtÀHE, e. "Énonclatlon: véracité ou conventlon littéraire ?.

Act.es-sémiotiques-Documents Nô 34, LggZ.

cÀtÀl'{E, c. "rllusions de la mythologie", Nouve.aux actes

sémiotiques No 72, 1990.

CALAUE , c. "Du f iguratif au thémat,ique: aspects narrat,if s etinterprétatlfs de 1a description en anthropologie de La

Grèce ancienne", in ADAM, J.-M. et a111 Le discours

anthropologique , Klincksieck, paris , 1990 .

CATAME-GRIAUI.E, G. (éd) Le renouveau du cente, éd. CNRS, paris,

1991 .

CÀMARÀ, s. "Pour une méthode d'analyse des contes africalns: 1e

schème narraLif" in Le conte, pourguoi, comnenL ?, éd.

CNRS, Paris, 1984.

CÀLVET, L.-J, Lq t,radltlon ora1e, p.U.f ., co1I. gue sals-je ?

Paris, 1984

CAHPS, G. "un t,hème religieux dans il art rupestre nord-

africaln. Le bê11er à sphéroide", Est,ratto da studi dlparetnoloqla ln onore di savatore M. puqlisi, unlversit,adl Roma "ta sapienza", 19g5.

Page 270: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

519

CAVÀLHO TOPES de, U. A. Le château int,érleur de Thérèse d'Àvlla

Ànalvse sérniotique . Le parcours du su'i et . Thè se de 3e

cycIe, EHESS, Paris, 1985.

CERTEAU de,

Documents

H.

No

"Le parler angé1ique" Actes sémiotiques-

54, i984

l

CHÀBROI, C. (éd. I Sémiot,ique narrative et t,ext,ue11e , tarousse ,

Paris, L973.

CHEVÀLTER, J. et GHEERBRÀIIT, A. Dictlonnaire des symboles,

Laffont-Jupiter, Paris, t982.

COLÏN, G.

Paris,

S. Chrestomathle marocaine, 2e éd., A. Maisonneuve,

1955.

COTONNÀ, f. "QuesËions à propos de la littérature orale comme

savoir" , ROMM, V, 22 , 19'?6, pp. t-l-26.

COQUET, J. -C. sénlotique littéraire , çonlrlbution à 1'analvse

sémantiq.ue du dlscours, Mame; Delarne, éditions

universltaires, Paris, t9'76.

COQUEï, J. -C. "Prolégonènes

sujet énonçant", Actes

à 1'analyse modale ( fragments ) ; 1e

sénlqttqlte:;:Oocuments No 3, t97 9 .

COQUET, J.-C. "Les modalltés du discours", Langaqes No 43, t976

COQUET, J. -C. ( sous

Paris, Hachette

Sémiotique; 1'École de1a

U,

direct,ion de )

Paris,1982,

Page 271: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

COQUET

520

J. -C. "L' implicite de 1'énonciat j-on" ,

coQUET, J. -C. Le

Paris, 1984.

coQUET, J. -C.

Paris, 1985

COQUET, J.-C. "Cinq petites 1eçons de

1985.

Langases N" 70,

sémiot.ique", Poésie §" 34

hist,oire, Le fait et 1'événemenc

,

983

coQUET , J.

NÔ 55,

-C. "La bonne

1984.

distance", Àctes

discours et son suiet, L, Klincksieck,

discours et son suiet, 2 , Klincksieck,Le

coQUET, J. -C

Prot,ée ,

. Sémiotique et,

aut,omne 1987.

coQUET,

t'Pa

J. -C.

autre " ,

ris, 1988

" L', être

TLE 6,

et 1e passage ou d'une

Presses universitaires

sémiot ique à

de Vincennes,

COQUET, J.-C. "L'objet sens et réa1ité", Lanqaqes No 103, L99L

coQUET, "Le discours plast.igue d'un obj et, ethnographique "

1983.Acte sémiot.lques-Documents §o 44

LE SAïNT CORÀN traduction intégra1e et notes de U.

8e édit,ion, Beyrouth, 1973.

HÀMIDULLAH,

LE coRÀll t,radult de 1'arabe par KAZrurRsKr, Garnier-Flammarion,

Paris, 1970.

l{.

S

Page 272: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

521

COURTES, J. Introduct,ion à 1a sémiotique narrativediscursive , Hachette U , Paris, t97 6.

couRTES, J. "La lettre dans Ie conte populaire merveilleux",Acte s sémiotiques-Documents No 9, I9i9.

et

mervellleux (2e

, 1979.

merveilleux ( 3e

, 1980.

grève", Àctes

COURTES, J. "La lettre dans 1e conLe populaire

part,ie)", Actes sémiotiques-Documents N" 10

nu1t,s.

IBLA NO

COURTES, J. "La lettre dans Ie conte populaire

partie ) ", Actes qé,m]-_p!iques-Documents No tq

COURTES , J. " Pour une approche mociale de la

sémiotiques-Bu11et,in No 23 , t982.

cOuRTEs, J. "Pour une sémant,ique des traditions popuiaires",

Actes sémiotiques-Documents No 65, 1985.

couRTES, J. Le conte populairer poétique et mytheroqj-g, p.u.r.

Paris, 1986.

COURTES , J. Analvse sémiotique du discours ; de I'énoncé à

1'énonciation, Hachette, Paris, 1991.

COUSSO§NET, P. "Pour une lecture historique des Mil1e et une

Essai d'analyse du conte des deux vizirs égyptiens"

1.55, T. 49, 1gg5

cRESsI{Et, R. et aIil. outils d'ensuête et, d'analvse anthropo-

lrrqiques, Maspéro, Paris , L973.

CUIïOLI, À. "VaIeurs modales et opératlons

francals moderne No e, t978.

énonciatives*, Le

Page 273: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

522

DANLOS, L. "Introductlon: lexique-grammaire des

fiqéês', Lanqqges N" 90, 1988.

express].ons

DAOU, À. "Architecture et d j lnnopathie au i.laroc" in Études

psvchot.hérapiqges. "L'Art et, 1'f nconscient" N" 33, 797A.

DECOURT, N. "Le conte maghrébin dans tous ses états ou 1es

enjeux de 1a variation en situation pluricu1ture1le" LOAB

19-2A t Publications U. P. R . 4L4, CNRS , paris, 1988- 1989.

DELORME, J. "savoir, croire et communicat,ion parabclrque" in

Acte s sémiotiques-Documents , IV, 38 , 1982 "

DEI'{ERSON, G. "Un motif de conte dans 1es nouvelles de B. Des

Pêriers: 1es cris bestiaux" in MAROTIN, î. (rassemblées

par) Frontières du conte, éd. CNRS, Paris, 1982.

DEI'{ONTO, L. "La quadrature du cycle. Logique eL contraintes

milieu rura1", CahieEs- int,ernationaux

vo1. LXVII , L979.

du

detemps en

socioloqie,

DENHÏERE, G.

récits, P.

DERHENGHEU, E.

Ga1 1 imard ,

r1

U.

était une fois, compréhension et souvenir de

L. , Li11e, 1984.

Le culte des saints dans

Parls, 1954.

1'Is1am maqhrébin,

DERRIDA , J. t'écriture et 1a différence ,

Paris, 1967 .

Seui1, co11. Points,

Page 274: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

DESTAING, E. TeXtes arabes

(Haroc), transcriptior],P. Geuthner, 1927 .

DOURIIES, J. "Ethrroanalyse

d'une recheche sur

comment ? Pourquoi ?,

DUCROT, O. Dire et ne pas

523

en parler des Chleuhs du Sous

traduct,ion, qlossaire, Librairie

de 1a récitation traditionnelle. État.

un corpus lndochlnois" in Le conte,

éd. CNRS , Parls, r1984.

dire, Hermann, Paris, 7972.

DUcRor, o. et ToDoRov, T. Dictionnalre encvclopédique des

Sciences du lanqaqe, Seuil-, paris, 1"972.

DUMEZfL, G. Les dieux souverains

Paris, L977 .

DUMEZIL, G. Mvthes et épopées f,

1968.

Indo-eugppéens, Ga1 1 imard ,

et hlstoire

des

Gallimard , (2e éd. ), Paris,

ECo, u. La structure absente. rntroduction. à la recherche

sémiotique, Mercure de Frarrce, paris, 1912,

ECO, U. Sémiotique. et, phllosophie du lanqaqe, p.U,f . paris

1988.

ECO, U. Les llmites de 1'lnterprétation, Grasset, paris, Lgg2.

ELïÀDB, M. La nostalqie des oriqlnes, méthodoloqle

des reliqions, Gallimard, paris, !97L.

ELIADE, M.

Payot,

ELIADE , t{.

Histolre des crovances et des 1dées relisieuses I,Paris, 1978.

Aspects du mvthe, Gal11mard, parls, 1963.

Page 275: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

EtIÀDE, M. Le sacré eL Ie

ELIÀDE, H. Inltlation,

Paris, 1978.

ELIÀDE, U. Le chamamisme et les

1'extase, (rééd.), Payot, Paris,

524

profane, Gallimard, Paris, 1965.

rite, sociétés seclèt,es, Gallimard,

te chni que s archaiques de

197 B

ELIÀDE, M. Hythes,

Paris, 1981.

rêves et mystèreq, (rééd. ), Gallimard,

EzzÀrH, A. "oralité et expression artistique du mythe dans une

nouvelle de Gabriel Garcia Marquez: uLes funéra111es de 1a

grande Mémée » " , Écriture et, oralit,é , Revue de l_a Faculté

des Lett,res et des Sciences humaines, Fès, L992.

EARES, N. "Propositions introductives à des études d'expression

populalre eL en partlculier à propos du conte populaire

d'expression ora1e", ROMH V, 22, L976.

FONTÂNILLE, J. "Le désespoir", Actes sémiot,iques"-Documents , L6,

1980.

FOIITÀ}IILLE, J. "Un point de vue sur «croire, et « savoir» ,

Actes sémiotiques-Documents, IV, 33, t982.

I'ONTANILLE, J. "Une topique narrative anthropomorphe", in Àctes

Ir, 57, 1984.séU:Lot i que s -Document s,

ERA§COIS, F. "t'analyse sémantique et 1a mise en mots"

"Linguistique et analyse du texte", in fRANCOI§,

Linquistique, P.U.F. Paris, 1980.

1n

et

r.

Page 276: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

fREUD, S. L'interprétation des rêves, P.U.f. Paris, L967.

GÀDET, f. Saussu.re " Une science de 1a lanqUe, P ' U. f. Paris,

525

fRÀNCOIS, F. et alii Conduites linquistiques

enfants , P. U. F. Paris, 1984.

3.987 .

GÀI.TIER, E. "La pomme et la fécondité",

populaires, T. 14 , 1899.

GÀSMI, t L. Narratlvité et production du

chez les ieunes

Revue des t-raditions

sens dans 1e texte

coranique: 1e récit de Josgj:4, thèse de 3e cycl-e

(dact,ylographiée), EHESS, Paris, L977.

GASMI, L. "Vers une sémiotique du Lexte coranigue", Actes

sémiotiques-Bu11etin, 8, t9'19,

GÀSMT, L. ''LA

Le Corarr:

Bulleti:,r

Humaine s

traversée de f imaginaire et le grand récit dans

1e récit d'Adam: Sourate XX, verËets LL4-L23" t

N" 1 de 1a Faculté des LettTes gt des Sciences

d'Ouida, l.laroc, 198L.

GAUDEEROY-DEMOHBYNES, M. Les institutions musulmanes,

Flammarion, Paris, 1945.

GENÀRDIERE (de Ia), C. "Le travai1 psychique du conte" in

CALAME-GRIAULE, G. (éd.) Le renouveau du conte, éd. CNRS,

Paris, 1991.

GIOVÀIII{A§GELI, D. Écriture et répétition. Àpproche de Derrida,

Union généraIe d'Éditions, co11. 10/18, Paris, 1979.

Page 277: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

526

GOLVIN, t. "NoLes sur deux procédés de divination en Afrique du

Nord" , Annales de 1'Institut d'ÉtuÊes Orient.ales, T. XfI,

éd. La typo-11tho et Jules Garbonel, Alger, 1954.

GEIIETTE, G. fiqures III, Seui1, ParLs, !972.

GEIIïI{ÀSCA, J. "P1âce du f lguratif ", Actes sémi-otiques-Bul1etin

No 20, 1981.

GENïNASCÀ, J. "La sanction

sémiotiques-Bulletirr N"

dans un conte

2t , 1982.

e sthét,iquê " ,

populaire", Acte s

Àcte s sémiotiques-GENINACSÀ, J. "Le regard

Documents N" 58, 1984.

GEOLTRÀIN, P. et, DELORME, J. "Le

J.-C. Sémiotique; 1'École

1982.

discours religleux"

de Paris, Hachette

1n

U,

COQUET ,

D:ri ql g-.9

,

GEOLTRÀIN, P. "Distanciation et appartenance: 1a notion

texte" in GREIMAS, A. J. Introduct,lon à I',analyse

discours en sciences sociales, Seuj-1, Paris, 7979.

GIROUD, P. et PÀNIER, L. Analvse sémiotlque des textes.

ïntroduction, t,héorie, pratique, Presses universitaires de

Lyon , 1979.

GREIHÀS, À. J. Sémantique structurale, Larousse, Paris, 1966.

de

du

GREIHÀS, À. J. Du sens, Seui1, Parls, 1970.

Page 278: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

527

GREfHÀS, A. J. MaupassanL. La sémiotique du texte; exerclces

pratiques, Seui1, Paris, 1"976.

GREIUÀS, A.

t976.

J. Sémiotique et, SC].ENCE S sociales, SeuJ-1, Paris,

GREIl,tÀ§, À. J. "Les acquis et les pro jets" préf ace à COURTES,

.r. Introduction à 1a sémiotlque narrative et discursive,

Hachette U, Paris, L976,

GREIUÀS, A. J. "Pour une sémiotique didact,iquê", Àctes

7 , L979sémiotiques-Bu11etin

GREÏUÀS, A. J. "La soupe

Docqglentq, 5, L979.

au piston", Àctes sémiotlques-

GREIMÀS, À. J. "Descript j.on et narrativité, sui-vi de, à piopos

du jeu", Actes sémiotiques-Documents, L3, 1980.

GREIUAS, A. J. "De 1a colèIê*, Actes sémiotigues-Documents, N"

21 , 1981.

GREIMAS, À. J. "Le défi", Actes sémiotlques-Bul1etin, N" 23,

L982.

GREIHAS, À. J. Du sens II, Seuil, Paris, L983.

GREIHAS, À. J. "Les actants, les acteurs et ]es figures" in

CHÂBROL, C. (éd.) Sémiotique narrative et textuelle-,

Larouse, Paris, 1973.

GREIMAS, À. J. "Un problème de sémiotique narrative: les objets

de valeurs", Lanqages No 31, 1973.

Page 279: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

528

GREIMÀS, À. J. et couRTEs, J. "Cendrillon va au bal. . .

Remarques sur les rôles et les figures de Ia litlérature

r)ra1ê " r Svstème de siqnes , Hermann, Paris , 1'979 '

GRÏIMÀS, À. J. et LANDOWSKI, E. (écl.) Introduction à 1'analvse

du discours en sciences socialgs, seui1, Parl-s, L919.

GREIMÀS, À. J. et NEf, E. "Essai sur

hippopotames't, Sémiotique et Bible

GROUPE D'ENTREVERNES, Analvse et sémiotique des

universitaires de LYon , ]-9'19.

HADJÀDJ, D.

HenrY

MAROTIN

1a

No

vie sentimentale des

22 , 1981.

textes, Presses

GRESITLON, A. et MÀINGUENEÀU, D. "Polyphonie , proverbe et

dét,ournement, ou un proverbe peut en cacher un autre",

Langages N" 73, 1984.

"Du «re1evé du folklore» au «conte poPulaire"; avec

Pourrat, promenade aux fontaines du dlre" in

, F. Frontières du cotrte-, éd. CNRS, Pari's, L982'

HAGEGE, C. "Le Iinguiste et 1e concept

sémiotisues-Bu1letin , L9, 1981.

d'universaux" , Actes

HAGEGE, C. L'homme de parole , Fayard, Paris, 1985 '

Description phonétique et ph-o-D-qlo-g-1que- d' un parler

du Rif marocain {province d'41-Hoceima), Thèse de

, Université de Provence, Aix-Marseille 1, 1985'

HÀHDAOUI, H.

amaz i- qh

3e cycle

HART, D. -M.

rifalne"

"C1an, lignage et communauté locale dans une tribu

, Revue de qéoqraphie du monde , ( C'A' O ' M' ) , 1965 '

',,'t]tM

Page 280: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

529

HENÀULT, À. Les enieux de 1a sémiotique. Int,roduction

sémiotique géÈé_æl3-, P. U. F . Par j-s , L97 9 .

à Ia

HJETMSLEV, L. Proléqomènes- à une t,héorig du l-aqg-gg§-, I'linuit,

Paris , 1968.

IB§ HAIIDOUR lisa& ai-earab, dar a1-maarlf, Beyrouth, 1981.

JACKEZ HELIÀ§ , P. §-U!SS- du vrai et du semblant, Julliard,

Paris, 1981.

JÀKOBSON, R. Essai de 1i-nquistique qénéraLe, Mirruit, Pari-s,

1953.

JEAII, G. Le pouvoir des contes, Casterman, Paris, 1990'

JOYAUX, J. Le lanqage , cet ineonnu, S. G. P. P. , Le Point de Ia

question, Paris, 1969.

KHÀLIL, A. Kh. maDnUn al 'u§Tura f1 1-kir

de Ia 1éqend-e dans 1a pensée arabe ) ,

Beyrouth, 1980.

al

2e

earabi ( 1e contenu

éd., dar al-kitab,

KHATIBI, A, La mémolre tat,outée, Denoê1, 10/18, Paris, 1919.

KILÀNI, M. "les anthropologue§ et leur savoir: du terrain au

texte" U ADAM, J.-M. et al. Le discours anthropoloqique,

Klincksieck, Paris , 1990 .

KILBORNE, B. "The handling of dream symbolismr aspects of dream

interpretation in Morocco", The psVchoanalvtic Studv of

socletv, Vo1. 9,1981.

Page 281: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

KIIITO, À.

Paris,

KLEÏBER, G.

No 76,

KLEIBER, G.

te rme s

1991.

530

L'a.uteur et ses doubles, Seuil,

1_985.

co11. Poéti9uê,

"DénominaLion et relations dénomlnatives", Langaqes

19? ?

"Hiérarchie lexicale: catésorlsation vertlcale et

de base", Séniotlques, Vo1. I, No 1, INALF, Paris,

KLEIBER, G. La sénantique du prototype, P.U.f., Pari3, 1990.

LÀilDOWSKï, E. La société réf1échie, Seuil, Parls, 1989.

IANTIER, G. La cité masique, Verviers, Marabout, Univers

secrets, Paris, 1984.

LÀOUST, E. Mot,s et, choses berbères: notes de linquistique et

d'ethnosraphie : dlalect,es du Maroc, Chal1amel, Pari-s, t920

LÀOUST, E. "Des noms berbères de 1'ogre et de I'ogresse',

Hespéris, T. XXXïV, 1947.

LÉVI-STRAUSS, C. Trlstes tropiques, Plon, Paris, 1955.

LÉVI-STRÀUSS, C. Ànt,hropoloqie structurale, Plon, Paris, 1958.

LÉVI-STRÀUSS, C. La pensée sauvase, P1on, Paris, 7962.

LEVI-STRÀU§S, C. Mytholoqiques, 1e cru et 1e cüit, Plon, Paris,

L964.

Page 282: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

531

tÉVI-STRAUSS , C. Les str:uctures é1émentai-res de 1a parenté ,

Mouton, 2e éd. , Pari.s , t967 .

tÉVI-STRÀU§S, C. Le totémlsme auiourd'hui, p.U.f. Parls, 1969.

P1on, Paris,LÉVI-STRÀUSS , C. Anthronoloqie struct,urale II ,

1973.

LÉVI-§TRAUSS, C.

Les sentlers

LORÀUX, N. "tes mots

direction de ) ,

Paris, 1989.

voie des masques- II, AIbert Sklra, co11.

1a création, Genève, \975.

qui voient" , in REICHLER , C. { sous la

L'lnterurétation des textes, Minuit,

La

de

tÉVI-STRAUSS , e. " Une petite énigme mythico- 1it,t,éraire " , Le

temps de 1a réf1exlon, Gallimard, Paris, 1g80.

LÉVI-STRÀUSS, C. Le resard é1oiqné, P1on, Paris, 1983.

LÉVI-STRÀUSS , C. , ERIBO§, D. De près et de loirr , suivi d'un

entretien inédit "Deux ans après", éC. Odile Jacob, coL1.

Points, Paris, L991.

MÀCCÀNNEL, D. "Communauté et symbole",

Bulletin N" 34, 1985.

Actes sémiotigues-

MAINGüENEÀU, D. "Dialogismes et analyse textueLle"

sémiotiques-Docunents N" 32, L982.

Acte s

MÀI}IGUE]IEAU, D. Àpproche de 1 'énonciation en linquist,ique

franÇaise, HacheLte, Paris, 1982.

Page 283: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

532

I{AINGUE}IEAU, D. Nouvelles

Hachette , Par j. s , 1987 .

tendance s en analyse êu discours,

HAIIIGUEIIEAU, D. "Le tour ethnolingulstique de

discours" , Iranqaqes N" 105, 1991.

l'analyse du

}{ÀKARIUS, L. t. Le sacré e! la vlolation des lnterdlts, Payot,

Paris , 197 4.

MALÀRKEY, J. M. "Eormes lnaginaire§ et histoire sociale à

Constantine. llypot,hèses'à Pgrtir. de 1a f ê!e. des v'autours" ,

CRESM, séminaire sur 1'Islam (dactytographië), IREMAH,

Âix-en-Provence.

MÀLIIIOWKI , B. Trois essais sur Ia vie qociel,e des primitif s .

Payot, (rééd. ), Paris, 1933.

HALI§OI{SKI, B. Une théorie scientifique de 1a Çulture, }laspéro,

co11. Points , Paris, 1968.

MANSOURI, D. "L'exemplarité ou 1a tradition orale en eolps',

Éqriture et oralité, Revue de Ia Eaqulté deB Lettres et

des Sciences humaines de Fès, numéro spéciaI, B, L992'

HARÀ}IDTN , U.

É 1éments

1988.

MÀRCHATID , G.

Nov. -Déc.

*A propos de la notion de thème de discours.

d'analyse dans le récit", Lanque fçancaise §o 78,

"Contes en dialecte marocairt", Journal asiatique,

, 1905.

Page 284: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

ilÀRCHA§D,

Rabat,

MÀRCHAND,

Rabat,

533

G. Contes et léqendes du Maroc, fasc.

1,924.

2, Cousin,

G, contes et Iéqendes du MaFoq, fase. 3 , Cousin,

t926.

MAR.CAIS, lt. "Nouvelles observations sur 1'euphénisrne dans les

parlers arabes maghrébins", HélanJfes Isidor Lévy, Annuaire

de l'Institut de Philoloqie et d'Histoire 9r-ientale et

§1ave, T. XIII, Bruxelles, 1953.

MARCOI|I, D. "Understanding and ref erence'! , -§émi.qtig§eg, -vo1. I;

No 1, 1991.

UARIH, t. Le récit est un piège, Minuit,, Pari§' 1978.

HARIN, t. La parole mangée et autres ess.ais thégloqico-

nolitlques, Klincksieck, Paris, 1986 "

HARIOTTI, M. "Le conte, uD savoir dire" i& CÂIrAME-GRIâUIIE, G.

(éd. ) , L€ r.enouveau du conte , CNRS , Paris , 1991 .

HÀRTI}I, R. Pour une losique du sens, P.U.F. Paris, 1983'

MÀUS§, M. Socioloqie et' anthropolaq j,g, P. U. f . Paris, 1980 '

McLUHÀ§, M. Pour comprendre les média, Seui1, Paris, 1968.

HDAGHRI ALAOUI, A. "Analyse énonciatlve du récit: les instances

discursives dans Le passé simple de D. Chraibi", baSanat

No !, 1988.

Page 285: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

534

MELETI§§KY, E. "L'organlsation sémantlque clu récit myt,hologlque

et le problème de f index sémlotlque des motifs et des

su jets" 1n Le con_te, pourquoi? Commgnt,l, éd. CNRS,

Parls, 1984.

HERCIER, H. Dlctiorrn_aire arabe-franlals, La porte, Paris, 1951.

MILNER, J.-C. Introduction à une science du langagq, Seui1,

Paris, 1989.

MOLINO, J. "Interpréter" in REICHLER, C. {sous 1a direction de)

L'interprétation des textes, Minuit, Paris, 19Bg

MOLINO, J. "Qu'est-ce que 1a traditiCIn orale ?", communication

au colloque: La pratique de 1'anthropologie eujourd'hui ,

Sèvres, 1981.

IIIETZSCHE, F. Par-de1à blen et ma1, Gallimard, Parls, 197L.

PANTER, L. "La vie éterne11e: une figure", Àctes sémiotiques-

Documents No 45, 1983.

PANIER, L. "Sémiotique du dlscours religieux et sémiotique

généra1e", Àctes sémiotiques-Bulletin N" 8, i9'79.

PAIIIER, L. "Le discours d'interprétation dans 1e comrnentaire

biblique", in GREIMÀS, A. J. Introduction à I'analvse du

discours en sciences soclales, SeuiI, Parls, L919.

P^àRRET, H. "La mise en discours en tant que déictisation et

modallsation", Lanqages N" 70, 1983.

Page 286: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

535

PÀTTE, D. "Carré sémiotique e t synt,axe

23, 1981.

narrative", Àctes

sémiotiques-DocumenLs No

PÀULU8, D. La mère déyorante.

contes africains, Gal11mard,

Essai sur 1a morpholoqie- dgs

Paris, 1976.

PELLÀT, Ch. Textes berbères

de La Moulouva, Larose,

dans le parler des Avt Seghrouchen

Parj-s, 1955.

PELLowsKr, À. "utilité thérapeutique du conte orar" irI CÂLÀHE-

GRIAULE G. (éd), Le renouveau du contq, éd. C§RS, paris,

1991.

PEROI, t. "Quand un récit s'intitule «ceci n'est pas un cofitê»

(Diderot)" in MÀROTIN, F. Eællières §U q-oq!s-, éd. C§RS,

Paris, 1982.

PERRIN, U. Le chemln des lndiens mr3rts, Payot, Par1s, 1976.

PROPP, V. I'lorpholoqie du conte, Seuil, co11. Polnt,s, Paris,

1970.

POTTï§R, B. 'L'homme, 1e monde, Ie langage, les langues et les

No \4 , 1980.lingulstes", Aqtes-sémiotiques-Bu11etln

POTTIER, B. Théorie et analvse en linquistique, Hachette,

Parls, 1987 .

QUERE, H. "Symbolisme et, énonciation" ,

Documents N" 43, 1983.

Acte s sémloti que s-

RÂSTIER, E. "Systêmatique des isoLopies" in GREIUAS, A. J,

(éd. ) Essais de sémlot,lque poétlque, Larousse, Paris, Lg72

Page 287: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

536

RÀSTIER, f. "§ur 1e développenent du concept d'isotopi-e", Àctes

sémiot j-sues*Documents No 29 , 1981.

RÀSTIER, f. "Peut-on définir sénantiquement Ie prototypê ?",

Sémiotiques, vo1. I, No L, 1991.

RASTIER, f. Sémantique et recheches cognitives, P.U.f. Paris,

1991.

RECÀNATI, F. La transparence et 1'énonciation, Seuii, Paris,

tg7 g

REICHIER, C. "La 1ltt.érature comme int,erprétation symboJ-1que " ,

ig REICHLER, C. ( sous la direction de ) f inlerorétatlon

des textes, Minuit, Paris, 1989.

RENISIO, À. Étude sur les dialectes berbères des Beni lznassen

du Rif et des Sanhadia du Srair, Leroux, Paris, 1931.

REY-HULMAN, D. "Procès d'énonciation dans 1es contes",

Llttérature N" 45 , L982.

RICOEUR, P. De f interprétatlon, Seull, Paris, 1965.

RICOEUR, P. temps et récit II. La confiquration du temps dans

1e récit de fict,ion, Seui1, Paris, 1983.

RICOEUR, P. "Entre herméneutique et sémiotiquê", Nouveaux actes

sémiotiques, 1990.

ROBERT, M. Roman des oriqlnes et oriqines du roman, Grasset,

Paris, L972.

Page 288: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

537

ROUSSEL, C. "Le conte et 1e mythe: histoire des enfants-cygnes"

in MAROTIN , f. ( éd' ) , Frontières du conte , éd. CNRS ,

Paris, t982.

SÀÂDâ, L. "Un problème de socio-sémiotique: les intersections

culLurelles", Actes du Ler conqrès d'études des cultures

méditerrarréennçs d'1nf luence arabo-berbère , (dactyl.og. ) 'SNED, A1ger, 1973,

SABIA, A. L'espace en arabe marocain. L'adverbe de 1ieq., îhèse

d'État, (dactylographlée), Fès, 1992.

SCHNITZER, L. Ce que clisent 1es contes, Sorbier, Paris, 1981'

TÀIEI , M. "L',écriture de 1a langUe berbère: problèmes de

notation" , Écriture et oralité, Revue de Ia FBcult,é des

Lettres et des Sciences Humaines de I'ès, numéro spécial 8,

1992.

TÀIrI, M. Le lexique berbère (parler du Maroc centraL): fofne-s,

sens et évo1uÈio-n, Hachette, Paris, 1991.

TODOROV, T. Introduction à 1a lit,térature fantastique, Seu11,

co11. Points, Paris, l-970.

VEtÀY-VALLÀIITIH, C. L'histoire des contes, Eayard, paris, 1992

WEBER, E. "PersgnnageS anonymes et noms des Personnages dans

Les U!!!q eL une nuits", I4À, No !52, 1983.

Page 289: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

538

YEttEs-cHÀoucHE, l{. "Tradition orale et espaces maghréblns,,, inEspaces maqhrébins: pratigues et enieux, Actes du c_olloque

de Taqhit, 23-26 nov. 1987.

YEI,LES-cHÀoucHE, M. "Dé1ire, désir, dlssidences: images de 1a

foli.e dans la tradit,lon orale maghrébifle'., I,es

prédicateurs profanes au Maqhreb, RMMM No 51, 19g9.

ZILBERBERG, C. "Les passions chez Freud,',

Bul1et,in N" 9, L979.

Actes sémioLiques-

ZILBERBERG,

No 30,

ZUHTHOR, P.

C. "A1ors

1981 .

! Raconte ! ", Àctes' sémi o-ti quq s :Documents

In_Èroduction à 1a poésie ora1e, Seui1, paris, igBC

Page 290: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

539

TA,B-L-Û de s PIAT-TE-RE,S

TTrTRODUC?TOfi.

P,a.EHTERE PARTIE: Le rôle du' discursi-ves

lexique dans les configurations

CffAPfTRE Tr Généralités. .

1, L'usage du mot dans 1e conte2. Position et mise au Point

CHAPTTRE ff: Champs et configurations discursives

t0

10

20

n1;+L

na2L1. Cadre spatial, .

* Exemples d'étude: 1e silo, 1e puits et 1a

grotte 46

Évaluation de 1'étude et élaboration d'une

* Organisation d'ensemble. . , 62

Espace des vivant,s et espace des morts. , 65

A. Le pouvoir divin 65

B. Étude de cas. '70

CHAPITRE IIl: Récurrence et lisibilité des motifs'...... 92

1. / l-xe/ba/ ( Ie corps ) eL ses parties. . 116

2. L'animal et. 1'humain: étude de cas.. L29

3. Quelques objets de consommation L42

4, Le motif de I'habit... . 145

CHAPTTRE lVz Évaluation de la description.. 183

1. Contenants / contenus et régularités syntactico-sémantiques. . 208

,)

3.

Page 291: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

Un autreA. LA

B. LE

Le temps

" /1-f

540

exemple: les relations Parentalesrelation Père / fiIs.. '

rapport frères / soeurs

comme cadre

)er/ et /L-efiYa/

220

224

235

231

241

255

(1'aurore et ie soir).

DEÜxrEilEPARIIEzConter:unactedéfinitoire..

Cï{APïÎRË lr Le

L. Comment

A. Lelf 1,u. !

t-'a Darl orL. ! LrÀ 4v! f

f aire- savoir: une f igure de manipul-at'ion ' 256

Ie conte se définit par lui-même 262

conLe: un univers de valeurs 210

êt.re et l-e paraitre: 1e rée1-vrai etiréel-mensonger, . . 282

réciter, assumer. ... 284

c)IAPïÿRE 11: / 1-mHa lya/ et sa structure hiérarchiqr:e de

contenu/i-Hkaya/ . . .. .. ..

le récit d'un rêve

3. /l-HkaYa/ eL Ie conte

CHAPI?RE TfIr Le conte: un univers d'union des

contraire s

1

2

/r'tezq/, un don de Dieu

La valeur dans 1'échange. . .

* ConcIusioIi. .

1. /1-mHalYa/ ,

2. I 1-HkaYa/ ,

JUU

3t)

11,,

?ROfSfEilg PAR?IE: rr(enlags», énonciation etfonctionnemenL d'un motif

mise en

344

358

368

382

385

CHAPITRE ft L'anthroponyme et 1'énonciation ' ' 385

1. Les anlhroponymes non motivés" " 406

2,LesnomspropresutiliséScommeanthroponymeS...40S3. Structures grammaticales de quelques

anlhroPonYmes motivês. .. ' 418

* /mqide// et / Hd'idwan/"" 421

Page 292: Etude d'un corpus de contes oraux au Maroc oriental (volume 2)

CA.ÀPITRE II-. /aHa)Lt ,

1. Le conteur et2, Un exemple de

communication

541

/aeawe6/ (contage, récitation). . . .

1'auditeur. . .

conLexte d'enquête eL de

472

456

474

CïiAPITRE IIIt Énonciation et lisibil1té de l1-mHajya/.. . 417* Érrotrciation et configuration: 1'exemple du

mariage. . 486

collclUsro§. . . 503

tsÏAT,ÏOGRAPHTË, 512

ANNEXE: Corpus et traduction. 1-310