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Etude de cas no 6 – Bangladesh
Source inattendue d’innovation dans les services bancaires à distance
Nomsa Kachingwe
Alexandre Berthaud Décembre 2013
2
Table des matières Page
I. Aperçu 3
II. Inclusion financière au Bangladesh 3
1. Contexte socioéconomique du Bangladesh 3
2. Caractéristiques du marché des services financiers 4
3. Cadre juridique et réglementaire pour les services financiers et postaux au Bangladesh 6
3.1 Cadre juridique et réglementaire pour les services financiers 6
3.2 Cadre juridique et réglementaire pour les services postaux 6
III. Bangladesh Post Office – Des mandats de poste au service bancaire mobile 7
1. Description du modèle d’entreprise pour les services financiers numériques 8
1.1 Service de mandats de poste mobiles 8
1.2 Carte de paiement postale 9
1.3 Service bancaire mobile 9
2. Fondements du modèle d’entreprise pour les services financiers numériques 10
3. Résultats obtenus 11
IV. Analyse du modèle d’entreprise – Questions clés et facteurs de réussite 11
V. Défis 15
VI. Conclusions et enseignements tirés 15
Appendice 17
3
I. Aperçu
Depuis un certain temps, Bangladesh Post Office, l’opérateur désigné du Bangladesh, joue un rôle important
dans l’accès aux services financiers dans les zones rurales et éloignées du pays. Avec un réseau très vaste
de 2000 bureaux de poste et 8500 points de vente dans les zones rurales, la poste bangladaise propose des
services de transferts de fonds, des comptes d’épargne et des plans d’assurance-vie. En 2010, la poste s’est
lancée dans un projet ambitieux consistant à développer et à fournir des services financiers numériques inno-
vants. La même année, elle a lancé un nouveau service de mandats de poste par téléphonie mobile (service
de mandats de poste mobiles) et la carte de paiement postale (Postal Cash Card), et, à la fin de 2012, le ser-
vice bancaire par téléphonie mobile (service bancaire mobile). Ces nouveaux services, destinés principale-
ment aux populations non bancarisées dans les zones rurales et éloignées, ont déjà obtenu un succès
remarquable. A ce jour, la poste bangladaise a émis plus de 11 millions de mandats de poste mobiles, pour
une valeur de 7 millions d’USD, et la carte de paiement postale a gagné 52 000 clients, un grand nombre
d’entre eux vivant dans les zones rurales. L’exemple de la poste bangladaise montre qu’avec une approche
appropriée les opérateurs désignés peuvent innover avec succès, et par conséquent contribuer de manière
significative à l’inclusion financière. Cette étude de cas fait partie d’une série d’études en cours de réalisation
par l’UPU afin de présenter les pratiques exemplaires s’offrant aux postes en matière d’inclusion financière.
Elle illustre le modèle d’entreprise adopté par la poste bangladaise pour proposer des services financiers
numériques et fournit des enseignements pour les autres opérateurs désignés désireux de numériser leurs
services financiers afin de mieux atteindre la population non bancarisée.
II. Inclusion financière au Bangladesh
Le Bangladesh a longtemps été considéré comme un modèle en matière d’inclusion financière, d’abord avec
l’émergence de Grameen Bank à la fin des années 70, puis avec la prolifération et l’importance croissante
des établissements de microfinancement tels que Bangladesh Rural Advancement Committee (BRAC), en
particulier dans les zones rurales. Malgré ces développements, l’accès aux services financiers de base reste
un défi pour beaucoup, en particulier pour les femmes, pour les agriculteurs marginaux, pour les entreprises
du secteur informel, et pour d'autres groupes socialement exclus. D’après les chiffres de la Banque mondiale,
seulement 39,6% de la population adulte possèdent un compte dans un établissement financier formel1. Lors-
que les services financiers quasi formels et informels sont pris en considération, la proportion d'adultes ayant
accès aux services financiers augmente de manière significative et atteint 76,8%2. Toutefois, l’augmentation
de la portée des services financiers formels est devenue une priorité pour le Gouvernement. Bangladesh
Bank, la banque centrale, a adopté d’importantes mesures ces dernières années pour promouvoir le déve-
loppement d'un système financier plus inclusif au Bangladesh.
1. Contexte socioéconomique du Bangladesh
Le Bangladesh compte une vaste population de 155 millions
d’habitants, dont 71% vivent dans les régions rurales. Ces
dernières années, des avancées significatives ont été réali-
sées en matière de développement socioéconomique, l’éco-
nomie bangladaise ayant crû constamment ces dix dernières
années, avec une croissance moyenne du produit intérieur
brut (PIB) de l’ordre de 6%. La croissance est principalement
alimentée par les exportations de produits manufacturés,
ainsi que par les améliorations apportées à la production agri-
cole, aux services et à la construction3. Fait intéressant, les
transferts de fonds des travailleurs expatriés contribuent éga-
lement de manière considérable à l’économie bangladaise,
puisque les transferts de fonds réalisés par les Bangladais
vivant à l’étranger s’élevaient à 14 milliards d’USD en 20134.
1 Banque mondiale (2011), Base de données sur l'inclusion financière à l'échelle internationale (Global Findex).
2 Institute of microfinance (2011), «Access to Financial Services in Bangladesh», résumé de recherche.
3 Banque mondiale (2013), Bangladesh Country Brief.
4 Bangladesh Bank (2013), Wage Earners’ Remittance Flows Data, accessible en ligne (www.bb.org.bd).
4
Pour ce qui est du développement social, le Bangladesh a connu une réduction remarquable de la pauvreté
depuis les années 90 alliée à une amélioration de l'espérance de vie, une baisse de la mortalité infantile et
une amélioration des taux d'alphabétisation et de scolarisation. Tout cela a lieu malgré un PIB par habitant de
747 USD, bien en deçà de la moyenne régionale (1388 USD)1. Cependant, comme c’est le cas dans beau-
coup de pays en développement et émergents, veiller à ce que la croissance économique reste solide et inclusive
représente un défi de taille pour le Gouvernement.
2. Caractéristiques du marché des services financiers
Le Bangladesh dispose d’un marché des services financiers relativement large, avec plusieurs banques, des
établissements financiers non bancaires, des intermédiaires du marché des capitaux et des établissements
de microfinancement. Le secteur bancaire se compose de quatre banques commerciales détenues par l’Etat
(SOCB), 39 banques commerciales privées et quatre banques de développement spécialisées, notamment
Grameen Bank, la fondation Palli Karma Sahayak («Rural Employment Support Foundation») et Bangladesh
House Building Finance Corporation. Il existe actuellement 29 établissements financiers non bancaires pro-
posant des services de financement à long terme, des services d’épargne et des services de capital-investis-
sement et 62 compagnies d'assurance, dont 44 proposent des services d'assurance générale. Les établisse-
ments de microfinancement sont devenus des acteurs importants sur le marché des services financiers du
Bangladesh, avec plus de 1000 établissements formels et informels proposant des services de microcrédits à
la fois dans les zones urbaines et dans les zones rurales2. Bangladesh Post Office joue également un rôle
important sur le marché des services financiers. Il offre des services d’épargne au nom du Ministère des finances
par le biais de sa caisse d'épargne postale, ainsi que d'autres services financiers, notamment des services
d’assurance postale, de mandats de poste mobiles, de cartes prépayées et le service bancaire mobile.
Etablissements financiers bancaires et non bancaires: les banques commerciales privées dominent le secteur
bancaire. Les actifs des banques privées représentaient 60% des actifs totals du secteur bancaire en 20113,
contre 35% en 20024. Les banques commerciales privées nationales sont principalement actives dans le prêt
aux grandes firmes industrielles et agricoles et prêtent de plus en plus aux petites et moyennes entreprises
(PME) et aux sociétés agricoles. Actuellement, le secteur bancaire possède un réseau cumulé de plus de
8000 succursales. Par comparaison, les établissements financiers non bancaires sont petits et relativement
sous-développés, avec un réseau total de seulement 164 succursales5. Les investissements des établisse-
ments financiers non bancaires sont également largement concentrés dans l’industrie, dans l’immobilier et dans le
logement. En conséquence, l’accès aux services bancaires et non bancaires est limité pour les consommateurs
de détail. La caisse d’épargne de la poste bangladaise (POSB), exploitée pour le compte de Directorate of
National Savings (DNS) du Ministère des finances bangladais, joue un rôle pour combler les lacunes. Les
comptes d’épargne et les bons de caisse sont proposés dans environ 2000 des 9886 points de vente de la
poste bangladaise6. Les produits d’épargne offerts comprennent l'épargne classique, l'épargne familiale pour
les femmes, les comptes de dépôts à terme fixe et tout une gamme de bons de caisse à long terme.
Compagnies d’assurance: les compagnies d’assurance proposent peu de services d'assurance aux consom-
mateurs à revenu faible, et ce malgré une clientèle pourtant nombreuse qui a enregistré ces dernières années
une croissance soutenue7. Bien que certaines grandes organisations non gouvernementales (ONG) propo-
sent des services de microassurance en matière de santé, d’invalidité et de décès, la Banque asiatique de
développement signale que ces initiatives n’ont toujours pas eu un impact significatif8. Dans ce cas, encore
une fois, la poste bangladaise joue un rôle essentiel en répondant à ce besoin non satisfait avec ses plans
d’assurance postale proposés dans les mêmes 2000 points de vente où sont offerts les services de la POSB. Les
produits d’assurance proposés incluent l’assurance-vie, l’assurance mixte et l’assurance mixte pour le mariage et
l’éducation. Les taux de prime perçus sont les plus bas du pays, et les produits sont proposés sur une base «ni
profit, ni perte», la totalité de l'excédent étant partagée entre les assurés sous forme de primes.
1 International Growth Centre (2013), «Bangladesh’s Achievements in Social Development Indicators: Explaining the
Puzzle», Research Brief, 13/0303. 2 Site Web de Bangladesh Bank (www.bb.org.bd).
3 Bangladesh Bank (2012), Annual Report 2011/2012.
4 Fonds monétaire international (2010), Bangladesh: Financial System Stability Assessment.
5 Bangladesh Bank (2012), Annual Report 2011/2012.
6 Société financière internationale (2011), Deposit Assessment in Bangladesh.
7 Banque asiatique de développement (2011), Developing Microinsurance Sector in Bangladesh.
8 Ibid.
5
Etablissements de microfinancement: les services de microfinancement au Bangladesh sont fournis par une
large variété d’établissements, notamment des ONG, des agences gouvernementales spécialisées, des ban-
ques commerciales publiques et privées et des banques de développement spécialisées. Les services fournis
par ces institutions comprennent habituellement des prêts généraux destinés aux activités indépendantes à
petite échelle, des prêts aux microentreprises, des prêts agricoles et des prêts pour la gestion de catastrophes.
Certains instituts de microfinance (IMF) proposent également des comptes d'épargne volontaire et de dépôt à
terme1. Le secteur s’est considérablement développé depuis vingt ans: il contribue désormais à hauteur de 3%
au PIB et sert plus de 25 millions de clients2. En août 2012, 651 établissements étaient agréés pour fournir
des services de microfinancement, quand bien même seuls 10 ONG-IMF importants et Grameen Bank compta-
bilisent plus de 80% de l’épargne totale et de tous les prêts en cours3. Malgré l’expansion bienvenue des IMF
au Bangladesh, des préoccupations se sont fait jour concernant le surendettement des emprunteurs et du fait
que beaucoup d’IMF n’ont pas réussi à atteindre le «noyau dur de la population pauvre». Quoi qu’il en soit,
les IMF sont devenus des acteurs essentiels sur le marché des services financiers au Bangladesh. Ils attei-
gnent des segments de la population et des secteurs de l'économie ayant peu ou pas accès aux banques
commerciales et à d’autres prestataires de services financiers.
Système national de paiement: les récentes avancées dans le domaine des services bancaires à distance ont
rendu nécessaire le développement d’un système de paiement automatisé au Bangladesh. Au cours des der-
nières années, Bangladesh Bank a mis en œuvre des initiatives en matière d’automatisation visant entre
autres à remplacer le système de compensation manuel, à introduire un système de transfert de fonds élec-
tronique et à mettre en place une plate-forme pour les services financiers mobiles. Le système de paiement
comprend maintenant la chambre de compensation automatisée du Bangladesh, le système de traitement
des chèques automatisé, le réseau de transfert de fonds électronique, des services financiers mobiles, des
fournisseurs de services de portail de paiement en ligne, la plate-forme de paiements nationale et des ser-
vices pour le commerce électronique et pour le commerce mobile4.
Développements récents dans les services financiers mobiles: bien que les services financiers par téléphonie
mobile n’en soient toujours qu’à un stade précoce de développement, des progrès considérables ont été
accomplis depuis que Bangladesh Bank a introduit des lignes directrices pour ces services en 2011. Au début
de 2012, 10 établissements financiers avaient lancé des services financiers mobiles, bien que seulement cinq
aient été actifs5. Les développements ayant gagné en ampleur le plus rapidement sont ceux portant sur la
fourniture de comptes accessibles par téléphone portable et sur les services de base de personne à per-
sonne (P2P). BRAC («bKash») et Dutch Bangla Bank sont actuellement les leaders sur le marché des ser-
vices mobiles et, à lui seul, BRAC possède une clientèle de plus de deux millions d’abonnés et un réseau de
plus de 40 000 agents6. D’après Bangladesh Bank, 28 établissements financiers possèdent actuellement des
licences pour proposer des services financiers mobiles et 19 déploiements mobiles sont maintenant actifs. Il a
été estimé que le marché des services financiers mobiles servait maintenant plus de 60 millions d'abonnés
uniques et que ce nombre devrait augmenter considérablement avec le temps7. La poste du Bangladesh a
également été à la pointe du développement en ce qui concerne les services financiers numériques. En 2010,
elle a lancé un nouveau service de mandats de poste mobiles (ou système de transfert de fonds électronique)
permettant aux clients d'envoyer des fonds depuis un établissement postal vers un autre via un téléphone
portable. Elle a également lancé une carte bancaire prépayée, la carte de paiement postale (Postal Cash
Card), en 2010, et un service bancaire mobile, «Post e-Pay», en 2012. Il s’agit des produits sur lesquels nous
nous concentrerons dans le présent rapport.
Dans l’ensemble, le marché des services financiers bangladais a considérablement progressé en matière
d’inclusion financière. Non seulement les banques et les autres établissements financiers formels commen-
cent à répondre aux besoins des marchés laissés pour compte, mais les IMF, la poste et les nouveaux pres-
tataires de services bancaires à distance jouent maintenant un rôle important pour atteindre la population non
bancarisée.
1 Site Web de Bangladesh Bank (www.bb.org.bd).
2 Ibid.
3 Ibid.
4 Site Web de Bangladesh Bank (www.bb.org.bd).
5 Bangladesh Bank (2012), «Mobile Financial Services in Bangladesh: An Overview of Market Development», document
d’orientation, juillet 2012. 6 Société financière internationale (2013), IFC Mobile Money Scoping Report: Bangladesh.
7 Ibid.
6
3. Cadre juridique et réglementaire pour les services financiers et postaux au Bangladesh
Le cadre juridique et réglementaire pour les services financiers au Bangladesh est particulièrement favorable
à l’inclusion financière, et à cet égard Bangladesh Bank joue un rôle crucial. Concernant les services postaux,
la poste bangladaise est traditionnellement chargée d'agir comme agent de mobilisation de l'épargne au nom
du Gouvernement et de fournir d'autres services financiers dans les régions rurales et éloignées du pays.
3.1 Cadre juridique et réglementaire pour les services financiers
Le système financier est principalement régulé par Bangladesh Bank, qui assure la surveillance et la régle-
mentation des banques commerciales publiques et privées et des établissements financiers non bancaires.
Bangladesh Bank reconnaît deux types de banques: les banques agréées, qui le sont en vertu de la loi sur les
banques (Bank Company Act) de 1991 (amendement apporté en 2013) et qui assument toutes les fonctions
bancaires, et les banques non agréées, des banques spécialisées aux fonctions restreintes. Plusieurs mesu-
res politiques ont été prises par Bangladesh Bank pour promouvoir l’extension des services bancaires à la
population non bancarisée. Plus spécifiquement, des directives ont été émises pour que les SOCB et les ban-
ques de développement spécialisées proposent des comptes sur mesure pour les agriculteurs, les jeunes
chômeurs, les plus démunis et les bénéficiaires des programmes de protection sociale. En outre, les banques
commerciales privées sont fortement encouragées à adopter des programmes d’inclusion financière dans le
cadre de leurs obligations de responsabilité sociale d’entreprise1.
Concernant les IMF, la loi sur l’Autorité de réglementation du microcrédit (Microcredit Regulatory Authority Act)
de 2006 a été établie pour mettre les ONG-IMF existantes sous surveillance et pour promouvoir la viabilité des
nouveaux IMF et veiller à la transparence des activités de microcrédit. Grameen Bank constitue néanmoins une
exception, car il continue d’opérer selon l’ordonnance sur Grameen Bank (Grameen Bank Ordinance) de 1983.
La loi sur l’Autorité de réglementation du microcrédit a également établi cette autorité comme principal organe res-
ponsable de la surveillance des IMF. Elle est notamment habilitée à émettre des directives sur les domaines d’acti-
vité, l’utilisation des bénéfices réalisés, les structures de gouvernance recommandées et les exigences en matière
de rapports pour les IMF2.
A la lumière des récentes avancées réalisées dans les services financiers mobiles, Bangladesh Bank a émis
en 2011 des directives en la matière destinées aux banques. Des directives connexes pour les agents bancaires
ont également été introduites en 2012. Les directives pour les services financiers mobiles en particulier recon-
naissent un seul modèle créé par les banques, même si les partenariats avec les opérateurs de réseaux
mobiles et d’autres prestataires de solutions ont été encouragés. En tant que telles, les directives imposent que les
comptes mobiles des clients restent sous le contrôle des banques. Par ailleurs, les comptes mobiles doivent être
classés séparément des comptes bancaires standard, et les banques doivent se conformer aux règles et règle-
ments sur la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme et de connaissance du client. Les
banques sont aussi responsables du choix, de la formation et du contrôle des agents de leur réseau.
Les transactions financières autorisées incluent le décaissement des fonds transférés depuis l’étranger, les ser-
vices de «cash in/cash out», les règlements de factures de services publics, les décaissements de salaires, les
transferts sociaux publics, les paiements d’impôts, le microfinancement et les transferts P2P entre détenteurs de
comptes mobiles enregistrés3. Mais pour Bangladesh Bank, le «cashing in/out» des transferts d’argent mobile par
les clients n’ayant pas de compte mobile est interdit4.
3.2 Cadre juridique et réglementaire pour les services postaux
Bangladesh Post Office, en sa qualité de département du Ministère de la poste et des télécommunications, n'est
pas officiellement régulé. Les principaux éléments de la législation régissant cependant les services postaux et
financiers fournis par l’opérateur désigné comprennent la loi sur la poste (Post Office Act) de 1898 (amendement
apporté en 2010), la loi sur les caisses d’épargne publiques (Government Savings Banks Act) de 1873 et l’ordonnance
sur les certificats d’épargne nationaux de la poste (Post Office National Savings Certificates Ordinance) de 1944.
1 Chowdhury, N. (2013), «Current Situation and Policies on Financial Inclusion – Perspectives Remittances», présentation
du pays devant l’Institut de la Banque asiatique de développement à l’occasion du forum 2013 sur l’inclusion financière dans la région Asie/Pacifique, les 11 et 12 juin 2013. 2 Gouvernement du Bangladesh (2006), Microcredit Regulatory Authority Act of 2006.
3 Bangladesh Bank (2011), Guidelines on Mobile Financial Services for the Banks.
4 Bangladesh Bank (2012), «Mobile Financial Services in Bangladesh: An Overview of Market Development», document
d’orientation, juillet 2012.
7
La loi sur la poste de 1898 fixe les règles sur la prestation des services postaux et sur la prestation des man-
dats de poste. Cette loi précise que la poste a le «pouvoir de gérer le système de mandats et d’établir les
règles nécessaires concernant les transferts de fonds, (notamment) la limite de montant pour laquelle les
mandats peuvent être émis; la durée pendant laquelle les mandats restent actifs; et les taux de commission
ou de frais à appliquer aux mandats»1. La loi sur les caisses d’épargne publiques de 1873 et l’ordonnance de
1944 sur les certificats d’épargne prévoient également des règles pour la gestion des comptes et certificats
d’épargne.
Les récents amendements apportés à la loi sur la poste, désormais appelée loi portant amendement sur la
poste (Post Office (Amendment) Act) de 2010, revêtent une grande importance en ce sens qu’ils permettent à
la poste d’offrir de nouveaux services à valeur ajoutée, comme d’autres services financiers2. En particulier, la
section 4A de la loi portant amendement délègue à la poste l’autorisation de «modifier, réorganiser ou adopter
de nouvelles technologies et de proposer de nouveaux services pour garantir la rapidité des services offerts
aux personnes comme elle le juge utile», et de «proposer des services de transfert de fonds, des services
bancaires, des services d’assurance-vie, individuellement ou par contrat conclu avec d’autres organisations
proposant les services susmentionnés aux personnes»3. La nouvelle loi permet également à la poste de nom-
mer des agents pour offrir ses services et d’agir comme agent pour d’autres prestataires de services4. Ces
dispositions ont ouvert la voie à l’introduction des nouveaux services financiers numériques de la poste.
En termes de surveillance, Bangladesh Bank régule et contrôle les nouveaux services financiers de la poste,
à savoir le service de mandats de poste mobiles, la carte de paiement postale et les services bancaires
mobiles5, tandis que le Ministère des finances contrôle la caisse d’épargne et les certificats d’épargne.
III. Bangladesh Post Office – Des mandats de poste au service bancaire mobile
Bangladesh Post Office a été créé il y a cent ans. Depuis, l’opérateur dési-
gné fournit une large gamme de services postaux et publics à la grande
majorité de la population. La poste offre des services de porte à porte et
compte 39 887 employés, répartis sur un vaste réseau de 9886 bureaux de
poste et points de vente. Sur ces établissements, 1426 sont des bureaux de
poste gérés par des salariés employés par le Gouvernement et 8260 sont
des points de vente dans les zones rurales gérés par des agents travaillant
sur une base ad honorarium6. Sur les 1426 bureaux de poste, 76% se trou-
vent dans des zones rurales7. La poste a récemment déployé cinq nouvelles
fourgonnettes servant de bureaux de poste mobiles pour servir les villes de
Dhaka, Chittagang, Khulna et Rajshahi8.
Les fonctions de la poste bangladaise sont réparties entre trois catégories: 1o les services postaux, 2
o les ser-
vices pour le compte de tiers et 3o les services financiers. Les services postaux comprennent la poste aux let-
tres, les colis et d'autres services postaux de base, alors que les services pour le compte de tiers incluent la
caisse d’épargne, les certificats d'épargne et les assurances-vie postales gérés par la poste pour DNS, rele-
vant du Gouvernement. Les services financiers exclusifs de la poste bangladaise comprennent les nouveaux
services financiers numériques: le service de mandats de poste mobiles (ou le service de transfert de fonds
électronique – EMTS), Postal Cash Card et le service bancaire mobile. Ces nouveaux services sont devenus
de plus en plus importants pour la poste bangladaise: il a été indiqué que les services financiers avaient
contribué au revenu total de la poste à hauteur de 60% en 2010, contre 48% en 20089.
1 Gouvernement du Bangladesh (1898), Post Office Act of 1898.
2 Ministère des postes et des télécommunications (2011), 2 Years Achievement: Bangladesh Post Office, consultation
possible en ligne (www.mopt.gov.bd). 3 Gouvernement du Bangladesh (2010), Section 4A, Post Office (Amendment) Act of 2010.
4 Ibid.
5 Sudhangshu Bhadra, Directeur adjoint, Bangladesh Post Office, discours prononcé à l’occasion de l’atelier de l’UPU sur
l’inclusion financière, le 31 octobre 2011. 6 UPU (2011), Statistique des services postaux 2011.
7 Société financière internationale (2011), Deposit Assessment in Bangladesh.
8 Site Web de Bangladesh Post Office (www.bangladeshpost.gov.bd).
9 UPU (2011), Statistique des services postaux 2011.
8
1. Description du modèle d’entreprise pour les services financiers numériques
En l’espace de trois ans, Bangladesh Post Office a conclu trois partenariats distincts pour offrir des services
financiers mobiles et électroniques novateurs sur son réseau. Le cas bangladais montre que les opérateurs
désignés sont en mesure de grimper «l’échelle» des services financiers postaux, en partant des services tra-
ditionnels de mandats de poste pour aboutir aux services financiers numériques sophistiqués, y compris là où
il existe des lacunes en matière d’Internet et de téléphonie mobile. Les modèles adoptés pour fournir chaque
service sont présentés ci-après.
1.1 Service de mandats de poste mobiles
En mars 2010, Bangladesh Post Office lançait un nouveau service de transfert de fonds (EMTS), communé-
ment appelé «service de mandats de poste mobiles», pour compléter son service traditionnel de mandat sur
support papier. Ce nouveau service, fourni en partenariat avec la société de téléphonie mobile Banglalink,
utilise les technologies électronique et de téléphonie mobile pour offrir des transferts d’argent instantanés natio-
naux et internationaux. Actuellement, le service est proposé dans 2750 points de vente de la poste, couvrant tous
les bureaux de poste aux niveaux des districts et sous-districts, ainsi que les points de vente ruraux de la poste.
Bangladesh Post Office possède un serveur central et un centre de renseignements pour contrôler et appuyer
ce service, et tous les lieux proposant le service EMTS ont été équipés d’un ordinateur, de la connectivité à Internet
et/ou de téléphones portables, utilisés pour émettre les mandats et envoyer les paiements au serveur central.
Pour accéder à ce service, un client doit se rendre à un bureau
de poste participant et demander un mandat en remplissant la
formule adéquate avec ses données personnelles et son
numéro de téléphone portable, et les données et le numéro
de téléphone portable du destinataire. Une fois l’argent
liquide remis, le personnel postal émettra le mandat, soit via
une interface Web lorsqu’une connectivité à Internet est
disponible, soit en utilisant un téléphone portable spéciale-
ment modifié (v. image ci-contre). Les données sont ensuite
transmises au serveur central, lequel génère automatique-
ment un numéro d’identification personnel unique (NIP) et
envoie un SMS à l'expéditeur sur son téléphone portable
accompagné du NIP. L’expéditeur doit ensuite transmettre le
NIP au destinataire, lequel soumet l’information à un employé
d’un bureau de poste participant afin de retirer le montant du transfert. Une fois le montant retiré, un SMS de notifi-
cation est envoyé à l’expéditeur pour confirmer la réalisation du paiement. Les clients sont facturés 27 BDT (envi-
ron 0,35 USD)1
pour 1000 BDT transférés, puis chaque tranche de 100 BDT transférés supplémentaire est
facturée 10 BDT. Le montant maximal pouvant être transféré par mandat mobile est actuellement de 50 000 BDT2.
Le service est disponible sur tous les réseaux de téléphonie mobile, et ni les expéditeurs ni les destinataires
ne sont obligés d'avoir un numéro de téléphone de l'opérateur Banglalink. A ce jour, la poste a émis plus de
11 millions de mandats, représentant une valeur totale de 54,7 millions de BDT (environ 7 millions d’USD)3.
En termes de modèle de partenariat adopté pour fournir ce service, l’accord avec Banglalink a été préparé
selon un arrangement prévoyant le partage des recettes4. Banglalink a financé l’acquisition de téléphones
portables pour un coût total de 7 millions de BDT, et la poste verse 7 BDT seulement à Banglalink pour cha-
que transfert d’argent réussi. En outre, Banglalink a fourni la connectivité au réseau dans tous les points de
vente postaux participants, tandis que la poste a développé le logiciel utilisé pour offrir le service et fournit le
personnel postal gérant le service5. La poste est également responsable de la formation des agents et
employés postaux pour la gestion et l’exploitation du réseau. Des plans sont actuellement en cours d’élabora-
tion en vue d'étendre le service aux autres points de vente du réseau postal.
1 Conversion en dollars des Etats-Unis calculée au taux de 77,75 BDT/USD. Le même taux est applicable à l’ensemble du
rapport. 2 Site Web de Banglalink Mobile Company Limited (www.banglalink.com.bd).
3 Nayeb Hossain, Directeur général, Bangladesh Post Office, discours prononcé lors du colloque mondial de l’UPU sur
l’inclusion financière au service du développement, le 24 octobre 2013. 4 Ibid.
5 Mobasherur Rahman, ancien Directeur général, Bangladesh Post Office, entretien réalisé pour Union Postale, n
o 2, 2010.
9
1.2 Carte de paiement postale
En 2010, la poste du Bangladesh a également introduit Postal Cash Card, une carte prépayée permettant aux
clients de déposer, retirer et transférer de l’argent (de carte à carte), d’effectuer des achats et de faire des
paiements de factures de services publics et également de percevoir des allocations et des prestations socia-
les du Gouvernement. Ainsi, un projet pilote est actuellement mis en œuvre dans le cadre du programme de
protection sociale, par lequel plus de 14 000 familles très pauvres ont reçu des fonds à certaines conditions
via la carte de paiement postale1.
Le service de carte est actuellement offert dans 1332 bureaux de poste, et des nouveaux distributeurs
d'argent ont été mis en place dans la capitale, Dhaka. Des terminaux de paiement ont été distribués dans les
bureaux de poste, dans les points de vente postaux et chez les commerçants concernés, et il est prévu d’ins-
taller 1200 distributeurs d’argent supplémentaires d’ici à juillet 2015. Dans les zones rurales et éloignées, la
poste emploie des facteurs équipés de terminaux de paiement afin d'offrir des services de porte à porte pour
l'encaissement et le versement de fonds aux détenteurs de Postal Cash Card2. Une clientèle de 52 000 titu-
laires existe déjà pour la carte et elle a accès aux services dans 598 bureaux de poste du pays3.
La carte constitue donc un moyen pratique d'accéder aux ser-
vices financiers à bas prix. Actuellement, ouvrir un compte et
recevoir une carte standard coûte 45 BDT (0,60 USD). Il est pos-
sible d’obtenir une carte avec les renseignements personnels et
la photo du titulaire du compte pour 110 BDT (environ 1,40 USD)4.
Les clients doivent payer des frais uniquement pour les retraits, à
hauteur de 1% du montant retiré. La carte est fournie et gérée en
collaboration avec Information Technology Consultants Limited
(ICTL) et la banque d'Etat Sonali Bank. La carte est hébergée
sur le réseau «Q-Cash» d’ICTL, l’un des plus larges réseaux de
distributeurs d’argent et de terminaux de paiement au Bangladesh.
Ce réseau se compose de 26 banques membres et de quelques autres établissements financiers, d’établis-
sements gouvernementaux et de vendeurs au détail5, ce qui signifie que la carte n’est pas fournie dans un sys-
tème en circuit fermé de la poste. Les titulaires de la carte peuvent donc avoir accès à leurs fonds par le biais des
distributeurs d’argent et grâce aux terminaux de paiement gérés par d’autres institutions participant à la plate-
forme interbancaire, en plus de ceux gérés par la poste bangladaise et par Sonali Bank.
Les distributeurs d’argent pour la carte de paiement postale sont fournis en partenariat avec Sonali Bank.
Selon le contrat de partenariat conclu avec Sonali Bank, les distributeurs d’argent doivent également porter le
logo de la banque, et la gestion de la trésorerie pour les distributeurs d’argent est réalisée par la banque. La
poste met à disposition les locaux et l'espace pour les distributeurs d'argent. Par ailleurs, les soldes des
comptes de la carte de paiement postale sont isolés de manière qu’ils ne soient pas employés de manière
inappropriée au sein de la poste et ils sont transférés à Sonali Bank sur une base mensuelle.
1.3 Service bancaire mobile
Le dernier service lancé par Bangaldesh Post Office est le service bancaire mobile, également appelé «Post
e-Pay». La poste a signé un accord avec Bangla Phone Limited et sa société sœur, Commlink Infotech Limi-
ted, en septembre 2012. Ce service est déployé clés en main, sans frais pour Bangladesh Post Office. Au
contraire, un arrangement basé sur le partage des recettes, très favorable à la poste, a également été convenu
dans le cadre d'un modèle de partenariat commercial de type «conception–construction–financement–exploi-
tation»6. Plus précisément, le projet a été estimé à 3 milliards de BDT (environ 39 millions d’USD), et les reve-
nus seront partagés selon un rapport de 42/58 les trois premières années (42% pour la poste, 58% pour
Bangla Phone), puis un rapport de 56/447.
1 Nayeb Hossain, Directeur général, Bangladesh Post Office, discours prononcé lors du colloque mondial de l’UPU sur
l’inclusion financière au service du développement, 24 octobre 2013. 2 UPU (2013), Global Panorama on Postal Financial Inclusion.
3 Ibid.
4 CGAP (2011), «Innovation in Branchless Banking at the Bangladesh Post Office», accessible en ligne (www.cgap.org).
5 Site Web du service Postal Cash Card (http://postalcashcard.gov.bd).
6 Site Web de Bangla Phone Limited (www.banglaphone.net.bd/BPO).
7 «Post Office Launches e-Pay: New service aims to earn more revenue», The Daily Star, décembre 2012. Accessible en
ligne (http://archive.thedailystar.net/newDesign/news-details.php?nid=261476).
10
Le service bancaire mobile fait avant tout office de portefeuille mobile et permet au client de stocker de
l’argent et d’effectuer des transferts P2P sans devoir se rendre dans un bureau de poste. Les détenteurs d'un
compte mobile peuvent aussi régler des factures, recevoir leurs salaires et les décaissements du Gouverne-
ment et payer des biens et des services en approchant leur téléphone portable au-dessus d'un lecteur spé-
cial. Chaque transaction est facturée 3 BDT, et les retraits d’argent («cash-out»), 5 BDT. Ce coût supérieur
pour le retrait est une caractéristique intégrée destinée à dissuader les clients d’effectuer des retraits et de
promouvoir l’utilisation de l’argent électronique. Pour le moment, les clients auraient besoin d’un smartphone
(avec accès à Internet activé) pour utiliser le service. Il est cependant prévu de proposer ce service aux
clients disposant d’un téléphone portable de base dans un avenir proche. Pour utiliser ce service, les clients
doivent ouvrir un compte dans un bureau de poste, ce qui leur coûte 10 BDT. Le service est pour le moment
proposé dans le cadre d’un projet pilote dans sept villes de chacune des divisions du pays (zones métropoli-
taines). Des plans prévoient l’extension au réseau élargi de bureaux de poste et à 100 000 agents supplé-
mentaires. Chaque agent recevra un «Bangla Pad», une tablette portative qui leur permettra de fournir les
services associés. La poste bangladaise a également dispensé une formation à son personnel pour lui per-
mettre d’offrir le service de manière efficace1.
Surtout, les comptes mobiles fournis dans le cadre du service bancaire mobile ne sont pas liés aux autres
comptes de la poste – les comptes de carte de paiement postale et les compte de la caisse d’épargne.
Conformément aux directives émises par Bangladesh Bank concernant les services financiers mobiles, les
comptes mobiles doivent être séparés des comptes standard. Cependant, on ignore si cette exigence limite
l’établissement d’un lien entre les comptes mobiles et les comptes de carte de paiement postale par
Bangladesh Post Office.
2. Fondements du modèle d'entreprise pour les services financiers numériques
Il y a peu de temps, Bangladesh Post Office traitait environ quatre millions de mandats de poste physiques
par an. Ce chiffre a considérablement diminué et est passé à 2,8 millions, en raison de la concurrence des
sociétés de messagerie privées2. L’introduction du nouveau système de mandats de poste mobiles et des
autres services financiers numériques devait permettre à la poste de rester un acteur principal sur le marché
des services financiers et des transferts de fonds. Toutefois, la poste bangladaise, en tant qu’agence gouver-
nementale, n’aurait pas eu les moyens de lancer et gérer les services financiers numériques seule. En for-
mant divers partenariats, la poste a pu obtenir les investissements en capitaux, la technologie et l'infrastruc-
ture réseau dont elle avait besoin. Ces partenariats ont également permis de veiller à ce que le personnel et
les agents postaux obtiennent les compétences techniques nécessaires pour gérer efficacement les nou-
veaux services.
Partenariat avec la société de téléphonie mobile Banglalink: Banglalink est le deuxième opérateur de réseau
de téléphonie mobile au Bangladesh et il dispose d’une zone de couverture de réseau très large. Ce partena-
riat permet donc à la poste du Bangladesh d’assurer l’accès au service de mandats de poste mobiles dans un
grand nombre d’établissements postaux, en particulier dans les zones où il existe peu ou pas de connectivité
à Internet.
Partenariat avec ITCL et Sonali Bank: en ce qui concerne le réseau, puisque ITCL gère l’un des plus vastes
réseaux de distributeurs d’argent et de terminaux de paiement dans le système bancaire, le bureau de poste
peut offrir un bon niveau d’interopérabilité aux utilisateurs de Postal Cash Card, et ainsi garantir un accès
pratique et facile aux services financiers. Par ailleurs, l’accord avec Sonali Bank permet à la poste de partager
les risques liés à la gestion de la trésorerie ainsi que les coûts d’installation des distributeurs d’argent dans le
pays, qui peuvent être considérables.
Partenariat avec Bangla Phone Limited: ce partenariat, dans lequel Bangla Phone est responsable de toute la
mise en œuvre et gestion du service bancaire mobile, ainsi que de l’ensemble des coûts du service, permet à
la poste bangladaise d’utiliser son réseau d’établissements postaux pour étendre ses services financiers à
une population plus large, sans devoir assumer tous les coûts de prestation du service.
1 Ibid.
2 Mobasherur Rahman, ancien Directeur général, Bangladesh Post Office, entretien réalisé pour Union Postale, n
o 2, 2010.
11
3. Résultats obtenus
Depuis l’introduction des services financiers numériques à la poste, la «popularité de Bangladesh Post Office
a augmenté de jour en jour»1. En 2013, les recettes de la poste ont augmenté de 240 000 000 de BDT (envi-
ron 3 millions d’USD) par rapport à l’année précédente, principalement en raison de la croissance et du suc-
cès de ses nouveaux services financiers. Le revenu net de la poste a également considérablement augmenté
en 2013, pour atteindre 750 millions de BDT2. Le service de mandats de poste mobiles a connu un succès
particulier et représentait 22,5% du marché des transferts de fonds au Bangladesh en juin 20113. Dans
l’avenir, ce service devrait présenter un taux de croissance de 5 ou 6%.
IV. Analyse du modèle d’entreprise – Questions clés et facteurs de réussite
Cette section contient une analyse du modèle d’entreprise adopté par Bangladesh Post Office en termes de
principaux facteurs de réussite pour l’inclusion financière postale, mis en évidence dans Global Panorama on
Postal Financial Inclusion de l’UPU. Ces facteurs comprennent le réseau, le personnel, la capacité financière,
la confiance, l’automatisation et l’intégration des processus, la volonté de favoriser l’inclusion financière, la
gouvernance, les cadres juridique et réglementaire, le marketing et la flexibilité. Un résumé de l’analyse figure
dans le tableau 2, qui montre les forces, les faiblesses, les possibilités et les menaces (SWOT) de
Bangladesh Post Office.
Tableau 2 – Analyse SWOT des services financiers numériques proposés par Bangladesh Post Office
Forces
– Partenariats permettant à Bangladesh Post Office
de partager les risques d’investissement et d’obte-
nir l’infrastructure technologique et réseau et les
compétences y relatives nécessaires
– Interopérabilité entre les réseaux de téléphonie
mobile et le réseau Q-Cash de distributeurs et de
terminaux de paiement rendant les services faci-
lement accessibles aux clients
– Bonnes mesures incitatives proposées au person-
nel postal pour promouvoir les nouveaux services
financiers
Faiblesses
– Approche verticale au développement et à l’exploi-
tation du service bancaire mobile et de la carte de
paiement postale empêchant les produits d'être
connectés pour des raisons pratiques
– Pénurie de personnel qualifié, notamment dans
les bureaux des zones rurales, entravant l’exten-
sion des services financiers numériques vers ces
zones
– Utilisation restreinte de l’ensemble du réseau
puisque 20% seulement des bureaux de poste pro-
posent les nouveaux services financiers
Possibilités
– Potentiel pour connecter le service bancaire mobile
et la carte de paiement postale pour une meil-
leure commodité
– Possibilité de partenariats avec les IMF et/ou les
SOCB pour offrir le microcrédit par le réseau de
téléphonie mobile ou par la carte de paiement
postale
Menaces
– Concurrence des solutions mobiles et électro-
niques existantes sur le marché des services
financiers qui pourrait limiter la croissance du ser-
vice bancaire mobile de la poste en particulier
– Autre
1 Nayeb Hossain, Directeur général, Bangladesh Post Office, discours prononcé lors du colloque mondial de l’UPU sur
l’inclusion financière au service du développement, le 24 octobre 2013. 2 Ibid.
3 Sudhangshu Bhadra, Directeur adjoint, Bangladesh Post Office, discours prononcé à l’occasion de l’atelier de l’UPU sur
l’inclusion financière, le 31 octobre 2011.
12
a) Réseau
Les opérateurs désignés peuvent promouvoir l’inclusion financière avec succès s’ils sont en mesure d’utiliser
la totalité du réseau postal et d’assurer la connectivité dans les établissements postaux ainsi que la capillarité
du réseau postal (forte densité du réseau postal)1. Comme cela a été mentionné dans les sections précé-
dentes, la poste bangladaise dispose d’un vaste réseau de bureaux de poste et de points de vente, avec
9886 établissements postaux au total. Toutefois, les services financiers sont actuellement offerts sur 20%
seulement de l’ensemble du réseau postal. Cela signifie que le potentiel d’extension des nouveaux services
financiers à l’ensemble de la population n’est pas encore exploité.
En termes de connectivité, il a été indiqué que seuls 100 bureaux de poste disposaient d’une connexion à
Internet en 2010, ce qui représente seulement 1% du réseau postal. Il s’agit d’une véritable faiblesse étant
donné que la connectivité est nécessaire pour offrir aux clients un accès aux informations sur leurs comptes
en temps réel. Toutefois, la poste a pu faire face à cette faiblesse, pour partie en utilisant la connectivité au
réseau de téléphonie mobile dans les établissements postaux ne disposant ni d’une connexion à Internet ni
d’une alimentation en électricité fiable. La poste a déjà équipé 8500 Directeurs de bureaux de poste ruraux de
cartes SIM et de téléphones portables, cela afin que les bureaux de poste des zones très rurales et éloignées
soient toujours capables d’effectuer des transferts de fonds pour les clients2. Cela est important pour aider à
repenser notre approche à l’amélioration de la connectivité et de l’électrification des bureaux de poste dans
les pays en développement. En moins de trois ans, avec un investissement minimal, le Bangladesh a équipé
8500 bureaux de poste pour qu’ils puissent proposer des services financiers. Cela pourrait également être
réalisé dans de nombreux endroits en Afrique subsaharienne où l’alimentation en électricité est au mieux
irrégulière et où la connectivité est inexistante dans les bureaux de poste.
Enfin, concernant la capillarité, Bangladesh Post Office s’en sort relativement bien par rapport aux normes
régionales. En termes de densité postale par zone (zone moyenne couverte par un bureau de poste perma-
nent en kilomètres carrés), le Bangladesh compte un bureau de poste pour 14,57 km2
, alors que la moyenne
pour le sud de l’Asie est d’un bureau pour 29 km2. En termes d’habitants, le nombre moyen d’habitants servis
par un bureau de poste permanent est d’environ 15 000, contre 9000 en moyenne pour l’Asie du Sud3.
Cependant, les moyennes de l’Asie du Sud pour la densité postale sont les plus faibles, tous continents
confondus, indiquant que la présence postale est la plus élevée par rapport aux autres régions. Par consé-
quent, la poste bangladaise n’a pas forcément besoin d’ouvrir de nouveaux bureaux. A la place, elle devrait
recruter un grand nombre d’agents qui pourraient offrir ses services financiers en étant encore plus proches
de la population que ne le sont actuellement les bureaux de poste existants.
b) Personnel
Le personnel peut constituer un atout ou un frein important pour les opérateurs désignés, en particulier pour
la fourniture des services financiers postaux. La poste du Bangladesh compte actuellement 39 000 employés.
Le succès obtenu par la poste pour la fourniture des nouveaux services financiers peut être attribué à
l’engagement du personnel postal et de la direction dans l’apprentissage des nouvelles technologies et à la
promotion des services. Cela a été réalisé avant tout grâce à des mesures incitatives. Ainsi, les responsables
des différents établissements postaux reçoivent une commission pour chaque transaction réalisée, et les
commissions sont plus élevées si le responsable doit utiliser ses propres ressources pour effectuer le verse-
ment d’une transaction dans les cas où l’établissement postal manque de liquidité4. Il s’agit d’un excellent
moyen de réduire les problèmes liés au manque de fonds pour réaliser les versements dans les zones
rurales. De plus, les cartes SIM fournies aux responsables postaux leur permettent de vendre des unités de
communication aux clients postaux, ce qui leur apporte un revenu supplémentaire et les encourage à rester
dans les bureaux de poste en se concentrant sur les services postaux plutôt que sur d’autres services5.
1 UPU (2013), Global Panorama on Postal Financial Inclusion.
2 Mobasherur Rahman, ancien Directeur général, Bangladesh Post Office, entretien réalisé pour Union Postale, n
o 2, 2010.
3 Les chiffres pour le Bangladesh proviennent de l’UPU (Statistique des services postaux 2010); les moyennes régionales
proviennent également de l’UPU (Global Panorama on Postal Financial Inclusion (2013)). 4 CGAP (2011), «Innovation in Branchless Banking at the Bangladesh Post Office», accessible en ligne (www.cgap.org).
5 Mobasherur Rahman, ancien Directeur général, Bangladesh Post Office, entretien réalisé pour Union Postale, n
o 2, 2010.
13
Par ailleurs, le personnel postal est en formation continue, et les compétences techniques nécessaires ont été
transférées par le biais des contrats de partenariats conclus par la poste. La poste du Bangladesh indique
que, pour les services de transferts de fonds électroniques, des centaines d’agents postaux sont formés
chaque mois dans les nouveaux bureaux et points de vente où le service sera proposé.
Toutefois, la poste doit toujours faire face à une sérieuse pénurie de personnel qualifié. Ce problème est
aggravé par le fait que, en sa qualité d’agence gouvernementale, la poste ne peut pas recruter du personnel
selon son bon vouloir, mais doit passer par le Ministère des finances. Concrètement, cela signifie que chaque
nouveau recrutement, même pour les employés de guichet, doit être approuvé par le Ministère des finances,
freinant ainsi le développement de services financiers modernes. Dès lors, le manque de personnel qualifié
peut être un facteur clé limitant l’extension des nouveaux services financiers à d’autres bureaux de poste du
réseau. Quoi qu’il en soit, la poste s’est lancée dans un projet destiné à consolider la capacité technique de
son personnel et de ses Directeurs1.
c) Capacité financière
De manière générale, un opérateur désigné présentant des résultats nets positifs peut mieux couvrir les
investissements dans les nouvelles technologies et mieux gérer l'exploitation quotidienne du bureau de
poste2. La poste bangladaise a été déficitaire en 2009 et 2010, les dépenses d’exploitation ayant considéra-
blement augmenté entre 2007 et 2010, alors que les recettes ont diminué. Toutefois, cette situation s’est
inversée puisque la poste présente maintenant des résultats nets positifs, largement en raison du succès des
services financiers récemment lancés.
Par ailleurs, grâce aux partenariats établis avec les fournisseurs de technologie et d'autres services, la poste
a pu générer des revenus tout en transférant et/ou partageant le coût de prestation des services. Par
exemple, comme cela a déjà été mentionné, le partenariat avec Sonali Bank permet à la poste de transférer
les risques liés à la gestion de la trésorerie et les coûts liés à la carte de paiement postale, et de partager les
coûts d'installation des distributeurs d'argent. Il s’agit d’activités que la poste n’aurait pas pu entreprendre
seule d’un point de vue financier.
En termes de liquidité, Bangladesh Post Office n’a pas connu de graves manques de fonds du fait de son
statut d’institution gouvernementale et du fait que le Gouvernement lui fournit ses facilités de trésorerie dans
tout le pays3. Cependant, il existe des problèmes de sécurité liés à la distribution d’argent dans les zones
fortement rurales et éloignées, d’autant plus que, dans ces endroits, la maison du Directeur d’un bureau de
poste fait office de bureau de poste. Les Directeurs de poste des zones rurales utilisent la plupart du temps
leur propre argent pour payer les transferts de fonds. Ils reçoivent le paiement du bureau de poste secondaire
avec leur commission deux ou trois jours après.
d) Automatisation et intégration du processus
Un autre facteur essentiel pour le succès des services financiers postaux concerne l'automatisation et l'inté-
gration du processus. Pour que le réseau postal fonctionne efficacement, les processus internes doivent être
automatisés et intégrés. A cet égard, la poste bangladaise a accompli des progrès, en particulier en ce qui
concerne le service de mandats de poste mobiles. Par exemple, le serveur central installé pour gérer le ser-
vice de mandats de poste mobiles crée un journal d’audit automatique lors du traitement des transactions.
La poste a récemment mis en œuvre un projet relatif à l’automatisation des processus de la poste visant à auto-
matiser les processus dans 134 bureaux, notamment dans 71 bureaux de poste principaux et dans 13 centres
de tri principaux. Le projet a impliqué l’installation de matériel informatique et une application logicielle en
ligne intégrée dans les bureaux de poste sélectionnés.
e) Volonté d’encourager l’inclusion financière par le biais de la poste
Pour que les services financiers contribuent significativement à l’inclusion financière, il faut que le Gouverne-
ment, Bangladesh Bank et la Direction de la poste manifestent une forte volonté. Dans le cas de Bangladesh
Post Office, toutes les parties ont montré un grand engagement dans la prestation des nouveaux services
financiers numériques via le réseau postal.
1 Site Web de Bangladesh Post Office (www.bangladeshpost.gov.bd).
2 UPU (2013), Global Panorama on Postal Financial Inclusion.
3 Mobasherur Rahman, ancien Directeur général, Bangladesh Post Office, entretien réalisé pour Union Postale, n
o 2, 2010.
14
Le Gouvernement a apporté un soutien direct à la poste du fait de son statut d’institution gouvernementale.
L’initiative «Digital Bangladesh» a également contribué à soutenir les efforts visant à numériser les services
offerts par Bangladesh Post Office, en particulier dans les zones rurales. Par exemple, la fourniture de sub-
ventions et de transferts sociaux et de transferts au moyen de la carte de paiement postale révèle une volonté
non seulement d'apporter aux pauvres un filet de protection sociale, mais aussi de moderniser les services
financiers proposés par la poste. Pour sa part, Bangladesh Bank a aidé la poste à fournir ses services finan-
ciers mobiles et électroniques sans lui demander de se conformer à la lourde réglementation du secteur
financier, et ce même si la poste n’est pas une institution financière agréée.
Enfin, le développement et le succès des nouveaux services financiers numériques peuvent également être
mis au crédit de la Direction de la poste bangladaise. L’implication personnelle de Mobasherur Rahman,
l’ancien Directeur général, et de Nayeb Delowar Hossain, l’actuel Directeur général, en particulier a été parti-
culièrement importante dans la numérisation des services financiers de Bangladesh Post Office.
f) Gouvernance entre la poste et les services financiers postaux
Les tendances récentes dans le monde indiquent que les opérateurs désignés bâtissent des entités juridique-
ment indépendantes pour fournir les services financiers à travers le réseau postal. Dès lors, la gouvernance
entre les activités postales de base et les services financiers postaux devient un facteur essentiel de la
réalisation de l’inclusion financière. Contrairement à la tendance, Bangladesh Post Office offre les deux types
de services – postaux et financiers – «sous le même toit», au sein de l’institution gouvernementale. Le cas de
la poste bangladaise est néanmoins intéressant, car elle détient une part significative de l’épargne pour le
compte du DNS tout en offrant ses nouveaux services financiers, de manière «exclusive», et qui ne sont pas
liés à la caisse d’épargne.
Alors que la poste a établi une direction des affaires bancaires et des assurances pour gérer la caisse
d’épargne, les certificats d’épargne et l’assurance-vie de la poste, toutes les décisions financières et adminis-
tratives relatives à ces services sont prises par le Ministère des finances. La poste doit encore établir une
direction pour ses nouveaux services financiers. Le principal inconvénient de cette organisation est que les
services financiers de la poste, que ce soit l'épargne ou le service bancaire mobile, ne peuvent pas être inter-
connectés de manière à accommoder les clients de la poste. C’est un problème assez important, car les
détenteurs d’un compte d’épargne souhaitant utiliser la carte de paiement postale ou le service bancaire
mobile doivent ouvrir un compte séparé à la poste, alors qu’ils pourraient facilement lier chaque service à un
seul compte souscrit auprès de Bangladesh Post Office. C’est particulièrement pertinent si l’on considère que
la caisse d’épargne de l’opérateur désigné détient plusieurs millions de comptes, bien plus que le nombre
d’utilisateurs des nouveaux produits mobiles. Des économies d’échelle et de gamme pourraient être réalisées
en liant les produits.
g) Cadre juridique et réglementaire
Comme expliqué dans la section II, chiffre 3.1, le cadre juridique et réglementaire de la poste est favorable aux services financiers postaux. Des récentes modifications apportées en 2009 à la loi sur la poste (qui ont élargi les droits de la poste pour qu’elle puisse offrir des services financiers) et l’introduction de lignes direc-trices pour les agents bancaires par Bangladesh Bank ont permis de clarifier les conditions de fourniture des services pour le compte de tiers par la poste. Toutefois, à l’intérieur de ce cadre, les lignes directrices rela-tives à la prestation de services financiers par téléphonie mobile apportent une limitation importante. En parti-culier, l’obligation de séparer les comptes mobiles des comptes standard signifie que la poste et d'autres éta-blissements financiers ne peuvent pas lier les services pour les comptes existants aux nouveaux services mobiles. Cet aspect peut constituer un frein à la croissance du nouveau service bancaire mobile de la poste.
h) Confiance et flexibilité
Pour Bangladesh Post Office, la confiance et la flexibilité sont très importantes pour la prestation des services
financiers, d’autant plus que plusieurs bureaux de poste sont exploités par un ou deux agents dans les zones
très rurales et éloignées. Les clients doivent alors pouvoir faire confiance au personnel postal pour remettre
les fonds de leur part, ou pour fournir de l'argent lorsque des retraits sont demandés, par exemple. L’efficacité
du service de mandats de poste mobiles, par exemple, a permis aux clients de mieux faire confiance en la
poste en tant que prestataire de services financiers. La flexibilité de la poste a également contribué au succès
de ses nouveaux services financiers. Ainsi, les heures d’ouverture en soirée dans certains bureaux, l’utilisa-
tion de fourgonnettes servant de bureaux de poste mobiles et d'employés assurant la prestation des services
postaux et financiers à domicile sont des exemples remarquables illustrant la flexibilité de Bangladesh Post Office.
15
V. Défis
Tout compte fait, la poste bangladaise a réalisé des progrès considérables en matière de développement et
prestation des services financiers numériques, en se classant devant plusieurs prestataires de services finan-
ciers et d'opérateurs de téléphonie mobile. Mais elle fait actuellement et fera à l’avenir face à certains défis,
au fur et à mesure de l’extension de ses services financiers à travers son réseau. Il s'agit notamment des
défis suivants:
– Concurrence des autres fournisseurs de services financiers mobiles: bien que la poste fût la première
institution à offrir un service mobile, avec son service de mandats de poste mobiles, les banques et les
IMF ont déjà dépassé Bangladesh Post Office sur le marché de l’argent mobile. Le service bancaire
mobile récemment lancé fera donc face à une concurrence rude des services similaires de BRAC/
bKash et Dutch Bangla Bank à mesure de l’extension de ces services.
– Déconnexion entre les services financiers existants et les nouveaux services financiers pouvant entra-
ver la croissance de ces derniers: comme souligné dans la section précédente, l’approche verticale
adoptée dans le développement et la prestation des services financiers par la poste bangladaise peut
devenir un frein à la croissance des nouveaux services financiers récemment lancés par Bangladesh
Post Office.
– Capacité technique limitée des Directeurs et employés postaux pouvant limiter l’extension des nou-
veaux services financiers vers les bureaux de poste ruraux: alors que Bangladesh Post Office a bien
tiré parti des technologies mobiles pour permettre d’offrir simplement les services financiers dans cer-
tains bureaux de poste ruraux, plus de personnel qualifié sera nécessaire pour soutenir l’extension de
ses nouveaux services financiers vers tous les bureaux des zones rurales.
VI. Conclusions et enseignements tirés
Comme c’est le cas dans beaucoup d’autres pays en développement et émergents, les services financiers
mobiles prennent de l’importance dans le cadre de l'inclusion financière. Au Bangladesh, l’opérateur désigné
est à la pointe de l’utilisation des technologies mobiles et électroniques pour la prestation des services finan-
ciers sur un réseau postal large et à grande portée. Ce que montre le cas de Bangladesh Post Office, c’est
qu’avec l’aide des partenaires adéquats les opérateurs désignés peuvent moderniser leurs services tradition-
nels de transfert de fonds et développer des services financiers plus novateurs répondant aux besoins de la
population non bancarisée: des services de paiement, mais aussi des services bancaires, comme les
comptes virtuels, sur un réseau de téléphonie mobile ou sur une carte prépayée. Certains enseignements en
particulier ont été tirés:
– Pour les opérateurs désignés manquant de ressources financières et humaines, des partenariats avec
des opérateurs des télécommunications et des fournisseurs de technologie peuvent permettre aux
postes d’assurer une meilleure prestation des services financiers numériques.
– Bien que des partenariats bien arrangés apportent un capital financier et humain efficace, les opéra-
teurs désignés ont encore besoin de veiller à ce que les Directeurs et le personnel soient dotés des
compétences techniques nécessaires pour gérer et exploiter les nouveaux services. C’est particulière-
ment le cas lorsque des nouveaux services sont étendus aux zones rurales.
– L’interopérabilité à travers les réseaux de téléphonie mobile pour les services mobiles et sur les
réseaux de distributeurs d’argent et de terminaux de paiement pour les services de carte électronique
est essentiel si les opérateurs désignés doivent offrir un accès facile et pratique aux services financiers
postaux.
– Les opérateurs désignés devraient intégrer des mesures incitatives dans leurs services mobiles ou de
cartes pour inciter le personnel à promouvoir ces services. Bangladesh Post Office a fait cela, et les
services mobiles ont donné de biens meilleurs résultats qu’au Pakistan, où des initiatives similaires ont
été adoptées par la poste, sans qu’aucune mesure incitative n’ait été prévue pour le personnel.
– Verser des commissions plus élevées aux Directeurs des bureaux de poste payant de leur poche les
services de la poste lorsque les bureaux manquent d’argent semble être une solution intéressante,
pour autant qu'un dispositif de contrôle et d’audit soit en place. Cela peut aider à répondre aux pro-
blèmes de liquidité rencontrés par les bureaux de poste ruraux, qui éprouvent souvent des difficultés à
remettre les fonds rapatriés par manque d'argent liquide.
16
– Offrir des solutions de cartes de paiement postales et de services financiers mobiles est une bonne
idée, car elles ne répondent pas forcément aux besoins des mêmes clients.
– Les opérateurs désignés doivent considérer la façon dont les nouveaux services financiers s’accorde-
ront avec les services financiers existants. Lier les services financiers comme les comptes d’épargne,
les portefeuilles électroniques et mobiles, quand cela est possible et autorisé, peut apporter plus de
commodité aux clients de la poste.
17
Appendice
Tableau 1 – Aperçu du contexte socioéconomique et de l’inclusion financière au Bangladesh
Indicateurs généraux Bangladesh Inde Asie du Sud
(moyenne régionale)
Pays à revenu
faible (moyenne)
Population (en millions d’habitants) 154,7 1236,7 1649,2 …
Densité de population (habitants au km2) 1174,3 410,7 341 …
Population adulte, 15–64 ans
(% de la population totale)
64,7 65,4 65 57
Population rurale (% de la population totale) 71,1 68,3 69 72
PIB par habitant (en USD) 747,3 1489,2 1388 592
Abonnés à la téléphonie mobile
(pour 100 personnes)
63,8 68,7 69 41
Utilisateurs d’Internet (pour
100 personnes)
6,3 12,6 11,6 6,9
Indicateurs d’inclusion financière
Compte dans une institution financière
formelle (% 15 ans et plus)
39,5 35,2 32,9 23,7
Compte dans une institution financière
formelle en zone rurale (% 15 ans et plus)
38,5 33,1 31,3 21,9
Compte utilisé pour recevoir les salaires
(% 15 ans et plus)
3,1 8,3 7,4 5,9
Compte utilisé pour recevoir des
paiements du Gouvernement (% 15 ans
et plus)
1,9 4,0 3,5 2,5
Compte utilisé pour recevoir des fonds
(% 15 ans et plus)
3,0 1,9 2,0 4,8
Compte utilisé pour envoyer des fonds
(% 15 ans et plus)
1,2 1,8 1,6 2,8
Epargne auprès d’une institution
financière l’an passé (% 15 ans et plus)
16,6 11,6 11,1 11,5
Prêt accordé par une institution
financière l’an passé (% 15 ans et plus)
23,3 7,7 8,7 11,4
Téléphone portable utilisé pour payer les
factures (% 15 ans et plus)
1,0 2,2 2,0 2,6
Téléphone portable utilisé pour recevoir
de l’argent (% 15 ans et plus)
1,2 2,0 1,9 9,1
Téléphone portable utilisé pour envoyer
de l’argent (% 15 ans et plus)
1,0 0,6 0,8 7,1
Paiements électroniques utilisés pour
faire des paiements (% 15 ans et plus)
0,5 2,0 1,6 1,9
Indicateurs d’accès financier
Succursales de banques commerciales
pour 1000 km2
64,7 33,2 … …
18
Indicateurs généraux Bangladesh Inde Asie du Sud
(moyenne régionale)
Pays à revenu
faible (moyenne)
Succursales de banques commerciales
pour 100 000 adultes
8,1 11,4 … …
Distributeurs automatiques pour 1000 km2 40,3 32,7 … …
Distributeurs automatiques pour
100 000 adultes
5,0 11,2 … …
Source: les indicateurs généraux sont ceux de 2012, à l’exception de la densité de population (2011) (don-
nées des indicateurs de développement de la Banque mondiale); les indicateurs d’inclusion financière sont
ceux de 2011 (données provenant de la base de données sur l'inclusion financière à l’échelle internationale
(Global Findex) de la Banque mondiale); les indicateurs d’accès financiers sont ceux de 2012 (données pro-
venant du Fonds monétaire international (enquête sur l’accès financier)).
Tableau 2 – Structure du marché financier bangladais (juin 2012)
Etablissements financiers
réglementés
Nombre d’institutions Nombre de succursales % de l’actif du secteur
Banques
Banques commerciales
publiques
4 3449 27,2
Banques de développement
spécialisées
4 1417 5,7
Banques commerciales privées 30 3130 60,8
Banques commerciales
étrangères
9 63 6,3
Total 47 8059 100,0
Etablissements financiers non
bancaires
Publics 2 … …
Coentreprises 8 … …
Privés 20 … …
Total 30 161 …
Compagnies d’assurance
Assurance-vie:
– Publiques
– Privées
1
43
… …
Autres:
– Publiques
– Privées
1
17
… …
Total 62 … …
IMF
Nombre total d’IMF agréés 576 18 066 …
Source: Bangladesh 2012 Bank Annual Report; Insurance Development and Regulatory Authority.
19
Tableau 3 – Résumé des services financiers mobiles (septembre/octobre 2013)
No
de série
Description Montant
(septembre 2013)
Montant (octobre 2013) Evolution
1. Nombre de banques
approuvées
28 28 –
2. Nombre de banques ayant
commencé à proposer les
services financiers mobiles
18 19 5,55%
3. Nombre d’agents 134 337 146 955 9,39%
4. Nombre de clients enregistrés 8 926 000 9 978 000 11,79%
5. Nombre de comptes actifs 3 691 000 4 088 000 10,76%
6. Nombre total de transactions 24 335 986 23 558 533 –3,19%
7. Total des transactions (en taka) 50 783 900 000 BDT 50 958 800 000 BDT 0,34%
8. Nombre moyen de transactions
quotidiennes
811 200 785 284 –3,19%
9. Moyenne des transactions
(en taka)
1 692 800 000 BDT 1 698 600 000 BDT 0,34%
10. Informations supplémentaires Montant Montant Evolution
a) Transferts de fonds arrivants 38 700 000 BDT 45 700 000 BDT 18,08%
b) Transactions «cash in» 22 183 200 000 BDT 21 646 700 000 BDT –2,42%
c) Transactions «cash out» 19 708 100 000 BDT 19 951 700 000 BDT 1,23%
d) Transactions P2P 7 498 400 000 BDT 7 783 600 000 BDT 3,80%
e) Versement des salaires (B2P) 188 000 000 BDT 305 200 000 BDT 62,34%
f) Règlements des factures
de services (P2B)
7 770 000 BDT 10 500 000 BDT 35,13%
g) Autres 1 159 700 000 BDT 1 215 400 000 4,80%
Source: Payment Systems Department, Bangladesh Bank, 2013.
Tableau 4 – Résumé des prestataires de services financiers mobiles (mars 2012)
Banque Plate-forme
technologique
Partenariats avec
des opérateurs de
téléphonie mobile
Date
de lancement
Clients
enregistrés
Agents Transactions
(en taka)
Trust Bank Genweb2 Teletalk Août 2010 1104 329 1 700 000
Dutch
Bangla Bank
Sybase 365 Airtel Banglalink
Citycell
GrameenPhone
Mai 2011 172 020 3181 882 900 000
BRAC
Bank/bKash
Fundamo (Visa) Bangaglink
Robi
GrameenPhone
Juillet 2011 237 423 5383 1 185 100 000
Mercantile
Bank
SMG GrameenPhone Février 2012 1392 170 1 000 000
Bank Asia iPay Pas obligatoire Mars 2012 0 30 100 000
20
Banque Plate-forme
technologique
Partenariats avec
des opérateurs de
téléphonie mobile
Date
de lancement
Clients
enregistrés
Agents Transactions
(en taka)
First
Security
Islami Bank
Progoti Systems Mars 2012
Citi N.A
Sonali Bank Digital
Technologies
Prime Bank SMG Mars 2012
Bangladesh
Commerce
Bank
iPay Mars 2012
Janata
Bank
Transaction
Solution
Total 442 289 9093 2 070 800 000
Autorisation pour les transferts de fonds internationaux uniquement
Eastern
Bank
Conjointement
avec Banglalink
Banglalink
Robi
Avril 2010 293 1386 359 600 000
Dhaka Bank Comviva Banglalink Avril 2010 594 1786 114 700 000
AB Bank Citycell Septembre
2010
– 116 400 000
Southeast
Bank
GrameenPhone Juin 2011 – 200 –
Premier
Bank
Septembre
2011
– 182 100 000
NCCBL GrameenPhone
Standard
Bank
GrameenPhone
Total 887 3670 474 800 000
Source: «Mobile Financial Services in Bangladesh: An Overview of Market Development», document d’orien-
tation, Bangladesh Bank.