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Maerten A. ETH R17 Mémoire bibliographique : Le déchet entre concept, objet et projet Juin 2009 1 Université de Provence Aix-Marseille 1 Département d’Anthropologie MASTER 1 PROFESSIONNEL « Anthropologie & Métiers du Développement durable » ETH.R17 Mémoire de recherche bibliographique Le déchet entre concept, objet et projet Analyse anthropologique des déchets dangereux issus des activités de soins en Afrique de l’Ouest. MAERTEN Adeline Sous la direction de Jacky Bouju 2008 – 2009

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Maerten A. ETH R17 Mémoire bibliographique : Le déchet entre concept, objet et projet

Juin 2009 1

Université de Provence Aix-Marseille 1 Département d’Anthropologie

MASTER 1 PROFESSIONNEL « Anthropologie & Métiers du Développement durable »

ETH.R17 Mémoire de recherche bibliographique

Le déchet entre concept, objet et projet Analyse anthropologique des déchets dangereux issus des activités de soins

en Afrique de l’Ouest.

MAERTEN Adeline

Sous la direction de Jacky Bouju

2008 – 2009

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Université de Provence Aix-Marseille 1 Département d’Anthropologie

MASTER 1 PROFESSIONNEL « Anthropologie & Métiers du Développement durable »

ETH.R17 Mémoire de recherche bibliographique

Le déchet entre concept, objet et projet

Analyse anthropologique des déchets dangereux issus des activités de soins en Afrique de l’Ouest.

MAERTEN Adeline

Sous la direction de Jacky Bouju

2008 – 2009

« Les opinions exprimées dans ce mémoire sont celles de l’auteure et ne sauraient en aucun cas engager l’Université de Provence, ni le directeur de

ce mémoire ».

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SOMMAIRE

I. PROPOS DIVERGENTS OU LES DIMENSIONS SEMANTIQUES DU DECHET…………………………………………………………………………………….9

A. ETAT DE LA QUESTION : LE DECHET C’EST QUOI ?......................................................... 9 B. LES DECHETS ISSUS D’ACTIVITES DE SOINS................................................................. 15

II. LES DECHETS DANGEREUX EN AFRIQUE DE L’OUEST ……… ………..20

A. SITUATION GLOBALE DES PAYS EN VOIE DE DEVELOPPEMENT.................................... 20 B. REPRESENTATIONS ET CONCEPTIONS SOCIO- CULTURELLES....................................... 33

III. SUR LA ROUTE DU DEVELOPPEMENT DURABLE……………………… ..39

A. DES PROBLEMES SOCIOPOLITIQUES AUX PROBLEMES ECONOMIQUES.......................... 39 B. RESPONSABILISER ET CONSCIENTISER LE PROBLEME DE GESTION DES DECHETS……..53

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Tables des sigles et des abréviations ADEME : Agence De l’Environnement et de la Maitrise de l’Energie CNH : Centre National d’Hygiène CSCom : Centre de Santé Communautaire DASRI : Déchet d’Activités de Soins à Risques Infectieux DBM : Déchets BioMédicaux DISS : Déchets Issus des Soins de Santé EPA : Environmental Protection Agency FAO : Food and Agriculture Organization GDBM : Gestion des Déchets BioMédicaux GDISS : Gestion des Déchets Issus des Soins de Santé IGSS : Inspection de Service de Santé MDRE : Ministère du Développement Rural et de l’Environnement MECV : Ministère de l’environnement et du Cadre de Vie MS : Ministère de la Santé MSAS : Ministère de la Santé et de l’Action Sociale MSP/LCE : Ministère de la Santé Publique et de la Lutte Contre les Endémies MWTA : Medical Waste Tracking Act n.m. : nom masculin OCB : Organisation Communautaire de Base OMS : Organisation Mondiale de la Santé ONG : Organisation Non Gouvernementale PDU : Projet de Développement Urbain PME : Petite et Moyenne Entreprise PNDS : Plan National De la Santé PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement SIDA : Syndrome d’Immunodéficience Acquise UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l’Enfance VIH : Virus d’Immunodéficience Humaine v. : verbe

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« Tant que la terre était peu peuplée, tant que les tribus étaient nomades, ces restes dérisoires comptaient peu dans l'espace sauvage. Mais l’homo faber sédentarisé s'est vite aperçu que toute innovation technique – l'emploi de la force animale par exemple – engendrait un accroissement des déchets, que toute augmentation de population avait le même effet, et que cette responsabilité demandait, soit de réutiliser une partie des ordures pour en réduire le volume, soit d'agrandir le cercle en les portant plus loin, hors de vue et de nez ».

PETONNET Colette, 1992, « Le cercle de l’immondice. Postface

anthropologique », in le génie du propre, Anne Querrien (dir.), Les annales de la recherche urbaine, n°53: 109-111.

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Introduction

Mon intervention porte sur un sujet actuel et complexe les déchets médicaux dangereux et leur gestion. C’est pourquoi dans un premier temps je vais m’attacher à définir1 chacun des termes adoptés pour le titre de ce mémoire.

Le déchet « ←déchoir : débris, restes sans valeur de quelque chose ». Cette définition est insuffisante pour cette étude. Ainsi, dans la première partie je reviens sur les nombreuses et complexes définitions prêtées aux déchets. « 2- Ce qui tombe d’une matière qu’on travaille ». Le sang, les os sont les restes des corps humains, la matière travaillée par le personnel de santé qui peut alors être considéré comme « l’artisan du corps ». Les déchets d’activités de soins peuvent être à la fois la matière, résidu (sang, organes, membres amputés) et l’objet qui a touché cette matière (instruments chirurgicaux tel le scalpel, ou la seringue).

Entre concept « ←lat. conceptus, saisi. Représentation générale et abstraite d’un objet, d’un ensemble d’objets. Un concept se définit selon sa compréhension et selon son extension ». Le déchet est un concept puisque que celui-ci peut être défini de multiples façons et aucune n’est exhaustive et acceptable pour tous. Chaque discipline, chaque culture interprète « le déchet » de façon spécifique et variée. Le concept de déchet est interdépendant des notions d’hygiène, de propreté qui ne possèdent pas la même signification pour chaque individu. J’aborde cet aspect dans une deuxième partie axée sur les représentations socio-culturelles.

Objet « ←lat. objectum, chose placée devant. Toute chose concrète, perceptible par la vue, le toucher ». En ce sens, le déchet hospitalier présente les caractéristiques d’un objet. « 2- Chose solide considérée comme un tout, fabriquée par l’homme et destinée à un certain usage ». En l’occurrence, le déchet d’activité de soins est un objet destiné à l’usage du personnel soignant dans les structures de santé (seringues mais encore cotons, compresses, etc.) Il est alors considéré comme un « objet-instrument » et se transforme en « objet-déchet » après son usage. « 3- Ce sur quoi on porte une activité, un sentiment ». Le déchet est appréhendé soit comme un objet de dégoût, soit tel un objet d’art, voire même un objet de convoitise et de pouvoir.

Et projet « Ce que l’on a l’intention de faire ». Le déchet devient un projet lorsque les politiques2 le place au centre des projets de développement. Voici la définition que donne la FAO du projet : « Les projets de développement tentent de mobiliser et de mettre à profit des ressources, dans l’optique d’obtenir des résultats précis, dans les délais déterminés, en respectant un certain budget. Ces projets varient dans leurs portées, objectifs et leur durée ». On peut admettre que cette définition convient aux projets des politiques : les plans nationaux relatifs à la gestion des déchets par exemple. Cette notion de projet rend compte d’une tension antinomique présente également dans le phénomène de déchet. Je m’explique, le projet et la gestion des déchets portent tous deux la vision d’une futur amélioré et dans le même temps un souci de contrôle du changement. On est obligé de renoncer à certains éléments du rêve pour arriver à des résultats. Ce point est développé plus en détail dans la dernière partie du document. 1 Cf. Le petit Larousse, 2001 2 Il s’agit de politiques des gouvernements, des pays développés comme celles des pays en voie de développement.

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Comme vous l’aurez remarqué, j’emploie les termes déchets hospitaliers, déchets médicaux dangereux, déchets d’activités de soins sans faire de distinction aucune – a priori. Car il existe bien une différence qu’il est important de souligner. Un article anglais1 paru en 1992 distingue chacun des termes comme suit :

“Hospital waste” (or solid waste) refers to all, biological or nonbiological, that is discarded and not intended for further use. “Medical waste” refers to materials generated as a result of patient diagnosis, treatment, or immunization of human beings or animals. “Infectious waste” refers to that portion of medical waste that could transmit an infectious disease. Congress and the EPA have used the term “regulated medical waste” rather than “infectious waste” in the MWTA in deference to the remote possibility of desease transmission. Thus, “medical waste” is a subject of “hospital waste”, and “regulated medical waste,” which is synonymous with “infectious waste” from a regulatory perspective, is a subset of “medical waste”.

Ainsi en employant l’expression « déchets hospitaliers » on se réfère à une généralité qui englobe les « déchets médicaux » parmi lesquels on retrouve les « déchets infectieux ». Toutefois tous les déchets médicaux ne sont pas uniquement des déchets hospitaliers car certains proviennent de centre de santé multiple, comme les dispensaires, les cliniques, les laboratoires2… Inversement les déchets hospitaliers ne sont pas tous des déchets médicaux. L’hôpital produit également des déchets sans risque sanitaire, assimilables aux ordures ménagères3. Aussi, il existe une diversité de catégorisations de ces déchets, par exemple les déchets d’activités de soins à risques, ou bien les déchets biomédicaux, ou encore les déchets spéciaux. Ces nombreuses distinctions des déchets dangereux issus des activités médicales sont invraisemblables pour une novice en la matière. Chacune des définitions se complètent mais parfois s’étouffent et créent des définitions dans la définition, des exceptions dans la règle. Finalement on s’y perd. Avec cette étude je vais tenter de classer les différents types de déchets dangereux produits par les structures de santé en fonction de leur nature. Suite à ce vaste débroussaillage, se dégage clairement l’intérêt de définir ce qu’est précisément un « déchet ». Il est souvent question d’employer les termes déchets, ordures, rebuts en songeant à la même chose et en les rendant équivalents dans le langage courant. Or le vocabulaire du déchet, lorsqu’on y prête attention, est systématiquement contesté. Le déchet provoque des oppositions, des hésitations quant à sa définition et sa caractérisation. Certains le considèrent comme un objet d’art, d’autres au contraire comme une monstruosité. Ainsi, les sciences humaines et de la nature comme les sciences dures se sont emparées de cet objet de réflexion qu’est le déchet. Pourquoi une telle soif de connaissance au sujet du déchet ? Le déchet n’est pas une nouveauté, c’est le phénomène de gestion des déchets qui est récent. Celui-ci est devenu une préoccupation collective, c’est-à-dire pour l’ensemble de la communauté internationale. La croissance démographique, le développement industriel et le développement de la technologique médicale produisent de plus en plus de déchets, et pas n’importe lesquels, des déchets forts dangereux, qui menacent l’homme et son environnement. C’est l’occasion pour les sphères politiques et économiques de capter ce

1 RUTALA W. A., MAYHALL C. G., 1992, « Medical Waste », The Society for Hospital Epidemiology of America, Infect Control Hosp Epidemiol, n°13, 38-48. 2 Je tiens à informer le lecteur ici, qu’aucune distinction n’est établie entre les déchets des hôpitaux, des cliniques, des centres communautaires, etc. 3 Les déchets ménagers, les déchets sans risque ne font pas l’objet de cette étude.

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nouvel objet de pouvoir qui incarne les enjeux primordiaux du domaine du développement durable, autrement dit la lutte contre la pauvreté, l’amélioration de la santé et la protection de l’environnement. Afin de cerner le thème, je propose trois parties :

- la première répond aux questions : qu’est ce qu’un déchet ? Que nomme-t-on déchets d’activités de soins dangereux ? De ces interrogations émergent débats et controverses sur le terme de « déchet ».

- la deuxième partie précise le contexte africain dans lequel intervient la question des déchets et notamment des déchets hospitaliers dangereux. On peut alors se demander quels sont les pratiques des acteurs, les risques associés à la manipulation des déchets biomédicaux, les représentations socio-culturelles liées aux notions de propreté, souillure, risque, danger… ? Cette partie tire une conclusion sur les deux figures antagonistes de l’hôpital.

- enfin, la troisième et dernière partie de cette composition approfondit la question de la gestion, de l’élimination et du traitement des déchets médicaux à risques. Il convient d’observer les problèmes et les dysfonctionnements des systèmes de gestion des déchets et d’évaluer, ensuite, les moyens politiques et économiques mis en œuvre en vue d’une gestion plus appropriée et d’une meilleure prise de conscience de la situation sanitaire et environnementale, relative à ces déchets dangereux. Le rapport santé/politique débouche sur la notion de santé publique et dévoile l’articulation entre la politique, la santé et l’économie. Derrière cette préoccupation manifeste des déchets se devine le dessein d’un développement durable pour les pays d’Afrique de l’Ouest.

En définitive, les déchets dangereux symboliseraient-ils le miroir des sociétés humaines ? La difficile gestion des déchets biomédicaux dangereux serait-elle le reflet d’un système de santé dépassé ? Pour ces pays d’Afrique de l’Ouest, pays en voie de développement, n’est-ce pas une façon d’entrer dans l’ère du « développement durable » au même titre que les pays développés et d’affirmer leur ambition de lutter contre la pauvreté ? Une gestion rigoureuse et exemplaire de ses propres déchets dangereux deviendrait-elle le symbole d’une société moderne, organisée et émancipée ? En outre, ces interrogations lèvent le voile sur le combat que mènent les pays de l’Afrique de l’Ouest pour reconquérir tant une autorité politique que morale, et cela passe notamment par l’étape que constitue la gestion des déchets dangereux.

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I. Propos divergents ou les dimensions sémantiques du déchet

Le déchet évoque un enjeu fondamental dont l’actualité ne cesse de nous rappeler1 : il est nécessaire et vital pour l’homme de savoir gérer ses déchets. Et avant tout, comme l’affirme Jean Claude Beaune dans son ouvrage le déchet, le rebut, le rien, chaque individu doit « prendre conscience de l’immensité de cette « décharge » quotidienne qui accompagne le monde humain en pleine activité ». (1999 : 7). Diverses questions se posent : comment reconnaître un « déchet » et comment savoir quand un « objet » devient un « déchet » ? Qu’appelle-t-on tout simplement un « déchet » ?

A. Etat de la question : le déchet c’est quoi ?

« Le déchet se déchiffre et se pense : il n’est pas simple néant ». (BEAUNE, 1999 : 7).

1. Etymologie, définitions des concepts

« Déchet2 : n.m., d'abord dechié (1270-1280), est le déverbal de déchoir formé sur les formes fortes de l'indicatif présent. Par substitution de suffixe, il a pris la forme déchiet (1328-1342) réduite à déchet. D'abord attesté dans la locution « aller en dechié », le mot a pris au XIVème siècle son sens actuel de quantité perdue dans l'emploi d'un produit (1328-1342). Le dérivé récent « déchetterie » n.f. est surtout d’usage administratif ».

« Déchoir3 : v. est issu par évolution phonétique (1080) du bas latin « decadere » - tomber-, altération du classique « decidere » - tomber-, au figuré être en décadence, essuyer un échec. En français, le verbe a perdu de bonne heure le sens propre de tomber ainsi que le sens figuré diminuer en intensité, faiblir (1080). Il a seulement conservé le sens moral, tomber dans un état inférieur à celui où on était ».

L’ouvrage de J. C. Beaune traite les problématiques et les enjeux autour des notions de « déchet », « rebut » et « rien ». Dans sa contribution à l’ouvrage, Alain Navarro résume ces différentes approches :

« « Déchet », « rebut », « rien » sont des notions fondamentales qui s’offrent comme objet dans des champs spécifiques du savoir technologique, anthropologique et philosophique. La notion de déchet est associée aux activités de production et de consommation à travers les différentes filières et stratégies de traitement et de gestion. La notion de « rebut » renvoie à des approches anthropologiques et aux rapports que nous entretenons avec les matières déchues ou inutiles. La notion de « rien » revêt la dimension philosophique, épistémologique, voire métaphysique qui s’appuie, par exemple, sur l’idée de corruption et sur la problématique de dissolution de la matière physique ou biologique » (in BEAUNE, 1999 : 63).

1 Les médias diffusent en boucle des publicités sur le tri des déchets (papier, verre, plastique), le recyclage et transmettent différents messages quant à l’urgence de protéger l’environnement et les ressources naturelles de notre planète. Le devoir, le geste citoyen étant mis en avant. 2 Tiré de "LE ROBERT": Dictionnaire historique de la langue française sous la direction de Alain Rey, cité dans Gestion des déchets hospitaliers, ML André, S Hubert, Projet DESS "TBH", UTC, 1997, pp 51, URL : http://www.utc.fr/~farges/DESS_TBH/96-97/Projets/DS/DS.htm. 3 ibid.

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Le déchet est caractérisé par les scientifiques de matière première et dernière. Le déchet est, pour ainsi dire, ce qui est délaissé, le rebut, ce qui est jeté et enfin le rien, l’inutile voire l’insignifiant. François Dagognet dans son ouvrage Des détritus, des déchets, de l’abject, une philosophie écologique donne une terminologie du déchet : il existe « le groupe des substances (le privilège ontologique) les morceaux, après cassure, les fragments (de fragmentum, ce mot venant du verbe latin frango, je brise), les décomposés (jusqu’au pourrissement), ainsi que de nombreux évincés (les fermentés, les déchets, les corps gras, les maculés, les désarticulés, etc.) » (1997 : 21). Le déchet finalement peut porter plusieurs titres qui chacun désigne une dimension distincte. Cette dénomination plurielle produit in fine du non-sens. Depuis le début de ce texte le terme de déchet compte plus d’une dizaine de synonymes ou de substituts : à savoir le rebut, le reste, le rien, les détritus, les ordures, les substances, les morceaux, les fragments, les décomposés, les fermentés, les déchets, les corps gras, les maculés, les désarticulés… Le déchet ne possède t-il pas une dénomination normative ?

Qu’en est-il par exemple du domaine juridique ? Comment le droit appréhende le « déchet » ? Le droit applique une « norme » mais avant tout, il faut définir la « chose » pour appliquer une règle.

« Objet de droit, (…) il s’inscrit sous une nouvelle forme et renouvelle son approche sociétale, tant le droit est révélateur de l’état d’esprit d’une époque, d’un moment donné » (BILLET, in BEAUNE, 1992 : 99).

Le déchet est un objet « à la mode », les médias, les scientifiques, les législateurs, les économistes, les spécialistes, les écologistes « habillent » le déchet de significations différentes. Actuellement, celui-ci fait l’objet de nouveaux cadres règlementaires. Il tient une place centrale dans les plans nationaux -pour une meilleure gestion des déchets- et dans les rapports de l’OMS. Philippe Billet affirme que « le déchet est en effet un label, une étiquette » (in BEAUNE, 1992 : 100). La loi 75-633 du 15 juillet 19751, relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux, définit la notion de déchets comme « tout résidu d’un processus de production, de transformation ou d'utilisation, toute substance, matériau, produit ou plus généralement tout bien meuble abandonné ou que son détenteur destine à l'abandon ». Un objet portera le nom de déchet lorsque celui-ci aura été utilisé ou transformé puis abandonné par son propriétaire. Mais la encore la définition a ses limites car « un bien ne peut devenir un déchet que si son propriétaire a la volonté de s'en débarrasser. Mais tant que ce bien n'a pas quitté la propriété de cette personne ou l'espace qu'elle loue, cette personne peut à tout moment changer d'avis 2». Ainsi l’objet abandonné devient déchet, mais si le propriétaire décide de le reprendre pour le recycler, alors le déchet redevient objet (il s’agit des déchets recyclés appelés « matières premières secondaires »). Le statut de déchet n’est jamais formel et définitif d’où l’ambiguïté de ce concept. Plusieurs lois définissent le déchet, d’un point de vue subjectif -volonté de se débarrasser d’un objet- mais ce n’est pas suffisant donc il faut compléter la législation par un point de vue objectif -classification des déchets en fonction de leur nature et de leurs caractéristiques. Enfin, l’aspect économique entre en compte car le déchet qui a perdu sa valeur économique peut redevenir un bien de valeur : exemple des brocantes où le détenteur se débarrasse d’un objet qui a perdu sa valeur et l’acquéreur 1 http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000006068529&dateTexte=19750715 2 Gestion des déchets hospitaliers, ML André, S Hubert, Projet DESS "TBH", UTC, 1997, pp 51, URL : http://www.utc.fr/~farges/DESS_TBH/96-97/Projets/DS/DS.htm

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dispose d’un objet qui pour lui a de la valeur. Cet aspect prend en compte le temps, le lieu et l’individu.

2. Le détritus qui encombre et pollue Lorsque vous entendez le terme « déchet » quelle pensée aussitôt vous traverse l’esprit ? Quel sentiment éprouvez-vous à cet instant précis ? Oui, le déchet inspire le dégoût et suscite la répulsion. Il est stigmatisé, écarté, éloigné, abandonné.

« Nous nous proposons d’explorer un territoire délaissé : celui des êtres ou bien écartés en raison de leur insignifiance ou de leur petitesse à tel point qu’ils rejoignent l’informe, l’amorphie, ou bien éloignés du fait de leur danger (la contamination, la pollution) ou bien abandonnés parce qu’eux-mêmes liés à la décomposition et à la mort (le pourri, le fermenté, le cadavérique), ou bien ignorés parce que liés au monde de l’inertie, alors que ce qui relève de la vie mériterait la considération, ou bien encore repoussés parce que malodorants ou tellement visqueux qu’ils engluent ceux qui les saisissent » (DAGOGNET, 1997 : 11).

Le déchet est toujours représenté comme quelque chose de dévalorisant. « C’est le minime, l’irrégulier, le fragmentaire, le brisé » explique François Dagognet (1997 : 28). D’autres termes prennent leur origine dans la racine du mot déchet par exemple : la déchéance, la décrépitude… Le déchet exprime le dégoût, la puanteur, l’impureté, c’est l’immondice et le non-propre. Lemennicier dans son article « le corps humain : propriété de l’Etat ou propriété de soi ? » range les cadavres humains parmi les déchets1. Cette affirmation est controversée : le Conseil de la Région de Bruxelles-Capitale en Belgique, affirme qu’il va de soi que « les cadavres humains ne constituent pas des déchets »2. D’ailleurs Philippe Billet nous rappelle que « selon le droit le terme de déchet ne concerne que les choses et pas les personnes » (in BEAUNE, 1999 : 107). Pourtant Ph. Billet termine son article en comparant la disparition du cadavre humain à celle de l’élimination du déchet : « le funerarium n’apparaît alors que comme l’habillage humaniste de la station de transit. Et le cimetière, une conception du jus sepulchri destiné à camoufler une vaste décharge aux règles de fonctionnement établies par le droit funéraire » (ibid. : 111). Cette conception monstrueuse du déchet montre la négativité de ce terme et témoigne de la condamnation ultime, la fatalité dont le déchet fait l’objet. Ce terme à valeur péjorative est même devenu une insulte de mépris : l’ordure. Le déchet correspond à une image négative à double titre : l’insalubrité, la saleté, la souillure d’une part, et la pollution, le danger, la mort et la putréfaction de l’autre. Ces déchets sont une honte pour l’homme, il va donc les éloigner de lui, les cacher, les éliminer…

« Depuis des temps immémoriaux, ils gardent libre d’immondices la place où ils se tiennent, dorment ou réfléchissent, au centre de la case, et rejettent ceux-ci, en cercle, autour de leur habitat » (PETONNET, 1991 : 109).

L’homme dissimule et éloigne ses déchets : comme le remarque Jean Gouhier, les chambres, la salle à manger, le salon sont au centre, tandis que la cave, le grenier, le débarras sont à la périphérie, en marge (in BEAUNE, 1999 : 81). Il ajoute que « la localisation du déchet révèle les espaces déconsidérés » (ibid.). Les Dogons du Mali, par exemple, gardent dans l’enceinte du village les déchets dits organiques, tandis qu’ils rejettent les déchets polluants,

1 cité par Philipe BILLET, « le déchet, du label au statut, Considérations juridiques sur un abandon », 1992 : 90-98, in BEAUNE (dir.), Le déchet, le rebus, le rien, Champ Vallon, Mayenne : 232 p. 2 Id.

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appelés négatifs, nous explique Laurence Douny dans sa thèse A praxeological approach to Dogon material culture (2007).

“ I propose now to examine some elements, called neme, that are considered “negative”. This term refers to repellent and useless domestic waste, such as the sweepings from the compound floor, decomposing food remains, plastics and other non local elements. These are allocated to the outside of the compound. While most of them are either progressively integrated into the soil or swept away by the wind, the bodily solids and menstruated blood that represent a polluting and dangerous substance, are both expelled from the village. And, as I shall show, in some places, plastics and metallic pieces are reclaimed from the outside of the compound to make craft items for the tourists” (DOUNY, 2007: 244).

“As I have suggested, the Dogon keep useful and meaningful body dirt, compost and smoke on the body or in the household temporarily. In contrast to this, bodily dejections, decomposing matter, fragments of modern/Western rubbish, as well sweepings, rags, soapy liquids and, finally, menstrual blood are all kept or removed to the outside of the compound ” (ibid : 255).

Est ici pointée l’idée qu’un déchet puisse être jugé négatif ou bien estimé positif en fonction de sa nature. Jean Gayon explique l’idée du philosophe Nietzsche que « les débauchés, misérables, malades mentaux, criminels sont les déchets de la société et que la société moderne n’est plus que déchet, décadence. C’est l’idée qu’un organisme qui accumule en lui-même ses déchets prend lui-même la valeur de déchet » (in BEAUNE, 1999 : 70). Il voit parfois la chose en terme positif car il n’y a pas seulement la déchéance mais aussi la croissance de la vie qui produit nécessairement des ordures et des déchets. Le déchet peut-il présenté des aspects positifs ?

3. Le reste artistique et le reliquat archéologique Selon François Dagognet, le déchet est digne d’être étudié, car « ce qui relève de la vie mériterait la considération » (1997 : 11). Selon l’auteur chaque objet abandonné témoigne de la vie, d’une activité.

« Aussi le moindre ustensile (fût-il démantibulé) comme le tissu le plus usé portent-ils toujours sur eux une sorte de « tatouages », dû au temps et au maniement : dans ses conditions, l’abandonné ou le « désormais sans emploi » nous semble un incomparable témoignage » (DAGOGNET, 1997 : 13).

Les déchets, les restes, les résidus représentent l’objet d’un travail pour certains, des indices pour d’autres. Ces derniers sont utiles pour la paléontologie, la criminologie, l’archéologie…

« Nulle science expérimentale n’échappe à la nécessaire prise en compte du « fragment » ou du « démoli » (le repoussant même) : en tête nous situons la minéralogie, qui ne néglige pas les roches sédimentaires, celles-ci agglomérant des débris de pierres ou de galets que le gel ou le vent ont délités, (les polypes, les carapaces, les coquillages etc.). Proche d’elle, la paléontologie n’étudie que les restes (notamment les cadavres et leurs ossements qui résistent à une rapide destruction). La criminologie s’empare, de son côté, des moindres indices, parmi les plus rebutants : déjections, crachats, mucosités, amas sanguinolents » (ibid. : 88).

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« L’anthropologie [physique] travaille de nombreux indices, parce que tout sujet se dépose sur tout ce qu’il touche » (ibid. : 221). (…) Il s’agit toujours de « restes », des effets de la décomposition, qui frappent les palais, les remparts, les forteresses et même les villes. (…)Non seulement nous saurons (en imagination) compléter les vestiges du passé que nous aurons analysés, mais le philosophe devrait s’intéresser à cette prouesse par laquelle l’architecte-paléontologue, à partir des débris, parvient à tout reproduire et donc à restituer l’état initial –preuve supplémentaire que la base (bien que minimale et souvent effacée) suffit pour retrouver le corps des bâtiments et de l’ouvrage » (ibid. : 225).

François Dagognet donne au déchet une valeur de vestige, de reste d’une civilisation passée, d’indices des activités. Celui-ci valorise ces « restes ». D’ailleurs, il ajoute que le déchet peut être ce qui est le plus luxueux. Cela paraît insensé, mais les vins de grand cru ne proviennent-ils pas du fruit trop mur, le raisin fermenté ? Le fromage ne se fabrique t-il point avec la pourriture et la moisissure ? Alors pourquoi toujours dévaluer le déchet, le pourri, le fermenté alors que parfois cela relève d’une très grande valeur ! Les artistes ont compris qu’il était avantageux, plaisant et fascinant de s’attacher au délaissé et à l’abandonné. Au XXième siècle, de nombreux artistes vont utiliser des rebuts pour créer leurs œuvres.

« Joan Miro utilisait des plumes, des coquillages ; Picasso fouillait les dépotoirs à la recherche d’objets qui pouvaient s’intégrer à une sculpture. Jean Dubuffet autre collecteur de fragments du monde environnant. La liste est longue des artistes qui ont utilisé des bribes du réel, des objets ou morceaux d’objets plus ou moins laissés de côté par la société humaine » (MOUREY, in BEAUNE, 1999 : 21).

Le déchet est un objet réutilisable et qui plus est, mis en valeur. Le déchet devient invisible pour laisser place à un nouvel objet, une image que veut montrer l’artiste. Jean Pierre Mourey dans son article cite le peintre Dubuffet qui utilisait des matériaux simples comme la poussière et des feuilles : « Nul besoin d’aller au loin chercher des raretés, tout est là devant votre nez ou par terre à vos pieds » (ibid. : 34). Le rebut gagne une nouvelle dignité, une nouvelle vie. Il est utile à la création d’une œuvre. Notamment, le déchet est un allié privilégié pour l’artiste, car il constitue une matière première gratuite. Par ailleurs, les déchets font souvent l’objet d’une collecte. On peut faire de l’argent avec la récupération et la vente de déchet.

« Selon le dictionnaire des symboles de Jean Chevalier et Alain Gheerbrant (1985), les significations de l’or et des excréments se rejoignent. Les excréments sont chargés de valeur : réceptacles de forces. Exemple : dans la pensée des Dogons l’or est une sublimation du cuivre et le cuivre rouge est lui-même l’excrément du dieu Nomo, organisateur du monde » (BERTOLINI in BEAUNE, 1999 : 37).

La psychanalyse s’applique à faire ressortir les « résidus » du subconscient, la part enfouie, refoulée, rejetée. Il s’agit là aussi de créer de la valeur à partir du reste, du presque rien.

« Le propre de l’art serait de nous révéler ce qui a été caché » (DAGOGNET in BEAUNE, 1999 : 206).

Le déchet est insignifiant et pourtant il est un indicateur de l’état d’esprit de la société de consommation… Le déchet décrypté comme du gaspillage, reflétant la richesse sinon

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l’aisance. Il représente un signe d’abondance. Les médias, actuellement, mettent en avant la crise économique pour justifier le comportement des personnes qui « font les poubelles ». Le déchet représente l’économie. Des magasins de déstockages vendent à prix réduits des produits dits « périmés » pour la vente qui n’ont plus de valeur, mais qui en réalité sont encore consommables. Le déchet selon le lieu, le temps et les individus prend une tout autre signification et peut être perçu comme une richesse, un bien formidable et accessible, une ressource.

« Ainsi le « déchet » mérite autre chose que la répulsion ou l’éviction (on n’ira pas jusqu’à dire que « l’or est dans la poubelle ») : la technologie actuelle a pu travailler à sa reprise, à sa rédemption » (ibid. : 203).

4. Conclusion et définition retenue pour ce mémoire Qui a dit que le déchet était négligeable, inintéressant, médiocre ? Le constat est ici clair, le déchet est un objet multiple, varié tant dans ses fonctions, ses compositions que par les sentiments qu’il procure. Il alterne entre effroi et sublimité, dégoût et adoration, minime et grandeur. Le déchet est alors étudié sous toutes les coutures.

« Le « matériologue » qui privilégie le substrat, ce qui éloigne les bases de la métaphysique traditionnelle, idéaliste, minimisant le support au bénéfice de ce qu’il diffuse – celui de « morphologue », attentif à la seule disposition des surfaces sur lesquelles nous lisons la spécificité, sans devoir chercher à atteindre une profondeur fantasmée – celui de l’ « objectologue », retenu par les fabrications (mêmes les industrielles) et les agencements prosaïques, y incorporant les outils et les machines ; enfin, avec la présente étude, nous y incluons l’ « abjectologie », qui élargit notre champ, réhabilitant le pulvérisé, le ruiné, et jusqu’au fermenté et au décomposé » (DAGOGNET, 1997 : 13-14).

Un article en ligne sur internet, rédigé par Mikael Drackner me paraît intéressant à citer puisqu’il fait le point sur tout ce qui vient d’être noté à propos du concept « déchet » : « “What is waste? To whom? - An anthropological perspective on garbage” explores the fact that what constitutes waste is a highly subjective notion. In Tacna, Peru, the place from where this article draws its empirical material, waste is not only seen as a risk to public health and the environment. Some find it is a mere aesthetic inconvenience, for others it is the only source of income. Yet another way of perceiving waste is as a social contagion, in which the negative qualities of garbage are transmitted to surrounding people in the eyes of others. Such perceptions of waste, it is argued, are important parts of local waste management systems, and the understanding of such perceptions might increase the effectiveness of waste management campaigns »1.

Le « déchet » est finalement un terme générique. Celui-ci prend une connotation péjorative ou méliorative suivant les contextes et les représentations. Cette capacité du déchet à passer d’un monde à son opposé rend compte de l’ambigüité de sa définition et de l’ambivalence de sa représentation. Pour cette présente étude, le déchet sera considéré comme un objet qui a perdu sa fonctionnalité après son emploi, son usage, pour quelque service qu’il soit. L’ « objet-outil » devient « objet-déchet » avec toute la signification, la symbolique qui s’ensuit. Ce point est développé ci-dessous.

1 http://wmr.sagepub.com/cgi/content/abstract/23/3/175

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Il est vrai que cette partie se compose principalement de définitions et se focalise sur le terme de déchet. Mais cela est, je pense, une étape nécessaire afin de comparer par la suite ces différentes définitions à celle des déchets issus du monde médical. Effectivement, certaines de ces définitions seront applicables à ces déchets spéciaux, mais d’autres devront être rejetées tant la nature même de ces déchets est singulière.

B. Les déchets issus d’activités de soins

Toute activité humaine génère des déchets. Mais leur quantité, leur nature, sont très variables. Connaître les déchets, c’est savoir les définir. L’article Medical Waste1 cité dans l’introduction emploie les termes de déchets hospitaliers “Hospital waste”, déchets médicaux “Medical waste” et déchets infectieux “Infectious waste”. Les déchets d'activités de soins sont le synonyme des déchets médicaux. Les déchets d'activités de soins sont définis comme étant « des déchets issus des activités de diagnostic, de suivi et de traitement préventif, curatif ou palliatif dans les domaines de la médecine humaine et vétérinaire »2. Il existe une contradiction importante entre les différentes lectures sur le thème des déchets de soins médicaux. Certains affirment qu’ils sont dangereux3 tandis que d’autres4 évoquent des déchets de soins médicaux sans risques qui comprennent les déchets recyclables (le papier, les caisses en carton, les plastiques ou métaux non contaminés, les cannettes ou verres recyclables), les déchets de soins médicaux biodégradables (les restes alimentaires, les déchets de jardin pouvant être compostés). Selon l’OMS « sur l'ensemble des déchets produits par les soins de santé, à peu près 80% ne sont pas dangereux. Les déchets restants, de l'ordre de 20%, sont considérés comme dangereux. Ils contiennent du matériel qui peut être infectieux, toxique ou radioactif »5.

Existe-t-il alors une différence potentielle entre ce que l’on appelle « déchets hospitaliers » (déchets liés à une structure en général) et « déchets d’activités de soins » (liés à une activité particulière) ? En effet, dans la première catégorie se classeraient tous les types de déchets produits par l’hôpital, c'est-à-dire dangereux ou non, liquides ou solides. Les déchets sans risque sont comparables aux ordures ménagères. Ils comprennent surtout des déchets provenant du secteur hôtelier et administratif des hôpitaux, des services d’entretien, mais aussi des travaux de transformation, des appareils jetés car hors d’usage ou obsolètes. Ce volet ne sera pas abordé dans cette étude. La deuxième catégorie se composerait, elle, des déchets d’activités de soins appelés aussi « déchets médicaux », « déchets biomédicaux », « déchets de soins de santé » qui sont des déchets dangereux à risques infectieux.

Au fil de mes lectures, je me sens perdue face à ces différents termes et ces diverses définitions. Ces dernières sont incertaines, imprécises, bien trop vagues pour me risquer à affirmer une définition claire. Ainsi, je vais dans un premier tant donner une définition générale, autrement dit approximative des déchets issus des soins de santé. Ensuite, j’agence chaque type de déchets afin de constituer une typologie complète. Pour terminer, je traite de l’image particulièrement négative des déchets d’activités de soins.

1 RUTALA W. A., MAYHALL C. G., 1992, « Medical Waste », The Society for Hospital Epidemiology of America, Infect Control Hosp Epidemiol, n°13, 38-48. 2 Article R.44-1 du code de la santé publique française 3 Rapport de l’Observatoire Régional de la Santé, Rhône-Alpes, octobre 2005. 4 Préparation des plans nationaux de gestion des déchets de soins médicaux en Afrique Subsaharienne : manuel d’aide à la décision, Secrétariat de la Convention de Bâle et Organisation mondiale de la Santé, 2005. 5 Aide mémoire n°253, OMS, octobre 2000.

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1. Les déchets produits dans le secteur sanitaire « Les déchets issus des soins de santé (DISS) font partie des déchets biomédicaux et sont constitués de déchets liquides et/ou solides, à risques infectieux, provenant de produits de diagnostics, de traitement, de prévention ou de recherche en matière de santé humaine et animale »1 (Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre les Endémies, 2005).

La définition des déchets biomédicaux varie en fonction des pays et des institutions, d’autant plus que certains pays d’Afrique de l’Ouest n’ont pas de définition propre pour ce type de déchets (par exemple le Bénin2 et le Sénégal3). Les Nations unies nous donnent une définition commune et internationalement acceptée des déchets produits par ces structures de santé. Les déchets d’activité de soins sont les déchets issus des soins médicaux. Elles définissent ce que sont les soins médicaux comme des : « activités médicales telles que le diagnostic, le suivi, le traitement ou la prévention d'une maladie ou le soulagement d'un handicap chez un être humain ou un animal, intégrant également les travaux de recherche associés, réalisés sous la direction d'un médecin, d'un vétérinaire ou d'une autre personne autorisée à exercer cette fonction en vertu de ses qualifications professionnelles »4.

Comment sont classés les différents déchets issus des activités de soins ? Les catégories de déchets sont définies par certains selon l’état du déchet (solide, liquide)5, par d’autres selon le danger que le déchet représente (à risques infectieux, dangereux, toxiques)6, selon leur nature (biologique, anatomique, pharmaceutique, chimique, radioactive)7. Une typologie exhaustive des déchets d’activités de soins est essentielle pour rendre compte des nombreux et divers déchets produits. Je choisis de classer les déchets selon leur état, puis selon leur nature :

� les déchets liquides : - les liquides biologiques et sanguins :

1 Projet de renforcement institutionnel et d’appui au secteur santé. Gestion des déchets issus des soins de santé (GDISS), Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre les Endémies, Niamey, 2005. 2 Pascal Billau explique : « A défaut d’avoir une définition propre au Bénin, l’auteur présente ci-dessous celles du Québec et de l’Alberta », dans son mémoire Estimation des dangers des déchets biomédicaux pour la santé et l’environnement au Bénin en vue de leur gestion, Université de Sherbrooke, 2008. 3 Ndiaye Dior Fall écrit : « Le terme “biomédical” quant à lui, vient de “bio” qui veut dire “vie” et “médical” qui est relatif à la pratique médicale. En l’absence de toute définition légale dans notre pays, nous pouvons, pour mieux comprendre cette notion, nous référer aux définitions française et canadienne», dans son mémoire intitulé la gestion des déchets biomédicaux au Sénégal : un vide juridique à combler, Agence universitaire de la Francophonie, 2009. 4 Directives techniques pour une gestion écologiquement rationnelle des déchets biomédicaux et des déchets de soins médicaux, Programme des Nations Unies pour l’environnement, conférence des parties à la convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontaliers de déchets dangereux et de leur élimination, Sixième réunion Genève, décembre 2002. 5 Saadia Radi, « L’hépatite C et les défaillances du système égyptien de santé public », Égypte/Monde arabe, Troisième série, 4 | 2007, [En ligne], mis en ligne le 31 décembre 2008. URL : http://ema.revues.org/index1766.html. Consulté le 10 mars 2009 et Projet de renforcement institutionnel et d’appui au secteur santé. Gestion des déchets issus des soins de santé (GDISS), Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre les Endémies, Niamey, 2005. 6 Directives techniques pour une gestion écologiquement rationnelle des déchets biomédicaux et des déchets de soins médicaux, Programme des Nations Unies pour l’environnement, conférence des parties à la convention de Bâle sur le contrôle des mouvements transfrontaliers de déchets dangereux et de leur élimination, Sixième réunion Genève, décembre 2002. 7 Les déchets d’activités de soins à risques infectieux au Maroc, Colloque, Medwem Maroc/Rudologia/France savoir et développement/France, Rabat, avril 2008.

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→ Les liquides utilisés dans les analyses médicales (liquides gastrique, de ponction pleurale et cardiaque, liquides de drainage post-opératoire et les expirations bronchiques et gastriques) et les dispositifs les contenant : poches, drains, etc. → Le sang, les urines, excrétas, sérum, liquides organiques contaminés etc.

- les produits chimiques : → Les produits issus de cultures cellulaires → Les solvants et réactifs liquides de laboratoires → Les désinfectants, cadmium de batterie, mercure de thermomètre brisé…

- les déchets cytostatiques (cytotoxiques) : → Les déchets pharmaceutiques cytotoxiques (produits chimiques : hormones, antibiotiques...)

- les autres effluents : → Les eaux de rinçage de films radiologiques, comme les révélateurs et fixateurs → Les eaux usées ménagères en provenance des cuisines et celles des toilettes…

� les déchets solides : - les déchets assimilables aux ordures ménagères :

→ Produits par le personnel de santé ou par les accompagnants de malades : reste de repas, papiers et emballages non souillés, serviettes hygiéniques non souillées, déchets provenant des services administratifs…

- déchets produits au niveau des services spéciaux des établissements de santé : → Les déchets anatomiques : tissus d’organes du corps humain, fœtus, placentas, prélèvements biologiques, éléments d’amputation, pièces opératoires, … → Les objets acérés de rebut : objets pointus ou tranchants, lames de scie, aiguilles, seringues, bistouris, scalpels jetables, lames de rasoirs, sondes diverses, cathéters, tubes, tubulures de perfusion, verres ayant contenu du sang ou tout autre objet pouvant causer une coupure. → Les résidus de pansement : cotons et compresses souillées, garnitures diverses poches de sang, et les plâtres. → Les déchets pharmaceutiques : médicaments périmés ou non utilisés, ampoules ou flacons de médicaments vidés, … → Les déchets radioactifs : tubes de rayons X, … → Les conteneurs pressurisés : médicaments aérosols, oxyde d’éthylène… → Les tissus et cultures : pipettes, boîtes de Pétri, flacons de cultures, lames et matériels à usage unique en verre ou en plastique, cadavres d’animaux, issus des laboratoires de bactériologie, virologie et parasitologie. Ces déchets spéciaux nécessitent une attention particulière car ils présentent un risque d’infection, de contamination. Toutefois, il est à noter que « tout déchet assimilable aux ordures ménagères devient déchet contaminé lorsqu'il est en contact avec un déchet à risque soit directement, soit parce que ce dernier n'est pas dans un emballage bactériologiquement étanche. La notion de "déchets à risques" peut donc être, soit directe (suivant la production), soit indirecte (contamination au cours du circuit de collecte) »1.

1 Gestion des déchets hospitaliers, ML André, S Hubert, Projet DESS "TBH", UTC, 1997, pp 51, URL : http://www.utc.fr/~farges/DESS_TBH/96-97/Projets/DS/DS.htm.

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2. Quel étrange déchet que celui des activités de soins

a) Avant d’être « un déchet »…

François Dagognet rappelle au lecteur de toujours lier le déchet à son usage avant d’être un déchet. Il crée le concept « d’objet de l’objet » et l’emploie pour caractériser les objets « qui dépassent le statut ordinaire, tel « l’outil » qui sert à fabriquer d’autres objets que lui-même et qui est dépourvu d’emploi direct. Médiateur, il favorise nos opérations et permet des agissements efficaces (homo faber) comme scier, déplacer, percer ou polir » (1997 : 59). Il place dans ce groupe « ce qui relève du « contenant » (la boîte, objet de l’objet) qui subsiste, alors qu’il a pu enfermer plusieurs collections diverses et qui ne cesse pas de jouer ce rôle, après tel ou tel usage. Il autorise aussi bien le transport que la protection » (ibid. : 59-60). La plupart des déchets d’activités de soins à risques infectieux (DASRI), avant de devenir des « déchets », peuvent être considérés comme des « objets de l’objet ». Pour exemple : la seringue qui permet d’injecter un médicament ou toute autre sorte de liquide médical ; ou encore tous les objets pointus, tranchants (scalpels, bistouris, seringues…) utilisés par les médecins lors des interventions. Ces objets sont des instruments qui permettent d’accomplir un acte médical en vue d’une guérison, d’un rétablissement du patient. Dagognet cite Platon en ces termes : « d’ailleurs Platon, amateur de recensement et de distribution, l’a mis à part, dans Le Politique : « Ils [les contenants] ne sont points fabriqués comme l’instrument, pour produire, mais pour conserver ce qui a été produit » (ibid. : 60). Celui-ci fait la distinction entre le contenant et l’instrument. En ce qui concerne les DASRI, la majorité, avant de devenir déchets, sont des instruments, « objets de l’objet » qui ont une valeur positive du fait de leur potentiel à soigner, voire parfois à sauver un patient. Mais dès lors que cet « objet sauveur » a été utilisé, il se transforme en « objet destructeur » car il peut contaminer, infecter, tuer. Immédiatement après son utilisation, il change de statut. F. Dagognet décrypte la trajectoire des déchets : « partout dans le monde, foisonnent les empreintes et les inscriptions ; il n’est rien qui ne laisse derrière soi des marques de son passage ou de sa présence ; nous devons décrypter et lire ces « reliquats ». Aussi le moindre ustensile (fût-il démantibulé) comme le tissu le plus usé portent-ils toujours sur eux une sorte de « tatouages », dû au temps et au maniement : dans ses conditions, l’abandonné ou le « désormais sans emploi » nous semble un incomparable témoignage » (1997 : 13). Ceci n’est en aucun cas valable pour les DASRI. Un exemple simple : après emploi, une seringue ne peut plus être réutilisée par risque de contaminer1. Contrairement à un objet quelconque retrouvé lors de fouilles archéologiques qui témoigne de son passage, d’une civilisation ancienne, le déchet hospitalier, lui, confirme la maladie, la dégradation et garde un sens négatif suite à sa manipulation. On occulte presque le fait qu’il a été l’objet de la réussite d’une opération et est considéré comme un objet intrus, nuisible. L’objet reliquat devient lors de sa découverte un déchet précieux -prenant une valeur considérable-, le déchet d’activités de soins quant à lui est déconsidéré ; il est dangereux, insalubre, néfaste et même toxique dans certain cas.

b) La double négativité des déchets hospitaliers dangereux

Les déchets des activités de soins à risques sont doublement stigmatisés. D’une part, l’objet (instrument médical ou autre) devient déchet lorsque l’on ne

l’utilise plus. F. Dagognet pense : « ce qui déclasse encore l’objet, c’est que lorsque nous ne le percevons plus, il n’existe que d’une vie latente ; il manque à la durabilité, il devient un déchet ou un débris, une loque, ce qui signe sa pauvreté » (in BEAUNE, 1999 : 11). C’est

1 En Afrique le virus du VIH est omniprésent, c’est pourquoi les aiguilles et seringues font l’objet d’une attention particulière.

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ce qui caractérise les DASRI car ils cessent d’être utiles suite à leur emploi. En effet, les objets médicaux après usage sont souillés, contaminés et risquent d’infecter un nouveau patient si on les réutilise. Ils sont donc jetés le plus souvent ou bien stérilisés, nettoyés avec précaution. Le recyclage est ici exclu. Il est impossible et inconcevable de valoriser une aiguille de seringue qui porte du sang. De plus, cela génère encore plus de déchets, car on utilise des objets jetables afin de limiter les risques. La durée de vie de l’objet est par conséquent très courte, il devient déchet aussitôt qu’il entre en contact avec un agent pathogène (corps malade...).

D’autre part, ces déchets occasionnent des nuisances et comportent un réel danger. Ils représentent une menace pour l’homme, aussi bien pour le patient que pour le personnel médical ou encore les techniciens de gestion des déchets. Ces déchets infectieux sont incriminés, blâmés. Ils sont la cause de nombreux accidents qui surviennent tant au sein des structures médicales que dans les lieux publics où sont jetés et entreposés les déchets1. Les dépotoirs sauvages des quartiers populaires sont généralement utilisés comme lieux d'aisance, principalement par des enfants qui marchent pieds nus, ce qui les exposent à la contamination et surtout aux accidents par les aiguilles et autres objets tranchants2. Parmi tous les types de déchets, compte tenu du risque que ceux-ci représentent aussi bien pour l’environnement que pour la santé humaine, les déchets biomédicaux (DBM) méritent une attention particulière.

1 Les DBM sont déversés dans les dépotoirs d’ordures (dans les bas-fonds ou à la proximité des habitations). 2 Les impacts sanitaires et environnementaux sont traités dans la partie suivante.

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II. Les déchets dangereux en Afrique de l’Ouest Le présent document se consacre à mettre en évidence la part dangereuse des déchets d’activités de soins et le contexte dans lequel interviennent ces déchets. Suite à cette présentation des différentes conceptions de ce qu’est un déchet en général et le déchet d’activités de soins, il s’agit de cerner le sujet des déchets hospitaliers dangereux en Afrique de l’Ouest.

A. Situation globale des pays en voie de développement Jusqu’à présent les définitions présentées s’adressaient plutôt au contexte occidental même si certaines définitions sont universelles et pour ainsi dire valables internationalement. Dès maintenant, il convient d’ancrer le sujet à partir du continent africain, plus précisément en Afrique de l’Ouest. Les lectures effectuées traitent principalement de la Mauritanie, du Mali, du Burkina Faso, du Niger, du Bénin, de la Guinée et du Sénégal. J’évoque pour chacun des pays les informations dont je dispose, c’est pourquoi demeurent un déséquilibre et une différenciation des renseignements mis en avant par les documents cités.

1. Une urbanisation galopante, état de la situation sanitaire Dans leur ouvrage Développement durable, Nouveau bilan, Christian Levêque et

Yves Sciama rendent compte du contexte : « Actuellement, on observe une augmentation considérable du volume de déchets, tant au stade de la production (déchets industriels, déchets agricoles) qu’à celui du consommateur (déchets ménagers). La nature des déchets s’est aussi complexifiée avec la diversification des matériaux employés et celle des biens manufacturés : métaux, plastiques, matériaux composites, matériels électronique et électroménager, voitures, sans parler des déchets nucléaires. Et le volume s’accroît du fait des modes de consommation, avec la pratique du jetable, le sur-emballage… » (2008 : 138).

La croissance démographique, le développement industriel, technique et le développement de la technologie médicale génèrent différents types de déchets responsables d’un danger qui pèse sur la santé de l’homme et sur son environnement. Si les déchets représentent un problème majeur pour les pays dit développés qu’en est-il des pays en voie de développement ? Adepoju G. Onibokun (dir.) dans la gestion des déchets urbains, des solutions pour l’Afrique constate ceci : « l’urbanisation rapide et sauvage des pays d’Afrique a causé la détérioration de l’environnement. L’une de ses conséquences les plus inquiétantes dans le monde en développement, et particulièrement en Afrique, réside d’ailleurs dans les problèmes de gestion des déchets solides, liquides et toxiques. Des incidents qui ont eu lieu récemment dans les grands centres urbains d’Afrique montrent que le problème de la gestion des déchets a atteint des proportions telles que les mesures prises par les différents niveaux d’administration et les spécialistes se sont révélées infructueuses. Il suffit de traverser n’importe quelle ville africaine pour constater les manifestations de ce problème : amoncellement de déchets, détritus le long des routes, ruisseaux bloqués, sites d’enfouissement menaçant la santé dans les secteurs résidentiels, et élimination inadéquate des déchets toxiques », (2001 : 10).

On constate que le taux élevé d’urbanisation dans les pays africains entraîne une accumulation rapide de déchets. Les déchets biomédicaux, au même titre que les déchets de type ménagers ou autres, connaissent une production sans cesse croissante dans tous les pays et leurs dangers augmentent proportionnellement à la quantité produite1. Voici brièvement

1 Plus il est produit de déchets, plus cette masse de déchets constitue une menace pour l’homme.

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évoquées, les généralités socio-sanitaires propres à chaque pays tirées de plusieurs documents, des plans nationaux quant à la gestion des déchets dangereux, des rapports de l’OMS ou encore des travaux universitaires sur ce même thème.

a) Etat de la situation sanitaire au Bénin, en particulier à Cotonou

Pascal Billau, écrit dans Estimation des dangers des déchets biomédicaux pour la santé et l’environnement au Bénin en vue de leur gestion : « Cotonou, capitale du Bénin, est construite sur un tapis d'ordures. Chaque terrain et chaque chaumière nouvellement érigée dans la métropole reposent sur un remblai de déchets. La ville étouffe chaque jour un peu plus sous le poids des détritus qui jonchent les rues, les trottoirs, les marchés, les rives, les canalisations pluviales… » (2008 : 5). L’auteur explique que les rues de Cotonou regorgent de plusieurs milliers d’êtres humains. Le problème qui surgit est l’absence de site d'enfouissement, de décharge, de service de ramassage des ordures ménagères. Cela engendre un paysage affligeant, sale, nauséabond, dangereux.

« Des seringues côtoient les terrains de jeux. Des femmes puisent de l'eau dans des puits alimentés par une nappe phréatique de qualité douteuse. Les amoncellements de détritus servent de nids de propagation pour la vermine, les insectes et les maladies. Dans certains quartiers populaires, les berges de la jadis jolie lagune de Cotonou, tout près de l'Atlantique, sont autant de latrines à ciel ouvert !» (ibid.)

b) Aspects socio-sanitaires en Mauritanie

Le plan national rappelle que la Mauritanie est un pays de moins de 3 millions d’habitants avec un taux d’accroissement de près de 3% par an. La population urbaine augmente, près de 45 % en 1994, contre 9.1% en 1965. Au plan socioéconomique, l'enquête permanente sur les conditions de vie des ménages révèle que 56% de la population vivait au dessous du seuil de pauvreté. Cette pauvreté touche de manière aigue 44 % de la population. Au plan sanitaire, les principaux indicateurs révèlent un taux de mortalité infantile de 118 /1000 tandis que l'espérance de vie à la naissance est de 51.3 ans. La situation sanitaire reste dominée par une incidence élevée des maladies infectieuses et parasitaires. On note un taux de séroprévalence du SIDA de 0.6% dans la population adulte. Pour la période 1997-2002, le taux de mortalité moyen est estimé à 15.7 /1000; le taux de mortalité infantile à 103/1000; le taux de mortalité infantojuvénile à 148/1000 et le taux de mortalité maternelle à 930 pour 100 000 naissances.

Le rapport final sur le plan de gestion des déchets biomédicaux révèle que : « La gestion des déchets pose déjà quelques problèmes aux structures sanitaires existantes, toutes catégories confondues. Elles font en effet actuellement des prestations de services dans des conditions d'hygiène très difficiles parfois dangereuses aussi bien pour le prestataire que pour le client. Ceci est dû à la fois au manque d'équipements adéquats (manque d'incinérateurs, de collecteurs d'aiguilles, etc.) permettant de sécuriser les soins et à un manque de sensibilisation de la population et du personnel de santé face aux dangers potentiels d'une manipulation maladroite. Par ailleurs, les structures sanitaires n'ont pas de dispositifs adéquats pour éliminer les déchets qu'elles produisent, exposant dangereusement les personnes fréquentant ces structures, ainsi que celles vivant à proximité des déchets » (2003 : 11). La situation sanitaire de la République Islamique de Mauritanie reste dominée par une incidence élevée des maladies infectieuses et parasitaires.

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« Le rapport préliminaire sur la situation de l'hygiène hospitalière, élaboré par le CNH (centre national d’hygiène) dans le cadre d'une enquête réalisée au niveau national (Wilaya par Wilaya), mentionne que dans les structures de santé « de grosses lacunes existent aussi bien au niveau de l'entretien des locaux que du respect des règles élémentaires d'hygiène hospitalière ». Dans le domaine de l'assainissement, le rapport met l'accent sur la mauvaise gestion des déchets, le manque d'incinérateur et l'absence du port de chaussures de sécurité » (ibid.).

c) Généralités sur le plan sanitaire au Sénégal

Au Sénégal, la récupération et la valorisation des déchets procurent des revenus et des emplois importants à toute une partie de la population. Mais cette fouille dans les déchets pose problème : le risque est de tomber sur des déchets dangereux comme les déchets biomédicaux. Les déchets toxiques sont souvent mélangés aux autres déchets ménagers. De cette manière, des quantités plus importantes de déchets sont devenus dangereux puisque contaminés au cours d’une collecte qui s’est faite sans tri au préalable. Le Ministère de l’environnement et protection de la nature établit dans Le plan national d’action pour la gestion des déchets dangereux que « dans les structures sanitaires, cette situation a conduit à une recrudescence des infections au niveau des hôpitaux. Beaucoup de personnes sont devenues ainsi très méfiantes vis-à-vis des structures sanitaires où le risque d’infection au cours d’un séjour est de plus en plus élevé » (1999 : 3). Dans le cadre de son mémoire de DEA en droit de la santé (2004-2005) sur les « déchets biomédicaux », Ndiaye Dior Fall a visité plusieurs structures de gestion pour se persuader des mêmes réalités : « il y a véritablement des difficultés dans la gestion des déchets biomédicaux ».

d) Situation sanitaire au Niger

Le ministère de la santé et de la lutte contre les endémies1 considère qu’en dépit des efforts fournis par le Gouvernement du Niger, l’état de santé des populations reste précaire. La malnutrition demeure un problème de santé préoccupant. L’espérance de vie à la naissance est de 48 ans. La situation épidémiologique actuelle du Niger est caractérisée par une forte prédominance des maladies diarrhéiques. En dehors de ces affections, il existe des maladies à potentiel épidémiques telles que la rougeole, le choléra et la méningite. Le SIDA progresse de façon inquiétante : le taux de prévalence est de 0,87% avec des proportions très élevées au niveau de certains groupes cibles dont les professionnels du sexe. En ce qui concerne les déchets, ces derniers sont constitués essentiellement de matières organiques, de matériaux divers et de plastiques. Leur système de collecte, de stockage, de transport et de gestion laisse à désirer compte tenu du fait que les différents intervenants dans le secteur (communes, ONG, Privé) n’ont pas les moyens nécessaires pour gérer ces déchets.

e) Etat de la situation sanitaire au Burkina Faso

Selon le Ministère de la santé, la gestion des DBM n’est pas une priorité dans la Politique sanitaire nationale, l’organisation et les équipements de gestion des DBM ne sont pas performants et les comportements et pratiques dans la gestion des DBM sont globalement médiocres. Ce dernier explique dans La stratégie nationale pour la gestion des déchets biomédicaux : « A priori, le personnel soignant (médecins, sages-femmes, infirmiers) dispose d’un niveau de connaissances, mais dans la pratique, les attitudes et les actes

1 Projet de renforcement institutionnel et d’appui au secteur santé, Gestion des déchets issus des soins de santé, Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre les Endémies, Niamey, mai 2005.

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laissent à désirer en matière de gestion des DBM. (…) En effet, ces catégories d’acteurs connaissent peu (ou pas du tout) les risques liés à la manipulation des DBM et elles accordent très peu d’attention à leur manipulation ; ce qui entraîne souvent des accidents (blessures ou infections). Le niveau d’ignorance des manipulateurs de déchets à la source (dans les hôpitaux et cliniques) ainsi que l’inadéquation et la faiblesse des équipements de stockage, de collecte et de disposition des DBM entraînent un mélange de ces derniers avec les autres déchets solides moins nocifs, notamment au niveau des décharges publiques ou sauvages très fréquentées par les animaux domestiques en quête de nourriture » (2005 : 18). Au Burkina Faso, comme dans la plupart des pays africains, la gestion des déchets issus des soins de santé (collecte, maniement, stockage) est inappropriée.

f) Aspects sanitaires du Mali

La République du Mali, située en Afrique de l'Ouest, compte environ 11 millions d'habitants pour 1 240 000 km2. L'infection du SIDA est prise en charge par diverses stratégies de limitation de la propagation parmi lesquelles la gestion des déchets biomédicaux. L'estimation de la production minimale de déchets biomédicaux est d'environ 585 tonnes par an soit 1603 kg/jour. La gestion constatée des déchets biomédicaux est encore problématique malgré les efforts notables réalisés ces dernières années. Le tri sélectif des déchets infectieux est rare ; ce tri concerne plus souvent les aiguilles dans divers récipients. Mais elles se retrouvent in fine dans le même circuit que les autres déchets non triés au départ. Ces déchets se retrouvent en dépotoir sauvage où récupérateurs et enfants procèdent au ramassage de matériaux. Djibril Doucouré, consultant et docteur en Sciences, Environnement et Santé rapporte dans le plan national de gestion des déchets biomédicaux qu’ « à l'instar de beaucoup de pays africains, le Mali est confronté à la pandémie du VIH/SIDA. La manipulation inappropriée des matériels infectés de VIH SIDA est un risque majeur pour les équipes médicales, mais aussi les familles, les enfants de la rue, les récupérateurs. Cette manipulation possible est du fait d'une mauvaise gestion de ce type de déchets » (2004 : 21).

g) La situation sanitaire en Guinée

La pré-collecte et la collecte des déchets (ordures ménagères et assimilées y compris les déchets biomédicaux) s'effectue par le biais de différents types de réceptacles allant des poubelles en plastique aux caisses en carton en passant par les demi-fûts et les poubelles à pédale en aluminium. Si ces dernières sont fermées, la majeure partie des poubelles n’est pas munie de couvercle. Djibril Doucouré, rédige dans son rapport sur le plan national de gestion : « ces supports de collecte reçoivent sans distinction pour la plupart les restes alimentaires, les emballages de médicaments, les ampoules pour injection, les pansements souillés, perfuseurs, bouteilles, seringues, etc. En particulier les aiguilles de seringue ont été trouvées jonchant le sol de plusieurs structures sanitaires et sans leur capuchon ! (Hôpital Ignace Deen, hôpital préfectoral et centre de santé de Coyah, centre de santé de Kindia) » (2002 : 9)

Ainsi, en général, l'hygiène des cours de structures sanitaires n’est pas rigoureuse. Ces déchets sont ensuite pris en charge par le personnel de nettoiement et mélangés aux autres déchets dans les poubelles en plastique, en fûts coupés placés à des endroits très fréquentés par la population.

h) Brève conclusion sur les points communs

Le constat est le suivant : les déchets jonchent les rues, des grandes villes en particulier. Car celles-ci font l’objet d’une urbanisation croissante ces dernières années. Les pays cités ci-dessus ont pour point commun leur faible niveau de santé et une pauvreté conséquente ce

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qui implique une multiplicité de maladies, dont le SIDA qui est l’une des plus importantes et qui génère de nombreux déchets dangereux (seringues…). Dans la plupart des pays africains, la manipulation inappropriée des matériels infectés par le VIH fait peser de graves menaces sur la santé de plusieurs catégories d'acteurs, en particulier le personnel travaillant dans les hôpitaux et les municipalités, les familles et les enfants de la rue qui s'adonnent au recyclage des ordures. La manipulation de ces déchets constitue un facteur d'aggravation du risque environnemental et sanitaire. En effet, les déchets biomédicaux suivent le même circuit que les déchets ménagers et se retrouvent finalement mélangés. Les données statistiques disponibles révèlent qu'au niveau mondial, la manipulation des déchets biomédicaux infectés par le VIH/SIDA représentent près de 0.2% des cas de transmission1. En 1998, l’Institut Africain des gestions urbaines, procédant à une étude des déchets biomédicaux dans quatre villes ouest Africaines, a montré que la gestion de tels déchets était « désespérante, chaotique et représente un danger permanent pour l’homme et son environnement »2. Enfin, certains de ces pays ont pour traits communs une mauvaise (voire quasi-nulle) règlementation et une absence d’équipement.

2. Un cadre règlementaire… ou pas Plutôt que d’énumérer pour tous ces pays les règlementations, s’il en existe3, je choisis de traiter des législations communes en matière de gestion des déchets biomédicaux en ajoutant les points contradictoires propres à chaque pays.

L’amélioration de la santé et du bien-être des populations est une constante dans les résolutions de chacun des pays. Certains, le Niger par exemple, considèrent la gestion des déchets biomédicaux comme faisant partie de la prévention pour une meilleure santé.

« Par ailleurs, le MSP a élaboré un projet de document cadre de politique nationale en matière d’hygiène et d’assainissement dont l’objectif général est d’améliorer l’état de santé et le cadre de vie de la population. Le document comporte dix stratégies de développement du secteur, dont la Promotion de l’hygiène du milieu traite entre autres, de la gestion des déchets médicaux : “concernant les déchets biomédicaux, chaque hôpital, maternité, groupe d’hôpitaux ou centres de santé disposera d’un système adéquat de collecte et de traitement de ses déchets” » (Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre les Endémies, 2005 : 13).

Pour d’autres au contraire comme l’Etat burkinabé, la gestion des DBM n’est pas une priorité dans la politique sanitaire nationale.

« Le cadre institutionnel est marqué par l’absence d’une stratégie nationale en matière de gestion des déchets hospitaliers. Il n’existe pas de document de politique sectorielle, ni une délimitation claire des domaines de compétences et de responsabilités de différentes institutions concernées, notamment entre le MS et le MECV. De même, on constate l’inexistence de procédures formalisées de gestion. Ni le document de politique sanitaire nationale, ni le PNDS, encore moins le plan triennal de mise en œuvre, n’accordent un rang de priorité élevé à la gestion des DBM » (Ministère de la santé, 2005 : 18).

1 Fall Ndiaye Dior « Les déchets biomédicaux au Sénégal : un vide juridique à combler», mémoire de DEA de droit de la santé, Agence Universitaire de la Francophonie, 2004-2005. 2 Mbengue M.F., « Déchets biomédicaux en Afrique de l’Ouest, problème de gestion et esquisse de solution », IAGU, octobre 1998. 3 Certains pays ne disposent d’aucune règlementation sur les DBM.

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En ce qui concerne le cadre institutionnel législatif en matière de gestion des DBM, celui-ci est déficient au Burkina Faso, au Sénégal mais également au Niger. Au Burkina Faso, « les lacunes inhérentes au cadre législatif, caractérisé notamment par l’inexistence de lois régissant les DBM ainsi que d’une réglementation interne au sein des formations sanitaires, ne permettent pas de garantir une gestion écologique des DBM et de déterminer de façon claire et précise les rôles et les responsabilités de chacune des catégories d’acteurs concernées. (…) Plus spécifiquement, il n’existe pas actuellement de procédure normalisée (guides techniques ou directives) pour la collecte, le transport, le stockage et le traitement des DBM » (ibid.). Le Sénégal a édité quelques textes en matière de gestion des déchets biomédicaux, mais qui restent généraux. Ce pays a montré sa volonté de lutter contre ce fléau. Toutefois Ndiaye Dior Fall qui a examiné cette législation met au clair ses insuffisances.

« Dans un premier temps, aucune des dispositions en présence n’a donné de définition des déchets biomédicaux. L’article 34 du code de l’hygiène publique fait vaguement allusion aux « déchets anatomiques » ou « contagieux », des « déchets pharmaceutiques ou toxiques ». Cette absence de définition est une source potentielle de dérapage, car elle ne permet pas de tracer les contours de cette notion et d’identifier de façon exhaustive les différentes structures de production. Dans un second moment, la réglementation a omis une phase fondamentale qui se trouve être la précision des étapes et méthodes de gestion des déchets biomédicaux. Enfin, nous avons une inexistence de mesures, de sanctions et d’indemnisations des dommages et violations des règles de gestion » (2004-2005).

Quant à l’Etat nigérien, s’il admet les conséquences sanitaires d’une non gestion des déchets biomédicaux : « au plan législatif et règlementaire, il n’existe pas de textes qui régissent de façon spécifique la gestion des DISS, en termes de dépôts, de collecte, d’évacuation et d’élimination. Seul le Code de l’Hygiène publique aborde le sujet de façon générale et très sommaire, mais ce texte souffre d’un manque d’application » (Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre les Endémies, 2005 : 30). En Mauritanie, il existe des lois et règlements relatifs à la gestion des déchets biomédicaux, bien qu’ils soient abordés de façons sommaires et générales par le Code de l’hygiène.

« En matière de GDBM, l'ordonnance n°84-208 du 10 septembre 1984 portant Code de l'Hygiène interdit de mélanger aux ordures ménagères les déchets anatomiques ou contagieux, les produits pharmaceutiques et tous autres produits toxiques. Les hôpitaux et les formations sanitaires publiques ou privées sont tenus de détruire par voie d'incinération les déchets anatomiques ou contagieux. En plus, les feux de combustion, les appareils incinérateurs ne doivent dégager ni poussière ni fumée gênante pouvant polluer l'atmosphère » (Rapport final, 2003 : 19).

La difficulté est ici l’application de ces règles car il y a une absence totale de décret d’application ce qui limite la portée de ces lois qui restent encore trop générales. C’est également le cas pour la politique sanitaire du Mali. Celui-ci affiche ses ambitions en mettant en place plusieurs lois et règlements concernant la gestion du secteur sanitaire et

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environnemental. Toutefois la loi consacrée aux déchets traite de manière succincte des déchets biomédicaux1. Un problème majeur persiste : si le discours est celui d’une gestion rationnelle des déchets, les pratiques sont toutes autres. Le processus de gestion n’est pas règlementé en termes d’identification des types de déchets, de disposition pour la collecte, le transport, l’élimination, les équipements… Au total, les contraintes portent sur un vide juridique, l’absence d’une réglementation nationale, de directives spécifiques et de procédures de contrôle dans la gestion des DBM. Suite à ce trouble institutionnel et législatif vient le dysfonctionnement du système de santé.

3. L’hôpital africain et les pratiques des acteurs de santé « Dès que l’on évoque les situations sanitaires en Afrique en général, et le fonctionnement des grands hôpitaux des capitales africaines en particulier, les digressions sur le dysfonctionnement des systèmes de santé africains ne manquent pas : absence de médicaments, équipements hors d’usage, personnels non motivés : les usagers se plaignent de ces structures sanitaires non fonctionnelles, du mauvais accueil (…) » déclare Marc-Eric Gruenais, (1996 : 118).

Ce qu’il résulte alors de mes lectures est un discours tout à fait incertain, indécis, autant dire vague et hésitant. En effet, soit il est mentionné qu’il existe une totale ignorance des principes d’hygiène -pour certains secteurs, ou un certain personnel- (encore faut-il définir ce que l’on entend par hygiène2), soit les pratiques d’hygiènes hospitalières sont connues et plus ou moins respectées.

« Des entretiens, il ressort que le personnel d'encadrement notamment les médecins suivent attentivement ces déchets et sensibilisent le personnel. Cependant au vue de l'état constaté de l'environnement des structures, cette sensibilisation devrait être renforcée et concerner tous les services » (DOUCOURE, 2002).

« Il faut noter que l'hygiène générale au niveau de la majorité des structures visitées est correcte. Cependant il a été constaté dans certains sites : des aiguilles de seringues éparpillées sur le sol ou derrière les fenêtres des salles de soins, cotons souillés de sang et autres détritus sur les planchers des salles; quelques salles de soins sont mal entretenues (Hôpital Ségou, CSCom Bamako). Ces actes sont du fait du personnel soignant et de collecte. Il vient se greffer aussi l'attitude d'une population importante (adultes - enfants) de gardes malades qui n'utilisent pas les poubelles mises à leur disposition ou installées dans les cours (Point G, Kati) » (DOUCOURE, 2004).

Alors, lorsque ces pratiques d’hygiène sont connues, elles font l’objet d’une application par le personnel médical. Même si certains termes soulignent une application peu méticuleuse :

« le personnel de santé : en règle générale, le personnel médical et paramédical

est relativement conscient des risques liés à la manipulation des DSMP, même

si la majorité n’a pas été formée dans ce sens. A priori, le personnel soignant

(médecins, sages-femmes, infirmiers) dispose d’un niveau de connaissances qui

se traduit, dans la pratique, par des attitudes et comportements relativement

1 Plan national de Gestion des déchets biomédicaux, consultant Djibril Doucouré, docteur en Sciences, Environnement et Santé, République du Mali, Banque Mondiale, Avril 2004 2 cf II-B-1 de ce présent document

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satisfaisants en matière de gestion des DSMP, mais certains comportements sont

déplorables car la manipulation quotidienne des déchets finit par installer des

attitudes d’indifférence et de banalisation du risque liés aux DSMP » déclare

Mohammed Abdou Daoudi dans son Evaluation de la gestion des déchets solides médicaux et pharmaceutiques à l’hôpital Hassan II D’Agadir

(2008). Effectivement, parfois la longue cohabitation du personnel soignant avec les déchets hospitaliers dangereux, et leur manipulation quotidienne engendre une indifférence : « on tombe dans une routine jusqu’à oublier les règles élémentaires d’hygiène et de sécurité ; il faut des rappels périodiques pour le personnel de santé… », explique le Dr. Arifa, CHN-Niamey (cité par le Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre les Endémies, 2005 : 36). Si le personnel médical entre dans la routine cela peut être dû en partie au flou qui entoure la notion d’hygiène : « la propreté du matériel est capitale, ça veut dire par exemple que le plateau ne doit pas avoir de traces de saleté ni de rouille. Si le plateau est en bon état, tu enflammes. Mais comme ce sont les seringues stériles qu’on met dedans c’est pas trop obligatoire qu’on enflamme, ou on peut aussi se limiter au nettoyage par alcool » traduit Yannick Jaffré (2003 : 357). Selon lui, « ce manque de support cognitif, stable et pertinent, fait aussi que bien souvent les mots n’accompagnent pas les gestes techniques, mais disjoignent plutôt les conduites de soins de leurs supports et raisons scientifiques. Dès lors, ces personnels de santé dérogent aux normes d’hygiène et construisent leurs conduites selon « ce qui se fait », entrant ainsi, comme cet autre infirmier, dans la « routine », autrement dit dans ces normes discrètes que construisent des petits groupes interactifs de professionnels » (ibid. : 358). Ce que montre l’anthropologue n’est pas un manque de rigueur de la part du personnel hospitalier mais plutôt l’absence de définition concrète. Ceci engendre une pratique des règles d’hygiène fondée uniquement sur « une crainte d’une réprimande ou d’une honte encourue » (ibid.) et non plus par conscience professionnelle des risques du métier. Un autre point soulevé importe tout autant. Lorsque le personnel de santé est conscient des risques de contamination quant aux déchets biomédicaux, d’autres comportements spécifiques sont notés comme le manque de rigueur quant à la séparation des ordures ménagères et des déchets biomédicaux. En effet, bien souvent les déchets biomédicaux se retrouvent côte à côte des déchets ordinaires. Enfin, le souci d'avoir un système performant de gestion des déchets biomédicaux est récurrent. Cela s’explique par le manque d’une formation au tri, à la gestion des déchets, à l’absence de matériel et d’équipement nécessaire à une gestion adéquate, ainsi qu’une insuffisance de personnel et de temps.

« L’occupation du personnel de santé à des tâches médicales plus urgentes semble être la raison majeure du peu d’intérêt accordé à la GDISS. Ces constats troublants trouvent leur explication dans le fait que ces pratiquants médicaux ont d’autres priorités plus urgentes, compte tenu du nombre élevé de malades à consulter quotidiennement et de la nécessité de s’occuper à la fois de tous : sous ce rapport la question de la gestion des déchets vient au second plan, derrière la gestion des malades » (Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre les Endémies, 2005 : 37).

Ainsi, les efforts orientés dans ce sens sont souvent annihilés par un manque de moyen et comme le signale Mohammed Abdou Daoudi, cela cause une « démotivation du personnel du fait des conditions de travail défavorables : manque de matériel, absence de mesures de

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protection, absence d'encadrement, de supervision... »1. Chiara Afiéri apporte quelques précisions : « en matière d’hygiène, il y a des conditions objectives qui ne permettent ni d’effectuer certaines pratiques hygiéniques, ni d’activer les modalités de la prévention dite traditionnelle. La pauvreté extrême d’une grande partie de la population, aggravée par la dévaluation de la monnaie, implique que cette population est dépourvue de vêtements suffisants pour se protéger du froid. Si l’on ajoute la carence structurelle des puits, de fontaines et de robinets, on comprend bien la difficulté de mettre en œuvre les conseils pour appliquer les mesures d’hygiène, au sens biomédical du terme, les plus élémentaires. (…) Il faut aussi donner aux uns soignés, et aux autres soignants, les moyens d’agir » (in BONNET et JAFFRE, 2003 : 502). Ce manque de matériel, ce sous-équipement, cette non application des mesures d’hygiène découlent de la pauvreté, du dénuement des pays en voie de développement.

S’éclaircit peu à peu le monde médical à lequel s’attache l’univers des déchets produits par ces secteurs de santé. En effet, définir et comprendre ce que sont les déchets biomédicaux, c’est avant tout connaître leur lieu de production et les acteurs qui les manipulent. Ainsi, ce bref retour sur les pratiques des acteurs met en avant la dimension sanitaire et « hygiénique » qu’affectent les déchets dangereux. Et cela tient du paradoxe lorsqu’on se focalise sur le lieu de production de ces déchets de soins dangereux : l’hôpital. Celui-ci dispense des soins, il représente le royaume de l’hygiène et de la santé et simultanément, il est vecteur de maladies, infections, germes et parasites en tout genre et producteur de déchets d’une dangerosité attestée.

« L’hôpital, est le lieu de tous les dangers où les patients encourent trop souvent des risques au-delà de ceux tolérables…générés par leur propre maladie » (GOGUEY M. www.anasys.org).

Par ailleurs, il est à noter le comportement des accompagnants. Si le personnel connaît quelques règles d’hygiène, les visiteurs quant à eux ignorent ces pratiques. Les conduites du personnel, des malades et de leurs familles sont différentes quant aux normes à respecter. Comme le mentionne Yannick Jaffré, « cet ensemble de références communes est aussi, pour une grande part, absente de nombre de pays subsahariens »2. Ainsi, la contradiction de l’hôpital réside dans le fait qu’il soit un acteur de santé publique soucieux d’une hygiène pour la protection de la population et parallèlement un producteur de déchets qui représentent une sérieuse menace pour l’homme. Jacky Bouju expose cette caractéristique de l’hôpital : « la gestion du déchet hospitalier constitue ainsi un problème social. Le paradoxe veut que l’hôpital qui exerce un monopole sur l’édiction des principes de l’hygiène, soit aussi considéré comme un lieu malsain »3. Ainsi Yannick Jaffré reprend Tasseau et Baron (1989) : « on estime globalement que sur 190 millions de personnes admises chaque année dans les hôpitaux du monde entier, l’infection hospitalière atteindrait 9 millions de malades et serait responsable de la mort de 1 million d’entre eux » (2003 : 342).

1 Evaluation de la gestion des déchets solides médicaux et pharmaceutiques à l’hôpital Hassan II D’Agadir, Mohammed Abdou Daoudi, Institut National d’Administration Sanitaire, Ministère de la Santé, juillet 2008. 2 Les maladies de passage. La construction sociale des notions de transmissions, Bonnet D. et Jaffré Y. (dir.), Khartala, 2003. 3 Une anthropologie politique de la fange. Conceptions culturelles, pratiques sociales et enjeux institutionnels de la propreté urbaine à Ouagadougou et Bobo-Dioulasso (Burkina-Faso), Jacky Bouju, Rapport SHADYC-GRIL, action de recherche n°4, septembre 2002.

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4. Les risques et les dangers associés aux déchets d’activités de soins « Les établissements de soins sont des unités de production de services où l’obligation de développer une culture du risque est à même de responsabiliser chaque agent pour fiabiliser et réussir le processus »1 (Colloque au Maroc, 2008).

Pourquoi l’hôpital est considéré comme un lieu impur ? Après tout, chaque structure, quelle soit médicale, technique, industrielle, etc., produit des déchets. La particularité de l’hôpital est la dangerosité des déchets qu’il génère. Aujourd’hui, la question des déchets à l’hôpital représente une urgence car ces derniers occasionnent des risques aussi bien pour la santé de l’homme que pour son environnement. Quelles sont ces menaces qui nuisent à l’image de l’hôpital, qui inquiètent la population, et alarment les politiques ?

Les risques liés aux déchets sont dus à une mauvaise gestion de ceux-ci, car « éliminés sans précautions, ils risquent non seulement de dégrader les paysages, mais aussi de polluer l’environnement et d’exposer l’homme à des nuisances et des dangers dont certains peuvent être très graves »2.

Saadia Radi, dans son article L’hépatite C et les défaillances du système égyptien de santé public (2007) s’inquiète : « Il faut que l’on réalise le danger que représentent ces déchets médicaux pour la santé publique. Il suffit de se promener autour des hôpitaux et des cabinets médicaux pour trouver des grandes quantités de poches de sang vides, des seringues, des médicaments, du coton et des pansements utilisés dont on s’est débarrassé, simplement en les jetant par terre […] On trouve des jouets pour enfant, sans que le consommateur sachent si ces jouets peuvent ou ne peuvent pas contaminer les enfants avec des maladies contagieuses et dangereuses comme le virus de l’hépatite C et le sida. Ils sont fabriqués à partir de produits de plastic dur qui proviennent de déchets hospitaliers. Il y a quelques semaines, on a confisqué de grandes quantités de seringues utilisées qui avaient été emballées comme des neuves et étaient destinées à être vendues dans les pharmacies ».

Ces déchets représentent un risque pour les personnes qui sont en contact direct ou indirect avec ces derniers, c'est-à-dire pour :

� le corps médical : docteurs, médecins, infirmiers et infirmières, agents de soins, (au niveau de la structure médicale : le praticien et son personnel peuvent se contaminer en manipulant du matériel souillé),

� les patients internes ou externes recevant des traitements dans les établissements sanitaires aussi bien que leurs visiteurs, accompagnants, familles,

� les travailleurs des services de soutien liés aux établissements sanitaires tels que : les services de buanderies, les services de manipulation des déchets (le personnel de nettoiement) et de transport, les gardiens ou responsables d’entretien lors des pré-collectes, le personnel sanitaire et de maintenance des hôpitaux,

� le grand public, la population qui vit autour de ces déchets laissés souvent à portée des gens, et plus spécifiquement, les enfants jouant avec des objets qu’ils peuvent trouver parmi les déchets à l’extérieur des établissements sanitaires, lorsque ceux-ci leur sont directement accessibles sur la voie publique ou bien les espaces naturels. Ils risquent des blessures en manipulant les seringues abandonnées, etc.

1 Les déchets d’activités de soins à risques infectieux au Maroc, Colloque, Medwem Maroc/Rudologia/France savoir et développement/France, Rabat, avril 2008. 2 Les déchets, sensibilisation à une gestion écologique, Christian Desachy. Edition et Tec, Paris, 2001, p3.

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« La réutilisation des seringues contaminées est un risque majeur pour la santé publique. D’après des estimations antérieures (Kane et al., 2000) et des mises à jour récentes, l’OMS a estimé qu’en 2000, 23 millions d’infections par les virus de l’hépatite B, de l’hépatite C et de l’immunodéficience humaine (VIH) avaient été provoquées par des injections avec des seringues contaminées. De telles situations sont très probables lorsque les déchets d’activités de soins sont déposés dans des décharges non contrôlées auxquelles le public a facilement accès: les enfants sont particulièrement exposés au contact avec des déchets infectieux. Le contact avec des produits chimiques toxiques, tels que les désinfectants, peut être à l’origine d’accidents lorsqu’ils sont accessibles au public. En 2002, les résultats d’une évaluation conduite par l’OMS dans 22 pays en développement ont montré que la proportion d’établissements de soins qui n’appliquent pas les méthodes appropriées d’élimination des déchets va de 18 % à 64 %. » (Guide de l’OMS, 2005).

Figure 1: Quand les gens fouillent les déchets, le risque de blessures par piqûres d'aiguilles augmente considérablement. OMS Fiche N° 231, Avril 2002

(http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs231/en/) Toutes ces personnes exposées aux déchets de soins médicaux dangereux courent, potentiellement le risque d’être blessées ou infectées. La directive européenne du 12 décembre 1991 relative aux déchets dangereux définit le risque infectieux : « matière contenant des micro-organismes viables ou leurs toxines, dont on sait ou dont on a de bonnes raisons de croire qu’ils causent la maladie chez l’homme ou chez d’autres organismes vivants ». Ces déchets sont qualifiés de dangereux ou à risques lorsqu’ils possèdent les caractéristiques énumérées1 ci-dessous :

« Irritants » : ils peuvent provoquer une réaction inflammatoire par contact immédiat, prolongé ou répété avec la peau ou les muqueuses ; « Nocifs » : ils peuvent entraîner des risques de gravité limitée par inhalation, ingestion ou pénétration cutanée ; « Toxiques » : ils peuvent entraîner des risques graves, aigus ou chroniques, voire la mort, par inhalation, ingestion ou pénétration cutanée ; « Cancérogènes » : ils peuvent produire le cancer ou en augmenter la fréquence par inhalation, ingestion ou pénétration cutanée ; « Corrosifs » : ils peuvent exercer une action destructrice sur les tissus vivants avec lesquels ils sont en contact ; « Infectieux » : ils contiennent des micro-organismes viables ou leurs toxines dont on sait ou dont on a de bonnes raisons

1 Les déchets d’activités de soins à risques infectieux au Maroc, Colloque, Medwem Maroc/Rudologia/France savoir et développement/France, Rabat, avril 2008.

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de croire qu’ils causent la maladie chez l’homme ou chez d’autres organismes vivants ; « Tératogènes » : ils peuvent produire des malformations congénitales non héréditaires ou en augmenter la fréquence par inhalation, ingestion ou pénétration cutanée ; « Mutagènes » : ils peuvent produire des défauts génétiques héréditaires ou en augmenter la fréquence par inhalation, ingestion ou pénétration cutanée.

Ces DASRI sont également une menace pour l’environnement : ces derniers peuvent avoir un impact négatif pour la santé humaine, par la contamination des sources d’eau au cours du traitement des déchets et par la pollution de l’air due à l’émission de gaz hautement toxique au cours de l’incinération (il peut y avoir émission dans l’air de dioxines, de furannes et d’autres polluants toxiques, qui peuvent être à l’origine de maladies graves chez les personnes qui inhalent cet air), ainsi qu’une pollution des sols lorsqu’ils sont déposés dans des décharges dites sauvages, ou enfouis à l’intérieur ou l’extérieur de l’enceinte des structures sanitaires. En définitive, le dépôt des déchets de soins médicaux dans des zones non contrôlées peut avoir un effet environnemental direct par la contamination des sols et des nappes souterraines.

Figure 2: Le sol et les nappes souterraines peuvent être contaminés par des métaux lourds et d’autres produits toxiques qui pourraient entrer dans la chaîne alimentaire.… OMS Fiche N° 231, Avril 2002 (http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs231/en/)

Danger et risque des notions qui diffèrent ? Le Conseil Supérieur d’Hygiène, distingue les notions de « danger » et de « risque ». Selon ce dernier elles sont souvent confondues à tort.

« Le mot “danger” a trait à la faculté intrinsèque d’un appareil, d’une situation, etc. de causer un dommage. Ainsi, un câble électrique sous tension ou une aiguille non protégée constituent-ils un danger réel. Cependant, ce danger n’engendre pas nécessairement des blessures. En effet, rien ne se passe si personne ne touche au câble ou si l’aiguille est rangée soigneusement. Il y a cependant un “risque” que ce danger ait des conséquences pour l’entourage. Ce risque est déterminé par un certain nombre de “facteurs de risque”. Dans l’exemple du câble électrique un tel facteur pourrait être la nécessité d’effectuer des travaux à proximité du câble. Dans le cas d’une aiguille, un facteur de risque pourrait être la nécessité d’une intervention rapide dans des situations mortellement graves. Le danger peut donc engendrer des “dommages” suite à la présence de facteurs de risque. Cette différence entre le “danger” et le “risque” est souvent négligée »1 (Conseil Supérieur d’Hygiène, 2005).

1 Recommandations en matière de gestion des déchets de soins de santé, Conseil Supérieur d’Hygiène, Bruxelles, 2005, n° 5109.

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Quels sont donc les risques et les dangers liés aux déchets de soins de santé ? Voici un exemple : celui de l’aiguille.

Figure 3 : rend intelligible les notions de « danger » et de « risque », schéma issu du rapport du Conseil Supérieur d’Hygiène, 2005

« Le but de cette figure est surtout de démontrer que les notions de “danger” et de “risque” sont bien des notions différentes. Un instrument, une situation… peuvent être exceptionnellement dangereux mais n’impliquer aucun risque si les facteurs de risques ont été neutralisés par des mesures adéquates » (ibid.).

C’est pourquoi les déchets d’activités de soins sont considérés comme dangereux par leur capacité à piquer, couper, blesser, etc. Mais le risque provient surtout d’une mauvaise et inadéquate gestion de ces déchets. Si cette gestion devient rigoureuse et appliquée alors on contrôlera les facteurs de risques (diminution du risque) et ces déchets dangereux ne causeront aucun dommage. Cette relation entre le danger et le risque dépend de l’estimation d’un certain danger par le responsable des déchets (faut-il encore qu’il y ait un responsable). Une gestion de qualité, basée sur une hygiène hospitalière convenable, demeure un enjeu de taille afin de limiter les risques.

« Les mesures d’hygiène agissent sur les causes ou sur les facteurs de risque : si les microbes (bactéries, virus) sont responsables de maladies infectieuses, les facteurs de risque sont les conditions dans lesquelles l’individu s’infecte ou se contamine » (Encyclopédie Axis, Vol 5 : 300).

Pour réduire les facteurs de risque des déchets d’activités de soins, l’hygiène s’impose comme solution. Encore faut-il définir ce que l’on entend par « hygiène ».

DANGER : CAPACITE D’UNE AIGUILLE A

PIQUER

RISQUE : CONTAMINATION

FACTEURS DE RISQUES : - COLLECTIFS

Matériel, organisation…

- INDIVIDUELS Stress, respect

des procédures…

« UN DANGER est une propriété intrinsèque d’un agent, d’une méthode de travail, d’une procédure ou d’un équipement qui peut mener à des conséquences néfastes c’est-à-dire causer un dommage. Un danger produit un risque sous l’influence des facteurs de risque. UN FACTEUR DE RISQUE est un élément codéterminant du risque ou une variable qui est statistiquement associée avec l’apparition d’un risque. Il existe deux principales catégories de facteurs de risque : - facteurs collectifs de risques : (circonstances de travail, agents et procédés chimiques, organisation du travail, facteurs de tension psychosociaux…) - facteurs individuels de risques : (médicaux, comportementaux, physiologiques…) UN RISQUE est la probabilité d’un dommage pour la santé, par la conjugaison d’un danger à un ou plusieurs facteurs de risques. »

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B. Représentations et conceptions socio- culturelles « Jamais, nulle part, les représentations populaires des maladies ne coïncident avec les représentations savantes, biomédicales. (…) c’est pour une bonne part à partir des bribes de discours médical réinterprété que se construisent les représentations populaires » note J.P. Olivier de Sardan, dans l’introduction d’un ouvrage publié avec Y. Jaffré, La construction sociale de maladies (1999 : 7). Cette réflexion d’Olivier de Sardan relative aux représentations populaires des maladies peut être utile pour envisager les conceptions populaires des déchets biomédicaux dangereux. En effet aucune étude ne porte réellement sur les représentations du déchet médical dangereux, mais plutôt sur celles de la santé, de la maladie ou encore de l’hygiène et de la saleté. Mon analyse tente d’articuler ces diverses représentations à la question du déchet hospitalier dangereux.

1. Notions d’hygiène, de propreté, de saleté et de souillure Quand l’OMS parle d’ « hygiène », de quoi s’agit-il ? L’ « hygiène » est-elle une notion universelle partagée par tout individu ? N’existe-t-il pas une « hygiène » dans les textes et une « hygiène » dans la pratique ? Yannick Jaffré et Doris Bonnet dans leur ouvrage les maladies de passage (2003) discutent le concept d’hygiène : « (…) Il en résulte, en effet, puisque l’apparente homogénéité des termes utilisés dissimule une hétérogénéité des représentations, que si tout le monde communique, il n’est pas certain que tout le monde se comprenne ».

L’encyclopédie Axis fournit une définition de base : « l’hygiène, ensemble des principes qui visent à maintenir l’homme en bonne santé, a d’abord inclus l’idée d’une prévention des maladies infectieuses ou transmissibles. Puis la notion a recouvert la totalité des mesures pouvant protéger la santé au sens large (hygiène mentale, hygiène du travail, hygiène sociale) ». L’hygiène est un ensemble de mesures destinées à prévenir les infections et l’apparition de maladies infectieuses. Elle est donc essentielle lorsqu’on manipule les déchets de soins dangereux. Toutefois, la notion d’hygiène en Occident a-t-elle un sens équivalent en Afrique de l’Ouest ? Yannick Jaffré aborde le sujet : « l’idée que les sociétés africaines aient des principes hygiéniques a longtemps paru inconcevable aux administrateurs coloniaux et aujourd’hui encore certains intervenants de projets de développement social et sanitaire. Certes, ceux-ci se réfèrent à une vision pasteurienne de l’hygiénisme, débarrassée des conceptions populaires de la contagion. De fait, ils perpétuent un hiatus entre « politique d’hygiène » et « pratiques de propreté ». Si l’on se réfère aux écrits concernant l’hygiène on constate que la différence entre l’hygiène et la propreté est véritable et démontrée1. L’hygiène relève de la prévention en vue d’une bonne santé pour les uns et d’une élimination des désagréments pour d’autres. Néanmoins, « la notion de « propreté » est présente dans toutes les sociétés ; son contenu peut varier d’un contexte social à un autre » déclare Jacky Bouju dans son rapport final, une anthropologie politique de la fange. Conceptions culturelles, pratiques sociales et enjeux institutionnels de

1 Yannick Jaffré reprend plusieurs auteurs qui ont traité le sujet : « En 1990, Arlette Poloni, lors d’études menées au Burkina Faso sur l’hygiène faisait état d’ « incompréhensions préjudiciables » entre les médecins, les urbanistes et la population de Ouagadougou. Les uns parlaient d’hygiène, les autres de propreté, deux notions qui ne se confondaient pas, écrivait l’auteur. Pour les premiers, il s’agissait de mesures prophylaxiques associées à la santé, pour les seconds « d’éliminer ce qui dérange et d’opérer des sélections » dans les registres du domestique ou du social. Ces réflexions s’ajoutaient à celles d’autres ethnologues ayant travaillé sur des terrains différents notamment aux Antilles françaises et ayant fait le constat (Peeters, 1982) : « il s’agit de notions appartenant à des ordres différents et qui ne sont pas nécessairement associées ni dans le passé, ni dans la plupart des sociétés » Si l’on consulte les travaux des historiens de la médecine et de l’hygiène (Mirko Gmerk ou Jean-Pierre Goubert), on constate qu’en Europe l’hygiène est, dès sa naissance, une idée éminemment politique… » (Les maladies de passages p17-18)

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la propreté urbaine à Ouagadogou et Bobo-Dioulasso (2002 : 7). Selon l’anthropologue « toute culture a ses propres normes de propreté. Les notions de « propreté », de « saleté » et de « santé » mettent en œuvre des conceptions populaires qui expriment une adaptation historique aux conditions prévalentes de l’environnement local ». Le rapport au propre et au sale est complexe, d’autant plus lorsqu’il s’agit des déchets d’activités de soins à risque infectieux.

Quel étrange objet, que le déchet de soins dangereux. En effet, une seringue à la base est un objet propre, il est un instrument qui va soigner. Et suite à son utilisation, celui-ci se transforme immédiatement en déchet dangereux et sale. Le passage du propre au sale est instantané. C’est une particularité des DASRI. Le rapport à la saleté, la souillure est omniprésent dans le secteur de la santé. Là aussi, c’est paradoxal. La santé jongle entre ce que l’on appelle un corps « malsain », c’est-à-dire malade, puis un corps « sain », entendez par là « propre au niveau de la santé », guéri. Mais où se situe la limite entre les deux, quand peut-on dire que tel corps est malsain, malade ou sale. François Enten traite les notions scientifiques d’hygiène et les notions populaires de propreté. Il mentionne la définition de Laplantine (1986) sur la maladie : « c’est le germe pathogène, le microbe, qui constitue l’élément étranger au malade qui, dehors, vient s’abattre sur ce dernier » (in BONNET et JAFFRE, 2003 : 375). François Enten continue son propos : « selon cette logique, les gestes de nettoyage se justifieraient donc par la volonté de se protéger des germes pathogènes susceptibles d’être contenus dans les déchets » (ibid. : 375-376).

La saleté représente-t-elle la même chose pour tous ? Sans nul doute la réponse est négative. Celle-ci dépend des conceptions des individus et des objets considérés. « La saleté et l’hygiène dépendent du milieu d’où l’on vient et du milieu dans lequel on vit. Il existe des gens sales de nature et des gens qui accordent une importance au propre et à l’hygiène en tant que vertus sociales » admet Malimata Millogo (2001, cité par BOUJU, 2002 : 33). L’une des représentations de la saleté décrite par Jacky Bouju est applicable aux déchets de soins dangereux. Il s’agit de la saleté vue comme un désordre : « le sale c’est ce qui n’est pas là où ça devrait être » s’exclame le chef coutumier Sanou sogosira (2001, cité par BOUJU, 2002 : 34). En effet, les DASRI peuvent être considérés comme sales et dangereux puisqu’ils ne se trouvent pas à leur place, dans des poubelles spéciales, ou bien dans des incinérateurs. Au contraire, comme il est mentionné plus haut, ces déchets se retrouvent n’importe où, dans les rues, accessibles au public. L’autre conception valable pour les DASRI est celle de la saleté-souillure. Souillure dans le sens de contamination, de transmission de maladies, de contagion. D’ailleurs, les mouches personnifient en quelque sorte cette souillure. Gérard Salem, dans La santé dans la ville, géographie d’un petit espace dense : Pikine (Sénégal), note la « présence de culex et de mouches, suspectés d’être des vecteurs d’agents pathogènes » sur des tas d’ordures (1998 : 111). Les DASRI sont à double titre des déchets souillés : du fait de leur éventuel risque de contamination (santé de l’homme) mais également par la pollution qu’ils engendrent (sur l’environnement). D’ailleurs, de nos jours le terme « souiller » a pris le sens de « polluer », de « dégrader un milieu ».

Le problème qui se pose ici, c’est la saleté à l’hôpital. Car si « la saleté est la racine de la maladie » (Amadé, cité par BOUJU), il est primordial pour une structure de santé de garantir une hygiène. « L’ordure est sale dans la mesure où elle salit ce avec quoi elle rentre en contact. La saleté amène des maladies et les maladies produisent des saletés. La relation entre les deux est circulaire » (BOUJU, 2002 : 52). Alors à partir de ce constat il semble impossible de pouvoir concilier propreté et lieu de soins qui accueille des malades, par extension des « saletés ».

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2. L’hygiène hospitalière « L’ensemble des mesures de prévention et de protection des malades et des professionnels de santé mises en œuvre dans un établissement de soins constitue l’hygiène hospitalière. Ces règles servent avant tout à protéger les malades des infections (urinaires, respiratoires, septicémies, bactériémies) contractées au cours de leur séjour à l’hôpital » (Encyclopédie Axis, Vol 5: 300).

Cette définition reste trop générale. Je vais donc m’appuyer essentiellement sur les travaux des anthropologues Yannick Jaffré et Jacky Bouju. Le premier constate trois caractéristiques de l’hygiène hospitalière : « une analyse fine du déploiement, des équilibres et des variations des parasites pathogènes », « la lutte contre les vecteurs pathogènes (…) les sujets d’actions semblent, dès lors, être les gestes et les objets médicaux » et « un ensemble de règles et de procédures édicté concernant la désinfection et la décontamination des lieux, des instruments, des linges ou des repas ». Ainsi l’hygiène hospitalière c’est d’abord prendre en compte les connaissances biologiques1et prendre des mesures, concevoir des règles pour lutter contre les « vecteurs pathogènes ». Toutefois, ce que note l’auteur, c’est que ces procédures ne prennent pas en compte « la question de la subjectivité des acteurs ». Y. Jaffré éclaire ce point négligé, resté dans l’ombre : « cette caractéristique discursive, qui est aussi celle du droit édictant la loi, conduit cette discipline médicale à se présenter comme une sorte de règle sanitaire doctrinale, une idéalité référentielle de l’organisation des pratiques des personnels, des malades, et des visiteurs. Mais forclos des textes de référence, les acteurs, dans leur épaisseur humaine et sociale, font retour dans le réel » (2003). Ainsi se dévoile la part subjective des acteurs, celle des représentations et conceptions qui modifie l’approche de l’hygiène hospitalière. Celle-ci n’est plus « construite non seulement sur l’idéalité des normes, mais aussi en fonction des identités et des logiques comportementales des soignants et soignés », conclut l’auteur. C’est pourquoi on constate que certaines conduites, d’un point de vue sanitaire, sont dangereuses. Je ne reviendrai pas sur le dysfonctionnement du système hospitalier qui s’explique tant par l’absence d’équipement2 que par le manque de formation du personnel de santé. Comme je l’ai expliqué précédemment, même si les mesures d’hygiènes sont connues elles ne font pas toujours l’objet d’une application, surtout lorsque ces conduites deviennent routinières3 : « A mes débuts ici, je prenais des précautions face au risque, mais à la longue, tu regardes le comportement des anciens et tu fais comme eux. (…) avant je me lavais les mains après chaque acte de soin, maintenant je ne le fais plus » (JAFFRE, 2003).

Qui plus est, la notion d’hygiène n’évoque pas la même chose pour les personnels de santé et pour les malades et les proches qui ont leur propre conception de ce qu’est l’hygiène à l’hôpital. Y. Jaffré et J. Bouju évoquent là les conduites des accompagnants qui mangent

1 Yannick Jaffré énumère ces parasites pathogènes : « conduisant à décrire les paysages hospitaliers, pour ainsi dire, du point de vue des germes (staphylocoques, klebsielle, etc.) : on précise leur résistance aux traitements ; on les localise (dans l’eau, dans l’air) ; on les caractérise selon leur provenance (flore commensale de la bouche, de l’œsophage, etc.) ; on indique les voies qu’ils empruntent pour se transmettre (blouses, mains, examens divers) ; on traque dans les cuisines et les vestiaires ; on s’inquiètent des lieux où ils prolifèrent (services de réanimation, bloc opératoire) ». 2 Yannick Jaffré explique que l’hôpital africain se confronte à des difficultés telles que l’absence d’équipement : « les mesures précédemment évoquées nécessitent un équipement complexe et performant de cuisines, douches, toilettes, vestiaires, salles de repos, blocs chirurgicaux, etc., qui sont pratiquement inexistants et économiquement hors d’accès pour les pays en voie de développement ». 3 Il est possible ici de faire un parallèle avec le code de la route : par exemple lorsque l’on doit tourner pour prévenir les autres automobilistes il faut mettre le clignotant, aux débuts de la conduite après avoir réussi le permis on met le clignotant, puis on perd peu à peu ce réflexe. Alors que cela comporte un risque, mais l’habitude de conduire, de faire la même route, etc. finalement on ne respecte plus les règles de sécurité.

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avec le patient, ou viennent porter des plats alors que tout cela est source d’infections. Alors de ce point de vue, il est légitime de se poser la question de ce qu’il advient des déchets dangereux. En effet, les visiteurs sont-ils prudent face aux DASRI ? Si le personnel est plus ou moins conscient des risques qu’occasionnent ces déchets, les visiteurs sont-ils « éveillés » sur les risques de leurs conduites ? Madame Kambou, infirmière responsable du service d’hygiène de l’hôpital de Bobo remarque ceci : « l’hôpital, c’est un cas particulier quand même. On m’a donné ce poste parce qu’au vu de tous les problèmes que nous avons au niveau de l’hygiène, il n’y a pas de responsable. C’est un gros problème, l’hygiène au sein de l’hôpital. Il y a beaucoup de déchets à éliminer, il y a les malades et les accompagnants qui ont besoin d’information sur le plan hygiène et assainissement. Moi, je fais de la sensibilisation » (cité par BOUJU, 2002 : 103). Celle-ci complète son commentaire en explicitant les différents modes vie qui conditionnent les actes des visiteurs ainsi que leur grand nombre lorsqu’ils accompagnent un proche (BOUJU, 2002 : 105). Ainsi l’hygiène hospitalière s’articule avec les multiples dimensions sociales et culturelles qui sans cesse la modifient et qui finalement l’effacent au profit de « la manifestation sociale du sentiment de solidarité » (BOUJU, 2002 : 108). En conclusion, pour une efficacité de l’hygiène hospitalière, les règles médicales devraient intégrer ce niveau subjectif ou du moins prendre en compte les aspects des relations sociales dans le milieu hospitalier.

3. Le rapport santé / déchet : conscience de l’impact Ici on admet que l’hygiène et les déchets ont un lien avec la santé, mais cela fait-il sens pour tous ?

« Le rapport entre déchet et santé n’apparaît pas spontanément dans les discours : le déchet n’est pas en lui-même considéré comme susceptible de porter atteinte à la santé » (LHUILIER et COCHIN, 1999).

François Enten précise que « les gens associent globalement les déchets aux maladies, sans apporter plus de précision. On dira simplement que « le déchet est responsable de maladies », que « c’est pas bon ». » (in BONNET et JAFFRE, 2003 : 392). Celui-ci traite de la transmission des maladies et interroge des femmes sénégalaises sur « les liens de causalité déchets-vecteurs-maladies » qui sont souvent morcelés et les termes mélangés. Cet exemple illustre l’attention qu’accordent les populations au rapport déchet/santé. F. Enten suppose trois vecteurs principaux responsables de maladies en rapport avec les déchets : les insectes (mouches et moustiques), les odeurs et les poussières : « Premièrement, on attribue aux mouches de nombreuses maladies. Elles provoquent des maux de ventre, des diarrhées et des vomissements par simple « contact avec les aliments » ou même en « libérant du poison (Pusen) dans la nourriture ». … Plus précisément, le lien de causalité entre le déchet et la fièvre « Sibbiru » (« paludisme ») est toujours clairement expliqué à partir des moustiques, ce qui apparaît comme le signe d’une intégration des messages de sensibilisation. (…) Deuxièmement les mauvaises odeurs sont considérées comme responsables du rhume. (…) Enfin, la poussière est considérée comme déclencheur des formes du rhume, particulièrement lors du balayage ou du tamisage » (ibid. : 393-395). F. Enten met en avant l’association des informations médicales transmises par les messages de sensibilisation et la pratique empirique. Les conceptions de la maladie, de la transmission, des déchets se composent d’un mélange de discours scientifique et de logique domestique. « Ce premier discours assez évasif témoigne cependant de l’attention que les femmes portent aux messages de sensibilisation, sans pour autant les avoir assimilés dans toutes leur complexité » explique l’auteur (ibid. : 392). « Il en résulte que le discours populaire

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correspond à une sorte d’hybride associant à la fois des bribes d’une étiologie médicale pasteurienne et une étiologie empirique basée sur la perception sensible immédiate. Le registre exclusivement hygiéniste ne permet donc pas d’intégrer la complexité d’une logique domestique composant avec une certaine appréhension du déchet défini comme ce qui est visible et un registre socioculturel où la propreté symbolise des notions d’ordre et d’esthétisme et participe à des processus de discrimination sociale » (ibid. : 396) Face à cette complexité, on peut se demander si les conseils présents dans les rapports de l’OMS ont pris en compte les multiplicités de représentations de l’hygiène, de la santé par les populations africaines avant de faire un plan de gestion des déchets. Les messages, comme l’indique F. Enten, sont souvent « conçus de manière standardisée par des organismes internationaux » (ibid. : 396) et ignorent les représentations socio-culturelles qui guident les actes des individus. Quelles sont-elles ?

La corrélation entre risques sanitaires et déchets se tisse à travers les représentations qui caractérisent le déchet comme nuisible, dangereux. Selon Lhuilier et Cochin, les deux voies associatives les plus fréquentes sont :

- déchet-saleté-insalubrité-maladie. Le déchet entre donc dans la catégorie du sale et de l’insalubre, c’est la catégorie « saleté-désordre » selon les termes de Jacky Bouju. Comme il est expliqué plus haut, c’est lorsque le déchet n’est pas à sa place : car les déchets dans la poubelle sont considérés comme inoffensifs, et ceux là mêmes s’échappant des espaces attribués deviennent nuisibles.

- déchet-pollution-toxicité-maladie. Le déchet entre dans la catégorie de la pollution, c’est alors la catégorie « saleté-souillure » pour reprendre une fois de plus les termes de Jacky Bouju. Il est ainsi considéré comme un excédent de la production et de la consommation, dont la technologie ne sait que faire. Le déchet devient un poison qui échappe à la maîtrise, à la gestion technique. Cette sorte de saleté est donc très péjorative car elle est polluante et envahissante, impossible à contrôler. Ainsi, de la contamination, on passe à l’intoxication.

Les deux auteurs à partir de nombreux entretiens concluent que « les déchets considérés comme dangereux, ceux auxquels sont associés des risques sanitaires, sont ceux qui défient les limites du naturel (par ses composants non biodégradables, par un excès qui perturbe l’autorégulation d’un équilibre naturel), du technologique (la pollution, ce qui s’échappe des installations industrielles – fumées, poussières, eaux usées – sont des déchets, résidus nuisibles des processus de production), qui créent des espaces sociaux nuisibles ( l’anxiété émerge quand la distinction entre espaces habités et espaces contaminés-pollués n’est plus préservée) ». En ce sens les déchets biomédicaux sont qualifiés de dangereux car ils détiennent ces caractéristiques : défier les limites du naturel, du technologique et créer des espaces sociaux nuisibles. De plus, ces déchets sont produits par des centres de santé comme l’hôpital qui se situent la plupart du temps en ville. Et c’est justement le monde urbain qui est un environnement malsain. Le lien santé-environnement est perceptible du fait de la question de la pollution du cadre de vie. Mais si l’on se préoccupe souvent des déchets dans notre environnement proche c’est plus par souci d’assimilation à lui, d’identification qu’un souci de santé. En effet, la proximité aux déchets est honteuse, stigmatisante, car elle donne à voir (tas d’ordures). Si aujourd’hui, pour les hygiénistes occidentaux, la corrélation santé/déchet est évidente, indéniable et va de soi ce n’est pas forcément le cas pour l’opinion publique africaine, c’est-à-dire pour les populations mais aussi les personnels de santé. Les entretiens de Lhuilier et Cochin révèlent que « les médecins apparaissent dans l’ensemble faiblement impliqués par la problématique environnement-santé. La formation initiale et continue n’accorde qu’une faible place à cette question comme les documentations et réunions professionnelles. Ils se disent le plus souvent peu informés ou seulement par les

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médias. De plus ce type de risques sanitaires leur paraît insuffisamment établis ». L’approche médicale reste centrée sur la dimension curative plus que sur une visée préventive. Quant aux politiques, le rapport santé/déchet se traduit par l’organisation de la gestion des déchets, qui constitue alors un enjeu de pouvoir plus qu’une réelle préoccupation des problèmes de santé.

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III. Sur la route du développement durable

« A la fin de la dernière décennie, c’est par centaine de milliers de tonnes que des déchets dangereux produits dans les pays industrialisés ont été exportés vers divers pays d’Amérique latine, d’Afrique (comme le Sénégal, le Libéria, le Nigéria, l’Angola) ou d’Europe de l’Est. Ne possédant pas l’infrastructure nécessaire au traitement de tels déchets, ces pays étaient utilisés comme simples dépotoirs bon marché » (Les déchets dangereux, 1997 : 11).

Déjà, l’élimination des déchets constituait un enjeu politique considérable. Avec le temps le nombre des déchets a augmenté, leur dangerosité s’est accentuée et ces derniers constituent aujourd’hui, un enjeu tant au niveau des pays développés que des pays en voie de développement.

A. Des problèmes sociopolitiques aux problèmes économiques « À ses origines, l'homme petit, isolé et fragile s'est installé dans une nature rude, complexe et puissante dont il a subi les contraintes et les limites d'usage vital. Aujourd'hui les objectifs et les moyens de ses activités ont apparemment renversé le sens du déséquilibre des forces à son avantage ; tout au moins localement, temporairement, au risque de tout détruire. En effet, la rupture avec la nature est consommée à cause de l'impérieuse réussite du modèle urbain, étayée sur l'appétit de puissance servie par la maîtrise technologique, servie par une apparente libération spirituelle née de la connaissance scientifique » (Encyclopédie wikipédia : la rudologie).

Très vite des limites insupportables apparaissent : accumulation de déchets, risques sanitaires, destruction des espaces naturels, pollution…Une prise en compte et une maîtrise efficace du déchet sous toutes ses formes deviennent inéluctables : résidus inutilisables, rejets dangereux, agressifs, toxiques, déchets radioactifs mortels encombrent et tuent.

1. La gestion et l’élimination des déchets

« Certains déchets d’activités de soins, tels que les déchets hospitaliers contaminés, présentent des risques infectieux et nécessitent de ce fait un traitement particulier » (DESACHY, 2001 : 37). « La gestion des déchets désigne le stockage, la collecte, le transfert, le recyclage et l’élimination finale des déchets ». (ONIBOKUN (dir.), 2001 : 105)

a) Les différentes techniques d’élimination selon les types de déchets

« Aujourd’hui la question des déchets à l'hôpital se pose avec de plus en plus d'acuité. Diverses publications et enquêtes ont montré que les conditions actuelles d'élimination des déchets solides hospitaliers ne sont pas toujours satisfaisantes » (Rapport Gestion des déchets hospitaliers, 1997).

La question qui se pose maintenant est celle des techniques utilisées pour éliminer les déchets. En effet, on étudiera ensuite les dysfonctionnements et la règlementation qui correspondent au système de gestion. Il est primordial de noter les divers modes d’élimination des déchets utilisés en Afrique de l’Ouest en général.

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Les déchets biomédicaux sont le plus souvent gérés comme des ordures ménagères. Le transport s’effectue par les propres moyens de l’hôpital. Les déchets dangereux sont mis en décharge sans conditions techniques spécifiques. Ils sont recueillis en même temps que les ordures ménagères dans les décharges municipales. Dans la plupart des pays, il n’existe pas de compartiment propre aux déchets dangereux. Ils sont alors le plus souvent mélangés, comme au Sénégal, par exemple. Une forte récupération s’effectue sur tous les types de déchets par des récupérateurs qui sont installés à l’intérieur même de la décharge. La gestion constatée des déchets biomédicaux est encore problématique malgré les efforts notables réalisés ces dernières années.

Tout d’abord, la pré-collecte et la collecte des déchets (ordures ménagères et assimilées y compris les déchets biomédicaux) s'effectuent par le biais de plusieurs types de réceptacles (énoncés précédemment). Ces derniers reçoivent sans distinction pour la plupart les reliefs de repas, les emballages de médicaments, les ampoules pour injection, les pansements souillés, les bouteilles de perfusion, bouteilles, seringues, aiguilles, etc. Les déchets ne sont quasiment pas conditionnés (mise en sachet). Selon les pays, les régions, certaines structures disposent de plans de gestion de ces déchets ; dans d'autres ils sont inexistants ou en préparation.

Puis, le tri sélectif des déchets infectieux est rare. Certaines structures ont mis en place des poubelles de différentes couleurs pour effectuer le tri. Cependant, la séparation des déchets n'est pas systématique. Les déchets les plus concernés par le tri sont représentés par les aiguilles et les placentas bien que la gestion des aiguilles s'avère être un casse-tête dans presque toutes les structures. En effet, il a été remarqué que les aiguilles de seringue sont triées à la source et stockées dans des flacons de perfusion, des bouteilles en plastique récupérées, des réceptacles en plastique ou carton dur (boîte de sécurité). Fall Ndiaye Dior évoque clairement que « les aiguilles sont conditionnées pour la plupart du temps dans des flacons en verre bouteille en plastique remplies d’eau de javel ». Mais malgré ces équipements mis à la disposition du personnel, certaines aiguilles sont encore jetées dans les poubelles et les équipements sont sous utilisés.

« Il a été constaté dans certains sites: des aiguilles de seringues éparpillées sur le sol ou derrière les fenêtres des salles de soins, cotons souillés de sang et autres détritus sur les planchers des salles; quelques salles de soins sont mal entretenues (Hôpital Ségou, CSCom Bamako). Ces actes sont du fait du personnel soignant et de collecte. Il vient se greffer aussi l'attitude d'une population importante (adultes - enfants) de gardes malades qui n'utilisent pas les poubelles mises à leur disposition ou installées dans les cours (Point G, Kati) » (DOUCOURE, 2004).

En terme de stockage, le nombre de poubelles est encore insuffisant pour la promotion

du tri à la source, des lieux spécifiques ne sont pas utilisés ni pour le stockage intermédiaire ni pour le stockage final. D’ailleurs, comme le stockage intermédiaire est rarement effectué en local spécifique, « les couloirs et les cours sont généralement mis en contribution » (ibid.). Le personnel sollicité pour les tâches de collecte et d'évacuation est généralement constitué de manœuvres ou d’agents de nettoiement contractés par les structures ; il ne porte pas systématiquement les équipements de protection lorsqu'ils sont disponibles. Cette évacuation des déchets triés ou non se fait « au moyen de brouettes, à la main surtout très tôt le matin et en fin de journée » décrit Djibril Doucouré. « Les structures visitées n'ont pas donné l'opportunité de voir un local de stockage aménagé et fermé accessible aux seuls manœuvres chargés de la gestion des déchets », explique t-il. Les déchets infectieux non conditionnés sont acheminés directement vers l'unité de traitement qui sert de stockage final.

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Des caisses de benne à ordures, des fûts non couverts sont aussi utilisés dans certaines structures à côté des équipements d'élimination.

Certains déchets sont récupérés après tri comme la verrerie dans les laboratoires, après rinçage à l'eau de javel et stérilisation à l'autoclave tel que le matériel utilisé pendant les interventions chirurgicales (pinces, ciseaux, etc.). Mêmes les contenants en plastique dur pour les aiguilles qui doivent être incinérés avec ces derniers sont réutilisés. Djibril Doucouré note également que « les gants chirurgicaux sont réutilisés en salle de pansement en Commune IV après un processus de décontamination, rinçage, talcage et stérilisation. Les films en radiologie sont récupérés par les tailleurs et les teinturières (Clinique Farako) ».

Ensuite, le transport des déchets hors des structures sanitaires est effectué par des agents ou la collectivité locale. Ces déchets se retrouvent en dépotoir sauvage où récupérateurs et enfants procèdent au ramassage de matériaux. A l'intérieur des structures sanitaires, l'incinération, le brûlage, l'enfouissement et même le dépôt sauvage des déchets biomédicaux sont les types de traitement rencontrés. Les placentas sont soit enfouis, incinérés, soit remis aux parents. Les déchets lorsqu’ils sont évacués, sont transportés au moyen de camion benne ou bien par des charrettes.

Enfin, le traitement et l’élimination des déchets dangereux : la désinfection par l'eau de javel est parfois utilisée pour les aiguilles triées, les placentas à remettre aux parents et le traitement par autoclave est employé pour la destruction des germes de milieu de culture. Toutes les structures de santé en Afrique de l’Ouest ne disposent pas d’incinérateurs. Le système de brûlage à l'air libre est alors utilisé, tout comme l'enfouissement. Les déchets provenant de certaines structures de santé sont aussi transférés vers les sites de dépôts sauvages ou autorisés où l’on note la présence de récupérateurs adultes et enfants. « A Bamako, beaucoup de dépôts sauvages cohabitent avec des dépôts autorisés sensés être évacués par la municipalité. Les limites de ce système de transfert transforment ces sites en véritables dépotoirs » conclut Djibril Doucouré.

b) Les dysfonctionnements :

Cette gestion des déchets est une question essentielle qui se pose lorsque les déchets deviennent trop nombreux1 et causent des incidents. Pour Christian Levêque et Yves Sciama ce sont « autant de déchets qui sont ensuite répartis dans l’environnement de proximité, avec des traitements divers mais généralement insuffisants, voire, dans les villes les plus pauvres, sans traitement aucun » (2008 : 34). Ce qui est le cas des déchets d’activités de soins dangereux en Afrique de l’Ouest qui provoquent de graves accidents, voire mortels, lorsque leur gestion est mal organisée. Mohammed Abdou Daoudi annonce qu’« une gestion inappropriée des déchets médicaux et pharmaceutiques au niveau des formations hospitalières, accroît les risques traumatique, infectieux, toxique, radioactif et psycho émotionnel pour les professionnels de santé et les usagers de l’Hôpital. Mounier et col. rapportent que la majorité des piqûres (60%) survient lors de l'élimination du matériel souillé » (2008). C’est pourquoi il est vital que ces derniers répondent à des traitements spéciaux qui hélas ne sont pas toujours performants comme il est mentionné ci-dessus. « Au niveau des décharges publiques qui sont souvent non contrôlées pour les pays en voie de développement, ces

1 « De façon générale, dans les pays en développement les infrastructures peinent à suivre le rythme effréné de la croissance urbaine. D’ailleurs le développement explosif des bidonvilles depuis les années 1950 illustre de manière criante l’incapacité des sociétés humaines à gérer leur propre urbanisation » (Christian Levêque, Yves Sciama, Développement durable. Nouveau Bilan, 2008 : 33)

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déchets s'infiltrent et posent le risque de contamination infectieuse, toxique ou radioactive du sol et des eaux souterraines, à l'origine de la pollution de l'écosystème et de l'apparition d'un certain nombre d'état morbide (choléra, typhoïde...) chez la population » commente Mohammed Abdou Daoudi. Une étude de l’OMS1 menée en 2002 auprès de 22 pays en voie de développement a montré que 18 à 64 % des établissements de soins n’éliminent pas correctement leurs déchets. Les injections par seringues contaminées sont responsables de : • 21 millions d’hépatite B (32 % des nouveaux cas) ; • 2 millions d’hépatite C (40 % des nouveaux cas) ; • 260 000 infections au VIH Sida (5 % des nouveaux cas).

Quelles sont donc les raisons de l’échec de la gestion des déchets hospitaliers dangereux ? « L’absence d’une politique de gestion des déchets, la sensibilisation médiocre aux risques pour la santé, les ressources financières et humaines insuffisantes, la réglementation inadéquate des mesures d’élimination des déchets sont les problèmes les plus fréquents » répond l’OMS (n°253, 2000). Il est évident que les établissements de soins produisent quotidiennement des déchets. Et leur gestion a longtemps été insuffisante en raison à la fois d’une mauvaise maîtrise du circuit de production et d’élimination mais aussi d’une méconnaissance des risques liés à leur traitement2. Par ailleurs, de nombreux pays n’ont tout simplement pas de réglementation appropriée ou alors les règles ne sont pas, ou ne peuvent pas être appliquées. Dans le cadre de son mémoire de DEA en droit de la santé (2004-2005) sur les « déchets biomédicaux »3, Fall Ndiaye Dior a visité plusieurs structures de gestion pour se persuader des mêmes réalités : « Il y a véritablement des difficultés dans la gestion des déchets biomédicaux. Pour la pré-collecte et la collecte, la plupart des structures sanitaires utilisent des poubelles en plastique, souvent sans couverture ou encore des seaux. Ces supports ont tendance à recevoir sans distinction toute sorte de déchets à l’exception des lames, et autres matériaux piquants et tranchants. Cependant il arrive que ces déchets piquants ou tranchants se retrouvent dans les bacs à ordure qui doivent être recueillis par les camions et déversés à la décharge publique, situation que nous avons vécue personnellement à Abass Ndao ». L’auteur rappelle que le tri se confond très souvent au conditionnement et au stockage. De même certaines formations hospitalières ont tendance à acquérir des sachets en plastiques et des poubelles avec des couvercles de couleurs différentes. Et « pour ce qui est de l’élimination, bon nombre de structure signe des contrats avec des GIE comme AMA/Sénégal ou contracte directement avec des particuliers. Ce personnel non averti est pourtant chargé d’acheminer les déchets biomédicaux des points de collectes aux différentes zones de destination ». Enfin, il existe l’incinération avec des incinérateurs de diverses fortunes notamment ceux qui sont vieux et défectueux, laissant échapper gaz et fumée nocifs pour l’homme et l’environnement dans lequel il vit. Au niveau des structures médicales, les difficultés de gestion des déchets infectieux se résument finalement à :

- l’absence d’équipement approprié de collecte, de transport et d’élimination des déchets infectieux,

1 OMS aide mémoire n°281, octobre 2004 2 cf. La recherche en santé au service du développement, à partir des études menées par le Projet Santé Abidjan de 1993 à 2000, Didier Gobbers et Philippe Eono, CEDA, Abidjan, 2001, Deuxième partie, F-9 « Etude de contrôle et d’adéquation aux besoins et aux normes des incinérateurs traditionnels de déchets médicaux dans les formations sanitaires d’Abidjan » (1999) Hygieco et E.R. Moutcho : p325. 3 Fall Ndiaye Dior « Les déchets biomédicaux », mémoire de DEA de droit de la santé 2004-2005.

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- le manque de ressources financières pour l’acquisition de petit matériel de stérilisation, de désinfection et de protection de personnel,

- le manque de personnel préposé uniquement à la gestion des déchets, - l’absence d’entreprises spécialisées et agrées pour l’enlèvement et l’élimination des

déchets, - le mélange des déchets ordinaires aux déchets infectieux solides et liquides, ce qui a

comme conséquence, l’augmentation des volumes des déchets infectieux à traiter, - le manque de motivation du personnel préposé à la gestion de ces types de déchets, - le manque d’information et de formation sur les risques liés aux déchets

biomédicaux1. Selon l'OMS, une gestion adéquate de ces déchets nécessiterait une politique d'hygiène appropriée, des moyens humains, matériels et financiers suffisants, du personnel formé et une réglementation adéquate pour pouvoir prévenir, si non réduire, tout risque pour les patients, les professionnels et l'environnement. Pourtant, les moyens mis en œuvre aujourd’hui tant en termes de capacités techniques de gestion des déchets, de mesures légales et institutionnelles de contrôle de la manière dont les déchets sont gérés restent encore insuffisantes par rapport aux besoins.

c) Aspects institutionnel et règlementaire :

Si l’on analyse la règlementation de plusieurs pays ouest africains, on se rend compte qu’il existe différents textes législatifs édictés dans le cadre de la gestion de l'environnement y compris des éléments importants relatifs à la gestion des déchets biomédicaux.

Mbaye Mbengue Faye évalue dans son rapport final (2003) la gestion des déchets biomédicaux en Mauritanie. En matière de GDBM, l'ordonnance n°84-208 du 10 septembre 1984 portant Code de l’Hygiène interdit de mélanger aux ordures ménagères les déchets anatomiques ou contagieux, les produits pharmaceutiques et tous autres produits toxiques. Les hôpitaux et les formations sanitaires publiques ou privées sont tenus de détruire par voie d'incinération les déchets anatomiques ou contagieux. En plus, les feux de combustion, les appareils incinérateurs ne doivent dégager ni poussière ni fumée gênante pouvant polluer l'atmosphère. L’auteure indique que ces dispositions relatives à l'assainissement du milieu sont très générales en matière d'assainissement des matières usées, solides et liquides: « la collecte et l'évacuation des matières usées solides est à la charge des autorités administratives ou des collectivités locales » ; « les mesures de propreté concernant les habitations et leurs alentours, les voies publiques (...) doivent être assurées régulièrement ». Elle signale que les dispositions relatives aux DBM sont abordées de façon sommaire, générale et incomplète et que leur application reste quasi impossible du fait de l'absence de décret d'application (p19). Ensuite Mbaye Mbengue Faye explicite le projet de Code de Santé Publique en cours de formulation qui comprend des dispositions en matière d'hygiène et d'assainissement, mais ces dernières, selon elle, ne sont pas spécifiques pour ce qui concerne la GDBM2. Elle dévoile que les circulaires administratives (13/MIPT relative à la

1 Cf. Le plan national d’action pour la gestion des déchets dangereux au Sénégal, Ministère de l’environnement et de la protection de la nature, novembre 1999 : expose la gestion des déchets dangereux comme un problème majeur à notre époque. Car si tout le monde est d’accord sur la nécessité d’adopter une production industrielle avec un minimum de déchets, la situation actuelle montre une production grandissante des déchets dangereux en milieu industriel comme au niveau des entreprises et des structures médicales. 2 Le chapitre I relatif aux règlements sanitaires stipule que « Dans chaque Wilaya, l'autorité administrative compétente est tenue de protéger l'hygiène publique et d'établir un règlement sanitaire applicable à l'ensemble de la Wilaya ». Ce règlement est établi sur la proposition des autorités locales et après avis du Conseil Supérieur d'Hygiène Publique (dont les conditions d'organisation et de fonctionnement seront fixées par décret). Le chapitre III portant sur le contrôle d'hygiène et la surveillance épidémiologique précise que « le

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salubrité de l'environnement et 04/MITP relative à l'assainissement des communes) évoquent la nécessité d'une saine gestion du cadre de vie, notamment en matière de nettoiement et de collecte des déchets, mais n'abordent pas la question des DBM (p19). Enfin, la loi n°200-045 du 26 juillet 2000, portant Code Cadre de l'Environnement, stipule (article 65) que « les déchets hospitaliers sont assimilés à des déchets industriels » et que « tout déchet industriel est présumé dangereux dès lors qu'il présente ou pourrait présenter une menace ou un danger quelconque pour la santé ou pour l'environnement (...) »1.

Il existe une règlementation internationale2 qui sera abordée plus tard. A coté de cette dernière, le Sénégal a adopté certaines dispositions nationales. Il s’agit respectivement du décret 74-368, portant Code Evacuation des ordures ménagères (article 8). Cet article est repris par la loi 83-71 du 5 juillet 1983, portant Code de l’hygiène publique aux articles 33, 34 en ces termes : « il est interdit de mélanger aux ordures ménagères des déchets anatomiques ou contagieux, des produits pharmaceutiques et tout autre produit toxique ainsi que les déchets issus d’abattoirs » (article33). Et l’article 34 de renchérir « les hôpitaux et les formations sanitaires publiques ou privées sont tenues de détruire par voie d’incinération les déchets anatomiques ou contagieux ». A cela, s’ajoute le code de l’environnement (loi n° 2001-01du 15 janvier 2001), à travers son titre II chapitre III (article 30 et suivants), qui a tenté de réglementer les déchets de toute nature comme l’attestent les dispositions de l’article 30 « les déchets doivent être éliminés ou recyclés de manière écologiquement rationnelle afin de réduire leurs effets nocifs sur la santé de l’homme, sur les ressources naturelles, la faune, ou la qualité de l’environnement. Les dispositions du présent article s’appliquent à toutes les catégories de déchets y compris les déchets biomédicaux ». En examinant de près cette législation, Ndiaye Dior Fall expose ses insuffisances, manquements et vides à combler. Il annonce dans un premier temps, qu’aucune des dispositions en présence n’a donné de définition des déchets biomédicaux. Cette absence de définition est une source potentielle de dérapage, selon lui, car elle ne permet pas de tracer les contours de cette notion et d’identifier de façon exhaustive les différentes structures de production. Ensuite, il montre que la réglementation a omis une phase fondamentale qui se trouve être la précision des étapes et méthodes de gestion des déchets biomédicaux : comment doit s’effectuer le tri ? Quels matériaux doit-on utiliser ? Par quels moyens peut se faire la collecte, le conditionnement, le transport des déchets et leur élimination ? Quelle est la durée nécessaire pour chaque étape de ce processus ? « Sur toutes ces interrogations le législateur sénégalais n’a pas encore apporté de réponses », commente t-il. Ndiaye Dior Fall voit que les textes responsabilisent les producteurs de déchets (article 34), sans que cette responsabilisation soit définie ou délimitée. Enfin, il remarque une inexistence de mesures, de sanctions et d’indemnisations des dommages et violations des règles de gestion. En plus de ces vides juridiques, il exprime d’autres lacunes contrôle administratif et technique des règles d'hygiène relève de la compétence de l'Etat qui en détermine les modalité et en assure l'organisation, le fonctionnement et les modes de délégation ». Le chapitre VI traitant des mesures d'assainissement de base stipule que « la collecte et l'élimination des matières usées solides est à la charge des autorités administratives ou des collectivités locales désignées par la réglementation en vigueur.. » et que « les déchets de toutes sortes doivent être immédiatement placés dans des récipients étanches munis d'un couvercle, qui doivent être vidés et nettoyés au moins une fois par jour... ». 1 Par ailleurs, la loi cadre précise que les activités susceptibles d'avoir des effets sensibles sur l'environnement sont soumises à une autorisation préalable du Ministère chargé de l'environnement, accordée sur la base d'une étude d'impact environnemental (EIE). La liste des travaux et activités soumis à l'EIE sera prise par décret. L'absence de décret d'application limite énormément la portée de cette loi cadre qui reste en définitive très générale, notamment en ce qui concerne la gestion des DBM (p20 du rapport final). 2 La Déclaration d’Alma Ata de 1978, la Convention de Bâle sur le « contrôle des mouvements transfrontières des déchets dangereux » en mars 1989, la Convention de Bamako sur « l’interdiction des déchets dangereux et le contrôle de leurs mouvements transfrontières en Afrique »

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d’ordre réglementaire : « la législation en ce domaine est disparate, affirme t-il. Nous avons des textes dispersés sans aucune articulation entre eux, et il y a aussi une ineffectivité de la réglementation dans la mesure où les textes sont méconnus et inappliqués, soit par défaut de publication ou de décret d’application (code de l’hygiène publique). Cette réglementation très lacunaire des déchets biomédicaux nous a entraîné dans une gestion irrationnelle voir anarchique » (p3).

Je termine cette énumération des lois avec la règlementation malienne, citée par Djibril Doucouré dans le plan national de gestion des déchets biomédicaux. La loi n°01 020 du 30 mai 2001 constitue le texte de base relatif aux pollutions et nuisances. Il encadre les procédures d'étude d'impact, l'accès de la population à l'information concernant l'environnement. Néanmoins, le chapitre V de cette loi consacré aux déchets traite de manière succincte les déchets biomédicaux. En effet en section 4 des « Déchets biomédicaux et industriels », l'article 17 pose un problème autorisant de fait, après traitement, le déversement des DBM dans les cours d'eau, canaux d'assainissement, etc. Si la mise en décharge doit s'effectuer après autorisation du Ministre chargé de l'Environnement, l'incinération en plein air est prohibée et toute incinération doit s'effectuer dans des établissements autorisés. Toujours dans le cadre du traitement, l'enfouissement est interdit. Aussi, le déversement des DBM et déchets industriels doit se faire uniquement en lieux réservés et dans les centres de stockage autorisés. Il faut signaler à ce niveau que la responsabilité des producteurs de DBM n'est pas spécifiée, les modes normalisés de transport, la manutention sécuritaire non plus. Djibril Doucouré souligne un silence porté sur les autres formes de traitement en rapport avec le type de déchet. Le décret n°03594/P-RM du 31 décembre 2003 relatif à l'étude d'impact environnemental en fixe les règles et procédures. Ainsi au Mali, tous les projets publics ou privés sont assujettis à l'étude d'impact dès lors que l'atteinte négative sur l'environnement est suspectée. Une liste de projets est annexée au décret et inclus les installations d'élimination des déchets par incinération, décharge ou enfouissement qui concernent donc les déchets biomédicaux. Ces trois exemples en matière de règlements montrent principalement : - l’interdiction de mélanger les ordures ménagères et déchets dangereux, alors que c’est une des pratiques les plus courantes, les déchets dangereux se retrouvent dans le même circuit. En définitive, cette loi est totalement occultée. - l’obligation de détruire les déchets toxiques et infectieux avec un incinérateur et sans causer de pollution, autrement dit de manière écologique, ce qui paraît totalement aberrant. D’une part car tous les déchets dangereux ne font pas forcément l’objet d’une incinération puisque certains sont décontaminés et réutilisés, ou alors enfouis, déposés dans des décharges sauvages. D’autre part, car incinérer de manière écologique semble difficile étant donné le niveau économique de ces pays. Comment imaginer un traitement des déchets qui ne produit pas de pollution alors même que dans les pays dit « développés » une élimination sans production de pollutions n’a pas encore été trouvée. - l’absence de décret d’application des lois, en effet des lois sans application, cela engendre une ignorance de ces lois car il n’existe aucune pénalisation. - l’absence de définition de la responsabilité, cet aspect sera étudié plus tard. - la généralité des lois concernant les déchets et plus particulièrement les déchets biomédicaux, comment est-il possible de définir des lois sans même donner une définition exacte de l’objet sur lequel elles agissent, ou encore à quoi peuvent bien servir des lois qui appliquent une même mesure à un ensemble hétérogène1 ? 1 Comme je l’ai expliqué dans ma première partie les déchets d’activités de soins dangereux diffèrent en plusieurs points des autres types de déchets.

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De fait, ces multiples règlementations sont ni efficaces, ni profitables à une gestion appropriée des déchets d’activités de soins dangereux. On remarque en définitive que les pratiques dans la réalité ne correspondent pas du tout aux règles d’hygiène et de sécurité.

2. Des solutions techniques qui engendrent de nouveaux « déchets » Les pratiques les plus nocives pour le milieu naturel concernent certaines méthodes de traitement et d'élimination des DBM tels que le rejet dans les dépotoirs d'ordures, l'enfouissement, le brûlage à l'air libre et l'incinération. - L'enfouissement «sauvage» dans un trou creusé dans le sol, dans l'enceinte des établissements sanitaires, constitue la pratique la plus répandue. Une telle pratique peut s'avérer nocive pour l'environnement dans la mesure où les trous ne sont pas protégés et que leur étanchéité n'est pas garantie. De fait, cela entraîne la contamination des nappes. En effet, l’enfouissement pose un risque potentiel de contamination de l’eau potable. - Le brûlage à l'air libre constitue une autre pratique courante dans les formations sanitaires. C'est de toute évidence la méthode la plus polluante pour l'air en raison des émanations de gaz et de particules contenant des substances hautement toxiques : la combustion des DBM par ce procédé peut entraîner des émissions riches en acide chlorhydrique, en azote et en oxyde de soufre, ainsi que des émissions de particules contenant des substances organochlorées, telles que les dioxines, les furannes, les chlorobenzènes et les chlorophénols, connus pour être hautement cancérigènes.

« L’incinérateur à ciel ouvert ou dans des fours non fermés ne permet pas d’obtenir une combustion complète et génère des substances hautement toxiques comme les dioxines et les furannes. (Les déchets traités produisent encore plus de pollution) » (HYGIECO et MOUTCHO, in GOBBERS et EONO, 2001 : 327).

- Le rejet des DBM dans les décharges publiques d'ordures ménagères apparaît comme une solution de facilité et de moindre effort. Le recours à cette méthode engendre le déplacement du risque d'infection d'un point à un autre et tend surtout à le démultiplier car le contact des DBM avec les autres déchets accroît la chaîne de contamination du milieu naturel, et donc de transmission de maladies. En outre, on constate l'absence de toute mesure de surveillance et de maîtrise des dangers à la fois pour le personnel (gestionnaires, récupérateurs) et le milieu naturel. - L'incinération constitue certes une pratique généralement recommandée pour son efficacité, mais elle n'en comporte pas moins des risques de pollution atmosphérique et des nuisances sur la santé des populations, lorsque les dispositions techniques appropriées ne sont pas adoptées. Par exemple, la sélection des déchets (tri à la source) devra être effectuée pour éviter la combustion d'éléments plastiques, de produits chimiques et de métaux lourds. En outre, l'emplacement de l'incinérateur, le dispositif de purification des fumées, la hauteur de la cheminée et les périodes de fonctionnement devront être sérieusement étudiés. L’incinération de matériaux contenant du chlore peut être à l’origine de dioxines et de furannes, substances potentiellement cancérogènes pour l’homme qui ont été associées à tout un éventail d’effets indésirables. L’incinération de métaux ou de matériels à forte teneur en métaux (en particulier de plomb, de mercure et de cadmium) peut conduire au rejet de métaux dans l’environnement. Les dioxines, les furannes et les métaux sont persistants et s’accumulent dans l’environnement. Les matériaux contenant du chlore ou des métaux ne doivent donc pas être incinérés1. Une exposition de faible intensité et durable aux dioxines

1 OMS aide mémoire n°253, octobre 2000.

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et aux furannes peut entraîner chez l’homme une atteinte du système immunitaire et des anomalies de développement du système nerveux, du système endocrinien et des fonctions reproductrices. Une exposition de forte intensité et de courte durée peut donner lieu à des lésions cutanées et une atteinte de la fonction hépatique1. En effet, Ndiaye Dior Fall affirme qu’ « une telle pollution passe par le canal du vent et des fumées à cause de certaines pratiques comme l’entreposage, l’incinération et le brûlage. La poussière provenant des tas de déchets biomédicaux, la fumée dégagée par les incinérateurs et le système de brûlage, contiennent des substances de gaz et couches toxiques, des particules riches en acide chlorhydriques, en azote et en oxyde de souffre et autres vecteurs de maladies par inhalation ». - Pour ce qui concerne les déchets liquides, le déversement des effluents hospitaliers sans traitement particulier présente un risque énorme pour la santé publique et pour le milieu naturel. Même si la plupart des formations sanitaires disposent de fosses septiques pour le rejet des eaux usées, ces dernières ne font l'objet d'aucun traitement spécifique avant rejet. Pourtant, une simple désinfection chimique pourrait réduire de façon très sensible les éléments pathogènes. A la pollution des eaux, s’ajoute la destruction de la nappe d’eau phréatique car la pluie fait descendre des agents pathogènes au niveau des eaux souterraines les rendant du coup impropre à toute consommation sans un traitement préalable. Ndiaye Dior Fall souligne qu’ « à Dakar, l’étude faite sur la décharge de Mbeubeuss 2 a révélé « une forte pollution de la nappe aquifère 3 par les nitrates ». De même, les cours d’eaux par le déversement et le système des canalisations servent de dépositoires à des déchets solides et liquides (sang, déchets toxiques), prétraités ou pas ».

En résumé, les impacts sur l'environnement biophysique sont d'ordre divers et concernent : la pollution esthétique, la pollution de l'air et les incommodités provoquées par les brûlages à l'air libre des déchets ainsi que par les fumées des incinérateurs, la contribution à la pollution des eaux de surface et des eaux souterraines par les eaux de lixiviation des décharges. Mais également, les infections respiratoires nosocomiales qui guettent toutes les fréquentations de la chaîne hospitalière à cause de l’exposition dans des couloirs fréquentés des poubelles de déchets infectieux et des habitudes culturelles et sociales des acteurs. Ndiaye Dior Fall indique que « le cancer serait une conséquence des moyens d’éliminations à l’instar du brûlage des incinérations par l’effet des gaz cancérogènes dégagés. D’ailleurs des études faites ont établi un lien entre le taux élevé de cancer et le fait de vivre à proximité d’un incinérateur surtout chez les enfants car la période de latence est longue ». L’auteur démontre alors ces dernières années le rebondissement de certaines maladies comme la tuberculose, la fièvre jaune, le choléra, qui pourtant avaient tendance à disparaître du paysage africain.

Cependant, « bien que l’incinérateur des déchets soit un procédé remis en question au profit de techniques plus écologiques et plus performantes, le traitement des déchets hospitaliers dont le recyclage est impossible doit encore faire appel à cette technique » (HYGIECO et MOUTCHO, in GOBBERS et EONO, 2001 : 325).

« Dans la plupart des cultures, l’évacuation des déchets liés aux soins de santé est un sujet sensible qui présente également des dimensions éthiques » (OMS n°253 octobre 2000).

1 OMS, aide-mémoire n°281, octobre 2004 2 C’est une localité de Dakar qui reçoit des déchets de toute nature. 3 Diop Abdou « La gestion des déchets biomédicaux au Sénégal : les exemples de l’hôpital Le Dantec et l’hôpital Fann », thèse de doctorat d’Etat en médecine.

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3. La santé publique et la sécurité comme enjeu de pouvoir « La gestion des déchets obéit à une logique simple : prévenir les nuisances que leur accumulation provoque à court et à long terme, notamment en matière de santé publique, et préserver la qualité des ressources naturelles telles que l’air, l’eau, les sols, etc » (LEVEQUE et SCIAMA, 2008 : 138).

Les déchets, en prenant en compte la menace qui pèse sur l’homme, ont un lien direct avec la santé publique. En ce qui concerne les déchets médicaux dangereux ce lien est encore plus évident du fait d’une diffusion de maladies. Comme l’affirme Christian Desachy, « un déchet d’activité de soins est à risque infectieux s’il est contaminé par un agent biologique qui peut provoquer une maladie grave chez l’homme et peut présenter un risque de propagation dans la collectivité » (2001 : 46). Il s’avère que les déchets médicaux dangereux représentent un danger réel pour les individus. Une large part de la population peut être exposée aux dangers représentés par exemple, par la filière recyclage-récupération des déchets au sens large. Les bidons en plastique et autres contenants contaminés ou ayant été en contact avec des DBM sont susceptibles d’être récupérés et réutilisés via la filière des recycleurs-récupérateurs dans les dépotoirs pour être remis en service et contenir éventuellement, par la suite, de l’eau potable ou autre produit de consommation présentant un danger indirect pour la santé humaine1. Saadia Radi sonne l’alarme : « Il faut que l’on réalise le danger que représentent ces déchets médicaux pour la santé publique. (…) Il y a quelques semaines, on a confisqué de grandes quantités de seringues utilisées qui avaient été emballées comme des neuves et étaient destinées à être vendues dans les pharmacies »2. Cet exemple soulève le problème de ces déchets quant à la santé publique et la place que pourraient occuper les politiques publiques. Ainsi, la santé fait son entrée dans le domaine politique. Le Sénégal, par exemple a manifesté très tôt une certaine volonté de lutter contre ce fléau en s’engageant à travers la constitution à « assurer à tout citoyen un droit à la santé et à un environnement sain »3. Cette préoccupation s’est traduite par la participation, la reconnaissance et la ratification de certaines déclarations, conférences et conventions internationales, renchéri Ndiaye Dior Fall. Ce risque pour la population qui touche « la collectivité » dévoile deux points essentiels à aborder : la santé publique et la sécurité publique. L’hygiène, constitue la passerelle entre ces deux notions.

« En Afrique, c’est par la médecine coloniale que le discours hygiéniste fait son entrée. Il est relayé aujourd’hui, par les services d’éducation sanitaire qui ont leurs propres codes de propreté. L’hygiène est donc liée à une idéologie de l’ordre où le sanitaire (domestique et public) est une préoccupation des politiques de l’Etat » (JAFFRE, 2003).

1 Par exemple, en côte d’ivoire en 2003 (le même scénario peut s’appliquer aujourd’hui au Bénin), des vendeurs d’ananas frais parcouraient la ville avec des fruits et des contenants en plastique ou en verre (très probablement des contenants provenant d’une filière de récupération, c’est-à-dire provenant d’un dépotoir ou d’une poubelle et sommairement rincé à l’eau) ; ensuite, les consommateurs choisissaient les fruits que le vendeur pressait sur place avec ses mains pour en extraire le jus et le vider dans ces contenants d’origine « douteuse »…raison pour laquelle il était fortement recommandé d’apporter sa propre bouteille. (plan national Bénin). 2 Saadia Radi, « L’hépatite C et les défaillances du système égyptien de santé public », Égypte/Monde arabe, Troisième série, 4 | 2007, [En ligne], mis en ligne le 31 décembre 2008. URL : http://ema.revues.org/index1766.html. Consulté le 10 mars 2009. 3 Voir l’article 8 de la Constitution sénégalaise de 2001, adoptée par référendum.

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Qu’appelle-t-on la santé publique ? Celle-ci désigne à la fois l’état sanitaire d’une population apprécié via des indicateurs de santé (quantitatifs et qualitatifs, dont l’accès aux soins), et l’ensemble des moyens collectifs susceptibles de soigner, promouvoir la santé et d’améliorer les conditions de vie.

Alphonse d’Houtaud, dans son ouvrage l’image sociale de la santé, recherches sociologiques (2003), explicite : « Le grand Robert (2ème édition P194 [1989]) définit la santé publique comme « l’ensemble des connaissances et des techniques propres à prévenir les maladies, à préserver la santé, à améliorer la vitalité et la longévité des individus par une action collective ». Le même dictionnaire ajoute que « la technique sanitaire1 comprend l’épidémiologie, l’étude de la salubrité des denrées alimentaires, de la pollution atmosphérique, des problèmes de construction, de voirie, de distribution des eaux » (à l’article sanitaire) » (2003 : 193). La santé publique ne peut exister que par l’acquisition d’une certaine sécurité, nommée en terme sanitaire : la prévention. Selon l’OMS, celle-ci comprend « tous les actes destinés à diminuer l’incidence d’une maladie dans une population, donc à réduire le risque d’apparition de cas nouveaux. Elle fait appel à des mesures de prévention individuelle (hygiène corporelle, alimentation, activité physique et sportive, vaccinations) et collective (distribution d’eau potable, élimination des déchets, salubrité de l’alimentation, vaccinations, hygiène de l’habitat et du milieu de travail). Cette conception traditionnelle de la prévention débouche inévitablement sur un programme très vaste d’amélioration de la qualité de vie et de réforme des institutions sociales » (HOUTAUD, 2003 : 1952). La santé peut se définir en fonction des pratiques d’hygiène collective et personnelle qu’il faut privilégier afin de garantir un minimum de sécurité publique. L’hygiène est un facteur déterminant de la santé. Les comportements individuels et collectifs sont de toute première importance dans la lutte contre les épidémies ou les pandémies, existantes dans les pays pauvres.

Jean-Pierre Dozon et Didier Fassin dans Critique de la santé publique, une approche anthropologique (2001) citent la définition de William Dab3 : « la santé publique est d’abord et avant tout affaire d’éthique et de valeurs. C’est l’affirmation que quelque part dans la société doit exister une préoccupation de préservation de la santé de la population. La santé qu’elle soit définie comme un état, un capital, un bien ou une norme, est d’abord une valeur, qu’il faut défendre contre d’autres valeurs, notamment des valeurs économiques telles que la productivité et la compétitivité ». La politique est l’affaire de la citée, la polis. Dozon et Fassin définissent le concept de cité salubre comme un « univers abstrait dans lequel le principe commun de la santé publique serait sinon réalisé de manière définitive, du moins défendu en permanence ». Il est bien du ressort de la politique de gérer la « santé publique » de sa citée.

« (…) la santé publique se caractérise par la croyance, obligatoirement partagée parmi ceux qui s’en réclament, en une valeur commune : la santé comme bien public. La définition peut sembler triviale, mais elle permet de comprendre que, parmi toutes les valeurs culturelles dont une société est porteuse, la santé soit par principe mise en avant, et que, parmi les manières concurrentes de l’envisager, elle tranche systématiquement en faveur de l’intérêt collectif » (DOZON et FASSIN, 2001 : 53).

La santé est présentée comme une valeur fondamentale pour tout vivant. Alphonse d’Houtaud montre en quoi la santé est si essentielle : « assurément la santé ne doit pour

1 Est ce que le ramassage des déchets ne pourrait pas être considéré comme une technique sanitaire ? 2 Pour plus de renseignements se reporter à la p14 de l’ouvrage Santé publique et santé de la communauté. 3 William Dab, La Décision en santé publique. Surveillance épidémiologique, urgences et crises, Paris, Editions de l’Ecole nationale de santé publique, 1993.

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autant être érigée comme la valeur la plus éminente, puisque d’autres valeurs sont de nature à la transcender aux yeux de nombreuses catégories d’humains et au sein de multiples contrées de notre terre. Mais elle a un titre à demeurer la valeur la plus fondamentale car, sans elle, toutes les autres valeurs cessent de valoir, du moins au sens où ni les personnes, ni les communautés ne sauraient en profiter. En revanche, par elle, toutes prennent valeur aux yeux de chacun et de tous. La santé maintenue, c’est la vie qui continue à durer, voire à se développer. La santé perdue, c’est déjà un début de mort qui envahit le champ de la conscience individuelle ou collective et qui compromet l’existence de façon plus ou moins larvée ou radicale » (2003 : 190). La caractéristique primordiale de la santé est son aspect collectif, tous les individus sont concernés. La santé publique s’obtient par le respect des règles d’hygiène mentionnées plus haut. Au chapitre 3, « Au cœur de la cité salubre, la santé publique entre les mots et les choses », Didier Fassin développe : « l’hygiène publique, qui est l’art de conserver la santé aux hommes réunis en société, est appelée à recevoir un grand développement et à fournir de nombreuses applications au perfectionnement de nos institutions. (…) Les fautes et les crimes sont les maladies de la société qu’il faut travailler à guérir ou, tout au moins, à diminuer ; et jamais les moyens de curation ne seront plus puissants que quand ils puiseront leur mode d’action dans les révélations de l’homme physique et intellectuel, et que la philosophie et l’hygiène prêteront leurs lumières à la science du gouvernement »1. La santé et la politique sont très fortement liées. De fait, les politiques2 portent un intérêt particulier à la santé.

Ceci n’est pas nouveau, toutefois cet intérêt prend un aspect différent dans l’actualité de l’Afrique de l’Ouest. Actuellement, le développement de la démocratie et le développement durable s’appuient sur la santé publique. Pour Didier Fassin3, « tout autant que le contenu effectif des propositions qui en ressortent [conseils de quartiers], on peut y voir le signe de la caution qu’elle représente, la manifestation de l’intérêt des pouvoirs publics pour des problèmes et des valeurs qui touchent de près à la vie ou à la sensibilité des habitants » (2000 : 186). Fonder des programmes sur le développement, traiter du ramassage des ordures, de la gestion des déchets dangereux, c’est montrer à la population que les pouvoirs publics, plus globalement les politiques, manifestent leur intérêt et s’inquiètent des problèmes des populations, telle que la gêne occasionnée par les ordures ou encore de leur soucis de santé. C’est en quelque sorte une stratégie politique. La santé comme le développement durable rehausse l’image de l’Etat. Pour Didier Fassin, la santé publique est un « pouvoir symbolique par lequel on affirme sa suprématie au niveau d’un ensemble de quartiers (…), mais qui s’exerce sur un domaine positivement investi (la santé privilégiée à la fois par la place qu’elle occupe dans le système de valeurs de la population et par la forte demande sociale dont elle est l’objet) » (2000 : 220). La santé apparaît donc comme un enjeu de pouvoir. Dans le document intitulé « Stratégie nationale de gestion des déchets biomédicaux au Burkina Faso » (2005), les principes directeurs qui guident cette stratégie articulent la santé, l’hygiène et la sécurité et valorisent le rôle politique : - Principe de « précaution ». C’est un principe clé qui régit la protection et la sécurité sanitaire. Quand l’ampleur d’un risque particulier est incertaine, il sera retenu que le risque

1 « Prospectus » de la première livraison des Annales d’hygiène publique et de médecine légale, en 1829. Selon Didier Fassin, c’est toujours le même discours dans les chartres de santé publique : agir au nom du « bien-être physique, mental et social » p48. 2 J’utilise l’expression, les politiques, que j’emploie dans le sens des mesures mises en place par les gouvernements ainsi que des hommes politiques en général. 3 Les enjeux politiques de la santé. Etudes sénégalaises, équatoriennes et françaises. Didier Fassin, Karthala, Paris, 2000, collection « hommes et sociétés ».

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est particulièrement significatif, et que des mesures appropriées devront être prises pour assurer la protection et la sécurité sanitaire. - Principe du « devoir de soin et d’attention ». Il stipule que toute personne manipulant ou gérant des substances dangereuses ou des équipements y relatifs, est responsable, au plan de l’éthique, pour prendre le maximum de soins et d’attention dans ces tâches. - Développement durable. En assurant que les interventions peuvent être gérées avec des ressources disponibles, en encourageant la conservation des ressources, satisfaisant aussi les besoins des générations actuelles sans compromettre les besoins en ressources des générations futures. - Approche de Santé Publique. En assurant la protection de la population dans l’enceinte des formations sanitaires, contre les blessures et maladies qui suivent l’exposition aux DBM ; en assurant que tous les DBM qui quittent l’enceinte des formations sanitaires présentent un minimum de risques potentiels pour les travailleurs externes et la population et en conservant l’environnement par la prévention de la pollution de l’eau, du sol et de l’air. - Promotion des droits humains. A travers la protection des agents de santé et de la communauté contre une gestion à risques des DBM et l’atténuation de leurs effets. - Equité et justice. Par le biais d’une promotion et d’un renforcement des compétences du personnel subalterne (agents d’entretien ; collecteurs de déchets, etc.) dans les services de soins de santé ; répartition égale du matériel de gestion des DBM à toutes les localités du pays ; protection de tous les employés contre les blessures et les maladies liées à l’exposition aux DBM.

Alors cette passion politique pour la santé publique s’explique par ce pouvoir symbolique mais aussi par un pouvoir matériel qui se manifeste par le contrôle de sommes importantes. Effectivement les pays de l’Afrique de l’Ouest se trouvent dans une situation financière difficile. Au niveau sanitaire notamment avec la diminution du budget relatif à la santé et l’accroissement du nombre de structures de santé. Tout cela revient à augmenter par conséquent le nombre de déchets médicaux dangereux et finalement engendrer des maladies, etc. C’est un cercle vicieux, où le facteur économique tient une place importante.

4. Conséquences socio-économiques Les déchets d’activités de soins dangereux, au même titre que les déchets de types ménagers ou autres, connaissent une production sans cesse croissante dans tous les pays, notamment les pays africains et leurs dangers augmentent proportionnellement à la quantité produite. Une gestion convenable et conforme de ce type de déchets, en vue d’une élimination qui minimise les risques pour la santé et l’environnement, représente un coût élevé, ce qui accentue les problèmes dans les pays en voie de développement. Ces déchets dangereux entraînent un impact économique sur leur société. Car en plus des impacts directs sur la santé et l’environnement, les DASRI ont également des impacts indirects, non négligeables, sur l’économie du pays. Il faut alors compter les coûts additionnels des hospitalisations, les pertes de temps de travail, les charges de revenus familiaux, les coûts de gestion des déchets dangereux sur les budgets et chiffres d’affaires des structures. En effet, lorsque la santé de la population est affectée par les DBM, le taux d’absentéisme augmente et l’efficacité au travail diminue. De plus, lorsqu’un traitement médical est nécessaire, cela occasionne des dépenses individuelles ou publiques. La dégradation du cadre de vie avec la contamination de certains milieux (plages, eaux de baignade, etc.), la perte d’esthétique (avec l’accumulation des déchets en décharge sauvage ou l’encombrement des rues par les contenants et les déchets de récupération) a un coût pour la société. Cela peut affecter le tourisme et ternir l’image du pays. Effectivement, Pascal Billau explique que « la mauvaise gestion des DBM occasionne également des pertes au niveau de l’économie touristique, en

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dévalorisant l’environnement visuel et olfactif (décharge ou incinérateur) ou en occasionnant une perte de confiance des touristes lorsque de mauvaises conditions d’hygiène prévalent et lorsque le taux d’incidence des maladies associées augmente 1» (2008). La pauvreté, l’environnement et la santé sont étroitement liés. Néanmoins des règles, des lois ont été édictées au sujet d’une bonne gestion des déchets dangereux qui prévient les risques et met en avant l’hygiène et la sécurité pour les individus. Toutefois les travaux de l’ouvrage les maladies de passage révèlent, en fait, que cette idéologie représentée par les choix sanitaires des Etats et par celle des organismes internationaux n’a pas les moyens de ses recommandations et comporte des difficultés à adapter son discours non seulement aux conceptions populaires de la maladie mais aussi aux réalités socio-économiques des familles. « On sait que les progrès en termes d’habitat et d’urbanisme, dans l’Europe du XIXème siècle, ont davantage contribué à une meilleure hygiène que les recommandations quelquefois autoritaires des médecins hygiénistes en matière de comportements individuels et collectifs. (…) Il est parfois curieux que ces évidences n’apparaissent pas comme telles en Afrique : à quoi sert de demander aux mères d’apprendre à leurs enfants à se laver les mains au savon avant chaque repas, lorsqu’elles doivent parcourir cinq kilomètres pour atteindre le point d’eau le plus proche ? Quel sens doit-on donner à l’éducation sanitaire lorsqu’il s’agit d’éduquer sans changer les conditions de vie ? » Il est aberrant d’assurer que la Santé Publique a pour principale vocation de mettre en relation les conditions de vie et les facteurs de cause de maladies pour instaurer des mesures de prévention, alors qu’en Afrique, elle n’intervient que sur les changements de comportements, faute de pouvoir modifier les conditions de vie. Cela paraît tout à fait incohérent, puisque les comportements sont tributaires des conditions de vie. « Cette lapalissade sociologique semble pourtant n’être pas perçue en ces termes par nombre d’éducateurs sanitaires qui attribuent l’échec de certains projets de développements aux mentalités « traditionnelles » réfractaires au changement social » remarque l’auteur. Celui-ci conclut : « l’hypothèse selon laquelle les populations, en particulier rurales, n’ont point de notions d’hygiène pose donc mal le problème. C’est encore une façon d’attribuer aux individus une responsabilité qui incombe à l’Etat. C’est à l’Etat d’instaurer des mesures d’hygiène ; et le couple propreté/santé doit s’associer à des conditions de vie décentes. Le problème n’est pas uniquement cognitif ou culturel mais aussi économique et politique (gestion de l’environnement, mise en place de latrines, créations de points d’eau, etc.) ». Certainement, le manque de moyens ne doit pas servir d’excuse pour l’inaction et la non prise en charge de ces déchets dangereux. Cette situation économique n’est pas un frein au développement dans certain cas, puisque la population consacre une partie de ses ressources à la santé. Marc Eric Gruénais soutient que : « faire participer la population à la gestion et au financement des structures de soins publiques désormais dotées de la plus grande autonomie possible, tel est, en résumé, le credo des agences de coopération multi et bilatérales qui sont engagées dans le développement sanitaire »2(1996 : 108). Il existe de nombreux exemples où la société civile3 s’organise afin de gérer les déchets urbains et

1 Comme c’est le cas actuellement, le tourisme au Mexique subit les conséquences dû à une épidémie de grippe porcine (avril-mai 2009). Lorsque un pays est contaminé (épidémies) ou pollué (déchets) le tourisme tend à diminuer en toute logique. 2 « A qui sert l’hôpital africain ? L’offre des soins à Mman Bwale (Brazaville) », 1996, Marc Eric Gruénais, Les annales de la Recherche Urbaine, n°73, 118-128. 3 L’expression société civile est très controversée voici une définition recevable de Weigle et Butterfield (1992 : 1) : organisation autonome de la société, dont les composantes s’engagent volontairement dans des activités publiques afin de poursuivre des intérêts individuels, collectifs ou nationaux dans le contexte de relations légalement définies entre l’Etat et la société… in La gestion des déchets urbains, des solutions pour l’Afrique,

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ménagers alors pourquoi pas les déchets médicaux dangereux ? La situation sanitaire relative aux déchets biomédicaux pourrait progresser positivement avec une meilleure prise de conscience des intervenants locaux et une responsabilisation des politiques et des différents acteurs.

B. Responsabiliser et conscientiser le problème de gestion des déchets

1. Qui est responsable ?

Une déresponsabilisation plane sur la question de la gestion des déchets dangereux. Aussi, la bonne gestion des déchets dans l'établissement de soins doit-elle devenir une préoccupation à part entière. Sans transformer l'établissement en spécialiste du déchet, il s'agit de prendre conscience que la résolution des problèmes de l'élimination des déchets solides hospitaliers nécessite un effort particulier au départ qui entraînera de nouveaux comportements réflexes : penser à la gestion des déchets à risques. La responsabilité doit-elle être imputée aux personnels des structures médicales qui jettent ces déchets n’importe où, aux personnels de nettoiement qui ne trient pas les déchets correctement, aux populations qui fouillent dans les décharges, aux pouvoirs publiques qui n’appliquent aucune règle ou bien aux gouvernements qui n’investissent pas dans des équipements nécessaires à la gestion des déchets, etc. ?

Il semble que la gestion des déchets dangereux ne soit pas prise en charge dans sa globalité. Il existe bien évidemment une volonté de sécurité et de promotion de santé publique, toutefois aucun dispositif n’est réellement mis en place. La responsabilité de la gestion des déchets repose souvent sur un seul acteur du système. La loi française du 15 juillet 1975 (n° 75-633), relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux fixe la responsabilité du producteur de déchet (autres que les ordures ménagères), « toute personne qui produit ou détient des déchets de nature à porter atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement, est tenue d'en assurer ou d'en faire assurer l'élimination ». L'hôpital est donc responsable de l'élimination des déchets qu'il produit. L’OMS s’accorde à dire que la répartition bien claire des responsabilités concernant la manutention et l’élimination appropriées des déchets est une question essentielle. Et ajoute qu’ « en vertu du principe du «pollueur payeur», cette responsabilité incombe aux producteurs des déchets, c’est-à-dire, généralement aux dispensateurs des soins de santé ou à l’établissement s’occupant des activités connexes » (n°253, 2000). Est-il possible de basée une gestion des déchets sur le principe du « pollueur payeur » qui axe la responsabilité sur les structures médicales, qui ont déjà un budget assez restreint en Afrique de l’Ouest ? Alors comment imaginer que des hôpitaux, des centres de santé, qui n’ont pas assez d’argent pour investir dans les équipements, les formations des personnels, etc. puissent dépenser une part de leur économie pour la gestion des déchets ? Est-ce aux hôpitaux de prendre seuls en charge cette responsabilité ? Les plans nationaux de gestion esquissent une solution : la division des tâches. La collecte, le tri, le stockage, l’évacuation (le transport), l’élimination constituent des opérations différentes qui doivent être prises en compte par plusieurs personnes qui auront chacun un rôle bien défini1. Ainsi chaque acteur du système de gestion 2001, Adepoju G. Onibokun (dir), p104. ( cf : ouvrage de Weigle : “civil society in reforming communist regimes : the logic of emergence”, Comparative Politics, vol.23, n°4, pp.1-23) 1 Il est possible ici de faire un parallèle avec la pensée de Durkheim. Selon lui la division du travail permet une forte cohésion sociale. Chaque individu contribue par son apport qui lui est propre et qui contribue au bien être de tous. Il ajoute que c’est en se différenciant que les individus échappent à la compétition et deviennent au final complémentaires. Cf De la division du travail social, Emile Durkheim, Paris, PUF, collection Quadrige, 2004.

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des déchets dangereux possèdera une activité précise dans ce processus. De nouveaux acteurs s’engagent : les secteurs publics aussi bien que privés.

2. Dans l’arène : les acteurs de la prise en charge des déchets

« On observe un transfert constant de responsabilités entre les organismes et les différents niveaux d’administration, de même qu’entre ceux-ci et le secteur privé » (ONIBOKUN (dir.), 2001 : 218).

Globalement dans chaque pays étudiés, selon les plans nationaux de gestion, les acteurs impliqués dans la gestion des déchets médicaux dangereux se constituent en plusieurs catégories, dont les rôles et les modes d’implication ont des impacts qui peuvent influencer de façon différenciée sur l’efficacité de la gestion au plan environnemental et sanitaire.

a) Le gouvernement

� Le Ministère de la Santé - Le Ministère de la Santé et de l'Action Sociale (MSAS)1 de Mauritanie. Le MSAS a la responsabilité de l'élaboration et de la mise en œuvre de la politique sanitaire. Ce département, dont relève la GDBM, définit la politique sanitaire et exerce une tutelle sur les établissements de soins qui constituent les principales sources de production de DBM. Toutefois, dans le domaine des DBM, la capacité d'intervention du MSAS est relativement limitée en raison de l'insuffisance des moyens matériels et financiers requis pour mener et exécuter cette mission. Les efforts du MSAS en termes d'équipement de gestion et de traitement des DBM tels que les poubelles de collecte appropriées, les systèmes de traitement, les équipements de protection, la construction d'incinérateurs restent relativement faibles et insuffisants eu égard à l'ampleur des besoins. - Le Ministère de la Santé du Mali, comme celui de la Guinée doit être le fer de lance de la politique nationale s'agissant des aspects de santé publique. - Le Ministère de la Santé du Burkina Faso a la responsabilité de l’élaboration et de la mise en œuvre de la politique sanitaire. Dans le domaine des infrastructures, il n’existe pas de programme spécifique qui soit orienté sur la gestion des DBM, mais plutôt des interventions ponctuelles inscrites dans certains programmes de santé ou alors réalisées par divers partenaires (ONG, bailleurs de fonds, etc.). Les interventions les plus significatives portent sur la construction d’incinérateurs artisanaux dans certains centres de soins. En matière de contrôle et du suivi de la mise en œuvre des politiques et autres directives et recommandations en matière de santé, le MS dispose d’une Inspection Générale des Services de Santé (IGSS) qui assure, entre autres, le contrôle du fonctionnement des formations sanitaires, y compris les aspects liés à l’hygiène et l’assainissement de l’environnement. Son niveau de rattachement hiérarchique (dépend du Cabinet du MS) lui permet de faire des recommandations directement à l’autorité sanitaire, mais ses moyens très limités en termes de déplacements réduisent son efficacité.

1 A noter les différents postes au sein de ce ministère, la Direction de Protection Sanitaire (DPS), la Direction de la Médecine Hospitalière (DMH), la Direction de la Planification, de la Coopération et des Statistiques, la Direction des Affaires Administratives et Financières, la Direction des Ressources Humaines, la Direction de la Gestion des Investissements sont concernées au premier plan. Au niveau décentralisé (Wilaya et Moughataa), les structures de références dans le domaine de la santé sont les Directions Régionales à la Promotion Sanitaire. En matière d'hygiène hospitalière et de gestion des DBM, le MSAS dispose, au niveau national, de ressources humaines compétentes, notamment à travers le CNH et la DPS.

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� Le Ministère de l’Environnement : - Le Ministère du Développement Rural et de l'Environnement (MDRE) en Mauritanie Le MDRE est responsable de l'élaboration et la mise en œuvre de la politique environnementale. Sa mission consiste à assurer le contrôle et le suivi de la gestion environnementale. Il a également défini des procédures de réalisations d'études d'impact sur l'environnement pour tout projet susceptible d'avoir des effets négatifs sur l'environnement, mais ces directives ne sont pas encore adoptées officiellement, même si elles ont été validées lors d'un atelier national. Peu de références sont faites aux DBM et à leur gestion. Le MDRE a élaboré un document de stratégie nationale ainsi que la Loi cadre de l'Environnement. Il n'existe cependant aucune directive environnementale fixant les normes de rejets de polluants dans l'air, l'eau et le sol. - Le Ministère de l'Environnement au Mali qui, en collaboration avec le Ministère de la Santé, doit définir toute la législation et la réglementation concernant l'environnement et la santé. - Le Ministère de l’Environnement et du Cadre de Vie (MECV). Le MECV est chargé du suivi de la mise en œuvre effective de la législation en matière d’environnement qui établit les principes fondamentaux de la préservation de celui-ci. Mais il faut constater que les préoccupations portent pour l’essentiel sur l’environnement biophysique et socio-économique et très peu de références sont faites aux DBM et à leur gestion.

� Le Ministère du transport : - Le Ministère chargé du transport au Mali en ce qui concerne le transport des matières dangereuses.

b) Les communes

- Les Communes en Mauritanie ont la responsabilité d'assurer la gestion des déchets solides ménagers et la salubrité publique. Au plan réglementaire, ces collectivités locales ne doivent pas prendre en charge la gestion des DBM qui ne sont pas des ordures ménagères. Dans la pratique, le rejet des DBM dans les bacs et les décharges publiques ou sauvages qui relèvent de la responsabilité des collectivités locales oblige ces dernières à prendre une part active dans la GDBM, comme c'est le cas à Nouakchott où l'enlèvement des bacs à ordures dans certaines formations sanitaires est assuré par la Commune (par le biais d'un service privé de collecte). Cela pose d'autant plus de problèmes que ces institutions décentralisées ne disposent pas des ressources financières requises ni d'un personnel compétent pour assurer correctement la salubrité de leur localité. Toutefois, les communes ne disposent pas de décharges publiques contrôlées, mais plutôt des décharges sauvages. La Commune de Nouakchott envisage, avec l'appui du PDU, de réaliser très prochainement un Centre d’Enfouissement Technique qui pourrait comprendre une zone spécialement réservée pour la réception des déchets biomédicaux. - En Guinée, les municipalités et surtout les PME sont actuellement au cœur du système de transport et de l'élimination des déchets biomédicaux. - Au Burkina Faso, elles ont la responsabilité d’assurer la gestion des déchets solides ménagers et la salubrité publique. Au plan réglementaire, ces collectivités locales ne doivent pas prendre en charge la gestion des déchets sanitaires qui ne sont pas des ordures ménagères. Dans la plupart des hôpitaux, les déchets assimilables aux ordures ménagères sont collectés dans des containers municipaux et évacués à la décharge municipale. Mais la majorité des villes ne dispose pas de décharge publique. La Commune de Ouagadougou a fini de réaliser un centre d’enfouissement technique des déchets solides urbains qui prévoit une zone spéciale pour la réception des DBM dans le cadre d’un système payant.

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c) Les structures médicales

- En Mauritanie mais aussi dans les autres pays, les formations sanitaires constituent les principales sources de production de DBM. Dans ces structures, le constat majeur est que le personnel soignant s'investit très faiblement dans la gestion quotidienne des DBM, alors qu'il devrait jouer un rôle central dans le fonctionnement du système de gestion durable des déchets. En réalité, la gestion rationnelle des déchets et l'amélioration des systèmes de gestion actuels sont perçues comme une priorité de second ordre par les équipes de soins. De surcroît, même si des directives sont généralement données, la plupart des formations sanitaires (notamment dans les Wilaya et Moughataa), ne disposent pas de guides ou de référentiels techniques permettant au personnel de gérer rationnellement les déchets ou d'adopter les comportements prescrits. Enfin, le fait qu'il n'existe pas de provision dans le budget pour prendre en charge les activités de gestion des DBM tend à limiter considérablement les initiatives visant à assurer une gestion correcte des DBM. La gestion des DBM peut s'apprécier à trois niveaux. Dans les formations hospitalières : pas de tri systématique à la source, DBM assimilés aux ordures ménagères ; beaucoup d’objets tranchants ; le personnel n'est pas protégé. Au niveau des centres de santé : peu de DBM produits, mais déchets tranchants importants ; importantes activités de récupération surtout par les enfants. Dans les cabinets privés : il existe en général un bon conditionnement des DBM, mais pas de tri sélectif ; un personnel peu averti des risques liés aux DBM. - Au Mali, les structures de santé tant publiques que privées sont les principaux producteurs et leurs agents sont impliqués dans la gestion interne.

d) Le secteur privé de collecte des déchets

- En Mauritanie, il n'existe pas d'entreprises privées spécialisées dans la collecte exclusive des DBM, même si certains opérateurs effectuent des prestations d'entretien et de nettoiement dans les formations sanitaires. La collecte des déchets solides à Nouakchott est assurée principalement par trois grandes sociétés de collecte. Ces opérateurs offrent des services d'entretien et de collecte des ordures ménagères au niveau des ménages, des institutions et des hôtels, sur la base d'une contractualisation. Bien que certains d'entre eux fournissent des services de collecte au niveau des centres de santé publics et privés, dans les dispositions de leurs contrats, les prestations ne concernent pas les DBM, mais uniquement le nettoiement et l'enlèvement des déchets assimilables aux ordures ménagères. - Au Burkina Faso, il n’existe pas non plus d’entreprises privées spécialisées. Toutefois, on note l’émergence de structures privées qui s’intéressent davantage à cette gestion : des privés comme « UNIVERS DU MEDICAL » (basée à Ouagadougou) ; la Société Ouest Africaine de Fonderie (SOAF, basée à Bobo-Dioulasso) s’activent dans la promotion et la vulgarisation d’équipement hospitaliers, notamment les modèles d’incinérateurs pour le traitement écologique des DBM ; la société SOGESIB (basée à Ouagadougou) est spécialisée dans la promotion d’appareil de destruction des aiguilles. Par ailleurs, dans le domaine artisanal, on assiste à l’émergence d’artisans innovateurs très actifs dans la gestion des déchets solides, notamment dans la conception des équipements de collecte, stockage et transport de déchets : poubelles, bacs à ordures collectifs, chariots d’évacuation, incinérateurs, etc. Ces artisans réalisent ces équipements à partir des produits de récupération (ferrailles usagées) qu’ils proposent à des prix très compétitifs.

e) Les ONG

- Certaines ONG en Mauritanie justifient d'une grande expérience dans divers domaines liés à la santé et l'environnement avec des activités relatives à la sensibilisation, à la vulgarisation, à la formation, à la planification, au suivi/évaluation. Concernant les organisations communautaires de base (OCB), elles se caractérisent par leur engouement

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dans des actions de développement local, pluridisciplinaires, avec l'avantage de résider dans la localité et de bénéficier ainsi de la confiance des populations locales. -Au Mali, des ONG œuvrant dans la lutte contre le SIDA peuvent s'investir énormément dans la sensibilisation des populations notamment atteintes par le biais de ses adhérents sur l'ensemble du territoire national. - Les initiatives du secteur communautaire sont très nombreuses, mais focalisées principalement sur la sensibilisation et les ateliers de formation en IEC. Le répertoire des ONG au Burkina Faso indique la présence de 145 structures dont 72 actives dans le domaine de l’environnement et 87 dans celui de la santé. Les ONG sont regroupées au sein de plusieurs cadres de concertation qui pourraient constituer des instruments importants de mobilisation des acteurs pour impulser une dynamique plus vigoureuse autour des questions d’hygiène et de salubrité publique.

f) Les partenaires au développement

- La plupart des partenaires au développement en Mauritanie, interviennent dans le domaine de la santé et tous reconnaissent l'importance des enjeux liés à la gestion des DBM ainsi que la nécessité d'entreprendre des actions vigoureuses dans ce sens. Cependant, très peu d'entre eux (à l'instar de GTZ s'agissant de l'hygiène hospitalière) appuient ou exécutent des programmes spécifiques dans ce domaine. Dans le cadre du PDU, la Banque Mondiale finance l’élaboration de la Stratégie de Gestion des Déchets Solides à Nouakchott, qui comprend un important volet sur le gestion des déchets biomédicaux. -Au Mali, les agences de coopération multilatérale et bilatérale sont sollicitées pour le financement des activités (UNICEF, PNUD, OMS, etc.). Les médias, également, pour réaliser le relais de l'information en ce qui concerne la gestion des déchets biomédicaux et les risques encourus par les agents de santé et la population (Radio Nationale, Radios privées, rurales, Télévision Nationale). - La plupart des partenaires au développement au Burkina Faso intervenant dans le domaine de la santé est intéressée par la mise en place d’un système durable de gestion des déchets. Pour conclure les plans nationaux de gestions des déchets biomédicaux des pays de l’Afrique de l’Ouest aspirent tous à mobiliser ces différentes catégories d’acteurs afin d’assurer une meilleure gestion des déchets d’activités de soins dangereux. Car une gestion convenable des déchets dangereux est un enjeu capital pour ces pays en voie de développement.

3. La gestion des déchets comme tremplin sur la scène internationale

« Maîtriser les déchets constitue désormais un objectif partagé à travers le monde » DESACHY, 2001 : 55).

a) Les pays d’Afrique face à leurs déchets

Les déchets font partie intégrale du développement. De fait, celui-ci met en scène le politique qui est le maître du jeu, il est l’arbitre qui choisit les mesures à prendre, le juridique qui écrit les lois, le technique qui invente des technologies plus puissantes… pour résoudre un problème majeur qui devient de plus en plus important, les domaines de l’économie et du social sur le plan de l’investissement et les formations nécessaires dans le cadre de la gestion des déchets.

Pourquoi cet intérêt collectif, et même international, pour la gestion des déchets ?

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Il est clair que le déchet constitue un problème urbain en Afrique. Les systèmes de gestion des déchets s’insèrent dans le contexte de la gouvernance. Car le processus d’urbanisation accéléré en Afrique cause des problèmes de gouvernance. Adepoju G. Onibokun explique dans son ouvrage La gestion des déchets urbains, des solutions pour l’Afrique, que « l’urbanisation rapide et sauvage des pays d’Afrique a causé la détérioration de l’environnement. L’une de ses conséquences les plus inquiétantes dans le monde en développement, et particulièrement en Afrique, réside d’ailleurs dans les problèmes de gestion des déchets solides, liquides et toxiques. (…) Le taux élevé d’urbanisation dans les pays africains entraîne une accumulation rapide de déchets » (2001 : 10). Par ailleurs, selon ce dernier « ce n’est pas la quantité de déchets qui pose problème, mais plutôt l’incapacité des gouvernements et des sociétés d’élimination des déchets de s’en débarrasser » (2001 : 11). Les Etats africain font l’objet d’une dévaluation. La capacité de gouvernance1 des pays africains liée aux problèmes des déchets urbains et à l’insuffisance de l’infrastructure et des services sociaux est totalement remise en question. La gestion inefficace ou inexistante des déchets dangereux menace la santé et l’environnement, cause une nuisance, contribue à l’érosion du sens civique et risque de donner lieu à un grave problème social. J.M. Lusugga Kironde souligne que « la gestion des déchets traduit la capacité ou l’incapacité des autorités locales à s’occuper de ces déchets et la réaction de la société face à cette capacité ou à cette incapacité. Ainsi, la gestion des déchets est de toute évidence du domaine public et constitue une question d’intérêt public » (in ONIBOKUN (dir.), 2001 : 105). Les citoyens s’attendent donc à ce que les administrations responsables de la gestion des déchets prennent les mesures nécessaires pour garder l’environnement propre. En ce sens les politiques portent le poids de la société qui attend de la part de l’Etat une action. « Les problèmes qui découlent de l’urbanisation rapide en Afrique menacent la gouvernance des centres urbains » affirme l’auteur. En effet, il s’agit bien d’une question de gouvernance urbaine puisque la gestion des déchets est interdépendante de la question de santé publique, de protection de l’environnement et de développement durable. Les politiques urbaines doivent donc répondre à ces questions touchant la gestion des déchets urbains. Koffi Attahi ajoute : « si la gestion des déchets dans les villes africaines apparaissait autrefois comme une activité de nature purement technique, organisationnelle et financière, on se rend compte aujourd’hui qu’elle comporte une dimension culturelle marquée et qu’elle constitue un très important levier de pouvoir » (in ONIBOKUN (dir.), 2001 : 17).

b) La gestion des déchets comme enjeu commun : l’Afrique et le reste du monde

Gérer les déchets pour améliorer la santé publique. Le but des pays africains est de renouveler leur image à travers leur implication dans les affaires publiques et notamment la santé qui repose sur un intérêt général pour l’ensemble des populations. Yveline Marie Thérèse Houenou-Agbo soutient que « l’Approche écosanté porte en elle les valeurs de bonne gouvernance, de respect, d’équité, de solidarité, de dévouement, d’humilité surtout dans le cadre de la transdisciplinarité. C’est l’un des outils à promouvoir, au plan international et national, au niveau des secteurs privé et public, au niveau des communautés à la base »2. La conjonction des facteurs politiques, de l’éveil de l’opinion et des impératifs

1 Définition donnée par ONIBOKUN, p11 : « La gouvernance a trait au rôle de l’Etat dans la société, à la gestion, bonne ou mauvaise, des activités socio-économiques dans les secteurs publics, privé et communautaire, ainsi qu’au degré de participation de la société civile à la gestion de la société dans son ensemble ». 2 Éthique de l’environnement : problématique des déchets toxiques en Afrique, Yveline Marie Thérèse Houenou-Agbo, 6 – 9 Décembre 2006, Ministère de la Recherche Scientifique, 5ième session ordinaire de la commission mondiale de l’éthique des connaissances scientifiques et des technologies.

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économiques amène les pouvoirs publics à mettre en œuvre une politique de la santé, qui s’intègre dans le développement d’une gestion des déchets dangereux. Il n’est aucun pays au monde qui puisse éviter d’envisager la lutte contre la maladie comme une priorité. Un ouvrage collectif intitulé le développement durable indique que « les objectifs des politiques de santé publique sont de contribuer à l’amélioration de l’état sanitaire des populations » (2007 : 126). Les questions environnementales constituent avec les questions économiques et sociales les trois piliers du développement durable. Les menaces sur la santé de l’homme et son environnement sont ainsi portées au grand jour et, de façon dramatique, à notre conscience individuelle et collective. En effet, « la santé » constitue aujourd’hui l’un des principaux secteurs d’activité des pays développés. Dozon et Fassin expliquent que « la santé publique s’est imposée, dans les sociétés contemporaines, comme lieu central de l’espace social et politique. (…) la santé publique apparaît comme un savoir et un savoir-faire, une méthode et un état d’esprit » (2001 : 7). Elle constitue aujourd’hui une idéologie selon laquelle un pays développé est un pays « en bonne santé », autrement dit où ses habitants ont accès à des soins, vivent dans un environnement sain. Assurer une gestion plus écologique des déchets est un enjeu aussi bien pour les pays riches que pour les pays pauvres. Cependant cet enjeu est multiple pour les pays africains. Tout d’abord, fonder une gestion adaptée des déchets hospitaliers dangereux c’est montrer une autre image des pays dit « sous-développés ». Le stéréotype mêmes de ces derniers est un pays qui ne peut offrir des soins à sa population, qui laisse les habitants dans une pauvreté extrême représentée en général par les tas d’ordures et les épidémies qui vont avec. Ensuite assurer un développement durable1, c’est se mettre au même niveau que les pays du Nord, acquérir un statut différent et être reconnu par ces pays. En effet « à la fin de la dernière décennie, c’est par centaine de milliers de tonnes que des déchets dangereux produits dans les pays industrialisés ont été exportés vers divers pays d’Amérique latine, d’Afrique (comme le Sénégal, le Libéria, le Nigéria, l’Angola) ou d’Europe de l’Est. Ne possédant pas l’infrastructure nécessaire au traitement de tels déchets, ces pays étaient utilisés comme simples dépotoirs bon marché »2. Il est possible que la volonté de créer une gestion des déchets dangereux est de montrer une autre image des pays africains, et de refuser que les pays industrialisés les utilisent comme « dépotoirs ». Ils expriment ainsi leur capacité à résoudre leurs problèmes. Pour les pays africains, la gestion des déchets biomédicaux dangereux constitue bien plus qu’un enjeu, c’est un défi.

4. Le développement durable en Afrique La gestion des déchets dangereux entre dans le vaste programme des nations qui a pour objectif un « développement durable ». Il semble que certains projets et concepts occidentaux qui sont un succès pour les pays riches se retrouvent transplantés en Afrique, dans des pays dit « sous-développés »3.

1 Selon le rapport de Brundtland de 1987 : « le développement durable vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ». 2 Les déchets dangereux. Histoire, gestion et prévention. Georg Editeur, édition Médecine et hygiène, Genève, 1997, Collection Dossiers de l’environnement, 125p. 3 Pour une explication du problème du sous développement confer Tibor Mende : « Le problème du sous-développement – c’est à peu près tout ce que nous avons appris au cours du dernier quart de siècle – est beaucoup plus complexe qu’on ne le pensait tout d’abord. Il a ses racines dans l’histoire locale tout autant que dans l’environnement économique à l’échelle mondiale. Il ne se prête ni aux solutions hâtives ni aux généralisations commodes. Cependant, au moment de la décolonisation, la crainte de la rupture des liens traditionnels, des soucis démographiques dans certaines régions, ainsi que des considérations politiques et

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Un article (2004) de Medard Djatou pose deux questions sur lesquelles il est essentiel de revenir : qu’est ce que le développement durable et quel développement durable pour l’Afrique ? L’auteur répond : « the concept of “sustainable development” is frequently used in speeches at international meetings. It originated from environmental dangers that threaten the planet, caused by rapid industrialization and the abundant exploitation and pollution of the environment ». Medard Djatou s’interroge en ces termes : “ so how can “sustainable development,” through European principles, contribute to the well-being of Africans? (…) Does Africa need “sustainable development” projects conceived according to European socio-anthropological realities instead of African realities? ”

En effet, le matériel d’élimination des déchets est apporté en Afrique par des ONG ou des institutions internationales. Mais on sait fort bien aujourd’hui que ce matériel ne convient pas en raison des différentes pratiques et conceptions selon les pays et qu’il ne peut être entretenu du fait de leur poids économique. Les réalités africaines diffèrent des réalités européennes. En Afrique, ce sont par exemple les aiguilles, les seringues qui font l’objet d’une plus grande attention, du fait d’un important risque de contamination du VIH/Sida. Medard Djatou considère que “in its development process, Africa needs “sustainable development” that comes from an internal dynamic and which will take into account Africa’s socio-cultural realities”. L’auteur argumente ici la nécessité de faire des analyses socio-anthropologiques afin de mieux comprendre les pratiques, les conceptions et les besoins des populations : “the transfer of technologies needs preliminary socio-anthropological studies because habits and socio-cultural mentalities of people differ from one continent to another and from one country to another(...) Socio-anthropological studies are highly important in the planning and undertaking of development projects”. Si le monde médical (en élaborant des propositions d’actions : l’hygiène hospitalière, etc.) et maintenant le monde politique (en rédigeant des plans nationaux sur la gestion des déchets) s’attachent à améliorer la situation relative aux problèmes des déchets dangereux, le monde scientifique pourrait quant à lui proposer ses services afin de contribuer à la compréhension des pratiques et représentations populaires. L’anthropologie du développement a un rôle à jouer car comme l’affirme Fatoumata Ouattara : « pour que ce dispositif fonctionne, il faut que le message ait été formulé de façon à faire sens dans l’univers du récepteur. Mais l’objectif n’est pas seulement que le message soit compris. Il faut encore qu’il induise des changements dans les comportements du récepteur, c'est-à-dire qu’il se traduise en acte chez l’individu ou le groupe cible. Mais le message sanitaire parce qu’il arrive rarement à tenir compte des réalités sociales dans toute leur complexité, n’aboutit pas toujours à ses objectifs. Pour le dire simplement, l’individu comme le groupe social auxquels le message est destiné sont des acteurs ayant leurs propres logiques et des besoins à satisfaire » (in BONNET et JAFFRE, 2003 : 465). stratégiques dans d’autres, ont précipité l’action. Les futurs donateurs n’étaient que trop disposés à négliger de considérer combien les problèmes et les choix en cause étaient fondamentaux et compliqués. Et c’est ainsi que commença l’expérience de l’aide » (1972 : 54).

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Conclusion Comme il est impossible à un corps d’être humain de ne pas rejeté des déjections, il est impossible pour une société de ne pas rejeter des déchets. Toute société, partout dans le monde est productrice de déchets.

« La civilisation crache ses fumées, ses gaz polluants et elle a besoin de le faire comme un corps, un ventre de rejeter ses mauvais penchants » (BEAUNE, 1999 : 20).

L’auteur avance l’idée qu’il est impossible d’éliminer les déchets. En effet, « éliminer » signifie « faire disparaitre totalement » et après cette étude, il est évident que cela n’est pas possible en ce qui concerne les DASRI. Il restera ce qu’Elvire Bernardet-Van Staëvel nomme le « déchet ultime ». Selon la loi du 13 juillet 1992 est ultime, le déchet « résultant ou non du traitement des déchets, et qui n’est plus susceptible d’être traité dans les conditions techniques et économiques du moment, notamment par extraction de la part valorisable ou par réduction de son caractère polluant ou dangereux ». Donc les déchets ultimes sont les déchets des déchets, la forme finale des déchets. Ils sont les résidus inutilisables des traitements de déchets. Celle-ci dégage deux significations : pour certains, « ultime » signifie le dernier. Pour d’autre, il prend la signification de l’ « ultimatum ». Elle commente : « Pour le profane, l’ultimatum prévient de l’avènement de la violence, de la destruction, de la catastrophe : le DU serait l’ultimatum, l’avertissement fait à l’homme pour lui signifier que ces capacités technologiques s’arrêtent avec ce déchet « qui n’est plus susceptible d’être traité dans les conditions techniques et économiques du moment ». Pour les scientifiques le DU renvoie à un aboutissement technologique alors que pour les profanes il renvoie à l’échec du processus technologique : subsiste un reste irréductible : limites technologiques de l’homme, impuissance à maitriser ses propres productions d’où l’idée de certains qu’il faut « arrêter de produire ce qu’on ne maîtrise pas » (in BEAUNE, 1997 : 115). Cette notion révèle toute l’ampleur de la difficulté des pays à gérer les déchets produits en masse. Cela devient un enjeu politique que d’assurer une gestion appropriée afin de minimiser les risques de pollution, de maladies, etc. Comme l’a montré Adepoju G. Onibokun « ces problèmes urbains surtout en ce qui concerne la gestion des déchets découlent d’une mauvaise gouvernance » (2001 : 225). L’enjeu pour les pays africains serait-il alors de renouveler leur mode de gouvernance ? Les principaux documents traités sont des rapports de l’OMS et des plans1 nationaux quant à la gestion des déchets biomédicaux. Il en résulte un décalage entre les logiques de l’OMS, des institutions internationales et les représentations populaires. Fatoumatta Ouattara résume tout ce qui a été exposé dans ce document : « selon la logique biomédicale, les mesures d’hygiène sont des pratiques incontournables pour limiter certains effets de contamination. De ce point de vue, il suffirait- et c’est le présupposé des interventions de développement- de changer les pratiques d’hygiène des populations pour diminuer le taux de prévalence de certaines maladies comme les accès de paludisme, de dysenterie amibienne et de diarrhées. Mais les constats d’échec des multiples politiques en matière de santé dans les sociétés africaines montrent que la réalité n’est pas simple à transformer. L’hygiène est une notion médicale alors que les populations parlent en termes de saleté ou

1 J’ai utilisé comme documents les plans nationaux mais c’est quoi un plan ? Selon Albertini « c’est la représentation symbolique d’un projet à réaliser, d’une action à entreprendre » (1967 : 185). L’Etat joue un rôle décisif dans les pays en voie de développement. « En effet, le plan est avant tout une prise de conscience collective des problèmes du développement » (ibid. : 193). « Le plan est enfin et surtout, dans le quotidien et à travers des réalisations précises, l’expression d’un engagement profond de la société et l’instrument de maîtrise du développement » (ibid. : 194).

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de propreté. Pour progresser dans ce dialogue, il est donc utile d’investiguer les conceptions locales sur la transmission des maladies et comprendre les modes populaires de gestion des saletés » (in BONNET et JAFFRE, 2003 : 403). Les consignes des plans nationaux, de l’OMS relèvent d’une bonne volonté mais leur projet n’est pas réalisable. Il faut d’abord étudier la situation de près, comprendre et ensuite agir, et surtout ne pas poser un modèle occidental basé sur l’hygiène, notion occidentale, qui n’a aucun poids dans les conceptions populaires. Fautes de règlementations, de moyens économiques, de concepts pertinents, la gestion des déchets dangereux ne pourra s’améliorer et les praticiens du développement se borneront à édicter des normes et proposer des objectifs pour de bien illusoires programmes. Une réflexion pluridisciplinaire sur ces questions semble pertinente. J.C. Beaune l’a fait sur le concept de déchet pourquoi pas sur celui de déchet hospitalier dangereux en Afrique de l’Ouest avec des anthropologues africanistes, anthropologues de la santé, anthropologues de la politique, des juristes, des sociologues, des économistes… Une question est soulevée : est-ce les pays africains qui souhaitent améliorer leur gestion des déchets dangereux ou bien est-ce une idéologie européenne imposée ? Car comme l’indiquait déjà Jean Marie Albertini dans les mécanismes du sous-développement : « le développement ne pourra naître que d’une action consciente et concertée pour maîtriser le devenir économique et social. Cette maîtrise doit d’abord être le résultat d’une volonté nationale. Le développement ne peut être imposé ou réalisé de l’extérieur, car il est essentiellement une transformation profonde des modes de faire, d’être et de penser » (1967 : 183). Et « il ne sert à rien d’élaborer un plan de développement, de mettre en place de nouvelles structures politiques et administratives, si les hommes ne vivent pas le développement » (ibid. : 202).

Les études anthropologiques sur la santé, la maladie en Afrique sont nombreuses. L’interaction entre santé, culture et société s’impose alors comme une évidence. Pourquoi les déchets dangereux en Afrique n’ont pas fait l’objet d’analyse anthropologique ? Pourtant il y aurait tant à faire. Analyser comment les différentes cultures d’Afrique de l’Ouest se représentent les déchets dangereux et leur mode de traitement, de gestion. Pour cela, il faudrait une ethnographie approfondie, minutieuse et descriptive des modes de production, de consommation, de gestion des déchets dangereux. Il s’agit de découvrir les différents concepts et conceptions liées aux déchets, aux déchets dangereux hospitaliers plus précisément, interroger le personnel médical, les patients, le personnel des structures médicales en général, le personnel de gestion des déchets, les populations, les politiques, les ONG, l’OMS… tous les acteurs stratégiques présents dans l’arène que constitue le déchet d’activités de soins dangereux. Analyser les interactions entre le système de gestion des déchets et les conceptions et pratiques populaires face à ces déchets, de même les corrélations entre les déchets et la santé, comment la santé et l’environnement au nom du développement durable sont instrumentalisés… Etudier le contexte de leur réutilisation, leur trajectoire, rendre compte des mises en application des règles et des conseils annoncés, comprendre qui ont rédigé et comment sont établis les rapports et plans nationaux et dans quel but.

Un enchevêtrement de l’anthropologie politique, économique, de la santé et du développement sur la question des déchets est préconisée. Cette ethnographie permettrait de constituer des plans nationaux sur les gestions des déchets qui prennent en compte les perceptions des populations, des acteurs afin d’avoir plus de chance de réussite d’une gestion appropriée. Celle-ci sera en effet plus adaptée donc fonctionnera sur le long terme ce qui est l’objectif même du développement durable.

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Glossaire / Terminologie - Autoclave : du lat. clavis, clé. Se dit d’un récipient à parois épaisses et à fermeture hermétique conçu pour réaliser sous pression soit une réaction industrielle, soit la cuisson ou la stérilisation à la vapeur. - Cadmium : métal mou d’un blanc très brillant. - Collecte : l’acte d’enlever des déchets solides accumulés dans un conteneur à leur source de génération. - Conteneur : récipient dans lequel les déchets sont placés pour leur manutention, transport, stockage et/ou élimination éventuelle. Le conteneur à déchet est une composante du conditionnement des déchets. (Conteneurs pressurisés : composés de conteneurs (pleins ou vides) substances liquides, gaz ou en poudre sous pression). - Décharge aménagée (sanitaire) : caractérisée par le dépôt contrôlé et organisé des déchets qui sont ensuite régulièrement (chaque jour) recouverts par le personnel présent sur le site. Et Décharge ouverte ou sauvage : caractérisée par le dépôt non contrôlé et non organisé des déchets. - Déchets anatomiques : déchets consistant en des parties reconnaissables du corps - Déchets biomédicaux et de soins médicaux : déchets solides ou liquides générés par des activités de soins (médicaux) telles que les diagnostics, le suivi, le traitement, la prévention des maladies ou l’éradication de handicaps chez les humains ou les animaux, y compris la recherche liée, effectuée sous la supervision d’un professionnel médical ou d’un vétérinaire ou autres personnes habilitées par leurs qualifications professionnelles. - Déchets chimiques : contiennent des substances chimiques. Et Déchets cytotoxiques : médicaments possédant une action destructive spécifique sur certaines cellules. - Déchets pharmaceutiques : composés de/ou contenant des substances pharmaceutiques déchets de soins médicaux à haute teneur de métaux lourds. Ils sont composés des matériaux et équipements qui contiennent des métaux lourds et leurs dérives dans leur structure. - Déchets de soins médicaux infectieux : substances jetées provenant des activités de soins médicaux sur les humains pour les animaux qui possèdent le potentiel de transmettre des agents infectieux aux humains. Ils comprennent les matériaux et équipements utilisés pour le diagnostic, le traitement et la prévention des maladies, l’évaluation du statut sanitaire à des fins d’identification qui ont été en contact avec du sang et ses dérivés, des tissus, des fluides ou des déchets des salles d’isolation de maladies infectieuses. - Déchets radioactifs : substances contaminées par un radio-isotope provenant de l’utilisation médicale ou de recherche de radionucléides. Ils peuvent avoir une forme solide, liquide ou gazeuse. - Déchets résiduels : ces matériaux (solides ou liquides) nécessiteront encore une élimination après l’accomplissement d’un traitement ou une activité de recouvrement de ressources. - Déchets tranchants ou piquants : sont une sous-catégorie des déchets de soins médicaux infectieux et comprennent des objets tranchants capables de causer des blessures. - Décontamination : le processus de réduction ou d’élimination des substances dangereuses telles que les agents infectieux pour réduire la probabilité de transmission de maladies à partir de ces substances. - Désinfectant : agents chimiques capables de réduire la viabilité des micro-organismes. - Elimination : enfouissement, dépôt, réforme, décharge, placement ou libération de tout déchet dans ou sur tout espace, terrain ou eau. - Environnement : c’est le milieu dans lequel un être vivant fonctionne. Ce milieu inclut l’air, le sol, les ressources naturelles, la faune, la flore et les êtres humains. Un tel trésor qui doit être préservé durablement est cependant gravement exposé aux effets d’une mauvaise

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gestion des déchets biomédicaux que sont les pollutions et nuisances. - Exposition : la quantité de radiation présente dans un environnement particulier (exemple: humain, naturel) qui représente une menace sanitaire potentielle pour les organismes vivants dans cet établissement. - Fût : emballage cylindrique à fond plat ou bombé, en métal, carton, plastique, contre plaqué ou autre matériau approprié. Le plus souvent, pour les déchets d'activités de soins à risques infectieux, les fûts sont en plastique. - Gestion des déchets : toutes activités -administratives et opérationnelles- concernant la manutention, le traitement, le conditionnement, le stockage, le transport et l’élimination des déchets. - Hygiène : contrôle de tous les facteurs de l'environnement physique, qui exercent ou peuvent exercer un effet nuisible sur le développement physique, la santé et la survie des êtres humains. - Lixiviation : du lat. lixivium, lessive. Opération qui consiste à faire passer lentement un solvant à travers une couche d’un produit en poudre, pour en extraire un ou plusieurs constituants solubles (parfums et alcaloïdes dans des substances organiques, or et cuivre dans des minerais). - Manipulation/manutention : les fonctions associées au mouvement des déchets. - Minimisation (des déchets) : l’application d’activités telles que la réduction, la réutilisation et le recyclage des déchets pour minimiser la quantité de déchets à éliminer - Pollution de l’air : la présence dans l’air de matériaux et de substances qui pourraient être dangereux pour, soit la nature ou, l’environnement humain, ce qui inclut tout matériaux en concentration suffisante sur une durée suffisante, et un nombre de circonstance, pour interférer significativement sur le confort, la santé ou le bien être des personnes ou la pleine utilisation et jouissance de leurs propriétés. - Recyclage : terme recouvrant la réhabilitation ou la réutilisation de débris ou déchets d’un matériau pour la fabrication ou d’autres usages. - Risque : probabilité d'occurrence d'un événement futur, soit incertain, soit à terme incertain, ne dépendant pas exclusivement de la volonté de l'homme et qui peut causer un dommage. - Stérilisation : un processus utilisé pour atteindre un état d’absence de micro-organisme viable. - Stockage : le placement des déchets dans un emplacement indiqué ou dans un endroit où l’isolation, la protection de la santé et de l’environnement et le contrôle humain sont garantis. Ceci est effectué avec l’intention que les déchets seront, ensuite, retirés pour être traités et conditionnés et/ou éliminés. - Suivi : surveillance périodique ou continue ou, test pour déterminer le niveau de conformité aux exigences statutaires et/ou quantités d’agents polluants dans divers supports ou chez les humains, les animaux et autres êtres vivants. - Traitement : toute méthode ou technique pour altérer les caractéristiques biologiques, chimiques physiques des déchets ou pour réduire les risques qu’ils représentent et faciliter ou amoindrir leurs coûts d’élimination. Les objets de base du traitement incluent la réduction de volume, la désinfection, la neutralisation ou autre changement de composition pour réduire les risques, y compris l’élimination ou, les radionucléides émanant des déchets radioactifs. - Tri : la séparation systématique des déchets selon des catégories identifiées. - Unité de traitement hors site : unité de traitement, de stockage ou d’élimination de déchets cliniques ou connexes située hors du site de génération de ces déchets. Et Unité de traitement sur site : unité de traitement, de stockage ou d’élimination de déchets cliniques ou connexes située sur le site de génération de ces déchets.

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Rapport de l’Observatoire Régional de la Santé, Rhône-Alpes, octobre 2005. Secrétariat de la Convention de Bâle et Organisation mondiale de la Santé, 2005, Préparation des plans nationaux de gestion des déchets de soins médicaux en Afrique Subsaharienne : manuel d’aide à la décision.

� Thèses et mémoires : �

Billau Pascal, Estimation des dangers des déchets biomédicaux pour la santé et l’environnement au Bénin en vue de leur gestion, Université de Sherbrooke, 2008. Daoudi Mohammed Abdou, juillet 2008, Evaluation de la gestion des déchets solides médicaux et pharmaceutiques à l’hôpital Hassan II D’Agadir, Institut National d’Administration Sanitaire, Ministère de la Santé. Diop Abdou, « La gestion des déchets biomédicaux au Sénégal : les exemples de l’hôpital Le Dantec et l’hôpital Fann », thèse de doctorat d’Etat en médecine. Douny Laurence, 2007, A praxeological approach to Dogon material culture, Department of Anthropology, University Colege London, 376 p. Fall Ndiaye Dior « Les déchets biomédicaux au Sénégal : un vide juridique à combler», mémoire de DEA de droit de la santé, Agence Universitaire de la Francophonie, 2004-2005. ML André, S Hubert, 1997, Gestion des déchets hospitaliers, Projet DESS "TBH", UTC, 51p. URL : http://www.utc.fr/~farges/DESS_TBH/96-97/Projets/DS/DS.htm. (page consultée le 21 avril 20009)

� Autres : Encyclopédie et Dictionnaire - Le petit Larousse, 2001 - Encyclopédie Axis Documents tirés du net : - Texte de la loi 75-633 du 15 juillet 1975 relative à l’élimination des déchets : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=LEGITEXT000006068529&dateTexte=19750715 (loi du 15 juillet 1975 et Article R.44-1 du code de la santé publique fran çaise) (page consultée le 19 avril 2009). - Encyclopédie Wikipédia

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Table des illustrations : FIGURE 1: PHOTO DE SERINGUES SUR LE SOL ET DE GENS QUI FOUILLENT LES DECHETS CE QUI

ILLUSTRE LE RISQUE DE BLESSURES PAR PIQURES D'AIGUILLES (IN PREPARATION DES

PLANS NATIONAUX DE GESTION DES DECHETS DE SOINS MEDICAUX EN AFRIQUE

SUBSAHARIENNE : MANUEL D’AIDE A LA DECISION, 2005: 8)............................................. 30 FIGURE 2: PHOTO QUI MONTRE LA POLLUTION DES SOLS DUE AUX DECHETS (IN PREPARATION

DES PLANS NATIONAUX DE GESTION DES DECHETS DE SOINS MEDICAUX EN AFRIQUE

SUBSAHARIENNE : MANUEL D’AIDE A LA DECISION, 2005 : 9) ............................................ 31 FIGURE 3 : REND INTELLIGIBLE LES NOTIONS DE « DANGER » ET DE « RISQUE », SCHEMA ISSU

DU RAPPORT DU CONSEIL SUPERIEUR D’HYGIENE, 2005 ................................................ 32

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Table des matières

Sommaire .................................................................................................................................................... 3 Table des sigles et des abréviations............................................................................................................ 4 Introduction ................................................................................................................................................ 6

I. PROPOS DIVERGENTS OU LES DIMENSIONS SEMANTIQUES DU DECHET.................................................................................................................................9

A. ETAT DE LA QUESTION : LE DECHET C’EST QUOI ?................................................................................... 9 1. Etymologie, définitions des concepts................................................................................................. 9 2. Le détritus qui encombre et pollue .................................................................................................. 11 3. Le reste artistique et le reliquat archéologique............................................................................... 12 4. Conclusion et définition retenue pour ce mémoire.......................................................................... 14

B. LES DECHETS ISSUS D’ACTIVITES DE SOINS........................................................................................... 15 1. Les déchets produits dans le secteur sanitaire ............................................................................... 16 2. Quel étrange déchet que celui des activités de soins....................................................................... 18

a) Avant d’être « un déchet »…...................................................................................................................... 18 b) La double négativité des déchets hospitaliers dangereux............................................................................ 18

II. LES DECHETS DANGEREUX EN AFRIQUE DE L’OUEST ... .......................20

A. SITUATION GLOBALE DES PAYS EN VOIE DE DEVELOPPEMENT.............................................................. 20 1. Une urbanisation galopante, état de la situation sanitaire ............................................................. 20

a) Etat de la situation sanitaire au Bénin, en particulier à Cotonou................................................................. 21 b) Aspects socio-sanitaires en Mauritanie....................................................................................................... 21 c) Généralités sur le plan sanitaire au Sénégal................................................................................................ 22 d) Situation sanitaire au Niger......................................................................................................................... 22 e) Etat de la situation sanitaire au Burkina Faso ............................................................................................. 22 f) Aspects sanitaires du Mali .......................................................................................................................... 23 g) La situation sanitaire en Guinée.................................................................................................................. 23 h) Brève conclusion sur les points communs .................................................................................................. 23

2. Un cadre règlementaire… ou pas.................................................................................................... 24 3. L’hôpital africain et les pratiques des acteurs de santé .................................................................. 26 4. Les risques et les dangers associés aux déchets d’activités de soins .............................................. 29

B. REPRESENTATIONS ET CONCEPTIONS SOCIO- CULTURELLES ................................................................. 33 1. Notions d’hygiène, de propreté, de saleté et de souillure................................................................ 33 2. L’hygiène hospitalière..................................................................................................................... 35 3. Le rapport santé / déchet : conscience de l’impact ......................................................................... 36

III. SUR LA ROUTE DU DEVELOPPEMENT DURABLE......... .............................39

A. DES PROBLEMES SOCIOPOLITIQUES AUX PROBLEMES ECONOMIQUES.................................................... 39 1. La gestion et l’élimination des déchets............................................................................................ 39

a) Les différentes techniques d’élimination selon les types de déchets........................................................... 39 b) Les dysfonctionnements : ........................................................................................................................... 41 c) Aspects institutionnel et règlementaire : ..................................................................................................... 43

2. Des solutions techniques qui engendrent de nouveaux « déchets »................................................. 46 3. La santé publique et la sécurité comme enjeu de pouvoir............................................................... 48 4. Conséquences socio-économiques................................................................................................... 51

B. RESPONSABILISER ET CONSCIENTISER LE PROBLEME DE GESTION DES DECHETS................................... 53 1. Qui est responsable ? ...................................................................................................................... 53 2. Dans l’arène : les acteurs de la prise en charge des déchets.......................................................... 54

a) Le gouvernement ........................................................................................................................................ 54 b) Les communes ............................................................................................................................................ 55 c) Les structures médicales ............................................................................................................................. 56 d) Le secteur privé de collecte des déchets ..................................................................................................... 56 e) Les ONG..................................................................................................................................................... 56 f) Les partenaires au développement .............................................................................................................. 57

3. La gestion des déchets comme tremplin sur la scène internationale............................................... 57 a) Les pays d’Afrique face à leurs déchets...................................................................................................... 57 b) La gestion des déchets comme enjeu commun : l’Afrique et le reste du monde......................................... 58

4. Le développement durable en Afrique ............................................................................................. 59

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Conclusion ................................................................................................................................................ 61 Glossaire................................................................................................................................................... 63 Bibliographie ............................................................................................................................................65 Table des ilustrations................................................................................................................................ 69

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Annexes Annexe 1 : Etymologie, sémiologie autour du déchet 73 Annexe 2 : Classification des déchets de soins médicaux et tableau des différents modes d’élimination selon la catégorie des déchets 77 Annexe 3 : Les risques associés aux déchets d’activités de soins pour l’homme et pour l’environnement et les connaissances, attitudes et pratiques des acteurs 79 Annexe 4 : Exemples des objectifs des plans nationaux (Mali et Guinée) 82 Annexe 5 : Enjeux de la gestion des déchets dans le cadre du développement durable 84 Annexe 6 : Photos 85

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Annexe 1 : Etymologie, sémiologie autour du déchet

(Beaune, 1999 : 184)

(Beaune, 1999 : 186)

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(Beaune, 1999 : 187)

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(Beaune, 1999 : 192)

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(Beaune, 1999 : 198)

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Annexe 2 : Classification des déchets de soins médicaux

(Préparation des plans nationaux de gestion des déchets de soins médicaux en Afrique Subsaharienne, 2005 : 6).

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(Plan de Gestion des déchets biomédicaux, République du Mali, 2004 : 54).

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Annexe 3 : Les risques associés aux déchets d’activités de soins pour l’homme et pour l’environnement et les connaissances, attitudes et

pratiques des acteurs

(Plan de gestion des déchets biomédicaux, République islamique de Mauritanie, 2003 : 33)

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(Plan de gestion des déchets biomédicaux, République islamique de Mauritanie, 2003 : 34)

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(Plan de gestion des déchets biomédicaux, République islamique de Mauritanie, 2003 : 36)

(Plan de gestion des déchets biomédicaux, République islamique de Mauritanie, 2003 : 52)

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Annexe 4 : Exemples des objectifs des plans nationaux

(Plan de Gestion des déchets biomédicaux, République du Mali, 2004 : 17).

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(Gestion des déchets biomédicaux en Guinée, Plan national de gestion, 2002 : 17-18).

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Juin 2009 84

Annexe 5 : Enjeux de la gestion des déchets dans le cadre du développement durable

Modèle de gestion durable des déchets en Afrique de l’Ouest Source : Oxfam, Québec (Pascal Billau, Bénin, 2008 : 61)

(Pascal Billau, Bénin, 2008 : 51)

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Juin 2009 85

Annexe 6 : Photos

Incinérateurs :

(Sénégal, Ministère de l’environnement et de la protection de la nature, 1999 : 62)

(ibid. : 63)

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(ibid. : 63) Appareils de combustion :

Source : WHO ( Pascal Billau, 2008 : 48)

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Incinérateur dans un bidon métallique avec cheminée :

Source : WHO (Pascal Billau, 2008 : 49)