entretiens avec metraux

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  • 7/25/2019 Entretiens Avec Metraux

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    L'Homme

    Entretiens avec Alfred Mtraux Alfred Mtraux , Fernande Bing

    Citer ce document Cite this document :

    Mtraux Alfred, Bing Fernande. Entretiens avec Alfred Mtraux. In: L'Homme, 1964, tome 4 n2. pp. 20-32.

    http://www.persee.fr/doc/hom_0439-4216_1964_num_4_2_366640

    Document gnr le 16/10/2015

    http://www.persee.fr/collection/homhttp://www.persee.fr/doc/hom_0439-4216_1964_num_4_2_366640http://www.persee.fr/author/auteur_hom_10755http://www.persee.fr/author/auteur_hom_10875http://www.persee.fr/doc/hom_0439-4216_1964_num_4_2_366640http://www.persee.fr/doc/hom_0439-4216_1964_num_4_2_366640http://www.persee.fr/author/auteur_hom_10875http://www.persee.fr/author/auteur_hom_10755http://www.persee.fr/doc/hom_0439-4216_1964_num_4_2_366640http://www.persee.fr/collection/homhttp://www.persee.fr/
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    2.O

    E N T R E T I E N S V E C LFRED M T R U X

    En igi, Mme FernandeBing eut avecAlfredMtrauxune srie d entretiens,u coursdesquelsilput mditer,hautevoix,sur sa vocation d ethnologueet commenterlibrementses travauxsur l le dePques et sur le vaudouhatien.

    Nous la remercionsvivementd avoirbien voulunous en communiquerle texteenregistr.C est Tahitimme,peu avantla dernireguerre, que,hbergepar unejeuneTahitiennequi, deuxans auparavant,avaitdonnl hospitalit A. M., elleentendit pour la premirefois le nom de celuiqu ellene devait connatrequ unevingtained annesplus tard Paris.Le tempsavaitpass,maisc tait bienle mmehommesimple, courtois et savant qui venait confirmer l image qu ont toujoursetpartout gardeceuxqui l ont connu.

    COMMENT ET POURQUOI DEVIENT-ON ETHNOLOGUE?

    Cettequestion,jeme lasuissouventposeet, je le sais, nombredemescollguesont pour leur part essayd y rpondre.Je croisqu elleest double,et quebiensrla rponse l estaussi: entrent en jeu, tout d abord,le facteur personnel,letempramentde l ethnographe,je prfredire l anthropologue,ensuite,le facteur social,c est--diretout ce qui dansson temps,sa civilisation,a pu le poussersur la voiequ il a choisie.La plupart des ethnographes,surtout ceux quiont travaillsur leterrain, sont, dansune mesureou une autre, des rebelles,des anxieux,desgensqui se sentent mal l aise dans leur propre civilisation.Ce caractresubjectifest si videntque l on ammeessayde voiren lui ce quidistinguel anthropologue

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    du sociologue.Certes, leurs deuxdisciplinessont connexes,maisl anthropologuese sent gn dans sapropre socit,alors que le sociologues y trouvebien et necherche qu' la rformer. Cependant nouspouvonsngliger pour l instant cefacteur personnelet considrerl autre aspectde la question,qui nous reporte l poqueo je suis devenuethnographe,au momento j'ai senti ma vocations veiller,et tenter de dterminer cequi,dansle milieuojevivais,apu la susciter.Cecise situevers lesannes1924,1925, 1926,et l on sait ce que ces annesontreprsentdansle mouvementde la pense.

    J y songeencoreavecune vritablemotion; c tait une prioded bullition,de rbellionet nousen tionstous secous.Pourle dire d un mot : le surralismedbutait,et c estalorsqu ila t le plusvigoureux.Je n ai pasfait partie dumouvement,mais j'ai connu beaucoupde surralistes,j'ai eu pour ami Georges

    Bataille,bref, j'ai

    suivice courant,auquell ethnographiea apportdes lmentsextrmementprcieux.Brusquement,les peuplesexotiquesvenaientconfirmer,en quelquesorte, l existenced aspirationsqui ne pouvaientpass exprimerdansnotre propre civilisation.La premiremanifestationde ce sentiment fut l veilde l intrt port aux arts exotiques,aux arts africainsd abord,ensuite ceuxde l Amriqueprcolombienne.Mais,trs tt, l intrt purementesthtiquea tdpasspar l tonnement devanttout ce qu'il y avait d incongru,d extraordinaire,dansces civilisationsexotiques. D ailleurs,jedoisdirequedanscetteattitudeentrait autant de navetque de prjugs: on demandait l ethnographielepittoresque,le bizarre; plus tard seulement, cetteexaltation,cet enthousiasme

    ont t canalissau profit de la science.Je doisdire aussique,par temprament,j taissurtout proccuppar l aspectscientifiquede l ethnologie. J estimaisquel enthousiasmequesuscitaitla rvlationdes culturesexotiquestrahissaitencorenotre ethnocentrisme.Noustions encore trop enfoncs,engoncsdans notrecivilisation,et trop surpris par tous cesaspects nouveaux.

    C est ce moment-lque j eus l occasionde faire mes premiers travaux surle terrain et c est alors que me fut donnela rvlationd autrescivilisations.Dans cesculturesnouvelles nouvellespourmoi,pournous que j'ai pu tudier,et qui appartiennentpour la plupart l Amriquedu Sud, j'ai prouvunsentimenttrs diffrent de celui auquelj auraispu m attendre : je m y suis sentiextrmement l aiseet beaucoupmoinsdpaysquedansmaproprecivilisation.Pourquoi? Peut-treparceque j'ai peru autour de moi un rythme plus lent,parce que les tres que j abordaisne souffraient pas des problmesqui nousaccablaienttous, et ceci tait pour moi une espcede repos. Je crois aussiquecette prisede contactavecles civilisationsprimitivesm a fait sentir qu'au fond,la protestationqui m avaitprcismentpoussvers des civilisationstellementloignesde la ntre, trouvaitsonmotif dansune sorte de nostalgie,une nostalgieque nous, hommesd Occident, avons,je crois, ressentie detout temps et quej appelled un termepeut-trecomique,enfin queje veuxtel, la nostalgie duno-

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    lithique.Il me semble,et celasans vouloirtomberdans un rousseauismefacile,quel humanita peut-tre eu tort d allerau-deldu nolithique.

    Vousme demanderez: pourquoile nolithique,pourquoipasle palolithique,pourquoi pasl gedu bronze oul gedu fer ? Eh bien,si j'ai choisile nolithique,et non, par exemple,le palolithique,c est qu'au nolithique,l hommeavaitdjruni peu prs tout ce dont il avait besoin.Devenusdentaire,il pratiquaitl agriculture,il avait dj domestiqules animaux.Certes, il ne possdaitpasencore l criture; probablementn existait-ilpas d tat organis: les hommesvivaienten petitescommunauts, maisj'ai l impressionqu ilstaient plusheureuxqu aujourd hui.Ce sontl, sansdoute, desdclarationstout fait gratuites.Biensr, je n en saisrien, je n aipas vcuau nolithique; pourtant, j'ai senti, si l onpeut dire, le souffle du nolithiquelorsquej'ai vcuchez les tribus indiennesdu

    Brsil.Je ne prtends certes pas que ces Indienssoient des hommesde cettepoque,leurs civilisationssont d ailleursaussianciennesque lantre, portentle mme nombrede sicles oude millnaires.Maisenfin leur style de vie ne devaitpas diffrer ou ne diffre pas grandementde celui des hommesdu nolithique.Et, prcisment,j'ai eu le sentimentqueleshommesquivivent dans ces conditionsmatriellessont plus heureux que nous. Naturellement,leurs problmes,leursdifficultssont normes,ils vivent beaucoupmoinslongtempsque nous, leuresprancede vie est, mettons, de trente-cinqans mais l existence,dans cespetitescommunauts,est malgrtout plusintgre.Elleoffre, sinonmatriellement,du moinssur le planpsychique,unescuritinfinimentsuprieure cellequenousressentonsdansnotre proprecivilisation.L hommeest infinimentmoinsisolqu il ne l est en Occident.D ailleurs,si la lutte pour la vie est dure, elle seprsente sous une forme beaucoupmoins dsagrable; chasser,naturellement,est un travail, une obligation,mais quis accompagnede toute la joie, de toutel exubrancedu sport. On peut revenirbredouille,il est vrai, on peut souffrir dela faim, maisaussijouir de l abondanceet cette abondanceest sourcede joie, defte. Je me trouvaischez les IndiensKayapodu Brsilcentral, un jour o ilsavaientrussi tuer quelquespcaris,quelquessanglierssauvages.Tout le villagedbordaitde joie,d unejoiedont je n aivu l quivalentdans aucunautre groupehumain.On prtendraqueces joiessont d unequalitinfrieure,ce sont desjoiestout de mme.D autrepart, dans ces civilisations-l,le rle que jouentlesindividusau coursde leurvie est infinimentmieuxfix et moinsangoissantqueceluiquenousavons jouernous-mmes.L homme quiavancevers la vieillesse,n'apas les soucis, lesproccupations quiassaillentla plupart de nos contemporains.Unhommed gea sa placebien dlimite,il sait ce qu ila faire, il jouitd autorit,de respect,il peut faire apprcierson exprience; son rle esttrs prcis ettrs important dansl ducationde ses petits-enfants.De faon gnrale,aucunepoquede la vie ne se prsente lui avectoute cette charge d inquitudequi,ici, est notre lot. Je sais bien que lamdecinen existait pas et le plus grand

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    reprocheque je ferais au nolithique,c est l absencede dentistes.Si le nolithiqueavaitconnul art dentaire,je m en seraisfort bien content

    Ce disant,je ne prchenaturellementpas un retour au nolithique,absolumentimpossible,je le sais. Maisje souffre de ce que les dernirescivilisationsquien sont encore cestadesoienten voiede disparitionrapide.Un des grandschagrinsde mavie d hommeest d avoirassist l agoniede tant de ces petitessocits,qui sont mprisesparceque, values l aunede nos techniques, ellesapparaissentcommemprisables,maisqui reclenten ralitune valeurprofondeet dont la disparitionreprsentecertainementune trs grandeperte. Je ne veuxpas apparatrecommeun crateurde sectesnouvelles,encoreune fois je neprconisepas un nouveaurousseauisme. Cependant,je tiens dire que d autrescivilisationsque la ntre ont pu, infiniment mieux que nous ne l avons fait,rsoudreles problmesqui se posent l homme.C est,je crois,cette ide,rellementfondamentale,quia inspirmacarrired ethnographe: j'ai vouluconserverle souvenir,ou l image,de cespetites civilisations.Ellesvont mourir, sans aucundoute, elles meurent dj : en trois, quatre ans, j'ai vu des peuplades,sinondisparatre physiquement,du moinsperdretoutes leurs traditions,se fondredansune masseamorphe.Nanmoins,il est utile, profitable, de conserverune imageaussiprcisequepossiblede leur type de vie. Je dis : aussiprcisequepossible,parcequ en ce domaineil s agit de faire uvrescientifique.Il ne faut pas cderauxpanchementslyriques,et nonplus voilerles ctsdplaisantsde cessocits.Aprstout, ces genssont des hommes,ils ont leurs dfauts, leurs ctssombres,

    ils sont trs souventcruels. Ne le cachonspas. Mais sachonsmontrer du moinsquenotre type decivilisationn est pas le seul, quenousn avonspas rsolu touslesproblmes,et sachonsinsistersur le relativismedes civilisations.

    II

    L'ILE DE PQUES

    Toute la questionde l le de Pques est revenue l actualit, depuisle voyaged Heyerdahl,il y a de cela quelquesannes.Mon propre voyagedate d il y avingt-cinq ans. A cettepoquel le de Pques attirait dj l attention. Elletait aussipopulairequ ellele redevint aprs l expditiond Heyerdahl,maispour d autres raisons.Un savanthongroisavait cru dcouvrirdes similitudesentre les mystrieuxcaractres dessinssur des tablettes trouvesdans l le dePques,et dans lesquelsil voyait des hiroglyphes,et une criture qui venaitd tre dcouvertedans la vallede l Indus,et qui appartenait la civilisation

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    de Mohenjo-daro,civilisationextrmementanciennepuisqu on lasitue environ3 500 ans avant J.-C. Effectivement, lesressemblancesque Efsi avait signalesentre leshiroglyphesde la civilisationde Mohenjo-daroet certains signesquiapparaissentsur des tablettesde boisrecueillies l le de Pques,un sicleplustt, taient telles, quel on pouvaitcroire une origine indienne,ou disonsd unefaonplus gnrale,asiatique,de la civilisationde cette lepolynsienneisole.Cette hypothseavait l poque,c est--direen 1932,provoqudes remousconsidrables,des discussionset, afin de trancherdfinitivementla question,laFrance s taitassocie la Belgiquepour organiser une grandeexpdition l lede Pques. J ai particip cette expdition, dontje devinsle chef aprsla mortde CharlesWatelin,en coursde voyage,et, pendantsix mois,avecmoncollguebelge,Henry Lavachery,nous avonstravailldans l le. Il s est occupsurtout

    d archologie,de relevde statues et d hiroglyphes.Pourma part, je me suisefforc d amenerles plus gs des Pascuans retrouver et mecommuniquerles souvenirsqu ils pouvaientavoir conservsde la civilisationde leursanctres.

    Ce travail fut extrmementdifficile, trs dlicat, car ceuxqui pouvaientsesouvenirencorede ce qu'avait t la civilisationde leurs pres taient trs peunombreux.J ai surtouttravaillavecl un d eux,le vieuxTfalo,quitait l hommele plusgde l le,un hommed ailleursfort intelligent,trs curieuxde sonpass,et c est au cours d entretienspoursuivis pendantplusde sixmoisque j'ai cherch retrouver la clef des mystresde l le de Pques. Maiscommenonspar situercesmystres.

    Je parleraidedeuxd entreeux : le premier,le plusconnu,est celuidel originede ces fameusesstatuesgantes,qui sont rellementcolossales.Je dois dire quel archologue,ou l ethnographe,exerc la rigueur del apprciationscientifiquedes uvresde l homme,ne peut s empcher d prouverun sentimentd crasementen facede ces monstres.La prsencede ces gantsrassemblssur ce toutpetit bout de terre un lot triangulairede 24, 18 et 16 kilomtresde ctsperdu au milieudes immensitsdu Pacifiqueoffre un desplus surprenantsspectaclesdes ralisationshumaines: qui a rig ces statues, commentles a-t-ontransportes,quelletait leur fonction?

    Le secondmystre, celuiqui m a toujours hant,et auquelj'ai fait allusionil y a un instant, est celuides tablettes.En 1865,je crois, l vquede Tahiti,MgrJaussen, recevaitun singuliercadeauque lui envoyaientles Presfranaisinstalls l le de Pques : une tresse faite de cheveuxde nophytes,enrouleautourd un morceaude boiscommeautourd unebobine.MgrJaussen,droulantles cheveux,constata quece morceaude boistait couvertde petits signes quiavaienttoute l apparenced hiroglyphesgyptiens.MgrJaussentait un hommecurieux, instruit. Immdiatementil envoyades instructionsaux missionnairespourqu ilsrecueillissentd autrestablettesou d autresspcimensde cette criture,

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    s iltait encorepossibled en trouver. Les recherchesfurent couronnesde succs;les Prespurent, en effet, obtenir un certainnombrede ces tabletteset ilsdemandrentaux indignesde leuren donnerla signification.Maisc est ce moment-lqueles difficults commencrent.

    Cesmissionnairesn taient pas des savants,et n avaientaucunenotion surles critures primitives.Ils exigrentdes indignesqu ilsdchiffrassentcessignescommeon dchiffre chez nousun manuscrit,quoiqu ilseussentd comprendreque celaleur tait impossible.Lorsqu onleur donnait lire ces tablettes,lesindignes entonnaientdesespcesde chants,de rcitatifs, et lesPresd enconclureque les indignesne connaissaientplus la significationde cette criture. Je neraconteraipas toutes les tentativesqui ont t faites depuislors pour dchiffrerces tablettes. On en a recueillienviron vingt-deux,un certain nombre sont

    disperses travers l Europeet la plupart sont restesen la possessiondes Presde Picpus.Bienentendu,les indignesde notre poquene connaissentpas lasignification

    des tablettes; ils en ont entenduparler, maisils ne peuventtre d aucunsecourspour leur comprhension.Je me suis beaucoupoccupde ceproblme,mais cen est pas pendantmon sjourdans l le que j'ai pu obtenirdes claircissementsme permettant de formulerune hypothseplausible.

    Auretour de mon voyage,j'ai sjourn pendantplus de deuxans Honolulu,o j'ai travaillau BishopMuseum,le plus grand centre d tudespolynsiennesau monde.L, avecmescollgues amricainset maoris le Directeurdu musetait un Maoride la Nouvelle-Zlande je me suis attel la tche d interprtertoutesles donnes donton pouvaitdisposersur l le de Pques.

    Mesconclusions,en gros, sont les suivantes: l le de Pques a t occupepar des Polynsiens,uniquementpar des Polynsiens,et probablement unepoquequi n est pas trs lointaine.J avaisproposle XIIeou le xme sicle.Lesstatuessont desreprsentationsd anctres. Surcepoint, je croisqu'il n y a aucundoute.La fabricationdeces statuesne prsentaitpasde difficultsinsurmontables,car la plupart ne sont pas en pierre maisen tuf, substancefriable, qui se taillefacilement,surtout lorsqu ilest frais ; exposaux intempries,il durcit. Quantau transport, sansdoutea-t-il d prsenterdes difficultsplusconsidrablesmaisnon insurmontables.D autrespeuples,les gyptiensentre autres, ont transportdesmassestout aussilourdes.Toutefoisle problme secomplique l lede Pquesdu fait de l absenced arbres,et par consquentde bois.Aujourd huien tout cas,l le est tout fait pele.Sansdoutel tait-ellemoinsautrefois,avant quel introductiondes moutons,au sicledernier, ait achevde la dnuder.Cependant,dsl poquede la dcouverte,le capitaineCook, Laprouseet d autres, furentfrapps de n yvoir que des arbustes.Comment alorsles indignesont-ils pufabriquerles traneauxncessairesau transport de ces statues? L existencedebois flotts donne la solutionde ce problme technique.L le a toujours vu

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    s chouersur ses plagesdes bois flotts, et j'ai recueillides lgendeso il taitquestionde cestroncsd arbresdont les indignesse saisissaientavidement, commede trsors envoyspar les esprits et par les Dieux.

    Je ne croisdoncpas querellementon puisseparler de mystre proposdesstatuesde l le dePques. En revanche,les signesquicouvrentles tablettes nousposaientun problmevritablementdifficile. J en ai proposune solution,quia t acceptependantlongtemps.J avaissupposqu il s agissaitnon pas d unecriture, mais de signesmnmotechniques,gravssur des tablettes,et destins faciliter la rcitationde ces trs longs pomes,de ces chantsrythms, quiappartiennent la tradition religieuseet littraire des Polynsiens.Pourne pasentrer dans des dtailsextrmementtechniques,je dirai seulementqu' l appuide mon hypothse,j'avais runi destmoignagesnombreuxet divers.Aprsavoir

    t longtempsreue, cette hypothses est trouvemodifiepar l emploid unenouvelle mthodeque les tudesatomiquesont mise notre disposition: ladatationpar le carbone14, qui permet de dater de faon assezprciseles vestigesdu pass conditionqu ils ne remontentpas plus de 25 000 ans laps detemps apprciable

    Toutes nos hypothsessur l antiquitdes peuplespolynsiensont ainsi dtre rvises.On commence admettre queles Polynsiensont occuples lesbienplustt qu onne le croyait; en proposant commedated arrivedespremiersoccupantsde l lede Pques,le XIIesicle, jepensaistre audacieux.Aujourd hui,on se demande s ilne faut pas reculer toutes lesdatesenvisagesd environmille

    ans. Autrementdit, l le de Pques aurait t occupepar des Polynsiensversle dbut de notre re. Voilqui changebeaucouples perspectivestemporelles:puisquel le semble avoirt occupe celan est pasremis en causeuniquementpar des Polynsiens,il y a donceu unit decivilisation,non pas pendantun demi-millnaire,mais pendantun millnaireet demi. Je sais bien, qu en serendantde la faonqu onsait, l le dePques,Heyerdahlespraitprouverquelepeuplementde cette letait le fait non de gens venus ducontinent asiatique,maisd Indiensde l Amriquedu Sud. C estune thorieparfaitementinsoutenablequ aucun homme de sciencen'a accepte,je dirai mmesi absurdequ aucunsavantn'a pu songer l examinersrieusement.Toutesles traditions de l le,jusqu' la languequ ony parle,appartiennentau sud-estde l Asie.C estl videncemme,et on ne peut la nier, sinonpar dsirde se singulariser.Toutefois,le voyagea t utile en ce sens qu Heyerdahl,justement, a pu ramener des spcimensarchologiquesquiont t soumisau test du carbone14, et c est ainsiqu ona dreculer des dates initialementadmisespour le peuplementde l le. Heyerdahltait en effet accompagn d excellentsarchologues.Ceux-cin ont pas encorefait connatreles rsultatsde leurs recherches,et j en attendsla publicationavecbeaucoupd impatience.D oreset dj,deux d entreeuxont pu m assurerqu ilscroyaient un dveloppementcontinu de la socitpascuane.Leur recherche

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    actuelleconcerneles tapesde cette volution.C est un travail passionnantetqu il fallait entreprendre,mais Heyerdahla rendu la scienceun trs mauvaisservice enessayantde prsenterles gensde l le dePques commedes sauvagesqui conservent encoredes souvenirsde leurpass.Lorsde mon sjour dans l lede Pques il y a vingt-cinqans, j'ai eu beaucoupde mal recueillirquelquestraditionsde la bouchede vieillards dontlesparentsavaientconnula civilisationpascuanelorsqu elletait encore intacte.Aujourd hui,les gens de l lede Pquesne diffrent pasplusquenous des gens du Chili; ilsme font penser des Corses, des gensdu Midi.Ils sont tout fait civiliss; outre leur langue,ils parlentl espagnol; ils n ont qu un dsir, celui d treentirementassimils,et pour euxle pass deleur le est aussilointain, aussitrangerqu'il l est pour nous, mmedavantageIl est assezcomiquedepenserquel-bas,j apparaiscommeunelumire

    pour le pass.A ceux quiles interrogent,les Pascuansrpondent: Bon, coutez,il y a Mtrauxqui est venu voicivingt-cinqans, il doit tout savoir,il a crit unlivre, nous le savons, nousavonslu son livre, alors lisez-le. C est unecurieuseexprienceque d tre, de son vivant, une espcede reprechronologique.Onm'a dit que l-bas, on date les chosesde l'poque de mon voyage.Les gensdisent : A l poqueo il tait l, il y avait telle chose...,on faisait telle chose,maintenanton ne le fait plus. J appris celal annedernire, me trouvant auChilien relationavecdes Pascuansvenussur le continentpour y travailler. Jedoisajouterqu ilsfaisaient desgorgeschaudesdu livre ; certains,en effet, l avaientlu, critiquet le trouvaienttout fait extravagant Pourconclure,je dirai quelesmystresde l lede Pques sontsur le pointd tre dissips.Ils le serontgrceaux travauxdes archologuesdont j'ai parl, travaux extrmementminutieux,puisquel un d euxvient deconsacrerune anneentire l tudedescoupesqu'ila pratiquesafin de pouvoirsuivrel volutionde la culturepascuanetout au longdes centainesd annesqu'a dur l occupationde l le. Je crois aussile problmedes tablettes prs d tre rsolu.Un jeunesavantallemand,M. Bartel, et dessavantsrusses s ysont attels.Commevousle savez,les Russes,en ce moment,s occupentbeaucoupdu dchiffrement des critures qui n ont pas encorelivrleurs secrets. A la lumirede leurs recherches,il sembleraitque mon hypothse

    d unsystme

    mnmotechniquetait trop simple.Sansdoute,

    s agit-il biendecela, mais aussi d undbut d criture qui rappelleplus ou moins le dbut del criture en Egypte.Ce sont, si je puis employercette expression,desbalbutiementshiroglyphiques.

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    un mondeextrmementvaste,une religionafricainecertes, maisen mmetemps,unereligioneuropenne:en unmot, unereligionsyncrtiquequia fonduensemble,nonseulementdiffrentscultesafricains,maisaussicertainescroyances dufolkloreeuropen.On y trouve destraditions normandes,bretonnes,apportespar lescolonsfranaiset adoptespar lesNoirs ony trouvejusqu' desrites maonniques.C est en sommeune espcede conglomratd lmentsde toutes sortes, dominpar les traditionsafricaines.Cettereligionest pratiquepar 90 dela populationhatienne.Les cultes vaudouse pratiquentnon seulementdans les campagnesrecules,maisgalementdans la capitale, Port-au-Prince.Je dirai mmequele vaudoua pris sa forme la plus typique,la plusvive, la plus complexe danslesmilieux urbains. Naturellement,la bourgeoisiequise rclamede la traditionfranaise,de la culture franaise, n yparticipepas. Naturellementaussi,de bonnes

    damesvont consulterdesprtressesvaudou,tout commecheznousellesvontconsulterdes cartomanciennes.Le vaudouest la religiondu peuplehatien.D autrepart, cepeuplese considrecommecatholique,et lorsqueje constateque les neufdiximesde la populationpratiquentle vaudou,je ne veuxpas dire qu ilssontpaens.Tous es vaudouisantssont en effet d excellents catholiques,extrmementpieux.Dans leurpense,il n y a pasde coupureentre la religionqu ilspratiquentet en laquelleils croient,et le catholicismeauquelils s astreignent.Levaudounese prsentedoncpas commeune religionopposeau catholicisme.Les paysanshatienssont tous,je le rpte, detrs bonscatholiqueset ne voientrellementpasde contradiction,d opposition,entre la foi officiellede leurpays et cette foiparticulirequ ilsont hritedeleursanctresafricains.Le vaudou s est constituen Hati la suite d unecarencede l glise. Lesesclaves,importsd Afriqueauxvinesicle, taient baptiss,forcsd aller l glise,maisils ne recevaientaucuneducationreligieuse.Ils sont doncrests fidlesau seul bien qu ils avaientpuemporter, c est--direleurs croyances.Ils y sont restsd autant plus attachsqu ellesleur permettaientde conserverun espoir,et de donner malgr tout unsens leur vie, grceauxquelquesvaleursque cescroyances prservaient.L existencedes esclavestait horrible,abominableet le vaudouleur a apportce qu ilapporte aux classes pauvresd Hati : des motifs d esprance,la confiance,et,surtout, un moyende se distraire, d chapper la ralit.

    Le vaudouse prsentecommele culte rendu un certainnombrede divinitsafricaines,et clbrpar un prtre (ouuneprtresse)autourduquelse runissentde petits groupes,dessectes.Pourpntrerdansle vaudou,la premiredmarcheconsiste donc faire la connaissance d unprtre ou d uneprtresse, gagnersaconfianceafin de pouvoird une part, les interroger et, d autre part, participerauxcrmonies.La chosen est pas facile,car le vaudouest une religionen partiesotrique: les prtres passent par des rites d initiation extrmementlongs,extrmementcompliqus,ils reoivent unenseignementcomplet, pourlequelilspayentdessommesconsidrableset, naturellement,ilsne rvlerontpasvolontiers

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    un trangerdes secrets qui leur ont cotsi cher tant en effort qu en argent.J ai eu la bonne fortune, en Hati, defaire la connaissanced une Franaise,Mme Odette Mennesson-Rigaud,marie un Hatien, et qui, depuis de trslonguesannes, s intresseau vaudou,non uniquementpour des raisonsscientifiques,mais aussiparce qu elleaime le vaudou,parce qu ellecroit en certainsde sesaspects.Grce sonenthousiasme, safoi, ellea russi gagnerla confianceabsolued un certain nombre de prtresses.Elle m a prsent l une d elles,Lorgina Delorge,qui avait,oh non pasun grand,maisun tout petit sanctuaire,situ dans l un des quartiersles plus misrablesde Port-au-Prince, et quandje dismisrable,je voudraisque ce mot voquepour vousla plusprofondemisre.

    C taitdoncun petit sanctuaire,banal,maisdiffrent de ceuxque l on pouvaitrencontrer dans les campagnes,et par l mme intressant; en outre, il tait

    parfaitement authentique. Je dois vousdire ce proposqu' ctdu vaudourel s est dveloppun vaudou touristique, unvaudouspectaculaire.Beaucoupde gensvont en Hatiuniquementpour voir des crmoniesvaudou,etnaturellementla demandeappellel offre, si bien qu un trs grand nombrede prtresse sont en quelquesorte vendusauxhtels; de mcheavecles portiers, ilsorganisentpour les touristes des crmoniesvaudouextrmementspectaculairesetmmebeaucoupplus extraordinairesque les crmoniesauthentiques.Etpourtantle vaudou revt des aspectstrs spectaculaires,sans qu ilsoit besoind enrajouter.Cepetit sanctuaire,au contraire,appartenait unefemmehonnte,quividemmenten espraitun certain gain car il ne faut pasoublierquele vaudouest pour cespauvresgens le seulmoyend ascensionsociale.tre prtre vaudouvousdonnedans la socitpopulaire,dansles bassesclasses, commeon dit,unesituationde premierplan,et vouspermetde gagnerdel argent.Celan empchequ elletaithonnteet, me semble-t-il, croyante,bienqu ilme soit arrivd assisterchez elle ce qu un esprit sceptique,voltairien,aurait puinterprter commedepetites fraudes. Maisenfin, je suis sr qu'au fond elle croyait profondmentl interventiondes esprits.Mon travail d ethnographeconsistait assister toutesles crmonies il y en avait constamment et passerde longuesheuresdanssonsanctuaire flneret bavarderavecelleet sesassistantes; une prtresse

    vaudourgne, en effet, sur un groupede femmesqu onappellehunsi. Ce sont descroyantesqui adhrent la secte, quise mettent sousl autorit de la prtresse,de la mambo,et constituenten quelquesorte le chur lorsdes crmonies.Deplus et c est l essentiel ellessont visitespar les dieux,dont ellessont ditesles pouses; c est ce que signifieleur nom de hunsi. Noustouchonsl l aspectleplus intressantde cette religionet qui en constituele vritablemystre : lephnomnede la possession.

    Cette religionpopulaireest caractrise parle fait que les croyantssont, aucours des crmonies,possds,saisis,par desdieux,desesprits.

    Considronsd abordcesphnomnesdu dehors,commepeuventles observer

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    les voyageurs,le touriste, l ethnographe.En premier lieu ce sont desdanses,defort belles danses sur une musiquemerveilleuse,d origine dahomenne.Lesjoueursde tambours,lestambouriers commeon les appelleen Hati,sont souventde trs grands artistes qui pourraientse produiredans n importequelthtre.Au bout d un certain temps,alors que les hunsi, ces assistantesprtresses, cesservantesdes dieux,sont en train de chanterdes hymnesen l honneurde ceux-ci,l un d eux descend : brusquementune, deux, trois de ces femmess agitent,ferment les yeux,parfois tombentet se roulentpar terre, apparemmentfrappesd unecrised pilepsie.En tout cas,il s agitd unemanifestation nerveuseextrmementviolente; les assistantess empressentauprsd elles,les relvent, essayentd viterqu ellesne se heurtent en se dbattant.Ellesse dbattenten effet, commesi un tre invisibleessayaitde lesmaintenir, de lescapturer. Le vocabulaire

    religieuxhatienl exprimeclairementd ailleurs: on est saisipar le dieu, on estmont parle dieu comme unchevalpar son cavalier. Aussibien les possdssont-ilsappelsleschevauxdesdieux.Enfin,au boutd un certain temps,variableselonles cas,la personnequi paraissaiten proie une crise d hystrie violente,se calme,redevient parfaitementnaturelle,maison s aperoitalors que sapersonnalita compltement chang: elle n est plus la mme, elleest maintenanthabitepar le dieu, elle est le dieului-mme.Une femmepeut ainsise conduireen hommesi elle est possdepar une divinit masculine.Certainsdieuxsontdes gnraux,des dieuxguerriers; monte par l un d eux, elle adoptetoutesles attitudes conventionnellesde vieux soudards,exigeun cigare,du rhum, semet jurer, prend desattitudes trs cavalires,lchedes obscnits; la jeunefille maladivese transformeen vieuxbrisquard A l inverse, unhommepeuttrepossdpar une divinitfminine: sa voixchange,il commenceminauder,exigedes vtementsfminins, se fait parfumer, se met du rouge lvres, et setransformeen grande coquette.Commele Panthonvaudouest extrmementvasteet complexe,les cas de possessionpeuventse prsenter sousles formes les plusdiverses.

    Lemystre, c est prcismentce changementsi manifestede la personnalit:que se passe-t-ildansla tte de ces gens-l? Lorsqu onles interroge, aprs lacrise,ils

    n ont souvenirderien.

    Ilsdisent

    s tre sentismal,d unesorte

    de pesanteur,maisaffirmentqu ilsont oublicequ ilsont pu faire ou dire entat de possession.A ma connaissance,personnen a entenduun possddire qu'il tait conscientde ce quise passait.Faut-ildoncadmettreune perte de la conscience?

    Nousnous trouvonsici en prsenced un phnomnepsychologiqueextrmementtroublant,dont nombrede psychologues,de psychiatres,d anthropologuesse sont occups.Je ne suis ni psychiatreni psychologue,j'ai tout de mmeavancune interprtation.Ellevaut ce qu ellevaut, maisje ne la croispas sansintrt. Il faut tout d abordliminerl hypothsede la fraude. Les possdssontdes croyants, des gensqui ne plaisantent pas,quine jouentpas avecles dieux.

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    Lorsqu ilsassurentqu ilsont oublice qu ilsont fait, je les croisparfaitementsincres.Cependant,lorsqu onobservedes possds,on se rend comptequecetoublin est pas aussitotal qu ilsveulentbien le dire. Je me suis renducomptequ' bien des gardsils avaientfort bonne mmoire; ils posent des questions,demandentdeschosesd unemanirequirvle de leurpart unecertaineconscience.On ne peut donc soutenirle caratreabsoluni de la perte de conscience,ni de latransformationde la personnalit.On ne peut pas nier non plus que cette perteet cette transformationexistentdansunecertaine mesure.Onne peut pasdavantageprtendrequeles possdssoientdes hystriques, desmalades,car il faudraitalors que toute la populationd'Hati en soit compose L exception,en effet, estde ne jamais tre possd.J ai connu des croyants qui me disaient : Jen arrivepas tre possd; je ne saispas ce que j ai, les dieuxne me visitent

    pas. Ce sont ces gens-l qui sont aberrants, qui souffrent. Si la normalitse dfinitpar l attitudegnralede la socit,on peut dire que culturellementles non-possdsne sont pas normaux. liminonsdonc l hypothse, avancepar certains,de la nvrose, del hystrie. LesHatienssont extrmement sains,je croismmeles gens du peuple Hatibeaucoupplus sainsd esprit que nousne le sommes nous-mmes.Les cas d hystrie, defolie sont parmi euxbeaucoupplusrares que parminous.

    Quese passe-t-il? Eh bien, je crois que lapsychologiede l acteurpeut nousdonner la solutiondu problme.Au fond, la possessionest une reprsentation,ellea un caractredramatique.Lesgensdeviennenten quelquesorte desacteurs:ils jouentle rle d un dieu.Ils le connaissentd avance.Chacunsait trsprcismentcequ est un dieu, et peut doncle jouerparfaitement.Seulement,ce rle,ils le jouentavec laplusgrandeconviction,comme ces acteurs il en existequi, eux aussi, oublientleur personnalitau momento, sur la scne,ilsreprsententun hrostragique.Mais cette convictions ajoute,pour les Hatiens,lacroyancereligieuse.Les gens attendent cette visite du dieuet, un momentdonn, dans la danse, danscette espced inconscienceprovoqueet entretenuepar la musiqueet le rythme, ilssentent le dieu arriver et ils s identifient alorscompltement la divinit.La possessionrelveraitainsides processuspsychologiquesquel expriencethtralenouspermetde comprendre.Je ne suisd ailleurspasle seul avoirformulcette hypothse.MonamiMichelLeirisl a reprisedansl ouvragequ'il a consacrau mme phnomnede la possessionen Abyssinie.