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ENDEMIX n° 05 décembre 2013 - février 2014 GRATUIT p. 17 Portrait Dick et Hnatr p. 46 Parcours En route avec le Chapitô p. 12 Grande interview Tim Sameke, ambassadeur de la musique p. 30 Palabres d’écrivain VINCENT VUIBERT Chroniqueur urbain p. 24 Enquête L’ÉCRITURE, LES COURBES DE L’ART

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Découvrez votre cinquième numéro d'Endemix, le magazine culturel de Nouvelle-Calédonie. Au proramme Vincent Vuibert, prix Lagneau 2013, Ajna, Dick et Hnatr, Tim Sameke, les Pirketous et plein d'autres portraits sans oublier les fiches métiers, des rencontres incroyables et les critiques...

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VINCENT VUIBERTChroniqueur urbainp. 24 Enquête

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Directeur de la publication : Chris TatéossianRédactrice en chef : Gaëlle Bessaudou-Perrier ([email protected])Coordinatrice : Claire ThiebautRédaction : Léna Quillier, Frédérique de Jode, Mathurin Derel, Aurélie Cornec, Claire Thiebaut, Charlotte Mestre, Myriam Grandcler, Sylvain Derne, Théo Rouby, Janice.Photographies : Éric Aubry (dont couverture), Éric Dell’Erba, Théo RoubyCorrections : Jean-Marc Estournès, Fany TorrePublicité : Recto Verso, 28.71.17 et Push & Pull, 24 22 49Maquette, réalisation et couverture : Push & Pull, tél. : 24 22 49Impression : Artypo Tirage : 15 000 exemplairesDistribution : Brian Ukéiwé, tél. : 87 31 53ISSN : en cours

Le Pôle Export de la Musique et des Arts de Nouvelle-Calédonie est une association à but non lucratif créée en décembre 2007. Il a pour mission de promouvoir la création locale à l’intérieur et à l’extérieur du territoire en accompagnant collectivement les artistes et en mettant à leur disposition des outils et un réseau-ressources local et international.

Le Poemart :Pôle Export de la Musique et des Arts de Nouvelle-Calédonie27, rue de SébastopolLe Central 310, 98800 NouméaNouvelle-CalédonieTél. : (687) 28 20 [email protected]

La Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie21, route du Port-DespointesFaubourg-Blanchot98800 NouméaNouvelle-CalédonieTél. : (687) 28 65 [email protected]

La bibliothèque Bernheim41, avenue du Maréchal Foch98800 NouméaNouvelle-CalédonieTél. : (687) 24 20 [email protected]

Endemix est publié par :

CRITIQUESMUSIQUE Hnazigu de Kurya Ma Mando et moi de Jean-Luc Leroux Do Not Disturb ! de Oncle Rico All is Silence de Gautama Hyewen des Koulnoué Boys Band Dyna & Family de Dyna

LITTÉRATURE  Un si long battement de coeur de Claudine Jacques Entrez, livre de photographies de Fred Payet

ART SCÉNIQUE L’Air de rien de Gauthier Rigoulot Le plus beau jour de ma vie de Myriam Sarg

EXPOSITIONKo Névâ au centre culturel Tjibaou

RETOUR SURÂnûû-rû âboro

FICHES PRATIQUES La propriété intellectuelle sur Facebook Relation entre artistes et galéristes

PARCOURS En route avec le Chapitô

MÉTIERGrégory Louzier : directeur de salle

LIEULe musée de la Seconde Guerre mondiale

PORTFOLIORetour sur Waan Danse et le K-Muzik

IL ÉTAIT UNE FOISLe hip hop

AGENDA

À SUIVRE

ANNUAIRE

LA CULTURE BOUGE

ON FAIT LE BILAN !

CULTURE WEB Kiss Kiss Bank Bank Geoculture.com Bouturesdeparoles.com Mood Radio

L'ART-PENTEURPar Roland Rossero

ÉVÉNEMENTRetour sur les Assises du livre

GRANDE INTERVIEWTim Sameke, musicien sans frontière

PORTRAITS Olivia Duchesne : écrits et cris Les Pirketous : Wat de fak iz dat?!? Patrice Prudent : tonnerre de rock Dick et Hnatr : le kaneka dans les gènes Landry : un amor de musicien Marc Faucompré : regards croisés Ajna : coup d’stylet ! Chavi : ondes de choc

PAROLESSleeping booking au lycée de Normandie

ENQUÊTE L’écriture, les courbes de l’art Comment écrire un spectacle ? Un CD ? Un livre ?

L’écriture se retrouve partout dans l’art. Endemix est parti à la recherche du processus d’écriture. Existe-t-il ?

PALABRES D'ÉCRIVAINVincent Vuibert, prix Lagneau 2013

QUESTION ÀQuestions croisées sur l’avenir du livre avecJean-Brice Peirano et Christophe Augias

LE CRI DU CAGOU

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éditoIl y a tout juste un an naissait la nouvelle

formule d'Endemix. Ouvert désormais à toutes les disciplines artistiques, votre

magazine vous propose tous les trimestres l'éclairage le plus complet possible sur

l'actualité culturelle du pays. Il s'est ensuite enrichi d'une émission télé et d'une

chronique radio hebdomadaires. Cette dernière pourrait devenir, à partir de la rentrée prochaine, une émission d'une

heure consacrée à l'actualité artistique. Nous y distillerons, comme dans sa formule papier, de la critique, stimulation nécessaire

à toute création. Je profite de ce numéro de fin d’année pour remercier au passage

nos partenaires de la Maison du Livre et de la bibliothèque Bernheim qui nous

accompagnent depuis le début de cette nouvelle aventure Endemix, ainsi que le

Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, la province des Iles, Imagin' Productions,

l'OPT, NC 1ère, Aircalin et tous ceux qui de près ou de loin nous soutiennent dans le

développement de ces différents supports.Et, puisque nous approchons d'une nouvelle

saison, d'une nouvelle année, je transmets tous mes vœux de réussite (et plein de subventions - à bon entendeur...) à ces

artistes qui travaillent tous les jours, se remettent en question, donnent le meilleur

d'eux-mêmes pour vous présenter, à vous public, lecteurs, spectateurs, une création

locale de qualité.Soyez curieux, écoutez, lisez, regardez :

la culture est à votre porte...

Chris Tatéossiandirecteur du Poemart.

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4 La culture bouge Par Gaëlle Perrier

box officeAu mois d’octobre, le Cinécity

accueillait, pour la première fois, deux projets calédoniens : un long métrage, Ni 28, Strate I et un moyen, Les tourneurs de films : le fantôme du Bagne…. Ni 28, strate I de Terence Chevrin a « squatté » les salles pendant cinq semaines (alors qu’il

était prévu pour deux seulement) brassant plus de 2000 spectateurs. Une belle première qui augure de bonnes choses pour les strates II et III. Maxime Le Bras, lui, a préféré offrir au public une seule journée pour découvrir son moyen-métrage, Les tourneurs de film, primé au festival de La Foa. C’est ainsi que le 18 octobre, il l’a présenté en quatre séances et a fait rire pas loin de 300 personnes.Espérons que cet engouement ne s’essouffle pas et que le cinéma calédonien ait encore de belles séances devant lui.

Le concept store Bô accueille dès le 12 décembre sa première exposition. L’artiste peintre Romain Arguence y proposera une

série de tableaux abstraits. Son éducation street art a laissé des traces chez le jeune homme puisque la plupart de ses outils pour peindre reste la bombe et le pochoir. Il reviendra d’ailleurs à son premier amour en « s’attaquant » aux murs du magasin. L’exposition est prévue pour deux semaines, mais pourrait se prolonger pendant l’été. À découvrir au magasin Bô, 27, rue du Maréchal Foch au Centre-Ville.

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Aimé l art

Après plusieurs semaines de concours, la Case des artistes a trouvé son bonheur

avec le logo proposé par l’artiste plasticien Aimé Nangard. Pourquoi ce logo a-t-il retenu l’attention de la structure au milieu de la quarantaine envoyée ? « Tous reflétaient une belle expression artistique. Si celui-ci a retenu l'attention du jury composé des membres du conseil d’administration de la Case, c'est parce qu'il est porteur du sens recherché : un symbole original et identitaire. Mais également parce qu'il répond à des critères de communication : simple, épuré, aisément repérable et reconnaissable, il peut aisément être reproduit sur de multiples supports... »Aimé nous a confié avoir travaillé de longues heures sur de nombreux croquis et dessins avant de se rendre compte que leur complexité empêcherait une utilisation facile et rapide. Quelques heures avant la fin de concours, il a tout changé pour offrir ce logo stylisé.

Les concept store s’exposent !

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Le TOP 20CALéDONIE

Pour la première fois dans le Pacifique, des étudiants en première année de BTS Communication ont participé au

Prix Goncourt des lycéens. Réunis à huis clos le 5 novembre dernier au lycée Lapérouse, ils ont choisi trois titres parmi les quatorze romans sélectionnés par l’Académie Goncourt : Le Cas d’Eduard Einstein de Laurent Seksik, Les Évaporés de Thomas B. Reverdy, L’invention de nos vies de Karine Tuil.Les étudiants avaient eu sept semaines pour lire tous les livres, encadrés et aidés par des professeurs. L’une des élèves, Audrey Bonnard est partie pour la Métropole afin de participer aux délibérations régionales le 12 novembre dernier et proposer l’un des trois romans choisis par sa classe. Mais c’est finalement un autre livre qui a remporté le prestigieux prix : Le Quatrième mur de Sorj Chalandon.

Aka en CAPITALE !

Un concoursen oR

Sur la route du suD

Sousle sunlightdes tropiqueS

l ittérature

m usique m usique

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e xposition

Le Pacifiqueau Goncourt

Qui a remporté le top 3 ce

trimestre ? Quel groupe a mis tout le monde K.O. ? Le suspense n’a pas été de la partie puisque le trois premiers du TOP 20 Calédonie sont restés presque identiques ces dernières semaines. Les Koulnoué Boys Band remporte, sans contestation, la première place avec Hyewen/Vol. 4 tandis que derrière s’accroche l’opus d’Ekoten, Petit d’homme. En troisième place, les fans retrouvent le T.E.L.L. de Sadro. Quels seront les classements de l’été ? À découvrir en mars prochain, dans Endemix !

Insatiable. Un mot qui sied parfaitement à

l’organiste Michel Bénébig et à sa femme Shem dont les différentes tournées dans le monde nourrissent toujours un peu plus leur amour profond pour la musique. Après Black Cap et Yellow Purple, le couple

de musiciens propose un nouveau CD à la vente, Sunlight spécial, riche de 8 nouveaux titres écrits par les deux artistes. À découvrir au rayon Jazz.

Présentée au château Hagen

en juin 2013, la dernière exposition de la sculptrice Aka, Matrice, est partie pour la France le mois dernier. Entre le 14 novembre et

le 5 décembre, les Parisiens et touristes ont pu découvrir les œuvres de l’artiste calédonienne dans une galerie du Marais, mais aussi à la Maison de la Nouvelle-Calédonie. « L'idée était de faire circuler le public d’un lieu vers l'autre et permettre ainsi la découverte d'un endroit inconnu », nous confie Aka. Un beau voyage pour une exposition pleine de charme. La Nouvelle-Calédonie a décidément conquis Paris en 2013.

Le groupe originaire de Yaté, Humaa Gué, sort

son 8e album, Xé ö Gué, qui signifie « notre espace de vie ». Disponible dans les bacs depuis le 5 novembre, il nous entraîne sur les routes du sud grâce au Tchedja, rythme traditionnel de cette région. Les mélanges kaneka et reggae apportent une touche moderne sympathique. À découvrir rapidement.

Le concours des Clés d’or, dont

nous vous parlions dans le dernier numéro, a eu lieu à la fin du mois d’octobre dans l’Espace culturel Eugénie Simone Drouard. Des diplômes mention

assez bien, bien et très bien ont été distribués. Une seule Clé d’or a été offerte à Morgane Vervent, dans la catégorie débutant 2. Quatre médailles d’argent et quatre autres de bronze ont félicité les musiciens en herbe avec une mention spéciale pour Marcel Thiolière qui obtient, en plus de sa médaille d’argent, son diplôme de fin d’études au bout de deux ans de piano seulement. Vivement l’année prochaine !

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Des yeux qui regardent le monde

Créé en 2007, la vocation première du Poemart, c’est l’export. Pour des diffusions ou des résidences de création à l’étranger, le Pôle d’Export de la Musique et des Arts participe au financement (en complément d’autres institutions) et offre aux artistes les contacts de son réseau à l’international. En 2013, neuf artistes ou groupes ont bénéficié de ce soutien pour des voyages vers la France (Jyssé Ukeiwé, Étienne Goa, le groupe Kalaga’la et Soul Sindikate), Manaia group, Brian, Kris Kona et Stéphanie Watt ont été soutenus pour des tournées dans le Pacifique. Enfin, le Poemart a aidé le chorégraphe Soufiane Karim pour deux résidences de création en Asie.

Des ouvertures internationales pour les artistes

Améliorant ses acquis historiques, le Poemart étend son réseau international. Les Flèches de la Musique, par exemple, qui n’auront pas lieu cette année car le concept est en pleine transformation. Elles s’enrichissent d’une véritable dimension « export » pour 2014. Le Poemart invitera des experts et des diffuseurs afin de créer un réseau d’accompagnement, de visibilité et de diffusion pour les lauréats. « Tout ceci est en train de se construire, c’est pourquoi les Flèches de la Musique n’ont pas été organisées cette année.

ON

FAIT Les fins d’année sont propices

aux bilans, à l’analyse des tâches accomplies. Le Poemart profite de la dernière parution d’Endemix en 2013 pour dresser la synthèse de cette année charnière qui a permis la mise en place de nouvelles actions et la construction d’une identité inédite pour le Pôle d’Export de la Musique et des Arts.  

Pour le pays, il était important d’avoir enfin un ouvrage référence sur le kaneka.

LE

BILAN

Nous souhaitons prendre quelques mois supplémentaires pour mûrir notre projet. Les Flèches de la Musique n’étaient devenues qu’une simple émission de variétés extrêmement coûteuse sans aucune retombée concrète pour les artistes. Nous nous devions de corriger cela », explique Chris Tatéossian, le directeur.

Le K-Muzik, la vitrine du kaneka

Le grand défi 2013, c’était le K-Muzik. Le projet est ambitieux et multiple : un plateau musical monté à l’occasion de l’exposition « Kanak, l’art est une parole » présentée à Paris, l’enregistrement et la diffusion d’un CD live de la tournée et la publication d’un livre Kaneka, musique en mouvement. Exporté dans toute la France, vitrine de la musique calédonienne vers la Métropole, ce projet a mobilisé le Poemart pendant plus d’un an et demi. « Il a fallu faire toutes les démarches pour trouver des partenariats

et les collaborateurs adéquats pour l’enregistrement, la fabrication, la distribution, la promotion et la diffusion du CD. Ensuite construire la tournée, la coordonner et la promouvoir. » Le livre a mobilisé tout autant d’efforts. Il est une des pierres angulaires du projet, celle qui présente le kaneka. « Nous ne pouvions pas arriver avec notre projet de tournée et de CD sans expliquer ce qu’est le kaneka, l’origine de cette musique et son ancrage politique. Il était essentiel d’expliquer aux gens à quelle culture musicale les artistes qu’ils allaient voir appartenaient. Et pour le pays, il était important d’avoir enfin un ouvrage référence sur le kaneka. »

« Endemix », la marque du Poemart

En novembre 2012, une nouvelle version du magazine Endemix était présentée au public calédonien. Désormais, support de valorisation de tous les arts de Nouvelle-Calédonie, les 60 pages sont à l’image de la nouvelle ouverture du Poemart, qui n’est

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plus exclusivement concentré sur la musique. Endemix se décline également en émission de télévision, tous les mercredis à 20 h sur NC1ère, et en chronique radio qui pourrait évoluer l’an prochain en une heure d’émission tous les vendredis.

Et, à l’occasion des soirées de lancement du magazine au centre d’Art, les artistes présentés dans la revue sont

invités à proposer leurs actualités au public.

Au service du monde culturel

Relai de la vie artistique locale, avec un site Internet et deux pages Facebook régulièrement mis à jour, le Poemart veille à diffuser un maximum d’infos sur la vie culturelle calédonienne. Agenda, annuaire, fiches artistes sont à la disposition du public comme des professionnels du monde artistique. Pour plus d’interactivité, les artistes peuvent eux-mêmes remplir leur « fiche artiste ».C’est aussi un centre de ressources et de conseils pour les professionnels du monde artistique qui peuvent bénéficier de conseils en management ou en développement, pour la communication, etc. Le Poemart participe aussi à la formation professionnelle.

Deux formations « son » en partenariat avec l’Ifap et le centre culturel Tjibaou ont été organisées en février et en

décembre. Trois jours en compagnie de Christian Bordarier et de Fabrice Absil ont permis de former les acteurs locaux sur le management et le numérique dans la culture musicale.Enfin présent sur de nombreux salons internationaux, comme le Babel Med à Marseille, l’AWME à Melbourne, le MaMA à Paris, le WOMEX en Europe, le IOMMA à l’Île de la Réunion, le Poemart permet la mise en réseau des artistes grâce à un carnet d’adresses bien fourni.

L’union fait la force

Pour permettre toutes ces innovations, le Poemart s’est entouré de plusieurs partenaires locaux, comme l’OPT, la Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie, la bibliothèque Bernheim, le centre culturel Tjibaou, la SACENC, Aircalin, et le centre d’Art de la Ville de Nouméa. Les institutions sont

également très présentes, comme le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, la Mission aux affaires culturelles (MAC), les

provinces Sud et Îles, la Coopération régionale du gouvernement, etc. On compte aussi des collaborateurs de Métropole, comme la Maison de la Nouvelle-Calédonie à Paris et la Direction Générale de l’Outre-mer (DGOM) Ville de Paris, le ministère de l’Outre-mer...Le Poemart a fait peau neuve en 2012 et rodé ses nouveautés en 2013. Ouvrir de nouvelles perspectives et valoriser les richesses artistiques calédoniennes sont les mots d’ordre de l’association, et 2014 en sera une nouvelle fois la preuve.

Par Claire Thiebaut

Ouvrir pour nos talents un horizon de diffusion inédit.

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Culture web Par Gaëlle Perrier

netInter

L’adresse locale

« Kanak - Boutures de paroles » est le premier

webdocumentaire 100 % calédonien. Réalisé par

Emmanuel Desbouiges et Dorothée Tromparent (Pao

Production/Skazy), il nous entraîne dans les coulisses

de la plus grande exposition d’art kanak au monde :

« Kanak, l’art est une parole », au musée du Quai Branly

depuis le 15 octobre dernier. Sur le site

www.bouturesdeparoles.com, on trouvera plus de

100 modules vidéo, autant de photos et de documents

d’archives. Au fur et à mesure de la navigation dans

le webdocumentaire, de plus en plus de feuilles, de

boutures, se dessinent sur l’arbre de parole. À découvrir

sans plus attendre !

Vous avez le vague à

l’âme ou, au contraire,

une envie folle de faire

exploser votre joie ?

L’application Mood

Radio permet de choisir

la musique qui convient

à son humeur du

moment.

Les plus : marrant,

facile d’accès et simple à utiliser, Mood Radio n’est

pas une application indispensable, mais elle permet

de découvrir des musiques différentes, en parfaite

adéquation avec les joies, les peines, les colères qui

nous traversent au cours d’une journée.

Les moins : elle n’existe pas en français et son

fonctionnement dépend du bon vouloir de votre réseau Internet. Si ce

dernier « rame », Mood Radio aussi.

Le site de

crowdfunding

à la mode ?

Kiss Kiss Bank

Bank. Cette

plate-forme de

financement

participatif (le

crowdfunding)

aide à lever

des fonds pour réaliser des projets.

Le plus de Kiss Kiss Bank Bank ? Le site

privilégie les projets « visionnaires,

audacieux ou courageux » et englobe

toutes sortes de métiers comme des

« cinéastes, explorateurs, journalistes, athlètes... ». L’idée

est aussi de faire la part belle aux nouvelles technologies

et « aux idées qui façonneront notre futur au-delà des

tendances imposées ». Le public peut ainsi trouver

son bonheur et soutenir un projet ou une idée qu’il

affectionne particulièrement.

Une seule adresse : http://www.kisskissbankbank.com

Salon du livre 2013 : la Fédération interrégionale du livre et de la

lecture (FILL) présente son dernier-né numérique, Géoculture, une

application de géolocalisation pour créer une carte littéraire de la

France à l’aide d’extraits de romans, de poèmes ou encore d’essais.

Ces derniers sont issus d’œuvres du patrimoine littéraire ainsi que

de la création contemporaine. Par exemple, si vous recherchez des

informations sur la Bretagne, vous découvrirez une citation de

Marguerite Eymery (1860-1953) qui concerne l’île de Sein : « À dix

heures, on arriva sur Ar-men. Je le sentis, car ça roulait beaucoup.

Dans ces endroits, la mer est perpétuellement démontée... ». Géoculture

ne recense, pour le moment, que 419 extraits issus de 246 œuvres.

C’est un projet participatif, donc n’hésitez pas à vous joindre à cette

aventure en vous rendant sur le site lafrancevueparlesecrivains.fr,

le relai web de cette application.

> Un fichier lourd à envoyer ? Votre travail à partager ? La solution la plus simple : wetransfer.com ! Une interface épurée et efficace avec quatre entrées seulement : l’adresse mail du destinataire, la vôtre, le fichier (2 Go maximum) et un message (facultatif). Pas d’inscription, entièrement gratuit, WeTransfer est le site pratique à mettre dans ses favoris.

> Retrouvez sur France Culture l’excellent reportage consacré à Nouméa, dans la collection Villes-Mondes. À réécouter en podcast, sans oublier les photos et les sons additionnels riches et intéressants.

EN PL

US !

COMMENT LIRE UN QR CODE ?

Tapez QR Code dans le store de

votre smartphone et choisissez

un programme (ex. QR Droïd pour

Androïd). Activez l’application,

scannez le QR Code et le tour est

joué. Attention, il faut être connecté à

Internet pour pouvoir lire un QR Code.

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La chRoniQUe de « l'aRT-peNTEuR »

in septembre, me rendant en art-penteur patenté au théâtre de l’Île, je pensais à une phrase tirée de L’Homme qui aimait les femmes de François Truffaut : « Les jambes des femmes sont des compas qui arpentent le globe terrestre en tous sens, lui donnant

son équilibre et son harmonie ». Cette réflexion, pouvant s’appliquer à tous les arts, n’était pas fortuite car ce même Truffaut, peu après, évoluait sur scène en compagnie du maître Alfred Hitchcock pour une réalité fantasmée en faux polar et vraie leçon de cinéma. Une belle réussite ciné/théâtrale à ne pas rater avec une interprétation mimétique et troublante de ces trois monstres sacrés, Madame Hitch étant en embuscade. Dans cette série « planches », tout était superbement ficelé : suspense, intelligence du propos, montée en tension et rideau… de douche. Douché fut également le spectateur curieux avec la dernière pièce de Pierre Gope au Mont-Dore car ses Échos du mensonge ont fait résonner de belle façon les injustices et les dysfonctionnements communautaires qui gangrènent notre pays. Engagé, cru, salutaire et pessimiste, l’homme de Maré nous a submergés avec le meilleur. Graine majeure du SILO Pessimistes aussi deux films remarquables sur les écrans du City. Tout d’abord The Place Beyond The Pines de Derek Cianfrance avec une sublime tragédie en spirale où s’engloutissent inexorablement des générations de pères et de fils reproduisant les fautes du passé. Puis avec une surprise locale. Malgré un manque de moyens probants, mais avec un gros cœur passionné, NI 28 de Terence Chevrin a

montré, dans une autre catégorie, qu’un cinéma calédonien de genre était en marche. Et qu’il passera la vitesse

supérieure prochainement. Le prix Lagneau, lui, couronnant un jeune talent littéraire, a trouvé sa vitesse de croisière avec Chroniques de la mauvaise herbe de Vincent Vuibert. Une croisière virant à la plongée dangereuse dans les bas-fonds urbains où une jeunesse en chute libre cherche la rédemption par tous les biais. Plume mouillée dans l’acide – celui qui fait décoller et retomber bien bas – ainsi qu’un style bien trempé, lui aussi, en ont fait la graine majeure du dernier SILO. La graine chorégraphique de Sthan Kabar-Louët, elle, a germé depuis longtemps et sa troupe s’orne au fil des ans de nouvelles pousses vivaces. Figures In, son dernier spectacle, était la preuve dansante d’un parcours qui traverse désormais les océans grâce à une appropriation exigeante de l’espace scénique, à des décors à corps et accords, sans oublier une utilisation musicale renforçant la gestuelle océanienne. Cirque Constance Plus que les figures, ce sont les visages qui passionnent Jean-Marie Ganeval avec Visage Paysage, sa dernière exposition itinérante. Hache tendre et têtes de bois, pourrait-on dire, car sa sculpture est délicatesse en animant la matière inerte. D’une même lignée du bois, il extirpe des regards, des faces, des présences nous rappelant que notre tronc est définitivement commun. Pour finir, revenons aux femmes, funk de surcroît, celles qui chantent et nous enchantent depuis tant d’années. Question nouveauté, il y avait une humoriste férocement drôle, plus fuck que funk. Cependant, son solo aurait mérité un peu plus d’émotion et moins de « cirque Constance » Notre coup de cœur est plutôt allé à Laura Mayne ainsi qu’à une autre native, celle-ci du Brésil, la bondissante Flavia Coelho. À la voir bouger et sauter tel un feu follet sur scène, Truffaut a rappliqué avec ses « jambes des femmes qui sont des compas... ». Elles sont comme cette chronique : à suivre…

L’intersaison est une période rêvée pour l’art-penteur, celui qui lézarde à travers les arts. Au menu, un off à la Hitchcock, un ciNIma calédonien, un écrivain en herbe ou, encore, des retours de Femmes… Funk.

Engagé, cru, salutaire et pessimiste, Pierre Gope nous a submergés avec le meilleur.

Par Roland Rossero

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10 Événement

C ’est dans le cadre du premier Festival des arts du pays « Culture

et citoyenneté » que le gouvernement a organisé les deuxièmes Assises du livre. Dans la boîte à outils du citoyen, le livre est une clé pour comprendre

la société, support intemporel de la démocratisation des idées. « Le livre est vecteur de savoir ; il est support de mémoire. Il est porteur d’une vision commune de l’histoire du pays », affirme Frédéric Ohlen, président de

la MLNC. Réhabilité dans toute sa richesse, le livre pouvait

dès lors être au cœur de l’attention.

Les plumes et les langues se sont déliées à l’occasion des Assises du livre et de la lecture les 13 et 14 septembre derniers. Réunis à la Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie (MLNC), auteurs, éditeurs, libraires, bibliothécaires et pouvoirs publics ont échangé pendant deux jours pour établir l’état de santé du livre calédonien.

Les Assisesdu

Une filière encore debout !

2013Livrel ittérature

Seuls 13 % des ménages calédoniensachètent au moins un livre par an.

L’historique des Assises

D’entrée, tous les participants se sont accordés sur l’utilité de ces Assises, les précédentes (et uniques) remontant à 1993. Prometteuses, elles avaient débouché sur la création de l’association Lire en Calédonie (LEC) qui lutte encore aujourd’hui « contre l’exclusion et l’illettrisme et promeut le livre jeunesse et la lecture ». Plus récemment, en 2009, le rapport Tertius, commandé par le gouvernement, avait fléché « des orientations de politique publique en matière de livre », avec notamment la validation de la création de la Maison du Livre. En dehors de ce grand acquis, ce rapport est resté quasi lettre morte. En 2013, la situation du livre est préoccupante et le gouvernement est à nouveau à l’initiative de ces rencontres au chevet des écrits du Caillou.

Prise de parole des associations. Ici, Juliette Maes pour Lire en Calédonie.

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Les institutions ont échangés sur leurs politiques culturelles en faveur du livre. Ici, Christiane Terrier, Ville de Nouméa, Sylvie Charmant, Mission aux Affaires Culturelles (MAC), et Jean-Baptiste Friat, province Sud.

Patrice Dion, vice-recteur et Frédéric Ohlen, président de la MLNC.

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Faut-il sauver le livre calédonien ?

Il a d’abord fallu rafraîchir le bilan du livre et de la lecture en Nouvelle-Calédonie. Malheureusement, les chiffres de l’ISEE dressent un portrait bien terne de notre consommation littéraire. « Seuls 13 % des ménages calédoniens achètent au moins un livre par an. L’acheteur type vit en province Sud, en zone urbaine, et provient d’une catégorie socio-professionnelle élevée », apprend-on des statistiques. Paradoxalement, la production d’ouvrages se porte bien, avec la parution d’une centaine de nouveautés par an. Du côté des bibliothèques et des médiathèques, la fréquentation est satisfaisante, avec un peu

Le livre est porteur d’une vision commune de l’histoire du pays...

plus de 17 000 inscrits sur tout le territoire. D’autant que ces chiffres ne reflètent pas totalement la réalité. « On ne compte que les abonnés, mais la fréquentation des établissements englobe aussi des lecteurs fidèles non abonnés qui viennent lire sur place et qui ne sont pas comptabilisés », précise l’ISEE.

Lire en public

Les Calédoniens achètent donc peu, et profitent des centres de lecture publique pour consulter et emprunter des ouvrages. Forts de ce constat, les pouvoirs publics ont mené une réflexion sur le soutien qu’ils peuvent apporter à ces structures. Le gouvernement tente d'acter une politique volontariste, mais rappelle que « la culture est une compétence des provinces et des communes ». Jean-Baptiste Friat, directeur de la Culture de la province Sud, peut alors présenter les actions de 2012. « Trois nouvelles structures ont été créées : une Maison du Livre et de l’Informatique (MILI) à l’Île des Pins et deux nouvelles

médiathèques à Yaté et Thio. » En province Nord, la direction de la Culture a soutenu des actions itinérantes en tribus, ainsi que la création de deux annexes de la bibliothèque Bernheim, à Koné et à Poindimié. Dans les Îles, le bilan est moins satisfaisant, seule la Fête du livre a été organisée l’an dernier.Malgré ces actions localisées, tous les acteurs déplorent l’absence de politiques globales à l’échelle du pays. La

bibliothèque Bernheim est en effet le seul établissement qui se développe sur l’ensemble du territoire. Dès lors, une (bonne) vieille idée du rapport Tertius ressurgit : mettre en place un conseil Consultatif du livre pour mutualiser les efforts et favoriser le dialogue.

« C’est un métier que de faire un livre »

Autre champ de réflexion de ces Assises : la professionnalisation de la filière livre. Nicolas Kurtovitch, au nom de

l’Association des écrivains, pose la question de la valorisation des auteurs en Nouvelle-Calédonie. Valorisation financière d’abord. « Un auteur ne touche que 5 % du prix public de vente d’un livre, quelques centaines de francs par mois tout au plus. » La province Sud a mis en place des aides à l’écriture et à l’édition, mais dans les autres provinces et au gouvernement, les soutiens financiers sont en constante diminution. Des voix s’élèvent pour aborder aussi la valorisation sociale et symbolique des auteurs. « Il est important de soutenir la littérature calédonienne en local et vers les pays francophones, France en tête de liste », entend-on d’un côté. « Il faut créer du lien entre les différents pays, développer des scènes littéraires, favoriser la diffusion en milieu scolaire et universitaire et soutenir la promotion », insiste-t-on de l’autre. Concernant l’édition, la bête noire est l’auto-édition. Elle court-circuite toute la chaîne de fabrication du livre. Des campagnes de soutien envers les éditeurs professionnels, destinées à valoriser leur rôle d’accompagnement des auteurs et encourager la diversité des éditions et des langues, sont envisagées. On déplore également l’absence d’opérateur majeur et la fragmentation de l’édition entre une quarantaine d’éditeurs associatifs et/ou institutionnels ou auto-éditeurs.Enfin, dernière étape dans la diffusion du livre, les bibliothécaires et libraires doivent être des professionnels, issus de formations adéquates pour valoriser les ouvrages et accompagner les lecteurs.

Vers un nouveau chapitre ?

La filière livre n’est pas dramatiquement en danger, mais les professionnels rencontrent tous des difficultés qui pourraient s’aggraver si des politiques territoriales n'étaient pas mises en œuvre pour soutenir les professionnels et développer le lectorat sont les deux axes qui ont été étudiés pour faire du livre un objet indispensable du quotidien.

Par Claire Thiebaut

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p. 12 Grande interview

Tim Sa meke« La culture n’a pas de couleur,

elle n’a pas de frontière. »

Endemix : Vous êtes connu comme leader de la troupe We Ce Ca, qu’est-ce que cette aventure représente

pour vous aujourd’hui ?Ça c’est mon bébé ! Quand je suis parti du Wetr on m’a pris pour un fou. Le défi était de rassembler des jeunes

de toutes les aires coutumières ! Il fallait juste le faire avec respect et humilité. À l’époque, en 1996, c’était un projet initié et financé par la province Sud pour

accueillir les touristes. Et je tiens à rendre hommage à Françoise Fradet qui était à la direction de la Culture.

Elle était à l’écoute de la culture kanak et a énormément contribué à la réussite de We Ce Ca. Aujourd’hui, on parle

de destin commun, mais en 1996 elle y a cru et ce n’était pas évident.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées à l’époque ?Quand il a fallu trouver un nom, nous avons rencontré les

coutumiers du pays Djubéa-Kaponé. Nous avons fait la coutume et Tito Ticouré est parti avec le tabac demander

à tous les grands chefs du Sud. C’est eux qui nous ont donné We Ce Ca. Il faut donner raison au pouvoir

spirituel de la coutume, à sa force. On a rencontré des problèmes mais We Ce Ca est toujours là.

Tim Sameke a marqué le monde de la musique et de la danse calédoniennes avec la troupe We Ce Ca et des tubes comme

Waipeipegu. S’il est moins présent dans les médias aujourd’hui, il n’en reste pas moins une cheville ouvrière de la culture.

Rencontre avec un artiste qui œuvre aussi derrière la scène, dans son rôle de président du conseil

d’administration de la Sacenc.

Nous sommes tous appelés à construire un même pays pour nous et nos enfants.

musique

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We Ce Ca était-il un moyen de revendication pour la culture kanak ?Au début, quand on a commencé, les jeunes venaient avec des drapeaux Kanaky, je leur ai dit : « Non. Si vous voulez faire de la revendication politique, allez vous inscrire dans des partis politiques. Ici on vient pour la culture et elle n’a pas de couleur, elle n’a pas de frontière ». Une culture est faite pour être partagée. C’était ça, l’esprit de We Ce Ca. On est fier de notre culture mais cela ne sert à rien d’en être fier si on ne la partage pas.

Où en est aujourd’hui votre composition musicale ?Pour moi, la musique comme la danse, est un sacerdoce.

Demain si je ne danse plus ou ne fais plus de musique, si je ne crée plus de ponts avec les autres, je suis malheureux. J’ai peut-être quitté We Ce Ca en 2006 et commencé les cours dans les écoles en 2008, mais je n’ai jamais arrêté de composer. Je sors à peu près un album tous les deux ans, le dernier était en 2012.

Tout le monde vous connaît en tant qu’artiste mais peu de gens savent que vous militez pour la promotion de la culture, notamment auprès des scolaires.Si tu veux valoriser ta culture, la faire reconnaître, il faut la partager. J’ai d’abord fait un triste constat : il y a un déficit d’amour de la culture, en particulier chez les Kanak. Quand je parle d’amour, je sous-entends le besoin de la montrer. C’est pour ça que j’ai voulu travailler dans les écoles. Aujourd’hui, quand tu donnes le choix

Tim Sa meke

Tim Sameke est né à Lifou, à la tribu de Kumo en 1964. Après avoir commencé sa scolarité sur l’île, il prend la direction de Nouméa pour terminer ses études. Il intègre la troupe du Wetr dans les années 80 avant de la quitter pour créer la sienne : We Ce Ca. En parallèle, il compose de la musique et sort pas moins de dix albums dont certains tubes, comme « Waipeipegu », sont joués un peu partout dans le Pacifique. Père de cinq enfants, Tim Sameke est aujourd’hui intervenant culturel dans les écoles et poursuit sa carrière artistique. Il est aussi président de la SACENC et de l’association Caledonia +687, porteuse du projet de festival culturel du même nom en 2014.

BIO EXPRESS

entre le pilou ou la zumba, les gosses choisissent la zumba. Pour faire venir les jeunes à la culture traditionnelle, il faut passer par la modernité. C’est pour ça que j’ai fait de la fusion avec des morceaux comme « Waipeipegu ». Depuis mes débuts, j'ai toujours fait ce travail de mélange des rythmes traditionnels et des styles venus d'ailleurs.

En tant que président de la SACENC, quel regard portez-vous sur la production musicale calédonienne ?On ne fait pas de la musique pour soi, ce n’est pas suffisant. Il faut travailler avec les autres, développer les échanges et être ouvert. Et c’est ce qui se passe aujourd’hui. Beaucoup d’artistes font cette démarche. C’est en échangeant et en partageant que l’on arrive à évoluer.

Vous avez d’ailleurs un projet pour promouvoir cette belle idée de cohésion sociale…J’ai contacté une vingtaine d’artistes de différentes communautés ou générations avec des styles de musique variés... J’ai proposé à chacun d’écrire une chanson dans sa langue maternelle sur le thème du destin commun pour qu’ils la partagent ensuite avec un autre artiste. Expliqué en français, les gens ne saisissent pas toujours l’idée, mais en langue certains mots permettent de mieux exprimer cette idée profonde. Ces chansons seront enregistrées en studio – le travail a déjà commencé – pour une sortie d’album prévue fin mars 2014.

Qu’attendez-vous de cet album collectif ?Le vrai support de cet album sera un festival au centre culturel Tjibaou. Lors de la coutume que j’ai présentée à Emmanuel, le fils de Jean-Marie

Il faut créer une culture commune

calédonienne pour l’enraciner dans ce pays.

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Tjibaou, pour lui expliquer le projet, il m’a donné une date, celle de la fête de l’igname en fin mai, et là, ça a fait tilt. Il n’y a pas de hasard. Pour moi, cette poignée de main, c’est une nouvelle espèce d’igname à cultiver. Cette espèce, tout le monde doit la cultiver et pas seulement les Kanak. Cette nouvelle espèce a des interdits : plus de haine, plus de violence. À la place, le vivre ensemble. Et quand il m’a proposé cette date, je me suis dit qu’il fallait rassembler toutes les communautés autour de la musique, de la danse mais aussi de la gastronomie. Que ce soit un festival culturel au sens large. Un festin commun.

Avez-vous un nom pour ce festival ?Le nom prévu est Caledonia +687. La date calée entre les élections municipales et provinciales nous permettra d’offrir un moment de partage. C’est une façon de dire : que l'on soit kanak, tahitien, wallisien... ou tout simplement calédonien, nous avons tous un

même et unique code. Nous sommes tous appelés à construire un même pays pour nous et nos enfants. Pour moi, Caledonia +687 a le même esprit que Melanesia 2000 : s'unir pour s'affirmer. À l’époque, c’était pour l’affirmation de l’identité, de la culture kanak. Aujourd’hui, on parle de destin commun, de citoyenneté, mais cette citoyenneté ne peut exister sans culture commune calédonienne. Il faut la créer pour l’enraciner dans ce pays.

Par Mathurin Derel

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14 Portraits

lle dit d'elle-même qu'elle est une grande timide. Pourtant, un jour, Olivia Duchesne a osé. Oser changer de cap, de destin. L'étudiante a laissé

tomber son cursus de biologie pour reprendre des études de lettres et vivre sa passion du théâtre. « Je pense que j'avais cette envie en moi depuis longtemps, confie Olivia, mais la rencontre avec Les Strapontins, la troupe de théâtre de l'Université de la Nouvelle-Calédonie, a été déterminante ». À tel point que la jeune femme décide en 2002 de quitter Nouméa, direction l'Université d'Aix-en-Provence pour poursuivre ses études littéraires en maîtrise. Une fois encore, elle ose, en passant en 2003 le concours d'entrée au Conservatoire national de région de Marseille. « J'avais tellement l'impression d'avoir raté les sélections que je me suis inscrite en DEA. » Erreur d'appréciation puisqu'elle est acceptée ! S'ensuivent des années intenses de rencontres et d'expériences où la comédienne gagne en maturité. Olivia mène de front ses études, ses cours au conservatoire, des ateliers de théâtre. Des années qui la conduisent notamment à jouer avec la compagnie Le Bruit des Hommes dans Les 7 portes de Corto et à mettre en scène Rouge, noir et ignorant d'Edward Bond. « Les pièces d'Edward Bond ont trouvé une résonance en moi puisque, en 2009 à mon retour en Nouvelle-Calédonie, j'ai

mis en scène Si ce n'est toi. Mais j'avoue qu'aujourd'hui je me détache de son théâtre radical car il faut être d'une grande honnêteté et innocence pour avoir la légitimité de jouer ses textes ».

Une artiste vraie

C'est en Nouvelle-Calédonie qu'Olivia Duchesne prolonge depuis cinq ans sa carrière, avec sa compagnie de théâtre cris pour habiter Exils. Un nom poétique qui renvoie à cette notion d'errance qui l'interpelle. Où les cris riment avec écrits et cette envie irrépressible de passer à l'écriture. Sauve-toi Pinocchio ! est sa première pièce en tant qu'auteure, sur le thème de l'homme marionnette et la question de la liberté. Elle la met en scène et la joue au théâtre de l'Île en 2010. Dès lors, ce travail d'écriture ne la quitte plus. Elle enchaîne avec J'habiterai la nuit. Un monologue poignant – mis en scène par Alexis Fichet, joué en Nouvele-Calédonie, en Métropole et en Afrique – qui révèle l'histoire entre réalité et fiction d'un vigile de nuit dans un théâtre. Un texte qui sera bientôt publié aux Éditions Madrépores. « J'ai toujours été intriguée par les gens qui restent au bord d'un monde, à l'image de ce vigile qui est présent mais regarde dans une autre

Elle a récemment interprété le rôle de Mémé Anita, dans Retour de flamme, une pièce qu'elle a créée et mise en scène. Olivia

Duchesne est une femme passionnée qui a trouvé sa voie sur les planches et dans l'écriture. Une artiste qui donne à voir autrement.

Écrits et crisDucHesNeOlivia

Edirection que celle des spectateurs. » Sa dernière création, Retour de flamme, a enflammé en mars dernier le public du théâtre de l'Île, avec comme fil conducteur la famille, « le lieu le plus doux ou le plus dangereux au monde ».

Olivia Duchesne aime donner à voir une autre vision du monde qui nous entoure. À la question récurrente : « Est-ce qu'elle se sent avant tout une artiste calédonienne qui écrit des textes calédoniens ? », elle répond : « Le fait d'être d'ici influence certainement mon travail, les textes que je choisis de mettre en scène ou les histoires que j'écris. Mais ce n'est pas la question qui m'obsède. Un artiste ne peut être que lui-même ».

Par Frédérique de Jode

J'ai toujours été intriguée par les gens qui restent au bord d'un monde.

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Préparez le paratonnerre, rentrez les animaux et les plantes ! Une tempête de riffs débarque dans les bacs ! Avec Electric Storm, son premier opus solo, Patrice Prudent montre qu’il est bien un enfant du rock !

arce qu’ils voulaient passer à la vitesse supérieure et changer de cap, Mimi et Pascal, les membres « historiques » du groupe ont recruté Olivier, Benji, Cédric et David qui s’est aussi chargé de la réalisation

de l’album. Pour Mimi, « les jeunes ont apporté quelques riffs pas piqués des vers et une sacrée énergie sur scène. David nous a permis de faire ce qu’on voulait. Il a repris certains morceaux de zéro, y a ajouté une touche d’électro par-ci, un peu de pop par-là et une fraîcheur qui nous manquait ». Au programme, du dubstep, du trip-hop, des morceaux plus soft qui font penser à Oasis et un duo avec Marithé Siwene qui confirme qu’elle DOIT faire un album. Pour les textes, beaucoup d’amour, de franglais et même du japonais ! « On écrit comme

ça vient. Ce qu’on cherche surtout, c’est de faire vibrer les gens sur une émotion. Que les paroles collent à la musique pour les emporter. » Un pari gagné pour les Pirketous, surtout en live où ils se muent en diables bondissants infatigables. Ceux qui ont vu leur tournée de promo dans les bars de la capitale peuvent le confirmer. Une tournée qu’ils veulent continuer dans le Nord d’ici à la fin de l’année, avant d’embrayer sur la réalisation des clips, l’écriture du deuxième album et peut-être un petit stop chez nos voisins anglophones. En espérant que d’ici là, ils auront fait des progrès en « aurtograf » !

Par Charlotte Mestre

PiRkeTousWat De Fak Iz Dat?!?!

LEsmusique

musique

Que les puristes anglophiles nous pardonnent, c’est écrit comme ça sur le disque. Wat De Fak Iz

Dat est le premier album des Pirketous, un groupe de rock un peu fâché avec l’orthographe et la

linguistique qui nous propose de « l’électro pop rock pour faire des bébés ». Rien que ça !

P

uitare négligemment posée sur l'épaule, Patrice Prudent apparaît très à l'aise sur la jaquette en noir et blanc de son premier album solo, Electric Storm, sorti le 13 septembre dernier. Rien d’étonnant car, à 31 ans tout juste, ce prof de musique, qui a monté sa propre

école, est loin d’être un novice du rock. Musicien – il joue de la guitare électrique, de la guitare

acoustique et de la basse – et chanteur, Patrice s'est illustré dans de nombreux groupes comme Escape, avec lequel il a sorti un album, Trias ou encore Daddy Kool, « des groupes à la sensibilité

musicale un peu différente », précise l'artiste. Ces dernières années de tournée sur les

scènes calédoniennes et ses compétences de musicien touche-à-tout lui ont pavé le

chemin vers une première expérience solo. « J'avais envie de mettre dans cet album un peu de toutes ces influences qui m'ont

construit comme musicien », confie l'auteur, compositeur et interprète de ce premier

opus plutôt rock progressif. Electric Storm est un projet qui a mûri pendant plus de

trois ans, sauf le titre Second Breath, écrit pendant les études du rocker en 2004. Essentiellement construit

autour de la guitare électrique, l’album offre aux amateurs du genre l'occasion de saisir à la

volée quelques jeux de cordes endiablés.

Par Myriam Grandcler

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Revenir aux fondements du kaneka pour délivrer un message de paix, tel est le pari du treizième album de Dick et Hnatr, Deko pareu ri ci rane. À l’aube de 2014, le célèbre couple de Maré participe à leur échelle à la construction de leur pays.

Le kaneka dans les gènes

LA MUSIQUE EN HÉRITAGEChez les Buama, la musique est une histoire de famille. Côté parents, bien sûr, puisque Dick et Hnatr sont mari et femme. « Parfois c’est un peu compliqué, admet Dick, mais c’est souvent avantageux. On se connaît bien, on peut se dire les choses. Et puis on partage beaucoup. Quand on est à la maison, on a une idée qui vient, on en parle, on la travaille. » Côté enfants aussi. Leur fille fait les chœurs sur leurs derniers albums et sur Deko pareu ri ci rane, leur fils chante deux morceaux qu’il a lui même composé et sur lesquels ses parents font les chœurs. Une façon de passer le témoin en douceur.

eko pareu ri ci rane, comprendre ici « Il ne faut pas avoir peur d’aimer ». Le message du treizième album de Dick et Hnatr est clair : à l’heure du destin commun, mais

aussi à la veille des élections cruciales de 2014, le couple maréen sonne les trompettes de la réconciliation. « On veut dire aux gens qui nous écoutent qu’il ne faut pas avoir peur de l’autre, nous confie Dick. En tant que Kanak, on grandit en entendant qu’on est inférieur aux autres. Du coup, on pense que les autres sont nos ennemis. Ce sont ces stéréotypes, ces préjugés qu’on veut effacer parce que nous sommes en train de construire quelque chose pour nous. » Cet engagement dans la vie de leur pays, Dick et Hnatr l’ont toujours eu. Déjà, en 2001, C’est qui qui paye ? avait montré la voie. « À notre échelle, on participe à la vie de la cité, on observe, on porte une parole. Je suis convaincu que la musique peut contribuer à la construction du pays en posant un autre

regard, en aidant les gens à mettre en application tout ce qu’on dit sans jamais le faire. »

Simplement kaneka

Besoin de revenir aux fondamentaux ou envie de faire plus simple pour une meilleure distillation de leur message... Deko pareu ri ci rane est un vrai retour aux sources du kaneka. « Quand on

a fait beaucoup d’albums, on a envie d’autre chose, de nouveaux sons, de tester d’autres voies, explique Dick, aussitôt appuyé par Hnatr, « mais on avait besoin de prendre du recul et

de faire le tri dans les instruments ». Exit donc les claviers et place à ce qui fait la base de cette musique : les percussions, les cordes et la rythmique. Même envie de simplicité en studio : rester au plus près des créations originales en les retravaillant très peu. Cette méthode de travail, c’est la marque du directeur artistique métropolitain Kamel Zekri avec qui le couple a déjà collaboré lors de leur précédent album. L’auteur

calédonien Joël Santino a également participé à l’aventure en travaillant sur les textes. Du kaneka fait par des non-Kanak ? « Mais c’est ça la musique ! C’est s’inspirer les uns les autres. Le kaneka, c’est la musique des Kanak mais elle n’appartient pas aux Kanak. On l’a créée mais elle est à tout le monde. Les Calédoniens exilés en France, ils écoutent ça et ils disent, « c’est la musique de mon pays ! » » N’ayons pas peur d’aimer, de partager, de vivre ensemble... la musique !

Par Charlotte Mestre

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À notre échelle, on participe à la vie de la cité, on observe, on porte une parole.

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andry est là, présent, frais et heureux. Il savoure chaque seconde de sa vie ensoleillée. Parce qu’il respire cette jeunesse

qui sait se faire plaisir en jonglant avec toutes les passions qui l’animent.Originaire de Lifou, Landry grandit dans la capitale où il suit des études au gré des mutations professionnelles de son père Mya, célèbre chanteur du Caillou. Malgré l’attachement très sain qu’il porte à ses parents, Landry a aujourd’hui choisi l’exil. Le jeune homme vit entre le territoire et la Métropole où il suit, avec rigueur mais bonne humeur, des études poussées en musicologie option jazz.Avant la fin de l’année, il promet sa première sortie dans les bacs : Amor, un EP de six titres, produit avec l’aide des BB4. C’est eux qui ont presque

réussi à faire oublier à Landry son furieux penchant pour la musique « très pointue » en lui proposant des titres plus légers, plus « soleil ». « J’ai tendu l’oreille sur des morceaux zouk, ragga, kizomba avec les BB4 et j’ai fini par avoir envie non seulement d’aimer, de comprendre, mais aussi d’adhérer. »Le jeune artiste attend la sortie de son album en Nouvelle-Calédonie pour repartir valider ses acquis en métropole, « parce que je ne souffre pas d’être loin au contraire ! Je préfère représenter ma culture là-bas ! ». Landry est un convaincu séduisant. Très séduisant même. La justesse et la promesse de sa voix peuvent en témoigner, soyez patients ! Ce ne sera que de l’Amor au bout du disque.

Par Janice

Regards croisésMarc Faucompré est un tresseur de liens. À la tête de l'association Tuburin, ce plasticien œuvre aux échanges entre la Nouvelle-Calédonie et le Vanuatu.

art visuel

MaRcaucompRéF

LaNdRy Un « Amor »de musicien

Il a hérité du sourire de son célèbre papa, Mya, mais aussi de sa voix « soul and blues ». Le tout transcendé par l’audace de sa jeunesse.

Landry, déterminé, annonce son premier EP pour la fin de l’année.

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musique

ébut décembre, Marc Faucompré réunit le travail d'une vingtaine

d'artistes de Nouvelle-Calédonie et du Vanuatu à Port-Vila, pour une exposition collective inspirée de la grande éruption volcanique qui a eu lieu sur l'île d'Ambrym, il y a un siècle. L’artiste a le sens du collectif ; ce n'est pas pour rien si les échanges avec l'archipel voisin sont au centre de sa démarche. « L'artiste occidental a souvent un ego surdimensionné. Il cherche toujours à se distinguer, relève Marc Faucompré. À l'inverse, les Vanuatais

craignent souvent de se mettre trop en avant par rapport à la collectivité. Il a fallu qu'ils demandent aux coutumiers s'ils pouvaient parler de l'éruption d'Ambrym ». Lui n'hésite pas à puiser son inspiration dans la société mélanésienne, son organisation, ses valeurs. Depuis sa rencontre avec le sculpteur Johanin Bangdor en 2005 et leurs nombreuses collaborations, il se rend plusieurs fois par an au Vanuatu, et a même appris le bichlamar. Plus que des techniques, Marc Faucompré cherche à partager des moments de vie. « Mon travail est abstrait mais je produis des représentations mentales sur des constats très concrets », résume le plasticien. Il assemble ainsi un patchwork coloré, mélange de papier collé et de peinture, pour figurer le lien social dans les quartiers populaires de Port-Vila. Son regard porte au-delà de la grisaille des bidonvilles... et des préjugés.

Par Théo Rouby

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Portr

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ans son atelier, les toiles ont laissé place aux écrans d'ordinateur. C'est à l'aide d'une tablette numérique qu'Ajna a esquissé une série

de dessins sur le thème des « Songes Numériques », exposée au Méridien de septembre à octobre, aux côtés du travail de Lilite Dumont. Ses personnages baignent dans un univers où se mélangent réel et surnaturel.

Les aplats noirs et blancs, rehaussés d'une dominante bleue ou rouge pour souligner un détail, sont travaillés avec un puissant logiciel de traitement d'images. Comme les volumes et les lignes de fuite mesurés au millimètre. Ses œuvres sont nées d’un logiciel, mais le coup de crayon est tout à fait authentique.  « Le numérique est un

outil moderne qui offre beaucoup de possibilités. Mais je viens du crayon à papier », tient à rappeler Ajna pour ceux qui douteraient encore du sérieux de son travail assisté par ordinateur.

Après le succès, d’autres succès

À 20 ans, il a dessiné le succès de librairie Frimeur des îles sous le pseudonyme de Niko. Depuis les

sollicitations pour des BD ne manquent pas. Il illustre notamment la Coloc 2.0 pour

le magazine Tazar ou encore Adeline et Charlotte dans le Télé NC. Mais si sa palette technique s’est étoffée avec les années, cette étiquette de dessinateur pour ados va longtemps lui coller à la peau. « On avait tendance à me refiler tous les trucs fun. J’avais du mal à percer en dehors de la BD », raconte le trentenaire, qui vient toujours à ses rendez-vous en skateboard, et surfe autant sur les passes du lagon que sur les pages web.Justement, l'artiste prendra son envol grâce à Internet, rapidement envisagé comme un sérieux espace de diffusion. Il y signe son travail sous un nouveau nom, qui n'a pas tardé à s'exporter du virtuel au réel. « On a commencé à m’appeler Ajna sans savoir que c’était la même personne que Niko ».

Dans un style plus réaliste, le dessinateur esquisse désormais des croquis en direct du tribunal pour Les Nouvelles Calédoniennes. Il prépare aussi des storyboards pour des boîtes de production en publicité, quand il ne collabore pas avec des magazines à l'étranger. Mais sa démarche ne se résume pas à répondre à des commandes pour gagner sa vie.« J'ai eu la chance d'avoir une BD qui a bien marché très tôt. Ainsi, j'ai pu continuer à me former pour améliorer mon art », explique-t-il. Encore aujourd'hui, ce passionné dessine plus de cinq heures par jour, souvent juste pour le plaisir. Ajna puise son inspiration dans un univers bien à lui. Taper des lignes de codes informatique et monter ses propres ordinateurs n'était pas incompatible avec sa pratique artistique, nourrie à travers l'immensité du web. Aujourd'hui son style s'inspire des jeux vidéos, des mangas, mais aussi des peintres impressionnistes et de la Renaissance. Toujours en quête du renouveau, Ajna partira bientôt pour un an en Australie, afin d'aiguiser la pointe de son stylet.

Par Théo Rouby

Le numérique est un outil moderne qui offre beaucoup de possibilités.

ajnaCoup d’stylet !

Il s’appelait Niko, a connu le succès grâce aux Frimeurs des îles mais a voulu se faire un nouveau nom : Ajna. Pari gagné puisque pour sa deuxième exposition - qu’il partageait avec Lilite Dumont, le dessinateur Geek de 36 ans a envoûté tous ceux venus admirer ses « songes numériques » au Méridien. Esquisse d’un artiste pétri de talent.

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Sa voix vous divertit tous les samedis et dimanches entre 18 et 20 h sur NC 1ère. Lui, c’est Chavi. Animateur mais artiste avant tout, le jeune homme de 26 ans s’apprête enfin à libérer dans les bacs son premier album Soudwane aux influences reggae français métissé. Portrait.

ès le lycée, Chavi est ce qu’on appelle un « addict ». Mais ses drogues à lui sont bien légales : c’est le sport et la musique. À Saumur où il grandit, le jeune homme se sent malgré lui en décalage : « j’étais le bourge de mon quartier pour les uns, pas assez friqué pour les autres, là-bas

aussi c’était le métissage sélectif. Très tôt, j’ai eu le cul entre deux chaises ». À l’époque où il révise le bac, les paroles des ténors du rap français raisonnent en lui et Chavi passe la majorité des cours à écrire des morceaux. Son parcours scolaire se finit avec un diplôme d’éducateur sportif en poche et Chavi débute sa carrière professionnelle dans un célèbre club de vacances. Il y restera trois ans, allant de stations balnéaires en stations de ski, en passant par la Tunisie, la Corse ou l’Italie. Le jeune homme devient alors « responsable des animations sur site » avec un accès illimité  aux scènes des villégiatures pour lesquelles il travaille. « Là j’étais bien. Le micro, la voix, le show, la scène, la tenue, j’ai tout appris là-bas. » Fatigué de rouler sa bosse sur les planches de ce tour operator, Chavi plaque tout et décide de partir à la rencontre de l’Australie.  « J’avais trop de rap dans la tête. J’en avais marre de faire danser les gens comme un idiot. » Quand la musique résonne

Puis en juillet 2011, le jeune homme arrive à Tontouta. Il n’a pas de billet retour, juste sa liberté retrouvée. « Depuis tout petit, une destination raisonnait dans ma tête : la Nouvelle-Calédonie. Mon père a vécu ici durant vingt ans. J’ai grandi avec le drapeau Kanaky sur un mur de chez moi et le calendrier du lagon dans les toilettes ! » La suite de l’histoire est simple : il entre à la radio lors d’un casting d’été, travaille en tant qu’éducateur sportif avec les enfants de Pierre-Lanquette, Rivière-Salée et Magenta Tour tout en continuant de bûcher sur ses morceaux pour sortir son premier album. Un vrai rêve de gosse qui prend enfin forme sous le titre Soudwane.Gros coup de cœur pour « Oleti », déjà disponible en clip, sur

lequel l’artiste chante en français mais aussi en drehu avec un couplet en kunié, interprété par l’artiste de l’Île des Pins, Faby.

Dubstep, hip hop, reggae-ragga, zouk, l’amour de Chavi pour la musique est aussi métissé que le territoire qui

l’accueille et son album en est le parfait représentant. À découvrir dans les bacs !

Par Janice

HISTOIRE DE RENCONTRESLes quinze titres de l’album de Chavi ont été enregistrés avec Stéphane Hervé, célèbre ingénieur du son sur le Caillou. Et comme souvent lorsque l’on pousse un peu le destin, la vie en Nouvelle-Calédonie lui a ouvert les portes des bonnes personnes. Pour cette première auto-production, DJSE, Rastea, K’sir et le très regretté musicien Beeman Wilson ont réalisé les instrus. Quant aux featurings, on aurait presque envie de dire « MERCI » : Gabstone, Faby et Stan And The Earth Force, une sacrée brochette de stars pour un premier album.

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Chefd’orchestrede la culture Bassiste, organisateur d’événements et éditeur phonographique, Émile Mene est une figure du milieu artistique calédonien. Pourtant, il possède une casquette que peu lui connaisse : celle d’ingénieur culturel.

D epuis plus de vingt ans, Émile Mene, 38 ans, musicien et acteur culturel, assiste au développement et à l’émancipation culturels de son pays. « Les provinces ainsi que les institutions de ce pays en construction mettent des moyens humains

et financiers considérables pour développer la culture. Or, il manque de réelles compétences dans ce domaine. Je parle de médiateurs culturels dotés d’un bac + 5 avec une solide méthodologie de travail ». À partir de ce constat, ce Kanak de Lifou, ancien conducteur de travaux, décide en 2009 de reprendre ses études pour apporter cette compétence au pays et jouer un rôle clé dans l’accompagnement des différentes mutations culturelles vécues par la Nouvelle-Calédonie. Il intègre un master II Politique et gestion de la culture à Sciences Po Strasbourg où il fait l’expérience du multiculturalisme, au cœur de cette ville qui abrite le siège du Parlement européen. Son mémoire Emploi culturel : un enjeu économique en Nouvelle-Calédonie lui vaut toute l’attention de la province des Îles qui lui confie dès son retour au pays en 2011 le projet de la Maison de la Culture à Lifou. Au même moment, la Sodie (cabinet de conseil en ressources humaines) l’invite à travailler à ses côtés sur l’épineux dossier du statut des artistes.

Œuvrer pour la construction de son pays« La culture est par essence un facteur de cohésion sociale et donc un maillon essentiel du vivre ensemble », estime l’ingénieur culturel. En substance, ce métier a pour vocation d’accompagner et de conseiller les collectivités publiques ainsi que les structures privées dans la mise en œuvre de projets culturels qui ont tendance à fleurir ces dernières années au

regard d’un contexte politique singulier. Ici plus qu’ailleurs, culture et politique sont étroitement liées depuis le festival Melanesia 2000 en 1975. Ce projet culturel est le premier à être de nature politique puisqu’il consacre le réveil identitaire du peuple kanak et marque l’avènement de la politique culturelle en Nouvelle-Calédonie, devenue compétence provinciale suite aux accords de Matignon en 1988. Si les artistes ainsi que tous les acteurs culturels ont un rôle indéniable à jouer dans cette partition,

les ingénieurs culturels en sont les chefs d’orchestre. « Nous sommes les têtes pensantes culturelles des preneurs de décision. C’est à nous de leur insuffler les idées de diversité culturelle pour qu’elles deviennent un réel projet politique. » Aujourd’hui, Émile Mene, qui porte également la casquette de président de la Case des artistes, vient d’être mandaté pour définir la stratégie des politiques culturelles au niveau de la région Pacifique.

Émile Mene

Publi-reportage

L’art et la culture figurent aussi parmi les domaines d’intervention du Congrès de la Nouvelle-Calédonie. Dans ce contexte, l’institution a choisi d’engager un partenariat avec Endemix au travers d’une chronique régulière. Le Congrès souhaite dans ce rendez-vous mettre en évidence le travail, les aspirations et les réalisations des artistes locaux.

La culture est par essence un facteur de cohésion sociale et donc un maillon essentiel du vivre ensemble.

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’opération « sleeping booking », créée l'an dernier dans une classe de 5e en

option histoire

de l'art, vise à casser l'image trop

scolaire du livre. Ainsi les enseignants se retrouvent à faire la lecture à des élèves confortablement installés dans leurs lits improvisés. Et rien n'empêche ces derniers de s'endormir à tout moment. Pour cette deuxième édition, les professeurs ont été une nouvelle fois pris à leur propre piège. À grand renfort de café, ils ont dû assurer la lecture jusqu'au petit matin... « Je suis venue pour me coucher tard et écouter des histoires. J'ai particulièrement aimé La Sorcière au placard à balais parce que c'est drôle. »Morgane, 5e

« J'aime bien cette soirée car on a le privilège que quelqu'un nous lise des histoires. On découvre des histoires qu'on n'aurait jamais entendues. Sinon, j'ai beaucoup aimé Riquet à la houppe. »Julien, 5e

« Je suis venue pour dormir au collège. On peut se rapprocher des profs. Ce qui est bien, c'est qu'ils nous lisent des histoires. Ça nous rassure car nos parents faisaient ça. »Clara, 4e

« J'ai lu des livres au collège. Ça fatigue moins quand on nous les raconte. Ça rappelle notre enfance et ça donne un peu plus envie de lire. On n'ose pas trop le dire mais si on vient, c'est surtout parce qu'on peut être en pyjama à l'école avec les copines. »Mathilde, 3e

« La lecture, c'est bien car les professeurs ont des voix différentes. Tu es allongé, tu es dans ton monde, tu peux imaginer les textes, alors que dans les cours, les professeurs te guident. Tu es obligé d'écouter, c'est fatigant. »Lucas, 5e

« Je n'ai jamais pu finir un livre. J'aime bien Twilight, les histoires fantastiques, mais c'est trop long. »Carla, 3e

« Je ne lis que pour les devoirs car je suis trop lente. J'ai beaucoup aimé l'histoire du pharaon avec les chats parce qu'on parlait du rôle du chat dans l’Égypte antique. »Océane, 4e

« Cette soirée était inoubliable avec ses histoires en français et en anglais, des extraits de romans, des contes japonais, des nouvelles, des poèmes. Bien sûr, le sommeil a gagné la partie. À 1 h du matin pour moi. »Élise, 4e

Un CDI rempli de livres, des professeurs motivés, des élèves captivés et le manteau de la nuit pour couvrir le « méfait » : lire jusqu’au petit matin. Endemix est parti à la rencontre des élèves du collège de Normandie à la lueur des bougies.

LPar Théo Rouby

de nuitVol

LE COLLÈGE SE LIVREElle se met en quatre pour partager son amour des livres avec les élèves. Anne Bannier est professeur de français au collège de Normandie. « Le livre n'est pas forcément un objet familier à la maison », remarque l'enseignante à l'origine du « sleeping booking ». Elle s'appuie sur ses élèves lecteurs pour qu'ils invitent leurs amis (souvent moins lecteurs) à écouter des histoires toute une nuit. Toujours dans le même but, la professeure a demandé à plusieurs élèves de cacher un roman qu'ils aimaient dans l'établissement, une opération nommée « enVOLE-moi ». Celui qui le trouve est invité à le lire. Il pourra alors à nouveau le cacher et laisser sa petite critique sur un blog, http://envole-moi-normandie.zz.mu/, assortie d'un indice pour aider celui qui voudrait le trouver.

Les derniers élèves ont tenu jusqu’à 4 h du matin. Ce sont finalement les professeurs qui ont abdiqué, épuisés par les heures de lecture.

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Raconter une histoire, partager une mémoire, dénoncer une injustice ; toute forme d’art fait sens. L’art livre ainsi une vision du monde à travers des signes plus ou moins abstraits qui feront sens lors de la création. Pour cela, l’artiste dessine, sculpte, chante, danse... En sa possession, des moyens d’expression infinis et au final, la création d’une écriture unique, qui lui est propre. Dès lors comment comprendre le processus d’écriture d’une œuvre ? Le « mode d’emploi » diffère toujours mais les artistes ont au moins une chose en commun : le désir de créer.

De la pensée à la matière

Pour Richard Digoué, chorégraphe, l’écriture est celle du corps, ce sont « des courbes auxquelles l’on donne du sens ». Pourtant, tout commence dans ses pensées, son imagination, et au contact des autres qui vont nourrir ses réflexions. Avant de décider de poser les mouvements sur le plateau, le danseur peut attendre des années que sa représentation de la création mûrisse à l’intérieur de lui. L’écriture se forme donc dans l’esprit de l’artiste jusqu’au « moment intense où écrire une idée sur un papier rend la pensée, le sens, saisissable », explique Claudine Jacques, écrivaine.

Qu’est-ce qui provoque l’envie d’écrire ? L’élément déclencheur peut être une émotion, une image, une actualité, le son d’un instrument, d’une voix, une rencontre, autant d’éléments émotionnels, abstraits, imaginaires que l’artiste va pouvoir exprimer à sa manière. Patrice Guirao, auteur et parolier, affirme que « c’est bien là le sens de l’écriture : transformer l’insaisissable matière pensée

pour la figer sur du papier ». Mais avant de voir l’œuvre se révéler et avant de la « figer », la phase d’écriture est parfois un moment très difficile, comparée par certains à un accouchement. « C’est laborieux, on retravaille encore et encore. Et puis, tout d’un coup, ça se débloque et on ne sait même plus pourquoi c’était si difficile », témoigne David Leroy, compositeur.

Le rituel de l’écriture

Écrire d’abord le titre, s’isoler, faire ses échauffements, le moment qui précède la création est teinté de rituels particuliers qui varient selon les domaines artistiques et les artistes eux-mêmes. Richard Digoué prend le temps de réunir les danseurs du spectacle pour échanger. C’est au travers des sensibilités et des propositions de chacun d’eux que la création peut se construire. Le travail d’équipe,

L’écriture,les courbes

En art, tout est écriture : l’encre sur du papier, l’empreinte d’un pinceau sur une toile, les courbes d’un danseur en

mouvement… Comment l’artiste utilise-t-il ces différents codes de langages pour réaliser ses œuvres ? Enquête sur

les traces de l’acte artistique : l’écriture.  

L’écriture est d’abord une relation à soi. Ce n’est pas une démarche associée à un quelconque rituel.

de l'artPar Léna Quillier

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la cohésion du groupe sont des éléments primordiaux pour la réussite d’un projet. Des valeurs que partage Yann Skyronka, grapheur connu sous le nom de Sham. « Pour réaliser une fresque, nous travaillons à plusieurs. Le nombre varie en fonction de la taille du mur. Nous choisissons un thème commun qui nous tient à cœur, puis nous nous réunissons pour cogiter ensemble et nous répartir le travail. » Pour d’autres, la solitude est essentielle. Claudine Jacques écrit le matin et se relit le soir. « C’est un rituel qui me convient. J’ai besoin de solitude, de calme, d’être loin de tout téléphone, de toute agitation pour me concentrer sur l’écrit et seulement l’écrit », explique la romancière. Et puis, il y a ceux qui n’ont pas forcément besoin d’un contexte particulier ou d’une ambiance spécifique, comme Patrice Guirao. « L’écriture est d’abord une relation à soi. Ce n’est pas une démarche associée à un quelconque rituel. Un crayon, un support, un ordi et l’envie d’écrire sont les « indispensables » pour le passage à l’acte. »

Une expression vivante

Écrire, c’est poser son empreinte, affirmer son existence. Le geste n’est pas anodin car l’artiste choisit délibérément de s’exposer à tous les regards. La démarche

est personnelle, comme un besoin presque vital. Celui de libérer sa parole au monde. Le processus n’est pas évident et demande une bonne dose de confiance en soi. « Je crois beaucoup à l’instinct. C’est très difficile mais il faut se faire confiance. J’ai besoin de faire sortir quelque chose et l’offrir au public », indique David Leroy. L’acte artistique devient alors inévitable. Lorsque Claudine Jacques commence à écrire un texte, elle s’y lance sans retenue. « De la première phrase à la dernière, en continu, sans plan, sans préjugé. Je ne pense plus qu’à ça. » Sans jamais se faire dépasser par l’exaltation créatrice au risque

de se couper une oreille*, l’artiste vit

profondément son art. « Mon temps d’écriture est la vie », confie Patrice Guirao. Loin d’être un moment de solitude tourmentée à l’image des artistes romantiques, l’acte d’écrire, de créer est surtout libérateur et source de plaisir. Yann Skyronka et son équipe de grapheurs s’amusent à détourner les codes, étirer les courbes, explorer les infinies possibilités de leur art. « On joue avec les volumes, les couleurs, les profondeurs, parfois les lettrages deviennent tellement compliqués que la lecture n'est plus accessible au profane, cela va à l'encontre de l'utilité première de l'écriture (qui est de reconnaître facilement un

caractère) et devient alors un jeu graphique. »De la pensée à la matière, de l’insensible au palpable, l’artiste offre ses propres courbes poétiques, une écriture à la fois personnelle et universelle.

Par Léna Quillier

Mon temps d’écriture est la vie.

* Vincent Van Gogh s’est coupé une oreille lors d’une

fièvre créatrice.

UN TEXTE PEUT EN CACHER UN AUTREAu théâtre, le texte à dire (celui des acteurs) est souvent introduit par les didascalies, des indications scéniques écrites par le dramaturge mais aussi par le metteur en scène. C’est le texte secondaire. Même s’il semble absent, il est partout, dans le décor, la scénographie, les gestes du personnages, les intentions, etc. Aujourd’hui, beaucoup de mises en scène prennent le contre-pied des informations données dans le texte secondaire par le dramaturge et éclairent le texte principal autrement, concrétisant ainsi une autre de ses multiples potentialités.

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aLes musiciens de Sumaele avec l'écrivain Frédéric Ohlen lors du

projet « Paroles et Musiques » à la Maison du Livre.

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n an après l’inauguration du centre culturel Tjibaou en 1998, le théâtre de l'Île est en préfiguration puis ouvre l’année suivante. À leurs

débuts, ces deux lieux concentraient la plupart des crédits d’aide à la création. La majorité des œuvres était des commandes passées aux artistes. C’est le cas des Dieux sont borgnes* commandé par le théâtre de l'Île et de Nyian la légende** commandé par le centre culturel Tjibaou. « C'était un âge d’or pour les artistes qui n’avaient qu’à faire leur métier d’artiste », raconte Emmanuel Touraille, directeur du Théâtre de Nouville à l’époque et désormais à la tête du Rex. Richard Digoué a aujourd’hui pris conscience des avantages dont il bénéficiait : « La première année de création a été tout confort. Je pouvais avoir le plateau quand je voulais. On travaillait jusqu’à trois, quatre heures du matin. On dormait là-bas, dans les cases. Le mot résidence prenait vraiment tout son sens ».

Un manque évident

En 2013, la situation a changé. Pour Gauthier Rigoulot, metteur en scène, « organiser les répétitions, trouver des lieux, c'est le plus fastidieux ». Pour répondre à cette pénurie de lieux de création, le centre culturel du Mont-Dore a dû faire évoluer sa politique

d’accueil. « En règle générale, nous recevons les artistes qui se produisent au centre dans le cadre de la saison ou à travers des partenariats sur des événements culturels, explique le directeur de la salle, Grégory Louzier. Mais, étant donné le manque cruel de lieux de résidence, nos salles sont également ouvertes aux artistes qui se produisent dans les autres structures culturelles ». De nombreux artistes ne peuvent pas travailler sans un espace particulier et du matériel approprié. Le soutien et l’accompagnement des lieux culturels et des institutions dans leurs recherches artistiques sont donc essentiels.

Points de rencontre

Le centre d’Art se positionne comme un espace de ressources et de recherche pour les artistes. De même pour le Rex qui accueille quinze créations par an ou encore le centre culturel Tjibaou qui finance et héberge depuis longtemps de nombreux spectacles chaque année (Slam Circus, Enono Anya, Tarzan, Confession d’un singe blanc, EkoooO). Le Chapitô de Nouvelle-Calédonie représente aussi un lieu important

Le pupitrede l’art

Centres culturels, théâtres, ateliers, salles itinérantes, bâtiments historiques ou point de ralliement extérieur, les artistes travaillent leurs arts dans des espaces publics qui peuvent se révéler parfois difficiles d’accès. Quels sont-ils ? Pourquoi les utiliser ? Visite guidée de ces lieux, où la création règne en maître.

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* Les Dieux sont borgnes de Nicolas Kurtovitch et Pierre Gope, mis en scène par

Yves Borrini, 2002** Nyian la légende, compagnie Nyian,

chorégraphie Richard Digoué, 2002

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de l'art

pour la création. La structure accueille deux résidences par an. Avec l’arrivée d’un « petit frère » cette année, une autre possibilité s’offre aux artistes : les « cartes blanches ». Deux compagnies sont invitées à utiliser les lieux comme elles le souhaitent pour présenter leur programmation, animer des ateliers, répéter et même créer.

« Les artistes en tournée arrivent dans un univers différent mais ne s’y intéressent pas forcément et repartent très vite. Donner la possibilité d’utiliser l’espace pour leurs projets leur permet de s’intégrer, faire des rencontres, échanger, s’impliquer tout simplement plus », explique Anne-Sophie Arzul, directrice du Chapitô, un espace de création itinérant. Des efforts appréciés par les artistes qui sont encore nombreux à ne pas trouver « salle à leur pied ».

Donner la possibilité d’utiliser l’espace pour leurs projets permet aux artistes de [...] s’impliquer tout simplement plus.

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Répétition de danse au Rex. Delphine Mahieu dans la pièce Ataï et moi, jouée au Théâtre de l'île.

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l existe différents types de résidence selon les sensibilités artistiques, les projets, les lieux, les régions. « Certaines résidences sont plus calmes que d'autres, certaines plus longues, certaines mieux payées, certaines avec beaucoup d'interventions, parfois même des résidences croisées écrivain, plasticien, musicien... Et tous ces critères doivent être

liés à la personnalité de l'écrivain et à son projet », nous explique Jean-Brice Peirano, directeur de la Maison du Livre qui accueille depuis le début de l’année l’écrivain Guillaume Berger pour une résidence d’écriture d’un an.

Un moment à part

La résidence est un moment de partage où l’humain est placé au centre du processus. Sur les chemins de la Nouvelle-Calédonie, le Chapitô héberge sous sa toile plusieurs artistes le temps de la recherche artistique. C’est l’occasion de parler ensemble, de partager, de nouer des liens plus profonds qui se ressentiront à un moment ou à un autre à travers l’œuvre scénique.

La création nécessite de la vivre complètement, jour et nuit.

Le temps de la création :la résidence

Chaque création s’inscrit dans un espace- temps particulier. La résidence d’artiste est ce moment de travail privilégié où les artistes vont pouvoir bénéficier de conditions optimales pour réaliser leurs œuvres.

Pour Richard Digoué, « la création nécessite de la vivre complètement, jour et nuit, et surtout de passer du temps avec les autres ».

Les temps de résidence varient surtout en fonction des projets.

Occuper l’espace

Avec le Street art, l’art a pris l’air pour un petit tour vivifiant dans la rue. Les danseurs de hip hop se retrouvent au damier de la place des Cocotiers et les grapheurs investissent les murs de la FOL. « On crée parfois nos résidences personnelles en occupant un endroit qui nous plaît de façon

collective... résidence sauvage ! », s’amuse Yann Skyronka. De même

pour la musique qui peut « s’écrire sur la plage avec un bout de papier. Le studio permet de concrétiser les choses et d’en sortir avec un résultat tangible », ajoute David Leroy. À l’extérieur ou dans un atelier, le lieu d’écriture, au même titre que le temps, est important pour l’artiste.Des paysages, des matières, une lumière particulière, des parfums, une atmosphère, des contraintes techniques... Voilà ce qui inspire consciemment ou inconsciemment le créateur. « L’écriture scénique n’est pas figée. La création naissante est façonnée et amenée à évoluer sans cesse. » Richard Digoué n’écarte jamais l’idée de tout modifier à trois jours de la représentation. « La résidence, c’est surtout le temps où les choses vont changer, où tout peut arriver. »

QUI CONTACTER ?> Le Chapitô de Nouvelle-Calédonie : [email protected].>  Le Rex Nouméa : Pablo - [email protected].>  La Maison du Livre : Jean-Brice Peirano ou Fany Torre -

[email protected].>  Le complexe culturel de Koné : Henri Lecren - [email protected].>  Le centre culturel du Mont-Dore : Grégory Louzier -

[email protected].>  Centre culturel Tjibaou : Guillaume Soulard - [email protected]>  Centre d'Art : Lydie Gardet - [email protected]

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Endemix : Quelles sont vos étapes d’écriture ?Guillaume Berger : tout commence avec du papier. Des carnets plus précisément. J’essaye de comprendre ce qui m’arrive, comment je le ressens et comment je peux le dépasser. Que mes idées soient bonnes ou mauvaises importe peu. Je les écris quand même. Mais avant d'écrire vraiment, il me faut du temps. J’ai besoin d’avoir du recul, je n’ai même jamais réussi à écrire à chaud. Certains disent que c’est mieux pour avoir une écriture vivante, moi je pense que le recul est nécessaire, indispensable. Une fois que c'est là, je me mets devant l’ordinateur. L’inspiration est-elle toujours au rendez-vous ?C’est très aléatoire. Il y a à peine trois jours, j’ai eu un grand doute existentiel : je trouvais que tout mon travail était creux. J’ai recommencé. La nouvelle sur laquelle je suis en ce moment m’a déjà demandé quatre réécritures en l’espace de deux semaines. D’un autre côté, certaines nouvelles s’écrivent en une journée. Mais ce qui compte dans l’écriture, c’est de pouvoir en tirer un plaisir immense, douloureux parfois. C’est une jouissance qui s’arrache

aussi très durement. On a envie de crier, de taper et en même temps de sauter de joie. Un mélange passionné. On est happé par l’écriture. Depuis un an, vous êtes en résidence à la Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie. Avoir un lieu pour créer, c’était indispensable pour vous ?Je préfère travailler en dehors de chez moi. C'est important de pouvoir avoir un autre espace, pour préserver sa vie personnelle. À la Maison du Livre, je ne m'occupe que d'écrire. Une fois mes stylos rangés, je me contente de vivre. Sans ça, on court le risque de passer ses nuits à

griffonner des brouillons dans la cuisine... D'autres institutions proposant des résidences ne seraient pas de trop pour les jeunes auteurs,

plus nombreux et talentueux qu'on peut le croire. Par exemple, pour moi, Chroniques de la mauvaise herbe de Vuibert est ce qu'on a écrit de mieux, en prose, depuis Mariotti.

GUILLAUMERencontre avec

jeune plume

7 janvier 1984 : naissance de Guillaume Berger à Nouméa.2002 : son goût pour les nouvelles aventures l’amène à parcourir l’Europe et l’Amérique latine pendant dix ans.2007 : il gagne l’aide à l’écriture de la province Sud.2010 : L’Exil est mon royaume, premier roman édité en format numérique aux Éditions Humanis.2011 : sortie de son deuxième roman, Les Enfants de salauds tiendront leur bière en enfer, toujours en format numérique chez Humanis.2012 : parution d'un conte pour enfants, La Terrible Vengeance d’Inti, un livre illustré par son père, Bernard Berger.2013 : résidence à la Maison du Livre de Nouvelle-Calédonie. Son troisième roman, Paris en bouteille, cherche encore son éditeur.

BIO EXPRESS

« On est happé par l’écriture »Un patronyme célèbre, l’amour de l’art en legs. Guillaume Berger a parcouru le monde pour trouver l’inspiration avant de comprendre qu’elle était déjà en lui. Aujourd’hui, en résidence à la Maison du Livre, il décortique pour Endemix son processus d’écriture.

L’écriture reste un travail.

L’écriture,les courbes

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Guillaume Berger travaille à la Maison du Livre sur un recueil de nouvelles articulé comme un roman portant sur ses pérégrinations en Amérique Latine et sur un ouvrage historique en coopération avec son père, Bernard Berger.

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« Ce roman est une preuve d’amour pour ma ville »Il a reçu le prix Lagneau du premier roman à l’unanimité du jury. À 33 ans, Vincent Vuibert bouscule la littérature calédonienne avec Chroniques de la mauvaise herbe, une peinture sociale brillante sur les errances de la jeunesse nouméenne. Rencontre avec un auteur

sans langue de bois qui refuse le statut de spécialiste ès jeunes en difficulté.

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Endemix : Pourquoi avoir attendu tout ce temps pour publier un livre ?Vincent Vuibert : parce que je n’étais pas mûr. J’ai commencé à écrire vers 15 ans mais c’était rarement bon et je n’étais pas régulier. Et puis je n’avais jamais imaginé que mes brouillons pourraient devenir quelque chose. C’est venu après, j’ai réfléchi. Je me suis dit qu’il y avait peut-être moyen d’en faire quelque chose de bien. Je suis professeur dans le Nord depuis dix ans et à chaque fois que je redescendais, je voyais la ville changer. Il y a beaucoup d’endroits que je kiffais vraiment dans Nouméa quand j’étais gosse et qui sont devenus des immeubles. Même chose avec les maisons coloniales... Ça me fait vomir. Je crois que ça a été l’élément déclencheur, comme un cri du cœur : « Mais qu’est-ce qu’ils font à ma ville ??!!! ».

L'image que tu donnes de Nouméa n’est pas très positive. On est très loin de la carte postale.Je voulais m’écarter des clichés de la littérature tropicale où les gens

idéalisent trop les îles. C’est fatigant et il y a plus intéressant à raconter sur Nouméa. Mais le roman n’est pas si noir. J’aime

ce côté de la ville. Les squats, les bars, les nakamals un peu

« pouraves », c’est là où tu as des paysages

et des gens qui sont vraiment intéressants. L’Anse Vata, OK, c’est cool,

il y a la plage mais ce n’est pas là où tu peux vraiment ressentir des choses pour ta ville, où tu as vraiment l’impression d’en faire partie. Du coup, je ne vois pas ce livre comme un crachoir, au contraire, c’est plus une preuve d’amour.

Ton personnage parle à la première personne. Bois Noir, c’est toi ?Ce n’est pas moi mais j’ai pioché un peu dans ma vie. Je suis arrivé à 5 ans, j’ai grandi à Nouméa. Dès que j’ai pu me balader tout seul en ville, je n’ai pas arrêté de traîner un peu partout avec mes carnets. Tu écris forcément sur ce que tu as vu, ce que tu connais. J’aime bien brouiller les pistes là-dessus, ça m’amuse qu’on cherche à savoir. Une fois, un mec est venu me voir en me demandant si Athanase Blaque* existait et où pouvait-on trouver sa chanson. « Fictionner » la vie, c’est un mélange qui m’éclate. Mais ce n’est pas un bouquin autobiographique, ça reste de la fiction. Je voulais faire un roman, raconter une histoire.

Une histoire qui n’est pas linéaire d’ailleurs. La construction en petites saynètes compilées est assez inédite.Je voulais qu’il y ait un rendu de cette chronologie trouble quand tu te trouves au quartier. Tu es là toute la journée, à rien branler. Les jours se succèdent sans conscience du temps qui passe. Le matin, les bons jours, tu sais que tu as du pétard, sinon, tu dois en chercher ; et le soir, tu vas au kava. Voilà ce qui rythme ta vie. Ou alors c’est le crash de machin ou bidule qui redescend de Brousse... Ce n’est pas un rendez-vous qui demande à ce que tu sois à un endroit précis à 7 h, puis à 10 h… C’est ça que je voulais rendre par cette mise en page.

L’écriture du livre très parlée, locale, c’est pour être plus proche de ton lectorat ?Je n’y ai pas réfléchi. Je voulais juste qu’il y ait de l’argot calédonien, parce que je trouve les langues calédoniennes

fascinantes. J’aime les utiliser, surtout qu’on ne le fait pas tant que ça. Pourtant il y a un matériau de fou. Le français qu’on parle ici est marqué par toute l’histoire du pays. Il y a des mots qui viennent des langues kanak, qui, elles, ont été influencées par l’anglais… Après, tu fais le lien avec les bagnards qui débarquaient ici. C’était des Communards, les pires Parisiens, avec l’argot de la capitale métropolitaine à fond. Ils débarquent à l’autre bout du monde et tu retrouves leurs expressions plusieurs générations derrière. Ça n’existe plus du tout à Paris, mais ici des expressions comme « crasse de meule » sont encore utilisées et moi je trouve ça mortel.

Bois Noir comme Hubert sont à la rue mais cultivés. Ils citent Burroughs et Fanon.J’ai eu des conversations comme ça. Tu croises un vieil « arraché » et il te cite vraiment des trucs de fou, des trucs qu’il a vraiment lus. Il a des références super pointues. Bois Noir ou Hubert, c’est aussi pour casser un peu l’image de ces personnes. Ce n’est pas parce qu’ils sont arrachés ou dans des situations sociales vraiment glauques qu’ils sont plus

cons que les autres. Il y a des trajectoires de vie qui font que ce n’est pas parce que tu es con que tu es clodo et ce n’est pas parce que tu es clodo que tu es con.

Par Charlotte Mestre

UNE ŒUVRE RYTHMÉEOutre sa modernité, ce qui frappe dans

l’écriture de Vincent Vuibert, c’est sa musicalité. Rien d’étonnant, Vincent a

monté le collectif de rap Dusty Digital en 2005 avec deux potes. Lassés de travailler

la musique des autres, ils se mettent à composer. Une très bonne école pour travailler le rythme

dans l’écriture. Mais le manque de liberté pousse Vincent à privilégier la littérature. « Le fait de devoir

écrire sur un beat, ça te coince un peu si tu veux écrire ton histoire. » Aujourd’hui, le collectif s’est

séparé, mais l’influence de cette période se retrouve partout dans son livre.

* Athanase Blaque est un personnage secondaire du roman, un musicien dont l’une des chansons est retranscrite dans le roman.

UNE COUVERTURE FUMEUSE

C’est le dessinateur Fly qui a dessiné la couverture. Une idée de Nadège Lagneau, la fille de Michel, qui a tout de suite plu à Vincent. « On est de la même génération, on traînait ensemble

à la fac et j’adore son travail. Quand on m’a dit que ça allait être lui, je lui ai donné carte blanche.

» Carte blanche, enfin presque. Si tout le monde était d’accord sur le portrait, la pousse sur la quatrième de couv’ a fait débat. « Au départ, ça devait être une pousse de

cannabis qui prenait feu. Ça a été refusé parce que c’était de l'apologie illégale par l’image. Bon au final, c’est du faux-mimosa, de la mauvaise herbe, donc ça

le fait. Moi, je l’aime cette couverture. »

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32 Questions à...

ndemix : en Nouvelle-Calédonie, le livre est-il en péril ?

Christophe Augias : en péril, c'est un bien grand mot. La formulation mérite d'être nuancée. Si l'on se place sur le plan de la lecture publique, la tendance est au contraire au développement. L'année dernière, Thio et Yaté se sont dotées de bibliothèques. Sont également en projet la création de bibliothèques à Koumac, à Magenta et Kaméré pour Nouméa, ainsi que la rénovation de la bibliothèque Bernheim. Ce sont des indicateurs rassurants. Plus le livre sera accessible et plus nous toucherons un large public. large.Jean-Brice Peirano : si la pratique culturelle qui consiste à emprunter des livres est bien ancrée, celle d'acheter des livres l'est moins en revanche. Ce qui pèche pour le secteur, c'est la partie économique du livre en bout de chaîne, c'est-à-dire la vente via les librairies et la distribution. Aujourd'hui, il n'y a plus qu'une librairie indépendante, et en dehors de Book'in, le réseau de

distribution se focalise sur l'export et les marchés publics et scolaires, donc peu finalement sur la production littéraire locale. Une situation qui a des conséquences directes sur l'édition, et a fortiori sur la production qui ne trouve plus sa place dans les lieux de vente et touche alors un moindre public. C’est ici qu’il y a une vraie inquiétude.

Existe-t-il des solutions miracles ?JBP : les Assises du livre l'ont souligné, l'édition et la commande publiques sont des enjeux majeurs sur un marché tel que celui de la Nouvelle-Calédonie. Pour soutenir l'édition privée, les institutions ont un rôle à jouer via des appels d'offre ou des commandes. C'est une première piste pour l'édition. Dans nos domaines de compétences, on peut faire des propositions pour impulser une dynamique, rappeler aux éditeurs qu'ils peuvent s'appuyer sur des structures comme les nôtres, et poursuivre la professionnalisation de cette métier. Dans le prolongement des Assises, la Maison du Livre

va organiser des rencontres pour accompagner les acteurs du livre.CA : d'autant plus qu'il existe un fort potentiel créatif littéraire et documentaire. À travers les concours et les aides, on peut le voir. On entend souvent dire que la chaîne du livre connaît des difficultés car il n'y a pas de production, or, elle existe, cette production. Mais pour qu'elle soit d'une bonne qualité et aboutie, il faut des éditeurs militants qui croient en leur travail et en leurs auteurs, et qui les accompagnent. Le livre, ce n'est pas seulement un business.

Vous qui vous déplacez dans des salons en Métropole ou ailleurs, quel retour avez-vous sur la production littéraire locale ?CA : nous remarquons, par exemple au Salon du Livre à Paris, qu'il y a une réelle envie de découvrir la littérature locale et océanienne car elle est méconnue. Ensuite, nous nous retrouvons face à la problématique du volume de la production et de sa

Jean-Brice Peirano&

Les Assises du livre et de la lecture ont pointé du doigt les difficultés connues par la filière. Mais comment pérenniser son avenir ? Jean-Brice Peirano, directeur de la Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie, et Christophe Augias, conservateur et directeur de la bibliothèque Bernheim, ont pris le temps de nous éclairer sur la complexité du secteur et son futur.

« Il existe un fortpotentiel créatif littéraire. »

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Christophe Augias

régularité. Les éditeurs ont besoin de s'engager auprès d'un auteur durablement. Une relation de confiance doit s'établir entre éditeurs et écrivains sur la base d'un partenariat intelligent.JBP : que ce soit le grand public ou les professionnels, ils sont surpris par la diversité de la production locale. Mais le point récurrent soulevé en Métropole, notamment par les bibliothécaires, concerne la qualité du texte ou de l'illustration, ou encore la cherté des ouvrages. S'il y a un intérêt, les achats ne suivent pas vraiment.

Comment donner une meilleure visibilité aux écrivains calédoniens ?CA : on peut s'appuyer sur l'exemple de la littérature antillaise car elle est mondialement connue. Ce qui montre qu'à partir d'un petit territoire, on

peut rayonner s'il existe des écrivains majeurs, une filière qui les porte et en arrière-plan une scène artistique littéraire qui impulse une émulation entre auteurs.JBP : je rejoins les propos de Christophe. Il faut que nos écrivains phares ouvrent les portes, la voie, et qu'ensuite une génération d'écrivains moins connus s'y engouffre. Les livres doivent être de qualité pour se démarquer, qu'ils soient plus grand public et peut-être moins centrés sur des thématiques calédoniennes, tout en préservant une singularité. Vaste programme !CA : il serait aussi essentiel de traduire en anglais certains textes calédoniens dans l'objectif de toucher des éditeurs de la région et non plus de viser de potentielles carrières européennes. De par notre position géographique, c'est une évidence. Ceci permettant de favoriser des partenariats avec des éditeurs du Pacifique et d'être présents sur les événements et salons régionaux.

Revenons sur le Caillou : le SILO, prévu à Nouméa l'année prochaine, tombe à l'eau. Mauvaise nouvelle !CA : la bonne nouvelle, c'est que le SILO existe toujours. Il devait évoluer vers une fréquence annuelle, en alternance entre Poindimié et Nouméa. À cause des restrictions budgétaires, le projet n'a pas été retenu. Mais le SILO sera bien au rendez-vous en 2015 à Poindimié. L'idée de créer un événement autour du livre à Nouméa était de toucher un plus large public et de donner une plus grande visibilité aux auteurs, tout en venant en complément du SILO qui est plus axé sur les rencontres entre professionnels, même si bien évidemment le public est attendu et est le bienvenu. Espérons que ce ne soit que partie remise. Mais il est évident qu'un événement d'envergure à Nouméa autour du livre pourrait dynamiser la filière.

Par Frédérique de Jode

Le livre, ce n'est pas seulement un business.

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34 LE cri du cagou présente...Les membres du Cri du Cagou se sont emparés d’une page d’Endemix pour parler, à chaque numéro, d’un thème qui leur tient à cœur.

Ti têtuTu veux me foutre dehors, Mais tu sais c’est dehors que je suis mieux, que je suis heureux.Tu veux qu’j’arrête de foutre mon delbor mais quand ça déborde, je fais toujours de mon mieux,Mais des fois, faut que ça valdingue, ce bastringue de baltringue me rend dingue, alors, je cogneJ’me fous en rogne, je sers les pognes, je grogne, je vise la trogne et j’l’assomme.Moi, quand je vois rouge, faut que j’bouge, faut qu’tu bouges ou bien que TOUT bouge !Alors j’écrase mon poing sur la table, je ressens de la haine et de la peineEt toi ?, tu me fous une colle ?Je rigole. Ma parole, tu ne vois pas que ça ne sert pas ?

Ce qu’il me faudrait, c’est de l’air frais,C’est qu’on me laisse, pas qu’on me blesse,Pas qu’on me stresse ni qu’on me teste.Tu ne sens pas la pression ?L’impression d’oppression qu’on me fout sur mes épaules ?

notre échelle, les déchets sont ce que notre corps rejette parce qu’il ne l’a pas intégré après ingestion. C’est aussi le CO2 de notre expiration... C’est ce qui se trouve dans notre poubelle, ou ce qui a été

laissé là, par terre, inutilisé. Le grand corps social n’assimile pas non plus tout le monde, pour diverses raisons. Certaines personnes sont rejetées car elles ne s’intègrent pas, n’ont pas prouvé leur utilité dans le collectif, trouvé leur place. Heureusement, dans l’univers, « Rien ne se perd, rien de se crée, tout se transforme », disait ce visionnaire de Lavoisier. L’art sublime les expériences, il recycle la souffrance en beauté, offrant à la société une possibilité parmi d’autres de s’unifier, d’accepter toutes ses composantes. Voici un slam de la RassKass, à méditer.

Poule d’O

ÀSi tu crois qu’en dehors de ces murs, à l’air pur, pour moi la vie est moins dureC’est que tu ne connais que mes ratures,Tu ne connais pas mes fêlures, mes blessures,Faut toujours être le plus dur, mais ça, ça ne dure pasÇa t’a à l’usure, ça te tue à coup sûr, je te le jure !

Je suis toujours prisonnier sans jamais être enfermé,Je ne serais jamais libéré, on a perdu la cléAlors pour m’évader, pour oublierJe me noie dans l’alcool, je rêve de brûler des bagnoles, de faire de la cambrioleJe ne crains plus les torgnoles, ni la tôle, y’a la mort qui rôde et me frôle.J’ai à peine 14 ans et de la peine MAXIMALAsocial, cas social, tel un animal animé d’animosité, un vandale marginal,

Et si je vais si mal c’est que j’ai déjà tout tenté, tout raté, tout gâché, tout craméUne vraie tête brûlée, occupé par l’envie de gerber sur les décombres de ma vie.Je reste assis, à l’ombre de ma tombe, à attendre que je tombe...

Et tu me demande pourquoi j’ai l’air si sombre ?Et tu t’étonnes quand un jour je sombre.

Quand la vie te chie dessus,Faut savoir faire les bons choix,Jamais rien lâcher, marcher droit,Et Inch’Allah, un beau jour, ça passera !

Par RassKass Rouge

Les déchets

Faut être sage à l’école et n’avoir qu’une parole.Tenir tête aux têtus, ne pas se laisser marcher dessus.Rendre fière la daronne pour que ton père te pardonnePas faire de vagues, ni des tags !Je ne suis pas de taille, faut que je me taille, faut que je m’en aille avant que je déraille

Mais vos grilles sont si hautes, ..., il faudrait que je sauteIl faudrait que je m’envole, que je décolle...Mais je reste cloué au sol, seul, avec ma colère.

À qui la faute si je déconne ?

C’est difficile de faire entrer dans des cases, ces gamins qui ont la rageC’est difficile de les faire rester sage en classe, ces enfants qu’on écrase. Retrouvez les déchets

sur le Cri du Cagou : www.lecriducagou.org

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Endemix a sorti sa chaîne, ses enceintes et même son lecteur MP3 pour écouter les dernières nouveautés sur le marché de la musique calédonienne. Verdict ?

on Airmusique

KOULNOUE BOYS BAND LA RECETTE DU SUCCÈS L

es amoureux de la country et du bluegrass ont

le chapeau qui les démange depuis le 12 septembre, date de sortie du dernier album de Jean-Luc Leroux. Ma Mando et moi

est un hommage à la mandoline, cet instrument à la sonorité si particulière qui accompagne le chanteur dans tous ses voyages depuis trente-cinq ans. Enregistré à Nashville, les onze titres sont dans la directe lignée de ce qui fait la renommée de l’artiste : odes aux grands espaces, anecdotes savoureuses ou mélancoliques, il y raconte ce qui est cher à son coeur. L’album, qui se veut plus autobiographique, plus profond aussi, marque un tournant dans la vie du countryman, comme en témoigne « Nouvelle vie », le premier titre de l'album diffusé sur les radios. Les textes un peu trop scolaires peinent parfois à convaincre malgré leur sincérité évidente, reste une chaleur communicative qui emporte l’auditeur fan du genre.

Par JB

JEAN-LUC LEROUX AU RYTHME DE LA MANDO

n nengone, Hnazigu fait référence au « chez-soi », à sa terre. Si Fernand Siwene, Kurya sur scène, a choisi de baptiser

ainsi son deuxième album solo, c'était pour exprimer son attachement à sa tribu natale de Rô et aux valeurs culturelles que la tradition transmet. Mais la musique selon Kurya est aussi une invitation à larguer les amarres, à s'inspirer de références diverses pour ciseler une expression singulière,

mélange remarquable de liberté et de maturité. À 35 ans, l'ancien chanteur du groupe Senety livre une copie sans fausse

note si ce n'est peut-être la tentation, heureusement anecdotique, de sacrifier au vocoder un morceau comme « Merijein ». Sa jolie voix naturelle aurait largement suffi à notre bonheur ! Subtile alchimie de tchap, de kaneka, de riffs de guitares rock et de virées jazzy, l'orchestration porte la musicalité de la langue nengone. De magnifiques ballades comme « Hnazigu », qui a donné son nom à l’album, ou le

mélancolique « Rawa Hmaien » sont servies par des chœurs très travaillés. « Mama Soen » est un sublime hommage à un cousin avec qui Kurya a fait ses gammes à la guitare sur les rivages de Maré, disparu il y a deux ans loin du Caillou. Le pamphlet vitaminé « Y en a marre » condense la spontanéité et la liberté de ton du compositeur qui nourrit son inspiration de thèmes variés, comme le suggère la playlist de son album. Près de deux ans après Wacedekan, son précédent opus, et avec l’aide d’une équipe de musiciens sensiblement remaniée, la trajectoire musicale de Kurya offre une impressionnante marge de progression...

Par SD

Moins d'un an et demi après

la sortie de leur troisième opus, best-of qui incluait six inédits, les Koulnoué Boys Band reviennent

avec Hyewen. Encouragé par l'incroyable succès des ventes de ses derniers albums, l'équipage en provenance de Hienghène reste fidèle à quelques-unes de ses recettes préférées : usage intensif du ukulélé qui donne une coloration tahitienne à certains morceaux, mélange de rythmes (valse, zouk, kaneka...) avec une prédilection pour le rapide cada et une alternance de textes en français et en fwai. Si l'inspiration mélodique s'essouffle parfois, des pépites comme « Marip », « Po wiec ido vap » et son imparable cadence ou « Kayukap » et son chœur d'enfants prouvent que le Band mené par Patrick Tidjitte reste une valeur sûre pour nous faire danser jusqu'à l'aube !

Par SD

KURYA L'INVITATION AUVOYAGE

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Voici déjà quelques années qu’ils font péter le métal le plus lourd de la table périodique dans les bars de Nouméa ; on les a même

vu au centre culturel du Mont-Dore, et aux côtés de Mass Hysteria au bar Le Bohème. Après ces performances live très remarquées, on avait ouï dire que le groupe Gautama - du nom de naissance de l’homme qui devint Bouddha - traînait ses guêtres au studio Bigsound NC, et que sous la direction de Christophe Planche, ils allaient bientôt accoucher d’une première production pas piquée des hannetons. Les quatre acolytes de la formation, dont deux frangin-frangine, portent bien haut l’étendard d’un métal parfois lourd, parfois aérien, toujours sans concession. Une belle énergie qui transparaît sur l’ensemble de l’album All is Silence : les riffs sont ronds et

gras à souhait, et le batteur aligne gaillardement roulements de grosse caisse et breaks à contrepied, où l’on se perd volontiers jusqu’à ce que tout reprenne de plus belle. La chanteuse Cloé n’est pas en reste. Très présente, elle livre une étonnante performance et se fraye un chemin sonore avec une voix rauque et grave tel un four de l’enfer, quand elle ne nous honore pas d’une voix cristalline comme sur le pacifique « Shanti Land ». Le disque enchaîne les titres avec rigueur et la structure, certes classique, est appliquée et de belle facture. L’album s’écoute avec un vrai plaisir et surtout avec le son « à donf ». Il est désormais disponible pour quelques pièces sonnantes et trébuchantes. Métal, toujours.

Par JB

GAUTAMA ATTENTION : MÉTAL LOURD

DYNA UN OPUS TRÈS GOSPEL

Je tiens tout d’abord à remercier celui qui a changé ma vie, Jésus-Christ, sans qui  je ne serais pas arrivée

là (...) Cet album est dédié au Roi des Rois. »C’est ainsi que débutent et se concluent les remerciements de Dyna inscrits au dos de son nouvel EP Dyna and Family. Car la jeune artiste de Lifou a désormais la Foi, la vraie. Une Foi qui l’a conduite à nous proposer 5 titres tous orientés très « gospel » au sens large. Dyna  souhaite aujourd’hui inscrire sa démarche musicale vers un chemin de convictions religieuses. Le déclic est très récent, probablement lié à sa tournée mondiale auprès du groupe américain de reggae chrétien CHRISTAFARI. Une pensée spéciale pour le dernier titre de L’EP « Ieovah », fabriqué aux États-Unis, alors que Dyna était dans le rush des concerts et « soulevait » parfois la ferveur de milliers de personnes.

Par AK

Do Not Disturb signe le retour de Éric Eriale aka Oncle Rico en solo. Avec cet album presque exclusivement instrumental,

cette figure calédonienne s’est fait plaisir et ça se sent. Mais n’est pas Joe Satriani qui veut. Oui, Oncle Rico est un très bon technicien de la six cordes. Ses qualités de musicien de studio sont indéniables. Oui, les influences sont là, bien présentes. On voyage, au gré des emballées mélodiques, entre les générations Pink Floyd, Genesis ou encore Pat Méthény pour les plus calés.Oui, Oncle Rico signe un joli projet huit titres accompagné des bons musiciens du pays tels que Stéphane Rénier à la batterie sur le morceau « 1990 » ou encore David Chuvan et

Marc-Olivier Vergé pour les solos. Mais non, Do Not Disturb ne nous perturbe pas plus que ça. Les fondamentaux de la musique relèvent des émotions,  et c’est là que le bât blesse. On serre un peu les dents lorsque les démonstrations de technicités frôlent la surexposition et on attend… on attend… le groove. Oncle Rico aimerait visiblement offrir à sa guitare les pouvoirs d’une conteuse mais à qui s’adresse t-elle ?

Par AK

ONCLE RICO CHUT, MUSIQUEEN COURS

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Victoire embarque sur la Virginie, direction les

terres lointaines de la Nouvelle-Calédonie Là-bas l’attend l’amour, sous les traits d’un imprimeur révolutionnaire. Évidemment, rien ne se passe comme prévu ; dès son débarquement à Nouméa, Victoire enchaîne les tragédies mais aussi les aventures, souvent amoureuses. Car Victoire est belle, d’une beauté à se faire désirer de tous les hommes qu’elle croise et à bon nombre desquels elle va succomber. On suit ainsi les aléas de sa vie mouvementée croisant au hasard Louise Michel, le grand chef Ataï, le cheikh Mokrani. Une fresque sur l’histoire si riche de notre île ? La promesse est alléchante.

Ellipse historique

Hélas, c’est raté. Les personnages historiques apportent bien peu au récit. Le plus flagrant est la seule apparition d’Ataï (pourtant si cher à Claudine Jacques) lors d’un dialogue avec son lieutenant : « On ne doit pas se révolter – Si, on doit – Non, on ne doit pas – Si ! On ne pliera jamais ! » En résumé, l’aspect historique du livre reste désespérément superficiel mais comment approfondir en 144 pages, me direz-vous. Reste alors un autre point à soulever : quid des invraisemblances ? Difficile d’imaginer qu’un ponte de la bourgeoisie nouméenne aurait, à cette époque, pris comme gardienne Victoire, une mère célibataire, brodeuse de son état. À vouloir faire accessible, Claudine Jacques tombe dans le simplisme.Nous en venons, au deuxième écueil du livre.

50 nuances de gris, version Calédonie ?

Pour une œuvre sensée éveiller les sens, Victoire provoque au mieux l’espoir (non,

mais je vais bien finir pas rentrer dedans) au pire l’ennui (et bien non...). L’écrivain maîtrise parfaitement la langue de Molière et si certaines scènes souffrent parfois d’un langage ampoulé, Un si long battement de cœur est bien écrit. Reste que lire les aventures de Victoire ne provoque aucune émotion. Les scènes s’empilent froidement, sans jamais parvenir à susciter ne serait-ce que de l’attachement pour son héroïne ou de l’empathie. Victoire tombe amoureuse comme on tombe d’une chaise, sans que l’on comprenne vraiment comment. De même, les scènes érotiques ont tendance à laisser

le lecteur sur sa faim : « Elle tourna vers lui un visage impassible. Attendit un instant, puis féline, vint se couler contre lui, en ronronnant. Sa belle panthère cacao avait le ventre chaud et les fesses froides, il l'embrassa dans le cou, puis un peu partout. Elle se mit à rire, saisit son sexe tendu et le porta au sien. Avec elle tout était simple, si simple, le désir comme le plaisir. Elle attendit sa jouissance, docile, puis se releva pour préparer le café. » Guy Marchand en slip provoquerait plus d’émoi. Là encore, la superficialité règne. Une

superficialité renforcée par l’usage intensif de l’ellipse. D’un chapitre à l’autre, les mois, les années ont passé, les sentiments évolué sans qu’on s’y retrouve vraiment dans ce tourbillon neurasthénique. C’est donc à grands coups de flashbacks maladroits, d’évocations lapidaires que Claudine Jacques tente de rétablir le fil du récit. Pour un livre censé ramener sur le chemin de la lecture les brebis égarées, ça frise le contre-emploi. Autant d’erreurs qui ruinent une très bonne idée de départ... L’histoire calédonienne mérite une saga. Reste à espérer que les prochains tomes d'Un si long battement de cœur, sauront mieux lui rendre hommage.

Par Charlotte Mestre

Désenchantement litteraire

Après avoir enchanté bien des lecteurs, la prolifique Claudine Jacques revient avec une saga historique sur la Nouvelle-Calédonie, Un si long battement de cœur. Le pitch nous promet de la passion, des rebondissements, des personnages hauts en couleur… De belles promesses aux lecteurs et pourtant…

1873,

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Plonger de Christophe Ono, dit Biot

ourquoi défendre ce livre ? Peut-être pour le récit. Celui de cet homme, détruit, qui quitte

Paris puis l’Europe afin d’entreprendre un voyage qu’il s’était défendu de refaire vers le Moyen-Orient. Peut-être aussi pour l’histoire d’amour tragique que nous suivons au gré des souvenirs vagabonds du protagoniste : la rencontre amoureuse, le flamboyant couple jusqu’à la destruction. Lente. Douloureuse. J’ai aussi apprécié l’écriture de l’auteur Christophe Ono. Superbe et chargée d’émotion, elle m’a d’autant plus conquise grâce à sa forme épistolaire.

Le triste héros raconte sa vie sous forme de lettres à son fils, créant un lien fort avec le lecteur. Enfin, je finirai sur la proximité entre l’auteur et le narrateur. Leur ressemblance presque perturbante nous interroge constamment sur le lien entre la vie qu’on lit et celle de celui qui l’écrit. La charge émotionnelle du roman est dès lors intense.

FRANÇOIS BENITO

Le coup de cœur du libraire

Publi-reportage

Ce livre, dont le titre prend tout son sens dans les 40 dernières pages, a également obtenu le prix du roman de l'Académie française le 25 octobre 2013.

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Ouvrir le livre de l’exposition Entrez, bien installé dans son salon, serait presque une mauvaise blague. Fred Payet propose au lecteur d’y découvrir le quotidien des squats à travers une série de photographies, au nom de l’association SOS Logement.

littérature

Immersion photographique de Fred Payet dans un squat de Nouméa, ce livre est un « cri d’alerte »de SOS Logement, à qui les

bénéfices sont reversés. Le sujet est grave, longuement débattu et en guise d’introduction, l’association n’hésite pas à culpabiliser le lecteur dans une très courte allocution. Mais ce ne sont pas les textes, faibles au demeurant, qui importent ici.Car à « la lecture » des photographies, on a plus l’impression d’une invitation à la prise de conscience qu’à un sermon en règle. Ces images dressent des fresques narratives, dont chaque détail est révélateur du quotidien qui se joue dans ce squat. Entre les sacs de courses, le linge étendu sur la corde, les décorations aux murs, et même les trophées sportifs, les habitants dévoilent l’intimité de leur vie. Tous photographiés volontairement, ils se présentent au travers d’un portrait

rapproché. Puis, un grand angle les dévoile dans la pauvreté de leur habitat, construit à l’aide d’objets de récupération et de bricolage toujours plus inventif.

Esthétique, mais...

Photographies du quotidien, ces images manquent pourtant de vie. L’œil du photographe transforme un réalisme cru en une mise en scène tutoyant la perfection esthétique. Le spectateur hésitera cependant à juger sévèrement l’esthétique statique des photos et y percevra peut-être l’expression de vies arrêtées, en suspens dans un environnement criant d’injustice. On regrettera juste une mise en page simpliste et l’absence de textes qui personnaliseraient ces regards marqués par la vie. Dommage également que la luminosité présente dans l’exposition du même nom (à Label image) ne se retrouve pas dans le livre.

Malgré ces défauts, ce portfolio fait partie de cette bibliographie qui dénonce et dérange, sans oublier qu’elle constitue aussi une porte ouverte sur une réalité proche et cachée.Alors, Entrez !

Par Claire Thiebaut

Entrez !

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rois amis, un jour pluvieux, le SIDA, un enterrement : le pitch de départ de la comédie musicale L’Air de rien n’est pas le plus appétissant du monde. Pourtant, c’est sans doute l’un des meilleurs spectacles de l’année pour trois raisons.

Premièrement, l’écriture : à la fois juste, poétique et drôle. Même en abordant le triste sujet du SIDA, Gautier Rigoulot parvient à convier la légèreté et l’humour, évitant l’écueil du misérabilisme et le drame. Deuxièmement, le jeu des acteurs. Ils sont quatre à raconter leurs histoires à coup de flashbacks et de chansons : Dominique Jean, Gauthier Rigoulot, Maïté Siwene et Antoine Tibo. Quatre talentueux comédiens dont les joies, les peines et les douleurs résonnent dans le cœur des spectateurs. Mention spéciale à Dominique Jean, interprète de feu Marcel, qui m’a ravi de nombreuses larmes. Troisièmement, la voix de Maïté Siwene.

Une comédie musicale ? L’idée ne déplaît pas mais l’exercice est périlleux. Avec L’Air de rien, Gauthier Rigoulot signe un spectacle complet qui déchaîne les rires et fait couler les larmes autour d’un sujet grave : le SIDA.

Le jeu de Dominique Jean m’a ravi de

nombreuses larmes.

eux heures de rire sans interruption, voilà ce que nous offrait Myriam Sarg pour son premier one woman show, Le plus beau jour de ma vie. Deux

heures à se demander si nos abdos survivraient à tant de sollicitations.Pourtant, rien n’était gagné pour l’humoriste qui a eu l’audace de choisir le thème de la maternité, un sujet

cher à un mastodonte de l’humour : Florence Foresti. Si je vous dis que j’ai préféré Le plus beau jour de ma vie à Mother Fucker, le croirez-vous ? Là où Foresti ne fait qu’effleurer

les problèmes de la maternité, Myriam appuie dessus, les décortique à l’aide de son humour très personnel, trash, noir. Devenir mère ? Ça fait mal. Le dire ? C’est encore plus douloureux. Mais la jeune femme n’a peur de rien et dévoile les coulisses de la maternité comme personne ne l’avait fait. Une gynéco créole très (trop ?) croyante, des réunions de femmes enceintes émotionnellement défaillantes, l’insulte au Tout-puissant là-haut qui a décidé qu’on enfanterait dans la douleur... L’humoriste dénonce les différentes strates de l’enfer par lesquelles elle est passée pour devenir maman. Comme moi. Comme vous. Forcément, on s’y retrouve, on rit, on partage des regards complices. Et les autres femmes ? Les papas ? Les

hommes ? Eux aussi rient car, sur scène, Myriam est une force de la nature. Les différents accents qu’elle imite ou encore les attitudes qu’elle adopte en fonction des personnages incarnés ne peuvent laisser les spectateurs indifférents. Et c’est d’ailleurs d’un

seul corps que le public s’est levé pour l’applaudir à la fin. Une standing ovation méritée.

Pourtant sur deux heures d’un spectacle hilarant, le moment le plus marquant reste l'épilogue, alors que résonne dans la salle toutes les phrases qu’une mère entendra dans sa vie. Ce dénouement tutoie une authenticité à vous donner la chair de poule.Par Gaëlle Perrier

C’est d’un seul corps que le public s’est levé pour l’applaudir.

Devenir mère, un sacré challenge. Écrire son propre one woman show, un défi de l’extrême. Myriam Sarg a réussi les deux avec succès. Le plus beau jour de ma vie, son premier spectacle en solo, a fait le plein au centre culturel du Mont-dore en août dernier.

humour

Un air dans la tetethéâtre

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TCristalline, presque divine, la jeune artiste semble pousser la chansonnette comme on demande une baguette de pain : avec une facilité déconcertante. Pour couronner le tout, les

danseurs talentueux de la compagnie Origin’ habitent la scène et illustrent de leurs entrechats les histoires des personnages. Même si la comédie musicale a souffert d’un manque de spectateurs au centre culturel du Mont-Dore, ceux qui étaient

là ont eu la chance, L’Air de rien, de voir un véritable chef d’œuvre.

Par Gaëlle Perrier

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AU CENTRE CULTUREL TJIBAOUdu 5 nov. au 31 mars 2014

AU CHÂTEAU HAGENdu 5 au 30 nov. 2013

À LA MAISON DU LIVREDE LA NOUVELLE-CALÉDONIE

du 5 nov. au 7 déc. 2013

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À LA LUMIÈRED’UNDOUTE

Renseignements : Tél. 41 45 45www.adck.nc /

centre culturel TjibaouProvince Sud

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e rêvais d'une forêt de sculptures qui s'élève dans la salle Komwi. Je suis ravi de voir que mon rêve est devenu réalité », note avec enthousiasme Guillaume Soulard, directeur artistique du centre culturel Tjibaou. L'exposition Ko Névâ est devenue un rendez-vous incontournable depuis treize années. Sa particularité : promouvoir l'art contemporain autour d'une thématique culturelle touchant à la société, encourager

la créativité et découvrir de nouveaux talents. L'édition 2013 offre à notre regard le travail d'une trentaine d'artistes qui ont été invités à s'exprimer sur le thème « Laisser parler le bois », ce matériau si cher à la culture et à l'art mélanésiens. Le support sur lequel les artistes depuis la nuit des temps ont témoigné de leur créativité à travers des œuvres hautement symboliques. À l'image de ces totems monumentaux.

Totems et sapin

Ils s'élancent vers le plafond, comme s'ils voulaient dépasser l'espace muséal trop étroit pour atteindre le ciel, et impressionnent par le foisonnement des détails. Des gardiens protecteurs des lieux en lien avec le culte des Anciens. Si ces sculptures totémiques dégagent une force et une facture indéniables, elles renvoient toutefois à un savoir-faire ancestral, une transmission. L'innovation artistique, on la découvre ailleurs, dans des œuvres plus conceptuelles ou plus engagées. Parmi elles, ce sapin qui capte le regard, interroge par sa présence, presque incongrue, décalée. Une œuvre de François Uzan qui souligne, tel un manifeste, « la rupture entre l'homme et son environnement naturel, mais aussi culturel et donc sociétal (...) dans un pays où l'exploitation minière forcenée croise le fer avec la volonté de préservation de l'environnement (...) ». Laisser parler le bois, c'est rappeler combien il faut respecter Dame Nature. Ce que nous fait comprendre Jean-Michel Boéné avec une sculpture Touche pas à ma mangrove ! qui représente le fruit du palétuvier, ou celle de Patrice Kaikilekofe qui rappelle que le bois est vivant, une source d'inspiration, un rapport au sacré, un médium qui permet à l'homme de rester en phase avec la nature.

Effervescence

Un matériau noble qui invite à nous plonger dans un univers poétique lorsque l'on s'attarde devant l'œuvre « Des racines et des ailes » d'Olivier Séranne – un bois flotté de gaïac sur lequel se pose délicatement un oiseau. Ou face aux « multiformes » abstraites de Mathieu Venon. La touche humoristique revient à Fabrice Ballay avec La sculpture de voyage, une œuvre en forme de totem avec une poignée pour partir à l'aventure ! L'exposition dégage une sensation d'émulation et d'effervescence créatrice, un propos artistique

et sociétal, qui sont à souligner. « En regardant ces œuvres contemporaines qui révèlent un foisonnement artistique passionnant,

explique Guillaume Soulard, je vois comme un bel écho à l'exposition événement « Kanak, l'art est une parole », présentée au Quai Branly à Paris ».

Par Frédérique de Jode

Exposition Ko Névâau centre culturel Tjibaou« Laisser parler le bois »Depuis l'année 2000, le centre culturel Tjibaou organise l'exposition collective Ko Névâ autour d'un thème culturel en lien avec la société. L'édition 2013 propose carte blanche aux artistes pour donner libre cours à leur imagination et... « laisser parler le bois ».

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Exposition Ko Névâ : « Laisser parler le bois », jusqu'au 23 février 2014.

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« Ipuë » de Jean-Marie Ganeval

« Des racines et

des ailes » (2013)

d'Olivier Séranne

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Un chapeau bien bas aux organisateurs de cette septième édition d'Ânûû-rû âboro, et à son directeur artistique, René Boutin, ainsi qu'aux associations présentes.

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Tous les vainqueurs des films internationauxDébat avec la réalisatrice Momoko Seto, film Arekara

Remise du Prix pour le court métrage locale La Roche Grise, Michelle Noël

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43Retour sur

e court documentaire que je présentais à la septième édition du festival Anûû-rû âboro s’est retrouvé comme un « gosse perdu » au beau milieu de la catégorie « court-métrages du Pacifique » et des nombreuses productions de l'association Poadane. Après avoir joué le jeu rigolo, mais un peu stressant, du réalisateur local pour la presse, je redescends doucement dans le monde pour assister à quelques

projections de films internationaux en tribu. À l’Ombre du soleil de Harry Freeland m'a laissé sans voix. Son sujet sur la condition des albinos en Tanzanie trouve un écho vibrant en Nouvelle-Calédonie. Le Documentariste des Lettons Ivars Zviedris et Inese Klava m'a autant amusé que surpris, au même titre que Atalaku de Dieudo Hamadi. La sélection était vaste cette année et même si mon envie d’assister à toutes les séances était forte, j’animais parallèlement un atelier vidéo dans la vallée d’Ina, torpillant mon désir de tout voir.

Une foule en berne

Cette édition 2013 du festival a été marquée par les rencontres avec les réalisateurs et producteurs présents, essentiellement européens. Il m’a aussi permis de découvrir une autre façon de travailler, un autre regard sur l'industrie du documentaire, à mille lieues de la mienne. Autre agréable constat : des invités internationaux très accessibles, qui se

mêlaient au public afin de provoquer de vrais rapports humains et partager expériences et souvenirs. Ma déception vient d’ailleurs. Je suis seulement étonné du manque de monde sur place. Où étaient donc les Nouméens par exemple ? Chaque année, la sélection est de plus en plus riche et devrait attirer toujours plus de gens. Les organisateurs, comme les tribus dans lesquelles les films étaient projetés se plient en quatre pour accueillir les badauds, être agréables aux spectateurs. Et le concept est tout de même sympathique.Longer les rives de la côte Est pour aller au cinéma, pendant les vacances scolaires, tout en saluant les gens aux abords de chaque village reste pour moi une expérience à vivre. Que j’aimerais beaucoup partager l’année prochaine avec plus de festivaliers. Quand le peuple voyage Je suis parti le temps de quelques jours dans un voyage cinématographique, en acceptant, dès le départ, de me prendre des claques. Mais derrière chaque projection, les débats avec les réalisateurs internationaux invités parvenaient à conclure nos voyages en douceur. Et je n’oublierai jamais que dans les différentes tribus de la province Nord ou au cœur des maisons communes quelques fois surpeuplées, des spectateurs de tous horizons frissonnaient ou s’esclaffaient d'un même sang, devant cette large fenêtre qui les propulsait aux quatre coins du monde.

Par Jimmy Janet

Regard transversalsur Ânûû-rû âboroÂnûû-rû âboro, le « festival des peuples », est un nom poétique et rêveur qui sied parfaitement à cet événement annuel. Pour sa septième édition à Poindimié, Jimmy Janet y assistait en tant que compétiteur. Il nous livre un regard personnel sur les temps forts de l’édition 2013.

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44 FICHES PRATIQUES

POUR NE PAS RIMER AVEC « GALÈRE », LA RELATION ENTRE L’ARTISTE ET LE GALERISTE DOIT ÊTRE CLAIRE DÈS LE DÉPART. UN CONTRAT SIGNÉ PAR LES DEUX PARTIES PRÉCISE LES OBLIGATIONS DE CHACUN.

L’exposition personnelleLes galeries de Nouméa proposent des contrats de location  : l’artiste loue les murs et le montant de vente de ses œuvres lui revient en intégralité ou le galeriste récupère un pourcentage sur les œuvres vendues.

  La galerie s’engage à laisser à la disposition de l’exposant une salle équipée (spots lumineux, vitrines, etc.). Le plus souvent, la galerie aide l’artiste à assurer la promotion de l’exposition auprès des médias. Elle effectue les démarches nécessaires auprès des services administratifs (TSS et contributions diverses) et veille au bon déroulement de l'exposition. Enfin, la galerie garantit à l’exposant la couverture par une assurance incendie de l’ensemble des œuvres présentées. À noter que dans la majorité des cas, le vol ou les dégradations des œuvres ne sont pas pris en charge par la galerie.

  L’artiste s’engage à être présent pendant toute la durée de l’exposition, à fournir une liste précise des œuvres exposées et de leur prix. Il dispose lui-même ses œuvres et chaque tableau doit être équipé d’un système d’accrochage.

L’exposition collectiveDans le cas d’exposition réunissant plusieurs artistes, les œuvres vendues font l’objet d’une commission perçue par le galeriste (environ 30 %). Le responsable du lieu choisit les œuvres présentées et assume entièrement les frais de promotion de l’exposition.

artisteset galeristesune relationde confiance

AU 19e SIÈCLE, PROUDHON DISAIT « LA PROPRIÉTÉ C’EST LE VOL ». EN 2013 AVEC FACEBOOK, LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE C’EST PLUTÔT LE « LOL » ! LE RÉSEAU SOCIAL A ÉTÉ ATTAQUÉ À PLUSIEURS REPRISES DEVANT LES TRIBUNAUX POUR VIOLATION DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE. ALORS COMMENT S’ASSURER DE PROTÉGER SES CONTENUS (VIDÉOS, TEXTES, PHOTOS OU TOUTE AUTRE CRÉATION INTELLECTUELLE) ?

Ce que dit Facebook Inutile de prendre en compte les textes publiés par le réseau social en ce qui concerne le « partage de votre contenu » : ils sont valables pour les utilisateurs américains. Les personnes inscrites sur Facebook et résidant sur un territoire français sont protégées par la loi française. Le Code de la Propriété Intellectuelle est d’ailleurs beaucoup plus protecteur que la législation américaine et toute création publiée sur un réseau social appartient à son auteur.

Quelles précautions ?

Cependant en souscrivant un compte Facebook, l’utilisateur accepte le « contrat ». La subtilité réside dans le choix de ses paramètres de confidentialité. En cas de procès, le juge prendra en compte les paramètres choisis. Il s’agit donc de bien verrouiller l’accès à sa page et à ses publications. Mais la meilleure façon de protéger ses créations reste de ne pas les publier.Facebook doit rester un outil de communication et non un lieu de diffusion. Enfin, si un utilisateur partage un contenu protégé par un droit d’auteur mais publié sur une page dite « publique », c’est l’administrateur de la page qui sera mis en cause. Merci à la SACENC pour son aide sur le sujet.

PropriEtE intellectuelle sur Facebook : vos contenus vous appartiennent

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ngan jila, la maison des richesses.Renseignements : Tél. 41 45 45 - www.adck.nc

à l’affiche au centre culturel Tjibaou

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KONÉVÂ*LAISSER PARLER LE BOIS* «L’ESPRIT DU PAYS » EN LANGUE AJIË

Du 29 octobre 2013 au 10 février 2014Salle Komwi

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46 Parcours

Les sardines du Chapitô sont désormais bien implantées dans le sol calédonien. Pourtant, quand tout a commencé, il y a cinq ans, l’équipe de cette salle mobile passait pour une belle bande

d’illuminés.2006 : Anne-Sophie Arzul passe un mois à jouer au Festival d’Avignon. Un mois à échanger autour du théâtre. Riche de cette expérience, elle revient sur le Caillou avec une envie : démocratiser la culture. Un matin, l’idée la frappe, « comme ça ». Il lui faut un chapiteau ! Une structure capable de se démonter et de se remonter partout ! Mais à l’époque, l’artiste est loin de la vie itinérante et n’y connaît pas grand-chose en matière de tente. Elle travaille en effet au théâtre de l'Île et réfléchit entre autres choses sur les questions de l’art à l’école.

Tente, mode d’emploi

Tout commence donc par l’écriture du projet et la recherche d’argent pour le financer. Un travail qui prendra près de deux ans. Mais en 2008, la « toile » finit par prendre la mer, direction la Nouvelle-Calédonie. Départ de Saint-Martin-de-Castillon, dans le Vaucluse pour débarquer au port de Nouméa, le 12 juin 2008.Pas de célébrations prématurées : avant d’attaquer les festivités, il faut monter la bête. Seul maquereau dans les sardines : personne ne sait vraiment par quel bout prendre le chapiteau malgré les nombreux bénévoles venus donner la main. Heureusement, Doudou, le chef monteur de Métropole, est là pour aider à décrypter le mode d’emploi. Le 20 juin, tout est fini. « On a vraiment eu une semaine de folie. Mais quand on a posé le premier projecteur sur le plancher, c’était magique. Cela prenait tout son sens même si on n'avait encore

aucune idée de ce qui allait arriver ensuite », se remémore Anne-Sophie Arzul, qui passe d’ailleurs la première nuit sous le chapiteau, de peur de le laisser « tout seul »...

En route pour la culture

Une semaine plus tard, l’odyssée commence. Ponérihouen, Ouvéa… La maîtrise est encore approximative, mais ça y est, l’équipe entre dans le vif du sujet : créer des liens

avec la population autour de spectacles tout en désacralisant le statut de « l’artiste », et, pour reprendre les mots d’Anne-Sophie Arzul, « pour tisser une grande toile autour d’un bout de plastique ». En cinq ans, le dessein du Chapitô n’a pas dévié d’un pouce.L’équipe oui, en revanche. La vie sur les routes n’est pas toujours évidente même si les conditions se sont considérablement améliorées, surtout depuis que le Chapitô s’est doté de matelas... Il faut composer avec les éléments et notamment le vent. « Quand il se déchaîne, on a vraiment l’impression que c’est l’apocalypse », glisse la directrice du Chapitô. Pour éviter les inondations, il faut

parfois se lever à deux heures du matin afin de creuser des tranchées. Et puis vivre en communauté peut peser lourd lorsque l’on n’est pas taillé pour.Alors comme dans toute famille, il y a des hauts et des bas. Mais pour Anne-Sophie Arzul et son équipe, plus question de revenir travailler dans un bureau, sauf pour préparer les tournées. Et quand ça arrive, chacun ronge son frein en attendant le prochain départ, son lot de rencontres et d’aventures.

Par Mathurin Derel

En route avecle ChapitôUne toile orange au milieu d’un champ, une bande de joyeux drilles qui fanfaronnent autour, la plaisir des enfants qui l’aperçoivent… Le Chapitô fête son cinquième anniversaire en accueillant l’arrivée d’un « bébé chapiteau ». L’occasion de découvrir le parcours atypique de cette structure itinérante.

UN PROJET ARTISTIQUEEN CONSTANTE ÉVOLUTION

Le chapitô propose entre cinq et sept spectacles par an tout autour de la Nouvelle-Calédonie avec, dorénavant, le très original festival des Hurluberlus. Mais la structure réalise également des actions culturelles dans les endroits où elle se pose, notamment auprès des jeunes

publics. Ce volet du Chapitô va passer à la vitesse supérieure avec l’arrivée du petit frère, le P’tit Chap’, qui tournera un peu partout à l’image du grand frère. L’équipe intervient aussi dans les lycées. L’année dernière, elle a mené un grand projet avec 80 lycéens de Touho qui s’y sont produits pendant près d’une heure. Dans le cadre de son projet artistique 2011-2014 et pour créer des liens avec la population, le Chapitô donne par ailleurs des « cartes blanches » à des artistes locaux. La structure aide ces personnes relais à écrire leurs projets, à trouver des financements et à se produire.

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48 Métier

n jongleur ? Non. Un équilibriste ? Un chef d’orchestre ? Toujours pas. Un chef d’orchestre qui  jongle avec ses partitions en équilibre sur un fil ? Voilà une belle image

pour comprendre le métier de directeur du salle. Clairement, il faut surtout de la passion pour y parvenir. Du point de vue de Grégory Louzier, ce métier, c’est une vocation. Enfin presque. À cinq ans, il rencontre Jean-Pierre Quintin. L’homme a des chaînes en or, une super moustache et s’occupe des artistes. De ses yeux d’enfant, il le voit s’amuser avec Patrick Sébastien et son « petit bonhomme en mousse ». C’est décidé, Grégory veut faire comme lui ! Vingt-trois ans plus tard, il a fait de la musique, du droit, monté l’ADAMIC*, administré et dirigé le théâtre de l’Île et le CCMD. C’est avec ce parcours bien rempli qu’il apprend qu’un directeur de salle a bien d’autres missions que de « s’occuper des artistes ».

Dompter la bourse

Une des plus importantes, c’est la gestion. L’autre étant la programmation et les deux s’influençant forcément. « Il faut avoir de bonnes connaissances

en gestion du personnel. On travaille le soir, les jours fériés, toujours en flux tendu. Il faut donc pouvoir concilier une saison culturelle avec les règles du droit du travail. » Pas de soucis, une maîtrise de droit, ça sert à ça. Le plus compliqué finalement, c’est le budget. Surtout quand on passe de 100 millions au théâtre de l'Île à 5 millions pour le CCMD. « 40 spectacles par saison avec 5 millions, c’est un peu de la magie. Alors on se débrouille, on mise sur les partenariats, les associations qui, elles, peuvent bénéficier de subventions contrairement à nous. On négocie avec les artistes pour travailler en co-réalisation avec partage de recettes. » Et ça marche. En six ans, la programmation a presque doublé.

Numéro de voltige

La programmation, c’est la partie « fun ». Même si on n’est pas là uniquement pour se faire plaisir. « On est là surtout pour soutenir les artistes. Ne pas aimer ce que fait un artiste, c’est possible, mais il est important de reconnaître la qualité du travail accompli et du spectacle qui en résulte. Il y a des coups de cœur mais il faut aussi conserver un certain détachement. » Et là aussi, savoir jongler, équilibrer. Permettre à tous

les arts et tous les courants d’avoir la même visibilité sur l’année avec les vacances, les ponts, les rendez-vous récurrents et le reste. Parce que le CCMD, c’est aussi les projets scolaires, les résidences d’artistes, la mise à disposition de salles de répétitions. Pour caser tout ça, Grégory rencontre les artistes, discute des projets, suit l’actualité culturelle. Un travail harassant et un retour sur investissement limité. « Depuis 2007, le budget n’a pas bougé. C’est de ma faute aussi, je me débrouille avec ce que j’ai. Mais à un moment, c’est usant. On n’est absolument pas aidés. Pourtant on a une vraie mission de service public ». Reste la vraie reconnaissance, celle du public et des artistes qui ont largement adopté le lieu. « On a gagné notre pari de montrer que le Mont-Dore n’est pas si loin, on y passe de bons spectacles et qu'il n’y a pas d’insécurité. » Ou comment un dresseur de scènes a réussi à amadouer le pire des fauves dans le monde de l’art : le public calédonien.   

Par Charlotte Mestre

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* l’Association pour le Développement des Arts et du Mécénat Industriel et Commercial. Elle gère, entre autres, le Chèque Culture et le Rex.

Programmer des artistes, insuffler au public l’envie de venir les découvrir sur scène, gérer les budgets serrés… Une liste non exhaustive des tâches attribuées au directeur de salle. Et dans ce métier, Grégory Louzier excelle. En six ans d’activité au centre culturel du Mont-Dore (CCMD), il a réussi le tour de force de quintupler le nombre de spectateurs.

The Show must go on*

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50 LieuLe musée est cofinancé à parts égales

par la ville de Nouméa et la province Sud. La gestion est confiée à la mairie par l’intermédiaire du musée de la Ville.

« Sans la présence américaine, le destin du Pacifique aurait basculé. » Ces mots, Jean Lèques les prononce avec beaucoup d’émotion lors de l’inauguration du musée consacré à la Seconde Guerre mondiale, le 19 septembre dernier. 73 ans plus tôt, jour pour jour, il voyait sa chère Calédonie entrer de plain-pied dans la France libre du Général de Gaulle.

L’APPELDU PASSÉ

ors de l’inauguration du musée de la Seconde Guerre mondiale en septembre dernier, l’émoi des officiels et des spectateurs était palpable. « Le rêve est devenu réalité. Après toutes ces années, nous sommes fiers d’inaugurer ce lieu », s’enthousiasme Jean Lèques,

maire de Nouméa. Un lieu hautement symbolique, puisque la demi-lune se situe près de la rade où plus de 18 000 Américains ont débarqué en mars 1942. « Un endroit idéal qui va permettre de conserver et de promouvoir une page difficile mais glorieuse de la Nouvelle-Calédonie », conclut le maire.

L’ambiance des années 40

En 1943, la demi-lune de l’avenue Paul-Doumer était utilisée par l’armée américaine pour stocker son matériel. Aujourd’hui, elle stocke les souvenirs du passé. Afin de recréer l’ambiance de l’époque, les concepteurs du musée ont opté pour une architecture industrielle où alternent métal et verre. D’anciens meubles et des objets de l’époque sont incorporés au décor. On retrouve ainsi des portes prises sur l’ancien bâtiment américain du Pentagone de l’Anse Vata.Le musée s’articule autour de différents espaces qui, au-delà de retracer l’histoire de la guerre, racontent celle d’une époque. L’exposition permanente ainsi que le centre de documentation sont riches de nombreux documents, photos et autres objets mis en scène de façon à plonger le visiteur au cœur de cette période mouvementée et pourtant fondatrice du pays que nous connaissons aujourd’hui.

American Touch*

De la reconstitution d’une chambre d’hôpital à la présence des deux jeeps, sans oublier les vitrines où s’amoncellent les articles du passé et les bouteilles de Coca-Cola... Autant de preuves de l’impact de l’arrivée des Américains sur le sol

calédonien. Une autre attraction très ludique : un survol de la capitale réaliste et instructif, autant sonore que visuel.Le musée retrace aussi le destin des Calédoniens qui ont choisi d’intégrer le Bataillon du Pacifique. Certains visiteurs retrouvent ainsi l’histoire d’un membre de la famille parti combattre avec les Alliés. Jean-Jacques Brot, haut-commissaire, souligne d’ailleurs l’aspect « historique et admirable » de ce musée qui permet de « ne pas oublier le rôle de la Nouvelle-Calédonie au cours de cette guerre ». Histoire, émotion, souvenirs... le musée raconte une période agitée et significative du Caillou, source

d’énormes bouleversements dans le quotidien et la mentalité des Calédoniens.

Par Aurélie Cornec

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MUSÉE PRATIQUEMusée de la Seconde Guerre mondiale | 14, avenue Paul-Doumer | Tél. : 27 48 70

Ouverture du lundi au vendredi de 9 h à 17 h et le samedi de 9 h à 13 h et de 14 h à 17 hTarifs : 200 F, 100 F pour les étudiants et les plus de 60 ans, 50 F pour les

12/18 ans, gratuit pour les moins de 12 ans et les personnes handicapées

Ce musée permet de ne pas oublier le rôle de la Nouvelle-Calédonie au cours de cette guerre.Jean-Jacques Brot

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4SPECTACLE

théâtre solidaire L’AGENCE TOUS RISQUES

Pour tuer l’ennui,

un groupe d’amies

du troisième âge se

rencontre tous les

mardis soir pour un

poker et autres jeux

de société. Soirées

dont, à la longue, elles

finissent par se lasser

… Elles regrettent

la présence des

hommes qui, malgré leurs nombreux défauts,

les amusaient beaucoup. Que faire pour renouer

avec la gent masculine ? Aux grands maux, les

grands remèdes : elles montent une agence

matrimoniale.

Samedi 14 et dimanche 15 décembre

à 18hTout public / Durée : 45 mn

Tarif unique : 1 500 F

ART’PÉRITIFSOIRÉE ITINÉRANCEDE CLÔTURE DE SAISON

VOUS ÊTES PROPRIÉTAIRES ! Jusqu’au 21 décembre

Une vingtaine de tableaux issus de la collection municipale sur le thème de la ville et du territoire, en avant-première des 160 ans de la Ville qui seront célébrés en 2014.Certaines des œuvres seront accompagnées d’un texte écrit par un acteur de la construction de la ville (urbaniste, architecte, aménageur…).

Les œuvres exposées :- Carte géographique II de Mariana Molteni- Une œuvre du centre-ville de Kim Seung-

Taek, contributeur : Anny Levanqué (chef du service de l’insertion urbaine)

- Entrée de port de Nouméa (1958) de Tavernier, contributeur : Carine Daly (chef de la subdivision opérationnelle de la construction)

- Doniambo Ecolo de Johanes Wahono- SLN de Johanes Wahono, contributeur :

EXPOSITION

STAGESComme chaque été, le centre d’Art

propose de nombreux stages artistiques

d’arts plastiques, de musique, de

mosaïque et de théâtre.

Programme détaillé auprès du

centre d’Art ou sur www.noumea.nc

En partenariat avec

Mise en espace par le metteur en scène Dominique Jean avec la complicité de danseurs, de comédiens et d’artistes, cette soirée sera une invitation au voyage des sens, de l’esprit et du corps avec une série d’animations et de performances théâtrales, musicales et artistiques proposée à l’intérieur du centre d’Art, puis sur le chemin reliant le centre d’Art et la Maison du Livre et enfin dans les locaux de cette dernière. 17 décembreEntrée libre et gratuite pour tout public.Sous réserve de bonnes conditions météorologiques.

Le centre d’Art passera en heure d’été à partir du 18 décembre, renseignements au 25 07 50. Ouverture au public des bureaux administratifs

et de la billetterie de 8h à 16h en continu.

Maison de l’architecture (Nathalie Marchand, Caroline Marlot et Gaëlle Henry)- Squatman junior de Stéphane Foucaud, contributeur : Dominique Bayol chef du pôle urbain du SIGN- The Good for evil de Stéphane Foucaud- Sans titre de Franck Fay, contributeur : Maison de l’architecture (Nathalie Marchand, Caroline Marlot et Gaëlle Henry)- Le nickel de Franck Fay,

contributeur : Nicolas Thioulouse (représentant du cabinet Woods Bagot)

- Sans titre de Franck Fay- L’Hôtel de Ville de Nouméa de Brossard Du

Bourg- Aquarelles sur le centre-ville de Miriam

Schwamm, contributeur : Steven Meriadec (chef du service du développement urbain)

- Plan Coffyn de Laurence Lagabrielle- Rupture et continuités de Dominique Roy- Entrée de Ville de Paul Mascart

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52 Portfolio

Images du Waan Danse

et du K-MuzikEn cette fin d'année, deux photographes sont à l'honneur dans le PORTFOLIO d'Endemix. Éric Dell'Erba

revient avec poésie sur le festival Waan Danse tandis que Stéphane Thabouret présente les musiciens

du K-Muzik, lors de leur concert à Lyon en octobre dernier. Images. 1

23

4 52 La beauté en suspension par les danseurs d'Afrique du Sud de Robin Orlyn.

1 La compagnie de danse contemporaine de Nouvelle-Calédonie a conquis le public notamment grâce à ses costumes très inventifs.

3 La compagnie Moebius a revisité certaines fables de La Fontaine avec humour, espièglerie et poésie. Ici Le lion et le moucheron en plein match de catch.

4 Convergences entre Lætitia Naude et Richard Digoué.

5 Jupes, sonailles, voix, tout est rythme avec les danseurs de Tyaou.

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6 Louis Upane, le directeur artistique du projet enchaîne les morceaux avec virtuosité sur ses deux claviers.

7 La voix voluptueuse de Rosina Hmae est la brise marine soufflant sur les voiles de la pirogue du K-Muzik.

8 L'équipe réunie pour les saluts, un moment chargé en émotions et une ovation pour le K-Muzik par le public lyonnais.

9 Maxim Dassonneville accompagne les chanteurs avec générosité.

10 Derrière ses lunettes, Joseph Iekawé est prêt pour 1 h 30 de grand spectacle ! 1, 2, 3, 4 !

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p. 54 Il était une fois

Le Boty, les ateliers de graff, les open mic… le hip hop calédonien n’a jamais eu autant de scènes pour s’exprimer. Mais avant de devenir un courant populaire et plébiscité, il a dû lisser son image et composer avec une réputation sulfureuse de « mauvais garçon ».

Une casquette, un baggy, un débardeur, des baskets et un bon sens du beat. C’est le portrait robot des gamins qu’on croise sur le « damier » de la place des Cocotiers. Un lieu emblématique du hip hop local, l’un des premiers adoptés par les danseurs de break. C’est d’ailleurs via le breakdance que le hip hop a percé sur le territoire. Une percée qui date, selon certains, du début des années 80. Mais c’est vraiment dix ans plus tard que le hip hop se fait remarquer, d’abord dans les quartiers populaires. Culture revendicative et militante, elle devient un moyen d’expression pour une jeunesse en mal d’écoute mais reste impopulaire, marquée par la mauvaise image de son côté contestataire.

Beat Party*

Début 2000, le développement d’Internet change la donne. Les premiers collectifs se montent et les pouvoirs publics, d’abord réticents, prennent conscience de son influence positive. Les premiers ateliers se créent d’abord autour de la danse puis

de la musique dans les maisons de quartier et au Rex. Le Rex qui, depuis sa reconversion en 2008, est devenu un moteur du milieu. Les participants aux ateliers d’écriture peuvent désormais s’y enregistrer, y produire leur instru et même leur clip. Côté graffeurs, si on n’a pas attendu des autorisations pour bomber, le mur d’expression géant de la FOL, les chantiers d’insertion ou les animations permettent de gommer l’image de vandales et d’ouvrir cette discipline artistique au grand public.

La jeunesse en mouvement

Après les premiers collectifs un peu éclatés, le mouvement gagne en structure. Aujourd’hui, l’association Street Force Attitude chapeaute tous les événements liés à la danse. Dans le graff, c’est autour des crews ATM et GB que l’actualité se fait. Même chose en musique où les collectifs Ina Da Street et BB4 Prod organisent des soirées. Mais la preuve de cette explosion, c’est l’omniprésence du hip hop. Plusieurs émissions radio lui sont consacrées. Les rappeurs comme Ybal Khan ou Kydam connaissent un succès populaire et critique. Le graff s’affiche sur les murs de la capitale et des fresques sont régulièrement commandées par les institutions et les entreprises.Cerise sur le beat : nos danseurs s’exportent. Les vainqueurs du Battle of Païta ont ainsi fini 3e lors d’un battle international à Sydney en juillet dernier. Pas mal pour un confetti du hip hop perdu dans le Pacifique ! 

Par Charlotte Mestre

OÙ ÇA SE PASSE ?Si le damier de la place des Cocotiers et le Rex sont devenus incontournables quand on parle hip hop, d’autres lieux ont également joué un rôle important dans l’essor du mouvement. À commencer par les Maisons de Quartier, parmi les premières à accueillir des ateliers. Même chose avec le « faré » de Rivière-Salée, collé à la Maison de Quartier, où le collectif Résurrection est né. Il y a aussi le Dock socioculturel de Païta qui organise depuis quelques années le Battle of Païta et permet notamment aux autres danses hip hop comme le krump ou le lockin’ d’avoir une scène.

De génération en génération

IL ÉTAIT UNE FOIS

* La fête du son

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12/2013-02/2014Le 11/12 de 14 h à 15 h

CONTES DE NOËLà la médiathèque de Rivière-SaléeContes de Noël par les biblioconteuses.Public : pour les 3-12 ans.

Jusqu'au 14/12 GRAFFITI ADDICT

ExpositonSham, artiste graffeur, aime jouer avec les lettres et mettre de la couleur dans les rues. Un univers poétique et graphique qui mêle les lettres stylisées aux motifs océaniens, les B-Boys aux tikis, la rue à la toile.

Le 17/12 SOIRÉE ITINÉRANCE

Clôture de saison du centre d’Art et de la Maison du Livre Nouvelle-Calédoniemise en espace par le metteur en scène Dominique Jean avec la complicité de danseurs, de comédiens et d’artistes, cette soirée sera une invitation au voyage des sens, de l’esprit et du corps.

Jusqu’au 18/12 VIES ET MAISONS D'AVANT

Exposition à la Maison du Livre.L’association Témoignage d’un Passé (ATUP) propose une exposition sur le patrimoine bâti et sur des témoignages de familles calédoniennes. Entrée libre et gratuite.

Jusqu'au 23/02/2014

En collaboration avec Roger Boulay.Depuis des années ce malicieux savant s’amuse à relever, sur des bambous gravés anciens, les scènes érotiques dont les reproductions sont présentées dans cette exposition.

EROTIK KANAKSalle Kavitara au centre culturel Tjibaou

ORIGINELExposition à la galerie photo Label image

Jusqu’au 24/12.

p. 55Agenda

LE NOMBRE D'OR

Du 1er au 31/12 Chez Andemic Art GalleryPar Kabradinsky

Du 5/01 au 9/02/2014 UN ÉTÉ AU CINÉ

organisé par la province Sud

Jusqu'au 23/02/2014 KO NÉVÂ :

LAISSER PARLER LE BOIS Salle Komwi au centre culturel Tjibaou

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56 À suivre...

La ruée VERS L'ART

Une vingtaine de sculptures créées par Adjé, en étroite collaboration avec l’artiste maréen Ito Waïa et Jean Marie Ganeval, sera

exposée dans les rues et autres espaces publics. Ce projet inédit, majoritairement soutenu par la province Sud, permet au plus grand

nombre de se retrouver immergé dans une vaste exposition d’art contemporain tout en posant la question du respect et de la confiance.

Lancement de l’exposition « À la rue » au Mont-Dore du 4 décembre au 7 janvier, puis autour du marché de Nouméa jusqu'à mi-février. À

découvrir ensuite dans différentes communes (vernissage le 11 décembre).

Une fin de saison EN BEAUTÉ

La soirée de clôture des saisons culturelles de la Maison du Livre de Nouvelle-Calédonie et du

centre d’Art de la ville de Nouméa se déroulera le jeudi 17 décembre, autour du thème du

nomadisme. Entre voyage et évasion mentale, cette soirée rassemblera de nombreux artistes

dirigés par Dominique Jean, comédien et metteur en scène.

La soirée « Itinérance » débute à 18 h au centre d’Art de la ville de Nouméa et se poursuit à la

Maison du livre de Nouvelle-Calédonie dès 19 h 30.

28 LANGUES KANAK,

1 grand concours d’écriture

Dans le cadre du premier Festival des arts du pays, le Service de

l’Enseignement des Langues et de la Culture Kanak (SELCK) du vice- Rectorat, l’Académie des Langues

Kanak (ALK) et la Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie ont lancé un

grand concours d’écriture en langues kanak : « Su fè tara » (« invitation à écrire » en xârâcùù). À travers

l’écriture d’une anecdote, d’un récit de vie ou encore d’un témoignage, ce projet tend à encourager de nouveaux

talents d’auteurs en langues et recueillir également des textes contemporains pour les établissements scolaires. Les résultats seront annoncés en février

prochain, mais les textes gagnants seront présentés à la presse par les lauréats eux-mêmes, le 8 mars.

Clôture du concours le 18 décembre 2013. Les textes gagnants seront publiquement présentés par leurs auteurs le 8 mars 2014, une date symbolique puisqu’elle

coïncide avec la clôture du Festival des arts du pays.

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Cartes FOLLESUne belle opération, « Mon pays, notre

destin commun », a vu le jour le 24 septembre dernier. Des enfants et des adolescents ont envoyé ce jour-là des cartes postales à des anonymes tirés

au hasard dans l’annuaire du pays. On pouvait y lire un message de fraternité

réalisé dans le cadre d’ateliers d’écriture. À leur tour, les destinataires sont invités à envoyer une réponse à l’aide d’un coupon

détachable à la Fédération des Œuvres Laïques (F.O.L.) qui transmettra aux jeunes

expéditeurs. Une très belle initiative qui devrait se renouveler tous les ans.

Autre actualité de la F.O.L., les locaux qui surplombent Nouméa seront bientôt reconstruits dans le cadre d’un accord signé avec la province

Sud. Un concours d’architecture sera organisé très prochainement.

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LA MUSIQUE fait son cinéLe concours de l’industriel Xtrata (maintenant Glencore),

lancé il y a quelques mois pour aider les réalisateurs à financer la musique de leur film, a révélé son grand

gagnant le jeudi 28 novembre au centre culturel Tjibaou. Le jury, composé de plusieurs professionnels de la

musique et du cinéma, s’est prononcé pour soutenir le projet Contacts. Karl Baudoin, le compositeur, touchera ainsi une aide de 300 000 francs pour mettre en musique

le prochain moyen-métrage de Roland Rossero. Mais dans le but de valoriser la qualité des quatre projets en lice Xtrata a choisi d’attribuer un deuxième prix, celui

de l’encouragement, au compositeur David Imbault pour le projet Les sondeurs de Manuella Ginestre. Encore un

grand pas en avant pour le cinéma local !

Roland Rossero et Karl Baudoin reçoivent leur prix des mains de Francis Gaillot du conservatoire de musique de Nouvelle-Calédonie.

Silence... ACTION !L’association métropolitaine « Dick Laurent » est spécialisée dans la production et la diffusion du 7e art, notamment celle du court-métrage de fiction. Éric Deschamps, créateur de la structure, se rend

en Calédonie en janvier, l’occasion pour le Bureau d’Accueil de Tournage de la province Sud d’organiser

une projection de courts-métrages. À l’issue du visionnage, le public pourra profiter de la présence de ce réalisateur/producteur pour lui poser toutes les questions sur ce genre cinématographique

parfois méconnu.Rendez-vous le 24 janvier

à partir de 18 h.

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CONTACT TÉL. LIEU EMAIL SITE INTERNETCentre culturel de Dumbéa Alice Pierre 412307 Dumbéa [email protected] www.mairie-dumbea.nc

FOL (Fédération des Œuvres Laïques) Pascal Hebert 272140 Nouméa [email protected]

Centre culturel provincial de Hienghène Goa ma Bwarhat Édouard Wamai 428074 Hienghène [email protected]

Centre culturel provincial de Koné Pélagie Nerhon 471106 Koné [email protected] www.pomemi.nc

Centre socioculturel de La Foa Jean-Pierre Lafay 443301 La Foa [email protected]

Centre culturel du Mont-Dore Grégory Louzier 419090 Mont-Dore [email protected] www.mont-dore.nc

Dock socioculturel de Païta Marc Richer 354404 Païta [email protected] www.ville-paita.nc

Centre culturel Tjibaou Guillaume Soulard 414535 Nouméa [email protected] www.adck.nc

Centre culturel Yeiweine Yeiweine Noël Guanere 450137 Maré

Andemic Art Gallery Éric Morarin 286990 Nouméa [email protected]

Arte Bello Patrick Vaudelle 253100 Nouméa [email protected]

Artifact/DZ Galerie Didier Zanette 241385 Nouméa [email protected] www.art-tribal-online.com

Bibliothèque Bernheim Christophe Augias 242090 Nouméa [email protected] www.bernheim.nc

Galerie 11 & 1/2 Franck Chan San 289115 Nouméa [email protected] www.onzeetdemi.com

Label Image Claude Beaudemoulin 26.46.00 Nouméa [email protected] www.facebook.com/pages/Labelimage

Le Chevalet d'Art Éric Valet 249242 Nouméa [email protected] www.lechevaletdart.nc

Lec Lec Tic Hélène Janet 825601 Nouméa [email protected]

Médiathèque du Nord Nicole Grochain / Marguerite Waly

426700 Poindimié [email protected] / [email protected] / [email protected]

www.mednord.nc

Tieti Tera Beach resort Stéphane Brun 436400 Poindimié [email protected] www.tera.nc

Médiathèque / complexe culturel de Koné Morgane Goromoedo 472065 Koné [email protected] www.bernheim.nc

CENTRES CULTURELS

LIEUX D’EXPOSITION

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Académie des Langues Kanak Weniko Ihage 286015 Nouméa [email protected] www.alk.nc

Antenne du Conservatoire de musique et de danse de Koumac Alfred Haïno 423304 Koumac [email protected]

Centre musical Mêre â gâârâ Renaldo Nérhon 424221 Houaïlou [email protected]

Conservatoire Annexe de Koné Hervé Lecren 473033 Koné [email protected] www.afmi.nc

Conservatoire Hnime ulane, antenne de Lifou Marie Hnanganyan 454575 Lifou [email protected] www.afmi.nc

Conservatoire de musique et de danse de la Nouvelle-Calédonie Francis Gaillot 246315/240206 Nouméa [email protected] www.conservatoiremusique.nc

Écomusée du Café de Voh José Kabar 473736 Voh [email protected] FB/ecomuseeducafe.voh

EMI - École du Multimédia et de l'Image Pascale Gery 471275 Koné [email protected] www.emi.nc

Le Chapitô de Nouvelle-Calédonie Anne-Sophie Conan 275636 Nouméa [email protected] www.lechapito.unblog.fr

Le Rex Manuel Touraille 282629 Nouméa [email protected] www.noumea.nc/espace-jeunes/culture/le-rex-noumea

Café concert le Mouv' Christophe Ventoume 411518 Nouméa [email protected] www.lemouv.nc

Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie Jean-Brice Peirano 286510 Nouméa [email protected] www.maisondulivre.nc

Musée territorial de Nouvelle-Calédonie Solange Neaoutyine 272342 Nouméa [email protected] www.museenouvellecaledonie.nc

Théâtre de l'Île Marie-Ève Delatte 255056 Nouméa [email protected] www.theatredelile.nc

Théâtre de Poche (centre d'Art de la ville de Nouméa) Lydie Gardet Cécile Robert

250750 Nouméa [email protected] [email protected]

www.noumea.nc/le-centre-dart

Art'Café Olivier Petit 278003 Nouméa [email protected]

La Barca Thierry Frottier 772903 Nouméa [email protected] www.restocity.nc

La Bodega Del Mar Jean-Luc Deroin 261153 Nouméa www.bodega.nc

Le Bohème 286600 Nouméa www.facebook.com/pages/Le-Boh%C3%A8me-Bar-Spectacle/61000982530

Le Bout du Monde Eric Napierai 277728 Nouméa

La Fiesta Eddy 262133 Nouméa [email protected]

Le Flex Club Élisa Pulpito Nouméa [email protected] www.facebook.com/flex.nc

L'Imprévu 241145 Nouméa

Le Malecon Café Antony 282805 Nouméa

Le MV Lounge Élodie et Romain 789767/785735 Nouméa [email protected] www.facebook.com/mvloungenoumea

Le Château Royal 230140 Nouméa [email protected]

Le Sweet Café Roxanne Hugeaud 442930 Bourail [email protected]

Le Toucouleur Zakia 765845 Koné

Les 3 Brasseurs Patrick Hogan 241516 Nouméa [email protected]

LIEUX DE DIFFUSION ET DE FORMATON

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Du 5 janvier au 9 février 2014

EN PARTENARIAT AVEC LA COORDINATION NATIONALE " PASSEURS D’IMAGES "

La province Sud agit pour vous

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