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#10 mars - mai 2015 GRATUIT ART & CULTURE DE NOUVELLE-CALÉDONIE province Numéro spécial Nord INTERVIEW P.12 Lauréat du prix Export des Flèches de la Musique BOAGAN

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Le magazine Endemix de mars - mai 2015 - Spécial Nord, avec au sommaire : Koumac joue la comédie, Sari Oedin, A7JK, Teddy Diaïke, Lycée de Pouembout, Sylvain Wenethem, Victor Tutugoro. Et aussi Guilhem, Boagan, Endemix Week-End, Era Kaneka, Le nemi, Valdel, Brice Poircuitte, Alan Nogues, Samuel Kitchine, Frédérique Viole, Nice To Meet You, le bureau des artistes, le Cri du Cagou, le Musée de la Mine de Thio, etc.

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Page 1: Endemix 10

#10mars - mai 2015

GRATUIT

ART & CULTURE DE NOUVELLE-CALÉDONIE

provinceNuméro spécial

Nord

INTERVIEW P.12

Lauréat du prix Export des Flèches de la Musique

BOAGAN

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Boursesd’enseignement

artistique

AudiovisuelMusiqueThéâtreChantDanseArts visuelsCirque

•••••••

Dépôt des dossiers jusqu’au 29 mai

Pièces justificatives,montage du dossierde demande

Où ?Centre Administratifde la province Sud(Direction de la Culture)6, route des ArtificesBaie de la MoselleNouméa(ouvert de 7 h à 18 h)

Et sur :province-sud.nc(dossier complet entéléchargement)

Contacts :Tél. 20 48 [email protected]

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Directeur de la publication : Chris TatéossianRédactrice en chef : Claire Thiebaut ([email protected]) Coordinatrice : Virginie Soula ([email protected]) Rédaction : Académie des Langues Kanak, Léa Bouarat, François Bensignor, Stéphane Camille, Coralie Cochin, Sylvain Derne, Jean-Marc Estournès, Frédérique de Jode, Le Cri du Cagou, Clémence Losserand, Antoine Pecquet, Charlotte Petiot, Virginie Soula, Théo Rouby, Gilbert Kaloombat Tein, Vincent VuibertPhotographies : AFMI, Éric Aubry, Richi Bouanou et Philippe Jemaa, Coralie Cochin, Éric Dell’Erba, Patrick « Patham» Hamm, Clémence Losserand, MLNC, Onepix, Antoine Pecquet, Denis Pourawa, Théo RoubyCouverture : Éric AubryCorrections : PipelettesCommerciale : Sandrina Bouyé ([email protected])Maquette, réalisation et couverture : Push & Pull Tél. : 24 22 49Impression : Artypo Tirage : 12 000 ex.Distribution : TotemISSN : en coursLe Pôle Export de la Musique et des Arts de Nouvelle-Calédonie est une association à but non lucratif créée en décembre 2007. Il a pour mission de promouvoir la création locale à l’intérieur et à l’extérieur du territoire en accompagnant collectivement les artistes et en mettant à leur disposition des outils et un réseau-ressources local et international.

Le Poemart :Pôle Export de la Musique et des Arts de Nouvelle-Calédonie1, rue de la RépubliqueL'Orégon, 98800 NouméaNouvelle-CalédonieTél. : (687) 28 20 [email protected]

La Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie21, route du Port-DespointesFaubourg-Blanchot98800 NouméaNouvelle-CalédonieTél. : (687) 28 65 [email protected]

La bibliothèque Bernheim41, avenue du Maréchal Foch98800 NouméaNouvelle-CalédonieTél. : (687) 24 20 [email protected]

Endemix est publié par :

ILS FONT LA CULTURERencontre underground avec Nice to Meet You CRITIQUES LITTÉRAIRES  Le Pays d’entre deux de Bernard Berger  Le Bouclier rouge de Claudine Jacques  À l’orée du sable de Déwé Gorodey  L’Or du bout du monde de Tamara McKingley  Buveurs de kava de Patricia Simeoni et Vincent Lebot  Poutous sur le popotin d’Epeli Hau’Ofa

CRITIQUES MUSIQUE  Légende de Kydam  Co Ahmani de Senada  Esses de Solydal  Koi Elanyi de Gayulaz  The Afrorockerz de The Afrorockerz  Blues People d’Eric Bibb

CRITIQUE EXPO

LA CULTURE BOUGE

CHRONIQUES D’AILLEURS

CULTURE WEB

ÉMERGENTUn tremplin pour Guilhem

LA GRANDE INTERVIEWBoagan, Lauréat du prix Export des Flèches de la Musique 2014

NOUVEAUTÉEndemix Week-End, l’émission radio

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éditoET, SI ON (NE) CHANGEAIT (PAS) TOUT ? Nouvelle année, nouvelles bonnes résolutions… Il y a fort à parier qu’Endemix n’était pas le seul à remettre ses acquis en cause pour attaquer sur des bases encore plus solides.Nouvelle tête, certes. Les graphistes se sont affairés « d’art d’art » pour relooker la couverture. Endemix s’affirme plus moderne, sans oublier ses racines océaniennes. Nouvelle rédaction, certes. Resserrée, la bande de journalistes et chroniqueurs continuera à apporter ses lumières, assumera avec bienveillance leurs critiques – bonnes ou mauvaises – pour mieux valoriser la culture locale. Se glissent aussi dans nos pages, quelques ouvertures sur l’international et un espace dédié à la BD. Mais, comme on ne change pas une équipe qui gagne, c’est toujours auprès des artistes qu’Endemix trouve son inspiration. Boagan, le visage en couverture vous est familier ? Normal, le chanteur était déjà l’homme phare d’Endemix n°2, en 2013. Pour ce numéro, il se réinvite sur la couv’. Ne vous y méprenez pas car il n’est plus l’artiste fraichement débarqué sur la scène calédonienne, mais bien le grand gagnant du prix Export-Maison de la Nouvelle-Calédonie des Flèches de la Musique 2014. Auteur, compositeur, interprète de la tribu de Poindah, à Koné, il est un modèle d’ascension artistique pour beaucoup de jeunes du Nord. Province Nord d’ailleurs à l’honneur dans cet Endemix n°10. Lieux culturels, danseurs, réalisateurs, chanteurs et élus ont une place de choix pour mettre en lumière la vivacité du Nord de la Grande Terre. Dixième numéro ? Vous avez bien lu. Le trimestriel Endemix, nouvelle version, entre dans sa troisième année. Nouvelle année, nous disions donc, où tout reste à écrire…

Claire ThiebautRédactrice en chefLIRE UN PAYS

Le bureau des artistes

MÉMOIRENe pas oublier Waan Hyaat

LE CRI DU CAGOUUn shell de son

LIEU Musée de la mine de Thio : l’histoire gravée dans le nickel

AGENDA

BDGuilhem ChamboredonL’art tout simplement

  COUTUME KANAKde Sébastien Lebègue

ERA KANEKA« Thook » de Bwanjep

EN QUELQUES MOTSLe nemi

PORTRAITS Valdel – Rime et rap Brice Poircuitte – Un artiste calédonien à New York

FOCUS RÉALISATEURAlan Nogues – La tête dans les images

HOMMAGEÀ Samuel Kitchine

PALABRES D'ÉCRIVAINFrédérique Viole : « Et si moi je n’ai envie d’écrire que des nouvelles ? »

SPÉCIAL PROVINCE NORD27 Koumac joue la comédie28 Sari Oedin – La mémoire dans l’objectif  29   A7JK – Les gens viennent au concert et

participent à fond30 Teddy Diaïke – Sculpteur dans l’âme32   Lycée de Pouembout – Un CDI qui a tout compris33 Sylvain Wenethem – Le jardinier du geste34 Questions à Victor Tutugoro 

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Le studio Mangrove nous replonge dans l’univers

kaneka des années 1990 en rééditant des albums fondateurs du genre, diffusés à l’époque sur cassette audio. On retrouve l’unique album du groupe Ungeep’s, Poere Yeu, sorti en 1996, ainsi que deux

compilations de Lakon Ien (Evasion et Oon kana) et Moïse Wadra (Kadanseka et Adodojeu). Au milieu des titres phares se sont glissées des chansons inédites, à découvrir d’urgence. Plus d’infos sur www.mangrove.nc

RÉÉDITION KANEKALE MEILLEURDES ANNEES 90

DEUX SEMAINESTRÈS HIP-HOP LIVRE EN FÊTE

musique

événement

lecture

livre

livre

QUAND LA (NOUVELLE)CARAVANE PASSE

Cette année, le Camion

librairie de la Maison du Livre devient la Caravane des livres. Ce nouvel outil continue ses tournées de librairie itinérante

sur la Grande Terre, mais s’enrichit désormais d’un espace d’exposition, de rencontre avec les auteurs et de formation. La Caravane (re)prend la route en avril à Koné pour la Semaine du Livre et s’arrêtera dans plusieurs grands événements culturels. Renseignements auprès de la Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie www.maisondulivre.nc

La Quinzaine du Hip-Hop, organisée

par la province Sud, revient en force du 3 au 18 avril. Un programme très mouvementé avec notamment la Méga Rex Party, le BOTY NC, Mix en Bouche, la battle graff et la Stand up battle. Shows et master class seront également organisés par des DJs, rappeurs et danseurs locaux, rejoints par des artistes internationaux. Des manifestations auront lieu dans toute la province Sud.Détails sur www.province-sud.nc

Ne manquez pas la 12e édition de la Semaine du Livre de Koné, organisée par la médiathèque Ouest

et la Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie. Le public pourra rencontrer une dizaine d’auteurs et d’illustrateurs calédoniens lors d’ateliers et de séances de dédicaces. Du mardi 21 au samedi 25 avrilPlus d’infos à la médiathèque de Koné. Tel. : 47 20 65

JURY EN HERBEC’est au tour des élèves de CM2 et de 6e de remettre

le prix « Livre, mon ami » à leur auteur préféré. Les dix ouvrages présélectionnés par un comité local seront dévoilés en mars aux 400 classes participantes. Les jeunes lecteurs pourront également s’inscrire à la deuxième édition du concours de lecture à voix haute organisé par le Vice-rectorat et l’association Livre, mon ami. Plus d’infos sur www.livremonami.nc

FESTIVAL INTERNATIONAL DU CINÉMA DES PEUPLESLes inscriptions pour le 9e festival Ânûû-rû Âboro sont ouvertes jusqu’au 15 mai 2015. Vous pourrez y proposer vos films réalisés en 2013, 2014 et 2015.Inscriptions sur www.anuuruaboro.com

DES LIVRES ET NOUS : QUATRE ANS DÉJÀDes Livres et Nous rempile pour la quatrième année. Tous les derniers mardis du mois, l’émission, diffusée en direct sur NC1ère radio depuis la Maison du Livre, met à l’honneur l’actualité littéraire. Vous pouvez assister aux prochaines émissions le 31 mars, le 28 avril et le 26 mai.Renseignements auprès de la Maison du Livre. Tel. : 28 65 10

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FESTIVAL DU CINÉMA DE LA FOAVous avez jusqu’au 18 mai 2015 pour vous inscrire aux différents concours du festival du Cinéma de La Foa et notamment pour les prix court-métrage, clip, musique de film ou jeune talent. Inscriptions sur www.festivalcinemalafoa.com

EN DEUX MOTS…

livre

LES MEILLEURES VENTESDE LIVRES DE 20141.  Le Prêtre et le Juge

de R. Apikaoua et J. -P. Briseul, éd. Le Corridor bleu 2.  Quintet

de F. Ohlen, éd. Gallimard 3.  Atlas de la Nouvelle-Calédonie

collectif, éd. IRD-Congrès de la Nouvelle-Calédonie 4.  Antoine Kombouaré, parole d’un footballeur

de W. Kotra, éd. Au vent des Îles 5.  L’Histoire illustrée de la Nouvelle-Calédonie

de F. Angleviel, éd. Footprint

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p. 4 La culture bouge

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festival

ux manettes de ce festival d’ampleur – un an de festivités sur tout le territoire, on trouve désormais le Comité des Grandes Manifestations Culturelles de Nouvelle-Calédonie

(CGMNC), qui regroupe deux directions du Gouvernement : la culture, la condition féminine et la citoyenneté d’un côté, la jeunesse et les sports de l’autre. M. Bouzid Benaziza, président du comité, s’explique sur cette association : « la citoyenneté, il faut arrêter d’en parler, il faut la vivre. Et pour cela, nous comptons sur la jeunesse ».

Un programme déjà chargéÀ l’image de ce qui avait déjà été réalisé en 2013 pour la première édition de ce festival, le CGMNC se rendra dans plusieurs manifestations artistiques et culturelles existantes, mais aussi la Journée de la Femme ou les fêtes en tribu. Il y sélectionnera les artistes qui formeront la délégation pour le festival des Arts du Pacifique en 2016. Ainsi, le 28 février dernier lors de « l’espace oralité » organisé dans la commune de Ouégoa par l’Académie des Langues Kanak, le comité a pu assister à des prestations de discours généalogiques, ainsi que des récitations de contes, de berceuses et de poésies. Sans oublier le slam, discipline particulièrement séduisante pour les jeunes.

Et pour la Journée de la Femme, organisée le 8 mars, on pouvait admirer les talents de l’artisanat féminin, avec de la vannerie et du tressage. Le stylisme et l’art culinaire n’étaient pas en reste non plus.

Le multiculturalisme comme une forceLes communes de Houaïlou, Touho, Thio, Païta, Maré, Ouvéa et Lifou accueilleront chacune un événement du festival. Autant de déplacements indispensables aux yeux de la Ministre Mme Déwé Gorodey

qui considère, comme Bouzid Benaziza, que la culture doit rester vivante en donnant notamment aux jeunes artistes la chance de se faire connaître. « L’important

c’est de faire régulièrement le point avec la jeunesse sur notre société ; parce qu’il ne s’agit pas seulement de chanter et danser ensemble, mais aussi de porter une réflexion sur nos cultures, sur le désir de continuer à affirmer notre richesse culturelle malgré la globalisation ». Elle souligne également que ce rendez-vous s’adresse à l’ensemble des identités calédoniennes : « le melting pot culturel qui entoure la culture kanak est une richesse, ce sont des voies, des chemins vers les autres ».

DEUXIÈME ÉDITION DUFESTIVAL DES ARTS DU PAYS

Artistes de 2015 : notez dans vos agendas le deuxième rendez-vous du festival des Arts du Pays ! De février 2015 à février 2016, le comité organisateur sélectionnera les 120 artistes, toutes disciplines confondues, qui représenteront la Nouvelle-Calédonie lors du 12e festival des Arts du Pacifique en mai 2016 à Guam, Micronésie.

COMMENT S’INSCRIRE ?Pour participer au deuxième festival des Arts du Pays, il suffit de remplir un formulaire d’inscription auprès du Gouvernement ; les frais de déplacement, l’hébergement ainsi que les repas seront pris en charge par la collectivité.

A La citoyenneté,il faut arrêter d’en

parler, il faut la vivre

Une troupe de jeunes danseurs, lors du festival des Arts du Pays de 2013.

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Sur le départ

De retour Tapis rouge

POUR L’OCÉANIE À ROCHEFORTC ette année – et c’est une grande première

– le Salon du Livre Océanien et le Festival de Cinéma de Rochefort ne font plus qu’un. Organisé par l’association Cinéma des Ailleurs, « Rochefort

Pacifique » devient LE rendez-vous des artistes, chercheurs et autres passionnés par la cinquième partie du monde.

Au programme : projections, tables rondes et débats mais avant tout des rencontres afin qu’émergent des réflexions nouvelles et singulières sur l’Océanie, loin des clichés exotiques. La Nouvelle-Calédonie sera représentée par une armada de films et documentaires, comme De la Terre et des Hommes d’Hélène Bucco, Naissance d’une Nation de Ben Salama et Thomas Marie, Bingo Sauvage de Merryl

Heneke et Kanak, l’histoire oubliée de Stéphane Kappes, notamment. Pour la littérature, les auteurs Anne Bihan, Paul Wamo, Roland Rossero, Nicolas Kurtovitch et Frédéric Ohlen porteront les couleurs du Caillou.Ces cinq jours seront également l’occasion de rencontrer d’autres grands noms comme le romancier maori Witi Ihimaera, parrain de cette édition, ou Serge Tcherkezoff et Roger Boulay, chercheurs et anthropologues du domaine océanien. Du 25 au 29 mars 2015 à RochefortPlus d’infos sur le site www.rochefortpacifique.org

Juste avant la fin de l’année 2014, seize membres de l’association Xoobwen Fwada de Koné sont partis* direction le Vanuatu pour participer à une cérémonie

coutumière. Depuis 2013, des liens se tissent entre la Nouvelle-Calédonie et l’archipel, qui partagent tous deux de forts traits culturels mélanésiens, comme notamment, celui de la coutume – la kastom ni-vanuataise.

Dans ce cadre, tous ressentent la nécessité de préserver ces traditions et de les transmettre. La fête, qui a duré plus d’une semaine, s’est déroulée au rythme des bambous pilonnants, un instrument commun aux artistes des deux pays. Pour en savoir plus, suivez l’association Sanma NC, initiatrice de ces échanges, sur Facebook (Association-Sanmanc).*Projet soutenu par le Poemart

RENCONTRE AUTOUR D’UN BAMBOU

festival

THÉÂTRE COMIQUEau Vanuatu L a compagnie de théâtre Nez à Nez diffusera*

son nouveau spectacle Les Farces au Vanuatu, lors d’une tournée qui se déroulera du 10 au 19 avril prochain. Avec cette pièce, tirée

du répertoire classique, les comédiens André Luserga, Stéphane Piochaud et Sam Kagy seront les porteurs de la richesse de la langue française. *Avec le soutien du Poemart

théâtre

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p. 6 CHRONIQUEs D’AILLEURS

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BRICEPOIRCUITTEÀ NEW YORK

PAUL WAMO EN MÉTROPOLE

L e Dj San and Tac s’est envolé* pour l’Australie

où il a enchaîné les plus grandes scènes underground de l’été. On a pu le croiser au festival VOID, à l’Earth Freq fest, au QUBE et pour finir au Maitreya festival. Une tournée bien remplie qui permet au jeune artiste de dévoiler son premier album, Cinematic, travail de longue haleine très attendue sur la planète electro. * Avec le soutien du Poemart 

Pour revenir sur cette tournée, retrouvez San and Tac sur Facebook.

D u 23 décembre au 15 janvier dernier, Brice Poircuitte (voir portrait p. 20) a exposé trois grandes toiles à l’Agora Gallery

à New York, en plein cœur de Chelsea, le quartier des arts par excellence. L’exposition collective, intitulée Pathway to Abstraction, a été l’occasion de réunir une vingtaine d’artistes internationaux qui utilisent l’abstraction comme fil conducteur.

Toute l’actu de l’artiste sur www.facebook.com/Brice.Poircuitte.Art

Star eyes, huile sur toile

SUMMER TOURarts plastiques musique

On garde un œil sur...

P arti en novembre 2014 pour enregistrer un album en Métropole*, le poète Paul Wamo est aussi investi du rôle important d’artiste ambassadeur de la culture calédonienne. Après plusieurs scènes slam à Paris et des rendez-vous décisifs pour son projet de disque, il a posé en janvier

ses valises en Bretagne, à Douarnenez, accueilli par l’association Rhizomes. Pendant deux mois, il a partagé son temps entre écriture et ateliers pour enfants et adultes. En empruntant les traces laissées par la documentariste algérienne Habiba Djahnine et l’auteure polynésienne Chantal T. Spitz, il participe ainsi au projet de l’association : faire circuler les artistes et les œuvres.*Projet soutenu par le Poemart

À suivre sur www.facebook.com/WamoPaul

slam

L e spectacle Figure In ! de la compagnie de Danse Contemporaine

de Nouvelle-Calédonie est reparti en Métropole en février 2015 au théâtre La Loge de Beaupréau, en Mauge et au théâtre Le Carré de

Sainte Maxime (Var). Commande du musée du quai Branly pour l’exposition Kanak, l’Art est une Parole en 2013, le ballet Figure In !, chorégraphié par Sthan Kabar Louët, est un voyage entre tradition et modernité.

Plus d’infos sur le site www.sthankabar-louet.com

FIGURE IN !

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p. 8 Culture web

netInter

Dubsmash : la culture Pop !

Qui n’a pas reproduit devant son miroir la célébrissime réplique de

Robert de Niro « Are you talking to me » ?

Ou encore celle de Oss 117 « J’aime me beurrer la tartine » ?

Grâce à trois jeunes Allemands un peu dingues, il est désormais

possible de mettre son propre visage sur la voix de l’acteur !

L’appli Dubsmash.com reprend deux fondamentaux de la culture

pop d’aujourd’hui : le selfie vidéo et les répliques cultes. Le but ?

Communiquer entre amis de façon originale et amusante.

Les meilleurs Dubsmash se bousculent déjà sur le Net, mais pour combien

de temps ? L’utilisation - même courte - d’extraits d’œuvres originales soumises

au droit d’auteur pourrait faire fermer le site et l’appli.

En attendant, si on se prenait pour James Bond…

À télécharger gratuitement sur l’Appstore et sur Google Play

www.dubsmash.com/

Transformer ses vidéos

Grâce à la démocratisation des smartphones, la réalisation

de petites vidéos est de plus en plus accessible.

Mais comment faire pour les couper, les éditer ou encore

réduire leur format sans se compliquer la tâche ?

Raccourcir sa vidéo :

Vous souhaitez poster un extrait de votre concert en ligne sur Facebook ?

Le site le plus facile d’utilisation est Online Video Cutter. On charge

le fichier, on découpe, on sauvegarde.

www.online-video-cutter.com/fr

Éditer sa vidéo :

Youtube propose quelques petites corrections faciles pour améliorer

votre prise. Il suffit de vous rendre dans la partie Creator Studio

et de cliquer sur « Retouches ».

www.youtube.com

Convertir sa vidéo :

Transformer le format de sa vidéo n’est plus un problème avec le site

Online Convert ! Vous pouvez même convertir vos photos, vos ebooks ou encore

vos musiques… Un site riche et très facile d’accès.

www.online-convert.com/fr

LoisirSud NC :

l’appli de la province Sud

L’application LoisirSud NC accompagne

les Calédoniens dans leurs sorties et activités

en province Sud. Trouver un monument

historique, une mise à l’eau, des pistes VTT

ou de rando ? Des cartes GPS et le plein

d’infos à télécharger vous attendent pour

préparer votre départ. Grâce à l’option

« géolocalisation », il est possible d’afficher

les occupations proches de chez soi.

Si les loisirs en extérieur sont majoritaires sur l’appli, on y retrouve également

un agenda des animations culturelles. Les courageux qui souhaitent mêler grand air

et patrimoine y dégoteront des itinéraires pédestres

sur les traces de l’histoire calédonienne.

À télécharger gratuitement sur l’Appstore et sur Google Play

Les pages Web de

nos artistes

À chaque numéro, retrouvez trois pages

culturelles Facebook ou des chaînes Youtube

qui bougent sur la toile calédonienne.

Les Bonnes Questions de Dany

sur Youtube

Plus de 395 abonnés, plus de 16 000 vues*

En collaboration avec le Centre Information Jeunesse

de Nouvelle-Calédonie, Dany Banreu endosse tous

les rôles possibles et imaginables pour parler avec

humour des problèmes que les jeunes rencontrent

au quotidien.

Autre adresse pour le suivre : sa page Facebook !

www.youtube.com/user/RienAFaireOFFICIEL

www.facebook.com/RienAFaireOFFICIEL

I&I sur Facebook

Plus de 3 300 J’aime*Très présent

sur la toile

calédonienne,

le groupe I&I

entraîne ses fans

dans son périple

musical.

Ainsi, en fin

d’année, on a pu les suivre dans

les backstages de leur tournée

australienne.

* À l’heure où nous publions.

Les Arts Tissent l’Outre-Mer

sur FacebookPlus de 560 J’aime*

L’association Les Arts Tissent

l’Outre-Mer œuvre à créer

un réseau des acteurs culturels

ultramarins, dans un esprit

d’économie sociale et

solidaire, afin de participer

à leur développement et à leur promotion.

À suivre sur : www.lesartstissentloutremer.org

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Les pages Web de

nos artistes

À chaque numéro, retrouvez trois pages

culturelles Facebook ou des chaînes Youtube

qui bougent sur la toile calédonienne.

Les Bonnes Questions de Dany

sur Youtube

Plus de 395 abonnés, plus de 16 000 vues*

En collaboration avec le Centre Information Jeunesse

de Nouvelle-Calédonie, Dany Banreu endosse tous

les rôles possibles et imaginables pour parler avec

humour des problèmes que les jeunes rencontrent

au quotidien.

Autre adresse pour le suivre : sa page Facebook !

www.youtube.com/user/RienAFaireOFFICIEL

www.facebook.com/RienAFaireOFFICIEL

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En juillet dernier, à 13 ans à peine, Guilhem Chamboredon décrochait le prix « sélection du jury » de l’exposition collective Tremplin de la création, organisée par le centre d’Art. Rencontre avec un gamin étonnamment mature, très bavard, et surtout passionné de dessin.

bande dessinée

Unpour Guilhemtremplin

uilhem dévore les BD, la série Le chat du rabbin de Joann Sfar – « les dessins les plus expressifs que je connaisse » – ou Emmanuel Guibert – « tout est dans la sensibilité, dans l’ellipse ». Lui crayonne depuis le berceau, par terre

dans sa chambre. Alors quand sa mère voit dans le journal l’appel à projets du centre d’Art, elle lui en parle. « Je lis la charte à laquelle je ne comprends strictement rien, mais décide de postuler. » Pourtant, le Tremplin de la création s’adresse aux 15-26 ans et primo-exposants plus âgés. Il ne satisfait donc à aucun des deux critères. « Pour moi, la réelle difficulté résidait dans le défi, très angoissant, de réussir à tenir les délais en réalisant vingt-sept dessins en trois mois ; je suis fier d’y être arrivé. »

La “bestialisation” de l’humainLe projet présenté par Guilhem concerne la Première Guerre mondiale. À l’origine, la découverte du film de Jeunet Un long dimanche de fiançailles, « qui m’a bouleversé ». En parallèle, il étudie au collège, la littérature de guerre et un extrait d’À l’Ouest, rien de nouveau d’Erich Maria Remarque. Il se précipite sur la bibliothèque familiale, trouve le livre. « Nouveau bouleversement ! Cet ouvrage ne donne pas une version aseptisée de la guerre. Les personnages sont des pauvres types de 18 ans, sans haine spéciale envers les Français, mais qui n’ont pas le choix. Ils souffrent ensemble sur le champ de bataille, défendent leur peau, tout simplement. » Après de longues recherches documentaires sur Internet, il exécute au lavis d’encre trois planches illustrant des scènes du livre.

GPar Jean-Marc Estournès

Tout au long de son travail d’illustration, Guilhem a utilisé un crayon 6B sur papier Canson, un stylo noir à pointe fine, une gomme et de l’encre claire : « Une véritable course contre la montre pour réaliser les diffusés (zones plus foncées) avant que le lavis ne s’évapore ».

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SAISON2015

Vincent GinGuené

La Vénus au phacochère

Jeudi 12 et vendredi 13 mars à 20 hSamedi 14 et dimanche 15 mars à 18 h

De Christian Siméon

Brocant’Art

Samedi 28 mars à 18hPour votre confort, la jauge est limitée à 250 places

De Émilie Féron et Patrick Vassard, compagnie Mik Mak Théâtre

Le Cercle des illusionnistes

Vendredi 24 avril à 20hSamedi 25 et dimanche 26 avril à 18h

D’Alexis Michalik

La Tempête d’après ShakespeareSamedi 9 et dimanche 10 mai à 18h

De Pierre Gope, la Troupe du Nord

Être ou paraître

Mercredi 20, jeudi 21 et vendredi 22 mai à 20hSamedi 23 mai à 18h

Théâtre du Corps, Pietragalla - DerouaultRéservation tél. 25 50 50www.theatredelile.nc

Guilhem s’attache à créer « une atmosphère irréelle, fantasmagorique », avec des visages privés d’yeux, un ciel éternellement blanc, et des chars comme s’il en pleuvait. « J’ai voulu montrer la “bestialisation” de l’humain par la guerre. » La dernière planche illustre les paroles de la chanson des révoltés de Craonne.

Des projets pour grandirUne fois les dessins accrochés sur les murs du centre d’Art, l’objectif était double : attirer le visiteur vers le livre de l’écrivain allemand, posé sur un présentoir ; et agiter le devoir de mémoire, « ne pas oublier nos aînés qui ont vécu cette guerre et en tirer des leçons ».

LE DESSIN POUR FIL CONDUCTEURNé à Montpellier le 23 juillet 2001, Guilhem vit à Nouméa depuis six ans. Il saute la 6e et rentre à l’école James Cook d’Auteuil (plus de 18 de moyenne générale en 3e). Celui qui concède un faible pour l’histoire-géo et le français, après s’être passionné pour les sciences et la géopolitique (!), vient d’entrer au lycée Lapérouse, direction bac S. Plus tard ? « J’ai eu des tas d’idées dans ma vie (sic), pour parvenir à la conclusion que quel que soit le sujet,

le fil conducteur restait le dessin. » Il souhaite en faire son métier, afin de « raconter une histoire et communiquer des émotions ». Et si le projet ne se concrétise pas, il écrira des livres ou réalisera des films. Élève brillant, Guilhem ne correspond en rien à l’image du gamin surdoué mais tête à claques. Derrière une élocution châtiée et un vocabulaire plus riche que celui de bon nombre d’adultes, se cache une grande sensibilité.

Le jeune artiste n’oubliera pas de sitôt cette expérience : le prix « sélection du jury », 100 000 F CFP de bons d’achat, des cours de dessin anatomique et surtout « des échanges

très sympathiques avec d’autres artistes » dont les dessinateurs Jar, Jilème et Bernard Berger. Le jeune garçon se demande aujourd’hui si ses dessins pourraient intéresser l’espace du musée de la Ville dédié à la Grande Guerre. Un nouveau projet mûrit aussi sous les traits d’une BD reportage sur les villas

coloniales, à la rencontre de leurs habitants. « Un jour je suis passé devant une très jolie maison, mais je n’avais pas mon carnet à dessin. J’ai décidé de revenir la semaine suivante et elle avait été détruite. Ce fut le déclic. »

Une atmosphère fantasmagorique, des visages privés d’yeux, un ciel éternellement blanc et des chars

comme s’il en pleuvait

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Propos recueillis par Frédérique de Jode

À 25 ans, il est le lauréat du prix Export-Maison de

la Nouvelle-Calédoniedes Flèches de

la Musique 2014.Trente-trois groupes

inscrits, six sélectionnés pour les auditions et c’est

finalement Boagan qui remporte la mise : une tournée dans

le Pacifique, en Métropole et en Nouvelle-Calédonie

en 2015.

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B o a g a n« Une porte dans laquelle il faut s’engouffrer »

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p. 12 Grande interview

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Vous attendiez-vous à remporter le prix Export ?Boagan : non, je ne m’y étais pas particulièrement préparé. Le niveau du concours était vraiment élevé

et la concurrence rude. Mais recevoir ce trophée de la part du jury* est une grande reconnaissance. Quand nous sommes passés à l’audition, nous avons misé sur la sincérité de notre musique. Sur scène, je me suis donné à 100%, en étant vraiment moi-même et en valorisant ma présence scénique. Au final, ce prix et le jugement des professionnels me confortent dans le chemin que j’ai pris musicalement.

Tous les nominés ont été coachés par Juliette Solal et Christian Bordarier. Que vous a apporté cet accompagnement ?C’est toujours une expérience enrichissante d’avoir l’avis de personnes qui connaissent parfaitement leur métier, qui ont un regard nouveau et une écoute différente. Ils m’ont fait comprendre qu’être sur scène, ce n’est pas simplement jouer de la musique devant un public. Il faut composer un tableau qui captive les spectateurs. Travailler son jeu scénique est donc fondamental.Notre job, c’est d’offrir un cadeau au public : voilà ce que je retiens pour la suite de ma carrière.

Remporter le prix Export vous offre une tournée en Métropole, dans le Pacifique et en Nouvelle-Calédonie. Comment comptez-vous saisir cette opportunité ?C’est une très belle chance qui m’est offerte. Une porte dans laquelle il faut s’engouffrer pour tenter de marquer le paysage musical par mon style et mes textes, développer également un réseau. Bref, me faire remarquer et représenter mon pays.

Comment allez-vous capter l’attention de ce public qui ne vous connaît pas ?

Avant tout grâce à ma musique mais aussi par tout ce qui l’entoure, la nourrit et la construit. Je cherche aussi à être original, singulier, honnête dans le message et les valeurs de respect que je défends et que je souhaite transmettre.

Enfant, vous imaginiez-vous musicien et chanteur ? Oui, je rêvais d’en faire mon métier. La musique, c’est plus fort que tout, c’est un art dans lequel je peux m’abriter.

C’est mon élément. Je me demande si parfois, ma réalité ne se trouve pas davantage sur scène que dans la vraie vie… Pourtant, devenir artiste était presque inconcevable chez moi. Quand nous chantions ou jouions d’un instrument, c’était à la maison, à l’école, à l’église en famille. Mais pas pour en faire carrière ! Maintenant, c’est différent. Mes proches m’ont d’ailleurs aidé à financer mon album. On est tous dedans !

En juillet 2014, vous avez sorti Papillon bleu, un EP de cinq titres, mais en réalité vous avez écrit une soixantaine de textes, tous très poétiques. Vous êtes particulièrement prolifique… Un nouvel enregistrement de prévu ?

C’est vrai que j’ai une certaine facilité pour l’écriture. Les rimes me viennent facilement. J’aime penser que la poésie de mes mots touche les gens et fait écho dans leur cœur. Le sens des paroles c’est essentiel parce que je ne veux pas tomber dans la superficialité. Aujourd’hui, je pourrais sortir six albums ! Bien sûr, j’espère enregistrer ces titres un jour. Mais pas tous car certains sont vraiment trop personnels, trop forts en émotion et je ne parviendrais pas à les chanter jusqu’au bout.

Dans votre chanson « Retour aux sources », vous dites : « Je n’ai pas l’impression d’être noir comme il faut ». Qu’entendez-vous par là ?Quand je dis « je », ce n’est pas moi personnellement, mais sous-entendu « nous, les Kanak ». Nous avons tendance à critiquer un système qui n’appartient pas à notre culture. Mais lorsqu’on a le pouvoir, on fait parfois pire. Et puis nous ne savons plus préserver nos traditions, les connaissances des anciens.

C’est comme nos langues, nous les parlons de moins en moins. Et l’argent qui prend de plus en plus d’importance. C’est visible dans la coutume qui brasse des millions. Je suis là pour dire ce que je ressens, rappeler que le bonheur se trouve en tribu, dans le partage de choses simples.

Vous considérez-vous comme un artiste engagé ou tout simplement libre de ses propos ?Je dénonce ce qui ne tourne pas rond dans notre pays. Si ce que je dis est parfois violent, je pense que la poésie peut adoucir cette force. Malgré ça, je pèse quand même mes mots lorsque j’écris.

* Le jury était composé de :Marion Guilbaud, Programmatrice musique live, France InterFlorence Jeux, Programmatrice festival Francofolies de la RochelleGilles Renault, Journaliste culturel, LibérationAurélie Montagnon, Programmatrice festival Antenne Rhône-Alpes du Printemps de BourgesJean-Marc Dépierre, Directeur Alliance Française, Auckland, Nouvelle-ZélandeIsabelle Faure, Directrice Alliance Française, Canberra, AustralieFabrice Absil, Diffuseur numérique, Absilone technologies

Aujourd’hui, je pourrais sortir

six albums !

UN SPECTACLE QUE VOUS AIMEZ : « Ipareke, c’est un spectacle musical avec des bambous, des flûtes kanak, très abouti. »LE LIVRE QUE VOUS PRÉFÉREZ : « La Bible. »UN DISQUE QUE VOUS ÉCOUTEZ EN BOUCLE : « Pe Taivi Gna, le dernier album de Joséphine, groupe de Pouebo. C’est un album de kaneka fusion avec un jeu de cuivres très réussi. »

LES TEMPS FORTS DE LA TOURNÉE DE BOAGAN*Une série de concerts en Métropole, dans le Pacifique et en Nouvelle-Calédonie attend Boagan en 2015. >  Du 18 au 21 juin, le groupe sera en concert

à Wellington, Auckland, Christchurch et Palmerston North, en Nouvelle-Zélande.

>  À partir du 24 juin, il s’envole pour la Métropole où il enchaînera une prestation en radio puis quatre jours de résidence à Saint-Étienne, avant de sillonner la région Rhône-Alpes et le Sud de la France. Il sera aussi programmé au festival des Francofolies de la Rochelle. Boagan finira son voyage par des dates à Paris, à la Maison de la Nouvelle-Calédonie, notamment.

>  À son retour de Métropole, il donnera trois concerts sur le Caillou avec le soutien de Bar en Live. D’autres dates en Australie et en Asie sont en projet.

* Organisée par le Poemart et ses partenaires.

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Après la télévision, le magazine culturel Endemix s’installe dans les studios radio de NC 1ère. Chaque samedi, les animateurs de la nouvelle émission

Endemix Week-End et leurs invités embarquent les auditeurs pour deux heures d’humour et de culture – histoire de bien commencer le week-end.

Tout le monde sur le pont ! Prévoyez plutôt la grasse mat’ dimanche matin…

Médias

Par Antoine Pecquet

epuis le 21 février 2015, Endemix a pris ses quartiers sur les ondes de la radio NC 1ère. Dans Endemix Week-End, diffusé en direct chaque samedi de 9h00 à 11h00, les deux animateurs Virginie et Gwen, accompagnés de la sémillante Charlotte et de quelques chroniqueurs

triés sur le volet, accueillent artistes et acteurs culturels. « L’idée est d’amener l’invité à se livrer en répondant à des questions sérieuses et d’autres plus décalées », annonce Virginie.L’actualité culturelle est aussi analysée dans une série de chroniques teintées « d’une certaine dose de critique, ce qui est assez inédit en Nouvelle-Calédonie », précise-t-elle, avant d’ajouter que spectacles, expositions, concerts, sorties cinéma sont passés en revue « avec humour et impertinence ». La rédaction donne son avis, distribue bons et mauvais points, notamment lors d’une « battle* » de chroniqueurs. Au menu également, « La minute geek »  pour savoir où surfer sur le Web. Ou encore « T’étais où hier soir ? T’as fait quoi cette semaine ? », qui verra la fine équipe appeler à l’improviste une tête connue de la culture calédonienne et lui demander son programme de la veille au soir. Théâtre, expo ou cabaret ? On va tout savoir de la vie nocturne des « cultureux » ! Chaque mois, un slameur se penchera sur les événements locaux et internationaux avec « L’actu-slam ». En dernière partie d’émission, un deuxième invité présente avec les animateurs « L’agenda du week-end ».

Culture et sociétéDe son côté, la chaîne NC 1ère se félicite de cette nouvelle programmation, qui va compléter et mettre en perspective l’offre culturelle déjà proposée avec les émissions C’est de l’art ! et Des Livres et Nous. « Nous réfléchissions depuis un moment à ouvrir un espace à l’équipe d’Endemix

(déjà présent sur NC 1ère TV, NDLR) dans notre grille, explique Gilles Marsauche, directeur des antennes radio. D’abord au titre de notre vocation de proximité, mais aussi parce que parler de culture permet d’aborder des questions de société importantes pour la Nouvelle-Calédonie ». Et d’ajouter : « l’aspect critique artistique qui était proposé nous intéresse spécialement. Dans la mesure où elle reste bienveillante, la critique ne peut qu’aider à faire progresser les productions locales ».

La chaîne et le Poemart, réalisateur de l’émission, ont signé une convention d’un an reconductible, le temps de roder un programme qui se veut original dans le ton comme dans la forme. Les lève-tard n’ont, quant à eux, aucune excuse pour louper l’émission puisqu’Endemix Week-End est filmée et podcastable sur le site de NC 1ère.

*Battle : joute oratoire ou dansée

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LES DEUX FONT LA PAIRE… SUR ENDEMIX WEEK-END 

Elle est aussi sérieuse qu’il est désinvolte et impertinent, mais ils ont en commun la curiosité, le goût du rire et de l’humour décalé : celui des Deschiens, de feu Nulle part ailleurs, de Si tu écoutes j’annule tout, et bien d’autres. Deux

approches différentes de la culture mais qui partagent la conviction qu’on peut rire de tout et même très sérieusement !

Il y aura une certaine dose de critique dans l’émission, ce qui est assez inédit ici, en Nouvelle-Calédonie

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Dans la nouvelle émission Endemix Week-End sur NC 1ère, Virginie Soula et Gwen portent un regard critique et bienveillant sur la culture calédonienne.

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endant la semaine, à Goro, Samuel Rochette travaille « à faciliter la communication entre les entreprises extérieures et le service hygiène

et sécurité de Vale » ; le week-end, sous le pseudo de DJ Exa, l’homme facilite la montée de l’euphorie sur les dancefloors de Nouméa, en mixant de la progressive house. Style electro de prédilection de ce natif des Ardennes. « J’avais douze ans quand mon oncle m’a emmené à Liège, en Belgique, écouter Robert Armani, un grand DJ house de Chicago. Un choc. Depuis, je suis addict à ce son-là. » La progressive house, explique- t-il, « c’est un rythme puissant, allié à des nappes sonores qui se développent tout en sensibilité, procurant une sensation de voyage. » À 19 ans, le goût de la house le transporte à Londres. « J’ai rôdé pendant un an chez les disquaires, pour m’affûter les oreilles » raconte-t-il. Rentré en France, il monte une association, Electro Uzers, et organise dans la salle omnisports de son village le festival We Are The Future, qui attire chaque année jusqu’à 1500 « teufeurs ».

Diurne. Aux platines de son festival, Samuel Rochette se forge en quelques

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À 29 ans, Samuel Rochette a deux casquettes. Ou plus exactement : une casquette de technicien hygiène et sécurité chez Vale NC, et un casque de DJ au sein de l’association Subculture, organisatrice d’événements electro.

DJ ExaLa house nickel

musique

La progressive house est un rythme puissant

procurant une sensation de voyage

et mélangé, de 18 à 35 ans. « Le concept est simple : c’est en plein air, dans un cadre magique, de 10h00 du matin à 20h00. On commence sur de la house pure, et on termine sur des sons plus techno. Aux platines il y a nous quatre, plus un invité international. » L’australien Jamie Stevens, le néerlandais Eelke Kleijn, le mexicain Robbie Akbal ont ainsi distillé à l’îlot Maître leurs élixirs sonores. « On cherche à faire venir la crème de l’electro underground » assure Samuel, alias DJ Exa, qui annonce pour la prochaine I LoVe SuNdAyZ la visite du bordelais Olivier Giacomotto, producteur et DJ booké par les meilleurs clubs de la planète.

Scène. Tirant au passage son chapeau à Vale NC, « qui met Subculture en avant sur ses supports de communication, et nous a permis de mixer au festival Femmes Funk », Samuel Rochette dit constater un vrai essor de la culture electro calédonienne. « Le niveau technique est très bon, le public est présent et ouvert, et on bénéficie d’un environnement parfait pour ce type de musique et d’événements. » Pour lui, le Caillou offre même une scène unique au monde. « La preuve, les DJ qu’on invite à mixer ici n’ont qu’une hâte : revenir » sourit-il.

années une solide expérience du mix. Pour financer sa passion, il se fait embaucher dans l’industrie nucléaire, où il reçoit une formation en radio-protection. Arrivé en Calédonie en 2011, cette compétence lui vaut d’abord d’être recruté chez un sous-traitant de Goro, puis d’intégrer l’équipe de Vale NC. Parallèlement, il découvre le Flex Club et ses platines, dont il devient un usager régulier. C’est là qu’il croise la route d’Arno, Tom et Rémy, DJs eux aussi. « On a décidé de se grouper en association, pour monter des événements house-techno.» Sous l’égide de l’association baptisée

Subculture, les quatre garçons lancent en 2012, la première I LoVe SuNdAyZ, une rave diurne, au Ramada dans un premier temps, puis à l’îlot Maître, avec la complicité

de l’Escapade, qui assure la logistique.

Elixir. À ce jour, I LoVe SuNdAyZ a connu une dizaine d’éditions, réunissant chaque fois un public plus nombreux

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om d’un illustre groupe fondateur de kaneka, Bwanjep désigne avant tout en langue nemi, un instrument de musique traditionnel emblématique de la Grande Terre : le battoir en écorce de figuier. Fondé en 1985 à Hienghène, autour de son leader Kaloonbat Gilbert Tein, il est reconnu pour être

l’un des précurseurs de ce mouvement musical. Ce titre en langue nemi est extrait de leur deuxième album Hiwec, « Le retour », sorti en 1995. Engagé depuis le début des années 1980 dans la collecte et la transmission des chants et musiques traditionnels kanak, l’artiste précise : « J’ai décidé de baptiser l’album Hiwec, car je sentais que le kaneka se dirigeait trop vite vers une musique commerciale. Et surtout parce que musicalement, j’avais aussi le sentiment que quelque chose de fondamental était négligé dans nos compositions ! » Le groupe place en effet, au premier plan de son identité musicale, des instruments tels que les bwanjep et les bambous pilonnants, ainsi que les rythmes et sonorités de la région : chuintements et bruissements de feuilles participent notamment à cette acoustique si reconnaissable.

Tradition et modernité La chanson « Thook » évoque une technique de pêche particulièrement populaire du côté de Bas-Coulna. Il raconte comment un père de famille va puiser dans son environnement,

en pêchant ou en chassant, pour pouvoir subvenir aux besoins de sa famille. Il veut ici acheter des fournitures pour que

ses enfants aillent à l’école. Ce chant, composé à une époque où Bas-Coulna était plus difficile

d’accès qu’aujourd’hui, laisse entrevoir l’apparition de nouveaux besoins, imposés par la société de consommation.

Par l’Académie des Langues Kanak avec la collaboration de Léa Bouarat et Gilbert Kaloonbat Tein

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Thook du groupe Bwanjep

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Couplet 1Nebu thook le savato Ai we nebu po iyuAi we thu-e kare hoNe nebu hen somu.

Refrain x2Am hwênana hun fe mwani nemi na rha le kuun ngaPhwâne ya do hina hun thook do li gaa hwari moo we phwâ nenge-m.

Couplet 2Nebu vap le po iriAi we nebu po iyuAi we thu-e kee-n tii Ne i nebu hen somu.

Refrain x2Am hwênana hun fe mwani nemi na rha le kuun ngaPhwâne ya do hina hun thook do li gaa hwari moo we phwâ nenge-m.

Reprise

Couplet 1Le samedi, nous pêchons à l’épuisettePuis nous vendons nos produitsPour pouvoir acheter des chaussuresEt aller à l’école.

Refrain x2C’est ainsi que nous gagnons de l’argent, chez nous, à Bas-Coulna.Si tu ne maîtrises pas la pêche à l’épuisette,

alors tu devras rester plus longtemps.

Couplet 2Le dimanche, nous chassons Puis nous vendons le gibierPour pouvoir acheter un cartableEt aller à l’école.

Refrain x2

Reprise

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« La pêcheà l’épuisette »

Retrouvez toute l’histoire du kaneka

Kaloonbat Gilbert Tein, leader du groupe Bwanjep et artiste engagé dans la préservation de sa langue, le nemi.

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Par l’Académie des Langues Kanak

linguistique

itué en aire Hoot ma whaap, dans le Nord de la Grande Terre, le nemi est parlé sur la côte Est, à la Ouaième (Panié, Haut et Bas-Coulna), dans la vallée

de la Hienghène (Kavatch, Tendo), mais aussi sur la côte Ouest à Témala. En 2009, on comptabilisait 908 locuteurs déclarés. Comparativement, le yuanga, langue kanak la plus parlée de cette aire, comprenait 2400 locuteurs ; tandis qu’on en comptait 39 pour le pwapwâ, la moins usitée*.Un intérêt émerge pour l’étude de la linguistique calédonienne dans les années 1970. En collaboration avec le linguiste et ethnologue A. -G. Haudricourt, Françoise Ozanne-Rivierre** recense mots et expressions

en langue qu’elle publie en 1982 dans un dictionnaire thématique. Au cours des années 1980, l’OCSTC (Office Culturel Scientifique et Technique Canaque) entame la collecte de nombreux textes de tradition orale, regroupés en recueil. Il sera prolongé par les travaux d’ethnomusicologie de J. -M. Beaudet et R. Ammann qui diffuseront ensuite ces corpus musicaux de la région de Hienghène.L’Académie des Langues Kanak et l’ADCK-CCT poursuivent aujourd’hui ce vaste programme de collecte.

* Source : ISEE, 2009** (†) Linguiste du Laboratoire de Langues et de Civilisations à Tradition Orale du CNRS (LACITO-CNRS)

KERMADEC9 ARTISTES DANS LE PACIFIQUE SUD

art contemporain28février 28juinSalle Komwi

À l’affiche au centre culturel Tjibaou

Tél. 41 45 45www.adck.nc

Œuvres contemporaines du Pacifique

Exposition produite et présentée par le programme Global Ocean Legacy

de The Pew Charitable Trusts.

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En mai 2011, neuf artistes embarquaient à bord d’un navire de la marine de Nouvelle Zélande en direction des Kermadec. Cette vaste étendue océanique et ses îles volcaniques, connexion entre la Nouvelle-Zélande et le Royaume de Tonga, sont devenues un lieu d’inspiration pour quelques-uns des artistes les plus talentueux d’Aotearoa et de la région Pacifique.

nemiLa Nouvelle-Calédonie compte vingt-huit langues kanak et un créole – le tayo – parlés par environ 75 000 personnes de plus de 14 ans*. Véhicules des savoirs du monde, les langues révèlent à la fois la diversité et l’universalité des productions symboliques de l’humanité. Mémoire des peuples qui les parlent, elles représentent une richesse culturelle qu’il est nécessaire de transmettre et mettre en valeur.

POUR ALLER PLUS LOIN>  Médiathèque de l’ADCK-CCT

www.adck.nc/mediatheque/departement>  Des enregistrements collectés par F. Ozanne-Rivierre

www.lacito.vjf.cnrs.fr>  Une fiche détaillée et des enregistrements

www.corpusdelaparole.huma-num.fr

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p. 17En quelques mots

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Rime et rap

slam

Par Coralie Cochin

aldel est un sniper de la langue française. Il vise là où ça fait mal et ça fait un bien fou. Geek assumé, l’étudiant en licence d’Histoire considère les jeux vidéo comme « un art ». Pas étonnant qu’il ait choisi son pseudo de gamer comme nom de scène. Une contraction de ses nom et prénom, que le rappeur préfère taire pour se protéger des retours de bâton.

Un phrasé engagéIl utilise les mots comme une arme de réflexion massive, avec les élus comme cible de prédilection. « Nos politiques jouent la division. Avec certains, c’est carrément maladif. » L’un d’eux a fait les frais de sa plume affûtée dès le début des phases éliminatoires du Grand concours de slam. « Les gens

ont été réceptifs à ce texte. Mais on m’a tout de même fait comprendre qu’il serait préférable de changer de sujet

pour les autres étapes de sélection. » L’artiste a finalement choisi de parler de son identité, à cheval entre deux cultures. « Je me sens le cul entre deux chaises. Je suis arrivé ici à 5 ans. Je n’ai pas eu le temps de prendre racine en France. Je ne me sens ni Zoreille, ni Caldoche. »Ce qui ne devait être qu’un simple coup d’essai s’est conclu par une victoire dans la catégorie adulte. « À la base, je suis rappeur

et je n’avais jamais fait de slam. Je m’étais inscrit à la dernière minute à ce concours, juste pour essayer. »

Un artiste actifBercé par la culture hip-hop depuis le début des années 2000, Valdel a formé en 2011 le collectif Rap NC avec son alter ego T-Tris, un ancien pote de lycée, tout aussi fan de jeux vidéo et amoureux des mots. « On a commencé par faire des battles, puis on s’est mis à écrire nos premiers textes. »Le rêve de Valdel est aujourd’hui de fédérer autour de la culture hip-hop, « qui peine ici à rassembler un public ». Toujours avec T-Tris, il a lancé en 2012 les premières soirées « Clash », véritables joutes oratoires entre deux MCs. Les deux acolytes préparent aussi un EP de sept titres qu’ils pensent diffuser fin 2015.

ON AIR SUR NC 1ÈRE

Valdel a mis son sens de l’impro à l’épreuve cet été, en animant la  tranche horaire du 6-9 sur NC 1ère radio. On pourra aussi désormais l’écouter toute

l’année, le week-end, avec son émission Kasseded’. Une carrière dans les médias comme journaliste ? Il y pense. Ou pourquoi pas dans la politique :

« J’ai envie de faire évoluer les mentalités. Ça peut paraître utopique de dire ça mais il faut bien essayer ».

VALDEL AUX CÔTÉS D’IAMLe 24 octobre 2014 restera longtemps gravé dans sa mémoire.

Ce soir-là, à l’Arène de Païta, Valdel fait la première partie du groupe mythique IAM, « J’étais backer du rappeur Kuby, tient-il à préciser. Mais il n’y a pas de

mots pour exprimer ce que j’ai ressenti. »

Si certains s’inquiétaient de l’avenir du slam en Nouvelle-Calédonie, qu’ils se consolent : la relève est assurée. Chaque année depuis 2007, le Grand concours de slam révèle de nouveaux talents. En 2014, c’est Valdel qui a marqué les esprits. Entre slam et rap, l’artiste d’une vingtaine d’années remet la politique et la société calédonienne en question dans des textes incisifs.

VÀ la base, je suis

rappeur et je n’avais jamais fait de slam

L’ascension de Valdel est fulgurante : il passe des petites scènes de quartier à la plus grande salle du territoire, aux

côtés du légendaire groupe IAM.

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Institution

Musique, écriture, exposition, courts-métrages… Du 4 avril au 27 juin, la province Sud lance une campagne d’aide à la création artistique pour encourager les artistes confirmés ou émergents à exprimer leurs talents.

Encouragerla fibre artistique

S’ils ne manquent pas de créativité, les artistes sont bien souvent freinés dans leur élan par l’aspect financier. C’est justement

pour dépasser cet obstacle que la Province a lancé le dispositif d’aide à la création artistique, en 2006. « Il fallait créer un cadre légal car les particuliers ne peuvent pas recevoir de subventions publiques contrairement aux associations », précise Christine Aïta, chef du service du développement artistique et culturel de la province Sud.La philosophie du dispositif ? Aider les artistes à se professionnaliser, encourager des vocations mais aussi repérer de nouveaux talents.

Jusqu’à 70 % du budget

Parmi les 80 projets présentés l’an dernier, la province Sud a choisi d’en soutenir 29, soit 8 de plus qu’en 2013. Une belle démonstration de la motivation et de la créativité des candidats. Parmi ces lauréats figuraient des artistes déjà connus du grand public, comme le slameur Paul Wamo ou le groupe Naya Roots, mais aussi des artistes en herbe, à l’image du groupe de rock The Groovin Mozs.Cette pépinière devrait bientôt s’agrandir puisque la province Sud lance une nouvelle campagne d’aide à la création, du 4 avril au 27 juin. 6 types d’aides seront proposés en fonction du domaine artistique : arts visuels, exposition, écriture, édition, création musicale ou réalisation de courts-métrages de fiction.« Nous aidons jusqu’à 70 % du budget global d’un projet, précise Christine Aïta, dans la limite des plafonds qui ont été fixés, soit 200 000 F pour la création en arts visuels, 450 000 F pour l’aide à l’exposition, 300 000 F pour l’écriture, 900 000 F pour l’édition, 700 000 F pour l’aide à la création musicale et 800 000 F pour la réalisation de courts-métrages. »Chaque domaine a également ses particularités. Pour l’aide à l’écriture, par exemple, la somme allouée ne servira pas à rémunérer directement l’auteur mais « permettra aux écrivains en herbe ou plus aguerris de s’offrir les services d’un professionnel pour la relecture, le scénario ou la correction », expose Julie Revault, chargée d’actions culturelles à la province Sud, dans le domaine du livre, notamment.

Côté audiovisuel, les candidats sont encouragés cette année à se lancer dans de « vrais courts », soit une durée de 15 minutes maximum. Ils doivent impérativement rester dans le domaine de la fiction, qui est « génératrice d’embauches et de retombées économiques », explique Aline Marteaud, responsable du Bureau d’Accueil des Tournages (BAT). « Ces aides doivent encourager les réalisateurs à s’accompagner de techniciens et d’acteurs professionnels, à utiliser du matériel pro. »

Des lauréats soutenus dans leur vie artistique

Au-delà du coup de pouce financier, la province Sud souhaite accompagner les lauréats dans leur vie artistique, en faisant participer, par exemple, les lauréats de la création musicale à la Fête de la Musique, ou en diffusant les courts-métrages au Cinécity, dans le cadre de l’opération CinéSud.Il faudra s’armer d’un peu de patience pour connaître le nom des lauréats 2015. Le jury, qui sera composé de représentants de la province Sud et d’experts dans les domaines concernés, rendra son verdict en août, avec une remise des prix en septembre.

COMMENT S’INSCRIRE ?Seuls les habitants de la province Sud peuvent présenter leur projet, sans limite d’âge. Les dossiers sont téléchargeables sur le site province-sud.nc.Les candidats peuvent aussi se rendre à la province Sud pour retirer un dossier auprès de la direction de la Culture, au centre administratif, 6 route des artifices, baie de la Moselle, à Nouméa. En fonction du domaine artistique choisi, la chargée d’actions culturelles référente pourra recevoir les artistes souhaitant être accompagnés dans la rédaction de leur dossier.

29 artistes ont bénéficié de l’aide à la création artistique en 2014 ©

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arts plastiques

Par Frédérique de Jode

L’angle et la courbe : c’est entre ces deux éléments graphiques totalement opposés que le dessinateur

Brice Poircuitte évolue. Son œuvre, univers fantasmagorique peuplé de personnages insolites,

captive et hypnotise. Alors, on ouvre grand les yeux – comme ses personnages – et on se laisse aller…

Par ses peintures, Brice Poircuitte cherche à provoquer, à déclencher des émotions, à ouvrir l’esprit. « J’aime

lorsque les gens s’approprient mes toiles, me racontent une histoire à laquelle je n’avais pas pensée. »

Un artiste calédonien à New York

hez Brice Poircuitte, l’obsession du dessin remonte à l’enfance. Imprégné par la lecture de comics, il remplissait ses cahiers de créatures étranges, sorties d’une imagination déjà débordante. Aujourd’hui, c’est dans la peinture qu’il se réalise pleinement. Ses toiles, très graphiques, ouvrent

un espace-temps à la fois tribal et urbain où se côtoient des enfants sauvages, des hommes et des femmes aux yeux écarquillés, la tête à Toto et un lapin blanc, clin d’œil au film Matrix.

Dans l’esprit d’un artisteLa référence à Jean-Michel Basquiat, cet artiste new-yorkais mythique décédé en 1988 d’une overdose, est assumée. « Si j’aime autant Van Gogh que Jackson Pollock ou encore le dessinateur Enki Bilal, je suis totalement fasciné par les toiles de Basquiat, par son style si énergique, parfois violent, ce mélange de symboles, de graffs, de figures, d’écriture... » Autre source d’inspiration, à la source de l’art justement : les peintures rupestres. « Il y a cette simplicité du dessin, mais qui dégage en même temps une force incroyable. »Sa créativité est foisonnante. « Quand j’arrive à l’atelier, j’enclenche la musique, car je ne peux pas peindre sans, confie l’artiste. Je couche alors sur la toile ce qui vibre en moi. Je ne m’arrête plus, un peu comme si j’étais en transe. »

NC-NYC : il n’y a qu’un pasParti en 2003 de Nouvelle-Calédonie pour voyager en Europe puis jusqu’à Los Angeles, il en profite pour exposer dans le Sud de la France. En 2010, le mal du pays le pousse à revenir. Récemment, il a exposé à la galerie Lec Lec Tic, pour le 8e Salon du petit format. Une mise en bouche avant la grande exposition collective qui l’attendait à… New York ! L’artiste a été

invité par l’Agora Gallery − une galerie d’art renommée de la « Grosse Pomme », à participer en décembre dernier à l’événement Pathway to Abstraction, Un Chemin vers l’Abstraction. « Un de mes amis est devenu mon agent et m’épaule pour

approcher des galeries à l’étranger. C’est vraiment une chance pour moi de présenter trois toiles à New York, ville d’art par excellence et celle de Basquiat en plus ! » Une reconnaissance qui pourrait déboucher sur d’autres opportunités.

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ROCK ATTITUDEBrice Poircuitte est aussi musicien, guitariste de Little Budapest. Ses connexions musicales lui ont permis de réaliser de nombreuses pochettes d’album pour différents groupes, et pas des moindres ! Il a signé la pochette du dernier EP Crazy Glue de Fishbone, un groupe américain fondé à la fin des années 1970 à Los Angeles, dont la musique fusionne entre rock, rap et funk. Sur le Caillou, il a signé la couv’ d’Othello and The Scaffolders dont la réussite graphique a souvent été soulignée.

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noguesLa tête dans les images

Avant de devenir réalisateur, Alan Nogues était un cuisinier passionné de littérature. Taraudé par son envie d’écrire, il reprend ses études, obtient son bac et s’inscrit en licence de Lettres. Auteur insoupçonné de plusieurs nouvelles, il publie

finalement un roman en 2009, Le Vert de l’île. Et, après la plume vient la vidéo : « j’aimais déjà la photo et le pouvoir de capter ce qu’on voit. Avec la vidéo, on peut aller plus loin et raconter une histoire non plus sur le papier mais en images ».

Liberté d’écritureIl apprend sur le tas et Internet. « Être autodidacte apporte une certaine liberté, une originalité, une fraîcheur mais c’est aussi avancer à tâtons, en n’étant jamais certain de ses choix. » En 2010, il se fait la main sur des clips, « des formats courts qui doivent coller à l’univers de l’artiste mis en scène et donnent un bon cadre de travail ». Deux ans plus tard, l’apprenti a trouvé sa propre voie, empreinte de nature, de contemplation et de réflexion. « Mon but n’est pas de donner mille informations à la seconde. » Il réalise le décor projeté du spectacle Mimésia de Liza Prouchandy, création double d’un film de paysages qui dialoguent avec la chorégraphie de la danseuse. « J’ai projeté le montage sur un écran transparent, un procédé qui permet à l’artiste de se fondre dans l’image, et même de s’y incruster. La gestuelle de Liza et la vidéo doivent être parfaitement synchronisées pour que l’effet soit réussi. » Il poursuit dans la même veine avec L’Île continent, sorti fin 2013. Un premier projet, une écriture plus personnelle, qui l’occupe pendant deux ans. « J’y raconte la nature calédonienne grâce aux savoirs kanak et scientifiques, deux connaissances du monde qu’on imagine le plus souvent en opposition. » Deux autres volets, déjà prévus, permettront de répondre à la question inaugurale du premier opus : « comment et par quel miracle, une si petite superficie peut-elle contenir autant de richesses ? »

Nature et cultureAlan rencontre, en 2013, l’auteur métropolitain Charles Juliet. L’écrivain, au passé familial torturé, mène une quête

Alan Nogues est un contemplatif. Il apprécie les pauses, les respirations

dans toutes les narrations.

poétique sur la construction identitaire, la condition humaine et la cellule familiale. Des considérations qui ont trouvé en Nouvelle-Calédonie, une résonnance particulière. Ces Entretiens avec Charles Juliet illustrent véritablement la griffe libre et non formatée d’Alan Nogues. Suivra en avril 2014, « Un Caillou et des livres », un docu-

fiction dans lequel des auteurs du pays deviennent acteurs. En s’inspirant astucieusement des techniques de réalisation de clips, il met en images la littérature, pourtant si abstraite. Productif, Alan Nogues sortira son prochain documentaire en mars prochain sur NC 1ère. Avec La Dernière révolte, il s’attaque –

et c’est peu dire – à un tabou : la rébellion kanak qui a secoué la région de Koné-Hienghène en 1917. « C’est un épisode méconnu et pourtant fondateur qui explique beaucoup de choses sur la société actuelle » résume-t-il. Revenant sur la question de la complémentarité des savoirs qui lui est chère, ce long métrage met en parallèle l’Histoire, livresque, et l’oralité kanak, montrant la subjectivité, consciente ou non, de chacun de ceux qui la racontent. Il n’a pas la prétention d’en sortir une « Vérité », mais espère que La Dernière révolte soit une bonne synthèse de l’état actuel des connaissances et permette peut-être d’ouvrir quelques pistes de réflexions.

Observateur attentif, cadreur minutieux, Alan Nogues filme la Nouvelle-Calédonie sous un angle original et sensible. Après la biodiversité dans L’Île continent puis la littérature dans Un Caillou et des livres, le réalisateur s’intéresse à l’histoire du pays. Avec La Dernière révolte, il expose un moment douloureux – la  rébellion kanak de 1917 – donnant du grain à moudre à la machine identitaire calédonienne.

Mon but n’est pas de donner mille informations

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Par Frédérique de Jode

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« Il y a un proverbe qui dit : tu es ‘’dans’’ ce Monde, mais tu n’es pas ‘’de’’ ce Monde… Ah ça, j’adore ! Le vent, tu sais d’où il vient mais tu ne sais pas où il va. Je suis comme ça ! » Certains êtres mystérieux, libérés des conventions, s’en vont soudain et ne laissent derrière eux que l’écho d’un rire tonitruant, le souvenir d’une forte personnalité. Samuel Kitchine, alias Palaje – « l’homme appartient à la terre » – nous a quitté à la fin du mois de novembre dernier à Strasbourg. Il devait enregistrer en studio, les semaines suivantes, quelques-unes des innombrables compositions rangées dans sa besace d’exilé volontaire.Cette aventure en terre alsacienne, si loin de la sienne, avait commencé presque 18 ans auparavant, en janvier 1997. En grandissant à la tribu de Tiéta, sur les bords de la rivière Voh, Samuel a rapidement trouvé dans la musique un terrain d’exploration propre à concilier son attachement à la tradition kanak et sa soif de rencontres. Initié au clavier et à la guitare dès son jeune âge, habitué à fréquenter les différentes communautés, « Sammy » va se forger un style aux influences jazz, rock et blues. « Il était dans cette mouvance soul music qui caractérisait bien des groupes à la fin des années 1970, cherchant une nouvelle voie

par rapport au reggae ou au rhythm’n’blues, se souvient Warawi Wayenece, l’un des vétérans du kaneka. C’était une époque où on tournait beaucoup dans les bals et les kermesses, sans se soucier d’enregistrer. » De fait, cette prédilection pour le live orientera très tôt le parcours du musicien.

L’un des fondateurs de VamaleyJuste après les « Événements », Samuel co-fonde Vamaley,

groupe de Témala parmi les poids lourds du kaneka alors naissant. En 1995, il enregistre au studio Alizé son unique cassette solo, Chant des Cagous. On y perçoit d’emblée l’influence blues qui colore ses rythmiques tchap. Puis vient 1997 et cette nouvelle vie, loin de Koné et de la station-service où Sammy travaillait. Suite à un concours de circonstances, il se retrouve sollicité pour une tournée métropolitaine de présentation du kaneka. L’auteur-

compositeur-interprète ne quittera plus l’Hexagone. Strasbourg sera donc sa ville adoptive, où son grand-père était venu combattre les Allemands. « J’ai pris l’initiative de rester pour tracer la route internationale sur laquelle les petits frères viendront circuler ensuite, expliquait-il en octobre dernier, avec sa faconde

Par Sylvain Derne

musique

La dernière balade de Palaje

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C’est à Strasbourg, dans l’Est de la France, que Samuel Kitchine « Palaje » avait « refait sa vie » depuis 1997. Le musicien, témoin et acteur de

la naissance du kaneka, était adepte d’un style fusion qui empruntait à  une foultitude de courants. Il s’est éteint fin 2014, à l’âge de 57 ans.

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et sa voix rauque caractéristiques. Si nous voulons que les gens qui jouent du blues et du rock soient imprégnés de notre kaneka, il faut peut-être commencer par s’intéresser à leur musique. C’est ça l’échange culturel ! C’est pourquoi j’ai voulu développer ce style fusion. »Au fil des ans, l’artiste à la dégaine bohème, chapeau vissé sur le crâne, s’était fait connaître grâce à son implication constante dans le réseau associatif de la ville et ses nombreux concerts dans les bars. Sly Karembeu, le partenaire préféré de Palaje au clavier, évoque l’une de ses premières scènes avec lui : « C’était il y a quelques années, pendant un mois de décembre. Palaje m’avait proposé de jouer ‘’pour un restau’’ de Strasbourg. Je saute sur l’occasion, débarque avec

mon instrument, et là je me rends compte que c’était pour le Noël des Restos du Cœur ! » L’association qui fournit des repas aux plus nécessiteux faisait appel au chanteur pour mettre un peu d’ambiance. « Il aimait les gens, essayait de les apaiser ; il les touchait avec sa simplicité. Les galères l’ont aussi forgé. »

Palaje ambassadeurIl se produisait régulièrement lors d’événements comme la Fête de l’Humanité ou le « Melanesian Culture Day »

d’Amsterdam. En 2009, il était retourné cinq mois sur le Caillou. L’occasion de renouer avec ses deux fils après une longue absence. Il avait pu échanger avec les vieux de la tribu, qui l’avaient remercié pour son travail de promoteur zélé de la langue hmwaveke.« Nous vivons dans une société où les gens sont tellement fatigués par leur boulot, leurs factures, les problèmes de la vie, avançait le chanteur. Alors si on arrive à leur donner une musique qui serve de thérapie, c’est bien. Parce que c’est ça aussi, ‘’Pacifique’’ vient du mot ‘’paix’’ ! »

Palaje, artiste fantasque et volubile, si fier de son rire

communicatif, se décrivait comme un « perfectionniste ». Il laisse quelques rares morceaux qu’on peut encore écouter en ligne, illustrant

sa recherche : des rythmes tchap, un kaneka fusionné

avec de multiples influences jazz, manouche, ou world – tel son morceau-fleuve Bofukaje. « C’est quelqu’un qui

s’est sacrifié à la musique et faisait preuve d’un grand courage, résume Warawi Wayenece. Il a contribué

à l’essor culturel kanak en Europe. J’aimerais qu’on puisse un jour

donner son nom à un centre musical ou une école sur

le Caillou. »

Merci à Odile Cottin, Warawi Waynece et Sly Karembeu d’avoir partagé leurs souvenirs.

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J’ai pris l’initiative de rester pour tracer la route internationale sur laquelle les petits frères viendront circuler ensuite

Samuel Kitchine lors d’un concert plein-air pour la Fête de la Musique 2014, à Ivry-sur-Seine.

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Propos recueillis par Jean-Marc Estournès

« Et si moi je n’ai envie d’écrire que des nouvelles ? »

littérature

Frédérique

De sa voix grave et sensuelle – qu’elle inscrit au passif du tabac ! – Frédérique Viole nous conte son amour

pour l’écriture de nouvelles, ses « histoires » comme elle dit. Même si, pour elle, l’exercice

ne coule pas de source. Son premier recueil, Narafala, a  secoué le landerneau calédonien.

Un délice pour les papilles.

Malgré de très bons retours, Frédérique Viole n’a pas l’intention de « se monter en mayonnaise » . « Un écrivain, c’est quelqu’un qui a déjà une œuvre. Moi, je viens juste de publier un bouquin.

J’en suis encore au stade de l’apprentissage. »

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* Publié dans l’ouvrage collectif Écrire les gens d’ici, 2011 ; Narafala, Écrire en Océanie, 2014 ;

Dors petit Sam, Écrire en Océanie, illustrations de Mélissa Bazire, 2013

Endemix : Orthophoniste, vous tentiez de « faire émerger les mots des autres, d’y mettre de l’ordre et de les polir ». Un beau combat. Pourquoi avoir arrêté ?Frédérique Viole : j’ai décidé, il y a quelques années, que le moment d’écrire était arrivé. Que je devais en profiter tant que j’avais deux bras, deux pieds et une tête fonctionnant à peu près normalement. J’ai toujours accumulé des tas de carnets et de bouts de papier. En pension, j’écrivais des histoires publiées ensuite dans le journal du collège. Mais pour se consacrer à l’écriture, il fallait du temps. J’ai donc arrêté le cabinet et changé de mode de vie.

Y a-t-il eu un déclic ?

En 2010, j’ai présenté le texte « Angélique ou l’histoire sans nom »* lors d’un concours organisé par l’association Écrire en Océanie sur le thème « Les gens d’ici ». Il a obtenu le grand prix. Ça m’a encouragée. Après « Angélique », Claudine Jacques m’a lancé : « Maintenant tu te mets à ta table et tu écris ! ». Je lui suis

reconnaissante de m’avoir un peu poussée.

Elle est très généreuse de son temps.

Pour la naissance de son dernier petit-fils, à sa demande j’ai produit un texte, qui lui

a plu et qu’elle a édité. C’était Dors

petit Sam, un conte pour tout-petits*,

l’histoire d’un gosse qui ne veut pas dormir…

Narafala* représente l’étape suivante…

J’avais envie de réaliser un recueil d’histoires

autour d’un fil conducteur. Certaines existaient déjà,

je les ai retravaillées. Les autres sont venues petit à petit. J’écris

difficilement, sans méthode ni plan. C’est pour moi un exercice laborieux, terriblement solitaire. J’ai besoin de silence. Parfois, je n’écris qu’une seule phrase en une journée !

Et le lendemain, il m’arrive de considérer qu’elle tombe comme un cheveu sur la soupe. Avant de commencer, il faut que je lise un peu, n’importe quoi. Comme une mise en condition. Je pense que si j’écris aujourd’hui, c’est d’abord parce que j’aime lire.

On vous dit très exigeante, plaçant la barre bien haut…Je veux trouver le mot précis, l’expression exacte – ils existent – le bon rythme. Celui qui se dit « oh, c’est pas grave, je laisse cette phrase, ça ira comme ça » peut changer de métier. Comme un menuisier qui fabriquerait une table avec un pied plus court que les autres. Non ! Une table doit être stable, et lisse lorsque vous faites glisser votre main dessus, sans échardes.

L’univers de Narafala est plutôt sombre, avec des thèmes récurrents : violences familiales, métissage, croyances, et la mort, omniprésente…Mon univers est fait de tout cela, un mari originaire du Vanuatu, des gosses métis, un féminisme qui a démarré à la fac. Des fois, je me dis « arrête de raconter des trucs avec des morts partout », mais je ne fais qu’écouter, piller des vies autour de moi qui, sans arrêt, butent sur cet écueil. Impossible d’y échapper.

Grâce à l’humour ? Il aide à ne pas sombrer dans le pathos, à parler de choses dramatiques sans pour autant vider la boîte de mouchoirs.

Comme le rapporte joliment Dominique Buzance, le libraire de Calédo Livres, à la fin d’une nouvelle vous laissez souvent le lecteur « au bord du précipice ». Assumez-vous ? Bien sûr, c’est délibéré. Il s’agit de tranches de vie, comme une rencontre,

un instant partagé dont personne ne connaît la suite, deux bornes de temps au milieu desquelles il s’est passé quelque chose. C’est la vie, on n’a pas toujours le pourquoi du comment.

À quoi ressemble l’après-Narafala ?J’ai travaillé avec Liliane Tauru, que j’apprécie énormément, sur sa collection bilingue de contes et légendes kanak. Elle m’a sollicité pour la réécriture d’un conte kunié, Nimüre (l’apparition de l’igname à l’île des Pins), à partir de la traduction mot à mot du kwényïï au français. Retranscrire l’esprit, avec pas mal de contraintes, est un exercice très intéressant.

Aucun roman en gestation ?Lorsqu’on me demande « alors, quand vas-tu écrire un roman ? », ça m’énerve ! Et si moi je n’ai envie d’écrire que des nouvelles ? Dans la tête des gens, le noble, c’est le roman. Moi j’aime le côté ramassé de la nouvelle. Rien n’y est innocent. Si un personnage boit un café telle page, c’est qu’il y a une raison à ce qu’il le boive là, et non trois pages plus loin. La nouvelle, ça ne pardonne pas. Et puis à mon âge, vu le nombre d’heures ou de jours que me prend une nouvelle, je n’ai peut-être plus le temps d’écrire un roman de 600 pages ! (rires)

J’écris difficilement. Sans méthode ni plan. C’est pour moi un exercice laborieux.

ENTRE PENSIONS ET CABANONNée en 1957 à Oujda, de parents auvergnats internes des hôpitaux du Maroc, Frédérique grandit à La Réunion. Enfant turbulente, elle est placée en pension dès la 6e. Chez les Sœurs de l’immaculée-Conception d’abord, dans un pensionnat pour jeunes filles de bonne famille près de Melun ensuite, un foyer d’Aix-en-Provence enfin, à l’heure du bac. « J’ai toujours eu un problème avec l’autorité et n’ai jamais supporté les contraintes.» Elle poursuit en psycho à Besançon, mais « à l’époque, avec ce genre d’études, on vous disait d’aller tout de suite vous inscrire à l’ANPE ». Alors, elle change d’orientation, suit un cursus d’orthophonie à la Timone, habite quatre ans un cabanon des Calanques, entre Marseille et Cassis. Un crochet par Paris et elle s’installe au début des années 1980 à Nouméa où elle ouvre un cabinet d’orthophonie.

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Intra-muros, c’est la plus petite structure du Conservatoire de la Grande Terre, mais hors les murs, elle rayonne sur le grand Nord et s’étend de Ouégoa à Belep en passant par Kaala-Gomen. Gérée par l’AFMI* et sous la direction d’Alfred Haino, surnommé Alphy, une dynamique équipe anime le lieu. Un agent d’accueil, une administratrice

– également chargée du développement du théâtre – et trois profs de musique s’activent auprès de 90 élèves en 2014.

Une antenne qui résonneQu’on ne s’y trompe pas, la musique vivait déjà de belles heures à Koumac. « Ça fait 20 ans que les enseignants du Conservatoire viennent ici. On n’avait pas d’espace pour la musique alors ils donnaient leurs cours à la mairie, à la gare routière ou au collège » se rappelle Alphy. Les mélomanes sont désormais bien mieux logés : salles de cours, individuelles ou collectives, locaux administratifs, et surtout un très bel auditorium. La jauge de 119 places peut sembler modeste, elle constitue pourtant une grande nouveauté à Koumac.Si le centre accueille tous les amateurs désireux d’apprendre, il accompagne aussi des musiciens en voie de professionnalisation, à l’image de Jason Belouma et Etienne Poamina, deux jeunes de Kaala-Gomen accompagnés l’an dernier pour intégrer le CMIT** de l’AFMI à Nouméa. Un parcours tout juste entamé, mais qui rappelle déjà celui d’Alphy, venu toutefois d’un petit peu plus loin. « J’arrive du Vanuatu ! J’ai commencé la musique dans ma chambre, puis à la maison commune, puis au village, puis à la capitale, et jusqu’en Nouvelle-Calédonie ». Le coordinateur rêve déjà du moment où, diplômés, ses jeunes poulains pourront prendre la relève. Pour valoriser la jeunesse

à tous niveaux, le centre organise aussi des concerts-tremplins et révèle les talents locaux.

Un cocon pour le théâtreCette effervescence ne s’arrête pas à la musique. Si l’antenne de Koné est le repère des danseurs du Nord, les comédiens ont, quant à eux, trouvé refuge dans les murs de celle de Koumac.

Invité et ambassadeur de marque, le dramaturge Pierre Gope y est résident depuis 2013. En 2015, le cap se confirme, avec au programme la diffusion de la prochaine création de l’auteur de Maré, mais aussi celle de la compagnie Les Arpenteurs du Caillou, un spectacle jeune public. « L’objectif de cette mission, qui nous a été déléguée par la province Nord, est de développer le théâtre ici,

et ensuite dans tout le Nord » souligne Olivia Wamytan, chargée du développement de la discipline. Des stages pour adultes et enfants seront aussi proposés tout au long de l’année.

* AFMI : Association de Formation de Musicien Intervenant** CMIT : Certificat de Musicien Intervenant

Scène

KOUMAC

Par Clémence Losserand

Il y a deux ans, le Conservatoire de Musique et de Danse de Nouvelle-Calédonie ouvrait une antenne à Koumac. Premier équipement spécialement dédié à la culture dans la commune, le nouvel espace a été rapidement investi par des habitants avides de création artistique.

QUELQUES RENDEZ-VOUS À NE PAS MANQUER EN 2015Le 30 avril : Pas de mariage et un enterrement, pièce de la compagnie Les Argonautes du PacifiqueLe 29 mai : concert-hommage à Gainsbourg par Stéphane FernandezLe 2 juin : L’Histoire et l’endroit, pièce de Pierre GopeLe 9 juillet : spectacle Free Women Show 2Le 7 septembre : Maloya, pièce de la compagnie Les Arpenteurs du CaillouDu 16 au 20 novembre : semaine de l’enfance spéciale théâtre

L’objectif est de développer le théâtre ici, et ensuite sur toute la province Nord

joue la comédie

L’antenne du Conservatoire devrait aussi compter une médiathèque municipale.

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onté à Koumac en 2011 pour y lancer une société d’infographie, le Nouméen tombe amoureux de la région. Il constate vite que, là-haut, tout ou presque est à construire en  termes d’audiovisuel. « Je me suis acheté du matériel grâce à un prêt

de l’ADIE* et je me suis formé tout seul, en suivant des tutoriels sur Internet. » L’apprenti-réalisateur se fait la main en réalisant des reportages pour des associations du cru. Ces premiers travaux attirent sur lui l’attention de la mairie de Koumac. « Dans le cadre du mois du Patrimoine 2013, ils m’ont proposé de réaliser un montage à partir de films en 8mm et super 8, collectés auprès des habitants. » Le documentaire retrace l’histoire de la commune depuis les années 1960, avec pour bande-son des interviews d’anciens. Il est projeté en public, et rencontre un vif succès. « Les vieux étaient fin contents de se revoir à l’image ! »

La parole en images Emballée, la municipalité  lui confie en 2014 la réalisation d’une série de  « portraits de vie » d’habitants de Koumac. En dix volets de dix minutes, il rencontre notamment Madeleine Chung, Marie Vico, le grand chef César Boarat, l’ancien maire Robert Frouin, Lucien Tourte et Lucien Berger. « L’idée est de conserver la parole des anciens, transmise directement par eux-mêmes, pour les générations futures. Ça ne s’était jamais fait auparavant dans la commune » explique le réalisateur, qui s’est aguerri en cours de route en suivant la formation de réalisation et de production dispensée par le Festival International du Cinéma des Peuples, Ânûû-rû âboro, en octobre dernier à Poindimié. Pour chaque portrait, une musique originale a été composée par Yohan Whaap, Louis Upane et Roman Perrin. « Je tiens beaucoup à ce que mes  films soient aussi une vitrine des sons du Nord » précise Sari Oedin.

L’imagination au pouvoir Autre corde à l’arc de Sari Oedin : la fiction. Pour célébrer l’ouverture du centre culturel Pomémie en juin 2014, il a réalisé Big Bang, la légende de Pomémie. Un dessin animé dans lequel il prête au lieu un passé sombre et violent, qui devra être lavé par une explosion de créativité tous azimuts. Il en a puisé l’idée… dans l’espace. « En faisant des recherches pour le scénario, je suis tombé sur un documentaire retraçant l’origine de l’univers qui m’a beaucoup impressionné et  influencé » raconte-t-il. Qu’elle soit cosmique, territoriale ou familiale, Sari Oedin est travaillé par la question de l’origine. Parmi ses projets à venir : d’autres « portraits de vie » des vingt derniers engagés indonésiens encore vivants sur les quelques 20 000 arrivés sur le Caillou depuis la fin du XIXe siècle. À l’instar de son père, aujourd’hui décédé. « Je n’ai pas eu beaucoup l’occasion d’échanger avec lui sur son passé à Java et sa vie de mineur, dit-il. Faire ce film, c’est aussi éclairer ma propre identité. » 

* ADIE : Association pour le Droit à l’Initiative Économique

La mémoire dans

l’objectif

En 2015, Sari rempile micro et caméra pour dix nouvelles rencontres de Mémoire de vies d’une commune.

Réalisateur autodidacte,

Sari Oedin commence à

s’imposer, en toute modestie, comme

« l’homme à la caméra »

en province Nord. À 38 ans,

il  déborde d’idées et met son regard

au service de la  valorisation de la culture et

des arts locaux.

audiovisuel

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Les vieux étaient fin contents de se revoir à l’image !

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Parlez-nous des origines d’A7JK.Jean-Yves Pawoap : on a monté le groupe dans les années 1990, entre jeunes de la tribu de Pombeï et des alentours de Touho. On avait trouvé un nom, A7JK : à 7 jeunes kanak. C’était juste pour s’amuser !

On jouait des reprises de styles différents, rock, reggae, etc. Aucun d’entre nous n’est passé par l’école de musique et encore aujourd’hui on joue tous à l’oreille. Au départ, on n’avait même pas de batterie, on tapait sur des cartons, sur n’importe quoi. Et puis, aujourd’hui, je suis le seul qui reste de la formation originale. À cause des responsabilités, du boulot et de la famille, les anciens sont partis et les petits frères ont assuré la relève.

Vous possédez un son bien à vous, comment s’est-il construit ?Au hasard, en fait ! En essayant un peu toutes les sonorités du synthé, un instrument qu’on aime bien. C’est « vas-y, mets voir un peu de son de trompette, un peu de machin... », et la sauce finit par prendre. En studio, Alain Lecante – qui a produit l’album – a aussi rajouté quelques effets supplémentaires.

Contrairement à beaucoup de groupes, vous n’avez pas de choriste sur l’album.Je m’attendais à ce qu’Alain Lecante en invite sur certains titres, mais il a trouvé que ma voix allait aussi bien toute seule. Et puis il y a aussi mon tonton Calice qui chante.

Vous pratiquez la scène depuis des années. Qu’est-ce qui vous a poussé à passer en studio pour la première fois l’an dernier ?Edou, qui dirigeait le centre culturel de Hienghène, nous a proposé de faire une scène au Mouv’ de Rivière-Salée avec d’autres groupes du Nord. Là, on a eu la surprise de découvrir un jury, des gens de la profession venus pour nous écouter, dont Alain Lecante, le directeur

de Mangrove. C’est comme ça qu’on a remporté la possibilité d’enregistrer un album en studio, environ deux mois après.

Vos compositions étaient déjà prêtes ?Oui, même si on a joué majoritairement des reprises, j’ai toujours un peu composé en parallèle. Depuis la sortie de l’album, j’ai déjà trois nouvelles chansons qu’on présente sur scène.

Quelles sont vos influences ?Toots and The Maytals et Creedence

Clearwater Revival. Ceux-là m’inspirent depuis longtemps.

Vous vous attendiez à faire un tel carton avec cet album ?Pas du tout. On a tous été étonnés qu’il marche aussi fort.

A7JK est-il un groupe engagé ?Engagé pour le pays, oui. Mais en croyant sincèrement au vivre

ensemble.

Vous sentez que votre message passe bien auprès du public ?Franchement, oui. Que ce soit dans le Nord, dans le Sud ou dans les Îles,

les gens viennent à nos concerts, et participent à fond. On a un copain qui nous accompagne souvent en tournée. À Lifou, il est descendu dans le public et quand il est remonté sur scène il n’en croyait pas ses oreilles. Les gens chantaient par cœur les paroles de nos chansons en cèmuhî. Tu te rends compte ? En terre drehu, ils connaissent nos paroles en langue. Ça nous a vraiment ému.

* À l’heure du bouclage de ce numéro

A7JKPropos recueillis par Antoine Pecquet 

musique

Les gens viennent aux concerts, et participent à fond

Sorti en août dernier, l’album Diapason du groupe A7JK a fait office d’ovni dans les charts calédoniens. Resté perché plusieurs semaines au sommet du top 20 en 2014, le titre « Aires du pays » est encore très sollicité sur Internet avec plus de 98 000 vues* sur Youtube. Même le leader du groupe, Jean-Yves Pawoap, n’en revient toujours pas.

Jean-Yves Pawoap, leader du groupe A7JK, « À 7 Jeunes Kanak ». © A

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es longues années qu’il a passées sur les bancs de l’école, Teddy Diaïké aura au moins gardé une grande agilité dans le maniement du stylo à bille. « Je gribouillais des portraits de Bob Marley ou

du Che parce que c’est ça qui était à la mode », s’amuse le solide gaillard au regard jovial. Il a quitté le système scolaire au collège

et retourne vivre chez ses parents, à la tribu de Gelima à Canala.

Déjà très jeune, il choisit

de partager son temps entre le dessin, la sculpture et le travail au champ. Simple routine

qu’il assume encore aujourd’hui.

arts plastiques

Sculpteur dans l’âme

TEddyTeddy Diaïké fait partie des sculpteurs les plus renommés du Caillou, dont les œuvres alimentent les collections du centre culturel Tjibaou ou de Pomémie. Pourtant, l’homme vit discrètement, humblement, entièrement dédié à sa création. Un de ces artistes qui n’a pas besoin de faire du bruit : ses sculptures parlent pour lui.

Par Théo Rouby

Teddy Diaïké puise son inspiration dans sa tribu de Gelima, à Canala.

DiAïkéD Du stylo au ciseau

C’est une rencontre avec le Pasteur Wata, sculpteur reconnu par ailleurs, qui le fera grandir artistiquement. « J’avais le coup de crayon. Lui, m’a apporté le rapport à la culture », se souvient le jeune disciple. Pendant quatre ans, il dessine, sans cesse, pour affiner son trait, peaufiner ses compositions, enrichir la symbolique de son corpus. « Quand j’avais terminé quatre ou cinq formats, j’allais le voir et il m’en faisait la critique. Et puis après, je pouvais sculpter un peu. » Car c’est bien le travail du bois qui lui a donné envie de se dépasser. « Dessiner n’a jamais été compliqué pour moi. En revanche quand on s’attaque au bois, on doit rentrer dedans, retirer de la matière, ça m’aide d’être passé par le dessin... »

Ouvrir les yeux et réfléchirTrès vite, ses œuvres fourmillantes de détails se font remarquer. Il enchevêtre l’homme, son environnement et les esprits,

fait surgir du néant un tourbillon de totems, cristallisant l’âme de la cosmogonie kanak. Cette âme qu’on retrouve, toujours, au centre de sa démarche. C’est d’ailleurs à Gelima qu’il puise son inspiration.

« Je ne pourrais pas faire ça sans vivre là, au milieu de la nature et de la coutume», souligne Teddy, qui assure

ne jamais tenir plus de trois jours à Nouméa. Cet artiste polyvalent se voit comme un passeur de culture. Entre son

monde et l’extérieur. Mais surtout pour les générations suivantes. « Nous sommes de passage sur terre. Je fais ce que j’ai à faire. Et j’espère que des jeunes prendront la relève quand je ne serai plus là. »Aujourd’hui, la sculpture occupe la majeure partie de son temps. On retrouve ses bois de Koné à Nouméa. Pourtant, sa dernière exposition au centre culturel Tjibaou remonte à 2006. Le succès a un prix : « J’ai tellement de commandes que j’ai beaucoup moins le temps d’être dans la créativité. » Qu’importe, sa vie est en cohérence avec sa production. « Il  faut avancer avec les yeux ouverts, estime Teddy. Ne pas regarder uniquement vers la modernité, courir après l’argent. Mais on ne doit pas non plus rester replié sur les racines. »

Je gribouillais des portraits de Bob Marley ou du Che parce que

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Le CDI de Pouembout, en dehors de sa mission premièred’accès à l’information, contribue à mettre en avant la culture.

culture

Oubliés les longs moments passés terrés au fond du CDI, à réviser ses leçons dans un silence de plomb. Les Centres de Documentations et d’Information peuvent être aussi des lieux dynamiques, ouverts sur l’extérieur. La preuve avec le CDI du lycée agricole de Pouembout qui révolutionne l’image des bibliothèques poussiéreuses et ouvre un espace d’expression et de découverte artistique.

Outil pédagogique indispensable dans un établissement scolaire, le CDI est un lieu de travail et de lecture permettant l’accès aux ressources documentaires des élèves et des enseignants.Outre ce rôle d’information,

les deux documentalistes du lycée agricole de Pouembout, Christine Davée et Céline Pillot, se sont données comme mission de lui octroyer une autre dimension. Tout au long de l’année, elles organisent pour les élèves, des événements culturels autour de la lecture et de l’écriture, qu’ils re-découvrent sous un jour plus ludique que la studieuse approche des cours. « Le CDI collabore avec différents partenaires, comme la médiathèque Ouest, la Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie, la bibliothèque Bernheim, le CDP* ou l’association CalédoPhoto, pour mettre en place ces opérations », explique Christine Davée, professeure-documentaliste.

Jeunes élèves et grands écrivainsDans le cadre de la Fête du livre organisée en avril 2014, un concours littéraire a été proposé aux élèves de seconde. Ces jeunes lecteurs ont pu élire leur roman préféré parmi cinq ouvrages. « Les élèves ont eu l’occasion de rencontrer les auteurs sélectionnés : Vincent Vuibert, Bernard Berger, Francia Tissot et Thanh-Van Tran-Nhut », rappelle Céline

Pillot. Huit élèves inscrits au concours se sont ensuite rendus au Silo à Nouméa, en octobre dernier. Grand honneur pour eux, ils ont pu rencontrer Déwé Gorodey, participer à l’une des tables-rondes et à un atelier destiné au public scolaire. « Ce fut une expérience formidable pour ces jeunes qui ont plongé au cœur de l’univers littéraire », constate la documentariste. Autre manifestation plébiscitée : le mois de la presse au lycée. Pour l’occasion, un kiosque de plus de 150 revues a été installé. Les élèves se sont ainsi familiarisés au langage des médias en travaillant sur l’écriture d’articles de presse ou en interviewant le réalisateur calédonien Vincent Lépine.

Pépinière d’artistesLe CDI s’ouvre à d’autres disciplines artistiques afin de faire découvrir aux élèves la culture en général. « Un concours de dessin sur la musique leur a particulièrement plu et les œuvres produites ont été très remarquées, à tel point que nous reconduisons l’opération en 2015. » D’autres expositions ont été aussi très

plébiscitées par les élèves, comme celles sur la musique reggae et les mangas ou encore celles sur les romans policiers du monde, prêtée par la bibliothèque Bernheim. « Nous avons eu de bons retours des élèves et des enseignants, c’est  pourquoi en 2015, nous allons poursuivre nos partenariats afin de multiplier ces événements tout au long de l’année scolaire. »

* CDP : Centre de Documentation Pédagogique

LYCÉE AGRICOLEDE POUEMBOUT

Par Frédérique de Jode

Un CDI qui a tout compris

QUOI DE NEUF EN 2015 ?Plusieurs projets d’animations ont été déposés au Vice-rectorat. Parmi eux, participer au Prix Vi Nïmo (récompense remise par les lycéens à un auteur calédonien contemporain). « On prévoit aussi une sortie au Silo de Poindimié, rajoute Christine Davée. On poursuivra également vers la musique avec la découverte d’instruments traditionnels. Des arts plastiques devraient également être proposés aux chanceux élèves de Pouembout. »

Le CDI est de plus en plus apprécié

en tant que lieu de découverte artistique

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culturel du Mont-Dore, dans lequel il coordonne les danseurs et musiciens de l’association Xoobwen Fwada « On se sert des qualités de mouvement typiques des danses traditionnelles d’ici, qu’on met au service d’une forme d’abstraction bien contemporaine », explique-t-il.

Le corps traverséPour nourrir son travail pédagogique et artistique, et afin de « poser des jalons » pour une danse contemporaine calédonienne, Sylvain Wenethem mène en parallèle une recherche de longue haleine sur le corps mélanésien. « La physicalité du peuple premier est étroitement liée à son environnement naturel, mais au contact d’autres ethnies, avec la colonisation et les transformations économiques et sociales, elle a été traversée et remise en question. À l’heure où tout s’accélère,

la confrontation entre l’espace de la tribu et l’espace urbain agit directement sur le corps et la posture. » Cette quête semble prometteuse. Sylvain Wenethem, quant à lui, veille avec soin à mûrir sa réflexion sur la danse contemporaine pour mieux en récolter les fruits.

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Le jardinier du geste

Sylvain

Par Antoine Pecquet

D’abord mettre les élèves à l’aise avec leur corps, la danse vient ensuite

atiemment, Sylvain Wenethem plante les graines de la danse contemporaine en province Nord. « C’est comme l’igname, ça met son temps à pousser » pose d’emblée le professeur diplômé d’État, en poste depuis mars 2013 à l’antenne du Conservatoire de Musique et de Danse de Koné. «  La base de tout, c’est la sensibilisation

des enfants au mouvement » assure-t-il. Tous les lundis et jeudis, il éveille les petits, dès trois ans, à l’expression corporelle. Et enseigne également aux plus grands, ados comme adultes, l’art « d’évoluer, individuellement et collectivement » à partir de leur « bagage gestuel ». Le danseur s’explique : « Il s’agit surtout de valoriser ce que chacun porte en lui, en imposant le minimum de choses. On doit déjà mettre les élèves à l’aise avec leur corps, puis les aider à développer les appuis, le regard et la perception. La danse proprement dite vient ensuite ». Sa mission pédagogique le conduit aussi dans les écoles et au collège de Koné, où il intervient régulièrement. « Là, le but n’est pas tant de former de futurs danseurs que de permettre aux jeunes d’être plus souples, mieux conscients de leur corps, et en harmonie avec lui. »

Une danse en actionS’il souhaite donner du temps au temps pour faire émerger des spectacles majeurs en province Nord, Sylvain Wenethem s’active déjà sur le front de la création. En avril 2014, il signe le tableau La Cigale et la Fourmi du spectacle Histoire de Fables mis en scène par Quentin Rouillier. Un duo dans lequel dialoguent danse contemporaine et culture hip-hop. En septembre, il chorégraphie une partie du spectacle Les Saisons du Sacre, présenté au centre

Professeur, Sylvain Wenethem enseigne la danse contemporaine à Koné. Une activité qu’il envisage sur le long terme, comme une croissance naturelle, et qu’il nourrit d’une réflexion profonde et originale sur le métissage du mouvement.  

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TutugoroLa culture,

ciment de la citoyennetéEn 2004, une politique culturelle émerge en province Nord. En une décennie, elle n’a cessé de prendre de l’ampleur et en 2015, malgré une légère récession, le budget qui lui est dédié dépasse les deux milliards de francs CFP. Retour sur ses principales orientations avec Victor Tutugoro, 2e vice-président de l’institution et président de la commission culture.

Propos recueillis par Clémence Losserand

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Endemix : Quel est le poids budgétaire de la culture en province Nord ?Victor Tutugoro : le budget voté pour 2015 est de 2,2 milliards de francs CFP.Il était de 2,3 milliards en 2014. Compte tenu de la récession budgétaire, on s’attache à maintenir ce qui existe déjà.

Quels sont les fondements des orientations politiques prises en faveur du développement culturel en province Nord ? De manière générale, il s’agit de proposer un nouveau contrat social établissant des liens entre les communautés. Nous souhaitons valoriser et protéger l’identité Kanak, tout en soutenant aussi les populations non Kanak. Le maître mot, c’est de conforter le patrimoine de toutes les communautés, pour que toutes soient reconnues pour ce qu’elles sont.

En termes d’équipements culturels, où en est-on ?Du point de vue opérationnel, nous nous appuyons sur les centres culturels. En 2014, celui de Koné a été rénové. Et en 2015, un centre flambant neuf à Hienghène va pouvoir accueillir une programmation. Deux autres structures sont en projet : une à Canala, pour laquelle l’architecte a été choisi et qui a fait l’objet d’une « Autorisation de Programme » de 557 millions de francs CFP ; et une seconde à Houaïlou. L’acte coutumier vient d’être signé entre la province et le GDPL* ; pour l’heure, il est chiffré à 410 millions. Il y a les salles de cinéma, ici à Koné sur terres coutumières. On aimerait mettre en place un partenariat avec un opérateur privé qui prendrait en charge la gestion. On trouve aussi l’écomusée du café à Voh. C’est tout un travail que l’on soutient depuis longtemps car il est important de valoriser cette histoire commune. Consigne a été donnée à la direction de continuer à accompagner au plus près toutes ces associations.

Le tissu associatif semble en fait le véritable acteur de cette vie culturelle.Dans notre méthodologie de travail, on mise beaucoup sur ce réseau associatif qui est en effet très développé. Pour la musique par exemple, on accompagne les centres qui se sont créés un peu partout, et par ce biais, nous sommes aux côtés de l’AFMI** et des associations Dubaan Kabe, Mêrê a Gaara, Ari Jawe… Soit dit en passant, nous dotons également le Conservatoire de Musique et de Danse à hauteur de 167 millions.

On peut aussi citer le soutien apporté aux descendants des Japonais de Poindimié lors de leur déplacement à Okinawa. On continue à favoriser les diverses communautés et les espaces d’échanges qu’elles créent : c’est ce qui fait le ciment de la citoyenneté. En tout, 364 millions sont dédiés aux associations.

Qu’en est-il des aides à la création ?Justement, elles passent par ces centres et les associations qui ont un rôle à jouer dans les processus de création. Il y a aussi l’association du Chapitô dotée de 20 millions. Il tourne dans toute la province, et c’est une formule qui marche bien, particulièrement auprès des enfants.

Parlons de l’événementiel. Quelles sont les grandes dates de 2015 ?Le festival Ânûû-rû âbôrô est toujours soutenu (plus de 45 millions). Cela prend de l’ampleur car il mobilise beaucoup les artistes et les populations, et ce au-delà de la région. Il y aussi le festival Cebu Nyebi, organisé tous les deux ans et en 2015, il aura lieu dans l’aire Hoot ma whaap. L’idée, c’est d’en faire quelque chose d’incontournable au niveau régional, à l’instar du Fest Napuan à Port Vila.

« La télé du Nord » a-t-elle un poids important dans ce budget ? NCTV s’enrichit et développe notamment le traitement de l’information interne à la chaîne. Une nouvelle session de formation a été organisée dès janvier pour

qu’à la mi-2015, la chaine passe à l’information. Son budget s’élève à 480 millions, dont 60 pour cette formation.

Malgré une multitude de propositions, la communication n’est pas toujours au rendez-vous. Avez-vous des solutions pour être plus visible ?Il est vrai que nous ne disposons

pas d’outils de communication propres à la culture. C’est vrai aussi qu’il y a des choses organisées ici ou là dont on n’est pas forcément informés. On réfléchit à utiliser les supports médiatiques soutenus par la province comme relai de ces actions. Il y a NCTV et

le magazine Le Pays, mais aussi les radios qu’on subventionne. Après, j’ai aussi la sensation que plus on communique, moins les gens font attention.

De la culture  « revendication politique » à la culture « produit de consommation », où nous situons-nous en province Nord ?La culture reste un élément fondamental de la revendication identitaire et politique, mais cet aspect de consommation-divertissement devient aussi important. On fait toujours la coutume, mais on achète aussi des CD, c’est une évolution normale ! On a aussi conscience que tout le monde n’avance pas dans les mêmes conditions : on parle de réduire la fracture numérique, mais au-delà il y a une fracture sociétale à réduire en premier.

Le maître mot, c’est de conforter

le patrimoine de toutes les

communautés

* GDPL : Groupement de Droit Particulier Local** AFMI : Association de Formation de Musicien Intervenant

TROIS QUESTIONS À ALBERT SIO, DIRECTEUR DE LA CULTUREEndemix : Quand la direction de la culture a-t-elle été créée ?Albert Sio : créée en 2008, elle obtient équipe et budget propres en 2009, se détachant de la mission de la femme, des sports et loisirs. En 2008, nous étions quatre agents ; aujourd’hui, nous sommes treize. Quels étaient ses objectifs?Le principal point était la mise en place d’infrastructures. Aujourd’hui, ce projet est achevé. Restent encore à l’étude les centres culturels, l’école d’art du pays, l’école de musique de Poindimié (déjà en travaux) et le cinéma de VKP. Ces équipements sont conçus pour dynamiser les zones dans lesquels ils sont implantés. Que reste-t-il à faire ?On réfléchit au développement de ces structures et à leur impact budgétaire : jusqu’en 2018, nous soutiendrons leur fonctionnement. Le rôle de la province, ce n’est pas de faire à la place des acteurs ! L’objectif est que les opérateurs associatifs, au fil du temps, se professionnalisent.

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e truc d’Élodie Lucas et Adrien Strzyzewski, le couple de trentenaires aux commandes de l’association Nice to Meet You,

c’est la « street ». Comprendre : la culture de la rue. Celle qui mixe rap, electro et graffiti dans un tourbillon de créativité globale, de Paris à New York en passant par Berlin, Montréal et Tokyo. « Nous sommes animés par un esprit d’exploration et d’échange, en dehors des sentiers battus de la culture commerciale » résume Élodie Lucas.  Ils se sont connus sur les banquettes du bar le MV Lounge, où Élodie a officié un temps comme directrice artistique, tandis qu’Adrien opérait aux platines. Et c’est le « MV » qui a accueilli les premières soirées Nice to Meet You. Le concept : inviter un artiste, DJ,

association

Rencontre

Élodie et Adrien, les deux moitiés de Nice to Meet You, sur fond de graff signé Grems, un maître du genre, qu’ils ont fait venir à Nouméa en août dernier.

underground avecNice to Meet You

LOn est content de les avoir rencontrés : Élodie Lucas et Adrien Strzyzewski, de l’asso Nice to Meet you, sont une ouverture sur le monde. Celui de l’underground international qui plus est. Ils font vibrer les nuits calédoniennes en

organisant le débarquement d’artistes de marque, comme

Elisa Do Brasil. En 2014, ils ont aussi fait entrer la Nouvelle-Calédonie dans le réseau artistique multi-pays du projet Inside Out, créé par le photographe JR.

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underground avec

rappeur international à se produire en exclusivité et en mode intimiste sur le Caillou. « Pour les artistes, c’est un bout de vacances et de vécu dans un endroit magique, et pour le public d’ici, c’est la possibilité de découvrir des propositions originales » explique Élodie.

Pointures et mélangesLe duo d’activistes alternatifs adeptes du DIY* – ils assurent quasiment

à eux seuls le booking, la gestion, la communication et la logistique de leurs événements, revendique une vingtaine de soirées depuis 2013. Leur liste d’invités force le respect. Entre autres DJ Vadim, pointure russe de l’abstract hip-hop ; DJ R-ash, quatre fois champion de France de scratch ;

Big Red, pape du ragga francophone ; le producteur esthète parisien Onra ; l’égérie drum and bass Elisa Do Brasil et le rappeur-graffeur-designer belge Grems. Fiers d’avoir attiré sur le Caillou ce « line-up » digne d’une capitale cosmopolite, Élodie et Adrien sont tout aussi satisfaits de faire jouer ces artistes devant un public des plus éclectiques. « Pour nous, une soirée est réussie quand elle réunit des gens de toutes les communautés et de tous les milieux. » Du reste, le nom de l’association annonce d’emblée la couleur.

« Nice to Meet You, ravi de vous rencontrer », c’est le résumé de notre programme : on est vraiment dans l’accueil, la découverte et le partage. »

Portraits géantsMordu de son, le binôme est aussi féru d’images et d’arts visuels. Les portraits XXL en noir et blanc affichés sur les murs du centre d’Art, sur la place des Cocotiers et sur la façade de l’hôtel de ville de Nouméa

en octobre dernier, c’était leur initiative. « On avait envie depuis longtemps de relayer ici le projet Inside Out, du photographe JR, qui expose dans les rues des grandes villes des portraits géants d’habitants. » À l’occasion de ses 160 ans, la municipalité leur a confié la production de cent soixante portraits de Nouméens. « On a travaillé avec deux photographes professionnels, Paco et Rémi Schapman, qui ont fait un boulot extraordinaire. » À partir de mars 2015, le projet Inside Out se prolonge avec une nouvelle série de deux cent cinquante portraits, financés par les provinces Nord et Sud, la Mission aux Affaires Culturelles du Haut Commissariat, la société Le Froid et Photo Discount. Affichés cette fois sur l’extérieur de la FOL. « On a suivi la tournée Bar en Live avec un studio mobile, explique Adrien, et on a shooté le public des concerts à Koumac, Koné, Poindimié et Lifou. » Comme au centre d’Art l’an dernier, l’exposition est participative : le public est invité à donner la main pour l’accrochage des photos, dans une ambiance de musique et de fête.Pour en savoir plus, rendez-vous sur www.facebook.com/ntmy.nea

*Do it Yourself : « Fais-le par toi-même », le credo des acteurs de l’underground depuis l’ère du punk

Une soirée est réussie quand elle réunit

des gens de toutes les communautés, de tous

les milieux

Nice to Meet You

Par Antoine Pecquet 

En avril, le couple compte revenir à ses premières amours musicales en organisant, dans le cadre de

la Quinzaine du Hip-Hop, la venue en Nouvelle-Calédonie de DJ Pone, une grande figure du

turntablism. Au-delà, jonglant entre leurs vies professionnelles et le fonctionnement de

l’association, qu’ils décrivent comme « un hobby franchement intense », les deux complices

espèrent, cette année développer encore leur force de frappe événementielle, « pour atteindre

un rythme de croisière de trois ou quatre soirées événements par an. » Sans céder aux sirènes du

mainstream. Bref, fidèles à la street.

* Turntablism : art de créer de la musique en utilisant des platines comme instruments

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Le Pays d’entre-deux de Bernard Berger,éd. La Brousse en folie, 156 p.

Drôle de Cailloulittérature calédonienne

Il ne s’agit pas vraiment d’une bande dessinée mais d’un mélange entre celle-ci, le manuel scolaire et le journal satirique, styles mêlés avec espièglerie et jubilation par monsieur Berger. Mais défricher

la complexité de l’histoire calédonienne, de 1900 à 1958, pour la rendre accessible au profane (soit résumer 58 ans en 156 pages, dont beaucoup d’illustrations) se révèle quasiment mission impossible. La culture BD humoristique passe mal dès lors qu’on se coltine à la violence de l’histoire. D’où le sentiment d’un traitement lisse, où tout est survolé, les événements comme les êtres.

Nos ancêtres les KanakCar la caricature détermine ses propres limites : elle découle et s’accommode de la brièveté, de la fulgurance. Elle s’affaiblit à mesure qu’elle dure et use de raccourcis. Ainsi, par exemple, on peut regretter le traitement expéditif de la révolte de 1917

Par Stéphane Camille

ou grincer des dents devant la représentation stéréotypée de la femme mélanésienne. Finalement, avec des formulations comme « nos vieux indigènes » ou « nos vieux Kanak », il émane du livre un fort parfum de IIIe République, un esprit que, pourtant, le texte dénonce à juste titre parce qu’il emboucane encore les relations entre la France et ses anciennes colonies.À l’image des nombreuses références aux grands de la BD, tel Hergé, on serait tenté de rebaptiser cet ouvrage Astérix et Obélix au pays des Kanak, à quelques choses près : on n’y retrouve ni l’art du cadrage quasi cinématographique d’Uderzo ni les traits d’esprit de Goscinny ni la liberté permise par la distance que représentent 2 000 ans d’histoire.

Alors, malgré un travail iconographique remarquable, on peut douter que ce bel album ne procure les bonnes clefs pour décoder (déminer ?) les rapports humains et les tensions sociales de la Calédonie contemporaine.

En voulant faire œuvre d’historien, le plus célèbre des auteurs calédoniens tente de donner corps à une notion à l’état embryonnaire, le destin commun. Un gros travail pour un exercice périlleux.

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Le Bouclier rouge de Claudine Jacques, éd. Noir au Blanc, 2014, 292 p.

À l’orée du sable de Déwé Gorodé, éd. Vents d’ailleurs, 2014, 116 p.

Il y a quelque chose dans ce roman qui rappelle à la fois Au cœur des ténèbres de Joseph Conrad et L’Île du docteur Moreau de H. G. Wells. Quelque chose de poisseux, surnaturel et sinistre ; une atmosphère qui, malgré le soleil

de plomb et le décor tropical, suinte, glace le sang et donne la nausée mais vous incite à poursuivre la lecture inlassablement. Dans ce roman choral qui réunit un « Man Ostrelia »*, un « Raconteur », une jeune fille et Belelu l’orphelin érudit, chacun des personnages constitue l’un des pions du jeu machiavélique auquel se livre un collectionneur d’art dont la démesure et la cruauté contaminent tous ceux qui le côtoient. 

Une intrigue menée au rythme du kunduCes histoires d’écumeurs des mers et de marchands d’art

sans scrupules ne sont certes pas nouvelles. Pourtant, ce récit est résolument original en ce qu’il convoque des grands récits mythiques océaniens et joue à la fois de l’imagerie cannibale, longtemps attachée aux îles noires du Pacifique. En lui ajoutant une once de fantastique, Claudine Jacques évite très habilement de raviver

un cliché et donne à l’intrigue une dimension intemporelle.Le Vanuatu, archipel voisin, archipel mystique s’il en est, n’a pas fini, semble-t-il, d’inspirer les auteurs calédoniens.

*« Man Ostrelia » Australien en bichlamar

Il aura fallu presque quinze ans, depuis la parution de Dire le vrai, pour que Déwé Gorodé ne revienne en poésie avec ce nouveau recueil intitulé À l’orée du sable. Quinze ans de la vie d’une femme accomplie, d’une mère, d’une militante

et d’une des figures incontournables de la scène politique calédonienne ; et pourtant, Déwé Gorodé ne livre ici que l’essentiel. Femme de peu de mots, au verbe juste et pudique, elle émeut par l’humanité qu’elle dégage lorsqu’elle évoque l’enfant parti trop tôt ou le cancer. Autant d’épreuves intimes qui, loin de peser sur le recueil et

la lecture, rappellent que nous partageons tous les mêmes joies et les mêmes douleurs, au long de notre vie.

Femme kanak et universelleCar c’est bien la vie qui est au cœur de ces poèmes, celle de cette femme une et multiple, d’une femme kanak et universelle. Une femme qui se construit sans jamais être « ni mère d’amertume/ni sœur d’aigreur/encore moins d’ingratitude » mais qui

« ba[t] [s]es semelles au rythme des mots [et] module [s]es pas à l’allure de l’alizé [...] près toujours plus près de l’espoir ».

Au cœurdes îles noires

Par Virginie Soula

Par Virginie Soula

Ce récit est résolument

original

De la moiteur des forêts de Mélanésie à celle du fond de cale d’un navire équipé de mercenaires sans foi ni loi, Le Bouclier rouge, dernier roman de Claudine Jacques, nous entraîne avec brio dans les turpitudes du monde des marchands et des collectionneurs d’art océanien. Effroi garanti car le sang coule le long des racines des nabanga !

littérature calédonienne

littérature calédonienne

Au bord de l’eau, à « l’orée du sable »

La poésie pour revenir au seuil, celui de la vie d’une femme, de son écriture, de ses luttes insulaires. Le dernier recueil de Déwé Gorodé fait émerger une voix plus douce et plus personnelle qui touche par sa simplicité. Une poésie aérienne et épurée auquel l’ouvrage, par sa facture même, rend hommage avec, en couverture, ce battement d’aile, moment suspendu de paix et de liberté.

Déwé Gorodé ne livre ici que

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Buveurs de kava de Patricia Simeoni et Vincent Lebot, éd. Géo-consulte, 361 p.

Poutous sur le popotin d’Epeli Hau’Ofa,éd. Au vent des îles, 2013, 211 p.

L’Or du bout du monde de Tamara McKingley, éd. Archipel, 2014, 450 p.

Les fondementsde la guérison

littérature internationale

littérature internationale

beau livre

La naissanced’une nation

La civilisationdu kava

vec le troisième volet de sa saga sur l’Australie, Tamara McKinley nous plonge dans les recoins du cinquième continent, dont l’histoire ne

manque pas de résonner avec la nôtre, une fresque vivante et peuplée de personnages dont les trajectoires se croisent en un même destin. Si on se laisse volontiers captiver par ces vies romancées, l’auteur n’évite pas

une question plus politique. L’épilogue semble contenir le propos central : une nation ne se construit, au sens politique et symbolique du terme, qu’avec le sang versé par ses citoyens. Bien que les hommes soient déjà liés par des attaches bigarrées voire improbables, il leur faut souvent faire front contre un ennemi commun pour se sentir concitoyens et dépasser leurs différences.

eux mains serrées sur un filtre végétal, le liquide brun qui s’écoule au-dessus d’un tanoa, la couverture de l’ouvrage Buveurs de kava montre le geste ancestral du presseur de ce breuvage auquel

la plupart des peuples du Pacifique ont attribué des vertus magiques. Derrière cette photo qui invite à partager un shell sous les farés enfumés ou au cœur des forêts de Tana, Vanuatu, c’est la restitution d’un travail de recherches particulièrement complet sur le kava qui attend le lecteur. Les auteurs ne se contentent pas d’être exhaustifs au niveau chimio-pharmacologique, mais comme l’indique le titre, ils traitent également des aspects humains de la «civilisation du kava»: cérémonies et échanges, analyse des enjeux économiques, mythes et légendes liés à cette boisson. Cet aspect culturel est particulièrement bien mis en valeur à travers de textes clairs et de documents originaux, comme cette photo montrant une cérémonie du kava dans la demeure de R. L. Stevenson…Un beau livre de références qui apporte un éclairage scientifique sur les mystères du kava.

Par Clémence Losserand Par Vincent Vuibert

on, ce roman ne fait pas l’éloge de la scatologie comme pourrait le laisser penser le titre. Il n’en demeure

pas moins qu’Epeli Hau’ofa est allé au fond des choses.Sur la petite île de Tipota, Océanie, Oilei Bomboki est réveillé au petit matin par l’haleine de son épouse qui déclenche un pet fantastique et non moins pestilentiel de sa part, bientôt suivi par une abominable douleur au popotin (ou derrière, fessier, anus… et autres appellations plus crues

que l’indécence lui intime de ne pas taire : derche, fion, trou de balle…). Le décor est vite campé, et ça va ch… : pour les tradipraticiens ; pour les médecins occidentaux ; pour les religieux ; pour les professeurs de « l’Université du Paradis-Sud » ; pour les « grands pays » du Pacifique ; enfin pour les insulaires que nous sommes.Mais la guérison a des voies que la médecine ne connaît pas.C’est cash, trash, c’est un peu rabelaisien comme le note l’éditeur, mais ça fait du bien par où ça passe.

Par Stéphane Camille

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> ADHÉREZ POUR PARTICIPER À L’ÉLAN DU PÔLE D’EXPORT DE LA MUSIQUE ET DES ARTS DE NOUVELLE-CALÉDONIE !

Le Poemart soutient l’export des artistes Calédoniens (musique, danse, théâtre, arts plastiques). Il a également pour mission d’assurer la promotion des artistes au travers de la marque Endemix (presse, radio, tv) et de la cérémonie des Flèches de la Musique. > Suivez l’actualité de l’association sur www.poemart.nc et sur facebook.

L’ADHÉSION DONNE DROIT À :

> Déposer une demande de financement pour un projet export> Participer aux formations organisées par le Poemart> Bénéficier du fonds documentaire et des conseils export du Poemart> Participer aux assemblées générales

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Souhaite adhérer ou renouveler son adhésion à l’association Poemart, pour l’année 2015 en tant que membre cotisant.

Souhaite faire apparaître mes contacts mail et téléphonique dans l’Annuaire des arts sur le site internet du Poemart www.poemart.nc

Certifie avoir pris connaissance et accepté les statuts ainsi que le règlement intérieur de l’association et m’acquitte d’une cotisation de 1 000 XPF. Fait à ………………………. Le ………………………. Pour l’association : Pour l’adhérent :

CONDITIONS D’ADHÉSION :L’adhésion est reservée aux artistes et aux professionnels du secteur culturel.

> Retourner le bulletin d’adhésion complété et la cotisation de 1 000 XPF à : Poemart, 1 rue de la République, 98 800 Nouméa

L’adhésion est valable du 1er janvier au 31 décembre 2015

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Légende de Kydam, éd. Keskiya Prod, 2014.

ydam, pour les amateurs de clips sur le web, c’est d’abord « Kanaky Yes I » et ses dizaines de milliers de vues. Des bagnoles défoncées qui dérapent dans la poussière, du « rien à foutre » à gogo et beaucoup de gesticulations enragées : difficile de trouver

un message constructif dans cet exutoire sorti en juin 2012. Mais si l’on retrouve ce morceau dans Légende, premier album de Kévin Rolland aka Kydam, par bonheur les autres thèmes abordés – parmi eux le respect de la nature ! – sont autrement significatifs.Cet album était annoncé et attendu depuis longtemps ; il faut remonter à 2011 et Ykar pour trouver trace d’un – dense et excellent – E.P. six titres. Depuis, Kydam mène un combat perpétuel. Contre lui-même, tiraillé entre ombre et lumière ; contre l’« État français » et les pouvoirs en place, les traîtres de tout poil, le chaos… Le champ lexical « lutte – révolution » est d’ailleurs omniprésent dans les lyrics assénés par le puncheur au crâne rasé : « où est le mal que je me batte encore ? Pas fini de lutter, si le bien est la clé, viens on se bat encore... » (dans « Encore un jour »). Fidèle à l’esprit contestataire initial des mouvements hip-hop, Kydam développe une prose caustique souvent efficace. Beaucoup en prennent pour leur grade. Et la grande majorité des titres sont dopés par une rage de dire, une envie communicative de dissoudre les faux-semblants liés au contexte socio-politico-culturel du Caillou.

Parmi les très belles réussites de l’album, « Concentré mais jamais dispersé », savante alchimie entre chanté et rappé, featuring Kanekshan qui convainc avec son flow sobre et maîtrisé. « Le poison » évoque les dérives colonialistes, renouvelant le thème avec une mordante précision, tout en intégrant une belle référence au chant traditionnel ae-ae. Tandis que le pamphlet « Mets la gomme » règle leur compte en bonne et due forme à quelques « voleurs »… On retrouve également les morceaux  « Clique sur j’aime », bande-son du court-métrage urbain réalisé fin 2013 avec l’équipe de 120 Prod’, et « Bats-toi », avec Aurore Lecren qui apporte un peu de suavité au menu fort épicé.

L’équipe de Keskiya Prod, dont DJSE et K’sir qui accompagnent le rappeur depuis ses débuts, a veillé à l’architecture sonore de l’ensemble. Cette dernière n’a pas été conçue pour créer de continuité entre les ambiances qui colorent l’album. Mais hormis quelques déceptions (« Combien de révolutions »

ou « Liberté » dont les boucles rythmiques et mélodiques, trop répétitives, s’essoufflent), la production de l’ensemble tient le choc et soutient brillamment le phrasé exalté de Kydam.

Tantôt influencé par une diction et un vocabulaire « banlieusards » typiquement hexagonaux, tantôt attaché aux références océaniennes (les dédicaces à la région de Houaïlou sont légion !), Kydam affine peu à peu son style. Sa voix éraillée, changeante, prend parfois des tonalités reggae et ragga. Sa quête acharnée, sa recherche d’idéal amènent le jeune homme à progresser constamment. Les dix-huit morceaux

de Légende sont comme les jalons d’une introspection menée au fil des ans, guidée par le besoin viscéral de dompter les démons en soi et « d’éclairer la noirceur ».

Par Sylvain Derne

LÉGENDEde Kydam :ROUND 1

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musique calédonienne

Dessin extrait du livret de l’album Légende.

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Esses, de Solydal, éd. DYSH PROD, 2014.

Senada, formation rassemblant de jeunes musiciens originaires de Maré et de Lifou emmenés par l’auteur-compositeur Dominique Laene, signe son premier

album. Co Ahmani  (« passer le premier » en nengone) bénéficie de l’expérience de quelques anciens (dont Georges et Messaline Wahnunu du groupe Sumaele) et contient des pépites

Avec « Koi Elanyi », « Ton avenir » en français, morceau inaugural qui donne son nom au troisième album de Gayulaz, le groupe de la tribu de Nang à

Lifou frappe fort. Arrangements méticuleux, refrains entêtants, puissance des chœurs : cette introduction rythmée avait tout pour devenir le tube du début d’année ! Hélas, la suite n’est pas tout à fait du même tonneau. La bonne maîtrise

SENADA CO AHMANI

SOLYDALESSES

GAYULAZKOI ELANYI

Le groupe Solydal porte l’héritage musical d’Ydal – originaire de Lifou, chantre du folk mélanésien dans les années 1980-1990. Ses neveux, eux, fréquentent

assidûment la maison de musique Artigue à Nouméa, et ils nous livrent à présent Esses, leur premier album. Les dix compositions naviguent entre influences rock, soul et kaneka des Îles, et reposent sur une très belle palette d’instruments (solo de piano sur « Esses », harmonica notamment sur « Netr Oryatal », guitare arpégée à l’honneur sur la plupart des morceaux…)

Koi Elanyi, de Gayulaz, éd. Mangrove, 2014.

Co Ahmani, de Senada, éd. Mangrove, 2014.

« Bulu Hme Medr », titre qui évoque les couleurs rouge et bleu emblématiques du district de Gaïtcha, séduit par ses remarquables arrangements et ses riffs à la guitare renforçant les refrains. En revanche, le chant et les textes semblent un peu naïfs lorsqu’ils sont interprétés en français, et laissent souvent dubitatif (ainsi du morceau « La Foi »). Mais en peaufinant ses arrangements et se nourrissant d’influences diverses, le jeune groupe est en quête d’une identité originale,

entre mélancolie et ballades entraînantes. Mention spéciale pour la réussite graphique de la pochette de l’album.

comme « Madrarungo » aux sublimes harmonies chorales. L’harmonica acidule les refrains de « Kiamu », l’ukulélé et le wessel s’invitent aux côtés des arpèges de guitare. Doshkilla du groupe Wifi Connexion fait une apparition sur le  morceau « Keriso », tandis que l’album se conclut par « Mon premier rendez-vous », une touche de zouk comme cela devient la tradition ces temps-ci ! Les textes empruntent au nengone, au drehu et au français pour évoquer la religion, l’amour, l’attachement aux Îles… Le résultat : un album qui pèche un peu par manque d’originalité mais qui a quand même su trouver son public grâce à de belles recettes mélodiques.

instrumentale ne compense pas toujours une inspiration mélodique intermittente. Les sonorités électroniques, l’usage un peu trop systématique du vocodeur qui transforme les voix, contribuent à une certaine monotonie. L’émouvant « Zore Ne Zil », porté par de beaux motifs au piano, se distingue cependant. « Y a bien longtemps », d’inspiration valse tahitienne, fait lui office de réjouissant final. Les textes, en drehu et en français, sont le reflet de la double vocation du groupe mené par Wacapo Taine : tour à tour festive et plus solennelle pour évoquer la rencontre entre tradition et évolution. L’ensemble est plutôt agréable, même si l’album manque un petit peu de relief.

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ERIC BIBBBLUES PEOPLE

musique internationale

THE AFROROCKERZTHE AFROROCKERZ

Fondé par le guitariste du groupe Fanga, Julien Raulet, The Afrorockerz donne une nouvelle

dimension à l’afrobeat. Un premier album était déjà paru sous ce nom en 2007. Le maître Tony Allen y tenait la batterie. Mais lorsque sa chanteuse, l’Ivoirienne Ruth Tafebe, s’expatrie aux États-Unis, il faut tout reconstruire.Dans leur studio-laboratoire, Julien Raulet et Sylvain Daniel (basse, claviers, programmation) ouvrent alors toutes les pistes à l’alchimie des sons. Contretemps subtil induisant le mouvement perpétuel du corps ; écho des avenues de l’âpre jungle urbaine ; extase et dépression ; nuit qui remue en illuminations. Les chansons se succèdent teintées d’electro, de rock, de jazz… Attisée par le groove intense de Julien, la plastique harmonique de Sylvain accueille deux voix superbes, yin-yang fécond d’un homme et

d’une femme. Allonymous est nourri du blues de Chicago, sa ville natale. Poète équilibriste au flow hanté de beat generation, il transmet sa soif de liberté, son dégoût de la guerre et des jeux de pouvoir sur un mode electro psychédélique. Son groove magnétique chevauche parfois la féérie d’un Prince. Splendide et généreuse Centrafricaine, Emma Lamadji irradie de soul. Sa voix possède la rigueur du jazz, l’intensité lyrique du negro spiritual. Qu’elle chante

en songo, sa langue maternelle, ou en anglais, elle est capable d’embraser un continent d’amour. Les deux voix, s’entremêlant sur l’afrobeat-fusion, réduisent à une fraction de seconde l’espace entre Lagos et Broadway. Maturé en studio, le son puissant de The Afrorockerz révèle ses arômes rock au firmament du groove.

Par François Bensignor

Avec ce 29e album, Eric Bibb confirme que la maturité de l’expérience produit le meilleur blues.

Il s’en tient au conseil que lui donnait Dylan, ami de son père le folksinger Leon Bibb, alors que pré-adolescent, il claquait ses premiers accords sur un dobro : « Reste simple, laisse tomber les fioritures. » Jamais il n’éprouve le besoin de pousser sa belle voix au velours semi-grave. Le sens de ses paroles, concises, dépouillées, n’en est que renforcé.En empruntant le titre du fameux livre où LeRoi Jones, en 1963, retraçait l’histoire du blues, du jazz et de leurs dérivés dans une perspective essentiellement afro-américaine, Eric Bibb s’inscrit dans une tradition de plus d’un siècle. « Cet album est un hommage à la tribu des troubadours du blues à laquelle je suis reconnaissant d’appartenir, » écrit-il. Mieux encore, à travers ces quinze chansons, il se réapproprie l’esprit d’engagement

pacifique, antiraciste qui animait la scène folk et soul des années 1960 aux États-Unis. Une nécessité pour le bluesman qui, vivant entre New York, Paris et Stockholm, ressent avec plus d’acuité les dérives des sociétés occidentales contemporaines, toujours plus promptes à exclure qu’à partager.Dans ce voyage musical, Eric Bibb est rejoint par de grands noms du blues (Taj Mahal, Ruthie Foster, Guy Davis, Jean-Jacques Milteau), du gospel (The Blind Boys of Alabama) ou de la soul (Harrison

Kennedy, Linda Tillery). Il nous entraîne même jusqu’en Afrique du Sud avec un hommage à « Madiba » écrit et interprété avec Andre De Lange. Un album riche et conséquent qui ravira les amateurs de « black music ».

Par François Bensignor

The Afrorockerz de The Afrorockerz, éd. Buda Musique, 2014.

Blues People d’Eric Bibb, éd. Flatbrim Recordings / Dixiefrog Records, 2014.

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a coutume, ça ne se raconte pas, ça se vit. De toute évidence, ce postulat a découragé plus d’un artiste ou journaliste à aborder un thème aussi singulier.

Or, c’est justement cette complexité qui a poussé Sébastien Lebègue à se lancer dans ce projet, alors même qu’il vit à Tokyo. « Quand on pense à la coutume, on a immédiatement une image de tradition en tête. Mais en interrogeant les gens, je me suis aperçu que chacun en avait une définition différente, note le photographe qui s’est passionné pour la culture kanak lors d’un premier séjour en 2005. Pour certains, c’est la place de l’homme qui prime. Et il y a ceux pour qui c’est le geste qui compte, ou bien l’objet. »

Deux voyages, cent cinquante témoignagesEn laissant les Kanak se raconter eux-mêmes et en sublimant ces témoignages par de très belles photos et aquarelles, Sébastien Lebègue ne rend pas compte d’une réalité simpliste mais offre des clés de compréhension au grand

public. « Ma démarche a toujours été de mettre l’autre en avant. Je ne raconte que ce que l’on me dit », précise celui qui, au cours de deux séjours en 2013 et 2014, a collecté près de cent cinquante témoignages, de Thio à Canala, en passant par Hienghène, Yaté, l’Île des Pins ou encore les Loyauté.

Un reportage d’immersionSi le talent du photographe et dessinateur est indéniable, on salue plus

encore la mise en scène de son travail, à la fois esthétique et pédagogique, qui permet de s’approcher au plus près du sujet.Grâce aux liens qu’il a su tisser

au fil de ses rencontres, Sébastien Lebègue invite ceux qui vivent hors de la coutume à voir l’invisible. À l’image de cette dernière séquence consacrée au deuil, que l’auteur a volontairement présentée dans une petite pièce à part, par respect envers la famille endeuillée et pour ne pas heurter un public non averti.Si son geste coutumier, lors de l’inauguration, a pu générer quelques réactions sur la toile, Sébastien Lebègue se réjouit surtout de « l’acceptation et

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Par Coralie Cochin

Sébastien Lebègue n’est pas anthropologue. Il ne vit pas non plus en Nouvelle-Calédonie. Photographe et dessinateur, il s’est pourtant lancé un défi audacieux : celui d’explorer la complexité de la coutume kanak dans une exposition mêlant texte, peinture et photographie. Un travail inédit à découvrir jusqu’en juin au centre culturel Tjibaou.

COMMUNAUTAIRE JUSQU’AU BOUTPour réaliser son projet, l’artiste a fait appel au crowdfunding, financement participatif sur Internet et a récolté près de 6 000 euros, auxquels se sont ajoutées des aides provenant des institutions et de partenaires privés. Après Nouméa, l’exposition sera proposée en province Nord puis à Tokyo et à Paris. Coutume Kanak fera également l’objet d’un livre publié par la maison Au vent des îles, qui ajoutera des éclairages supplémentaires à ceux présentés lors de l’exposition.

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Servie par des couleurs chatoyantes qui évoquent celle des manous que l’on offre lors

des  cérémonies coutumières, l’exposition se  déroule de manière chronologique, en

revenant sur les moments forts de la vie que sont la  naissance, le mariage et le deuil.

des remerciements » qu’il a reçus. Cet élan général a été favorisé par le travail initié depuis des années autour du socle commun des valeurs kanak contenues dans la coutume. Je crois que, sans le vouloir, je suis arrivé au bon moment. »

Ma démarche a toujours été de mettre l’autre en avant

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n collaboration et en complément des aides à l’édition et à l’accompagnement à l’écriture de la province Sud, la Maison du Livre propose depuis 2012 des résidences de création. L’objectif est simple : « nous cherchons à soutenir

des projets originaux, découvrir de nouvelles plumes et répondre au plus près aux besoins des auteurs » explique Jean-Brice Peirano.En deux ans, quatre résidents – Guillaume Berger, Roland Rossero, Laure Ozanon et Isa Qala – se sont succédés au petit bureau d’écriture de la maison Célières.Peuvent prétendre à ces résidences, tous les auteurs, qu’ils soient écrivains ou illustrateurs. Ils bénéficieront d’un espace de travail, et éventuellement d’une aide financière comprise entre 45 000 et 200 000 F CFP, allouée en fonction de leurs besoins. Les résidents peuvent également, s’ils le souhaitent, être encadrés par l’équipe de la Maison du Livre pour un appui technique et rédactionnel. Une vraie maison et presque une famille !

Le nid de création « Avoir un lieu dédié à la création littéraire, c’est une façon pour les auteurs d’être épaulés et reconnus dans leur travail et leur effort de création », précise le directeur. Pour Isa Qala – jeune auteur de Lifou, il s’agit surtout d’« avoir un temps et un lieu dédiés uniquement à l’écriture. À Nouméa, on a plus de temps qu’à Lifou, où il y a toujours quelque chose à faire ». Roland Rossero, auteur confirmé, affirme quant à lui

qu’« une résidence, c’est s’imposer une discipline, jouer le jeu de la contrainte, et voir ce qu’il en sort. Chez soi, les repères sont trop connus. Le quotidien nous rattrape. »

Bien qu’il n’y ait pas de réelle obligation de résultats ni de publication attendue à l’issue de leur résidence,

tous les auteurs se sont montrés assidus, se fixant eux-mêmes des objectifs ambitieux : deux nouvelles par semaine pour Isa Qala ; deux pages par jour pour Roland Rossero. « Une expérience physiquement très fatigante, raconte ce dernier, mais l’histoire des Évadés aurait été différente si je l’avais écrite ailleurs, j’en suis persuadé ».Les retours positifs de ce dispositif incitent

la Maison du Livre et la province Sud à voir plus grand. En 2015, Jean-Brice Peirano souhaite élargir l’offre d’accueil sur l’ensemble du territoire, notamment à Koné où les attentes vont grandissantes.

Par Charlotte Petiot

Le bureau des

En mars, la Maison du Livre rouvre les inscriptions pour ses résidences d’écriture ; l’occasion pour son directeur,

Jean-Brice Peirano, de revenir sur ce dispositif d’aide à la création tout à fait singulier sur le territoire.

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Une résidence, c’est s’imposer une discipline

S’INSCRIRE EN CINQ ÉTAPESAvant de se lancer dans l’écriture du futur best-seller calédonien, les candidats aux résidences doivent se plier à la rédaction de quelques formalités et construire un dossier comprenant :>  Leurs coordonnées >  Une biographie, précisant son expérience d’écriture (possibilité d’ajouter un CV) >  Une description du projet en dix lignes maximum (possibilité de joindre

jusqu’à dix pages d’extraits, si le projet est déjà entamé) >  Une liste des besoins techniques (durée souhaitée, période, …) >  Un budget précisant l’utilisation de l’aide financière (achat de matériel,

per diem, etc.) L’équipe de la Maison du Livre étudie les candidatures tout au long de l’année.

Isa Qala en résidence à la Maison du Livre en janvier 2015.

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Il y a trente ans, l’embuscade de Waan Hyaat à Hienghène se soldait par le lourd bilan de dix morts. L’album Cega’m Vhalik, sorti en décembre dernier, commémore le souvenir des disparus, originaires de Tiendanite. Des musiciens de tout le pays ont participé à l’hommage.

musique

Ne pas oublier

Par Sylvain Derne

n 1985, un tout jeune groupe de Hienghène, un des créateurs d’une musique toute aussi jeune, dédiait sa première cassette à un certain « Loulou ». Ce groupe s’appelait Bwanjep et le nouveau style, le kaneka, né dans les graves turbulences des années 1980. Quant à Loulou, c’était Louis Tjibaou, alors petit chef de Tiendanite, qui fit partie des dix de Waan Hyaat assassinés

le 5 décembre 1984, avec Tarcisse, autre frère de Jean-Marie. Les familles Couhia, Maepas, Mandjia et Wathea furent également endeuillées, la moitié de la population masculine adulte de Tiendanite décimée. Ne pas oublier : c’est le leitmotiv de l’album Cega’m Vhalik, dont le titre exprime l’idée de « perpétuer la parole » en langue fwaî. À l’initiative du projet, l’association Koï Theen qui fédère les jeunes de la région de Hienghène autour du sport, des pratiques artistiques et ouvre des débats grâce notamment à des projections de films. « Il s’agit d’un message à plusieurs couleurs : politique, sociale, coutumière, et philosophique. Il doit permettre de dépasser le cadre des simples commémorations, explique Emmanuel Tjibaou, président de Koï Theen. Grâce à l’accompagnement des plus anciens, les jeunes sont invités à se souvenir, 30 ans après, de cette partie de l’histoire qu’ils ne comprennent pas ou que leurs parents ne leur ont pas racontée. »

« Poser la charpente »Le texte de « Fondation », la chanson initiale de l’album, a été écrit par Emmanuel Tjibaou et son frère Joël. Mais ce n’est pas qu’une histoire de famille… L’événement a mobilisé quelques-unes des plus éminentes formations de la scène kaneka d’aujourd’hui, des Îles comme Nodeak, Dick & Hnatr, et Jyssé, de la Grande Terre avec Vamaley, Jèmââ, et les « locaux » Cada, Koulnoué Boys Band, Hurere,

Robert Atine…. Les artistes se sont retrouvés à Jèmââ, Poindimié, pour une résidence d’environ trois semaines avant d’enregistrer à Nouméa, au studio Mangrove. Doo Huny, l’association du centre culturel de Hienghène, a pris en charge les « impératifs logistiques » du rassemblement. Le collectif de musiciens ainsi créé a été baptisé Thai Ceen, « poser la charpente » en fwaî. Une étape intermédiaire au moment de la construction de la case.Après le travail d’anciens qui durent parfois se sacrifier pour poser les fondations d’une société nouvelle, il appartiendra aux générations suivantes de fixer la paille et de hisser la flèche faîtière. De fait, les quinze titres de l’album, s’ils reviennent sur la tuerie en elle-même, font de ce drame un acte fondateur pour envisager l’avenir sous de meilleurs auspices. « L’intérêt de la musique, c’est qu’elle est sans limite, souligne Emmanuel Tjibaou, pour faire

écho au nom de son association (Koï Theen signifie « il n’y a pas de limite »). Elle passe partout, dans toutes les maisons, au-delà des clivages partisans. Nous n’avons pas fait un simple requiem. On chante, et on est debout... » Une tournée du collectif est envisagée courant 2015, une fois levé le deuil du grand chef Goa, disparu en août dernier.

Waan Hyaat

ELes jeunes sont

invités à se souvenir, 30 ans après, de cette partie de l’histoire

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Par BoSS U

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e Cri du Cagou a décidé d’enquêter sur les concerts dans des nakamals de Nouméa. Pour mener l’affaire, il a envoyé deux de ses fidèles reporters, BoSS U et Patham.

« - Mais pourquoi moi ? Je ne bois pas de kava », s’étonne Patham. Moi, je n’aime pas vraiment la musique quand je bois du kava. Mais j’ai accepté de bonne grâce : la perspective de boire sur le compte du Cri m’a ouvert l’appétit.« - Évidemment, nous n’avons pas le budget pour rembourser les frais. » La rédaction du CdK est championne quand il s’agit de briser l’enthousiasme de ses auteurs…Mercredi soir. Je bois mon kava vert d’une traite. Nous sommes au Boston, à Ducos. Sur la minuscule estrade, des musiciens s’accordent pour un jam aux accents reggae. Greg, le patron du nakamal, finit la balance, réglant les amplis des uns et des autres. Les musiciens sont partout, devant et dessus la scène, dans les fauteuils, avec guitares, batteries, claviers, percussions ou basses. Parfois, il y a aussi des chanteurs, des slameurs ou des rappeurs.« - T’as vu le bassiste ? me lance Greg. Il doit avoir 12 ou 13 ans, c’est un petit prodige. Il joue de la basse, de la guitare et son instrument favori reste la batterie. »C’est vrai qu’il assure. Je ne laisse pas le patron s’échapper : « - Cette scène existe depuis longtemps ?- La scène ouverte, c’est tous les mercredis depuis deux ou trois ans. Et sinon, on accueille des concerts tous les 15 jours, le vendredi.- Qui vient jouer le mercredi ?- En début de soirée, ce sont principalement des habitués du nakamal car il faut oser. Puis, les musiciens tournent. Le mercredi commence à avoir sa renommée. Des instruments sont à disposition ou on peut venir avec les siens. Tu veux boire une dose de décoction de racines de faux poivriers servie dans une demi-noix de coco ?- Très certainement, mon cher*. » Changement sur scène, le gosse est passé derrière la batterie.

Je choppe le batteur précédent :« Moi c’est BoSS U et toi, comment t’appelles-tu ?- Je ne sais plus…- C’est étrange de ne pas se souvenir de son prénom !- Moi, je m’en souviens, mais c’est toi, qui n’a pas pris de notes pendant l’interview, qui ne t’en souviens plus.- …- J’suis prof de batterie et je joue dans plusieurs groupes de styles différents. Avec Greg, on a eu l’idée de ces soirées pour rencontrer de nouveaux musiciens. Chaque mercredi est différent mais il se passe toujours quelque chose. »Je ne suis pas encore convaincu par le mélange musique et kava. Le temps du kava est propice à la méditation et à l’échange, et pour ça, j’ai besoin de calme.« - C’est vrai que, parfois, la programmation surprend la clientèle, me dit Greg. Nous avons accueilli le Black Woodstock Festival pour une soirée métal, les clients ont fui les riffs de guitare. »

On se plaint souvent qu’il y a peu de scènes alternatives sur le Grand Nouméa. Le nakamal est une solution qui trouve son public.Tiens, où est passé Patham ? Vous le saurez en lisant http://lecriducagou.org/

OÙ ÉCOUTER DE LA MUSIQUE LIVE DANS LES NAKAMALS ?>  Au Boston (Ducos).>  Au Bouddha Nak (Ducos), concerts presque tous les 15 jours. Infos sur place

et sur la page Facebook>  Au 1881 (Nouville), des DJs, de temps en temps;>  Et sûrement dans plein de nakamals à travers le pays. Une pensée pour le

Jo Bar à Nouville, qui faisait parfois jouer des musiciens en live avant que le nakamal ne soit réduit en cendres.

*  Ce dialogue est traduit du kanako-calédonien :« On lève un shell, mon con ? - Bombaaaarde ! »

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LA MAISON DU LIVREDE LA NOUVELLE-CALÉDONIE

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Le Secret des anguilles aveugles du lac LopolopoYannick Prigentill. de Dominique BertonÉditions Plume de NotouCollection Contes d’ici, 20132 000 F CFP

Ce conte s’inspire de trois légendes polynésiennes authentiques. Dans l’immensité du Pacifique, l’histoire d’un puissant roi, de la reine des anguilles et de leur fille Asipapasavesa.

L‘Énigme du bambou gravéPeggy Bonnet-Vergara, ill. de Romain Flamand (Dka)Éditions Caouanne, 2012Avec un dossier pédagogique1 900 F CFP

Nakao et Timaï de la tribu de Yédélé, ont récupéré de leur grand-père Waya, un morceau de bambou gravé dont le dessin

évoque une étrange carte au trésor… C’est, pour les deux enfants, le début d’une grande aventure qui les mènera jusqu’à la véritable richesse.

Bac Chiche & Le Grand départ Léannie, Tome double 3 & 4Jilème2014 2 700 F CFP

L’année du Bac, du permis de conduire et de sa rencontre avec Louis… Puis, Léannie se prépare à partir en France pour suivre ses études. Le début d’une vie sans parents, d’une vie

en couple et loin de ses amies...

Mon BougnaLiliane Tauruill. de Isabelle RitzenthalerÉditions Plume de NotouProvince des îles Loyauté Collection Petit etë, 20131 150 F CFP

Compter de 1 à 10 les ingrédients du bougna, le plat traditionnel kanak. Avec un DVD d’animation en français, en nengone, en drehu, en iaai et en fagauvea.

Yoo, chants du sud de la Nouvelle-CalédonieAlbum avec CD audioÉditions ALK, Comité consultatif coutumier et environnemental, 20141 500 F CFP

Berceuses, chansons et formulettes chantées dans les quatre langues du Grand Sud : naa drubea, nââ numèè, nââ kwényï et tayo.

ToutouteLire en CalédonieÉditions Grain de Sable Album avec CD audio20072 450 F CFP

L’album réunit des comptines et berceuses de différentes

communautés, d’ici et d’ailleurs, enracinées en Nouvelle-Calédonie. Ces petits chants, en français et en vingt langues sont présentés en sons et en images (& jeux de doigt).

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oliment rafraîchie, la maison coloniale qui abrita longtemps les directeurs de la mine au cœur du village de Thio a été réaménagée par Henri Gama et son équipe, déjà signataires du récent Musée Maritime. «  Notre travail a consisté à mettre en valeur

les objets de la collection du musée, riches et variés, explique le muséographe, en les contextualisant dans des espaces évocateurs. » Ainsi, une petite pièce transformée en atelier de mineur présente les outils des pionniers du nickel, dans un décor de tôle et de bois. En fond sonore, les bruits du village tels qu’ils résonnaient au tournant du XXe siècle : sifflements du chemin de fer, trot des chevaux, chantiers de construction, voix des travailleurs venus des quatre coins du monde. « Bien sûr, on entend aussi la langue Xârâgurè, pour rappeler la présence du peuple originaire de Thio, témoin d’autant de souffrances que de joies » souligne Henri Gama.

Des hommes et du mineraiDe fait, l’humain est le principal fil conducteur, déroulé sur environ 150 m2 grâce à des objets chargés d’histoire, des archives et une quarantaine de panneaux au graphisme épuré. « C’est d’abord un hommage à toutes les communautés qui se sont croisées sur le massif de Thio », explique Maurice Fels, ancien de la SLN, historien local et âme du lieu. « Les Vanuatais,

les Japonais, les Australiens, les Vietnamiens, les Dalmates, les forçats venus de France, tous ont leur place sur ces murs. On leur doit bien cela. » D’autres thématiques, comme l’évolution des techniques d’extraction du ferronickel ou le transport du minerai dans les navires cap-horniers sont aussi passées en revue, via des textes clairs et une iconographie généreuse. « On a tenu à ce que les messages soient accessibles à tous, explique Henri Gama. Terence Barnes, notre spécialiste « jeux », a conçu des manips afin de rendre la visite ludique et intéressante pour les enfants. »

Arbre de ferLa géologie, autre thème central du musée, est mise à l’honneur à travers une réalisation du sculpteur François Uzan, aux allures d’arbre de fer dont chaque branche porte un échantillon de roche. Une intervention

artistique sobre et de belle qualité, à l’image de la scénographie dans son ensemble.

* À l’heure du bouclage, la date d’ouverture officielle n’a pas été communiquée.

patrimoine

MUSÉE DE LA MINEPar Antoine Pecquet 

L’histoire gravée dans le nickelBerceau de la SLN et, du même coup, de l’industrie calédonienne du nickel, le village de Thio méritait bien un musée de la mine digne de ce nom. L’ouverture est prévue pour mars*. Visite en avant-première !

UN VA-TOUT TOURISTIQUERendue possible par un investissement d’environ 105 millions de francs supporté par la municipalité, la province Sud et la SLN, gageons que la rénovation du musée attire davantage de visiteurs dans ce coin de Nouvelle-Calédonie si chargé d’histoire.

C’est d’abord un hommage à toutesles communautés qui se sont croiséessur le massif de Thio

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Maurice Fels, l’intarissable historien de Thio, continue d’accueillir chaleureusement les visiteurs dans le musée rénové.

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MARSDu 6 mars au 6 avril Exposition

HAKUTH - LES ŒUVRES ET LES CRÉATIONS LITTÉRAIRES S’ENVELOPPENTMichaël HusserÀ la Maison du Livre de la Nouvelle-Calédonie

Le 11 marsConcerts

  LA NUIT WOMAD

Avec Toumani et Sidiki Diabate venus du Mali, Bustamento de Melbourne et le groupe Cemara de Ponerihouen.Au centre culturel Tjibaou

À partir du 11 marsÉvénement

MOUVEMENT LIBREChaque mercredi de l’année, des rencontres artistiques et culturelles, une scène ouverte, des matches d’impros et du théâtre associatif sont proposés aux artistes. Au centre culturel du Mont-Dore

Du 12 mars au 11 avrilConcerts

REGGAE MONTH

Le 13 marsConcert

OTONANDOAvec Stéphane Fernandezet Laurent OttogalliAu centre culturel du Mont-Dore

Du 14 au 22 marsRencontres

SEMAINE DE LA FRANCOPHONIEDix mots de la langue française sont mis à l’honneur pendant une semaine. Au programme : accueil de scolaires, soirées contes, dictées adulte et enfant en français et en paicî, projections et conférences.À Poindimié, médiathèque du Nord

Du 23 mars au 4 avrilExposition

ALEXIS TATÉOSSIANSes deux dernières expositions remontent à 1985 au Musée de la Nouvelle-Calédonie et 1988 à la galerie Galeria. Pourtant, il n’a jamais cessé de créer, au contraire ! Le 23 mars prochain, il présentera, à la galerie Lec Lec Tic, vingt ans de travail autour d’un thème qu’il affectionne particulièrement : des peintures qu’il qualifie de « surréalistes abstraites » réalisées à l’aide de tubes de plexiglas. Imposantes, ses « sculptures » seront visibles sur la Promenade de l’Anse Vata pour deux semaines seulement et devraient ravir le public, initié ou non à l’art pictural. À la galerie Lec Lec Tic

Le 24 mars Projection

AVANT-PREMIÈRE DE LA DERNIÈRE RÉVOLTEDocumentaire d’Alan NoguesKoné, complexe culturel

Le 26 mars Projection

AVANT-PREMIÈRE DE LA DERNIÈRE RÉVOLTEDocumentaire d’Alan NoguesAu centre culturel Tjibaou

AVRILDu 2 au 4 avrilThéâtre

L’HISTOIRE ET L’ENDROITPièce de Pierre Gope, avec la troupe de théâtre du NordAu centre culturel Tjibaou

Du 3 au 18 avrilFestival

LA QUINZAINE DU HIP-HOPRetrouvez les événements phares de la Méga Rex Party, du Boty NC, de Mix en Bouche, de la Battle graff, de la Stand up Battle, de nombreux shows et master class en profitant de la venue d’artistes internationaux.Dans toute la province Sud

Du 15 au 27 avrilSpectacle

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Du 21 au 25 avrilRencontres

LA FÊTE DES BIBLIOTHÈQUESSur le thème « Chaque jour est un art », arts plastiques, danse, cinéma et musique seront explorés durant cette semaine festive. Au programme des ateliers pour enfants, des ventes de livres et des conférences.À Poindimié, médiathèque du Nord

Les 24 et 25 avrilThéâtre jeune public

LES SECRETS DE GÂÂRAMDe la compagnie Histoire de MarionnettesSpectacle de marionnettes à partir de 6 ans. Au centre culturel du Mont-Dore

Du 24 au 26 avrilThéâtre

 LE CERCLE DES ILLUSIONNISTES

De Alexis Michalik. Un horloger – créateur d’automates, un bottier et cinéaste, un voleur du dimanche et bien d’autres personnages vous offrent une parenthèse enchantée où les destins se croisent et les rencontres sont impromptues. C’est drôle, émouvant et passionnant.Au théâtre de l’Île

À partir du 25 avrilExposition

HISTOIRE DU COMMERCE D’AUTREFOIS – PETITS COMMERCES ET GRANDES MAISONSÀ la Maison du Livrede la Nouvelle-Calédonie

Du 28 au 30 avrilSpectacle

PAS DE MARIAGE ET UN ENTERREMENTDe Sylvain lorgnier et Erwan BotrelSuite au suicide d’un jeune métis, toute la famille se réunit et se dispute le lieu et la procédure de l’enterrement, selon la culture de chaque personnage. Le destin commun est ici abordé à travers les divergences symboliques liées à la mort, le tout sur un ton élevé alternant passages tragiques et comiques. Tournée en province Nord : Koné, Koumac, Houailou, etc

MAILe 6 maiDanse

HISTOIRE DE FABLES 2Par la compagnie MoebiusDes nouvelles fables mises en scène au travers d’un délicieux mélange de danse et d’humour. Prétexte à la présentation de styles de danse variés et de l’univers chorégraphique des artistes du pays, le spectacle est une excellente occasion de rire et de casser ses a priori sur la danse et Jean de La Fontaine. À Koné, complexe culturel

Le 9 et 10 maiThéâtre

LA TEMPÊTE D’APRÈS SHAKESPEAREDe Pierre Gope, avec la troupe du NordLa Tempête est l’une des plus belles pièces de théâtre au monde. Le temps de la représentation, Shakespeare convoque sur le plateau des personnages extraordinaires que Prospero le magicien et Ariel son esprit malicieux, dirigent de main de maître. Cette comédie jubilatoire dissèque le cœur humain et ses travers mais aussi ses grandeurs avec humour et émotion.Au théâtre de l’Île

Le 11 maiProjection

HOMMAGE À BOB MARLEYAu centre culturel du Mont-Dore

Le 13 maiConcert

HOMMAGE À BOB MARLEYConcert des groupes I&I and FriendsAu centre culturel du Mont-Dore

Du 14 au 24 maiSpectacles

LE CHAPITÔ À Poum

Le 16 Mai Événement

LA NUIT DES MUSÉESSur tout le territoire

Du 21 mai au 16 aoûtExposition

CALEDOUN, ARABES ET BERBÈRES DE NOUVELLE-CALÉDONIE, HIER ET AUJOURD’HUIAu centre culturel Tjibaou

Le 29 maiConcert

HOMMAGE À SERGE GAINSBOURGPar Stéphane FernandezÀ Koumac, espace culturel

Les 29 et 30 maiThéâtre

NOUS SERONS LES PREMIERSDe la compagnie Nez à NezAu centre culturel du Mont-Dore

Le 30 maiConcert

HOMMAGE À SERGE GAINSBOURGPar Stéphane FernandezÀ Koné, complexe culturel

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Tel un animal qui reprend ses droits, il s’approprie le lieu, grimpe sur les murs, escalade les barrières…

Il nous pousse plus loin, plus haut. Nous fait prendre des risques.

Il nous captive et nous emporte dans un tourbillon d’images et d’émotions. Mais qui est-ce ?

L’art, tout simplement.

Il ne connait pas de limite. Il vibre, bouge, crépite. C’est un feu qui nous anime et ne s’éteint jamais.

On le retrouve souvent entre les pages d’un livre, perdu dans les rayonnages.

Parce que le dessin est parfois plus parlant que des mots, Endemix invite un artiste à résumer chaque magazine en quelques bulles.

Par Guilhem Chamboredon

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