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René BLEUZEN PERGUET PERGUET : c'est le nom de l'ancienne paroisse dont l'église est placée sous le vocable de Santez BERHET, la sainte irlandaise que les français connaissent sous le nom de BRIGITTE. On sait que la paroisse, devenue Commune sous la Révolution, a perdu son nom d'origine pour devenir BENODET. (Décret N° 4878 du 15 mars 1878, signé du Maréchal Mac Mahon, Président de la République). Pourquoi Perguet et non Berhet ? C'est une déformation du nom au cours du temps. II est devenu Birgit dans d'autres régions, et chez nous, les anciens le prononcent Pirg't. On trouve aussi l'orthographe Berchet sur la carte de Bretagne du "Théâtre François" qui fut le premier atlas français, daté de 1590 (Bibliothèque Nationale). Le nom de Perguet apparaît au cours du XVII ème siècle. On le trouve dans un inventaire du monastère de Daoulas de 1662. Il y est précisé que les religieux de cette abbaye augustinienne sont venus y exercer leur ministère à la suite d'un acte important Cet acte de l'évêque de Quimper Raynaud (1219-1245) conservé au Cartulaire de l'abbaye de Daoulas, et figurant aux Archives départementales, date de 1231. Il mentionne que le comte Eude de Fouesnant et toute sa famille : ses frères Rivoallon et Alain ; ses neveux Morvan Robert et ses soeurs : Eude Grallon, Guy et Daniel, fils de Geffroy Guy : Grallon Kerscoed et son épouse, donnent à l'église de Bénodet du Bienheureux Thomas, martyr, toutes les dîmes qu'ils possèdent dans la paroisse de Perguet. L'évêque, du consentement de son chapître, donne l'église Saint- Thomas de Bénodet et toute la paroisse de Perguet aux Abbés de Notre- Dame de Daoulas, à charge pour les dits religieux de prier pour leurs bienfaiteurs et d'assurer le service religieux en l'église de Bénodet: service qu'ils ont observé jusqu’à l'annexion de l'abbaye au Séminaire de la Marine, en 1690. Quant à Eude (ou Eudon) de Fouesnant, nous ne connaissons à peu près rien du personnage, et donc des raisons de l'acte que nous citons plus haut. Cet acte ne nous renseigne pas davantage sur la date de la création de la paroisse de Perguet, ni sur la période qui sépare la venue des premiers évangélisateurs aux VI ème et VII ème siècles et l'époque de la Construction de l'église romane que nous connaissons actuellement. 1/15

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Eglises du Pays de Fouesnant -

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Page 1: Eglises du Pays de Fouesnant -  oqrt

René BLEUZEN

PERGUET

PERGUET : c'est le nom del'ancienne paroisse dont l'église est placéesous le vocable de Santez BERHET, lasainte irlandaise que les françaisconnaissent sous le nom de BRIGITTE.

On saitque la paroisse, devenueCommune sous la Révolution, a perdu sonnom d'origine pour devenir BENODET.(Décret N° 4878 du 15 mars 1878, signé duMaréchal Mac Mahon, Président de laRépublique).

Pourquoi Perguet et non Berhet ?C'est une déformation du nom au cours dutemps. II est devenu Birgit dans d'autresrégions, et chez nous, les anciens leprononcent Pirg't. On trouve aussil'orthographe Berchet sur la carte deBretagne du "Théâtre François" qui fut lepremier atlas français, daté de 1590(Bibliothèque Nationale). Le nom dePerguet apparaît au cours du XVII ème

siècle. On le trouve dans un inventaire dumonastère de Daoulas de 1662. Il y estprécisé que les religieux de cette abbayeaugustinienne sont venus y exercer leurministère à la suite d'un acte important Cetacte de l'évêque de Quimper Raynaud(1219-1245) conservé au Cartulaire del'abbaye de Daoulas, et figurant auxArchives départementales, date de 1231.

Il mentionne que le comte Eude deFouesnant et toute sa famille : ses frèresRivoallon et Alain ; ses neveux MorvanRobert et ses soeurs : Eude Grallon, Guy etDaniel, fils de Geffroy Guy : GrallonKerscoed et son épouse, donnent à l'églisede Bénodet du Bienheureux Thomas,martyr, toutes les dîmes qu'ils possèdentdans la paroisse de Perguet. L'évêque, duconsentement de son chapître, donnel'église Saint- Thomas de Bénodet et toutela paroisse de Perguet aux Abbés de Notre-Dame de Daoulas, à charge pour les ditsreligieux de prier pour leurs bienfaiteurs etd'assurer le service religieux en l'église deBénodet: service qu'ils ont observé jusqu’àl'annexion de l'abbaye au Séminaire de laMarine, en 1690.

Quant à Eude (ou Eudon) deFouesnant, nous ne connaissons à peu prèsrien du personnage, et donc des raisons del'acte que nous citons plus haut. Cet acte nenous renseigne pas davantage sur la date dela création de la paroisse de Perguet, ni surla période qui sépare la venue des premiersévangélisateurs aux VI ème et VII ème siècleset l'époque de la Construction de l'égliseromane que nous connaissonsactuellement.

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Sainte Brigitte

L'église de Perguet est dédiée àSainte Brigitte l'Irlandaise, à ne pasconfondre avec Sainte Brigitte laSuédoise, la seule citée dans "La vie desSaints ( Buez ar Zent)." La suédoisevécut de 1302 à 1373 une vie édifiante, fitdes miracles, créa à Valtein le couvent del'Ordre du Saint Sauveur, mais ce n'est pasla nôtre.

Sainte Brigitte d'Irlande naquit enl'an 452 (ou 456) et décéda en 524 ; elle futinhumée dans le monastère de Kildare

qu'elle avait fondé. De La Villemarqué ditqu'elle était fille du druide Dubtak, et"qu'après avoir chanté sur sa harpe leshéros païens de l'Irlande, elle consacra savie au Seigneur. Ses chants ravissaient lesrois et les peuples aux fêtes de Tara.Influente, elle fit abolir les tributs de chairhumaine."

Job an Irien a consacré le n° 24 dela revue " Minihi Lévénez" à Santez Berhet(Vie et culte de Sainte Brigitte). Encouverture, la photo du tronc de l'église dePerguet. L'auteur cite dans cet ouvrage lesdeux paroisses de l'évêché de Quimper etde Léon, Perguet et Loperhet, dont SainteBrigitte est la patronne, les 14 chapellesqui lui sont dédiées, ainsi que les différentspays d'Europe ou elle fut vénérée. LaGrande Bretagne lui a donné des noms devilles ; en Alsace, le nom du costumeféminin.. "bürebride", vient du prénomBrigitte , prénom par ailleurs très fréquent.

Job an Irien ajoute que Brigitte estla sainte la plus connue des évangélisateursirlandais. On ne sait pas grand chose à sonsujet, dit-il, mais les "vies de SainteBrigittes sont des suites de miracles qu'ilconte avec beaucoup d'humour etd'humilité. Tous ces miracles ont pourthème la charité envers les plus pauvres etleur protection à l'égard des méchants.

Le site de Perguet

Le lieu-dit et le secteur qu’il estconvenu d'appeler quartier de Perguet setrouvent à une demi-lieue au nord duplateau rocheux de Mousterlin et à unedistance sensiblement égale des chefs-lieuxdes quatre communes qui l'encadrentFouesnant, Pleuven, Clohars-Fouesnant etBénodet.

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Vue d’ensemble de la façade sud : de gauche à droite, l’ossuaire, le porche, la sacristie, letransept, le calvaire

Il s'agit d'un plateau de terres riches, ce quipeut expliquer le choix des religieux d'yétablir leur lieu de culte.

Selon Louise-Marie Tillet, membredu Centre International d'Études Romanes,certains auteurs feraient remonter laconstruction de l’église à l'époquecarolingienne. Il est probable qu’elle date

du début du deuxième millénaire,au temps Olt le breton Abélard, théologien,permit à Paris de devenir le premier centreculturel de l'occident.

C'était aussi le temps de l'écobuage,qui a permis la sédentarisation de lapopulation ; les Cisterciens, qui lepratiquaient, furent dispensés par le papede payer la dîme au clergé séculier. Onpeut imaginer que des religieux, travaillantau coude à coude avec des paysans unnoyau de parcelles fertiles, ont pu déciderla création d'un lieu de culte. Lesdifficultés n'ont pas manquer aux

bâtisseurs ; certes, il s'agit d'uneconstruction modeste si on la compareaux abbayes de la même époque, mais si lebois de charpente a pu être trouvé surplace, tous les autres matériaux ont dû êtretransportés, en des temps où les voies decommunication étaient quasi inexistanteset le matériel rudimentaire.

On peut également remarquer qu'aumoment ou l'endroit fut choisi pour

édifier ce lieu de culte, il n'existait aucuneautre église aux alentours (du moins il n'enreste rien), si ce n'est celle de Saint-Pierrede Fouesnant.

Les services des MonumentsHistoriques ont été et continuent d'être trèsintéressés par Perguet. Ils participent à tousles travaux de restauration, de même que leservice de protection des antiquités etoeuvres d'art pour ce qui concerne lemobilier.

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L'église de Perguet figure sur la liste desmonuments cités dans l'arrêté du 16 avril1916, et des plaques apposées aux entréesde l'enclos signalent au visiteur qu'il s'agitd'un Monument Historique. L'enclos lui-même est inscrit sur la listesupplémentaire, par décision du 9 mai1931.

L'enclos

L'église de Perguet se trouve dansun enclos dont le mur nord longe la routedépartementale n°44 ; ceux de l'est et dusud donnant sur cette ancienne R.D. 44sont devenus chemins communaux de lacommune de Fouesnant.Ce clos qui fut le cimetière communal estaccessible des côtés nord et sud-est par desescaliers. L'entrée principale, en arctriomphal, est pratiquée dans le mur ouestet flanquée d'un échalier. La grille quien interdisait l'entrée a depuis longtemps

disparu. De grands arbres (chênes etchâtaigniers) se dressent de chaque côté dumur d'enceinte ; certains, menaçant detomber, ont été abattus et remplacés. Un ifplusieurs fois centenaire, au tronc torturé,est regardé comme le symbole, le témoinde la présence des aïeux inhumés dans lelieu saint.

Cet arbre fut autrefois beaucoupplus important et son tronc était énorme.Puis il a périclité ; au début du siècle unegrande partie du tronc s'est desséchée ets'en est allée en pans entiers. Vers lesannées 30- 40, il s'était vidé et il s'étaitformé un creux que l'on assimilait, l'entréed'une crypte, ou les jeunes mariés aimaientà se taire photographier le jour de leursnoces. Puis, l'un après l'autre, lesmorceaux de bois mort ont disparu ; ladernière plaque, devenue dangereuse pourles promeneurs, a été enlevée en 1995.

Seule une petite partie de l'ancientronc, située contre le mur, continue devivre. Des bourrelets attestent l'apparitionde nouveau bois, la frondaison s'étendchaque printemps pour la plus grandesatisfaction des perguétois qui voient dansce vieil if la preuve que leur berceau nepeut disparaître. L'enclos de Perguet, qui est unplacître pour les services des Bâtiments deFrance, est inscrit à l'inventaire des sitesdont la conservation présente un intérêtgénéral, avec ses arbres et la clôture qui aété restaurée récemment. Mais, sans doutepar oubli, le calvaire qui s'y dresse et quidaterait du XVI ème siècle ne figure pas surl'arrêté du 9 mai 1931 du Secrétariat d'Étataux Beaux-Arts : les services concernésont dès lors refusé leur participation àsa restauration, qui a été financée par lamunicipalité de Bénodet avec le concoursde l'association "Paotred Perguet" en1989.

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Le calvaire est composé d'une croixde granit montée sur un socle de troismarches. Les statues de la Vierge et deSaint Jean encadrent le Christ en croix. Aurevers, la Sainte Trinité ; dans le fut estsculptée l'effigie de Saint Laurent avec songril.

A signaler aussi dans le triangleherbu et planté de grands arbres, à l'ouestde l'enclos, un deuxième calvaire de fortbelle facture, composé d'une croixmonolithique scellée dans un joli socle detrois marches. A proximité, une pierrecylindrique d'environ un mètre de haut,plantée verticalement; certains y voient unepierre milliaire, mais elle ne se rattachesans doute pas à l'histoire de l'ensemblereligieux.

L'église est le joyauL'église de Perguet est très modeste

dans ses dimensions son volume, et mêmeson architecture si on la compare auxcathédrales ou aux abbayes de l'époqueromane. Elle prend de l'importance par letémoignage qu'elle apporte sur lesbâtisseurs de l'époque, témoignage souventapprécié et commenté par les visiteurs. Sil'arrivant est souvent sous le charme etouvre de grands yeux en pénétrant dansl'enclos, on le trouve aussi bouche bée,admiratif dès qu'il pénètre dans l'église etqu'il se trouve entre les travées de la nef.

Découvrons la d'abord del'extérieur. Le pignon ouest a été remaniéou rebâti ; il est daté du XVI ème et estpercé en son milieu d'une porte de la fin dugothique, dans le prolongement de la nef.

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On trouve exactement la même à l'église deLoperhet, dédiée également, nous l'avonsvu, à Sainte Brigitte.

Le caractère roman de l'édificeancien apparaît nettement sur la façadenord, qui est crépie, par trois fenêtres trèshautes et très étroites. Plus bas, ajoutéquelques siècles plus tard, le bas-côté dontles murs sont de bel appareillage.

Toute la partie est, constituant lechoeur et les deux transepts, serait du XVème: elle déborde largement sur la nef. Cettepartie est percée de trois baies : l'une, aunord, de deux lancettes ; la plus grande ausud: au chevet, la plus belle, de stylegothique flamboyant, constitue le vitrail duchoeur. Dans le passé, cette fenêtre étaitgarnie d'un vitrail en couleurs dont ilsubsiste seulement trois écussons qui ontété récemment déposés par les services desBâtiments de France pour remplacer leverre blanc posé dans un réseau de plombet dont le mauvais état constituait unemenace pour le retable restauré.

L'écusson central est celui du comtede Fouesnant : "De sable à l'aigleimpériale d'argent, becquée et membrée degueules". Les deux autres pourraient êtreceux des seigneurs du Juch : "D'azur aulion d'argent, armé et lampassé degueules." Ces armoiries témoignent de laprééminence des deux familles dans laparoisse de Perguet.

Mais c'est la façade sud del'ensemble qui est surtout admirée à causede l'harmonie qui s'en dégage. Partant del’ouest où une pierre tombale perpétue lecarré où étaient enterrés les prêtres de laparoisse, se trouve un petit ossuaire à troisarches, adossé à l'église. Au milieu, leporche aux colonnes légèrement diver-gentes, et ses deux bancs de pierre à deuxseuils qui témoignent de la fréquentation :

le premier est bien usé et le second, qui luiest bien antérieur, profondément creusé parles paroissiens qui y ont ainsi laissé la tracede leur existence.

A droite du porche, contre letransept avec lequel elle communique, setrouve la sacristie, un petit carrédissimulant un oculus débouché en 1995 etorné d'un petit vitrail évoquant le gril deSaint Laurent. Le long de la nef le solin dutoit du bas-côté arrive à mi-hauteur desfenêtres.

En levant les yeux, on remarque unescalier de pierre conduisant au clocherconstruit sur le mur de retend : joli clocher,bien que modeste. Ajouré, il est tout à faitdans le style de la région. Construit surl’arc diaphragme, il date de la fin du XVIème siècle, comme l’atteste une inscriptiongravée sur la face sud de l'embase: "1592DOM IAN RISTEN CUR CARADEC" ;deux noms qui ne peuvent désigner qu'uneautorité religieuse et le desservant de laparoisse au moment de la construction.

La cloche, qui appelait lesparoissiens aux offices et sonnait pour euxles événements heureux ou malheureux, estun témoignage de la distance qui lesséparait des troubles de la Révolution: à labase, sur la grande circonférence, estgravée l'inscription "JESUS MARIAJOSEPH JOACHIM ANNA - 1790 ".

Pénétrant dansl’église, le visiteurlaisse à sa droite un bénitier original: unegrande auge de pierre insérée dans le mur.Débouchant dans la nef: baignée d'unedouce lumière tombant des hautes fenêtresen meurtrières, il oscille entre admirationet recueillement. Louise-Marie Tillet ladécrit ainsi :"L’intérieur est roman: d’un art quis'apparente aux églises de Fouesnant et deLoctudy, où l'on retrouve une disposition etune décoration assez semblables.

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La nef à trois travées, non voûtée, estdirectement éclairée par de petites fenêtresromanes très ébrasées intérieurement. Lesbas-côtés ont été refaits au XV ème siècle. Ilsemble que la nef soit très ancienne ;certains auteurs (Grand en particulier) enferaient remonter la construction àl'époque carolingienne, Elle est composéede trois grandes arcades s'appuyantdirectement sur le sol (côté nord). Lesclaveaux, soigneusement extradossés, sonttrès réguliers,

Le côté sud présente unedisposition particulièrement peu commune,peut-être signe d’un renforcement que l'ondaterait de la fin du XI ème ou du début duXII ème. Trois grandes arcades encadrentles fenêtres hautes, retombant auxextrémités sur des piédroits non moulurés.Et deux colonnes dont les bases sont enforme de chapiteaux renversés s'appuientsur le tailloir en saillie des piles de la nef.

Ces chapiteaux sont ornésd'élégants entrelacs, une des basesreprésente trois petits personnages. Entrela nef el le chœur, l'arc roman en plein-cintre a été remplacé par un arc en tiers-point. Sur le mur intérieur, façade nord,près des fonts baptismaux, une cheminéeancienne assez rudimentaire."

En ce qui concerne l'arc triomphal,ajoutons que lors des travaux deremaniement de la charpente, on a puobserver que le mur qui le surplombe estcomposé de deux types de maçonnerienettement différenciés, montrant que l'arcogival constitue un renforcement pourrecevoir le clocher qui s'appuie ainsi sur lespiliers latéraux. Des architectes desBâtiments de France, consultés sur cetteparticularité, y voient aussi unrenforcement du plein-cintre qui n’offraitpas de garantie suffisante pour supporter leclocher.

D'autres spécialistes ont vu dansl’église de Perguet mais à une échelledifférente, des dispositions constatées dansl'église de Saint-Philibert de Grandlieuconsidérée comme unique en Bretagne etannonciatrice de l'époque romane. Desvisiteurs avertis voient dans les entrelacs etfigures des colonnes sud l'image demanuscrits irlandais. Autre sujetd'interrogation, la petite cheminée.

L'église était-elle une étape du"Tro Breiz" ? Y allumait-on le feu pourtiédir l'air près des fonds baptismaux ? Yveillait-on les dépouilles des naufragés ?Autant de questions sans réponses

Le choeur et les transepts de lapériode gothique n'ont pas le mêmeintérêt historique, mais la construction estsignificative de l'importance de laparoisse.

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L'ossuaire était déjà construit, le clocherest venu ensuite.

Le choeur lui-même est séparé destransepts qui forment une croix latine pardes arcs reposant sur des corbeaux ; d'uncôté, des visages humains qui ne laissentpas indifférent, de l'autre deux écussonsmartelés.

Le mobilier L'église hors d'eau, les

restaurations de Perguet ont commencé parle calvaire. Acceptant une suggestion dumaire, la toute nouvelle association"Paotred Perguet" affectait une somme de10.000 francs pour cette restauration quifut alors inscrite au budget de la commune.Les Monuments Historiques refusèrent leurparticipation, pour les raisons que nousavons déjà citées.Après les élections municipales de 1989arrive Renan Clorennec, adjoint au maire,connu pour son attachement aux affairesculturelles, et qui va être le grand artisande la restauration de tout le mobilier dePerguet. Ce fut d'abord l'inventaire,nécessaire pour avoir accès auxsubventions de l’état, réalisé par TanguyDaniel, président de la SociétéArchéologique et responsable des

antiquités et objets d'art, inventaire auquela collaboré l'auteur de cet article. En quel-ques années furent restaurés : le tableau dela Sainte Famille qui fut l’objet d'uneattention toute particulière de FrançoiseLe Corre qui en a retrouvé la polychromieinitiale après avoir repris les accrocs dont ilétait affecté.

- Le Christ en croix, revenu àPerguet ; après un séjour dans l'égliseSaint Thomas, a été consolidé et restaurédans l'atelier Le Goel.

- Ce fut ensuite la grande entreprise: toutes les statues en bois polychrome sontallées à l'atelier régional de Kerguéhenneucoù elles ont été traitées, renforcées etrestaurées certaines, telle celle de SaintJacques, étaient à la limite du trans-portable et d'un état permettant desupporter les travaux.

A présent, Ste Brigitte et StPatrice sont dans des niches de chaque côtédu vitrail du choeur ; deux Pietas, l'uneen boispolychrome et l'autre en calcaire,encadrent le tableau de la Sainte Famille;dans le transept sud, St Laurent , et StHerbot ; au tond de la nef au pignon ouest,St Jacques et un personnage non identifié ;le Christ en croix est dans la nef au-dessusd'un pilier des arcades " nord; deuxangelots sont en vis à vis sur le retable.

L’arc triomphalen plein-cintre,surmonté d’un

arc en tiers-point

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- L'estrade du choeur, en trop mauvais état,n'a pu être refaite, et c'est une copie sortiedes ateliers De La Bernardie, de Brest, quil'a remplacée.- Puis ce fut au tour du retable, qui aretrouvé tout son éclat, des autels des deuxtransepts, et, pour terminer, de la table decommunion qui a été renforcée et gardéedans sa teinte d'origine, mademoiselleGargadennec, responsable des antiquités etobjets d'art du Finistère, a montrébeaucoup d'empressement à sauver cematériel sacré; les autorités religieuses ontsuivi les opérations avec satisfaction. Lestravaux terminés, Monseigneur l'évêque,répondant à l'invitation des "PaotredPerguet", leur a fait le grand honneur deprésider, auprès de son recteur RobertMartin, le pardon de St Laurent.

La nouvelle municipalité continuel'oeuvre entreprise: elle a financé leremaniement du mur de l'enclos quis'éboulait par pans entiers. Elle estconfrontée au remplacement fréquent desprojecteurs qui partent régulièrement sanslaisser d'adresse. Et Christian Pennanec'h,maire, est actuellement au coeur d'un projetde création de vitraux couleur, voulus etfinancés par les "Paotred Perguet",réalisation laquelle ils aspirent depuisplusieurs années et qui les passionne.

La stèle de Santez Berhed

Un vieux tronc de chêne danslequel est sculpté une petite effigie de SteBrigitte, et creusé d'un tronc pour lesoffrandes, est placé à la droite du choeur.La stèle est attribuée à Joseph Peillet,sculpteur fécond de Landrévarzec (bois etpierre). Elle a été offerte à Perguet par leSyndicat d'Initiative de Cornouaille,comme l'atteste l'inscription gravée auciseau.

Les anciens se souviennent de voircette stèle plantée dans le sol à l'entrée del'enclos. La partie enterrée ne résista pas autemps, et elle fut alors placée dans la petiteremise. Un jour, les employés municipaux,obéissant aux ordres, envoyèrent à ladécharge publique tout le mobilier horsd'usage entreposé dans cette remise, dontSantez Berhed. Un artisan de Bénodet laremarqua,

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l'emporta dans son atelier où elle futdésirée par un client, et c'est ainsi qu'elles'est trouvée pendant quelques années dansune ancienne ferme où elle a été bientraitée avant d'être rendue à son lieu deculte.

Quelque peu abîmée par les ans etses tribulations, la stèle a été restaurée parFrançois Le Corre, à Clohars-Fouesnant. Etson retour a donné lieu à une cérémonie debénédiction par le recteur Robert Martin,très attentif à tout ce qui touchait Perguet.C'est ce modeste tronc de chêne que l 'abbéJob an Irien a choisi pour illustrer lacouverture de la revue "Minihi Lévénez" defévrier 1994

Une longue périoded'abandon

L'enclos, l'église et son mobilier ont étélongtemps voués à l'abandon: Perguet

n'était pas dans les priorités des édiles etles services de l'Etat eux-mêmessemblaient s'en désintéresser. Des losangesde vitraux non protégés volaient en éclatset l'église fut bientôt hantée par les oiseauxde nuit et par les chauves-souris dont lesdéjections signalaient la présence dans lacharpente.

Les ronces et les herbes follesenvahissaient l'ancien cimetière, danslequel le maire avait interdit aux enfants dese livrer à leur exercice favori : le tir aulance-pierres.

Robuchon, connu pour son intérêt àl'égard de tout ce qui touche l'art roman,est passé à Perguet, et voici ce qu'il a vu"égIise romane "délabrée...quelquesvieilles statues....des débris de vitraux".Jos Parker, le barde de Fouesnant, n'est pasplus tendre dans son recueil "Sous leschênes" paru en 1891

C'est une pauvre vieille église dans un siteQu'on ne visite pas, qu'aucun guide ne cite.

On reconnaît de loin son style primitif.Quelques chênes tordus l'entourent : un grand ifPlusieurs fois centenaire et rongé de vieillesse

L'ombre d'un front pensif qui n’a plus de souplesseEt quand on a la goutte on vient sous ses rameauxInvoquer Saint Laurent qui guérit tous ces maux.

L’herbe pousse partout du portail à l'entrée :D'un seul petit sentier l'église est entourée,

Signe des vœux fervents comme on les fait chez nousEt que les pèlerins creusent de leurs genoux.Les lichens ont rongé le granit: des fissures

Percent partout le toit et font des meurtrissuresAu plein-cintre, à l’ogive, éclatant des plâtras.

Le calvaire lui-même à peine tend les bras.L’ossuaire a perdu ses os pleins d'asphodèles,

Le bénitier son eau, la cloche ses fidèles,Et le clocher penchant semble prendre un appui

A l'escalier de pierre étagé jusqu’à lui.Chaque hiver la tempête emporte quelque chose

Aux vitraux déchaussés, à la porte déclose.

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Elle s'en va, de jour en jour se ruinant,Et comme elle n'est plus paroisse maintenant,

La messe ne s’y dit qu'une fois par année Comme si Dieu lui-même l'avait abandonnée,

Au fil des ans, les ardoisess'envolaient une à une sous lesbourrasques, il pleuvait à l'intérieur et lemobilier se dégradait. Ce n'est qu'en 1975que la municipalité et les MonumentsHistoriques ont entrepris de remanier lacharpente et la toiture, en deux chantiers, lanef d'abord, la partie Est ensuite.

Quelques années plus tard, lesregards se sont à nouveau tournés versPerguet. Le comité des fêtes de Bénodet,présidé par Jean Heydon, a vu une bellefaçon d'élargir le champ d'action du comitéen offrant aux bénodétois et aux touristesdes animations conformes aux souhaits desvacanciers. Un nouvel essor était donné aupardon de Saint Laurent, qui contribuaitainsi à alimenter la caisse du comité.Quand sa dissolution est survenue quelquesannées plus tard, les dirigeants se sontsouvenu de Perguet dans la répartition desreliquats.

Une tranche d'histoire

L’histoire religieuse de Perguet setrouve surtout dans les pierres qui se sontajoutées au fil des siècles pour constituerl'ensemble que nous connaissons. Elle estégalement enfouie dans ce qui constitua lepresbytère, dont les restes seraient ces pansde murs que l'on voit encore à l'angle nord-ouest de l'église, sous les broussailles:vestiges d'une ancienne demeure avec, aupignon, la grande cheminée. La moitié dela construction a été prise, en diagonale,dans l'assiette du C.D.44 à la fin du XIXème

siècle.Ce que fut l'histoire des premiers

habitants de Perguet nous échappe: on ne

peut que l'imaginer au travers d'études pluslarges.

De l'abbaye augustinienne deDaoulas nous viennent des témoignages dufonctionnement de la paroisse. De 1231 à1690, des religieux de ce monastèredesservaient la chapelle Saint Thomas etpercevaient les dîmes de la paroisse dePerguet ; mais l'église paroissialeavait cependant son clergé séculier et sonadministration. Les prêtres s'y succèdentjusqu'en 1792.

Une dalle funéraire ecclésiastique

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Certains sont connus grâce à la mention deleur arrivée ; d'autres y sont décédés aprèsun ministère plus ou moins long: ainsiMessire Le Reun, mort en 1672. JeanCollin, recteur, arrive en 1678 et décède le13 mars 1708 à l'âge de 70 ans, "au manoirpresbytéral". Pierre Millard, arrivé en1722, meurt le 31 décembre 1741. En1739, c'est Guillerm Hostiou qui meurt"dans sa maison du bourg de Perguet"; etle 8 juillet 1763, Hervé Rivoal estsignalé mort au presbytère. On peutsupposer que sa dépouille a été la dernièreensevelie sous la dalle, devant l'ossuaire.

Dès cette époque, la sépulture desprêtres est aussi un signe du clivage de laparoisse. En effet, le 6.janvier 1750 étaitinhumé au cimetière de Bénodet le corpsdu Vénérable Messire Le Borgne, 28 ans,curé de Perguet.

Le dernier desservant de l'église dePerguet a été Guillaume Pellerin, recteur.Insermenté, il émigre en Espagne le 2juillet 1792, et reviendra le 22 mai 1802pour s'installer à Bénodet. Son vicaire,Jacques L 'Haridon, qui l’avaitaccompagné, n'est pas revenu.

Pellerin était arrivé à Perguet en1787 en remplacement de François Canaffqui s'y trouvait depuis 1768. Ce dernieravait démissionné; on le dit malade dansune auberge à Quimper, puis reprenant sadémission avant d'abandonnerdéfinitivement. Cette démission était peut-être spontanée, mais on sait que sesconfrères l'avaient signalé à l'évêque pouravoir une jeune et jolie servante dont il nevoulait pas se séparer.

Au départ de Guillaume Pellerin, leservice de la paroisse est revenu à Demizit,curé de Clohars-Fouesnant.

En 1792, la communede Perguetétait en force auprès de Alain Nédélec, lejuge fouesnantais qui ne voulait pas jugeret incitait ses compatriotes à ne pas payerd'impôts au nouveau régime. Parmiles noms cités dans le procès qui s'estterminé par la condamnation à mortd'Alain Nédélec : Pierre Lc Cain, maire;Pierre Creven, tailleur à Kermine ;Corentin Bertholom et François Caradec,de Kerconan ; Yves Philippe, de KeravenVihan ; Jean Fichant, de Kerguel et lesonneur de cloches qui donna l'alarmeen sonnant le tocsin : Dans un butd'apaisement, tous furent acquittés. (Voir Foen-Izella N° 10).

La commune de Perguet estdevenue Bénodet par décret du 15 avril1878, à la demande du maire, Jean-MarieFriant, qui habitait Bénodet. Mais entre lademande et la parution du décret, il y eutdes élections municipales" et c'est unnouveau maire, René Berrou, propriétairede la ferme de Kerconan à Perguet, quisigne le premier registre de la nouvellecommune.

René Berrou a laissé le souvenir d'unhomme d'action. Il dut lutter contre sonconseil pour faire ouvrir une école à

Perguel et il donna gratuitement leterrain pour la réaliser. Il décéda en coursde mandat" et son fils refusa de prendre sasuite malgré un vote unanime de sescollègues élus.

Le changement de nom de lacommune a fait couler de l'encre et de lasalive;

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en fait, il ne s'agissait que d'officialiser unesituation existante par l'importance qu'avaitprise le port de Bénodet. Dans les registresparoissiaux, on constate déjà, dès 1700,c'est-à-dire 185 ans plus tôt, que si lesnaissances et les mariages se faisaient àPerguet, les défunts étaient enterrés àPerguet ou à Bénodet selon le lieu de leurdomicile.

L'Association " PAOTREDPERGUET "

Depuis 1987 existe une associationde quartier qui s'est donné pour objectifsd'entretenir les liens d'amitié entre leshabitants, d'animer la vie du quartier, etd'être gardienne des traditions et dupatrimoine culturel. Elle a pris le nom de"Paotred Perguet" (les Gars de Perguet) :Le président en est Jean-Pierre Diascomdepuis sa création.

Et depuis, l'association n'acessé d'oeuvrer pour donner vie au quartierdurant l'hiver. Par ses initiatives, le pardonde Saint Laurent est devenu un rendez-vous important, prisé par les vacanciersen quête de traditions bretonnes. Elle aparticipé financièrement, auprès de lamunicipalité, aux restaurations etembellissements du site. En ce moment,elle propose de financer la pose de vitrauxcouleur sur les fenêtres du choeur et desdeux transepts de l’église.

Les élus de la communesont en phase avec l'association.Conscients de la notoriété et de l'intérêtque présente pour la station l'édificeroman, ils l'ouvrent aux visiteurs pendantla saison estivale, et les comptes del'hôtesse d'accueil prouvent que Perguet esten bonne place sur les carnets de route desvacanciers.

Foule au pardon de Perguet, où se mêlent vacanciers et autochtones

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