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>>> SOMMAIRE
EDITO Page 3
MOUVEMENTS SOCIAUX Page 4
EMPLOI Page 9 PROTECTION SOCIALE Page 15
PSE Page 17
RESSOURCES HUMAINES Page 19
POLITIQUE SOCIALE Page 21
INTERNATIONAL Page 25
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Edito
Chers supporters,
L’été est bel et bien terminé : au placard tongues et lunettes de soleil, sortez les parapluies. Une nouvelle saison commence et s’annonce déterminante pour l’avenir de l’équipe. Nous espérons que vous avez bien profité de vos vacances pour être prêt à vaincre l’adversaire: l’actualité du droit social. Pour cela, une seule solution, connaître son ennemi dans ses moindres détails afin d’avoir une chance de transformer l’essai et de remporter la victoire. Il n’est point utile de distribuer poires, marrons et châtaignes, « Drop social » le fait pour vous. Il entre dans la mêlée juridique, sélectionne les informations principales et vous les lance pour que vous puissiez marquer l’essai. N’essayez pas d’esquiver, le sort de l’équipe repose sur vous. Cette semaine, le pack de l’ennemi pèse lourd. Tout d’abord, impossible de décoller. Les pilotes d’Air France font grève refusant d’allez chez Transavia. Toutefois, le MEDEF ne semble pas touché par ces problèmes de décollage et lance l’idée d’une diminution du SMIC et d’une augmentation du temps de travail. Ensuite, les intermittents du spectacle, toujours mécontents de leur situation se mobilisent à nouveau ; attention aux coups de poing, l’arbitre pourrait brandir un carton rouge. Quant à Bouygues Telecom, il a subi un mauvais plaquage de la concurrence qui l’oblige à se séparer d’un grand nombre de ses salariés. Tandis que les mutuelles étudiantes, elles, sont toujours dans le jeu avec leurs politiques commerciales agressives qui font souffrir les étudiants. Le coup de sifflet a retenti, l’équipe du Master II Droit social entre dans le stade pour une nouvelle saison. Installez-‐vous confortablement dans les gradins du stade Marcel Michelin, et que le Match commence. Bonne lecture !
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>>> MOUVEMENTS SOCIAUX
Deux intermittents face à leur mouvement
« Je n'ai absolument pas de regrets. Il fallait le faire, montrer que l'on était vigilants et surtout que l'on était décidé à se battre. » Le 3 juin, Nathalie Ducasse, technicienne-‐lumière employée par le Printemps des Comédiens depuis cinq ans, vote, comme une majorité de ses collègues, pour la grève durant la manifestation « montpelliéroise » prévue du 3 au 29 juin, l'un des premiers grands rendez-‐vous estivaux. A l'exception d'une pièce interprétée par des personnes handicapées, tous les spectacles sont annulés. Pour Nathalie, la mobilisation se solde par vingt-‐sept jours de grève et cent heures de moins à déclarer, soit un cinquième des heures requises pour percevoir l'allocation-‐chômage (un technicien doit effectuer 507 heures en dix mois pour être éligible aux prestations de l'Unedic). Cette professionnelle du spectacle, âgée de 45 ans et intermittente depuis six ans, a assumé le risque : « Plus on avançait dans les jours, plus on sentait qu'on avait lancé quelque chose. On ne pouvait pas s'arrêter là. »
« ÇA VA ÊTRE TRÈS JUSTE »
Les répercutions sur sa situation professionnelle se ressentent encore aujourd'hui. « J'ai pu récupérer une quarantaine d'heures pour le moment, mais je ne sais toujours pas si je vais pouvoir faire mon quota. Le renouvellement de mes allocations-‐chômages est prévu fin novembre. Impossible d'être sure que je vais réaliser les 507 heures nécessaires à temps. Ça va être très juste». Son année se partage entre la période hivernale où elle œuvre dans plusieurs salles, s'occupe de l'accueil des régisseurs en tournée avec les groupes – notamment au Victoire 2, à Montpellier – et l'été où elle enchaîne les festivals, la plupart basés sur cette commune également. Le Printemps des Comédiens est sa plus grosse date.
La détermination de la « montpelliéroise » et de ses confrères et consœurs leur aura été profitable. Face à la grogne grandissante des professionnels du spectacle, qui protestaient contre l'accord du 22 mars sur l'assurance-‐chômage, Manuel Valls annonçait, le 19 juin, des mesures concrètes visant à rassurer les intermittents, ainsi que le lancement d'une concertation. « Notre grève a été utile, c'est sûr. Sans elle, les concertations n'auraient pas démarré, affirme la technicienne-‐lumière. Mais, on n’est pas dupe. Ce qu'ils nous ont donné, c'est quelques miettes pour nous faire taire, pour que les festivals aient lieu. »
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« ON DEVAIT LE FAIRE »
Déçus par les annonces du premier ministre, des intermittents choisissent de maintenir une forme de pression. C'est le cas de Vincent Dissez, comédien, qui conteste la prise en charge du délai de carence par le gouvernement. « C'est une décision perverse, qui fausse l'image de l'intermittence, s'inquiète l'artiste. Le fait que l'Etat utilise l'argent du contribuable pour combler le délai dans le versement de nos allocations légitime l'idée que nous sommes des privilégiés. Rien ne le justifie. » Une désapprobation qu'il manifeste en votant la grève du Week-‐end International #6, festival organisé les 20, 21 et 22 juin au Théâtre de la Cité Internationale, à Paris, renonçant à se produire en spectacle et à déclarer une quarantaine d'heures de travail, répétitions et représentations.
Intermittent depuis dix-‐neuf ans, cet acteur, intervenant essentiellement au théâtre, enchaîne créations propres et différents rôles partout en France, tout au long de l'année. Il reconnaît ne pas s'être mis en danger en renonçant à ces heures de travail, mais ce n'était pas le cas de toutes les personnes présentes, dit-‐il. « Lors des assemblées générales avec les membres du festival, l'une des techniciennes en grève nous a expliqué qu’elle allait rester au RSA. Après le blocage du Printemps des Comédiens, on s'est dit qu'il fallait prolonger une forme d'action. On devait le faire. »
« IL AURAIT FALLU MAINTENIR LA PRESSION »
Avec le recul, Nathalie Ducasse regrette que cette volonté n'ait pas été partagée. « On sortait de quelque chose, il aurait fallu maintenir la pression. En voyant le soufflet retomber, on y croyait à peine. » Au final, la grève a peu perturbé les festivals d'été, même si nombre d'acteurs culturels ont été mobilisés, informant le public avant ou après les spectacles. Bilan (non exhaustif) du mouvement : 12 représentations bloquées à Avignon sur un total de presque 300 spectacles, une annulation au festival lyrique d'Aix-‐en-‐Provence, 3 spectacles en moins sur 21 à Chalons dans la rue, etc.…
Pour Vincent Dissez cette situation s'explique aussi par la nature créative du travail artistique : il est difficile pour un artiste, dit-‐il, de s'impliquer dans les mouvements sociaux lorsqu'il est en phase de production. « Je me mets à la place des gens à Avignon. C'est très pénible de ne pas montrer ce que l'on a préparé. C'est abîmer, voire dévaloriser notre propre travail. Choisir de ne pas jouer, c'est une décision terrible. » Actuellement en résidence pour son nouveau spectacle, programmé au Théâtre de Lorient du 13 au 17 octobre, le comédien ne sait pas s'il se mobilisera à nouveau, mais suivra avec intérêt et méfiance la reprise des concertations avec la délégation nommée par le gouvernement – la première réunion avait lieu jeudi 18 septembre.
MANIFESTATIONS PRÉVUES LE 1ER OCTOBRE
Une nouvelle journée de manifestations des intermittents, prévue le 1er octobre, pourrait donner un nouveau souffle au mouvement. Nathalie Ducasse profitera d'une journée sans contrat pour se joindre aux manifestations organisées dans sa ville. « Si j'avais une date de prévue, je ferais tout de même grève. C'est la rentrée et la reprise des concertations, il ne
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faut pas les rater. » Comme beaucoup de ses confrères et consœurs, elle reste dans l'expectative. « Je n'attends rien, lâche la technicienne, désabusée. Sauf, peut-‐être, que les syndicats représentatifs des intermittents soient réellement associés et que notre nouvelle ministre se positionne clairement sur ce dossier. »
Nommée le 26 août en remplacement d'Aurélie Filippetti, Fleur Pellerin, qui s'est récemment exprimée sur le sujet dans nos colonnes, n'exclut pas la possibilité de faire voter une loi pour redéfinir le cadre de l'intermittence, si les concertations n'aboutissent pas d'ici la fin de l'année.
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>>> MOUVEMENTS SOCIAUX
Grève des pilotes d'Air France : un mouvement
« corporatiste » ?
Après l'abandon du projet Transavia Europe, c'est le volet français de la filiale à bas coût d'Air France qui est maintenant au cœur des négociations entre la direction et les pilotes. Jeudi, ces derniers ont remporté une première victoire en obtenant le retrait « définitif » du projet européen de filiale à bas coût d'Air France, Transavia Europe.
« Aucun pilote d'Air France n'acceptera de partir chez Transavia si on lui impose la conclusion d'un nouveau contrat de travail Transavia », répète le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), syndicat majoritaire dans la profession, pour justifier la poursuite du mouvement.
Retour sur les raisons d'une grève qui entre dans son douzième jour, dépassant le précédent record de 1998.
POURQUOI LES PILOTES FONT-‐ILS GREVE ?
Air France-‐KLM voulait faire de sa filiale Transavia un des « leaders du low-‐cost paneuropéen », avec une flotte de 220 avions contre une cinquantaine aujourd'hui (à titre de comparaison, EasyJet possède 300 appareils). Et de rendre ses activités court et moyen-‐courrier, qui lui ont coûté une perte 200 millions d'euros au premier semestre, enfin rentables.
Les pilotes, qui craignent une harmonisation de leurs conditions de travail avec celles de leurs homologues européens, souvent moins avantageuses, réclament un seul contrat pour tous les vols exploités par la compagnie Air France. Mais qu'en est-‐il vraiment ?
LE SALAIRE DES PILOTES, FANTASMES ET REALITES
Le salaire n'est pas vraiment l'inquiétude majeure des pilotes puisque la fiche de paie est en fin de compte meilleure chez les compagnies à bas coûts : un copilote débutant chez Air France, sur un moyen-‐courrier Airbus A320, touche environ 3 500 euros brut par mois ; son homologue de Transavia débute à 4 000 euros. Du côté de la concurrence, un copilote d'EasyJet gagne, lui, environ 5 000 euros par mois.
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La carrière est en outre plus rapide chez Transavia qu'à Air France, où les pilotes doivent grimper patiemment les échelons de séniorité de la compagnie.
En réalité, les pilotes craignent davantage pour leurs conditions de travail : l'une des clés de la réussite des compagnies à bas coûts est la vitesse de rotation de leurs avions. Ils restent au sol le moins de temps possible.
Chez Transavia, raconte un navigant, « on se pose et on redécolle en moins de trente minutes sur du court et moyen-‐courrier. Chez Air France, vous ne descendrez jamais sous les quarante-‐cinq minutes ! »
Le développement de Transavia en Europe suggérerait une augmentation du temps passé en vol, pour l'instant beaucoup moins long en France qu'ailleurs en Europe.
Selon la direction d'Air France, le coût à l'heure d'un pilote d'Air France est en moyenne 70 % plus élevé que chez Transavia, car les pilotes, à rémunération égale, effectuent d'avantage d'heures de vol sur la compagnie low cost.
UNE GREVE « CORPORATISTE » ?
La grève coûte 15 millions à 20 millions d'euros par jour à Air FranceKLM selon la direction.
La CFDT et de la CGE-‐CGC s'y opposent. La critique la plus acide vient du secrétaire général de la CGE-‐CGC à Air France, Ronald Noirot : « Sous des prétextes fallacieux, les pilotes ne pensent encore une fois qu'à eux », dénoncait-‐il.
La CGT ne soutient pas clairement le mouvement (qualifiant le contenu des revendications d'« ultra corporatistes ») mais ne le condamne pas non plus et critique une stratégie de « low-‐costisation ». Le syndicat a insisté sur l'aspect collectif que doivent prendre les négociations au sein de la compagnie aérienne en difficulté.
Les pilotes bénéficient en effet d'une situation assez avantageuse. Au regard de la grille des salaires publiée sur le site de la CGT d'Air France, ils sont même plutôt bien lotis :
La poursuite du mouvement, si elle ne semble pas souffrir de contestation chez les pilotes, suscite une levée de boucliers parmi les autres catégories de personnel.
Hôtesses, stewards et personnel au sol ont le sentiment d'avoir payé un plus lourd tribut que les pilotes lors du plan de restructuration « Transform 2015 », qui s'est traduit par la suppression d'environ 10 % des effectifs.
Bruno Nègre, de la CFE-‐CGC, prédit d'ailleurs un « après-‐grève (...) horrible à gérer », tant la famille Air France s'est déchirée, selon lui, dans le conflit.
« Plus la grève dure, plus la facture s'alourdit, et tous les salariés vont devoir la payer. On a fait deux ans d'efforts et tout est balayé en 10 jours », s'est pour sa part désolée Béatrice Lestic, syndicaliste de la CFDT.
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>>> EMPLOI
Baisse du Smic, fin des 35 heures: le Medef joue bien la surenchère
Pierre Gattaz a levé le voile ce mercredi 24 septembre sur ses propositions en vue de créer un million d'emplois en cinq ans. Sans oser l'avouer, le patron des patrons remet bien en cause le Smic et les 35 heures.
Il aurait pu tenter un passage en douceur en cette période décisive de négociations entre les partenaires sociaux. Mais non. Ce mercredi matin, Pierre Gattaz a présenté au siège du Medef ses propositions pour créer, en cinq ans, un million d'emplois. Des dizaines et des dizaines de préconisations incluses dans un livret jaune d'une centaine de pages. Sans concession aucune. Pour le Medef, créer un million d'emplois semblerait presque aisé, et permettrait tout juste de baisser le taux de chômage de deux points, à 9%. La manœuvre est bien sentie, puisqu'elle permet à l'organisation patronale de s'exonérer de toute responsabilité, d'éluder le débat des contreparties, pourtant mal engagé. Grâce à son slogan "un million d'emplois", le Medef ne fait en réalité rien d'autre que de réclamer un nouvel engagement du gouvernement, des réformes drastiques du droit du travail, via des dérèglementations massives. Loin, très loin d'une prise d'engagements en vue de concrétiser le Pacte de responsabilité.
"Ce n'est pas une provocation", insistent pourtant, les uns après les autres, les responsables du Medef. Et Pierre Gattaz d'assurer que non, le Medef ne remet pas en cause le Smic et les 35 heures. Ce n'est pourtant pas ce que laissent apparaitre les mesures prônées par l'organisation. En voulant renverser la hiérarchie des normes, faire primer les négociations d'entreprises et de branches, le Medef ouvre une boite de Pandore, voulant offrir l'opportunité aux chefs d'entreprise de déroger sur les bases du droit du travail. La flexibilité, à tout prix.
BOUSCULER LA HIERARCHIE DES NORMES
Sur les 35 heures, le document propose de "revoir le cadre légal de la durée du travail". Il s'agit de revoir "le principe d'une durée légale imposée à toutes les entreprises". Elle serait plutôt fixée par une négociation au niveau de l'entreprise. Pour les TPE et les PME, le Medef précise vouloir instaurer une négociation de branches. La loi, ajoute le texte, "ne serait plus
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que supplétive, trouvant à s'appliquer dans les entreprises n'ayant pas mené de négociations sur le sujet.
Sur ce dossier pourtant, les entreprises peuvent déjà obtenir des dérogations. Pour preuve, le temps de travail moyen s'élevait à 39,5 heures par semaine en 2011, selon les statistiques de la Dares. Plusieurs dispositifs rendent possibles les dérogations aux 35 heures. Les heures supplémentaires ont été assouplies en 2008, les forfaits-‐jours ont été libéralisés. Enfin, les compte épargne-‐temps, qui permettent aux salariés d'économiser pour leur retraite ou la constitution d'un capital risque, ont été simplifiés. Désormais, la cinquième semaine de congés payés et les jours de congés supplémentaires prévus par la convention ou l'entreprise peuvent y être affectés.
Le constat est sensiblement identique pour le Smic. Sur le sujet, Pierre Gattaz n'en est pas à sa première. C'est en fait le 15 avril dernier que le patron du Medef prônait officiellement l'instauration transitoire d'un salaire plus bas que le Smic, pour "un jeune ou quelqu'un qui ne trouve pas de travail". Des propos qui ont eu le don d'agacer au sein du gouvernement. Même Laurence Parisot y était alors allée de son tweet, dénonçant la "logique esclavagiste" d'une telle mesure. Dans la version finale de ses propositions, le Medef préconise l'instauration d'un cadre transitoire d'accès à l'emploi, destiné "aux populations très éloignées de l'emploi". Une formulation particulièrement floue, qui ne révèle rien des personnes qui seraient potentiellement concernées par cette mesure. Pourtant, le Medef est en mesure d'espérer un gain de 50 000 à 100 000 emplois en cinq ans sur cette seule base.
Tout de même, le document explique que ce cadre pourrait prendre la forme de "contrats aidés". Un petit fascicule annexe explique quant à lui que ces derniers pourraient prendre la forme de contrats payés en dessous du Smic. Les revenus du salarié seraient alors complétés par des allocations sociales. Comme prévu, les voix s'élèvent contre ces prises de position. François Rebsamen, en 140 caractères, estime par exemple que les "propositions du Medef, c'est toujours plus" malgré les "41 milliards d'allègements pour les entreprises". Le tollé avait débuté dès le 14 septembre après la fuite parue dans Les Echos. Le Medef dénonçait alors la mise en ligne d'un simple document de travail, qui s'est finalement avéré être en totale cohérence avec les annonces formulées ce mercredi, malgré un report d'une semaine de la conférence de presse. Reculer pour mieux sauter, une expression dans l'air du temps au Medef.
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>>> EMPLOI
Restaurer la confiance entre PME et grands groupes
La France se désole régulièrement de la faiblesse de ses PME, qui ne parviennent pas à devenir des entreprises de taille intermédiaire (ETI), souvent faute de financements suffisants. Pourtant, avec 23% des investissements et 26% des dépenses internes de recherche et développement (R&D), les ETI sont les pépites de notre économie : face à une croissance française atone et à un chômage qui ne cesse de progresser, ces structures disposent d'un potentiel inégalé d'innovation et de création d'emplois. Alors qu'elles sont à l'origine de plus d'un quart du chiffre d'affaires total des entreprises françaises, elles ne représentent que 0,2% d'entre elles, soit 2,5 fois moins qu'en Allemagne et moitié moins qu'en Grande-‐Bretagne. Pourquoi de telles difficultés, en France, à financer et à faire grandir nos PME ?
Trop nombreux sont les patrons de PME qui limitent leurs ambitions !
Une réflexion de fond sur le financement et la croissance des PME est indispensable ; c'était d'ailleurs l'objet des Assises du financement qui ont lieu le 15 septembre à l'Elysée. Au-‐delà des problèmes d'accès au crédit bancaire souvent évoqués, la raison du faible nombre d'ETI en France est aussi à chercher du côté des relations entre PME et grandes entreprises, ces « champions mondiaux français » qui font l'objet de toutes les attentions des pouvoirs publics depuis la Libération.
En France, l'absorption des PME par les grands groupes est la règle, même lorsque les fondateurs ou managers conservent une part minoritaire du capital. Attirées par le développement de certains secteurs innovants dans lesquels elles n'ont jamais investi auparavant, certaines grandes entreprises françaises n'hésitent pas à piller les actifs, les savoir-‐faire, les clients que des PME ont mis des années à acquérir et à développer.
DISCOURS INCANTATOIRES
En conséquence, nombreux sont les patrons de PME qui préfèrent limiter leurs ambitions et le développement de leur société, et donc de l'emploi, plutôt que de s'adosser à un groupe qui risquerait de les phagocyter et d'aller à l'encontre des intérêts des actionnaires minoritaires, comme par exemple ceux des actionnaires familiaux restés au capital.
Pour que nos PME deviennent des ETI florissantes, favorisons l'investissement par les grands groupes, en toute confiance.
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Malgré de nombreux discours incantatoires sur la nécessité de soutenir les PME, de développer un tissu d'ETI innovantes, malgré les références régulières au modèle allemand, l'Etat français n'a pas défini et ne garantit pas les conditions, notamment juridiques, d'une relation équilibrée entre PME et grands groupes.
Or, la collaboration est possible et même indispensable pour l'économie et l'emploi. Cela passe par une réforme de notre droit des sociétés non cotées. Tout le monde gagnerait, en France, à ce que l'on favorise un cadre législatif sécurisant pour les PME : elles pourraient, en toute confiance, apporter aux grandes entreprises leur savoir-‐faire à forte valeur ajoutée et leurs technologies innovantes dans des secteurs en forte croissance.
En retour, elles bénéficieraient de la surface financière et de la connaissance de l'international des grands groupes, essentiels pour développer des projets d'envergure. Bref, PME et grands groupes partageraient les risques et les bénéfices éventuels de leur collaboration, à l'image de la pratique allemande.
AVANCÉE LÉGISLATIVE
Libérer l'entreprenariat français ne tient pas qu'à des mesures fiscales !
Il faut sortir de la logique du pot de terre et du pot de fer et créer les conditions d'un rapport non plus de domination, mais de coopération, de partenariat et non plus de confrontation. La Grande-‐Bretagne, les Etats-‐Unis et le Canada l'ont compris ; l'Allemagne bénéficie d'un dispositif législatif et réglementaire efficace qui permet à ses PME de grandir en symbiose avec les grands groupes et ainsi devenir des ETI, depuis… 1965 ! En France, une réglementation efficace se fait toujours attendre.
Pourtant, des parlementaires se mobilisent. Une proposition de loi, préparée par Christian Assaf, député de l'Hérault, a été déposée en février par 115 députés au nom du Groupe socialiste. Elle prévoit que lorsqu'un groupe prend le contrôle d'une entreprise, il ne peut agir contre les intérêts propres de celle-‐ci que s'il répare le préjudice qu'il lui fait subir ou acquiert la totalité des titres des actionnaires minoritaires. Karine Berger, député PS des Hautes Alpes, a également rappelé, lors des premières rencontres parlementaires des ETI, la nécessité de préserver l'intégrité, le savoir-‐faire et les emplois des sociétés dans lesquelles les grands groupes investissent.
Libérer l'entreprenariat français ne tient pas qu'à des mesures fiscales. Une avancée législative permettant d'introduire des dispositions de nature à restaurer la confiance des patrons de PME dans les grands groupes est indispensable. Il reste désormais à transformer l'essai, en inscrivant la proposition de loi au calendrier de l'Assemblée ou en intégrant ses dispositions dans un des projets de loi économique de la rentrée.
Ce serait la traduction de la promesse du candidat François Hollande en 2012 : « je ferai des petites et moyennes entreprises une priorité » et le signe fort de l'engagement de l'Etat en faveur de ces « champions de demain », de la croissance, et de l'emploi.
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>>> EMPLOI
La hausse du niveau de qualification n’enraie pas celle du chômage
La course aux diplômes a-‐t-‐elle atteint ses limites ? Le chômage des jeunes sortis de l’enseignement supérieur en 2010 explose, et la hausse générale du niveau de diplôme n’y fait rien.
C’est ce qu’a constaté le Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq), dans une étude rendue publique jeudi 18 septembre, et qui compare la situation professionnelle de ces jeunes trois ans après leur diplôme, avec celle des étudiants diplômés en 2004. Résultat : ceux de 2010 sont plus diplômés que leurs prédécesseurs de 2004, mais ils sont aussi plus touchés par le chômage (13 %, contre 8,7 %). « La hausse du niveau de formation n’empêche pas celle du chômage », conclut le Céreq.
Alors que toutes les études tendent à prouver que le diplôme est une arme antichômage, celui-‐ci perdrait-‐il de son efficacité ? Selon les statistiques du Céreq, 11,9 % des titulaires d’un master 2 (bac + 5) étaient au chômage en 2013, trois ans après l’obtention de leur diplôme en 2010. Ils n’étaient que 6,3 % en 2007 (pour les diplômés de 2004). Même situation pour les licences professionnelles – le taux de chômeurs atteint 9,9 % en 2010, contre 5,1 % en 2007 – ou les écoles de commerce (9,2 %, contre 5,1 %). Néanmoins, ceux qui ont quitté le supérieur sans diplôme (un jeune sur cinq) subissent un taux de chômage de 23,1 % en 2010, contre 15,8 % en 2007.
« UNE CONCEPTION MAGIQUE DES CHOSES »
Depuis le début des années 2000, la France pousse toujours plus loin ses étudiants. Beaucoup de ceux qui s’arrêtaient auparavant après un BTS ou un DUT vont jusqu’en licence professionnelle. Dans le même temps, la part d’une génération qui arrive jusqu’au master est passée de 13 % à 20 % entre 2004 et 2010. L’objectif des ministres de l’enseignement supérieur est clair : il faut que la moitié d’une génération soit diplômée du supérieur en 2020, contre plus de 40 % aujourd’hui.
En 2006, la sociologue Marie Duru-‐Bellat avait fait grand bruit en mettant en garde contre L’Inflation scolaire (Seuil). La course aux diplômes, relevait-‐elle, engendre déclassement, inégalités, sentiment d’injustice…
Les chiffres du Céreq montrent-‐ils que la course aux diplômes est dangereuse ? « Les résultats de l’étude du Céreq ne sont pas étonnants, analyse Mme Duru-‐Bellat. En quoi faire une ou deux années d’études supplémentaires créera-‐t-‐il les emplois que les jeunes attendent ? C’est une conception magique des choses : on va allonger la formation et ça ira mieux. »
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Pour la sociologue de l’Institut de recherche sur l’éducation (Iredu), si « la crise économique joue un peu », ce qui est plus probablement en jeu, ce sont les « effets de seuil ». La structure de l’emploi en France n’évolue pas aussi vite que l’élévation du niveau académique, et le marché peine à absorber ces nouveaux diplômés. « Tout le monde ne peut pas être ingénieur ou manager, rappelle Mme Duru-‐Bellat. Le marché des diplômés est mondial, et la concurrence est forte. »
« C’EST PRINCIPALEMENT LA CRISE »
Saturation du marché ? Crise économique ? Il est difficile de distinguer les poids respectifs de l’une et de l’autre dans la situation décrite par le Céreq. Pour le sociologue Camille Peugny, maître de conférences à l’université ParisVIII-‐Vincennes-‐Saint-‐Denis, cependant, « c’est principalement la crise » qui explique la hausse du chômage. Et, dit-‐il, « si le diplôme protège moins en 2010 qu’en 2004, il demeure très protecteur ».
Plus on monte dans les études, plus on a en effet des chances de trouver un emploi. « Selon l’étude du Céreq, observe-‐t-‐il, un non-‐diplômé de la génération 2004 avait 2,3 fois plus de risque d’être au chômage qu’un jeune sorti de l’enseignement supérieur avec un master 1 ou 2. En 2010, cette probabilité est restée strictement la même. C’est donc bien la crise qui explique les chiffres du Céreq. Diplômer de plus en plus d’étudiants ne crée pas de manière magique des emplois qualifiés pour les accueillir. Il faut une activité économique dynamique pour les absorber. »
Au demeurant, cela n’enlève rien aux risques qui pèsent sur le pays. Situation dangereuse ? « Oui, sans doute, répond Mme Duru-‐Bellat. Car les jeunes y croient et ils se sentent floués.» Dans ce sombre tableau, seuls les ingénieurs, les docteurs et les diplômés de bac + 2 et bac + 3 en santé social tirent leur épingle du jeu.
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>>> PROTECTION SOCIALE
L'UFC dénonce les méthodes commerciales des mutuelles étudiantes
Les mutuelles étudiantes sont de nouveau sur la sellette. Cette fois, ce sont leurs pratiques commerciales jugées agressives qui sont dénoncées par l'UFC-‐Que choisir.
Cet été, une journaliste de la principale association de défense des consommateurs, Léa Billon, s'est fait recruter par la Smerep, la première mutuelle étudiante régionale (182 000 affiliés en Ile-‐de-‐France), pour devenir agent commercial et démarcher de nouveaux adhérents sur les campus, à la rentrée.
Elle raconte, dans un article publié sur le site de l'association le 25 septembre, ses cinq jours de formation, en compagnie d'une cinquantaine de jeunes comme elle, et d'initiation à des méthodes commerciales pour le moins agressives, voire mensongères.
Les mutuelles, organismes privés, sont le passage obligé pour tout étudiant devant s'affilier à la Sécurité sociale puisqu'elles ont obtenu, de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), une délégation de service public pour gérer le régime étudiant.
« EXASPÉRER LE CAMP D'EN FACE »
Pour chaque jeune inscrit par son intermédiaire à la « sécu » – moyennant une cotisation de 213 euros –, la mutuelle perçoit, de la CNAM, une « remise de gestion » de 52 euros par an, ce qui représente, au total, un pactole de 95 millions d'euros que se partagent âprement deux réseaux, La Mutuelle des étudiants (LMDE, administrée par l'UNEF) et Emevia, qui regroupe dix mutuelles régionales, dont la Smerep.
De plus, jouant de la confusion entre ce rôle public et leur objectif commercial de société privée, elles en profitent pour faire valoir et placer leur complémentaire santé, qui est facultative.
Léa Billon a dû passer pas moins de trois entretiens pour se faire embaucher comme vendeuse, ce qui est beaucoup pour un simple job étudiant. « On vous teste d'entrée pour savoir jusqu'où vous êtes prêt à aller, par exemple si vous sauriez imaginer un scénario pour aller créer un scandale devant le stand de la LMDE concurrente, en faisant tout pour exaspérer le camp d'en face sans jamais répondre aux insultes », se souvient-‐elle.
En cette rentrée 2014, la LMDE est en effet en fâcheuse posture puisque placée sous administration provisoire suite à des difficultés financières. La Smerep n'hésite pas à tirer parti de cette faiblesse. Cela est même allé jusqu'à des échauffourées, fin juillet, sur le campus de Nanterre : « Ce sont nos commerciaux qui ont été agressés physiquement par
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ceux de la LMDE », soutient Annie Coutarel, directrice générale de la Smerep, qui a tout de même édité un tract « LMDE en crise » pour raconter par le menu les déboires de sa rivale.
« CONSIGNE : NE PAS LAISSER LE CHOIX »
Durant la formation intensive, les stagiaires en uniforme – jean et T-‐shirt blanc – se livrent à des jeux de rôle où il faut se montrer offensif en utilisant, comme le raconte Léa Billon, des phrases toujours affirmatives, comme « il te faut cette complémentaire », évitant soigneusement de proposer une alternative avec des propositions comme « veux-‐tu souscrire ? ».
« La consigne est de ne pas laisser le choix », témoigne-‐t-‐elle. Ces apprentis commerciaux sont aussi encouragés à vendre l'assurance responsabilité civile de la Smerep (27 euros) et incités à prétendre qu'elle est obligatoire, ce qui n'est pas le cas, la plupart des jeunes étant déjà couverts par celle de leurs parents ou de leur logement.
« L'astuce est de vendre le 'pack Smerep' sous le nom d''assurance étudiante' », raconte Léa Billon. Sollicitée, Annie Coutarel dément « l'interprétation négative des faits » par la journaliste et s'interroge sur l'éventualité de porter plainte pour diffamation. « Sur les 1 000 établissements que compte l'Ile-‐de-‐France, nous sommes présents sur 200, avec l'accord des chefs d'établissements qui sont vigilants sur les informations que nous diffusons. A Paris-‐VII Diderot, par exemple, nous n'avons pas le droit de vendre nos complémentaires », affirme-‐t-‐elle.
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>>> PSE
Bouygues Telecom prévoit finalement la suppression de 1 404 postes
Semaine chargée pour le groupe Bouygues. Après l’annonce mardi 23 septembre de l’ouverture d’un plan de sauvegarde de l’emploi chez LCI, c’est au tour de Bouygues Telecom de rencontrer, mercredi 24 septembre, les syndicats de salariés lors d’un comité central d’entreprise. L’opérateur de téléphonie mobile leur a présenté la dernière mouture du plan de suppression d’effectifs annoncé en juin dernier.
Le nouveau projet prévoit la suppression de 1404 postes au lieu des 1 516 initialement présentés en juin dernier. 112 postes seront donc finalement préservés. Comme prévu au départ, ce sont principalement les divisions marketing, informatique et les fonctions supports en général qui seront touchées.
DEPARTS
Ce plan vient s’ajouter aux 600 départs déjà finalisés par Bouygues Telecom en 2013. Il s’inscrit dans un contexte difficile pour l’opérateur. Fragilisée depuis l’arrivée de Free mobile sur le marché en janvier 2012 et l’échec de sa tentative de rachat de SFR en mars dernier, la filiale du groupe de BTP tente par tous les moyens de survivre toute seule sur un marché de plus en plus concurrentiel. Pour y arriver, elle a mis en place un plan stratégique offensif (miser sur la 4G, le très haut débit mobile et investir dans les réseaux, simplifier le nombre de ses forfaits, et casser les prix) afin de gagner des parts de marché et de réduire ses coûts. Un plan qui passe donc aussi par des suppressions de postes sans précédent dans la filiale du bétonneur.
Mais s’ils reconnaissent la situation délicate dans laquelle se trouve l’opérateur, les syndicats n’en sont pas moins inquiets des modalités de mise en œuvre du plan par la direction. En effet, si celle-‐ci ne trouve pas suffisamment de candidats au départ, elle aura recours à des licenciements secs.
« Personne ne conteste la réalité économique et la nécessité d’un changement dans le groupe, cependant nous regrettons que les départs soient contraints et non pas uniquement volontaires, explique Bernard Allain, délégué FO au sein de Bouygues Telecom, c’est déjà douloureux de voir des destructions de postes, ça l’est encore plus de voir des gens qui n’étaient pas candidats au départ, obligés de partir »
Les syndicats se disent par ailleurs très vigilants sur la charge de travail que les salariés restants devront assumer. « Nous avons des vraies craintes concernant la possibilité de faire
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fonctionner l’entreprise avec autant de départs », a déclaré à l’AFP Azzam Ahdab, délégué CFDT.
L’ouverture du guichet de départ début novembre prochain devrait être surveillée de près par les représentants des salariés.
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>>> RESSOURCES HUMAINES
SNCF: un apéro, des sanctions... et une grève
Des perturbations sont attendues aujourd'hui sur les lignes J et L du Transilien. Un mouvement lancé par les syndicats pour soutenir des agents qui avaient bu du punch dans un poste d'aiguillage.
« Ce n'est pas une affaire très reluisante », reconnaît dans un soupir un cadre de la SNCF. Aujourd'hui, les syndicats SUD-‐Rail, CGT et Unsa de la gare Paris-‐Saint-‐Lazare lancent un préavis de grève de 24 heures. La SNCF annonce 1 train sur 2 sur les lignes J et L du Transilien. Des dizaines de milliers de voyageurs sont concernées.
Motif de la mobilisation : soutenir deux agents qui passent cet après-‐midi en conseil de discipline pour avoir bu du punch un dimanche soir de février 2013 à leur poste de travail, un poste d'aiguillage très sensible du réseau Paris-‐Ouest.
Une petite fête entre amis qui aurait pu passer inaperçue si une vidéo de la soirée, mise en ligne par le site Internet du « Point » en juin, n'avait fait le buzz, six mois après le drame de Brétigny-‐sur-‐Orge. On y voit pendant une minute cinquante plusieurs agents rigolards en train de boire un cocktail rhum-‐piment-‐citron dans la salle de repos. Puis l'un d'eux, à son poste d'aiguillage, de reconnaître avoir oublié de « clignoter » un train qui entre sur un quai occupé... Après une enquête interne, huit agents ont été sanctionnés. « Ils ont été reçus à plusieurs reprises, explique-‐t-‐on à la direction générale de Paris-‐Saint Lazare. Deux d'entre eux, qui avaient consommé de l'alcool, ont été mis à pied deux jours et quatre sanctionnés par une mise à pied d'un jour avec sursis pour ne pas avoir alerté leur hiérarchie. Le conseil de discipline se prononcera demain (NDLR : aujourd'hui) sur les cas d'un cadre opérationnel et d'un agent de maîtrise. » Des sanctions que la CGT du secteur Saint-‐Lazare juge disproportionnées. Sollicité, le syndicat renvoie sur un communiqué publié sur Internet dans lequel il dénonce la « répression patronale » et critique vertement « la posture dogmatique de la direction dictée par Pepy ( NDLR : PDG de la SNCF) ».
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Le texte rappelle aussi que la vidéo tremblotante, qualifiée de « bidonnée », a été tournée par un agent qui a ensuite été congédié par la SNCF et donne sa version des faits. En fait de beuverie, tout aurait commencé par une soirée crêpes. « Et, pour la pâte, ils ont emmené du rhum, breuvage qui, une fois passé à la poêle, aura perdu sa capacité enivrante », raconte le syndicat. Là-‐dessus, un agent aurait voulu préparer un cocktail avec du piment. Une boisson tellement épicée « que personne n'a fini son verre ». Preuve, selon la CGT, que les agents n'étaient pas ivres, ils auraient « parfaitement géré », trente minutes après que les images eurent été filmées, une situation dangereuse où des voyageurs se sont retrouvés sur les voies. « Mais la direction refuse d'en tenir compte », regrette le syndicat qui évoque « un sentiment d'injustice et d'irrationalité ». Du côté de la direction régionale de Paris-‐Saint-‐Lazare, on ne souhaite pas entrer dans les détails d'une procédure confidentielle. « On prend cette affaire très au sérieux, souligne un de ses responsables. L'alcool est prohibé sur tous les lieux de travail et a fortiori dans un poste de sécurité. Mais il faut rappeler que ce cas est marginal. Les agents SNCF ont la sécurité toujours présente à l'esprit. »
Le trafic sur les lignes des RER B et D et des Transilien H et K a été très perturbé hier à la suite d'un autre mouvement social lancé par SUD, la CGT, FO, l'Unsa et la CFDT. Les grévistes dénonçaient les « sanctions lourdes » qui menaçaient six agents. On leur reproche notamment de s'en être pris verbalement à des conducteurs envoyés par la SNCF durant les grèves de juin contre la réforme ferroviaire.
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>>> POLITIQUE SOCIALE
Le cofondateur de Google, avocat inattendu de la réduction du temps de
travail
Larry Page, avocat de la réduction du temps de travail ! Qui aurait cru que le cofondateur de Google, l'un des patrons les plus respectés de la Silicon Valley, prône une telle idée pour résoudre le problème du chômage ? C'est pourtant la démonstration à laquelle il s'est livré le 3 juillet lors d'un débat à l'occasion du « Khosla Venture CEO Summit ».
Vinod Khosla, fondateur du fonds d'investissement du même nom, interrogeait pour l'occasion les deux fondateurs de Google, Larry Page et Serguey Brin, sur le type d'emplois qui seront remplacés demain par des machines. M. Page a eu cette réponse étonnante: « Si vous réfléchissez vraiment à ce dont vous avez besoin pour être heureux, votre foyer, votre sécurité, saisir les bonnes opportunités pour vos enfants, les anthropologues ont identifié tout cela, il est moins difficile aujourd'hui de se procurer ces choses. La quantité de ressources, de travail, pour obtenir tout cela est vraiment réduite. Donc l'idée qu'il faille travailler frénétiquement pour satisfaire ces besoins n'est tout simplement pas vraie. Je pense que c'est un problème de ne pas reconnaître cela. »
M. Page a toutefois reconnu que « beaucoup de gens ne sont pas heureux s'ils n'ont rien à faire. On a besoin de se sentir utile, désiré, et avoir des choses productives à faire ».
« LES GENS AIMENT LEUR TRAVAIL, MAIS... »
Mais le patron de Google estime que la relation entre le travail et ce type de besoins n'est pas satisfaisante, lançant une ode à la décroissance : « C'est pourquoi nous sommes occupés à détruire l'environnement et d'autres choses, ce que nous n'avons peut-‐être pas besoin de faire », a-‐t-‐il insisté en se disant « inquiet » si nous persistions dans cette voie.
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Pour changer de paradigme, Larry Page propose de partager le travail. Une idée sur laquelle il a échangé avec le patron de Virgin, Richard Branson.
« Le Royaume-‐Uni n'a pas assez d'emplois, [Richard Branson] a essayé d'amener les gens à embaucher deux personnes en temps partiel au lieu d'un temps plein. Ainsi, au moins, les jeunes peuvent avoir un emploi à mi-‐temps plutôt que pas d'emploi du tout. Et le coût pour les employeurs est un peu plus avantageux. En élargissant cette idée, en temps de chômage de masse, on peut réduire le temps de travail. Si je demande à la plupart des gens "voudriez-‐vous une semaine de vacances de plus", 100 % lèvera la main et répondra oui. Même chose si je propose une semaine de quatre jours de travail. Les gens aiment leur travail, mais veulent aussi consacrer du temps à leur famille, développer leurs centres d'intérêt. »
Cette idée du développement personnel au détriment du travail avait été largement évoqué par l'économiste John Maynard Keynes, qui, en 1930, avait rédigé un essai, Economic Possibilities for our Grandchildren, dans lequel il expliquait : « Pour la première fois depuis sa création, l'homme se retrouve face avec son problème permanent et réel : comment utiliser sa liberté acquise au détriment des pressions des besoins économiques, comment occuper ses loisirs ? ».
Avant que la discussion ne prenne un tour trop keynésien et par certains côtés trop français, Sergei Brin s'est senti obligé d'intervenir : « Je ne pense pas que, dans le court terme, le besoin de main-‐d'œuvre va disparaître. Ce besoin se déplace d'un endroit à l'autre, mais les gens veulent toujours plus de choses, plus de divertissements, plus de créativité. » Une façon polie de dire que les 35 heures chez Google ne sont pas certainement pas pour demain.
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>>> POLITIQUE SOCIALE
La crèche Baby-‐Loup va déposer le bilan
INFO LE FIGARO -‐ La crèche qui est devenue le symbole de la laïcité devait recevoir une enveloppe de 400.000 euros de la municipalité. Mais le nouveau maire UMP de Conflans-‐Sainte-‐Honorine ne lui accordera a priori que 90.000 euros.
La crèche dont le budget annuel est de 1,2 million d'euros (financé à 80% par les institutions publiques) est à la veille du dépôt de bilan. L'ancienne municipalité de gauche avait décidé d'allouer un budget de 400.000 euros pour l'association au titre de l'année 2014. Mais le nouveau maire UMP de Conflans Sainte-‐Honorine (Yvelines), Laurent Brosse ne semble pas disposé à honorer les engagements de son prédécesseur. Diverses personnalités UMP dont Laurent Wauquiez ont été sollicitées par des proches de Baby-‐Loup pour essayer de faire bouger les choses. La Fondation de Carla Bruni a également été approchée.
Ce soir, doit se tenir une réunion entre le maire et les représentants de la crèche avant le comité municipal de lundi soir. Mais selon nos informations, le maire n'a pas l'intention de verser les 400.000 euros à Baby-‐Loup. «Le vote de lundi portera sur 90.000 euros», explique-‐t-‐il. «Entre 90.000 et 120.000 euros, ce ne sera pas possible de survivre, cela signifie que l'on se moque de nous. La somme serait ridicule, estime de son côté Natalia Baleato, la directrice de l'établissement. À moins de 300.000 euros de la part de la mairie, nous ne pourrons plus travailler». Le maire se défend en expliquant que l'engagement de son prédécesseur avait été pris dans un simple courrier adressé à la crèche et non à l'issue d'un vote du conseil municipal. «Cette promesse ne reposait donc sur rien», assure-‐t-‐il. Et de conclure: «Le combat pour la laïcité, ce n'est pas mon problème. J'ai des finances à gérer. Pour nous, la question n'est pas la laïcité mais l'équité avec les autres crèches de Conflans, notamment les crèches municipales».
LA COUR DE CASSATION AVAIT DONNE RAISON A L'ASSOCIATION Après 22 années à Chanteloup-‐les-‐Vignes (Yvelines), la crèche avait été contrainte de déménager à la fin de l'année dernière pour s'installer à sept kilomètres de là, à Conflans suite à des revendications communautaires de plus en plus pressantes. Organisation unique en France, Baby-‐Loup a été crée en 1991. L'établissement est ouvert 24 heures sur 24, sept jours sur sept. Son objectif était de créer un mode de garde permettant aux parents, surtout aux femmes seules, de travailler, et d'accueillir des enfants dont le père ou la mère travaille en horaires décalés. Le militantisme de Baby-‐Loup ne concerne donc pas la revendication de la laïcité mais l'insertion sociale. La laïcité s'est imposée pour faire coexister des cultures et des milieux différents: personnel hospitalier, salariés de la restauration et de l'hôtellerie,
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femme de ménage, pompier, gardien de prison, policier, pilote de ligne, hôtesse de l'air, médecin. Un tiers des familles sont monoparentales et deux tiers financièrement fragiles.
En juin dernier, la Cour de cassation avait mis un point final à la saga judiciaire qui durait depuis six ans. Et elle avait donné raison à Baby-‐Loup: oui, la crèche était dans son bon droit en licenciant une salariée voilée. L'Assemblée plénière de la Cour avait en effet estimé qu'une personne privée, en l'espèce une association, peut restreindre la liberté de ses salariés de manifester leurs convictions religieuses sur leur lieu de travail. Si l'histoire est devenue le symbole du combat pour la laïcité, il s'agit en réalité au départ d'un banal conflit social. Devenue directrice adjointe, Fatima Afif est absente de la crèche pendant six ans pour congé maternité puis parental. À son retour en 2008, elle fait savoir à son employeur qu'elle ne souhaite plus rester et demande une rupture conventionnelle que la crèche refuse: si elle veut partir, il lui faut démissionner. C'est à la suite de ce refus qu'elle revient travailler voilée alors qu'elle sait, puisqu'elle a participé à la rédaction du règlement intérieur, que les signes religieux sont interdits au sein de la crèche. Elle est licenciée. Les parents ont organisé un comité de défense de Baby-‐Loup.
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>>> INTERNATIONAL
On travaillera le dimanche... à Londres
D'un simple tweet, George Osborne, chancelier de l'Echiquier, s'est invité dans le débat sur le travail dominical en France. Il a affirmé que le Royaume-‐Uni allait simplifier la délivrance de visas pour les visiteurs chinois. Cette annonce inquiète les grands magasins de la capitale. "Les tour-‐opérateurs pourraient changer leurs habitudes. Généralement, les circuits des Chinois se concluent par Paris et donc par un tour dans nos magasins. Le risque, c'est que Londres prenne notre place. Les magasins y sont ouverts tous les jours", souligne un de leurs représentants, avant de préciser : "La seule solution pour que nous restions compétitifs, c'est d'ouvrir le dimanche."
Aujourd'hui, les vacanciers chinois ne peuvent pas traverser la Manche avec un visa pour l'Union européenne, car notre voisin d'outre-‐Manche n'appartient pas à l'espace Schengen. "Il y aura de nouvelles mesures qui seront bonnes pour le tourisme et pour le commerce britanniques", a justifié le ministre. Les touristes chinois disposent en effet d'un budget appréciable, entre 1 000 et 1 500 euros en moyenne par visiteur pour six jours de voyage. Les commerçants de Paris en savent quelque chose, puisque ce sont eux aujourd'hui, en Europe continentale, qui profitent de cette manne. Ils ne manquent pas aussi de rappeler qu'autoriser le travail le dimanche pourrait créer au moins 1 000 emplois. Les conclusions de Jean-‐Paul Bailly, chargé du dossier, sont attendues pour fin novembre.