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SAM Paper Series 1 (2000) Systèmes Agraires de Montagne Dynamiques agraires et différenciation des exploitations agricoles dans la commune de Xuat Hoa, province de Bac Kan, Vietnam David Sadoulet a, Jean-Christophe Castella b, Vu Hai Nam c, Dang Dinh Quang" a Direction dela CoopérationInternationale et du Développement, Ministère des Affaires Etrangères, 20 rue Monsieur, 75700 Paris 7, France b Instituî de Recherchepour le Développement, 213 rue Lafayette, 75480 Paris 10, France et Institut International de Recherchesur le Riz, Los Banos,Laguna, Phûippine: o Centre Géomatiqueet Télédéteaion, Institut National de Planificationet Projection Agricole, 61 Hong Chuoi, Hanoi Vietnam d Départementdes Systèmes Agraires, Institut National des Sciences Agronomiques, Thanh Tri,Hanoi Vietnam Résumé La commune de Xuat Hoa, dans la province montagneuse de Bac Kan, Vietnam, a fuit l'objet d'une étude diagnostic sur les dynamiques agraires passées et leur influence sur la diversité actuelle des systèmes de production agricole. Des enquêtes approfondies auprès de différents acteurs du développement local et 3EJ: iculteurs ont permis d'évaluer l'impact des transformations socio-économlques sur les modes d'exploitation du milieu. Un modèle de différenciation des exploitationsagricoles est proposé. Il est fondé sur le ratio «nombre d'actifs 1 nombre de bouches à nourrir par foyer» puis sur les modes de distribution des terres de rizières au début des années 1990. L'interprétation d'une série chronologique de photographies aériennes (de 1954, 1977 et 1998) associée à de nombreux relevés de terrain ont permis d'évaluer les conséquences des dynamiques passées sur l'environnement: état de la forêt, viabilité des systèmes de culture, etc. Enfin l'analyse des stratégies de production des différents types d'exploitations agricoles identifiés conduit à des propositions concrètes visant à guider les actions de développement. Mots clés: Systèmes agraires, Transformations sociales, Développement rural, Diversité, Différenciation, Typologies, Montagnes, BacKan, Nord Vietnam Introduction Le diagnostic est un préalable à toute intervention visant au développement d'une zone agricole donnée (Capillon, 1986, 1993; Conway, 1986; Dufumier, 1996). L'étude des dynamiques agraires permet de décrypter la diversité actuelle des stratégies développées par différents groupes d'acteurs. Les nombreuses expériences passées ont montré que l'étape du diagnostic est garante du succès de l'introduction d'innovations techniques et organisationnelles (Bal et al., 2000). L'agriculture de la province de Bac Kan est caractérisée par une forte diversité des formes d'exploitation du milieu naturel. Cette diversité se double d'une forte variabilité géographique à l'échelle de quelques kilomètres et d'une évolution tIès rapide des systèmes de production, ce qui complique le diagnostic. Dans un tel contexte, le projet SAM- Régional vise à poser les bases méthodologiques permettant de rendre compte rapidement de la diversité des systèmes de production agricole d'une zone, ainsi que de leurs dynamiques d'évolution (Castella et al. 1999). La commune de Xuat

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SAM Paper Series 1 (2000)Systèmes

Agraires deMontagne

Dynamiques agraires et différenciation des exploitations agricolesdans la commune de Xuat Hoa, province de Bac Kan, Vietnam

David Sadoulet a, Jean-Christophe Castella b, Vu Hai Nam c, Dang Dinh Quang"

a Direction dela CoopérationInternationaleet du Développement,Ministère des Affaires Etrangères,20 rue Monsieur, 75700 Paris 7,France

b Instituî de Recherchepour le Développement, 213 rue Lafayette,75480 Paris 10,France etInstitutInternational de Recherchesur le Riz, LosBanos,Laguna, Phûippine:

oCentre Géomatiqueet Télédéteaion, Institut National de Planificationet Projection Agricole,61 Hong Chuoi, Hanoi Vietnam

d Départementdes Systèmes Agraires, Institut National des Sciences Agronomiques,ThanhTri,Hanoi Vietnam

Résumé

La commune de Xuat Hoa, dans la province montagneuse de Bac Kan, Vietnam, a fuit l'objet d'une étudediagnostic sur les dynamiques agraires passées et leur influence sur la diversité actuelle des systèmes deproduction agricole. Des enquêtes approfondies auprès de différents acteurs du développement local et3EJ: iculteurs ont permis d'évaluer l'impact des transformations socio-économlques sur les modesd'exploitation du milieu.Un modèle de différenciationdes exploitationsagricoles est proposé. Il est fondé surle ratio «nombre d'actifs 1 nombre de bouches à nourrir par foyer» puis sur les modes de distribution desterres de rizières au début des années 1990. L'interprétation d'une série chronologique de photographiesaériennes (de 1954, 1977 et 1998) associée à de nombreux relevés de terrain ont permis d'évaluer lesconséquences des dynamiques passées sur l'environnement: état de la forêt, viabilité des systèmes de culture,etc. Enfin l'analyse des stratégies de production des différents types d'exploitations agricoles identifiésconduit à des propositionsconcrètesvisant à guider les actions de développement.

Mots clés: Systèmes agraires, Transformations sociales, Développement rural, Diversité, Différenciation, Typologies,Montagnes, BacKan,Nord Vietnam

Introduction

Le diagnostic est un préalable à touteintervention visant au développement d'unezone agricole donnée (Capillon, 1986,1993; Conway, 1986; Dufumier, 1996).L'étude des dynamiques agraires permet dedécrypter la diversité actuelle des stratégiesdéveloppées par différents groupesd'acteurs. Les nombreuses expériencespassées ont montré que l'étape du diagnosticest garante du succès de l'introductiond'innovations techniques etorganisationnelles (Bal et al., 2000).L'agriculture de la province de Bac Kan est

caractérisée par une forte diversité desformes d'exploitation du milieu naturel.Cette diversité se double d'une fortevariabilité géographique à l'échelle dequelques kilomètres et d'une évolution tIèsrapide des systèmes de production, ce quicomplique le diagnostic.

Dans un tel contexte, le projet SAM­Régional vise à poser les basesméthodologiques permettant de rendrecompte rapidement de la diversité dessystèmes de production agricole d'une zone,ainsi que de leurs dynamiques d'évolution(Castella et al. 1999). La commune de Xuat

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Dynamiques agraires et différenciation dans la commune de Xuat Hoa 2

Hoa est l'un des sites de recherche du projet,sélectionné avec six autres communes pourcouvrir la diversité agro-écologique et legradient d'intégration au marché observés àl'échelle de la province de Bac Kan.L'analyse comparée des résultats ob\enussur ces différents sites en 1999 et 2000 doitpermettre d'établir les relationsfonctionnelles entre échelles locales etrégionales (Castella et Dang Dinh Quang,2000). Les diagnostics tels que celuiprésenté ci.œssous visent à mieux cibler lesactions de développement en les fondant surla compréhension des dynamiques locales.Leur généralisation à l'échelle de laprovince doit permettre (i) d'évaluer lescondnons d'ext rapolation des résultats derecherche à de plus grands ensemblesgéographiques et (ii) d'accompagner ladiffusion des innovations proposées par leprojet SAM comme alternative aux pratiquesjugées non-viables.

Méthode

L'approche proposée s'appuie sur lesconcepts et théories de l'agriculturecomparée (Mazoyer et Roudart, 1997). El1econsiste à analyser les dynamiques dessystèmes de production agricole à l'interfaceentre les transformations du milieubiopl;rsique et de l'environnement socio­économique. Ce type de démarche nécessitel'intégration des différentes facettes d'uneréalité complexe; c'est pourquoi nous avonsrecours à l'approche système.

Les dynamiques spatiales ont été suIvIesgrâce à l'interprétation d'une senechrono logique de photographies aériennesdatant respectivement de 1954, 1977 et1998. Le suivi longitudinal, sur plus dequarante ans, des modes d'exploitation dumilieu renseigne sur leur fonctionnementactuel, leur extension spatiale et plusgénéralement sur la dynamique des systèmesagraires.

La commune de Xuat Hoa, a été divisée entrois zones homogènes pour faciliter letravail d'enquête en évitant les confusionsentre contextes agro -écologique et socio ­économique différents. Le travail de terrain

s'est déroulé, pour chaque site denquête, entrois phases:

1. Une phase d'enquêtes historiques auprèsde personnes ressources âgées, pourcerner les dynamiques anciennesd'exploitation du milieu

2. Une phase d'enquêtes plus précises sur ladifférenciation récente et les différencesactuelles entre systèmes de production. Al'issue de ce travail, nous avons dresséune première typologie servant de based'échantillonnage pour la dernière phase.

3. Une phase d'enquête d'exploitationsarchétypiques, représentatives de chaquecatégorie définie auparavant.

Le nombre d'enquête par phase est donnédans le Tableau 1pour chaque zone:

Tableau 1: Dispositifd'enquête

Ethnie Nombre Phase Phase Phasedominante villages 1 2 3Tay 7 5 22 29Dao 1 2 16 12Kinh 2 17 8Total 10 7 55 49

Pour des raisons de concision, les résultatsprésentés à la Partie II sont essentiellementissus de l'analyse des villages Tay. En effet,ils sont au centre des dynamiques agraires etsont largement dominant en terme depopulation: plus de 75% de la populationtotale de la commune.

Dans une première partie, nous présenteronsles dynamiques de transformation dusystème agraire. Les villages seront ensuiteétudiés sous l'angle de l'exploitationactuelle de l'écosystème cultivé. Dans ladeuxième partie, nous nous placerons àl'échelle de l'exploitation agricole. L'étudedes modes d'exploitation du milieucombinée à cel1e des dynamiques historiquesaboutira à une typologie des systèmes deproduction qui rend compte des trajectoiresindividuelles des exploitations. Enfin,l'analyse des systèmes de culture etd'élevage permettra de comprendre lacohérence des systèmes de productionidentifiés.

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3 D. Sadou/el, J.c. Castella, V.H. Nam D.D Quang / SAM Paper Series 1 (2000)

I. Evolution des modes d'exploitation du milieu et dynamique des paysagesagraires

1.1. Les quatre étapes de l'anthropisation des ba~fonds

En se basant sur des études historiques du même type, effectuées dans le delta du Fleuve Rouge ouau Laos (Devienne et Dufumier, cours INA P-G), et en utilisant les méthodes de \'Agriculturecomparée (Mazoyer et Roudart, 1997), nous faisons l'hypothèse d'une anthropisation du milieu enquatre étapes (Figure 1).

Défriche - brûlis sur les pente;On peut avancer l'hypothèse deJ'existence très ancienne (environ8000 ans avant notre ère) d'uneagriculture de défriche - brû lis,associant le riz pluvial et laculture d'ignames ou de taro,sans mise en valeur des bas­fonds

La colonisation des bas-fondsLes bas-fonds ont sans doute été coloniséspar des peuples venus de Chine au

néolithique, ancêtres des Tay actuels, et misen valeur par une riziculture de décrue. Lespentes continuent d'être exploitées endéfriche - brûlis.Le travail du sol et l'aménagement dediguettes, pour maintenir une lame d'eau pluslongtemps, a progressivement abouti à unterrassement des bas-fonds.

Maîtrise de l'eau: aménagements de terrassesAux environs du début de notre ère,l'invasion chinoise apporte la charrue.L'utilisation de cet outil a permis unecolorisation des bas de pentes, aménagés enterrasses, car la semelle de labour limite lespertes d'eau par lessivage dans les sols de bas

de pente, qui sont plus grossiers.Dans ce systéme, la productivité du travaildans les rizières a augmenté du fait dupassage à la traction attelée. 11 y a donc euconcentration de la force de travail dans lesrizières et régression des cultures de brû lis.

Irrigation: extension des rizièresLa dernière étape, difficile à dater, est la miseen oeuvre d'une irrigation par gravité, à partirde la rivière. Cela a permis une augmentationdes surfaces, une meilleure maîtrise de l'eauet donc des rendements plus stables et plusélevés.

Figure J : Dynamiques des modesd'exploitation du milieu ettransformation de l'écosystèmecultivé

Zone inondable ~ Systèmes de culture.. non mise en ,.. manuelle de défricbe - brûlis

valeur (riz pluvial, igname et taro)

1 : Systèmes de culture~iz de dém.:. manuelle de défriche brûlis

(riz pluvial, igname et taro)

.... ·1·····

1. •

• Riz de • •lM- décrue~ Riz inondé -..... Forêt -

• •

Cultures de défriche - brûlis(l., I~

r ./

\ / :ulture attelée,

1• •• Riz •.14 ~ Forêt: inondé :

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Dynamiques agraires et différenciation dans la commWle de Xuat Hoa 4

L'extension progressive des rizières a lieu àpeu près à la même époque que l'installationdes populations d'ethnie Dao, qui émigrentdepuis la Chine à partir du 17° siècle(Gourou, 1935). Elles s'installent en hautdes pentes. Le niveau d'aménagementhydraulique de la quatrième étape est celuique l'on trouve au milieu de ce siècle à XuatHoa. Le système agraire correspondant estdécrit au point suivant.

Malgré l'imprécision de ces hypothèses, ilest important de souligner deux points quisemblent acquis:• Le milieu de la commune de Xuat Hoa est

exploité par l'homme depuis plusieurssiècles. Le paysage qu'on pouvait observerau sortir de la seconde guerre mondiale estdonc un paysage modelé par l'homme.

• Les modes d'exploitation successifs sontcaractérisés par leur faible rémunérationdu travail et surtout l'incertitude pesant surles rendements. Dans ce milieu oùprémminait la forêt, la collecte de produitsfurestiers comestibles (ignames sauvages,pousses de bambou, chasse) semble avoirjoué un rôle essentiel.

1.2. Au milieu du ÀXe siècle: unsystème agraire dual

Le mode d'exploitation observé au milieu dusiècle se caractérise par une exploitationétagée de l'écosystème: bas-fonds etvelSants, où des systèmes de culturedifférents sont pratiqués par les groupesethniques Tay et Dao.

Une exploitation étagée de l'écosystèmeLe système de culture rizicole, dans les bas­fonds, peut être caractérisé comme suit:• Monoculture, à un cycle annuel suivit

d'une jachère pâturée de 3 mois, pratiquedu repiquage,

• Travail du sol à la charrue, tractionanimale (buffles),

• Reproduction de la fertilité par les eaux deruissellement et transfert, limité, par lesbuffles depuis les pentes,

• Maîtrise de l'eau plus ou momssatisfaisante suivant les rizières.

Sur les pentes on observe deux types desystèmes de culture:• Système de culture à utilisation courte du

champ défriché. Ils sont pratiqués par lesagriculteurs « nomades». Il s'agit de

monocultures de maïs et de riz pendantdeux à trois ans.

• Système de culture à utilisation longue desparcelles défrichées. En général après deuxà trois années de céréales, la fertilitérésiduelle est «captée» par un cycle demanioc pluriamuel.

Pour ces deux systèmes, l'outillage estmanuel. Le temps de travail qui doit êtreconsacré au désherbage limite l'étendue dessurfaces de ces systèmes de culture. Lafertilité est reconstituée par une jachèrearborée de longue durée (15-30 ans).

La Figure 2 présente l'exploitation desdifférentes unités de paysage et leurcomplémertarité.

Deux principaux systèmes de productionDu fait d'un accès inégal aux différentsétages de l'écosystème, les deux groupesethniques Tay et Dao ont œveloppé dessystèmes de production dissemblables.L'impact sur les paysages de ces deuxmodes d'exploitation du milieu estnettement visible sur la carte d'utilisationdes sols de 1954 (Figure 3).

Le système de production sédentaire (Tay)Dans la partie Ouest de la commune,l'agriculture s'organise autour des bas fondsrizicoles. Elle combine l'exploitation du basdes pentes en culture manuelle avec celledes rizières en culture attelée légère.L'emprise de ces systèmes Tay sur la forêtreste très lim itée.

Le système de production itinérant (Dao)Au contraire, l'impact des systèmes Dao esttrès marqué dans la partie Est de lacommune. Les familles sont regroupées enpetits hameaux autour des terres quellesexploitent. La proximité des champs permetune surveillance efficace contre les animauxsauvages. Les zones d'habitation sontdéplacées, en général tous les trois ansquand les brûlis deviennent moinsproductifs, laissant derrière elles desjachères arbustives.

Au moment de la seconde guerre mondiale,ce système nomade est en crise du fait del'augmentation de la population (15habt./km2 alors qu'il est considéré commeviable pour des densités de 4habt.lkm2

) etdes lourds prélèvements imposés par lesystème colonial (piquet et Puvilland, 1992 ;Mazoyer et Roudart, 1997).

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D. Sado-ule/, J.e. Cas/el/a, v.H. Nam, D.n Quang / SAM Paper Series 1 (2000)

Habitation

Jardin -vergersElevage (volailles porcins, buJJ1es)

Buffles: traction attelée,Transfen de ftrli/iJé

''-

\.•

Espace exploité par lessystèmes de production

"nom_des" Dao.

Systèmes de cultures à utilisation courie du sol: riz el maiSHabitat proche des parcelles de riz pluvial

Chasse, cueillette en forêt.._.. - .. - .. _.__ .. _ .. -Systèmes de culture de défriche / brûlis:

riz maiS el maJJioc

Espace exploité par lessystèmes de production

sédentaires Tay

Riz d'été / Jachère pâturée d'hiverReproduction de la fertilité:

AlluvionnementStabulation nocturne d'hiver des buffles sur les riZières

Figure 2: Un système agraire dual fondè sur l'exploitation de deux unités de paysages distinctespar les deux groupes ethniques Tay et Dao.

Légende

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AJ:hcs utilisations

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Source: !nte rélation de photogra hies aériames 1954

Figure 3: Carte d'occupation des sols de la commune de Xuat Hoa en 1954

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Dynamiques agraires el différenciation dans la commune de Xual Hoa 6

1.3 Les coopératives agricoles

La période des coopératives a été le cadred'une modification importante du moded'exploitation de l'espace et des rapportssociaux.

Entre 1958 et 1962, le village Dao de TanCu est créé sous l'impulsion du programmenational de sédentarisation des ethniesminoritaires. S'y regroupent des famillesdescendues des versants alentours quipouvaient ainsi être mieux contrôlées par lesautorités locales et participer auxcoopératives qui venaient d'être créées. Cesfamilles dont la pratique traditionnelle étaitl'abattis-brûlis, se sont alors converties à lariziculture intensive dans les valléesirriguées. L'accès de h communauté Daoaux différents étages de l'écosystème estalors identique à celui des Tay, avectoutefois l'attribution de surfaces de rizièresplus réduites pour les Dao.

La transition vers la propriété collective debiens de production semble s'être faite endouceur.• Entre 1958 et 1960 on assiste à une

généralisation des pratiques d'entraide déjàtrès répandues auparavant Le travail encommun permettait d'optimiserl'utilisation de la main d'œuvre lors despointes de travail, et donc d'étendre lessurfàces cultivables, en particulier sur lespentes;

• Le contexte historique de la périoded'après-guerre de libération et lapropagande de cette époque ont sans doutefacilité le processus;

• Le jeu social au niveau local a renforcé lasolidarité pour l'accès à l'eau d'irrigationet la gestion des systèmes irrigués.

Par la modification radicale des rapports deproduction, la collectivisation a permis unerévolution agricole avec dans un premiertemps le passage à deux cycles de riz par an(1962). Les innovations de la RévolutionVerte (cf. encadré) ont été introduites dansun second temps (1967). L'activité agricolecoopérative s'est donc organisée autour desbas-fonds alors que la production privée seconcentrait sur les pentes: riz pluvial pourles familles non autosuffisantes, maïs etmanioc pour alimenter un élevage porcinprivé (Figure 4).

La Révolution Verte: modification dessystèmes de culture du riz

Deux cycles de riz :• augmentation des exportations en

éléments minéraux, donc besoins defertilisation orgflDique;

• modification des systèmes d'élevage etparcage de nuit ;

• nécessité d'un outil d'enfouissement(charrue chinoise) ;

• irrigation nécessaire => limite de cettedouble culture, peu d'investissementsdans cette période;

Dans un second temps:Changement de variétés pour des riz àhauts rendements (HYPV), à cycle pluscourt, plus exigeants en fertilisation etplus fragiles. Chimisation progressive dela protection phytosalÎtaire.

Le système de gestion de la coopérative s'estprogressivement bureaucratisé perdant enflexibilité. La croiss ance démographique aaussi contribué à la diminution de la valeurdu point de travail. L'activité coopérative neparvenait plus à couvrir les besoinsessentiels des familles, même avec unappoint de produits forestiers. Lescoopératives ont alors exploité les pentesouvrant le paysage autour des plainesrizicoles par de larges parcelles de brûlis(zone Ouest de la Figure 5). Les jachèreslongues permettaient néanmoins larégénération forestière.

Assez rapidement, les agriculteurs ontpartagé leur temps entre un travailcoopératif, le matin et l'après-midi, et untravail privé de collecte en forêt et decultures de brûlis, à midi et le soir, parfois lematin avant le travail en commun. Lesdéplacements étaient assez nomireux; aumoins quatre aller-retours par jour. Comptetenu du relief, ils limitaient la zoneexploitable autour du village en cultures debrûlis. Cela a eu pour conséquence uneimportante régénération forestière dans leszones éloignées de la coopérative. A la findes années 70, le co uvert forestier étaitdense et âgé dans la partie Est de lacommune (Figure 5).

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7 D. Sadoule/, Je. Cas/el/a, V.N. Nam, D.D Quang 1SAM PaperSeries 1 (2000)

'_1)

~mier ;

Inlrants cbimiques

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'-,-_..... -

Sédentarisation des Daodans certains bas-fonds:

Disparilion del'étagement «etbnique»

Forêt:

Sys/èmes de culture de dèfriche 1 br/His

Coliede (bois, produils non-ligneux, e/c.), chasse

Sou:rulilisa1ion des terres éloignées etreconstituJion d'un couvert arboré climacique.

Habi/afionJardin - vergers

________.. Elevage (vo!ailles, po.rc}.~s, bujJles)_ .. .. .

Riz d'é/é 1Jachère pâturée d'hiver

'pas de ferti-'j~alj~

Riz de printemps! Riz d'idé 1Jachère pâlurée d'hiverProgressivement, mise en œuvre des tecbniques de la Révolution verte:• Fertilisation (engrais minéraux, engrais verts, fumier), variétés à

baut potentiel de rendemeo1, insecticides et pesticides.

Figure 4: Exploitation de l 'écosystéme cultivé à l'époqr-e des coopératives (1962 -1982)

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1

~ : Interprétation de photographies aéri61J1es 1977

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Légende

Cl Rizi~es de b... rondso RLiérc:s en tOl"aS$CS

D CulUJ.res~-urpcn~

Cl Fo~ scoondaire

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Cl Forêt d. borobou.

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Cl Autresutilismioll8

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Figure 5: Carte d'occupation des sols de la commune de Xuat Hoa en 1977

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Dynamiques agraires et différenciation dans la commune de Xuat Hoa 8

1.4. La libéralisation progressive desannées 1980 -1995

Vers la fin des années 70, on assiste à unefragilisation du cadre disciplinaire, face àl'aggravation des problèmes alimentaires, età la tension de plus en plus vive avec laChine voisine, qui aboutit à la guerre en1979. Le nombre de brûlis privés sur lespentes se multiplie, démontrant à tous laforte productivité de ses surfaces.

A partir de 1982, une série de réformes dusystème coopératif ont abouti à sondémantèlement progressif (Tableau 2). Lesaspects essentiels de ce processus delibéralisation de l'agriculture, sont présentésci·dessous:

• Les modifications profondes des règlescollectives de fonctionnement du secteuragricoles semblent issues de rapports deforce locaux. Elles entérinent généralementdes pratiques déjà largement développées.Les décisions stratégiques et les règlesadministratives édictées au niveau nationalet régional semblent avoir étésystématiquement réinterprétées localementet assez sowent contournées. L'exemple leplus spectaculaire est l'application en 1986dans la commune d'un système privé, avec

propriété collective de la terre. Ce systèmen'apparaît pas dans les autres étudeseffectuées dans la région et est très prochedu Contrat 10, réforme agricole lancée par legouvernement central en 1988.

• L'exploitation de l'écosystème s'estprogressivement intensifiée, en trois étapes:1. Maximisation de la productivité par unité

de main d'œuvre: expansion très rapidedes brûlis avec abandon rapide despll"celles lorsque la productivitédiminuait La disponibilité en terres depentes semblait inépuis able;

2. Avec l'épuisement des surfacesdéfrichables vers 1986, passage à dessystèmes visant une augmentation de laproductivité de la terre: passage à deuxcycles, utilisation d'intrants sur lesrizières et augmentation du cheptel(fumure);

3. A partir de 1990, la sécurité foncière surles rizières, puis sur les pentes, favorised'une part l'investissement en maind'œuvre et une augmentation rapide de laproduction et d'autre part lesinvestissement à moyen et long terme(Figure 6).

Tableau 2 : Réformes politiques et dynamiques agraires à Xuat Hoa

Dates Modification des règles Conséquence à court terme Impact écologiqued'organisation sur l'agriculture

1982 - Privatisation de l'activité de - Exploitation minière des - Disparition rapide de la foret

Contratproduction, mais prélèvements pentes par les brûlis âgée

100forfaitaires (quotas) - Erosion- Privatisation des bumes - Augmentation progressive du - Inondations catastrophiques

cheptel (buffles 1bovins) en 1986 et 19961986 - Privatisation des fruits du - Réduction des surfaces de - Limites géographiques de la

Contrattravail (le foncier reste brillis, fm du riz pluvial foret exploitable sont atteintescollectif) - Passage à deux cycles partout - Limité par les disponibilité

ajusté où l'irrigation le pennet en eau et les ouvragescollectifs

1990 - Ré-appropriation des rizières Augmentation de Buffles dans la foret causent

Contrat 10des ancêtres par les Tays l'investissement en temps et des dégâts sur brûlis =>Nombreux laissés-pour- en capital dans les bas-fonds conflits, dégradent la foret etcompte de la distribution des (rizières, jardins, etc.) sont un obstacle aurizières Migrations vers le sud du pays développement des cultures

Brûlis avec jachères courtes pérennes1994 - Allocation progressive des - Investissements importants - Relative régénération du

Allocationterres de pentes (en fonction dans les plantations (vergers), couvert forestier.

des terresdes brûlis ouverts durant les - Diversification agricole -Problèmes de protection

de pentes périodes précédentes) • Motorisation et capitalisation phytosanitaire liés àimportante en rizières l'intensification des rizières

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9 D. SadouJet, J.c. Castella, v.H. Nam, D.D Quang / SAM Paper Series 1 (2000)

2 t....- cycles--Hcycle

"Intrants cbimiques

\ , ...-.Cll/lures de brûlis sur foril dégradée

Maïs 3 ans 1 fric be 6 ansManioc 2 x 3 ans 1 fricbe 6 ans

Plantation d'abricotiers

Intensification par l'élevage porcin (maïs, manioc)

Habitation

Jardin - vergers

E/evage(vo/ai//es, porcins. bufJ/es)

IntensificationSurfaces par actif trés variables

Investissement en capital: intraots el travail (fertilisation organique, désberbages .. )Motorisation de la traction, mécanisation de la récolte

Figure 6: Exploitation actuelle de l'écosystème cultivé à Xual Hoa

=-=-=~Km

Légende

c::J Rlzià'a> de b<6- foods

DRizi~c.:senl~

o CullUIt'Ssurpentcs

o Fo<ct socondaire

o Forêt dégnldée

o Forêt de bambous

o Fo<ct jrone

o Bo;s, arbres épars

Flichesarbuwcs

Figure 7: Carte d'occupation des sols de la commune de Xuat Hoa en 1998

o ~lumges

_ Rivi~cs

o Aa"""atilisatioll.'

Zona; rœ:identielleso M07JtÏques

(MIll. 1jachères)

Cound'cau

RoUl<::1:l

_. ümitcs commune

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Dynamiques agraires el différenciation dans la commune de Xual Hoa 10

Face aux changements rapides des règlesd'organisation collective, les agriculteurs ontdonc développé des modes d'exploitation dumilieu qui répondaient aux contextesspécifiques à chaque période. Ces dernierspeuvent être caractérisés par la rentabilitérelative des différentes productions, lecapital disponible, les connaissancestechniques, les règles locales, etc..

L'impact sur "environnement desdynamiques agraires qui en découle estconsidérable. Ainsi, l'exploitation minièredes pentes de 1982 à 1986 a presque épuiséle « capital forêt» de la commune(Figure 7). Les grands arbres ont été coupéspour être vendus (souvent transportés par lescamions militaires en garnison dans la zoneau sortir du conflit avec la Chine) ou stockéspour reconstruire les maisons (on observeune vague de rénovation de l'habitat en boisà cette période). Cette pratique a contribué àretarder la régénération forestière.

Ces évolutions des modes d'exploitation dumilieu se sont accompagnées d'une intensedifférenciation des systèmes de production(voir Partie II), qui a aujourd'hui desconséquences sur l'accès des familles auxdifférentes unités de paysage.

1.5. Les modes d'exploitation (J(;tuelsdu milieu (Figure 6)

• Les bas-fonds sont encore exclusivementcultivés en riz. Le mode d'exploitation s'estintensifié en travail (désherbage et

fertilis arion organique soignés) et, plussensiblement encore, en capital (quantitéd'intrants, motorisation pour certainsexploitants). Les su rfaces cukivées deuxsaisons par an sont limitées par lesdisponibilités en eau sur le territoire de lacommune.

• Le bas des pentes est encore exploité demanière traditionnelle Gardins, vergers).

• Les pentes connaissent une exploitationde plus en plus intensive et, peut-être,durable. L'exploitation minière de forêtsdégrooées fait aujourd'hui place à desplantations pérennes. Plusieurs programmes

gouvernementaux de replantation forestièrese sont succédés à "échelle de la provincedepuis le début des années 1990. Cependant,ils n'ont été mis en œuvre dans la communede Xuat Hoa qu'en 1998 grâce au

Programme Alimentaire Mondial. L'intérêtdes paysans pour ce programme est double:(i) ils obtiennent le droit de défricher des

recrus forestiers théoriquement interdits à laculture, car l'objectif final est lareforestation, (ii) sur ces parcelles ilspratiquent quelques cycles de culturesannuelles avant que le couvert arboré ne soittrop dense, (iii) ils reçoivent pendant lestrois premiéres années des sIDventionsi rnportantes puis ont des perspect ives derevenu différé lié à l'exploitation des arbres.Les plantations de manglieta se sontrapidement développées entre 1998 et 2000pour atteindre une surface de 2.000 haenviron (Figure 8).

Source: Dé alternent de l'a ricu1ture el du dévelo ement rural de Bac Kan

Figure 8 : Surfaces plantées en manglietadans le cadre du programme PAM entre1998 et 2000

1.6. Conclusion

On peut interpréter la dynamique historiquedes systèmes agraires exposée ici comme lasuccession de quatre modes d'exploitationdu milieu (Figure 9 et Encadré 1),correspondant à trois étapes dans l'évolutiondu système agraire (Figure 10).

A Avant l'indépendance, un moded'exploitation peu intensif del'écosystème: rizières à un cycle avec unedensité de repiquage faible, systèmes deculture de défriche - brûlis à jachèrelongue sur les pentes. Le système agraire

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Il D. Sadou/et, J.C. Castel/a, v.H. Nan~ D.n Quang / SAM Paper Series 1 (2000)

est caractérisé par l'accès privilégié dugroupe ethniqu e Tay aux bas-fonds.

B. Pendant les coopératives, le moded'exploitation est celui de la révolutionverte dans les bas-fonds, mais resteinchangé sur les pentes. Le système agraireest caractérisé par un sous-emploi desressources en regard des capacités dumilieu et de la main d'œuvre disponible.On observe une relative régénérationforestière dans la zone Est de la commune(Figure 7).

C. Or, comme la population s'accroît, laproduction agricole par habitant devientinsulTisante, alors même que le milieu setrouve sous-exploité. Les ressourcesnaturelles sont préservées mais « les gensont faim! ». Cela crée une situationd'instabilité qui se manifeste par un retourbrutal à une adéquation entre exploitationdu milieu et population: c'est la «courseaux brûlis ». En quelques années la quasitotalité des terres de pentes est déforestée.Il s'agit d'Un mode d'exploitationtransitoire que l'on observe au début desannées 80, toujours avec une sous­exploitation des rizières.

D. Progressivement, on assiste àl'émergence d'un nouveau moded'exploitation durable, caractérisé parl'intensification et la pérennisation dessystèmes de culture de pentes figure 6).Toutes les familles ne peuvent toutefois

pas mettre en oeuvre ce moded'exploitation à forte capitalis ..ion.

Ce processus d'intensification est passé par:• la modification des modes d'exploitation

des bas fonds (révolution verte, niveaud'outillage, motorisation)

• l'intensification de l'exploitation despentes avec le passage à des systèmes decultures permanentes agro-forestières et ledéveloppement de l'élevage demonogastriques.

Sur le long terme, on observe donc une netteaugmentation de la productivité par!ravai lieur en même temps que la diminutionde la surface par travailleur.

On observe par ailleurs une forte tendance àl'individualisation des modes d'exploitationdu milieu en fonction des moyens dontdispose chaque famille. Ces tendanceslourdes: individualisation, captation demannes (forêts, projets gouvernementaux,etc.), réinterprétation locale des politiquesjouent sur les modes de mise en valeur dumilieu et par conséquent sur la partition del'espace. Elles ne sont pas encore visiblessur la Figure 7, mais elles marquent déjà lepaysage.

La division de l'espace est de plus en plusmarquée à mesure que les écarts socio­économiques se creusent entre catégoriessociales. Ces phénomènes de clivage et dedifférenciation entre catégories sociales sontétudiés dans la Partie II.

année 1950 1960 1970 1980 1990 2000

Système agrairecollectiviste

Bas-fonds / bas de pentes collectifsVersants: brûlis privés

90 - actuelRetour terres

ancêtres

Agriculturefamiliale

Diversification\ Agroforesterie

\ .........,',.@-'.....~

\ ..86 - 901Contrat l"ajustè" !

82 - 86Contrat

100

67 - 82Coopératives

regroupées

Système agrairepré - indépendance

Système dualTay- Dao

Principales ,.... .l ''-., -'-/ ... '-,périodes ! 54 -58 r 58 - 60') 60 - 67

Régies sociales IIndépendance! Entraide j Coopéraliveset politiques ! !!villageoises

~ ! i

CJ Transitions entre systèmes agraires 1

Figure 9: Chronologie des systèmes agraires

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Dynamiques agraires el dijJérellcialioll dallS la commune de Xual Hoa 12

\

Augmentation friches

Aménagement de rizièrCll

SaVaJU811Lion ~ pâturages

f!Klcnsion dUriche - brtlLis

Inchangé

----Km.J ~,

R6généralion forc3uère

II. Dégradation couvert forestier

1977-1998

Changement d'occupation des sols

...,\

,1

.,....

\1, .

1998

f

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1 1977( ,.-: ....

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1

Occupation des sols

....<; 1954

./c:\i·

Source: Photographies aériames 1954,1977,1998

Figure 10: Carte des changements d'occupation des sols de la commune deXuat Hoa

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13 D. Sadoulet, J.C. Castella, VOY. Nam, D.D Quang / SAMPaper Series 1 (2000)

Les graphes ci-contres sont produits à partir de l'analyse SIG des figures 3, 5 et 7 présentées ci dessus.

199819771954

Evolution des surfaces de iuêts';'5.---------------....,..cl

g 4C!E,3~ 2:l~ 1

fi) 0

Une intense déforestationLe graphe 1 montre l'ampleur de ladéforestation. En 1998 il ne reste plus que15% des surfaces de forêt présentes en1954, soit 12% de la surface totale de lacommune. Ces chiffres agrégés cachentcependant des disparités en terme de qualitédes couverts forestier. La réduction enquantité s'est accompagnée d'unedégradation en qualité avec la disparitiontotale de la forêt secondaire pour faire placeà des formations dégr adées (graphe 3).

600......---------------,

Evolution des surfaces de culturesde pentes

199819771954

300 f---.---­2OOt---­

100

o

,....cS 500 ---.------

~ 400 ---...:l..=fi)

La pratique de la défriche - brûlismise en cause...L'histoire agraire de la commune de XuatHoa montre que ce phénomène à plusieursorigines (pratiques de la défriche - brOlis,abatage de bois précieux, etc.) selon lespériodes considérées et les zonesgéographiques. L'augmentation dessurfaces de brûlis au cours des 40 dernièresannées a joué un rôle indéniable sur ladéforestation.

Evolution des surfaces de frichesRéduction des périodes de jachèreOn constate sur le graphe 3 que l'impactdes brûlis sur l'état de la forêt est bien plusmarqué pendant la période 77-98 quedurant la précédente. La croissance dessurfaces de friches proportionnellementplus importante que celles déforestéestémoigne d'une réduction des périodes dejachère. La forêt n'a plus le temps de serégénérer... 1954 1977 1998

Surface moyenne des parceUesde brûlis

199819771954

,.... 3.5..------------------,cS 3.0 ------~ 2.5 ------.f 2.0 +------,~ 1.5

fi) 1.0

0.50.0

La tragédie des communs...Les calculs réalisés sur les surfacesmoymnes de brOlis repérés sur lesphotographies aériennes montrent uneaugmentation ÏI1Jortante de la taille desparcelles à la période co lIectiviste. Lesbrûlis sont gérés collectivement dans lazone proche de la coopérative permettantune régénération progressive en auréoles(Figure 5). La «course aux brûlis » de lapériode suivante, conjuguée à des densitésde population bien supérieures à celles desannées 50 conduisent à l'épuisement de laressource forestière.

Encadré! : Transitions agraires et dynamiques écologiques

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Dynamiques agraires et différenciation dans la commune de Xuat Hoa

II. Processus de différenciation des exploitations agricoles et diversité dessystèmes de production actuels.

14

2.1. Introduction: une société depuislongtemps inégalitaire

A l'aube des transformations de la décennie1980, on observe assez peu de différencesentre systèmes de production, sans doutebien moindre qu'à la mise en place dusystème coopératif. Nous avons décidé ici denégliger ces différences. Cette hypothèse,bien que difficilement démontlable, nous asemblé réaliste et a été validée à plusieursreprises par les paysans enquêtés à Xuat Hoa(Sadoulet, 1999). Son corollaire est quel'accroissement des inégalités depuis la findes coopératives est bien supérieur auxdifférences sociales qui pouvaient existerdurant la période collectiviste.

2.2. Les moteurs de la différenciationdans les années 80

Les différences sociales que l'on peutobserver actuellement sont apparues, oupour certaines réapparues, depuis le débutdes années 80, on peut regrouper les moteursde la différenciation selon trois catégories:

• L'inéquité du système «forfaitaire» misen place en 1982 (contrat 100),

• L'accaparement de rentes, nées del'exploitation minière de la forêt et decertaines nouvelles adivités,

• L'appropriation du foncier des bas-fonds,réapparition d'inégalités anciennes

Le Contrat 100 : perversité d'un système quisemblait pourtant équjtableLe Contrat 100 a marqué la mise en placed'un nouveau système de répartition desterres de bas-fond et de redistribution desfruits du travail sur les rizières:• Attribution des surfaces de rizière au

prorata du nombre de bouches à nourrirpar famille, pour garantir unapprovisionnement alimentaire suffisant;

• Prélèvement d'un rendement objectifdestiné à payer les intrants et à rémunérerle travail coopératif;

• Rémunération du travail sur les rizières, etdes autres travaux coopératifs (irrigation,soins au cheptel, etc.), en comptabilisantles points de travail.

Ce système semblait simple et équitable. Lesfamilles ayant beaucoup de bouches à

nourrir avaient la possibilité d'obtenir unsurplus de riz plus important. En réalité,c'est exactement l'inverse qui s'est produit:

• La très forte productivité du travail dedéfriche-brûlis n'a pas incité les familles àinvestir du temps de travail pour soignerleurs rizières. Les rendements objectifs ontdonc été tout juste atteints.

• Les familles disposant de peu d'actifsrelativement au nombre de bouches ànourrir ont eu à cultiver des surfaces derizière par actif importantes. Elles ont doncsouvent aboutit à des rendementsmédiocres.

• La sous-évaluation du temps de travail surles rizières a eu pour effet un transfert desfruits du travail des ces familles«défavorisées» par leur compositiondémographique, vers des familles ayantsuffisamment de main d'œuvre pours'occuper des autres tâches de lacoopérative.

• Compte tenu du manque de temps pourtravailler les rilières, ces famillesdéfawrisées n'ont pas pu cultiver debrûlis, pourtant beaucoup plus rentables àcette période.

Ainsi, pendant deux ou trois ans, certainesfamilles ont été peu rémunérées pour untravail obligatoire. Elles ont finalementassuré, à leurs dépends, la sécurité del'approvisionnement en riz pour lacommunauté.

Une agriculture d'accaparement des rentesEntre 1982 et 1995, certains exploitants ontbénéficié de surplus de revenus, que l'onpeut assimiler à des rentes différentielles:• Surplus de rendement sur les pentes entre

1982 et 1986. La ressource a étérapidement épuisée compte tenu de lapopulation qui l'exploitait en systèmes deculture de défriche-brûlis (riz, mais,manioc, taro),

• Exploitation du bois précieux entre 1982 et1990, pour les familles ayant de la maind'œuvre,

• Supplément de rémunération, au début desannées 90, pour les exploitations ayantplanté dès cette époque (années 80) desabriwtiers,

• A un degré moindre, l'accaparement parcertains de terres de pente encore à haut

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15 D. SadouJet, J.C. Castella, v.n. Nam, D.n Quang / SAMPaper Series 1 (2000)

potentiel de productivité, permettant parexemple de cultiver du Taro.

A partir de 1990. l'accès inégal au foncier età la propriété privéeEn 1990, on assiste à un mouvementspontané de réappropriation des terres derizières collectivisées en 1960. Cetteredistribution est très inégalitaire. Ellereprend les inégalités du système qui avaitprécédé l'indépendance.

Sur les pentes, la règle de concession desterres pour de longues durées aux famillesest mise en oeuvre à partir de 1994. Lesfamilles ont ainsi obtenu des titres fonciersstables. Toutefois, les règles localesd'attribution de la terre, dérivées du droitd'usage traditionnel, se sont limitées àaccorder aux familles les surfaces qu'ellesavaient déjà exploitées auparavant, ycompris les jachères. Ainsi, la redistribution

des terres de pente n'a fait qu'entériner lesinégalités entre familles crées entre 1982 et1986 selon leur accès au défrichement

Conclusion: arbre de différenciation etaccès aux moyens de productionCette évolution des différences sociales estreprésentée à la Figure 10. En effet, on peutproposer un modèle conceptuel de ceprocessus historique en expliquant ladifférenciation sociale depuis le début desannées 80 par les deux facteurs suivants:• L'abondance relative de main d'œuvre par

rapport au nombre de bouches à nourrirdans les années 80, principalement entre1982 et 1986,

• La surface de rizière héritée des ancêtresau début des années 1990.

19821 1

19861

19901 1

1994 années1 1.

4

Capitalisation

...,1

TYPEF

TYPEB

Marcbandisa1ioD dm: rizjm Il..

TYPE 0

rs.;;;:~;;;;;-l__--.....TYPEE

Ré appropriationrizières des

.. ancêtres

.----------,'-------""""'~TypEA

plantation précoce d'abricotiers=> profrte de courn éleyés

4 Défriche - brûlis aExploitation de bois précieux

TYPE A : Combinaison de surface de rizières et arboriculture mportantes. Peu de cultures annueUes de brûlis.TYPE B : Surfaces de rizières moyennes, productions à rentabilitè très différée sur les pentes (arboricuhure)TYPE C : Surface de riziéres importantes, capita1isation progressive et plantalion d'arbres, évo lution vers TYPE ATYPE 0: Manque de riz important. Productions de veute à rentabilité différée sur les peutes (élevage de porcs, manioc)TYPE E: Surface de rizières moyennes, productions sur les peutes à rentabilité peu différée (manioc, taro)TYPEF : Peu de rizières, peu de capital. Travail à l'exlérieur, endettement.

Figure Il : Processus de différenciation des systèmes de production et typologie actuelle

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Dynamiques agraires et différenciation dans la commWle de Xuat Hoa 16

2.3. Les systèmes de production: unecohérence technique enfonction desmoyens deproduction disponibles

Il s'agit ici de mettre en évidence les lien sentre les systèmes de production présentésci.dessus et les systèmes de culture qui lescomposent. La rentabilité relative de cesderniers est là encore une variable clé.

La diversité des systèmes techniques mis enoeuvre (systèmes de culture et d'élevage)L'activité agricole à Xuat Hoa peut êtredécrite de manière simplifiée en ayantrecours à une fragmentation desexploitations agricoles en « ateliers »,définis comme une combinaison de systèmesde culture et d'élevages possédant unecohérence interne. Par exemple, uneexploitation cultivant du riz dans les bas­fonds, du maïs et des abricotiers sur lespentes et pratiquant un élevage de porcs etde bumes (utilisés pour le travail desrizières) pourra être ramené à trois atdiers :(i) systèmes de production du rizcomprenant la culture du riz et l'élevage desbuffles, ces deux activités étantindissociables; (ii) système de production deporcs comprenant la culture du maïs utiliséepour alimenter l'élevage de porcin; (iii)système de production d'abricot, réduit ausystème de culture de l'abricotier.

On trouve trois principaux types d'ateliersassociés au riz :• culture attelée du riz associée à l'élevage

de bumes par la famille,

• culture motorisée du riz, associée à uneactivité de travail à façon de rizières chezd'autres exploitants,

• culture manuelle du riz, en faisant appel àun autre exploitant pour le travail du sol.

Sur les pentes, les principaux systèmesobservés sont:• la culture de maïs pour la vente,

• la culture du maïs pour l'engraissementdes porcs, associé dans la ration à desquantités plus ou moins importantesd'aliments concentrés achetés,

• la culture de l'abricotier, généralementplanté sur des brûlis cultivés dans unpremier temps en maïs,

• la plantation de manglietia, subventionnéepar le Programme Alimentaire Mondial.

Le Tableau 3 présente la rentabilité desdifférents ateliers observés dans la communede Xuat Hoa. Il permet de comprendre lescombinaisons de production développées parles agriculteurs.

Tableau 3 : Rentabilité relative des ateliers (en milliers de Dongs)

Rentabilité Besoins en capital Besoins en travailrevenu 1jour rémunération Fond de Investissement Surface Pointe(s) de

de travail moyenne 1 roulement par initial (capital maximale par travail1000 m'en 1000 m' minimal mis en actif(m')

Ateliers culture cultivé œuvre)riz + buffle 20 1.700 250 1.500 1.200 marsriz + 21 2.100 250 1.000 1.200

etmotoculteurriz (travail à 15 1.300 600 7.000 2.000 juin - jui11etfaçon)maïs vente 13 120 négligeable négligeable 2.500maïs + porcs 19 2.300 120 négligeable 1.500 juilletmaïs + porcs 23 1.140 450 négligeable 2.000avec conceltréabricotier 150 900 négligeable négligeable 6.000 mars - avrilmanglietia 220 48 négligeable négligeab le > 10.000 aucun(PAM)

.I:i!!.: 1000 VND = 0,5 FF = 0,9 USD

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17

6,000

5,000

ê~ 4,000Cl

~Clc 3,000:::s.c..caa-

IS 2,000;:1

f!'CDC:::sE 1,000'CDl!:

D. SadouJet, J.C. Castella, v.H. Nam, D.n Quang / SAM Paper Series 1 (2000)

.Taro-

 Mais + porc Intensif en travail

 Riz 2cycles

... "~7~ .n"~t Riz 1 cycle_Abricot

Mais Manglieta (PAM)Manoc ~-o 50,000 100,000 150,000 200,000 250,000 300,000

Rémunération moyenne par Jour de travail en VN dongs

Fiflure 12: Rémunération du temps de travail et rémunération à l'unité de surface des différentssystèmes élémentaires de production (J bung = 1.000 m2)

Rentabilité des ateliers de productionLa Figure 12 compare les rentabilitésmarginales de ces différents ateliersrapportés à la surface cultivée et larémunération moyenne par jour de travail.Pour les cultures de pœtes, on n'a pas prisen compte la jachère car il n'existe plus desystème de culture stable avec jachèreencore observable.

Le riz demeure une production stratégique.Il constitue la première source alimentairedes familles. Ses rendements sontrelativement peu aléatoires et il permet dedégager une rémunération moyenne de20.000 dongs, environ, par jour de travail. Ilest prioritaire par rapport à d'autresspéculations tout aussi rémunératrices telque le système maïs-porc. Ce dernier offredes caractéristiques comparables maisdemande un capital de départ plus importantEn pratique, on observe un développementimportant de la production porcine chez lesexploitants qui en ont les moyens (capital),en cas de manque de rizières.

Le manioc et le maïs sont des systèmes deculture moins rémunérateurs à l'unité de

surface. Le manioc est assez rémunérateurpar rapport au temps passé, mais ses travauxtombent en concurrence avec toutes lesautres productions (voir paragraphe suivant).

Le Taro est un cas particulier, par sa forterémunération à l'unité de surface et par unerémunération assez élevée du temps detravail.

Les systèmes de plantation (abricotier,manglietia) sont très rémunérateurs parjour de travail. Toutefois, ils demandent dessurfaces irrportantes, et un investissement àrentabilité très différée

Calendrier de travail: deux pojntes de travailOn observe deux principales pointes detravail en mars - avril et en juin - juillet.

Pour chacune de ces pointes, le revenumarginal par jour de travail des différentescultures permet d'expliquer les choix desagriculteurs. Ils sont présentés, pour les deuxpointes de travail dans le Tableau 4.

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Dynamiques agraires et différenciation dans la commune de Xuat Hoa 18

Tableau 4 : Revenu marginal d'une journée de travailpour les deux périodes de pointes de travail

Périodes abricot riz deux mais + porcs mais + porcs maïs ventecycles intensifs en intensifs en

main d'œuvre ca italmars-avril 150.000 120.000 88.000 90.000 78.000juin-jui1let 74.000 135.000 60.000 47.000

Remarque: Le revenu marginal d'une journée de travail est égal au rapport entre la Il rémunération par ha H

et le Il temps de travail par ha pendant la période de pointe de travail considérée H. Renoncer àune journée de travail revient donc à renoncer à la rémunération de la surface correspondant àcelle journée de tlavail.

En mars - avril, c'est le riz qui est privilégié,car il est rentable et permet de sécuriserl'approvisionnement alimentaire. Le maïs etl'abricotier viennent ensuite. On remarquecependant que ces deux cultures (maïs et riz)sont difficilement compatibles sur une mêmeexploit ation en raison des pointes de travailconcomitantes.

A la période de pointe de juillet-août, lescultures de maïs et de riz sont encompétition pour le travail, selon le tempsdisponible, certaines familles ne cultiventpas de seconde saison de maïs. Toutefois, laforte rentabilité du maïs utilisé pour

l'élevage porcin explique que ce systèmesoit privilégié par les exploitants possédantpeu de rizières relativement à la maind'œuvre disponible.

2.4. Conclusion: pôles d'agrégationet polarisation

Le Tableau 5 tableau résulte de lacombinaison des trois approches présentéessuccessivement à la Partie II : (i) analyse desmoteurs de la différenciation, (ii) rentabilitérelative des systèmes élémentaires deproduction et (iii) calendrier de travail.

Tableau 5 : Facteurs explicatifs des combinaisons de production observées àXuat lba

Ateliers Atouts ContraintesRiz + buffle - sécurité de l'approvisionnement -limité par les surfaces possédées

alimmtaire- valorisation de main d'œuvre âgée oud'enfants pour le gardiennage des bufiles

Riz + -sécurité de l'approvisionnement - surfaces importantes nécessaires pourmotoculteur alimmtaire sécuriser la rentabilité de l'investissement

- valorisation intéressante del'investissement

Riz (travail à - permet de libérer de la main d'œuvre en - faible rentabilité du travailfaçon) période de pointe de travail - sécurité de l'approvisionnement

alimmtaire moins assuréeMaïs vente - aucun investissement néce ssaire - rentabilité trés faible

- peu de surfaces disponibles et faiblerentabilité à l'unité de surfuce

Maïs + porcs - rémunération dl travail comparable à celle - forte concurrence avec les rizières, pour lades rizières main d'œuvre, au mois de juillet

Maïs + porcs - rémunération du travail ÜI1Jortante - investissement préalable important

avec concentré - travail régulier sur l'année - rentabilité du travail de la période depointe de juillet moins importante que le riz

Abricotier - très rentable - rentabilité différée

Manglietia - rentable pour le travail - rentabilité à l'hectare très faible(PAM) - permet de défricher de nouvelles parcelles

pour le mais

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19 D. SadouJet, 1. C. Castel/a, VH Nam, D.D Quang 1SAM Paper Series 1 (2000)

Surface de rizières

Capital accumulé,hors rizières

• que de riz limité• pital impq:tllot• PlantatiOns nom breuses• Elevage de porcs intensif en capital

• Manque de riz important• Capi 1moyen• E1ev Ile de porcs intensif en capital• plantatiom limitées

"• PlantatiOft~'abricotiers importantes•• Riziiidlture intensive excédentaire~,

//

/POLARISATION

Accroissement desdifférences soci a les,

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• Vente de'riz deguis 10 aos• Capitalisation rogressiv et

plantation sur ks pentes=> tendance à cbantll:Lde catégorie

• Manque de riz limité• Pe\l de capital• Vente des production

de brûlis

. "• Jarnai.s d~plus• Pas de 9lf>Pl• Ve;.tsa force de travail

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Figure 13: Typologie des systèmes de production agricole de la commune de Xuat Hoa: pôlesd'agrégation et polarisation

Conclusion générale

Apport de l'étude en terme scient ifigueLa réinterprétation locale systématique desrègles nationales observée dans le cas deXuat Hoa semble généralisable à l'ensemblede la province. Ces relations de subsidiaritéentre pouvoir national Kinh et pouvoir localTay semblent déjà anciennes. Elles trouventsans doute leur source dans la différenced'écosystème: les règles mises au pointpour le Delta sont ainsi adaptées au contextebien différent des montagnes (Sikor, 1999;Rambo, 2000).

Par ailleurs, l'étude de la commune de XuatHoa a montré l'existence de processus dedifférenciation très marqués depuis le débutde la décollectivisation. Ce travail a permisde définir différents indicateurs permettantde suivre ces processus dans le cadre d'uneétude comparative menée à l'échelle de laprovince. Ces indicateurs qualitatifs ont étéintégrés à un modèle mult}.agent (SAMBA)qui a permis de les valider et d'évaluer leurimportance relative dans les évolutions

passées. Ce modèle informatique, une foisadapté en jeu de rôle permet de testerdifférents scénarios avec les acteurs locauxvisant à une meilleure gestion collective del'environnement fondée sur uneconnaissance fine des réalités locales(Castella et al., 2000).

Apport de l'étude pour le développementEnfin, il faut ici revenir sur les aspectsenv ironnementaux de cette étude. Lesdiagnostics réalisés dans la province de BacKan (Cho Don) au début des années 90,période où la course à la défriche - brûlisavait ateint son paroxysme, anticipaient une

crise environnementale majeure dans laprovince. Elle ne s'est pas produite, lesagriculteurs ayant, pour l'essentiel,développé des systèmes plus intensifs - maisqui semblent durables - d'exploitation despentes. De nombreuses explications de cetteévolution peuvent être avancées, malSl'allocation des terres a sans doute été lefacteur déclenchant principal.

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Dynamiques agraires et différenciation dans la commune de Xuat Hoa 20

Pourtant ces systèmes intensifs sont souventcoilteux en capital (association maïs +élevage porcin) et/ou à rentabilité différéedes investissements en travail de départ(arboriculture, aménagements de rizières).Certains agriculteurs sont donc exclus decette évolution. Ils n'ont d'autres.alternatives qu'une exploitation peu durabledes pentes. Ils doivent donc faire l'objetd'un appui technique et organisationnel afind'assurer la reproductibilité écologique etéconomique de leurs systèmesd'exploitation.C'est l'un des objectifs du volet «Systèmesde culture» du projet SAM qui travaille enpartenariat avec le volet «Régional» (Bal etal. 2000).

Les questions encore en SUspens...

• Des systèmes intensifs et reproductiblesd'exploitation des pentes à faible capital dedépart doivent êtres développés pour lesagriculteurs les plus en difficulté de lazone, qui n'ont pas les moyens d'investir àdans l'arboriculture;

• De nouveaux modes de gestion del'élevage bubalin doivent être recherchés.En effet, le cheptel est voie de réductionrapide du fait de la charge de travail degardiennage mais aussi afin d'éviter lesconflits liés au pâturage libre: dégâts surcultures et sur plantations, dégradationsforestières, etc. Avec la nécessité de passerà des systèmes plus intensifs sur lespentes, pourquoi ne pas étudierl'introduction de l'élevage bovin sousplantations pérennes associée à laproduction de fourrages sur les pentes?

• Dans cette commune, le développement del'arboriculture fruitière à l'initiative privéedes familles est remarquable. Cetteprodud:ion a maintenant pris une placeessmtielle dans le revenu. Toutefois,l'écoulement futur de la production est uneinconnue. Le marché de labricot connaîtune chute des cours continue depuis 5 ans.L'étude des débouchés et de l'évolutiondes marchés serait utile pour orienter lesdécisions des producteurs.

Remerciements

Les auteurs tiennent à remercierchaleureusement les autorités de la communede Xuat Hoa pour le soutien qu'elles ontapporté aux travaux de terrain ainsi que le

comité populaire de la province de Bac Kanpour son implication dans les travaux derecherche et les activités de développement encours. MM. Tran Dinh Long et Le QwcDoanh, directeurs adjoints de l'InstitutNational des Sciences Agronomiques ontguidé et facilité les travaux présentés ci­dessus. Qu'ils en soient remerciés!

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