Éducation musicale et cinéma -...

39
Éducation musicale et cinéma Denis Waleckx IA-IPR Éducation musicale Académie de Montpellier [email protected]

Upload: hoanghanh

Post on 12-Mar-2018

221 views

Category:

Documents


5 download

TRANSCRIPT

Page 1: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Éducation musicale et cinéma

Denis Waleckx IA-IPR Éducation musicale

Académie de Montpellier [email protected]

Page 2: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Préalables

n  Le cinéma : « un lieu d’images et des sons » (Michel Chion) Cette expression rappelle, entre autres choses, la grande diversité des rapports entre images et sons : complexes, ouverts, ces rapports vont de la coexistence inerte aux interactions multiformes

n  Rapports complexes, ouverts entre image et sons : de la coexistence inerte aux interactions multiformes

n  Asymétrie entre images et sons

Page 3: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Asymétrie Bande son / Bande image

n  Il n’y a pas de cadre sonore des sons

n  Accumulation potentiellement illimitée (Grâce à la technique du mixage, l’écriture de la bande son s’apparente au contrepoint. L’absence de cadre sonore rend banale la superposition de voies très hétérogènes)

n  Les ondes sonores sont lentes (33O m/s)

n  Le cadre visuel est fortement identifié

n  Accumulation très limitée (mixage d’images limité dans le temps lors, par exemple du fondu enchaîné ; au contrepoint visuel, la bande image préfère plutôt la division du cadre visuel)

n  Les ondes visuelles sont près d’un million de fois plus rapides (300 000 km/s)

Page 4: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Asymétrie Bande son / Bande image

n  L’audition propose un flux continu (« Il n’y a pas de paupières aux oreilles » Pascal Quignard, la haine

de la musique) ; Le silence est souvent relatif, il a besoin d’un cadre musical pour exister (Cf. Debussy) On écoute à 360 °

n  L’analyse de la bande son suppose un déroulement dans le temps

n  Les paupières empêchent de fait ce flux continu pour l’œil; au cinéma, le noir précède la diffusion.

n  La vue est au contraire très directionnelle

n  L’arrêt sur image est possible

Page 5: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Asymétrie Bande son / Bande image

n  «Un son off aussi banal en apparence qu’un bruit de pas déclenche sept images plus ou moins conscientes : 1/ la chaussure (savate, basket, mocassin), 2/ le sol (gravier, gadoue, macadam, parquet…), 3/ l’acoustique des lieux (plein air, trottoir, local petit ou grand, réverbérant ou feutré…), 4/ la personne (qui marche ?), 5/ le jeu (avec détermination, furtivement, en traînant les pieds ou d’un bon pas, en trébuchant…), 6/la provenance (d’où vient-elle ?) 7/ la destination (où va-t-elle ? Quelles sont ses intentions ?) » Claude Bailblé le réel, le sonore et l’imaginerie auditive

Page 6: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Asymétrie Bande son / Bande image

n  La bande son contient énormément d’informations …

n  n  Les langues indo-européennes

sont peu adaptées à la description du sonore ; en conséquence, l’analyse musicale use volontiers d’un vocabulaire emprunté à d’autres domaines (sciences, lettres), ou à d’autres champs sensoriels, notamment au visuel

n  … informations associées à l’image par « aimantation spatiale »

n  … et par automatisme mental « vous entendez un bruit, vous recréez la scène; vous entendez un sifflement de locomotive, vous voyez la gare. Tandis que vous voyez une locomotive, vous n’entendez pas un sifflement » Robert Bresson

n  Le transfert analogique traditionnel renforce encore le pouvoir attractif de l’image

Page 7: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Entrées d’analyse de la musique et du son au cinéma

n  Grandes entrées, englobant plusieurs notions n  Présentées sous forme de questions simples

proposant un angle privilégié d’approche des aspects complexes

n  Ces différentes entrées se complètent et renvoient l’une à l’autre (Cf. couleur, espace, temps, forme)

n  Tous les exemples donnés, illustrant le discours gagneraient à être éclairés par toutes les entrées.

Page 8: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Pour le cours d’éducation musicale

n  Permettant d’être exploitées dans le cadre de l’activité d’écoute en classe

n  Permettant de faire des liens avec d’autres activités du cours (création, activité vocale)

n  Permettant des prolongements interdisciplinaires (arts plastiques, lettres, cinéma) Exemple à partir d’un extrait de Taxi driver

Page 9: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Les questions concernant le son et la musique au cinéma

n  Quoi ? Identification des différents éléments de la bande son

n  Où ? (localisation des sources sonores) n  Quand ? À quel moment ? (en soi (Cf.

temps) / image / propos)

n  Pourquoi ? (la fonction du son et de la musique) Comment ? (les procédés)

Tirez sur le pianiste

Page 10: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Quoi ?

n  Identification des différents éléments de la bande son (ensemble des sons filmiques diffusés)

n  En général, bruit / voix / musique ; grande hétérogénéité potentielle ; accumulation sans limite

n  Mixage ; (voco-centrisme ou verbo-centrisme, qui donne souvent une prédominance aux dialogues)

n  La confrontation avec la bande image facilite : n  La mise en évidence de l’absence de cadre sonore des sons (le fabuleux destin

d’Amélie Poulain) n  Les liens complexes entre des éléments de la bande son et l’image ; le repérage de

« sons en creux » (Tirez sur le pianiste)

Page 11: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Où ? n  Localisation des sources sonores n  Sons diégétiques ou d’écran, « in screen », sons réels du

monde ou des mondes narratifs, qui peuvent être in ou hors champ (les oiseaux, l’attente)

n  Sons non ou extra-diégétiques, musique de fosse, son irréel (Parle avec elle)

n  Jeu entre ces deux mondes : sons transversaux, diagonaux, sons « on the air », sons internes, acousmètre (taxi driver, Péril en la demeure, générique)

Page 12: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Quand ? n  À quel moment (en soi / image / propos)

n  Synchrèse audio-visuelle : relation son/cause faites par automatisme mental

n  Relation de synchronisation plus ou moins serrée n  Points de synchronisation les lumières de la ville n  Effet-clip Le Dictateur, Chicago, tango de la taule,

Mickeymousing n  Tuilages entre séquences visuelles et sonores

Taxi driver tuilage

Page 13: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Pourquoi ? (Comment ?)

n  Jouer sur le temps, les temps n  Polyrythmie entre la bande son et la bande

image les temps modernes, les oiseaux n  Dynamiser, strier le temps

2001, l’Odyssée de l’Espace

n  Vectoriser, linéariser le temps Lawrence d’Arabie

n  Dilater le temps, le comprimer, Citizen Kane

n  Suspendre le temps, mettre en évidence un moment, créer un climat d’attente Psychose

Page 14: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Pourquoi ? (Comment ?)

n  Jouer sur l’espace, les espaces, les points de vues Le fabuleux destin d’Amélie Poulain

n  Créer un espace cinématographique particulier Les sentiers de perdition

n  Espace du souvenir, Vertigo, le cauchemar n  Espace du monde (des mondes) intérieur(s)

Taxi driver, générique, II était une fois dans l’ouest, Mort de Morton

Page 15: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Pourquoi ? (Comment ?)

n  Jouer des fonctions symboliques et sémantiques de la musique n  Symbole social et culturel les oiseaux

n  Universalité supposée de la musique Mission

n  La musique et les paroles qu’elle porte (explicites ou implicites) Jeune et innocent, générique

Page 16: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Pourquoi ? (Comment ?)

n  User du symbolisme musical (le cinéma se réapproprie les procédés de l’opéra) n  Citer, connoter scène du musée de Vertigo, n  Donner un contenu sémantique à la musique

Jeune et innocent, découverte de l’assassin, La corde, perte du tempo

n  Utiliser les leitmotives Vertigo, thème de Madeleine, des figuralismes Psychose, hésitation et fuite

n  Imiter, faire fonctionner de manière analogique images et sons Il était une fois dans l’ouest, arrivée madame Mac Baine, Vertigo, générique

Page 17: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Quelques idées de mises en situation en classe

n  Jouer de la diffusion des différentes combinaisons du couple BI/BS (percevoir)

n  Faire proposer, créer une alternative à la BO existante (produire, percevoir)

n  Faire interpréter une chanson extraite d’un film (produire, percevoir) ou évoquant le monde du cinéma (produire, connaître)

Page 18: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Bibliographie n  CHION (Michel) La musique au cinéma , 1995, Fayard,Paris. n  CHION (Michel) l’audio-vision, son et image au cinéma, 1990,

réédition 2000, Nathan , Paris. n  CHION (Michel) Un art sonore, le cinéma, Cahier du cinéma,

2003. n  DAMBRICOURT (Jean-Pierre) la musique et le son au cinéma,

éléments pour une nouvelle pédagogie de l’écoute et du goût, in L’éducation musicale, mars-avril 1998.

n  EUGENE (Jean-Pierre) La musique dans les films d’Alfred Hitchcock 2000, Editions Dreamland, Paris.

n  MAGNY (Joël) Le point de vue, cahiers du cinéma, CNDP, 2001 n  PINEL (Vincent) Le montage, cahiers du cinéma, CNDP, 2001 n  SIETY (Emmanuel) Le plan, cahiers du cinéma, CNDP, 2001

Page 19: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Taxi driver (1976) de Martin Scorcese musique de Bernard Herrmann

n  L'histoire : Ancien du Vietnam et insomniaque, Travis Bickle (Robert De Niro) devient chauffeur de taxi la nuit dans les bas-fond new-yorkais. Écoeuré du spectacle dont il est le témoin quotidien, il cherche à s'attirer les charmes d'une jeune femme très différente de sa personnalité, puis prend pitié pour une jeune adolescente prostituée (Jodie Foster). Repoussé par la première, il sombre dans une folie meurtrière qui le poussera à libérer la seconde des bras de son mac, laissant derrière lui un terrible bain de sang.

n  Générique : bel exemple de peinture d’un monde intérieur, en l’occurrence celui de Travis, homme à la dérive, vivant une vie banale, répétitive, majoritairement nocturne, à la vision brouillée et qui va s’arranger avec la loi ; très gros plans sur les yeux du héros et en contre champ, ce qu’il voit : abondance de flous (nuit, pluie, fumées : brouillages visuels). Le thème musical de Travis, symbolise cette dérive et ce contexte nocturne : atmosphère jazzy, liberté rythmique du saxophone (flou rythmique), flottant au dessus d’une harmonie répétitive à la fois banale et pimentée.

n  Scène de la « tentative de reconquête » Travis a déjà rencontré la jeune prostituée et l’a incitée à changer de vie. Elle fait part de ses doutes à son souteneur (Harvey Keteyl) qui tente de la reconquérir. Il met un disque et danse ; lors de la scène suivante Travis s’entraîne au tir et prépare son attentat.

n  Le disque que met le souteneur, musique clairement diégétique, s’avère être la même, mais extradiégétique, qui accompagne la préparation de Travis : c’est le leitmotiv de Travis, entendu dès le générique du film. L’utilisation de ce thème pendant le slow entre la prostituée et son souteneur a une haute portée symbolique; A la fin du slow, l’anticipation importante des coups de feu symbolise l’affrontement entre les deux hommes et revêt un aspect prémonitoire, la première victime de Travis étant effectivement le souteneur.

Page 20: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Tirez sur le pianiste (1960) de François Truffaut, musique de Georges Delerue

n  Chansons : "Framboise" de Bobby Lapointe, interprétée par l'auteur, "Dialogues d'amoureux" de Félix Leclerc interprétée par l'auteur et Lucienne Vernay

n  L'histoire : Petit pianiste d'origine arménienne, Edouard Saroyan est devenu un grand virtuose. Grâce à son talent, mais aussi à la bienveillance de son épouse, Thérésa, serveuse dans un bar, qui s'est prêtée aux exigences de l'impresario qui lança Edouard. Un jour, Thérésa confesse cet étrange pacte à son mari. Mais devant l'hésitation de celui-ci à pardonner, elle se jette, sous ses yeux, par sa fenêtre et se tue. Désespéré, il abandonne sa carrière et va chercher l'oubli dans un petit emploi de bar-dancing, le Mamy's. Il ne parle guère, et chacun ignore son passé. Connu à présent sous le nom de Charlie, il s'occupe de l'éducation de son jeune frère Fido, mais doit aussi supporter les frasques et les méfaits de ses autres frères, Richard et Chico. Ceux-ci viennent précisément d'exécuter un mauvais coup en compagnie de deux autres gangsters, Ernest et Momo. Au moment du partage, les deux frères se sont éclipsés avec le magot...

n  On suit Edouard se préparant à intervenir dans le bar, d’où provient, entre autres bruits d’ambiance, une chanson de Bobby Lapointe mêlée à tous les bruitages réalistes ; lorsqu’Edouard rentre dans le bar, les bruits de la salle de danse sont « naturellement » plus forts ; on voit Bobby Lapointe saluer ostensiblement, sans entendre les applaudissements qui auraient dû les accompagner (son en creux) ; Edouard se met au piano, son frère l’entreprend (vococentrisme).

Page 21: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Le fabuleux destin d’Amélie Poulain (2001) de Jean-Pierre Jeunet, musique de Yann Tiersen

n  L’histoire : Fille d'un médecin militaire et d'une institutrice, Amélie Poulain n'a pas eu une enfance banale. Prétendument cardiaque, elle a été tenue à l'écart de la société et en particulier de l'école, sa maman lui fournissant à domicile l'enseignement obligatoire. Son père devenu veuf et elle une jeune femme, Amélie travaille comme serveuse dans un bar-tabac de Montmartre. Elle mène une existence sans relief jusqu'au soir où elle découvre, cachée dans son appartement, une petite boîte ayant appartenu à un enfant quarante ans auparavant. Amélie décide de retrouver cet ancien locataire pour lui rendre son trésor. Cette expérience émouvante convainc Amélie de se mêler de la vie des autres. C'est ainsi qu'elle va fomenter des coups en douce pour rendre aux personnes de son entourage un goût de vivre qu'elles croyaient perdu à jamais...

n  Absence de cadre sonore du son : Amélie, dans le métro (acoustique très réverbérante), est attirée par une chanson populaire, qui provient d’une vieille platine tourne disque tenue par un mendiant. Cette musique au début clairement diégétique, va devenir extradiégetique, présente lors du changement de point de vue (souvenirs de Mathieu Kassovitz pendant lesquels cette musique sera mixée aux sons « réels » de ses souvenirs), puis accompagnera Amélie chez elle. A noter également la présence dans la bande son de la voix off du narrateur omniscient.

Page 22: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Les oiseaux (1963) de Alfred Hichcock, Sons électroniques de Rémi Gassman et Oskar Sala, Conseiller pour le son : Bernard Herrmann

n  Pas de musique hormis une comptine et un extrait d’une œuvre de Debussy (1ère arabesque). n  Herrman filtre, modifie, orchestre tous les sons en particulier les sons d’oiseaux créés artificiellement par

un instrument électronique appelé le trautonium (du nom de son inventeur Trautwein) n  Utilisation du piano pour connoter la classe sociale et la culture artistique de l’héroïne. Aucune recherche

pour crédibiliser le jeu du piano. L’actrice regarde peu le clavier et discute en jouant Debussy. n  La comptine des enfants accompagne une des séquences les plus célèbres du film, au cours de laquelle

Mélanie Daniels vient attendre l’institutrice à la sortie de l’école. La comptine doit clore le temps scolaire. n  Horripilante : pour nous spectateur (on sait que le temps est compté), pour l’héroïne (qui fume

nerveusement), pour les oiseaux (la comptine ne justifie-t-elle pas l’attaque ?) n  Alternative aux sons électroniques qui accompagne l’ensemble du film. La bande son, pendant la comptine,

fait entendre le calme avant la tempête. n  Indépendance entre Bande son et Bande image. Lorsque l’héroïne fait irruption dans la salle de classe, les

élèves se retournent et ne chantent plus, ce que contredit la bande son.

Page 23: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Parle avec elle (2002) de Pedro Almodovar, musique de Alberto Iglesias

n  L’histoire : Marco et Benigno sont l'un à côté de l'autre, admirant avec émotion un spectacle de Pina Bausch. Marco est journaliste. Il vient de vivre une douloureuse séparation. Un jour, il aperçoit la célèbre torera Lydia, pleurant à la télévision. Elle aussi a du mal à vivre une séparation. Ils se rencontrent et apprennent à s'aimer. Benigno est infirmier. Il veille autant qu'il peut sur la douce Alicia qu'il observait de sa chambre quand elle s'entraînait à danser. Alicia est dans le coma. Il lui parle, la soigne, la lave, lui raconte sa vie. Sa vie à elle si elle n'était pas dans le coma. Lydia affronte un taureau de trop, perturbée par sa journée. Elle finit dans le coma. Marco croise de nouveau Benigno. Leur amitié commence.

n  Marco va tomber amoureux d’une torera Lydia, lors d’une émission de télévision ; il va assister à sa corrida n  Exemple de musique extra-diégetique, évoquant l’Espagne, sur une bande image légèrement ralentie,

faisant le lien entre différentes séquences (arènes, références au toréador blessé (saut dans le temps ? changement de point de vue ?), scène dans le café).

n  Quelques sons diégétiques se superposent (le cri de la torera, les bruits d’ambiance du café, les paroles de l’ancien amant de Lydia et de son ami)

n  Un son en creux : le « olé » de la foule absent.

Page 24: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Péril en la demeure (1985) de Michel Deville, musiques empruntées à Brahms, Granados, Schubert

n  L’histoire : Musicien, David Aurphet (Christophe Malavoy) est engagé pour donner des cours de guitare à la jeune Viviane (Anaïs Jeanneret). Il se laisse immédiatement séduire par la jolie mère Julia (Nicole Garcia), épouse du riche Graham Tombsthay (Michel Piccoli). Rapidement, ils multiplient leurs rendez-vous adultères. David fait également la connaissance d'Edwige Ledieu (Anémone), la nouvelle voisine des Tombsthay, prétendûment infirme. En rentrant chez lui, il est sauvé d'une agression par Daniel Forest (Richard Bohringer), tueur professionnel avec qui il sympathise. Tout comme Julia, David reçoit une VHS anonyme où les amants font l'amour. Ceux-ci soupçonnent bien sûr le mari, sans certitude. Croyant Graham parti, David rejoint Julia dans son pavillon cossu. Mais le mari menaçant l'attend, et le musicien l'abat. En manière d'avertissement, Daniel - qui était chargé d'assassiner Graham Tombsthay - enlève Viviane et la dépose chez David. Il lui demande le globe réclamé par ses commanditaires. En un acte suicidaire, Daniel se laisse tuer par David. Une seconde VHS, tournée cette fois-ci par Edwige, révèle que Julia a achevé son mari. Après avoir fait disparaître le corps de Daniel dans l'explosion de son propre pavillon, et empoché les généreux gages destinés au tueur professionnel, il part avec Viviane, réfugiée chez des amis.

n  Générique jouant constamment sur le diégétique, l’extra diégétique et le transversal, la musique on the air ; au départ, la musique (un trio de Brahms) semble diégétique (Cf la cassette qui tourne dans le lecteur), campant un univers de musicien (guitare, appareil de reproduction, partition, etc.) ; elle semble dans un second temps extra diégétique, accompagnant le trajet effectué par David en voiture. Lorsqu’on aborde une partie plus cossue, plus bourgeoise de la ville, ce changement coïncidence avec un passage du trio plus lent, au caractère moins rythmique, plus legato, plus lyrique. Dans une sorte de clin d’œil final, David arrête la musique en actionnant son autoradio, ce qui n’est pas crédible sur l’ensemble du générique. Le réalisateur joue sur les niveaux et nous met dans la confidence.

Page 25: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Les lumières de la ville (1931) de Charles Chaplin

n  L’histoire : Charlot cherche à gagner de l’argent pour aider une jeune aveugle à réaliser une opération qui lui permettra de recouvrer la vue.

n  Film muet ; Chaplin se méfie du parlant et se moque de ses techniques : ouverture du film sur une séquence de discours d’inauguration d’une statue, qui aurait exigé l’audition de paroles et qui est réalisé par Chaplin parlant à travers le bec d’un saxophone.

n  Quelques points de synchronisation même si cette synchronisation est relativement lâche. Durant le match de boxe, thème de la fuite ; appels des flûtes ; points de synchronisation sur les coups de gong.

Page 26: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Le Dictateur (1940) de Charles Chaplin

n  Le Dictateur de Chaplin est pour une part un film de fiction - avec des personnages évidemment inventés comme le barbier juif interprété par Chaplin lui-même ou sa fiancée Hannah - mais cette fiction se réfère également de façon très claire à des faits réels, à l'actualité la plus récente des années 30 et 40, moment où le film est conçu et réalisé: Hynkel est bien sûr une caricature de Hitler, et la Tomania évoque l'Allemagne nazie.

n  Sorte d’effet clip avant la lettre (Chaplin se méfiait du mickeymousing qui consiste en une synchronisation systématique illustrant musicalement ce qui se voit à l’écran, technique très utilisée pour les dessins animés) ; ici la musique est préexistante : nouvelle preuve de la manière dont Chaplin détourne les procédés.

Page 27: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Chicago (2002) de Rob Marshall, musique de John Kander et Danny Elfman

n  Histoire : Chicago. 1929. Velma Kelly commence son show... seule. Où est sa soeur? Dans la salle, Roxy Hart l'observe danser, chanter, briller. Et rêve d'être sur scène. Cette nuit-là, abusée par son amant qui lui faisait miroiter une carrière évidemment illusoire, Roxy le tue froidement. Velma est aussi arrêtée pour avoir assassiné son mari et sa soeur, retrouvés ensemble dans le lit. Elles se retrouvent en prison, sous le commandement de Mama Morton, habile impressario pour faire passer les cigarettes, ou trouver le bon avocat. Mais le meilleur des avocats, c'est Billy. Velma, comme Roxy, vont s'arracher ses faveurs, pour sortir de taule et retrouver la scène. nExemples nombreux d’effets-clips

Page 28: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Les temps modernes (1936) de Charles Chaplin

n  Film muet de l’ère parlante, mais sonorisé n  Par rapport aux lumières de la ville, beaucoup d’effets sonores synchronisés (points de synchronisation)

associés à une musique beaucoup plus synchrone avec l’image n  Moments de paroles intelligibles mais Chaplin reste distancié par rapport au parlant, d’où cette chanson

sans sens n  Passage de la chanson sans sens n  Utilisation de gramelots à consonances italiennes, latines (cita, bucho, spinnach’) n  Chaplin continue de régler ses comptes avec le parlant n  Fonction d’attente de l’introduction qui s’éternise n  Pendant le travail de la chanson en coulisse, on entend un quatuor d’hommes aux voix travaillées ;

polyrythmie entre l’audition intérieure de Chaplin et le quatuor vocal qu’entend le spectateur.

Page 29: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

2001, l’Odyssée de l’Espace (1968) de Stanley Kubrick, musiques empruntées à J. Strauss, R. Strauss, A. Katchatourian, G. Ligeti

n  L’histoire : L'aube de l'humanité, il y a 4 millions d'années : de grands singes tentent de survivre... Un jour, ils découvrent un monolithe de couleur noire. Un des singes a l'idée de prendre un os et de s'en servir comme d'une arme. C'est le début de l'évolution de l'humanité... En 2001, sur la Lune : une expédition américaine est chargée de percer le mystère d'un mystérieux bloc de métal noir découvert par le docteur Floyd sur la surface du satellite. L'équipe, à bord du vaisseau Discovery, a été alerté par un signal émis de Jupiter. A bord, tous les membres de l'équipage sont placés en état d'hibernation. Seuls deux astronautes conversent avec Hal 9000, l'ordinateur contrôlant le Discovery.. Ce dernier, soupçonné d'être l'auteur d'une erreur technique volontaire, provoque la mort d'un des deux astronautes et de l'équipage en hibernation. Le dernier astronaute parvient à fausser ses circuits, mais à l'approche de Jupiter, il est précipité dans l'espace et le temps...

n  Sur le plan visuel, le temps spatial semble lisse : mouvements de camera très lents, sans à-coups, abondance des formes courbes, de rotations lentes ; sur ce temps visuel « lisse », la valse de Strauss fait entendre un temps d’abord suspendu, puis strié régulièrement.

Page 30: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Lawrence d’Arabie (1962) de David Lean, musique de Maurice Jarre

n  Exemples de raccord par le son : Lawrence d’Arabie (Peter O’Toole) réfléchit pendant une nuit et une journée à la bonne stratégie à adopter pour attaquer les turcs. L’illumination « Akabba, par l’intérieur » se fera après ces 24 heures de réflexion, ramenées à 3mn en temps cinématographique. Les différents moments sont unifiés par une musique qui possède sa propre progression (crescendo d’intensité, et évolution dans les hauteurs) montrant ainsi l’avancée de la pensée du héros, et niant la technique de juxtaposition des étapes et des péripéties utilisée au montage (Cf. épisode des deux enfants).

Page 31: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Citizen Kane (1941) de Orson Welles, musique de Bernard Herrmann

n  Avec :Orson Welles (Charles Foster Kane), Everett Sloane (Bernstein), Joseph Cotten(Jedediah Leland),Dorothy Comingore (Susan Alexander),Agnes Moorehead (la mère de Kane),William Alland (Thomson) Durée : 1H 56 mn en noir et blanc.Musique de Bernard Hermann. Scénario : Welles et H.J.Mankiewicz

n  L'histoire : Charles Foster Kanes, magnat de la presse new-yorkaise, expire dans son fabuleux château de Xanadou, sur la côte californienne. Son dernier mot est : "Rosebud". Intrigué, un rédacteur en chef décide de mener son enquête. Il charge l'un de ses journalistes, Thomson, d'en savoir plus. Celui-ci n'a que le passé de Kane pour mener à bien sa mission.

n  Magnifique exemple de compression temporelle par la musique. Kanes veut faire de sa femme une cantatrice. Même s’il finit par renoncer à ce rêve, son ascension sociale va accompagner les progrès tout relatifs de l’apprentie-cantatrice. Dans cette scène d’une trentaine de secondes, on entendra la femme de Kanes chanter Rossini en anglais d’une voix médiocre, accompagnée d’un mauvais piano, installé dans un intérieur de la petite bourgeoisie, puis la même personne chanter le même air d’une voix à peine plus assurée, mais en italien, avec un meilleur piano, et dans un intérieur nettement plus cossu. C’est la vocalise qui permettra le fondu enchaîné et le changement de langue.

Page 32: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Les sentiers de perdition (2002) de Sam Mendes, musique de Thomas Newmann

n  L’histoire : Tom Hanks interprète Michael Sullivan, un tueur à la solde du caïd irlandais local, John Rooney (Paul Newman), qui l'a élevé comme son fils. Si John est un homme craint mais digne, son fils naturel, Connor (Daniel Craig), est au contraire un être lâche et incapable qui jalouse le lien qui unit John à Michael. Aussi lorsque Michael Jr (Tyler Hoechlin) est témoin d'une exécution perpétrée par son père et Connor, ce dernier y voit l'opportunité de se débarrasser une fois pour toute de ce « frère » gênant. Connor assassine l'épouse de Sullivan (Jennifer Jason Leigh) et son plus jeune fils. Seuls rescapés Michael et Jr partent en cavale, avec une seule idée en tête, la vengeance à tout prix.

n  C’est pratiquement le dénouement : Sullivan va se faire justice en tuant John Rooney, caïd irlandais local. Cette scène est réglée comme une sorte de ballet macabre, Sullivan semblant accomplir cette mission dans un état second. Rooney sort avec sa bande sous la pluie battante très présente (visuellement et auditivement). Pendant toute la scène, très violente, deux musiques extradiégetique se font entendre, la première (son cristallins ; gammes descendantes au piano) faisant taire progressivement la pluie (léger ralenti à l’image) ; la seconde (aux cordes) accompagne le retour progressif du son diégétique et ponctue l’exécution de Rooney donnant au son de la mitraillette une grande force (réverbération très importante) ; la première musique reviendra après cette exécution, montrant ainsi que, pour Sullivan, rien n’est fini.

Page 33: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Vertigo (1958) de Alfred Htchcock, musique de Bernard Herrmann

n  L’histoire “Sujet aux vertiges, Scottie (James Stewart) est manipulé par Madeleine (Kim Novak) et Elster, se faisant passer pour mari et femme. Madeleine semble sous l’emprise d’une morte et simulera son suicide tandis que Scottie, amoureux de la belle ne pourra l’empêcher. Dans une seconde partie du film, Scottie, toujours amoureux, refaçonnera Judy à l’image d’Hélène (qui est en fait la seule et même personne) avant de découvrir qu’il a été trompé »

n  4ème collaboration Hermann / Hitchcock n  adapté d’un roman de Boileau et Narcejac D’entre les morts n  Thématique hitchockienne de la femme idéale rêvée supérieure à la femme réelle ; idée qui renvoie à la

femme idéale et inaccessible romantique n  Musique qui va se référer à Wagner, notamment à Tristan (comme l’histoire renvoie à un amour conduisant

inexorablement à la mort) n  Réflexion sur le temps présent, sur le passé n  générique Le thème du film est le vertige, la perte de repère, l’envoûtement ; ce vertige se traduit

musicalement par un seul et même élément à la fois harmonique et mélodique (accord mineur de septième majeure) égréné de l’aigu au grave et du grave à l’aigu, accompagné par son propre mouvement rétrograde ou superposé à sa version dédoublée, jouant ainsi sur le temps et le sens. Ce motif reviendra à la harpe lorsque Judy redeviendra Madeleine ; A noter la belle équivalence sur le plan pictural , avec des schémas de Saul Bass, spécialiste des effets optiques avec une prédilection pour les mouvements circulaires d’éléments symétriques et une focalisation sur les éléments humains faussement symétriques (gros plan sur la bouche, l’œil).

Page 34: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Vertigo (1958) de Alfred Htchcock, musique de Bernard Herrmann

n  Thème de Madeleine Ce thème, ostensiblement attribué, est dans son écriture comme dans son usage, très influencé par Wagner. Il personnifie ce qui aurait pu n’être qu’une silhouette, conférant une force réelle à l’apparition de l’héroïne, apparition dans le sens presque biblique du terme (Madeleine pécheresse) ; Ce leitmotiv ne sera plus entendu après la mort (simulée) de Madeleine, alors que son emploi aurait pu mettre le spectateur sur la voie. En fait, son absence signifie que pour Scottie, elle est définitivement morte.

n  scène du musée On entend le motif du souvenir (renvoyant tout autant au souvenir individuel de Madeleine (puis plus tard de Scottie) que collectif, référence au passé espagnol de la Californie (l’histoire se passe à San Francisco). Basé sur un rythme de habanera, avec une pédale de ré omniprésente, la musique est lancinante, obsédante. Dans cette scène, les mouvements de caméra rapprochent les mondes passés et présents à travers des objets (fleurs, coiffure, broche) communs, le ré entendu servant de point fixe dans ces univers mouvants.

n  le cauchemar Le cauchemar du héros a lieu après le faux suicide de Madeine. Scottie, sous le choc, revit tous les moments forts qu’ils vient de vivre ; sur le plan visuel : effets graphiques de Saul Bass, scène d’errance, chute dans le vide, tombeau ouvert, Carlotta, la femme du tableau ; sur le plan sonore, deux thèmes se succèdent : celui de la poursuite et celui du souvenir, habanera à l’esthétique ici très outrée.

Page 35: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

II était une fois dans l’ouest (1968) de Sergio Leone, musique d’Ennio Morricone

n  Usage ostensible et marqué du procédé de leitmotives, très caractérisés, apparaissant systématiquement avec les personnages.

n  Mort de Norton : mise en relation par le son. Morton est responsable de la compagnie du train et rêve d’atteindre le Pacifique, ce qui justifie d’ailleurs à ses yeux tous les crimes commis au nom de l’avancée du chantier du train (expropriation par la force, qu’il confie à Franck). Morton est malade des os (sorte de myopathie) ; dans une première scène, on rappelle ostensiblement son rêve, sa maladie, son angoisse de mourir avant la fin du chantier. (Il regarde un tableau représentant l’océan, il en entend le bruit, sa vue se brouille). Morton décide de se débarrasser de Franck qu’il juge trop dangereux ; quelques minutes plus tard (en temps cinématographique), après l’échec de sa tentative, il agonise en plein désert, rampe jusqu’à une flaque, et meurt dans un bruit de vagues.

n  Arrivée de Madame Mac Baine : cette arrivée est saluée par la présentation du thème de Ms. Mac Baine ; le crescendo orchestral qui l’anime coïncide avec un mouvement vertical de bas en haut de la caméra passant d’un plan serré à un plan général très large découvrant l’immensité du paysage.

Page 36: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Mission (1986) de Laurent Joffe, musique d’Ennio Morricone

n  L’histoire : Au 18e siècle, Frère Gabriel pénètre sur les terres des Indiens Guaranis et fonde avec eux la mission «San Carlos». Un autre homme hante à la même époque ces hauts plateaux d'Iguazu : Rodrigo Mendoza, aventurier, marchand d'esclaves et mercenaire. Son gibier favori : les Guaranis. Un jour, rentrant d'une de ses chasses, il tue son frère Felipe qui lui a ravi la femme dont il se croyait aimé. Fou de remords, il s'isole dans un hôpital pour incurables où il reçoit la visite de Frère Gabriel. Mendoza désespère de trouver le châtiment proportionnel à sa faute. Gabriel lui propose un symbolique, épuisant et salvateur chemin de croix. : l'escalade, lourdement chargé, des falaises qui surplombent les rapides d'Iguazu...

n  Arrivée de Frère Gabriel sur les terres des indiens guaranis ; c’est par la musique qu’il arrive à rentrer en contact avec eux. De diégétique, la musique passera on the air (sur les ondes) montrant la réussite de l’entreprise. Le thème de l’universalité supposée de la musique est utilisé également dans rencontre du troisième type de Spielberg (1977) où pour rentrer en contact avec des extra terrestres, les hommes envoient un message pentatonique au nom de toute l’humanité (ré mi do do sol)

Page 37: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Jeune et innocent (1937) de Alfred Hitchcock, musique de Claude Levy

n  L’histoire : Le héros est accusé à tort d’être le coupable d’un meurtre en fait commis par le batteur d’un orchestre de jazz

n  Générique : Les thèmes musicaux apparaissent dès le générique, de forme ABA. A : thème de jazz (the drummer man) ; B sorte de valse (thème de l’amour). Les paroles de la chanson (sous entendues dans le générique mais qui seront plus tard entonnées) désignent le coupable « No one can like the drummer man ».

n  Découverte de l’assassin The drummer Man est chanté dans le thé dansant alors que Hitchcock, grâce à un magistral mouvement de caméra, nous découvre de manière ostensible l’assassin. La musique, les plans (très gros plans sur les yeux sujets aux tics nerveux du batteur), et les paroles désignent tous le coupable. Le batteur perd le rythme en même temps que son sang froid, joue du xylophone sur un trois temps, se décale rythmiquement et joue hors tempo sur la reprise du thème The drummer man. Il va s’écrouler en provoquant un bruit énorme qui couvre la musique.

Page 38: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Psychose (1960) de Alfred Hitchcock, musique de Bernard Herrmann

n  L’histoire : Une jeune femme habituellement honnête, Marion Crane (Janet Leigh), dérobe les 40.000 dollars d'un client de son patron. Elle quitte Phoenix pour rejoindre son amant, Sam Loomis (John Gavin). Epuisée par sa longue fuite, elle s'arrête à l'hôtel isolé de Norman Bates (Anthony Perkins). Dans une scène célèbrissime, elle y est poignardée sous la douche. Le détective (Martin Balsam) lancé à ses trousses subira le même sort. Sam et la soeur Lila (Vera Miles) continueront l'enquête et découvriront l'indicible vérité...

n  Hermann rompt avec le grand orchestre symphonique et utilise le seule pupitre à cordes (selon lui équivalent du noir et blanc utilisé par Hitchcock alors qu’à l’époque la plupart de films américains sont en couleur)

n  Utilisation du leitmotiv thème de la fuite (sur le générique), thème de la relation amoureuse, thème de l’amour impossible, thème de la tentation

n  Thème de la tentation : Marion a déjà décidé de partir avec l’argent qu’elle était chargée de déposer à la banque, mais tout est encore possible. Les modulations et le va-et-vient hésitant de la mélodie, les expositions mineur puis majeur, traduisent les hésitations de Marion. A la fin de la scène, la musique restera en suspens, symbolisant le départ vers l’inconnu ; sur le plan visuel, trois éléments sont présents : Marion, l’argent, la valise. Ces éléments, qui ne sont jamais dans le même cadre au début de la scène, ne seront réunis qu’à la fin de celle-ci, après la prise de décision.

Page 39: Éducation musicale et cinéma - disciplines.ac-montpellier.frdisciplines.ac-montpellier.fr/.../fichiers/pdf/musique_et_cinema.pdf · Edouard se met au piano, son frère l’entreprend

Jules et Jim (1962) de François Truffaut, musique de Georges Delerue, chanson de Cyrus Bassiak

n  La chanson, interprétée par Jeanne Moreau ne sera interprétée qu’une seule fois. Mise en situation, diégétique, elle est également le commentaire du film dans lequel elle figure, ses paroles évoquant le tourbillon de la vie menée par l’héroïne. A ce titre, elle symbolise bien le « statut » ambigu de la chanson d’un film, à la fois dedans et dehors.