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Du concept de la personnalité de la marque au concept de la personnalité du modèle : une recherche exploratoire sur le
marché de l’automobile.
Par
Joël Gouteron,
maître de conférences de gestion à l’IUT du Limousin Résumé : Notre article est fondé sur l’existence potentielle du concept de la personnalité d’un modèle dans le secteur automobile. Cette étude empirique, réalisée auprès d’un échantillon des deux sexes et hétérogène en âge, démontre les validités discriminante et prédictive du concept de la personnalité du modèle ; elle prouve notamment que la situation d’utilisation envisagée du modèle dépend de la personnalité perçue du modèle. L’article se termine sur une discussion autour de l’utilité managériale du concept de la personnalité du modèle. Mots clés : Personnalité de la marque – Personnalité du modèle – Situation d’utilisation -Validité discriminante – Validité prédictive.
******************* Title : From the concept of brand personality to the concept of model personality : an exploratory research on the car market. Abstract : This article is founded on the potential existence of the concept of model personality in the automobile sector. This empirical investigation, based on a sample of the two sexes and heterogeneous about the age, reveals the discriminating and the predictive validities of the concept of model personality ; it especially proves that the anticipated situation of consumption is conditioned by the perception of the model personality. This study is concluded by a discussion about the managerial use of the concept of model personality. Key words : Brand personality – Model personality – Situation of consumption – Discriminating validity – Predictive validity.
Du concept de la personnalité à la marque au concept de la personnalité du modèle :
une recherche exploratoire sur le marché de l’automobile.
En marketing, la personnalité est le plus souvent associée à la marque. Depuis les travaux
d’Aaker (1997) qui définissent la personnalité de la marque comme « l’ensemble des
caractéristiques humaines associées à une marque », la multiplication des études réalisées sur
le sujet en témoigne. De telles études reposent sur la théorie de la congruence de l’image qui
énonce que les consommateurs vont préférer des marques dont les caractéristiques
psychologiques sont congruentes avec leurs propres caractéristiques psychologiques. Mais
l’étude de la personnalité ne s’est pas limitée à la marque et a été peu à peu élargie à des
objets commerciaux divers. Les travaux sur la personnalité ont indifféremment portés sur des
émissions télévisées (Ladhari, Boulaire et N yeck, 2004), sur des magasins (d’Astous, Said et
Lévesque, 2003), sur des enseignes de la grande distribution (Viot, 2002), sur des enseignes
bancaires (Paviot, 2001) ou sur des chaînes de restauration rapide (Siguaw, Mattila et Austin,
1999). Dans une perspective d’études qui vise à étendre le champ d’application de la
personnalité à des produits, il conviendrait de s’interroger sur les interactions entre la
personnalité d’une marque et celle d’un produit marqué. Peut-on véritablement parler de la
personnalité d’un produit ? Dans le cas d’une marque à la personnalité très dessinée et sous
l’effet d’un phénomène de halo, la personnalité d’un produit ne se confond-t-elle pas avec
celle de sa marque ? Dans la négative, on s’interrogerait sur l’extension de la mesure de la
personnalité de la marque à celle de la personnalité du produit. La personnalité du produit
implique-t-elle une refonte complète des dimensions psychologiques qui composent la
personnalité de sa marque ? Les mêmes adjectifs pour la mesure de la personnalité peuvent-ils
être indifféremment appliqués au produit et à la marque ? Sous l’hypothèse où l’instrument de
mesure est le même pour les deux objets, existe-t-il des écarts d’intensité entre la personnalité
de la marque et celle du produit ? Dans un tel cas, quels sont les risques d’incompatibilité
entre la personnalité perçue de la marque et celle du produit ? Comment respecter un
positionnement d’une marque axé sur un ensemble de traits tout en exploitant sur un plan
stratégique la personnalité de son ou de ses produits ?
Pour satisfaire à autant de questions, nous nous devions de sélectionner un secteur d’activités
qui soit propice à l’expression et à l’utilisation managériale de la personnalité d’un produit.
Après observations des stratégies de positionnement publicitaire et de communication, le
secteur de l’automobile nous est apparu comme un marché pouvant parfaitement convenir au
champ de notre expérimentation. A priori, la personnalité d’un modèle d’automobile nous
semble un concept vraisemblable puisque dans une pratique publicitaire ordinaire, les
modèles d’automobile sont parfois associés à des attributs de la personnalité. Le concept de
personnalité du modèle paraît en effet tout aussi familier aux professionnels du marketing de
l’automobile que celui de la personnalité de la marque. Si Citroën est considérée comme une
marque idéaliste (Kapferer, 1988), Mercedes comme une marque sérieuse (Koebel et
Ladwein, 1999), les modèles sont aussi qualifiés par des traits de personnalité qui participent
au marquage de leur territoire. Le constructeur d’automobiles Renault, dans sa volonté
politique de devenir un véritable « créateur de modèles », n’hésite pas à introduire la notion
de personnalité pour ses futurs modèles. Nous pouvons alors nous interroger sur la capacité de
Renault à renouveler un modèle à la personnalité aussi forte que Twingo (leblogauto.com), ou
bien sur le devenir du modèle Avantime censé ne ressembler à aucun autre véhicule pour une
identification immédiate (lagalaxie.com). En tant que base théorique sous-jacente, nos travaux
sur la personnalité du modèle utilisent la théorie de la congruence de l’image, à l’instar des
études qui portent sur la personnalité de la marque. Selon cette théorie, la préférence pour un
objet serait plus forte si la personnalité de l’objet correspond à celle de l’acheteur. Les
praticiens se font déjà l’écho d’une telle théorie en considérant la personnalité comme un
moyen de différencier un objet et comme un incitateur des préférences et des usages du
consommateur (Biel, 1993). L’intérêt de proposer un instrument qui mesure la personnalité de
modèles d’automobiles réside dans l’exploration d’incidences comportementales
nouvelles. Dans la plupart des théories en psychologie humaine, les aspects statiques de la
personnalité sont fondamentaux. La personnalité est considérée comme un ensemble de
facteurs qui résistent au changement, en dépit des occasions. Selon Allport (1937, p.48), la
personnalité « détermine une adaptation unique à son environnement », autrement dit la
personnalité est considérée comme une unité stable et individualisée d’ensembles de
conduites. Si la structure de la personnalité demeure identique à elle-même malgré les
circonstances, il va de soi que l’individu sera en quête d’un environnement compatible avec
ses traits de personnalité. Dans nos travaux sur le marché de l’automobile, nous émettons
l’hypothèse que la personnalité perçue d’un objet nourrit l’évaluation contextuelle de l’objet.
Si cette idée n’a guère de cohérence lorsqu’on l’applique à l’objet « marque », elle prend tout
son sens si l’on retient l’objet « modèle ». Selon la personnalité perçue d’un modèle,
l’automobile paraîtrait plus ou moins bien adaptée à une situation de consommation donnée.
Dans le cas où cette hypothèse verrait confirmation, la personnalité du modèle d’automobile
composerait par exemple un axe de communication qui, associé à une situation attendue sur
laquelle le modèle est positionné, renforcerait les préférences du consommateur à l’égard de
ce modèle.
Notre recherche vise à développer et à tester la validité d’un instrument permettant de mesurer
la personnalité de modèles d’automobile. Dans l’hypothèse où nous attribuons une bonne
validité de contenu à la personnalité du modèle, nous nous interrogeons désormais sur la
possibilité d’utiliser les dimensions et les marqueurs d’une mesure de la personnalité de la
marque afin de quantifier la personnalité du modèle. En ce sens, nos travaux poursuivent
plusieurs objectifs. D’une part, nous voulons vérifier la validité discriminante de l’échelle de
la personnalité du modèle en montrant que ce dernier concept se distingue de façon empirique
d’autres concepts connus comme la personnalité de la marque. D’autre part, nous voulons
prouver sa validité prédictive en montrant que le construit de personnalité du modèle proposé
permet de prédire le score d’un autre construit conceptuellement lié au premier. Ainsi, nous
souhaitons mettre en lumière les variations d’adaptation aux situations d’utilisation du modèle
selon ses traits de personnalité perçus.
Pour ce faire, notre article présentera les points généraux de la méthodologie utilisée avant
d’exposer nos mesures de la personnalité de la marque et de la personnalité du modèle ; des
analyses factorielles confirmatoires permettront de vérifier la structure, la fiabilité et la
validité des échelles de mesure proposées pour les deux construits pré-cités ; des résultats
seront développés dans le but de vérifier la validité discriminante et la validité prédictive du
concept de la personnalité du modèle, avant d’aboutir à une discussion finale autour des
implications managériales.
PRESENTATION DE LA METHODOLOGIE
La méthodologie générale
Le questionnaire a été structuré en trois grandes parties. La première partie a pour but de
mesurer la personnalité de la marque d’automobile Renault à l’aide de 42 traits issus de
l’échelle d’Aaker (1997). Cette échelle a été choisie car il s’agit de la première échelle de
mesure de la personnalité de la marque, et car elle a été déjà efficacement utilisée dans bon
nombre de travaux. Ses propriétés sont vues comme tout à fait intéressantes (Koebel et
Ladwein, 1999) et son intérêt managérial est reconnu, notamment en termes de stratégies de
communication (Ferrandi et Valette-Florence, 2002). La seconde partie porte sur la préférence
d’un modèle d’automobile de marque Renault, à choisir parmi une liste de 12 modèles
présents sur le marché à la période de l’administration du questionnaire (année 2008). La
marque Renault a été choisie en raison de sa stratégie de communication axée sur la création
(« Renault, créateur d’automobiles »), laquelle laisse supposer une différenciation des
modèles par leur personnalité. Il a été demandé aux répondants de retenir le modèle qui
répondrait le mieux à leurs besoins individuels d’utilisation dans l’absolu, sans considération
de prix notamment. Par la suite, une évaluation circonstancielle de ce modèle a été réalisée,
abordant le thème de l’adaptation du modèle choisi à 10 situations de consommation
potentielles (l’échelle allant de « modèle absolument inadapté à la situation » à « modèle
absolument adapté à la situation »). Les situations ont été caractérisées à partir de quatre des
cinq dimensions environnementales définies par Belk (1974) : l’environnement physique (en
ville), l’environnement social (seul, en couple, en famille), la perspective temporelle (en
semaine, en week-end) et la définition des rôles (pour les courses, pour le travail, pour les
vacances, pour transporter des objets encombrants). Les contextes de consommation du
produit ont été formulés à partir d’études empiriques réalisées dans le domaine automobile
(Berkowitz, Ginter et Talarzyk, 1977 ; Lemoine, 2002). Enfin, la troisième partie du
questionnaire est consacrée à la mesure de la personnalité du modèle d’automobile retenu par
le répondant, avec une nouvelle utilisation des 42 traits de l’échelle d’Aaker dans le but de
faciliter la comparaison entre la personnalité de la marque et la personnalité du modèle. Pour
chaque concept (personnalité de la marque, personnalité du modèle, situation d’utilisation),
nous avons choisi d’utiliser des échelles de type Likert en 7 points afin de rendre le
questionnaire homogène dans sa globalité. Le questionnaire a été rempli en auto-
administration par un échantillon de 202 individus des deux sexes (54% d’hommes et 46% de
femmes), lequel présentait des caractéristiques sociodémographiques diverses sur le plan de
l’âge (l’âge moyen est de 35 ans avec un écart-type de 13,5 ans) et du taux d’activité (70% de
personnes actives et 30% de personnes inactives). Cette hétérogénéité de la population a été
établie volontairement pour obtenir des réponses potentiellement différentes sur les questions
relatives au choix du modèle d’automobile préféré et aux situations d’utilisation anticipées.
La mesure de la personnalité de la marque
Dans un but exploratoire, une analyse factorielle avec rotation VARIMAX a été réalisée sur
l’ensemble des 42 items de la mesure initiale d’Aaker (1997). Une première analyse laisse
apparaître une structure en 6 axes, retenus d’après le critère de Kaiser1, et assez proches dans
leur composition de ceux définis en théorie dans les travaux d’Aaker (1997). Un premier
facteur rend compte de la séduction (dans le vent, excitante, fougueuse, imaginative,
séduisante, belle) et correspond à l’axe 1 d’Aaker nommé excitation. Un second facteur
traduit la sincérité (honnête, sincère, concrète, fiable, sûre) qui forme également l’axe 2 dans
l’échelle d’Aaker. Le troisième facteur dit de « masculinité » (masculine, virile), le quatrième
facteur dit de « féminité » (féminine, douce) ainsi que le cinquième facteur dit de « rigueur »
(technique, organisée) sont également des dimensions que l’on retrouve dans la mesure
d’Aaker sous des appellations quelque peu synonymes (la rudesse pour la masculinité, la
sophistication pour la féminité et la compétence pour la rigueur). Seul l’ultime facteur de
notre échelle dégageant des traits d’humanité (sentimentale, amicale) ne trouve pas d’écho
direct dans l’échelle de personnalité de la marque américaine, mais semble davantage attaché
à la dimension d’amabilité (chaleureuse, compatissante, gentille) dégagée par Ferrandi et
Valette-Florence (2002) dans leur transposition de l’échelle de la personnalité humaine de
Saucier (1994). Nous avons par la suite purifié la structure de la personnalité de la marque
1 Valeurs propres supérieures à 1.
grâce à diverses méthodes propres à l’analyse exploratoire, soit par le retrait d’items trop
fortement liés à plusieurs facteurs, soit par l’élimination de traits au contraire trop peu liés à
aucun des axes. Une seconde analyse factorielle conduit à la suppression du facteur féminité
(féminin, douce) et à l’élimination de trois autres items (imaginative, concrète, douce),
simplifiant ainsi la formation de certains autres facteurs. A l’issue de ces premiers pré-tests, la
personnalité de la marque paraît être un construit à cinq dimensions, à l’instar des mesures
proposées par Aaker (1997) ou bien par Koebel et Ladwein (1999). Néanmoins, une analyse
factorielle confirmatoire a montré un très mauvais ajustement de l’échelle aux données avec
cinq dimensions. Nous avons alors revisité l’exploration de la mesure en poursuivant
l’épuration de l’échelle de la personnalité de la marque. Respectant la règle mathématique de
Hair et alii2, nous avons rejeté les items dont les corrélations de structure étaient les plus
faibles sur le facteur étudié (charge inférieure à 0,70) ou insuffisamment faibles sur l’un des
autres facteurs (charge supérieure à 0,30). Au final, plusieurs solutions nous ont paru
admissibles qui, pour l’ensemble, suggèrent que la personnalité de la marque est un concept
tridimensionnel avec comme axe principal la séduction (dans le vent, excitante, fougueuse,
belle, distinguée, imaginative), puis avec comme axes secondaires la masculinité (masculine,
virile, rude) et la rigueur (technique, organisée). L’hésitation porte sur la formation de la
dimension de séduction, tantôt proposée en quatre traits tantôt en trois traits selon les
solutions, avec des combinaisons d’adjectifs différentes. Une autre indécision concerne la
dimension de masculinité, qui inclut ou exclut l’item « rude » selon les solutions adoptées.
Retenant que la personnalité de la marque était composée de trois facteurs latents de premier
ordre, nommés « séduction », « masculinité » et « rigueur », nous avons utilisé un modèle
d’équations structurelles pour étudier les solutions retenues. Globalement, les indices
2 Hair J.F., Anderson R.E., Tatham R.L. et Black W.C. (1998), Multivariate data analysis, 5e édition, New Jersey, Prentice-Hall International.
d’ajustement apparaissent comme bons et les paramètres sont élevés. En revanche, la valeur
de la variance extraite ne respecte pas la norme établie par Fornell et Larcker (1981)
puisqu’elle est très en deçà de 0,50 pour certains facteurs des modèles retenus. La validité
convergente n’étant pas établie, nous avons à nouveau purifié la mesure pour ne garder que
les six items de la mesure de la personnalité du modèle, laquelle fut élaborée simultanément à
celle de la personnalité de la marque. La solution définitive maintient les trois dimensions de
séduction (séduisante, belle), de masculinité (masculine, virile) et de rigueur (technique,
organisée), expliquant près de 82% de la variance totale (voir Tableau 1). La fiabilité des
dimensions du concept nous paraît acquise d’après les indications de Nunnally3, même si les
alphas de Cronbach sont d’un niveau très inégal selon les dimensions (de 0,69 pour la rigueur
à 0,88 pour la séduction). L’analyse factorielle confirmatoire apporte un soutien
supplémentaire à la conceptualisation du construit en trois dimensions et six items, les indices
d’ajustement étant excellents (CMIN/DF=0,499 ; RMR=0,020 ; GFI=0,995 ; AGFI=0,983 ;
CFI=1,000 ; RMSEA=0,000 ; P associé=0,931 ; CAICk=97,618 ; CAICs=132,474), les poids
factoriels (compris entre 0,682 et 0,949) et les statistiques t (comprises entre 3,945 et 7,500)
s’avérant largement conformes aux valeurs acceptables. D’après Kline4, la valeur maximale
du CFI ne signifie pas que le modèle s’ajuste parfaitement aux données mais simplement que
le chi-deux est à peu près égal aux degrés de liberté. Avec un tel modèle, la validité
convergente est vérifiée sur le facteur de séduction, même si l’indicateur présente quelques
faiblesses sur les autres facteurs (voir « Rhô de Convergence » dans le Tableau 1). Nous
avons toutefois maintenu la mesure car, eu égard aux conseils de Netmeyer et alii5, un rhô (p)
de validité convergente proche de 0,50 (i.e. supérieur à 0,45) demeure acceptable dans le cas
d’une création de mesure. La validité discriminante, quant à elle, a été établie selon la règle
3 Nunnally J. (1978), Psychometric theory, 2e édition, New-York, McGraw Hill. 4 Kline R.B. (2005), Principles and practice of strutural equation modeling, Guilford. 5 Netemeyer R.G., Bearden W.O. et Sharma S. (2003), Scaling procedures – issues and applications, Sage Publication.
préconisée par Anderson et Gerbing6. Le modèle testé a été comparé à un modèle contraint où
les corrélations entre les dimensions ont été fixées à l’unité. L’écart entre les Chi-deux des
deux modèles est statistiquement significatif (différence de Chi-deux entre M1 et M2 =
138,489, ddl=3, p<0,001). La validité discriminante de l’échelle de la personnalité de la
marque fait suite à sa fiabilité et à sa validité convergente, ce qui autorise son utilisation dans
la pratique.
Tableau 1. Mesure de la personnalité de la marque. Analyse factorielle exploratoire (rotation varimax).
Dimension Axe 1 Axe 2 Axe 3 Pourcentage de la variance 29,503% 26,943% 25,507% Pourcentages cumulés 29,503% 56,446% 81,953% Séduisante 0,914 0,107 0,196 Belle 0,931 0,085 0,137 Masculine 0,046 0,893 0,108 Virile 0,133 0,883 0,086 Technique 0,160 0,119 0,846 Organisée 0,146 0,075 0,860 Valeur propre 1,770 1,617 1,530 Alpha de Cronbach 0,874 0,760 0,683 Rhô de Convergence 0,672 0,477 0,479
La mesure de la personnalité du modèle
Les résultats, obtenus à l’aide d’une analyse en composantes principales avec rotation
VARIMAX, font émerger une structure factorielle en cinq dimensions. L’axe premier
regroupe les items relatifs à la séduction (dans le vent, excitant, fougueux, distingué,
séduisant, beau). L’axe second rassemble les items de la masculinité (masculin, viril). Le
troisième facteur correspond à la douceur (sentimental, féminin, doux). Le quatrième facteur
traduit la fiabilité (fiable, sûr, indépendant). Enfin, la cinquième dimension décrit la rigueur
6 Anderson J.C. et Gerbing D.W. (1988), Structural modeling in practice : a review and recommended two-step approach, Psychological Bulletin, 103 (3), 411-423.
(technique, organisé). Après examen des indices de fit, l’analyse factorielle confirmatoire n’a
cependant pas vérifié la structure multidimensionnelle en cinq facteurs. Un tel constat a
soulevé la nécessité de poursuivre la purification de l’échelle au niveau exploratoire. Les ACP
suivantes ont progressivement fait apparaître une structure en trois dimensions, de nature
analogue à celles relevées pour la mesure de la personnalité de la marque (la séduction, la
masculinité, la rigueur), avec des traits de personnalité identiques (dans le vent, séduisant,
beau, masculin, viril, technique, organisé). Finalement, quatre solutions nous ont paru
admissibles qui toutes apportent une combinaison originale de traits de séduction : « dans le
vent, séduisant, beau » pour la première solution, « séduisant, beau » pour la seconde solution,
« dans le vent, beau » pour la troisième solution et « dans le vent, séduisant » pour la
quatrième solution. Le comparatif entre analyses retenues laisse un doute sur l’importance du
facteur de séduction puisque selon les solutions examinées, l’axe fournit soit la part de
variance la plus forte (pour les solutions 1 et 2) soit la part de variance la plus faible (pour les
solutions 3 et 4). A priori, les quatre solutions présentent chacune des intérêts divergents (voir
Tableau 3). La première solution offre des indices de fiabilité très satisfaisants (l’alpha de
Cronbach le plus faible est de 0,821), à l’instar de la seconde solution qui montre également
un RMR de faible valeur (0,035). La troisième solution apporte simultanément un RMR
(0,034) et un RMSEA (0,039) faibles. Enfin, la quatrième solution procure l’avantage de
lisser l’ensemble des indices d’ajustement sur des valeurs médianes et tolérables (voir
Tableau 3). En revanche, seule la seconde solution a permis d’établir une bonne validité
convergente sur la totalité des dimensions puisque d’une part les tests t associés à chacune des
contributions factorielles λi (comprises entre 0,722 et 0,948) sont tous significatifs au seuil de
1% (les tests t sont compris entre 4,836 et 5,994), et puisque d’autre part les variances
moyennes extraites dépassent pour leur totalité les normes attendues (voir Tableau 2). Nous
avons donc conservé la deuxième solution car pour les trois dimensions, la variable latente
partage largement plus de 50% de sa variance avec ses mesures. La valeur du RMSEA est
toutefois plus élevée que pour deux des autres solutions (voir Tableau 3), mais elle demeure
inférieure à la valeur maximale préconisée par Steiger et Lind7 (RMSEA < 0,08, et si possible
< 0,05). La validité discriminante entre les variables latentes impliquées dans le modèle
retenu a également été étudiée au moyen de la différence de Chi-deux, vérifiant ainsi que
l’ajustement du modèle proposé est bien meilleur que celui d’un modèle hypothétique où les
énoncés des trois dimensions seraient fondus dans une seule dimension. Cette condition est
remplie puisque l’écart de Chi-deux entre le modèle testé et le modèle contraint s’avère très
significatif (différence de Chi-deux entre M1 et M2 = 267,286, ddl=3, p<0,001). La véritable
validité discriminante reste à établir, prouvant que le construit étudié est réellement distinct
dans la pratique d’un autre construit théoriquement similaire.
Tableau 2. Mesure de la personnalité du modèle. Analyse factorielle exploratoire (rotation varimax).
Dimension Axe 1 Axe 2 Axe 3 Pourcentage de la variance 29,247% 29,077% 28,099% Pourcentages cumulés 29,247% 58,324% 86,424% Séduisant 0,920 0,154 0,090 Beau 0,926 0,078 0,131 Masculin 0,106 0,918 0,120 Viril 0,124 0,918 0,110 Technique 0,121 0,161 0,893 Organisé 0,096 0,068 0,915 Valeur propre 1,755 1,745 1,684 Alpha de Cronbach 0,860 0,849 0,812 Rhô de Convergence 0,656 0,562 0,628
Tableau 3. Indices d’adéquation de la mesure de la personnalité du modèle.
Analyse factorielle confirmatoire (ML). Solutions X2 normé RMR GFI AGFI CFI RMSEA P associé CAIC k CAIC s
Solution 1 2,177 0,074 0,968 0,919 0,978 0,077 0,134 131,182 176,631
Solution 2 2,132 0,035 0,980 0,931 0,986 0,075 0,197 107,417 132,474
Solution 3 1,305 0,034 0,988 0,956 0,995 0,039 0,530 102,456 132,474
7 Steiger J.H. et Lind J.C. (1980), Statistical-based tests for the number of common factors, Congrès annuel de la Psychometric Society, Iowa City, IO.
Solution 4 1,957 0,053 0,981 0,933 0,986 0,069 0,249 106,368 132,474
PRESENTATION DES RESULTATS
La validité discriminante de la personnalité du modèle
La validité discriminante de l’échelle de la personnalité du modèle a été vérifiée dans un
premier temps par une analyse factorielle exploratoire incluant simultanément les variables de
la personnalité du modèle et celles de la personnalité de la marque. Eu égard aux informations
détenues sur le nombre de dimensions des deux mesures respectives de la personnalité,
l’analyse factorielle a été réalisée en levant le critère de Kaiser et en forçant l’extraction sur
six facteurs (les valeurs propres des axes non retenus avec une ACP forcée sur 6 facteurs
étaient toutefois très proches de 1 : 0,970 pour l’axe 5 et 0,905 pour l’axe 6). Les résultats de
cette analyse se trouvent dans le tableau N°4. Comme on peut le constater, les facteurs de la
personnalité du modèle se distinguent clairement de ceux de la personnalité de marque. Il est
intéressant de noter que la séduction du modèle forme un facteur séparé de la séduction de la
marque, que la masculinité du modèle est dissemblable de la masculinité de la marque ou que
les variables de rigueur du modèle et de la marque ne convergent pas vers un facteur unique.
De tels résultats constituent un encouragement à l’étude de la validité discriminante du
construit de la personnalité du modèle au sens donné par Fornell et Larcker (1981). Selon eux,
on peut conclure à une bonne validité discriminante lorsque la variance moyenne extraite (le
rhô de validité convergente) de chaque construit est supérieure au carré des corrélations que
celui-ci partage avec les autres construits. Ainsi, le carré de la corrélation entre les deux
facteurs de séduction étant de 0,303 (voir Tableau 5), cette valeur est bien inférieure aux deux
variances moyennes extraites correspondantes qui figurent dans les tableaux 1 (pVC=0,672)
et 2 (pVC=0,656). De même, les dimensions de masculinité ou de rigueur du modèle
partagent davantage de variance avec leurs items qu’avec les autres variables latentes étudiées
qui sont respectivement la masculinité ou la rigueur de la marque (voir Tableau 5). Par
conséquent, nous avons démontré que les variables latentes comparées et théoriquement
distinctes (séduction du modèle et de la marque, masculinité du modèle et de la maque,
rigueur du modèle et de la marque) sont également différentes au niveau statistique. Nous
concluons alors à une bonne validité discriminante du concept de la personnalité du modèle.
La vérification de l’hypothèse de la validité discriminante de la personnalité du modèle induit
des conclusions empiriques qu’il nous faut tester. Les résultats prouvent que la personnalité
du modèle est indépendante de la personnalité de la marque, même si les deux construits sont
liés (voir Tableau 5). L’étude des corrélations de Pearson atteste que plus une marque est
séduisante, et plus le modèle a tendance lui aussi à être séduisant. Il en est de même pour les
dimensions de masculinité et de rigueur qui lient positivement le modèle à la marque (voir
Tableau 5). Néanmoins, nous avons démontré que les concepts de personnalité de la marque
et de personnalité du modèle sont dissociés dans l’esprit du consommateur. Un individu peut
très bien trouver une marque séduisante mais ne pas automatiquement trouver un modèle de
cette marque séduisant. Il peut considérer la marque comme étant masculine ou rigoureuse
sans pour autant attribuer aux modèles de cette marque la même perception de la personnalité.
Si cette théorie est vraie, la personnalité perçue d’un modèle serait en opposition potentielle
avec la personnalité perçue de la marque. Pour trois modèles d’automobile donnés présentant
une taille de l’échantillon convenable (Clio, Mégane, Espace), nous avons utilisé la procédure
du test t pour échantillons appariés dans le but de comparer la moyenne attribuée à la marque
à celle attribuée au modèle sur des facteurs de personnalité identiques (séduction, masculinité
ou rigueur). Les variables traitées n’étant pas distribuées normalement, nous avons également
utilisé le test de rang de Wilcoxon pour deux échantillons liés qui confirme les résultats
obtenus avec le test t (voir Tableau 6). La Mégane est perçue comme étant beaucoup plus
séduisante que Renault en général, et aussi plus masculine que Renault. L’Espace est un
modèle vu comme étant plus rigoureux que sa marque, alors que la Clio est au contraire un
modèle vu comme étant moins rigoureux que sa marque. De tels résultats attestent de façon
empirique que la personnalité du modèle est dissociable de la personnalité de la marque.
Tableau 4. Mesure de la personnalité du modèle : validité discriminante. Analyse factorielle exploratoire (rotation varimax).
Dimension Axe 1 Axe 2 Axe 3 Axe 4 Axe 5 Axe 6 Pourcentage de la variance 14,775% 14,697% 14,682% 14,059% 13,513% 12,906% Pourcentages cumulés 14,775% 29,472% 44,154% 58,214% 71,726% 84,633% Séduisante (marque) 0,898 0,194 0,042 0,042 0,101 0,183 Belle (marque) 0,922 0,116 -0,014 0,107 0,087 0,119 Séduisant (modèle) 0,162 0,910 0,156 0,090 0,029 0,043 Beau (modèle) 0,145 0,894 0,070 0,107 0,018 0,200 Masculin (modèle) -0,015 0,113 0,911 0,120 0,143 0,024 Viril (modèle) 0,040 0,107 0,898 0,093 0,138 0,114 Technique (modèle) 0,077 0,093 0,162 0,875 -0,003 0,191 Organisé (modèle) 0,052 0,095 0,056 0,908 0,113 0,083 Masculine (marque) 0,059 -0,021 0,228 0,022 0,865 0,094 Virile (marque) 0,116 0,064 0,056 0,085 0,886 0,081 Technique (marque) 0,165 0,041 0,045 0,133 0,109 0,855 Organisée (marque) 0,121 0,190 0,091 0,132 0,070 0,810 Valeur propre 1,773 1,764 1,762 1,687 1,622 1,549
Tableau 5. Etude des corrélations entre les facteurs de la personnalité de la marque et les facteurs de la personnalité du modèle.
Séduction de la marque Masculinité de la marque Rigueur de la marque
Séduction du modèle 0,303 (Sig.=0,000) -0,003 (Sig.=0,967) 0,213 (Sig.=0,002)
Masculinité du modèle -0,031 (Sig.=0,661) 0,293 (Sig.=0,000) 0,109 (Sig.=0,122)
Rigueur du modèle 0,093 (Sig.=0,190) 0,082 (Sig.=0,247) 0,266 (Sig.=0,000)
Tableau 6. Comparatif entre la personnalité de la marque Renault et la personnalité des modèles Clio (62 individus), Mégane (40 individus) et Espace (26 individus) : statistiques
pour échantillons appariés (test t et test de Wilcoxon).
Paire de variables testée Test t (Sig.) Test Z (Sig.)
Séduction marque Renault - Séduction modèle Clio -0,420 (0,676) -1,258 (0,208) Masculinité marque Renault – Masculinité modèle Clio -0,884 (0,380) -0,831 (0,406) Rigueur marque Renault – Rigueur modèle Clio -2,557 (0,013) -2,205 (0,027) Séduction marque Renault - Séduction modèle Mégane 2,882 (0,006) -2,742 (0,006) Masculinité marque Renault – Masculinité modèle Mégane 2,150 (0,038) -2,110 (0,035) Rigueur marque Renault – Rigueur modèle Mégane -0,430 (0,670) -0,497 (0,619) Séduction marque Renault - Séduction modèle Espace -0,839 (0,410) -0,800 (0,424) Masculinité marque Renault – Masculinité modèle Espace 1,331 (0,195) -0,952 (0,341) Rigueur marque Renault – Rigueur modèle Espace 2,398 (0,024) -2,832 (0,005)
La validité prédictive de la personnalité du modèle
A ce stade de l’étude, il nous reste à tester la validité prédictive du construit de la personnalité
du modèle en évaluant ses effets sur un construit qui en est théoriquement la conséquence.
Ainsi, nous avons tenté de vérifier qu’il existe des traits de personnalité « situationnels »,
c’est-à-dire que pour un modèle d’automobile le consommateur associe naturellement des
situations d’utilisation à des traits de personnalité. Afin de mettre au jour cette relation, nous
avons calculé des coefficients de corrélation de rang (Tau-b de Kendall et Rho de Spearman)
entre les trois dimensions de la personnalité du modèle et dix situations d’utilisation censées
être plus ou moins adaptées au modèle d’automobile sélectionné par le répondant. Les
résultats de cette analyse ont été repris dans le tableau N°7. Sur un total de 30 paires de
variables mises en relation, 12 laissent apparaître des tests qui sont significatifs avec un risque
d’erreur inférieur à 1%. Plus un modèle d’automobile est perçu séduisant et plus il semble
conçu pour les situations d’utilisation suivantes : seul, en couple, le week-end, le travail, en
ville. Plus le modèle d’automobile paraît masculin et plus il est déclaré adapté pour partir en
vacances et/ou transporter des objets encombrants. Enfin, plus le modèle d’automobile est vu
comme étant rigoureux et plus le consommateur admet qu’il convient pour les situations
énumérées ci-après : en famille, le week-end, les courses, les vacances, le transport d’objets
encombrants. Le second volet de notre analyse sur la validité prédictive de la personnalité du
modèle repose sur une régression logistique binaire visant à cerner les liens de dépendance
entre variables fortement corrélées. Nous avons pour ce faire composé pour chaque variable
dépendante (ici les variables situationnelles) deux classes d’observations homogènes à l’aide
d’une analyse des nuées dynamiques. La statistique de Wald nous autorise la prédiction à
l’appartenance des répondants à l’une ou l’autre des classes à partir de la personnalité perçue
du modèle. D’après les résultats exposés dans le tableau N°8, nous pouvons affirmer que la
séduction perçue d’un modèle définit son adaptation pour la conduite en ville, que
l’impression de masculinité d’un modèle génère un sentiment d’adaptation plus ou plus
développé pour le transport d’objets encombrants et pour les départs en vacances. Enfin, la
rigueur est une dimension de la personnalité qui apporte une crédibilité au modèle plus ou
moins grande pour les usages qui suivent : les courses, le week-end, les vacances et surtout le
transport d’objets encombrants et la conduite en famille. Le test U de Mann-Whitney, qui
permet de comparer les réponses dans le cas d’une variable ordinale et non plus métrique,
corrobore ces conclusions. Pour finir, nous avons conduit une analyse factorielle
confirmatoire afin d’évaluer la qualité globale du modèle dégagé par l’étude exploratoire. Les
meilleurs indices d’ajustement sont obtenus lorsque sont retirées les situations d’utilisation
« ville », « week-end » et « transport d’objets ». L’analyse des liens structurels, tous
significatifs, indique que la rigueur est la dimension influençant le plus fortement le contexte
d’utilisation du modèle, alors que la séduction a l’influence la plus faible. L’examen
approfondi des indices d’ajustement permet de conclure à une qualité satisfaisante du modèle
(CMIN/DF=1,773 ; RMR=0,069 ; GFI=0,961 ; AGFI=0,916 ; CFI=0,979 ; RMSEA=0,060 ; P
associé=0,276 ; CAICk=187,799 ; CAICs=283,872). La personnalité du modèle influence
bien le contexte d’utilisation envisagé de l’automobile lorsqu’il est réduit à ce sous-ensemble
de situations : la famille, les courses et les vacances. On peut ainsi clore cette analyse en
assurant la bonne validité prédictive du concept de la personnalité du modèle.
Tableau 7. Etude des liens de corrélation entre la personnalité du modèle et la situation d’utilisation : Tau-b de Kendall et Rho de Spearman.
Situations Corrélations Dimensions de la personnalité du modèle
Séduction Masculinité Rigueur Seul Tau-b de Kendall (Sig.)
Rho de Spearman (Sig.) 0,145 (0,005) 0,195 (0,005)
-0,087 (0,095) -0,118 (0,094)
-0,045 (0,393) -0,057 (0,418)
Couple Tau-b de Kendall (Sig.) Rho de Spearman (Sig.)
0,142 (0,007) 0,193 (0,006)
-0,075 (0,155) -0,092 (0,195)
0,104 (0,050) 0,135 (0,055)
Famille Tau-b de Kendall (Sig.) Rho de Spearman (Sig.)
-0,001 (0,985) 0,001 (0,989)
0,093 (0,071) 0,123 (0,081)
0,318 (0,000) 0,419 (0,000)
Semaine Tau-b de Kendall (Sig.) Rho de Spearman (Sig.)
0,100 (0,059) 0,130 (0,065)
-0,087 (0,099) -0,114 (0,106)
-0,006 (0,913) -0,008 (0,906)
Week-end Tau-b de Kendall (Sig.) Rho de Spearman (Sig.)
0,161 (0,002) 0,216 (0,002)
-0,039 (0,459) -0,052 (0,464)
0,226 (0,000) 0,294 (0,000)
Courses Tau-b de Kendall (Sig.) Rho de Spearman (Sig.)
0,090 (0,088) 0,124 (0,080)
0,043 (0,420) 0,051 (0,472)
0,181 (0,001) 0,238 (0,001)
Travail Tau-b de Kendall (Sig.) Rho de Spearman (Sig.)
0,168 (0,001) 0,221 (0,002)
-0,064 (0,224) -0,084 (0,233)
-0,035 (0,507) -0,046 (0,512)
Ville Tau-b de Kendall (Sig.) Rho de Spearman (Sig.)
0,164 (0,001) 0,219 (0,002)
-0,087 (0,093) -0,126 (0,075)
-0,050 (0,330) -0,065 (0,359)
Vacances Tau-b de Kendall (Sig.) Rho de Spearman (Sig.)
0,068 (0,188) 0,095 (0,179)
0,146 (0,004) 0,191 (0,007)
0,315 (0,000) 0,414 (0,000)
Objets Tau-b de Kendall (Sig.) Rho de Spearman (Sig.)
-0,052 (0,305) -0,074 (0,296)
0,137 (0,007) 0,189 (0,007)
0,305 (0,000) 0,403 (0,000)
Tableau 8. Etude de l’influence de la personnalité du modèle sur la situation d’utilisation anticipée : test non paramétrique pour deux échantillons indépendants (test U de Mann-
Whitney) et régression logistique binaire (test de Wald).
Situations Séduction Masculinité Rigueur
Mann-W. (Sig.) Wald (Sig.) Mann-W. (Sig.) Wald (Sig.) Mann-W. (Sig.) Wald (Sig.) Seul -1,182 (0,237) 2,441 (0,118) Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé
Couple -1,505 (0,614) 0,650 (0,420) Non Corrélé Non Corrélé -1,369 (0,171) 1,866 (0,172) Famille Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé -4,868 (0,000) 19,156 (0,000) Semaine Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé
Week-end -0,081 (0,936) 0,027 (0,869) Non Corrélé Non Corrélé -2,889 (0,004) 7,908 (0,005) Courses -0,285 (0,776) 0,233 (0,630) Non Corrélé Non Corrélé -2,113 (0,035) 4,439 (0,035) Travail -0,862 (0,389) 2,524 (0,112) Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé Ville -2,544 (0,011) 6,772 (0,009) Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé Non Corrélé
Vacances Non Corrélé Non Corrélé -2,472 (0,013) 6,126 (0,013) -3,826 (0,000) 13,478 (0,000) Objets Non Corrélé Non Corrélé -2,612 (0,009) 6,679 (0,010) -5,047 (0,000) 19,898 (0,000)
DISCUSSION ET CONCLUSION
Nos travaux établissent la stabilité ainsi que les validités discriminante et prédictive de
l’échelle de la personnalité du modèle. Les données confortent la conceptualisation de la
personnalité du modèle comme un facteur de second ordre incluant trois facteurs de premier
ordre qui sont la séduction, la masculinité et la rigueur. Elles soutiennent également la
conceptualisation de la personnalité du modèle comme un construit empiriquement
dissemblable de la personnalité de la marque, bien que les dimensions et les marqueurs de la
personnalité soient strictement les mêmes. Enfin, nos travaux confirment la validité prédictive
de l’échelle de la personnalité du modèle en démontrant son influence sur des variables
dépendantes représentées dans cette étude par une consommation situationnelle du modèle.
Nous sommes conscients que nos travaux font état d’un traitement partiel de la validité de
trait. La validité convergente de nos mesures de la personnalité est évaluée à partir des deux
seuls critères de Fornell et Larcker8. Le premier critère repose sur un test t associé à chacune
des contributions factorielles, lequel doit être significatif au seuil de 5%. La seconde exigence
porte sur un rhô de validité convergente supérieur à 0,5, la variance du construit devant
effectivement être davantage expliquée par les items qui le mesurent que par l’erreur. Il
convient de noter que la validité convergente calculée sur la base de ces deux critères n’offre
que des signes de validité par rapport au modèle proposé. Un véritable travail de validation
devrait se fonder sur l’utilisation concomitante d’outils de mesure alternatifs, ce que nous
n’avons pas réalisé sciemment dans ces travaux. Pour ne pas décrédibiliser un questionnaire
d’une durée d’administration déjà longue, nous avons centré exclusivement notre étude autour
de la validité discriminante et de la validité prédictive du concept de la personnalité d’un
modèle d’automobile. En conséquence, la validité convergente de la personnalité du modèle
devrait être prise en considération dans de futurs travaux. Selon Evrard et alii9, la validité
convergente permet de vérifier si « des indicateurs supposés mesurer le même phénomène
sont effectivement corrélés ». Une matrice MTMM pourrait être construite dans ce but. Le
principe fondamental de la matrice MTMM est de croiser des méthodes d’évaluation
8 Fornell C. et Larcker D.F. (1981), Evaluating structural equation models with unobservable variables and measurement error, Journal of Marketing Research, 18, 3, 39-50. 9 Evrard Y., Pras B. et Roux E. (2003), Market : études et recherches en marketing (3e édition), Paris, Dunod.
différentes des phénomènes mesurés. Dans notre cas, nous pourrions mettre en relation notre
échelle avec d’autre échelles existantes qui seraient soit des transpositions d’échelles de
personnalité humaine à l’objet commercial étudié (Ferrandi et Valette-Florence, 2002, ont
notamment proposé une version allégée des marqueurs de Saucier, 1994), soit des échelles
développées spécifiquement pour un objet commercial (Viot, 2002). D’autre part, nous
rappelons que cette première phase dans l’élaboration d’une échelle de mesure de la
personnalité appliquée au modèle, est menée sur un échantillon de convenance d’assez faible
taille dans un cadre purement exploratoire. De prochaines études devraient examiner la
validité de l’échelle sur la base d’un échantillon plus grand et plus diversifié, qui soit
véritablement représentatif de la population française concernée par l’objet, afin d’évaluer sur
de solides fondements empiriques la validité nomologique du concept de la personnalité du
modèle.
L’extrapolation d’une mesure de l’échelle de la personnalité de la marque à d’autres objets
commerciaux adjacents a le mérite d’ouvrir un nouveau champ d’expérimentation concernant
le potentiel de prédiction de la personnalité. Il est aujourd’hui couramment admis que la
personnalité joue un rôle important dans la relation consommateur-marque (Ji, 2003),
contribue à la fidélité à la marque de l’acheteur (Huber et alii, 2000) et produit un effet direct
sur un ensemble d’intentions favorables à la marque (Hayes, 2000). L’application du concept
de personnalité au modèle découvre des perspectives d’analyse contextuelle inapplicables
dans le cas d’une marque à l’utilisation multisituationnelle. Il convient d’étudier l’impact de
la personnalité sur l’utilisation de l’objet dans une situation donnée, la personnalité
apparaissant alors comme un antécédent de l’attitude à l’égard d’une consommation
circonstanciée. Pour une situation d’utilisation (voire d’achat) donnée, le consommateur
présenterait des dispositions à juger favorablement un produit (et à l’utiliser) si la situation
(notamment psychologique, au sens de Lutz et Kakkar, 1975) est en cohérence avec la
personnalité de l’objet. Dans ce cadre hypothétique, il conviendrait de cerner les antécédents
de la situation subjective et de lier le construit de personnalité à un ensemble de conséquences
attitudinales et comportementales, dans le but de justifier l’intérêt porté à l’association entre la
situation et les traits perçus de la personnalité de l’objet. La personnalité du modèle peut
également contribuer à la formation de facteurs psychologiques pour caractériser une situation
subjective. Autre champ de recherche déjà suggéré par Ambroise et alii (2004), il peut
sembler important de savoir si la congruence entre les traits de personnalité humains et ceux
de l’objet (ici le modèle) est liée à des facteurs situationnels objectifs de consommation
comme par exemple l’environnement social. Subséquemment à l’intérêt théorique et
conceptuel de la personnalité du modèle, il faut attendre l’insertion d’un tel concept dans le
développement de modèles complexes pour assurer de sa bonne validité nomologique.
L’utilisation managériale la plus courante de la personnalité des marques réside dans sa
capacité à positionner les marques les unes par rapport aux autres (Ambroise et alii, 2004 ;
Ferrandi et Valette-Forence, 2002 ; Viot, 2002). Si l’on transpose cet emploi au modèle, les
résultats de notre étude invitent les entreprises à faire preuve de cohérence car la personnalité
du modèle doit avant toute chose préserver la personnalité de sa marque. Certes, notre étude a
prouvé qu’un modèle exprime un physique, un style et un caractère qui lui est particulier. Une
entreprise qui utilise la personnalité à titre de critère de positionnement ne peut donc ignorer
qu’il existe dans l’esprit des individus de sa cible une personnalité qui est propre à chaque
modèle, totalement différenciée de celle de la marque à laquelle les modèles sont rattachés. La
personnalité du modèle constituerait a priori pour les praticiens un nouvel outil stratégique
dont l’utilité serait soit d’attirer une clientèle potentielle sensible aux traits qui forgent la
personnalité du modèle, soit d’améliorer le positionnement des modèles en se servant de leur
personnalité pour les différencier. En conséquence, et du fait que le consommateur dissocie la
personnalité du modèle de celle de sa marque, une personnalité de marque perçue telle que
voulue par l’entreprise ne signifie pas que le modèle portera dans l’esprit du consommateur
automatiquement les mêmes traits que sa marque. Il paraît donc indispensable de réserver si
nécessaire un budget pour une communication spécifique autour de la personnalité du modèle,
lorsque celle-ci participe indubitablement au positionnement du dit modèle. Cette conclusion
soulève aussi l’intérêt de mettre au point un baromètre de personnalité des modèles en tant
qu’outil de gestion stratégique. Les responsables marketing pourraient, grâce à cet outil,
contrôler l’évolution du positionnement des modèles et aussi surveiller l’écart entre la
personnalité du modèle et celle de la marque. Les résultats de l’étude barométrique pourraient
si nécessaire s’accompagner d’actions de communication visant à corriger la personnalité
d’un modèle lorsqu’elle s’écarte soit du positionnement recherché dans l’absolu pour le
modèle soit de l’image de sa marque.
De toute évidence, la personnalité du modèle ne doit pas se substituer aux autres éléments de
positionnement mais simplement les compléter. Etant donné que la personnalité du modèle est
dépendante de la personnalité de sa marque, la première ne doit pas entrer en contradiction
avec la seconde, au risque indubitable de troubler le positionnement de la marque. La forte
corrélation entre la personnalité de la marque et celle du modèle signifie qu’un modèle dont la
personnalité est mal perçue peut altérer la personnalité de sa marque, tout comme d’ailleurs
une personnalité de la marque mal interprétée peut nuire à la personnalité de ses modèles.
Ainsi, il est non seulement indispensable de s’assurer que la personnalité du modèle est
correctement perçue mais aussi qu’elle n’entame ni la personnalité de la marque ni le
positionnement originel du modèle. En revanche, la personnalité du modèle peut être utilisée
pour renforcer un positionnement de marque déjà axé sur la personnalité sous la condition
qu’il existe des traits de personnalité communs aux deux objets. La personnalité du modèle
peut également servir à clarifier le positionnement de modèles entre eux, soit d’une même
marque soit de marques concurrentes. Elle ne peut certes pas remplacer des éléments de
positionnement existants (la situation d’utilisation par exemple) mais seulement les étayer au
travers de toute forme d’expression du modèle, soit par exemple par le biais du dessin d’une
ligne de modèle soit par le biais de différentes actions de communication (publicités, actions
de sponsoring, relations publiques, etc.). Il s’agirait de définir le plan d’action le plus efficace
pour rejoindre des consommateurs déjà ciblés, et d’alimenter le positionnement prédéfini en
mettant en valeur les traits de la personnalité qui lui correspondent. Nos travaux ont déjà
insisté sur l’intérêt d’associer aux modèles, dans un contenu publicitaire notamment, des
attributs de la personnalité en accord avec les situations dans lesquelles la cible est supposée
utiliser le modèle. Ces travaux invitent de futures recherches à multiplier les associations de
traits de personnalité d’un modèle à d’autres critères de segmentation utilisés de façon
classique sur le marché automobile (sexe, style de vie, bénéfices produits, etc.). De façon plus
étendue, nos travaux sont également une incitation à une prise en compte plus systématique
du statut de la marque (marque enseigne, marque ombrelle, marque gamme) dans l’étude de la
personnalité, et à une compréhension élargie des interactions entre les personnalités d’objets
commercialement attenants. Ces travaux suggèrent toutefois que si l’extrapolation du concept
de personnalité à différents objets semble riche d’utilisation, il doit être exploité avec la plus
grande des circonspections.
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