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Droit fiscal 20102011 Valérie Nicaise

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  • Droit  fiscal  2010-2011  Valérie  Nicaise  

     

  • Droit fiscal – Valérie NICAISE – Master 1 (2010-2011)    

    Introduction Nous verrons les aspects constitutionnels (compétences) et la TVA. On peut le contacter par email. Les documents seront sur icampus et notamment des exemples de questions d’examen. Le droit fiscal est une matière qui bouge énormément : il y a des nouvelles lois tout le temps. Tous les jours une ou plusieurs dispositions fiscales sont modifiées. C’est plus lié à la vie économique. Il y aura des syllabus mais il faut aussi connaitre le cours oral. Au cours oral, il insiste sur certains aspects et met en contexte avec des exemples de l’actualité ou jurisprudentiels. Examen écrit avec des questions sur les deux parties. Il y a des cas pratiques simplifiés qui font appel aux notions vues au cours pour Traversa. Il faut appliquer la théorie vue au cours. Il y a beaucoup de lois fiscales. Pour l’examen, on ne doit pas avoir un code fiscal exhaustif. Dans la partie générale, on aura des normes de base qui parlent du domaine fiscal. On peut avoir les lois à l’examen mais également la jurisprudence (fortement encouragés de la lire et de la prendre avec nous). Pour la TVA on verra par exemple que ce sont les arrêts de la CJCE qui sont le pilier de la matière. Remarque: Quelle langue parle le droit fiscal ? La plus grande partie de la doctrine en Belgique est écrite en néerlandais. Le droit fiscal international et européen parle anglais.

  • Droit fiscal – Valérie NICAISE – Master 1 (2010-2011)    

    POURQUOI ETUDIER LE DROIT FISCAL ? Pour apprendre à répondre à certaines questions qui entourent tout d’abord la notion même de droit fiscal (qu’est-ce que le droit fiscal par exemple, qu’est-ce que l’impôt ? Quelles autorités peuvent prélever l’impôt ? Qui doit payer l’impôt et qui ne doit pas ? Comment le payer ? Quelles sont les garanties des contribuables ? Répartition des compétences entre autorités publiques ?) Cette étude prend toute son importance dans l’actualité. Il y a deux nouvelles qui font la une depuis des années : la crise financière et le conflit politique et institutionnel belge. Ces deux phénomènes sont intimement liés au niveau fiscal.

    - La crise économique Elle a en outre été le résultat de différentes personnes qui ont été expulsées,… Il y a eu une baisse des recettes fiscales qui s’en est suivie puis une crise financière. Sur la richesse créée tous les états du monde perçoivent l’impôt. Quand les richesses diminuent sur un territoire, les recettes diminuent. L’année passée les recettes fiscales on chutées de 95 milliards d’euros à 86 milliard pour la Belgique. C’est bien plus que dix pourcents : il a fallu fonctionner de la même manière mais avec moins de budget. D’où l’augmentation du déficit. Peut-on donc continuer avec le même modèle fiscal ? Le système fiscal tel qu’on le connaît maintenant connaît des risques de stabilité en période de crise. Car cela conduit à des baisses drastiques des impôts en tant de crise et cela a un impact sur le bien être général des citoyens et des entreprises car les institutions ont moins d’argent.

    - On ressent aussi une crise institutionnelle. La pierre sur laquelle les négociateurs ont buté a été de nature fiscale et financière. Le moment de la rupture des négociations a été lorsque du coté francophone on a voulu un refinancement de la région bruxelloise sans l’inclure dans la réforme de la loi de financement comme le voulaient les flamands. Cette loi attribue des ressources financières et fiscales aux régions et communautés.

    Tant d’un point de vue international que d’un point de vue national la fiscalité est au cœur du débat public. Nous verrons donc rapidement les aspects politiques et économiques du droit fiscal pour coller à l’actualité. Aperçu historique Revenons en arrière… La fiscalité a toujours été un élément important de l’évolution des états. Prenons les révolutions française et américaines.

    • En 1788, il y a eu deux famines en France et cela a appauvri la bourgeoisie et les paysans mais la pression fiscale a augmenté à ce moment là. Louis 16 maintient des impôt alors qu’ils sont moins riches : il faut s’attendre à des troubles politiques importants qui étaient aussi générés par l’inégalité fiscale. La noblesse et le clergé avaient des privilèges fiscaux donc il y avait une inégalité dans la charge de l’impôt. Avec tout ca on a eu la révolution française.

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    • La révolution américaine était importante aussi pour la fiscalité. Avant

    c’était des colonies du royaume d’Angleterre, qui n’était pas souveraines. Les lois des impôts étaient votées par le parlement britannique à Londres. Ce parlement a voulu instaurer un nouvel impôt sur le thé à destination des états Unis, supportés par les habitants des colonies américaines. Cela a provoqué la Boston Tea Party : des colons américains qui se sont rués dans le port de Boston sur les bateaux de thé et ont jeté les caisses d e thé à la mer : cela a déclenché la révolution américaine.

    On peut voir que la fiscalité a un impact direct sur certains phénomènes historiques très connu. Prenons aussi l’Union Européenne. La première mise en commun forte au niveau européen c’était l’Union douanière : ce sont des impôts ! C’est ce processus qui a été le précurseur de l’union économique et politique, toujours en évolution. On retrouve une double tension en matière fiscale :

    - Verticale Qui doit percevoir l’impôt ? Quel niveau de pouvoir ? Faut-il le centraliser ou au contraire le décentraliser ? Les arguments en faveur d’une plus grande centralisation, c’est d’avoir un impôt identique sur tout le territoire (exemple pour une société qui a des entreprises dans les 27 pays, ils veulent les mêmes taux partout) qu’on retrouve notamment pour l’impôt des sociétés. D’autres veulent un impôt décentralisé, régionalisé, pour permettre au législateur régional d’être plus attentif aux attentes de sa population. L’impôt est quelque chose de trop lié à un contexte social pour être centralisé. Par exemple pour les entreprises. Donc c’est un paradoxe : centraliser ou décentraliser ?

    - Horizontale C’est au niveau de la répartition de la charge fiscale entre les différents contribuables. On retrouve cette tension fort entre équité sociale (l’impôt doit être juste et toucher tous les contribuables selon leurs capacités) et efficacité (du rendement de l’impôt et/ou efficacité économique aussi : il faut adapter la fiscalité à la réalité économique, diminuer l’impôt pour augmenter le rendement…). Tension entre justice fiscale et efficacité.

    Etant donné que la fiscalité est si vaste et touche tant de personnes, le domaine de la fiscalité touche un tas de métiers et de secteurs. Derrière l’impôt il y a toujours des personnes : qui le payent et d’autres qui l’appliquent. Les métiers de la fiscalité sont comme illimités. On trouvera des gens qui font de la fiscalité dans tous les domaines (avocats, notaires, magistrats, administration publique, institutions européennes et internationales, entreprises, ASBL). Quelle que soit la matière qu’on fasse, il faut avoir des réflexes car en tant que contribuable on sera confronté à ce type de règle.

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    Définition à donner au droit fiscal Ce droit est lié avec l’impôt mais pas uniquement. Dans le syllabus il y a plusieurs définitions qui sont utiles en guise d’introduction.

    - Jean van Houtte Une définition vient de Jean van Houtte. Il définit le droit fiscal comme « l’étude juridique de la fiscalité ». Cette définition met l’accent sur le fait que l’impôt fait naitre une créance de l’état vis à vis du contribuable. C’est un rapport d’obligation au sens du droit fiscal et non du droit civil. Donc le rapport entre état et contribuable est un rapport obligatoire et non voulu : l’état peut exiger que les citoyens lui versent une partie de leur revenu ou de leur patrimoine. Il faut compléter cette définition car là on dirait un rapport purement unilatéral : c’est l’état qui a une créance et le contribuable a une dette. Il y a en fait aussi un tas d’obligations qui pèsent sur l’état : cela peut être vu comme des droits du contribuable. Donc au delà du caractère obligatoire, il y a aussi des droits que le contribuable a. L’état impose l’impôt dans les formes et les manières imposées par le droit fiscal. Donc ce droit est en quelque sorte la traduction juridique d’une atteinte à la liberté des citoyens. Mais c’est aussi un droit qui a la forme de la protection des contribuables : il encadre le pouvoir de l’administration et du législateur fiscal notamment dans la dette d’impôt : elle ne peut être fixée hors le cadre légal. Ce principe de la légalité est un droit du contribuable. Le particulier peut demander que l’administration n’applique et ne demande que ce qui est prévu par la loi. La dimension centrale de la loi en matière fiscale doit être vue comme une garantie du droit des contribuables.

    - Définition politique

    Une autre définition parle de répartition entre l’état et les contribuables. C’est une définition politique car c’est le droit fiscal tel qu’il serait idéalement mis en œuvre : il faudrait idéalement fixer la participation selon la capacité à donner une partie de leurs ressources aux institutions publiques. C’est un idéal et ce n’est pas toujours le cas. Le législateur peut décider de réduction d’impôt pour des motifs qui ne soient pas sociaux. De même pour l’exonération. Par exemple, en matière de fiscalité environnementale, lorsque l’état fait une mesure fiscale pour encourager la vente de panneau solaire. Le but, ce n’est pas de s’assurer que les personnes qui profitent de l’exonération sont des personnes qui ne pourraient pas payer les impôts. On veut en vendre donc on fait une politique générale via l’outil fiscal mais cela n’a rien à voir avec la capacité contributive.

    - Tiberghien

    Tiberghien a une définition beaucoup plus concrète : le droit fiscal est un droit né dans des époques et des morceaux séparés, dont les textes sont écrits à la hâte. Il parle aussi d’idéologie et de chaos désordonné. C’est utile car cela permet d’aborder le droit fiscal avec de la philo.

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    On est souvent devant des textes qui ont été modifiés très vite, écrits très vite ou qui ont perdu en cohérence. Donc il faut réussir à expliquer ces textes par des contraintes politiques. Ils sont votés sous la pression d’idéologies diverses et changeantes. Par exemple, certains lobbys revendiquent des mesures fiscales et quand c’est efficace ils les obtiennent mais c’est dur après coup d’insérer ces mesures fiscales dans une politique fiscale plus générale. On a voulu baisser la TVA dans les restaurants par exemple mais ce qui a motivé le législateur, cela a été de faire un geste pour le secteur. Cela explique la ratio legis de cette modification mais on ne peut pas insérer cette mesure dans la philosophie générale de la TVA car cela échappe à une idée globale de cet impôt. Cette mesure ne s’explique que par une mesure ponctuelle et par la volonté de faire un geste pour un secteur. Il y a un tas d’exemples de mesures votées de la sorte donc dans le cadre d’un accord entre pouvoirs politiques (ou certains qui font une pression sur le pouvoir politique). Nous, on ne sait pas ce qui se passe derrière chaque mesure d’impôt ou de TVA mais on va essayer de décoder ce qui se passe derrière pour comprendre qu’on n’est pas devant un tout cohérent ou un code bien agencé. C’est un ensemble parfois disparate de mesures qui poursuivent des objectifs différents. Donc le droit fiscal, ce sont les règles qui sont relatives à

    - l’établissement (création d’impôts), - la perception (l’administration fiscale se fait verser l’impôt par le

    contribuable) - la contestation des impôts (le contribuable n’est pas d’accord).

    Ce sont des règles qui déterminent la nature et l’étendue : o des pouvoirs d’imposition de l’autorité publique o des obligations des contribuables.

    Objectif L’objectif du droit fiscal, c’est de répartir les couts du financement des autorités et des politiques publiques. Ce n’est pas l’objectif exclusif car certaines règles fiscales ne sont pas motivées par un besoin de financement des services publics (mais on utilise la fiscalité comme instrument au service d’autres branches de droit ou de politique générale). Droit fiscal et branches du droit On a des cours séparés donc ca laisse à penser que les branches du droit sont hermétiques. Mais le droit est un et unique. On s’en fout que la réponse à un problème soit sous le label fiscal, des biens, des obligations,… Même dans des problématiques purement fiscales, on doit jongler avec les différentes branches du droit. Donc on doit être sensibilisé à l’interdisciplinarité qu’il y a dans le droit lui-même.

    - Le droit fiscal est une branche de droit public au sens strict On est dans un rapport vertical entre l’état, les institutions publiques et le citoyen.

    o Ce sont les institutions de droit constitutionnel qui vont prélever l’impôt.

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    o C’est aussi une branche de droit administratif spécial car c’est un droit administratif appliqué à une administration particulière. Il y a des recours spécifiques, des agents spéciaux avec des pouvoirs particuliers. Mais c’est une logique administrative et les principes de bonne administration doivent être respectés. Comme cela fait partie du droit public, il y a une grande importance accordée aux droits de l’homme et libertés publiques. Dans la jurisprudence du Conseil d’Etat pour les libertés des citoyens, cela parle souvent de fiscalité. En effet la fiscalité restreint les libertés… Certains arrêts même de la CEDH portent sur le droit fiscal, même si a priori cela ne rentre pas dans le champ d’application de la Convention. Il y a aussi tout un tas de libertés des traités européens qui ont des rapports avec le droit fiscal.

    - De plus, le droit fiscal entretient beaucoup de rapports avec le droit privé.

    La cour de cassation a dit que les principes du droit civil dominent le droit fiscal tant que celui-ci n’y a pas dérogé. Donc sauf dérogation expresse, on applique les principes du droit civil en droit fiscal. On ne va pas appliquer le droit des contrats dans les rapports entre fisc et contribuable car le droit fiscal y déroge spécialement. Par contre pour les impôts qui s’appliquent à des immeubles par exemple, il faut aller voir une définition pour le mot immeuble etc dans le droit civil. Le droit fiscal s’appuie donc sur la jurisprudence et les règles de droit civil. En matière d’impôt des sociétés, le droit civil au sens large s’applique. Le droit civil privé englobe le droit des sociétés et le droit comptable. Tant que la loi fiscale ne prévoit pas quelque chose d’autre pour l’impôt des entreprises on applique des règles tirées du droit comptable.

    - Niveau international

    Tous les concepts juridiques tirés du droit international et européen priment sur le droit national. Donc quand on reprend un terme d’un traité, on fait référence aux sources européennes et internationales et pas aux sources belges. Pour la TVA, il y a une directive européenne et quand on la met en œuvre, on interprète la TVA à la lumière de la jurisprudence de la CJCE et des directives européennes.

    - Procédure

    En matière procédurale également, les procédures fiscales sont réglées par le droit judiciaire commun donc par le code judiciaire. Le code judiciaire nous explique la manière selon laquelle le juge va trancher.

    - Droit pénal

    Un autre lien qu’on peut faire c’est avec le droit pénal.

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    On peut faire des liens au niveau de l’approche. L’atteinte aux libertés individuelles est sans commune mesure avec le droit fiscal mais néanmoins, ce sont deux branches du droit où les libertés individuelles sont mises à mal. En droit fiscal c’est dans la détermination de la dette d’impôt donc l’atteinte est moins importante. Mais du coup il y a aussi une interprétation restrictive qui s’applique, de matière à éviter une intrusion trop grande dans les libertés individuelles. Il y a aussi du droit pénal fiscal : il s’occupe des crimes et délits d’argent. Un crime d’argent typique, c’est la fraude fiscale. Il arrive que des procédures fiscales débouchent sur des véritables procès pénaux. Quand on veut éviter l’impôt de manière illégale et avec intention frauduleuse, on commet un délit : on va appliquer droit fiscal et droit pénal de façon simultanée.

    - Droit social

    On peut encore faire des liens entre droit fiscal et droit social. L’impôt des personnes physiques frappe les revenus du travail, tout comme les cotisations de sécurité sociale. La définition de rémunération du droit fiscal découle de l’interprétation de la législation en matière de droit social. De même, entre cotisations de sécurité sociale et impôt, il y a des liens à faire même si ce sont des concepts distincts.

    Encore un mot sur le droit fiscal européen et international Nous sommes dans un mouvement d’européanisation importante de la fiscalité donc de plus en plus de règles fiscales trouvent leur source dans le droit européen. C’est vrai pour la TVA mais aussi pour les impôts sur les revenus. Pour la TVA il y a de nombreux traités internationaux conclus par la Belgique. Il y a des conventions préventives de double imposition : deux pouvoirs fiscaux souverains se mettent d’accord pour limiter leur prétention fiscale afin de limiter la charge fiscale qui pose sur les citoyens entre ces deux états. C’est bilatéral. On parle d’une centaine de traités signés par la Belgique. Mais la cour, quand elle les applique, doit les interpréter selon le droit international ! DROIT FISCAL ET FISCALITE… Pour revenir sur cette distinction entre droit fiscal et fiscalité, il faut comprendre que pour bien cerner le droit fiscal et le comprendre, il faut sortir du droit. Le droit fiscal étudie les phénomènes de la fiscalité mais il y a d’autres branches et d’autres sciences qui peuvent permettre de mieux les comprendre. Par exemple : la science de la fiscalité : l’impact économique de la fiscalité est fondamental pour définir une règle fiscale. Il faut définir l’impact sur l’économie ou sur les citoyens et pour cela on fait appel à des outils purement économiques. Il ne suffit pas de faire adopter des règles par un parlement dans le respect des règles, il faut aussi que les règles prennent en compte la réalité économique à laquelle elles vont s’appliquer. Pour compléter la connaissance globale de la fiscalité, il y a aussi la psychologie et la sociologie fiscales. On regarde comment les gens réagissent à certains impôts car

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    certains sont mieux acceptés que d’autre. Quel est l’impôt qui s’adaptent le mieux à cette réalité sociale ? C’es très utile pour arriver à définir le système fiscal idéal. Quand on voit les exemples sur la révolution américaine et française, on voit que la dimension historique est également très importante pour comprendre la fiscalité. C’est une succession de mesures qui évoluent et se transforment à travers les siècles et il faut pour chaque mesure comprendre pourquoi elle a été adoptée. La philosophie et l’éthique s’intéressent aussi de près à la fiscalité. On regarde ce qu’est une mesure juste, un impôt juste,… Il faut donc aller voir au delà du droit fiscal pour avoir un éclairage différent mais complémentaire à ce domaine.

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    INTRODUCTION SUR LE SYSTEME FISCAL BELGE : GRANDS TRAITS Si on se place dans une perspective historique, il faut savoir que durant tout le 20è il y avait deux phénomènes :

    - Augmentation considérable du volume des recettes fiscales perçues par l’état. Maintenant nous sommes pratiquement à la moitié du PIB, avant quelques pourcents. Donc la moitié de la richesse produite par l’ensemble des activités économiques sur le territoire est perçue sous forme d’impôt. Augmentation quantitative des impôts mais aussi augmentation des services publics,…

    - Augmentation du nombre des impôts. Avant il y avait les droits de douane, les droits d’enregistrement (on ne voyait que ça en 1902 au cours de droit fiscal mais maintenant on y passera 2 heures !) mais aussi les accises sur certains produits. Avec tout ca on arrivait presque à définir le budget de l’état mais actuellement ce n’est que 15 pourcent ! Le premier séisme cela a été l’impôt sur le revenu à la suite de la première guerre mondiale. Cela concerne les entreprises et les personnes physiques. Certains pays européens avaient ca depuis le 18e ! Après la deuxième guerre mondiale, deuxième gros séisme : apparition de la TVA. Avec tout ça, on est à près de 80% des recettes perçues par l’état fédéral. Diversification du nombre d’impôts (encore d’autres !) qui tous ensemble constituent environ la moitié du PIB.

    Pour avoir une idée : quelques chiffres Si on prend les chiffres de 2009, le montant total des recettes fiscales perçues en 2009 c’était 86 milliards d’euro. Mais il y a d’autres types de rentrées qui valent 95 milliards d’euros. Donc on voit quand même que les recettes fiscales sont très importantes (en 2008 les recettes fiscales c’était 93 et demi et les recettes de l’état 90 seulement). Les recettes fiscales sont très importantes dans le financement de l’état, cela équivaut globalement aux recettes de l’état lui-même. L’état belge reverse une partie considérable des recettes fiscales à d’autres autorités. L’état fédéral n’en dépense que 35 milliards sur 95. Le reste des recettes fiscales va aux régions, aux communautés, communes, Union européenne. Il y a également la sécurité sociale ! Si on enlève l’argent qu’on donne à l’UE (2 milliards d’euros), la sécurité sociale (14 milliards du budget fédéral, en plus bien sur des cotisations sociales qui vont directement à la sécurité sociale !), les communautés les régions (35 milliards), on arrive à un chiffre bien plus bas ! On a un fédéralisme assez poussé par rapport à nos voisins car les régions et les communautés dépensent déjà autant que l’état fédéral, hors sécurité sociale. Donc on a déjà un fédéralisme fortement orienté vers les régions. Il y a le problème de la

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    responsabilisation car là on ne regarde que les données brutes et combien d’argent est versé à qui,… Donc contrairement aux apparences, l’état ne dépense qu’un peu moins d’un tiers de ce que les contribuables lui donnent. Si on doit segmenter les recettes fiscales en fonction des types d’impôt, on voit :

    - Impôts sur les revenus : 55% quand ca va bien (l’année passée dans la crise c’est ce qui a fort baissé avec l’impôt des sociétés et des personnes physiques)

    - TVA : 30% (normalement 25% mais en période de crise cela s’avère plus stable que l’impôt sur les revenus)

    - Les accises : 7-8 - Droit d’enregistrement : 7-8 - Droits de douane perçus par la Belgique pour l’UE : 2-3 pourcents.

    Prédominance de l’impôt sur les revenus. C’est un pays qui perçoit le plus d’impôt, c’est celui qui taxe le plus les revenus d travail mais c’est celui qui taxe le moins la consommation (la TVA par exemple). Il taxe relativement peu le patrimoine et les revenus du patrimoine (liés à l’investissement dans immeubles et biens meubles : actions, obligations,…) Il y a toute une série de choses sur les fonctions du système fiscal dans le syllabus, c’est juste pour notre information. On va les reprendre le long du cours pour comprendre les différentes mesures qui sont prises mais c’est tout.

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    28/09/2010

    CHAPITRE 1 : L’IMPOT Dans son expression la plus réductrice, le droit fiscal est le droit de l’impôt. Section 1. Définitions et caractéristiques Principes généraux du droit fiscal : ensemble des règles qui s’imposent à tous les impôts quels qu’ils soient. Ils servent de fondement juridique à la relation entre état (autorité publique) et contribuable. On va voir l’ensemble des contraintes quand l’autorité publique veut avoir recours à l’impôt pour se financer. Car c’est surtout des contraintes… Nous avons vu que c’est surtout l’impôt qui finance l’état. Nous allons tenter de définir ce qu’est un impôt de deux manières :

    - Analytique, fixe : prendre les définitions qu’on trouve dans la jurisprudence - Dynamique, par opposition : on compare à d’autres formes de prélèvements

    obligatoires. On regardera des décisions illustratives du fait qu’il n’est pas toujours facile de faire la distinction

    On a la jurisprudence de la Cour de cassation et de la cour constitutionnelle : elles ne sont pas toujours d’accord en droit fiscal. Par exemple les définitions sont différentes car elles mettent l’accent sur des choses différentes mais elles ne sont pas nécessairement inconciliables.

    1. Cour constitutionnelle

    Deux éléments pour la cour constitutionnelle

    - L’impôt constitue un prélèvement pratiqué par voie d’autorité. - Il est inscrit à son budget (référence à l’unicité budgétaire) et ne constitue pas

    la contrepartie d’un service (élément essentiel pour le différencier de la redevance).

    2. Cour de cassation

    Pour la Cour de cassation, il y a plusieurs éléments :

    - L’impôt est un prélèvement pratiqué par voie d’autorité - Par l’état, les communautés, les régions, les provinces et les communes - Sur les ressources des personnes qui y vivent ou y possèdent des intérêts. - Pour être affecté au service d’utilité publique

    (Référence au fait que l’impôt a une destination indéterminée : on verse en général puis c’est réparti).

    L’impôt trouve sa justification en lui-même : dans le pouvoir reconnu à l’autorité publique de percevoir l’impôt et non dans l’éventuelle contrepartie que le contribuable recevrait de l’autorité publique.

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    1) L’impôt est un prélèvement pratiqué par voie d’autorité

    Dès lors que le fondement de l’impôt est la puissance publique, le rapport qui nait n’est pas un rapport typique du droit privé lié à l’autonomie de la volonté. Donc les règles du droit des obligations ne s’appliquent pas quand ces règles font appel à un principe d’égalité des parties ou d’autonomie de la volonté. Par ailleurs, un tas de règles concernant le droit des tiers au contrat ne vont pas s’appliquer non plus. De même le fait que le fondement c’est la puissance publique, cela comme conséquence qu’elle a des pouvoirs spéciaux, exorbitants du droit commun. Le fisc par exemple. Ils ont aussi des privilèges et notamment pour percevoir l’impôt : par exemple la dette d’impôt est due sans intervention d’un quelconque juge. Quand bien même le contribuable voudrait contester, il faut payer puis contester. Hors du cadre de droit civil mais plutôt dans le privilège d’exécution d’office du droit administratif (privilège du préalable).

    De même, cela signifie que l’impôt existe sans contrepartie de l’état : pas de redevance, ou pas de prix comme en droit privé.

    De plus l’impôt a aussi comme caractéristique de ne pas être une confiscation. Quand un individu prend une partie de la propriété d’un autre, c’est une confiscation. Nous verrons les différences qui séparent ces deux notions.

    2) Autorité publique : Par l’état, les communautés, les régions, les provinces et

    les communes

    De nombreuses autorités peuvent percevoir l’impôt en Belgique, nous le voyons dans la définition supra. Les modalités sont différentes. On parle chaque fois d’autonomie fiscale mais c’est plus ou moins limité selon qu’on parle de l’état fédéral ou des communes. Il n’y a pas ou pas encore d’impôt européen mais s’il venait à voir le jour la Cour adapterait sa définition.

    3) Sur les ressources d’une personne

    La cour parle aussi d’un impôt prélevé sur les ressources d’une personne. C’est volontairement extrêmement large car on trouve une très grande variété d’impôts. L’impôt frappe toujours une manifestation de richesse : une ressource. Mais cette ressource peut prendre plusieurs formes :

    a. les revenus b. le patrimoine, la propriété c. l’utilisation de son patrimoine : impôt sur la consommation, sur la

    dépense. La TVA par exemple voit la consommation comme une manifestation de richesse. Si j’ai suffisamment de richesse pour avoir une voiture, cela justifie qu’on perçoive un peu d’argent sur cet achat.

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    « Les ressources des personnes » : personnes, c’est large : personne physique, morale,… Ces personnes peuvent être soumises à l’impôt de la même manière comme la TVA mais parfois c’est différent : l’impôt sur le revenus :

    d. impôt sur les revenus des personnes physiques e. impôt sur les revenus des personnes morales f. impôt sur le revenu des sociétés

    On peut aussi parler de personnes morales de droit public : elles peuvent aussi être assujettie à l’impôt. En principe elles sont assujetties à la TVA. Cela peut paraître bête quand l’état est redevable de la TVA à l’égard de lui même mais c’est pour des motifs d’égalité…

    4) Qui vivent sur le territoire de l’état ou y possèdent des intérêts

    Ces personnes soit vivent sur le territoire des autorités publiques, soit elles y possèdent des intérêts. Pour cela il faut comprendre la fiscalité internationale. La cour a en effet en tête la distinction fondamentale entre personnes résidentes et non résidentes en droit fiscal international :

    a. personnes résidentes : vivent de manière durable dans un état. Du coup l’état les considèrent comme des contribuables dont l’obligation fiscale est extrêmement large : elle est illimitée car ils devront payer l’impôt sur le revenu sur l’ensemble des revenus qu’ils ont perçu dans le monde : taxation sur le revenu mondiale. La Belgique arrive donc à taxer des revenus qui nous viennent d’Australie.

    b. non résidentes : ceux qui ne vivent pas de manière durable dans un état. Mais ils sont tout de même taxables en Belgique s’ils ont un lien suffisant avec le territoire belge. Par exemple un étranger qui a des immeubles en Belgique, ou qui a investi dans une société belge. Les revenus générés par son activité en Belgique sont taxables par la Belgique.

    Cette partie de la définition renvoie à cette distinction.

    5) Affecté au service d’utilité publique, d’utilité générale

    Il est indistinctement affecté au budget de l’autorité publique qui le prélève. Donc a priori il n’est pas affecté à l’intérêt particulier de la personne qui le paye (donc pas la contrepartie de quelque chose) et a priori on ne décide pas à l’avance de l’affectation qu’on va donner à l’impôt. Cela renvoie à un principe des finances publiques : toutes les recettes et toutes les dépenses doivent figurer au budget et toutes les recettes doivent couvrir toutes les dépenses : on ne peut pas désigner une recette comme finançant une dépense particulière.

    Il y a des exceptions : quand l’autorité prévoit de créer un lien entre un impôt particulier à une dépense. Par exemple utiliser les ascises sur le tabac pour financer les soins de santé. Ça rend les impôts plus acceptables donc un lien est fait mais cela n’a aucun lien avec la validité de l’ascise sur le débat. Donc si le législateur décide en une fois d’affecter l’ascise sur le tabac pour financer

  • Droit fiscal – Valérie NICAISE – Master 1 (2010-2011)    

    un circuit de formule 1, il n’y a pas de recours possible de ceux qui ont payé. Car cela reste un impôt, cela ne modifie pas la définition.

    Le principe de la non affectation est interprété de manière très souple sauf par la CC en matière de cotisations de sécurité sociale pour éviter de mélanger les deux… Section 2 : Distinction avec d’autres prélèvements publics obligatoires

    1. La redevance Notion différente de celle d’impôt. On insiste car beaucoup de termes différents sont utilisés pour décrire les prélèvements mais très souvent la différence de terme ne définit pas une différence réelle. Donc par exemple on utilise le mot taxe dans la TVA mais le législateur n’a pas voulu donner une nature autre que celle d’impôt. De même quand il utilise le mot cotisation : très souvent alors la cotisation est un impôt (sauf pour la sécurité sociale, on y reviendra). Il y a aussi les droits : d’enregistrement, de douane,… Cela ne change rien ; c’est toujours des impôts. Le terme n’a pas d’incidence sur la notion d’impôt. Le mot ne va jamais empêcher un juge de décider s’il s’agit d’un impôt ou d’un autre prélèvement. Il faut regarder les critères de la jurisprudence. Reprenons la redevance. Il arrive qu’on utilise aussi le mot rétribution. Pas d’incidence sauf pour l’interprétation de l’article 173 de la constitution que nous aborderons plus tard. La redevance c’est une somme que l’on paye pour utiliser un service (définition non juridique). Le prix c’est dans un rapport de droit privé mais ici c’est un peu la même chose mais dans un rapport de droit public : donc cela veut dire que l’autorité fournit un service mais dans des circonstances un peu particulière : on peut parler de monopole ou de quasi monopole de droit ou de fait. Par exemple, la redevance de stationnement : on bénéficie d’un service mais il n’y a que la commune qui est en mesure de nous autoriser à stationner, sauf parking privé. Ce n’est donc pas un rapport typique de droit privé, il y a quand-même cette idée de monopole de la commune. Critères jurisprudentiels Pour éviter qu’on confonde redevance et impôt, la jurisprudence a élaboré un tas de critères. Pourquoi une autorité aurait un intérêt à faire passer un impôt pour une redevance ? Car le contribuable a un tas d’avantages dans le cas des impôts, qu’il n’a pas dans le cas de la redevance. Donc pour protéger le contribuable, la jurisprudence a défini la redevance sur la base de deux critères et un troisième facultatif.

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    1. Le critère de la spécialité On entend par spécialité le fait que le cout, la somme versée par le redevable à l’autorité, est en lien direct immédiat avec un service que cette autorité rend. Si le lien est trop ténu, pas clair, pas individualisé, ce critère n’est pas rempli. Par exemple, si on nous demande une redevance pour la purification de l’air dans le centre ville, prélevée par la Région bruxelloise mais qu’on habite dans une commune loin du centre, on peut argumenter qu’il ne s’agit pas vraiment d’une redevance car pas de lien direct entre bénéficiaire du service et la somme qu’on paye. Remarque : si un prélèvement qualifié par une autorité publique l’est erronément, il n’est pas nul mais il est juste requalifié. Et alors éventuellement il pourrait être contraire à la constitution,… mais juste le fait de mal qualifier n’a pas d’office pour incidence qu’il soit nul.

    2. La proportionnalité Entre l’intérêt du service et la hauteur du montant qu’on paye. On ne va pas aller estimer le cout du service mais le juge va regarder si le prix fixé par l’autorité publique est raisonnable. Ces deux critères rentrent dans la définition des deux cours pour la redevance.

    3. Le caractère facultatif Il est vrai qu’à première vue si l’on est dans le cadre d’une somme qu’on paye pour un service, on peut toujours dire qu’on ne veut pas le service et donc je ne veux pas de la redevance. Mais en pratique la jurisprudence admet que des sommes payées à l’autorité de manière obligatoire peuvent également être des redevances. C’est par simplicité, du moment que les deux autres critères soient remplis. Exemple : redevance obligatoire pour l’enlèvement des sacs poubelles. Le caractère obligatoire enlève-t-il la qualification de redevance ? Non sauf si on présume de manière irréfragable qu’on bénéficie toujours du service fourni. C’est dur à établir… mais en ce qui concerne l’enlèvement des déchets, on peut présumer que si on est domicilié à une certaine adresse on va bénéficier du service : un employé communal ne doit pas vérifier qu’on dépose bien des poubelles. Application : arrêt 194193 de la CE du 15 juin 2009 Cela concerne des charges d’urbanisme. Ce sont des sommes qu’une commune ou une région (donc le pouvoir public en charge de l’urbanisme) impose à une personne privée qui réalise des travaux de construction. L’idée ce n’est pas de punir les gens qui construisent mais on va compenser les couts supplémentaires pour la région liés à la construction d’un immeuble ou son agrandissement. Exemple : mettre un nouveau trottoir, mettre de l’éclairage public, raccord en eau et en électricité,.. La question qui a du être tranchée par le conseil d’état était la suivante : la région bruxelloise avait autorisé le gouvernement bruxellois ou le collège des bourgmestres et échevins a fixer les charges d’urbanisme selon des directives : phénomène de délégation. En principe c’est interdit en matière fiscale. Mais les personnes qui

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    devaient payer voulaient convaincre le CE que c’était un impôt car si c’était autre chose les garanties de l’impôt n’étaient pas applicables. Ils ont dit que c’était un impôt car pas de lien direct entre somme payé et service rendu et pas de rapport proportionnel entre couts engendrés par la collectivité et le montant de ces charges d’urbanisme calculé au mettre carré. L’ordonnance prévoyait deux cas de figure : nouvelle construction, modification de l’affectation d’un immeuble existant. Le CE a changé son approche : pour la construction, ces charges sont justifiées et proportionnées comme c’est par mettre carré. Mais pour la modification de l’affectation, c’est un autre cas de figure et le rapport de proportionnalité disparaît. Quand la construction reste la même, le CE considère que le rapport est excessif donc il ne peut pas s’agir d’une redevance. Donc il s’agissait d’un impôt. Et il n’y avait plus de dimension proportionnée dans l’établissement de cet impôt. Ce qui semble théorique a un impact important sur les finances publiques et les sommes dues par les citoyens devant les tribunaux.

    2. Les cotisations de sécurité sociale (parafiscalité) Dans un premier temps si on analyse la différence, c’est pratiquement la même chose dans les caractéristiques purement matérielles, indépendamment du traitement juridique. Car la cotisation de sécu sociale, c’est un prélèvement proportionnel prélevé sur les revenus du travail, qui ouvre le droit aux prestations sociales mais vu la situation actuelle de la sécu sociale, le rapport direct de proportionnalité entre montant et prestations n’est plus vraiment établi. On vient d’un système de sécu sociale basé à l’origine sur une solidarité forte entre travailleurs : caisses d’assistance mutuelle pour les ouvriers. Ils cotisaient et quand ils étaient dans le besoin, ils avaient une prestation. C’est la base de notre système mais celui-ci s’est étatisé et puis on a étendu l’obligation de cotiser aux travailleurs mais aussi aux employeurs, l’état participe au financement de la sécu sociale par l’impôt (triple financement donc). Mais les prestations ont été de plus en plus étendues : on peut en bénéficier sans avoir travaillé : étendu aux membres de la famille, aux étudiants. Mais maintenant le rapport entre le fait de payer un montant pour bénéficier de la sécu sociale et de bénéficier de la sécu n’est plus aussi net qu’avant. Un tas d’arguments plaident pour diminuer la distinction. Quand on regarde l’impôt sur les revenus du travail, la CC maintient que les cotisations de sécu sociale ne sont pas des impôts. Arrêt du 10 février 1999 : 14/99 Une loi avait habilité le gouvernement à modifier le système de sécurité sociale et le roi en avait fait usage pour modifier le seuil à partir duquel un travailleur indépendant complémentaire devait payer des cotisations sociales. Donc c’est un salarié qui a une petite activité d’indépendant à côté de ca. Sous un certain montant, il ne faut plus

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    payer de cotisations sociales : le seuil était de 32 000 francs. Le roi a fait passer ce seuil de 800 à 400 euros : c’est très significatif. Donc on a substantiellement modifié le niveau à partir duquel il fallait payer des cotisations sociales. On pouvait présumer que si c’était un impôt c’était une habilitation contraire à la constitution et donc une personne a fait un recours à la CC pour faire annuler la loi d’habilitation. La CC a considéré qu’il y avait sans doute ce principe en matière fiscale mais qu’on n’était pas en matière fiscale : c’est un prélèvement mais pas un impôt : les cotisations de sécu sociale servent à financer la sécu sociale donc elles ne sont pas affectées au budget général de l’état et donc ce ne sont pas des impôts. Application très rigide du principe de non affectation de l’impôt. C’est intimement lié aux circonstances : notre système de sécu sociale est construit pour une bonne partie sur des AR donc si la CC avait dit que c’était des impôts, on aurait plus de fondements juridiques pour notre système de sécu sociale ou presque. Toutes les garanties des impôts ne sont pas applicables pour les cotisations de sécu sociale ! Remarque : pour l’examen, il nous donne des cas pratiques où il faut appliquer ce qu’on a vu notamment dans les arrêts. Cotisations sociales : même si selon ses caractéristiques non juridiques cela ressemble à l’impôt, la CC dit que ce n’est pas un impôt. Il y a un tas d’impôt qui financent en partie la sécurité sociale même la TVA par exemple mais ce n’est pas pour ça que ce n’est plus un impôt !

    3. Amendes et sanctions

    On voit que l’objectif de l’état n’est pas le financement de l’autorité publique mais c’est un objectif dissuasif dans un domaine le plus souvent non fiscal. Il peut arriver qu’on hésite sur la qualification d’un prélèvement car l’impot peut aussi avoir un objectif dissuasif et particulièrement dans le cadre de la fiscalité environnementale : là le législateur veut orienter le comportement des individus avant de procurer des recettes à l’état.

    4. Prélèvements sui generis

    Prélèvements non identifiables que le législateur adopte parfois : il ne faut pas toujours qualifier, le législateur peut se contenter de nommer comme il l’entend et s’il n’y a pas de recours où le juge doit trancher, cela reste indéterminé. Parfois il y a des différences énormes d’interprétation entre cours suprêmes. Prenons un prélèvement qui n’existe plus actuellement : il avait été institué par la Communauté française, compétente en matière culturelle notamment et en matière de média. Pour soutenir la presse écrite la communauté avait initié une « compensation » perçue sur les recettes publicitaires des chaines de télévision et ensuite reversées aux éditeurs de la presse écrite : car plus les gens regardent la télé moins les gens lisent le journal donc les recettes publicitaires des journaux baissaient. Pour maintenir une presse libre et diversifiée, il fallait absolument verser de l’argent aux éditeurs.

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    Les annonceurs publicitaires des chaines télévisées ont contesté cet impôt. C’était justement une habilitation extrêmement large donc une qualification comme impôt aurait réduit celui-ci à néant. Recours devant les tribunaux et la cour d’appel décide de poser une question à la CC pour savoir si ce prélèvement était conforme au principe de la légalité de l’impôt car il y avait ce problème d’habilitation. Est-ce que ce prélèvement est conforme au principe de la légalité de l’impôt ? Pour commencer la cour ne répond ni oui ni non mais explique pourquoi elle peut requalifier la question et donc la notion d’impôt donnée au prélèvement. Ensuite elle analyse ce prélèvement et considère qu’il ne s’agit pas d’un impôt : elle le qualifie de mécanisme de compensation entre deux secteurs de la presse : écrite et audiovisuelle. Si la compensation en cause s’apparente à un impôt ça n’en est pas un… Donc la CC renvoie à la cour d’appel car pas lieu de répondre puisque pas un impôt. Mais la Cour d’appel considère que c’est un impôt car prélevé sur des ressources avec toutes ses caractéristiques. Pourvoi en cassation qui s’en suit : l’arrêt se trompe dans la qualification de cette compensation financière et ne suit pas l’arrêt de la CC. La Cour répond qu’elle ne se sent pas liée par la qualification de la CC, qu’elle considère que la CC n’a tout simplement pas répondu à la question posée par la Cour d’appel, que la cour d’appel a qualifié correctement le prélèvement comme impôt. Donc la Cour sous entend que la CC a été au delà de sa compétence : elle n’a pas répondu à une question en considérant que la question était mal posée. Section 3 : Définition des éléments constitutifs de l’impôt En ce qui concerne l’impôt on peut aussi définir les éléments qui le constituent et plus juste l’impôt lui-même. Lorsqu’on parle d’éléments constitutifs, on se met à un double niveau :

    - déterminer le champ d’application de l’impôt - calcul de l’impôt

    §1. Champ d’application de l’impôt En ce qui concerne le champ d’application de l’impôt :

    1. Matière imposable C’est comme la ressource économique sur laquelle porte l’impôt. C’est un concept qui n’est pas très juridique, pas souvent utilisé dans la législation : utilisé juste dans les règles de répartition de l’impôt entre état et régions. Mais cela doit s’entendre en fait comme le fait générateur…

    2. Fait générateur On dit aussi assiette parfois mais c’est plus indéterminé.

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    Le fait générateur c’est l’ensemble des conditions qui sont d’ordre matériel, d’ordre personnel, spatial, temporel : l’ensemble des conditions qui doivent être remplie pour donner naissance à la dette d’impôt. Précisons que ce n’est pas parce que l’impôt est né qu’il est du. Un impôt existant n’est pas pour autant exigible tout de suite : fait générateur et moment de l’exigibilité ne se recoupent pas toujours. Il faut d’abord que toutes les conditions soient là avant le recouvrement de l’impôt. Le fait générateur parle de la constitution et l’existence de l’impôt. Cela différencie les impôts : dans le cas par exemple de l’impôt sur les revenus, le fait générateur c’est un état : il faut être un habitant du royaume donc un résident du territoire belge pour payer l’impôt sur le revenu des personnes physiques. Sinon la base imposable est de 0. Dans d’autres types d’imposition, le fait générateur est la réalisation d’un acte : démarche active de la part de la personne imposable. Cela peut être réaliser un acte purement matériel (par exemple on va en voyage au japon et on achète plein de Play Station avant de rentrer mais le simple fait de faire entrer sur le sol belge des biens provenant hors de l’UE implique qu’on va devoir payer TVA + droits de douane : on ne nous demande pas si on les a volées ou construites, il faut juste les avoir amenées en Belgique). Mais cela peut aussi être une opération juridique : on vend un bien par une relation contractuelle avec autrui : à la suite du transfert on est redevable d’un impôt, c’est le cas par exemple des droits d’enregistrement. En matière de TVA quand on réalise un service ou qu’on vend un bien on est redevable de la TVA. C’est important de comprendre que le fait générateur va déterminer plein de conséquences sur notre situation de contribuable : savoir si on doit payer l’impôt ou pas, quand on doit payer, où on doit payer l’impôt. Selon qu’on réalise un revenu en 2009 ou en 2010, on va devoir le déclarer en 2010 pour 2009 ou en 2011 pour 2010 donc cela a un impact ! Le moment où on verse ne modifie pas le fait qu’on doive payer l’impôt sur le revenu mais c’est le moment qui détermine quand on va devoir payer l’impôt. De même si on perçoit notre salaire en Belgique ou ailleurs, des législations différentes vont s’appliquer. Pour éviter les doubles impositions, il y a aussi un traité international entre France et Belgique qui va s’appliquer. Donc c’est important de savoir où on a travaillé et où on a été payé. Donc le fait générateur est très important et notamment en droit international ! Car les taux sont très différents, par exemple Monaco n’est pas la Belgique donc cela peut avoir une incidence sur notre dette fiscale…

    3. La personne imposable C’est important d’en parler car souvent dans les mécanismes fiscaux ce n’est pas une personne qui intervient mais plusieurs, avec un traitement fiscal différent. La notion centrale est celle de contribuable, de redevable,

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    d’assujetti,… : c’est la personne qui est légalement redevable de l’impôt. On lui donne différents noms selon le type d’impôt : par exemple pour la TVA c’est un assujetti. Il faut distinguer cette notion d’une notion économique ; celle qui supporte économiquement l’impôt. L’impôt s’applique dans une société où les personnes ont des relations économiques entre elles donc la richesse tourne et passe d’une main à l’autre. Puisqu’il y a beaucoup d’échanges, il se peut que la personne considérée comme redevable arrive à faire supporter le poids de cet impôt, économiquement, par une autre personne. Par exemple dans le cas de la TVA : dissociation entre la personne qui doit l’impôt au fisc (le vendeur) et la personne qui paye économiquement la taxe (l’acheteur). Donc si l’état constate que la TVA n’a pas été payée, en principe il ne pourra se retourner que contre le vendeur. Mais néanmoins le vendeur va rétrocéder la taxe au trésor si on paye cette TVA comme il se doit. Il y a donc une distinction importante ! Exemple : l’impôt des sociétés est payé par les bénéfices, qui vient de l’argent indirectement du client. Donc le client, sans le voir, paye une partie des impôts de la société. On observe très souvent un glissement au point de vue économique de la charge de l’impôt. Par exemple : on a interdit qu’en matière de PI le bailleur puisse le faire supporter par le locataire en matière de bail de résidence principale. Donc le législateur prend cette dissociation en compte. Il y a souvent une troisième personne qui intervient car l’état la considère come particulièrement bien mise pour prélever l’impôt à sa place. Par exemple : j’ai un million d’euros sur mon compte et je vais percevoir un intérêt, versé par la banque. Mais c’est soumis à l’impôt sur les revenus puisque c’est un revenu comme un autre. Mais ici c’est la banque qui le prélève : elle verse les intérêts nets d’impôts et le précompte mobilier sera versé directement à l’état : donc dans ce cadre la banque agit un peu comme un percepteur d’impôt ! C’est encore différent du contribuable légal ou économique : elle est indiquée comme la personne qui doit payer l’impôt mais c’est aussi celle qui doit prélever l’impôt à l’égard d’un tiers. Quand on va travailler on ne verra jamais avec exactitude ce qu’on va payer comme impôts sur les revenus car le PP est déjà prélevé par l’employeur : aussi une situation de percepteur d’impôt.

    §2. Bases pour le calcul de l’impôt Trois notions essentielles pour le calcul de l’impôt :

    1. La base imposable C’est traduire en argent la valeur sur laquelle on va percevoir l’impôt. C’est la valeur de la matière imposable si on veut.

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    L’impôt sur le revenu du travail : la base imposable c’est notre salaire. Dans le cas de la TVA pour une voiture, c’est la valeur de la voiture. Notion toujours exprimée en argent. C’est calculé de manière différente selon le type d’impôt mais pour des raisons extra fiscales il arrive que le législateur décide fictivement de ne prendre en compte qu’une partie de notre base imposable. La base la plus large c’est le revenu perçu pendant toute une année : c’est la base imposable. Par exemple 20000 euros. Mais le législateur ne veut pas taxer des gens qui ont trop peu pour vivre donc les premiers 6000 euros d’une personne ne seront jamais taxés. C’est une exonération de base imposable. Donc pour le calcul de l’impôt on ne tiendra compte que de 14000 euros et pas 20000. C’est amputé pour des raisons extra fiscales.

    2. Le taux Ce n’est pas toujours un pourcentage : il y a différentes formes.

    • Le taux fixe Montant d’impôt toujours le même peu importe la base imposable. Par exemple ce sont les droits d’enregistrement.

    • Le taux proportionnel

    C’est l’idée de l’impôt : pourcentage qu’on fixe sur la base imposable et ca donne l’impôt. Prenons la TVA c’est 21%. Parfois on a plusieurs taux proportionnels : la TVA on verra qu’il y a le taux réduit.

    • Le taux progressif

    Il augmente avec la valeur de la base imposable. Plus on gagne de l’argent, plus on va nous appliquer un taux élevé : on découpe notre revenu en tranche et à chaque tranche on applique un taux progressif. Cela ne signifie pas qu’on applique 45% à tout notre revenu si on est bourré de thune mais juste à la tranche la plus haute. Mais il faut se rendre compte que le taux le plus haut qu’on va nous appliquer (50% en Belgique) c’est le taux marginal : applicable à chaque euros en plus qu’on va gagner en plus de ce qu’on gagne déjà. Ce n’est pas pareil que le taux moyen ! Ca c’est la moyenne des différents taux qu’on va nous appliquer et ca sera généralement plus bas. Par exemple, on gagne 25 000 euros et on sera taxé avec un taux marginal de 45 % (seule une partie sera soumise à ces 45%) mais le taux moyen ne sera par exemple que de 30% par exemple car on va d’abord nous appliquer le taux d’exonération puis une tranche avec 25 puis 30 puis 35 puis encore une tranche avec 40 et une dernière avec 45.

    3. Les réductions d’impôt

    Après avoir payé l’impôt on peut être bénéficiaire de réduction d’impôt : cela intervient après avoir calculé l’impôt mais c’est la même finalité que les exonérations de base imposable : le législateur va donner un bonus en

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    diminuant l’impôt qui est du : article 145 et suivant du code d’impôt sur les revenus par exemple pour l’impôt sur les revenus,… Exemple : on achète une porte blindée pour notre maison,… A ne pas oublier en plus du calcul de l’impôt !

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    CHAPITRE 2 : LES SOURCES DU DROIT FISCAL Section 1 : La fiscalité internationale §1. Principe La fiscalité internationale est un domaine en pleine expansion. Le droit fiscal international est composé de traités internationaux conclus par les Etats du monde entier, y compris la Belgique, et qui visent à protéger les contribuables contre un phénomène qui est celui de la double imposition. La situation la plus typique, c’est le conflit sources-résidences. La Cour de cassation parle de l’impôt comme un prélèvement de personnes qui vivent sur un territoire ou y perçoivent un intérêt. La plupart des Etats, comme la Belgique, imposent également leurs résidents et les ressources des non-résidents qui sont situés sur leur territoire. Si deux pays appliquent simultanément leur législation, la conséquence de cette double application sera une double imposition. Si on est résident belge et qu’on a des actions dans une société espagnole, on reçoit des dividendes de la société espagnole taxées en Espagne une 1ère fois et en Belgique une 2ème fois. Si chaque fois qu’on reçoit un revenu d’un pays et qu’il arrive en Belgique, on est donc taxé deux fois, ça constitue un frein à l’investissement. Les Etats ont souhaité limiter, dans la mesure du possible, le fait d’imposer deux fois le même type de revenus. D’où l’émergence des conventions préventives de la double imposition. Sinon le même contribuable va être taxé deux fois pour la même activité. D’une part parce qu’il réside sur le territoire d’un premier Etat, d’autre part pace qu’il contribue à l’évolution économique d’un autre Etat. §2. Types de conflit

    1. Le critère territorial On a des conflits résidence-source, c'est-à-dire entre le pays de la résidence du contribuable et de la source du revenu. Généralement, on reste dans le cadre de l’impôt sur le revenu, même si on peut avoir une double imposition pour tous les impôts en principe. La situation la plus typique est le conflit source-résidence. On peut avoir d’autres situations, dès lors que les critères de rattachement utilisés par les Etats ne sont pas toujours d’ordre territorial.

    2. Le critère personnel Quelques rares Etats utilisent d’autres critères que le critère territorial : c’est le critère national : quand on a la nationalité d’un Etat, on doit payer des impôts au trésor de cet Etat. Aux USA, ce critère est retenu. En Belgique, par contre, les ressortissants ne sont pas taxés. Si un Belge va vivre en Australie et qu’il n’a aucun lien économique

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    avec la Belgique, il n’est pas soumis à l’impôt belge. Au niveau de la responsabilité fiscale, les USA assimilent les Américains et les personnes qui ont vécu longtemps aux USA. Il s’agit d’un frein fiscal à l’émigration. C’est le cas des USA. La Belgique, par contre, ne taxe pas ses ressortissants qui n’ont plus aucun lien économique avec elle.

    3. Le critère fonctionnel

    C’est un critère plus marginal. Il s’agit d’une particularité des organisations internationales. Lorsqu’une personne travaille pour une organisation internationale, elle est contribuable de cette organisation, peu importe l’Etat où elle se trouve. Sur les revenus des fonctionnaires de l’UE qu’ils perçoivent de l’organisation internationale dans laquelle ils travaillent, sont perçus des impôts par l’organisation. Pourquoi? Que diraient les autres EM si la Belgique taxait tous les travailleurs de l’UE à Bruxelles? La Belgique ne peut pas taxer les revenus des fonctionnaires européens qui travaillent sur son territoire. Si elle le faisait, elle récupérerait une partie de ce qu’elle a versé à l’UE et contribuerait moins que les autres Etats. Elle récupérerait alors une partie de ce qu’elle a payé à l’UE puisque chaque EM de l’UE paie pour financer les institutions européennes et ses fonctionnaires. Donc l’ensemble des Etats membres d’une OI accepte ce critère fonctionnel. La souveraineté de l’Etat sur lequel est l’organisation internationale est limitée. Lorsqu’on sort du revenu donné au fonctionnaire, l’Etat où est située l’organisation retrouve une compétence fiscale, par exemple en matière immobilière, ou en matière de taxes de circulation, sauf immunité plus importante. Il y a une multiplicité de critères de rattachement. Si on regarde dans le droit fiscal belge, on voit que de très nombreuses dispositions visent des revenus étrangers. On peut imaginer que si tous les Etats du monde ont un système semblable au système belge, la double imposition est presque inévitable. §3. La double imposition

    1. Définition

    A) La double imposition juridique dans le cadre international Quand deux Etats imposent sur le même revenu, dans le chef d’une même personne, pour une même année.

    B) La double imposition économique

    Il y a également des situations de double imposition qui ne rentrent pas dans le domaine de la double imposition juridique. C’est ce qu’on appelle la double imposition économique : deux impositions dans le chef de deux contribuables différents. L’exemple le plus typique, c’est dans le cadre des dividendes versées par une société à un actionnaire. Les dividendes sont taxées dans le chef de la société, et

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    ensuite taxées une seconde fois dans le chef de l’actionnaire. Si ça se passe dans deux Etats différents, un parlera de double imposition économique internationale.

    2. Les conventions préventives de double imposition

    Ces situations de double imposition existent s’il n’y a pas d’accord entre les Etats, et dans d’autres cas malgré l’existence de traités internationaux. Les Etats concluent souvent des conventions pour limiter la double imposition. Ces conventions forment une grande partie de la fiscalité internationale, mais elles ne permettent pas de limiter d’office la double imposition. La Belgique a conclu environ 90 conventions préventives de la double imposition. Elle en a même conclu en matière de droits de succession (mais seulement 2).

    3. Accords d’échange de renseignements Outre les conventions préventives de la double imposition, on a aussi des accords d’échange de renseignement. Il peut arriver que, pour différentes raisons, quand un Etat ne souhaite pas conclure de convention préventive de la double imposition, on fait un accord d’échange de renseignements qui permet aux Etats de se demander mutuellement des informations sur la situation de leurs contribuables. On a un accord d’échange de renseignements, entre autres, entre la Belgique et les Seychelles. Beaucoup d’accords ont été conclus ces dernières années car la Belgique a été jugée mauvais élève, a été mise sur une liste « grise » comme un Etat qui, en matière fiscale, faisait de la rétention d’informations. Pour sortir de cette liste grise, la Belgique a du montrer sa bonne volonté et donc a signé un grand nombre d’accords portant sur l’échange de renseignements. NB : Pas juste un échange de renseignements comme avec Andorre (pas encore en vigueur) : avec les Seychelles c’est vraiment une convention pour éviter la double imposition.

    4. Autres

    - Il existe des traités d’investissement : conclus entre une partie (souvent un pays industrialisé) et une autre (souvent un pays en voie de développement) et qui permettent de tabler sur certains éléments permettant un bon rapport entre les investisseurs étrangers et les pays en voie de développement.

    - Il existe aussi des conventions privées entre Etats sur la fiscalité. Il y a des traités entre une partie, généralement un pays industrialisé, et un autre pays, généralement en voie de développement, qui prévoient toute une série de droits pour des investisseurs d’un pays souhaitant investir dans un autre. Souvent, on rajoute dans ces traités, des dispositions fiscales, telles que l’interdiction de discrimination entre investisseur étranger et local. Il y a une dimension fiscale dans tous les accords qui ont conduit à l’organisation mondiale du commerce.

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    A. Modèles OCDE et ONU Ces conventions suivent un modèle : une convention qui a été écrite au sein d’une organisation internationale qu’est l’OCDE (organisation pour la coopération et le développement économique). La tâche de cette organisation est de proposer aux Etats un modèle pour conclure une convention fiscale bilatérale. Ce modèle a connu un grand succès (pratiquement toutes les conventions signées sur la Belgique se basent sur le modèle), et ça permet de faciliter les négociations entre différents Etats. Il existe depuis longtemps des modèles en matière de convention fiscale. Ca a commencé déjà dans les années ’20, avec la société des nations, l’ancêtre de l’ONU. Après la 2ème guerre mondiale, l’OCDE a pris le relais. L’ONU a son modèle, mais il est différent, il tient plus compte des spécificités en voie de développement. Le modèle OCDE instaure une convention qui avantage les pays industrialisés.

    Exemple : le modèle OCDE prévoit que les redevances (c'est-à-dire la rémunération pour l’utilisation d’un brevet, d’une marque, d’un savoir-faire) payées d’un Etat à un autre ne sont pas imposables dans l’Etat de la source. C'est-à-dire que l’Etat où la marque, le brevet est utilisé ne peut pas taxer la rémunération qu’une entreprise de cet Etat verse. Si on applique ça à une situation normale de rapport avec les pays en voie de développement, ceux qui détiennent les brevets sont les pays industrialisés tandis que ceux qui payent sont les pays en voie de développement. Le prix ne serait taxable que dans le pays industrialisé. Le modèle ONU prévoit que le pays en voie de développement peut aussi taxer les redevances.

    B. Modèle belge La Belgique a aussi son propre modèle, il sert de base de négociation. La Belgique ne conclut pas tout sur base de ce modèle, mais c’est un point de départ.

    Si on regarde le modèle OCDE, il est révisé régulièrement (dernièrement 2010). Pendant ce cours, on va se référer au modèle OCDE. Ce modèle comporte une 30aine d’articles, qui visent uniquement l’impôt sur la fortune et les revenus, et il prévoit des dispositions sur son champ d’application, ainsi que certains définitions. On a l’équivalent des articles 6 à 22 qui répartissent le pouvoir d’imposition entre Etats. L’article 6 traite des revenus immobiliers qui ne sont taxables que dans l’Etat où est situé l’immeuble. On met en location un immeuble en France, les loyers ne sont taxables qu’en France, selon le modèle OCDE.

    5. L’élimination de la double imposition L’article 23 du modèle OCDE nous donne une réponse pour cette question. L’Etat a le choix : soit le crédit, soit l’exemption. La Belgique applique la méthode de l’exemption, c'est-à-dire que le revenu étranger n’est simplement pas taxé, il est exclu de la base imposable.

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    Section 2 : La fiscalité européenne §1. Généralités L’Europe fiscale a connu un bouleversement avec l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne. On a changé de terminologie. On parle du droit de l’Union européenne. On a aussi renuméroté tous les articles. « L’UE n’a pas de compétence fiscale car il n’y a pas d’impôt européen » est une phrase que l’on a déjà entendue. Il n’y a pas d’impôt européen dans le sens où les Etats membres n’ont jamais accepté que l’UE, en tant que collectivité politique, puisse lever un impôt, en déterminer les éléments essentiels, et en percevoir les recettes. Aucune souveraineté fiscale pour l’UE donc.

    Cet état des choses ne signifie pas que l’UE n’a aucune compétence en matière fiscale, ou n’agit pas en matière fiscale. L’UE a des compétences fiscales, elle a le pouvoir de limiter la souveraineté fiscale des Etats membres. L’UE dispose de compétences fiscales dans le but de réaliser ses objectifs. Quel est l’objectif principal de l’UE ? Un marché commun devenu le marché intérieur: c’est un espace où les personnes et les marchandises peuvent circuler librement, sans entraves, sans frontières économiques. Les entraves aux mouvements peuvent être de nature fiscale et c’est à ce titre que l’UE a des compétences fiscales. Quelles sont-elles ?

    -‐ Les compétences en matière d’harmonisation fiscale ; -‐ Les libertés de circulation, au sens le plus traditionnel, peuvent être

    directement appliquées par le juge national, par la CJCE, à toute législation qui constituerait une violation de ces libertés de circulation ;

    -‐ L’interdiction des aides d’Etat. §2. Compétences fiscales de l’UE

    1. L’harmonisation

    A. Impôts directs et indirects

    En ce qui concerne l’harmonisation, il faut l’entendre de manière différente selon qu’elle porte sur les impôts directs et indirects.

    -‐ Un impôt direct est un impôt sur le revenu ou un impôt sur le patrimoine. -‐ Les impôts indirects portent sur des opérations économiques particulières, par

    exemple la taxe sur la valeur ajoutée.

    B. Compétence d’harmonisation fiscale de l’UE 1. Dispositions légales

    Dans le traité, on a un chapitre intitulé « dispositions fiscales » (articles 110 à 113). Les articles 111 et 112 n’ont jamais été appliqués. L’article 110 est une variation du

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    principe de non discrimination (il interdit aux Etats de taxer plus lourdement les produits d’autres Etats membres que les produits nationaux). Le 113 est véritablement la disposition qui autorise l’UE à adopter des actes, principalement des directives d’harmonisation, en matière de fiscalité indirecte.

    2. Notion L’harmonisation, c’est une méthode d’adoption de la norme qui consiste à déterminer les éléments essentiels d’un impôt (dans ce cas-ci) et de laisser d’autres autorités (ici les Etats membres) mettre en œuvre ces directives d’harmonisation de la manière qu’ils jugent la plus opportune. Les Etats membres gardent une marge de manœuvre. En matière de douane, et c’est le seul exemple, les Etats membres n’ont plus rien à dire car tout a été réglé. Pour les autres matières, on a des directives d’harmonisation à mettre en œuvre par les Etats. Les impôts harmonisés au niveau européen : la TVA, les accises, les impôts sur les apports en société de capitaux (les droits d’apports principalement).

    3. En matière d’impôt direct On ne retrouve pas, dans le traité, explicitement une compétence de l’UE en matière d’impôt sur les revenus. Néanmoins, un article du traité peut être utilisé pour toutes les matières, du moment que ce soit utile à l’établissement du marché intérieur : l’article 115 du TFUE. Sur cette base, le conseil a adopté certaines directives en matière d’impôt direct. En matière d’impôt, tant direct qu’indirect, il faut l’unanimité des Etats membres au sein du conseil pour adopter l’impôt. Il y a donc relativement peu d’harmonisation en matière d’impôt direct. Le but de ces textes est d’éviter la double imposition internationale pour certains opérations : les réorganisation des sociétés au niveau européen, les transferts de dividendes entre sociétés appartenant au même groupe et situées dans des Etats membres différents, et les transferts d’intérêts et de redevances entre sociétés de groupes multinationaux.

    4. L’impôt des personnes physiques L’harmonisation est quasi nulle. Il y a une directive (la directive épargne). Si on est titulaire d’un compte au Portugal, automatiquement, chaque fois qu’on percevra des intérêts de ce compte, le Portugal transmet automatiquement l’information au fisc belge. Si on n’a pas déclaré ces intérêts, on va avoir un problème avec le fisc belge. Cette directive a connu un succès inattendu dès lors qu’il a été appliqué au-delà de l’UE. Depuis la directive 2003-48, il existe un système qui permet l’échange d’information automatique en matière d’intérêt de l’épargne.

    2. Les libertés de circulation

    Des dispositions, parfois antérieurs à l’adhésion à l’UE, qui sont des violations à la liberté de circulation existent encore dans différents Etats : soit il s’agit de discrimination, soit il s’agit d’une taxation plus lourde pour les activités transfrontalières que les activités nationales.

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    3. L’aide d’Etat

    Pas d’aide fiscale aux entreprises. Certains négociateurs croient qu’en transférant des compétences fiscales aux régions, il y aura des cadeaux faits aux entreprises régionales. Le droit européen s’applique aux Etats et, si demain, la région flamande obtient l’autonomie fiscale en matière d’impôt sur les sociétés, elle ne pourra conférer d’aides d’Etats.

    4. Le code de conduite en matière de fiscalité des entreprises

    Formellement, ce code de conduite n’est pas obligatoire pour les Etats membres. Néanmoins, il contient un engagement de tous les Etats membres de mettre fin à la concurrence fiscale dommageable. Ce document est important car il part d’un constat : il y a des limites à ne pas franchir quand on souhaite utiliser la fiscalité pour exploiter les capitaux étrangers. Il y a des mesures qui sont excessives, qui introduisent des distorsions de concurrence, ces mesures ne sont pas justes. On peut utiliser l’instrument fiscal pour attirer les investisseurs, mais ces mesures fiscales ne peuvent être excessives. En 1999, les Etats membres ont adopté ce code de conduite, ont fixé certains critères concernant la définition d’une mesure fiscale dommageable, ont demandé à un groupe de suivi de lister, dans l’ensemble des Etats membres, les mesures correspondant à ces critères. Et les Etats membres se sont engagés à supprimer ces mesures. Indépendamment d’un texte contraignant, les Etats membres se sont mis d’accord pour, tous ensemble, supprimer certains régimes fiscaux considérés comme dommageables. Il y en avait, au début, plus d’une 60aine de ces régimes fiscaux.ils avaient comme caractéristique de viser des non résidents et de leur offrir un régime fiscal sur mesure, complètement différent du régime appliqué à d’autres sociétés normales (c'est-à-dire des sociétés résidantes). La Belgique a du supprimer le régime des centres de coordination, qui consistait à autoriser des entreprises, sur agrément du ministre, à être faiblement taxées à l’impôt des sociétés, selon des critères dérogatoires à ceux de l’impôt sur les revenus. C’était sur base d’un arrêté royal. §3. Les sources du droit fiscal belge

    1. La Constitution

    Si on regarde dans la Constitution, aux articles 170 et suivants, on voit le titre intitulé « des finances ». Ces articles s’insèrent dans le système juridique mis en place par la Constitution. Certains sont une application particulière de principes énoncés à d’autres articles, d’autres sont spécifiques à la matière fiscale. Si on prend les différents articles, on voit que l’article 170 a une double fonction : il fonde l’autonomie fiscale des différentes autorités publiques qui peuvent percevoir l’impôt et, deuxièmement, il est la base juridique du principe de la légalité en matière fiscale. L’article 172, c’est le principe d’égalité qui reçoit une application particulière en matière fiscale dans le sens où le constituant prévoit un article spécifique pour les

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    impôts, qui n’est dans les faits, que l’application du principe général d’égalité et de non discrimination. L’article 173, quant à lui, traite des rétributions. Cet article, peu clair, a comme fonction principale de fonder l’autonomie fiscale d’autorité publique que sont les polders et les watring. Cet article fonde le pouvoir des différentes autorités publiques visées par l’article 170 à établir des redevances. On ne doit pas savoir donner notre interprétation de l’article 173. Les articles 174 et suivants traitent du financement des communautés et des régions. La Constitution renvoie à une loi spéciale, prise en application de ces articles de la Constitution. La loi spéciale qui fixe à la fois certaines compétences spéciales des régions et des communautés et leur financement, est la loi spéciale de financement de 1989, dont on parlera plus tard.

    2. La loi Volontairement, on met la loi au-dessus des décrets et ordonnances car la loi et le décret n’ont pas la même valeur en droit fiscal.

    A. Importance de la loi

    La loi fédérale a un rôle fondamental en matière fiscal, ça reste la source principale de droit fiscal en Belgique. La première raison est purement factuelle :

    -‐ La plupart des impôts perçus en Belgique sont des impôts de compétence fédérale. Les textes qui régissent ces impôts sont donc des lois fédérales (impôt sur les revenus, tva, accises font l’objet de législations fédérales).

    -‐ D’après la Constitution elle-même, la loi fédérale peut limiter la compétence fiscale d’autres autorités publiques. Si on lit l’article 170, on voit que, tant pour les régions, communautés provinces et communes, le constituant prévoit que la loi ordinaire peut venir apporter des dérogations aux compétences de ces autorités.

    B. Tempérament

    Il est vrai que c’est la loi fédérale qui institue la plupart des impôts prélevés en Belgique. Néanmoins, au niveau de la répartition de la recette de ces impôts, c’est l’Etat fédéral qui en profite le moins, il distribue une grande partie des recettes perçues, même pour des impôts qui sont de sa compétence exclusive.

    3. Le décret et l’ordonnance

    A. Le pouvoir fiscal propre des collectivités fédérées et ses limites  

    -‐ Principe Les régions et les communautés peuvent lever l’impôt. Ces décrets et ordonnances fiscales sont d’au moins deux natures, les compétences fiscales des régions et des communautés ne sont pas uniformes. Le principe est qu’elles peuvent instituer n’importe quel impôt.

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    -‐ Exceptions Selon le texte de la Constitution, il y a un bémol : la loi fédérale peut venir apporter des exceptions à cette autonomie fiscale.

    • Des lois fédérales (loi ordinaire du 23 janvier 1989, et article 11 de la loi de financement du 16 janvier 1989) a déclaré qu’il ne peut y avoir de décret et d’ordonnance quand une loi fédérale a déjà été proclamée en la matière, quand il n’y a pas d’imposition nationale. Il reste peu de marge pour les régions et communautés

    • La seconde limite, c’est le fait que les régions et les communautés ne peuvent porter atteinte à l’union économique et monétaire. Cette union, c’est la traduction, dans le langage de la Cour constitutionnelle, du marché intérieur qui existe au niveau européen, à la différence que l’union économique et monétaire vise les solutions internes à la Belgique. Ensuite, il y a les limites imposées par le droit européen

    • Limite territoriale ne concernant que les communautés françaises et

    flamandes : ces communautés n’ont pas de territoire déterminé. La région bruxelloise appartient aux deux communautés, sans aucune distinction territoriale. La communauté française et flamande n’ont pas de territoire, elles ne peuvent pas non plus déterminer leurs contribuables. Les communautés françaises et flamandes ne peuvent percevoir l’impôt, faute de territoire.

    • Le principe de proportionnalité : les communautés et régions ne peuvent, dans

    l’exercice de leurs compétences, porter atteinte aux compétences d’autres entités politiques et donc ne peuvent instituer un impôt qui aurait, comme conséquence, de limiter de manière excessive, l’exercice par une autre autorité politique de sa compétence fiscale ou de toute autre compétence.

    Exemple (arrêt 195-2004 du 1er décembre 2004): la région wallonne avait fait un recours à la Cour constitutionnelle contre l’Etat fédéral car ce dernier avait institué des éco-taxes sur certains emballages. La région wallonne alléguait que, dès lors que les régions étaient compétentes en matière d’environnement, le fait pour le législateur de légiférer en matière d’éco-taxe portait atteinte au principe de proportionnalité. L’exercice de cette compétence avait un impact disproportionné sur l’exercice de la compétence de la région wallonne en matière d’environnement. La Cour a dit qu’elle ne voyait pas comment il pouvait y avoir atteinte au principe de proportionnalité dès lors que le fait d’instituer une éco-taxe allait dans la direction qui était celle choisie par la région wallonne en matière de politique de l’environnement. L’exercice de ces compétences était complémentaire.

    B. Les compétences fiscales transférées

    Les impôts fixés par les communautés et régions ne rapportent quasiment rien. C’est pourquoi il a été décidé dans la loi spéciale de financement de transférer des impôts, qui étaient fédéraux, et qui sont devenus régionaux.

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    -‐ Les impôts régionaux On distingue les impôts propres et les impôts régionaux, qui sont des impôts transférés du fédéral vers le régional. Il y a 12 impôts régionaux (loi spéciale de financement, article 3), et il s’agit essentiellement des droits de succession, des droits d’enregistrement, des impôts sur les véhicules et de certains autres impôts. Pour ces 12 impôts, les régions déterminent la base d’imposition, le taux, et les exonérations ; et ont droit aux recettes. Là, il s’agit de recettes plus substantielles (en région bruxelloise, plus de 50% du budget repose sur ces ressources). Ces impôts étaient fédéraux donc les textes qui continuent de servir de base à la législation régionale sont les anciens textes fédéraux qui, maintenant, peuvent être modifiés par les régions comme elles l’entendent. La compétence en matière de droit de succession a fait que, maintenant, on a trois codes de droits de succession, qui sont pour la plupart identiques mais qui deviennent quand même différents. La loi spéciale de financement prévoit également des critères pour éviter la double imposition, des critères de rattachement donc. En ce qui concerne ces impôts, il faut savoir qu’ils sont perçus par le niveau fédéral tant que les régions ne font pas la déclaration de vouloir les percevoir eux-mêmes.  

    -‐ Les impôts conjoints Permettent de participer aux recettes, mais ne confèrent aucune compétence en matière de base imposable et d’exonération. Le seul impôt conjoint est l’IPP. Mais une fois que l’impôt est calculé, dans un cadre limité par la loi spéciale (6,75%), les régions peuvent décider soit d’augmenter, soit de diminuer l’impôt dû, mais sans toucher à la base imposable.  

    -‐ Les impôts partagés Prévoient juste une participation des communautés à leurs recettes. Il s’agit de la TVA et de l’IPP.

    4. Le règlement-taxe

    A. Le pouvoir fiscal propre des provinces et des communes On en parle car elles ont l’autonomie fiscale : pied d’égalité d’avec l’état fédéral. Elles n’ont pas le même rang, elles sont subordonnées mais si demain une commune décide d’instituer un impôt, elle a le pouvoir constitutionnel de le faire. Autonomie de principe. Cette autonomie est tempérée par un tas de principes :

    -‐ le droit fiscal international et européen -‐ la loi : quand elle prévoit une exception à l’autonomie des provinces et des

    communes, cette autonomie est réduite.

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    Mais il y a également des limites propres : celles de la tutelle. Cela vient du fait que ce sont des pouvoirs subordonnés. Les provinces et les communes ne peuvent adopter que des règlements comme ce sont des pouvoirs subordonnés. De plus ils doivent être conformes à toutes les lois. Ils ont un champ d’application potentiellement plus limité de la loi (voir l’interdiction de la rétroactivité). Puisque cette autonomie est très limitée (plusieurs lois limitent leurs compétence, exemple article 464 du code d’impôt sur les revenus : pas d’impôt pour personnes physiques et sociétés), il a fallu, comme pour les Régions, que l’état fédéral consacre des compétences fiscales spécifiques, qu’il transfère un pouvoir d’imposition aux provinces et aux communes : les compétences fiscales dérivées.

    B. Les compétences fiscales dérivées des provinces et des communes Pas attribué par la constitution mais par l’état fédéral. C’est la principale source de financement des provinces et des communes. Ce sont des additionnels : droit de pouvoir percevoir un certain pourcentage d’un autre impôt. Donc pour avoir des additionnels, il faut d’office un autre impôt d’abord.

    -‐ Les communes peuvent percevoir des centimes sur le précompte immobilier et aussi des additionnels à l’IPP : impôt sur les personnes physiques. Ces additionnels varient selon les communes : elle est libre d’imposer le taux qu’elle souhaite. Certaines communes ont même des taux zéro, d’autres ont des taux élevés. La différence peut être énorme car si on paye un impôt de 100, on devra payer 100+0 à Knokke mais ailleurs ça peut être 100 + 8.

    -‐ Les provinces peuvent prélever des centimes additionnels au précompte