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Introduction générale. Le droit comptable est une nouvelle discipline en pleine évolution. Elle rassemble surtout des éléments anciens nés des exigences de rendre compte et de garder traces des transactions et ce dès les premiers échanges. Puis pour des raisons du développement industriel et de la nécessité du crédit, il a fallu élaborer et rassembler un corps de techniques comptables. Mais à mesure qu’une technique progresse, elle appelle, pour ordonner sa fonction sociale, des règles juridiques. Ainsi s’est formé le droit comptable en tant que discipline à part entière de sa lente maturité jusqu’à ses aboutissements. Définition du Droit Comptable. Il revient ici à dire ce qu’est le droit comptable et qu’est-ce qui n’est pas le droit comptable. Le droit comptable est la branche du droit privé qui régit les comptables et la comptabilité. Le rattachement au droit privé est à la fois indiscutable et discutable. Il est indiscutable en ce sens qu’il régit les missions comme les responsabilités des professionnels de la comptabilité en posant les conditions de la valeur probatoire des comptes comme de leurs diffusions aux bénéfices des associés, des tiers ou des salariés. Il contient aussi de nombreux apports du droit public. On en tient pour preuve les textes qui organisent l’ordre des experts comptables (ONECCA), le droit pénal comptable ainsi que les relations qu’entretiennent le droit fiscal et le droit comptable. Initialement, le droit comptable a été surtout le droit de la comptabilité, au sens de l’élaboration et de la présentation de la comptabilité. Aujourd’hui, les

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Introduction générale.Le droit comptable est une nouvelle discipline en pleine évolution. Elle rassemble

surtout des éléments anciens nés des exigences de rendre compte et de garder traces des transactions et ce dès les premiers échanges. Puis pour des raisons du développement industriel et de la nécessité du crédit, il a fallu élaborer et rassembler un corps de techniques comptables. Mais à mesure qu’une technique progresse, elle appelle, pour ordonner sa fonction sociale, des règles juridiques. Ainsi s’est formé le droit comptable en tant que discipline à part entière de sa lente maturité jusqu’à ses aboutissements.

Définition du Droit Comptable.Il revient ici à dire ce qu’est le droit comptable et qu’est-ce qui n’est pas le droit

comptable.

Le droit comptable est la branche du droit privé qui régit les comptables et la comptabilité.

Le rattachement au droit privé est à la fois indiscutable et discutable.

Il est indiscutable en ce sens qu’il régit les missions comme les responsabilités des professionnels de la comptabilité en posant les conditions de la valeur probatoire des comptes comme de leurs diffusions aux bénéfices des associés, des tiers ou des salariés. Il contient aussi de nombreux apports du droit public. On en tient pour preuve les textes qui organisent l’ordre des experts comptables (ONECCA), le droit pénal comptable ainsi que les relations qu’entretiennent le droit fiscal et le droit comptable.

Initialement, le droit comptable a été surtout le droit de la comptabilité, au sens de l’élaboration et de la présentation de la comptabilité. Aujourd’hui, les « producteurs » et les « contrôleurs » de la comptabilité sont également saisis par le droit comptable.

En d’autres termes, le droit comptable touche à la fois le droit des comptables constitué par l’examen des institutions professionnelles, les missions des professionnels de la comptabilité, leur responsabilité et le mode d’exercice de la profession.

La comptabilité se définit donc comme la science qui a pour but « l’enregistrement en unités monétaires des mouvements de valeurs économiques en vue de faciliter la conduite des affaires financières, industrielles et commerciales »1.

De ce point de vue, le droit comptable regroupe l’ensemble des dispositions légales et règlementaires qui conditionnent la technique comptable, droit des documents comptables qui doivent être tenus par les entreprises, droit des comptes eux-mêmes et des principes comptables, droit de l’information comptable.

1Fourastie

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Cependant, il faut remarquer que toute la comptabilité n’est pas saisie par le droit, notamment la comptabilité analytique. Seule la comptabilité générale des entreprises l’est.

Droit Comptable et Comptabilité.On a pendant longtemps enseigné que le droit comptable régit la comptabilité,

laquelle traduit le plus fidèlement et servilement les réalités juridiques. Pour l’illustrer, on a parlé de la comptabilité, algèbre du droit, on a aussi dit que la comptabilité n’est que l’expression chiffrée du droit civil ou commercial et que le bilan n’a qu’une fonction patrimoniale. Ces affirmations ont provoqué les praticiens de la comptabilité qui ont appelé à libérer ou au moins partiellement la comptabilité du joug des réalités juridiques afin de privilégier la présentation des réalités économiques. On convient tout de même que les relations entre la comptabilité et le droit ne sont pas univoques. Le droit comptable n’assujettit pas totalement la comptabilité et il n’est davantage absorbé par elle. Le droit comptable est au sens physique du terme la résultante des forces comptables et des forces juridiques. L’importance des forces comptables dans le droit comptable est incontestable.

Elle se manifeste de deux manières :

Le comptable joue un rôle éminent dans la fabrication des normes comptables,

la science comptable définit par ailleurs l’essentiel des finalités du droit et la quête de l’image fidèle a été l’œuvre des comptables avant de devenir une consigne législative.

Vis-à-vis des tiers, la fonction de la comptabilité est surtout juridique en ce sens qu’elle a un rôle probatoire et elle est la clé de répartition des bénéfices. Pour l’entreprise elle a une fonction supplémentaire qui est économique. C’est une mesure de performance et des coûts et des prévisions.

Le droit comptable n’est pas la comptabilité. Seules les normes comptables nous intéressent ici. Ainsi le Plan comptable Général retient davantage l’amateur de droit comptable sous l’angle de la théorie des sources que sous celui de la classification ou de l’organisation des comptes.

De même, le bilan attire son regard (de l’amateur) par les qualités qu’il doit déceler plutôt que par les procédés employés pour établir la comptabilité dont il est issu. Au fond, la démarche est la même que celle du spécialiste en droit de la construction indifférent aux mille manières de gâcher le mortier mais attentif aux conséquences des malfaçons. Dans notre analyse, nous échapperons à la comptabilité analytique, à la comptabilité privée au sens de comptabilité des particuliers, à la comptabilité publique.

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Les originalités du droit comptable.Elles sont de trois ordres : le langage, le concept et les méthodes du droit comptable.

Des dissemblances sur le plan du langage sont à relever. Un exemple, le terme « immobilisation ». En droit civil, c’est l’opération par laquelle un meuble devient immeuble alors qu’en Droit comptable, il s’agit des biens destinées à durer durablement dans l’entreprise. Un autre exemple, « les produits » ; en Droit, les produits représentent ce qu’une chose fournit sans périodicité ou en épuisant sa substance. En comptabilité, il s’agit pour l’essentiel des sommes reçues par l’entreprise au titre de son exploitation.

Une différence d’ordre conceptuel, la plus importante est assurément l’absence de concordance entre personnalité juridique et personnalité comptable. La personnalité comptable est parfois reconnue à des entités que le droit commercial ne range pas parmi les personnes morales. Par exemple, l’entreprise dont l’existence comptable est avérée, est niée juridiquement. L’entreprise individuelle réalisant un véritable patrimoine d’affectation comptable est exclue en droit civil du fait de l’unicité du patrimoine. Et le droit comptable promeut la consolidation des comptes voir la combinaison des comptes alors que le droit commercial n’admet pas le groupe de sociétés.

Les méthodes du droit comptable apparaissent hétérodoxes aux yeux d’une privatiste. Le comptable n’enregistre que sur présentation de justificatifs la vente bien que parfaite entre les parties a raison de l’accord de volonté intervenu sur la chose et sur le prix, ne sera prise en compte par le teneur de livres au moment où une facture aura été établie. Tout ceci fait dire au juriste (privatiste bien sûr) que le droit comptable est un droit fantaisiste, ce qui lui rappelle les extravagances du droit fiscal.

Les sources du droit comptable.Les sources du droit comptable sont à la fois nationales, communautaires et internationales.

L’internationalisation des marchés ou tout simplement la mondialisation impose que la comptabilité devienne un objet de droit harmonisé et lisible pour tous de la même manière et qu’elle constitue un langage commun. La création des comptes suivra alors les règles élaborées dans un cadre international et transposées au plan national. Il en est de même du droit des comptables qui eux aussi doivent donner une image unifiée et cohérente à travers le monde. Ainsi les tiers destinataires de l’information comptable connaitront les diligences du contrôle légal quel que soit son pays d’installation et appréhenderont la valeur d’une certification de la même manière, d’où qu’elle provienne.

On va donc distinguer dans le cadre de ces sources, les normes de techniques comptables applicable à l’élaboration et à la présentation des comptes (normalisation comptable), les normes professionnelles applicable aux professionnels de la comptabilité et

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qui sont des normes de diligence et des normes de déontologie professionnelle (normalisation professionnelle).

a- La normalisation comptable.Au niveau international, nous avons l’International Accounting Standard Boards

(IASB). C’est le comité exécutif de l’IASC (International Accounting Standard Committee) créée en 1973 par les représentants des organisations comptables de différents pays. Constitué de normalisateurs de nationalité différente choisi pour leurs expériences, l’IASB élabore et diffuse les normes comptables dénommées dans un premier temps IAS (International Accounting Standard) puis IFRS (International Financial Reporting Standard) depuis Avril 2001. Ces normes recommandées au Forum pour la stabilité financière en 2000, sont peu à peu introduites dans les droits nationaux.

Cette volonté résulte de la nécessite d’adopter un langage comptable commun qui modifie la logique des états financiers. De nouveaux référentiels internationaux modifient profondément la conception et la perception que l’on pouvait avoir de la comptabilité en imposant une nouvelle façon de penser estimée plus appropriée pour évaluer les actifs et les passifs d’une entité car elle est plus proche de la réalité économique. Cette juste valeur se définit comme le prix auquel un bien peut être vendu sur un marché d’échange à un moment donné. Il en résulte une plus grande variabilité de la valeur des actifs d’un exercice à l’autre, d’une entreprise à l’autre, liée à un environnement qui ne sera plus détachée des comptes et cantonnée à l’annexe ou au rapport de gestion.

Le nouveau référentiel a dès lors l’objectif de traduire une réalité économique permettant de comparer les entreprises ayant la même activité et où qu’elles soient dans le monde.

Sans remettre en cause les règles fondamentales du Droit comptable OHADA, les normes internationales les relaient en seconde position pour ériger en principe de base pour la préparation et l’établissement des états financiers, le principe de prédominance de la substance sur l’apparence. Une approche très nouvelle en termes d’IFRS se veut donc très objective, conforme à la réalité économique et moins simple retranscription d’une réalité juridique ou fiscale. Le résultat ne s’en trouvera pas forcement affecté, mais le bilan ne sera pas présenté de la même manière. Il y aura désormais beaucoup plus à l’actif et moins dans le compte charges à repartir. Les résultats pourront également connaitre une variation d’un exercice à l’autre compte tenu non pas de l’activité de l’entreprise mais de son environnement.

En somme, les normes IFRS apportent des bouleversements importants dans l’entreprise en ce sens que les services financiers devront parfaitement connaitre les activités des autres services et communiquer avec eux afin de rechercher la « fair value » ou « juste valeur » des biens.

La bonne gouvernance sera la clé de succès de la mise en place de ces normes puisque le système d’information sociale et environnemental et du bon fonctionnement des organes de

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direction, dépendront la fiabilité de l’information financière, gage de la confiance des investisseurs.

Au niveau de l’OHADA, nous avons l’acte uniforme portant Organisation et Harmonisation des comptabilités des entreprises, du 24 mars 2000. Cet acte uniforme est aussi appelé droit comptable, pour une raison simple, en plus des aspects comptables purement dit, l’OHADA a innové en développant des aspects juridiques applicables à la comptabilité. On en veut pour preuve, les principes applicables aux comptes personnels des entreprises, aux comptes consolidés et combinés, aux aspects relatifs à l’incrimination des comportements pouvant être sanctionné par des peines pénales définies par les États parties, parachevant ainsi ce qu’on peut appeler le droit pénal des affaires OHADA. D’ailleurs, allant dans ce sens, le législateur camerounais par la loi du 10 Juillet 2003 est venu déterminer les peines sanctionnant des incriminations des actes uniformes et plus particulièrement du Droit comptable OHADA. Au jour d’aujourd’hui, le Cameroun et le Sénégal sont les seuls pays de l’OHADA à avoir ainsi parfait le droit pénal OHADA.

Au niveau national, on note la loi du 6 mai 2011 relatif à l’exercice de la profession comptable libérale et au fonctionnement de l’ordre nationale des experts comptables du Cameroun (ONECCA). Il importe de préciser que cette nouvelle loi abroge toutes les dispositions antérieures contraires, notamment la loi du 10 Aout 1990, relatif à l’exercice et à l’organisation de la profession d’expert-comptable. Cette nouvelle loi réglemente le métier de professionnel comptable libéral qui intègre l’Expertise Comptable, le Commissariat aux Comptes et l’Expertise Judiciaire en Comptabilité. Elle organise l’ONECCA dans son fonctionnement, dans l’exercice de ses responsabilités administratives, dans l’exercice de son pouvoir disciplinaire. On se rend donc compte en lisant, de cette loi, renvoi est souvent fait à la CEMAC dans le processus d’obtention de l’agrément.

On peut donc dire que la CEMAC joue un rôle important dans le droit comptable ou bien que la profession bénéficie d’une organisation sous régionale.

b- La normalisation professionnelle.Il ne s’agit pas de la méthodologie d’Établissement des comptes d’une entité, mais

uniquement la démarche à suivre par le professionnel de la comptabilité pour émettre une opinion sur ces comptes.

L’État n’est pas seul à intervenir dans la confection des règles comptables, la part des organismes professionnels est capitale dans l’élaboration des normes professionnelles. Et comme en matière de technique comptable, il existe un besoin d’harmonisation international des pratiques des professionnels de la comptabilité qui réduit la marge de manœuvre des institutions professionnelles soumises aux organismes internationaux.

L’internationalisation des normes d’élaboration des comptes a été rendu nécessaire pour une meilleure lisibilité et une meilleure comparabilité des États Financiers ; de la même manière le contrôle de ces états financiers doit procéder de la même démarche de travail et

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donner lieu aux mêmes diligences. C’est pourquoi les professionnels de la comptabilité connaissent-ils des normes de diligences harmonisées afin qu’ils adoptent la même méthodologie, les mêmes pratiques professionnelles érigées au plan international, parce que considérées comme étant les meilleures par leurs pairs. Et aussi dans un esprit de dérèglementation, des professions libérales, l’harmonisation des pratiques est un préalable indispensable à la libre circulation des prestataires de services.

Le droit des comptables est un droit élaboré par des professionnels pour ces mêmes professionnels. C’est une particularité du droit comptable.

Au niveau international, on peut citer deux organismes qui participent à cette normalisation professionnelle : l’IFAC (International Federation of Accountants) et le FIDEF (Fédération Internationale des Expert comptables Francophones).

L’IFAC est créé en 1977, et est constituée de 159 instituts comptables de 119 pays. Ils normalisent la profession d’auditeurs au niveau international. Le principal objectif de l’IFAC est de favoriser le développement d’une profession comptable mondiale homogène ayant des pratiques et des comportements harmonisés. Pour se faire, l’IFAC s’attache à promouvoir les normes et le développement de la profession en publiant les informations techniques et professionnelles et en encourageant l’adoption des normes qu’elle élabore. Elle souhaite une profession forte et unie, elle assure la coordination avec les organisations régionales et les organismes membres, et les aide à atteindre les objectifs stratégiques. Les organismes membres s’engagent à appliquer les normes et les directives dans toute la mesure du possible en tenant compte des spécificités nationales. Il s’engage aussi à intégrer dans leur référentiel normatif, les principes et les normes internationales élaborées.

La FIDEF, pour sa part, est une structure d’échange et de coopération au sein de la communauté linguistique francophone. Elle fonde son action autour de trois objectifs majeurs :

1- Garantir la reconnaissance et l’autorité de la profession comptable francophone (Institutionnalisation de la profession, création des structures professionnelles auprès d’organisations régionales publiques, adhésion de ses membres a l’IFAC) ;

2- Promouvoir la culture comptable francophone tout en prenant en compte l’évolution internationale ;

3- Assurer aux professionnels un niveau de compétences techniques homogènes reconnus sur le plan international en adéquation avec les besoins des économies des pays membres.

Elle comptait en 2002, 24 membres actifs dont le Cameroun.

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Chapitre 1 : les statuts du professionnel comptable libéral.

Sur la scène comptable, les acteurs sont nombreux.

A côté de l’expert-comptable, du commissaire aux comptes, on a aussi le directeur financier, le chef comptable et l’agent comptable. Ce sont les comptables d’entreprise. Ces derniers sont pourvus d’une formation technique souvent semblable et habitée des mêmes soucis de régularité, de sincérité et de fidélité. Les uns produisent ou surveillent la comptabilité d’une entreprise à laquelle ils sont subordonnés, les autres contrôlent voire tiennent des comptabilités d’entreprises sans être liées à ces dernières par un contrat de travail. Les premiers sont d’abord des salariés et les seconds sont indépendants.

L’article 2 exclut expressément ceux qui sont liées par un contrat de travail. Par conséquent, ces comptables d ‘entreprise n’utiliseront pas les titres de commissaire aux comptes, d’experts comptable et d’expert judiciaire car ce métier découle du statut d’expert-comptable conformément à l’article 6 de la loi de 2011.

Ceci peut être regrettable car les travaux de ces comptables d’entreprise nécessitent pourtant les mêmes exigences de fiabilité et de transparence que ceux des membres de l’ordre. Ailleurs, l’intérêt d’harmoniser les pratiques et de promouvoir une image fédérée de la profession a été vite perçu. C’est ainsi que l’ordre des experts comptables français a créée l’institut des professionnels associés à l’ordre des experts comptables (IPAO), afin de fédérer aux côtés des experts comptables libéraux les comptables publics, les enseignants en comptabilité, les comptables d’entreprises et plus largement, la communauté financière et comptable. Ils sont environ 40 000 professionnels en France issus de l’économie d’entreprise. L’intérêt de ce rassemblement est de favoriser les échanges et la visibilité de ces acteurs par une réflexion commune sur les sujets qui intéressent de près ou de loin toutes ces professions afin de créer de la valeur ajoutée pour ces métiers. Ces professionnels par leur adhésion à l’institut deviennent membres associés inscrit sur une liste voisine à celle du tableau. Cette inscription ne leur confère en aucun cas, la qualité de membres de l’ordre mais leur permet d’avoir une représentativité et une reconnaissance de leur rôle et plus globalement une crédibilité renforcée et unifiée autour de la profession comptable libérale.

Section1 : l’organisation de la profession de comptable libéral.

Les experts comptables sont regroupés au sein de l’organisation professionnelle appelée ONECCA. Cet ordre est placé sous la tutelle du ministère des finances et est dotée d’une personnalité juridique et son siège est situé à DOUALA.

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I- Les missions de l’ordre.L’article 42 de la loi de 2011 dispose d’une manière générale que l’ordre veille au

maintien des principes de moralité et de dévouement indispensable à l’exercice de la profession d’expert-comptable, ainsi qu’au respect du règlement intérieur.

Par ailleurs, l’ordre exerce également toute attribution qui peut lui être confiée par la présente loi ou par les textes particuliers. En principe, les missions essentielles d’un ordre doivent être :

1- D’assurer la promotion de la profession ;2- de protéger les intérêts de ses membres ;3- d’affirmer sa contribution à l’évolution ;4- Et au redressement de l’économie de pays et de préconiser toutes les mesures

susceptibles d’atteindre ces objectifs.

La personnalité juridique que l’ordre possède lui permet de mieux assumer ses missions. Elle garantit une expression collective pour la défense des intérêts licites, dignes et par suite juridiquement reconnus et protégés.

L’ordre est donc titulaire des droits et obligations et dispose d’un patrimoine propre mais la personnalité juridique lui est exclusivement octroyée pour la poursuite de son objet à savoir la défense de l’honneur et de l’indépendance de la profession qu’il représente. Tout acte étranger à cette fin serait nul. La défense de la profession passe par la formation qui est la clé de voute de toute prestation intellectuelle de qualité.

C’est ainsi que l’article 61-alinéa 1 fait obligation aux professionnels comptables libéraux, aux diplômés d’expertise comptable n’exerçant pas la profession de comptable libérale, aux experts comptables stagiaires inscrits au tableau de l’ordre de se soumettre aux obligations de formation continus et aux respect des normes et règlements de la profession.

II- Les Organes de l’Ordre.L’ordre comprend deux organes : l’assemblée générale et le conseil de l’ordre.

L’assemblée générale est constituée de tous les experts comptables inscrits au Tableau de l’ordre. C’est l’organe suprême de l’ordre car, c’est elle qui élit le président du conseil de l’ordre (PCO). Elle se réunit tous les ans en session ordinaire sur convocation de son président ou en session extraordinaire à la demande soit de la majorité absolue de ses membres, soit du conseil de l’ordre, soit encore de l’autorité de tutelle.

Dans tous les cas de figure, c’est pour élire les membres du conseil de l’ordre, le PCO, pour statuer sur le rapport d’activité et le plan d’action du PCO, pour fixer les orientations susceptibles d’assurer la bonne marche de la profession, adopter le code de déontologie de la profession et le règlement intérieur de l’ordre, élire les membres de la chambre d’appel que l’assemblée générale extraordinaire peut être convoquée.

L’Ordre du jour d’une session d’assemblée générale porte exclusivement sur les questions relatives à l’exercice de la profession par ses membres. Quoi que d’apparence

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restreint, l’ordre du jour peut être largement débattu à condition qu’il s’agisse des questions relatives à l’exercice de la profession.

Le conseil de l’ordre.

C’est l’organe exécutif de l’ordre qui comprend 10 membres titulaires et 9 membres suppléant élus pour 3 ans, choisis parmi les experts comptables libéraux.

L’article 56 de la loi 2011 définit ses attributions de la manière suivante. Il statut sur la demande d’inscription ou de réinscription au tableau de l’ordre et sr l’élection de ses membres. Le conseil de l’ordre émet un avis sur les demandes d’agrément en qualité d’expert-comptable ou de société d’expertise comptable avant leur transmission à la commission de la CEMAC par l’autorité de tutelle.

On doit savoir que l’ONECCA n’agréé pas les experts comptables ou les sociétés d’expertise comptable. L’agrément relève du pouvoir exclusif de la commission de la CEMAC. Mais l’ONECCA doit émettre son avis préalablement et de manière absolue avant toute transmission du dossier à la commission. Sur le terrain de la pratique, l’obtention de cet avis n’est pas toujours simple. On peut aussi se demander si l’avis de l’ONECCA qui peut être favorable ou défavorable lie la commission. Ce qui est certain c’est que la commission en tient compte.

Le conseil de l’ordre veille à la formation et au perfectionnement continu de tous les membres de l’ordre. Il veille aussi à l’application des exigences de la normalisation comptable internationale et régionale. Il assure également le contrôle de qualité des prestations de ses membres, en d’autres termes, le conseil de l’ordre doit s’assurer que tous les experts comptables inscrits à l’ordre fournissent les mêmes qualités de prestations de services.

L’Ordre assure enfin la compétence disciplinaire en première instance. Dans les conditions prévues par ladite loi, le conseil connait de toute question relative à l’exercice de la profession, au bon fonctionnement de l’ordre et des questions à lui soumise par l’autorité de tutelle.

La mission de l’ordre est une mission de service public. Les décisions ordinales qu’elles soient règlementaires comme la conception du code des devoirs professionnels (ou code de déontologie) ou l’inscription au tableau de l’ordre revêt la qualité d’actes administratifs de nature à être portée devant les juridictions administratives. Néanmoins, le fonctionnement interne de l’ordre reste régit par le droit privé.

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Section 2- Les Conditions d’exercice de la profession libérale.Pour avoir la capacité d’exercice de la profession comptable libérale, il y a d’abord un

préalable à observer qui figure à l’article 10 de la loi camerounaise de 2011 ; « Nul ne peut porter le titre de professionnel comptable libéral s’il n’est préalablement autorisée par un décision du conseil des ministres de l’Union Économique de l’Afrique Centrale. ».

Par l’exigence de ce formalisme, l’état camerounais se conforme aux engagements communautaires. Mais ce formalisme est porteur de conséquence plus importante à savoir :

- L’inscription à l’ONECCA ou plus largement entendu l’exercice de la profession dans l’espace CEMAC ne peut intervenir qu’après cette autorisation préalable du conseil ;

- Toute personne désirant exercer la profession doit se conformer à ce formalisme.

Des conditions supplémentaires sont exigées à l’article 11, par exemple :

- Être citoyen d’un pays membres de la CEMAC ;

- Jouir de ses droits civiques ;

- N’avoir subi aucune condamnation pénale de nature à entacher son honorabilité (interdiction du droit de gérer et d’administrer les sociétés) ;

- Être âgé de 23 ans au moins ;

- Être titulaire d’un diplôme d’expertise comptable reconnu par l’état du Cameroun ;

- Avoir subi avec succès l’examen complémentaire organisé par l’ONECCA sous la supervision du ministère en charge des finances conformément aux dispositions règlementaires de l’IFAC.

Pour les ressortissants étrangers à la CEMAC, en l’absence de convention de réciprocité, ils ne sont autorisés ni à exercer la profession d’expert-comptable au Cameroun ni à constituer une société d’expertise comptable entre eux. Cependant, il leur est permis soit d’être salarié dans une société d’expertise comptable soit de créer avec les associes de nationalité camerounaise, une société d’expertise comptable, à condition que ceux-ci soit majoritaires du 2/3 en nombre et en capital.

Le législateur camerounais renforce les conditions dès lors qu’il s’agit de constituer une société d’expertise comptable. Les candidats doivent remplir en outre les conditions particulières à savoir :

- Produire un certificat de résidence effective au Cameroun ;

- N’avoir pas été radié de l’Ordre des experts comptables de leur pays d’origine ou de tout autre pays où elle aurait exercée auparavant.

Pour se résumer, exerce illégalement la profession comptable libérale sans préjudice des dispositions du règlement CEMAC n*11\01-UEAC-027-CM-0 du 05 décembre 2001, approuvant le statut des professionnels libéraux de la comptabilité, tout personne qui pratique la profession en infraction des dispositions de la présente loi, notamment :

- en exerçant sans être inscrit au tableau de l’ONECCA ;

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- en exerçant sous un pseudonyme

- en offrant de l’aide à toute personne non habilitée à exercer ou encore ;

- en exerçant en dépit d’une interdiction temporaire ou définitive d’exercer ;

- et enfin sans une police d’assurance responsabilité civile professionnelle en cours de validité.

Cet article 13 de la loi camerounaise mérite quelques observations :

Il ne donne pas une liste exhaustive des hypothèses d’exercice illégal de la profession. Il faut certainement intégrer les dispositions du règlement CEMAC.

L’inscription au tableau de l’ONECCA est une autorisation obligatoire certainement après autorisation préalable du conseil des ministres de la CEMAC. En d’autres termes, pour ne pas être dans l’illégalité, il faut être agréé par le conseil et être inscrit au tableau de l’ONECCA.

Toutefois, la demande doit être déposée contre récépissé en deux exemples originaux au siège du conseil de l’ordre du Cameroun.

Dès réception, le conseil est tenu de se prononcer sur le dossier de demande d’agrément dans le délai de 30 jours à compter de la date de dépôt de celui-ci. Puis il transmet un exemplaire du dossier avec avis motivé au ministre des finances, lequel dispose d’un délai de 60 jours pour se prononcer et transmettre le dossier à la commission de la CEMAC.

Le Président de l’ordre est informé par communication du bordereau de transmission du dossier.

Lorsque la commission refuse d’octroyer l’agrément, elle doit motiver son refus. En cas de commission d’infractions pouvant justifier le retrait d’agrément, le parallélisme de forme est également respecté. C’est à la commission de décider du retrait d’agrément dès lors qu’elle est saisie par le conseil de l’ordre par lettre motivée. La décision prise, elle est notifiée à l’intéressé par lettre du président de la commission et copie de cette lettre est adressée au ministre des finances et à l’ordre.

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Chapitre 2 : les Conditions d’exercice de la profession de comptable libéral. La loi camerounaise commence par déterminer les métiers de la profession comptable libérale. Ils sont dans l’ordre de 3 : l’expertise comptable, le commissariat aux comptes, l’expertise judiciaire en comptabilité. Incidemment, le législateur va glisser dans la détermination des missions des experts comptables et des commissaires aux comptes et des experts judiciaires en comptabilité, avant de déterminer les conditions d’exercice de la profession comptable libérale.

Section 1- Les missions d’expertise comptable.Aux termes de l’article 7, l’expertise comptable consiste notamment à :

1- Tenir, centraliser, ouvrir, arrêter, surveiller, redresser, consolider les comptabilités des entreprises et organismes auxquels les experts comptables ne sont pas liés par un contrat de travail ;

2- Réviser et apprécier les comptabilités des entreprises et organismes auxquels ils ne sont pas liés par un contrat de travail ;

3- Faire des travaux et consultations d’ordre statistique, économique, financier et administratif.

Selon l’organisation comptable interne de l’entité, la mission qui est dévolue à l’expert-comptable peut se comprendre de deux manières :

- Une mission d’aide à l’établissement des comptes : cette mission peut concerner directement ou indirectement des données financières ou non financières de la société cliente (tenue de la comptabilité, déclaration fiscale, conseil, mise en place de procédure etc.…) ;

- Une mission de révision pour celles des entreprises qui sont dotées en interne de personnels qualifiés pour tenir la comptabilité, mais qui sollicitent l’expert-comptable pour la vérifier et émettre une opinion sur celle-ci.

La révision constitue un contrôle général s’appliquant à l’ensemble de la comptabilité et qui a pour objet d’en vérifier la régularité et la sincérité.

Ce qui rapproche l’établissement des comptes, de la révision, c’est que les deux types de mission aboutissent à l’expression d’une opinion. Mais dans le second cas, l’expert-comptable n’a pas participé à l’élaboration de la comptabilité. Il exerce un contrôle de nature contractuelle.

Dans les deux cas, l’opinion sur les comptes a été sollicitée volontairement par l’entité cliente, encouragée par un tiers (banquier, fournisseurs ou repreneurs…) qui exige une fiabilité garantie de l’information financière pour prendre une décision éclairée.

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Tous attendent de l’expert-comptable une appréciation sur le compte avant de prendre une décision de crédit ou d’engagement.

Sans entrer dans les détails de la pratique, on peut signaler qu’une telle mission exige d’une part, une évaluation de la qualité du contrôle interne i.e. l’ensemble des moyens humains et matériels propres à prévenir les erreurs et les fraudes, d’autre part, diverses vérifications techniques en vue d’apprécier la valeur de l’inscription comptable. C’est un tel faisceau d’expertise qui nourrit l’intime conviction du reviseur sur la régularité et la sincérité des comptes.

La mission traditionnelle de l’expert-comptable pour laquelle il jouit d’un contrôle comporte donc l’établissement ou la révision des comptes et une attestation comprenant son opinion sur la régularité, la sincérité et la fidélité des comptes, afin de réduire les incertitudes inhérentes à toute comptabilité.

Il faut relever que ces missions liées aux comptes sont par essence annuelle et ne saurait faire l’objet d’un abonnement sous peine de restreindre la liberté de choix du client et l’indépendance du professionnel. C’est pourquoi une lettre de mission doit préciser ce caractère annuel et indiquer qu’elle prend fin à la remise finale des documents de synthèse de l’exercice. Elle est reconductible par tacite reconduction sauf dénonciation dans les conditions prévues aux conditions générales d’intervention.

Il est important de relever que parmi les missions dites accessoires de l’expert-comptable, le droit camerounais ne fait plus figurer les travaux d’ordre juridique qui présentaient un risque énorme pour ce dernier. Celui-ci n’étant pas un juriste au sens noble du terme. On peut nourrir la même crainte pour les missions d’ordre administratif. L’expert-comptable devrait s’assurer que ces missions aient un lien avec les travaux comptables qui lui sont demandés.

Il faut savoir aussi que l’expert-comptable peut proposer également d’autres missions à titre principal sans avoir de mission comptable auprès de ses clients. Ces missions ne font pas partie du monopole du professionnel et sont librement fixées par les parties. Ces missions ne peuvent être assurées qu’à condition de respecter un certain nombre de principes. Notamment :

- Garantir le respect des domaines réservés des autres professionnels règlementés (la matière juridique relève des avocats mais l’expert-comptable peut rédiger un acte sous seing privé lorsqu’il s’agit de l’accessoire d’une mission comptable);

- Garantir le respect des incompatibilités auxquelles est soumis l’expert-comptable ;

- Veiller à ce qu’un même client ne constitue pas l’essentiel des revenus d’un expert-comptable.

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Section 2- Les missions de l’expert judiciaire. Les experts judiciaires en comptabilité sont principalement chargés de conduire les travaux d’expertise comptable auprès des tribunaux.

Devant le silence du législateur camerounais, on peut se poser la question de savoir en quoi consiste cette expertise?

Il faut dire que le juge est souvent dépassé par les questions comptables. La complication croissante des techniques et la perfection du langage comptable se conjuguent pour rendre la tâche particulièrement difficile au juge. Le recours à un technicien de la comptabilité s’impose donc de plus en plus en matière pénale et en matière civile. Le juge peut donc dans ce cas, commettre toute personne de son choix pour l’éclairer par des constatations, par une consultation ou par une expertise, sur une question de fait qui requiert les lumières d’un technicien. Il le choisit sur une liste d’experts agréés auprès de la cour d’appel, qui sont des techniciens dans leur spécialité.

Le cadre de la mission de l’expert judiciaire est strictement défini par le juge. L’expertise implique de connaitre la nature exacte de la chronologie des faits impliquant une prise de connaissances approfondie des évènements. L’expertise constitue aussi une analyse factuelle, synthétique et objective de la situation dans un ordre chronologique.

La mission de l’expert judiciaire est placée sous le contrôle du juge d’instruction. Si l’expert souhaite interroger la personne mise en examen, il le fera par entremise du juge d’instruction, ce dernier posant des questions qui lui sont suggérées par l’expert. Sur autorisation expresse du juge, il pourra l’interroger directement. À l’issue de l’expertise qui est entamée dans les délais prévus par le juge, l’expert dresse un rapport qui décrit les opérations effectuées et les conclusions auxquelles il a abouti. Le rapport est remis au juge qui porte à la connaissance des parties intéressées ; celles-ci jouissent du droit de formuler des observations et de demander le cas échéant une nouvelle expertise.

Section 3- Les missions du Commissaire aux comptes.Aux termes de l’article 8 :

- Les Commissaires aux comptes sont chargés d’une mission d’audit externe conduisant à la formation d’opinions sur les comptes d’organismes et ainsi qu’à la rédaction de rapport ;

- Des missions de vérifications spécifiques ;

- Des autres interventions définies par la loi.

Le commissaire aux comptes a essentiellement une mission permanente de contrôle sur la situation comptable et financière de la société. L’ampleur et la nature des devoirs de ce dernier sont modulées par l’objet de la mission sensoriale.

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Ses premières obligations sont des obligations de faire, des obligations de contrôle, des obligations d’information, qui sont étroitement imbriquées. C’est la nécessité d’informer qui justifie et détermine la profondeur du contrôle. Le contrôle des comptes est une obligation légale d’ordre public à laquelle on ne peut déroger. Il s’impose dans un certain nombre d’entité dont on considère que, par leur poids économique ou leur rôle social et politique, un besoin de transparence financière totale doit garantir la fiabilité de l’information financière pour les actionnaires, les salariés, les investisseurs et le public. C’est au commissaire aux comptes que la loi confie ces missions légales de contrôle des comptes. Et la question se pose de savoir s’il est un mandataire ou un organe social.

C’est un organe social car ses missions sont définies par la loi et seulement elle . On comprend que l’AUDSCGIE réserve tout un chapitre au choix du commissaire aux comptes et de son suppléant. Ses missions telles que définies à l’article 37 de la loi de 2011 constituent une partie du dispositif de l’acte uniforme notamment les articles 711 à 717.

Aux termes de l’article 695 de l’acte uniforme, seuls les experts comptables agréés par l’ordre peuvent exercer les fonctions de commissaire aux comptes. Pour ce qui est des pays membres de la CEMAC, les experts comptables doivent être agréé par décision du comité de direction de la CEMAC (cf. Acte du conseil des chefs d’états UDEAC n*5\82-UDEAC-324 adoptée le 18 décembre 1982 relatif au commissariat aux comptes et à l’expertise judiciaire en comptabilité dans les états membres de l’UDEAC).2

Plus spécifiquement, le commissaire aux comptes assure une mission permanente sans immixtion dans la gestion de vérification des valeurs et des documents comptables de la société et du contrôle de la conformité de la comptabilité aux règles en vigueur.

Donc, il doit vérifier la sincérité, la cohérence des informations fournies dans le rapport de la gestion du conseil d’administration avec les états financiers de synthèse. Il doit s’assurer que l’égalité entre les associés est respectée. Il dresse un rapport aux dirigeants sociaux dans lequel il les informe de l’étendue des vérifications effectuées, des irrégularités et inexactitudes découvertes ainsi que des conclusions auxquelles conduisent les observateurs et rectifications demandées par lui. Il dresse un rapport à l’assemblée générale dans lequel il énonce les irrégularités et inexactitudes relevées lors de l’accomplissement de sa mission.

Enfin, le Commissaire aux comptes doit s’informer sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l’exploitation pour en informer les dirigeants et l’assemblée générale le cas échéant.

En plus de ces missions conjointement définies par le législateur camerounais et l’OHADA, on doit relever une des missions importantes qui découle de l ‘Article 716 alinéa 2 de l’acte uniforme : « En outre, il révèle au ministère public les faits délictueux dont il a eu connaissance dans l’exercice de sa mission sans que sa responsabilité puisse être engagée par cette révélation. »

2Ici on commence à avoir une dimension communautaire de la profession.

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Il est important de savoir que le commissaire aux comptes qui aura sciemment donnée ou confirmer des informations mensongères sur la situation de la société, ou qui n’aura pas révéler au ministère public les faits délictueux dont il aura eu connaissance encoure une peine d’emprisonnement de 2 à 5 ans et d’une amende de 500 000 à 5 000 000 FCFA ou de l’une de ces deux peines seulement (Article 17 de la loi du 10 juillet 2003).

Il faut donc retenir que le contrôle du commissaire aux comptes présente deux caractéristiques ; c’est un contrôle permanent, c’est un contrôle personnel.

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Chapitre 3: Les obligations professionnelles des professionnels comptables libéraux. Si on écarte au moins provisoirement le contrat passé avec le client, la source première des obligations professionnelles est le code de déontologie de l’ONECCA adoptée par arrêté 00166\MINFI du 07 Décembre 1993.

Mais il faut dire que sur le plan de l’importance pratique le comportement et les diligences du professionnel lui sont dictées par deux corps de dispositions particulièrement complètes à savoir le code de déontologie et les normes professionnelles. Ces dispositions doivent être complétées par des usages liés la notion de professionnel normalement diligent.

Le code de déontologie a un caractère obligatoire ; il impose des obligations générales qui expriment surtout des impératifs appelés à gouverner le comportement du professionnel dans ses relations avec autrui. C’est ainsi que l’article 1er du Code déontologique de l’ONECCA dispose que : « il est demandé aux membres de l’ordre d’observer les règles de conduite, d’intégrité et de dévouement professionnel, de sauvegarder l’honneur et l’indépendance de la profession, et notamment, de s’abstenir de toute conduite, de tout acte ou manquement susceptible de jeter un discrédit sur le manque lui-même, sur l’ordre ou sur la profession. Les membres qui ne respectent pas cette ligne de conduite peuvent être traduits devant le conseil de discipline de l’ordre ».

Il s’agit ici d’un préambule qui résumé la philosophie de l’ordre en donnant quelques indications sur les obligations déontologiques (obligation d’indépendance, le devoir du secret professionnel, l’intégrité…) mais il faut dire que tout n’est pas contenu dans cet article ; c’est ainsi que certaines dispositions déontologiques sont mieux présentées par la suite.

Section 1- L’indépendance professionnelle : la clé de voute de la profession.

Sur un plan général, l’indépendance est présentée dans le code déontologique et bénéficie aussi d’une attention particulière dans l’acte uniforme et le droit des sociétés et GIE.

En ce qui concerne les CAC, d’après l’article 2 du code de déontologie, « dans l’exécution de chaque mission professionnelle, un membre exerçant à titre indépendant doit être et apparaitre libre de tout intérêt portant atteinte à son objectivité. »

Aux termes de l’article 3, « les membres expert-comptable professionnels n’exerçant pas librement la profession ne sont pas en mesure d’agir en toute indépendance. Toutefois,

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cette situation ne doit pas porter atteinte à son devoir d’objectivité dans l’exercice de son activité professionnelle ».

Le code de déontologie n’est pas assez explicite sur les situations qualificatives de manque d’indépendance. Il faut donc se reporter à la section 2 de la loi organique de 2011 qui règlemente les incompatibilités et les interdictions.

Aux termes de l’article 29, « les fonctions de commissaire aux comptes sont incompatibles dans la même société avec celles d’expert judiciaire en comptabilité et d’expert-comptable ». Il s’agit ici du refus du cumul de fonction pouvant opérer l’indépendance du professionnel comptable libéral car autant les trois fonctions sont différentes, autant elles se complètent.

Et puis, l’article 30 pose le principe général de l’incompatibilité en ces termes : « l’exercice de la profession comptable libérale est incompatible avec toute occupation ou tout acte de nature à porter atteinte à l’indépendance du professionnel concerné… ». Il s’agira de la qualité d’agent public, de tout emploi salarié (sauf dans un cabinet d’expertise comptable ou dans une société d’expertise comptable membre de l’ONECCA). Il s’agit également de tout acte de commerce à l’exception du mandat d’administrateur indépendant, de gérant ou fondé de pouvoir dans le cadre d’un mandat judiciaire.

Les professions libérales dans leur ensemble gardent ainsi une défiance à l’égard de l’idée de mercantilisme. Mais toute la difficulté réside dans l’appréciation de l’activité accomplie afin de déterminer son caractère civil ou commercial. Egalement dans le cadre du principe général de l’incompatibilité, la fonction de conseil fiscal est incompatible avec la profession comptable libérale (loi du 5 décembre 2001).

En comparant avec l’ordonnance française du 19 décembre 1945, parmi les situations caractéristiques du manque d’indépendance, on peut rajouter l’interdiction pour tout membre de l’ordre d’exercer son art en faveur des entreprises dans lesquelles il possède directement ou indirectement des intérêts substantiels (existence de liens familiaux, personnels et financiers entre le professionnel comptable libéral et l’entité à contrôler de nature à faire naitre des doutes dans l’esprit des tiers quant à son objectivité et son impartialité. En conséquence, le professionnel comptable libéral ne peut recevoir de l’entité contrôlée ni prêts, ni avantages particuliers, ni détenir une fraction symbolique du capital de ladite société).

On peut ajouter aussi l’interdiction d’élaborer les comptes de l’entité contrôlée, de se prononcer sur des documents, évaluation ou prise de position qu’il aurait contribué à élaborer.

L’article 30 alinéas 2 prescrit que ces compatibilités s’étendent aux employés salariés et à toute personne agissant pour le compte de l’expert-comptable libéral (tout mandataire).

Les articles 697 à 701 de l’AUDSCGIE règlementent spécialement le régime des incompatibilités liées au statut du commissaire aux comptes. Au préalable, il lui est interdit de cumuler sa mission de CAC avec tout emploi salarié bien qu’il puisse dispenser des

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enseignements se rattachant à l’exercice de sa profession. Il est autorisé à occuper un emploi rémunéré chez un commissaire aux comptes ou chez un expert-comptable.

À travers l’article 698, par un raisonnement à contrario, le législateur OHADA renforce le régime des incompatibilités. On peut dire qu’un commissaire aux comptes ne peut être fondateur, apporteur, bénéficiaire d’avantages particuliers, dirigeant social de la société ou de ses filiales, ainsi que leur conjoint. Les dirigeants de société possédant le 10eme du capital de la société ou dont celle-ci possède le 10eme du capital ainsi que leurs conjoints…

Une société de commissaire aux comptes dont l’un des associés, actionnaires ou dirigeants à un intérêt indirect ou direct ou par personne interposée, reçoit des dirigeants un salaire ou une rémunération quelconque en raison d’une activité permanente autre que celle de commissaires aux comptes, ne peut pas exercer comme commissaire aux comptes.

Toutefois, prévoit l’article 699, le commissaire aux comptes peut être nommé administrateur, administrateur général adjoint, directeur général, directeur général adjoint des sociétés qu’il contrôle, mais 5 ans après qu’il ait cessé sa mission de contrôle.

Une question importante et d’actualité demeure, celle de non cumul de l’audit et du conseil dans l’actualité mondiale.

La question se pose surtout quant à la mission du commissaire aux comptes qui est appelé parfois à conseiller le chef d’entreprise. En droit français, par exemple, désormais il est interdit de fournir à la personne qui l’a chargé de certifier ses comptes ou aux personnes qui les contrôlent ou qui sont contrôlés par celle-ci, tout conseil ou toute autre prestation n’entrant pas dans les diligences directement liées à la mission du commissaire aux comptes.

Les diligences directement à la mission du commissaire aux comptes sont de deux ordres :

- Les prestations visant à obtenir un niveau d’assurance raisonnable sur les comptes ou les informations comptables historiques, mais également sur une information ou sur un objet ou sur un sujet d’une autre nature qu’on appelle communément « Audit » ;

- Les prestations visant à obtenir un niveau d’assurance modérée sur une information ou sur un sujet du type « examen » ou « revue ».

Ne constituent donc pas les prestations entrant dans les diligences directement liées à la mission de commissaire aux comptes et sont, par conséquent, exclues du champ de prestation du commissaire aux comptes, celles qui ne feraient pas appel à la démarche ou aux techniques de l’audit et dont la nature ne correspondrait pas aux missions dites d’assurance ou de procédure convenue.

En d’autres termes, il lui est interdit de fournir tout conseil ou toute autre prestation de service à cette société aux personnes qui la contrôlent ou sont contrôlées par elle. Seules les diligences directement liées à la mission telles que définies par les normes d’exercice professionnelles sont autorisées. Qu’en est-il du droit comptable camerounais ? Certainement des recommandations dans ce sens sont faites mais la loi de 2011 n’en fait pas expressément allusion, mais on espère que l’OHADA s’adaptera en cas de besoins.

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Section 2- Le respect du secret professionnel.

Le Code de Déontologie rappelle, à l’article 4, le devoir de tout membre de l’ordre de faire comprendre à son client qu’il ne peut agir, au mieux pour lui, que s’il accepte de lui communiquer toutes les informations nécessaires à la bonne exécution de sa mission.

Est-ce dire que pour qu’il y ait respect du secret professionnel, il faut qu’il y ait eu communication des informations de la part du client ? Pas forcément car le domaine du secret professionnel s’étend à toute information portée à sa connaissance pendant l’exécution de sa mission. C’est donc dire que le lien n’est pas obligatoire. L’obligation de communiquer s’impose au commerçant dont les comptes sociaux doivent être établis ou certifiés en ce sens que si le commerçant ne met pas à la disposition du professionnel comptable toutes les informations utiles, ce dernier ne serait pas à même de bien assurer son obligation professionnelle, les comptes ne seront pas juste et ne refléteront pas en conséquence l’image fidèle du patrimoine de l’entreprise, de sa situation financière et économique. Aussi, la responsabilité du professionnel comptable pour complicité de faux bilan serait partagée avec le chef d’entreprise.

Par contre, à l’article 5 du Code Déontologique, tout membre de l’ordre est tenu au secret professionnel. Par conséquent, il ne peut communiquer au tiers des informations sur les affaires d’un client qu’avec l’autorisation de celui-ci.

Cependant, il y a des hypothèses dans lesquelles il est délié du secret professionnel :

En cas de révélation obligatoire des faits délictueux au ministère public, En cas de révélation circonstancielle quand cela est nécessaire pour défendre

l’intérêt professionnel du membre ou l’intérêt de la profession.

Quelques observations sur le secret professionnel.

Les révélations en question doivent se faire dans le cadre prévu par la loi (à la demande par la justice) lors de l’enquête de la CMF_ Commission des Marchés Financiers, lors du contrôle de la COBAC ; sinon le professionnel comptable libéral qui révélerait ces informations serait en train de violer le secret professionnel.

Mais, il faut dire que l’obligation au secret professionnel du CAC est plus complexe. Révélation ici, discrétion là-bas, ce d’autant plus qu’il y est des personnes (des actionnaires) envers lesquelles, il est à la fois tenu d’une obligation d’information et d’une obligation de mutisme.

La règle est posée par l’article 717 de l’AUDSCGIE, dans les termes suivants, « sous réserve des dispositions de l’article 76 du présent acte uniforme, le CAC ainsi que ses collaborateurs sont astreints au secret professionnel pour les faits, actes et renseignements dont ils ont pu avoir connaissance en raison de leurs fonctions. ». C’est dire que vis-à-vis des institutions professionnelles, des institutions publiques (CMF, COBAC, Juridictions

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pénales et auxiliaires, Juges-commissaires, Experts-Judiciaires, Organes de direction des entités contrôlées, l’assemblée des actionnaires, le comité d’entreprise), le CAC est délié du secret. Il peut aussi partager le secret avec des confrères (Co-CAC de la société consolidante, de la société absorbante, CAC à la transformation).

Par contre, le secret du commissaire aux comptes doit être maintenu à l’égard d’un actionnaire ou groupe d’actionnaire, à l’égard du personnel de l’entité contrôlée, des tiers ayant des relations avec l’entité contrôlée (banques, fournisseurs, le fisc, le repreneur, l’avocat de l’entité).

Section 3- La publicité et Réclame ou l’utilisation maitrisée des outils de communication

L’article 7 du Code Déontologique dispose que « d’une façon générale, la publicité/réclame est interdite ».

Cependant, l’article 8 du CD vient tempérer cette interdiction et va admettre qu’un membre de l’ONECCA peut offrir ses services au public dans toute publication à condition que en général le media utilisé ne nuise ni à l’annonceur, ni à l’ordre, ni à la profession ou que de l’avis du conseil, l’annonce elle-même de par son contenu et sa présentation n’entache la réputation de l’ordre et ne jette un discrédit sur le membre, le cabinet ou la profession, ne dévalorise pas le service offert par les autres membres en proclamant la supériorité de ses propres services, ne soit en contradiction avec la réglementation en vigueur en matière de publicité notamment en ce qui concerne la légalité, la décence, l’honnêteté et la véracité…

Par contre, l’article 9 du CD autorise le membre à faire une annonce pour la recherche de personnel, d’associés, d’emploi-salarié ou d’un travail de sous-traitance pour le compte de son client, pour l’ouverture d’un cabinet ou d’un nouveau bureau ; en vue d’indiquer les heures de réception de la clientèle, de signaler les changements d’associés, de nom, d’adresse et de numéro de téléphone intervenus au sein du cabinet.

Ce régime de restriction peut être critiquable pour deux raisons :

Certaines dispositions ne rentrent pas dans le cadre de la publicité ; d’autres, par contre, que le CD autorise, ne sont pas de la publicité. Cette interdiction généralisée peut se révéler contraire à la libre concurrence et disproportionnée par rapport aux objectifs poursuivis. De plus en plus, le droit comparé, notamment le droit européen, admet déjà que les professionnels puissent communiquer sur leurs spécialités en direction des destinataires clairement identifiés tout en respectant la dignité de la profession.

D’autre part, les mesures restrictives à la liberté de communication individuelle doivent reposer sur les principes liés à la concurrence déloyale. Par exemple, interdiction de publicité trompeuse, interdiction de publicité agressive, interdiction de publicité comparative et laudative.

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Section 4- l’obligation de conseil du professionnel comptable libéral

C’est une prescription qui se dégage des différentes prescriptions du code de déontologie sans être bien formulée.

En ce qui concerne l’expert-comptable, le contrat le liant à son client est un contrat d’entreprise par lequel l’expert-comptable s’engage à déployer toutes les ressources de son art dans le cadre de ses missions. C’est ainsi qu’il s’engage à mettre en œuvre les diligences convenues à respecter les contraintes réglementaires, à respecter les règles déontologiques, à optimiser les options facultatives, à respecter les délais prescrits, à alerter et informer en temps voulu. Il faut relever que les missions de l’expert-comptable sont toutes accompagnées d’un devoir de conseil qui constitue la traduction de ses obligations.

Le devoir de conseil dépasse le cadre stricte des obligations contractuellement convenues en les prolongeant et en constitue ainsi l’accessoire naturel. En dehors de tout texte spécifique, le devoir de conseil est une obligation mise à la charge des professionnels par les tribunaux qui emploient indistinctement les termes de « devoir de conseil » ou d’ « obligation de conseil ». En effet, l’expert-comptable n’est pas un simple scribe et sa transcription des données doit être réfléchie.

Le devoir de conseil est donc une obligation prétorienne mise à la charge d’un professionnel à l’égard de son client profane. En conséquence, plus ce déséquilibre est important, plus lourde est l’obligation de conseil.

L’obligation de conseil commande aussi qu’en matière de rédaction d’acte juridique, l’expert-comptable s’assure de l’efficacité de l’acte qu’il a rédigé ; obligation que l’on retrouve à l’égard des professionnels du droit. L’obligation d’éclairer les parties s’apprécie au regard des buts poursuivis par elles et l’information doit également porter sur les incidences notamment fiscales de l’opération envisagée.

L’expert-comptable doit être capable en cas de besoin d’user de son autorité et d’imposer à son client les mesures qui s’imposent dans son intérêt. Par exemple, réclamer des éclaircissements et des documents nécessaires en cas de besoin, préconiser des régularisations indispensables, formuler des réserves circonstanciées, adopter des solutions appropriées, relancer votre client avec insistance dans la production des documents nécessaires et desdits éclaircissements.

Il faut retenir que si le professionnel comptable libéral renonce à se rebeller, sa responsabilité peut être recherchée par celui-là même qui a profité de sa complaisance dès lors qu’il aurait souffert d’un préjudice.

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Chapitre 4: Les modes d’exercice de la profession comptable libérale

La loi de 2011 prévoit deux modes d’exercices de la profession comptable libérale à savoir :

L’exercice individuel L’exercice en société

On oublie peut être l’exercice en tant que salarié d’un autre expert-comptable ou d’une société d’expertise comptable qui est justifié par la crise de l’emploi et surtout la difficulté des jeunes à créer leurs propres cabinets.

On est encore loin du statut de collaborateur qu’on trouve chez les avocats européens et qui permet à un jeune professionnel de démarrer en dehors du schéma habituel de salarié afin de préserver son indépendance par l’absence de tout lien de subordination.

Section 1 – L’exercice individuelAux termes de l’article 23 de la loi de 2011, l’exercice individuel de la profession

consiste pour un expert-comptable libéral à équiper pour son compte personnel un cabinet de travail où il procède à l’accueil de ses clients aux fins d’accomplissement de ses prestations professionnelles. Les experts comptables et les commissaires aux comptes exerçant individuellement leurs professions ne peuvent le faire que sur leurs propres noms, à l’exclusion de tout pseudonyme ou titre impersonnel.

Les experts judicaires en comptabilité ne peuvent faire état de leur qualité que sous la dénomination « Expert près la Cour d’Appel de … ».

Le régime juridique de l’exercice individuel est très maigre au regard du droit camerounais. Pourtant ce mode d’exercice soulève des problématiques importantes. Il faut reconnaitre que créer un cabinet nécessite du courage et de l’intelligence car c’est aussi créer une entreprise à partir de rien. Il suffit d’être agréé et inscrit à l’ONECCA.

Quand on exerce une profession libérale, son statut social et fiscal est celui d’un travailleur indépendant. Son activité est civile. Il doit exercer personnellement sa profession et il doit loyauté à ses pairs ce qui implique certains devoirs lors du remplacement d’un confrère et ce qui interdit aussi à l’évidence tout détournement de la clientèle. Si ce professionnel est protégé contre les manœuvres de captation de clientèle ; ne doit-on pas reconnaitre en conséquence une valeur patrimoniale à la clientèle ? Ceci renvoie au débat qui tourne autour de la question de la transmission du cabinet.

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La transmission du cabinet s’est heurtée au principe de l’incessibilité des clients qui va régner dans les années 40. On ne concevait pas qu’on pouvait transmettre sa cliente à autrui.

Mais progressivement, on va vivre un changement de cap en s’alliant à la cession des cabinets médicaux. On va admettre que la cession de la clientèle civile d’un médecin était conforme à la loi des lors que le choix du patient reste libre. En conséquence, patrimoiniser la clientèle civile et reconnaitre le fonds libéral est juridiquement admis.

Le contrat de cession se manifeste par une obligation de présentation d’abord, de non-concurrence ensuite à la charge du cédant qui s’engage à ne plus solliciter la clientèle qu’il a cédé au cessionnaire afin d’encourager un report favorable sur celui-ci. Il serait donc possible à l’expert-comptable qui exerce individuellement en cabinet de pouvoir transmettre le cabinet dans ces conditions.

Section 2- l’exercice en sociétéLa loi camerounaise prévoit à priori deux formes de société auxquelles peuvent recourir

les experts comptables libéraux :

La SNC la SA

On constatera également que la SARL est admise.

Lorsque les professionnels choisissent la SNC, deux conditions doivent être remplies :

tous les associés doivent être autorisés individuellement à exercer la profession. La société ainsi constituée doit recevoir l’agrément des autorités compétentes.

On note aussi que la raison sociale de la SNC doit intégrer tous les noms des associés ou d’un seul d’entre eux suivis des mots « et Cie ».

La première condition va de soi car la SNC a pour objet ici une activité professionnelle. En principe, dans une SNC commerciale, tous les associés doivent être commerçants et sont tenus indéfiniment et solidairement du passif social ce qui est le gage des créanciers. Lorsque dans le cadre de cette SNC, les associés veulent exploiter une activité civile professionnelle, réglementée sous cette forme, il est important que tous soient d’abord professionnels du secteur d’activité. Et aussi, la SNC est une société commerciale par la forme.

Bien qu’il s’agisse d’une personne morale civile, la société d’expertise comptable est distincte de ses associés ; c’est donc en toute logique qu’elle doit obtenir l’agrément.

Lorsque les experts comptables libéraux ont optes pour la forme SA ou SARL, ces sociétés doivent avoir pour objet social : l’exercice de la profession comptable libérale.

La société peut être pluripersonnelle ou unipersonnelle. Cette dernière étant celle constituée par un seul associé ; lequel doit être régulièrement agréé et inscrit au tableau de

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l’ordre. La société pluripersonnelle peut être une SARL ou une SA et l’article 25 de la loi de 2011 pose une spécificité : la SARL pluripersonnelle doit comprendre au moins deux experts comptables régulièrement inscrits au tableau de l’ordre parmi ses propriétaires et s’agissant de la SA pluripersonnelle, elle doit comprendre parmi ses actionnaires au moins trois membres régulièrement inscrits au tableau de l’ordre.

Au vu de ces spécificités, on doit déduire qu’un non expert-comptable peut être associé d’une société d’expertise comptable.

Lorsqu’elle est constituée avec des partenaires étrangers, on doit justifier que la majorité des 2/3 d’actions ou parts sociales sont détenus pas les experts comptables de nationalité d’un des états-membres de la CEMAC (art 25 al 1). C’est une technique de verrouillage des sociétés d’expertise comptable en zone CEMAC, c’est une volonté louable de la part du législateur ; toutefois, majorité des actions ou parts sociales détenues ne vous garantit pas le pouvoir réel dans la société : c’est la majorité du droit de vote qui est efficace.

Lorsqu’il s’agit d’une SA, les actions doivent être sous forme nominative. La mission de tout nouvel associé doit être soumise à l’autorisation préalable soit du conseil d’administration, soit de l’assemblée générale des actionnaires ou des porteurs de parts.

Dans tous les cas, la société doit communiquer au conseil de l’ordre la liste de leurs associés ainsi que toute modification apportée à cette liste. La société d’expertise comptable ne doit être sous la dépendance même indirecte d’aucune personne ou d’aucun groupement d’intérêt. La société ne doit prendre des participations financières substantielles dans les entreprises industrielles, commerciales, agricoles ou bancaires ni dans les sociétés civiles. Le président ou le DG ou le Gérant ou le fondé de pouvoir doivent être des membres de la profession comptable libérale

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Chapitre 5: Le droit pénal comptable

Section 1- Les infractions spécifiques à la ComptabilitéL’étude du droit pénal comptable OHADA se décline en deux temps :

Les atteintes aux principes comptables d’une part, et d’autre part, les infractions liées à l’exercice de la profession comptable

libérale.1- Les atteintes aux principes comptables

On doit distinguer les infractions liées à la gérance des sociétés et les défaillances dans l’établissement des documents comptables.

En ce qui concerne les comportements fautifs des dirigeants sociaux liés à la tenue de la comptabilité, on peut citer l’infraction de distribution de dividendes fictifs. Aux termes de l’article 889 de l’AUDSCGIE, « encourent une sanction pénale les dirigeants sociaux qui en l’absence d’inventaire ou aux moyens d’inventaires frauduleux auront sciemment opérés, entre les actionnaires ou les associés, la répartition des dividendes fictifs ». Pour que l’infraction existe, il faut une condition préalable : le caractère fictif ou inexact de l’inventaire ou en cas d’absence d’inventaire, il faut aussi une répartition des dividendes (élément matériel de l’infraction) et également la mauvaise foi de son auteur car il aurait fait sciemment.

En ce qui concerne les défaillances dans l’établissement des documents comptables ou atteintes aux principes comptables, évoquons le délit de présentation ou de publication de comptes infidèles et la fausse comptabilité.

Présentation et publication de comptes infidèles.L’article 890 de l’AUDSCGIE dispose « encourent une sanction pénale les dirigeants sociaux qui auront sciemment même en l’absence de toute distribution de dividendes publié ou présenté aux actionnaires ou associés, en vue de dissimuler la véritable situation de la société, des états financiers de synthèse ne donnant pas pour chaque exercice une image fidèle des opérations de l’exercice, de la situation financière et de celle du patrimoine de la société à l’expiration de cette période. ». L’élément matériel est vérifié; à savoir, l’acte de communication des états financiers de synthèse infidèles et l’intention coupable de la part du dirigeant est vérifiée car il l’a fait en connaissance de cause.

En ce qui concerne les infractions relatives à l’exercice de la profession, l’Article 694 (1) de l’AUDSCGIE dispose « le contrôle est exercé dans chaque société anonyme par un ou plusieurs commissaires aux comptes. ».

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Deux incriminations sont examinées : l’interdiction des incompatibilités, l’interdiction de la certification des comptes infidèles mais également l’infraction spécifique de non-révélation des faits délictueux au ministère public.

2- L’infraction d’atteinte à l’exercice illégal de la profession.

L’article 898 de l’acte uniforme dispose « encoure une sanction pénale toute personne qui, soit en son nom personnel, soit à titre d’associé d’une société de CAC aura sciemment exercée ou conservée les fonctions de CAC nonobstant les incompatibilités ».

Cette infraction suppose que l’on soit en situation d’incompatibilité avant ou pendant l’exercice de la profession. Elle suppose que l’acceptation d’exercice ou la conservation des fonctions ait eu lieu en connaissance de cause.

L’infraction de certification des comptes infidèles découle de l’interprétation à contrario de l’article 710 de l’AU qui dispose « le CAC certifie que les états financiers de synthèse sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle du résultat des opérations de l’exercice écoulé ainsi que de la situation financière et du patrimoine de la société à la fin de cet exercice. ». En d’autres termes, il doit refuser de certifier s’il n’est pas convaincu de la régularité, de la sincérité, de l’image fidèle.

L’infraction de non révélation de faits délictueux découle de l’obligation faite au CAC lorsqu’il aura découvert pendant son contrôle les faits délictueux. Pour que cette infraction de l’article 899 de l’AU soit constituée, il faut trois éléments : l’existence des faits délictueux et connus du CAC, la relation étroite entre ces faits avec la situation patrimoniale de l’entreprise contrôlée, ces faits doivent être significatifs et délibérés. /.