LES DIMENSIONS DE L’EXPÉRIENCE UTILISATEUR DE LA PRESSE JEUNESSE :
Littérature de jeunesse
Quand les ressources numériques et interactives enrichissent le magazine imprimé
Sous la direction de Nicolas Esposito
Emilie Tran
Soutenance en Septembre
2021
#Magazine jeunesse#Expérience utilisateur
#Numérique #Web#Lecture enrichie
#Réalité augmentée
MÉMOIRE DE MASTER 2MÉMOIRE DE MASTER 2
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
1
Résumé
La presse jeunesse diversifie ses offres en proposant des ressources numériques et
interactives, en plus du magazine imprimé. Suite aux réflexions autour du stage pratiqué
chez Hippopo Éditions pour le magazine Touk Touk (février - avril 2021), l’objectif est
d’explorer un corpus de magazines jeunesse pour réfléchir à la nécessité d’intégrer des
compléments numériques et leur impact sur les pratiques éditoriales. Cinq interviews auprès
des professionnels de l’édition ont permis de définir les finalités des ressources numériques
vis-à-vis du magazine imprimé. Dans certains cas, les dimensions de l’expérience utilisateur
sont renforcées : l’enjeu principal est d’enrichir le magazine grâce aux apports narratifs, ludo-
éducatifs, sociaux et créatifs. Cependant, l’interactivité peut également causer des pertes sur
les dimensions, lorsqu’elle perturbe la notion de lecture focalisée. Enfin, le papier reste une
valeur primordiale pour le magazine jeunesse, mais le design d’expérience utilisateur devient
un facteur essentiel face à l’accroissement des offres numériques.
Mots-clés : Magazine jeunesse / Presse jeunesse / Édition jeunesse / Expérience utilisateur (UX) /
Numérique / Réalité augmentée / QR codes / Site web / Lecture enrichie
Abstract
The youth press is diversifying its products by offering digital and interactive resources, in
addition to the printed magazine. Following the reflections on the internship practiced at
Hippopo Éditions for the magazine Touk Touk (February - April 2021), the objective is to
explore a collection of children’s magazines to reflect on the need to integrate digital
supplements and their impact on editorial practices. Five interviews with publishing
professionals made it possible to define the purposes of digital resources regarding the
printed magazine. In some cases, the dimensions of the user experience are reinforced: the
main challenge is to enrich the magazine through narrative, edutainment, social and creative
contributions. However, interactivity can also cause losses in these dimensions, when it
disrupts the notion of focused reading. Finally, paper remains a primary value for children’s
magazines, but user experience design is becoming an essential factor due to the increase
of digital offerings.
Keywords: Children’s magazine / Youth press / Children’s magazine publishing / User experience (UX)
/ Digital / Augmented reality / QR codes / Website / Enriched reading
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
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Remerciements
Je souhaite remercier toutes les personnes qui m’ont aidée à assurer mon mémoire de
recherche et mon stage de Master 2 Arts, Lettres et Civilisations - parcours Littérature de
Jeunesse (LIJE).
En premier lieu, mes remerciements se dirigent principalement envers mon directeur de
mémoire Nicolas Esposito, qui m’a guidée dans mon parcours. J’ai bénéficié de sa
disponibilité et de ses précieux conseils suite à mes rendus de synthèse et de mon avancement
pour le mémoire. Son expertise dans le domaine de la conception centrée sur l’expérience
utilisateur m’a inspirée, et son cours intitulé “Concevoir des ouvrages numériques sous l'angle
de l'expérience de l'utilisateur : exemple avec l'édition jeunesse” m’a été très utile pour
comprendre les enjeux de mes problématiques.
Je remercie par la même occasion toute l’équipe enseignante du Master LIJE de
l’Université du Mans. Les cours et les échanges sur le forum m’ont motivée à la rédaction
du mémoire.
Je voudrais remercier Florie Deswaziere De Castro, ma tutrice de stage et directrice de
Hippopo Éditions. Pendant trois mois, j’ai eu l’opportunité de développer mes compétences
en graphisme-maquettisme, en rédaction et en design web pour le magazine et les ressources
numériques de Touk Touk. J’ai reçu un accueil chaleureux grâce aux réunions quotidiennes
en visioconférence et aux échanges sur mes travaux.
Je tiens également à remercier les professionnels de l’édition avec qui j’ai réalisé les
interviews servant à ma recherche : Christophe Coquis (Geek Junior), Olivier Jughon (Mini-
Schools), Alastair Macdonald (WoW! News), Noémie Monier (Baïka), et Axel Planté-
Bordeneuve (Toboggan). Leur généreuse disponibilité et leurs propos m’ont grandement
servi pour l’analyse de recherche.
Emilie Tran
Août 2021 · Alicante, Espagne
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Glossaire
Expérience utilisateur : la qualité du vécu de l’utilisateur lorsqu’il interagit avec un
environnement numérique ou physique. L'expérience utilisateur désigne les émotions et les
attitudes d’une personne sur un produit ou un service.
Figma : un outil de prototypage et d’édition de graphiques vectoriels.
Hypertexte : un document avec des unités d’information liées entre elles par des
hyperliens (références permettant de passer d’un document à un autre).
Interactivité : dans le secteur du numérique, elle désigne une activité de dialogue entre
l’utilisateur et le dispositif, par l’écran.
Livre enrichi : un livre (avec du contenu textuel) lié à d’autres médias, tels que les sons, les
vidéos et les animations.
Persona : une représentation d’un utilisateur potentiel du produit.
Prototype : il symbolise une étape d’évolution d’un projet (par exemple une maquette de
test numérique et interactive) avant de passer à la vraie création (telle que le
développement d’un site web).
QR code : un type de code-barre permettant de déclencher des actions telles que naviguer
sur un site web et regarder une vidéo ou un contenu multimédia. QR code signifie “quick
response code” en anglais (“code à réponse rapide”). Il est également possible de voir des
contenus en réalité augmentée.
Réalité augmentée : une technologie désignant une interface virtuelle incrustant des
objets virtuels en direct dans le monde réel, dans le but d’enrichir la réalité par le virtuel.
Responsive : un site responsive s’adapte au dispositif sur lequel il est présenté, que ce soit
sur un écran d’ordinateur, une tablette ou un smartphone.
Test utilisateur : une pratique où des personnes testent et évaluent le dispositif qui leur
est destiné. Cela permet de recueillir des données pour éventuellement améliorer le
dispositif.
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Transmédia : l’utilisation combinée de plusieurs médias pour proposer une expérience
cohérente.
Utilisabilité : l’aptitude à l’utilisation d’un dispositif. Ses critères sont l’efficacité (la
personne parvient à ses objectifs), l’efficience (le temps et l’effort sont moindres) et la
satisfaction (le confort et l’évaluation positive du produit).
Wireframe : une représentation de la structure visuelle d’un site web ou autre interface
numérique.
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Sommaire
Résumé ........................................................................................................................................................................................................... 1
Remerciements ....................................................................................................................................................................................... 2
Glossaire ...................................................................................................................................................................................................... 3
Sommaire .................................................................................................................................................................................................... 5
Introduction .............................................................................................................................................................................................. 7
Partie 1 : Le contexte du magazine jeunesse et ses enjeux créatifs .................................................. 9
A. La presse jeunesse : un secteur en constante évolution .................................................................... 9
1. Qu’est-ce qu’un magazine jeunesse ? ..................................................................................................................................... 9
2. Les enjeux du magazine jeunesse à l’ère du numérique ............................................................................... 13
3. Les observations sur l’édition numérique : Dans quelles mesures le magazine
s’inspire-t-il du livre enrichi ? ................................................................................................................................................................17
B. Le processus de recherche ...........................................................................................................................................20
1. La problématique et les hypothèses .................................................................................................................................... 20
2. La méthodologie ........................................................................................................................................................................................ 23
a. Le stage chez Hippopo Éditions : le magazine Touk Touk et le site web ......................... 23
b. Le corpus de recherche : présentation de 8 magazines jeunesse............................................... 30
c. Les interviews aux professionnels du magazine : exploration des contenus
numériques et leurs finalités .......................................................................................................................................................... 31
Partie 2 : Les ressources numériques et interactives - un renforcement sur les
dimensions de l’expérience utilisateur ......................................................................................................................... 33
A. Le renforcement de la dimension narrative .............................................................................................. 34
1. Des contenus sonores pour lire et écouter en même temps ...................................................................... 34
2. Une déclinaison de l’univers narratif pour un rapprochement des personnages ........... 40
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6
3. L’interactivité au service de la narration : quand le lecteur devient auteur ......................... 43
4. Le podcast de Touk Touk : une expérience avec ou sans le magazine ? .................................. 46
B. Le renforcement de la dimension ludo-éducative................................................................................. 48
1. Des plateformes accessibles pour satisfaire la curiosité des enfants ............................................ 49
2. Les jeux numériques : le renforcement de la stimulation mentale et ludique ..................... 57
3. Les QR codes de Touk Touk : de la lecture du magazine aux enrichissements
numériques et ludo-éducatifs .............................................................................................................................................................. 61
C. Les dimensions secondaires et leurs apports sur l’expérience utilisateur ..................... 67
1. La dimension sociale et créative : une offre pour toute la famille ................................................... 67
2. La dimension ergonomique : un usage plus adapté aux enfants et aux parents ........... 72
Partie 3 : Les réflexions supplémentaires autour des pratiques éditoriales ........................... 82
A. Les pertes des dimensions de l’expérience utilisateur causées par les ressources
numériques ........................................................................................................................................................................................ 82
1. Le manque de délimitation : une expérience de dispersion ...................................................................... 82
2. Lorsque la dimension ludique surpasse la dimension narrative ou éducative ................... 84
B. La nouvelle identité de la presse jeunesse .................................................................................................. 86
1. Dans quels cas le magazine imprimé reste-il le produit principal ? ................................................ 86
2. Les hypothèses sur le futur du magazine jeunesse ............................................................................................ 92
Conclusion ............................................................................................................................................................................................... 96
Bibliographie ................................................................................................................................................................................... 98
Annexes .................................................................................................................................................................................................... 104
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Introduction
Les écrans sont omniprésents. Nous interagissons quotidiennement avec ces
périphériques, que ce soit sur un ordinateur, une tablette ou un smartphone. Ces usages
influencent directement l’utilisation des enfants : un sondage sur 1011 jeunes parents en 2018
nous révèle que 89% des enfants de moins de 8 ans ont régulièrement accès à des écrans
tactiles1.
Face à cette génération hyperconnectée, la lecture des magazines jeunesse ne s’efface pas
pour autant. L’étude de La Presse Jeunesse déclare que 60% des jeunes s’identifient en tant
que lecteurs de magazines et y consacrent 3h40 chaque semaine2. Dans le même temps, nous
remarquons un déploiement croissant chez les éditions de presse jeunesse sur les supports
numériques : des applications, des sites web informatifs et ludo-éducatifs, mais aussi des
intégrations de QR codes pour accéder à des ressources web ou enrichir le magazine
imprimé avec la réalité augmentée.
Mon stage de 3 mois pour Touk Touk (Hippopo Éditions) m’a fait prendre conscience de ce
phénomène. J’ai travaillé dans la création graphique des maquettes, la rédaction et le design
du site web. Le produit principal de Touk Touk est son magazine à visée ludo-éducative pour
apprécier les cultures de la France et du monde, ainsi que les valeurs de l’environnement. Or,
deux observations m’ont motivée à écrire ce mémoire : premièrement, Touk Touk magazine
contient des QR codes ; la version papier se relie donc aux liens numériques de l’édition.
Deuxièmement, avec la refonte du site web, Touk Touk souhaite promouvoir son identité non
pas comme un magazine, mais plutôt comme un “univers de contenus ludo-éducatifs”.
Je m’aperçois que l’expérience utilisateur devient importante chez les éditions de presse
jeunesse : en plus des ressentis du lecteur sur un support statique (le papier), il devient
primordial de réfléchir aux apports émotionnels, éducatifs et sociaux des offres numériques
pour les enfants. Ainsi, la recherche de ce mémoire vise à comprendre leurs renforcements
en plus du magazine imprimé, pour ensuite déduire de leur impact sur les pratiques
éditoriales.
La première partie de mon mémoire explique le contexte du magazine jeunesse et de ses
enjeux créatifs ; elle traite également de ma méthodologie, combinant la pratique de mon
1 Sondage exclusif : La digitalisation de la vie familiale. (2018). Faireparterie. https://www.faireparterie.fr/etude-enfants-rapport-digital/#enfants-ecrans 2 La Presse Jeunesse. (s.d.). Syndicat des éditeurs de la presse magazine. https://www.lapressejeunesse.fr/editos/la-presse-jeunesse.pdf
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stage avec l’analyse d’un corpus de magazines et des interviews aux professionnels de
l’édition.
La deuxième partie se focalise sur la réflexion autour des dimensions renforcées sur
l’expérience utilisateur. Enfin, la troisième partie apporte des analyses supplémentaires, en
questionnant les pertes de l’expérience utilisateur dues aux ressources numériques ainsi que
la nouvelle identité du magazine et du secteur de la presse jeunesse.
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Partie 1 : Le contexte du magazine jeunesse et ses enjeux créatifs
A. La presse jeunesse : un secteur en constante évolution
1. Qu’est-ce qu’un magazine jeunesse ?
En tapant la requête “magazine” sur Google Images, voici ce que nous observons :
Figure 1 : Recherche du mot “magazine” sur Google Images
Une diversité de maquettes rectangulaires, des couvertures aussi visuellement captivantes
les unes que les autres, avec un style graphique défini. Nous percevons également des
démonstrations de double-pages, ainsi que des magazines empilés et tenus dans un kiosque.
L’idée qu’un magazine soit avant tout un objet imprimé, qui se feuillette, est donc bien ancrée
dans la vision du public.
Or, le dictionnaire Le Robert propose deux définitions sans aucune mention du support
papier : soit une “Publication périodique, généralement illustrée”, ou une “Émission périodique
de radio, de télévision, sur des sujets d’actualité” 3. Le terme magazine est donc bien plus
ambigu qu’il n’y paraît.
En explorant l’histoire de la presse, on constate que le magazine faisait référence au magasin
: un entrepôt où les marchandises étaient gardées avant d’être vendues4. En effet, The
Gentleman’s Magazine, premier magazine mensuel fondé par Edouard Cave, est sorti en
1731 en Angleterre. Divisé en sept rubriques, l’ouvrage rassemble une diversité d’articles - de
la politique au jardinage, en passant par des pièces de poésie - ce qui a suscité un vif attrait
pour le public souhaitant explorer les pages, à la manière d’un magasin textuel.
3 Le Robert. (s. d.). Le Robert. https://dictionnaire.lerobert.com/definition/magazine 4 Feyel, G. (2001). Naissance, constitution progressive et épanouissement d'un genre de presse aux limites floues : le magazine. Réseaux, nº105, 19-51. https://www.cairn.info/revue-reseaux1-2001-1-page-19.htm
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Nous pourrions donc supposer qu’un magazine est différent du journal, par son contenu plus
varié, mais aussi plus élaboré notamment dû à son rythme de périodicité : un journal est
généralement quotidien ou hebdomadaire, tandis qu’un magazine est souvent hebdomadaire
ou mensuel5. De ce fait, le visuel est un aspect important. Grâce au développement de
l’illustration photographique en similigravure, c’est à la fin du XIXe siècle que le magazine
prend de l’ampleur, puis autour de 1907 qu’il devient à la mode6. C’est pourquoi les journaux
illustrés et les revues prennent également l’appellation de magazine, prouvant le répertoire
étendu de cette offre.
Avec un tel succès, il est intéressant de réfléchir à ce qui fait d’un magazine, “un média
puissant”, pour reprendre les termes de Jean-Marie Charon7. Tout comme la presse
journalistique, la radio et la télévision, le magazine vise à une diffusion massive de
l’information. Or, sa particularité est de cibler un type de lecteurs bien précis : l’âge, le sexe,
le domaine socioculturel et les centres d’intérêt sont pris en compte. Cette segmentation du
public induit une relation plus forte entre l’individu et la publication correspondant à son
identité.
Le magazine jeunesse serait alors une publication périodique conçue pour les jeunes. Mais
alors, on pourrait se demander : quels types de contenus sont destinés aux jeunes ? N’y
aurait-il pas besoin d’une segmentation d’âge encore plus renforcée ? En effet, un enfant de
quatre ans a des besoins différents d’un adolescent de quinze ans. De plus, le parent est
également concerné puisqu’il est l’acheteur : ainsi, il détient un grand rôle en tant
qu’influenceur des lectures de son enfant. Les éditeurs de presse jeunesse se voient donc
dans l’implication d’attirer deux types de publics différents.
5 Journal, Magazine ou Revue ? (s.d.). Éducation aux Médias et à l’Information. http://www.education-aux-medias.ac-versailles.fr/journal-magazine-ou-revue 6 Feyel, G. (2001). Naissance, constitution progressive et épanouissement d'un genre de presse aux limites floues : le magazine. Réseaux, nº105, 19-51. https://www.cairn.info/revue-reseaux1-2001-1-page-19.htm 7 Charon, J. (2001). La presse magazine: Un média à part entière ?. Réseaux, nº 105. https://www.cairn.info/revue-reseaux1-2001-1-page-53.htm
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En reprenant des critères principaux cités par Jean-Marie Charon8, voici un tableau pour
mieux comprendre les spécificités de la presse jeunesse :
Magazine adulte
Magazine jeunesse
Importance du visuel
Une grande importance sur
l’esthétique : le récit visuel se
combine avec le récit écrit.
Une grande importance sur
l’esthétique, en particulier sur
les illustrations pour les plus
jeunes.
Impératif de la créativité
Les éditions doivent faire
preuve de créativité pour
innover leurs contenus. Elles
font aussi du marketing avec
l’inclusion de publicités.
Les éditions sont également
dans l’impératif créatif. Or le
magazine jeunesse se
distingue par l’absence de
revenus publicitaires.
Segmentation du public et
contrat de lecteur
Une segmentation en suivant
les tendances et évolutions de
la société. Les magazines
prennent souvent en compte
l’âge, le sexe, le niveau
socioculturel et les centres
d’intérêts.
Beaucoup d’éditeurs jeunesse
font du chaînage : ils
conçoivent une gamme de
titres, souvent par tranches de
2 à 3 ans ; en grandissant,
l’enfant peut donc passer au
titre suivant.
Internationalisation
En France,
l'internationalisation est
souvent réussie pour les
magazines féminins (Elle,
Marie Claire).
L’internationalisation se fait
aussi pour les titres de
jeunesse, surtout chez les
grands groupes comme
Bayard Jeunesse.
Figure 2 : Tableau des caractéristiques entre le magazine adulte et le magazine jeunesse
Il est important de constater que les éditions de presse jeunesse sont dans un enjeu
d’accompagnement de l’enfant, aussi bien dans la découverte de soi que du monde. En effet,
si l’on plonge dans les racines du magazine jeunesse, nous remarquons que le premier
ouvrage français se nomme : Journal d’Éducation (1768)9. Avec l’apparence d’un cahier et
des illustrations similaires à celles de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert, ce projet était
surtout pédagogique et moral. Pourtant, avec l’évolution de la presse, les dimensions ludiques
se sont progressivement insérées, tout en conservant la finalité éducative chez de nombreux
8 Charon, J. (2001). La presse magazine: Un média à part entière ?. Réseaux, nº 105. https://www.cairn.info/revue-reseaux1-2001-1-page-53.htm 9 Charon, J. (2003). Lire et grandir en s'amusant, ou la grande aventure de la presse des jeunes. Éla. Études de linguistique appliquée, nº130, 223-236. https://doi.org/10.3917/ela.130.0223
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magazines. Ceux-ci deviennent un média à part entière, une source d’information importante
pour l’enfant, qui grandit aussi bien physiquement que psychologiquement.
Cependant, le magazine jeunesse serait-il également un art ? Son format physique ainsi que
ses illustrations le font ressembler à un livre ou un album de jeunesse. La thématique de
lecture est surtout populaire ; l’abonnement à un magazine serait une clé d’accès à
l’apprentissage et à l’appréciation de la littérature. J’aime lire (de Bayard Jeunesse),
magazine jeunesse le plus populaire10, mise essentiellement sur la finalité du plaisir de lire.
Selon le journaliste Jules Janin, le magazine est “un livre pour tous les goûts, pour toutes les
positions, pour toutes les fortunes, pour tous les âges”11. La dimension narrative y serait donc
intimement liée ; puisque les émotions entrent en jeu, la notion d'œuvre artistique pourrait
correspondre au magazine jeunesse. L’importance à la création graphique vient supporter
cette observation : des publications comme Georges et Graou (Maison Georges) ont pour
ambition d’être collectionnés12. Cela fait référence à un support physique, peut-être
également à la notion de magazine-objet.
Or, à l'ère des nouvelles technologies, la question de matérialité pose débat sur la valeur du
magazine. En reprenant les arguments d’impératif créatif, d’adaptation aux usages du
public, de média évolutif et d'œuvre innovante et artistique, les éditions de presse jeunesse
se voient contraintes à proposer des offres aux multiples supports et dispositifs13. De ce fait,
l’identité du magazine pourrait être altérée et mérite une enquête approfondie quant à son
impact causé par le numérique.
10 Rodier, J. (2020, 23 octobre). Forte de ses abonnements, la presse jeunesse peu touchée par la crise sanitaire. La Revue des Médias. https://larevuedesmedias.ina.fr/abonnements-presse-jeunesse-peu-touchee-par-la-crise-sanitaire 11 Feyel, G. (2001). Naissance, constitution progressive et épanouissement d'un genre de presse aux limites floues : le magazine. Réseaux, nº105, 19-51. https://www.cairn.info/revue-reseaux1-2001-1-page-19.htm 12 Rodier, J. (2020, 23 octobre). Forte de ses abonnements, la presse jeunesse peu touchée par la crise sanitaire. La Revue des Médias. https://larevuedesmedias.ina.fr/abonnements-presse-jeunesse-peu-touchee-par-la-crise-sanitaire 13 Charon, J. (2002). La presse des jeunes. Paris: La Découverte. https://doi.org/10.3917/dec.charo.2002.01
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2. Les enjeux du magazine jeunesse à l’ère du numérique
Puisque la presse jeunesse est un secteur en constante évolution, la créativité est un
facteur essentiel chez les éditions. Selon Jean-Marie Charon, il n’existe pas d’autre
alternative pour “attirer l’attention de leur public, satisfaire ses attentes, le séduire,
l’accompagner dans son évolution, le fidéliser”14. En précisant que le lecteur n’est pas toujours
l’acheteur, c’est non seulement l’enfant, mais également le parent qu’il faut convaincre. Alors
que dans les kiosques, les cadeaux ou “plus-produits” ont été réputés comme arguments de
vente, de nombreuses éditions se mettent désormais à proposer des contenus numériques et
interactifs.
Ainsi, Bayard Jeunesse présente Bayam, une application ludo-éducative pour les enfants de
3 à 10 ans15. Fleurus Presse inclut des ressources numériques, telles que des contes à haute
voix, en combinaison avec le magazine Mille et une Histoires16. La plupart des magazines ont
leur propre site web, qui sert de répertoire d’articles, de jeux numériques et de vidéos, en
plus d’être une interface de présentation vitrine. Dans ces cas, il est possible d’accéder aux
contenus gratuitement, sans nécessairement avoir besoin du magazine papier.
Dans d’autres cas, il se peut que la proposition d’offres numériques impacte la conception
du magazine : par exemple, sur les pages de Touk Touk (Hippopo Éditions), il est possible
de scanner des QR codes avec la caméra de son téléphone portable. De l’anglais “Quick
Response Code”, ce type de code-barre permet de déclencher des actions telles que naviguer
sur un site web et regarder une vidéo ou un contenu multimédia.
14 Charon, J. (2002). La presse des jeunes. Paris: La Découverte. https://doi.org/10.3917/dec.charo.2002.01 15 Bayam. (s.d.). https://bayam.tv/fr/ 16 Mille et une Histoires. (s.d.).https://milleetunehistoires.fr/
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Figure 3 : Image d’une page du magazine Touk Touk contenant un QR code ; en scannant le code
avec l’appareil du téléphone, il est possible d’accéder au site pour découvrir la ressource et
télécharger le fichier PDF.
D’autres magazines proposent des ressources en réalité augmentée (AR). Cette technologie
désigne une interface qui incruste des objets virtuels en direct dans le monde réel. Elle
enrichit donc la réalité grâce à la superposition des informations numériques17. Dans le cas
des magazines, il est possible de visualiser ces images de synthèse à partir d’un smartphone
ou d’une tablette.
17 Arnaldi, B., Pascal, G., & Moreau, G. (2018). Réalité virtuelle et réalité augmentée : Mythes et réalités. ISTE Éditions.
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15
Voici l’utilisation de l’application ARGOplay pour le numéro 14 du magazine Geek Junior :
Figure 4 : pages 4-5 de Geek Junior (nº14). Il
est possible de voir une vidéo du Muséum
national d’Histoire naturelle à Paris.
Figure 5 : pages 6-7 de Geek Junior (nº14). Une
image apparaît pour présenter le jeu Pokémon
Unite. En cliquant dessus, l’utilisateur arrive sur
une vidéo YouTube de la chaîne Jidun.
La conception de ces ressources fait appel à des professionnels en création numérique. Qu’ils
soient directement intégrés à l’entreprise éditoriale ou à une agence externe, la collaboration
entre les éditeurs et les développeurs multimédia est de plus en plus forte. Mais pour assurer
la meilleure utilisation possible de ces contenus, il est essentiel de travailler avec des
designers d’expérience utilisateur (nous pouvons également entendre parler d’UX Designers
; UX est une expression d’origine anglaise pour User eXperience).
Qu’est-ce que l’expérience utilisateur ? Le professeur Don Norman a inventé ce terme dans
les années 199018. La philosophie de la “conception centrée utilisateur” implique une
considération poussée sur les besoins de la personne (nommée utilisateur) interagissant dans
un environnement numérique. Cette idée va au-delà de la simple utilisabilité, qui signifie
l’aptitude à l’utilisation (à quel degré le produit peut-il être utilisé ?). En effet, l’aspect
fonctionnel ne suffit pas : Nicolas Esposito précise que de multiples dimensions sont à
prendre en compte19, en sachant que la relation entretenue par un utilisateur et son dispositif
est complexe.
Si l’on conçoit un magazine dans sa forme imprimée, sans incitation à accéder au monde
numérique, les enjeux centrés sur le lecteur sont bien évidemment toujours présents : de quels
18 Norman, D. A. (1990). The Design of Everyday Things. Basic Books. 19 Esposito, N. (2017). Observation des usages au moyen de tests utilisateurs. Actes de la journée Quels usages aujourd’hui des bibliothèques numériques ? Enseignements et perspectives à partir de Gallica. BnF, Paris, France. http://nicolasesposito.fr/publications_fichiers/esposito2017testsutilisateurs.pdf
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sujets traiter ? Comment présenter les articles autant dans le texte que l’image ?
Historiquement, le secteur de l’édition de magazines était dominé par une culture du design
graphique, notamment sur le maquettisme des pages.
Aujourd’hui, de nouveaux défis de design entrent en jeu comme le décrit Richard Buchanan
: nous pouvons citer le design industriel (Dans quels types de dispositifs présenter l’ouvrage
?), le design d’interaction (Comment l’ouvrage va-t-il se comporter avec les interactions du
lecteur ?) et le design environnemental (Comment travailler sur la gestion de l’abonnement
et des contenus numériques ?)20.
Ces enjeux modifient les activités des éditions de presse jeunesse, qui étaient purement
centrées sur la conception d’un matériel physique. Désormais, si les offres numériques se
multiplient, il devient primordial de réfléchir à l’interactivité pour donner une expérience
adéquate, correspondant aux attentes des abonnés.
Pour creuser encore plus dans l’ampleur des enjeux, il est intéressant d’explorer la notion de
document numérique. Alors qu’un document représente une “pièce écrite servant
d’information”21, Marie-Anne Chabin explique le phénomène de virtualisation du document
par le numérique : cela ne changerait en rien la notion de document, mais plutôt du support,
qui est remis en cause22. Ainsi, les articles web publiés par une édition de presse jeunesse
pourraient être considérés comme des documents. Pourtant, le support sur lequel ces articles
sont fixés n’est pas stable : il est possible de modifier le contenu et d’ajouter des hyperliens
(des éléments cliquables permettant d’accéder à d’autres contenus web). Ici aussi, les
professionnels de l’édition doivent faire face aux nouvelles formes de lecture qui peuvent
changer l’expérience de la jeunesse.
Le numérique ouvre de nouvelles portes à l’innovation éditoriale. L’écriture, qui servait tout
d’abord de transcription du langage, “s’est étendue à la capture du réel” selon Marie-Anne
Chabin23. La photographie, le son et les captures audiovisuelles, mais aussi les jeux interactifs
et la superposition du virtuel au réel : ces éléments pourraient enrichir l’expérience utilisateur,
faisant potentiellement du magazine, une publication enrichie.
20 Nylén, D., Holmström, J., & Lyytinen, K. (2014). Oscillating Between Four Orders of Design : The Case of Digital Magazines. Design Issues, 30(3), 53–68. https://doi.org/10.1162/desi_a_00278 21 Larousse. (s.d.). Larousse. https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/document/26265 22 Chabin, M.-A. (2004). Document trace et document source. La technologie numérique change-t-elle la notion de document ? Revue I3 - Information Interaction Intelligence, Cépaduès, 4 (1). https://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic_00001020/document 23 Chabin, M.-A. (2004). Document trace et document source. La technologie numérique change-t-elle la notion de document ? Revue I3 - Information Interaction Intelligence, Cépaduès, 4 (1). https://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic_00001020/document
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17
3. Les observations sur l’édition numérique : Dans quelles mesures le magazine
s’inspire-t-il du livre enrichi ?
Par définition, un enrichissement est l’ajout de nouveaux éléments. Un livre enrichi serait
donc, d’après les termes de Nolwenn Tréhondart : “un objet culturel alliant un contenu
textuel à différents médias (sons, images fixes ou animées, vidéos) pour une finalité de
lecture” 24. Il est important de préciser que le texte reste toujours présent : les notions de livre
et de lecture sont censées être mises en valeur. Cependant, les compléments multimédia
viennent proposer une nouvelle expérience, notamment pour renforcer la dimension
narrative.
En conséquence, plusieurs éditions de littérature jeunesse décident de se lancer dans cette
voie. L’Apprimerie édite des livres conçus pour l’écran, en apportant de nouvelles possibilités
tactiles, interactives et multilingues25. Par exemple, l’ebook “Et si la nuit…” (écrit par Adèle
Pedrola, illustré par Douglace, mise en musique par Emmanuel Séguin et conté par Patrick
Mancini) inclut le mot-passerelle comme élément interactif26. Sur une tablette, au clic du mot
mis en évidence, l’histoire bascule : le texte et les images se transforment, permettant au
lecteur de créer sa propre expérience.
Les adaptations enrichies existent également : un exemple édité par L’Apprimerie est Le
Horla, de Guy de Maupassant (illustré par Julie Guilleminot et mise en musique par
Emmanuel Séguin)27. Ici, les animations graphiques sont surtout mises en valeur.
Qu’en est-il donc pour les magazines, ces publications qui mettent beaucoup d’importance
dans le visuel ?
La notion de magazine enrichi est encore très peu utilisée. Quant à l’édition de presse
jeunesse, les expressions de contenus numériques et réalité augmentée sont préférées au
terme d’enrichissement. En effet, il est supposé qu’un ouvrage enrichi impose un support
numérique (comme une tablette ou un smartphone), à travers le magazine qui se consulte
en même temps qu’il s’écoute, se regarde ou se joue. Pourtant, comme il sera vu dans le
corpus de recherche, les éditions de magazines jeunesse préfèrent proposer des offres
numériques en dehors du magazine. Certaines viennent enrichir le magazine imprimé,
d’autres s’utilisent indépendamment. Contrairement à plusieurs éditions de livres enrichis,
24 Tréhondart, N. (2013). Le livre numérique enrichi : un hypermédia en construction. Enquête sur les représentations des éditeurs. H2PTM. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01548478 25 L’Apprimerie. https://www.lapprimerie.com/ 26 Et si la nuit…(s.d.). L’Apprimerie. https://www.lapprimerie.com/portfolio/et-si-la-nuit-adele-pedrola/ 27 Le Horla. (s.d.). L’Apprimerie. https://www.lapprimerie.com/portfolio/le-horla/
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
18
dont le support principal est la tablette, les éditions de presse jeunesse veulent rester fidèles
au papier.
C’est pourquoi la réalité augmentée est une solution populaire : elle superpose des éléments
virtuels (grâce au téléphone portable ou à la tablette) au réel (grâce au magazine imprimé).
Même si cela correspond à un type d’enrichissement, Nolwenn Tréhondart propose une
distinction entre l’ouvrage numérique enrichi et l’ouvrage numérique augmenté : le premier
exploite “son potentiel hypertextuel, animé et manipulable”; il entre surtout en rapport avec
les spécificité créatives de l’écriture numérique28. Le deuxième associe un support papier et
une application de réalité augmentée ; il s’agit donc d’une proposition de “formes de lecture
transmédiatiques”. Effectivement, la narration transmédia symbolise une utilisation
combinée de plusieurs médias, dans le but de satisfaire une expérience unifiée29. Nous
pourrions aussi citer Marshall McLuhan, lorsqu’il mentionne l’hybridation de deux médias
comme une “découverte qui engendre des formes nouvelles”30.
L’appellation de magazine enrichi pourrait peut-être correspondre aux sites web et
applications créés par les éditions de presse : ils contiennent des contenus hypertextuels,
animés et manipulables. Mais sont-ils à proprement parler des magazines ? La réponse
dépendrait fortement de l’avis des éditeurs ainsi que de leurs abonnés : par leur création ou
leur consommation, ils ont un rôle fondamental sur la perception et la définition du produit.
Toutefois, deux critères principaux questionnés par les éditions de livres enrichis pourraient
inspirer les éditions de presse :
● La délimitation : une publication doit-elle forcément avoir un début et une fin ? Les
éditeurs de livres tels qu’Hybrid’Book s’attachent à cette idée de clôture31. Il y aurait
donc la volonté de se rapprocher de l’objet-livre et de clarifier une lecture achevée.
Cela va à l’encontre des sites web, dont les publications s’ajoutent au cours du temps.
Plutôt qu’un magazine imprimé avec une première et une quatrième de couverture,
le site ou l’application web se voit plutôt comme un répertoire numérique, enrichi par
des contenus hypertextuels, interactifs et audiovisuels.
28 Tréhondart, N. (2019). Le livre numérique enrichi : quels enjeux de littératie en contexte pédagogique ? Pratiques, (183-184). https://doi.org/10.4000/pratiques.7732 29 Jenkins, H. (2003). Transmedia Storytelling. MIT Technology Review. https://www.technologyreview.com/2003/01/15/234540/transmedia-storytelling/ 30 Tréhondart, N. (2013). Le livre numérique enrichi : un hypermédia en construction. Enquête sur les représentations des éditeurs. H2PTM. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01548478 31 Tréhondart, N. (2014). Le livre numérique « augmenté » au regard du livre imprimé : positions d’acteurs et modélisations de pratiques. Les Enjeux de l'information et de la communication, 15/2(2), 23. https://doi.org/10.3917/enic.017.0023
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
19
● Le paratexte : pour les éditeurs de livres numériques, il faudrait que la proposition
enrichie ressemble à un livre. Le paratexte désigne l’ensemble des éléments éditoriaux
accompagnant un texte ; par conséquent, bien qu’il soit spécialement adapté pour les
dispositifs numériques, le format de la couverture, du sommaire et de la page sont
maintenues32. En revanche, un magazine en ligne (si telle est l’appellation donnée par
les éditeurs) perd souvent les caractéristiques propres au magazine imprimé, avec un
menu en guise de sommaire et la page d’accueil comme couverture attirante.
Nous pouvons déjà faire quelques suppositions quant au manque de magazines s’inspirant
des codes du livre enrichi. Pour l’instant, le livre numérique enrichi reste toujours un
hypermédia en construction : le grand public ne serait pas encore habitué à ce nouveau
format de lecture, et l’offre du marché est faible comme le mentionne Nolwenn Tréhondart33.
Lors de la création de Mag+, une plateforme de publication numérique pour distribuer du
contenu sur tablettes et smartphones, le designer a décrit une situation de confusion34 : il est
difficile de déterminer ce qui va fonctionner et quels seront les futurs usages, comme tout
projet innovant.
Pour l’instant, la plupart des éditions de presse s’en tiennent aux versions homothétiques :
ces retranscriptions de magazines en format ePub ou PDF n’ont pas d’enrichissements
permettant d’avoir directement du contenu multimédia, à moins de proposer des hyperliens
menant à d’autres plateformes externes. Selon les recherches de Nolwenn Tréhondart, les
premiers échecs du livre numérique seraient liés au fait que ce dernier soit considéré comme
un mime, un double et un leurre, n’apportant rien de plus qu’une version numérique d’un livre
traditionnel35. Paradoxalement, l’horizon d’attente du public reste le livre imprimé, et
l’adoption d’un ouvrage enrichi à part entière est loin d’être populaire, selon les éditeurs36.
Dans ma recherche, étant donné le peu de ressources sur les magazines enrichis comparé
aux livres enrichis, je me focaliserai principalement sur l’étude de ces derniers.
Bien que les éditeurs de presse jeunesse n’utilisent pas forcément le terme d’enrichissement
du magazine, il est intéressant de réfléchir sur les apports (ainsi que les pertes) de leurs
32 Tréhondart, N. (2013). Le livre numérique enrichi : un hypermédia en construction. Enquête sur les représentations des éditeurs. H2PTM. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01548478 33 Tréhondart, N. (2013). Le livre numérique enrichi : un hypermédia en construction. Enquête sur les représentations des éditeurs. H2PTM. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01548478 34 Nylén, D., Holmström, J., & Lyytinen, K. (2014). Oscillating Between Four Orders of Design : The Case of Digital Magazines. Design Issues, 30(3), 53–68. https://doi.org/10.1162/desi_a_00278 35 Tréhondart, N. (2014). Le livre numérique « augmenté » au regard du livre imprimé : positions d’acteurs et modélisations de pratiques. Les Enjeux de l'information et de la communication, 15/2(2), 23. https://doi.org/10.3917/enic.017.0023 36 Tréhondart, N. (2013). Le livre numérique enrichi : un hypermédia en construction. Enquête sur les représentations des éditeurs. H2PTM. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01548478
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contenus numériques vis-à-vis de la publication imprimée. C’est pourquoi l’étude d’articles de
recherche sur le livre enrichi me semble pertinente, car il est possible d’y voir des
questionnements similaires : qu’il s’agisse d’un magazine ou d’un livre avec des contenus
numériques et interactifs, les dimensions de l’expérience utilisateur restent essentielles.
B. Le processus de recherche
1. La problématique et les hypothèses
À partir de l’étude de ressources bibliographiques, des cours du Master 2 parcours
Littérature de jeunesse, et de mon stage chez Hippopo Éditions, j’ai été motivée à l’idée
d’explorer le terrain de recherche des éditions de presse jeunesse et de leurs produits
numériques. J’ai choisi d’utiliser les termes de “publication numérique”, “ressource numérique”
et “contenu numérique” (qui symbolisent un éventail de moyens non seulement textuels, mais
aussi sonores, audiovisuels ou interactifs) plutôt que “magazine numérique”, qui a une
signification discutable dans le monde de l’édition et du public.
Les questions de recherche :
- Quelles sont les intentions des publications numériques ?
- Quelles dimensions sont ajoutées ?
- Pourquoi les magazines jeunesse imprimés sont-ils reliés aux
publications numériques ?
- Quels seraient les apports de ces publications numériques à l’expérience
utilisateur ?
- Qu’est-ce que ces publications numériques ont de plus que les magazines
imprimés ?
- Dans quelle mesure les ressources numériques font-elles partie des magazines ?
- Dans quel cas la définition du mot “magazine” évolue-t-elle ? Dans quelle mesure
peut-on parler de document numérique (délimitation, niveau d’autonomie, etc.) ?
La problématique :
En quoi le magazine jeunesse imprimé aurait-il besoin de ressources numériques et
interactives pour renforcer ses dimensions de l’expérience utilisateur ?
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La problématique implique qu’il y aurait probablement un renforcement des dimensions, que
ce soit sur la lecture, mais aussi la partie ludique, éducative ou même sociale et créative.
Puisque la ressource numérique diffère du magazine imprimé, l’expérience de lecture change
également. Il serait donc intéressant de comprendre ce que ces contenus apportent de plus
à l’utilisateur.
Les hypothèses :
Même si les problématiques de ce mémoire n’offrent pas une seule réponse définitive, elles
proposent tout de même de réfléchir aux apports du numérique, au cas par cas. Il serait
impossible de généraliser, puisque chaque magazine imprimé propose un contenu différent.
Dans certains cas, le magazine jeunesse imprimé aurait besoin de ressources numériques et
interactives pour renforcer ses dimensions de l’expérience utilisateur. En effet, le numérique
peut apporter de nouvelles possibilités, qui varient en fonction de chaque magazine et de
leur intentionnalité.
Si la finalité de l’éditeur nécessite des dimensions accessibles uniquement avec les ressources
numériques et interactives, le magazine imprimé sera donc renforcé.
Voici quelques exemples d’apports :
● Les ressources numériques seraient personnalisables : les jeux interactifs mesurent
le score et les erreurs. Les activités créatives permettent une grande liberté pour
chaque enfant, qui s’exprime de sa propre façon.
● Les ressources numériques pourraient renforcer l’apprentissage : les médias sonores
et audiovisuels pourraient être plus pertinents que le texte, dans le renforcement des
connaissances. La diversité des contenus tels que le texte, les podcasts ou les vidéos
profiteraient des manières d’apprendre (visuelles, auditives, kinesthésiques).
● Les ressources numériques pourraient renforcer la dimension ludique : l’ajout de
limites (comptabilisation des erreurs, mesure de la rapidité) et l’ajout d’éléments
dynamiques apporteraient un effet plus stimulant que le magazine papier, de nature
statique.
● Les ressources numériques pourraient renforcer la dimension sociale : le magazine
imprimé peut évidemment être lu par plusieurs personnes De fait, les plus jeunes
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22
auraient besoin de leur parent pour lire une histoire. Un magazine avec des ressources
numériques pourrait améliorer le partage, notamment sur la partie ludique et
créative. Le web ouvre également une porte sur le monde social, avec par exemple la
diffusion de commentaires ou les jeux à distance.
● Les ressources numériques auraient un potentiel de rejouabilité plus important :
un magazine papier peut éventuellement se lire de nombreuses fois, mais c’est surtout
la partie ludo-éducative qui aurait des limites. Il faudrait attendre le prochain numéro
pour avoir de nouveaux jeux imprimés. Quant aux jeux numériques et interactifs, ils
peuvent insérer de nouvelles variantes et se rejouer en un clic.
Dans certains cas, bien que les ressources numériques soient juste des publications
supplémentaires au magazine imprimé, elles pourraient avoir un impact sur l’identité même
du magazine. En effet, il se pourrait que la publication papier ne soit plus le produit principal
comme à l’époque, mais plutôt un produit parmi d’autres publications numériques.
Certaines éditions seraient tentées de créer d’autres produits numériques (applications,
ebooks, jeux interactifs, etc.) : en retour, cela pourrait influencer les parents à se décider
parmi une multitude de ressources. La gratuité des contenus web serait un avantage. Les
éditeurs pourraient ensuite proposer des contenus numériques payants ou alors inviter les
parents à s’abonner au magazine papier.
Du point de vue de l’édition, les offres deviendraient des produits numériques, non pas pour
remplacer le magazine papier, mais pour le compléter. À l’ère où les jeux vidéo, les
applications et Internet attirent la jeune génération, les éditions tentent d’innover car ils sont
dans l’impératif créatif37. Dans un second temps, en publiant des ressources sur Internet,
l’édition augmenterait la visibilité du magazine ; c’est une technique de communication
efficace pour attirer les nouveaux lecteurs et les fidéliser.
37 Charon, J. (2002). La presse des jeunes. Paris: La Découverte. https://doi.org/10.3917/dec.charo.2002.01
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23
2. La méthodologie
Pour évaluer mes hypothèses, la méthode qualitative sera privilégiée en plus de ma
pratique du stage chez Hippopo Éditions et mon étude de ressources bibliographiques.
Stage de Master
Méthode qualitative (corpus)
Méthode qualitative
(entretien)
Stage pour Touk Touk
et réflexion sur la
création des
ressources numériques.
Analyse des produits
numériques
8 magazines +
ressources numériques
analysés pour
comprendre les
apports sur
l’expérience utilisateur
Analyses des sites
web
8 sites des magazines
analysés pour
comprendre la
communication sur les
ressources numériques
Entretien avec 5
professionnels
d’édition
Pour comprendre les
apports du produit
numérique et l’impact
sur le magazine
papier.
a. Le stage chez Hippopo Éditions : le magazine Touk Touk et le site web
De février à avril 2021 (3 mois), j’ai été stagiaire en graphisme, rédaction et webdesign à
Hippopo Éditions. Cette expérience a grandement influencé le parcours de mon mémoire
autour des ressources multimédia proposées par la presse jeunesse.
Le magazine Touk Touk, produit principal de l’édition
Hippopo Éditions a été fondé par Florie Deswaziere De Castro en 2019. Touk Touk
magazine est destiné aux enfants de trois à sept ans. Disponible à l’achat ou à l’abonnement
(4 numéros par an) via le web, il vise principalement à faire découvrir les valeurs “de la
culture française, du multiculturalisme, de l’acceptation de l’autre, des voyages, de la
bienveillance et de la protection de l’environnement”38.
38 À Propos de Touk Touk. (s.d.). Touk Touk. https://touk-touk.com/a-propos
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24
Figure 6 : Couvertures des magazines Touk Touk (Numéro 7 - Pyrénées-Orientales / Portugal
et Numéro 8 - Vendée / Cambodge)
Chaque numéro présente une région de France et un pays du monde. Par exemple, la
première publication nous fait visiter la Bretagne et la Corée du Sud. Ainsi, les rubriques se
concentrent principalement sur ces deux endroits : aussi bien dans les histoires (La Famille
Nomade), que dans les rubriques de bricolage, jeux, yoga, cuisine, et découvertes de la
biodiversité.
En plus de la découverte culturelle, Touk Touk se caractérise par une motivation de
sensibiliser à la nature, la beauté de la planète et l’écologie. Des documentaires sur la faune
et la flore spécifiques à la région / le pays, sont présentés de manière ludique, avec des
encadrés d’information tels que “Le sais-tu ?”, des quiz et des jeux.
Touk Touk magazine a également l’ambition de faire vivre ses personnages principaux : Tim,
Gaïa et Touk. Les héros sont présentés sous forme de bande dessinée, mais également dans
plusieurs pages du magazine pour accompagner le lecteur.
Le magazine n’est pas la seule offre de l’édition. Au fil de mon stage, j’ai constaté un enjeu
de diversification de produits, donnant alors une nouvelle identité à la marque de Touk Touk.
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25
Les carnets d’expédition
Ces magazines hors-série rejoignent les valeurs d’environnement et de biodiversité promues
par Touk Touk, mais leur ligne éditoriale est différente : le but est de faire découvrir aux
enfants des missions d’exploration conduites par des associations. Par exemple, le premier
numéro auquel j’ai pu participer entre en collaboration avec Under The Pole, un programme
d’expédition sous-marine. Le lecteur découvre des pages présentant les fonds marins
polynésiens : la finalité est à la fois éducative (avec le contenu rédigé comme un
documentaire) et ludique (avec un mini-jeu pour chaque page d’animal présenté).
Le podcast Touk Touk
En plus du magazine Touk Touk, l’édition propose des histoires audio gratuites, disponibles
sur le site mais également sur YouTube et les plateformes de diffusion audio. Certaines sont
des versions sonores des histoires publiées sur le magazine, telles que “La Famille Nomade
à Séoul” et “Où est Bella ?”. D’autres sont exclusives au texte, comme “Le réveillon de Mei” et
“On a perdu doudou !”.
Les kits d’activité
Ces carnets de quarante à cinquante pages ont pour objectif d’offrir des activités ludiques.
Chaque kit a une thématique bien précise autour de la nature : par exemple, l’enfant peut
explorer les carnets autour des dinosaures, de l’espace ou des océans. Les activités (parmi
lesquelles on peut trouver des coloriages, des jeux d’observation, mais aussi des labyrinthes
et des rubriques de bricolage) sont décrites comme des jeux éducatifs, avec la motivation de
donner envie d’apprendre tout en s’amusant.
Ces kits sont payants depuis le site. Contrairement au magazine, l’envoi de ces produits se
fait en version numérique, par email. Après l’achat, le client reçoit un lien de téléchargement
vers un document PDF.
Les loisirs créatifs : des articles web et des PDFs à télécharger
La rubrique des Loisirs créatifs contient des articles divisés en quatre sous-parties sur le site
: Bricolage / Expériences, Recettes, Jeux, et Yoga / Pilates. La plupart de ces loisirs créatifs
serviraient comme contenus supplémentaires et gratuits au magazine papier. En effet, il est
possible d’y accéder depuis certaines pages du magazine présentant un QR code.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
26
Cependant, il est possible d’accéder à ces articles et de télécharger les ressources PDF sans
passer par le magazine. De même, il n’est pas nécessaire d’avoir lu le magazine pour
comprendre les instructions des bricolages ou des recettes.
L’organisation du stage
Hippopo Éditions est une structure à petite taille : en plus du travail de conception par la
directrice Florie Deswaziere, des collaboratrices en illustration comme Alexandra Michel
(illustratrice à Roubaix), en rédaction comme Cécile Batailler (autrice à Paris) et en
contenus web comme Inga Penverne (juriste, autrice, relectrice-correctrice, rédactrice web
et conceptrice générale à Sydney en Australie) travaillent sur Touk Touk.
L’édition a un profil multiculturel, puisque le travail se fait depuis différents pays ; Florie
Deswaziere habitait en Corée du Sud lors de mon stage, avant de déménager en France en
juin 2021. De ce fait, la collaboration s’est faite entièrement à distance. Il est tout de même
important de préciser que le siège social de Hippopo Éditions se situe en Provence (France)
: l’endroit sert notamment au stockage et à l’envoi des magazines imprimés.
Lors de mes deux premiers mois de stage (début février à fin mars), j’ai essentiellement été
en contact avec ma tutrice de stage, Florie Deswaziere. Une réunion en visioconférence s’est
effectuée tous les matins à 8 heures (15 heures en Corée du Sud), pour discuter des attentes
et des retours sur mon travail effectué.
En avril, dernier mois de mon stage, les stagiaires Roxane Lebastard et Chloé Delattre ont
rejoint l’équipe. Nous avons pu échanger nos avis sur nos travaux, en collaborant sur des
maquettes dans certaines occasions. Malgré la distance physique causée par le télétravail,
nous avons tout de même pu travailler ensemble grâce à l’application de communication
collaborative Microsoft Teams.
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27
Les missions de mon stage
J’ai principalement travaillé dans deux secteurs différents : la conception du magazine
imprimé avec ses contenus supplémentaires en PDF, et le design web pour le nouveau site
de Touk Touk.
Mission 1 : Graphisme et rédaction du magazine / documents PDF
J’ai participé à la conception de deux magazines Touk Touk : le numéro 7 (Pyrénées-
Orientales / Portugal) et le numéro 8 (Vendée / Cambodge). En total, j’ai fait les maquettes
de 29 pages sur Adobe InDesign, un logiciel de mise en page. J’ai également utilisé Adobe
Photoshop et Illustrator pour la création et la manipulation de visuels.
Avec la motivation d’organiser mes activités, j’ai suivi ce processus de création suivant :
1) Recherche sur le sujet à traiter : Prise de notes sur des éléments qui serviront à la
rédaction. Récolte d’idées autour du contenu textuel et graphique. Réflexion sur les
jeux, les quiz et des encadrés d’information supplémentaires à insérer.
2) Rédaction : Il est important d’écrire le contenu avec un vocabulaire qui soit adapté
à l’enfant. De ce fait, des corrections peuvent être faites dans le cas où les phrases
seraient trop complexes à comprendre.
3) Création de la maquette : Au départ, j’ai fait des croquis sur papier pour avoir une
idée globale du graphisme. Ensuite, l’élaboration des maquettes s’enchaîne et
s’accorde au contenu textuel.
4) Corrections / Validation : Suite aux retours de Florie Deswaziere, j’ai apporté les
modifications nécessaires sur la maquette avant la validation.
Mission 2 : Refonte du site web de Touk Touk
À l’origine, le nom de domaine de Touk Touk s’appelait : “touktouk-magazine.com”. Le mot
“magazine” laisse supposer qu’il s’agit du produit essentiel de la marque. Florie Deswaziere
a mentionné sa motivation à changer son nom de domaine pour “touk-touk.com”.
J’ai appris que la nouvelle identité de Touk Touk visait à proposer une multitude de produits,
aussi bien imprimés que numériques. De plus, l’ancien site web avait des problèmes de
performance, ce qui ralentissait son chargement.
Cela a provoqué des pertes de visites ; il était donc primordial de rectifier le site au plus vite.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
28
Voici les étapes menant au lancement du nouveau site web :
1) Rédaction du dossier de conception : j’ai fait des recherches sur les finalités du site.
Avec Florie Deswaziere, nous avons pu discuter sur l’arborescence, c’est-à-dire la
structure du site. Pour une conception centrée sur l’utilisateur, j’ai réfléchi aux
personas (“des personnages fictifs représentant des groupes d’utilisateurs”)39 et à
leur parcours potentiel.
2) Création des wireframes sur Figma : Suite à la validation de Florie Deswaziere,
j’ai utilisé l’outil collaboratif Figma pour créer des guides visuels représentant
l’interface (ou wireframes).
3) Développement web : Le site web a été développé sur WordPress, une plateforme
de gestion de contenu. Pour faciliter le travail de design, j’ai utilisé le constructeur de
thème Elementor, qui permet de glisser-déposer des modules et d’ajouter des sections
de manière intuitive.
4) Corrections : Des erreurs techniques sont survenues lors de la création du site,
notamment à cause de certaines extensions installées. C’est pourquoi la phase de
débogage (processus de diagnostic et d’élimination des erreurs) et de révision est
importante. Il y avait cependant la contrainte du temps (le site étant en mode
“maintenance”, son contenu était hors de la vue du public et il était donc important
de terminer rapidement).
5) Mise en ligne : Une fois les corrections faites, le site a été lancé pour la visite du
public.
Enfin, j’ai sauvegardé des modèles de pages sur Elementor, dans le cas où le site aurait de
futurs problèmes ou si l’édition souhaite ajouter des pages.
39 Esposito, N. (2020-2021). Concevoir des ouvrages numériques sous l'angle de l'expérience de l'utilisateur : exemple avec l'édition jeunesse. Le Mans Université.
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29
Réflexions principales sur les missions :
Lors de mon travail sur les maquettes, j’ai constaté que beaucoup de pages contenaient des
QR codes menant à des liens divers, tels que les vidéos, les podcasts et les articles web. Cela
m’a fait réfléchir sur les potentiels apports concernant la relation du magazine imprimé au
site et à des plateformes sociales telles que YouTube.
La conception du site m’a aussi fait réfléchir à l’expérience utilisateur : comment s’adresser
à la fois aux parents et aux enfants ? Je me suis rendu compte de l’importance du site web
quant à l’identité de Touk Touk.
Pour résoudre une partie de mes problématiques, je compte détailler mes réflexions sur ma
pratique en tant que stagiaire chez Hippopo Éditions. Il serait également possible de
percevoir mon stage comme une méthode d’observation participante ; en étant immergée
dans le secteur de l’édition de presse jeunesse et en ayant un rôle actif, ce mémoire de
recherche a pour intention d’être combiné avec le mémoire de stage.
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30
b. Le corpus de recherche : présentation de 8 magazines jeunesse
Dans les éditions de presse jeunesse, nous constatons qu’il n’y a pas une seule règle spécifique
à la création d’un contenu numérique. Puisque ces offres sont différentes, l’analyse d’un
corpus de magazines jeunesse semble pertinent afin de connaître leurs spécificités uniques.
En plus du magazine Touk Touk auquel j’ai pu travailler lors de mon stage, 8 magazines
jeunesse ont été sélectionnés.
Magazine
Slogan
Entreprise
Proposition numérique
1
Baïka
Du voyage à chaque page
Éditions Salmantina
Histoires audiovisuelles sur
YouTube
2
Geek Junior
Le média tech et geek pour
les ados
Geek Junior
Site web d’articles
Contenus en réalité
augmentée
3
J’aime lire
Le magazine des 7-10 ans
pour donner le goût de la
lecture aux enfants !
Bayard Jeunesse
Application Bayam
contenant les ebooks des
histoires J’aime lire
4
Le Journal de
Mickey
L’hebdo le plus lu par les
jeunes lecteurs de 7 à 14 ans
Unique Heritage Media
Site web d’articles et jeux
numériques
5
Mini-Schools
Apprendre l’anglais est un
jeu d’enfants !
Mini-Schools
Contenus en réalité
augmentée
6
National
Geographic
Kids
Le magazine des petits et
grands explorateurs
National Geographic
Society (version française
éditée par Fleurus Presse)
Site web d’articles
documentaires, de jeux
numériques et de vidéos
7
Toboggan
Le magazine pour se sentir
bien en primaire
Milan Presse
Jeux interactifs et outils de
création sur le web
8
Wow! News
Les infos positives pour
enfants !
INFOW!
Site web d’articles, podcasts,
vidéos. Future application.
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31
c. Les interviews aux professionnels du magazine : exploration des
contenus numériques et leurs finalités
Pour enrichir mon analyse du corpus, j’ai utilisé la méthode qualitative des entretiens pour
récolter les données verbales des professionnels.
Après avoir contacté une quinzaine d’éditions de presse jeunesse contenant des publications
numériques, j’ai reçu cinq réponses positives pour une interview. Les professionnels de
l’édition sont présentés dans le tableau ci-dessous :
Nom
Magazine
Édition
Profession
Christophe Coquis
Geek Junior
Geek Junior
Rédacteur en chef
de Geek Junior
Olivier Jughon
Mini-Schools
Mini-Schools
Directeur de
publication de Mini-
Schools
Alastair Macdonald
WoW! News
INFOW!
Rédacteur en chef de
WoW! News
Noémie Monier
Baïka
Éditions Salmantina
Rédactrice en chef de
Baïka
Axel Planté-Bordeneuve
Toboggan
Milan Presse
Rédacteur en chef de
Toboggan et Wakou
J’ai tout d’abord préparé mes questions d’avance, avant de les envoyer par mail aux éditions.
Suite à leur validation, l’entretien s’est fait par téléphone ou en visioconférence. Cependant,
les questions ont parfois été altérées lors de l’entretien, pour demander plus de précisions ou
pour mieux correspondre aux spécificités du magazine.
Questions générales pour les interviews :
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
32
Thématiques à explorer
Questions
1
Finalités de la ressource numérique
Comment est née l’idée de concevoir la publication
numérique ?
2
Apports (ou pertes) des contenus
numériques sur l’utilisation du
magazine : point de vue de
l’édition
Quels ont été les changements liés au magazine avec
l’intégration des ressources numériques ?
3
Apports (ou pertes) sur les
dimensions de l’expérience
utilisateur : point de vue des
lecteurs / abonnés
Quels ont été les avis des abonnés à l’arrivée de la
ressource numérique ? Y-a-t-il eu des retours ?
4
Positionnement du magazine
imprimé vs. publication numérique
Quelle place a la publication numérique par rapport au
magazine papier ?
6
Changements de l’édition
Quelles sont les différences entre l’édition de la
publication numérique et l’édition des magazines
papier ?
7
Identité du magazine jeunesse
Dans quelles mesures la proposition d’offres
numériques peut-elle changer l’identité du magazine
papier, à votre avis ?
8
Futur du magazine jeunesse
Dans quelle mesure l’édition va-t-elle diffuser ses offres
numériques dans le futur, et pourquoi ?
9
Que pensez-vous de la place qu’aura le magazine
papier dans le futur ?
10
Dans quelle mesure la conception d'un magazine enrichi
serait envisageable ?
Dans la présentation de mes résultats, les propos pertinents des entretiens seront mis en
citation pour appuyer mon étude ; puisque tous les professionnels interviewés travaillent sur
les magazines faisant partie du corpus, il serait intéressant de combiner toutes ces données
pour arriver à un bilan efficace.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
33
Partie 2 : Les ressources numériques et interactives - un
renforcement sur les dimensions de l’expérience utilisateur
J’ai choisi de présenter les deux principales dimensions ayant pour but de renforcer
l’expérience utilisateur des ressources numériques : la dimension narrative et la dimension
ludo-éducative. Suite à cela, je mentionnerai également les dimensions sociales, créatives et
ergonomiques qui viennent plutôt au service de la narration, de la pédagogie et du
divertissement. Puisqu’elles contiennent des rubriques diverses, la majorité des magazines de
mon corpus apportent à la fois une dimension narrative et ludo-éducative (voir Annexe 1). Il
en est de même pour les publications numériques. C’est pourquoi j’ai choisi de présenter les
exemples les plus représentatifs, afin d’éviter les répétitions :
Ressources numériques
Dimension narrative
Baïka
Des Mythes et légendes par ai en version audiovisuelle: le cas de Baïka
(p. 36)
Mini-Schools
Lorsque la réalité augmentée facilite la dimension narrative : le cas de
Mini-Schools (p. 39)
J’aime lire (Bayam)
Le déploiement de personnages issus de bandes dessinées sur le
numérique : le cas de Bayam (p. 42)
Ressources numériques
Dimension ludo-éducative
Geek Junior et
WoW! News
L’idée d’un webmagazine aux articles enrichissants : le cas de Geek
Junior et de Wow! News (p. 50)
Le Journal de Mickey et
National Geographic Kids
Un répertoire encyclopédique : le cas du Journal de Mickey et de
National Geographic Kids (p. 55)
Toboggan
Renforcer son sens de la déduction grâce aux Enquêtes interactives de
Super-Ouaf : le cas de Toboggan (p. 58)
La pratique de mon stage pour le magazine Touk Touk sera mentionnée à la fin de chaque
partie.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
34
A. Le renforcement de la dimension narrative
Par définition, la narration est un “exposé écrit et détaillé d’une suite de faits, dans
une forme littéraire40”. La dimension narrative incite donc à lire un contenu textuel : Pascal
Ruffenach, président du directoire de Bayard, précise que la presse jeunesse a pour ambition
de développer “le goût de la lecture et de la compréhension du monde”41. Ces enjeux majeurs
montrent pourquoi les éditeurs de presse s’attachent à la publication d’histoires. Grâce au
système d’abonnement, les parents y voient un avantage de développer le goût de lire de
leurs enfants. Ainsi, Jean-Marie Charon met le magazine jeunesse dans la même catégorie
culturelle que le livre, “dont la créativité, la qualité visuelle, le prix, sans parler parfois des
héros, sont très proches”42.
Nous observons un renforcement de la dimension narrative, par des offres numériques qui
servent souvent de compléments à la lecture. Dans cette partie, l’analyse du corpus sera donc
appuyée par les ouvrages de référence aux pratiques de lecture de livres, qui symbolisent le
développement psychologique et imaginaire de l’enfance.
1. Des contenus sonores pour lire et écouter en même temps
Plusieurs éditions de presse jeunesse conçoivent des outils audio pour les enfants en
apprentissage de la lecture ; ainsi, la dimension narrative est renforcée grâce au support
audio. En outre, l’enregistrement sonore peut s’avérer nécessaire pour la compréhension des
plus petits. Raymond Hétier insiste sur cette importance, notamment dans les ouvrages
destinés à la petite enfance. En étudiant la dramatisation des maîtres de classes maternelles,
il a conclu que 77% utilisaient cette technique pour adapter les textes43.
La lecture dramatisée permet aux enfants de mieux saisir le sens de l’histoire. Ainsi, les
illustrations des albums jeunesse ne suffiraient pas et pourraient même causer des
malentendus. En effet, Véronique Boiron fait une distinction entre deux types de lecteurs :
les “autonomes”, ceux qui arrivent à interagir avec le texte, et les lecteurs débutants qui
nécessitent une interaction avec la lecture dramatisée44. D’où l’importance du parent ou du
maître qui devient acteur et se met dans la peau des personnages. Avec cette observation
40 Le Robert. (s. d.). Le Robert. https://dictionnaire.lerobert.com/definition/narration 41 La Presse Jeunesse. (s. d.). La Presse Jeunesse. https://www.lapressejeunesse.fr/ 42 Charon, J. (2003). Lire et grandir en s'amusant, ou la grande aventure de la presse des jeunes. Éla. Études de linguistique appliquée, nº130, 223-236. https://doi.org/10.3917/ela.130.0223 43 Hétier, R. (2014). Albums destinés à la petite enfance et questionnement existentiel : herméneutique d’oeuvres formatrices. Revue des sciences de l’éducation, 39(1), 33–59. https://doi.org/10.7202/1024532ar 44 Boiron, V. (2010). Lire des albums de littérature de jeunesse à l’école maternelle : quelques caractéristiques d’une expertise en actes. Repères, (42), 105–126. https://doi.org/10.4000/reperes.254
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
35
en tête, les éditeurs de presse jeunesse renforcent la narration en faisant écouter les voix de
plusieurs personnes. Ainsi, l’enfant comprend non seulement la manière de parler du
personnage, ou du narrateur, mais aussi ses pensées, ses émotions et ses affects. Il a un
aperçu plus dense de son identité.
Des Mythes et légendes d’ailleurs en version audiovisuelle : le cas de Baïka
Le magazine Baïka45 (Éditions Salmantina) a pour objectif de faire voyager les enfants de
8 à 12 ans dans le monde, en leur faisant explorer la diversité culturelle. Chaque numéro
présente un pays différent, avec des histoires, des bandes dessinées, des reportages, mais
aussi des jeux et des recettes de cuisine. Une de ses rubriques marquantes s’intitule Les
Aventuriers de la Mappemonde : elle présente des interviews d’enfants nés dans des pays
étrangers et immigrés en France. Par exemple, le numéro du Sénégal raconte l’histoire de
Raymond, un garçon né à Dakar et qui s’est installé en Essonne (France) à 5 ans. Les lecteurs
peuvent donc explorer une culture sous un angle plus personnel. Avec cette finalité de
montrer la diversité culturelle, Noémie Monier explique que l’édition s'applique à “proposer
plein de rubriques différentes pour aborder le plus d'angles possibles”. En lisant le magazine
imprimé, le lecteur enrichit son expérience par la dimension narrative, culturelle, ludique et
pédagogique.
En revanche pour les contenus sonores et audiovisuels de Baïka, c’est surtout la dimension
narrative qui entre en jeu. Accessibles depuis le site web (en version audio) ou sur la chaîne
YouTube, ces histoires proviennent de la rubrique Mythes et légendes d’ailleurs du magazine
imprimé : par exemple, Candra Kirana, la princesse qui devint roi (adaptée par Noémie
Monier et illustrée par Charlotte Lemaire) provient du numéro Indonésie / Sri Lanka. 4
histoires ont été publiées avec un montage vidéo des illustrations ; sur certains passages, le
texte apparaît en version agrandie.
45 Baïka Magazine. Du voyage à chaque page. https://baika-magazine.com
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
36
Figure 7 : Captures YouTube de la vidéo Candra Kirana, la princesse qui devient roi ;
une publication de Baïka46
Premièrement, nous constatons que ces vidéos sur YouTube sont accessibles à tous. En effet,
la volonté de Noémie Monier est de les diffuser au-delà du cadre des abonnés : grâce à
l'instantanéité des réseaux sociaux, elle a pu les envoyer à son entourage, aux parents et aux
enseignants sur WhatsApp. Cela nous montre qu’il n’y a pas besoin du magazine imprimé
pour visionner les histoires racontées. L’expérience peut se faire uniquement avec la ressource
audiovisuelle. Toutefois, une autre intention de Noémie Monier est de maintenir la présence
de Baïka, avec la possibilité d’avoir de nouveaux abonnés. Elle ajoute que cette idée est
venue durant le premier confinement en 2020, suite à l’épidémie du Covid-19. En effet, cette
période a été difficile pour les ventes de magazines ; le web se révèle être un moyen efficace
d’offrir du contenu sans contraintes physiques.
La valeur audiovisuelle enrichit l’histoire : les images bougent, s’agrandissent, défilent de
gauche à droite pendant que le narrateur parle. Ainsi, elles apportent un aspect plus
dynamique que le magazine imprimé. Ensuite, certains passages nous dévoilent une partie
du texte sur un fond blanc. Dans ce cas, le lecteur est invité à lire le texte en même temps
que la voix narrative ; l’enjeu de lecture promu par le magazine Baïka est donc toujours
46 Baïka. (2020, 5 mai). Candra Kirana, la princesse qui devint roi, une histoire du magazine Baïka. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=yOZA-Z5-fBA
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
37
accessible via les vidéos. Le spectateur intègre également le rôle de lecteur. Cette inclusion
du texte est importante pour percevoir l’intention de Baïka : faire lire, écouter et regarder
en même temps.
Cette offre nous fait réfléchir sur la complémentarité avec le magazine : puisque le texte est
déjà présent, l’expérience utilisateur a-t-elle plus tendance à se faire sans la publication
imprimée ? Selon Noémie Monier, les vidéos peuvent se complémenter au magazine : par
exemple, les enfants ayant déjà lu le texte sur un numéro imprimé de Baïka peuvent avoir
envie de visionner la même histoire sur YouTube. Même s’il n’y a pas encore eu de retours
sur l’expérience utilisateur, Noémie Monier ajoute que les histoires racontées permettent
aux enfants de profiter d’un instant de calme, dans l’indépendance : “L’idée de ces histoires
audio, c'est que les enfants puissent les écouter en autonomie”.
L’écoute est donc un facteur majeur de ces publications audiovisuelles ; celles-ci ont été
conçues pour fournir une expérience à part entière, pour tous les publics, sans la nécessité
d’avoir le magazine papier pour la compréhension. Ainsi, elles sont indépendantes de la
publication imprimée.
Toutefois, puisque ce sont des histoires reprises du magazine, elles ont un lien fort permettant
à un enfant abonné de supplémenter son offre par une double-expérience. La première est
de focaliser son attention sur la lecture du magazine (en écoutant la version audio en même
temps) ; dans ce cas, il s’agirait d’une lecture enrichie par les voix et les sons, apportant une
dimension immersive améliorée. La deuxième expérience est de consulter la vidéo sans le
magazine, pour se centrer davantage sur les images animées en accord avec la narration
sonore, mais aussi le texte affiché sur l’écran. Ainsi, les vidéos et les magazines peuvent se
compléter, mais elles sont surtout conçues pour être indépendantes.
Il est important de rappeler que magazine n’a pas la dimension narrative pour finalité
principale. En effet, “c’est une des composantes du magazine”, précise Noémie Monier. “Mais
pour moi, le fer de lance du projet, c’est de donner la parole aux enfants issus de multiples
cultures.” Ainsi, pour connaître toute l’expérience de Baïka, les ressources vidéo ne remplacent
pas la publication imprimée ; elles adaptent plutôt les 8 premières pages de l’histoire, tandis
que le reste du magazine fait 50 pages. Nous voyons alors qu’il est possible pour un
magazine de se concentrer sur une dimension spécifique quant à la conception numérique ;
cela peut aussi inciter les nouveaux spectateurs à s’abonner au magazine pour profiter de
l’intégralité du contenu.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
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Lorsque la réalité augmentée facilite la dimension narrative : le cas de Mini-Schools
Mini-Schools est tout d’abord un service d’ateliers en anglais pour les enfants de 3 à 11 ans.
Son magazine est apparu en 1971 comme une ressource offrant une multitude de contenus
écrits dans la langue anglaise. Nous découvrons des histoires et comptines, des jeux et des
documentaires ; par exemple, le numéro 249 publié en automne 2020 présente des pages de
jeux en anglais, une rubrique sur le Canada (Visiting Canada) et un documentaire sur l’eau
(All about water)47. Nous voyons alors une thématique centrée sur la pédagogie, à la fois sur
la découverte du monde mais aussi l’apprentissage de la langue.
Lors de mon interview avec Olivier Jughon, j’ai appris que la réalité augmentée est venue
après l’intégration des cassettes, puis des CDs. Selon lui, “la réalité augmentée permettait
d’avoir un accès facile à des contenus supplémentaires sans avoir un support physique”. En
effet, le CD est un support nécessitant un appareil lecteur, tandis qu’un téléphone (capable
de scanner le magazine en réalité augmentée) est un objet généralement utilisé par la
société. De plus, Olivier Jughon mentionne la possibilité d’intégrer non seulement des
ressources audio, mais aussi des vidéos en lien avec le magazine.
Figure 8 : Captures YouTube de la présentation du magazine Mini-Schools48
47 Sommaire du Mini-School® Magazine numéro 249, Automne 2020 - Magazine en anglais pour enfants. (2020). YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=s3i5AG-Byus 48 Mini-Schools. (2019, 4 juin). Mini-Schools® - Apprendre l'anglais en s'amusant !. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=tpbmNAeoAck
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
39
Sur la vidéo de présentation du magazine, nous apercevons des illustrations dynamiques en
réalité augmentée. Par exemple, en scannant la couverture de Mini-Schools, les personnages
illustrés se superposent et la couverture devient une piste de patinage. Or, la volonté
principale de l’édition est de mettre le texte en version audio. Cela facilite la lecture pour
des enfants en apprentissage : “Un certain nombre [d’enfants] ne savent pas lire l’anglais”,
précise Olivier Jughon. C’est pourquoi la ressource audio leur facilite l’accès à la lecture et
à la prononciation. Il mentionne également que le contenu peut être écouté en autonomie,
sans forcément avoir un adulte à côté. Or, il ajoute cependant que la réalité augmentée n’a
pas de finalité ludique ; il n’y a pas vraiment d’interaction supplémentaire, à part pour
scanner le code. L’enjeu est surtout d'offrir une dimension sonore autre que les CDs. Nous
voyons alors que la réalité augmentée est perçue par l’édition comme une grande
opportunité en termes d’accessibilité.
Pour le magazine Mini-Schools, il semblerait que la nécessité du son surpasse celle d’autres
enrichissements tels que les animations visuelles : Olivier Jughon mentionne les vidéos de
leurs ressources en réalité augmentée comme une partie accessoire, servant plutôt à retenir
l’attention et complémenter la partie sonore, qui elle, est essentielle. Les vidéos durent entre
1 et 2 minutes ; elles sont donc très courtes, ce qui pourrait éviter au lecteur de se détacher
du magazine imprimé, qui est l’objet principal.
Puisque la dimension narrative et sonore a toujours été importante depuis la création de
Mini-Schools, la ligne éditoriale pour l’expérience utilisateur reste la même. En effet, avec le
support audio déjà implémenté dans les années antérieures, le passage à la réalité
augmentée est plutôt un renforcement de la dimension ergonomique pour soutenir la
dimension narrative.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
40
2. Une déclinaison de l’univers narratif pour un rapprochement des personnages
Il est courant qu’un magazine jeunesse intègre des personnages clés dans ses pages. Les
numéros de Touk Touk sont toujours accompagnés de leurs trois héros : les enfants Tim et
Gaïa, accompagnés du singe Touk. Toboggan intègre ses personnages tels que le chien
Super-Ouaf et la créature Avni. J’aime lire a une mascotte représentée par un crayon
nommée Bonnemine, mais son succès est également dû aux bandes dessinées, très appréciées
par les enfants : avec les parutions mensuelles des histoires d’Ariol, un petit âne à lunettes,
ou “le roi des idées folles” nommé Anatole Latuile49, l’enfant suit des héros auxquels il peut
s’identifier. Le magazine jeunesse a la caractéristique de fidéliser ce rapprochement avec le
personnage, par sa nature de périodicité.
Avec les opportunités du multimédia, nous voyons un renforcement de cette proximité : en
effet, la dimension narrative serait renforcée puisque le personnage se décline non seulement
sur papier, mais aussi sur l’écran. De plus, il se met à intégrer d’autres dimensions : ludiques,
audiovisuelles et créatives.
L’audiovisuel est un élément courant de l’adaptation d’ouvrages fictifs. Dans son article
Lectures d’œuvres de divertissement au collège, Jean-Marc Étienne dénote l’influence de la
télévision, des jeux vidéo et d’Internet sur la perception des jeunes50. En effet, alors que les
générations antérieures ont grandi avec les livres papier, la notion actuelle de livre ne se
limite plus nécessairement à un simple texte sur du papier : les adaptations deviennent par
exemple des jeux de rôle, des mangas, et des œuvres cinématographiques. À la même image
que l’édition Ankama51, très orientée dans l’univers des ses personnages comme Dofus et
Wakfu, des éditions comme Bayard Jeunesse et Milan Presse ont une approche créative
centrée sur leurs personnages phares. Cette technique aurait-elle un impact sur la perception
que l’enfant aura de l’histoire ?
49 Les héros. (s.d.). J’aime lire. https://www.jaimelire.com/j-aime-lire/les-heros-j-aime-lire 50 Étienne, J. (2015). Lectures d’œuvres de divertissement au collège. Informations sociales, 190, 18-24. https://doi.org/10.3917/inso.190.0018 51 Ankama. https://www.ankama.com/
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
41
Le déploiement de personnages issus de bandes dessinées sur le numérique : le cas de
Bayam
L’application Bayam est éditée par Bayard Jeunesse et Milan Presse. Elle se qualifie comme
“L’appli ludo-éducative des 3-10 ans”52. Plus de 2000 activités sont disponibles, telles que les
visites virtuelles au musée, les jeux éducatifs et les vidéos pour découvrir le monde. Il est
possible d’y accéder gratuitement ou de s’abonner pour obtenir la totalité des ressources ;
en sachant que de nouveaux contenus s’ajoutent tous les mois, Bayam possède les
caractéristiques d’un magazine papier. De plus, il offre une multitude de jeux et de séries
diffusant les héros principaux de publications connues comme J’aime lire.
Justement, le magazine J’aime lire a une forte approche narrative. En plus de son roman
mensuel, nous découvrons les bandes dessinées telles que Ariol, Anatole Latuile et La
cantoche. Sur Bayam, nous retrouvons encore d’autres personnages se présentant sous des
formes audiovisuelles et ludiques, tels que les héros Tom-Tom et Nana, popularisés dans les
anciens J’aime lire.
Figure 9 : Interface de Bayam (Section “Regarder”). Plusieurs dessins animés tels que Tom-Tom et
Nana, et Anatole Latuile sont proposés. Nous retrouvons également Le Bayam Show, La valise à
histoires et les films-poèmes En sortant de l’école.
52 Bayam. https://bayam.tv/fr/
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
42
Alors que l’intention première des auteurs était de raconter une histoire en bande dessinée,
les séries audiovisuelles montrent la fiction sur un autre format plus dynamique, dû aux sons
et à l’animation. Cela se fait déjà avec le média télévisé, où les adaptations d’histoires
textuelles sont communes. Après avoir lu une bande dessinée, l’enfant pourrait également
regarder la série : l’apport de cette consultation multiple est qu’il pourrait enrichir son plaisir
à la fois de lire et apprécier la valeur de son contenu audiovisuel. Dans ce cas, la dimension
narrative sur son expérience est enrichie, puisqu’il saisit plus amplement le contexte de la
fiction avec la musique, les voix des acteurs et les animations. Inversement, le visionnage du
dessin animé pourrait l’inciter à lire avec une appréciation particulière pour le format
imprimé.
En effet, malgré les débats qui se tiennent entre l’histoire textuelle versus l’adaptation
audiovisuelle, la jeunesse serait de plus en plus attachée aux éléments dynamiques, causés
par la popularisation des réseaux sociaux audiovisuels. Jean-Marc Étienne précise
l’importance de l’action et des “effets spéciaux”, qui sont plus visibles et accessibles53. Il cite
en particulier le succès de Hunger Games (Suzanne Collins), dont l’adaptation au cinéma a
été un grand succès pour donner envie de lire le roman. Quant à J’aime lire, destiné aux 7-
10 ans, âge où l’on renforce ses compétences en lecture et en compréhension, la méthode
audiovisuelle pourrait renforcer le plaisir de lire la bande dessinée, bien que ces deux formats
ne soient pas intimement liés.
53 Étienne, J. (2015). Lectures d’œuvres de divertissement au collège. Informations sociales, 190, 18-24. https://doi.org/10.3917/inso.190.0018
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43
3. L’interactivité au service de la narration : quand le lecteur devient auteur
Sur le site du magazine Toboggan54, parmi les nombreux jeux numériques mis en avant,
l’activité "Crée ta mini BD Avni” se distingue par sa finalité narrative et créative : elle permet
à l’enfant d’inventer une courte bande dessinée sur quatre cases, autour du personnage Avni
(Animal Vraiment Non Identifié).
Figure 10 : Interface de l’activité “Crée ta mini BD Avni” sur le site de Toboggan55
Plusieurs illustrations, bulles et icônes sont à choisir. Grâce à l’interactivité, il devient possible
de glisser-déposer des éléments avec un choix étendu de polices et de couleurs ; l’enfant peut
également agrandir et rétrécir les éléments à son goût. Ainsi, les possibilités de création
narratives sont multiples : l’interactivité altère le rôle du lecteur habitué aux histoires d’Avni,
et le fait passer au statut d’auteur de bandes dessinées.
Cela a un impact émotionnel non seulement sur son expérience utilisateur (il y a par exemple
la sensation plaisante de créer et d'explorer son imagination), mais aussi sur sa perception
quant à la narration du personnage : si Avni et ses amis peuvent vivre des histoires facilement
modifiables, il devient manipulable, un peu comme les hyperfictions citées par Nolwenn
Tréhondart56 : des fictions interactives dont le déroulement dépend des choix de l’auteur.
54 Toboggan. https://www.toboggan-magazine.com/ 55 Crée ta mini BD Avni. Toboggan. https://www.toboggan-magazine.com/avni/cree-ta-bd-avec-avni?cat_prov 56 Tréhondart, N. (2019). Le livre numérique enrichi : quels enjeux de littératie en contexte pédagogique ? Pratiques, (183-184). https://doi.org/10.4000/pratiques.7732
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
44
Même si l’activité d’Avni ne se définit pas forcément comme telle, on peut y trouver des
ressemblances : le choix d’éléments à sélectionner, même s’il semble très vaste, reste délimité
par les éditeurs : l’enfant fait ses décisions par ce qu’on lui propose déjà. Dans le même
temps, il joue un rôle actif de lecteur-auteur (ou wreader en anglais), concept lancé par
Landow en 199257.
En quoi cela renforcerait-il la dimension narrative par rapport au magazine imprimé ? Axel
Planté-Bordeneuve précise l’avantage de donner un contenu interactif qui serait
difficilement reproduit sur une version papier. En effet, le magazine pourrait proposer des
cases vides avec pour consigne de dessiner dessus ou de coller des autocollants. La version
interactive facilite ce processus en permettant de créer plus rapidement, surtout pour ceux
qui ne sont pas forcément dessinateurs, comme l’indique Axel Planté-Bordeneuve.
Quant à la première finalité citée par l’éditeur, elle concerne le développement de
l’imagination. C’est pourquoi, du point de vue éditorial, ce contenu numérique renforcerait
une dimension créative, pour au final avoir une expérience à dimension narrative : il est
possible de télécharger la bande dessinée dès que l’utilisateur est prêt, et par conséquent,
de l’imprimer, de le partager avec ses proches et de le relire à souhait.
57 Tréhondart, N. (2019). Le livre numérique enrichi : quels enjeux de littératie en contexte pédagogique ? Pratiques, (183-184). https://doi.org/10.4000/pratiques.7732
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45
Le site de National Geographic Kids utilise également le concept d’écriture ludique,
permettant ensuite à l’enfant de lire sa propre histoire. En effet, la ressource nommée “Funny
Fill-In” (remplissage marrant) permet de remplir des espaces de texte pour que l’histoire
narrative soit personnalisée.
Figure 11 : Le jeu narratif “Funny Fill-In: Dreaming Green” sur le site de
National Geographic Kids58
De même que la ressource web du magazine Toboggan, la dimension créative et ludique de
National Geographic Kids s’allie à la dimension narrative, laissant une expérience où l’enfant
peut écrire et lire sa propre création.
58 Funny Fill-In: Dreaming Green. National Geographic Kids. https://kids.nationalgeographic.com/games/funny-fill-in/article/dreaming-green
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4. Le podcast de Touk Touk : une expérience avec ou sans le magazine ?
Dans mon stage, même si je n’ai pas participé à la création du podcast de Touk Touk,
j’ai pu intégrer cette rubrique lors de la refonte du site web. J’ai découvert que deux types
d’expérience utilisateur pouvaient se faire :
● Expérience 1 : l’enfant lit le texte du magazine en même temps qu’il écoute l’histoire audio.
● Expérience 2 : l’enfant écoute simplement l’histoire audio, sans avoir besoin de consulter le
magazine papier.
Dans le premier cas, l’offre numérique est reliée au contenu imprimé. La dimension narrative
combine donc à la fois le texte et l’audio. Par exemple, l’histoire Escapade sur l’île d’Yeu,
écrite par Ambre Pineda et illustrée par Jera Kim a été publiée dans le numéro 8 de Touk
Touk (Vendée / Cambodge). L’inclusion d’un QR code à côté du titre s’est donc révélée être
intéressante pour faciliter la démarche ; accéder à un lien en quelques secondes demanderait
moins d’efforts que se rendre sur le site web de Touk Touk.
Figure 12 : Le QR code de l’histoire Escapade sur l’île d’Yeu mène vers le podcast sur le site web
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
47
Cependant, il est important de préciser que toutes les histoires n’ont pas forcément un lien
avec le magazine papier. Par exemple, Le réveillon de Mei, Quand je serai Roi et Pâques en
Bulgarie : Vive les batailles d’oeufs ! ont été créés spécialement pour être des ressources
audio sans publication papier. De même, les histoires audio liées au magazine Touk Touk
n’ont pas besoin d’être lues. C’est pourquoi la deuxième expérience d’utilisation est plus
répandue : le podcast de Touk Touk est un média à part entière, car il peut être consulté
indépendamment du magazine papier.
Ainsi, l’expérience sur la dimension narrative est différente : l’enfant peut se concentrer
uniquement sur son ouïe. Il peut fermer les yeux ou s’allonger, ce qui favorise l’immersion. Il
peut également se promener ou faire d’autres activités, ce qui serait plus difficile lors de la
lecture sur un support textuel.
En plus de l’interprétation théâtrale, nous retrouvons des bruitages et une ambiance musicale
qui nous immerge dans l’univers fictif. Par exemple, dans l’histoire Escapade sur l’île d’Yeu,
lorsque le narrateur annonce : “Papa et les enfants attrapent les vélos”, une pause de
quelques secondes laisse entendre des sonnettes de vélo. Puis, en continuant la phrase “[...]
posés sur le sable, et traversent la plage. C’est une drôle d’expérience de rouler face au vent
!”, se déclenche le bruit du vent accompagné des vélos qui roulent. Ainsi, il y a non seulement
une intention par l’édition de faciliter la compréhension orale pour les 3-7 ans, mais aussi de
faire apprécier les spécificités des histoires audio qui ne peuvent être reproduites par un
support papier.
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48
B. Le renforcement de la dimension ludo-éducative
Cette partie rassemble deux dimensions : la dimension ludique et la dimension
éducative. Effectivement, lors de mon étude du corpus, je me suis aperçue que ces deux
sections étaient souvent liées. Cette particularité du magazine jeunesse attire le public.
Désormais, le numérique se révèle être un fort procédé pour renforcer cette hybridation.
Si l’on retourne à l’historique de la presse, le Journal d’Éducation (1768) a été le pionnier des
magazines jeunesse à visée uniquement pédagogique ; cependant, cette démarche a été
abandonnée en 1904. Les éditeurs ont opté pour une logique distractive afin d’attirer plus
de lecteurs59. Les bandes dessinées commencent à apparaître dans les magazines jeunesse,
telles que Le Petit Illustré. La France se distingue notamment d’autres pays comme les États-
Unis, puisque ses BD s’adressent avant tout à une clientèle juvénile60. Or, la presse distractive
a connu un déclin après les années soixante, ce qui a poussé les éditeurs comme Disney
Hachette Presse à influencer une démarche plus éducative. De plus, avec la popularisation
des jeux vidéos et de la télévision, qui étaient surtout dans la dimension ludique, le magazine
jeunesse avait un intérêt à se démarquer en développant sa logique éducative61.
Désormais, avec Internet et les réseaux sociaux, les éditions se sentent encore plus dans le
besoin de créer, en plus de l’imprimé, des produits numériques mêlant divertissement et
pédagogie. Mais on pourrait se demander : la dimension ludique ne serait-elle pas au service
de la dimension éducative ? En effet, c’est par des contenus à l’apparence distractive et
ludiques que les éditions pourraient propulser leur finalité principale : donner envie
d’apprendre.
C’est justement cette finalité qui donne toute sa notoriété aux éditions de magazines
jeunesse. Selon le site de La Presse Jeunesse, plus de 25 titres français peuvent être classés
dans cette catégorie : c’est donc le segment le plus important du marché62. Il se pourrait que
la dimension pédagogique attire surtout les parents, qui sont avant tout les acheteurs du
magazine, et la dimension ludique séduit surtout les plus jeunes.
59 La Presse Jeunesse. (s. d.). La Presse Jeunesse. https://www.lapressejeunesse.fr/ 60 Gaumer, P. (2020-2021). La Bande dessinée sur le territoire francophone européen. Le Mans Université. 61 Charon, J. (2002). La presse des jeunes. Paris: La Découverte. https://doi.org/10.3917/dec.charo.2002.01 62 La Presse Jeunesse. (s. d.). La Presse Jeunesse. https://www.lapressejeunesse.fr/
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49
1. Des plateformes accessibles pour satisfaire la curiosité des enfants
Dans cette partie, nous découvrons les apports des plateformes web en plus des
magazines imprimés. Par définition, une plateforme Internet est “l’espace par lequel transite
l’ensemble des informations ou des services”63. Les possibilités sont donc multiples quant à la
diffusion des informations : des articles, mais aussi des jeux, des vidéos et des fichiers peuvent
s’inclure. Ces documents numériques perdurent avec la technologie ; Marie-Anne Chabin
mentionne l’engagement du lecteur “à naviguer, à sélectionner, à comparer, à recomposer, à
construire « sa » source d'information”64. Même si cela peut engendrer des risques “par un
excès d’opérations successives”, il n’empêche que la multiplicité des sources a pour enjeu de
laisser un parcours plus libre à l’internaute, et d’enrichir ses connaissances en plus du
magazine imprimé qui a une délimitation fixe.
L’idée d’un webmagazine aux articles enrichissants : le cas de Geek Junior et de
Wow! News
Figure 13 : Page d’accueil du site web de Geek Junior65
Dans les résultats de recherche pour Geek Junior, le titre affiche : “Le webmag des ados
connectés”. Après discussion avec Christophe Coquis, j’ai appris que cette plateforme était
plutôt considérée comme un “site web d’information”, terme qui serait plus employé par le
63 Lexing. (02/03/2017). Plateforme en ligne : la consécration d’une définition légale.https://www.alain-bensoussan.com/avocats/plateforme-en-ligne-definition/2017/03/02/ 64 Chabin, M.-A. (2004). Document trace et document source. La technologie numérique change-t-elle la notion de document ? Revue I3 - Information Interaction Intelligence, Cépaduès, 4 (1). https://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic_00001020/document 65 Geek Junior. https://www.geekjunior.fr
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50
grand public. Toutefois, la publication des articles et l’approche stylistique le fait ressembler
à un magazine en ligne : Geek Junior était uniquement sous forme de site, en 2015, avant la
création du magazine imprimé en mai 2020.
Le menu du site nous montre déjà les dimensions principales de Geek Junior : il y a surtout
une approche informationnelle, grâce à l’actualité, les recommandations d’applications et de
jeux vidéo, mais aussi des tutoriels pour apprendre le monde numérique en détail. Christophe
Coquis fait la distinction entre le magazine imprimé et le site web de Geek Junior : bien qu’ils
aient la même finalité (celle de développer la culture numérique des adolescents), les articles
web seraient généralement plus courts, avec l’ajout de thématiques plutôt liées au secteur
du divertissement : “[...] sur le site web, on va parler parfois de mangas, de séries télé, ce qui
n'est pas forcément le cas sur le magazine”.
Or, le site web vise également à faire découvrir de nouveaux outils numériques grâce à des
conseils et des tutoriels. Par exemple, l’article “Apprendre à coder : Ma première page web
en HTML” guide le lecteur dans l’apprentissage du code, avec l’ajout d’images et de schémas
pour faciliter la compréhension.
Cela nous montre que le site web vise à faire “développer la créativité autour du numérique”
tout en restant dans un style abordable et léger, “pour qu’ils n’aient pas l’impression que ce
soit un contenu trop éducatif”. Cependant, le magazine imprimé viendrait renforcer la
dimension pédagogique en proposant des contenus plus détaillés sur l’aspect numérique.
Ensuite, le site web propose des hyperliens : en cliquant dessus, il est possible d’accéder à un
autre contenu, que ce soit sur la même plateforme ou un site externe. Cela est utile pour
supporter l’intention de Geek Junior : en s’apercevant que les adolescents connaissaient
encore peu d’applications, Christophe Coquis souhaite leur faire découvrir de nouveaux
outils pour les aider à mieux maîtriser leur vie numérique. Ces outils sont externes à Geek
Junior et nécessitent donc des liens pour faciliter l’accès.
Nous constatons alors que la plateforme web de Geek Junior suit une approche différente
du magazine imprimé ; avec des articles plus courts et instantanés, Christophe Coquis
souhaite cibler une population plus large, en incluant les jeunes adultes, les parents et les
personnes souhaitant faire une veille. Quant au magazine imprimé, il a été conçu
spécialement pour les collégiens de 10 à 15 ans. Toutefois, le site web convient également à
cette tranche d’âge : des liens pour la réalité augmentée (accessibles avec l’application
ARGOplay) ont été ajoutés sur la publication imprimée, afin de leur permettre de visiter
rapidement les articles web de Geek Junior. Christophe Coquis souhaite améliorer
l’expérience utilisateur en proposant des QR code, une méthode actuellement répandue, pour
accéder aux contenus en réalité augmentée.
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51
Figure 14 : Présentation de la réalité augmentée sur la première page de Geek Junior (nº 14)
Figure 15 : Double-page de Geek Junior (nº 13) présentant 2 pictogrammes ARGOplay
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
52
Par conséquent, nous pouvons déduire que les ressources web viennent enrichir le magazine
imprimé, et vice-versa. Avec 11 numéros par an, les contenus imprimés sont plus structurés et
intemporels comme le mentionne Christophe Coquis. Les lecteurs ont donc une vision plus
globale sur la culture numérique, tandis que les articles web ont une approche plus centrée
sur l’actualité. Ainsi, l’édition de Geek Junior les publie de manière plus instantanée.
La publication à visée informationnelle est également le cas de WoW! News. Tout d’abord,
l’intention initiale du rédacteur en chef Alastair Macdonald a été de créer une application
d’actualités positives pour les enfants. Pour l’instant, un site web WoW! News a été créé
comme plateforme d’expérimentation, et le magazine imprimé est sorti en fin 2020. Alastair
Macdonald compte éventuellement lancer son application en automne 2021.
L’intégration de la dimension informative et pédagogique est bien présente ; or, plutôt qu’un
renforcement du magazine papier, ce serait plutôt l’inverse : le magazine papier, par sa
création ultérieure, viendrait renforcer les publications web.
Figure 16 : Interface du site web de WoW! News (rubrique des Infos Positives)66
Pour WoW! News, dont la finalité est de faire découvrir l’actualité sous un angle positif,
Alastair Macdonald explique également l’importance de fournir des sources : “[il y a] plus
de profondeur sur les sujets”. Effectivement, pour des personnes qui souhaitent mieux
comprendre l’actualité, l’acquisition de diverses ressources est importante : “il y a la possibilité
d’aller regarder les articles d’autres médias, des sites web de personnes concernées”. Alastair
Macdonald précise que cette initiative est appréciée par les parents, qui souhaitent savoir
66 WoW! News. https://wow-news.eu/fr/accueil/
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53
comment l’actualité a été trouvée. Cela justifie donc l’apport d’un dispositif publié sur le web,
qui se traduit par une toile d’araignée mondiale, riche en informations.
Un autre apport sur la dimension pédagogique est l’inclusion d’outils multimédia, tels que
les vidéos et les podcasts. Par exemple, l’équipe de WoW! News a publié une série de
podcasts accompagnés de transcriptions, pour montrer 4 jeunes acteurs du changement
(Young Changemaker). La présentation de héros et d’héroïnes est également une
thématique importante en sachant que l’intention de WoW! News est d’inspirer la jeune
génération à trouver des solutions aux problèmes d’actualité.
L’apport interactif viendra avec la future application de Wow! News : des éléments ludiques
seront proposés tels que des quiz, pour que l’enfant puisse tester ses connaissances. Ainsi, le
jeu se destine à faire apprécier l’actualité mais sa finalité principale réside dans la
pédagogie. Les quiz peuvent également se présenter sur le magazine papier, mais le
numérique permet un feedback (un retour sur l’expérience) plus instantané ; alors que la
version imprimée montre les réponses en bas de la page ou sur une rubrique de solution des
jeux, l’application peut directement montrer si l’enfant a eu la bonne réponse après son choix.
De même que pour Geek Junior, le magazine Wow! News et ses ressources numériques sont
perçues comme des “offres combinées”. Pour Alastair Macdonald, le magazine imprimé a
une finalité de lecture en autonomie : “c’est quelque chose que l’on peut prendre et lire
tranquillement dans sa chambre”. Or l’application renforce la dimension ludo-éducative par
“des infos hebdomadaires sur smartphone ou tablette”, plus instantanées que la publication
trimestrielle. De plus, le divertissement se renforce par le partage d’informations avec les
parents ; en effet, Alastair Macdonald souhaite stimuler la discussion grâce aux éléments
ludiques. La dimension sociale est au service de la dimension ludo-éducative, pour permettre
une expérience enrichissante.
Enfin, l’inclusion des vidéos est importante pour une plateforme d’information. Pour Geek
Junior, Christophe Coquis cite que l’apport d’objets multimédia tels que des vidéos, des
images et des sons rend un contenu beaucoup plus enrichissant. En effet, le multimédia
permettrait de saisir un contexte plus global, faisant appel à plusieurs sens, et faciliterait
donc l’apprentissage.
Contrairement aux autres magazines de mon corpus, Geek Junior et WoW! News avaient
pour finalité première de concevoir un média numérique, avant d’inclure la publication
imprimée. Ainsi, le magazine viendrait enrichir ces ressources numériques par sa qualité de
pédagogie plus profonde, car son rythme de périodicité est plus lent que celui des articles
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
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web. Les plateformes numériques de Geek Junior et de Wow! News souhaitent offrir des
contenus avec un renforcement plus appuyé sur le divertissement, tout en restant sur leur
intention éducative.
Un répertoire encyclopédique : le cas du Journal de Mickey et de National Geographic
Kids
Pour fortifier les valeurs pédagogiques du magazine, certaines éditions de presse publient
des ressources web de type encyclopédique. C’est le cas du Journal de Mickey et de National
Geographic Kids.
Le Journal de Mickey a une rubrique web nommée Dico Disney : comme son nom l’indique, il
s’agit d’un dictionnaire centré sur la culture de Disney. En quoi cela apporterait-il plus de
connaissances par rapport au magazine imprimé, qui contient également des pages
informatives sur cette thématique ? Le sous-titre de la rubrique nous apporte peut-être la
réponse : “Films, séries, personnages, magazines...Toutes les infos Disney réunies au même
endroit”. Ainsi, cette volonté de réunir les sources “au même endroit” transforme une partie
du site web en un répertoire. L’enfant peut aussi filtrer sa recherche pour accéder
directement à l’article : l’expérience à dimension ergonomique vient aider la dimension
informative. Certes, la dimension ludique n’est pas vraiment présente ; l’enfant ne joue pas
en naviguant sur les articles web. Or, nous voyons que les rédacteurs ont conçu des
informations assez courtes, avec en dessous une image de Donald Duck et une bulle “Le
savais-tu ?”.
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55
Figure 17 : Article web des 101 Dalmatiens dans le Dico Disney du site du Journal de Mickey67
Cette approche de conception viserait à favoriser les connaissances sur la culture de la bande
dessinée et du cinéma, tout en minimisant l’aspect trop institutionnel. Il en va de même pour
National Geographic Kids, qui a conçu son site spécialement pour créer un répertoire à la
fois ludique et informatif.
Figure 18 : Page d’accueil de National Geographic Kids68
67 Les 101 Dalmatiens, le film. (s. d.). Le Journal de Mickey. https://www.journaldemickey.com/dico-disney/les-101-dalmatiens 68 National Geographic Kids. https://kids.nationalgeographic.com/
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La motivation d’apporter des contenus ludo-éducatifs, en plus du magazine imprimé, se
constate déjà par le menu : “Games” (Jeux), “Videos”, “Animals” et “Explore more” (Explorez
plus) sont les quatre premiers éléments, devançant “Subscribe” (Abonnez-vous), incitant à
l’abonnement du magazine. De ce fait, l’intention du site de National Geographic Kids est
d’en faire un répertoire à part entière : avec à la fois des vidéos documentaires et des articles
de type encyclopédique pour renforcer la dimension éducative, et des jeux pour renforcer la
dimension ludique.
Ce répertoire évolutif est un apport qu’il serait difficile de produire sur un magazine imprimé.
Tout d’abord, ce dernier est un ouvrage délimité par des pages et des couvertures ; il faut
choisir les textes à implémenter et en supprimer d’autres. Le répertoire numérique peut
contenir plus de ressources, et donc enrichir les connaissances de l’enfant. Deuxièmement,
alors qu’une publication papier se feuillette, le répertoire numérique permet une recherche
plus ciblée. L’architecture du site de National Geographic Kids présente diverses rubriques
organisées dans le menu. Le Dico Disney, quant à lui, propose une recherche par ordre
alphabétique, par film, ou alors en tapant une requête dans la barre de recherche. Dans ce
cas, l’enfant a plus de liberté quant au contenu qu’il souhaite apprendre, puisqu’une
multitude de choix lui sont donnés. Ces publications viennent donc enrichir la dimension ludo-
éducative de l’expérience utilisateur, valeur importante du magazine imprimé.
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2. Les jeux numériques : le renforcement de la stimulation mentale et ludique
De même que pour les adaptations audiovisuelles du texte narratif, plusieurs éditions de
presse jeunesse disposent de jeux vidéo mettant en scène les personnages présents sur le
magazine. Par exemple, le Journal de Mickey présente Donald Duck et Mickey Mouse sur les
jeux du web comme “Les puzzles” ou “Les 7 différences”. Pour Bayam, la dimension immersive
se met au service de la dimension ludique : dans certains jeux, l’enfant n’est pas en dehors
de la scène ; au contraire, il joue avec les personnages au sein de leur univers.
Par exemple, dans “C’est la Bataille”, l’enfant joue aux cartes avec le petit âne Ariol comme
adversaire. Ce jeu serait difficilement reproductible sur un magazine imprimé. En effet, grâce
à l’interactivité, il est possible d’appuyer sur l’écran lorsque deux cartes similaires et
aléatoires sont mises ensemble. De plus, il y a automatiquement un compteur de points. Une
inscription finale lui indique s’il a gagné ou perdu. Alors que pour J’aime lire, la bande
dessinée d’Ariol vise une dimension purement narrative, il peut désormais jouer avec lui sur
le support numérique. Cette activité ludique fait également travailler le sens du réflexe. Enfin,
cela permet à l’enfant d'interagir avec le personnage Ariol.
Figure 19 : Jeu C’est la Bataille ! avec le personnage Ariol, disponible sur Bayam
Renforcer son sens de la déduction grâce aux Enquêtes interactives de Super-Ouaf : le
cas de Toboggan
Toboggan est un magazine de Milan Presse, destiné aux enfants de 6 à 8 ans. Son intention
est de rassurer l’enfant durant ses premières années de primaire, de l’accompagner dans
l’apprentissage de la lecture, mais aussi de lui proposer des jeux mentalement stimulants. Le
magazine a donc des objectifs variés : de la narration en passant par la dimension ludique
ainsi que la pédagogie (avec des documentaires dessinés). Chaque numéro contient les héros
principaux de Toboggan, tels que le chien Super-Ouaf et la créature Avni.
Les enquêtes de Super-Ouaf du magazine Toboggan renforcent la dimension ludo-
éducative grâce à l’interactivité. Sur la version imprimée, ces enquêtes se présentent sur des
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
58
doubles-pages incluant des mini-jeux qui vont permettre de trouver le personnage coupable.
Selon le texte descriptif du site web, cette rubrique incite le jeune lecteur à exercer “son sens
de l’observation et de la déduction”69 en compagnie du chien détective Super-Ouaf.
Figure 20 : Double-page du magazine Toboggan, présentant les mini-jeux
pour les enquêtes de Super-Ouaf
Or, la version interactive des enquêtes de Super-Ouaf est construite différemment : à la
place des mini-jeux imprimés qui ont un parcours plutôt linéaire, le jeu numérique permet à
l’enfant de cliquer sur le personnage de son choix, dans son ordre de préférence. Il peut
également cliquer sur un objet présentant l’indice.
69 Les rubriques. (s.d.). Toboggan. https://www.toboggan-magazine.com/magazine/les-rubriques
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59
Figure 21 : Les enquêtes interactives de Super-Ouaf sur le site Toboggan70
De plus, l’enquête est affichée en mode audiovisuel. Nous avons donc un aperçu plus détaillé
des personnages suspects concernant leur voix, intonation et gestes. Puisque le texte n’est
pas affiché, l’enfant doit donc se concentrer sur la partie auditive et il peut réécouter
plusieurs fois en cliquant à nouveau sur le personnage. Suite à cela, lorsque le coupable a
été trouvé, il est possible de cliquer sur une icône de carnet en bas de l’écran.
Par conséquent, l’expérience de jeu diffère de celle de la version imprimée : l’enfant doit
surtout écouter alors que le magazine papier propose des labyrinthes et des rébus pour
trouver les indices. Axel Planté-Bordeneuve explique cette distinction de l’expérience
utilisateur entre l’imprimé et le numérique : le magazine papier propose des jeux classiques,
avec pour finalité de renforcer l’apprentissage de la lecture et de l’écriture. C’est pourquoi
le stylo et la feuille sont importants sur cet aspect-là. Or pour la version web, la finalité est
d’enseigner l’utilisation de dispositifs numériques. De ce fait, il est nécessaire que l’enfant
puisse cliquer, se repérer dans une scène et trouver des informations.
Avec une interface interactive, facilement accessible et rejouable, la dimension ergonomique
s’ajoute. Il est également important de préciser que les enquêtes sont constituées de vidéos
70 Les enquêtes de Super-Ouaf. (s. d.). Toboggan. https://www.toboggan-magazine.com/super-ouaf/les-enquetes-de-super-ouaf
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60
; la dimension narrative pourrait également s’ajouter, car les histoires des suspects sont plus
mises en valeur : il est nécessaire d’écouter les personnages pour trouver la solution. Suite à
cela, un mini-jeu est proposé, tel que Le puzzle de La Puce. Contrairement à l’enquête papier,
ce dernier jeu vient compléter la grande enquête et n’est pas la partie centrale.
Quant aux autres jeux proposés par le site web, certains pourraient être facilement
reproduits sur un magazine papier, comme Le jeu des 7 différences. Cependant, l’enjeu
stimulant est privilégié, puisque le système comptabilise le score ; au bout de 3 erreurs,
l’enfant doit recommencer la partie. De plus, une fois que les différences ont été trouvées,
l’enfant peut rejouer chaque fois avec une nouvelle variante, contrairement au magazine
papier où il devra attendre le prochain magazine. Le potentiel de rejouabilité est donc
augmenté.
En somme, les enquêtes interactives de Super-Ouaf renforcent la dimension ludo-éducative,
mais d’une différente façon que le magazine papier. En effet, Axel Planté-Bordeneuve cite
qu’il est important de proposer des contenus différents entre la version imprimée et le
numérique. Ainsi, Toboggan renforce l’expérience utilisateur en diversifiant son approche de
création. Pour un magazine dont l’ambition est de valoriser les enfants de 6 à 8 ans dans
leur parcours, c’est surtout par le jeu que le plaisir d’apprendre se développe. Axel Planté-
Bordeneuve explique la raison pour laquelle les contenus numériques ont été créés : l’enjeu
est aussi de proposer des contenus interactifs aux enfants plus jeunes, qui sont encore en
apprentissage de la lecture. En effet, nous voyons que les jeux interactifs n’ont pas forcément
une finalité de lecture, ce qui les rend accessibles à un public plus large d’enfants.
Ainsi, le magazine Toboggan démontre qu’il est possible d’intégrer des contenus aux mêmes
finalités, mais avec une conception d’expérience utilisateur différente. Dans le cas du papier
comme du web, l’enfant acquiert des compétences en réflexion et en logique tout en
s’amusant.
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61
3. Les QR codes de Touk Touk : de la lecture du magazine aux enrichissements
numériques et ludo-éducatifs
Le magazine Touk Touk intègre plusieurs QR codes au fil de ses pages. Le numéro 7
(Pyrénées-Orientales / Portugal) en contient 5. Le numéro 8 (Vendée / Cambodge) en a 4.
Par définition, le QR code est “un dispositif qui permet le passage de l’espace figé de l’écrit
à l’espace ouvert du numérique”71. C’est donc un outil de transition, ayant la capacité de relier
le magazine et la ressource web. L’usage peut renforcer la dimension éducative, selon l’étude
de Gaëtan Temperman, Stéphanie Montagne, Bruno de Lièvre et Karim Boumazguida :
en faisant une analyse sur les usages de QR codes dans un manuel scolaire augmenté, ils
ont conclu que les élèves ont surtout fait appel aux prompts pour les questions difficiles. Il y
aurait donc “un lien entre l’usage des prompts et le niveau de complexité des questions perçu
par les élèves”. Dans ce cas, les QR codes apportent une information supplémentaire, lorsque
le contenu papier ne le permet pas.
De plus, l’étude ajoute que les prompts ont permis “une meilleure contrôlabilité de la tâche”,
ce qui motive les apprenants à s’engager dans leur apprentissage. En effet, le choix est
important : certains enfants ont besoin de scanner le QR code, d’autres non. Cette liberté de
parcours laisse un sentiment d’autonomie recherché par l’utilisateur. Pour Touk Touk, il est
intéressant de comprendre comment les QR codes invitent l’enfant à obtenir des
informations supplémentaires, pour un enjeu ludo-éducatif.
Les Loisirs Créatifs : des activités sous le format d’articles web et de documents PDF
Touk Touk propose des activités sur la rubrique web Loisirs Créatifs. Ces contenus ont
souvent un lien avec le magazine, d’où le fait que ce dernier affiche des QR codes dans ses
pages : l’utilisateur doit les scanner pour parvenir à des articles web avec un document PDF
à télécharger. Toutefois, il est également possible de se rendre directement sur le site,
indépendamment du magazine.
Les recettes, les bricolages, les jeux et le yoga sont des activités relatives au divertissement,
au bien-être et à la créativité. En même temps, les valeurs de ces activités ont donc un lien
fort avec l’apprentissage des cultures de la France et du monde. De plus, nous voyons un
renforcement du savoir-faire manuel.
71 Temperman, G., Montagne, S., Lièvre, B. d., & Boumazguida, K. (2018). Analyse des usages d’aides par QR codes et de leurs effets dans un manuel scolaire augmenté. Sciences et Technologies de l'Information et de la Communication pour l'Éducation et la Formation, 25(1), 151–168. https://doi.org/10.3406/stice.2018.1759
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62
Dans mon stage chez Hippopo Éditions, j’ai travaillé sur les maquettes du magazine, mais
aussi sur les documents PDF publiés sur le site web. L’exemple ci-dessous montre une double-
page du numéro 7 (Portugal / Pyrénées-Orientales) sur le thème de la cerise :
Figure 22 : Double-page présentant la cerise pour le magazine Touk Touk
(nº7 : Pyrénées-Orientales / Portugal)
Le but de cette double-page était surtout de montrer le cycle de vie du cerisier, mais aussi
d’inclure un ou deux mini-jeux, une section d’information supplémentaire nommée “Le sais-tu
?”, et un quiz. Florie Deswaziere m’a dit qu’une recette de clafoutis serait à envisager pour
cette thématique : or, étant donné qu’elle prendrait beaucoup de place, il serait peut-être
plus adéquat de la présenter comme ressource supplémentaire. C’est pourquoi l’insertion d’un
QR code s’est avérée avantageuse : le message pédagogique et théorique sur la cerise n’a
pas eu besoin d’être rétrécie. Il n’y avait pas non plus besoin de réduire l’espace, qui aurait
rendu le design difficile à apprécier, avec une expérience plus difficile de lecture. Un QR
code a donc été inséré en bas de la double-page. Le texte incite à rejoindre le groupe
Facebook de Touk Touk, étant donné que le nouveau site n’était pas encore disponible lors
de la conception du numéro Pyrénées-Orientales / Portugal.
Dans la conception graphique, la place du QR code incite à des réflexions : où serait-il plus
convenable de le placer ? Comment le rendre assez visible, sans pour autant perturber la
lecture ? En effet, le fichier PDF n’est pas indispensable puisqu’il s’agit d’une ressource
supplémentaire. Cependant, il est important de le mettre en évidence pour le lecteur. J’ai
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63
donc placé le QR code en dessous de l’encadré rouge “La cerise sur le gâteau !”. Le quiz
demande à l’enfant ce que signifie cette expression, avec trois choix possibles. Il y aurait
donc une cohérence avec le terme gâteau, puisque le QR code donne accès à la recette du
clafoutis. Ainsi, nous pouvons faire une distinction entre le contenu ludo-éducatif du
magazine imprimé, qui incite à la lecture et aux jeux sur papier, et le document PDF du site
qui vise à l’action (en l'occurrence, l’élaboration de la recette du clafoutis).
Figure 23 : Le PDF de la recette du clafoutis se trouve dans les Loisirs Créatifs
du site de Touk Touk72
Sur les autres exemples de pages, nous pouvons voir comment les QR codes sont mis en
évidence. Dans le magazine imprimé, la rubrique des Bricolages nécessite souvent des liens
supplémentaires car des étapes complexes sont requises. Par exemple, dans le bricolage des
Sardines de Lisbonne, la première étape consiste à fabriquer la pâte à sel ; le QR code a
été mis à côté du texte pour accéder plus facilement à la recette sur le site. Pour le bricolage
du théâtre d’ombres Khmer, l’étape 3 nécessitait un QR code ; pour faciliter la construction
des marionnettes, Touk Touk a mis à disposition un fichier contenant les silhouettes des
danseurs et danseuses cambodgiens, ainsi que d’un éléphant et du buffle. L’objectif est
72 Les loisirs créatifs Touk Touk. Touk Touk. https://www.touk-touk.com/loisirs-creatifs/
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64
d’imprimer le document pour ensuite dessiner les contours sur une feuille noire, avant de
découper les marionnettes.
Nous pourrions nous demander si les QR codes sont nécessaires pour renforcer l’expérience
utilisateur. Ils servent surtout à rendre les ressources plus accessibles : scanner le code avec
le téléphone permet d’entrer directement sur le contenu souhaité, sans la nécessité de devoir
entrer le nom du site web Touk Touk. Ensuite, il aurait été difficile d’inclure les figures de
silhouettes dans le magazine imprimé ; ce dernier a une délimitation de 42 pages et sa taille
est de 210 x 240 millimètres. En revanche, les ressources PDF des marionnettes font trois
pages avec un format A4. L’insertion des QR codes peut donc également faciliter l’approche
éditoriale, mais aussi donner plus de visibilité au site web, en tant que plateforme à part
entière : la rubrique des Loisirs Créatifs contient d’autres activités qui peuvent également
intéresser le lecteur.
Nous pourrions donc dire que cet espace numérique de Touk Touk incite plutôt aux activités
ludo-éducatives avec les rubriques suivantes : Bricolage / Expériences, Recettes, Jeux, Yoga
/ Pilates ; tandis que le magazine imprimé se focalise plutôt sur la lecture ludo-éducative.
En combinant ces deux offres, le lecteur aurait une expérience plus active, dans le cas où il
s’engage dans ces loisirs créatifs. De plus, nous remarquons que ces contenus servent de
suppléments au magazine imprimé : dû à la délimitation de ce dernier par le nombre restreint
de pages, le web se révèle être un moyen d’enrichir la dimension ludo-pédagogique en
incitant à l’action.
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65
Les documentaires animaliers enrichis avec la dimension sonore
À chaque numéro de Touk Touk, un animal spécifique à la région ou au pays est présenté
sur une double-page, en respectant la charte graphique. En plus de la partie textuelle et
illustrée, l’enfant peut scanner un QR code pour écouter le cri de l’animal.
Figure 24 : Maquette de Touk Touk (nº8 : Vendée / Cambodge) sur le buffle d’eau
J’ai participé à la maquette et la rédaction pour le buffle d’eau, un animal répandu au
Cambodge et présenté dans le numéro 8 (Vendée / Cambodge). Sur la première page, un
QR code a été intégré avec l’instruction : “Pour écouter le cri du buffle d’eau, passe l’appareil
photo de ton téléphone sur le QR code”. Concernant le magazine imprimé, je constate qu’il
est important de mettre une consigne : premièrement, cela permet à l’utilisateur de savoir
sur quel contenu il va atterrir. Ensuite, même si la technique du QR code se popularise dans
la conception des éditions de presse, elle ne s’étend pas pour tous les magazines ; il est donc
pertinent de guider le lecteur dans sa démarche.
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66
Figure 25 : Vidéo sur le cri du buffle d’eau, publiée par Touk Touk sur YouTube73
En utilisant le QR code, l’utilisateur découvre une vidéo sur YouTube ; comme mentionné sur
le magazine imprimé, le cri du buffle d’eau apparaît pendant une trentaine de secondes. Des
images et une vidéo apparaissent également pour montrer la vie de l’animal. Par conséquent,
l’enfant peut découvrir la biodiversité sous plusieurs angles ; écouter le cri de l’animal peut
être informatif et divertissant.
Avec Touk Touk, nous constatons que les ressources web sont complémentaires au magazine,
d’où la nécessité d’intégrer des QR codes. Dans la plupart des cas, comme le cri d’un animal
ou la recette du clafoutis, il n’est pas essentiel de scanner le code ; le magazine imprimé peut
se lire indépendamment du numérique. Or, pour la rubrique du bricolage, il est parfois
indispensable d’obtenir les ressources, comme pour le théâtre d’ombres Khmer, afin de
réaliser les étapes comme l’indiquent les consignes. Le QR code s’affirme donc comme un
outil à visée ergonomique pour mener à bien la destination vers les ressources ludo-
éducatives.
73 Touk Touk. (2021, 12 mai). Le cri du buffle d’eau. YouTube. https://www.youtube.com/watch?v=0mM2j8lVYio
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67
C. Les dimensions secondaires et leurs apports sur l’expérience
utilisateur
Dans mon corpus, j’ai constaté que les dimensions narratives et ludo-éducatives
étaient souvent les finalités principales des éditions ; celles-ci sont motivées à l’idée
d’apporter des ressources numériques pour enrichir l’expérience des enfants en plus de la
lecture sur papier.
Pourtant, j’ai également mentionné la dimension sociale, créative et ergonomique : dans
certains cas, elles se mettent au service de la narration ou de l’apprentissage ludique.
Cette partie vise à démontrer le renforcement de ces dimensions secondaires, toutes aussi
importantes pour la réflexion sur l’expérience utilisateur.
1. La dimension sociale et créative : une offre pour toute la famille
Suite à mes recherches, j’ai découvert que la dimension sociale serait renforcée dans
certains cas : la ressource numérique permettrait à l’enfant de faciliter ses contacts sociaux.
Tel est l’enjeu de certains éditeurs ayant pour défi de créer un produit convenant non
seulement aux enfants, mais aussi aux adultes. En outre, la dimension sociale s’intègre
souvent avec la dimension créative ; c’est pourquoi j’ai préféré les assimiler dans cette même
partie. En compagnie de ses proches, l’enfant s'engage dans des activités faisant appel à
l’imagination, l’ouverture d’esprit et le savoir-faire manuel.
L’utilisation des écrans à plusieurs pour favoriser la discussion
Dans une première réflexion, l’idée qu’un produit numérique puisse inciter à la sociabilité
n’est pas courante. Il reste la crainte d’isoler l’enfant devant l’écran, comme le précise Olivier
Jughon pour son magazine Mini-Schools : “On a eu une grande explication pédagogique à
faire, en expliquant aux parents qu’il ne s’agissait pas de les mettre devant des vidéos qui
vont durer des heures. Les vidéos qu’on a à l’intérieur du magazine durent entre 1 et 2
minutes.” En effet, une surexposition aux nouvelles technologies est néfaste, comme l’a
démontré Sherry Turkle dans son livre Alone Together : en partie parce qu’elle crée une
illusion de la connexion constante, ce qui affecte en retour nos relations dans le monde réel74.
Or, ce n’est pas forcément le cas quand un dispositif est utilisé par plusieurs personnes. C’est
l’observation que Sherry Turkle porte sur la télévision : elle peut isoler une famille, ou bien
74 Turkle, S. (2011). Alone Together: Why We Expect More from Technology and Less from Each Other. Basic Books.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
68
la rapprocher lorsqu’elle est utilisée de manière avantageuse, afin d’établir des contacts
sociaux75.
Pour le magazine en réalité augmentée Mini-Schools, le parent est censé guider l’enfant
dans ses premières utilisations. La possibilité d’interaction sociale est possible et même
encouragée avec l’utilisation du dispositif : par exemple, l’enfant peut scanner le magazine
et montrer à ses proches les contenus audiovisuels sur l’écran.
Pour la future application de Wow! News, Alastair Macdonald vise surtout une utilisation
partagée entre l’enfant et le parent. Selon lui, le magazine imprimé est édité de manière à
renforcer la lecture solitaire ; la publication numérique, par ses atouts d’interactivité, mise
sur la conversation. C’est pourquoi Alastair Macdonald souligne la finalité de partage :
“[L’application] est conçue pour être une expérience de 15 minutes environ [...] c’est un
moment partagé avec les parents”. Les quiz intégrés, à dimension ludo-éducative, sont
également “des moments de partage où on peut comparer les réactions du parent et de
l’enfant”. Ainsi, le parent peut mieux comprendre la relation de son enfant face à
l’actualité, et vice-versa.
Effectivement, il est primordial de constater l’influence que les médias ont sur notre
perception du monde : pour un enfant de sept ans qui commence à s'intéresser à l’actualité,
il peut parfois être décourageant de voir des publications constantes présentées sous un
angle négatif. Par les recherches d’enseignants et de pédopsychiatres, l’édition de WoW!
News a fait le constat d’une inquiétude croissante chez la jeune génération. Alastair
Macdonald justifie sa mission : “Et donc est né une volonté de rééquilibrer cette vision du
monde qui est très négative pour des enfants”, en clarifiant que les adultes ont également
ce rôle de transmission de nouvelles. En conséquence, si l’enjeu du parent est d’augmenter la
confiance de l’enfant sur l’apport de solutions aux problèmes , Wow! News correspond à ce
besoin ; les conversations peuvent se faciliter grâce à ce média informationnel.
L’application Bayam se destine également à être utilisée par plusieurs membres de la famille.
Premièrement, elle propose “jusqu’à 6 comptes enfant pour un usage en famille
(cousins/cousines, fratrie)”76. Cela se justifie par une tranche d’âge plus large (3 à 10 ans),
contrairement à un magazine imprimé tel que J’aime lire, destiné aux 7 à 10 ans (avec en
compagnie Mes premiers J’aime lire pour les 6-7 ans, et J’aime lire Max pour les 9-13 ans).
Mais aussi, l’expérience utilisateur peut se faire à plusieurs sur un seul écran, comme le cite
ce témoignage de Mamie Bea : ses petits-enfants de 2 à 7 ans se mettent “le plus souvent à
75 Turkle, S. (2015). Reclaiming Conversation: The Power of Talk in a Digital Age. Penguin Press. 76 Bayam. (s. d.). https://bayam.tv/fr/
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
69
3 ou 4 autour de l’écran, ils choisissent chacun leur tour”77. Cela démontre alors un
enrichissement de la dimension sociale, alors que le magazine J’aime lire, même s’il peut aussi
être lu à plusieurs, renforce l’apprentissage et l’appréciation de la lecture en autonomie. Avec
un public plus large d’utilisateurs, Bayam souhaite rassembler les différents âges sur un seul
et même dispositif.
Plusieurs offres numériques souhaitent également apporter une expérience de créativité à
plusieurs. Par exemple, le site de Baïka met à disposition certaines pages du magazine à
télécharger, pour faire des recettes (Les tortillas du Guatemala78) ou jouer tout en
découvrant les cultures de pays différents (Masques du Gabon79). Touk Touk rassemble des
articles web contenant des fichiers PDF supplémentaires, pour favoriser le partage de loisirs
créatifs80 en famille. Parmi les jeux numériques de Toboggan, nous trouvons également des
activités créatives dont l’expérience pourrait également être renforcée en situation sociale ;
par exemple, l’activité Crée ton emploi du temps avec Avni se qualifie d’outil interactif
permettant à l’enfant de personnaliser ses horaires avec des étiquettes81 ; il peut ensuite le
télécharger et l’imprimer. L’enjeu est similaire pour Crée ton poisson d’avril avec Avni82 ; dans
un contexte social, l’enfant peut montrer sa création et inviter d’autres personnes à jouer
avec lui.
Un rapprochement à distance facilité par le web
En plus de favoriser la visibilité du magazine, les ressources web ont pour intention de
rapprocher l’édition de l’internaute. Par exemple, le Journal de Mickey propose des concours
sur son site ; cela permet aux internautes de participer de manière plus instantanée, en se
créant un compte au lieu d’envoyer une lettre par la poste.
Les dimensions sociales et créatives sont surtout renforcées dans la rubrique Participe à la
vie du journal. L’édition laisse 6 choix à l’internaute : “Pose une question”, “Poste une photo”,
“Poste une blague”, “Poste un dessin”, “Le pour ou contre”, et “Envoie une vidéo”.
77 Bayam. (s. d.). https://bayam.tv/fr/ 78 Monier, N. (s. d.). Les tortillas du Guatemala. Baïka. https://www.baika-magazine.com/2020/04/26/les-tortillas-du-guatemala/ 79 Monier, N. (s. d.). Masques du Gabon. Baïka. https://www.baika-magazine.com/2020/04/04/masques-du-gabon/ 80 Touk Touk. (s. d.). Les loisirs créatifs Touk Touk. Touk Touk. https://www.touk-touk.com/loisirs-creatifs/ 81 Crée ton emploi du temps avec Avni. Toboggan. https://www.toboggan-magazine.com/avni/emploi-du-temps-avni?cat_prov 82 Crée ton poisson d’avril avec Avni. Toboggan. https://www.toboggan-magazine.com/avni/poisson-avril-avni?cat_prov
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
70
Ainsi, l’enfant peut également avoir un rôle de contributeur, grâce au renforcement de la
dimension créative par l’incitation à envoyer des dessins, des vidéos ou des blagues. La
création de l’enfant a le potentiel d’être sélectionnée pour apparaître dans le prochain
numéro du magazine papier. Ce rapprochement implicite avec les rédacteurs lui donnerait
le rôle de spect’acteur (spectateur-acteur)83, une notion facilitée par l’ère des réseaux sociaux,
où l’on peut partager et consommer du contenu sur la même plateforme. La dimension
sociale est renforcée par cet échange, que ce soit par la créativité, le vote pour un sondage
pour ou contre, ou par l’envoi d’une question qui sera répondue par l’édition.
Le rassemblement de la dimension sociale et créative par Touk Touk
La dimension sociale est encouragée pour le magazine imprimé Touk Touk. En effet, la
tranche d’âge des 3 à 7 ans est encore dans l’apprentissage de la lecture. C’est pourquoi le
parent est souvent celui qui lit les pages, ou celui qui accompagne l’enfant dans sa
compréhension. Une interaction doit donc s’établir ; dans l’article de Raymond Hétier sur les
albums destinés à la petite enfance, on apprend que le décodage d’une histoire a besoin
d’être « extériorisé par le langage »84. Dans ce cas, le contact humain serait indispensable
pour le développement de l’enfant, y compris à travers les premières lectures. Il est également
supposé que le parent soit celui qui possède l’appareil pour accéder au lien numérique.
La rubrique du bricolage nécessite l’aide d’un parent dans plusieurs domaines :
premièrement, une étape peut requérir l’utilisation d’un four ou d’un découpage qui serait
dangereux sans la supervision d’un adulte. En l'occurrence, dans l’étape 3 des Sardines de
Lisbonne, il est demandé à un adulte de mettre les pâtes à sel au four. Bien que cette
dimension sociale soit essentielle, elle peut apporter un fort moment de partage entre
l’enfant et son parent. Par ses diverses rubriques comme les recettes, le yoga ou les
expériences scientifiques, le magazine imprimé Touk Touk vise à rapprocher la connexion
familiale.
Or pour l’utilisation du numérique, elle s’avère être un argument pour renforcer cette
dimension sociale déjà présente. L’enfant pourrait naviguer sur le site web en compagnie de
son parent pour réaliser ensemble des activités ludo-éducatives. En second lieu, le parent
peut aider l’enfant à diffuser ses créations, notamment lors des concours pour gagner un
83 Weissberg, J.-L. (1999). Retour sur interactivité. Revue des sciences de l’éducation, 25(1), 167-199. https://doi.org/10.7202/031997ar 84 Hétier, R. (2014). Albums destinés à la petite enfance et questionnement existentiel : herméneutique d’oeuvres formatrices. Revue des sciences de l’éducation, 39(1), 33–59. https://doi.org/10.7202/1024532ar
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
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magazine Touk Touk. J’ai pu concevoir ces pages disponibles dans les numéros Pyrénées-
Orientales / Portugal et Vendée / Cambodge :
Figure 26 : Maquettes pour les concours de Touk Touk, publiés sur les magazines nº7 (Pyrénées-
Orientales / Portugal) et nº8 (Vendée / Cambodge)
Dès la première étape, la consigne est de colorier le dessin de la page. Pourtant, les étapes
suivantes nécessitent l’utilisation d’Internet, en l'occurrence le réseau social Instagram. Il est
donc supposé que ce soit l’adulte qui dispose d’un compte pour pouvoir publier le coloriage
de son enfant. Ensuite, la troisième étape demande d’identifier le compte
@touktoukmagazine, avec le hashtag #concourstouktoukmag dans la description. Cela
permet à Hippopo Éditions de mieux trouver les images qui lui sont destinées. Le partage
sur les réseaux sociaux peut donc se faire de manière plus rapide. Ainsi, en publiant le
coloriage avec l’accompagnement d’un adulte, l’enfant a l’occasion de s’initier à l’utilisation
numérique, de favoriser l’échange avec son parent, et de diffuser sa création sur une
plateforme sociale, pour un rapprochement avec l’édition.
En conclusion, les dimensions sociales et créatives peuvent être renforcées par les ressources
numériques, en plus du magazine imprimé. Si le magazine a pour finalité principale de
favoriser la lecture et / ou l’apprentissage ludique, l’expérience créative et sociale seraient
des compléments secondaires à l’expérience utilisateur. Cela ne fait pas baisser leur
importance ; au contraire, en se mettant au service de la dimension narrative et ludo-
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
72
éducative, elles enrichissent l’expérience utilisateur non seulement de l’enfant, mais aussi de
ses parents et de ses proches.
2. La dimension ergonomique : un usage plus adapté aux enfants et aux parents
L’ergonomie désigne l’étude de l’activité humaine et se met au service du bien-être
humain85. Pour les éditions de presse jeunesse, si certaines offres sont numériques, il est
important de réfléchir en quoi la dimension ergonomique est importante, et comment elle
permet aux dimensions principales (narrative et ludo-éducative) de donner une expérience
d’utilisation plus efficace.
Puisque le support est sur un écran (une interface modifiable), il convient de réfléchir aux
multiples possibilités d’interaction. De plus, il est essentiel de réfléchir sur l’utilisateur en
question. L’édition Actialuna fait part de cette réflexion : “Je conçois des œuvres à lire et il
s’agit de ne pas entrer dans la confusion : est-ce que mon utilisateur est un lecteur ? un
joueur ? un spectateur ? un auditeur ?”86. Cette réflexion est également importante pour les
magazines jeunesse, notamment ceux en réalité augmentée : comment assurer une utilisation
optimale en sachant que le lecteur va devenir un joueur ou un auditeur pendant quelques
minutes ? Dans ce cas, le magazine aurait fortement besoin de la dimension ergonomique
pour mener à bien sa finalité principale : en l'occurrence la narration, l’apprentissage ou le
divertissement.
L’identité de l’utilisateur est tout aussi importante. Un magazine imprimé se focalise sur
l’expérience de lecture : le texte est-il adapté à l’âge de l’enfant ? La typographie est-elle
facile à lire ? Y a-t-il une cohérence dans les images ? Pour les ressources numériques de
l’édition, il est important de voir les usages des interfaces écran. Dans son livre Design for
Kids: Digital Products for Playing and Learning, Debra Levin Gelman cite que les jeunes
sont désormais “natifs du numérique” : une étude en 2013 signale même que les enfants aux
États-Unis passent environ 8 heures par jour sur les écrans87. Il est donc fondamental
d’observer leurs usages pour qu’ils aient une expérience la plus adaptée à leurs besoins.
85 Usabilis. (2020, 1er avril). Qu’est-ce que l’ergonomie ?. Usabilis. https://www.usabilis.com/qu-est-ce-que-l-ergonomie/ 86 Tréhondart, N. (2013). Le livre numérique enrichi : un hypermédia en construction. Enquête sur les représentations des éditeurs. H2PTM. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01548478 87 Levin, G. (2014). Design for Kids: Digital Products for Playing and Learning. Rosenfeld Media.
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73
En effet, l’utilisation numérique d’un enfant diffère de celle d’un adulte. Voici un tableau
comparatif, en m’inspirant des résultats principaux exposées par Norman Nielsen Group88
et Debra Levin Gelman89 :
Différences principales sur l’expérience utilisateur (site web, application)
Enfant (3-12 ans)
Adulte
Intention
Se divertir
Communiquer ou réussir à
faire quelque chose
Comportement
Volonté d’explorer plusieurs
options sur l’interface
Volonté de rester sur le même
parcours
Son et animations
Appréciation pour les sons et
les éléments animés sur le site
ou l’application
Pas d’appréciation en général ;
les sons peuvent déranger
l’expérience.
Limitations physiques
Saisie lente sur le clavier et
faible contrôle de la souris
Pas de limitations physiques
en général
Tranche d’âge
Il est très important de
distinguer les tranches d’âges
entre les enfants pour le
design d’expérience utilisateur.
Le design par tranche d’âge
pour les adultes n’est pas très
important.
Figure 27 : Tableau présentant les différences principales sur l’enfant et l’adulte
quant à l’utilisation d’un site web ou d’une application
Malgré ces différences, Debra Levin Gelman rappelle qu’il y a également des similitudes
dans les besoins de l’enfant et du parent. Cette information est cruciale pour ne pas produire
un contenu qui soit trop éloigné des attentes globales. Par exemple, le design devrait être
cohérent et l’outil devrait fournir une raison pour être utilisé. Il vaudrait mieux ne pas rendre
88 Nielsen, J. (2019, 13 janvier). Children’s UX : Usability Issues in Designing for Young People. Nielsen Norman Group. https://www.nngroup.com/articles/childrens-websites-usability-issues/ 89 Levin, G. (2014). Design for Kids: Digital Products for Playing and Learning. Rosenfeld Media.
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74
l’utilisateur surpris (l’adulte et l’enfant ont des attentes sur un site / une application et une
expérience inattendue n’est pas désirable)90. Plus qu’un apport, la dimension ergonomique
est un critère à ne pas négliger ; elle devient une nécessité pour être mise au service de la
dimension narrative et ludo-éducative.
Or, comme vu précédemment pour la dimension sociale, certaines ressources produites par
les éditions de presse concernent aussi les parents. Ainsi, selon l’identité de l’utilisateur, il
convient de réfléchir à l’expérience attendue par ces deux types de profils.
Le niveau d’autonomie est aussi à prendre en compte. En créant un magazine en réalité
augmentée, l’édition de presse jeunesse suppose que le lecteur ou ses proches disposent d’un
outil apte à scanner les codes. De plus, sur quelle application peut-on accéder à ces
documents numériques ? Dans le cas de Mini-Schools et de Geek Junior, il faut tout d’abord
télécharger l’application ARGOplay, un lecteur de réalité augmentée91. Le degré d’autonomie
est réduit puisqu’une action préalable est nécessaire afin d’avoir l’expérience complète du
magazine. Avec cette réflexion, Christophe Coquis constate la difficulté d’utilisation de la
réalité augmentée : “ça ne marchait pas très bien, tout simplement parce qu’il fallait
télécharger l’application : c’était un frein”. Il souhaite donc intégrer des QR codes pour ses
prochains numéros ; la méthode serait plus simple et rapide étant donné que la caméra du
téléphone serait uniquement nécessaire.
Ensuite, il est important de se demander quel serait le dispositif idéal pour consulter les
informations. Dans le cas de WoW! News, Alastair Macdonald envisage de sortir une
application mobile/tablette plutôt qu’un site web : “on n’a jamais pensé qu'un site pour des
enfants de cet âge-là pourrait être une proposition durable”. De plus, la recherche de
Norman Nielsen Group nous indique que les participants entre 3 à 12 ans étaient très
confortables avec les téléphones et les tablettes, contrairement à l’ordinateur : jusqu’à l’âge
de 9 ans, beaucoup ont préféré les supports tactiles plutôt que la souris et le clavier. Ensuite,
la majorité des utilisateurs de moins de 6 ans n’avaient jamais utilisé d’ordinateur. Même s’il
serait possible de naviguer sur un site web via un téléphone, l’application mobile WoW! News
se révèle être une solution plus pratique, correspondant aux usages actuels des enfants.
90 Levin, G. (2014). Design for Kids: Digital Products for Playing and Learning. Rosenfeld Media. 91 L’application mobile de réalité augmentée ARGOplay. Argo. https://ar-go.co/fr/produits/argoplay/application-native/
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75
Dans les ebooks de J’aime lire, l’application Bayam intègre la dimension ergonomique pour
renforcer la dimension narrative :
Figure 28 : Interfaces de l’application Bayam pour les ebooks de J’aime lire
Tout d’abord, l’interface montre un aperçu des histoires, avec une barre de navigation en
dessous. Une fois l’ebook sélectionné, il est possible de voir le nombre de pages . Le format
parait plus petit en version horizontale, mais on peut également mettre son téléphone ou sa
tablette en mode vertical. Contrairement au magazine imprimé, l’application a un menu où
il est possible de cliquer sur une page précise. Il est également possible de marquer des
pages avec le symbole du signet. De plus, en dessous de chaque page, un petit bouton orange
permet de lire l’histoire en version audio.
Cependant, avec la volonté de renforcer la dimension narrative grâce à l’intégration
d’éléments ergonomiques, se trouve aussi la finalité de garder l’identité de livre. Don
Norman parle du design skeuomorphique comme technique intégrant des idées familières
et anciennes dans les nouvelles technologies ; il précise qu’une manière d’affronter la peur
du nouveau est de le concevoir comme un ancien objet92. Dans le cas de Bayam, bien que les
92 Norman, D. A. (1990). The Design of Everyday Things. Basic Books.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
76
pages ressemblent à des diapositives, un son de page se déclenche dès que l’on défile l’écran
avec son doigt. Nolwenn Tréhondart fait allusion aux résonances mimétiques, en partant
du principe que les éditeurs imaginent sûrement la pratique de réception liées à leurs propres
visions de la lecture93. Le design centré sur l’utilisateur est donc une nécessité pour les
ressources numériques supplémentaires au magazine imprimé.
93 Tréhondart, N. (2013). Le livre numérique enrichi : un hypermédia en construction. Enquête sur les représentations des éditeurs. H2PTM. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01548478
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77
Le site web de Touk Touk : Concevoir un espace numérique pour les parents et les
enfants
Le site web de Touk Touk est à la fois une vitrine des produits et un répertoire pour les
podcasts et les articles web des loisirs créatifs. Il contient également un blog pour les parents,
sur les sujets de voyage, d’écologie, d’activités à faire avec les enfants et de parentalité.
Avant la refonte du site web, une réflexion a dû être établie : comment proposer un espace
numérique qui convienne à la fois aux enfants et aux parents ?
Cet enjeu est délicat. Après la réalisation du dossier de conception et les discussions avec
Florie Deswaziere, j’ai appris que les pages principales de Touk Touk (dont la page d’accueil
et la présentation du magazine) auraient plutôt pour finalité de montrer une vitrine de
produits. Dans ce cas, il devrait surtout être conçu pour le parent. De même, il serait probable
que ce soit le parent qui guide son enfant dans la navigation des loisirs créatifs ou pour
écouter les podcasts.
Voici les principales catégories de profils établies par Florie Deswaziere :
Groupe 1
Groupe 2
Les femmes de 24-45 ans (en France) avec un
enfant de 3-7 ans, qui ont une sensibilisation à
l’environnement.
Les femmes francophones expatriées de 24-45
ans, avec un enfant de 3-7 ans et qui ont une
sensibilisation à l’environnement.
Groupe 3
Groupe 4
Les grands-parents / les membres de la famille
ayant des enfants vivant à l’étranger. Leurs
petits-enfants ont 3-7 ans.
Les parents d’enfants de 3-7 ans qui voyagent
régulièrement, et qui souhaitent transmettre les
valeurs culturelles et écologiques.
Figure 29 : Présentation des groupes de profils des abonnés Touk Touk
Nous voyons que tous groupes ont des profils d’adultes ; en effet, les éditeurs de presse
jeunesse prennent surtout en compte cette tranche d’âge, et comme l’explique Jean-Marie
Charon : “En réalité, l’achat de la presse des jeunes est jusqu’à l’adolescence essentiellement
réalisé par les adultes, en priorité les parents et grands-parents, et, pour une moindre part,
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
78
les enseignants”94. Pour un magazine de voyage comme Touk Touk, j’ai également appris que
ce sont surtout les familles en France qui s’abonnent, même si nous trouvons aussi des
abonnés dans différents pays du monde.
Une autre réflexion se pose : comment ces personnes utiliseraient-elles le magazine pour
accéder aux ressources numériques avec leur enfant ? Pour réfléchir à l’utilisateur, la création
de personas peut s’avérer bénéfique. Un persona est un archétype de personnage fictif pour
représenter des groupes d’utilisateurs95.
Emmanuelle Tournier (exemple de persona du Groupe 3)
Profil : 68 ans. Grand-mère vivant en Savoie, elle est passionnée de randonnées. Elle s’intéresse à
la nature et possède un jardin. Ses petits-enfants viennent lui rendre visite pendant les vacances.
Son objectif : elle connaît Touk Touk. Elle s’est abonnée parce qu’elle partage les valeurs du
magazine et souhaite que ses petits-enfants apprennent à apprécier la planète, les animaux et la
nature.
Elle cherche une nouvelle activité ludique à leur proposer et se rend donc sur le site de Touk Touk
en quête d’idées.
Elle se sent plus à l’aise avec son téléphone portable ou sa tablette, plutôt que l’ordinateur.
Figure 30 : Fiche persona pour une abonnée de Touk Touk
94 Charon, J. (2003). Lire et grandir en s'amusant, ou la grande aventure de la presse des jeunes. Éla. Études de linguistique appliquée, nº130, 223-236. https://doi.org/10.3917/ela.130.0223 95 Esposito, N. (2020-2021). Concevoir des ouvrages numériques sous l'angle de l'expérience de l'utilisateur : exemple avec l'édition jeunesse. Le Mans Université.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
79
Scénario utilisateur imaginé pour Emmanuelle Tournier :
1. Lit le magazine en compagnie de ses
petits-enfants.
2. Scanne le QR code avec son téléphone
pour accéder à un podcast.
3. Atterrit sur le site Touk Touk, sur la
page individuelle du podcast.
4. Écoute le podcast avec les enfants.
5. Découvre que le menu du site a un
élément nommé : Kits d’activités.
6. Clique dessus.
7. Atterrit sur la page Kits d’activités.
8. Défile la page du téléphone.
9. Observe les différents kits.
10. Clique sur un kit spécial jeu.
11. Atterrit sur la page individuelle du kit,
directement sur le site Boutique.
12. Lit la description et l’aperçu du Kit.
13. Fait sa commande.
Figure 31 : Scénario utilisateur imaginé pour Emmanuelle Tournier
Dans ce scénario, Emmanuelle Tournier ne va pas sur la page d’accueil. Elle connaît déjà le
site, mais elle doit encore découvrir les nouveautés, comme les Kits d’activités. Son parcours
est plus rapide : elle choisit son kit, et passe directement à la Boutique pour lire la description.
Ce type de parcours déduit que ce serait plutôt l’adulte qui scannerait le code en compagnie
de son enfant. En observant les pages imprimées de Touk Touk, il serait également
envisageable que l’enfant fasse des bricolages en compagnie d’une grande personne. Par
exemple, voici une maquette du numéro 7 (Pyrénées-Orientales / Portugal) sur laquelle j’ai
pu travailler :
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
80
Figure 32 : Double-page “Bricolage : Les sardines de Lisbonne” du magazine
Touk Touk (nº7 : Pyrénées-Orientales / Portugal).
L’étape 1 du bricolage s’intitule : “Fais ta pâte à sel”. Étant donné que cette étape avait elle-
aussi des instructions supplémentaires, un QR code a été mis pour inciter au téléchargement
du document PDF. Le parent sortirait donc son téléphone ou sa tablette, pour accompagner
son enfant dans le parcours web. Cela permettrait à l’enfant d’apprendre l’utilisation des
dispositifs ; scanner un QR code ou naviguer sur Internet pose également un enjeu
pédagogique, d’autant plus que la société actuelle s’est adaptée à ces usages.
Une fois sur l’article web, le parent peut accompagner l’enfant dans sa création de la pâte
à sel. Ainsi, la rubrique Loisirs créatifs sur le site de Touk Touk se présente comme un
répertoire d’activités à faire à plusieurs. D’une part, l’enfant s’instruit grâce aux activités
manuelles. D’autre part, l’entrée dans le monde numérique est une étape qu’il peut apprécier
de parcourir en compagnie de ses parents. Cette double-pédagogie lui permet d’avoir une
expérience sociale renforcée avec ses proches.
Enfin, nous remarquons que l’utilisation a été imaginée sur un téléphone. Or, elle pourrait
également se faire une tablette. De même, il serait possible pour l’adulte d’entrer sur le site
web de Touk Touk depuis son ordinateur. C’est pourquoi la conception responsive (adaptée
à tous types de support) est importante pour favoriser la dimension ergonomique.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
81
Figure 33 : Site web de Touk Touk sur le support d’ordinateur et de téléphone
La conception sur plusieurs supports a été facilitée grâce à Elementor, un constructeur de
page sur WordPress (le système de gestion de contenu pour créer le site web Touk Touk).
Enfin, les tests utilisateurs n’ont pas été faits avant la mise en ligne ; ceux-ci permettent
d’évaluer “l’adéquation entre un dispositif et les utilisateurs auxquels il est destiné”96.
Toutefois, cette pratique aurait été pertinente pour déterminer le parcours et les réactions
des internautes afin d’améliorer encore plus l’expérience utilisateur.
96 Esposito, N. (2020-2021). Concevoir des ouvrages numériques sous l'angle de l'expérience de l'utilisateur : exemple avec l'édition jeunesse. Le Mans Université.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
82
Partie 3 : Les réflexions supplémentaires autour des pratiques
éditoriales
Suite à l’analyse des dimensions renforcées sur l’expérience utilisateur, il serait
intéressant de traiter les potentielles pertes causées par les ressources numériques. Ensuite,
j’analyserai les implications de ces publications numériques sur l’identité du magazine et du
secteur de la presse jeunesse.
A. Les pertes des dimensions de l’expérience utilisateur causées par
les ressources numériques
La lecture et l’apprentissage ont souvent un enjeu de plaisir. Or, lorsque ces notions sont
associées au numérique, il peut parfois y avoir des pertes autour des dimensions sur
l’expérience utilisateur. La conception est donc délicate puisque nous sommes face à deux
supports bien différents : le papier avec sa qualité statique, et l’écran avec ses éléments
dynamiques.
1. Le manque de délimitation : une expérience de dispersion
Premièrement, le manque de délimitation est une caractéristique souvent marquée par
la ressource numérique. Cela a un impact direct sur le lecteur, puisqu’il risque de détourner
son attention du contenu principal. Si la publication se trouve dans l’espace web, il est
probable que l’internaute s’aventure dans d’autres onglets, clique sur des hyperliens et se
détourne alors de son objectif principal. Où serait donc l’expérience de lecture initiée par
l’édition du magazine ? Nolwenn Tréhondart précise que l’idée de clôture semble surtout
nécessaire pour les concepteurs de livres enrichis lorsque le support est sur une tablette. Par
sa polyvalence, celle-ci “tend à détourner l’attention du lecteur vers une multitude d’activités”.
Quant aux QR codes, bien qu’ils aient pour but d’enrichir le papier avec des éléments
supplémentaires, ils ont également le risque de perdre le sentiment d’immersion chez le
lecteur. La première raison est liée au fait que ce dernier doit interagir avec deux supports :
le magazine imprimé et le téléphone ou la tablette pour scanner le code. Par cette demande,
la lecture devient fragmentée : un temps d’arrêt de lecture se crée lorsque l’enfant ou l’adulte
prend le téléphone, entre dans l’application de réalité augmentée ou la caméra, avant de
scanner l’élément souhaité. Par conséquent, le lecteur doit passer au statut d’utilisateur
pendant quelques secondes ou minutes, ce qui pourrait le distraire de sa quête initiale, qui
est de lire le magazine. Noémie Monier a exprimé son intention de ne pas insérer de liens
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numériques sur son magazine Baïka : “Personnellement, ce n'est pas une expérience de lecture
que j'aime”, confie-t-elle. Sauf si les retours d’enfants ou de professionnels le demandent, la
rédactrice en chef préfère ne pas combiner le papier à l’écran pour ne pas fragmenter ce
plaisir de lire.
De plus, l’action de scanner le document fait prendre conscience de la matérialité du
magazine. La dimension narrative risque donc d’être perdue, à cause de cet oubli
d’immersion : dans le cas de la réalité augmentée, la vision d’éléments virtuels superposés
dans le monde réel laisse supposer une constatation : le magazine en tant que support fait
partie de la réalité. Alors, cette publication est réduite à l’utilisation de sa forme, tandis que
son contenu est secondaire, voire remplacé par les éléments virtuels et dynamiques. Ainsi,
même si ces derniers visent à enrichir la narration, il se peut que le contenu imprimé soit
relégué au second plan au niveau narratif. Nolwenn Tréhondart cite que “l’interactivité
nuirait à la cohérence narrative”97. Justement, à cause de sa nature distractive, l’utilisation
d’un téléphone au-dessus du magazine imprimé aurait “un risque d’exploration jouissive des
formes au détriment de la réflexivité nécessaire à la lecture profonde du texte”. Cela nous
montre que le contenu imprimé, censé attirer vers la contemplation, la réflexion et
l’immersion, peut perturber l’expérience lorsqu’elle est intimement liée à l’écran.
Lors de ma pratique de stage pour le magazine Touk Touk, j’ai pu concevoir les maquettes
avec des QR codes à l’intérieur (et les liens intégrés par Florie Deswaziere). Les tests
utilisateurs n’ont pas eu lieu, mais il aurait été intéressant d’observer l’approche par les
enfants et leurs parents : une fois qu’ils ont scanné le code, auraient-ils plus tendance à
parcourir le site de Touk Touk, ou alors de revenir directement sur le magazine après la
consultation de la ressource numérique ? En effet, les articles web ont été conçus avec des
hyperliens menant généralement à d’autres pages du site Touk Touk. Or, il y a aussi la
possibilité que le lecteur soit amené à regarder une vidéo sur YouTube, puisque Touk Touk
a également sa propre chaîne. Bien que l’apport audiovisuel enrichisse l’expérience
utilisateur, il y a aussi le risque de vouloir se promener sur d’autres vidéos n’ayant pas
forcément de lien avec le magazine.
Avec la multitude de parcours possibles, le numérique permet une meilleure personnalisation,
aussi bien qu’il a des risques de rendre la lecture plus imprévisible.
Ensuite, le manque de compréhension peut être une conséquence de la pseudo-lecture. Cette
notion traitée par Pierre Barbagelata, Aude Inaudi et Maud Pelissier se caractérise par
97 Tréhondart, N. (2018). Pratiques de conception du livre numérique enrichi : enjeux idéologiques et créatifs. Interfaces numériques, 7. https://www.unilim.fr/interfaces-numeriques/3619
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une “lecture fragmentaire”98, à l’opposé du livre papier dont l’enjeu est de développer une
lecture attentive et savante. Puisque le multimédia incite à l’interaction avec les éléments
dynamiques, le texte aurait tendance à être lu par morceaux. Il aura donc perdu de sa
fluidité. Si cet effet est constaté dans les livres enrichis, il aurait également une influence
pour les magazines jeunesse à forte dimension narrative. La lecture de survol est à l’inverse
de la lecture approfondie, qui permet justement d’avoir une plus ample compréhension de
l’histoire. Selon le livre The Shallows de Nicholas Carr, les apports dynamiques du support
numérique et du web peuvent réduire la concentration, un trait désirable pour une expérience
de lecture99.
Certes, la lecture sur Internet est facilitée par les hyperliens, nous permettant d’accéder à
une multitude d’informations. Or, si le but est de favoriser une lecture réfléchie, elle peut
causer des pertes à l’expérience utilisateur. Nicholas Carr nous fait part d’une étude
scientifique où deux groupes d’étudiants devaient lire une histoire100. Le premier groupe avait
un texte sans lien, et le deuxième groupe en avait. Il s’est révélé que ce dernier avait plus de
mal à comprendre l’histoire. En effet, pendant que ces étudiants lisaient, leur cortex
préfrontal était en train d’hésiter à cliquer sur les liens. La distraction aurait donc des
conséquences négatives sur notre mémoire. En somme, en plus de la dimension narrative, il
se pourrait que la dimension pédagogique soit affectée.
2. Lorsque la dimension ludique surpasse la dimension narrative ou éducative
Le texte est une composante majeure des histoires imprimées pour les enfants. Or, avec
l’intégration de ressources numériques, il pourrait perdre de sa valeur comme le cite
Alexandra Saemmer dans l’article de Nolwenn Tréhondart : le “rapport entre observation,
écoute, lecture et interaction [,,,] peut mettre en danger le texte comme signifiant potentiel”.
En effet, si l'objectif est d’enrichir le contenu textuel par les images animées, les sons et les
vidéos, nous faisons face à une réflexion majeure : le texte ne se suffirait-il pas à lui-même ?
Dans certains cas, il peut même y avoir une confusion lorsque les autres médias interactifs
surpassent le texte. De ce fait, la dimension ludique et distractive serait renforcée au
détriment de la dimension narrative.
Cette problématique a été constatée par Nicolas Esposito lors des tests utilisateurs pour
l’adaptation enrichie du livre Mon voisin. L’objectif était de faire une comparaison entre
98 Barbagelata, P., Inaudi, A., & Pelissier, M. (2014). Le numérique vecteur d’un renouveau des pratiques de lecture : leurre ou opportunité ? Études de communication, (43), 17–38. https://doi.org/10.4000/edc.5965 99 Carr, N. (2010). The Shallows: What the Internet is Doing to Our Brains. W. W. Norton. 100 Carr, N. (2010). The Shallows: What the Internet is Doing to Our Brains. W. W. Norton.
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l’utilisation du livre imprimé avec un CD audio, et la version numérique. Les résultats ont
montré l’importance de bien réfléchir à la finalité du produit : alors que certains enfants ont
préféré la version papier, ceux qui se sont intéressés n’ont pas fait attention à l’histoire. En
effet, les illustrations et les enrichissements ont pris le dessus. “Certains d’entre eux sont
même passés à la page suivante sans attendre la fin de la lecture de la page”, a écrit Nicolas
Esposito101. De plus, les enfants ayant interagi avec les enrichissements ont avoué qu’ils
auraient préféré un jeu vidéo. Cela prouve que la narration n’a pas été perçue comme la
dimension principale ; or, puisque que l’adaptation ne visait pas non plus à être un jeu, la
dimension ludique n’a pas été aussi forte pour susciter de l’intérêt chez les “joueurs”.
Un autre risque est de produire un contenu numérique qui n’apporte pas de renforcement
particulier sur les dimensions. Par exemple, la réalité augmentée peut susciter de
l’émerveillement dans ses premières utilisations ; cette ingénierie de l’enchantement peut
faire oublier les dimensions trop techniques et enrichir la narration102. Or, si la ressource
numérique est associée au magazine imprimé, la fascination devrait avoir un sens quant au
contenu textuel et illustré de ce magazine. Une logique purement distractive ou ayant
simplement pour but de retenir l’attention risquerait de confondre l’utilisateur dans son
expérience.
Selon Nolwenn Tréhondart, il se peut que l’interactivité soit perçue comme un gadget103.
Alors que les plus produits et les cadeaux ont été courants pour la vente de magazines dans
les kiosques104, il y aurait un risque de voir émerger des publications numériques à forte
finalité de marketing plutôt que pour l’enrichissement narratif ou ludo-éducatif de l’enfant.
Nolwenn Tréhondart prévient qu’il pourrait y avoir une pression des tendances dans
l’édition du livre enrichi à “intégrer la course à la vitesse, l’hyperconsommation d’expériences
éphémères, les idéologies du jeu et du gratuit”105.
Ainsi, les éditeurs laissent souvent le choix à l’utilisateur : les QR codes viennent
complémenter l’expérience utilisateur, mais ils ne sont généralement pas une nécessité. Cela
nous démontre que dans la plupart des cas, le magazine imprimé reste le produit principal ;
quant à la ressource numérique, elle se présente souvent comme un supplément enrichissant.
101 Esposito, N. (2019). Comparaison de l’activité de lecture entre un livre imprimé et son adaptation numérique enrichie, expérimentation et analyse des dimensions de l’expérience utilisateur. Publije, no 1. http://revues.univ-lemans.fr/index.php/publije/article/view/140/134 102 Tréhondart, N. (2018). Pratiques de conception du livre numérique enrichi : enjeux idéologiques et créatifs. Interfaces numériques, 7. https://www.unilim.fr/interfaces-numeriques/3619 103 Tréhondart, N. (2013). Le livre numérique enrichi : un hypermédia en construction. Enquête sur les représentations des éditeurs. H2PTM. https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01548478 104 Charon, J. (2002). La presse des jeunes. Paris: La Découverte. https://doi.org/10.3917/dec.charo.2002.01 105 Tréhondart, N. (2018). Pratiques de conception du livre numérique enrichi : enjeux idéologiques et créatifs. Interfaces numériques, 7. https://www.unilim.fr/interfaces-numeriques/3619
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B. La nouvelle identité de la presse jeunesse
En marketing, le positionnement fait référence à la position qu’occupe un produit ou une
marque. Étant donné que de nombreuses éditions se sont mises à la publication d’offres
numériques, il est intéressant de voir comment la place et l’identité du magazine jeunesse
est perçue. Cette analyse va nous permettre de comprendre à quel degré les pratiques
éditoriales se transforment pour se centrer davantage sur la conception centrée utilisateur
pour les écrans.
1. Dans quels cas le magazine imprimé reste-il le produit principal ?
Avec la popularisation d’Internet et des réseaux sociaux dans les années 2000, le secteur
de l’édition presse s’est retrouvé avec un potentiel de numérisation complète. Or, avec la
baisse des abonnements, des réflexions ont été faites sur les pratiques éditoriales. Pour suivre
les usages actuels, Daniel Nylén, Jonny Holmström et Kalle Lyytinen citent que les éditeurs
se sont mis à intégrer le design industriel et interactif en plus du design graphique 106.
Il y aurait non seulement une motivation de satisfaire l’expérience utilisateur avec les qualités
de l’interface écran, mais aussi de promouvoir la marque du magazine. Les offres numériques
sont aussi un enjeu marketing. Frédéric Gargaud, responsable du projet pour Pif le Mag,
révèle sa vision du magazine : “La bataille de l’attention ne se joue pas avec Okapi ou Le
Journal de Mickey, mais avec YouTube”107. En effet, des préoccupations quant au devenir du
magazine ont surgi : si l’on peut consulter un article sur Internet, quelle est la place du
support papier ? Pourtant, suite à l’étude de mon corpus, il se trouve que le magazine
imprimé reste souvent le produit principal.
106 Nylén, D., Holmström, J., & Lyytinen, K. (2014). Oscillating Between Four Orders of Design : The Case of Digital Magazines. Design Issues, 30(3), 53–68. https://doi.org/10.1162/desi_a_00278 107 Bougon, F. (2018). “Pif” prépare son retour, sans gadget. Le Monde. https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2018/06/23/pif-prepare-son-retour-sans-gadget_5320023_3236.html?xtor=RSS-3208
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La ressource numérique : un bonus au magazine papier
Lors des interviews aux professionnels de l’édition, j’ai appris que les contenus numériques
de Toboggan, Baïka et Mini-Schools étaient considérés comme des offres supplémentaires
au magazine. Ainsi, ce dernier est le produit principal : celui sur lequel l’édition se focalise le
plus.
Dans le cas de Toboggan, Axel Planté-Bordeneuve précise que les jeux interactifs et les
activités créatives du site web sont surtout un cadeau, une offre pour les personnes
souhaitant découvrir l’univers et les personnages plus en détail. Pour Mini-Schools, Olivier
Jughon cite que “ce n’est pas un magazine à visée numérique”, puisque l’objectif principal
est de donner un magazine papier sans que les enfants soient obligés de passer par la réalité
augmentée. Enfin, pour Baïka, les ressources numériques sont tirées du magazine papier.
Noémie Monier ajoute également la volonté de donner plus de visibilité grâce au web. En
effet, les qualités des réseaux sociaux tels que YouTube et WhatsApp lui ont permis de
diffuser les histoires audiovisuelles aux enseignants et à ses amis : “L’idée était aussi de
maintenir une présence, de proposer du contenu sympa gratuitement et éventuellement de
réussir à avoir de nouveaux abonnés”, ajoute-t-elle.
Nous constatons alors que les publications numériques ont un double objectif : le premier est
d’enrichir l’expérience utilisateur des personnes sur les aspects ludo-éducatifs, narratifs,
sociaux ou créatifs. Le deuxième est d’avoir une meilleure visibilité sur le magazine imprimé.
En effet, puisque les ressources web sont faciles d’accès, de nouveaux visiteurs peuvent les
utiliser et peut-être s’intéresser au magazine imprimé, qui offre une expérience plus complète
sur les différentes dimensions. De plus, ceux qui sont déjà abonnés au magazine auraient
également l’intérêt de découvrir d’autres offres, comme le précise Axel Planté Bordeneuve.
Par exemple, l’enfant étant déjà familiarisé aux jeux papier du chien Super-Ouaf pourra
également jouer la version interactive sur le site de Toboggan.
Lorsque la première finalité concerne le numérique
Suite aux interviews avec Christophe Coquis (Geek Junior) et Alastair Macdonald (WoW!
News), j’ai appris que les ressources numériques avaient une place aussi importante que le
magazine papier. Cela pourrait s’expliquer par leur intention initiale : celle de créer un média
numérique.
À l’inverse des magazines Baïka, Mini-Schools et Toboggan, le magazine papier de Geek
Junior et de WoW! News a été un projet décidé suite à la diffusion des articles web. Il est
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donc intéressant de comprendre la raison de cette nouvelle offre : Alastair Macdonald
explique la volonté des familles et des enseignants de recevoir les informations de WoW!
News sur papier. Pour Christophe Coquis, après cinq ans de publications sur le site web, son
objectif était d’enrichir Geek Junior en tant que média d’information. De plus, les retours
positifs des internautes lecteurs et des professionnels sur la création du magazine l’ont
motivé à intégrer cette voie éditoriale.
Cette constatation nous prouve que la demande est forte pour le magazine imprimé, même
lorsque des publications numériques sont déjà accessibles. Cela voudrait dire que le support
imprimé reste une valeur essentielle qui séduit l’audience. La perception du public sur Geek
Junior et WoW! News se pose alors : pensent-ils plutôt au magazine imprimé comme étant
le produit principal de ces marques ?
Selon Christophe Coquis, le positionnement n’est pas encore établi parce que Geek Junior
est constamment en évolution. En effet, le numéro de septembre 2021 change de formule
avec l’intégration des QR codes pour faciliter l’utilisation. Il cite que le magazine est
considéré comme produit principal, tandis que le site web donne une exposition de Geek
Junior : c’est grâce à lui que de nouveaux internautes peuvent s’intéresser au magazine
papier et s’abonner. Pour Alastair Macdonald, lorsqu’il mentionne les produits qui seront
exposés sur le site web, il cite l’application WoW! News, et le magazine comme élément
accessoire. Même si l’application reste le produit principal depuis la diffusion du projet,
Alastair Macdonald évoque l’idée de combiner les deux produits : “L’idée pour l’instant, c’est
de proposer un abonnement à l’application ; les infos hebdomadaires seraient plus ou moins
liées à un abonnement annuel qui serait accompagné par l’envoi du magazine”. Ainsi, cette
offre bimédia peut permettre au papier et au numérique de cohabiter mutuellement dans la
vie du lecteur. Nous pouvons donc supposer que le magazine imprimé et la ressource web
ont un positionnement égal grâce à leur complémentarité.
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Touk Touk, un univers de contenus ludo-éducatifs : la conception du site pour présenter
les différents produits
Le produit principal de Touk Touk est son magazine. Or, l’enjeu du nouveau site web est de
présenter une multitude de produits : les carnets d’expédition, les kits d’activités, mais aussi
le podcast d’histoires et les activités sous formes d’articles web et de documents PDF (dans
la rubrique nommée Loisirs créatifs). L’objectif de Florie Deswaziere est de présenter un
ensemble de produits ludo-éducatifs sur le voyage, les cultures du monde et l’environnement.
Dans ce cas, comment réunir tous ces éléments dans le même espace, en soulignant à la fois
l’importance du magazine papier ? Lors de la conception du dossier de conception, en
m’informant sur les avis de Florie Deswaziere pour la refonte du site, j’ai appris que deux
objectifs étaient à prévoir :
● Objectif principal : Présenter Touk Touk pour inciter les parents à abonner leurs
enfants à un magazine centré sur le voyage et l’écologie.
● Objectif secondaire : Proposer des médias pour les abonnés (podcasts, articles,
activités) qui enrichissent l’identité de Touk Touk. En effet, le magazine intègre divers
types d’interactions pour une expérience encore plus ludique.
Alors que l’ancien site était surtout focalisé sur le premier objectif, la refonte devrait
renforcer l’objectif secondaire : mettre en visibilité les ressources web au grand public. Florie
Deswaziere a également utilisé la notion d’univers pour représenter cet ensemble ludo-
éducatif. C’est pourquoi le titre du site conçu par la responsable SEO Inga Penverne est
devenu : L’Univers Touk Touk | Voyage et Écologie pour les Enfants. Nous constatons que le
mot magazine n’y est pas inclus ; Touk Touk vise une image plus large, puisque le magazine
est un produit parmi d’autres, même si c’est celui qui est le plus visible.
Ainsi, il était important de réfléchir à l’arborescence du site web. Par définition,
l’arborescence est une organisation hiérarchique des informations. La conception d’un site
web fait généralement appel à une représentation par branches, pour bien situer la
hiérarchie. Cette conception m’a permis de mieux comprendre le positionnement des produits.
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Figure 34 : Arborescence initiale pour le site web Touk Touk
En sachant que le magazine serait le plus mis en avant, il était essentiel de le mettre en
première position.
La page d’accueil a également été conçue comme une vitrine des contenus Touk Touk. En
premier lieu, lorsque l’utilisateur atterrit pour la première fois sur le site web, il observe une
série de magazines. Cet aperçu lui donne directement l’information de l’identité principale
de Touk Touk : un magazine jeunesse. Or, le slogan affiché en grand est : “Faites découvrir
la France, le monde et la nature à vos enfants !”. Ici non plus, le mot magazine n’est pas
inclus. Il y a donc une forte volonté de montrer les valeurs de Touk Touk, qui sont tout aussi
importantes pour se démarquer des autres produits éditoriaux.
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Figure 35 : Page d’accueil de Touk Touk
Figure 36 : Présentation des produits sur la page d’accueil de Touk Touk
En défilant la page d’accueil, nous découvrons les quatre produits principaux ; cela montre
au visiteur que Touk Touk propose non seulement son magazine imprimé, mais aussi d’autres
produits ludo-éducatifs avec les mêmes thématiques du voyage, des cultures et de l’écologie.
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C’est donc par le site de Touk Touk que son positionnement est affiché. Puisque les
internautes découvrent souvent les produits des éditions par les réseaux sociaux ou les sites
web, il est important de montrer la relation entre le magazine imprimé et les ressources
numériques pour bien clarifier les offres de l’édition.
2. Les hypothèses sur le futur du magazine jeunesse
À quoi ressemblera le magazine du futur ? Malgré la quête d’innovation des éditions de
presse jeunesse, il est difficile d’avoir une réponse bien définie. Comme l’explique l’article du
MIT Press Direct, le numérique présente aux concepteurs du magazine un nouveau monde,
où il n’y a pas de chemin singulier en termes de design108. Toutefois, il est intéressant
d’explorer quelques hypothèses en prenant en compte les méthodes actuelles et les avis des
éditeurs.
En premier lieu, plusieurs professionnels s’accordent sur une vision précise : le magazine
papier continuera à survivre. En effet, selon Axel Planté-Bordeneuve (Toboggan), la
publication imprimée aura toujours un intérêt. L’expérience de recevoir tous les mois son
magazine dans la boîte aux lettres est un plaisir difficilement réplicable par le numérique.
Dans l’interview pour France Culture, Patrick Eveno donne l’argument que les magazines
sont plus agréables à lire sur papier que sur écran109. Christophe Coquis (Geek Junior) cite
que c’est “un élément physique de culture” qui reste apprécié par les jeunes. Il précise
cependant une nécessité d’avoir de nouvelles approches, avec des contenus s’adressant au
quotidien du lecteur : “Le papier n’est pas mort, il faut juste le dynamiser un peu”.
Or, nous pouvons cerner quelques doutes sur la distribution chez les marchands de journaux.
Christophe Coquis fait part de son hésitation à faire distribuer son magazine Geek Junior
en kiosque, car la vente chez les marchands de journaux s’avère compliquée, surtout depuis
la crise du Covid-19. En effet, même si le magazine jeunesse a beaucoup mieux résisté que
les autres types de presse, l’épidémie a grandement modifié les pratiques, autant chez les
éditions que chez les lecteurs. Par exemple, Marie-Anne Denis (Milan Presse) mentionne un
fort accroissement de visites sur le site 1jour1actu.com : anciennement à 250 000 visites par
mois, la fréquentation est passée à un million depuis le confinement. Cela s’explique aussi
par le fait que les enseignants ont utilisé le site comme moyen éducatif, notamment “pour
108 Nylén, D., Holmström, J., & Lyytinen, K. (2014). Oscillating Between Four Orders of Design : The Case of Digital Magazines. Design Issues, 30(3), 53–68. https://doi.org/10.1162/desi_a_00278 109 Moghaddam, F. (2020, 5 mai). Presse en confinement : "La victoire définitive du numérique sur le papier". France Culture. https://www.franceculture.fr/medias/presse-en-confinement-la-victoire-definitive-du-numerique-sur-le-papier
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expliquer la crise à leurs élèves”110. Nous voyons donc à quel point un événement inattendu
tel que la crise sanitaire peut impacter les futurs usages.
Justement, depuis mars 2020 où a été imposé le premier confinement, l’utilisation massive
des visioconférences a été constatée dans la société, pour compenser le manque de distance
physique. Cette pratique influencera-t-elle les éditions de presse ? Bayard Jeunesse s’est mis
au jeu en organisant des ateliers de cuisine et de bricolage, sur des vidéos en direct suivis
par plus de 10 000 enfants en live, comme le confirme Nathalie Becht111. Cette utilisation
des réseaux sociaux incite à la réflexion : en quoi les vidéos en livestream auraient un lien
avec le magazine ? Les dimensions sociales et créatives, valeurs déjà promues par les
publications jeunesse, pourraient renforcer l’expérience de l’enfant. D’un autre côté, il
semblerait que ce soit la marque de l’édition qui soit mise en avant, plutôt que le magazine.
À l’avenir, il se pourrait donc que les éditeurs établissent un lien plus rapproché avec leurs
abonnés, dans le cas où ils se diffuseraient en direct pour interagir avec le public.
Si les éditions cherchent à innover constamment, c’est aussi parce qu'elles prédisent une
concurrence de plus en plus rude face aux écrans. Il y a un enjeu de survie, comme le constate
Patrick Eveno, en conseillant de produire d’autres supports que le papier112. En tant que
média, le magazine imprimé est confronté à d’autres techniques de diffusion plus
instantanées. Les réseaux sociaux sont un parfait exemple d’utilisation par la jeune
génération. Les éditions de presse se servent de ces outils pour communiquer à leur audience
et promouvoir leurs magazines. Serait-il possible de voir une émergence de format instantané
présenté comme un magazine ? Christophe Coquis envisage de collaborer avec la startup
Zmooz113, pour diffuser des stories de Geek Junior. Le mot anglais story signifie “histoire” et
est largement employé dans l’univers des réseaux sociaux tels qu’Instagram ou Snapchat :
présentées comme une collection de contenus photos et vidéos, les stories sont rapides et
interactives ; elles se consultent souvent en mode vertical adapté au téléphone.
La question de visibilité s’applique aussi, surtout pour les petites éditions. Avec cette
contrainte, Alastair Macdonald mentionne la volonté de créer un produit durable avant
tout, comme l’application Wow! News. Il y aurait donc une motivation de se démarquer, de
110 Rodier, J. (2020, 23 octobre). Forte de ses abonnements, la presse jeunesse peu touchée par la crise sanitaire. La Revue des Médias. https://larevuedesmedias.ina.fr/abonnements-presse-jeunesse-peu-touchee-par-la-crise-sanitaire 111 Rodier, J. (2020, 23 octobre). Forte de ses abonnements, la presse jeunesse peu touchée par la crise sanitaire. La Revue des Médias. https://larevuedesmedias.ina.fr/abonnements-presse-jeunesse-peu-touchee-par-la-crise-sanitaire 112 Moghaddam, F. (2020, 5 mai). Presse en confinement : "La victoire définitive du numérique sur le papier". France Culture. https://www.franceculture.fr/medias/presse-en-confinement-la-victoire-definitive-du-numerique-sur-le-papier 113 Zmooz. https://www.zmooz.com/francais-france
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proposer des offres innovantes en accord avec les besoins de l’enfant. Il est intéressant de
constater que chaque édition de presse envisage un produit différent : cela montre la
diversité de la presse. Tout comme les magazines qui ciblent désormais un secteur de niche,
il serait également possible d’envisager des contenus uniques, d’où l’importance d’explorer
ces futurs contenus au cas par cas.
Lors de ma conversation avec Florie Deswaziere au cours de mon stage, j’ai appris que
Hippopo Éditions avait pour intention de développer une application Touk Touk. Elle
mettrait en scène les héros Tim, Gaïa et Touk dans différents pays du monde, pour résoudre
des enquêtes. Présenté sous forme de jeu vidéo pour la tablette ou le smartphone, l’enfant
pourrait à la fois se divertir et développer ses capacités de réflexion. Cela montre une volonté
de renforcer la dimension ludo-éducative, mais aussi de fortifier le manifeste de Touk Touk
comme univers de contenus aux valeurs de l’environnement et du voyage.
Avec l’accumulation de produits numériques, il serait intéressant de se demander si le
magazine passerait en second plan, dans le long terme, ou au même rang que le restant des
ressources. Cette question se pose aussi pour les éditions concevant des livres enrichis :
l’identité éditoriale changerait-elle pour se rapprocher du studio d’animation ? En voyant
que les albums jeunesse numériques se déploient sous forme d’application, cela nous fait
repenser à l’identité même de l’album. Quant aux ressources humaines, les éditions de presse
jeunesse intégreraient plus de développeurs et de designers d’expérience utilisateur (ou UX
Designers).
De nouvelles formes de lecture et d’usages
Le numérique a bouleversé nos pratiques quotidiennes. Alors, l’idée que de nouvelles lectures
puissent émerger n’est pas à négliger. Selon Nolwenn Tréhondart, il y a un intérêt de
commencer à enquêter sur les expériences de lectures, pour permettre éventuellement aux
éditeurs d’envisager “un modèle de lecteur plus libre et audacieux”.
Nous pouvons du moins prédire que les éditions de presse jeunesse accorderont toujours une
grande importance aux usages de la société, car elles évoluent en même temps qu'elles. Le
magazine étant une publication périodique, il y a le grand enjeu de prendre part à l’actualité.
Axel Planté-Bordeneuve cite qu’il s’agit plus de suivre les évolutions de la société plutôt que
de la devancer. En observant les futurs projets envisagés par les éditions, nous constatons
qu’ils correspondent aux usages actuels de la jeunesse : le futur jeu numérique de Touk Touk,
l’application informative de WoW! News et le passage aux QR code pour Geek Junior,
prouvent l’envie d’innover tout en répondant aux besoins du présent.
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Cela implique un parcours riche en expérimentations. De même que le livre est un format
qui exploite les potentialités de l’écriture numérique114, le magazine serait lui aussi en cours
de nouvelles explorations grâce à sa qualité de média. Comme le décrit Christophe Coquis,
“il faut expérimenter beaucoup”, en précisant qu’il est lui-même passé par ce processus avec
Geek Junior. C’est donc avec optimisme que les éditions de presse perçoivent le futur du
magazine jeunesse, véritable média d’accompagnement pour la jeune génération.
114 Tréhondart, N. (2014). Le livre numérique « augmenté » au regard du livre imprimé : positions d’acteurs et modélisations de pratiques. Les Enjeux de l'information et de la communication, 15/2(2), 23. https://doi.org/10.3917/enic.017.0023
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96
Conclusion
L’objectif de ce mémoire est d’analyser en quoi le magazine jeunesse aurait besoin
de ressources numériques et interactives pour renforcer ses dimensions de l’expérience
utilisateur. Pour ma recherche qualitative, j’ai analysé un corpus de 8 magazines jeunesse et
leurs ressources numériques. Parmi ces magazines, j’ai pu en savoir plus sur les finalités
éditoriales grâce à 5 interviews avec les professionnels de l’édition. Enfin, mon stage à
Hippopo Éditions pour le magazine Touk Touk a également servi à réfléchir sur la
conception des pages intégrant des QR codes et du site web servant à la fois de vitrine et
de répertoire de documents numériques.
D’après l’étude du corpus, il est nécessaire de connaître les finalités de l’édition pour
déterminer en quoi les ressources numériques vont renforcer les dimensions de l’expérience
utilisateur en plus du magazine imprimé. Dans la plupart des cas, les dimensions principales
sont narratives et ludo-éducatives, et sont supportées par les dimensions sociales, créatives
et ergonomiques ; par leurs apports audiovisuels et interactifs, les ressources numériques ont
souvent pour but d’enrichir l’expérience utilisateur, soit sur le magazine imprimé par les QR
codes ou les applications de réalité augmentée, soit par d’autres produits externes ayant un
lien avec la ligne éditoriale.
Par conséquent, la publication imprimée et la ressource numérique sont souvent dans la
complémentarité. Pourtant, tous les magazines étudiés dans le corpus peuvent se lire
indépendamment des ressources numériques, ce qui laisse une liberté de contrôle. Dans
plusieurs cas, le magazine imprimé est le produit principal, tandis que le contenu numérique
est un bonus ; ce dernier peut offrir des informations supplémentaires alors que la version
imprimée est limitée par ses couvertures. Dans ce cas, le magazine papier n’a pas forcément
besoin du numérique, mais ce dernier vise à enrichir l’expérience pour ceux qui le désirent.
Dans d’autres cas, les ressources numériques font partie des produits principaux de l’édition
et sont donc essentielles. Le magazine imprimé serait alors un objet avec pour finalité
d’apporter une expérience autre que celle des écrans : une expérience de lecture plus
autonome, sans l’intervention d’un autre dispositif. Grâce à sa qualité intemporelle, plusieurs
éditions sont confiantes sur le fait que la publication papier continuera à survivre. De ce fait,
le magazine jeunesse ne change pas d’identité, mais il se dynamise à la fois pour répondre
aux usages de la jeune génération et augmenter sa visibilité. L’enjeu de l’impératif créatif
est d’autant plus important face à la concurrence des plateformes sur écran. Or, plusieurs
éditions de presse utilisent les médias tels que YouTube pour offrir leurs ressources.
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97
Cette recherche s’est focalisée sur les intentions des éditions. Or, pour vraiment compléter
l’analyse de la problématique, il serait intéressant de connaître le point de vue du lecteur et
de l’utilisateur. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour évaluer son expérience
sur le magazine et sa relation avec la ressource numérique. Par exemple, un utilisateur
pourrait penser qu’un QR code est indispensable tandis que l’édition voit cela comme un
supplément, et vice-versa. Des tests utilisateurs seraient donc nécessaires afin de mieux
connaître leurs parcours.
Enfin, avec l’inclusion progressive d’offres numériques par les éditions de presse jeunesse, il
devient important de réfléchir à la conception centrée utilisateur sur les enfants. Ceux-ci
grandissent avec l’usage des écrans et ont des attentes qui correspondent à leur tranche
d’âge. Le design d’expérience utilisateur centré sur les enfants est donc une pratique qui
pourrait bientôt s’accroître chez les éditions. Avec cette perspective, le secteur jeunesse a de
grandes opportunités d’innovation pour enrichir le parcours de la nouvelle génération.
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
98
Bibliographie
La presse magazine
La presse jeunesse
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Gaumer, P. (2020-2021). La Bande dessinée sur le territoire francophone européen. Le
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Ouvry-Vial, B. (2020-2021). L'album de littérature de jeunesse, point de vue graphique et
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Le corpus
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Hippopo Éditions. https://hippopoeditions.com/
Bayard Jeunesse. https://www.bayard-jeunesse.com/
Milan presse: Abonnements magazines pour enfants, presse Jeunesse, livres et revues.
https://www.milanpresse.com/
Magazines et chansons en anglais pour enfants - Mini-Schools. https://mini-
schools.com/boutique/
Unique Heritage Media - Des médias pour les nouvelles tribus.
http://www.uniqueheritage.fr/fr/
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103
Sites web des magazines jeunesse et des produits numériques
Univers Touk Touk | Voyage et Écologie pour les Enfants. https://www.touk-touk.com/
Geek Junior - Le webmag des ados connectés. Apps, jeux vidéos... https://www.geekjunior.fr/
Toboggan, Abonnement Magazine enfant, Magazine 5 à 8 ans. https://www.toboggan-
magazine.com/
J’aime lire : Abonnement magazine enfant de 6 à 13 ans. https://www.jaimelire.com/
National Geographic Kids. https://kids.nationalgeographic.com/
Accueil - Wow! News. https://wow-news.eu
Le Journal de Mickey: Home. https://www.journaldemickey.com/
Bayam - L’appli ludo-éducative des 3-10 ans. https://bayam.tv/fr/
Baïka Magazine Du voyage à chaque page. https://baika-magazine.com
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Annexes
Annexe 1 : Tableau récapitulatif des dimensions sur l’expérience utilisateur
1) Le magazine imprimé et ses dimensions principales sur l’expérience utilisateur :
Dimension narrative
Dimension ludo-éducative
Touk Touk
Histoires du magazine : La Famille
Nomade, Pépino et Pomme de pin,
la BD de Tim, Gaïa et Touk, La
Grande Histoire...
Reportages animaliers, Us et Coutumes,
Documentaires sur la nature et la
biodiversité, cartes des pays.
Ces pages sont accompagnées de mini-
jeux et de quiz.
Baïka
Mythes et légendes d’ailleurs, BD
(Les voyages de Max et Némo,
Les Krobs)...
Interviews d’enfants (Les Aventuriers du
Mappemonde), documentaires,
reportages ludiques, jeux, recettes de
cuisine.
Geek Junior
Il n’y a pas d’histoires fictives ;
l’aspect narratif se déroule sur des
faits réels et l’actualité,
notamment dans la rubrique La
photo du mois.
Pages d’articles sur la Génération Geek :
l’actualité, les recommandations de livres,
le dossier spécial, des conseils numériques
pour le collège, plus un cahier pour les
parents. Une diversité de tutoriels (Les
Tutos) sur le numérique, un quiz et des
jeux.
Mini-Schools
Histoires, comptines et bandes
dessinées en anglais.
Des rubriques en anglais sur la culture
générale et des jeux : des documentaires
sur les animaux, la nature, les pays...
Toboggan
Histoires et bandes dessinées
(Super-Ouaf raconte, La Planète
des Grouillons, Avni, La famille
Excalibrius)...Un roman de 16
pages est inclus sous forme de
livret.
Documentaires (Le docu dessiné),
l’actualité (L’agenda Super-Ouah), les
jeux et les blagues, et Les Enquêtes de
Super-Ouaf et La puce pour exercer son
sens de la déduction.
Wow! News
Narration optimiste de faits réels
avec des solutions, sur l’actualité
et les personnes inspirantes.
Documentaires, reportages et interviews
sur l’environnement, les sports, la science,
la santé, et des héros / héroïnes qui
inspirent au changement. Jeux et quiz.
J’aime lire
Un roman, des bandes dessinées
(Ariol, Anatole Latuile, La
cantoche).
Jeux (Les jeux de Bonnemine), des pages
d’information sur l’actualité (Bonnemine
Mag).
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105
Le Journal de
Mickey
Bandes dessinées des personnages
Disney, ainsi que Ducobu, Les
Profs, Les P’tits Diables, Titeuf,
Boule et Bill...
Reportages sur l’actualité, dossiers et
fiches d’encyclopédies, jeux.
National
Geographic Kids
Bande dessinée sur un explorateur. Grand dossier sur la vie des animaux,
rubriques ludiques (Guinness Book des
records, Incroyable mais
vrai)...Documentaires sur l’histoire et la
nature.
2) Les ressources numériques et leurs dimensions principales sur l’expérience
utilisateur :
Dimension narrative
Dimension ludo-éducative
Touk Touk
Podcast Touk Touk d’histoires
audio sur le site web, YouTube et
les plateformes audio (Spotify,
Acast)
Rubrique du site web des Loisirs Créatifs :
articles et PDFs à télécharger sur le
bricolage, les expériences, le yoga, les
recettes et les jeux.
Baïka
Histoires racontées des Mythes et
légendes d’ailleurs sur le site web
et YouTube. Vidéos illustrées.
Activités à télécharger sur le site web :
pages du magazine imprimé sur les jeux,
les recettes et le bricolage.
Geek Junior
Le site web n’a pas vraiment de
dimension narrative car il a une
intention plutôt centrée sur
l’information (découverte de livres,
de jeux vidéo et d’applications)
avec un enjeu plus descriptif et
explicatif.
Articles sur l’actualité du numérique (les
sorties de mangas, les jeux vidéos), mais
aussi des tutoriels et articles
pédagogiques (rubriques Éducation et
Coding).
Mini-Schools
Magazine en réalité augmentée
pour accéder aux ressources
audiovisuelles (dans le but
d’écouter le texte écrit sur la
publication imprimée).
Pas de finalité ludo-éducative, car la
réalité augmentée vise surtout à faciliter
l’écoute audio, avec des éléments vidéo.
Toboggan
Outil de création de BD (Crée ta
BD avec Avni) : l’enfant conçoit sa
propre narration avec le
personnage de Toboggan. Quant
aux enquêtes interactives de
Super-Ouaf, une histoire est
Les enquêtes interactives de Super-Ouaf
ont la même finalité que le magazine
papier : renforcer le sens de l’observation
et de la déduction tout en s’amusant. Les
jeux d’Avni sont variés (puzzles, Le duo
rapido Avni, Les 7 erreurs, etc) et ont une
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106
contée par les personnages
suspects ; la narration entre au
service de la dimension ludo-
éducative.
stimulation mentale. La dimension
créative vient également supporter
l’aspect ludique (Crée ton emploi du
temps, Crée ton poisson d’avril).
Wow! News
Les articles web de WoW! News
ont une visée informative. La
narration de faits réels s’établit,
par exemple, pour les histoires de
personnes inspirantes (Héro·ïnes).
En lisant les articles, en écoutant les
podcasts et en regardant les vidéos,
l’enfant s’informe et développe ses
connaissances sur l’actualité, la nature ou
les sciences. Des solutions aux problèmes
lui sont proposées. La future application
comprendra des quiz et des jeux
interactifs.
J’aime lire
Les ebooks sur Bayam peuvent
s’écouter avec un bouton Play. On
retrouve également des podcasts.
Des jeux dans lesquels on trouve les
personnages Ariol et Anatole sont
présents. Il y a également des vidéos sur
les expériences scientifiques, des recettes
et des activités créatives.
Le Journal de
Mickey
Des bandes dessinées se trouvent
sur le site web.
Un répertoire de Disney se trouve sur le
site web (rubrique Dico Disney).
National
Geographic Kids
Les jeux Funny fill-in permettent à
l’enfant de personnaliser une
histoire en intégrant ses propres
mots dans des textes à trous.
Une encyclopédie numérique sert de site
web, avec des vidéos, des jeux et des
articles informatifs.
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107
Annexe 2 : Retranscription des entretiens
Geek Junior - Entretien avec Christophe Coquis
Question 1 : Intéressée par vos contenus, je voudrais m’assurer que le magazine est
venu après la création du site Web, c’est bien cela ?
Christophe Coquis : Oui, tout à fait. Le site web a été créé en 2015 et c'était un projet
parallèle à mes activités professionnelles. J'ai deux adolescents qui sont en train de
commencer à être de jeunes adultes et il me semblait intéressant de proposer un contenu à
leur destination pour développer leur culture numérique et enrichir leur pratique. Alors, j'ai
continué ce site web pendant cinq ans, et ensuite j'ai voulu passer à une étape supérieure et
en faire un vrai média d'information avec la création d’une entreprise derrière et la
publication d'un magazine.
Le premier numéro est sorti au mois de mai de l'année dernière. On en est au numéro 14
actuellement. On est en train de finaliser le numéro 15 de la rentrée.
Question 2 : J'aimerais savoir quelles seraient les finalités principales du web magazine
(site web). Quelles sont ses dimensions principales ?
À la fois, on a le site web et le magazine. Le site web cible une population un peu plus large
que des collégiens, alors que le magazine est vraiment pour les collégiens (10-15 ans). Le site
web va être un peu plus large aussi, pour les jeunes adultes, les parents, et ceux qui veulent
faire une veille. L'objectif, c'est vraiment de développer la culture numérique des adolescents,
que ce soit sur le site web ou le magazine : on s'est aperçus que les adolescents avaient
souvent une pratique finalement assez pauvre du numérique, où ils vont seulement utiliser
3-4 applications sociales.
L'idée est de montrer qu'il y a d'autres alternatives, qu’il existe aussi énormément d'outils
pour développer la créativité et l'esprit critique des ados par rapport à leur propre pratique
numérique. Tout cela dans un emballage qui soit attractif, pour qu’ils n’aient pas l'impression
que ce soit un contenu trop éducatif, fait par des adultes pour expliquer aux ados comment
faire pour bien utiliser son smartphone.
Il faut trouver un équilibre entre des contenus qui soient intéressants pour développer leur
pratique numérique et des contenus plus légers. Par exemple, sur le site web, on va parler
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
108
parfois de mangas, de séries télé, ce qui n'est pas forcément le cas sur le magazine. Là, on
est un peu plus centrés sur l'aspect numérique.
Question 3 : Je voudrais savoir quels sont les avis des lecteurs sur le site web. Comment
se passe leur utilisation par rapport au magazine imprimé, et s’il y a eu des retours.
Est-ce qu'ils considèrent le site web comme un magazine?
Non, ils le considèrent comme un site web classique, où ils vont trouver des informations.
C’est un peu difficile de savoir quels sont nos lecteurs. Geek Junior, c’est une petite structure
: on est 4 à y travailler, et on n’y travaille pas en plus à plein temps, mais ça se développe.
On n'avait pas forcément de retour sur le site web. Le meilleur retour qu’on a eu, c'est quand
on a fait la campagne de financement participatif pour le lancement du magazine.
C'était une campagne sur Ulule, trois jours avant le premier confinement. C'était plutôt un
succès. On a eu avant tout des retours de personnes qui nous connaissaient déjà à travers
le site web. La plupart me disaient qu'ils étaient super contents que le site web, on en fasse
aussi un magazine, pour leurs enfants, ou des professionnels d’éducation. Le site web était
déjà une source d'information de qualité pour les ados, et offrait justement une veille
intéressante.
On a eu beaucoup de retours avec la campagne de financement participatif. Ça nous a
confirmé que ce qu'on faisait pendant cinq ans avait un intérêt. On nous disait : “Vous êtes
les seuls à proposer un contenu comme ça”.
Question 4 : Je voudrais savoir quelle place ont ces deux contenus. Est ce que, par
exemple, vous considérez que le magazine est le produit principal et le site web est une
autre source supplémentaire pour que les abonnés aient plus d'informations ? Comment
voyez-vous le positionnement?
On a un positionnement qui n’est pas encore fixe, parce que ça reste un projet évolutif : dans
le numéro de septembre, on va encore améliorer la formule du magazine. Le produit
principal, c'est le magazine d'un point de vue des ressources financières. Mais le site web est
stratégique parce que c'est lui qui nous donne aussi une exposition sur le web, de ce que l'on
fait. C’est aussi à travers le magazine qu'on va capter de nouveaux abonnés.
Au niveau éditorial, ce sont les articles sur le site web qui sont plus sur l'actualité, alors que
pour le magazine, on va avoir des contenus plus construits, plus intemporels aussi. Parfois, il
y a des news qu'on va publier dans un premier temps sur le site web, tout de suite. On va les
Emilie Tran Master 2 LIJE – Université Le Mans
109
retrouver aussi sur le magazine parce qu'on considère que les adolescents ne sont pas tout
le temps le nez à regarder l'information technologique.
Ensuite, il y a des contenus des anciens numéros du magazine qu'on va petit à petit republier
sur le site web de manière régulière. Mais il y a des articles qu’on publie sur le site web qui
ne seront jamais sur le magazine, et inversement. Ça dépend du contexte et de l'objectif du
contenu en lui-même.
Question 5 : Au niveau de l’édition, j’aimerais savoir quelles sont les différences entre
le magazine imprimé Geek Junior et l’édition des articles web sur le site ?
Sur le site web, on est vraiment plus sur le moment ; des contenus qui sont par rapport à
l’actualité. Les articles sont souvent plus courts, mais ça dépend de l’article. On va forcément
mettre beaucoup plus d'objets multimédias : une vidéo, des images, des sons... C'est beaucoup
plus enrichissant.
L’intérêt du magazine est que c’est un contenu qui est beaucoup plus structuré ; on a aussi
un manque d'espace évident du magazine. Si on peut mettre 700 signes sur une page, ou
1500 signes, on ne peut pas en mettre 1700. C'est un travail d'écriture différent, beaucoup
plus structuré, un peu plus formel aussi que sur la version web, qui est plus directe et où on
peut aussi ajouter plus de détails. Pour moi c'est complémentaire, sachant qu’on peut aussi
faire passer du magazine à des contenus sur Internet.
On avait mis en place avec la startup ArgoPlay, des contenus en réalité augmentée depuis
notre site web. Il fallait télécharger l'application et après, en scannant une page, on prévenait
le lecteur qu’il y avait un contenu augmenté. Ça pouvait être une vidéo, par exemple. C’est
un procédé qu'on va continuer à partir de septembre. Mais ça va être encore plus simple,
avec juste un QR code.
Pour le site web, c'est intéressant si on peut développer les contenus de manière différente,
notamment par rapport aux réseaux sociaux. C’est ce qu'on va faire avec la startup Zmooz
à partir de la rentrée. La plupart de nos articles vont être transformés en story : c'est un
format que les ados apprécient particulièrement. On va pouvoir automatiser nos contenus
pour créer des stories qu'on publiera après sur nos réseaux.
Question 6 : Le fait de voir la conception en réalité augmentée, je trouve que c'est très
intéressant et je me demande quels sont les apports, par exemple, de faire un magazine
imprimé en réalité augmentée vs un magazine enrichi, ou directement sur une tablette,
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avec des sons, des animations intégrées. Quelles seraient les apports sur cette
expérience?
Le fait est qu’il s’agit d’un magazine papier. Ça se conserve mieux. Le magazine papier peut
vivre sans la dimension augmentée. Ensuite, pour en faire un véritable magazine augmenté
sur une tablette, il y a un frein économique et technique pour nous.
Ça va coûter beaucoup plus cher et il faut des moyens supplémentaires. Il y a un problème
de distribution parce qu'il faut créer l'application. Il faut qu'elle soit téléchargée. Les ados
téléchargent très peu d'applications, contrairement à ce qu'on peut imaginer. On préfère
vraiment la version magazine parce qu'il y a un public d'adolescents qui y restent attachés.
On a des très bons retours par rapport au magazine papier ; notamment, plein de
professeurs documentalistes nous ont dit que c'est devenu l'un des magazines préférés des
ados au collège.
C'est plutôt bon signe parce que c'est un magazine qui traite de leur quotidien. La réalité
augmentée, c'est un plus pour nous. Pour l'instant, ça ne marchait pas très bien, tout
simplement parce qu'il fallait télécharger l'application : c'était un frein. Alors, j'allais dire une
bonne chose de cette histoire d'épidémie, c’est que tout le monde sait que c'est qu’un QR
code maintenant (rires). À partir de là, ça va être beaucoup plus simple et je pense qu'on
aura beaucoup plus d'interactivité.
On pourrait imaginer beaucoup plus de contenus comme ça : un édito sous la forme d'une
vidéo ; une critique de bouquin qu'on a mis sur le magazine. Ça permet de mettre en vidéo
pas mal de contenus : présenter un produit, un test... On va pouvoir faire beaucoup plus de
choses très sympa ; ce qu’on ne pouvait pas trop faire avant, même si ça demande du temps.
C'est une question de moyens techniques, financiers, et de distribution. Parce que même si
on met ça sur un store, je ne suis pas sûr que beaucoup téléchargent.
Question 7 : Comment pensez-vous que le magazine évoluera dans le futur ? Pensez-
vous qu’il y aura plus d'offres numériques ou est-ce que ça restera un magazine papier
?
Le magazine papier, comme tout élément physique de culture, reste un objet qui est apprécié,
contrairement à ce que l’on peut penser, par les jeunes et les ados. C’est souvent qu'on ne
leur met pas dans les mains, ou pas suffisamment. Après, on est en concurrence avec les
écrans. Néanmoins, on est sur une thématique qui est intéressante pour eux, qui traite de
leur quotidien et de problématiques concrètes qu’ils ont avec leurs appareils.
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Au niveau de l’évolution, je vois avec Geek Junior qu’on va développer des outils pour faire
des liens entre le site web, le magazine et que les deux fonctionnent ensemble. Je pense qu’il
ne faut pas opposer l’un à l’autre. Ça peut être très complémentaire, il faut expérimenter
beaucoup : on a commencé des choses, ça ne marchait pas. On a laissé tomber, on en refait
d’autres, on expérimente (rires) !
La difficulté, c’est surtout pour des éditeurs indépendants. On ne fait pas partie d'un groupe
; il faut trouver la visibilité parce qu’on est face à des grands groupes mainstream qui ont
des moyens infiniment plus importants que les nôtres et qui ont des canaux de promotion
qui leur sont facilement ouverts.
On a eu des retours presse, mais c’était limité alors qu'on est un magazine novateur. On a
un problème de visibilité, et c'est souvent le problème des petits éditeurs. Après, il y a aussi
la distribution chez les marchands de journaux qui, à mon avis pour la presse magazine, va
être de plus en plus compliquée. On hésite à distribuer le magazine chez les marchands de
journaux. On est en train de réfléchir à ça.
C'est compliqué, outre le fait qu’il y a une épidémie en ce moment. Je pense qu’il y aura
toujours un public comme la presse en général, mais il peut être de plus en plus restreint sur
le long terme. Pour Geek Junior, on sait qu’on va s'adresser à un certain public déjà averti
qui a déjà probablement un ou deux magazines sur lequel ils sont abonnés, qui a une culture
du papier dans la maison, que ce soit des livres ou des magazines.
Cette culture du papier a tendance à disparaître de plus en plus, même si la presse jeunesse
est une des presses qui résiste le mieux, notamment par rapport à la crise actuelle. On essaye
de proposer un produit mixte et bimédia, parce que c'est avec le site web qu'on fait découvrir.
Pour les plus curieux, on essaye de leur proposer quelque chose qui soit pérenne dans le
temps.
Je me rappelle quand j'étais gamin, j’achetais GEO. J'adorais les collectionner, parce qu’on
pouvait les garder et revenir sur un magazine deux ans après. C’était toujours aussi
intéressant. Le papier n’est pas mort, il faut juste le dynamiser un peu, comme on le fait avec
une approche un peu plus multimédia, et surtout proposer des contenus qui s'adressent au
quotidien du lecteur.
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Baïka - Entretien avec Noémie Monier
Question 1 : Comment est née l'idée de concevoir les ressources sonores et audiovisuelles
du magazine Baïka et quelles sont leurs finalités principales pour les enfants?
Noémie Monier : L'idée est venue pendant le premier confinement ; on s'est retrouvés avec
tous nos ateliers pour enfants annulés. Les librairies et les écoles étaient fermées. Donc, on
a développé ça d'abord pour essayer de proposer des choses sur nos réseaux sociaux et
maintenir une présence, et pour se joindre à l'effort collectif, de plein de gens qui visaient à
proposer des activités pour les enfants. Nous-même on était bloqués chez nous avec nos
enfants et on savait à quel point ce n'était pas évident de les occuper pendant qu'on essayait
tant bien que mal de travailler.
On a vu un peu tout ce qui tournait sur le web à ce moment-là. On a voulu participer à cet
élan collectif ; on s’est dit qu’on avait certaines choses qu'on pouvait valoriser. Les histoires
racontées sont venues parce qu’on avait autour de nous un vivier de gens, d’amis, qui étaient
intéressés, ou qui s'ennuyaient parce qu'ils ne pouvaient plus travailler. On a un copain
réalisateur qui nous a proposé de réaliser les vidéos parce que ça l'intéressait. Au fur et à
mesure, il y a d’autres amis qui nous ont proposé de poser leurs voix : de jeunes comédiennes
et comédiens. Et donc, on a fait quatre vidéos.
Question 2 : Comment se passe l’utilisation des abonnés sur les vidéos, par rapport aux
magazines imprimés? Dans quelle mesure font-ils partie du magazine? Est ce qu'il y a
un rapprochement ?
Ce sont les histoires tirées du magazine. Je n’ai pas eu de retours de nos abonnés là-dessus.
On a fait tourner les vidéos à tous les enseignants qu'on connaissait, sur WhatsApp. L'idée,
c'était plutôt que ce soit viral. Pour le coup, on ne s’adressait pas du tout à nos abonnés.
C'était bien au-delà de ce cadre-là. L'idée était aussi de maintenir une présence, de proposer
du contenu sympa gratuitement et éventuellement de réussir à avoir de nouveaux abonnés,
dans un moment où on ne pouvait plus vendre d'animation ni de magazines en librairie.
Question 3 : Je suis assez intéressée par la dimension sociale vis-à-vis de ces contenus-
là. Les personnes qui écoutent les histoires auraient-elles plus tendance à les écouter
en autonomie ou bien avec leurs parents / d’autres enfants?
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Je n’en ai aucune idée. L'idée de ces histoires audio, c'est que les enfants puissent les écouter
en autonomie. Quand je propose des histoires audio à mes enfants, c’est pour qu'ils aient un
moment calme, tout seul ou avec la fratrie, mais effectivement sans les parents.
Je sais que dans le cadre privé, chez tous mes amis qui ont des enfants de cet âge là, l’histoire
audio est écoutée en autonomie. Le but aussi, c'est de se dégager des plages de temps, tout
en occupant les enceintes d'une manière sympathique.
Question 4 : À votre avis, dans quelle mesure la proposition d'offres numériques peut-
elle changer l'identité du magazine imprimé?
Je le vois plutôt dans l'autre sens. Notre cœur de métier, c'est vraiment le print. On n'a pas
pour projet de développer une connexion en parallèle avec le numérique. À l'avenir, j'aimerais
bien qu'on rende disponible à nouveau les anciens numéros qui sont épuisés en numérique.
Tous les supports numériques qu'on a développés jusqu'à présent, ce sont plutôt des
déclinaisons du magazine plutôt que l'inverse. Il y a les histoires, mais aussi des recettes de
cuisine, quelques jeux qu'on a tirés de différents numéros et qu'on a mis à disposition
gratuitement. Pour l'instant, ce n'est pas le numérique qui influe sur le magazine print, et ce
ne sera jamais le cas.
Question 5 : Que pensez-vous de la place qu'aura le magazine papier dans le futur?
Est ce que vous voyez qu'il y aura peut être une évolution? (Que pensez-vous du format
enrichi avec l’intégration de sons, d’animations ou de jeux numériques directement sur
le magazine ?)
Le contenu du magazine va toujours évoluer ; c'est le cas depuis le début. Il y a des évolutions
graphiques, notamment dans la maquette, des restructurations, etc.
Pour être honnête, je n'aime pas [l’intégration de contenus numériques] en tant qu'utilisatrice
pour les autres magazines. Je ne vais jamais flasher un flashcode dans un magazine ou
regarder un bonus numérique quand je lis un magazine papier. Personnellement, ce n'est pas
une expérience de lecture que j'aime et c'est quelque chose que je n’utilise jamais sur aucun
des supports de lecture que j'ai.
Par contre, si on avait plein de retours d’enfants et de professionnels qui nous demandaient
ça, pourquoi pas? Ce n'est pas une direction qui m'intéresse, sauf si ça nous est vraiment
demandé par notre communauté et par les enseignants avec qui on travaille, les
bibliothécaires, etc. Mais pour l’instant ce n’est absolument pas le cas. Si ça nous était
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demandé, on y réfléchirait. Mais moi, je préfère développer des contenus numériques qui ne
soient pas intégrés au print.
Ça peut être complémentaire. Par exemple, ceux qui ont repéré qu’on proposait quelques
vidéos avec les histoires et qui veulent [regarder la vidéo] après avoir lu le magazine, ils
peuvent déjà le faire. Mais je ne vais pas intégrer dans le magazine des flashcodes, des liens.
Parce que je n’aime pas tout ce qui sort de la lecture.
On est assez à l'écoute des retours qu'on peut avoir des enfants, des enseignants et des
bibliothécaires. On a déjà fait évoluer le magazine en fonction des retours qu'on avait. Donc,
ça pourrait être le cas à l'avenir, mais ce n'est pas une direction qu'on explore.
Question 6 : J'aimerais savoir quelles sont les différences entre le travail de l'édition du
magazine imprimé Baïka et l'édition des contenus web (au niveau du temps, de la
conception etc.) ?
Il y a les fichiers audio et les vidéos de quelques histoires. Le reste, ce ne sont que des pages
tirées du magazine : tout ce qui est activités à télécharger, ce sont des pages entières du
magazine à télécharger. Il n'y a pas d'édition de contenus numérique à proprement parler.
Question 7 : Je m’intéresse aux dimensions et aux apports des ressources audiovisuelles
vs. du magazine. Je voudrais savoir si la narration est bien la finalité principale pour
les enfants ?
(Pour le magazine papier) La dimension narrative n'est pas du tout la plus importante du
magazine. Le but est d'ouvrir les enfants sur les cultures étrangères et leur diversité. Dans
chaque numéro, on présente un pays différent. Il y a de la narration, mais c'est une petite
partie. La base de notre ligne éditoriale est de donner la parole à un enfant qui est né dans
un pays étranger et qui a immigré en France. Par exemple, le dernier numéro est sur le
Sénégal : je vais à la rencontre d'un enfant qui vient de là bas. Le magazine est construit
autour du personnage de cet enfant qui est interviewé dans le magazine et qui va intervenir
dans toutes les rubriques. Il y a une dizaine de rubriques : une rubrique fiction, où
effectivement, on présente un conte, une légende du pays d'origine ; un dossier pédagogique
et ludique pour creuser un peu l'univers des contes et légendes de ce pays-là ; une rubrique
sur la cuisine, la géographie, l'histoire, la faune, la flore et les différentes langues qui sont
parlées dans le pays ; une rubrique reportage où on va aborder le pays sous un autre angle.
Ça dépend des pays dont il est question.
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La finalité du magazine, c'est de présenter les cultures étrangères sous un angle pluriel pour
montrer la diversité. C'est pour ça qu'on s'applique à proposer des rubriques différentes pour
aborder le plus d'angles possibles, pour montrer plein de facettes d'un même pays. L’angle
narratif, ce n'est pas du tout le plus important pour moi. C'est une des composantes du
magazine. Mais pour moi, le fer de lance du projet, c'est donner la parole aux enfants qui
sont issus de multiples cultures.
On a utilisé les histoires pour créer les contenus audiovisuels parce que c’était une matière
disponible et valorisable sous ce format-là. Mais pour les interviews d’enfants, on ne peut
pas mettre en scène sous forme de vidéo tous les contenus de notre magazine. Les histoires,
ça s'y prêtait très bien ; mais c'est juste la première rubrique du magazine. Il y a 50 pages,
ce sont les huit premières. L’idée, c'était de proposer des contenus qui permettent d'occuper
les enfants et leur apprendre des choses, les occuper de façon ludique.
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WoW! News - Entretien avec Alastair Macdonald
Question 1 : Comment est née l'idée de concevoir les articles en plus des magazines
imprimés? Quels sont les apports principaux sur l’expérience utilisateur, pour mettre en
ligne ces contenus ?
Alastair Macdonald : L’idée fondamentale, c’est Catherine (cofondatrice de WoW! News)
qui a fait le constat qu’il y a un biais négatif dans les médias en général. J’étais dans le
journalisme de crise et de conflit, et Catherine me posait des questions : Pourquoi est ce
qu'on ne lit que des mauvaises nouvelles? J’avais une explication : quelque part, le journalisme
est là en tant que lanceur d'alerte. Une fonction des médias est de prévenir d'autres citoyens
des choses qui ne vont pas. Ça joue avec la psychologie humaine car nous avons évolué en
mettant notre attention plus sur les dangers que sur des choses positives.
On s'est rendu compte que ces informations deviennent plus présentes, quasiment
omniprésentes pour les plus jeunes. Ça a un effet négatif sur ces enfants. On fait des
recherches autour de nous - enseignants, pédopsychiatres et autres - pour faire le constat
qu'effectivement, nous avons une génération de jeunes enfants inquiets sur l'état du monde
et que ça commence chez les adultes. Cette négativité peut mener à une sorte de sentiment
d'impuissance, d'inquiétude (“le monde va très mal”, “il n'y a plus rien à faire”). Et donc est
né une volonté de rééquilibrer cette vision du monde très négative pour des enfants, mais il
y a des gens qui cherchent et trouvent des solutions. Nous sommes persuadés que, en
montrant une partie des solutions et pas simplement des problèmes, ça aide les enfants à
avoir confiance en eux.
Il y a deux ans, nous avons commencé à faire des expériences en écrivant des articles. Nous
les avons postés en ligne, sous forme de blog. Un peu plus d'un an, on a commencé à refaire
le site, mais c'est vraiment une plateforme de test pour nous. C'était gratuit et ça nous a
permis d'avoir des retours des enfants, des parents et enseignants, et de tester différentes
formes d'articles, des podcasts, des vidéos. A l'automne dernier, l'idée a toujours été d'être
dans le numérique, mais on n’a jamais pensé qu'un site pour des enfants de cet âge-là
pourrait être une proposition durable. Nous avons depuis le début l'idée de créer une
application qui serait plus à même d'offrir aux familles la sécurité autour de l’accès à
l’information numérique. Et entre-temps, à la fin de l'année dernière, nous avons lancé le
magazine parce qu’on a eu beaucoup de retours des familles et des enseignants, sur le fait
que les enfants aimeraient aussi avoir quelque chose sur papier. C'est pourquoi nous avons
lancé le magazine. Mais nous sommes sur le point de lancer l’application ; le magazine et
l’application sont combinés.
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Question 2 : Comment voyez-vous le positionnement de ces contenus ? En quoi
considérez-vous qu’il y a un produit principal et après d'autres contenus
supplémentaires? Est ce qu'il y a un rapprochement vis à vis de ces ressources?
Le site va être transformé plutôt comme une vitrine, pour montrer nos produits et encourager
à ce que les gens viennent les découvrir. Ce sont des produits d’infos centrales ; il y a
l’application Wow! News que nous allons lancer en automne, et accessoirement, nous avons
le magazine. On a des publics un peu différents, mais nous voyons une complémentarité. Le
magazine, c'est vraiment quelque chose que l'on peut prendre et lire tranquillement dans sa
chambre, pour recevoir des vraies infos d'une manière très différente d'autres produits. Pour
l’application, elle comporte des infos hebdomadaires sur smartphone ou tablette ; c’est un
moment qui sera partagé avec un parent ou un adulte. À cet âge là, c'est plus pratique pour
découvrir le monde numérique, d'être accompagné par un adulte et découvrir des infos de
solutions aux problèmes du monde.
Question 3 : Donc, avec l’application, la dimension sociale serait renforcée, étant donné
que l’adulte partage l’application avec l’enfant ? Que voyez-vous comme apports sur
l'application, par rapport au magazine imprimé ?
L’application est conçue pour être une expérience de 15 minutes environ. C'est un moment
partagé avec les parents. Les infos sont publiées toutes les semaines, tandis que le magazine
est trimestriel. Donc ce sera un peu plus dans l’actualité.
On est beaucoup dans le format audiovisuel ; le problème et la solution sont racontés en
vidéo et il y a des éléments ludiques et interactifs : des quiz, des moments de partage où on
peut comparer les réactions du parent et de l’enfant pour stimuler la discussion. Ça permet
aux parents de mieux comprendre la relation de l’enfant à l’actualité. Ça permet aussi à
l’enfant de voir ses parents aussi s'informer en même temps. C’est quelque chose pour nous
qui est assez nouveau. Nous ne voyons pas vraiment d’équivalent en ce moment.
Question 4 : Selon vous, dans quelle mesure la proposition d'offre numérique peut-elle
changer l'identité du magazine papier ? En quoi ces deux contenus sont liés : L'enfant
pourrait par exemple juste lire l'application, mais ne pas consulter le magazine.
Je ne vois pas le changer parce que la conception du numérique et de l'application est un
antécédent au magazine. Même si on n'a pas lancé l'application, elle était dans notre projet
depuis deux ans. Le magazine, on l’avait lancé à la fin de l'année dernière : il a été lancé
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avec l'idée de montrer aux enfants que le monde est plein de solutions aux problèmes. C'est
un support différent, plus classique pour montrer nos idées.
Mais dans le magazine, on a pris soin d'avoir des liens sur les contenus numériques : on a
des codes QR pour regarder des vidéos, écouter des podcasts, voir du contenu très vivant
sur notre site, dans le magazine. Aussi, ce serait une manière d'attirer l'attention sur ce que
nous faisons dans l'application. Ce sont deux produits assez différents mais nous les utilisons
essentiellement pour les renforcer. L’idée pour l’instant, c’est de proposer un abonnement à
l’application ; les infos hebdomadaires seraient plus ou moins liées à un abonnement annuel
qui serait accompagné par l’envoi du magazine.
On vise aussi des publics un peu différents. Ce que nous avons vu, c’est que la possibilité
d'offrir le magazine plaît beaucoup aux grands parents. Ils ont envie de partager le
magazine papier avec les enfants, tandis que les parents vivent beaucoup plus dans le
monde numérique. Nous proposons une solution adaptée pour le parent qui voit que son
enfant peut être inquiété par le monde de l’actualité, et qui cherche des outils pour discuter,
pour trouver les moyens de montrer à l’enfant que ce n’est pas juste que des catastrophes.
Question 5 : Vous avez mentionné les retours des abonnés sur le site web, sur les articles.
J'aimerais savoir un peu comment se passe leur expérience d’utilisation, comment cela
s'est passé pour eux.
Le site, c’est une plateforme d'expérimentation : on n'a jamais pensé qu'un enfant de 8 ans
va aller sur un site Internet et naviguer. Les gens ont constaté la richesse et le choix des
contenus ; de pouvoir lire et en même temps, écouter des podcasts. Nous avons compris qu’à
cet âge-là, il y a beaucoup d'enfants qui ont du mal à lire ou qui peuvent trouver pénible de
lire un article de quelques minutes. Ils aiment bien écouter la lecture des podcasts. On a
compris qu'effectivement, l’interactivité, la possibilité de voir des vidéos, de cliquer, donne
une richesse à l’information.
Quant aux parents, ils ont apprécié le fait que nous donnions déjà nos sources ; il y a la
possibilité d’aller regarder les articles d’autres médias, des sites web des personnes
concernées. Donc il y a plus de profondeur sur les sujets. C’est quelque chose qu’on essaie de
garder. L’utilisation même du site nous a donné des tuyaux sur la manière de se référencer.
Question 6 : Que pensez-vous de la place qu'aura le magazine papier dans le futur? Et
aussi, vous avez parlé des QR codes et cela m'intéresse. Je voudrais savoir si vous
envisagez la conception d'un magazine enrichi, par exemple un magazine sur une
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tablette, intégré à des sons, des animations ou des jeux numériques. Est ce que cela
serait envisageable?
Peut-être, mais nous sommes une start-up. Nous nous battons pour notre survie et il faut des
revenus pour un produit durable, avant de faire autre chose. On n’est pas convaincus que
faire revivre des magazines soit facile en ce moment.
D’ailleurs, il faut noter que notre site est bilingue : quasiment tout est en anglais. Pour
l'instant, on se concentre sur le marché français, pas autant en anglais qu’avant. L’idée avec
l’application, c’est de le faire en plusieurs langues, notamment en anglais et de couvrir
l’actualité globale. Le magazine reste pour l’instant quelque chose que nous faisons en
français. Les marchés de magazines en France sont assez nationaux tandis que pour nous,
notre vision est vraiment globale ; nous avons des abonnés un peu partout dans le monde.
Pour l’instant, il faut chercher une manière de survivre, et pour nous, c’est en lançant
l’application.
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Mini-Schools - Entretien avec Olivier Jughon
Question 1 : Comment est née l’idée de concevoir ce magazine Mini-Schools en réalité
augmentée ?
Olivier Jughon : Mini-Schools Magazine existe depuis 1971, donc il n’y avait pas la réalité
augmentée à l’époque. En revanche, depuis une vingtaine d’années, on a mis en place des
supports audio qui viennent compléter la partie papier, parce qu’on s’adresse à des enfants
qui apprennent l’anglais. D’abord ça a été des cassettes, des CD. C’est un peu par hasard
qu’on est arrivés sur la réalité augmentée parce qu’on a vu une pub sur ce type de contenu,
et qu’on s’est dit que c’était la possibilité non seulement d’ajouter des contenus audio, mais
également des vidéos à notre magazine, sans avoir besoin d’un support physique différent
de celui du support papier. L’édition de CD, c’est sympathique. Mais d’une part, il y a de
moins en moins de lecteurs de CD chez les enfants qui écoutent de la musique sur des
tablettes. D’autre part, ça avait un coût carbone qui est négligeable, et pour nous un coût
pratique de faire imprimer les CDs. On s’est dit que l’idée de la réalité augmentée
permettait d’avoir un accès facile à des contenus sans avoir un support physique
supplémentaire.
Question 2 : Avec l’arrivée de la réalité augmentée sur le magazine, quels ont été les
changements avec ce magazine ? En quoi pensez-vous que ça fait changer la nature
du magazine ?
Pas énormément, parce que la ligne éditoriale reste la même. Il a fallu qu’on définisse les
pages qui étaient en réalité augmentée, le contenu qu’on voulait mettre dedans, mais étant
donné qu’on avait déjà un support d’audio attaché au magazine (qu’on utilisait depuis au
moins une vingtaine d’années), ça n’a pas changé de façon très importante la structure du
magazine.
Question 3 : Est-ce que vous pensez que la réalité augmentée facilite l’apprentissage
de l’anglais, étant donné que le magazine Mini-Schools vise un apprentissage de
cette langue ?
Oui, ça facilite certainement, puisque ça permet d’avoir en plus du support papier, un
support audio, voire un support vidéo. Cependant la vidéo est un peu accessoire ; elle est là
pour retenir l’attention des enfants et les amuser, mais le support audio est très important.
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Question 4 : Quels ont été les avis des enfants à l’arrivée du magazine en réalité
augmentée ? Est-ce qu’ils ont eu des avis ?
Oui. Les enfants auxquels on s'adresse sont toujours très enthousiastes quand on leur
propose des choses qui sont innovantes et amusantes. Plein de parents ont trouvé cela très
sympa, dans l’air du temps ; ils ont trouvé que c’était une très bonne idée. En revanche,
certains parents nous ont dit que ça les mettait devant les écrans. On a eu une grande
explication pédagogique à faire, en expliquant aux parents qu’il ne s’agissait pas de les
mettre devant des vidéos qui vont durer des heures. Les vidéos qu’on a à l’intérieur du
magazine durent entre 1 et 2 minutes. C’est très court. L’intérêt de ces vidéos est d’avoir la
partie sonore. Le magazine a été bien accueilli dans l’ensemble, mais avec quelques
restrictions, car ça nécessitait de passer par un écran.
Question 5 : Est-ce que les enfants ont trouvé la réalité augmentée facile dans leur
première utilisation ? Est-ce qu’il fallait d’abord les guider pour qu’ils utilisent le
dispositif ?
Il faut les guider. C’est très simple mais il faut quand même télécharger l’application, donc
cela nécessite la présence d’un adulte.
Question 6 : Mini-Schools est un magazine qui est bien physique, mais est-ce qu’on
pourrait lire ce magazine sans avoir recours à la réalité augmentée ? Est-ce que cela
peut être indépendant du numérique ?
Absolument, oui. On peut tout à fait lire sans avoir recours à la réalité augmentée. Elle
n’est pas une obligation pour accéder au magazine. On peut tout à fait lire sans réalité
augmentée.
Donc le contenu numérique serait comme un plus, un contenu supplémentaire mais le
contenu principal reste bien le magazine imprimé.
Absolument. Il n’y a pas d'éléments supplémentaires dans le contenu en réalité augmentée
par rapport à ce qu’il y a sur le papier. Il y a juste une version sonore. On n’apporte pas
plus d’information comme il y a dans certains livres et notamment des livres scolaires. On a
une image avec un peu de texte, qui est mis en audio.
Question 7 : Quelles sont les différences entre l’édition de Mini-Schools en réalité
augmentée, par rapport à l’édition d’un magazine traditionnel ?
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Il n’y a pas de différences. Il faut juste décider des pages qui sont faites en réalité
augmentée, les identifier pour les lecteurs, et donner le mode d’emploi dans le magazine.
En revanche, cela reste un magazine papier de base ; il faut que les enfants puissent le lire
sans être obligés de passer par la réalité augmentée. Ce n’est pas une obligation, car ce
n’est pas un magazine à visée numérique.
Question 8 : Dans quelle mesure cet enrichissement numérique peut-il changer
l'identité du magazine papier, à votre avis ?
Je trouve que ça apporte un plus, sans que ce soit compliqué, puisque ça ne nécessite pas
d’avoir recours à un lecteur. Il est évident que ça nécessite d’avoir une tablette ou un
téléphone, mais à priori, cela fait partie de ce que les gens ont chez eux. Ça nécessite un
support qui est tellement répandu à l’heure actuelle que c’est plutôt simple d’utilisation.
Question 9 : Dans quelles mesures pourrait-on appeler le magazine Mini-Schools, un
magazine interactif ?
Le magazine Mini-Schools n’est pas complètement interactif, puisque l’enfant n’a pas la
possibilité d’interagir. Il peut prendre des informations soit par la lecture, soit par l’audio,
mais il ne peut pas interagir sur le magazine.
C’est vrai qu’on ne lui propose pas de jeu à partir de la réalité augmentée. Il est interactif
comme tout magazine pour enfants, dans le sens où ils ont des jeux imprimés. En revanche,
la réalité augmentée ne leur apporte pas de possibilité d’interactivité supplémentaire.
Question 10 : Concernant le futur du magazine, dans quelle mesure l’édition de Mini-
Schools va-t-elle diffuser possiblement ses offres numériques dans le futur, et
pourquoi ?
Pour l’instant, l’offre numérique est de mettre ce magazine en ligne pour nos adhérents,
surtout en ces temps compliqués, parce qu’on travaille beaucoup avec les écoles et ça a été
compliqué de l’acheminer, de le distribuer, etc. Donc, on l’a mis en ligne. En revanche, notre
but n’est pas d’en faire un magazine numérique.
Question 11 : Que pensez-vous de la place qu’aura le magazine papier dans le futur ?
Est-ce que vous pensez que plus tard, il y aura plus d’enrichissements qu’avant ?
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Probablement oui. Mais je suis un petit peu surpris du fait que ça ne mette pas plus
d’efforts parce que je trouve que c’est un moyen facile d’accéder à des informations
supplémentaires. Visiblement, ça n’a pas l’air pour l’instant de se développer énormément,
alors que le support audio en presse jeunesse existe de façon assez habituelle. Je trouve
que la réalité augmentée ne décolle pas beaucoup.
Précisions à la fin :
On a une activité qui est de faire des cours d’anglais et des animations pour les enfants, et
de leur apprendre l’anglais avec un prof, des jeux, et des méthodes pédagogiques. On a
également l’édition de ce magazine, mais ce n’est pas une méthode pédagogique du tout.
L’application pour utiliser le magazine s’appelle ArgoPlay. Il faut cette application pour
accéder au contenu en réalité augmentée, mais ce n’est pas une finalité pour nous. C’est
juste un moyen d’apporter des contenus supplémentaires pour les enfants.
Le magazine va être écrit en anglais à des enfants. Un certain nombre ne savent pas lire
dans cette langue, donc s’ils veulent avoir un accès à la lecture, cela passe par un adulte.
Cela permet d’avoir l’accès à l’écoute de l’anglais, à la prononciation, etc. Avec la réalité
augmentée, on n’a pas forcément besoin d’avoir un adulte à côté puisqu’une fois qu’on a
téléchargé la vidéo, on peut l’écouter comme on veut.