Download - Psychologie des erreurs de raisonnement
Les enjeux décisionnels en santé publique
Mécanismes psychologiques des
erreurs de raisonnement:
implications pour les décisions en
santé
Aymery Constant
Maitre de conférences
Psychologie de la santé
• Diagnostic
• Choix d’un traitement ?
• Initier un nouveau traitement ? Conserver le statut quo ?
• Décès ou handicap ?
• Acharnement ou euthanasie ?
• Qu’est ce qui doit primer?
• Vie?
• Bien être?
• Liberté?
• Devoir?
• Compassion?
Décision médicale
Raisonnement et décision
1) Processus logique et rationnel
2) L’Accumulation de savoir améliore la décision
3) L’expérience renforce la logique
4) Les décisions collectives sont les plus pertinentes
Une Rationalité….
…Limitée
Madame M., 62 ans, vient voir son médecin de famille car elle
sent fatiguée en permanence et a du mal à gérer ses activités
quotidiennes. Il lui prescrit des analyses sanguines:
Le médecin lui suggère qu’elle boit trop d’alcool et lui
recommande de limiter sa consommation voire une abstinence
totale. Il lui parle des traitements possibles, d’une
hospitalisation pour effectuer des traitements complémentaires
(endoscopie digestive, examen du foie…).
Etude de cas
transaminases élevées
=> Hépatite chronique C, contractée au cours d’une
intervention de sclérose des varices dix ans auparavant
Le test du VHC a été pratiqué plusieurs semaines après le
diagnostic initial, après que madame M. ait insisté et
finalement convaincu son médecin de revoir son
diagnostic, car elle ne boit que très modérément
Adressée au service d’hépatologie du CHU pour y débuter
un traitement antiviral (aucune conséquence sur la santé)
Etude de cas
Manque de connaissances ? De compétences ?
C’est un médecin diplômé
Mauvaise information ?
Toutes les informations médicales étaient valides
Manque d’expérience ?
Il exerce depuis des décennies
Manque de connaissance sur la patiente ?
C’est son médecin de famille depuis des années
D’où vient l’erreur ?
Transaminase élevée = alcoolisme :diagnostic le plus facilement
disponible en mémoire ?
Hypothèses
Peut être qu’un grand nombre de patients a un problème
d’alcool ? Et il a fait le lien avec sa patiente.
Pense t-il que le problème est forcement d’origine interne ? Et
non externe ?
Il n’a pas recherché de manière exhaustives les informations
pertinentes (intervention médicale invasive il y 10 ans)
A-t-il focalisé son attention sur les informations venant confirmer
sa croyance initiale (alcoolisme) en ignorant celles qui l’infirment
(aucun signe clinique) ou qui sont en faveur d’une hypothèse
alternative (asthénie chronique) ?
Heuristique
Stratégie cognitive simplifiée utilisée pour économiser du temps
qui permet de faire des déductions acceptables pour l’individu
Mis en évidence par Tversky & Kahneman, dans les années 70
Tversky, A. & Kahneman, D. (1974). Science, 185, 1124–1130.
Kahneman, D (1972). Judgment under uncertainty: Heuristics and biases.
Cambridge: Cambridge University Press.
Trois de ces heuristiques sont particulièrement influents:
• Heuristique de Disponibilité
• Heuristique de Représentativité
• L’Ancrage
Disponibilité
On juge la probabilité d’un événement ou d’un objet en
fonction de sa disponibilité en mémoire. La
première impression ou l’explication la plus
présente à l’esprit est privilégiée pour expliquer un
évènement ou estimer une probabilité.
Selon une enquête, 50% des américains craignaient
de mourir dans une attaque terroriste en 2006 (Gallup
poll)
Tversky, A; Kahneman (1973). "Availability: A heuristic for judging frequency and probability". Cognitive Psychology 5
(1): 207–233
La probabilité d’un tel événement est estimée à une
chance sur 20 millions (calcul sur la base des chiffres
disponibles)
Représentativité
On a interviewé un groupe d’une centaines de
personnes dont 30 avocats et 70 ingénieurs. Ces
entrevues ont permis la rédaction de fiches
succinctes sur chacune de ces personnes.
On a ensuite tiré une de ces fiches au hasard:
« Jean est un homme de 39 ans. Il est marié et a
deux enfants. Il s’occupe activement de politique
locale. Son passe-temps préféré est la collection de
livres rares. Il aime la compétition, la discussion et
s’exprime bien »
Quelle est la probabilité que Jean soit avocat ?
Représentativité Négligence des probabilités au profit de
l’individu
On préfère se focaliser sur l’information descriptive
et individuelle, au mépris de la logique
mathématique.
Et au profit des similitudes supposées
« Jean est un homme de 39 ans. Il est marié et a
deux enfants. Il s’occupe activement de politique
locale. Son passe-temps préféré est la collection de
livres rares. Il aime la compétition, la discussion et
s’exprime bien » Avocat !!!
Ancrage (anchoring)
On demande à des participants d’estimer le
pourcentage de pays Africains membres des Nations
unies
Réponse : 25% en moyenne
Réponse : 45% en moyenne
• Dans l’autre groupe: « Est-ce plus ou moins de 65% ? »
• Dans un groupe: « Est-ce plus ou moins de 10% ? »
Ancrage (anchoring)
L’ensemble du processus de raisonnement est
gouverné par une seule donnée initiale dont il
est difficile de se départir par la suite
Explique l’influence des premières
impressions, ou celles des apprentissages
précoces sur la prise de décision ou l’analyse
d’une situation
Biais cognitif
«Distorsion que subit une information en entrant dans le système
cognitif ou en sortant. Dans le premier cas, le sujet opère une
sélection des informations, dans le second, il réalise une sélection
des réponses »
Le Ny (1991)
Informations
Pertinentes
Réponses
pertinentes
Informations
Non
pertinentes
Réponses
non
pertinentes
Biais de
sélection
Biais de
raisonnement
Heuristiques
Acad. Med. 2003;78:775–780
33 biais et heuristiques recensés potentiellement actifs en
clinique médicale
Biais de sélection
Négligence (Unpacking) – échec à prendre en compte toutes les
informations pertinentes disponibles
Disponibilité (Availability): Ne pas chercher d’autres éléments que
ceux présents à l’esprit – Les expériences récentes influencent le
diagnostic
Ancrage (Anchoring) –”la première impression est la bonne” -
Conserver un diagnostic, même après avoir reçu des informations
contradictoires
Search satisfiying bias– se limiter à la recherche d’information
satisfaisantes; mais pas optimales. Ne pas chercher plus loin
Biais de raisonement
Aggregate bias – les données scientifiques disponibles ne correspondent pas au patient – cas atypique
Représentativité – ignorer la prévalence réelle d’une maladie (les données statitstiques)
Gender bias – le genre affecte la probabilité du diagnostic
Gambler’s fallacy – “une suite de diagnostics identiques va forcement s’arrêter”
Illusion des séries – “une suite de diagnostics identiques va forcement continuer”
Transaminase élevée = alcoolisme :diagnostic le plus facilement disponible en mémoire ? biais de disponibilité
Peut être qu’un grand nombre de patients a un problème d’alcool ? Illusion des séries
Le problème est lié à la patiente et non à des événements externes. Erreur fondamentale d’attribution
Certaines informations importantes étaient inconnues (intervention médicale invasive il y 10 ans): Ancrage, unpacking
Focalise son attention sur les informations venant confirmer son diagnostic (transaminases élevées) en ignorant celles qui l’infirment (aucun signe clinique) ou sont en faveur d’une hypothèse alternative (asthénie chronique): Ancrage, Biais d’interprétation
D’où vient l’erreur ?
Les émotions peuvent compromettre la rationalité d’un décideur
Trois types d’affects:
Transitoire: facteurs environnant, fatigue….
Induits par la situation clinique
Endogène: anxiété, adaptation émotionnelle
Les meilleures preuves scientifiques peuvent être négligées à cause des affects
Biais Affectif
Deux modes de raisonnement concurrents:
Le premier est rapide, intuitif, automatique (voire
inconscient) implique souvent une composante
affective ou émotionnelle, et requiert peu de
ressources
=> Solutions satisfaisantes
Le second procède étape par étape, lent, délibéré,
dénué d’affect et couteux en ressources
=> solutions optimales
Vulnérable aux biais !
Rationalité limitée en santé
publique
Cadrage, aversion au risque et biais
d’interprétation
Définir des priorités ? Décider quels sont les facteurs de risque pour
la santé
Dépister le plus tôt possible ? Ou quand le problème atteint un seuil
critique?
Quelles actions mettre en place ? Comment faire ? Où ? Durée ?
Innover ? Maintenir le statut quo ?
Interdire ? Dissuader ?
Rendre obligatoire ? Encourager ?
Nouvelles stratégies ?
Comparaisons nationales, internationales ?
Cibler les individus? La société ? Les entreprises ?
Qu’est ce qui doit primer?
Liberté ? Bien être? Compassion? Efficacité ? Habitude ?
Décision en Santé publique
Certaines informations scientifiques sont considérées
comme acquises depuis des décennies car démontrées par
de nombreuses études épidémiologiques, relayées par les
médias et intériorisées par les individus
Preuve épidémiologique forte
Acceptation par le grand public
Pratique des professionnels
Santé Publique
Concordance
Effets nocifs du tabac, de l’alcool, du manque
d’exercice physique ou de la « malbouffe », ivresse au
volant, etc.
Prendre des décisions éclairées concernant la santé des populations suppose de pouvoir collecter des informations pertinentes
Dans les situations ambiguës, nouvelles, changeantes inconnues, ou chargée émotionnellement, la collecte et l’interprétation des informations vont être influencées par:
Recherche d’information
1) la manière dont l’information est présentée
2) les croyances du décideur
Vous êtes un décideur haut placé à l’OMS et vous voulez
mettre en place une action préventive pour réduire le
nombre de décès et de blessures liées aux morsures
d’animaux. Sur quel animal allez vous cibler vos efforts ?
en Australie ?
A) Le chien, B) le requin, ou C) le crocodile
en Roumanie ?
A) Le chien, B) le requin, ou C) le crocodile
Décision en Santé publique
en Afrique du sud ?
A) Le chien, B) le requin, ou C) le crocodile
Cadrage (Framing) L’ensemble du processus de raisonnement est
gouverné par la manière dont est présentée
l’information
Choisie par 72% des participants
Choisie par 28% des participants
On s’attend à ce qu’une épidémie tue 600 personnes.
On demande à des participants de choisir entre deux
programmes possibles
Option A: pourra sauver la vie de 200 personnes
Option B: 33% de chances de sauver 600 personnes
Cadrage (Framing)
Même scénario, présentation différente
Option A: 400 personnes vont décéder
Option B: 33% de chances qu’il n’y ait aucun décès
Choisie par 22% des participants
Choisie par 78% des participants
L’espérance mathématique est la même dans les deux cas, mais
les formulations évoquant des décès certains sont rejetées, alors
que celles impliquant des vies sauvées certaines sont préférées
Cadrage (Framing)
Phénomène d’aversion à la perte: la valeur négative d’une perte
est considérée comme supérieure à valeur positive d’un gain
équivalent (capacité, année de vie, décès..)
Possibilité ressenti
Gain de X Positif
Perte de X Extrêmement négatif
Cadrage (Framing)
Le cadrage permet d’influencer la décision en
utilisant notre tendance à l’aversion à la perte
Si vous êtes favorable au traitement LAMBDA,
vous direz au patient: « Avec le traitement LAMBDA, vous avez 90% de
chances de survie »
Si vous préférez une solution alternative, vous
direz: « Avec le traitement LAMBDA, vous avez 10% de
chances de décès »
Biais de confirmation Le Bio est-il meilleur pour la santé ? Les jeux vidéos peuvent-ils rendre les enfants violents ? Le WI-FI est-il cancérigène ?
=> A pour effet de semer le doute, même en l’absence de
preuve scientifique
Les comportements changent-ils pendant la pleine
lune ?
Question fermée (OUI/NON): Tendance naturelle à
chercher des informations confirmantes, qui vont
dans le sens du OUI => ignorer l’hypothèse
alternative
Reformulation
Poser la question de manière ouverte: Quels sont les facteurs de risque du cancer ?
- Tabac - Alcool - Obésité (sucre, graisse…) - Sédentarité, - Diesel - Soleil - …. Permet de relativiser et définir des priorités
Reformulation
Induire une comparaison pertinente! Le risque est-il plus élevé pour l’aspartame que pour le sucre ? Le risque est-il plus élevé pour la cigarette électronique que pour la cigarette classique ? Permet d’introduire les alternatives possibles dans la décision
Changer d’avis ?
...pas si simple
Biais d’interprétation
(confirmation des hypothèses)
Université de Santford (USA): On forme deux groupes d’étudiants en fonction de leur avis concernant la peine de mort: Un groupe pour la peine de mort; et un contre la peine de mort
On leur présente ensuite deux études: une
démontrant l’utilité de la peine de mort, et une
démontrant sa contre-productivité
Et on leur demande d’évaluer la qualité
méthodologique de ces deux études
“Biased assimilation and attitude polarization: The effects
of prior theories on subsequently considered evidence”
Conclusions des études sur la peine
de mort
« efficace » « Contre-productive »
Groupe Favorable
à la peine de mort Qualité ++ Qualité --
“Biased assimilation and attitude polarization: The effects
of prior theories on subsequently considered evidence”
Conclusions des études sur la peine
de mort
« efficace » « Contre-productive »
Groupe Favorable
à la peine de mort Qualité ++ Qualité --
Groupe contre la
peine de mort Qualité ++ Qualité --
Les études sont jugées valides si elles vont dans le
sens des opinions initiales, et discréditées dans le
cas contraire
Autre effets
Des médias couvrant une campagne politique vont être jugés hostiles par les deux camps Des lobbys vont sélectionner les études qui les arrangent (casque à vélo; effet néfaste d’un aliment ou bénéfice d’un médicament…)
Des travaux scientifiques vont être jugés sous un angle politique ou idéologique, sans considération de leur valeur scientifique intrinsèque
L’expérience renforce la logique
(ou freine toute évolution)
Question 1: « décrivez le contenu exact du repas de midi que vous avez pris il y a 15 jours »
Le Biais mnésique
Questions 2: « décrivez la situation dans laquelle vous vous trouviez lorsque vous avez appris les attentats du 11 septembre 2001 »
Le rappel des informations est facilité par l’intensité des émotions associées…et par leur nature
“Dissociation of recall and fragment completion”
Journal of Abnormal Psychology, 101, 575–580
Biais mnésique
Dans son fonctionnement normal, la mémoire traite et récupère les données agréables et plaisantes plus efficacement que les autres. => Disponibilité Accrue qui produit des biais de rappel Mécanisme de protection contre l'humeur dépressive (« positive illusions ») Permet aussi de justifier après-coup les décisions prises au cours de sa vie (« choice supportive bias »)
Biais mnésique
Nos expériences passées semblent bien plus positives qu'elles ne l'étaient en réalité
La référence purement subjective (hors données chiffrées comparables) à une situation passée est peu pertinente pour évaluer une situation actuelle ou à venir
Renforce des phénomènes comme la résistance au
changement, l’ancrage, la persévérance de croyances erronées, la confirmation des hypothèses, etc…
L’expérience éclaire surtout le passé
Est-il possible de se remettre
en question?
Erreur Fondamentale
Mise en évidence par Jones et Harris (1967) Des participants doivent juger des dissertations défendant des positions idéologiques, imposées par le professeur. La moitié des participants savent que le thème est imposé, les autres pensant qu'il s'agit de « libre expression »
« The attribution of attitudes », 1967
Erreur Fondamentale Même les participants qui savaient que le thème était imposé ont considéré qu'il reflétait la véritable position du rédacteur sur le sujet Leur attitude était jugée conforme à la position qu'ils étaient obligés de défendre Surestimation des causes internes à un individu, au
détriment de contraintes ou de causes externes possibles
Biais d’autocomplaisance Suite à un cancer mal diagnostiqué en 1980, M. Paul Mongerson décide de fonder une société visant à concevoir des logiciels d’aide au diagnostic. En 2006, il demande à son médecin pourquoi il n’utilise pas de logiciel d’aide à la décision. Réponse du praticien:
- « Cela prend du temps et je fais moins de 1% d’erreur »
The American Journal of Medicine (2008) Vol 121 (5A), fvii
- « La littérature montre que le taux d’erreur est de 5 à 10% »
- « C’est à cause des autres médecins »
Biais d’autocomplaisance
- Gosling (1992) a interrogé des enseignants sur la cause de la réussite et de l’échec de leurs élèves
- Les résultats ont montré que:
- Lorsque les étudiants réussissent, ils pensent c’est grâce à la qualité de leur enseignement
- Lorsque les étudiants échouent, ils pensent que c’est davantage liés à des causes externes (contexte familial)
Qui est responsable de l’échec scolaire ? (1992 ) PUF, Paris
Renforcement des croyances:
Les prophéties auto-réalisatrices
1° trimestre 2° trimestre 3° trimestre
Test de QI Test de QI
Enfants « précoces » Enfants « Normaux »
“Teacher Expectation for the
Disadvantaged”
Évolution
Evolution
Tous les élèves annoncés comme « précoces » ont progressé significativement Des relations privilégiées se sont formés entre ces élèves et les enseignants Des rôles plus importants (garder la classe, gérer les activités, etc...) leur était attribué Minoration des erreurs commis par les précoce
Effet Rosenthal
« Précoces » ou « normaux » => tirage à pile ou face
Rosenthal et Jacobson créaient chez les professeurs soit une « attente positive », soit, « pas d’attente ». Un préjugé basé sur un test valide, mais aux résultats faussés
…qui a eu un effet sur la conduite des
enseignants, les résultats des élèves, ce qui a
confirmé les attentes !
On demande à un étudiant d’appeler une personne qu’elle ne connaît pas sous un prétexte quelconque. On lui présente une photo de l’interlocuteur:
corpulence normale obèse
Préjugé (USA): « les personnes obèses ont
tendance à être désagréable et irritable »
“Why does behavioral confirmation occur? A functional
perspective on the role of the perceiver”
Prophéties auto-réalisatrices
Ceux qui croyaient téléphoner à une personne en surpoids se comportaient de manière plus désagréable que celles qui croyaient appeler une personne de corpulence normale En retour la personne au téléphone était également plus désagréable avec leur interlocuteur
=>Confirmant ainsi la croyance initiale
Snyder M, Haugen JA. 1994. Why does behavioral confirmation occur? A functional perspective on the role of the
perceiver. J. Exp. Soc. Psychol. 30:218–46
Etude prospective sur la consommation d’alcool des adolescents
“Self-Fulfilling Prophecies : The Synergistic
Accumulative Effect of Parents' Beliefs on Children's
Drinking Behavior”
Consommation d’alcool des
adolescents
Estimation par les parents
Temps 2
Consommation d’alcool
des adolescents
12 mois
Temps 1
• Estimation parentale conforme à la réalité
• Surestimation
• Sous-estimation
Surestimation des
deux parents
Consommation
+ élevée
Une étude menée en Grande-Bretagne, a
démontré que le nombre de passages aux
urgences suite à un accident à la route était de
52% supérieur les vendredi 13 par rapport aux
vendredi 6, même s'il y avait moins de voitures en
circulation.
Les auteurs recommandent de rester chez soi ce
jour-là
Scanlon, Luben, Scanlon, & Singleton, 1993
Is Friday the 13th bad for your health?
Cet élève est « précoce »
Les obèses sont désagréables
Mon enfant boit beaucoup d’alcool
Le vendredi 13 porte malheur
Décision, Conduites, actions
attentes
Croyances, stéréotypes
Réactions et résultats en
conséquence
Renforcement
des croyances
initiales
Contribue à l’effet « placébo », et la persistance de pratiques infondées car elles produisent un effet conforme aux croyances
Dynamique de groupe?
Le danger du conformisme
Effet ASCH On demande à un groupe d’étudiants d’effectuer
un test de vision simple: quelle ligne parmi les trois
correspond au modèle ?
Effet ASCH Le groupe est composé de « complices », à
l’exception d’un étudiant qui est le sujet réel de
l’expérience
Lorsque les complices soutiennent à l’unanimité
une mauvaise réponse, 37% des sujets
préfèrent se conformer à cette mauvaise
réponse que de s’opposer au groupe
Lorsque la pression du groupe disparait, le taux
de réponse correcte passe à 100%
=>Soumission à la majorité
=> conformisme
Effet ASCH
- Peur du ridicule, d'avoir l'air idiot, d'être rejeté
(Peur de la désapprobation sociale):
=>Influence Normative
- Le doute quant à la validité de sa propre réponse.
=> Influence informationnelle
L'influence informationnelle est particulièrement
importante quand on est confronté à une tâche que
l'on ne maîtrise pas.
L'influence normative est importante quand le
groupe est important pour nous
Soumission volontaire
On se conforme aux avis d’une
« autorité légitime »: blouses
blanches, experts, savant,
intellectuel, etc…sans interroger
ni l’origine ni la pertinence de leur
dires
Soumission à l’autorité
EHESP
66
Expérience datant de 1966 sur 22 infirmières
Un médecin nommé "Smith" appelle les
infirmières par téléphone et leur demande
d'administrer 20 mg d'un médicament
(Astroten) à un patient
• Les prescriptions par téléphone étaient strictement interdites
• Aucun docteur Smith ne travaillait effectivement au sein de
l'hôpital
• l'Astroten était « en phase de test »
• Enfin, la dose prescrite ne pouvait excéder 10mg selon les
indications du flacon
21 des 22 infirmières ont administré le « médicament » au
patient.
Hofling CK et al. (1966) "An Experimental Study of Nurse-Physician Relationships"
Rationalité limitée
Pourquoi tous ces biais de jugements ? Parce qu’ils semblent donner des résultats
satisfaisants dans les situations familières,
courantes, routinières et ne requièrent qu’un
minimum d’efforts
=> Adaptés aux situations de la vie de tous les jours
Conséquences adverses pour la santé publique:
le discrédit de connaissances valides, la persistance
de croyances erronées et de pratiques obsolètes; le
maintien de statut quo
Utiliser un médicament qui n’a jamais fait la preuve de
son efficacité, car on y est habitué
Considérer la cigarette inoffensive car plein de gens
fument depuis des années sans problème
Continuer à rouler vite car jamais eu d’accidents
« La consommation de bon vin n’est pas dangereuse »
Pour sa santé, il vaut mieux consommer du sucre que des
édulcorants; Les antibiotiques, c’est automatique; ne pas
toucher un granulé d’homéopathie (piège)
Félix-Archimède Pouchet
(1800-1872), médecin,
biologiste et chercheur
rouennais, fut l'un des
précurseurs de la science
naturelle....et l'un des
adversaires les plus
acharné de Pasteur !
Il a soutenu jusqu’à sa mort la théorie de la génération spontanée
de la « Rationalité Limitée » au
« Rationalisme Critique »
Contre-mesures
- Sensibiliser à l’existence des biais cognitifs par
l’information et l’éducation, en utilisant des exemples concrets et des descriptions détaillées de leurs effets - Forcer l’hypothèse alternative à toute question. - Prendre du recul par rapport au problème immédiat et analyser sa manière de le résoudre.
- Ne pas (trop) se fier à sa mémoire - Développer des algorithmes de décisions adaptés aux situations nouvelles
Douter a priori
- Privilégier les informations issues de plusieurs sources indépendantes utilisant des méthodes rigoureuses et transparentes de collecte et d’analyse des données (revue de littérature; méta-revue;…)
- Distinguer ce que disent les études de ce qu’elles ne disent pas
- Le niveau de preuve infirmant une hypothèse doit être au moins égal à celui la confirmant pour pouvoir induire un doute légitime
- Attention à l’émotion !
Attention !: groupes d’intérêt idéologiques, financiers,
religieux, politiques, corporatistes, etc…
Comment les décisions en santé
publique ont pu être influencées au
mépris des preuves scientifiques:
Exemples de cas en France
Si on a le temps……
EHESP
74
EHESP
75
EHESP
76
Rapport INSERM 2005
S’appuyant sur les conclusions de plus d’un millier de recherches scientifiques internationales, les experts de l'INSERM préconisent dans un document de 364 pages (disponible en ligne) de mieux informer parents et éducateurs sur les troubles du comportements chez les enfants et de le dépister le plus précocement possible, dès l’âge de trois ans, afin d’en assurer la prévention.
Recommandations du rapport
Améliorer l’information sur le trouble des conduites en France, notamment au
moyen d’études épidémiologiques auprès d’enfants et adolescents dans la
population générale, tout comme dans des populations à haut risque (milieu
carcéral, éducation spécialisée, zones urbaines sensibles…).
• Repérer les facteurs de risque familiaux, pré- et périnataux, génétiques.
• Développer des programmes de prévention spécifiques,
former le personnel des structures éducatives,
intervenir auprès des familles à risques, dépister les signes
précurseurs le plus tôt possible, c’est-à-dire à 3 ans, et les reporter
sur le carnet de santé.
• Effectuer des évaluations régulières, approfondies et pluridisciplinaires
pour les sujets présentant des symptômes. Évaluer les effets des diverses
psychothérapies. Poursuivre les recherches pharmacologiques.
Rapport INSERM 2005
Le lendemain même, le Syndicat national des médecins de protection maternelle et infantile (SNMPMI), s’insurge. Ses dirigeants seront à l’origine de Pasde0deconduite, qui ralliera plusieurs dizaines d’associations de psychologues, médecins, éducateurs… et dont la pétition (disponible en ligne) sera contresignée par près de 200 000 internautes. Parmi les premiers signataires, on retrouve des pédopsychiatres, psychologues cliniciens, médecins, maitre de conférence, professionnels de la petite enfance, …. …Dont beaucoup appartiennent à un courant de pensée philosophique qui avait déjà fait censurer un rapport de l’INSERM par le ministre de la santé en 2004
Pétition
« les enfants dépistés seraient soumis à une batterie de tests élaborés sur la base des théories de neuropsychologie comportementaliste » « Selon les critères des études Anglo-Saxonnes » crèches et écoles transformées en « lieux de traque », « dressage ou rabotage des comportements », toxicomanie médicamenteuse pour abrutir le délinquant potentiel trop petit pour se défendre « Le moindre geste, les premières bêtises d’enfant risquent d’être interprétés comme l’expression d’une personnalité pathologique » à la merci d’une « pensée soignante robotisée »
http://www.pasde0deconduite.org/appel/
EHESP
81
Appel à l'initiative des premiers signataires suivants : Dr Christine Bellas-Cabane (pédiatre,
présidente du syndicat national des médecins de PMI), Dr François Bourdillon (président de la société
française de santé publique), Dr Marie-Laure Cadart (médecin, anthropologue, syndicat national des
médecins de PMI), Michèle Clément (secrétaire générale du syndicat national des psychologues), Dr
Yvonne Coinçon (pédopsychiatre, association des psychiatres de secteur infanto-juvénile), Jean-
François Cottes (psychologue clinicien, psychanalyste, InterCoPsychos, Institut de Jeunes Sourds de
Clermont-Ferrand), Pr Boris Cyrulnik (neuropsychiatre et éthologue), Pr Pierre Delion (chef de service
de pédopsychiatrie au CHU de Lille), Danièle Delouvin (psychologue, présidente d’A.NA.PSY.p.e. –
association nationale des psychologues pour la petite enfance), Dr Michel Dugnat (pédopsychiatre, unité
parents-bébés hôpital de Montfavet), Dr Marie-Thérèse Fritz (pédiatre, syndicat national des médecins
de PMI), Sylviane Giampino (psychanalyste, psychologue petite enfance, fondatrice
d’A.NA.PSY.p.e.), Pr Bernard Golse (chef de service de pédopsychiatrie CHU Necker-enfants malades,
professeur Université Paris V), Pr Roland Gori (psychanalyste, professeur d’université), Pr Catherine
Graindorge(chef de service de pédopsychiatrie Fondation Vallée, professeur Université Paris XI), Pr
Philippe Gutton (pédopsychiatre, professeur des universités), Alberto Konicheckis (maître de
conférences en psychologie clinique, Université de Provence), Dr Sophie Lemerle (pédiatre hospitalière,
présidente de la société française de santé de l'adolescent), Dr Evelyne Lenoble (pédopsychiatre, hôpital
Sainte-Anne), Pr Roger Misès (professeur émérite de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent,
Université Paris XI), Pr Martine Myquel (présidente de la société française de psychiatrie de l’enfant et
de l’adolescent et des disciplines associées), Gérard Neyrand(professeur de sociologie Université
Toulouse III), Dr Pierre Paresys (Union syndicale de la psychiatrie), Danielle Rapoport (psychologue
clinicienne, association Bien-traitance formation), Elisabeth Roudinesco(historienne, directrice de
recherches Université Paris VII), Dr Pierre Staël (président du syndicat des psychiatres français), Dr
Pierre Suesser (pédiatre, syndicat national des médecins de PMI).
Cadrage
Contenu du rapport Contenu de la pétition
Etudes internationales Etudes Anglo-saxonnes
Dépistage Traque
Repérer les facteurs de risque
et prévenir les troubles
approche déterministe et
suivant un implacable principe
de linéarité
Prévention précoce Traque précoce
Pharmacologie en seconde
intention
Toxicomanie
Prise en charge
psychothérapique
Formatage, dressage ou
rabotage des comportements
intervenir auprès des familles à
risques
stigmatisation
Enfants: charge émotionnelle forte
Contexte politique et culturel
Lobbys et opinions idéologiques
Croyances concernant les méthodes « Anglo-saxonnes »
Irruption de recommandations internationales dans la sphère
professionnelle locale
Pétition: effet de cadrage et
aversion au risque
Mise en cause:
de l’INSERM
Des « Anglos-Saxons »
des experts
Des études internationales
Des recommandations
scientifiques
Maintien du statut quo
contexte
Changement des pratiques
=
dérive totalitaire
Fondamental pour
toute action de prévention
Pour finir….
Eléments de réflexion sur la décision en
santé publique
L’analyse des besoins doit s’appuyer sur des
preuves, pas des croyances…
Accès au soins vs. Recours aux soins
Mais les prédictions à moyens et
longs termes sont souvent à
coté de la plaque….
Une étude épidémiologique publiée dans The Lancet (16 juillet 2013) témoigne d’un
très net recul de 25% du taux de démences chez les plus de 65 ans en Angleterre au
cours de ces 20 dernières années : Alors que le taux de démences au sein de cette
population s’établissait à 8,3% il y a 20 ans, il n’est plus que de 6,2%
The Lancet Published Online July 16, 2013
Devise à méditer…
« Nullius in Verba »