PROJET DE RÈGLEMENT SUR LES PROMOTIONSDES VENTES DANS LE MARCHÉ INTÉRIEUR
- Réactions de la CCIP -
Rapport présenté par M. Alain BUATau nom de la Commission du commerce intérieur
et adopté à l’Assemblée générale du 16 mai 2002
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SYNTHÈSE DES PRISES DE POSITION
La Commission européenne vient de rédiger un projet de règlement ayant pour
objectif d’éliminer les barrières aux ventes promotionnelles, érigées par les
dispositions nationales en matière de rabais, soldes, primes, cadeaux, concours et
jeux promotionnels.
Si toute démarche communautaire d’harmonisation est à encourager, il n’en
demeure pas moins que l’économie générale de ce texte est préoccupante, par sa
remise en cause fondamentale des dispositifs de rationalisation entre les différentes
catégories de commerce.
C’est pourquoi la Chambre de commerce et d’industrie de Paris formule de très
sensibles réserves.
1) Pour une utilisation et une communication commerciale des promotionsdes ventes adaptées aux exigences économiques
� Clarifier les conditions de recours aux promotions :
� en améliorant le contenu juridique des notions définies par le projet de
règlement. Ainsi, pour éviter toute confusion et par souci de transparence, il est
indispensable d’encadrer le prix de référence à partir duquel le rabais sera
calculé (soit, celui pratiqué dans les trente derniers jours) ;
� en précisant davantage les obligations du vendeur. En l’état actuel du projet de
réforme, la fréquence des promotions serait augmentée, rendant difficile la
perception par le consommateur de la valeur réelle du produit. Or, il serait
préférable de maintenir les systèmes tels que celui des soldes saisonniers, afin
de permettre aux différentes formes de commerce de s’organiser au regard des
besoins de leurs activités ;
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� Encadrer la libéralisation des communications commerciales. Le projet de
règlement supprime toute interdiction de limitation des promotions et, par
conséquent, autorise la revente à perte.
Notre Compagnie s’oppose fermement à cette disposition et demande lemaintien de la prohibition de la revente à perte.
En effet, cet objectif de simplification des réglementations affiché parBruxelles est ici dangereux : il sous-estime les répercussions économiquescomme les pratiques de prix prédateurs et d’ententes qui seraientengendrées par des politiques tarifaires anarchiques ;
� Conserver les dispositifs spécifiques d’autorisation préalable selon lesparticularités commerciales de chaque pays. Ainsi, en France, notreCompagnie reste très attachée au contrôle préalable des ventes audéballage et des liquidations de stocks, dans un souci d’équilibre ducommerce local.
En tout état de cause, les Etats membres, conformément au principe de
subsidiarité, doivent être à même d’apprécier les restrictions qu’il convient
d’apporter en ces domaines.
2) Pour une rationalisation des obligations d’information du consommateur etdes mécanismes de recours
� En matière d’information du consommateur et concernant plus particulièrement le
commerce électronique, prévoir des systèmes sécurisés d’authentification des
parties et de certification des signatures lors de la commande ;
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� Renforcer les modes alternatifs de règlements des différends et étendre au plan
communautaire des initiatives de traitement amiable des litiges entre
professionnels et consommateurs. A cet effet, le réseau consulaire européen
aurait un rôle majeur d’impulsion.
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- SOMMAIRE -
PAGE
I - POUR UNE UTILISATION ET UNE COMMUNICATION COMMERCIALEDES PROMOTIONS DES VENTES ADAPTÉES AUX EXIGENCESÉCONOMIQUES.................................................................................................... 8
A – LA CLARIFICATION DES CONDITIONS D’UTILISATION DES PROMOTIONS ..................... 91) Projet de règlement (article 2) .......................................................................... 92) Position de la CCIP .......................................................................................... 9
a) L’amélioration du contenu juridique de certaines notions.............................. 9b) La nécessité de mieux préciser les obligations du vendeur..........................10
B – L’ENCADREMENT DE LA LIBÉRALISATION DES COMMUNICATIONS COMMERCIALES ....111) Projet de règlement (article 3) .........................................................................112) Position de la CCIP .........................................................................................11
a) Sur l’interdiction de limiter la valeur des promotions des ventes ..................12b) Sur l’interdiction de maintenir une demande d’autorisation préalable
pour les promotions des ventes ....................................................................15c) Sur l’affirmation de la reconnaissance mutuelle : un principe juridique
contestable en ce domaine spécifique ..........................................................17
II – POUR UNE RATIONALISATION DES OBLIGATIONS D’INFORMATION DUCONSOMMATEUR ET DES MÉCANISMES DE RECOURS ...................................18
A - LE RENFORCEMENT DE L’OBLIGATION D’INFORMATION ...........................................191) Le projet de règlement (article 4).....................................................................192) Position de la CCIP .........................................................................................19
B – L’EXTENSION DES MÉCANISMES DE RECOURS .......................................................191) Le projet de règlement (article 6).....................................................................192) Position de la CCIP .........................................................................................20
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L’élimination des obstacles à la libre circulation des marchandises et à la liberté
d’établissement fait aujourd’hui partie intégrante des priorités de la nouvelle politique
de l'Union européenne. Pour garantir l’accès au marché aux entreprises comme à
leurs clients, la Commission de Bruxelles vient de rédiger un projet de règlement
relatif aux promotions des ventes dans le marché intérieur1. Il a pour objectif
d’éliminer les barrières aux ventes promotionnelles, érigées par les dispositions
nationales en matière de rabais, primes, cadeaux, concours et jeux promotionnels2.
Pour faciliter cette libre circulation, il envisage d’instaurer des exigences de
transparence et d’information. Cette démarche devrait avoir au moins deux impacts :
faciliter la croissance des services de communication commerciale, en simplifiant les
difficultés que peuvent rencontrer les entreprises lorsqu’elles souhaitent réaliser des
campagnes de publicité et améliorer le choix des consommateurs.
Plus précisément, ce projet a pour ambition de supprimer les interdictions et
restrictions générales que la Commission considère comme obsolètes mais que
divers Etats membres continuent d’appliquer. Il entend également assurer un niveau
plus élevé de protection du consommateur au travers d’une meilleure information et
renforcer celle des mineurs en matière de santé publique. Enfin, il envisage
d’appliquer le principe de reconnaissance mutuelle et faire en sorte que les
opérateurs, établis légalement dans un Etat membre, soient en mesure de fournir
leurs services librement dans les autres.
D’emblée, la Chambre de commerce et d’industrie de Paris regrette que les
discussions initiées par le Livre vert sur la protection des consommateurs dans
l'Union européenne3 n’aient pas été menées avec celles ouvertes par la présente
proposition de règlement, les domaines traités par ces deux documents étant
parfaitement complémentaires.
1 « Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil relatif aux promotions des ventesdans le marché intérieur », Bruxelles, le 2/10/2001, COM(2001) 546 final.2 Conformément à l’article 49 du Traité CE : « Dans le cadre des dispositions ci-après, les restrictionsà la libre prestation des services à l’intérieur de la Communauté sont interdites à l’égard desressortissants des Etats membres établis dans un pays de la Communauté autre que celui dudestinataire de la prestation ».3 La CCIP a pris position sur ce Livre vert par le rapport de M. Blachier du 24 janvier 2002.
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Au-delà de cette remarque méthodologique, et compte tenu des implications d’une
telle réforme dans notre droit interne, il convient d’être très vigilant quant à la
démarche qui pourrait libéraliser de manière excessive nos cadres législatifs.
L’économie générale de ce texte est en effet préoccupante : par sa remise en cause
fondamentale des dispositifs de rationalisation entre les différentes catégories de
commerce, elle conduit à formuler de très sensibles réserves.
Le bouleversement que susciterait une telle réforme ne concernerait pas que notre
pays. La plupart des Etats membres connaissent des réglementations sur les ventes
promotionnelles, notamment en matière de soldes, même si, il est vrai, notre
législation est plus rigoureuse que celles de l’Allemagne, de l’Italie ou encore de la
Grande-Bretagne. C’est pourquoi la libéralisation excessive de ce domaine soulève
de vives critiques chez l’ensemble de nos voisins.
Seront successivement examinées les conditions dans lesquelles les promotions
peuvent être libéralisées au regard des contraintes des entreprises et de leurs
attentes, mais également quant aux conséquences pour la clientèle. Autrement dit, il
s’agit d’adapter et de clarifier l’utilisation et la communication commerciale des
promotions des ventes aux exigences économiques (I) et de déterminer les
modalités d’information du consommateur et les mécanismes de recours
adéquats (II).
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I - POUR UNE UTILISATION ET UNE COMMUNICATIONCOMMERCIALE DES PROMOTIONS DES VENTES
ADAPTEES AUX EXIGENCES ECONOMIQUES
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A – LA CLARIFICATION DES CONDITIONS D’UTILISATION DES PROMOTIONS
1) Projet de règlement (article 2)
Ce texte donne une liste exhaustive de définitions des différents types de promotions
qui peuvent être pratiquées par les entreprises. Au sens du projet de règlement, la
promotion des ventes revêt toute forme de rabais, de cadeau, de prime ou de titre de
participation à un concours ou jeu promotionnel. Il décrit ensuite les modes de
communication commerciale couverts, c’est-à-dire « toute forme de communication
destinée à promouvoir, directement ou indirectement, des biens, des services, ou
l'image d'une entreprise, d'une organisation ou d'une personne ayant une activité
commerciale, industrielle, artisanale ou exerçant une profession réglementée ».
L’harmonisation de la réglementation sur la promotion des ventes envisagée par
Bruxelles devrait permettre aux entreprises, qui le souhaitent, d’accéder à de
nouveaux marchés et de fidéliser leurs clients. De prime abord, il convient de
préciser que bénéficieront directement de cette réforme les sociétés spécialisées
dans la conception des promotions des ventes, mais aussi les agences de publicité,
les médias, les sociétés de vente d’espaces publicitaires qui pourront recourir à ces
promotions.
Ce texte entend ainsi éliminer les distorsions de concurrence, en particulier celles
dont sont victimes les PME opérant ou voulant opérer dans d’autres Etats membres
et, pour lesquelles, le manque d’harmonisation des législations relatives aux
communications augmentent les coûts publicitaires des promotions de leurs produits
et de leurs services.
2) Position de la CCIP
a) L’amélioration du contenu juridique de certaines notions
A la lecture de l’article 2 du projet de règlement, la notion de rabais est définie en
fonction des différentes formes qu’elle pourrait être susceptible de prendre :
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réduction, quantité additionnelle de bien ou de service offerte, bon ou coupon
accordant à l’acheteur une baisse de prix sur un bien ou un service à l’occasion d’un
achat ultérieur.
Juridiquement, cette définition est encore trop imprécise et comporte le risque
d’entraîner des problèmes d’interprétation et d’application du règlement, rendant
impossible la détermination du prix de référence sur lequel la promotion est
pratiquée. Dans ce cas, la valeur économique de cette dernière ne peut pas être
appréhendée correctement et ne favorise pas la transparence exigée par la
réglementation ; ce qui pourrait être une source de conflits avec les consommateurs.
Par ailleurs, les concurrents des entreprises réalisant ces promotions ne seraient pas
à même de se positionner pour évaluer la réalité et l’ampleur de la diminution de prix.
Il serait donc particulièrement difficile de vérifier si le produit ou le service en
promotion l’est véritablement.
Pour éviter tout risque de confusion, il est indispensable de prévoirl'encadrement du prix de référence à partir duquel le rabais sera calculé. Sur cepoint, la réglementation française impose au vendeur qui souhaite réaliser unepromotion, de calculer celle-ci par rapport au prix affiché durant les trentederniers jours ; cette disposition permettant de contrôler la réalité de laréduction appliquée aux produits et services. C’est ce principe qu’il faudraitretenir au niveau communautaire.
b) La nécessité de mieux préciser les obligations du vendeur
Si le règlement devait être adopté en l’état, la fréquence des promotions devraitsensiblement augmenter et rendrait très difficile la perception par leconsommateur de la réelle valeur du produit. Pour clarifier cette inflation dunombre de baisses de prix, il serait préférable de maintenir, notamment, lesystème des soldes saisonniers tel qu’il fonctionne actuellement, en ce qu’il
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permet aux différentes formes de commerce de s’organiser au regard desbesoins de leurs activités4.
Ainsi, de nombreux obstacles entourent l’européanisation de l’activitépromotionnelle, il est donc primordial de parvenir à un juste équilibre adaptéaux modes de distribution et aux habitudes d’achat de chaque pays.
B – L’ENCADREMENT DE LA LIBERALISATION DES COMMUNICATIONS COMMERCIALES
1) Projet de règlement (article 3)
Les Etats membres ne pourraient édicter aucune des mesures suivantes :
� interdiction générale de l’utilisation ou de la communication commerciale d’une
promotion des ventes, à moins qu’elle ne soit imposée par le droit
communautaire ;
� limitation de la valeur d’une promotion des ventes, à l’exception des rabais sur les
livres ;
� interdiction des rabais précédant les soldes ;
� autorisation préalable, ou exigence ayant un effet équivalent, en vue de l’utilisation
ou de la communication commerciale d’une promotion des ventes.
2) Position de la CCIP
Le texte, tel qu’il est rédigé, soulève un certain nombre de difficultés. Pour la France,
c’est l’ensemble de la législation relative aux soldes et aux ventes promotionnelles
qui serait remise en cause, les promotions étant susceptibles d’être effectuées tout
au long de l’année.
4 Voir rapport de la CCIP de M. Mabille du 10 mai 2001, « Pour une meilleure adaptation de laréglementation des ventes à prix réduits aux évolutions économiques ».
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De plus, le projet envisage d’autoriser les reventes à perte et les loteries
commerciales. Celles-ci étant actuellement pénalement réprimées en France, leur
libéralisation pourrait avoir des incidences sur le droit de la concurrence et
notamment sur l’interdiction de pratiquer des prix prédateurs. En outre, il serait mis
fin aux réglementations concernant les ventes avec prime.
De telles démarches suscitent de vives réactions de notre Compagnie.
a) Sur l’interdiction de limiter la valeur des promotions des ventes
� Ventes avec primes, cadeaux et jeux promotionnels
Le projet de règlement élimine les interdictions et restrictions nationales relatives aux
primes, aux limites de valeur nationale touchant les rabais, ainsi que celles relatives
à la participation aux jeux promotionnels soumis à achat.
Les ventes avec primes sont aujourd’hui strictement encadrées par le droit français,
qui limite leur valeur et prohibe celles qui excèdent de plus d’un certain pourcentage
la valeur du produit ou du service proposé à la vente.
On rappellera que les cadeaux sont des produits offerts au consommateur, sans
obligation d'achat. Ils sont payés par les détaillants ou d'autres promoteurs afin de
promouvoir un produit ou un service spécifique. Ils peuvent prendre la forme
d'échantillons ou de cadeaux symboliques distribués lors d'un événement
promotionnel.
La limitation de la valeur des primes obéissait à un souci de protection du
consommateur, celui-ci pouvant être incité à acheter le produit pour la prime qu’il
offrait. De nos jours, compte tenu de la qualité de l’information fournie au
consommateur et de la valeur relationnelle de la prime qui permet de pérenniser la
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relation avec la clientèle, cette disposition législative n’est plus d’actualité. Si bien
que la suppression de cette limitation aboutirait à un réelle harmonisation5.
Dans ces conditions, la CCIP considère que la limitation de la valeur desprimes ne doit plus rester en vigueur. En revanche, il faut conserver lasoumission de la participation à un jeu promotionnel à l’absence d’obligationd’achat.
� Incidences sur la revente à perte
En libéralisant la possibilité de revendre à perte les produits, la Commission
européenne risque de déstabiliser les rapports économiques. La possibilité pour les
professionnels de prévoir des conditions contractuelles imposant de prévenir le
fournisseur de la revente à perte de leurs produits par un revendeur ne paraît pas
présenter les meilleurs garanties pour assainir les relations d’affaires. A cet égard, il
semble que la Commission adopte une vision quelque peu « idyllique » des rapports
que peuvent entretenir les fournisseurs et distributeurs. Il en va ainsi également de la
disposition qui aménage la faculté pour les fournisseurs de fixer, dans leur contrat,
les conditions de revente de leurs produits, tout en se réservant la possibilité de
refuser de contracter si ceux-ci devaient être revendus à perte.
Un tel dispositif sous-estime le rapport de dépendance économique danslequel se situent bien souvent certains fournisseurs lorsque la grandedistribution constitue, par exemple, 80% de leur chiffre d'affaires. Ainsi, detelles règles ne tiendraient pas raisonnablement compte des différences depuissance d’achat qui existent entre les PME et les gros détaillants. En effet,ces derniers sont plus à même de soutenir des campagnes publicitaires degrande ampleur, pouvant destabiliser ainsi l’image et la valeur d’un mêmeproduit pour le consommateur.
5 Aujourd’hui la vente avec prime est interdite en Allemagne, au Danemark, en Autriche et en France.En revanche, elle est autorisée en Espagne, au Portugal, en Grèce, en Italie, au Royaume-Uni et enIrlande.
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Certes, la technique de la revente à perte peut, dans certains cas, s’avérer toutà fait efficace lorsqu’elle permet de lancer des nouveaux biens et services surle marché, ou à des fins de liquidation de stocks. Néanmoins, le risque est devoir apparaître des prix abusivement bas6 du coté des gros détaillants qui ontsuffisamment de force économique pour mettre en place une multiplication despolitiques de prix prédateurs, multipliant les offres ou pratiques ayant pourobjet ou pour effet d’éliminer d’un marché ou d’empêcher d’y accéder uneentreprise ou l’un de ses produits.
C’est pourquoi, contrairement à ce que soutient la Commission de Bruxelles, le fait
de contraindre le vendeur à indiquer dans sa communication commerciale que le
produit ou le service est revendu à perte ne devrait pas faciliter l’application des lois
antitrust. La détection des abus de position dominante sera encore plus difficile en ce
que cette obligation d’affichage n’excluerait pas la possibilité pour les opérateurs de
conclure des ententes illicites.
En outre, la levée de l’interdiction de la revente à perte impliquerait d’autres
conséquences. Elle affecterait inévitablement l’image de marque d’un bien ou d’un
service si leur prix peut être facilement abaissé à tout moment, ce qui aboutirait à
leur banalisation. Il s’agit d’une pratique déloyale qui, d’une part, conduit à un
détournement de clientèle et, d’autre part, affaiblit les concurrents. En effet, un tel
système est loin de présenter les meilleures garanties de transparence pour évaluer
la réduction qui est pratiquée, car il est tout à fait possible pour le distributeur qui
revend à perte un produit, d’en vendre un autre avec une marge nettement
supérieure à celle pratiquée habituellement.
6 Les prix risquant d’être abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation etde commercialisation.
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Pour toutes ces raisons, la CCIP demande fermement le maintien del’interdiction de la revente à perte7.
On précisera, pour conclure sur ce point, que la libéralisation de la revente à perte
suscite de vives controverses à l’intérieur de l’Union, et ce, pour des raisons
différentes. Ainsi, au Royaume-Uni, si ce type de pratique est actuellement autorisé,
les professionnels contestent l’obligation de mention explicite sur leur support
promotionnel, comme les y contraindrait le projet de règlement.
b) Sur l’interdiction de maintenir une demande d’autorisation préalable pour les
promotions des ventes
L’interdiction, envisagée par le projet de règlement, de prévoir une autorisation
préalable pour certaines formes de ventes spécifiques comporte diverses incidences
dangereuses sur notre législation nationale, avec la remise en cause du régime des
ventes au déballage et des opérations de liquidation des stocks actuellement
soumises à une autorisation préalable, mais aussi de l’article 49 de la récente loi sur
les nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001 selon lequel l’annonce des
prix des fruits et légumes frais dans des catalogues est subordonnée à la validation
par des accords interprofessionnels.
La prohibition générale de soumettre à une autorisation préalable la réalisation de
tous les types de ventes promotionnelles n’est pas économiquement justifiée.
� En matière de ventes au déballage, dans un souci de protection du commerce
local, notre Compagnie8 reste très attachée au maintien, et même aurenforcement, de la procédure administrative liée à l’organisation des ventesau déballage qui limite dans le temps la durée de ce type de commerce. Il est
indispensable de maintenir certains gardes-fous afin de préserver et de défendre le
7 D’ailleurs, en ce sens, voir le projet d’avis de la commission de l’environnement, de la santé publiqueet de la politique des consommateurs, à l’intention de la commission juridique et du marché intérieursur la proposition de règlement du Parlement Européen et du Conseil relatif aux promotions desventes dans le marché intérieur, (COM(2001) 546- C5-0475/2001- 2001/0227((COD)), 7 février 2002.8 Cf. rapport du 10 mai 2001, précité.
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commerce local et de centre-ville qui, dans le cas contraire, serait constamment
amené à souffrir d’une certaine forme de concurrence déloyale. Dans le même sens,
les grandes surfaces prennent aujourd’hui de plus en plus l’habitude d’organiser des
ventes au déballage, ce qui les amène bien souvent à étendre de manière détournée
leur surface de vente.
L’argument de Bruxelles qui tendrait à démontrer que les autorisations
administratives pénaliseraient financièrement les nouveaux concurrents en les
obligeant à se conformer à une procédure lourde en dehors de leur pays
d'établissement, n’est pas fondé. En effet, les ventes au déballage répondent à une
philosophie commerciale bien différente en ce qu’elles peuvent être saisonnières ou
propres à des manifestations organisées par les communes. Elles ont ainsi plus
aisément vocation à être locales que nationales et ne correspondent pas aux
objectifs poursuivis par les communications commerciales transfrontalières. En outre,
le maintien d’une autorisation administrative est également un gage de protection du
consommateur, dans la mesure ou toute autorisation préalable est subordonnée à la
transmission de pièces justificatives par le vendeur.
� En ce qui concerne les liquidations des stocks, il faut bien garder à l’esprit que les
autorisations actuellement requises correspondent à des besoins ponctuels et
spécifiques aux aléas d’un commerce donné (travaux, cessation d’activité, force
majeure). Il n’y a donc pas lieu de remettre en cause ce dispositif qui n’affectepas la liberté de la concurrence.
� S’agissant des dispositions concernant la nouvelle réglementation des fruits et
légumes frais, il serait extrêmement préjudiciable de la remettre en cause, sonobjet principal visant à moraliser et à assainir les pratiques commercialesentre fournisseurs et professionnels de la distribution.
En tout état de cause, la libéralisation illimitée des ventes promotionnelles
entraînerait un bouleversement des politiques tarifaires entre fabricants et
distributeurs, et plus largement, dans la relation industrie/commerce.
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c) Sur l’affirmation de la reconnaissance mutuelle : un principe juridique contestable
en ce domaine spécifique
Dans le souci de garantir un maximum de sécurité juridique aux opérateurs
économiques et aux consommateurs, l’article 3§2 du projet envisage de soumettre
les restrictions nationales résiduelles au principe de reconnaissance mutuelle, afin de
permettre aux opérateurs légalement établis dans un Etat membre de pouvoir fournir
leurs produits ou services librement dans les autres pays. Ainsi, la législation
restrictive de l’Etat membre dans lequel se déroule la promotion devra s’effacer au
profit de la législation plus libérale de celui dans lequel le promoteur est établi.
Soucieuse d’éliminer toute barrière réglementaire protectionniste, la Commission de
Bruxelles entend accorder une pleine valeur juridique au principe de reconnaissance
mutuelle. Il s’agirait de lever toutes les contraintes auxquelles sont actuellement
soumis les services des agences de publicité, des médias, les services d’élaboration
de plans médias et de vente d’espaces publicitaires, les opérations de marketing
direct, les services de distribution et ceux en matière de relation à la clientèle.
Toutefois, comme il est très justement souligné par la proposition d’amendement
parlementaire9, l’application du principe de reconnaissance mutuelle comporte des
difficultés pratiques : celle pour le consommateur de connaître le droit auquel est
soumis le produit qu’il achète ou celle pour le juge national d'appliquer un droit
étranger contradictoire.
C'est pourquoi il conviendrait de supprimer en ce domaine particulier desventes promotionnelles, la référence au principe de reconnaissance mutuelle.Conformément à la règle de subsidiarité, les Etats membres doivent pouvoirédicter les restrictions nationales qu’ils jugent proportionnées avec l'objectifde garantir la protection des acteurs économiques (vendeurs etconsommateurs ).
9 Cf. amendement n° 18 du projet d’avis précité.
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II – POUR UNE RATIONALISATION DES OBLIGATIONSD’INFORMATION DU CONSOMMATEUR ET DES
MECANISMES DE RECOURS
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A - LE RENFORCEMENT DE L’OBLIGATION D’INFORMATION
1) Le projet de règlement (article 4)
Le texte prévoit des obligations d’information mises à la charge de l’organisateur de
la promotion, telles que celle de mentionner la revente à perte, l’importance de la
réduction accordée, la valeur réelle du cadeau ou de la prime offerte, ou encore en
cas de jeu promotionnel, les chances de gain réelles ou estimées. En annexe de ce
projet, figure également une liste d’informations qui doivent être produites de
manière claire et non équivoque par le vendeur.
Enfin, le projet énonce que les jeux promotionnels ne peuvent être conçus de façon à
encourager les mineurs à divulguer des données à caractère personnel. Il prévoit, en
outre, que les règles garantissent que les échantillons gratuits sont de nature à ne
pouvoir blesser les enfants, et il prohibe la distribution gratuite de boissons
alcoolisées à des mineurs et adolescents dans toute l’Europe.
2) Position de la CCIP
Si nul ne conteste la nécessité d’accorder une très grande protection aux mineurs,
l’exigence de recueillir le consentement préalable du responsable légal constitue une
contrainte parfois délicate à satisfaire en matière de commerce électronique, compte
tenu du caractère virtuel des processus de vente. Aussi, l’utilisation de systèmes
sécurisés d’authentification des parties et de signatures certifiées serait-elle
indispensable.
B – L’EXTENSION DES MECANISMES DE RECOURS
1) Le projet de règlement (article 6)
À la demande d'une autorité judiciaire ou administrative, le promoteur est tenu de
prouver que les informations visées à l'article 4 sont exactes. Il doit fournir
gratuitement une adresse chargée de recevoir les plaintes qui lui sont destinées. S’il
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ouvre un service d'assistance téléphonique à l'occasion d'une promotion des ventes,
il veille à ce que les communications ne soient pas soumises à un tarif majoré.
En cas de litige, ce même promoteur doit répondre à une plainte initiale dans les six
semaines à compter de la date de réception de celle-ci. Cette plainte et la réponse
sont présentées par écrit, y compris par les moyens électroniques, sachant que la
réponse sera rédigée dans la langue de la communication de la promotion des
ventes.
Enfin, il est tenu de mentionner dans la communication commerciale relative à la
promotion des ventes tout mécanisme de recours extrajudiciaire ou code de conduite
auquel il a souscrit, et d’en expliciter les modalités.
2) Position de la CCIP
� S’agissant du traitement des plaintes, afin de permettre au litige de prendre date, il
est indispensable que le promoteur puisse accuser réception des plaintes dans les
huit jours par lettre recommandée, y compris par voir de courrier électronique.
Par ailleurs, dans un souci de sécurité juridique, la réponse à la plainte formulée par
le client doit être écrite dans la langue du pays dans lequel la communication a été
réalisée.
� Quant aux mécanismes de recours extrajudiciaires de résolution des litiges, ils
sont particulièrement appropriés dans le contexte de cette réforme des ventes
promotionnelles. Ils présentent l’avantage de résoudre plus rapidement les litiges et
de faciliter le recours amiable tout en présentant une certaine transparence. Il s’agit
d’une position constante de la CCIP et récemment réitérée lors de la consultation sur
le Livre vert relatif à la protection des consommateurs10.
10 Rapport du 24 janvier 2002, précité. Voir aussi les recommandations de la Commission Européennedu 30 mars 1998 (JOCE L 115 du 17 avril 1998, p. 31) et du 4 avril 2001 (JOCE L 109 du 19 avril2001, p. 56).
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D’ores et déjà, notre Compagnie intervient régulièrement, de manière non formelle
(échange de courriers entre les parties), dans le règlement amiable des litiges de la
consommation qui opposent des professionnels aux consommateurs ; ce mode de
résolution évite la sanction judiciaire et est plus simple et moins coûteux pour les
parties.
Toute extension au niveau européen, en particulier avec la participation du réseau
consulaire, doit être encouragée.