Download - Nutrition 1 Partie
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
1/20Tl. : 0144 397575 - www.frm.org
La revue de la Fondation Recherche Mdical
&RECHERCHE SANT
54, rue de Varenne 75007 Paris
Vos dons en action p. 20
Une maladie rare:
le syndrome de Coffin-Lowry p. 24
Point de vue p. 26
Le traitement hormonal substitutif
Avec Bernard Blanc
La Fondation lcoute p. 28
Rencontre Sant:
dpressions et maladies
maniaco-dpressives p. 28
Questions-rponses p. 37
Vos dons en action p. 20
Une maladie rare:
le syndrome de Coffin-Lowry p. 24
Point de vue p. 26
Le traitement hormonal substitutif
Avec Bernard Blanc
La Fondation lcoute p. 28
Rencontre Sant:
dpressions et maladies
maniaco-dpressives p. 28
Questions-rponses p. 37
p. 8 Prvention par la nutrition
tre acteurde sa sant
tre acteurde sa sant
tre acteurde sa sant
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
2/202 Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 ju i ll e t 2 0 03
Longtemps, la mdecine est reste conforme la description quen
donnait Molire. Ce sont les dcouvertes de la biologie qui lont peu
peu nourrie, qui lont quipe de pratiques et de mdicaments de
plus en plus puissants. Lesprance de vie sest ainsi accrue au cours
de ce sicle de manire nagure encore inimaginable. Le temps est
proche o un individu sur deux, dabord la femme, atteindra lge de 100 ans.
Ce sont surtout les rvolutions de la biologie qui ont entran les rvolutions
mdicales.La biologie est une fois encore en train de changer. Depuis sa naissance, au dbut
du XIXe sicle, elle a t essentiellement une science danalyse. Avec le dcryp-
tage du gnome humain, avec ltude des protines et de leurs interactions appa-
rat une mdecine nouvelle. Dune part, il va tre possible de prvoir, chez les
individus, certaines lsions dorigine gntique; do une mdecine de prvision.
Dautre part, la dsorganisation du vivant qui a caractris deux sicles de bio-
logie va venir se substituer une phase de reconstruction : reconstruction de tissus
ou dorganes avec les cellules souches. Cest donc une mdecine de rparation,
une mdecine de rgnration qui peu peu viendra se mettre en place.
Tout cela est prometteur. Mais lapplication reste encore loigne. Mme si lon atrouv le gne de la mucoviscidose, on ne sait toujours pas traiter cette maladie.
On ne sait toujours pas bien ce quest le rhumatisme. On ttonne sur le traite-
ment de la sclrose en plaques. On peut attendre larrive inopine de nouveaux
virus inconnus et redoutables. Do la ncessit de poursuivre avec acharnement
recherches fondamentale et applique. Et financer ces recherches, cest le but
mme de la Fondation Recherche Mdicale.
La Fondation Recherche Mdicaltablissement reconnu
dutilit publique par dcret
du 14 mai 1965, est membrefondateur du Comit de la Chartede Dontologie des associations
humanitaires.
D I T O R I A L Recherche & Santestla revue trimestriellede la FondationRecherche Mdicale.
Directeur de la publication:Pierre Joly,Prsident de la Fondation
Recherche Mdicale
Directeur gnral:ric Palluat de BessetComit de rdaction:Pr Claude DreuxJolle FinidoriAgns Lara
Marie-Franoise LescourretMarielle MayoCatherine Monnierric Palluat de BessetClaude PouvreauPriodicit trimestrielleCopyright: la reproductiondes textes, mme partielle,est soumise notre autorisationsur demande crite pralable.Ont particip au dossier :Serge HecbergNicolas DanchinMarie-Franoise Rolland-CacheJean-Michel OppertDenis LaironPaule MartelOnt particip la rdaction:Louise Blottire (dossier)Clara DelpasCorinne DraultChantal GuniotMartine LochouarnFranoise MoinetPhoto de couverture:Garo/PhanieConception, ralisation:
26, rue du Sentier75002 Paris (rf. 5895
Imprimeur : Tiempo4, rue de Sane- 75014 ParisUsine : Carretera de Ajalvir28864 Ajalvir Madrid- Espagne.
Date et dpt lgal parution:ISSN 0241-0338Dpt lgal n 8117Numro CP 62273
Pour tous renseignementsou si vous souhaitez vousabonner, adressez-vous :
Fondation RechercheMdicale
54, rue de Varenne75007 Paris
Service donateurs:0144397576
Information scientifique:0144397592Publication:0144397565
Prix de labonnementpour 4 numros: 9,15 Chque lordre de la Fondatio
Recherche Mdicale
Site Internet: www.frm.org
DR
Franois Jacob,biologiste, prix Nobel de mdecineet membre de lAcadmie franaise
De la recherche encore
et toujours
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
3/20
CHOS SCIENTIFIQUESUn driv de la vitamine B1 pour lutter contre le diabte,le bacille du charbon pour traiter le cancer, la miseau point dun pansement biologique Tour dhorizondes progrs de la recherche mdicale.
DOSSIERPrvention par la nutritionUne bonne nutrition permet de rduire les risques demaladie cardio-vasculaire et de cancer. Nous pouvonsagir pour prserver notre capital sant, mais gare auxides fausses
Quand lhygine de vie se fait protectriceDossier ralis avec la collaboration du Pr SergeHercberg, directeur de lunit Inserm 557 et de lunitde surveillance et dpidmiologie nutritionnelle mixteInVS-Cnam.
Nutrition: combattre les ides faussesLavis du Pr Serge Hercberg.
Lpidmiologie: un outil incontournableLtude SU.VI.MAX.
Prserver son capital sant chaque jour
VOS DONS EN ACTIONDans cette rubrique, la Fondation Recherche Mdicaleprsente chaque trimestre une slectiondes 700 travaux quelle soutient annuellement.
Comprendre les mcanismes de la satit
Maladies du cur et des vaisseaux: la piste inflammatoireMaladies prions: une stratgie vaccinale envisageable
Premires donnes franaises sur la sant des schizophrnes
Maladie rare: syndrome de Coffin-Lowrytude dun retard mental.
POINT DE VUETraitement hormonal substitutif:une question dquilibreEntretien avec le Pr Bernard Blanc, directeur
du service de gyncologie-obsttrique de lhpitalde la Conception, Marseille.
LA FONDATION LCOUTERencontre SantRemise des Prix de la Fondation Recherche Mdicale
Bilan 2002 du soutien la recherche
QUESTIONS-RPONSESAvec le Pr Ph. Chanson et le Dr N. Hnhatemian
4
8
10
15
16
18
20
20
21
22
23
24
26
28
32
33
37
S O M M A I R E
Page 7Le fibrinogne:
un sparadrap
biologique.
Aprifel
CNRI
Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 ju i ll e t 2 0 03
Page 14 - Fruits et lgumes contre le cancer.
Page 31 - Qui veut gagner des millions joue pour la FRM.
DR
Page 20Graldine Ibarz
tudie les mcanismes
de la satit.
StphaneLaure
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
4/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S an t n 9 5 ju i ll et 2 0 034
Parce que nous souhaitons vous communiquer une informationde qualit, hors des effets dannonce, indpendante des intrtsfinanciers, nous avons rassembl, dans cette rubrique, les chos
scientifiques et les faits les plus marquants de la recherchemdicale mondiale de ces derniers mois. Un driv de la vitamine B1
pour lutter contre les complications du diabte, le bacille du charbonpour traiter le cancer, la dcouverte du gne du somnanbulisme, lesprogrs sur les cellules souches ou encore la mise au point dun pansementbiologique Voici quelques-unes des nouvelles avances mdicales.
Source: Nature Medicine, fvrier 2003.
College of Medicine). Mais,pour lheure, seuls des essaissur des rats ont t raliss:les animaux diabtiques traits la benfotiamine ne prsentaientpas de lsions de la rtineau terme de neuf mois detraitement, contrairement ceuxqui avaient reu un placebo.Selon les chercheurs, ce rsultatsexplique par le fait quela molcule de benfotiaminesoppose trois mcanismes
biochimiques majeurs impliqusdans les lsions vasculairescauses par lhyperglycmie.Alors que la plupart desmdicaments actuels ou en coursde dveloppement bloquentun seul de ces mcanismes, la
benfotiamine bloque lensembledu systme. Ces rsultats restenttoutefois confirmer par desessais de plus grande envergurechez lanimal avant dtre testssur lhomme. I
Hyperglycmie: excs de glucose (sucre)dans le sang.
Placebo: substance inactive substitue unmdicament.
Un driv de la vitamine B1prviendrait les complications
La benfotiamine, drive de la vitamine B1 (ci-dessus), prvient les lsions des vaisseaux dues lhyperglycmie.
complications: ccit, insuffisancernale, amputation des membresinfrieurs ou encore crisecardiaque. Notre rsultatest dautant plus prometteur quele driv de la vitamine B1 quenous avons utilis, la benfotiamine,est sans effets secondaires, noteMichael Brownlee, le chercheurnew-yorkais qui a dirig ltude(Diabetes Research Center,
CHOS SCIENTIFIQUES
DIABTE
CEIV/Roche/Inserm
Des biologistes amricainsont dcouvert quundriv de la vitamineB1prviendrait les ravages
causs par lhyperglycmiecaractristique du diabte.En effet, chez les diabtiques,lexcs chronique de glucosedans le sang est lorigine delsions des vaisseaux sanguinsentranant de nombreuses
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
5/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S an t n 9 5 ju i ll e t 2 0 03
Source: PNAS,janvier 2003.Les sujets les plus sensibles la douleur possdentun gne mut.
Les chercheurs utilisent la toxine du bacille de lanthrax (ci-dessus) pour tuer les cellules cancreuses.
De la guerre biologiqueau traitement du cancer
Pourquoi certaines personnessont-elles plus douillettes quedautres? Le Dr Jon Kar Zubieta,chercheur luniversit duMichigan, apporte aujourdhuiun lment de rponse. Dansune tude mene auprs de vingt-neuf volontaires, il vient en effetde dcouvrir que les sujets les plussensibles la douleur possdentun gne portant une mutation
que ne prsentent pas les sujetsla tolrant mieux. Ce gne codeune enzyme dnommecathchol-O-mthyltransfrase,prsente dans le cerveau. Cetteenzyme permet la dgradationde deux neuromdiateursjouant unrle essentiel dans la perception dela douleur: la dopamine etla noradrnaline. Les personnesles plus sensibles possdentune enzyme mute peu activesur ces deux neuromdiateursalors que, chez les individusressentant moins lintensitde la douleur, lenzyme estau contraire hyperactive. I
Neuromdiateur: messager chimiquescrt par les neurones et servant
transmettre une information dune cellule une autre.
ANTHRAX DOULEUR
Dur ou douillet?Cest dans les gnes!
Institut
Pasteur
M a y / B S I P
Arme biologique redoutable, le bacille du charbon (lanthraxpour les Anglo-Saxons) pourrait donner naissance untraitement anticancreux original et puissant. Ce bacille exerce
ses effets toxiques par le biais dune toxine qui ne devient active
que si elle est clive par des enzymes particulires de lorganisme,
les furines. Une quipe amricaine a modifi la structure
de la toxine du charbon pour quelle soit active non plus parles furines mais par lurokinase, une enzyme prsente en grande
quantit la surface des cellules cancreuses, mais quasiment
absente des tissus normaux. Administre dans lorganisme,
cette toxine modifie dtruit les cellules tumorales. Chez des
souris normales, elle na entran aucune toxicit visible, mme
dose leve. Mais chez des souris atteintes de diffrents cancers
(fibrosarcomes, carcinomes pulmonaires, mlanomes) rsistant
habituellement aux traitements, deux injections ont suffi
pour rduire la taille des tumeurs de 86% 98%. La majorit desfibrosarcomes a mme compltement disparu aprs une seule
injection. Lurokinase tant prsente dans pratiquement tous
les types de tumeurs et de mtastases, cet agent anticancreux
pourrait avoir des indications trs larges. Coupl des molcules
radioactives ou fluorescentes, il pourrait aussi aider visualiser
les tumeurs, et avoir ainsi des applications diagnostiques. I
Source: Science, fvrier 2003.
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
6/20
Muqueusede sinus
maxillaire.
Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S an t n 9 5 ju i ll et 2 0 036
CHOS SCIENTIFIQUES
permettre dtablir un diagnosticavec certitude chez les patientsvivants. I
Une quipe britannique a dcouvert chez la souris le moyendempcher la transformation de protines cellulairesnormales de prion (PrPC) en protines toxiques (PrPSc). Selon
des tudes rcentes menes in vitro, des anticorps spcifiques
dirigs contre les protines de prion suffisent empcher cette
transformation. Administrs immdiatement des souris aprs
exposition lagent de lencphalopathie spongiforme bovine
la maladie de la vache folle , ces mmes anticorps ont
bloqu le dveloppement de la maladie. Moins dun an aprs,
ces souris taient toujours en vie, contrairement aux animaux
non traits. I
Normalement prsent dans lorganisme,le prion change parfois de forme. Il saccumuledans le cerveau et induit alors la maladiede Creutzfeldt-Jakob. Comment prvenircette transformation en prion pathologique?
Source: Nature, mars 2003.
Source: Molecular Psychiatry, mars 2003.Voir aussiRecherche & Sant n 94 p. 22,Mieux comprendre les bases gntiquesdu somnambulisme.
PRIONS
La propagation du prion stoppechez la souris
Un test diagnostique du vivant des patients?
Source: New England Journalof Medicine,fvrier 2003.
Le somnambulisme, qui survientsurtout chez les enfants lorsdu sommeil lent profond, possdeune composante hrditaire.Les parents ont en effet souventt atteints eux-mmes.Des anomalies dun gne appelHLA-DQB1 ayant t associes certains troubles du sommeil(narcolepsie), une quipe franco-suisse a tudi ce gne chez
soixante personnes somnambuleset soixante personnes nonsomnambules. Rsultats: 35%des sujets du premier groupeprsentaient une anomalie dece gne, contre seulement 13,3%de ceux du second groupe ;un individu porteur de lanomalieprsenterait un risque 3,5 foisplus lev dtre somnambule.Le fait que le gne HLA-DQB1appartienne au complexe HLA,un ensemble de gnes impliqusdans le systme immunitaire, laissesupposer que le somnambulismepourrait tre li un drglementimmunitaire. I
Narcolepsie: besoin excessifet pathologique de dormir survenantpar accs en plein jour.
lectroencphalogramme montrant les zonescrbrales actives au cours du stade IV desommeil profond.
Le somnambulisme,une affection gntique?
SOMMEIL
CNRI
Dans la maladie de Creutzfeldt-Jakob sporadique(85% des cas), laccumulationde la protine prion dans
le cerveau provoque des troublesneurologiques peu caractristiques(mouvements anormaux, dficitssensitifs, raideur excessive),voluant vers la dmence. Jusquprsent, seule lanalyse des tissusdu cerveau aprs dcs permettaitde confirmer le diagnostic.Or, une quipe italienne vientde montrer quil existe des dptsde prions dans la muqueuseolfactive. Ces rsultats suggrentquune biopsie nasale pourrait
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
7/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S an t n 9 5 ju i ll e t 2 0 03
Lhormone de croissancene fait pas rajeunir
partir dune protinedu sang, des chercheursde Virginie (tats-Unis) sontparvenus mettre au point unegaze biologique qui pourraittre utilise comme pansementpour faciliter la cicatrisation.Cette protine du sang est lefibrinogne, un lment essentielpour la rparation des tissus.En cas de blessure, le fibrinogneest transform, grce une enzyme, en un fin rseaude fibrine qui couvre la plaie,stoppe lhmorragie et aidela cicatrisation. Les chercheurssont parvenus reproduireen laboratoire ce rseau fibreux,en soumettant du fibrinogneextrait du sang un champlectrique. Plac sur une plaie,ce pansement biodgradablepourrait la protger de linfection,arrter les saignementset favoriser la cicatrisation,les cellules se dveloppant
Un sparadrap biologique
VIEILLISSEMENT
CICATRISATION
Des cellules tout fairedans le sang
CELLULES SOUCHES
La dcouverte de cellulessouches pluripotentes a donnlimmense espoir de pouvoir rparerles tissus malades. Les embryonsreprsentent la principale sourcede ces cellules. Cependant, au coursdes dernires annes, des cellulessouches dotes de propritssimilaires ont t identifiesgalement dans la moelle osseusedorganismes adultes. Rcemment,
en examinant le cerveau de femmesayant reu une greffe de moelleosseuse, des chercheurs y ontobserv la prsence de cellulesissues du greffon et transformesen neurones, ce qui confirme bienla capacit de ces cellules sintgrerdans des tissus autres que la moelleosseuse. Dans une autre tude, cest partir dune simple prise de sangquune quipe amricaine a obtenudes cellules souches pluripotentes.Incubes en prsence de diversfacteurs de croissance, ces cellulesse sont transformes en globules
blancs, en neurones, en cellulesde foie, de peau ou de paroide vaisseau sanguin. Une quipeallemande est parvenue, quant elle, obtenir des cellulescardiaques. Si ces donnes seconfirment, ces cellules, faciles stocker, pourraient permettre desthrapies cellulaires beaucoup plussimples, tout en vitant le recoursaux cellules souches embryonnaires,sujet trs controvers. I
Cellules souches pluripotentes:en prsence de facteurs de croissanceappropris, ces cellules immaturessont susceptibles de se transformerpour donner naissance aux divers typescellulaires de lorganisme.
Sources: PNAS,fvrier 2003;
PNAS, mars 2003; Circulation,fvrier 2003.
Source: New England Journal
of Medicine,fvrier 2003.
sur ce support pour formerun nouveau tissu. Les chercheursessaient maintenant de combinerdivers facteurs de croissance etprotines pour former une trame
biodgradable capable de stimulerla croissance des diffrents tissusde lorganisme. I
Source: Nano Letters,fvrier 2003.
C N R I
Dans les annes 1990, plusieurspublications ont fait tatdes effets bnfiques de lhormonede croissance sur le vieillissement:diminution du tissu adipeuxau profit du tissu musculaire,meilleure oxygnation des tissus,amlioration fonctionnelleDepuis, les thrapies vantantles mrites de cette hormone ontfleuri. Mais lanalyse critique des
essais mens invite la prudence:les effets immdiats de cettehormone, pas plus que ses effets
long terme, nont pu treclairement tablis. En particulier,lhormone de croissance stimuleraitchez lhomme la productiondIGF-1 (Insulin-like Growth Factor 1),un facteur de risque tabli decancer de la prostate. Un moyenplus sr contre les effets de lge:une alimentation quilibreet uneactivit physique rgulire(voir pp. 18 et 19)! I
Rseau de fibrine, qui bloque le passagedes globules rouges et favorise la cicatrisation.
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
8/208 Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 j u il l et 2 0 03
D O S S I E R
BrandXPictures
Manger des fruits et lgumes, varier
et quilibrer ses repas, bouger
Ces mesures simples peuvent tre
la cl dune bonne sant.
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
9/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 j u il l et 2 0 03
Obsit :
Dans les maladies cardio-vasculaires et les cancers,de nombreux facteurs sont en cause. Sil est impossible
ou trs difficile dagir sur certains dentre eux,comme le patrimoine gntique, par exemple, il en estun qui offre une libert de manuvre non ngligeable:
la nutrition. Augmenter les facteurs nutritionnels
de protection et rduire les facteurs de risque,cest agir pour prserver son capital sant. Mais gareaux ides fausses qui circulent dans ce domaine !
Seules les connaissances valides par la communautscientifique peuvent se voir accorder crdit.
Notre revue Recherche & Santsen fait lcho.
QUAND LHYGINE DE VIE SE FAIT PROTECTRICE p. 10
NUTRITION: COMBATTRE LES IDES FAUSSES p. 15
LPIDMIOLOGIE: UN OUTIL INCONTOURNABLE p. 16
PRSERVER SON CAPITAL SANT CHAQUE JOUR p. 18
Prvention par la nutrition
TRE ACTEURDE SA SANT
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
10/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 j u il l et 2 0 03
D O S S I E R
p r v e n t i o n p a r l a n u t r i t i o n
Dossier ralis avec la collaboration du Pr Serge Hercberg, directeur de lunit Inserm 557 (UMR Inserm/Inra/Cnam)et de lunit de surveillance et dpidmiologie nutritionnelle mixte InVS-Cnam.
ide quil existe un lien entrenutrition et sant ne date pasdaujourdhui. Progressivement,des hypothses plus prcises ontvu le jour. La relation entre alimen-
tation riche en graisses satures, choles-trolmie et maladies cardio-vasculairesa t souponne ds les annes 1970,
partir des rsultats de ltude pidmiologiquemene dans sept pays dEurope, dAmrique etdAsie par le docteur Ancel Keys, cite commeexemple le Pr Serge Hercberg.Au cours des dernires dcennies, les relationsqui existent entre la nutrition et certainesmaladies (diabte, ostoporose, obsit,maladies cardio-vasculaires et cancers) ontt prcises puis tablies scientifiquement.
Le programme national nutrition-sant(PNNS), lanc en 2001, dfinit les recom-mandations nutritionnelles dont le ministre
Quand lhygine de viese fait protectrice
L
10
de la Sant en France entend promouvoirlapplication, en association avec lInstitunational de prvention et dducation pourla sant (INPES), lAgence franaise descurit sanitaire des aliments (Afssa)
lInstitut national de veille sanitaire (InVSet des ministres de lducation, delAgriculture, de la Recherche et duSport. En effet, le concept de nutritioninclut lalimentation, bien sr, mais ausslactivit physique, apports et dpensednergie devant squilibrer pour unehygine de vie optimale.Parce que la sant de la population franaisea beaucoup gagner suivre les recommandations du PNNS, mdias, professionnels dela sant, enseignants, collectivits locales et
territoriales sont invits participer leurdiffusion. La Fondation Recherche Mdicalea choisi de sassocier cette dmarche din-formation en se concentrant sur deuxgrandes familles de pathologies aux forterpercussions en sant publique: les maladiescardio-vasculaires et les cancers.
Nutrition et maladies cardio-vasculaires
Bien quune diminution de 25% de lamortalit cardio-vasculaire des 35-64 an
ait t constate en France entre 1981et 1991, les maladies cardio-vasculaireconstituent toujours la premire cause dedcs, ainsi que le premier motif de miseen affection de longue dure par lesrgimes de Scurit sociale. Il sagit doncdun problme de sant publique importanet dont lampleur risque de crotre dans lesprochaines annes, en raison notammendu vieillissement de la population.La nutrition apparat comme un facteurmajeur pour agir sur lincidence de ces GG
10
Linfarctus du myocarde (ici, en coupe sagittale) peut tre prvenu.
CentreJean-JacquesPerrin/CNRI
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
11/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 j u il l et 2 0 03
Le circuit physiologique des graisses
1) Circulation du cholestrol et des autres lipidesalimentairesLe cholestrol et les autres lipides alimentaires sont
digrs (1) par des enzymes spcialises, scrtes par
lestomac et le pancras. Les produits de cette digestion
sont absorbs au niveau de lintestin grle (2).
Les lipides sont alors transports sous forme de gouttelettes(chylomicrons) jusqu proximit des cellules adipeuses
et des muscles, par lesquels ils sont capts (3): les cellules
adipeuses formant le tissu graisseux stockent les lipides,
tandis que les muscles les utilisent comme source dnergie.
Les lipides non distribus restant dans les gouttelettes sont
dchargs dans le foie (4).
Celui-ci distribue rgulirement dans la circulation le
cholestrol et les autres lipides ainsi capts ou nouvellement
synthtiss sous la forme de lipoprotines LDL (globules
forms par lassociation de lipides et de protines). Ces LDL
alimentent les tissus, y compris le foie et les artres (5).
Cest ici que se situe le risque de constitution dune plaquedathrome. Les HDL, de leur ct, se chargent du surplus
de cholestrol dans les cellules des organes autres que
le foie et le rapportent au foie (6). Lexcs de cholestrol
y est transform en sels biliaires et vacu via la vsicule
biliaire dans lintestin (7), o il aide la digestion des lipides.
La moiti de ce cholestrol est limine dans les selles (8),
le reste tant rabsorb avec le cholestrol ingr.
2) Formation des plaques dathromeLes plaques dathrome se forment dans les grosses
et moyennes artres (aorte, coronaires, carotides, etc.).
Au dbut, il sagit dun renflement dans la paroiartrielle, constitu de lipides et de tissu fibreux (1), (2).
La plaque se calcifie progressivement et finit par sulcrer.
Un hmatome ou un caillot peuvent alors se constituer
(risque docclusion) (3). Des fragments de la plaque
ou du caillot risquent aussi de se dtacher et de boucher
des artres plus petites (embolie) (4). Dans le meilleur
des cas, la plaque ulcre cicatrise mais son volume a
augment, perturbant beaucoup la circulation sanguine.
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
12/2012 Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 j u il l et 2 0 03
verres de vin par jour pour une femme et plus detrois pour un homme , en augmentant la tensionartrielle, constitue un autre facteur de risquecardio-vasculaire. En effet, lhypertensionartrielle a notamment pour effet dacclrer la formation des plaques dathromeCelles-ci obstruent progressivement leartres et diminuent llasticit de leurparois, faisant le lit des infarctus du myocardeet des accidents vasculaires crbraux (lsiondu cerveau dues une hmorragie ou
lobstruction brutale dune artre crbrale)Le cholestrol en cause
Il est un autre facteur nutritionnel quaugmente le risque cardio-vasculaire en
favorisant la formation de plaques dathrome: le cholestrol. Constituant indispensable de la membrane des cellules, acteur cldans la synthse de certaines hormones ede la vitamine D, le cholestrol est essentie la vie. Mais, prsent en trop grande quantit
dans le sang, il sinfiltre dans les parois des artreet favorise progressivement leur obstruction elaccident coronarien, indique le docteuDenis Lairon, directeur de lunit Inserm 476 luniversit de la Mditerrane (Marseille)Le cholestrol sanguin provient pour untiers de lalimentation. Les deux tiers restants sont synthtiss par lorganismeNormalement, un systme de rgulationcontrle le taux de cholestrol, prcise le docteur Lairon. Mais ce systme prsente dedfaillances constitutives chez environ 50% deindividus on parle de sujets hyperrpondeurs au cholestrol et des dfaillances lieau vieillissement chez tous. Comme il nexiste
pour linstant aucun moyen de dpister cdfaillances grande chelle, la seule option qu
D O S S I E R
p r v e n t i o n p a r l a n u t r i t i o n
La nutrition est un facteur majeur pouragir sur lincidence des maladies cardio-vasculaires.
pathologies. En effet, la prvalence desmaladies cardio-vasculaires varie beaucoup selonles diffrentes populations, et ces variations ne
sont pas tant le fait de particularits gntiquesque celui de modes de vie, et particulirement demodes nutritionnels, explique le professeurNicolas Danchin, cardiologue lhpitaleuropen Georges-Pompidou, Paris. Cecia t vrifi rcemment travers ltude dela population chinoise, dont le nombre decas de maladie cardio-vasculaire saccrot
mesure que son alimentation soccidentalise.Grce de nombreuses tudes pidmio-logiques, cliniques et physiopathologiques,il a t possible didentifier les facteurs nu-tritionnels cls. Le rgime mditerranen,
pauvre en graisses dites satures (que lontrouve principalement dans les produits dorigineanimale) et riche en graisses mono-insatures(prsentes dans lhuile dolive, par exemple), en
graisses polyinsatures (dont les clbres omga-3,prsents, entre autres, dans les huiles de colza etde noix et les poissons gras), en fibres et en agents
antioxydants (fruits et lgumes verts), a t asso-ci une diminution trs importante du risquecardio-vasculaire, note le Pr Danchin. Uneconsommation excessive dalcool plus de deux
GGG
Lexcs de cholestrol a tendance sinfiltrer dans la paroi des artres, favorisantla formation de plaques dathrome lorigine de maladies cardio-vasculaires.
M.
Scotto/Inserm
Prvalence: chiffre faisant tat du nombre de casdune maladie un moment donn, dans une populationdonne.
Accident coronarien: obstruction totale ou partielledes artres coronaires irriguant le muscle cardiaque.Celui-ci, ntant plus ou insuffisamment oxygn, nepeut plus se contracter normalement: cest linfarctusdu myocarde.
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
13/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 j u il l et 2 0 03
Morbidit: nombre de malades dans la population.
Prinatale: qui prcde ou suit immdiatementla naissance.
En chiffres
Avec prs
de 170000 dcs
chaque anne
(soit 32% des
dcs), les maladiescardio-vasculaires
constituent
la premire cause
de mortalit
en France;
10% des dcs
surviennent
avant 65 ans.
1 adulte sur 5
environ prsente
une cholest-rolmie totale
suprieure 2,50 g/l
(la normale
se situe 2 g/l).
7% 10%
des adultes
sont obses,
et 16%
des enfants
de 7 9 ans
sont en surpoidsou obses.
240000 nouveaux
cas de cancer
par an en France.
29% des dcs
chez lhomme
et 23% chez la
femme sont dus
une tumeur
maligne: en tout,
143000 dcs
par an en France.
Entre 3 et
4 millions de cas
de cancer pour-
raient tre vits
annuellement dans
le monde grce
une alimentation
saine.
soffre nous, dans une stratgie de prvention desmaladies cardio-vasculaires, est de convaincrelensemble de la population de limiter les apportsde cholestrol. De quelle manire? En vitantles aliments riches en cholestrol et engraisses satures (ce sont les aliments richesen graisses dorigine animale tels que le
beurre, les viennoiseries, les ptisseries, lescharcuteries, etc.), et en privilgiant les
graisses mono-insatures et polyinsatures,dorigine vgtale notamment.
Les risques lis lobsit
Hypertension artrielle et cholestrol nesont pas les deux seuls facteurs de risque
cardio-vasculaire sur lesquels la nutritionpeut avoir un effet: Une surcharge pondrale,
surtout quand lexcs de graisse est localis dans lacavit abdominale (graisse viscrale) plutt que sousla peau (graisse sous-cutane), est associe unenette augmentation du risque cardio-vasculaire,avertit le docteur Jean-Michel Oppert, duservice de nutrition de lHtel-Dieu, Paris.Linfluence de lobsit sur la maladie coro-narienne est la fois directe, lie lexcsde poids, et indirecte, par laugmentationdes facteurs de risque cardio-vasculaire. Enparticulier, lexcs de graisse viscrale est associ une augmentation du risque de diabte,dhypertension artrielle et danomalies lipi-diques. Cest pourquoi les recommandationsnutritionnelles faites aux obses visent non
seulement une perte de poids, quand elle estpossible, mais aussi le traitement de tous lesfacteurs de risque associs.Linfluence de lobsit sur la mortalit et lamorbidit cardio-vasculaires est dautant plusproccupante que le nombre dobses enFrance ne cesse de crotre. Le nombre den-
fants prsentant un excs de poids a doublentre 1980 et 1996. Dans le mme temps, le
nombre denfants souffrant dobsit svre aaugment de faon beaucoup plus importante,dplore le Dr Marie-Franoise Rolland-Cachera, nutritionniste et pidmiologiste lunit Inserm 557, Paris. Or, tre obse
pendant lenfance prdispose lobsit lgeadulte. Serait-il possible de mettre un frein lexpansion de lobsit en veillant deplus prs lalimentation prinatale? Desarguments le suggrent. Cest pourquoi, actuel-lement, diffrentes tudes sattachent luciderce qui, dans lalimentation du ftus et du jeuneenfant, peut favoriser une obsit ultrieure.
Des allis nutritionnels contre les cancers
Deuxime cause de dcs aprs les mala-dies cardio-vasculaires et premire cause
de mortalit prmature, les cancers consti-tuent un autre problme majeur de sant GG G
Lobsit ne cesse de saccrotre en France : le nombre denfants prsentant une surcharge pondrale a ainsi doubl entre 1980et 1996. Cet excs de poids est corrl laugmentation du risque cardio-vasculaire.
Mendil/BSIP
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
14/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 j u il l et 2 0 0314
D O S S I E R
p r v e n t i o n p a r l a n u t r i t i o n
la rfrigration, indique le docteur MartelCela dit, toutes les tudes ne sont pas unanimes.Que ce soit au sujet du sel ou dautres facteuralimentaires, la recherche a encore beaucoup faire. La tche est lourde et complexe, car il nou
faut tudier par des approches pidmiologique(voir p. 16) et exprimentales une multituddaliments, et ce, au regard de diffrents cancersLes moyens dont nous disposons en France n
sont malheureusement pas la hauteur de lproblmatique ni de lenjeu, regrette le docteuPaule Martel.Et pourtant, aux plans humain et conomique, quel immense bnfice la socittirerait de savoir prcisment quelles habitudealimentaires sont susceptibles de diminueou daugmenter le risque de cancer ou demaladie cardio-vasculaire! s
publique. Dans quelle mesure la nutrition
peut-elle avoir une influence pour luttercontre ce flau?Lorigine des cancers est encore mal connue,reconnat le docteur Paule Martel, directriceadjointe du laboratoire de nutrition et scuritalimentaire lInra (Jouy-en-Josas), maisnous sommes dsormais loin de lide selonlaquelle les prdispositions gntiques et les agentscancrognes prsents dans lenvironnementinterviendraient de manire exclusive. De nom-breuses tudes pidmiologiques ont clairementdmontr que les habitudes alimentaires sont aussi
dterminantes: leurs rsultats suggrent quenjouant sur lensemble des facteurs alimentaires, ilserait possible dviter 30% 40% des cancers!Les donnes les plus nombreuses concernentle rle protecteur des fruits et des lgumes surla plupart des cancers, notamment ceux desvoies arodigestives suprieures cavit
buccale, larynx, pharynx, sophage , delestomac, du poumon, du clon et du rectum.Fruits et lgumes sont riches en vitamines, en
fibres et en microconstituants qui sont dots demultiples activits biologiques, prcise le docteur
Martel. Certains dentre eux, comme lesvitamines C et E, possdent une activitantioxydante et pourraient donc protger lescellules, et plus prcisment lADN, desattaques destructrices des radicaux libres, cesdrivs de loxygne trs ractifs. Ils ontaussi bien dautres effets, dont les mca-nismes ne sont pas encore lucids. Pourlinstant, les rsultats fiables dont nous disposonsconcernent les fruits et lgumes dans leurensemble. Cest pourquoi les recommandationsnutritionnelles actuelles sont daugmenter laconsommation de ces aliments dans leur globalitet non celle de tel ou tel nutriment isol (vitamine Cou E, sel minral).Parmi les facteurs alimentaires qui augmen-tent le risque de cancer figure la consomma-tion excessive dalcool, notamment pour lescancers des voies arodigestives suprieureset du foie. Concernant les aliments sals, unenette diminution de lincidence des cancers delestomac a t observe chez les populations asia-tiques lorsquelles ont chang de mode de conser-vation des aliments, remplaant la salaison par
GGG
Les fruits et lgumes permettent dviter beaucoup de cancers,
car ils sont riches en vitamines, fibres et microconstituants.
Radicaux libres: ces molcules interagissentsur le plan chimique avec de nombreuses espcesmolculaires. Les lsions quils gnrent surla molcule dADN peuvent tre lorigine de cancers.
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
15/20
Lavis du Dr Serge Hercberg, directeur de lunit Inserm 557 (UMRInserm/Inra/Cnam) et de lunit de surveillance et dpidmiologienutritionnelle mixte InVS-Cnam.
Toutes les ides qui circulent au sujet de la nutrition les vraies comme lesfausses trouvent un large cho auprs du public. Ce nest pas tonnant:chacun dentre nous se nourrit quotidiennement et se sent donc concern
par tout ce qui touche lalimentation. Il existe, en outre, un ct affectifdans la relation qui nous lie la nutrition, et cest sans doute la raison pourlaquelle une part considrable dirrationnel intervient dans ce domaine.Les ides fausses retiennent peut-tre encore plus lattention du public queles vraies car elles sont souvent de nature sensationnelle et mdiatises outrance. Elles sont lances par des gourous ou des pseudo-scientifiquessans scrupule, qui cherchent avant toute chose leur profit et une part declbrit.Il est essentiel de faire la part de la vrit entre toutes les informationsayant trait la nutrition. Tout dabord, pour ne pas se laisser abuser par undiscours fallacieux et devenir ainsi la victime crdule des manipulateurs;ensuite, et surtout, pour ne pas adopter de rgles nutritionnelles nfastes
pour la sant. En effet, croire les alertes rgulires et pourtant infondes concernant les produits laitiers et leur propension favoriser la formationde cancers, cest priver son organisme dune source importante de calcium,lment indispensable la bonne sant des os, la contraction musculaire, la coagulation sanguine, etc. tre obnubil par le pouvoir cancrognedes pesticides et diminuer sa consommation de fruits et de lgumes poursen prmunir, cest augmenter en ralit ses risques de cancer et demaladie cardio-vasculaire en soustrayant son corps aux effets protecteursdes fibres et des antioxydants dont regorgent les vgtaux. Il est clair quecertaines de ces ides fausses ne sont pas dpourvues de fondementsscientifiques. Exemple: les dulcorants sont cancrognes. Il a en effet tmontr que la saccharine, donne lanimal forte dose, augmentait lerisque de cancer. Mais, heureusement, rien de tel na jamais t observchez lhomme, et linnocuit de tous les dulcorants disponiblesactuellement sur le march est prouve scientifiquement.Comment se protger contre les ides fausses et parfois dangereuses quicirculent? En ne faisant confiance quaux expertises scientifiquescollectives. Les conseils manant dun personnage isol, tout professeurou expert quil soit ou quil se dise, noffrent aucune garantie de srieux.En revanche, leffort de concertation auquel se livrent les chercheurs,mettant en commun leurs connaissances scientifiques et les rsultats deleurs diffrentes tudes, tant pidmiologiques quexprimentales, assurela protection du consommateur.
O p i n i o n
Nutrition : combattre les ides fausses
Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 j u il l et 2 0 03
La dsinformation dans le domaine de la nutrition va bon trainLes ides fausses sont nombreuses circuler, lances par des individuspeu scrupuleux et relayes par certains mdias. Cest donc au publicdapprendre faire la part de la vrit. La solution: naccorder crditquaux expertises scientifiques collectives.
Faire
confianceaux expertises
scientifiquescollectives
pour pouvoirse protger desides fausses et
parfois mme
dangereusespour lanutrition.
CNAM
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
16/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 ju i ll et 2 0 0316
D O S S I E R
our savoir commentprserver au mieuxla sant du consom-mateur, les respon-
sables de sant publique
attendent de la recherchequelle identifie les facteursnutritionnels de risqueet de protection, expliquele professeur SergeHercberg. Cette iden-tification est complexeet ncessite de mettreen relation les rsultatsde la recherchefondamentale et ceuxde la recherche pid-
miologique. Cest en effetde la convergence desinformations obtenuessur des cellules, desanimaux, des malades,ou encore sur despopulations entires,que des vrits scienti-fiques peuvent merger.
Un rle majeur pour larecherche en nutritionLe rle que jouentles tudes pidmiologiquesdans lacquisition denouvelles connaissancesdans le domaine de lanutrition est primordial,estime le professeurHercberg. Ce sont lestudes pidmiologiquesdobservation qui,au dpart, suggrentune relation entre
diffrents paramtres:Elles tudient en paralllele mode alimentaire etlincidence de telle ou tellemaladie dans diffrentes
populations ou comparentles comportements alimen-taires dun groupe demalades et dun groupede tmoins.
Des tudessur le long termeViennent ensuite lestudes pidmiologiquesprospectives. Celles-ciconsistent, par exemple,
analyser la consommationde certains aliments (ou mesurer des marqueurs
sanguins tmoignantde ltat nutritionnel) dansune population au dbutde ltude, puis surveiller
pendant dix vingt ansles sujets pour recenser
les cas de maladies quiont touch cette populationet calculer le risque dedvelopper ces maladiesen fonction de la consom-
mation initiale.Ces tudes, bien queriches denseignements,sont impuissantes prouver un lien decausalit entre diffrentsparamtres. Pour ce faireil faut mener des tudespidmiologiques ditesdintervention, commeles tudes SU.VI.MAX(voir encadr ci-contre)
et SU.FOL.OM3.La premire a pour butde dterminer si le rle
r e c h e r c h e s
Avec le concours du Pr Serge Hercberg, directeur de lunit Inserm 557 (UMR Inserm/Inra/Cnam)et de lunit de surveillance et dpidmiologie nutritionnelle mixte InVS-Cnam.
PComment dcelerce qui, danslalimentation,est susceptible
dempcher, ou,au contraire, defavoriser lapparitiondune pathologie?En menant destudes croises surle rgime alimentaireet la frquencedes maladies
dans de largespopulations. Cestle rle des tudespidmiologiques.
Lpidmiologie:un outil incontournable
SU.VI.MAX: supplmentation envitamines et minraux.
SU.FOL.OM3 : supplmentation enfolates (vitamine B9)et en acides gras omga-3.
Au cours des cinq dernires annes, prs de 80 aides ontt attribues des quipes de recherche, pour un montantglobal de 1,4 million deuros. Cest surtout le mtabolismedes glucides et des lipides (45% des aides) que lon essaiede comprendre, car ils sont la base de nombreusespathologies. Mais bien dautres sujets lis la nutrition sontaussi tudis: relations entre cholestrol et athrosclrose,cancer, vieillissement, diabte, obsit, effets des vitamines,des bactries lactiques, de lalcool, etc.
> FRM: un soutien actif
pour la recherche en nutrition
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
17/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 ju i ll e t 2 0 03
protecteur des fruits etdes lgumes vis--vis descancers et des maladiescardio-vasculaires est liaux vitamines et auxminraux antioxydantsquils contiennent.Lobjectif de la secondeest danalyser limpactdune prise quotidiennede vitamines B9 (folates),B6 et B12 et/ou dacides
gras omga-3 sur la santcardio-vasculaire.
Le double aveuglepour viter le biaispsychologiquePour ce type dtude, desvolontaires sont recrutset rpartis par tirageau sort en sous-groupes.Ainsi, les uns reoiventpendant toute la dure
de ltude un cocktailde nutriments dont leschercheurs souhaitenttester les effets,les autres reoiventun composant neutre(placebo). Ltude estmene en double aveugle:les volontaires ne savent
pas quel groupeils appartiennent,
pas plus que les mdecinsqui les suivent. Ainsi,aucun biais de nature
psychologique ne vientcompromettre les rsultats,souligne le professeurSerge Hercberg.Linfluence de luniqueparamtre qui diffreentre les deux groupes(nutriments/placebo)peut donc treclairement tablie.
Place la recherchefondamentaleReste ensuite comprendreles mcanismes biologiquesqui sous-tendent le ou les
phnomnes observs dansles tudes pidmiologiques,poursuit le professeurHercberg. Cest iciquintervient la recherche
fondamentale. Elle apermis, par exemple,
de suggrer un lienentre cancer, vitamineset minraux antioxy-dants. Le cancer rsultedune multiplicationcellulaire anarchiquequi peut se dclencher la faveur dune altrationde lADN des cellules.Ces altrations peuvent trecauses par les radicauxlibres, des drivs de
loxygne trs ractifs. Or,les vitamines et les minrauxantioxydants constituentune dfense contre cesradicaux libres (chacun peuten faire lexprience avecun demi-avocat dont la chairexpose loxygne de lairnoircit, sauf si on appliquedessus un peu de jus decitron, riche en vitamine Cantioxydante!). Ceciexpliquerait leur rle dansla prvention des cancers.Cumulant exprimen-tation et pidmiologie,la recherche ennutrition est doncun chantier de grandeenvergure, coteuxen termes de moyenset de temps. Les tudespidmiologiquesncessitent en outre
la coopration de trsnombreux volontaires.Heureusement, en France,ceux-ci ne manquent pas.
Soucieux de leur sant,les citoyens rpondentsouvent gnreusement lappel des scientifiques. s
Cumulant exprimentation et pidmiologie, la rechercheen nutrition est un chantier de grande envergure et coteux.
L a u r e n t / M e j e a n / B S I P
Des tudes pidmiologiques devraient rapidement permettre dtablirsil existe un effet protecteur des vitamines et minraux antioxydantscontre le cancer.
La FRM a aussi apport sa contribution ltude SU.VI.MAXen finanant et en participant lcriture du bulletinSU.VI.MAX Info, vritable lien de soutien et dinformationpour les 14000 volontaires suvimaxiens, durant huit ans.
> La FRM aux cts de SU.VI.MAX
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
18/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S a nt n 9 5 ju i ll et 2 0 0318
D O S S I E R
V I E Q U O T I D I E N N E
Avec le concours du Pr Serge Hercberg, directeur de lunit Inserm 557 (UMR Inserm/Inra/Cnam)et de lunit de surveillance et dpidmiologie nutritionnelle mixte InVS-Cnam.
Surveiller son alimentation, amliorer son hygine de vieNombreux sont ceux qui aspirent de tels objectifs. Mais commentsy prendre? Entre les ides fausses qui foisonnent dans ce domaineet le dcouragement qui menace quand leffort fournir parattrop grand, la tche nest pas aise. Quelques clairages et conseilspratiques pour sy retrouver.
Largement diffuse la fin des annes 1970 et encore trsfrquente aujourdhui, lide que le pain, les craleset les fculents font grossir est abandonner. Ces aliments,riches en amidon et en fibres (notamment dans leur formecomplte), sont source dnergie durable: grce eux,ltat de satit est maintenu plus longtemps et lenviede grignoter entre les repas diminue dautant. Manger sa faim et chaque repas du pain, des ptes, du riz ou despommes de terre ne fait donc pas grossir, condition biensr que le mode de prparation ncessite peu de graisse.
La rduction du risque de maladie cardio-vasculaire na pas t valide de manirescientifique et ne sobserverait que pourdes consommations infrieures lquivalentde deux verres de vin par jour. Quelquesastuces pour diminuer une consommationdalcool excessive: table, disposer toujours
dun verre deau pour tancher sa soif;si leau parat trop fade, ajouter quelquesgouttes de citron, des feuilles de menthe,un peu de sirop ou la remplacer par de leaugazeuse ou des jus de fruits; lors de lapritif,privilgier les boissons peu alcoolises et limiterles aliments sals, qui donnent soif.
Des bienfaits suggrs, non dmontrs
Des ides reues
PAIN, CRALES ET FCULENTS
ALCOOL
Prserver son capital sant c
LES CONSEILSNUTRITIONNELSDU PNNS:
5 fruits et lgumes(au moins) par jour
3 produits laitiers
1 fculent chaque repas
Viande, poissonou uf, une oudeux fois par jour(poisson au moins2 fois par semaine)
30 minutes demarche par jour
Limiter la consom-mation de graissessatures (viennoi-series, ptisseries,charcuteries, beurre,sauces, certainsfromages, etc.)
Limiter la consom-mation de sucre(sodas, confiseries,chocolat, ptisseries,desserts sucrs, etc.)
DR
Boulay/BSIP
R
oux/BSIP
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
19/20Fondat ion Recherche Mdicale Recherche & S an t n 9 5 j u il l et 2 0 03
Adresses utiles
IFNInstitut franais
pour la nutrition
www.ifn.asso.fr
INPESLe Guide alimentaire
pour tous est disponible
sur simple demande
crite:
2, rue Auguste-Comte
92174 Vanves Cedex
Fax: 0141 333391
www.inpes.sante.fr
Hpital Htel-DieuConsultations
spcialises surlobsit de ladulte
et de ladolescent
Service de nutrition
1, place du Parvis-
Notre-Dame
75004 Paris
Tl. : 0142348210/82 16
Hpital Robert-DebrConsultations
spcialises sur
lobsit de lenfantet de ladolescent
Service endocrinologie
et nutrition
48, boulevard Srurier
75019 Paris
Tl.: 0140 032000
Fdration franaisede cardiologie
50, rue du Rocher
75008 Paris
Tl.: 0144908383www.fedecardio.com
Dossier Nutritionet compte rendu
de la Rencontre
Sant sur la nutrition
disponibles sur le site
de la Fondation
Recherche Mdicale
www.frm.org
Mme modre, lactivit physique est utile. Il nest doncpas ncessaire de sinscrire dans un club de gymnastiqueou daller courir sur un stade: une demi-heure de marcheintgre dans la vie quotidienne est suffisante. Aller faireses courses pied, descendre du mtro ou du bus une stationavant ou aprs sa destination, garer sa voiture quelquescentaines de mtres plus loin et finir le trajet pied, prendrelescalier plutt que lascenseur ou lescalier mcanique,bricoler, jardiner et faire le mnage font partie des multiplesoccasions daugmenter la dpense nergtique.
Pas besoin dtre sportif pour tre actif
Le sel donne du gotaux aliments mais,en rduisant progressivementses quantits, il est possibledaccoutumer son sensgustatif. Le premier objectifest de perdre lhabitudede resaler avant de goter.Il faut ensuite diminuerlajout de sel dans les eauxde cuisson, limiter lesfromages, les charcuteriesles plus sales et les produitsapritifs sals, ainsi queles plats cuisins de typequiche, pizza ou friand, quicachent une forte teneur ensel. Enfin, penser aux piceset aux aromates pour releverla saveur des plats.
Une question dhabitudeLE SEL
Ph.
Gerbier/CNRI
Chassenet/BSIP
aque jourACTIVIT PHYSIQUE
-
8/8/2019 Nutrition 1 Partie
20/20
V O S D O N S E N AC T I O N
Vos dons jouent un rle capital dans lavancementdes travaux de recherche mdicale. Explorer de nouvelles
pistes de recherche, multiplier les changes entre
les disciplines et les chercheurs, dceler plus prcocementcertaines pathologies graves pour mettre en place plus rapidement
les traitements, dcouvrir la meilleure prise en charge diagnostiquepuis thrapeutique, tels sont les principaux objectifs que sest fixsla Fondation Recherche Mdicale en multipliant ses programmes.Cette rubrique Vos dons en action prsente quelques exemplesdes 700 projets que vous soutenez chaque anne travers la Fondation.
Comprendre les mcanismesde la satit pour rguler lapptit
Graldine Ibarz tudie depuis 1999 le fonctionne-ment du rcepteur CKK, qui intervient dans lemcanisme de la satit
DR
NUTRITION
Ce repli muqueux de lintestin grle portedes rcepteurs de la satit
Mais ce nest pas si facile tenirquand il faut composer avecla faim!Car plus quune histoire devolont, labsence de faim, oula sensation dtre repu (satit),
est un tat biologique impliquantnotamment un rcepteur(le rcepteur de la cholcysto-kinine, ou CCK) situ au niveaudes organes digestifs (pancras,estomac, vsicule biliaire,intestin). Comprendre lefonctionnement de ce rcepteurpermettrait de mettre au pointdes substances capables delactiver spcifiquementet, donc, de rguler la prisealimentaire, ce qui ouvredes perspectives intressantes la recherche de traitementscontre lobsit, mais aussicontre lanorexieDepuis 1999, Graldine Ibarzconsacre ses recherches llucidation de la structure etdu rle de ce rcepteur impliqudans le mcanisme de la satit.Sous la direction du professeurJean Martinez la facult
de pharmacie de Montpellier1,cette jeune chercheusea bnfici dune aide dela Fondation Recherche Mdicaleafin de poursuivre ses travauxde thse. Une thse dont
lintrt dpasse le domainede la nutrition, puisque ltudedes rcepteurs CKK chez le ratet la souris a montr quilsrgulaient diffremment unfacteur de transcription oncogne(c-jun), molcule implique dansle dveloppement de certainscancers
La solution la plus simplepour perdre quelqueskilos est daugmenter sa
dpense nergtique ou encorede rduire la quantit denourriture que lon consomme.
1 Facult de pharmacie de Montpellier:laboratoire des aminoacides peptideset protines (LAPP), CNRS UMR 5810.