Download - Mémoire d'analyse appliquée Master
UNIVERSITÉ PARIS-SORBONNE
MASTER I LEA
GESTION ET COMMERCE INTERNATIONAL
Année Universitaire 2015-2016
Mémoire d'analyses appliquées
Sous la Direction du Professeur Claudia SENIK
Sujet :
Comment inciter au recyclage des ordinateurs à l'aide d'un Nudge ?
Présentation du Nudge proposé à l'occasion du concours NudgeFrance
Stefanie TÜRK
Numéro Etudiant: 16002831
II
Abréviations ................................................................................................................. III
Résumé ........................................................................................................................... IV
1 Introduction ............................................................................................................ 1
1.1 Le problème ...................................................................................................... 1
1.2 L'objectif ........................................................................................................... 1
1.3 Le plan .............................................................................................................. 2
2 Impact des produits électroniques sur l'environnement .................................... 3
2.1 Etat des lieux du recyclage des appareils électroniques ................................... 3
2.2 Dispositions déjà mises en œuvre pour recycler les DEEE .............................. 5
3 Influences sur le comportement ............................................................................ 7
3.1 L'utilité de favoriser certains comportements ................................................... 7
3.1.1 La rationalité limitée des humains ................................................................ 7
3.1.2 Qu'est-ce qu'un Nudge ................................................................................ 10
3.2 Phénomènes qui affectent les décisions .......................................................... 11
3.3 Quelques techniques d'influence .................................................................... 12
4 Application du Nudge incitant au recyclage ...................................................... 15
4.1 Présentation du Nudge .................................................................................... 15
4.1.1 Contexte justifiant l'utilisation d'un Nudge ................................................. 15
4.1.2 Le Nudge encourageant le recyclage des ordinateurs ................................. 16
4.2 Appréciation critique ...................................................................................... 17
4.2.1 Pourquoi le Nudge peut fonctionner ........................................................... 17
4.2.2 Obstacles ..................................................................................................... 19
4.2.3 Propositions d'amélioration ......................................................................... 20
4.3 Gains économiques ......................................................................................... 23
5 Conclusion ............................................................................................................ 25
Annexe ............................................................................................................................ 27
III
ABREVIATIONS
ADEME Agence de l'environnement et de la maitrise de l'énergie
CNIID Centre national d’information indépendante sur les déchets
DEEE Déchets électriques et électroniques
ESS Economie sociale et solidaire
OCAD3E Organisme coordonnateur agréé déchets électroniques et électriques
PNUE Programme des Nations unies pour l’environnement
STEP Solving the e-waste program
IV
RESUME
Dans un contexte de consommation effrénée d’appareils électroniques et électriques tels
que les ordinateurs, tablettes ou téléphones portables, le recyclage insuffisant de ces produits
entraine des problèmes environnementaux et sanitaires significatifs. A cet égard, ce travail a
pour objectif de développer un outil encourageant le recyclage des équipements informatiques
et de télécommunications. Pour ce faire, il est proposé d’identifier les biais qui affectent la
prise de décisions et les moyens pour les contourner en vue de concevoir un instrument
facilitant et incitant le recyclage, qui se base sur les connaissances des sciences
comportementales.
La faisabilité de la mise en œuvre d'un Nudge est analysée. S'agissant d'un outil
provenant de l'économie comportementale, celui-ci s'appuie sur les biais du comportement
humain et favorise la réalisation d'un comportement souhaité, sans contraindre la personne
concernée.
Ce travail montre que l'application d'un Nudge en forme de page d'accueil est pertinent
en vue d’encourager le recyclage de produits électroniques. Les biais, tels que la nature
irrationnel des humains et le manque d'engagement expliquent le manque de recyclage. Le
Nudge proposé prend en compte ces biais ainsi que plusieurs techniques comportementales
comme le « pied dans la porte » et le sentiment de liberté. Les avantages de cet outil sont qu'il
facilite la procédure de recyclage, incite au recyclage et peut également avoir des effets plus
large sur le comportement des utilisateurs. Ses limites se trouvent dans l'acceptation de la
société d'un Nudge, sa mise en place par défaut dans les ordinateurs et l'efficacité de la filière
de recyclage. En intégrant des améliorations telles que la prise en compte de l'influence
sociale et l’ajout d’un feedback, l’effet du Nudge peut être encore renforcé.
1
1 INTRODUCTION
1.1 Le problème
Notre vie quotidienne s'organise autour d'appareils électroniques tels que les
ordinateurs, les téléphones portables et les tablettes. Ils sont aujourd'hui devenus des outils
presque indispensables pour le travail ou le loisir, afin de suivre les actualités ou d'établir et
d'entretenir des réseaux professionnel et privé. Une multitude de raisons nous incite à acheter
de nouveaux appareils. En particulier, lorsque les objets ne fonctionnent plus parce qu'ils sont
devenus incompatibles, plus assez puissants ou encore lorsqu'ils ne sont plus à la mode. La
consommation effrénée de produits électroniques s'avère d'un point de vue écologique
désastreuse. L'augmentation de la vente des produits est certes de bonne augure sur le plan
économique, mais cela pèse lourd sur l'environnement.1 L'impact environnemental de la
demande de nouveaux appareils est d'autant plus important, du fait des processus industriels et
de la forte consommation de terres rares, que les anciens appareils électroniques ne sont pas,
dans la plupart des cas, recyclés mais jetés dans des décharges non-adéquates, notamment
avec les ordures ménagères, ce qui aggrave leur impact sur la santé publique et sur
l'environnement.
1.2 L'objectif
L'impact négatif des appareils électroniques mal recyclés montre qu’il est essentiel de
promouvoir le recyclage durable. Il faut pour cela identifier les freins qui empêchent le
recyclage et développer une stratégie pour contourner ces obstacles. Ce travail étudie les biais
qui affectent la prise de décision et montre comment il est possible d'inciter les personnes à
prendre des (meilleures) décisions en matière de recyclage de produits électroniques. Pour
cela, un Nudge, qui est un outil qui aide à prendre de meilleures décisions, est invoqué.
L'objectif est d'établir un Nudge qui se sert des connaissances des techniques
comportementales dans le but d'encourager les personnes à recycler leurs anciens appareils
électroniques, et dans notre cas en premier lieu les ordinateurs.
1 Rédaction bio. Les déchets électroniques, véritable danger pour l’environnement [en ligne]. 13 mars 2010.
Disponible sur : <http://www.vivez-nature.com/agriculture-biologique/dechets-electroniques,463.html>.
[Consulté le 12 février 2016]
2
Le sujet suivant est analysé:
Comment inciter au recyclage des ordinateurs à l'aide d'un Nudge ?
1.3 Le plan
Le prochain chapitre aborde le sujet du recyclage des appareils électroniques et
électriques, analyse la situation actuelle de ces déchets et les dispositifs mis en place pour leur
recyclage. Le troisième chapitre présente des éléments de théorie des sciences
comportementales utiles pour expliquer les raisons du comportement des humains,
notamment face au recyclage, et pour identifier les éléments influençant leur comportement
qui peuvent être utiles pour la constitution d'un Nudge. Le Nudge incitant à recycler est
présenté dans le quatrième chapitre. A cette fin, l'utilité d'un Nudge pour le sujet du recyclage
est expliquée et les avantages, les obstacles ainsi que des améliorations sont exposés. Le
dernier chapitre résume ce travail et donne une perspective sur les étapes à suivre.
3
2 IMPACT DES PRODUITS ELECTRONIQUES SUR L'ENVIRONNEMENT
2.1 Etat des lieux du recyclage des appareils électroniques
Selon un rapport du programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) de
2011, environ 50 millions de tonnes de déchets électriques et électroniques (DEEE) sont
produits chaque année dans le monde2, et une étude de UFC-Que Choisir de 2016 chiffre les
DEEE par Français à 20 kg par an.3 Le terme DEEE, également D3E, désigne un équipement
mis au rebut qui fonctionne avec une prise électrique, une pile ou un accumulateur
(rechargeable). Ceci comprend notamment les petits et gros appareils électroménagers et les
équipements informatiques et de télécommunications.4
Il s'agit de produits avec un impact écologique fort, car ils sont à la fois issus de
procédés industriels lourds qui consomment beaucoup d'énergie et sont constitués à partir de
ressources naturels et de substances de valeur comme l’or, l’argent ou le platine, qui se
trouvent, faute de recyclage, enfermés dans les appareils.5 Un rapport du Centre national
d’information indépendante sur les déchets (CNIID) parle à ce sujet d'une dévastation de la
planète6, et le PNUE estime que les métaux spéciaux se trouvent menacés d'épuisement par
manque de recyclage.7 En outre, les DEEE contiennent des métaux lourd comme le plomb, le
mercure ou l'aluminium ainsi que d'autres substances toxiques comme l'arsenic ou l'amiante,
2 Mahesh, Priti, Un cadeau empoisonnée. Dans Programme des Nations Unies pour l’environnement. Notre
planète, revue du Programme des Nations Unies pour l‘environnement. Gestion des produits chimiques et
plastiques marins, p. 16-19 [en ligne]. Avril 2011. Disponible sur : <http://www.unep.org/pdf/op_april/FR/OP-
2011-04-FR-FULLVERSION.pdf>. [Consulté le 12 février 2016] 3 UFC Que Choisir Service des études (éd.), Equipements électriques et électroniques : déchets trop
encombrants pour la distribution [en ligne]. Janvier 2016. Disponible sur :
<http://www.youscribe.com/BookReader/IframeEmbed?productId=2692716&width=auto&height=auto&startPa
ge=2&displayMode=scroll&documentId=2856830&fullscreen=1&token=>. [Consulté le 11 février 2016] 4 Communauté d'agglomération Sud de Seine (éd.), Déchets d’Equipements Electroniques et Electriques (DEEE
ou D3E) [en ligne]. Sans date. Disponible sur <http://www.suddeseine.fr/index.php/collecte-dechet/150-dechets-
d-equipements-electroniques-et-electriques-deee-ou-d3e>. [Consulté le 12 février 2016] 5 Casters, Sébastien, Recyclage : que faire de nos appareils électroniques usagés ? [en ligne]. 22 avril 2015.
Disponible sur : <http://www.clubic.com/mag/trendy/article-763976-1-recyclage-appareils-electroniques-
usages.html>. [Consulté le 12 février 2016] 6 Fabre, Marine et Winkler, Wiebke, L'obsolescence programmée, symbole de la société du gaspillage. Le cas
des produits électriques et électroniques. ? [en ligne]. Septembre 2010. Disponible sur :
<http://www.cniid.org/IMG/pdf/201009_rapport_OP_AdT_Cniid.pdf>. [Consulté le 15 février 2016] 7 Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) (éd.), Rapport Annuel 2013 [en ligne]. 2014.
Disponible sur <http://www.unep.org/french/annualreport/2013/docs/UNEP%20AR2013_
French%20WEB.pdf>. [Consulté le 15 février 2016]
4
ayant des effets néfastes sur la santé et l'environnement s'ils se libèrent dans l'atmosphère,
notamment en cas de mauvaise gestion des déchets.8
D'après le rapport du PNUE de 2010, une forte augmentation de la quantité de DEEE
est prévue entre 2011 et 20219. Cette tendance est confirmée par des études plus récentes dans
le cadre de l'initiative « Solving the e-waste program » (STEP) de l'organisation mondiale,
une initiative engagée dans une collaboration entre divers agents concernés par les DEEE.10
Bien que les chiffres des estimations varient, la hausse générale de la quantité de DEEE fait
consensus, ce qui est notamment dû à l'évolution technologique rapide, l'obsolescence
programmée qui favorise les cycles courts, et les diktats de la mode, qui amènent les
consommateurs de racheter constamment de nouveaux appareils. Le fait que les réparations
soient limitées s'ajoutent à ce phénomène. Les DEEE sont considérés comme le groupe de
déchets pour lequel le volume augmente le plus vite.11
Une fois les appareils électroniques et électriques devenus obsolètes, ils sont soit
collectés par une filière de traitement des déchets, soit réparés, soit ils partent, souvent après
un passage dans les armoires des particuliers, dans les ordures ménagères. La dernière option
compte pour 60 à 70 % des DEEE. Dans ce cas les DEEE peuvent être récupérés par des
ferrailleurs non agrémentés ou exportés vers les décharges d'Afrique ou d'Asie. Envoyé dans
les pays en voie de développement, les appareils sont en partie démantelés, dans des
conditions souvent néfastes pour la santé des intervenants, et le reste est incinéré ou enfoui,
entrainant la contamination des sols, des eaux et de l'air, et représentant donc un réel danger
en raison de la présence de substances polluantes.12
Les taux de collecte de DEEE est aujourd'hui de 38 % en France, ce qui correspond à
environ 7 kg de produits recyclés ou réutilisés par habitant par an. En dépit du fait que le
volume de produits collectés s'est multiplié par trois entre les années 2007 et 2014, les
objectifs ne sont pas atteints. Le potentiel de collecte est estimé à 19 à 24 kg par an selon
8 MED-3R Plateforme Stratégique Euro-méditerranéenne pour une Gestion Adaptée des Déchets (éd.), Les
déchets d’équipements électriques et électroniques à Nice (France) [en ligne]. Sans date. Disponible sur :
<http://www.med-3r.org/index.php/fr/a-propos/les-resultats/286-resultat-deee-fr>. [Consulté le 15 février 2016] 9 Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE) (éd.), Rapport Annuel 2010 [en ligne]. Février
2011. Disponible sur <http://www.unep.org/pdf/annualreport/2010/UNEP_AR_2010_French.pdf>, p. 93.
[Consulté le 15 février 2016] 10
Senet, Stéphanie, DEEE: une hausse de 33% attendue en 2017 [en ligne]. 16 décembre 2013. Disponible sur :
<http://www.journaldelenvironnement.net/article/deee-une-hausse-de-33-attendue-en-2017,40657>. [Consulté le
15 février 2016] 11
Arte (éd.), Les déchets électroniques et leur recyclage : la grande FAQ [en ligne]. 04 janvier 2016. Disponible
sur : <http://future.arte.tv/fr/les-dechets-electroniques-et-leur-recyclage-la-grande-faq?language=fr>. [Consulté
le 03 février 2016] 12
Knaebel, Rachel, Comment l’Europe fait passer ses déchets informatiques pour des dons « humanitaires » [en
ligne]. 27 janvier 2014. Disponible sur : <http://www.bastamag.net/Comment-l-Europe-fait-passer-ses>.
[Consulté le 05 février 2016]
5
l'Agence de l'environnement et de la maitrise de l'énergie (ADEME)13
, et le ministère de
l'Environnement, l'Énergie et de la Mer (ancien ministère de l’Écologie) a fixé un objectif de
14 kg de produits recyclés en 2019.14
Le faible taux de collecte s'explique par l’organisation
mal structurée de la collecte, en partie du fait d'une intégration insuffisante des acteurs, du
faible respect de la loi par les distributeurs, ainsi qu'un manque d'engagement et d’information
des consommateurs sur la collecte des DEEE.15
Le champ des D3E étant vaste, ce travail se focalise sur les équipements informatiques
et de télécommunications qui sont équipés d'un écran, comme les ordinateurs, tablettes ou
téléphones portables. Ces appareils se stockent plus facilement dans les armoires et se laissent
plus facilement glisser dans les ordures ménagers que les gros appareils ménager comme des
frigos. Ce sont ceux les moins recyclés et contenant les plus de matériaux spéciaux.16
2.2 Dispositions déjà mises en œuvre pour recycler les DEEE
Plusieurs dispositifs existent déjà en vue d'augmenter le recyclage de DEEE. Tout
d'abord, un pictogramme d'une poubelle sur roues, barrée d’une croix, figure sur les
emballages et les produits en application de la directive DEEE, de l’article R543-177 du code
de l’environnement ainsi que la norme FR EN 50419 sur les équipements électroniques et
électriques distribués après août 2005.17
Il indique que le produit fait l'objet d'une collecte
sélective, et il est interdit, après usage, de le jeter aux ordures ménagères.
Ensuite, conformément à la directive 2002/96/CE, la reprise par les distributeurs est
prévue dans les articles L.541-10-2 et R. 543-172 à R.543-206 du code français de
l’environnement depuis 2005. Les producteurs et distributeurs d'équipements électrique et
électronique sont notamment obligés de reprendre et d'assurer le traitement des appareils en
13
UFC Que Choisir Service des études (éd.), Equipements électriques et électroniques : déchets trop
encombrants pour la distribution [en ligne]. Janvier 2016. Disponible sur :
<http://www.youscribe.com/BookReader/IframeEmbed?productId=2692716&width=auto&height=auto&startPa
ge=2&displayMode=scroll&documentId=2856830&fullscreen=1&token=>, p. 1-6. [Consulté le 11 février 2016] 14
Theunissen, Benoît, La collecte des DEEE en France décolle lentement mais sûrement [en ligne]. 13 février
2015. Disponible sur : <http://www.ecogisements.org/collecte-des-deee-en-france-2647>. [Consulté le 15 février
2016] 15
UFC Que Choisir Service des études (éd.), Equipements électriques et électroniques : déchets trop
encombrants pour la distribution [en ligne]. Janvier 2016. Disponible sur :
<http://www.youscribe.com/BookReader/IframeEmbed?productId=2692716&width=auto&height=auto&startPa
ge=2&displayMode=scroll&documentId=2856830&fullscreen=1&token=>, p. 1. [Consulté le 11 février 2016] 16
Arte (éd.), Les déchets électroniques et leur recyclage : la grande FAQ [en ligne]. 04 janvier 2016. Disponible
sur : <http://future.arte.tv/fr/les-dechets-electroniques-et-leur-recyclage-la-grande-faq?language=fr>. [Consulté
le 03 février 2016] 17
Enterprise Europe Network (éd.), Obligations des producteurs d’équipements électriques et électroniques [en
ligne]. Sans date. Disponible sur : <http://www.cci-international.net/documentation/een/
accueil/Dossier%20obligations%20producteurs%20DEEE.pdf>. [Consulté le 15 février 2016]
6
fin de vie, et d'informer les consommateurs en cas d'achat d'un nouvel appareil sur les effets
néfastes des DEEE sur l'environnement et la santé. Suivant la directive 2012/19/UE, les
distributeurs doivent également reprendre des petits équipements électriques et électroniques
même sans condition d’achat. Néanmoins, selon l'étude de UFC-Que Choisir, le taux de
proposition de reprise gratuit va de 41 % à 67 % selon le type de DEEE dans les magasins et
est encore inférieur en ce qui concerne les magasins en ligne.18
La responsabilité des producteurs et des distributeurs a partiellement été déléguée à
quatre éco-organismes agréés, mis en place depuis 2006: Recyclum, ERP France, Eco-
Systèmes et Ecologic. Ces structures sont en partie financées par l'éco-participation, qui est
payée par l’acheteur lors de l’acquisition d’un appareil, et en partie par les ventes des
matériaux extraits des DEEE.19
Les éco-organismes ont pu contribuer à la hausse de la
collecte des DEEE et remplir l'objectif de 4 kg fixé par la directive européenne de 2002, mais
le système s'adapte difficilement à l'augmentation des déchets au fil des années.20
Les éco-
organismes, coordonnées par l’Organisme coordonnateur agréé pour les déchets électroniques
et électriques (OCAD3E) selon l'arrêté du 24 décembre 2014 en application des articles
R. 543-182 et R. 543-183 du code de l'environnement, s'appuient sur les collectivités
territoriales, les distributeurs, les professionnels de la reprise (des métaux) et des structures
faisant partie de l’économie sociale et solidaire (ESS).21
Ces derniers proposent par exemple
des sites internet de rachats d'ordinateurs ou de téléphones portables, comme
http://www.recycler.fr/.
Bien que plusieurs dispositifs sont déjà mis en place, une minorité seulement des DEEE
est recyclée de manière adéquate. Afin d'agir sur le manque d'engagement des consommateurs
pour le recyclage, la chapitre suivant s'attache à l'identification des influences sur le
comportement qui expliquent le faible taux de recyclage et qui permettent de proposer des
solutions pour améliorer ce taux.
18
UFC Que Choisir Service des études (éd.), Equipements électriques et électroniques : déchets trop
encombrants pour la distribution [en ligne]. Janvier 2016. Disponible sur :
<http://www.youscribe.com/BookReader/IframeEmbed?productId=2692716&width=auto&height=auto&startPa
ge=2&displayMode=scroll&documentId=2856830&fullscreen=1&token=>, p. 5-11. [Consulté le 11 février
2016] 19
Casters, Sébastien, Recyclage : que faire de nos appareils électroniques usagés ? [en ligne]. 22 avril 2015.
Disponible sur : <http://www.clubic.com/mag/trendy/article-763976-1-recyclage-appareils-electroniques-
usages.html>. [Consulté le 12 février 2016] 20
Knaebel, Rachel, Comment l’Europe fait passer ses déchets informatiques pour des dons « humanitaires » [en
ligne]. 27 janvier 2014. Disponible sur : <http://www.bastamag.net/Comment-l-Europe-fait-passer-ses>.
[Consulté le 05 février 2016] 21
UFC Que Choisir Service des études (éd.), Equipements électriques et électroniques : déchets trop
encombrants pour la distribution [en ligne]. Janvier 2016. Disponible sur :
<http://www.youscribe.com/BookReader/IframeEmbed?productId=2692716&width=auto&height=auto&startPa
ge=2&displayMode=scroll&documentId=2856830&fullscreen=1&token=>, p .4. [Consulté le 11 février 2016]
7
3 INFLUENCES SUR LE COMPORTEMENT
3.1 L'utilité de favoriser certains comportements
L'économie comportementale, qui est un champ des sciences économiques et des
sciences sociales, distingue l'homo œconomicus et l'homo sapiens, des notions qui sont
également observées dans la théorie économique classique. Contrairement à l'homo
œconomicus qui agit de manière rationnelle, est à la recherche de la maximisation de l'utilité
et possède des ressources cognitives importantes, l'homo sapiens montre de l'inconsistance
dans ses choix, est influencé par des biais et ses émotions et se trompe. Richard Thaler et Cass
Sunstein, des chercheurs en économie comportementale, soulignent que les humains ne sont
pas de homo œconomicus, mais des homo sapiens, ils n'ont ainsi pas de connaissances
parfaites de leurs préférences et ne font pas de manière systématique des choix optimaux.22
De ce fait, il peut être utile de favoriser certains comportements chez les humains.
3.1.1 La rationalité limitée des humains
Pour caractériser les limites du cerveau humain, qui recherche les simplifications et qui
se contente d'une solution satisfaisante et suffisante plutôt que d'une solution raisonnée, il est
justifié de parler de rationalité limitée.
Daniel Kahneman, psychologue et économiste, différencie chez les humains deux
modes cognitifs qui agissent et interagissent dans le processus de la prise de décision: le
Système 1 et Système 2. Le Système 1, fondé sur l’intuition et l’émotion, est caractérisé
comme étant un système « vieux », agissant de manière automatique et rapide. A ceci
s'oppose le Système 2, considéré comme « nouveau » et rationnel, mais qui réagit plus
lentement. Les humains ont besoin des deux systèmes, qui peuvent cependant être en conflit
et ainsi, à eux seuls, entrainer des erreurs. Selon Kahneman, le Système 2 est en charge de
l'autocontrôle afin de retenir les impulsions du Système 1 qui oriente spontanément nos choix,
souvent malgré nous.23
Les psychologues sociaux ont identifié de nombreux biais qui influencent notre
perception et, de manière inconsciente, notre prise de décision et notre comportement. Parmi
22
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R. , Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 6–8. 23
Kahneman, Daniel, Thinking Fast and Slow, New York, Farrar, Straus and Giroux, 2011, p. 20–26.
8
eux se trouvent le biais d'ancrage, le biais de la disponibilité de l'information, le biais de la
représentation, le biais de confirmation, l'excès de confiance24
ainsi que la dépense gâchée et
le piège abscons.25
En outre, on constate une aversion pour la perte, les humains valorisent
davantage des biens déjà acquis. Richard Thaler parle de l'effet de dotation initiale.26
A cela
s'ajoute la tendance des humains à préserver le statu quo, qui résulte d'un conservatisme,
démontré par William Samuelson et Richard Zeckhauser.27
Ceci explique en partie la
préférence pour des options par défaut, la tendance à prendre l'option qui demande le moins
d'effort, et qui est le chemin de la moindre résistance.28
Le professeur en psychologie Barry Schwartz a constaté un paradoxe de choix.
Lorsqu'un individu est exposé à trop de choix, une décision est moins souvent prise.
L'individu est paralysé par le choix, et en plus il semble être moins satisfait de son choix par
la suite.29
Il faut également noter que les individus ont tendance à succomber aux tentations
rencontrées dans leur vie quotidienne, Thaler et Sunstein parlent de « l'inconsistance
dynamique ». Ils distinguent notamment la partie de soi-même qui planifie (« planner ») et
celle qui réalise les décisions (« doer »). D'après Thaler et Sunstein, le « planner » est
principalement influencé par le Système 2, tandis que le « doer » est surtout influencé par le
Système 1. Même si le « planner » prévoit d'agir d'une certaine manière, le « doer »,
influencé par des tentations, ne met pas en place le comportement prévu. L'économiste
comportemental George Loewenstein parle également de la distinction entre les « états
chauds » et les « états froids ». Les humains sont cependant souvent conscients de leurs
faiblesses, mais peuvent avoir besoin de l'aide de l'extérieur, car il ne leur est pas toujours
possible de se préparer aux émotions, à la tentation et d'anticiper les états de soi.30
Parmi les limites de la rationalité humaine, on compte également la difficulté des choix
inter-temporels. Une source des décisions irrationnelles des humains se trouve souvent dans la
dissociation dans le temps entre effort et récompense, donc une gratification différée. Le moi
24
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R. , Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 23–37. 25
Beauvois, Jean-Léon et Joule, Robert-Vincent, Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens,
Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, février 2015, p. 31–33. 26
Thaler, Richard H., Toward a positive theory of consumer choice, Journal of Economic Behavior and
Organization volume 1, n°1, March 1980, p. 39–60. 27
Samuelson, William et Zeckhauser, Richard, Status Quo Bias in Decision Making, Journal of Risk and
Uncertainty, volume 1, n°1, 1988, p. 7–59. 28
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R., Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 83. 29
Schwartz, Barry, Freedom, Choice, Wealth and Welfare, Finance & Bien Commun, 2/2005, n°22, p. 47–53. 30
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R., Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 40–45.
9
impulsif court-termiste ne poursuit pas les mêmes objectifs que le moi patient long-termiste.
Des problèmes dans le contrôle de soi peuvent mener à la procrastination.31
Thaler et Sunstein énoncent également l'effet de choix déraisonné (« mindless
choosing »), à savoir que les humains ne font pas activement attention aux décisions, mais
font souvent ce qu'on leur demande ou propose. Le Système 1 réagit dans ces cas, le cerveau
est en mode « pilote automatique ».32
Il faut aussi noter que l'influence sociale guide les décisions. Bien que les homo
œconomicus ne sont pas considérés comme des êtres sociaux, les humains le sont davantage.
Les individus souhaitent adopter un comportement conforme au groupe, et sont facilement
influencés par d'autres. Ceci a pu être confirmé par des expérimentations menées par le
psychologue social Solomon Asch. Il a par ailleurs montré la validité de ce principe au niveau
international. En outre, les individus se conforment davantage au groupe s'ils pensent être vus
ou observés par les autres.33
Enfin, face aux décision complexes, les humains adoptent naturellement des stratégies
de simplification et filtrent les informations. Les choix les plus complexes, qui sont par
exemple caractérisés par une multitude d'alternatives, sont des candidats préférentiels pour les
architectes de choix. Ces derniers peuvent structurer les réponses et faciliter l'obtention d'un
résultat souhaité, à l'aide de la mise en valeur de certaines options.34
Ils peuvent, selon Thaler
et Sunstein, améliorer les vies des autres en créant un environnement de choix modifiant la
perception et facilitant l'utilisation.35
Ces éléments montrent la faillibilité des humains, se trouvant dans un monde complexe,
avec des capacités cérébrales restreintes et une attention limitée. N'ayant pas la possibilité de
réfléchir profondément à chacune des alternatives disponibles, ils acceptent souvent les
circonstances et les questions telles qu’elles sont posées - voilà pourquoi ils pourraient
bénéficier d'un Nudge.36
31
Fudenberg, Drew et Levine, David K., A Dual-Self Model of Impulse Control, American Economic Review,
volume 96, n°5, décembre 2006, 1449–1476. 32
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R., Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 43–44. 33
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R., Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 53–60. 34
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R. , Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 94–97. 35
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R. , Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 11. 36
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R., Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 37.
10
3.1.2 Qu'est-ce qu'un Nudge
Un Nudge suit le principe du paternalisme libéral, en anglais « libertarian
paternalism ». Ce terme, introduit par Thaler et Sunstein, désigne l'idée qu'il est à la fois
possible de respecter le libre choix des agents, et en même temps qu'il peut être légitime, pour
les institutions publiques et privées, d'intervenir dans le processus décisionnel des individus
sans les contraindre, pour les aider à améliorer leurs choix. Il s'agit d'intervenir dans le
processus de décision d'un agent qui n'aurait pas fait le même choix s'il avait fait entièrement
attention, eu toutes les informations, fait preuve d'un contrôle de soi ou eu des possibilités
cognitives illimitées.37
Les Nudges s'appuient ainsi sur le Système 1 du cerveau.
Le concept du Nudge, dont la traduction depuis l'anglais signifie « pousser » ou « coup
de pousse », est utilisé par Thaler et Sunstein afin de désigner une façon de mener des
personnes, sans contraintes, dans des directions qui améliorent leurs vies et qui leur font
prendre de meilleures décisions. Il ne s'agit pas d'obligations ou d'interdictions, mais d'une
modification dans l'architecture du choix qui favorise l'adaptation du comportement souhaité
sans contrainte. Le Nudge se fonde sur les biais cognitifs et comportementaux, et il ne
cherche pas à convaincre, mais à faire agir. Un Nudge est un moyen de modifier le
comportement des humains, mais un homo œconomicus ne serait pas affecté. Les principes
d'un Nudge sont qu'il doit être facile et peu coûteux à éviter. Thaler et Sunstein estiment qu'à
l'aide des Nudges, des problèmes majeurs de la société pourraient être résolus.38
Le concept du Nudge existe depuis quelques décennies, sans être qualifié ainsi, et n'est
devenu populaire pour un large public que pendant la dernière décennie. Ce concept est
d'abord devenu populaire dans le monde anglo-saxon grâce à Barack Obama dont Sunstein
était un des conseillers.39
37
Thaler, Richard H. et and Sunstein, Cass R., Libertarian Paternalism, American Economic Review,
volume 93, n°2, 2003. p. 175–179. 38
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R., Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 6–8. 39
Bates, Daniel, Obama adviser and 'Nudge' author Cass Sunstein to leave White House [en ligne]. 04 août
2014. Disponible sur : <http://www.telegraph.co.uk/news/worldnews/barackobama/9451997/Obama-adviser-
and-Nudge-author-Cass-Sunstein-to-leave-White-House.html>. [Consulté le 15 février 2016]
11
3.2 Phénomènes qui affectent les décisions
L'homo œconomicus réagit face aux incitations et stimuli. Afin d'orienter son
comportement, il est suffisant de proposer par exemple des incitations monétaires adéquates.40
Ceci n'est cependant pas le cas en ce qui concerne les humains, qui manifestent des choix
irrationnels et qui sont, en général, influencés par une multitude de facteurs. Il est essentiel de
comprendre les facteurs qui sous-tendent les décisions de la vie quotidienne afin de
déterminer, par la suite, les méthodes qui peuvent inciter un comportement désiré.
Le principe de consistance comportementale établit qu'un individu montre une
consistance dans ses actes. Ceci permet de comprendre et de prévoir les actes passés et futurs
de chacun, il est possible d'anticiper les comportements après avoir examiné le comportement
dans le passé. Pourtant, les individus montrent aussi des comportements inconsistants, ce qui
correspond à la notion de « spécificité comportementale ». Le comportement n'est pas, selon
ce principe, uniquement dépendant de la personne, mais aussi d'une situation donnée, c'est-à-
dire du contexte.41
La consistance des comportements humains participe au phénomène d'engagement qui
peut influencer les décisions. Le psychologue Kurt Lewin propose la notion d' « effet de gel ».
Il a pu constater une tendance chez des personnes à adhérer à une décision lorsqu'elle paraît
être leur propre décision. Le lien entre motivation et comportement, de même qu'entre attitude
et comportement, n'est pas direct, un maillon intermédiaire est nécessaire, il s'agit de la
décision qui représente le gel. Cet effet est davantage efficace quand l'individu est placé dans
une situation de groupe.42
Le principe de l'engagement définit par Charles Kiesler, professeur en psychologie
sociale, montre un lien entre l’individu et ses actes qui influence la prise de décision. Afin de
s'engager, le sentiment de liberté dont un individu dispose vis-à-vis de la prise de décision est
considéré comme indispensable et augmente l'engagement de l'individu. Ce concept est
nommé, par Robert-Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois, chercheurs en psychologie sociale,
« soumission librement consentie » et conduit à donner l'impression aux individus concernés
qu'ils sont les auteurs de leurs décisions. Les principaux autres facteurs qui influencent le
degré de l'engagement sont le fait de devoir agir en public et de dévoiler son identité, le coût
40
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R., Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 8. 41
Beauvois, Jean-Léon et Joule, Robert-Vincent, Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens,
Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, février 2015, p. 19–25. 42
Lewin, Kurt, Group decisions and social change, éd. Newcomb, T. M. et Hartley, E. L., Readings in Social
Psychology, New York, Henry Holt and Co., 1947, p. 330–344.
12
que l'acte implique, son caractère irrévocable ainsi que sa répétition. Dans le processus de la
pensée quotidienne, un acte et l'individu qui l'émet se confonde, ce qui implique une
assimilation entre la valeur de l'individu et son acte. Une forte menace ou forte récompense
constituent des facteurs de désengagement, l'individu n'internalisant pas la justification de son
acte ou dans une moindre mesure seulement. En principe, on distingue deux types d'actes:
d'un côté ceux qui sont conformes à nos convictions, et dont l'engagement nous rend plus
résistant au changement ultérieur. Et de l'autre, ceux qui ne sont pas conformes à nos
convictions, on parle ainsi d'actes problématiques.43
L'effet d'engagement peut s'intensifier si les individus expriment des détails (« channel
factors » d'après Lewin) sur quand et comment ils envisagent d'effectuer leur décision par la
suite.44
Le phénomène de l'escalade d'engagement, en lien avec le phénomène d'engagement, a
également été identifié. Il s'agit d'une tendance observé chez des personnes qui maintiennent
une première décision qu'ils ont prise, même si elle est questionnée a posteriori. L'individu
s'accroche à une décision pour ne pas devoir avouer de s'être trompé, ce qui représente une
sorte d'autojustification ou auto-rationalisation.45
L'influence du contexte et de la perception individuelle sur la prise de décision a été
démontrée par Kahneman et Amos Tversky, qui appellent ce phénomène « framing » ou effet
de contexte. Cet effet tient compte, en plus des motifs classiques, des motifs supplémentaires
d’action, notamment l'existence d'un point de référence par rapport auquel d'éventuels
changements sont analysés et valorisés. Un exemple de l'effet de contexte est l'aversion des
individus à la perte.46
3.3 Quelques techniques d'influence
Dans le champ de la psychologie sociale, des techniques d'influence ont été
caractérisées pour présenter les méthodes qui peuvent être utilisées en vue d'influencer des
43
Beauvois, Jean-Léon et Joule, Robert-Vincent, Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens,
Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, février 2015, p. 70–86. 44
Beauvois, Jean-Léon et Joule, Robert-Vincent, Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens,
Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, février 2015, p. 49–73. 45
Staw, Barry M., Knee-Deep in the Big Muddy: a Study of Escalating Commitment to a Chosen Course of
Action, Organizational Behavior and Human Performance, volume 16, n°1, juin 1976, p. 27–44. 46
Tversky, Amos and Kahneman, Daniel, The Framing of Decisions and the Psychology of Choice, Science,
volume 211, n°4481, 30 janvier 1981, p. 453–458.
13
individus, hommes et femmes, pour qu'ils se comportent, en liberté, « différemment de la
façon dont ils se seraient comportés spontanément ».47
Ce travail présente plusieurs techniques qui peuvent augmenter la probabilité qu'un
individu adopte le comportement souhaité, cependant le recours à ces techniques ne garantie
pas une réussite systématique. Ces techniques peuvent représenter une source d'inspiration
pour la constitution d'un Nudge. Suivant la théorie de l'engagement, l'efficacité des stratégies
présentées dans ce chapitre repose sur l'engagement, et ce sont les circonstances dans
lesquelles les actes se déroulent qui rendent l'acte engageant ou non.
La technique « pied dans la porte », mise en évidence par les chercheurs américains
Freedman et Fraser, se base sur l'acceptation d'une première demande qui augmente la
possibilité que l'individu, ayant accepté la première demande, accepte une deuxième demande
qu'il n'aurait pas accepté sinon, suivant les principes du comportement humain cités
auparavant. Freedman et Fraser ont montré qu'ils ont pu plus que doubler le taux d'acceptation
d'une demande lorsqu'ils ont d'abord formulé une requête simple. La technique du « pied dans
la porte » repose sur l'effet de persévération. Afin de faciliter l'engagement souhaité, la
première demande représente un comportement préparatoire, peu couteux, dans un contexte
de libre choix, qui est difficilement refusable. Une fois le comportement préparatoire obtenu,
la requête porte sur une demande plus couteuse, qui représente le but souhaité dès le début.48
La technique du « pied dans la porte avec demande implicite » est une variante de la
technique précédente. Elle a été présentée dans des expériences de Seymour Uranowitz. Le
comportement préparatoire n'est plus en lien direct avec la demande la plus importante et
l'opportunité de réaliser le comportement souhaité est seulement offerte à l'individu. Le
comportement attendu ne fait pas l'objet d'une sollicitation formelle, c'est pourquoi cette
technique représente un avantage par rapport au « pied dans la porte » classique.49
Une autre technique est celle appelée « pied dans la bouche », démontrée par le
psychologue Daniel Howard en 199050
, et dont efficacité a davantage été établie par Aune et
Basil en 1994. L'utilisation d'une banale formule de politesse ou une phrase d'introduction
avant de demander la requête voulue augmente la possibilité d'acceptation. La forme
interrogative de la question donne certes l'impression de pouvoir choisir la réponse, mais
47
Beauvois, Jean-Léon et Joule, Robert-Vincent, Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens,
Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, février 2015, p. 13. 48
Freedman, Jonathan. L. et Fraser, Scott, Compliance Without Pressure: the Foot-in-the-Door Technique,
Journal of Personality and Social Psychology, volume 4, n°2, août 1966, p. 195–202. 49
Uranowitz, Seymour, Helping and Self-Attributions: A Field Experiment. Journal of Personality and Social
Psychology, volume 31, n°5, mai 1975, p. 852–854. 50
Howard, Daniel J., The Influence of Verbal Responses to Common Greetings on Compliance Behavior: The
Foot-in-the-Mouth Effect, Journal of Applied Social Psychology, volume 20, n°14, août 1990, p. 1185–1196.
14
l'interlocuteur ne peut guère répondre autre chose que « ça va ». La réponse positive rend
ensuite plus difficile le refus d'une demande ultérieure.51
Il existe également la technique d' « étiquetage », qui consiste à attribuer une
caractéristique à une personne (caractéristique positive), qui est congruente avec le
comportement que l'on souhaite que la personne adopte, afin d'ensuite utiliser celle-ci pour
solliciter la personne. Avec l'attribution internalisée, la personne est amenée à agir selon les
traits de personnalité qu'on lui a attribués. Ce qui est appelé « explication interne » favorise le
comportement d'une personne tel que l'on attend d'elle.52
Enfin, il y a la technique du « pied dans le mémoire », mise en évidence par le
psychologue Elliot Aronson. Cette technique ressemble à la technique du « pied dans la
porte » car elle fait appel au même type d'acte préparatoire. Il est ajouté une incitation à se
rappeler des souvenirs. Par exemple, en faisant appel à des circonstances à l'occasion
desquelles l'individu s'est comporté contrairement à l'acte obtenu, cela enclenche un processus
de souvenirs dans la mémoire et la personne corrige inconsciemment son comportement par la
suite.53
Ils existent certes encore une multitude d'autres techniques, comme celle qui se base sur
le toucher (« technique du toucher »)54
ou la technique visant à malmener un interlocuteur,
avant de changer de ton, et dont le soulagement rend cet interlocuteur plus enclin à
l'acceptation d'un acte (« technique de la crainte-puis-soulagement »).55
Ou encore celle dont
l'acceptation d'une demande se base sur le refus d'une autre beaucoup plus coûteuse («
technique de la porte au nez »).56
Ce travail se concentre cependant sur les techniques les plus
applicables à un Nudge comme celui présenté dans le chapitre suivant.
51
Aune, R. Kelly et Basil, Michael D., A Relational Obligations Approach to the Foot-in-the-Mouth Effect,
Journal of Applied Social Psychology, Volume 24, n°6, mars 1994, p. 546–556. 52
Mills, Rosemary S.L. et Grusec, Joan E., Cognitive, Affective and Behavioral Consequences of Praising
Altruism, Merrill-Palmer Quarterly, Volume 35, n°3, juillet 1989, p. 299–326. 53
Beauvois, Jean-Léon et Joule, Robert-Vincent, Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens,
Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, février 2015, p. 168–172. 54
Beauvois, Jean-Léon et Joule, Robert-Vincent, Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens,
Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, février 2015, p. 146–150. 55
Dolinsky, Dariusz et Nawrat, Richard, Fear-then-Relief Procedure for Producing Compliance : Beware when
the Danger is Over, Journal of Experimental Social Psychology, volume 34, n°1, janvier 1998, p. 27–50. 56
Beauvois, Jean-Léon et Joule, Robert-Vincent, Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens,
Grenoble, Presses universitaires de Grenoble, février 2015, p. 117–119.
15
4 APPLICATION DU NUDGE INCITANT AU RECYCLAGE
4.1 Présentation du Nudge
4.1.1 Contexte justifiant l'utilisation d'un Nudge
Selon Thaler et Sunstein, les situations nécessitant un Nudge sont celles impliquant des
décisions qui sont difficiles et rares, des situations dans lesquelles les personnes ne reçoivent
pas de feedback immédiat, et quand il s'avère difficile de définir la situation dans des termes
facilement compréhensibles.57
La question du recyclage des DEEE se pose peu fréquemment
et ponctuellement dans la vie quotidienne. Les personnes semblent hésiter à recycler leurs
D3E à cause d'un manque d'information sur les lieux de recyclage. Les sites de collecte ne
sont pas toujours clairement identifiables, et l'opposition des différents états de soi complique
le processus de décision et influence le comportement. Même si les personnes sont
conscientes des impacts négatifs que l'absence de recyclage représente, notamment grâce aux
informations diffusées régulièrement (média, gouvernement, éducation), le décalage entre le
moment de prendre la décision et les conséquences de la décision affecte les actes des
individus. Notamment, les contradictions entre le moi court-termiste et le moi long-termiste
ainsi qu'entre le « planner » et le « doer » empêchent souvent le recyclage des appareils
électroniques. En plus, si les personnes gardent les appareils chez eux à la maison ou les
jettent dans les ordures ménagères, leur impact direct n'est pas visible à court terme, et aucun
feedback ne leur est transmis de manière immédiate. Suivant le principe de l'aversion à la
perte, on peut également estimer que les individus préfèrent inconsciemment de garder leurs
anciens appareils plutôt que de les céder. Peut-être qu'ils les estiment utiles pour une autre
occasion ou ils prévoient de les vendre plus tard. A cela s'ajoute la préférence pour maintenir
un statu quo car recycler demande trop d'effort. La problématique du recyclage des DEEE
correspond ainsi aux cas pour lesquels l'application d'un Nudge est pertinente.
En outre, il s'agit d'un sujet dont peuvent bénéficier les individus ainsi que la société de
manière générale. Étant donné que le sujet du recyclage a un impact négatif important sur
l'environnement et la santé, cela ne concerne pas uniquement la poursuite d'intérêts propres,
mais de l'intérêt de la société en incitant les personnes à recycler leurs anciens appareils
électroniques.
57
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R., Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 72–76.
16
4.1.2 Le Nudge encourageant le recyclage des ordinateurs
Le Nudge de ce mémoire a pour objectif d'inciter les personnes à recycler leurs anciens
appareils électroniques. Ce Nudge s'adresse principalement aux équipements informatiques et
de télécommunications, et aux ordinateurs en premier lieu. Bien que ce travail s'intéresse
principalement aux ordinateurs, il peut facilement être appliqué aux autres appareils
électroniques avec écran, tels que les tablettes ou les téléphones portables.
Ce Nudge se présente sous la forme d'une page d'accueil qui apparaît après l'achat d'un
nouvel ordinateur. Au moment du premier démarrage d'un nouvel appareil, une page d'accueil
apparait, qui est constituée d'un fond bleu, d'un logo d'une organisation pour l'environnement
et d'une question qui est de l'ordre: « Avez-vous pensé à recycler votre ancien appareil ? ».
L'utilisateur a ensuite le choix entre les deux réponses suivantes : « Non, c'est sans importance
pour moi » ou « Où puis-je le faire à proximité ? » (annexe A). Si l'utilisateur choisit la
seconde option, une nouvelle page s'ouvre qui montre, grâce à de la géo-localisation, des lieux
de recyclage qui se trouvent à proximité de la position géographique actuelle de l'utilisateur
(annexe B). Il y a plusieurs sites qui proposent déjà un service de recherche des différents
lieux de recyclage via géo-localisation. A titre d'exemple, le site internet http://ourecycler.fr/ a
été choisi. Il s'agit principalement d'associations qui indiquent des dépôts et des points de
collectes. En cliquant sur des points de collecte ou dépôts, l'utilisateur est ensuite redirigé vers
les sites internet des organismes pour plus d'informations. Il a ainsi accès aux données des
points de collecte, notamment l'adresse et les horaires d'ouverture. Il est possible de remplacer
la fonctionnalité de géo-localisation, l'utilisateur peut en effet également indiquer l'adresse de
son choix et voir les points de collecte les plus proches. Une fois sur les sites internet des
différentes associations, les utilisateurs peuvent avoir des informations supplémentaires sur
les motifs et raisons qui justifient le recyclage, ainsi que l'objectif poursuivi par les
associations et leur démarche. Un guide d'aide au recyclage est également disponible.
Si l'utilisateur choisit la première option, le démarrage de l'ordinateur se poursuit, et il
n'y a pas plus d'impact. Il est cependant utile d'agir sur ce point, des améliorations seront
proposées plus tard dans ce travail.
Afin de mettre ce Nudge en place, il faut d'abord démarcher les constructeurs des
ordinateurs, et les fournisseurs des systèmes d'exploitation et leur proposer une interface de
démarrage. Les principaux constructeurs en 2015 dans le monde sont Lenovo, HP, Dell, Acer,
17
Asus, Apple58
, et les principaux fournisseurs de systèmes d'exploitation sont Windows, MAC
et Linux.59
Ces démarches n'entrainent, a priori, aucun coût à part le design pour la page
d'accueil. Cependant, pour mettre en place le Nudge, il faut convaincre les opérateurs.
L'objectif est que cette démarche soit soutenue par des organisations pour l'environnement,
qui peuvent aider à négocier avec des constructeurs et fournisseurs. La collaboration avec des
organisations pour l'environnement peut également donner plus de crédibilité à ce projet.
4.2 Appréciation critique
Ce Nudge peut fonctionner car il s'appuie sur des connaissances de la théorie
comportementale. Il faut toutefois prendre en compte les éventuels obstacles qui peuvent
apparaître lors de la mise en place de ce Nudge, afin de réfléchir à des améliorations qui
pourront renforcer l'efficacité de ce Nudge.
4.2.1 Pourquoi le Nudge peut fonctionner
Ce Nudge s'appuie sur les connaissances de la théorie comportementale qui ont été
présentées précédemment. Les observations du comportement des individus et l'observation
de l'application de techniques d'influence permettent de déduire que ce Nudge peut produire
des effets attendus et peut mener des individus au comportement envisagé, c'est à dire à
recycler.
D'abord, ce Nudge simplifie le processus de recyclage et rend les différentes options
(lieux de recyclage) plus claires et compréhensibles. Étant donné qu'une architecture de choix
simple et claire aide à prendre de meilleures décisions, cet objectif est atteint à l'aide du site
internet indiquant les lieux de recyclage les plus proches et disponibles. Le choix est limité et
les individus ne sont plus exposés à un nombre de choix trop importants susceptibles de
conduire à un paradoxe de choix, qui peut limiter le recyclage des appareils. Le lecteur est
également guidé vers des sites internet qui indiquent où et quand il est possible de déposer des
appareils. L'individu obtient des informations qui facilitent les démarches et qui constituent
des « channel factors ». Même si les individus savent que des points de collecte existent, le
58
ZDNet (éd.), Chiffres clés : le marché des PC [en ligne]. 13 janvier 2016. Disponible sur :
<http://www.zdnet.fr/actualites/chiffres-cles-le-marche-des-pc-39380521.htm>. [Consulté le 27 janvier 2016] 59
ZDNet (éd.), Chiffres clés : les systèmes d’exploitation sur PC [en ligne]. 2 février 2016. Disponible sur :
<http://www.zdnet.fr/actualites/chiffres-cles-les-systemes-d-exploitation-sur-pc-39790131.htm>. [Consulté le 27
janvier 2016]
18
fait de les indiquer sur une carte et de montrer les horaires d'ouverture facilite l'accès à
l'information, augmente la possibilité de recyclage par la suite et permet de s'imaginer la
réalisation de l'action. Une étude similaire a montré l'efficacité d'une telle méthode parmi des
étudiants américains.60
Ensuite, les individus sont libres de prendre leur décision (cocher la case qui mène aux
lieux de recyclage ou non), ce qui renforce de l'engagement. Plusieurs travaux ont pu
démontrer la pertinence de la théorie de l’engagement appliquée aux enjeux
environnementaux et l'effet durable des effets de l'engagement.6162
L'individu est soumis au
principe de « soumission librement consentie », et le fait de cocher la case « Où puis-je le
faire à proximité ? » permet d'enclencher le phénomène d'effet de gel. Ceci renforce
l'adhérence à la décision prise, et l'individu est par la suite plus enclin à adopter un
comportement conforme à sa décision. Ainsi, le Nudge vise à créer des actes conformes aux
actes non problématiques des individus et l'engagement les rend résistants aux changements
ultérieurs.
La manière dont la question est posée encourage l'utilisateur (aussi par sa curiosité), à
choisir l'option « Où puis-je le faire à proximité ? » plutôt que « Non, c'est sans importance
pour moi ». Dans la société dans laquelle nous vivons, avec l'omniprésence de messages
encourageant le recyclage, il semble très probable que les individus ne seront guère enclins à
avouer que le recyclage n'a pas d'importance. Le logo d'une organisation environnementale,
qui apparaît sur la page d'accueil et qui a une forte valeur symbolique, intervient en renfort de
la question (le logo est associé à la protection de l'environnement). Les individus souhaitent
adopter un comportement conformément aux exigences de la société et le font, très
probablement, même s'ils sont seuls à la maison. De plus, il ne s'agit pas d'une simple
question, mais plutôt d'une requête qui sollicite davantage la projection et donc l'activité de
décision.
Étant donné que les individus n'ont probablement pas encore recyclé leur anciens
appareils au moment où ils voient la page d'accueil, et en faisant appel au principe de
consistance comportementale, il est possible de déduire que la personne n'est pas motivée
pour recycler l'ordinateur maintenant. Mais ce Nudge s'appuie sur l'effet de la « spécificité
60
Leventhal, Howard, Robert Singer, et Susan Jones, Effects of Fear and Specificity of Recommendation upon
Attitudes and Behaviour, Journal of Personality and Social Psychology, Volume 2, n°1, juillet 1965, p. 20–29. 61
Wang, Theodore H. et Katzev, Richard D., Group Commitment and Resource Conservation : Two Field
Experiment on Promoting Recycling, Journal of Applied Social Psychology, volume 20, n°4, mars 1990, p. 265–
275. 62
Roussiau, Nicolas, et Girandola, Fabien, Utilisation des technologies comportementales dans les économies
d’énergie et dans la protection de l’environnement. In Bonardi, Christine, Girandola, Fabien, Roussiau, Nicolas
et Soubiale, Nadège (éds.), Psychologie sociale appliquée, In-Press, septembre 2002, p. 39–57.
19
comportementale » en agissant sur le contexte, qui diffère des habitudes de l'utilisateur. En
changeant le contexte on suppose un changement dans le comportement.
L'idée de ce Nudge est une adaptation de la technique du « pied dans la porte ». Dans
notre cas, la deuxième demande, qui est coûteuse et complexe, est celle présente de manière
très fréquente dans la société. Cette demande de recycler les anciens appareils électroniques
est omniprésente, et les individus la rencontrent de manière quotidienne. Par le biais de la
page d'accueil, l'objectif est de renforcer cette demande de la société. La page d'accueil
représente la première demande, l'acte préparatoire, qui consiste à amener les personnes à
cocher la case « Où puis-je le faire à proximité ? » afin de stimuler l'engagement.
Un autre effet de ce Nudge est le phénomène du « pied dans la mémoire ». La page
d'accueil fait réfléchir l'utilisateur à ces anciens appareils qu'il n'a pas recyclé, et il s'avère que
la probabilité qu'il agisse en vue de changer son comportement pour plus recycler augmente
par la suite.
Suivant le principe de la technique « pied dans la porte avec demande implicite », on
peut supposer que suite à notre Nudge, l'individu se sentira plus engagé, et que le Nudge peut
s'avérer utile pour le recyclage d'autres produits, y compris des produits non électroniques, ou
pour s'engager favorablement pour le recyclage.
4.2.2 Obstacles
Tout d'abord, les obstacles se trouvent principalement dans la mise en place de ce
Nudge et dans l'acceptation des fabricants pour l’intégration d’une telle page d’accueil par
défaut. Afin de faciliter l'acceptation d'une page d'accueil, les démarches auprès des fabricants
pourraient être facilitées grâce au soutien d'organisations pour l'environnement. L'intervention
des médias ou de l'Etat permettrait également de faire pression sur les fabricants.
Une fois l'étape de l'acceptation de la page d'accueil passée, la disponibilité et
l'accessibilité de la filière de recyclage est essentielle pour que le Nudge puisse fonctionner.
La filière de recyclage doit être organisée de manière structurée et efficace, pour que les
DEEE, une fois apportés aux points de collecte, soient recyclés de manière appropriée aux
standards et exigences règlementaires. La filière doit valoriser certaines matières et réduire
autant que possible les déchets ultimes en fin de chaîne. A cette étape, c'est en particulier le
rôle de l'Etat de favoriser l'émergence d'une filière structurée.
Le temps nécessaire pour utiliser la page d'accueil ou le sentiment d'un trop faible
impact sur l'environnement pourraient limiter l'efficacité du Nudge. Lors de l'achat d'un
20
nouvel appareil, un individu pourrait ne pas prendre le temps de cocher « Où puis je le faire à
proximité » car il est pressé de tester appareil. Afin de prendre en compte cette possibilité, il
peut être envisagé une option de représentation ultérieure de la page d'accueil pour les
utilisateurs pressés. L'utilisateur peut en outre estimer que l'impact sur l'environnement est
trop minime et pour cela ne pas être enclin à faire un effort pour recycler. A ce sujet, des
informations supplémentaires pourraient être fournies. La partie suivante qui porte sur des
propositions d'amélioration permettra notamment de répondre à ces difficultés.
Enfin, de manière non spécifique à ce Nudge, il est possible de faire face à la résistance
de la société pour que soit mis en place un Nudge visant à orienter les comportements. Les
principaux reproches formulés dans ce cas sont que les Nudges agissent contre le principe de
liberté et qu'il s'agit d'une forme de paternalisme non acceptable. Pour les opposants du
Nudge, des interdictions contre certains comportements plutôt que l'installation de Nudges
seraient préférables pour palier les défaillances du cerveau humain.63
Et la capacité des
institutions pour connaitre les décisions les meilleures pour les individus est également remise
en cause.64
Ces critiques ne devraient pas s'appliquer au Nudge présenté dans ce travail car la
nécessité du recyclage n’est pas sujet à controverse et fait largement consensus. Il y a une
conscience commune que la nécessité de recyclage existe.
4.2.3 Propositions d'amélioration
Aucune stratégie d'influence ne peut fonctionner à 100 %, même si son efficacité est
prouvée. En poursuivant l'analyse et à l'aide de connaissances des sciences comportementales,
il est possible d'améliorer le Nudge et de le rendre encore plus efficace.
Afin d'améliorer le Nudge, une page d'accueil plus élaborée peut davantage sensibiliser
et encourager les personnes à recycler. Dans notre cas, la page d'accueil pourrait afficher des
informations supplémentaires. Il serait possible de montrer le problème que l'absence de
recyclage représente aujourd'hui, notamment dans l'environnement proche de l'utilisateur.
L'objectif est de fournir un feedback sur les conséquences environnementales de l'absence de
recyclage. Les personnes devraient être informées, avant la question « Avez-vous pensé à
63
Sunstein, Cass, There's a Backlash Against Nudging – But It Was Never Meant to Solve Every Problem [en
ligne]. 24 avril 2014. Disponible sur : <http://www.theguardian.com/commentisfree/2014/apr/24/nudge-
backlash-free-society-dignity-coercion>. [Consulté le 15 février 2016] 64
Farrell, Henry et Shalizi, Cosma, Nudge No More : Benevolent Meddling Won’t Help Us Make Good
Decisions [en ligne]. 12 novembre 2011. Disponible sur : <http://www.slate.com/articles/health_and_science/
new_scientist/2011/11/does_nudge_policy_work_a_critique_of_sunstein_and_thaler_.html> [Consulté le 15
février 2016]
21
recycler votre ancien appareil ? » ou au moment où elles cochent la case « Non, c'est sans
importance pour moi », de l'impact néfaste d'un ordinateur ou d'un autre appareil électronique
non-recyclé. En complément de la présentation des ravages écologiques que représente
l'absence de recyclage, la référence à l'aversion à la perte peut être utilisée, en citant les coûts,
payés sous forme d’impôts par exemple, que le non-recyclage représente au final pour
l'environnement ou même pour chaque habitant.
L'ajout d'une information sur le taux de recyclage d'un type de produit en France et dans
l'environnement direct de l'utilisateur pourrait davantage favoriser le recyclage. La statistique
affichée s'appuierait sur le biais de la représentation. En outre, cette méthode utilise la théorie
du psychologue Robert Cialdini, qui consiste à privilégier davantage les formulations
positives, et ainsi montrer les personnes qui ont déjà recyclé au lieu de montrer des
statistiques de non-recyclage.65
En particulier, la page d'accueil pourrait bénéficier de l'effet
de l'influence sociale et montrer le pourcentage de personnes qui, dans l'environnement direct,
pensent qu'il est important de recycler et qui ont déjà recyclés leur appareils électroniques, à
l'aide d'un lien vers les réseaux sociaux, le site Facebook par exemple. Étant donné que les
humains sont des êtres sociaux, utiliser l'influence sociale et montrer ce que les autres gens
pensent et font est une manière très efficace d'inciter à un comportement souhaité. Pour cela,
l'utilisation des réseaux sociaux via un lien depuis la page d'accueil est bénéfique. A partir de
ce lien, les individus pourraient faire part de leur engagement et ainsi en solliciter d'autres.
Une construction similaire avec un objectif comparable a déjà été testé avec succès.66
De plus,
le caractère public, visible au travers des réseaux sociaux par exemple, d'un acte le renforce.
En effet, les individus sont, d'une part, à la recherche d'approbation social (influence
normative) et, d'autre part, l'information, qu'une majorité du groupe émet, a la valeur de vérité
(influence informationnelle).67
Et le fait que les individus aient tendance à surestimer le
nombre de personnes qui les regarde renforce davantage le souhait de réagir conformément à
son engagement. La répétition de l'acte renforce également l'engagement, il est pour cela utile
de créer des habitudes pour vaincre le biais du statu quo. Des études ont à ce sujet confirmé la
persévérance de l'influence sociale.68
Il est ainsi légitime d'estimer que ce Nudge, en recourant
65
Cialdini, Robert B., Demaine, Linda J., Sagarin, Brad J., Barrett, Daniel W., Rhoads, Kelton, & Winter,
Patricia L., Managing Social Norms for Persuasive Impact, Social Influence, volume 1, n°1, mars 2006, p. 3–
15. 66
Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R., Nudge : Improving Decisions About Health, Wealth and Happiness,
New Haven, Yale University Press, 2008, p. 182. 67
Deutsch, Morton et Gerard, Harold, A Study of Normative and Informational Social Influence upon Individual
Judgment. Journal of Abnormal and Social Psychology, volume 51, n°3, novembre 1955, p. 629–636. 68
Ross, Lee, and Richard Nisbett. The Person and the Situation. New York: McGraw-
22
à l'influence sociale, peut encourager un recyclage durable, et son effet peut être maintenu
même dans des situations pendant lesquels le Nudge n'est plus présent.
En outre, l'intégration d'une formule de politesse de l'ordre « Comment allez-vous
aujourd'hui ? », avant de poser la question de recyclage, utiliserait la technique « pied dans la
bouche », pour augmenter la possibilité de recyclage. Il faut toutefois se poser la question si
l'absence d'un réel dialogue, entre l'individu et l'ordinateur, permet de maintenir cet effet.
Par ailleurs, il en est envisageable d'utiliser la technique de l' «étiquetage». Il est
possible d'envisager l'ajout d'un commentaire du type « Vous semblez être attentif(ve) aux
problèmes écologiques et à la problématique de recyclage ». Cette phrase pourrait être
intégrée avant le choix de la case à cocher dans une bulle d'un personnage fictif, de type
« bande dessinée » par exemple (annexe C). Cela pourrait rendre la page d'accueil plus
plaisante. En jouant sur l'humour, cela peut créer une connotation positive, ce qui peut
augmenter la possibilité de recyclage par la suite. L'étiquetage peut également intervenir après
avoir coché l'option « Où puis-je le faire à proximité ? » pour renforcer l'engagement.
Puis, une autre formulation de la question qui apparaît sur la page d'accueil peut
améliorer le Nudge. Le verbe « prévoir » étant plus engageant, la question peut être de l'ordre
« Avez-vous prévu de recycler ou de revendre votre ancien appareil ? ». L'utilisateur a ensuite
le choix entre les deux réponses suivantes : « C'est déjà fait ou cela ne me concerne pas » ou
« Je souhaite recycler mon ancien appareil, où puis-je le faire à proximité ? ».
Ensuite, des sites internet autres que http://ourecycler.fr/ peuvent être utilisés. Il est
possible de transférer les utilisateurs vers des sites qui promeuvent l'économie circulaire, vers
des associations solidaires qui se chargent de la collecte et du traitement des DEEE, vers des
sites d’échange ou de don entre particuliers, ou encore vers des sites d'achat et de vente
d'anciens appareils comme http://www.vendremonmobile.com/. Le consommateur pourrait
fournir, pour ce dernier type de site, manuellement des détails de ses anciens appareils et
publier une annonce depuis la page d'accueil. D'autres sites internet comme celui de la FNAC,
eBay ou autres peuvent également être utilisées, l'annonce pourrait être payée par une
commission en cas de vente réussie. Un bon d'achat sur ces sites pourrait aussi être donné en
échange d'un ancien appareil. Par ce biais, les individus auraient le sentiment de tirer des
bénéfices du recyclage. Ceci permet de déjouer le phénomène d'aversion à la perte. Puisque
les individus sont centrés sur le présent, une récompense immédiate, ou au moins une
estimation ou visualisation de récompenses, facilitera le recyclage.
Hill, 1991. Cité dans: Thaler, Richard H. et Sunstein, Cass R., Nudge : Improving Decisions About Health,
Wealth and Happiness, New Haven, Yale University Press, 2008, p. 58.
23
Enfin, dans l'hypothèse où l'utilisateur n'a pas le temps de cocher la case « Où puis-je le
faire à proximité ? », il peut être envisageable d'offrir la possibilité à l'utilisateur de répondre à
la question posée plus tard. Ainsi, la page d'accueil pourrait réapparaitre ultérieurement à
intervalles réguliers. Cela peut permettre à l'utilisateur de répondre dans un moment plus
tranquille, pendant lequel il peut avoir plus de temps de s'occuper du recyclage de son ancien
appareil. La réapparition de la page d'accueil peut également être utilisée comme rappel aux
utilisateurs ayant manifesté leur souhait de recycler. Par exemple, après un délai de quelques
semaines, une nouvelle page d'accueil permettrait de rappeler la nécessité du recyclage de
l'ancien appareil électronique. Une fois l'option « C'est déjà fait, ce n'est plus nécessaire de me
le rappeler » choisie, l'utilisateur ne serait plus questionné.
Une combinaison de plusieurs scénarios présentés dans ce chapitre peuvent accroître
l'efficacité du Nudge. Il a en effet été montré que l’utilisation de plusieurs techniques se
révèlent davantage efficace.69
4.3 Gains économiques
Ce Nudge cible l'ensemble des consommateurs d'équipements électroniques tels que les
ordinateurs, les tablettes et les téléphones portables. De plus, bien que ce Nudge cible les
appareils électroniques, il peut avoir un effet plus large sur la conscience des utilisateurs, et
un effet à long-terme sur le recyclage. Il est probable que l'utilisateur adaptera, par la suite, un
comportement plus engagé envers le recyclage et se montre plus sensible au respect de
l'environnement après que le Nudge ait fonctionné (principe de l'engagement).
Ce Nudge se limite dans un premier temps à l'échelle nationale, car il utilise le site
http://ourecycler.fr/, qui se restreint au territoire français. Par la suite, d'autres Etats pourraient
également le mettre en œuvre et ce Nudge pourrait alors dépasser le cadre national. La
problématique du recyclage des appareils électroniques est présente dans la plupart des pays
développés dont l'Australie, qui propose déjà le site http://recyclingnearyou.com.au/, ou
l'Allemagne, qui offre une application portable pour localiser les points de collectes les plus
proches.70
Étant donné que la plupart des consommateurs d'appareils électroniques se situent
dans l'hémisphère nord, dans une première étape, l'échelle du Nudge pourrait être
l'hémisphère nord.
69
Goldman, Morton, Creason, Christopher R. et McCall, Cynthia G., Compliance Employing a Two-Feet-in-the-
Door Procedure, The Journal of Social Psychology, 1981, volume 114, n°2, p. 259–265. 70
eSchrottRecycling (éd.), Die App "eSchrott" [en ligne]. Sans date. Disponible sur :
<http://www.umweltmanager.net/recyclingsuche-app>. [Consulté le 15 février 2016]
24
En ce qui concerne les bénéfices que ce Nudge peut apporter, il est proposé de faire
référence aux résultats obtenus dans les expériences dans lesquelles les techniques
comportementales sur lesquelles ce travail s'appuie ont été testées. A titre d'exemple, les
expériences de Freedman et Fraser utilisant la technique du « pied dans la porte » ont pu
démontrer qu'il a été possible de plus que doubler le taux d'acceptation de la seconde demande
lorsqu'une requête simple l'a précédée (52,8 % contre 22,2 % en condition contrôle).71
Si
notre Nudge suit ce principe, on peut imaginer avoir une augmentation de la même manière,
en prenant toutefois les précautions nécessaires. Il n'est en effet pas possible de comparer les
résultats des expériences menées avec la réalité et espérer exactement des résultats identiques.
En prenant néanmoins comme hypothèse une évolution similaire à celle montrée par
l'expérience de Freedman et Fraser, et avec un taux d'acceptation initial de 30 % de personnes
qui recyclent leurs anciens appareils électroniques aujourd'hui, cela signifierait que le taux de
personnes qui pourrait recycler va plus que doubler (taux d'acceptation final de 71% avec
cette hypothèse). Le taux de 6 kg de DEEE recyclés par Français aujourd'hui par an pourrait
ainsi augmenter à 14 kg, ce qui permettrait de répondre aux objectifs fixés par le ministère de
l'Environnement, l'Énergie et de la Mer pour 2019. Et comparativement aux 9,5 millions de
tonnes de e-déchet en Europe, dont seulement 3,3 millions de tonnes sont recyclés72
, le
volume des déchets recyclés pourrait augmenter à 7,8 millions de tonnes. L'extraction de
métaux spéciaux, dans le processus de recyclage, rapportant entre environ 50 et 150 euros par
tonne de DEEE73
, les 4,5 millions de tonnes supplémentaires pourraient apporter entre 225 et
675 millions d'euros, au niveau européen. A cela, il convient d'ajouter que l'extraction des
métaux spéciaux de la nature est plus couteuse que la récupération de métaux issus de
produits usagés, les métaux spéciaux sont « jusqu'à 10 fois plus coûteux à extraire qu’à
recycler ».74
71
Freedman, Jonathan. L. et Fraser, Scott, Compliance Without Pressure: the Foot-in-the-DoorTechnique,
Journal of Personality and Social Psychology, Volume 4, n°2, août 1966, p. 195–202. 72
Rose, Dominique C., Europe : Interpol met en garde contre le non recyclage des «e-déchets» [en ligne]. 03
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l%E2%80%99environnement-l%E2%80%99economie-et-la-sante>. [Consulté le 18 janvier 2016]
25
5 CONCLUSION
Les recherches en économie comportementale ont mis en évidence une multitude de
biais qui affectent les individus dans leur vie quotidienne. Plusieurs biais participent à
l’émergence d’un comportement à l’origine du manque de recyclage tels que la nature
irrationnelle des humains, la difficulté des choix inter-temporels et le manque d'engagement.
Etant donné que l’absence de recyclage peut avoir des effets néfastes sur la santé et
l'environnement, une intervention est souhaitable, et l'application des techniques
comportementales afin d'inciter les personnes vers un comportement souhaité se justifie. Le
Nudge présenté dans ce travail est un outil approprié pour inciter les individus à prendre de
meilleures décisions et favoriser le recyclage des ordinateurs. Il vise à encourager les
individus, à l'aide de techniques comportementales prenant en compte les défaillances des
humains, se diriger vers les sites de recyclage. Dans le cas idéal, il peut participer au
changement et à l’adaptation de leurs habitudes sur le long terme. Le Nudge s'appuie sur les
sciences comportementales et adapte des techniques comportementales comme la méthode
« pied dans la porte », la théorie de l'engagement ou encore l' « effet de gel ». Les obstacles à
la mise en place de ce Nudge se trouvent principalement dans la nécessité d'acceptation de
l'installation d'une telle page d'accueil par les constructeurs des ordinateurs et les fournisseurs
des systèmes d'exploitation et le fait que la filière de recyclage doit être structurée de manière
efficace. Ce mémoire a fait des propositions pour contourner ces obstacles. En outre, une
reformulation de la question qui apparaît sur la page d'accueil, une intégration des liens vers
des réseaux sociaux et des statistiques de recyclage ainsi que l'ajout d'un feedback des
conséquences de l'absence du recyclage pourraient davantage améliorer et augmenter
l'efficacité de ce Nudge.
Ce Nudge permet également de renforcer la prise en compte des problèmes
environnementaux dans notre société. La thématique s'inscrit dans la continuité de la
démarche de protection de l’environnement. Voilà pourquoi ce Nudge a été présenté lors du
concours « Nudge Challenge COP 21 » dans le cadre de la conférence sur le climat à Paris de
la COP21 le 16.10.2015, devant un jury composé de membres de l'organisation NudgeFrance,
un représentant du ministère de l'Environnement, de l'Énergie et de la Mer (ancien ministère
de l’écologie, du développement durable et de l’énergie) ainsi que de la Commission
Européenne (annexe D).
Enfin, avec l'essor de l'internet et le développement des réseaux sociaux, l'économie
collaborative est en pleine croissance et modifie profondément les habitudes des
26
consommateurs. L'économie du partage favorise la réutilisation des produits et peut ainsi
atténuer l'économie du gaspillage qui s'est installée au cours des dernières décennies. L'effet
bénéfique sur l'écologie que cela peut représenter n'est pas négligeable. L'économie du
partage peut favoriser une économie tournée vers le respect des ressources, en répondant à la
demande du développement durable. Il est utile d'agir là-dessus et adapter la page d'accueil
par la suite, en intégrant par exemple davantage de sites internet d'échange ou de don de
produits entre particulier comme proposé dans le cadre de ce travail.
Dans une prochaine étape, la mise en œuvre de ce Nudge est envisageable dans
plusieurs pays, principalement les pays développés. Une fois la page d'accueil accepté par
défaut par les constructeurs et fournisseurs, le champ d'application peut désormais s'étendre à
l’ensemble des équipements électroniques et de télécommunication avec écran.
27
ANNEXE
Annexe A Page d'accueil
Annexe B Plan des points de recyclage
Annexe C Technique d' « étiquetage »
Annexe D Attestation participation concours « Nudge Challenge COP21 »
28
Annexe A Page d'accueil
Figure 1 : Page d'accueil
Source: GreenPower (éd.), Page d'accueil lors de la présentation du Nudge au concours NudgeFrance le
16.10.2015, Paris.
29
Annexe B Plan des points de recyclage
Figure 2 : Plan des points de recyclage grâce à la géo-localisation
Source: OùRecycler (éd.), Outil communautaire de location de points de collecte [en ligne]. Disponible sur :
<http://ourecycler.fr/>. [Page consultée le 16.02.2016]
30
Annexe C Technique d' « étiquetage »
Figure 3 : Technique d' « étiquetage » à l'aide d'un cartoon
Source: Propre figuration avec Earth Cartoon with recycle Symbol [en ligne]. Disponible sur :
<http://fr.stockfresh.com/image/322777/earth-cartoon-with-recycle-symbol>. [Page consultée le 16.02.2016]
Vous semblez être
attentif(ve) aux
problèmes écologiques
et à la problématique
du recyclage
31
Annexe D Attestation participation concours « Nudge Challenge COP21 »
Figure 4 : Attestation de participation de l'équipe GreenPower lors du concours « Nudge
Challenge COP21 »
Source: NudgeFrance (éd.) Attestation de participation, émis au groupes participants au concours, 09.12.2015,
Paris.
32
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