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LIVRE BLANC :

L’AVENIR DES RESEAUX SOCIAUX DANS L’ASSURANCE

SOMMAIRE Assurance, réseaux sociaux et cloud computing 3 François LAURENT, Consumer Insight, CoPrésident de l'ADETEM, auteur de Marketing 2.0 (Ed.M21 -mai 2008), Animateur des blogs "Marketing is Dead" et "l'Intelligence Collective" Démarche d’innovation participative 5 Damien de BLOTEAU, Responsable Innovation - AG2R LA MONDIALE Marketing et management dans l’assurance : De la mise en marché à 9 la mise en réseau Marc PHALIPPOU, Responsable Communication Editoriale et Opérationnelle - MMA Les réseaux de défiance 15 Michel REVEST, Directeur Recherche et Innovations - COVEA Les réseaux sociaux d’entreprises, une des clés de votre réussite pour demain ! 20 Frédéric CANEVET, Chef de marché CRM - SAGE L’assurance et les media sociaux : Réinventons un modèle « Socialisé » 35 pour l’assurance Julien MALDONATO - Manager - DELOITTE

Le management des jeunes professionnels à l'heure des réseaux sociaux : rupture 43 et continuités Emmanuel FRAYSSE, Manager Pôle web - Infopro Communication Impact des réseaux sociaux sur le management des entreprises 48

Hervé KABLA, Directeur Général - BLOG ANGELS

Quelles entreprises pour la Génération Y ? 54 Emmanuel MIGNOT, Président - Teletech International Les Réseaux Sociaux et l’Assurance 60 Vers un rééquilibrage des forces entre assureurs et assurés Christian PARMENTIER , Fondateur - LAB

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PREFACE DU LIBRE BLANC

ASSURANCE, RÉSEAUX SOCIAUX ET CLOUD COMPUTING

François LAURENT

Consumer Insight, CoPrésident de l'ADETEM, auteur de Marketing 2.0 (Ed.M21 -mai 2008), Animateur des blogs "Marketing is Dead" et "l'Intelligence Collective"

Les nouvelles technologies – et plus particulièrement le web social – ont profondément modifié la relation des clients aux marques, et des assurés ou sociétaires à leurs compagnies d’assurances, en leur permettant de dialoguer aisément entre eux, comme l’annonçait dès 1999, la première thèse du célèbre Cluetrain Manifesto : « Les marchés sont des conversations ».

Aujourd’hui, il n’est plus une entreprise pour nier la puissance de ces nouveaux formats communicationnels et/ou refuser d’engager des discussions (parfois encore timides) avec les internautes : qu’elles négligent d’ouvrir leur propre page Facebook, et d’autres le feront pour elles … et parfois à leurs dépens !

Mais le web social ne se limite pas à de sympathiques et futiles conversations de Café du Commerce, où de gentils internautes s’en viennent déclarer : « Je t’aime » à de gentilles marques dans l’espoir de gagner un superbe gadget – même si les annonceurs usent et abusent de ces concours de recrutement !

Les gens qui échangent sur les médias sociaux – au sens large : des forums à Twitter et Foursquare, en passant par la blogosphère, les commentaires des médias en ligne et bien sûr, l’incontournable Facebook –, évoquent en vrac l’augmentation de leurs primes d’assurance, les enjeux des prochaines élections, les problèmes de scolarisation de leurs enfants et montrent leurs dernières photos de vacances.

Ces gens donc, pourquoi changeraient-ils soudain du tout au tout, passé la porte d’entrée de leur entreprise : « De même que dans les marchés en réseau, les personnes se parlent directement à l'intérieur de l'entreprise », continue ainsi le Cluetrain Manifesto – 42ème thèse !

Dommage que beaucoup dirigeants ne connaissent du manifeste que les premières lignes – pour ne pas dire, juste la première ; car ils passent à côté des thèses #51 et #52, plutôt décapantes : « Le management du style commander-et-contrôler vient de et renforce la bureaucratie, la lutte du pouvoir et une culture globale de la paranoïa » ; et : « La paranoïa tue le dialogue. C'est son but. Mais le manque de dialogue peut tuer une entreprise ».

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Les enjeux deviennent les mêmes, tant en interne qu’en externe : passer d’une communication verticale, d’un management hiérarchique, à une communication horizontale … et à d’autres types de management : mais là, beaucoup reste à inventer.

Notamment dans les entreprises très hiérarchisées, bien sûr, mais également dans celles qui disposent d’une force de vente très disséminée et parfois très loin du siège … comme par exemple, les compagnies d’assurances : quoi de plus naturel pour tel ou tel conseiller du Sud ou de l’Est de la France, de dialoguer avec ses amis … mais aussi ses clients … voire d’ouvrir une page Facebook pour mieux développer son portefeuille.

Les limites deviennent ténues entre vie privée et vie professionnelle, ou plutôt entre pratiques privées et pratiques professionnelles, et elles vont encore s’amenuiser avec l’arrivée massive des jeunes de la Génération Y dans les entreprises ; des jeunes qui non seulement ont remplacé les mails à leurs amis par des messages sur Facebook mais manient avec aisance tous les outils du cloud computing – la fameuse informatique dans les nuages !

Des jeunes qui après avoir utilisé pendant des années toute la palette des outils Google pour travailler en groupes avec les étudiants de leurs promotions trouveront tout naturel de procéder pareillement en entreprise, quitte à bypasser la DSI pour gagner en souplesse et en efficacité ; et pourquoi leur imposer d’en revenir aux vieilles méthodes, si celles-ci fonctionnent mieux ?

La compagnie d’assurances de demain se construit aujourd’hui – mais souvent de manière très empirique ! Quelle sera-t-elle, cette compagnie, façonnée à la mesure des réseaux sociaux et du cloud computing, par les « digital natives » … et les assurés d’aujourd’hui ?

Telle est la question que le Laboratoire Assurance Banque a posée à 6 blogueurs qui font autorité, spécialistes des Réseaux Sociaux, et 5 professionnels de l’assurance, en préparation du Colloque Prospective 2012 : leurs réponses feront l'objet d'un livre blanc, de présentations et tables rondes lors de la seconde matinée du colloque, le 3 Octobre.

Nous en publierons également de larges extraits dans le nouveau blog du LAB.

Vous pouvez retrouver l’intégralité du livre blanc sur le blog du LAB sur : www.cerclelab.com – rubrique BLOG

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DEMARCHE D’INNOVATION PARTICIPATIVE

Damien de BLOTEAU Responsable Innovation

AG2R LA MONDIALE

Dans le cadre de sa politique d’innovation Groupe, AG2R LA MONDIALE a testé la participation des collaborateurs autour d'une démarche d'innovation participative. Les enjeux sont doubles : 1-Motiver les salariés à participer et déposer des idées, 2- Etre capable de mettre en œuvre les meilleures idées. Cette démarche participative permet à chaque collaborateur du Groupe AG2R LA MONDIALE de partager ses idées, commenter celles des autres ou voter pour les plus intéressantes. Après 3 ans d'existence, cette démarche est une réussite, avec près de 35% des collaborateurs inscrits sur le site... et plus de 2000 idées émises et 5% d'idées mises en œuvre. Le management est relativement éloigné de ce dispositif puisque chaque collaborateur est considéré, au sein de cette démarche, comme un internaute lambda émetteur d'idées (chaque idée est traitée indépendamment du statut du collaborateur.)

AG2R LA MONDIALE, a initié en 2008 et déployé à l’ensemble des 7000 collaborateurs en 2009 sa démarche d’innovation participative interne. Retour sur les grandes étapes de ce projet collaboratif !

La construction de la démarche En 2008, AG2R et La Mondiale se rapprochent pour construire le Groupe AG2R LA MONDIALE, aujourd’hui leader de l'assurance de protection sociale et patrimoniale en France. Le groupe se dote alors d’une direction de l’innovation dont la mission vise notamment à développer la création de nouveaux projets et à mettre en place une culture de l’innovation auprès de l’ensemble des 7000 salariés. Convaincu que nous aurons plus d’idées à plusieurs, il se dégage très rapidement l’opportunité de proposer une démarche participative où l’ensemble des collaborateurs pourrait participer activement à la réussite du projet. La rencontre avec Innov’Acteurs, association dont l’objet est de réunir les entreprises qui ont mis en place une démarche d’innovation participative, va permettre de construire ce projet. Des échanges avec d’autres assureurs mais aussi des grands noms de la banque ou de l’industrie (Société Générale, Michelin, Air France Industries,…) nous permettent également d’esquisser les grandes lignes de notre future démarche interne.

Un essai transformé

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Afin de valider nos orientations avant un éventuel déploiement, nous organisons un test sur le dernier trimestre 2008 sur 160 personnes réparties dans 2 directions. Avec 32% de participation et 31% d’idées validées, ce test nous permet de valider les 2 axes majeurs inhérents à la réussite d’un tel projet : 1/ Avoir des idées 2/ Être capable de traiter les idées et mettre en œuvre les meilleures Pour l’obtention des idées, le test nous enseigne que 90% des idées ont été émises le 1er mois…. Une démarche ouverte toute l’année risque de s’essouffler très vite. Pour notre capacité à traiter des idées, nous nous apercevons que notre process de traitement instauré pour le test (un premier comité de sélection des idées par métier puis un second comité Innovation Participative transversal dont le rôle est de valider les idées) est trop lourd en vue d’un déploiement pour le Groupe. Il nous faut donc réfléchir à un process le plus court possible et le plus efficace. Ce test nous permet donc d’esquisser l’originalité de notre démarche : 1/ une démarche ouverte seulement 2 mois par an : Mars et Septembre 2/ un process de traitement extrêmement court où chaque idée émise est traitée directement par la personne concernée par la mise en œuvre de l’idée ! Le process de traitement de l’idée relie donc directement l’auteur de l’idée à l’interlocuteur en charge de l’analyse de cette idée. Le manager de l’auteur est donc exclu du process et donc du traitement de l’idée. C’est dans cette philosophie que le site Extranet sera construit : chaque participant est un internaute, sans aucun lien (transversal ou managérial) avec les autres internautes. Dans le cadre de notre démarche d’innovation participative, le salarié est considéré comme un émetteur d’idées, qui a la possibilité de commenter toutes les idées qu’il souhaite et qui peut aussi voter pour d’autres idées que les siennes.

Un déploiement réussi C’est fort des résultats du test et de ses enseignements que la Direction Générale valide en 2009 le déploiement de notre démarche d’innovation participative pour l’ensemble des 7000 collaborateurs du Groupe à l’occasion du lancement du nouveau plan d’entreprise. Pour obtenir le maximum d’idées lors du premier temps fort de septembre, nous avons choisi 4 thématiques très larges pour permettre à chaque salarié d’être concerné par au moins une des thématiques proposées et favoriser le lancement de la démarche. Le jour du lancement, plus de 1000 collaborateurs s’inscrivent sur notre site et les idées commencent à venir par dizaines, puis par centaines. Les meilleures idées remportent un nombre de vote important (plus de 600 votes pour certaines idées). Le lancement est un vrai succès ! Chaque collaborateur trouve dans cette démarche la possibilité de proposer les idées auxquelles il croit, quel que soit le métier qui est concerné par son idée, sans lien avec son management. Le salarié peut tout simplement proposer des idées d’amélioration ou de nouveauté sur les différents domaines d’AG2R LA MONDIALE… et chaque idée sera traitée par la personne ad hoc !

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Ce lancement s’est également accompagné d’une communication originale, variée et inédite avec une série de teasers humoristiques, des affiches dans les lieux de vie du Groupe, des petits déjeuners sur tous les sites du Groupe le même jour…. Petit déjeuner où chacun pouvait décider ou non d’y aller. La démarche d’innovation est individuelle, il nous semblait judicieux que la participation au petit déjeuner soit également sur la base du volontariat de chacun.

Une démarche pérenne Depuis 2009, la démarche perdure 2 mois par an avec de nouvelles thématiques. Désormais, 2700 collaborateurs participent à la démarche, soit 37% des salariés, en proposant leurs idées, votant ou commentant celles des autres ! En 6 temps forts, plus de 2000 idées ont été émises, avec un taux de mise en œuvre de 5%. Chaque année, nous organisons les trophées de l’innovation AG2R LA MONDIALE pour récompenser les auteurs des meilleures idées mises en œuvre sur l’année. Cette journée, sponsorisée par la Direction Générale, est essentielle dans la réussite du projet. La présence de notre Direction Générale permet de souligner l’importance de cette démarche au sein de l’entreprise, mais surtout elle offre la possibilité aux lauréats de rencontrer les membres de la Direction Générale. Ce dernier aspect est un facteur important dans la motivation des lauréats à émettre de nouvelles propositions et à motiver leurs collègues pour faire de ce projet une réussite encore plus participative ! Mais au-delà de cette rencontre, la première récompense des lauréats est tout simplement la fierté d’avoir eu des idées retenues et mises en œuvre, d’avoir contribué à changer les choses et d’avoir pu apporter concrètement des idées au bénéfice de l’entreprise.

Les axes d’amélioration de la démarche La participation, bien que très forte pour des projets de ce type (37% des collaborateurs), progresse faiblement. Il reste 63% des salariés qui ne sont jamais allé sur l’Extranet pour connaître les idées émises par leurs collègues. Certaines thématiques proposées lors des temps forts n’ont pas rencontré le succès escompté. Que la conséquence soit un faible nombre de suggestions ou un trop faible pourcentage d’idées retenues, les thématiques doivent correspondre à une attente des collaborateurs mais aussi à des axes de réflexion de l’entreprise. Interroger les salariés sur des questions secondaires ne favorisera pas l’émission d’idées ou la mise en œuvre des meilleures suggestions.

Les prochaines étapes ?

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Comme tout projet, l’efficacité de notre démarche devra être confrontée au sacro-saint ROI. Depuis 2009, des idées ont apporté des gains ou contribué à des économies, mais nous n’avons pas eu (ou pas retenu ?) l’IDEE, celle dont on parlera encore dans 15 ans comme ayant généré un gain important, dopé les ventes d’un produit ou économisé une petite fortune. C’est en rassemblant les conditions favorables à l’éclosion des idées (la sérendipité) que nous pourrons obtenir ces idées ! Malgré tout, notre démarche d’innovation participative a montré l’intérêt des salariés du Groupe à collaborer autour de projets communs, transversaux, au-delà des frontières des métiers. Probablement que le Réseau Social d’Entreprise, véritable intranet où chacun peut participer aux communautés de son choix en fonction de son expertise, son métier, ses connaissance et ses envies, sera l’étape suivante. En conclusion, ce projet collaboratif peut être déployé dans tout type d’entreprise, quel que soit le secteur d’activité. La diversité des sociétés représentées au sein d’Innov’Acteurs en témoigne. Avant de se lancer dans cette aventure, il me semble qu’il ne faut pas sous-estimer le traitement des idées et sa capacité à en mettre en œuvre. Les démarches participatives s’éteignent pour manque de mise en œuvre concrète, jamais pour manque d’idées émises !

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MARKETING ET MANAGEMENT DANS L’ASSURANCE : DE LA MISE EN MARCHÉ À LA

MISE EN RÉSEAU

Marc PHALIPPOU Responsable Communication Editoriale et Opérationnelle

MMA

Avec le tout digital, le tout horizontal et le tout… tout de suite, le time to connect devient plus important que le time to market. La vague des réseaux sociaux et du web collaboratif porte et diffuse plus que tout autre phénomène ces trois dimensions, pour les clients de l’organisation mais aussi pour ses collaborateurs. Avec cette vague, l’entreprise d’assurance fait un nouveau pas vers (dans ?) le monde (du temps) réel : elle ne peut plus externaliser cette (r)évolution. L’onde de choc pour le marketing et le management est réelle.

Les réseaux sociaux ont largement alimenté ces derniers mois les tables-rondes, conférences et autres déjeuners-débats du monde de l’assurance. Avec l’arrivée de nouveaux chevaux de bataille comme le « big data », le phénomène semble se calmer. N’aurions-nous vu et nourri qu’un simple effet de mode, tant pour nos clients que pour le management ?

Si la crise n’était que de passage, on pourrait peut-être répondre oui à la question pour les clients. Mais voilà, le cap des 3 millions de chômeurs franchi en France à l’été 2012, la crise est là et bien là. Cette perception tisse un contexte « porteur » au développement des réseaux sociaux : en période de crise, un réseau, ça rassure. Les réseaux sociaux réels et virtuels sonnent comme une forme d’antidote de la fameuse « fracture sociale ».

Et puis, cela détend aussi : la place qu’occupent les jeux et le divertissement sur ces réseaux (souvent très peu sociaux d’ailleurs dans cet usage-là) en témoigne. La Tribune de Genève rappelait ainsi que l’éditeur de jeux Zynga représente 15% du CA de Facebook : http://www.tdg.ch/economie/Facebook-tire-Zynga-vers-le-bas-/story/22553200 .

Ce regard rapide et vaguement sociologique s’appuie sur l’un des fondements du marketing : partir des besoins du client. Face à la crise, le client a besoin d’être rassuré et, pourquoi pas, de se divertir. D’où la croissance des réseaux sociaux, bâtie sur le besoin de « réseauter » en période de crise (économique, d’adolescence, du milieu de la vie…) et prenant appui sur l’accès au web 2.0 et le développement des temps de connexion disponibles pour leurs clients. Si Google a développé la Google Car, ce n’est pas pour faire la course avec Ford. C’est pour étendre les opportunités et temps de connexion du conducteur de sa voiture, de ses passagers…

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Les consommateurs veulent du réseau social. Cela tombe bien : les grands de l’industrie du net, qu’il s’agisse des créateurs de contenus, des poseurs de tuyaux ou des gérants des moyens de paiement, sont d’accord pour leur en donner.

Dans ces conditions, le tableau des réseaux sociaux et de l’assurance apparaît un peu comme une énigme : comment expliquer que cette autre industrie, l’assurance, construite sur un besoin de sécurité et une valeur de solidarité – « boostés » donc par ces temps troublés - ne prenne pas plus racine dans ce nouveau terreau social à base de Facebook, Twitter, Instagram et autres Pinterest ? « Etonnant, non ? » Comme aurait dit le fameux humoriste à la fin de ses 5 minutes nécessaires et indispensables. L’assurance n’est-elle pas affaire de communauté et question de réseau ?

En fait, les réseaux sociaux dont on parle aujourd’hui – j’ajouterai LinkedIn aux précédents « nominés » - ne sont pas ceux (ou pas que) qui fédèrent et irriguent de vraies communautés : nous sommes loin de la création et des premiers usages d’Internet dans les années 1970 par la communauté des scientifiques rapportée par Joël de Rosnay. La démocratisation du web collaboratif via les réseaux sociaux ne fait pas de chacun de nous un scientifique… en tous cas, pas pour moi.

Les réseaux sociaux sont bien des réseaux qui créent du lien, certes, mais ils le font autour de centres d’intérêt partagés : si vous aimez la photo Vintage, votre compte Instagram n’est pas un sésame pour la communauté des fous d’instantané ou de Polaroïd ! On voit la limite de l’outil « réseau social »… mais aussi celle du sujet : qui s’intéresse à l’assurance comme on peut le faire pour la photo ?

Si l’assurance est peu présente sur les réseaux sociaux, c’est donc pour deux raisons essentielles : une mutualité d’assurés auprès d’une même enseigne, d’un même courtier… n’est pas une vraie communauté a priori, au sens qu’un centre d’intérêt commun autour de l’assurance ne peut l’animer aussi fortement que d’autres intérêts partagés. L’assurance ne passionne pas les foules, sur la toile comme « IRL », dans la vie réelle !

Les mutuelles affinitaires voire professionnelles sont bien sûr l’exception qui confirme la règle : elles disposent de vrais avantages à valoriser sur et via les réseaux sociaux. Et ne s’en privent pas pour certaines, l’exemple de la MACSF est riche à ce sujet : http://rezoplus.fr/

Autre raison pour la présence active encore réduite des assureurs sur les réseaux sociaux : ils ne savent pas par quel bout les prendre : agence spécialisée, community-manager intégré, salariés dédiés, volontaires associés en mode collaboratif ?…S’en servir avec ses clients, ses collaborateurs, ses partenaires ? Et pour quoi faire ? Ouvrir la lecture des réclamations clients à tous via sa page Facebook ? Donner à ses concurrents des informations internes précieuses via son compte Twitter ? L’ironie pointe dans ces lignes… mais la réalité est-elle si éloignée ?

Habitué depuis des lustres à externaliser les innovations les plus risquées (assurance vie, assistance, informatique, vente directe… pour ne citer que les plus marquantes), l’assureur donne aujourd’hui l’impression de devoir ingérer des réseaux sociaux… sans trop savoir ni pourquoi, ni comment. Le mode « test and learn » peut donc parfois dissimuler une absence d’objectifs : il est en revanche clair sur l’enjeu. L’assurance est touchée de plein fouet par la vague qui porte les réseaux sociaux.

L’émergence des réseaux sociaux est en effet une nouvelle étape de 3 grands mouvements :

1. la digitalisation de l’information,

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2. l’horizontalisation des relations, 3. et l’accélération des échanges.

Pour l’assurance, c’est une évidence : ces 3 mouvements la visent en plein cœur. En effet :

1. l’information est la matière première de l’assureur

2. l’assurance n’est pas un produit de consommation mais un produit de relation

3. l’assureur n’a plus le temps pour lui : pour son client comme son actionnaire, la « court-termisation » est la nouvelle règle. Une règle parfois difficile à marier au plan financier avec la nécessaire maîtrise de l’information et de la relation au plan marketing…

L’assureur ne peut et ne doit donc plus externaliser les innovations liées à ces 3 mouvements.

Un exemple : la manière dont l’entreprise développe et gère son site web est essentielle. Avec la naissance de l’électricité au XIXème siècle, l’ampoule n’a pas remplacé la bougie, c’est l’électricité qui a gagné, pas l’ampoule. L’entreprise est devenue électrique. C’est la même chose avec le digital : ce n’est pas parce que votre entreprise a son site et une équipe web et/ou multicanale, que votre entreprise est digitale. Ce n’est pas parce qu’elle a un community-manager, une plate-forme collaborative ou une agence-conseil en e-réputation que votre compagnie fonctionne en réseau avec ses clients, ses collaborateurs ou ses partenaires.

Comment l’entreprise d’assurance peut-elle donc se « réseau-socialiser » ?

L’assurance est un métier de confiance, une affaire de bouche à oreille, de recommandation et d’engagement. Ces mots ne sont pas repris par hasard sur les réseaux sociaux : même si la matière assurance revêt peu d’intérêt pour les clients, la vague des réseaux sociaux se nourrit de valeurs au cœur de l’assurance.

Dans l’entreprise d’assurance, les implications sont nombreuses. Trois émergent à nos yeux :

1. la réduction des niveaux « hiérarchiques » internes et externes :

les échanges collaborateur-hiérarchie sont plus directs, plus rapides, moins formels

certaines structures peuvent « s’aplatir », de nouveaux modes de fonctionnement se développer : poursuite des décloisonnements, recours au volontariat, mise en place de groupes, d’outils collaboratifs (co-création, co-développement, co-coaching…), voire d’équipes pérennes chargées d’accompagner le changement aux plans métier (veille, anticipation, stratégie) et management

Pour les entreprises ayant suivi ces dernières voies et développé le collaboratif, le volontariat, clé de l’engagement au sein de groupes communautaires, est un

nouvel élément à gérer dans la relation collaborateur-hiérarchie… et pas le plus simple : comment considérer et évaluer cette activité, pour le collaborateur en particulier (implication, contribution… et rémunération) et pour l’entreprise en général (position officielle des RH à ce sujet… ou pas ?)

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On assiste (ou devrait assister) au changement de paradigme vers la « wirearchy » proposé par John Husband : http://wirearchy.com/what-is-wirearchy/ . Le choc avec l’organisation de l’assurance est réel : les couches superposées (intégration verticale), les silos par métiers (industrialisation des services) doivent se repenser. Toutes les entreprises n’adoptent pas la même conduite, le même rythme pour avancer sur cette voie.

2. la prise en compte de la génération Y dans l’organisation

Pour l’entreprise et la gestion de ses ressources humaines, le nouveau paradigme pose (à nouveau) qu’il n’y a pas de client heureux, satisfait, sans collaborateur heureux, engagé. Ce constat implique bien sûr une attention particulière aux salariés de la génération Y…

… nécessaire, cette prise en compte doit incarner un véritable objectif stratégique pour l’organisation, afin d’éviter les risques d’une dérive compatissante ou manipulatoire. Comme le rappelle Stephen Jay Gould (La structure de la théorie de l'évolution, Gallimard), la protection de ses enfants (et des plus faibles en général) par une espèce est un gage d’espérance de survie accrue pour cet espèce par le jeu de l’adaptation. Maintenant, la mise sous cocon dans l’organisation de ces collaborateurs risque de créer une espèce sur-protégée dans un cadre empreint de paternalisme… ou au contraire, son exposition forcenée la transformer en une sorte de « chair à canon » broyée pour la mutation de l’organisation… nouveaux temps modernes.

Comme elle a su le mettre en place pour ces « cadres à potentiel » dans une logique de progression hiérarchique plus ou moins programmée, l’entreprise doit concrètement repérer et accompagner les profils de type « génération Y » dans la logique non plus seulement de gérer des territoires au sein de l’organisation mais aussi d’accentuer son empreinte dans et sur l’organisation en mouvement.

3. la mutation du management, du marketing et de la communication

C’est une évidence : le client a plus librement accès à l’entreprise en direct et/ou sur les réseaux sociaux. Il peut désormais selon le terme consacré faire entendre sa « voix » à qui de droit et/ou qui il souhaite : les paires d’yeux ou d’oreilles les plus compétentes ou gradées… et à des dizaines / centaines / milliers / millions d’internautes et/ou de pairs selon son audience sur les réseaux sociaux. Comme le rappelle Yan Claeyssen, Président D’ETO, « la marque n’est plus ce qu’elle dit qu’elle est, elle est ce que disent d’elle ses clients » (sur les forums, réseaux sociaux…). Le marketing, structure-tampon imaginée par l’entreprise pour mieux observer et digérer les évolutions de son environnement et tout particulièrement les voies à suivre pour capter le client, vit dès lors une profonde mutation autour de 2 grands axes : un nécessaire décloisonnement et une intégration complète, interactive et maîtrisée de la voix du client.

Le décloisonnement : les sujets traditionnels du marketing diffusent dans toute l’entreprise : veille, anticipation, analyse des marchés, satisfaction client… chaque collaborateur a sa vision, ses actions et ses indicateurs pour ses clients. Ces idées circulent, remontent et partagent de plus en plus dans l’entreprise : les réseaux sociaux d’entreprise le rendent possible et fluide. Et comme la satisfaction du client est intimement liée au bien-être des salariés, l’entreprise et le marketing

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s’attachent de plus en plus à cette prise en compte. Comme avec la qualité à la fin du siècle dernier, le marketing est au plan politique dans l’entreprise « dépossédé » d’un des sujets qu’il a portés en termes de veille, stratégie et sensibilisation : la relation client. Ce mouvement est naturel : capter les sujets liés aux clients pour que l’entreprise les digère mieux le moment venu, c’est fondamentalement la raison d’être du marketing dans l’entreprise.

L’intégration complète, interactive et maîtrisée de la voix du client : études, baromètres, marketing direct en mode one-to-one, télémarketing, vente directe… le marketing gérait déjà des interactions clients. Son métier intègre désormais la gestion de la conversation directe avec le client, sur tous les modes (one-to-one, one-to-many, one-to-one in front of many…) : interactivité, fluidité, pertinence et rigueur en sont les facteurs-clés de succès. Ils obligent dans la plupart des cas le marketing à repenser son organisation mais aussi, dans le meilleur des cas, à peser sur celle de l’entreprise. Objectif là aussi : réduire les niveaux « hiérarchiques » vécus ou perçus par le consommateur dans ses différents parcours.

Le marketing de mass-market vit donc une profonde mutation née de la numérisation de l’information, dans et hors l’entreprise. La capacité à traiter en mode collaboratif et en temps réel des masses d’informations, tant en interne qu’en externe, est la nouvelle donne. Le marketing passe aujourd’hui d’un paradigme de mise en marché à celui de la mise en réseau. Le modèle relationnel franchit une nouvelle étape: toujours plus d’informations, toujours plus de relations, professionnelles, privées, ce modèle tisse sa toile pour laisser encore plus l’initiative au client : de la recherche, du retour (… ou pas), de l’engagement, du partage… Ce nouveau modèle « en réseau » emprunte de nombreuses caractéristiques au marketing industriel (le B-to-B) : intégration « vivante » d’une connaissance client tous azimuts, gestion des liens avec des prescripteurs, des influenceurs. Le cloud et la big data rendent aujourd’hui possible pour chaque client individuel le traitement auparavant réservé par l’entreprise à ses meilleurs clients professionnels. Coté media, la communication 360, le brand-content doivent compenser la baisse des medias traditionnels (y compris en termes de budget), des messages de type « push » et de la communication descendante en général.

Au cœur de ces évolutions, les missions de base du marketing demeurent : identification de ses marchés, connaissance du client, de ses attentes… mais leur exercice évolue : quand les communautés internes ou externes à l’entreprise remplacent et/ou décrivent les marchés, quand la voix du client incarne les attentes d’un segment, les fonctions et la vision d’un chef de marché ou d’un chef de produit – lui-même issu de la génération Y - évoluent. Une voie apparaît ainsi dans l’assurance : la consolidation d’un rôle de chef d’orchestre autour d’un (segment de) marché client. Marketing-mix intégrant la stratégie de relation, mais aussi la co-création (études, offres, services, interfaces de communication)… : tous les volets d’un mix stratégique et opérationnel mis en réseau.

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Le nom de ce chef d’orchestre ? Pourquoi pas manager de communauté ? Le télémarketing a marqué l’apparition et le développement du vocable relation client. La vague des réseaux sociaux a créé le nom de community-manager… Le marketing pourrait lui donner tout son sens et son contenu avec les talents nécessaires : psychologie, communication, relationnel, commercial…

… Stratégie et organisation aussi. Son rôle à venir dans l’assurance est immense : comme le rappelle avec humour Jean-François Zobrist, Administrateur de la Société FAVI, leader mondial dans la fonderie : le diable est dans les cloisons. Et il faut mettre le dehors… dedans !

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LES RESEAUX DE DEFIANCE

Michel REVEST Directeur Recherche et Innovations

COVEA « Les assureurs sont des voleurs ; les banquiers des escrocs ». Le reste n'est pas mieux ... Pour le public, le système économique a implosé du fait de l'incurie des politiques et de l'incompétence des responsables en charge des activités économiques. Bien pire encore, c'est l'esprit de lucre, la voracité des dirigeants, la corruption et la confusion des intérêts qui est à l'origine des fléaux qui frappent le commun des peuples. Le malheur de tous est dû à la rapacité de quelques-uns ; le résultat actuel de la Société conduit à stigmatiser ceux qui sont aux commandes du pouvoir politique et économique. Créer des réseaux est donner un fond à la Société, qui a bien besoin d'une « arrière-cour » ou d’un bas-fond pour exister ; le « haut social » est devenu inexistant et illégitime, il faut à la Société des socles pour assurer sa solidité. Les réseaux sociaux en font partie, peuvent être un moteur, de vrais socles devenus vitaux. L’échec des intermédiaires (quoiqu’on en dise), des syndicats aux autres formes de filtres, et des représentants des citoyens (plus capables de se représenter seulement eux-mêmes) amènent la Société à rechercher de nouveaux canaux d’expression. Les réseaux sociaux ne seraient pas ainsi une mode, une facilité, un argument de vente pour fournisseurs d’objets numériques de haute technologie, mais une nécessité sociale facilitée par la technologie, et non des prestations artificielles créées pour les besoins du commerce. Ses racines seraient dans la nature même des êtres humains (besoin de communiquer) et seraient une adaptation aux carences de nos Sociétés, à ses façons de vivre et à sa technologie. Profondément ancrées dans l’homme, ses besoins et envies, les raisons d’être des réseaux les destineraient à rester pour très longtemps dans la Société » ; ils se modifieront avec la Société elle-même ; toutes les activités économiques devront et doivent les intégrer, progressivement dans une perspective de longue durée, sous peine de dépérir et disparaître. Loin d’être un phénomène de mode ; un accident sociétal ; une création artificielle du marketing, les réseaux sociaux viendraient des profondeurs de la Société. Ils font venir à la surface les mouvements profonds qui étaient latents ou non perçus. Loin d’être des mécanismes qui pervertiraient le fonctionnement de la société, ils en seraient au contraire des rouages essentiels correspondant à la vraie nature des sociétés humaines, telles qu’elles existent dans le temps. Il ne s’agit pas de nouvelles tendances destructrices de valeurs anciennes, mais des retrouvailles des relations sociales plus proches, plus « villageoises », plus collectives, plus participatives, plus collégiales. L’acclimatation au monde moderne du sens relationnel des « anciens temps ». L’inverse des discours hiérarchiques, formels et creux, d’autorité, auxquels le monde moderne avait fini par s’identifier.

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Des échanges multiples, horizontaux et transverses, égalitaires, concrets et interactifs. La chance pour nos mondes de se renouveler en retrouvant la vraie nature à la fois de ses membres (nous) et de ce que sont réellement nos sociétés. Les réseaux sociaux, comme outils, bases de référence, instruments de contrôle, renouvellement des données, sources d’informations, mais aussi d’inspiration, sont l’opportunité de créer de la valeur ajoutée tout en respectant les vraies valeurs des Sociétés et de ses citoyens. De quitter le quantitatif du « toujours plus » des trente glorieuses pour le qualitatif des échanges et de la participation de tous et sortir des trente piteuses qui les ont suivies. De quitter les problématiques d’énergie, de destruction des matières pour créer de la richesse avec la possibilité d’identifier des attentes et besoins plus pertinents, moins consommateurs de ressources, davantage tournées vers les services, économiseurs de matières et de biens, constituant des garanties de performance et d’efficacité. De réconcilier économie et aspirations sociales. Le « fonds » des réseaux sociaux serait alors celui d’un nouveau fonds de commerce, d’une nouvelle économie plus respectueuse de la nature, de son environnement et des personnes, plus proches de leurs aspirations et de leurs besoins ; un gage d’efficacité des économies aussi, tenant compte de leurs contraintes nouvelles. Ce que nous voyons à l’œuvre est une nouvelle mythologie, la création de nouveaux mythes sociaux, dont nous n’avons aperçu que les prémices, identifié que quelques héros. Les réseaux sociaux seront déclinés sous toutes les formes des activités économiques en tenant compte de leur diversité. La plus grave des erreurs serait de croire que les réseaux sociaux ont une forme unique et une même forme d’expression pour toutes les activités traitées. Ils s’adapteront au contexte de chaque activité, comme ils s’expriment différemment selon les caractéristiques propres à leurs membres, qui sont particulières à un réseau, mais aussi différentes pour leurs « sous-réseaux » et autres catégories rattachées à des réseaux. La capacité d’adaptation est la marque de fabrique des réseaux sociaux ; ceux d’aujourd’hui ne seront pas ceux de demain. Leur adaptabilité ne peut que laisser optimiste quant à leur survie aux changements nés de la crise ; eux au moins s’adapteront. Pour les entreprises qui sauront intégrer dans leur stratégie les réseaux sociaux, elles achèteront avec l’acquisition de cette capacité à travailler, concevoir et gérer avec les réseaux sociaux, un brevet de pérennité, de « résistance » au futur, quels que soient les futurs de l’économie en général et de leurs activités en particulier. C’est peu de dire que toutes les innovations et nouveautés, toutes les modes (la dernière « Big Data »), les plus grandes sociétés créées (APPLE et toutes les autres), tous les nouveaux objets prennent leur sens avec les réseaux sociaux, leur émergence, leur constitution, leur gestion, leur exploitation. Les anciennes stars y trouvent souvent aussi l’occasion de leur renaissance. D’autres enfin, des occasions de ne pas mourir (l’auto-partage comme nouvelle chance des constructeurs ou facteur de survie ?). L’industrie, l’informatique, la communication, le marketing finissent par n’avoir de sens que par rapport à ces réseaux sociaux, dénominateurs de toutes choses.

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La typologie de ces réseaux devient infinie; ils sont la face apparente de toutes les évolutions de la Société : ils peuvent être externes, internes, canalisés dans des structures anciennes (comme les associations, les mutuelles) ou informelles, à objectif ponctuel ou de portée très longue, d’une grande liberté d’action ou soumis à des contraintes précises (un service prédéfini). Les réseaux sociaux ont toujours existé sous les formes les plus diverses. Ce sont les nouveaux outils et la technologie, l’informatique et l’intelligence artificielle, les nouvelles capacités apportées par les nouveaux produits qui ont donné une nouvelle dimension aux réseaux sociaux. Rien n’aurait été possible cependant, sans l’élévation de la culture des populations, très récente (d’une ou deux générations) de la libéralisation de société et l’atteinte d’un certain niveau de développement économique. Les dangers qui menacent les réseaux sociaux sont pourtant, eux aussi, grands. Ils tiennent au détournement des réseaux, jugés subversifs, par les Etats, mais aussi les marques Il semble pourtant que le principal risque soit celui d’une mauvaise utilisation des réseaux et de ses outils par les membres eux-mêmes, qu’ils soient leurs propres victimes de leur excès, complaisance ou vices, comme Facebook a pu donner quelques exemples. La survie des réseaux sociaux tiendra aux vertus de ses membres, à leur vigilance et à leur autocontrôle, à leur capacité à les faire vivre ensemble, à les enrichir au jour le jour. Rien ne durera si les réseaux sociaux n’apportent pas du sens. Si les utilisations des objets de communication restent finalement vaines, leur maniement hors de tout besoin, les réseaux des organisations convenues, noyautés et sous l’emprise de personnes avides de se faire voir. La société du spectacle a été dénoncée : le spectacle n’était plus le reflet de la Société, son révélateur et sa grille de lecture, mais elle était devenue elle-même un spectacle, le lieu où les ambitions se montraient (ou plutôt se montrent), les politiques en étant, parmi d’autres, les artistes. Le prix à payer est celui du sens et de la raison d’être des Sociétés. Le même danger guette les réseaux sociaux : celui d’être des chambres d’enregistrement sans but et sans valeurs, des scènes d’ombres où on s’agite pour se faire entendre. Mais le pouvoir est ici non concentré, les façons de se faire connaître et entendre, démultipliées. Les risques réduits ; les volontés mobilisables ; les forces de rappel nombreuses. Il faut veiller à l’instauration de règles, au respect de principes, à l’organisation des pouvoirs. En d’autres termes, les réseaux sociaux échoueront s’ils se laissent détourner de leurs fonctions, et perdent de vue les raisons de leur existence. Ils doivent tenir à distance ceux qui les organiseraient, leur apporteraient leurs moyens de fonctionner, collecteraient leurs idées et leurs données, capteraient leur apports (leur valeur ajoutée). Ils ne doivent pas devenir les esclaves et les auxiliaires de ceux qui devraient être leurs prestataires ; mais, on en voit bien toute la difficulté : il ne sera pas facile de rester autonome et d’agir sans frontières. La puissance même qu’ils donnent à ceux qu’ils alimentent pourrait être la cause de leur perte. C’est la fédération des réseaux sociaux qui donnera ses chances aux Sociétés et les Etats devront les aider, assister et protéger dans l’intérêt de tous. Les assureurs auront leur rôle à jouer...

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C’est dire l’enjeu que représentent pour les assureurs les réseaux sociaux, qui est un secteur traditionnel ( pour ne pas dire archaïque par certains aspects) et qui peut être menacé par les évolutions à venir plus encore que d’autres activités plus modernes, ayant déjà dû faire de gros efforts pour s’adapter aux contextes de crise et de concurrence. Savoir comprendre les réseaux sociaux est, pour beaucoup d’assureurs (tous ?), se donner les ressources pour assumer leur futur. La raison profonde de l'émergence des réseaux sociaux, leur raison d'être réside alors dans ce constat. Les réseaux résistent et se multiplient en autant « d'orchestres rouges » actifs ; ils sont subversifs et souterrains, les égouts indispensables de nos Sociétés pour qu'elles fonctionnent ; ils s'organisent sans contrôle et conscience. Ils existent par eux-mêmes et se constatent. Sociaux, leur nature ne se décide pas. Ils sont ce qu'ils sont : à la fois, tout (ils sont la Société et toute la Société) et rien (on ne décide pas pour eux). Les réseaux sociaux sont apparemment à l'opposé de l'assurance : horizontalité contre verticalité, démocratie contre autorité, liberté contre hiérarchie, spontanéité contre technicité, globalité contre éclatement des fonctions et tâches. Intégrer le fonctionnement des réseaux sociaux dans le fonctionnement des sociétés d'assurance serait contre nature, la négation de leur organisation, de ce que sont les sociétés d'assurance. Mais l'assurance est la mutualité des assureurs, l'esprit de solidarité, une fonction sociale aussi ancienne que la Société elle-même. Un réseau social qui s'ignore, mais qui a qu'oublié ce qu'il est. Pour aller plus loin, il faut dégager la vraie nature apportée par les outils de communication. Les réseaux sociaux dépendant des « TIC » pour la valeur ajoutée par eux aux relations sociales. Plus précisément, les smartphones sont des prolongements de soi ; à la fois, une multiplication des « Mois » et un « Moi » amplifié par les connexions de mes réseaux. J’ai l’impression d’exister plus, si je multiplie mes relations numériques par les réseaux. Mais le sens, la proximité, c’est prendre des risques quand au travers des réseaux sociaux, j’entends diriger, conserver la maîtrise, couper selon ma volonté. On peut considérer que le syndrome « anti-smartphone » serait de prendre le risque de condamner et d’être condamné, de refuser et d’être rejeté, de conserver sa capacité à se mettre en cause et d’être mis en cause. La distance numérique peut devenir l’outil pour ne pas être soi, dialoguer avec une personne qui n’est pas elle, une identité factice, usurpée, une identité artificielle en mode numérique... Tout le monde peut mentir dans l’univers numérique, notamment sur le contenu échangé s’il ne plaît pas. Les possibilités multiples de falsifications dénaturent les relations ; l’artificialité numérique interdit la vraie communication en profondeur ; l’immédiateté et la simultanéité sont contraires au sens des choses et de la vie ; on ne peut pas faire du sens avec des mensonges ou des réactions, des jugements formés dans l’instant ; le sens exige du temps et de la confiance. La technologie, ici, dénature le sens de la vie : on croit qu’en communicant plus, on ajoute plus de sens, confondant le quantitatif et le qualitatif. On produit en fait de l’anti-sens. Le sens est hors l’objet de communication ; l’utiliser n’est pas créer du sens. Les objets numériques ne portent pas de sens par eux-mêmes.

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Au vide des contenus des communications répond le vide des personnes qui les utilisent ; la solitude des individus n’est pas compensée par la frénésie compulsive des utilisations des objets. Sinon, comme illusion… Le sens est la victime des objets de communication. En les sur-utilisant, on s’oublie et on fuit devant la seule vraie nécessité, celle de donner du sens à ce que l’on fait. Cette fuite effectuée grâce à la technologie est une fuite de soi-même. Le rôle de ces nouveaux outils est de se rassurer avec des outils qui économisent l’investissement de soi et épargne les risques liés aux relations ; le prix payé est le néant apporté par des nouvelles communications sans contenu, sans véritable sens, sans vie en somme. Les outils numériques censés rapprocher et permettre de communiquer en tous lieux et à tout moment sont des producteurs d’anti-sens. C’est l’enjeu des réseaux sociaux que de donner du sens aux objets de communication, à ces technologies. Le mode de fonctionnement des réseaux, leurs règles, doivent répondre aux critiques faites aux outils de la nouvelle technologie, leurs carences. Il leur faut redonner aux communications une proximité humaine, supprimer l’artificialité dans le mode numérique des contacts par les TIC. Il leur est nécessaire de garantir l’identité, de mettre de l’authenticité dans les rapports des réseaux, de faire s’engager les personnes, de les faire se mettre « en jeu » ; il faut créer de la « proximité-sens » sur des contenus concrets, définir les conditions amenant à une mise en risque de soi. Une acceptation de personne à personne, une vraie proximité doit être la règle des réseaux. Une absence d’investissement personnel ne crée pas de sens mais en détruit ; les réseaux sociaux doivent être une garantie de l’investissement personnel de ses membres par les règles éthiques qu’ils se donnent. Pour qu’il y ait sens dans l’utilisation des outils de communication, il faut que les utilisateurs acceptent de prendre le risque d’une mise en cause de leur personnalité, de leurs jugements, de leurs actions, de leurs actes. Les réseaux sociaux sont là pour ça. Les réseaux sociaux donnant du sens à des outils qui en sont dépourvus sans eux souvent, les assureurs ont là un terrain de jeu incomparable. Prendre en compte les réseaux sociaux de défiance sous leurs formes d'aujourd'hui et de demain, c'est pour les assureurs retrouver ce qu'ils sont en oubliant leurs dérives financières et techniciennes. Adapter leur organisation, savoir ce que pense la Société, réinventer l'Assurance, redécouvrir ses origines, réorganiser ses fonctions, repartir de leurs bases, se refonder en retrouvant le sens premier de leur raison d'être et repartir de leurs bases. Les réseaux sociaux sont une occasion unique pour les assureurs de se « re-connaître », de revisiter leur évolution, de se « re-justifier » : l'enjeu représenté par ceux-ci est leur légitimité dans une société déséquilibrée qui se recherche et doit elle-même retrouver le sens de son existence.

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LES RÉSEAUX SOCIAUX D’ENTREPRISES, UNE DES CLÉS DE VOTRE RÉUSSITE POUR

DEMAIN !

Frédéric CANEVET Chef de marché CRM - SAGE

Blogueur sur conseilsmarketing.fr

L’informatique fait désormais partie de notre quotidien, que cela soit pour un usage personnel ou professionnel. Et si nul n’est censé ignorer la loi, maintenant nul n’est censé ignorer Internet ! En effet l’explosion des réseaux sociaux, avec comme étendard Facebook et 25 millions d’utilisateurs français, est d’ores et déjà en train de changer notre manière d’appréhender nos échanges et par voie de conséquence notre business. Par exemple dans mon activité de Blogueur il m’arrive de plus en plus souvent d’échanger avec des partenaires d’abord via Facebook ou Twitter (messages, chats…), et ce n’est qu’ensuite que nous passons à l’email lorsque l’échange de fichiers devient indispensable… De plus, tout comme un appel téléphonique, un SMS, un email… désormais il est courant de voir ses contacts poser des questions à la cantonade pour trouver un plombier, avoir un avis sur un produit, trouver une idée de restaurant, pour donner un avis sur un film, pour se plaindre sur la Page d’une marque… En effet, envoyer des messages via mes réseaux sociaux est un mode de communication qui est assez proche d’une conversation physique avec ce que l’on fait, ce que l’on aime… tout en ayant l’avantage d’une présentation des messages personnalisés (photo…) et plus riches (asynchrone, lien pour en savoir plus…).

Et ce n’est qu’un début… Les réseaux sociaux vont nous accompagner tout au long de notre carrière : avant notre recrutement avec notre futur manager qui va « enquêter » sur Linkedin afin de mieux nous connaître,

en checkant sur Foursquare, la « pointeuse 2.0 », lors de l’arrivée au bureau,

lors d’un salon en live-Tweetant et en donnant son avis sur tout, en faisant partager ses coups de cœur et coups de gueule sur Facebook

… Pourtant, les réseaux sociaux ont en même temps des effets diamétralement opposés:

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d’une part en apportant du liant entre les personnes en leur permettant de garder contact… grâce à Facebook on n’oublie plus un anniversaire, on suit en temps réel les activités, on retrouve ses anciens collègues, on suit les humeurs…

à l’inverse, les réseaux sociaux nous font entrer dans le monde du superficiel et l’égocentrisme, avec toujours plus de frivolité, de papillonnage…

Que va-t-il se passer quand les réseaux sociaux vont arriver dans les entreprises ? Quels vont être les impacts dans notre quotidien ? Comment faut-il faire pour les mettre en place en entreprise et surtout les faire adopter ? C’est ce que nous allons évoquer dans cet article… Nous verrons dans un premier temps quelles sont les grandes tendances qui vont faire que les Réseau Sociaux vont arriver dans les entreprises et quelles en sont les implications, ensuite dans la seconde partie nous vous donnerons des conseils pour mettre en place facilement ce genre d’application, et pour finir comment bien appréhender les principaux usages.

Les Réseaux Sociaux, l’information partout et pour tous ! Le retour du client léger… pour des Méga Bases de Données L'informatique fonctionne comme un mouvement de balancier : d'une structure centralisée avec les mainframes dans les années 60 et 70, nous étions passés à un structure décentralisée avec l'avènement du PC personnel grâce à Apple, IBM et Microsoft (voir l'excellent documentaire « L’histoire de l’informatique» sur http://www.entreprise-marketing.fr/lhistoire-de-linformatique). Or depuis 2000 et la révolution Internet, le mouvement de balancier repart dans l’autre sens… avec une nouvelle centralisation des applications sur le Cloud, et surtout l’émergence des Réseaux Sociaux centralisés. Cette tendance va impacter l'architecture informatique (logiciels et matériels), mais aussi la manière de travailler… En effet par essence le PC centralisait les données (et donc les décisions) vers l’utilisateur, chacun était autonome, avec son PC, avec ses données, sa manière de travailler, ses droits spécifiques, des fichiers qu’on transfère précieusement de disquettes en disquettes… Bref, le Pouvoir était dans la possession de l’information, et non pas dans sa diffusion et son partage. Or avec le Cloud et les Réseaux Sociaux, l’information est disponible pour le plus grand nombre, en étant parfois même trop riche car trop nombreuse… Pour s’en convaincre, il suffit de regarder votre boite email, vos statuts Facebook, les flux Twitter… Il devient plus difficile de distinguer l’essentiel du superflu afin de se concentrer sur ce qui apporte vraiment de la valeur. De facto le Pouvoir ne va plus être dans les données, mais dans l’analyse de ces montagnes de chiffres, et surtout la diffusion et la communication au bon moment et aux bonnes personnes.

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Le manager devra être capable de donner la bonne information, sans trop attendre le bouche à oreille qui va immanquablement se diffuser à la vitesse du son par les messageries instantanées, blogs, Tweets... Si l’on remonte d’un niveau et que l’on se place au niveau de la direction, la nouvelle tendance du « Big Data » est dans cette mouvance : analyser une botte de foin pour retrouver l’aiguille qui se cache en son sein… Les applications business sont concrètes et multiples comme par exemple

Exalead qui analyse les données transmises automatiquement par les machines courrier de la poste pour anticiper les pannes,

Google Analyics qui analyse en temps réel le trafic d’un site Web pour analyser le résultat des actions marketing,

Les outils d’eRéputation comme Mention.net qui surveillent le buzz sur le Web afin de détecter les murmures négatifs sur une marque avant que celui-ci ne prenne trop d’ampleur…

Mais pour revenir aux réseaux sociaux d’entreprise, ceux-ci vont changer les relations interpersonnelles, vers plus de transversalité. En effet comme nous l’avons expliqué dans l’article « Pourquoi les medias sociaux sont rentables » (voir http://www.conseilsmarketing.com/communication/pourquoi-il-est-rentable-dutiliser-les-reseaux-sociaux-pour-vendre), le réseau social rapprochera les collaborateurs (toutes les personnes d’un réseau étant au maximum à 6 niveaux les uns des autres).

Réseaux Sociaux et Management

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La manière de manager va ainsi être impacté par l’émergence des réseaux sociaux d’entreprise, en nécessitant plus de collaboratif et de décentralisation. Du chacun pour soi sur son PC, il faudra passer progressivement au tous ensemble pour réussir. Des raisons simples vont accélérer le mouvement :

une conjoncture économique plus difficile qui rend l’intelligence collective indispensable pour surmonter les challenges. Seul on va certes plus vite, mais à plusieurs on va plus loin... On retrouve d’ailleurs cette philosophie dans l’ancêtre d’internet, ARPANET, qui avait pour objectif que même lorsqu’un maillon de la chaine disparaissait, l’organisation devait pouvoir continuer à fonctionner.

Les gains de productivités apportés par la capitalisation de l’information et de l’expertise qui va permettre aux entreprises de garder leurs mémoires et d’aller plus vite pour affronter les fluctuations d’une économie mouvante et incertaine.

… Mais ce travail plus collectif va nécessiter aussi des concessions indispensables au travail collectif… Et le manager de demain devra être là pour les faire appliquer et respecter, comme par exemple :

Dans le cadre de la saisie des données, la centralisation des données sur un serveur nécessitera plus de rigueur de la part de chacun (données à saisir, nom des fichiers, type de mise à jour…),

Aller plus vite ne voudra pas dire ne plus faire de contrôle (bien au contraire),

Faire travailler les gens ensemble, ne veut pas dire les laisser s’éparpiller, mais au contraire canaliser les énergies sur les projets stratégiques.

… Nouveaux usages et nouveaux périphériques… Qui dit utilisation des Réseaux Sociaux, du Cloud... dit obligatoirement utilisation de nouveaux périphériques afin de bénéficier des gains de productivité et de l’ergonomie de ces nouvelles technologies (Smartphone, Tablette…). Steve Jobs l’avait prédit : l’iPad est une révolution… Car ses usages ne sont pas ceux d’un Smartphone, ni celui d’un PC, ce sont des nouveaux usages. Ce phénomène va aller en s’accélérant via le phénomène BYOD (Bring Your Own Device) car les salariés commencent déjà à utiliser leurs propres matériels (et parfois logiciels) dans un cadre professionnel pour retrouver au travail les gains apportés par ces nouvelles technologies. Par exemple, avec les opérateurs Low Cost une personne peut maintenant n’utiliser que son propre smartphone « dernier cri » pour passer ses appels illimités au lieu d'utiliser le mobile ancienne génération mis à sa disposition par l'entreprise… Dans la même veine il peut installer des applications sur son iPad pour faire des présentations chez les clients, pour prendre des notes lors des réunions... et ainsi être précurseur par rapport aux méthodes et process d’une entreprise qui a du mal à suivre car ces dépenses ne sont pas prévues dans les budgets, l’informatique interne n’a pas valider ces systèmes….

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Or cela posera 3 problèmes aux managers :

La sécurité : si le collaborateur a utilisé ses propres outils, comment l'entreprise peut avoir un contrôle strict des données et de l’utilisation du matériel ? Par exemple si un collaborateur donne son numéro personnel afin de ne plus avoir deux portables sur lui… comment ce salarié pourra séparer correctement la vie privée et professionnelle ? De même, le jour où il quitte l'entreprise, comment gérer le fait que son numéro sera encore mémorisé par de nombreux clients ?

La séparation pro / perso : en mélangeant les deux sphères, on arrive immanquablement à une confusion entre ces deux domaines. Dans ce cadre, comment un salarié peut se reposer et « décrocher », si ses outils personnels contiennent des données professionnelles ? En effet la majorité des cadres acceptent d’être joignables à toutes heures, avec un Blackberry comme fil à la patte… Mais c’est aussi la séparation entre la vie personnelle et professionnelle… Sur un coup de tête vous pouvez inviter votre manager sur Facebook, et ainsi il va partager à la fois votre vie personnelle et professionnelle…

La fiscalité : Si un salarié utilise son propre matériel doit-on lui rembourser une partie de son investissement ? En effet nombreux sont les salariés qui utilisent au travail iPad, téléphones... Voire des logiciels. Comment l'entreprise peut rembourser le salarié ? Et si son matériel se fait voler, qui va le lui rembourser ? À l'heure actuelle la question est « il fallait utiliser le matériel de l'entreprise », mais qu’en sera-t-il lorsque de plus en plus de personnes utiliseront leur propre matériel ? Allons-nous avoir une déduction sur ce genre de matériels comme on peut l’avoir pour les frais kilométriques d’une voiture ?

Ces questions ne sont pas que théoriques, car ce sont des situations qui arrivent maintenant dans les entreprises, et un bon manager doit anticiper des demandes pour ne pas se retrouver au pied du mur lorsqu’un problème va arriver. Comme c’est une situation inévitable, autant prendre les devant et clarifier ces situations. Des nouveaux usages et de nouveaux besoins... Un des bénéfices majeurs qu’ont apportés les réseaux sociaux personnels, c’est de montrer que l’email n’est pas forcément la seule et unique solution pour communiquer. Par nature, la communication n’est pas asynchrone comme l’email… Elle est interactive. Car nous fonctionnons naturellement avec une communication interactive, avec des en plus du son, des gestes, des histoires… ce que l’email ne parvient pas à transmettre. C’est en cela que les Réseau Sociaux vont faire passer la communication vers une nouvelle ère, vers plus de conversation. En effet il est temps de faire évoluer notre manière de communiquer, et apporter dans les échanges informatiques plus de richesse, à la fois en terme de contenant et de contenu.

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Cette révolution est déjà en train de prendre forme, avec des conversations ouvertes comme dans Twitter, avec du multimédia dans Facebook via l’intégration de la vidéo, avec les historiques des échanges avec Microsoft Lync ou Skype afin d’archiver des conversations toutes entières… Mais ce n’est qu’un début, les applications de gestion de projets ouvrent un volet collaboratif inspiré des Réseaux Sociaux Personnels et Professionnels en apportant du sang neuf à une organisation via le collaboratif. Par exemple l’application https://do.com/ qui va plus loin qu’une simple application de gestion de projets en apportant un volet collaboratif, avec une gestion des commentaires, une timeline avec les modifications apportées par tous les membres sur le projet, une notification temps réel sur les modifications apportées…

Bref, la dimension sociale, collaborative commence à prendre pas sur l’univers « carré » et ennuyeux des solutions classiques de gestion de projets. Cet aspect collaboratif des Réseaux Sociaux transpire aussi dans de multiples aspects dans les entreprises. Par exemple via les blogs d’entreprises collaboratifs, où la création n’est plus centralisée par une personne, mais décentralisée auprès de contributeurs qui ont une forte autonomie dans la réalisation du contenu avec leur propre auto-censure. C’est par exemple le cas d’Orange avec ses blogs Orange Business (http://www.orange-business.com/fr/entreprise/une/media-sociaux/) qui sont animés par une armée d’experts qui portent l’expertise de l’entreprise au-delà de ses murs et de la communication institutionnelle classique. Tout comme dans les réseaux sociaux, ce sont les utilisateurs qui ont pris une partie du pouvoir, qui décident ce qui est le mieux à publier… afin d’apporter une plus grande réactivité et une meilleure adaptation à un marché qu’ils connaissent par cœur.

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Ces Réseaux Sociaux s’ouvrent également vers l’extérieur, avec comme premiers pas les communautés utilisateurs sur les Pages Facebook où les clients, les prospects, les prescripteurs, les distributeurs… ont enfin un espace d’échange. Et ce n’est qu’une première étape ! Le carcan Facebook (absence de moteur de recherche d’informations sur les Pages, présentation sous forme chronologique, absence du référencement dans Google des données…), font qu’immanquablement l’entreprise devra prolonger la conversation et l’animation de sa communauté dans son propre espace « privatif », qu’il soit un « club VIP » pour des privilégiés ou un « Forum » où tous pourront partager ensemble leur passion. Mais cette évolution vers plus de conversation et d’autonomie réclamera aussi plus de souplesse de la part du management : il faut savoir insuffler, conseiller… sans pour autant museler et décourager.

Mise en place d’une solution collaborative comme un Réseau Social d’Entreprise Les 4 Règles d’Or de la mise en place d’une Solution Collaborative

Ceux qui ont déjà « subit » l’installation d’un ERP dans une entreprise savent que la mise en place d’une solution collaborative en entreprise peut sembler très simple: il suffit d’installer l’application (internet Sharepoint, solution de CRM…), puis d’envoyer un email pour inviter les collaborateurs à utiliser et à s’auto-former avec la documentation… et Hop c’est fait !

Or dans les faits c’est loin d’être aussi simple que cela en a l’air : un projet collaboratif doit parfaitement s’intégrer au coeur des processus internes de l’entreprise (la communication

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interne, le process de lancement des produits…), et en cela il modifie les habitudes de travail des utilisateurs.

C’est pourquoi l’aspect humain du projet (besoins opérationnels, actions pour favoriser l’adoption, lutte contre la résistance au changement…) doit être particulièrement pris en compte, sinon l’application sera peu adoptée, peu utilisée et sera une fois de plus considérée comme un gadget de direction alors que bien implémentée la situation peut être toute autre… C’est pourquoi avant de choisir le bon outil, il faut d’abord savoir où l’on veut aller et ce que l’on souhaite faire. Un outil peut très bien fonctionner dans une start up qui a une culture d’entreprise d’agilité, de collaboratif… mais être un cuisant échec dans une entreprise aux valeurs conservatrices. Pour réussir l’implémentation d’une solution collaborative il faut donc respecter les règles d’Or suivantes : Règle 1 : Intégrer le projet collaboratif dans la stratégie de l’entreprise. Avant de commencer il faut se poser les bonnes questions :

Quel est l’objectif de l’application ?

Que doit-elle simplifier ?

Qui va l’utiliser ?

Quels sont leurs bénéfices concrets à l’utilisation de l’application ?

Quelles sont les applications immédiates de cette solution ?

En quoi cette application va aider l’entreprise à atteindre ses objectifs stratégiques ?

C’est uniquement après avoir réalisé ce mini diagnostic que le projet collaboratif peut démarrer avec la mise en place d’un mini cahier des charges.

Celui-ci va : Définir le périmètre de l’application : utilisation au départ uniquement par un ou plusieurs

services

Structurer le projet : qui, quoi, où, pourquoi, comment (planification, répartition des rôles, attribution d’un budget)

Proposer (éventuellement) une stratégie de déploiement en phases pour une conduite du changement optimale (ne pas tout changer tout radicalement !)

Intégrer des actions de communication percutantes pour faire adopter le changement : réunions de lancement, mise en avant des avantages pour les salariés, informations sur l’avancement du projet…

En parallèle, lors de la mise en place de l’application, il est important de mettre en place un groupe “Pilote” auprès d’utilisateurs influents dans l’entreprise. Ce groupe “Pilote” testera en avant-première l’application afin d’améliorer les fonctionnalités métiers du logiciel et créer un climat de confiance autour de l’application pour les futurs utilisateurs.

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Vous devez impliquer les opérationnels dans la réflexion, en particulier les employés reconnus dans la structure (les “anciens” ou ceux qui ont une très bonne connaissance des processus formels et non formels). Il faut vraiment prendre le temps de la réflexion et de l’analyse des besoins. Le temps passé à réfléchir en amont représente au minimum 2 à 3 fois plus de temps économisé lors de la mise en place du projet et de facto des coûts en moins.

Ayez toujours en tête que 50 % de la réussite d’un projet passe, non pas de l’outil informatique utilisé, mais par la mise en place du projet et de la personnalité de la personne qui en a la charge.

Le Comité de Pilotage se compose généralement de :

• d’un membre issu du comité de direction de l’entreprise (ou le chef d’entreprise lui-même) qui montre ainsi l’implication et la dimension stratégique du projet pour l’entreprise. Ceci permet également de prendre des décisions importantes rapidement et de les faire accepter de tous.

• d’unchef de projet qui pilotera la mise en application du logiciel de, et sera l’interface entre l’entreprise et le prestataire chargé de la mise en place de l’outil informatique.

• Des membres de l’entreprise de différents services qui devront apporter leur expérience quotidienne.

Tous doivent être responsables de la mise en place du projet. A noter que cette phase n’est pas forcément nécessaire. En effet dans les PME et les Grandes Entreprises, il y a toujours des initiatives personnelles ou de services. Ces initiatives d’installation de l’application, d’utilisation de services en lignes… font souvent tâches d’huile dans les organisations. Dans ce cas le DSI, la direction… ne doit pas censurer ou trop cadrer ces essais, mais accompagner et développer ces projets pour les implémenter dans toute l’organisation. Pour que cela fonctionne il faut laisser aux auteurs historiques les clés du projet mais leur apporter un soutien logistique et financier, et prévoir une montée en puissance. Le but n’étant pas de reprendre le projet, mais de le prolonger en l’état, quitte à ensuite le faire évoluer.

Il ne faut surtout pas non plus oublier que ce projet va impliquer une évolution de l’entreprise au niveau :

• Culturel (évolution des mentalités) : on ne travaille plus seul dans son coin, mais on partage les informations avec ses collègues et services, et l’informatique va être utilisé pour automatiser certaines tâches autrefois centralisées.

• Organisationnel : revoir les manières de penser et de travailler parfois archaïques. Plus de papier volant, plus de centralisation de l’information ou de culture du secret… mais un échange d’informations.

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Au final, on va faire passer certaines entreprises d’une culture de l’oral à une culture de l’écrit qui impliquera un changement dans les habitudes de travail Par exemple, avec des outils collaboratifs comme Microsoft Yammer, tout le monde va publier des informations visibles de tous, en particulier de son chef, du chef de son chef… voire du DG. Ainsi les collaborateurs pourront faire remonter de l’information sans subir les filtres hiérarchiques classiques. Règle 2 : Lutter contre la résistance au changement.

Vous devez donc définir clairement les buts et objectifs de votre solution collaborative pour éviter les incompréhensions et mettre en avant les bénéfices et les avantages apportés pour tous ses utilisateurs.

La rengaine “On a toujours eu l’habitude de faire cela comme ça…”… est une réaction classique lorsque vous proposez un changement en entreprise.

Pour convaincre du bien fondé de ces évolutions pour l’entreprise, vous devrez consacrer beaucoup de temps à convaincre de l’utilité du projet et des bénéfices concrets que cela va apporter aux collaborateurs.

Sachant que dans une entreprise il y a toujours la répartition suivante :

10% d’Alliés : des gens fiables sur qui vous pouvez compter.

Ils ne posent pas de questions et vous suivront. En tant que manager il faut les récompenser, les reconnaitre, les féliciter…

En effet un manager ne pense pas assez à soutenir ces personnes qui sont les moteurs de l’entreprise (et qu’il surcharge souvent de travail, car ce sont ceux qui disent toujours OUI).

60% de « Non Alliés » ou des gens « neutres »: ils ne sont ni pour ni contre le changement, il faut les convaincre de vous suivre…

Avec vos alliés vous devez les convaincre par la communication et la mise en avant des bénéfices.

30% les « négatifs » : ce sont des gens qui n’en ont rien à faire de l’entreprise et de son évolution. Ils font juste leur boulot, ils ne seront jamais avec les nouveaux projets qui viennent changer leurs petites habitudes. Donc en tant que Manager il ne faut ne pas perdre son temps avec eux…

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Lorsque l’on connait cela, on peut savoir très facilement où il faut dépenser son énergie…

Un autre écueil majeur réside dans la mauvaise appréciation des changements entraînés par l’utilisation d’une solution collaborative. Par exemple avec l’utilisation de Twitter, Facebook… comme instruments de communication, il faut s’attendre à ce que cela dérape un peu, et que des faits anodins se transforment en mini crise. Par exemple la mise en ligne de photos de soirées d’entreprise, les messages postés à la va vite remplis de fautes et d’imprécisions… peuvent donner une mauvaise image des salariés, de l’entreprise, d’un service... C’est pourquoi « réseau social d’entreprise » ne veut pas dire discussion du « café du commerce », et donc responsabilisation des contributeurs sur le contenu posté. Le principe de bonne conduite sur les Media Sociaux étant que s’il y a un doute sur le contenu posté, c’est qu’il n’y a pas de doute… il ne faut pas le publier ! L’impact peut être également fort et donner une exposition plus forte aux salariés vis-à-vis de leur direction : avec l’émergence des réseaux sociaux le DG peut recevoir un email d’un client mécontent ou lire un message d’un client mécontent sur un Forum… et demander ce qui se passe (avec un traitement immédiat, des justificatifs…). L’aspect positif étant que le dirigeant sort de sa Tour d’Ivoire, mais en même temps des micro-problèmes peuvent être montés en épingle… Néanmoins, quelque part, c’est un bénéfice, car les Media Sociaux vont faire qu’il sera de plus en plus dur de vendre un mauvais produit !

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Règle 3 : Intégrer la solution collaborative dans le S.I. L’application collaborative doit être considérée comme un ciment qui permet de relier toutes les informations de l’entreprise. Pour que l’intégration soit optimale, il faut commencer “petit”.

C’est-à-dire commencer en douceur en mettant en place le logiciel là où il est le plus utile (ex: pour gérer le SAV si l’entreprise a des problèmes de suivi clients, pour favoriser le lancement des projets, pour favoriser la collaboration transversale…).

Ensuite seulement intégrer les autres pans de l’activité de l’entreprise, une fois que cette première intégration sera digérée et assimilée.

Dans le même ordre d’idée, ajouter trop de fonctionnel sans demandes des utilisateurs peut faire peur car “trop d’informations tuent l’information”.

Par conséquent, lors de la mise en place, il est plus simple de travailler en phases et enrichir au fur et mesure.

Vouloir imposer un changement radical dans toute l’entreprise du jour au lendemain est souvent un des facteurs d’échec.

Par exemple l’implémentation d’un chat interne à l’entreprise (par exemple via Microsoft Lync), pourra débuter par un simple chat, et une fois l’application adoptée, être utilisée pour de la vidéo conférence.

Cette nouvelle fonctionnalité pouvant être débloquée à l’occasion d’une mini conférence « live » d’un directeur, du DG… sur un sujet d’actualité (ex : vœux de nouvelle année, annonce des résultats, vacances…). Règle N° 4 : Vérifier l’utilisation et faire évoluer la solution. La formation initiale des utilisateurs est essentielle : elle peut être effectuée par un prestataire pour le groupe initial d’utilisateurs, puis déléguée aux salariés, mais il est essentiel que tous sachent bien utiliser le produit et en voient les bénéfices.

Il faut aussi prévoir une “piqûre” de rappel 1 à 2 mois plus tard, via des paramétrages et de la formation pour répondre aux nouvelles questions et attentes suite à la mise en place du système en production et ainsi prévoir des adaptations.

Cela vous permet de savoir où vous en êtes, et éventuellement d’identifier des points de blocages et améliorer la situation.

L’impact générationnel et relationnel des réseaux sociaux d’entreprise La mise en place d’un réseau social d’entreprise sera un prolongement naturel pour la plupart des « digital natives » pour qui MSN, Chat Facebook, SMS, Mobilité… sont des outils utilisés dans la vie personnelle mais aussi lors de leurs études. Or les « anciennes générations » sont souvent encore loin d’avoir adoptés ces outils au quotidien.

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Le « OK, mais est ce que tu peux m’envoyer un email et on se cale une réunion ? » qui est un réflexe « Baby Boomer », n’est pas forcément le réflexe N°1 des jeunes générations habituées à une communication multicanal. En effet pourquoi envoyer un email alors qu’un chat, une réunion informelle… serait plus efficace… De même, dans une société où le temps réel est de rigueur, où la réactivité une force… les réseaux sociaux vont encore accélérer les délais attendus pour les réponses et la prise de décision. Dans tous les réseaux sociaux l’effet boule de neige joue à plein volume : il suffit qu’une personne hausse le ton, et un phénomène peut rapidement prendre de l’ampleur… Or cette volonté d’avoir une réponse toujours plus vite n’est pas compatible avec le recul nécessaire pour une réflexion. En effet le manager devra faire « l’effort » de s’extraire du temps réel pour prendre régulièrement le temps de la réflexion, de l’analyse et de la prospective. Il devra se déconnecter, et même déconnecter son équipe pour avancer sur des sujets importants. Or de plus en plus nous vivons le rêve de l’ubiquité : faire deux choses à la fois… Etre en réunion et en même temps répondre à nos emails ou consulter les informations sur nos portables… ce qui ne permet pas de faire deux choses bien à la fois. Le Manager de Demain, devra donc être capable de :

Demander une présence physique et intellectuelle dans les réunions, meetings… importants ou au contraire justement faire appel aux réseaux sociaux d’entreprise pour des réunions en ligne enregistrées (vidéo, conversations en chat…) sans demander une présence physique et active.

Décentraliser une partie de son pouvoir dans les réseaux sociaux, par exemple avec une prise de décision asynchrone via des « To Do Listes » communes à tous mais sur lesquelles il pourra agir afin de modifier les priorités, via des votes participatifs comme « Digg.com » ou PollDaddy qui lui permettront d’avoir un meilleur feedback des collaborateurs sur un projet ou une décision…

… Ces quelques évolutions devront être mises en place, car après les gains de productivité mis en place dans la production (Taylorisme, Fordisme, Toyotisme…), dans la comptabilité (logiciels de gestion), dans la vente (call center…)… les prochaines fonctions à profiter de la rationalisation et de l’informatique seront les fonctions « support » (marketing, gestion de projets…). Or ces changements organisationnels vont entrainer des changements de mentalités : le Manager de Demain ne sera plus seul à décider, il devra prendre en compte les avis remontés par les réseaux (clients, collaborateurs…) et justifier ses décisions. De même le Manager actuel devra apprendre à motiver des « Digital Native » dopés à reconnaissance, à la volonté d’accomplir quelque chose, de comprendre pourquoi ils agissent… Il faudra apprendre à intégrer la motivation, le jeu (la Gamification comme le disent les anglo-saxons)… dans les méthodes de management.

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Par exemple lors de la mise en place d’un projet, mettre en place un challenge pour la résolution de celui-ci avec un suivi de l’avancement sur le réseau social de l’entreprise, des photos des premiers résultats, des messages d’encouragement… Bref un Team Building quotidien qui devra passer par une communication interactive et multimédia… En cela Seth Godin avec son livre the « Unleashing the Idea Virus» a montré la voie : à son époque il avait utilisé le courrier papier pour faire parler de son projet et fédérer toute l’entreprise sur son projet qui n’avait pas de ressources. Il avait montré qu’avec une bonne communication, de l’enthousiasme…on arrivait à soulever des montagnes. La communication multicanaux va devenir le nouvel outil de communication des entreprises performantes. L’email qui est l’outil actuel majeur devra laisser une part de son pouvoir à des canaux de communications alternatifs qui seront plus adaptés :

Le chat (internet & externe) pour archiver les communications et savoir comment ont été prises les décisions.

L’application de gestion de projet collaboratif pour participer à plusieurs sur un dossier et en suivre l’avancement.

Le logiciel de MindMapping pour travailler graphiquement à plusieurs sur une idée.

L’intranet intelligent pour partager et retrouver facilement les documents.

… Là encore le management devra prendre en compte une plus grande décentralisation et un plus grand volume d’information tout en ayant la capacité de mieux contrôler et vérifier l’atteinte des objectifs.

L’ouverture vers l’extérieur L’intérêt d’un réseau social d’entreprise est également sa capacité à s’ouvrir vers l’extérieur. Les intérêts étant multiples comme par exemple le rapprochement vers le client et le raccourcissement de la prise de décision. Dans le cadre d’un projet il sera appréciable d’ouvrir partiellement son système d’informations à son client : celui-ci pourra répondre aux questions via un chat dédié à son projet, il pourra valider des documents en gardant une traçabilité, donner des précisions, amender un cahier des charges… Un autre exemple peut se situer au niveau de la décentralisation de l’information. Il sera possible de publier vers l’extérieur une partie de l’information (ex : un FAQ externe alimentée par une FAQ interne) pour capitaliser sur l’expertise interne, mais en capitalisant sur les connaissances externes via aussi la prise en compte des remontées de sa communauté d’utilisateurs, de distributeurs… sur les Media Sociaux. Il sera donc de plus en plus nécessaire de prendre en compte la communication interne et externe, en mesurant l’impact de ses écrits. En effet encore plus que par email, un message sur un réseau social rédigé à la va vite pourra être copié collé et envoyé en externe… et inversement !

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Par exemple il n’est plus rare de voir dans les groupes internationaux que les choix stratégiques sont en premier lieu diffusés en externe (journalistes, investisseurs…) et ensuite uniquement l’information arrive en interne… Or entre temps l’information aura été récupérée en interne et commentée en chat, à la cafet… Il faudra donc être réactif, sans pour autant céder à la précipitation. L’information n’est plus cloisonnée, elle circule de plus en plus facilement dans les flots des torrents numériques. En revanche cela nécessitera une plus forte vigilance, à la fois individuelle (de la part du manager qui sera le garant de l’information), collective (par chaque utilisateur) mais aussi informatique (traçabilité, cohérence des informations…).

En conclusion… Dans les années à venir, le pouvoir en entreprise ne viendra plus de la possession de l’information, mais de son partage et de sa transparence. Le Manager devra donc apprendre à gérer et digérer de l’information pour la retranscrire à ses équipes. Néanmoins il faut rappeler que le réseau social d’entreprise a des limites : ce n’est qu’un outil et ce sont les hommes et la manière dont l’utiliser qui font la différence. Par exemple en intégrant les réseaux sociaux en entreprise, il faudra accepter plus de souplesse dans son management et plus de transparence dans sa communication. En contrepartie l’entreprise qui va en bénéficier aura une meilleure vision de son marché, une meilleure prise en compte des remontées internes, un raccourcissement des délais de prise de décision… Cette souplesse apportée par les réseaux sociaux est quasi inéluctable, car la pression du marché et les évolutions des mentalités vont nécessiter toujours plus d’agilité et de collaboratif pour affronter les défis de demain. La question n’est plus de se dire est-ce que les réseaux sociaux sont vraiment utiles à mon entreprise, mais plutôt comment je peux utiliser les réseaux sociaux pour donner à mon entreprise un avantage concurrentiel pour surperformer et acquérir un avantage concurrentiel par rapport à mes concurrents.

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L’ASSURANCE ET LES MEDIA SOCIAUX : RÉINVENTONS UN MODÈLE « SOCIALISÉ »

POUR L’ASSURANCE

Julien MALDONATO Manager

DELOITTE

Un modèle “Socialisé” pour l’assurance

Aujourd’hui, certains dirigeants de l’assurance en France mésestiment encore le potentiel des technologies dites « sociales » (i.e. blogs, wikis, media et réseaux sociaux...), soit en les reléguant au royaume du marketing Internet, soit en les ignorant tel un simple effet de mode qui serait éphémère.

Toutefois, les mentalités évoluent, à mesure que les « baby-boomers » s’imprègnent des technologies digitales, et que les jeunes de la génération Y rejoignent les rangs des compagnies d’assurance. Irrésistiblement, les media sociaux prennent une part de plus en plus importante dans notre quotidien laissant ainsi s’ouvrir les portes d’un nouveau modèle que les anglo-saxons ont appelé le « Social Business ».

Les compagnies d’assurance les plus matures appliquent, depuis quelques années déjà, les technologies « sociales » à la collaboration, la communication et la gestion des contenus, au travers de réseaux sociaux1 internes (salariés et/ou agents) et externes (prospects et clients). Ces initiatives propriétaires peuvent être amplifiées par les media sociaux publics (blogs, sites communautaires et sites de réseaux sociaux), par exemple lorsqu’une interaction démarrée sur la plate-forme sociale d’un assureur est relayée sur Youtube ou Facebook.

Le phénomène dépasse largement la simple utilisation des outils et des technologies. En effet, pour un investissement relativement faible, les modèles opérationnels et économiques de l’assurance sont transformés : les processus et les organisations sont repensés avec une approche « sociale » pour créer plus de valeur, plus vite.

Se lancer dans le « Social Business » peut commencer par des thématiques externes à la compagnie – et beaucoup d’assureurs ont déjà choisi cette direction comme première étape de leur transformation. Ainsi, des Directions Commerciales et Marketing, désireuses de mieux comprendre les sentiments du client et le positionnement de leur offre, écoutent attentivement les opinions exprimées sur le web social. Quelques assureurs ont également commencé à déployer des micro-blogs internes qui permettent aux salariés et/ou agents de remonter des idées, de l’expertise à l’entreprise, et de collaborer d’une manière plus spontanée. Ces types de projets sont d’excellents points d’entrée mais ne sont pas les seuls car toute la chaîne de valeur de l’assurance peut être transformée : création des produits,

1 Les réseaux sociaux désignent des plate-formes électroniques reliant les personnes et les actifs digitaux.

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prospection, vente, gestion de la relation client, prestation des services, gestion des partenaires, gestion des ressources humaines…

Le « Social Business » permet de faire évoluer la dynamique d’une organisation : d’un modèle d’isolement vers un modèle d’engagement, en fournissant des canaux pour découvrir, construire et diffuser des idées et des expertises. En effet, les assureurs sont encore souvent dans des organisations en silos. Qu’arrive-t-il donc lorsque les individus « prisonniers » de ces silos sont dotés d’outils leur permettant de se connecter, sans effort, avec leurs correspondants dans les autres Directions ? L’innovation peut naître d’un simple échange favorisé par ces outils « sociaux » ; ainsi, ces outils auront permis de capitaliser sur une ressource déjà existante : l’humain. Dans le même temps, des avantages pratiques, plus nombreux encore, ont un impact immédiat au niveau opérationnel. Prenons par exemple le nombre d’interactions qui sont réalisées entre des distributeurs, des actuaires-tarificateurs et des gestionnaires lors d’un processus de souscription de certains contrats nécessitant plusieurs niveaux d’approbation. Dans un modèle en réseau social, le processus va être rendu plus « plat », plus fluide, permettant des échanges entre les différents acteurs plus rapides et plus efficaces. Cela peut avoir un impact notable sur les coûts.

Une telle transformation nécessite des assureurs une approche plus active du « social ».

Au-delà de la surveillance et de l’écoute des conversations, les assureurs les plus matures mettent en place des équipes spécifiques pour interagir avec le client et le marché au sein de la sphère « sociale ». Certaines interactions sont transactionnelles, telles que la gestion de la relation client ou la gestion des prestations/sinistres, et a contrario d’autres interactions ont pour objectif la fidélisation ou la notoriété. Par exemple, en IARD ou en Assurance Vie, les assureurs peuvent fournir sur les réseaux sociaux des informations pédagogiques sur leurs offres pour créer un prospect plus « éduqué » et générer de potentielles opportunités de vente. Ils peuvent alors utiliser l’analyse de données pour détecter tout signe d’intérêt de la part du prospect et personnaliser leurs messages en temps réel en fonction de son comportement.

En outre, les clients peuvent venir s’alimenter en ressources « socialisées » (i.e. enrichies de commentaires, notes, catégorisation,…) ce qui développe chez eux un sentiment de communauté et d’appartenance.

Les outils disponibles pour les entreprises se sont étoffés ; outre les fonctionnalités de base de communication, ils offrent des fonctionnalités de collaboration, des annuaires de compétences et l’accès aux connaissances passe désormais par les liens entre individus. Des communautés se constituent et s’animent autour de thèmes fondés sur les intérêts communs des individus.

Ces tendances reposent sur un principe simple : Les individus constituent le cœur du système. Le pouvoir s’est déplacé de l’institution vers l’individu. La technologie a rendu plus facile la découverte et la participation dans les réseaux sociaux mais n’a pas changés leurs valeurs : contenu, authenticité, intégrité, réputation, engagement et implication. Le « Social Business » permet aux organisations qui partagent ces valeurs de revoir en profondeur leur approche du marché. Un monde « plat » – permettant des contacts directs entre des clients et leur compagnie d’assurance, entre des directeurs et des opérationnels de terrain, entre

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des distributeurs et leurs producteurs de contrats – pourrait être intrinsèquement plus efficace et efficient.

L’occasion est unique pour les compagnies d’assurance de faire coïncider les intérêts de leurs salariés avec ceux de leurs clients. Celles qui réussiront sont celles qui capteront le marché.

L’histoire qui se répète ? Avant de contribuer à l’émergence du « Social Business » dans l’assurance, les media sociaux, la collaboration et la gestion des connaissances ont dû relever plusieurs défis. Quels obstacles ont été franchis et vers quel futur nous dirigeons-nous ?

Quels ont été les obstacles aux media sociaux ?

Les générations qui ont précédé la génération Y ont été plus lentes dans l’adoption de media sociaux, ce qui a rendu sceptiques les décideurs vis-à-vis de leur utilité dans une configuration professionnelle.

La sécurité, la confidentialité, les risques de conformité ont été réels. La propriété intellectuelle pourrait être compromise, des avantages compétitifs pourraient être partagés et les marques pourraient être dégradées par des comportements individuels.

Les compagnies d’assurance ont investi dans des pilotes centrés sur la technologie et dans des systèmes imitant les mécanismes qui ont connu le succès dans la sphère privée. Parfois en adoptant une approche du type « Ouvrons et ils viendront ! », elles n’ont pas suivi de démarche orientée résultats : définir l’objectif métier, déterminer le réseau social le plus adapté, implémenter la technologie et le média ciblé, évaluer les résultats, ajuster la cible. L’étape la plus fréquemment manquée est le choix du réseau social le plus adapté pour interagir.

Quelles sont les tendances émergentes pour les réseaux sociaux ?

Le marché des outils « sociaux » (collaboration, gestion de contenus et communication) a explosé au cours des 12 derniers mois. Des versions « Cloud » des outils sociaux facilitent l’ouverture du système.

Les sites publics de media sociaux ne sont maintenant plus perçus comme une fin en soi par les assureurs mais comme un des composants d’une stratégie globale de « Social Business ». Ils sont principalement utilisés comme des sources de signaux des sentiments sociaux, des véhicules pour la gestion de la marque et la communication externe et des canaux pour le service client et les ventes.

Les jeunes de la génération Y, qui rejoignent les effectifs des assureurs, sont « câblés » pour l’utilisation des canaux sociaux et mobiles. Ils utilisent ces canaux pour se lier, socialiser et résoudre des problèmes. Les compagnies d’assurance qui manquent d’outils internes, de gouvernance des media sociaux et de canaux digitaux pourraient voir leurs jeunes ressources utiliser des outils publics comme une alternative bien intentionnée mais risquée.

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Plusieurs assureurs, petits et grands, réalisent désormais des investissements ciblés dans le déploiement de technologies sociales sur des réseaux sociaux adaptés à des objectifs métiers spécifiques le long de la chaîne de valeur.

Quels ont été les obstacles à la collaboration et la gestion des connaissances ?

De nombreux assureurs sont confrontés à l’inefficacité dans la manière dont le travail est produit puis partagé car ils ont mis en place des solutions de travail collaboratif pour des groupes de personnes statiques et/ou mal définis. Ces solutions, souvent basées sur d’anciens systèmes limités au partage documentaire, ne permettent pas à la communication de se muer en conversations et communautés. Souvent limités à une fonction, un domaine ou un rôle, ces systèmes n’exploitent pas l’étendue et la profondeur de la compagnie dans son ensemble.

Les premiers outils dédiés à la gestion des connaissances ont été centrés sur la collecte et la gestion des contenus sans parvenir à capturer le contexte et les processus métiers qui transforment cette propriété intellectuelle en valeur. Ainsi ces outils sont devenus des bibliothèques ou bases documentaires statiques sans aucune circulation ou curation (i.e. sélection, édition et partage des contenus les plus pertinents).

Quelles sont les tendances émergentes pour la collaboration et la gestion des connaissances ?

Le « Social Business » en interne de la compagnie peut faciliter la découverte et les interactions entre les salariés, la collaboration en temps réel sur des tâches et des documents, et une vision systématique des relations de chacun, des compétences de chacun et de la façon dont le travail est produit.

Les nouveaux outils « sociaux » peuvent couvrir à la fois la collaboration et l’exécution des tâches ce qui motive les contributeurs à les utiliser au quotidien. Le contexte de la tâche est préservé en lien avec le contenu, favorisant à la fois la découverte et l’utilisation. Par exemple, un conseiller commercial transmet une pièce justificative à un gestionnaire pour réaliser une souscription, si une conversation a lieu entre ces deux acteurs alors cet échange pourra être tracé et associé à la pièce justificative et à l’acte de souscription.

La catégorisation, les tâches et les liens relationnels peuvent être utilisés pour documenter, détecter des corrélations et trouver des informations. Ainsi, la découverte « taxonomique2 » peut ainsi créer des ponts entre des sources d’information structurées, non-structurées ou semi-structurées, trouvant de nouvelles relations entre les contenus, offrant un moyen de découvrir et créer de « l’intelligence ». Cela est d’autant plus important pour les compagnies d’assurance avec un effectif vieillissant et où les décideurs cherchent à faciliter le transfert de connaissances à grande échelle.

Les curateurs et modérateurs rejoignent les documentalistes dans l’exploitation des contenus, des communications et des conversations au travers de communautés de courte ou longue durée autours des sujets et opportunités clés pour le métier.

2 La taxonomie désigne une méthode de classification des informations dans une architecture structurée de

manière évolutive. Le terme est couramment employé pour des systèmes de gestion de contenu.

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Les implications technologiques Le « Social Business » exploite les intérêts partagés des individus pour parvenir à la création d’une valeur commune. La technologie peut aider à rendre ces interactions effectives – facilitant la découverte de nouvelles informations, le partage de contenu, la collaboration autours d’idées ou de tâches, et permettant l’utilisation de données ou de parties des systèmes transactionnels sur des canaux sociaux.

Les outils sociaux

La mise en place d’outils de travail collaboratif, de wikis, de boîte à idées, d’annuaire de compétences, n’est pas un projet trivial. Les principaux critères qui renseignent sur le périmètre et l’utilité de chaque solution sont les conventions de nommage, les structures, la gestion des droits et l’archivage. La valeur des outils sociaux peut être augmentée par l’intégration des emails pour la correspondance traditionnelle, de la messagerie instantanée et autres outils de communication ainsi que les bases de contenus pour faciliter l’accès à l’information par-delà les silos.

Les outils d’analyse de sentiments

Les avancées dans l’intelligence artificielle devraient amener des améliorations en continu dans les produits d’analyse de sentiments mais l’offre actuelle requiert encore une expertise dans la configuration, la surveillance et la maintenance. Les outils de surveillance des media sociaux tels que Radian6, Mantis ou Lithium reflètent le mouvement vers une analyse des données où les mécanismes de configuration ne sont plus complexes. Néanmoins ces outils requièrent toujours une grande expertise de l’assurance et de la modélisation pour obtenir des résultats fiables et pertinents. Ainsi, une supervision intelligente reste nécessaire car les systèmes automatiques ont des difficultés à interpréter les nuances, les subtilités ou les sarcasmes.

La gestion des contenus digitaux

Les informations du produit, les informations sur la marque, les données des employés/intermédiaires et autres contenus doivent être cohérents sur tous les canaux de l’assureur : agences, conseiller nomade, site web, plate- formes téléphoniques, applications mobiles, réseaux sociaux, télé et autres innovations de demain. Ce monde « Omnicanal » augmente l’importance de la gestion des actifs digitaux, la gouvernance et le pilotage des contenus aussi bien que la nécessité de gérer les contenus et les communautés simultanément sur tous les canaux.

Les identités digitales

Le « Social Business » amplifie la valeur potentielle des individus et des relations, qu’ils soient salariés, clients, prospects, intermédiaires ou partenaires. Les corrélations entre

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identités distinctes à travers les différents organismes (publics et privés) nécessitent un service des identités digitales tiers et fédéré, capable de contrôler l’authenticité et le caractère incontestable des affirmations concernant l’identité d’un individu, et de certifier les autorisations d’accès. Au sein d’une compagnie d’assurance une approche uniforme de l’identité pour l’accès, l’authentification et la certification est une nécessité.

Les leçons du terrain

Piloter la passion et les parts de marché

Un leader de l’assurance IARD aux Etats-Unis voulait augmenter son volume d’affaires auprès des collectionneurs de voitures et augmenter ses parts de marché sur cette niche. Ces passionnés de voitures ne souscrivent pas une assurance automobile classique mais une police spécialisée. L’assureur a lancé une page communautaire sur Facebook, invitant tous les passionnés qui participaient à des ventes aux enchères de voitures de collection. En seulement 30 jours l’assureur a lancé un site communautaire. En moins de 3 mois après le démarrage, le nombre d’utilisateurs et de contenus postés par les utilisateurs a atteint un niveau considérable car les passionnés postaient les photos de leur véhicule ainsi que des informations. En résultat, la notoriété de l’assureur a fortement crû au sein de cette communauté. En outre, le nombre de polices souscrites par cette communauté a également beaucoup augmenté. L’assureur envisage d’élaborer des initiatives similaires pour d’autres marchés de spécialités haut de gamme.

Intégrer les réseaux sociaux à la relation client

La compagnie American Family Insurance a souhaité intégrer les canaux sociaux dans son dispositif de gestion de la relation client. Pour atteindre son objectif la compagnie a mis en place 9 plate-formes dédiées aux media sociaux, notamment pour ses agents, pour ses clients et pour ses prospects. L’assureur est ainsi en capacité d’engager une conversation quelle que soit la plate-forme sociale utilisée par le client ou le prospect. Une analyse des sentiments est réalisée en temps réel : lorsqu’un commentaire positif est détecté, la compagnie le diffuse à son réseau d’agents, chaque agent peut ensuite l’exploiter en le republiant dans ses propres pages sur les réseaux sociaux. Dans le cas où un commentaire négatif est détecté, la plate-forme cherche immédiatement à rentrer en contact avec l’auteur du commentaire afin de trouver une solution au problème. Dans 15% des cas une conversation s'établit et, suite à ces conversations 33% des internautes retournent sur leur réseau social pour publier un commentaire positif. La compagnie capitalise aussi sur l'engagement des agents et leurs 2 500 pages Facebook. Pour assurer la cohérence entre toutes ces pages la compagnie dispose d'un système qui propose aux agents des contenus pré-validés pour publication, tout en leur laissant de la flexibilité pour personnaliser leurs messages. En outre la compagnie a développé une application Facebook intégrée dans les pages agents pour permettre aux clients d'évaluer les produits et la performance de l'agent. Pour compléter son dispositif, l'assureur utilise la ludification avec un jeu qui invite les internautes à se connecter avec leur identité Facebook. En résultat le nombre de devis sur le site institutionnel a augmenté ainsi que le nombre de visites en agence.

Diminuer les coûts en utilisant les données « sociales »

Aux États-Unis, les coûts générés pour déterminer l’éligibilité des candidats à la souscription d’une police d’assurance prévoyance peuvent s’avérer très élevés pour les assureurs. En

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effet, selon la nature des examens médicaux nécessaires, les coûts atteignent des montants compris entre 100$ à 1000$.

Une compagnie d’assurance a expérimenté l’utilisation des données comportementales collectées par des sites d’achat en ligne et d’autres bases de données tiers pour alimenter un modèle prédictif pour évaluer le risque santé.

Les résultats furent concluants : sur 60 000 dossiers cette technique d’analyse des données comportementales a obtenu des résultats similaires à la technique traditionnelle d’analyse des examens médicaux, avec des coûts drastiquement réduits aux alentours de 5$ par dossier.

Suite à cette expérimentation, des assureurs américains ont lancé des réflexions, allant au-delà de la maîtrise des coûts, pour utiliser les données des réseaux sociaux (avec le consentement des assurés) pour enrichir leur connaissance client et ainsi améliorer les actions marketing et la personnalisation du service.

Où commencer ?

Le « Social Business » requiert une pensée plus large que celle rencontrée aujourd’hui dans beaucoup de compagnies d’assurance et les préjugés institutionnels peuvent l’empêcher de recevoir la priorité qu’il mérite. Le « Social Business » ne se réduit pas à l’augmentation des capacités opérationnelles comme des projets de modernisation, il inclut aussi l’amélioration des campagnes marketing et des liens avec différentes cibles. Par chance, il existe des moyens simples pour dépasser les perceptions surannées et les inerties culturelles et ainsi démarrer le voyage vers le social. Et pour ne pas se perdre dans ce voyage, il faut suivre une trajectoire « incrémentale », dessinée par les expérimentations qui démontrent du potentiel.

Commencez par le commencement.

Le « Social Business » doit atteindre des objectifs métiers spécifiques. Commencez avec un périmètre raisonnable dans les premiers projets. Déterminez les membres de votre réseau social cible, sachez quels comportements vous allez leur affecter et comment vous pourriez les engager avec le plus de pertinence dans des communautés durables. Utilisez ces éléments pour guider la réalisation des outils, plannings et plans de déploiement – et non l’inverse. Focalisez-vous sur des résultats qui peuvent être mesurables et dont la responsabilité est clairement identifiée.

Déployez les bases.

Certains aspects du « Social Business » sont presque universellement pertinents, tels que la surveillance et l'écoute pour l’analyse des sentiments clients et pour le positionnement de la marque, ainsi que des pages jaunes d’entreprise et des réseaux sociaux pour améliorer l’expérience de recherche des connaissances et pour tirer parti de la propriété intellectuelle. Ces aspects devraient être dans le radar de chaque compagnie d’assurance – et ils peuvent fournir une excellente entrée au « Social Business » dans le développement de produit, la distribution, les ressources humaines, les opérations et même la fonction Finance ! Après tout, la clôture comptable est une activité intrinsèquement collaborative et reproductible

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avec des objectifs métiers clairs, un réseau d’acteurs bien défini et une utilisation de contenus à la fois structurés et non structurés.

Passez de la détection à l’action.

Avec les outils de surveillance de base mis en place, le « Social Business » peut passer d’un mode passif à actif. Au lieu de simplement écouter, mettez en place une entité pour la gestion « sociale » de la relation client, pour la vente sur les canaux sociaux et pour la conception « sociale » des produits. Passez de l'expérience à une gestion participative à l'aide de micro-blogs et d’outils de gestion de contenu pour promouvoir le partage et la réutilisation des connaissances et des actifs digitaux.

Franchissez les lignes.

Le Directeur Marketing, le DRH et le Directeur Commercial sont généralement les premiers à adopter le « Social Business ». Mais il ne faut pas en rester là. Pourquoi ne pas envisager un Directeur Financier « socialisé » ? Comment seraient transformés le reporting, la classification et l’audit en alimentant la Finance et le Contrôle interne par les flux de connaissances et les « traces sociales » des activités (i.e. identification des acteurs, des actions, des origines et des résultats d’un travail). Avec le « Social Business », c’est l'individu qui, une fois encore, importe le plus dans l'amélioration des performances. À plusieurs niveaux, les compagnies d'assurance qui font coïncider les intérêts de leurs salariés avec ceux de leurs marchés peuvent avoir un avantage concurrentiel très fort.

Visez l'authenticité.

Le « Social Business » est centré sur l'individu. Une présence anonyme, froide et distante de l’institution sur les canaux sociaux comme vecteur d’influence ne donnera probablement aucun résultat positif. Ces dernières décennies, les fonctions Marketing et RH ont cherché à évoluer en communicant sur leurs actions, mais ils ont souvent atterri bien loin de leur cible initiale. Le « Social Business » peut nous ramener vers cette cible initiale, en misant sur la « voix personnelle » des individus et les interactions « authentiques ». La construction de ces relations authentiques nécessite du temps et de l'investissement.

Ce qu’il faut retenir

Le « Social Business » dans l’assurance n’en est encore qu’à ses débuts. Ces premières vagues s’attachent à dépasser les idées reçues sur le comportement des gens, sur la nature des relations, et à compléter la vision traditionnelle de l'entreprise sur ses marchés et ses employés. Encore plus de valeur est créée à mesure que les compagnies restructurent leurs processus et leur organisation autours de l'engagement « social » – et en personnalisant leurs messages, leurs promotions et même leurs offres, en fonction des désirs individuels et communautaires. Dès lors, la sensibilisation au « social » cède sa place à l’engagement, l'autonomisation, la responsabilisation – une fois de plus en plaçant les individus au cœur du système.

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Le management des jeunes professionnels à l'heure des réseaux sociaux : ruptures et

continuités

Emmanuel FRAYSSE Manager Pôle web - Infopro Communication

« Les jeunes d'aujourd'hui aiment le luxe, méprisent l'autorité et bavardent au lieu de travailler. » Cette citation aurait pu être contemporaine et pourtant, elle a été énoncée par... Socrate dans les temps anciens. Les jeunes d'aujourd'hui, à savoir la génération Z ou génération des "écho-boomers" est déstabilisante mais tellement riche. Très connectée, elle fait un usage intensif des réseaux sociaux. D’une manière générale, la digitalisation avancée de cette génération a de fortes conséquences sur sa vision de la société et de l’entreprise. Quelles sont ses valeurs ? Comment bien la manager et la motiver dans un univers professionnel ? LES VALEURS DE LA GENERATION Z On a beaucoup parlé des baby-boomers et de la génération Y, celle qui a défriché le Web dans les années 90. Désormais, on évoque la génération Z, la génération de ceux qui sont arrivés récemment sur le marché de l’emploi ou qui sont sur le point de le faire. Pour faire simple, disons que cette génération Z (ou « Echo-boomers » pour les sociologues) a entre 18 et 25 ans. Ils sont jeunes, ils sont digitaux et peuvent faire peur aux recruteurs. Pourquoi ? Parce que le contexte technologique, économique, social et environnemental les a notamment rendus connectés, émotifs et plutôt désinhibés. Tout en conservant un socle commun avec les générations antérieures, chaque génération vient avec son lot de surprises. Un vrai « changement dans la continuité » lié notamment à la digitalisation du monde. Débutée dans les années 90 pour la génération Y, cette digitalisation s’est accélérée dans les années 2000 pour la génération Z. Ce qui a été imaginé il y a 15 ans est désormais une réalité : mobilité, support tactile, hyperconnectivité, identité numérique, …

Une génération particulièrement mobile et connectée ATAWAD, vous connaissez ? Cet acronyme signifie : AnyTime, AnyWhere, AnyDevice, traduisez “n’importe quand, n’importe où, n’importe quel terminal”. L’évolution des smartphones et autres supports mobiles rend concret cet acronyme qui existe pourtant depuis au moins 10 ans. La génération des « Always on » est en marche, les yeux rivés sur son support mobile. Plus de 50% du milliard d'utilisateurs de Facebook à travers le monde se connectent mensuellement via un support mobile (smartphone, tablette, ...).

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Une génération « vite, vite, vite » « Tout, tout de suite ». La génération Z se donne un rythme effréné et privilégie le « multitâches ». Le temps se compresse pour elle… du moins en apparence sachant que la réactivité face aux stimili externes n’est pas forcément tenable / souhaitable à long terme,ça facebooke, ça tweete, ça youtubise. Est-ce que ce phénomène du « Je veux tout, tout de suite » est nouveau ? Pas vraiment, la jeunesse est impétueuse et c’est d’ailleurs ce qui en fait sa force et son intérêt.

Moi et les autres Ils sont particulièrement digito-sociaux et émotionnels. Ils réseautent énormément en prenant soin de distinguer 2 niveaux de liens. Mark Granovetter, dans les années 70, a montré qu'au sein d'un réseau social, les liens faibles sont plus puissants que les liens forts. Les liens forts sont ceux qui nous unissent à notre famille, nos amis, voire à nos collègues que nous voyons régulièrement. Les liens faibles sont les liens qui nous unissent aux individus que nous voyons rarement ou qu’occasionnellement. Ces liens faibles sont moins chargés en émotion, en intimité et en réciprocité que les liens forts. Sachant que ces individus naviguent dans d’autres sphères que les nôtres, ils sont plus à même de nous faire découvrir des territoires inconnus, des opportunités “invisibles” dans nos sphères. Leurs informations viennent compléter celles auxquelles nous avons nous-mêmes accès dans nos cercles. Dans son étude, Mark Granovetter démontra que la plupart des gens trouvaient un job via leurs liens faibles plutôt que par leurs liens forts. LinkedIn et Viadeo ont été bâtis sur cette idée. Sur d’autres réseaux comme Facebook, les interactions comme le “j’aime” sont particulièrement adaptées pour maintenir des liens faibles. Elles ne nécessitent pas une forte implication émotionnelle, sont rapides à réaliser, un clic suffit pour garder le contact. Les liens forts sont plus impliquants. Selon le nombre de Dunbar, il y a une limite au nombre d'amis avec lesquels une personne peut entretenir une relation stable à un moment donné de sa vie. Cette limite, le nombre de Dunbar, est inhérente à la taille de notre néocortex et s’élèverait à environ 150 personnes. En revanche, en termes de liens faibles, la limite est de plusieurs milliers.

Quête de liberté et consommation temporaire Leur rapport aux choses a fortement évolué : avant, on achetait, on réparait. Maintenant, la génération Z loue, échange, recycle. La possession n’est plus une fin en soi. Cette génération privilégie la possession temporaire à la possession permanente. Cette possession temporaire lui permet de tenter de nouvelles expériences et d’accéder d’une façon continue à des biens qu’elle ne peut pas / ne souhaite pas acquérir tout en respectant ses préoccupations environnementales. Cette possession à durée limitée lui procure un sentiment de liberté et de fluidité dans la gestion de sa propre vie. 3 exemples :

Transport : création des services de partage Velib’ et Autolib’

Biens culturels : les services de vidéo à la demande

Biens de consommation : sites web de location de sacs de luxe ou de « box tout compris »

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Dans cette quête du « sans contraintes », du « seamless », la dimension ludique est fondamentale. La génération Z a besoin de divertissement. On parle de « ludification », de « gamification » de la société. Il faut ruser et amuser pour faire passer ses messages. La tendance a débuté avant la génération Z mais elle s’est accélérée depuis quelques années.

Un rapport nouveau à la connaissance et aux idées Le partage pléthorique d’informations et d’analyses conduit à une nouvelle situation : l’externalisation du process cognitif et des connaissances qui sont désormais consultables à tout moment sur le web. Sachant que la probabilité pour que quelqu’un ait partagé l’info sur tel ou tel sujet est forte, certains internautes peuvent ne pas chercher à mémoriser l’info. : ils savent qu’ils y reviendront en temps voulu via Google ou les réseaux sociaux. Conséquence : les jeunes peuvent être tentés de ne pas cultiver leur mémoire, leur attention, voire leur sens critique. En revanche, ils seront capables d’aller rechercher l’information ou de demander à un « lien faible » de les aiguiller. L’intelligence devient réellement collective : la connaissance réside dans le groupe. Bon à savoir ! Ce nouveau rapport à la connaissance a des conséquences sur leurs rapports au corps professoral et donc à la hiérarchie : « Google en sait plus que mon professeur / mon supérieur hiérarchique alors je suis tenté de remettre en cause son autorité. » D’où la nécessité de transmettre les compétences et de les manager selon certaines règles pour ne pas rompre inutilement le dialogue.

LA GENERATION Z ET LE MONDE PROFESSIONNEL Le monde professionnel est toujours un saut dans l’inconnu pour les nouvelles générations. En situation professionnelle, la génération Z est particulièrement créative, connectée et participative.

Un plan de carrière à réenchanter Vive l’entrepreneuriat ! Elevée dans un environnement de crise et bercée par les success stories professionnelles de jeunes entrepreneurs, la génération Z est lucide sur les plans de carrière et la pérennité de l’emploi dans les grandes ou les petites entreprises. Aventurières, elle est attirée par le fait d’expérimenter l’entrepreneuriat. L’entreprise est un lieu de passage pour la génération Z qui sait qu’il lui faudra changer d’entreprise et de métier plusieurs fois dans sa vie. Devant leur baisse d’attractivité, certaines sociétés ont élargi le périmètre de leurs recrutements pour accueillir des candidats venant de nouveaux horizons. D’autres développent des postes « d’intrapreneurs » pour les jeunes aventuriers. Dans certains cas, l’incompréhension entre la génération Z et les entreprises provient de la forte dimension émotionnelle de cette génération. Oui, cette génération est à fleur de peau, les contraintes sont mal vécues, d’où l’importance de ne pas sur-réagir et de faire preuve de patience face à ces réactions. Avec de l’empathie, les choses rentrent dans l’ordre.

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La consumerisation IT de l’espace de travail Désormais, en termes d’équipement technologique, ce n’est plus l’environnement pro qui influence l’environnement perso mais l’inverse. La génération Z vient avec ses propres outils et ses réseaux sociaux sur son lieu de travail. Pour la petite histoire, une stagiaire nous a demandé préalablement à son stage si elle devait apporter son propre ordinateur portable pour travailler. Révélateur, non ? La mise à disposition d’un ordinateur portable ou d’un smartphone professionnel renforce le flou entre vie privée et vie professionnelle et facilite le travail à distance. La génération Z apprécie ce flou. Dans ce contexte, le management par objectif apparait comme une solution : plutôt que de s’attarder sur certaines règles liées aux moyens mis en oeuvre, mieux vaut laisser une liberté cohérente aux jeunes professionnels dont la préoccupation doit rester l’objectif.

Besoin d’interactions personnelles Selon l’enquête « Référence des usages en entreprise » menée par Microsoft, il apparait que les TIC transforment progressivement les entreprises de l’intérieur. Le web social est central dans cette transformation. Au sein des entreprises, 2 cultures complémentaires sont en interaction : la culture des “Ludens” et la culture des “Faber”. Les Ludens (génération Z, voire génération Y) sont fondamentaux dans la compréhension de ce qui va arriver en matière d’usages. Ils montrent la voie et les écouter permet de gagner du temps dans le bon usage du web social tant en interne qu’en externe. Les Faber (les "sachants") ont beaucoup à apprendre des Ludens (les "apprenants", les jeunes).

FABER LUDENS

Posture Le sachant, très méthodique L’apprenant, intuitif

Travail Effort, dévouement, mérite, sacrifice, perfectionnisme

Jeu, plaisir, fun, expérimentation, voire détournement et prise de risque

Temps Orienté vers le futur, la planification

Implanté dans le présent, voire l’instant

Figures Le père, l’ingénieur, le pionnier, le héros, le chef, l’arbitre

Le meneur, la tête de réseaux, l’enfant, le navigateur, le mercenaire, l’homme de défi

Mots-clés Appliquer, structurer, Créer, transformer, personnaliser

Imaginaire dominant Rationalisation, domestication, contrôle, pouvoir, productivité, rentabilité, excellence

Mise en relation, réseau, connexion, coordination, harmonisation, socialisation, débat, collaboration, participation

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Plus que jamais, il est nécessaire de s’entourer de Ludens, de jeunes professionnels pour comprendre ce qui va être. Leur créativité et leur usage des outils numériques sont particulièrement enrichissants pour innover. La collaboration entre Faber et Ludens peut passer par la mise en place d’un Réseau Social Interne d’Entreprise. La réussite reposera notamment sur le partage d’expertises et les collaborateurs moteurs au sein de l’entreprise. Le facteur humain sera déterminant pour la pérennisation des échanges.

Vers une entreprise fluide Sur le plan organisationnel, l’orientation “web social” a des fortes conséquences sachant que le modèle hiérachique a tendance à passer d’une approche “top-down” (du haut vers la base) à une approche “bottom- up” (de la base vers le haut). Bien sûr, ce changement de modèle hiérarchique est variable et plus ou moins avancé selon les tailles d’entreprise, les secteurs d’activité, les marchés adressés. Pour faire court, la nouvelle orientation “web social” passe notamment par : - Moins de hiérarchie, des organisations plus plates - Des interactions moins formelles, plus spontanées et non-linéaires - Plus de partage - La mise en place de groupes de projet La génération Z est une génération fluide et participative. Cette fluidité est riche d’enseignements pour le monde professionnel qui repose encore trop sur un modèle hiérarchique pyramidal. Autant tirer profit de la vision revigorante de la génération Z. En conclusion, nous assistons à une accélération des cycles dûe notamment au contexte digital & économique. Dans ce cadre, la génération Z a développé des spécificités digitales et « énergisantes » qui font sa force. Sa créativité et sa vision digitalisée du monde sont autant d’atouts à utiliser en symbiose avec les standards des générations précédentes : Les échanges intergénérationnels faits en bonne intelligence seront créateurs de valeur. Tout cela reste à observer sur une période longue (5-10 ans) sachant que la génération Z nous donne un aperçu du futur. Comme l’a dit Robert Metcalfe, “le futur est déjà là. Simplement, il n'est pas réparti de manière uniforme.”

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Impact des réseaux sociaux sur le management des entreprises

Hervé KABLA Directeur Général

BLOG ANGELS Les réseaux sociaux – et d’une manière générale le web dit « social » - ont changé les mœurs de nos civilisations modernes. Blogs, sites collaboratifs, sites de partage, réseaux sociaux, ont fait évoluer nos modes de travail, de l’acquisition des connaissances au travail collaboratif. Cette révolution lente a des répercussions profondes sur le mode de fonctionnement des entreprises. Le retour de la parole et de l’expression écrite en ligne modifie les schémas organisationnels, et requiert de modifier certaines priorités. D’un management vertical, nous passons à un management horizontal.

Le retour de la parole

En près de quinze ans, Internet a radicalement modifié les modes de communication des organisations. Rares sont de nos jours les entreprises qui peuvent se permettre de faire l’impasse d’une démarche structurée et réfléchie de communication sur Internet. Les premières années de l’ère Internet ont ainsi vu le développement fulgurant de sites institutionnels et de boutiques en ligne, dans une vision de l’Internet réduite à sa plus simple fonction mercantile. Mais la révolution Internet ne se limite pas à cela. Dès avant l’apparition du web, les utilisateurs du réseau des réseaux s’étaient organisés en groupes d’utilisateurs partageant les mêmes passions et les mêmes intérêts professionnels. Des newsgroups au forum puis au réseau social, c’est d’une certaine façon ce même besoin de communiquer à son prochain que l’on retrouve, amplifié, renforcé, étendu, par la richesse que permet le passage à des moyens technologiques plus sophistiqués que le papier et le stylo à bille : échanges asynchrones, avec de multiples utilisateurs, au travers d’outils multimédia. Un temps qualifié de « web 2.0 » pour évoquer l’apparition d’une nouvelle espèce de sites web, le « web social » est l’expression sous laquelle on regroupe aujourd’hui toutes ces formes qui permettent à un internaute de communiquer avec d’autres internautes, à titre privé ou professionnel, de manière anonyme ou à visage découvert. Ce web social marque le retour de la parole, dans un monde que l’on croyait à jamais industrialisé et mécanisé. C’est la revanche de la communication sur la technicité : que vaut la plus belle des technologies si elle ne sait le faire savoir ? Que peut réaliser le meilleur des experts, s’il ne sait pas s’exprimer ? Cette évolution s’est opérée doucement, sur une période d’une quinzaine d’années, d’abord dans la sphère privée, avant de toucher le monde de l’entreprise. Cette évolution s’est construite sur quatre socles essentiels : blogs, sites de partage, outils collaboratifs, réseaux sociaux.

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La première étape est franchie avec la démocratisation des blogs, simple évolution du concept de site personnel introduit dès le milieu des années 90. Avant leur apparition, un individu ne pouvait en général partager sa passion ou ses loisirs qu’avec un cercle restreint, souvent localisé à quelques centaines de mètres de chez lui : association sportive, club de modélisme, philatéliste, collectionneurs en tout genre. Toucher un public plus large aurait requis un travail de recherche additionnel, de passer par des revues spécialisées, d’écrire et de faire publier un livre, choses compliquées par essence. Le web a annihilé ces frontières physiques, en permettant d’établir de nouvelles passerelles avec des inconnus, internautes à la recherche d’informations, de conseils, de réponses à leurs propres préoccupations. Par sa structure simple, ses mécanismes immédiatement accessibles de lecture, de recherche ou de publication de commentaires, les blogs ont parfaitement rempli ce rôle. Leur explosion vers le milieu de la précédente décennie en est la parfaite illustration. Les blogs ne sont néanmoins pas les seuls supports de web social. Les sites de partage de contenus ont accentué cet essor du web social. On a tous, un jour ou l’autre, accepté de partager quelque chose : des lectures, de bons moments, des souvenirs. Les sites de partage sont la traduction en ligne de ce besoin essentiel. Partager un favori, cela peut paraître stupide, mais relève d’une démarche ô combien altruiste : « tel site m’a été utile, je t’en recommande l’usage ». Partager des photos, des vidéos, des listes de morceaux de musique, c’est le moyen dont disposent les jeunes générations pour partager des souvenirs, et parfois même une sorte de savoir ou de fond commun culturel, par exemple en partageant des vidéos issues d’émissions cultes. Les outils collaboratifs et de co-création forment le troisième socle de cette évolution vers le web social. Le meilleur exemple en est de toute évidence Wikipedia, devenu en moins de dix ans le référentiel absolu du savoir humain. De la biographie de John Kennedy à la conjecture de Goldbach, existe-t-il encore un sujet qui n’ait pas encore été abordé sur ce support ? Et bien aussi paradoxal que cela puisse paraître, Wikipedia ne s’est pas construit uniquement sur le savoir d’une poignée d’experts, mais sur le long et minutieux travail de centaines de milliers d’individus qui ont rédigé, modifié, débattu, autour de ces quelques millions d’articles dédiés au savoir de l’humanité. Enfin, les réseaux sociaux sont le dernier élément de cette tétralogie essentielle du web social. Il s’agit de sites dont l’essence même est de permettre à leurs utilisateurs d’en remplir le contenu, au travers d’une démarche simple et rigoureusement déclinée d’une plateforme à l’autre :

établissement d’un profil utilisateur, comme un CV

indication des liens avec certains autres membres du réseau : les amis, contacts, relations, etc.

publication de contenus, courts ou riches Le rituel est le même : de LinkedIn à Facebook, de Xing à Instagram, les réseaux sociaux respectent ces mêmes formes de connexion et d’animation. Pas un jour ne passe sans que l’on soit sollicité par un de nos proches ou de nos relations pour rejoindre ou alimenter l’une de ces plateformes.

Les conséquences sur l’organisation

Ce retour de la parole ne peut pas être sans conséquence pour les organisations, et notamment pour les entreprises. A cela, plusieurs raisons.

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La première réside sans aucun conteste dans la nécessaire adaptation des outils de l’entreprise aux réalités de la vie de tous les jours. Qui accepterait de travailler de nos jours avec des versions des logiciels d’entreprises vieilles de plus de vingt ans ? Qui serait prêt à revenir à la règle à calcul pour calculer ses notes de frais ? Ou à la bonne vieille carte Michelin pour ses déplacements professionnels ? Cela peut vous faire sourire, mais rien n’est plus énervant que de se retrouver plongé dans un environnement de travail moins efficace que son environnement personnel. Or que trouve-t-on le plus souvent quand on franchit la porte de l’entreprise ? Bien souvent un désert, en terme de web social. Disparu, les sites de partage, les outils collaboratifs, et même les bons vieux blogs, si prolixes dès qu’on jette le nez dehors. Adapter l’intranet au web social est un enjeu majeur de ce qu’on appelle « l’entreprise 2.0 ». Y faire défaut, c’est s’exposer de plus en plus au risque de ringardisation… La seconde raison, c’est que ces outils sociaux peuvent être de formidables outils au service de l’entreprise elle-même. Imaginez – ce n’est pas difficile, vous verrez – que l’entreprise elle-même s’empare de ces outils sociaux. D’un blog personnel on passe à un blog d’entreprise, d’une chaîne de vidéos personnelles partagées on passe à une « web TV », d’un site de partage de photos on passe à une médiathèque, et ainsi de suite. Cette approche simple au premier abord, se révèle primordiale en terme de communication de marque. Celles et ceux qui l’ont compris les premiers en récoltent aujourd’hui les bénéfices. De l’animation de pages Facebook à celles de communautés d’utilisateurs très spécialisées (comme le réseau de plus de 30 000 auto-entrepreneurs entretenu par la société Ciel !), de multiples cas se sont développés ces dernières années. La troisième raison, c’est que ces outils de communication sont aussi des outils professionnels. Imaginez que vous cherchiez à recruter un collaborateur, expert dans tel ou tel domaine d’activité. Une simple recherche sur un moteur de recherche (Google) ou sur un réseau social professionnel (LinkedIn ou Viadeo) vous fournira des dizaines et des dizaines de candidats. En ciblant un peu mieux votre requête, à l’aide de mots-clés judicieusement choisis (par exemple, le nom de vos concurrents), vous cernerez peu à peu la personne que vous recherchez. C’est la démarche la plus simple. Inversez maintenant la logique. Recherchez non pas un profil, mais le nom d’un individu : un prospect, un candidat, bref une personne dont vous aimeriez vous faire une idée. Les mêmes outils vous permettront de trouver son profil professionnel s’il existe, peut-être même certains contenus personnels s’ils sont peu ou mal protégés, voire le ou les blogs gérés par la personne en question. Vous voyez aisément jusqu’où on peut arriver… On touche ici à ce qu’on appelle l’e-réputation, et cela peut rapidement devenir un sujet sensible. Si elle est convenablement traitée, tout va pour le mieux. Dans le cas contraire, on peut remettre en question certains choix… On le voit bien, les réseaux sociaux ne sont pas neutres, et agissent sur la vie de l’entreprise. Mais est-ce pour le meilleur ou pour le pire ?

Les bénéfices et les risques

Comme souvent, on peut voir la bouteille à moitié vide… ou à moitié pleine. Commençons par illustrer les problèmes que posent les réseaux sociaux. On l’a déjà évoqué précédemment, le risque de ringardisation est réel. Ne le sous-estimez pas. La jeune génération, celle qu’on qualifie volontiers de « génération Y » n’est pas aussi

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solidement attachée à l’entreprise que le furent leurs prédécesseurs. L’entreprise intelligente va devoir apprendre à séduire, et cela passe par l’acceptation et la standardisation de ces outils de communication. Les risques liés à l’e-réputation mériteraient un volume à part entière. E-réputation des dirigeants tout d’abord, comme ce CEO de Yahoo ! récemment débarqué faute d’avoir menti sur sa formation, un risque qu’on ne peut se permettre à l’heure des réseaux sociaux professionnels, où les sociétés d’anciens élèves évoluent à ciel ouvert et non derrière les vitres teintées de cercles privés. E-réputation des salariés, qui doivent parfois traîner avec eux le boulet d’un procès gagné aux prud’hommes ou devant la Halde, et ayant fait les choux gras de la presse spécialisée. E-réputation de l’entreprise elle-même, désormais, avec des campagnes de communication orchestrées de main de maître par certains opposants comme Greenpeace (affaire Nestlé), ou de vulgaires erreurs d’appréciation sur la perception du grand public (inutile de revenir sur les récents « bad buzz »…). Le risque le plus grave cependant consiste simplement à ne pas saisir sa chance, et à laisser ses concurrents s’approprier le web social au nom de leur industrie toute entière. Le web a beau être extensible à l’infini, il réserve souvent une place de choix au premier entrant. Mais au-delà de ces considérations opportunistes, que dire de la simple écoute des bruits qui alimentent le web social ? Quelle entreprise peut se permettre de passer à côté de la perception de ses propres consommateurs, de leurs avis, de leurs colères, de leurs goûts, de leurs tendances, de leurs attentes, de leurs déceptions ? Peu importe les outils dont on se sert pour exploiter ce minerai (et ils sont légion !), c’est un joyau à l’état pur, dont se régalent les marketeurs avisés. Mais n’y a-t-il que des soucis à se faire ? Assurément non ? On vient de le dire, le web social regorge d’idées, de conseils, de tendances, dont les entreprises peuvent et doivent s’inspirer pour coller au plus près des attentes de leurs clients. Twitter, Facebook, les blogs, sont de formidables réservoirs d’idées pour faire évoluer les produits, identifier les ambassadeurs de marque, animer de vraies communautés. A condition d’en accepter les règles. Les réseaux sociaux réduisent les distances, et brisent les frontières. Les dix degrés de séparation entre deux individus se réduisent souvent à trois voire deux degrés seulement. Les réseaux sociaux raccourcissent les circuits d’information, aussi bien top-down que bottom-up. La circulation de l’information s’en trouve renforcée, parfois même un peu trop. « L’infobésité » n’est pas rare, et il faut surveiller la redondance des données entre les différents supports (mails, blogs, sites de partage). Parfois, la cohérence s’en ressent. Parfois, aussi, certains circuits décisionnels vont se retrouver shuntés : tel ou tel salarié pourra communiquer directement avec un manager deux ou trois niveaux au-dessus, et l’impact sur la motivation de ce middle management peut parfois être lourd à gérer. Attention aux dérapages. Les réseaux sociaux démultiplient l’image et la présence d’une marque. De nos jours, le moindre collaborateur devient un support publicitaire vivant, une enseigne lumineuse qui scintille au gré des requêtes sur les moteurs de recherche. Il ne tient qu’à vous d’apprendre à vous servir de ces supports vivants, de les éduquer et les assister pour présenter marques, produits et entreprises sous un jour nouveau. Tel responsable SAV sera le meilleur exemple d’un support de qualité, au travers de son blog ou de son profil professionnel. « Nous sommes tous des community managers », devrait être écrit à l’entrée de toutes les entreprises.

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Le web social, c’est la possibilité de faire du viral, au prix du viral. Certes, ça ne marche pas à tous les coups, mais tout le monde peut tenter sa chance, contrairement à la publicité à la télévision ou à la radio. Mieux, il y a comme une prime à l’intelligence, quand on voit quelles sont les campagnes en ligne les plus réussies : la sanction du web est une sanction démocratique, universelle, elle n’est pas la sanction du pouvoir tyrannique ni celle de l’argent, mais celle de ces multiples anonymes, qui encenseront votre marque aussi vite qu’ils la porteront aux gémonies… Le web social, c’es le retour de la parole, qui a toujours été le meilleur vecteur de vente. Une parole authentique, un discours commercial parfois, mais aussi le point de départ d’un véritable bouche-à-oreille, synonyme de succès inattendus.

Les bonnes pratiques

Ce retour de la parole se doit d’être authentique. Il serait désastreux de tenir une posture sur les médias sociaux pour paraître ce qu’on n’est pas vraiment. Le web a cet avantage sur les autres médias, qu’il laisse rapidement transparaître la véritable nature de celles et ceux qui l’utilisent. S’approprier les médias sociaux en entreprise, c’est d’abord renoncer aux faux profils, aux faux commentaires, aux faux amis. Cela peut paraître évident, mais à y regarder de plus près, on se rend compte que nombre d’individus seraient prêts à franchir le pas. Alors comment éviter de tomber dans de telles pratiques ? Voici quelques conseils. Le premier, c’est la formation. La présence sur les médias sociaux nécessitent de former les personnels de l’entreprise à ces nouveaux outils, à ces nouveaux médias. Au même titre qu’on formait autrefois les salariés à l’usage de la messagerie électronique, ou lors de l’introduction d’Internet et du web, il faut préparer ses équipes à cette nouvelle démarche. On commencera, d’ailleurs, par former l’équipe de direction et le middle management, pour s’assurer qu’il s’agit bien d’une démarche globale et non isolée. Le contenu des formations diffèrera : sensibilisation aux enjeux pour le top management, participation opérationnelle et community management pour les personnes impliquées au jour le jour, sensibilisation aux usages et aux outils pour le reste de l’entreprise. Le second, c’est d’accepter l’échec. Vous n’êtes plus à l’école, et vous ne serez pas jugés et notés en fonction de votre participation sur les médias sociaux. Inutile de vous inscrire dans une démarche précautionneuse, et de passer votre journée à n’imaginer que les pièges et les risques. Oui, vous commettrez des erreurs, vous vous « planterez » parfois, vous corrigerez le tir, mais après tout, c’est le meilleur moyen de devenir le meilleur. Le troisième conseil que je vous donnerais, c’est de vous structurer. On ne va pas sur les médias sociaux sans un minimum de préparation et de structuration : sachez identifier vos sujets, votre ligne éditoriale, vos interlocuteurs, votre « cible » (pour reprendre une expression si marketing 1.0) ; établissez un agenda, une « roadmap » des médias sociaux, pour caler les grands rendez-vous du réel dans le virtuel : salons, conférences, lancements, dates clés ; formez des équipes, tenez compte des congés, décidez de la posture à adopter pendant les week-ends et les jours fériés (attention à l’inspection du travail…) ; préparez-vous aux scénarios catastrophes pour bien rôder vos processus de réaction. Bref, structurez un peu tout cela. Le quatrième conseil, c’est d’apprendre à écouter. Il va falloir également tenir compte de l’écoute des autres, parfois plus précise, plus juste, plus efficace. Ecouter, ce n’est pas forcément espionner : halte aux rapports de veille incessants, qui finissent par aboutir directement à la corbeille, au bout de quelques semaines. Apprenez plutôt à identifier les

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thèmes récurrents, les fortes personnalités (les « influenceurs »), les relais de communication. Prenez part à la discussion, quand vous le pouvez et quand vous le souhaitez. Apprenez à donner pour mieux recevoir. Il va falloir vous connecter, sur Viadeo, sur LinkedIn, sur Facebook… Tomber le masque et révéler votre identité, pour être mieux apprécié. Le cinquième, c’est de structurer et de mesurer votre engagement, pour ne pas non plus vous disperser. L’effort initial ne doit pas devenir un fardeau à porter. Ces conseils, ne les gardez pas pour vous. Partagez-les auprès de vos équipes, auprès des RH, de la DSI, des différentes organisations concernées par l’image e la marque, la qualité des produits et la satisfaction des clients. Bonne nouvelle, vous êtes dans une entreprise, vous n’êtes donc a priori pas seuls à intervenir. Faites-vous aider. Vous trouverez forcément quelqu’un qui sera déjà présent sur une plateforme sociale et vous appuiera dans vos projets sociaux. Faites-vous aider, dans les premiers temps, par des personnes déjà plus avancées dans ces domaines : consultants, agences, ou tout simplement pairs dans des entreprises de taille similaire (l’organisation Media Aces peut vous aider à faire d’excellentes rencontres, de professionnels en entreprise, engagés sur les médias sociaux : MMA, Orange, Yoplait, la Société Générale, CEGOS, Alcatel-Lucent y sont dignement représentés).

Conclusion

Les médias sociaux changent la manière de communiquer, non seulement hors de l’entreprise, mais aussi au sein même des organisations. Cette nouvelle révolution numérique nécessite de repenser le fonctionnement des entreprises. La formation des équipes en place est impérative, si l’on veut obtenir une bonne adhésion de l’ensemble des équipes. Un projet parfois lourd à mener, mais le jeu en vaut la chandelle.

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Quelles entreprises pour la Génération Y ?

Emmanuel MIGNOT Président de Teletech International

Blog : GoodMorning-Client! (www.goodmorning-client.com)

Les réseaux sociaux, en ouvrant l'horizon, ont engendré un changement dont les effets ne font que commencer à se faire sentir. D'une entreprise-employeur, à laquelle la journée entière était dévouée, on assiste à une communauté télétravaillant qui se regroupe physiquement tout en maintenant un lien vers ses membres extérieurs. Source d'information, de prosélytisme, ces communautés enchevêtrées constituent un nouvel écosystème des entreprises que celles-ci n'ont pas identifié et ignorent. Il ne s'agit ni d'employés, ni de clients, ni de partenaires. Ce sont ses stakeholders le plus souvent inconscients et involontaires. Ce sont eux qui, par affinité avec le membre interne, vont véhiculer, via leur page Facebook, les informations sur la marque au-delà du périmètre auquel celle-ci a accès. Ce sas avec l'extérieur, est une source d'instabilité, mais aussi d'innovation et de développement.

Impliquer la génération Y ?

Comment les entreprises peuvent-elles tirer parti des réseaux sociaux pour se prolonger en une communauté étendue et efficiente ? Bien sûr, il reste des marques pour qui les jeunes "Y" rêvent de travailler, ou sont fiers de travailler quand ils sont parvenus à entrer dans le clan. Apple, bien sûr, Google, Facebook ont pris la place des grands cabinets d'audit, de l'Air Liquide, IBM ou autre Club Med, sans oublier les GE ou Unilever. Dans leur catégories, ces marques restent des Graals pour des générations de jeunes candidats désireux d'assurer leurs arrières : épingler une marque cotée à son CV, y apprendre, plus vite et mieux, comment avoir une carrière météorique, le tout dans un environnement qui laisse le droit à l'erreur et s'y forger un réseau qui sera un atout pour la suite. Ces entreprises ont une culture forte, qui est claire pour ses membres comme pour ses clients. Le sentiment identitaire y est fort et la fierté d'y appartenir palpable.

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Ceci ne doit rien au hasard. Ici, le sentiment d'appartenance est facteur d'engagement et de fidélité. Les anciennes gloires ne peuvent pas forcément en dire autant. Cette faculté d'attirer à elles la génération Y qui sera majoritaire en 2015 est loin d'être commune. Mais ce n'est sans doute pas un hasard si c'est un étudiant de Harvard qui a créé Facebook et rendu caduque les managements de la plupart des entreprises. Destinés à assurer la pérennité du système, ces étudiants de la génération Y vont au contraire les contraindre à un changement aussi profond qu'irréversible.

Le phénomène Facebook

Les observateurs ne manquent pas pour stigmatiser un effet de mode qui ne devait pas tarder à s'éteindre. 300 millions de membres en moins de temps qu'il faut pour dépasser Myspace ? Un château de carte, un truc de jeune. 500 millions et l'élection d'un président américain noir ? Le chant du cygne. 900 millions et la détention des données clés sur les clients de toutes les entreprises de la planète ? Eh bien, oui, il faut s'y résoudre, quelque chose a changé dans la vie des gens. Ou plutôt, tout a changé. La pensée commune prétend que d'un côté il y a les réseaux professionnels, comme LinkedIn ou Viadeo, et de l'autre, le réseau des particuliers, Facebook. En disant pour les particuliers, on veut dire pour les jeunes, pour des choses insignifiantes. Ce réseau est souvent accusé de faire courir des risques à la vie privée des jeunes. Bien entendu, ce sont des idées de vieux. La réalité, c'est que de plus en plus, on ne sépare plus autant sa vie privée de sa vie professionnelle. Que l'on se voit comme une seule et même personne et que l'on a pris conscience que le principe même du networking consiste à nouer des liens extra-professionnels pour favoriser ses affaires. Mais dans beaucoup d'entreprises, l'accès à internet est bloqué, le branchement sur Facebook proscrit et considéré comme du farniente. Le salarié est présumé coupable de vouloir se distraire, voire divulguer les secrets de fabrique. L'interdiction, au nom du sacro-saint principe de sécurité, est la réponse la plus classique.

Ouverture ou cloisonnement ?

Le management feint d'ignorer que souvent, le collaborateur bénéficie à son domicile d'équipements plus performants que ceux qu'il met à sa disposition à son poste de travail. Il est paradoxal quand il espère à la fois que le collaborateur sera assez impliqué pour rester disponible en dehors des heures de travail grâce à son portable personnel et qu'il lui impose l'enceinte de l'entreprise comme seul endroit d'où il peut accéder aux données utiles.

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La réflexion sur le temps de travail et le télétravail est embryonnaire ou absente de la majorité des sociétés : la confiance nécessaire pour imaginer un temps travaillé indéfini, laissé à la libre appréciation des collaborateurs, n'est pas là. Jusque dans les textes de lois qui conservent une vision passéiste de la relation à l'employé. Ce dernier parle de son métier, comme il l'a toujours fait. Simplement, ses échanges sont devenus publics, et ils sont conservés, pour longtemps, ce qui fait peur aux entreprises. Souvent même, le collaborateur a davantage d'échanges et d'affinités avec des contacts externes qu'en interne. Souvent aussi, il recherchera les échanges avec ceux qui partagent ses centres d'intérêt, de compétences. Ceux-là peuvent exercer le même métier que lui, mais dans une entreprise concurrente de la sienne. Les forums thématiques regroupent des spécialistes qui sont concurrents et qui prennent un grand plaisir à confronter leurs connaissances et leurs idées, parfois leurs projets. Personne ne peut être sûr que ces échanges ne contribuent pas à diffuser des informations que l'employeur de l'un ou l'autre aurait choisi de conserver secrètes. On voit bien qu'il est inutile, superflu, voire contreproductif d'interdire ces échanges depuis l'équipement professionnel. Sitôt rentré à son domicile, ou dans les transports en commun, à peine la porte du bureau franchie, le collaborateur peut entamer ses discussions privées depuis son smartphone. Il est tentant d'interdire et de brandir des sanctions. Encore faut-il être en mesure de contrôler et de sanctionner pour conserver à ces interdictions un minimum d'effet dissuasif. Mais cette position défensive, qui peut parfaitement se comprendre est de plus en plus en décalage avec l'attitude des jeunes de la génération Y. Ceux-ci sont nés avec les nouvelles technologies, les téléphones mobiles, le chat, les mails. Ils sont habitués à des échanges permanents, au partage, au collaboratif. Le cloisonnement n'est pas dans leur culture. Même si les adultes les mettent en garde régulièrement contre les risques de s'exposer sans retenue, ils fonctionnent en tribu, maîtrisant de mieux en mieux les solutions de protection de leurs données personnelles. Cette aptitude à discerner ce qui peut et ce qui ne peut pas être diffusé se généralise, via l'apprentissage et la communication sur les incidents générés par l'exploitation négative des données sur les réseaux sociaux. C'est bien la voie à suivre pour établir un fonctionnement plus performant des organisations.

Libérer le potentiel des nouveaux collaborateurs

Il est naturellement possible aux entreprises de poursuivre le même mode de fonctionnement : hiérarchisé, hyper-structuré, avec des missions strictes assignées à chacun.

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Les jeunes générations s'y conformeront, comme les précédentes, d'autant que la conjoncture ne leur permettra pas de s'y soustraire aisément. Mais d'une part, rien ne pourra les empêcher de rester connectés à leur réseau, depuis leur smartphone, leur PC, leur tablette, leur télé connectée. Ils échangeront leurs connaissances, demanderont conseil, participeront à des forums. D'autre part, l'entreprise peut saisir l'opportunité qui lui est offerte par cette nouvelle génération. Là où le contrôle, les procédures, les règles en tous genres brident les initiatives, contraignent les échanges et privent l'entreprise de ses richesses, la nouvelle génération saura innover spontanément, enrichir sa mission, la penser avant de la réaliser. Déjà certaines entreprises ont franchi le cap, créant des wikis thématiques internes. D'autres ont depuis longtemps ouvert des intranets. D'autres encore créent des groupes de travail virtuels via des visio-conférences. Mais là encore, on constate le plus souvent que les mots de passe, les restrictions d'accès sont nombreux. Les initiatives viennent "d'en haut" et l'appropriation par les publics visés décevante. Ceux qui ont déjà participé à un vrai barcamp savent que la production d'idées, le nombre et la qualité des échanges entre les participants à ces "user generated events" sont incroyablement supérieurs à ceux d'événements organisés par les entreprises. La différence s'explique par l'implication de tous les membres, leur envie d'apporter leur contribution, d'apprendre, de faire partager leurs connaissances. Pas un vidéoprojecteur en panne, pas un réseau inaccessible, lors de ces événements qui allient le festif et l'apprentissage, qui proposent, en week-end de venir "travailler" (mais est-ce du travail ?) gratuitement, en fournissant les repas à des centaines de volontaires qui ne tardent pas à former des communautés qui poursuivent continuellement leurs échanges sur internet. On peut même logiquement se demander comment les entreprises se trouvent éloignées de ces mobilisations si efficaces.

Les entreprises vont muter

De la même manière que les consommateurs vont chercher de plus en plus à influer sur l'évolution des entreprises qu'ils affectionnent, les collaborateurs vont saisir les occasions de prendre des initiatives dès que les processus internes leur en laisseront la chance. En réalité, pour répondre aux attentes des consommateurs, qui veulent plus de personnalisation, de réactivité, de créativité, il n'y a pas d'autre voie pour les entreprises que de lâcher prise et de laisser à leurs membres le soin d'inventer les réponses à apporter. Mais lâcher prise, justement, c'est la haute marche à franchir pour des organisations qui ont toujours fonctionné sur la reconnaissance de statuts, de privilèges et les pyramides

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hiérarchiques. Quid de ces hiérarchies, si chacun est encouragé à prendre des initiatives ? Comment fonder une organisation sur la confiance, si un individu comme Jérôme Kerviel peut menacer l'économie mondiale ? Pourtant, ces organisations calquées sur celles des armées ont fait leur preuve par le passé. Mais justement, les révolutions "internet" sont passées par là. Et Jérôme Kerviel a pu, seul, en déjouer aisément toutes les protections. Là où un collectif vertueux aurait mis un frein, la déresponsabilisation engendrée par les systèmes technocratiques a permis tous ces excès. Force est de constater que la notion même d'entreprise a profondément changé. Quand un General Motors a failli sombrer corps et bien, quand des pays sont en faillite, on voit un Microsoft abandonner Encarta dans lequel elle a investi longtemps et massivement : même ce mastodonte mondial et richissime ne peut lutter contre le collectif Wikipedia. On a vu l'administration française adopter Linux pour faire des économies mais aussi pour disposer de davantage de latitude dans la gestion de ses systèmes d'informations. Oracle vient d'abandonner au collectif son produit libre "Open Office". Le cloud computing permet de créer en quelques minutes des collectifs virtuels qui collaborent pour des développements logiciels à des coûts insignifiants. Le Mechanical Türk d'Amazon permet de répartir des micro-tâches entre des centaines de prestataires qui vont travailler à la demande selon des contrats ultra-light. Les anciennes générations croyaient aux entreprises "pour toute une vie", vision paternaliste et castratrice de toutes les initiatives. La génération Y croit en elle-même, pas forcément de façon individualiste, mais collectivement. L'effondrement des promesses de retraites loyalement versées a ouvert une nouvelle brèche. Les entreprises mutent, changent de métier, de pays, de produits, de personnels au gré des événements, des opportunités et des contraintes. Le personnel est presque toujours la variable d'ajustement, sacrifiée aux mouvements de concurrence. Les réseaux sociaux, internet, le monde "libre", lui offrent les moyens, de trouver, collectivement, de nouvelles voies d'épanouissement. Les entreprises qui vont survivre à ce tsunami seront celles qui auront intégré cette nouvelle donne et créé les conditions de cette prise d'initiative, d'auto-réalisation. Le maître-mot de cette révolution est "Confiance". Faire confiance non pas benoitement à chaque collaborateur (toujours l'expérience Kerviel), mais au collectif. Globalement, chacun tend à se réaliser dans des conditions de bien-être maximales. En étant acteur de son quotidien, en jouant de sa tribu comme d'une arme pour aller plus vite plus simplement, le jeune collaborateur encouragé à inventer sa mission démultipliera son apport.

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Quelles solutions pour réinventer son organisation ?

Il n'est pas possible de traiter de ce sujet ici en quelques pages, mais on peut dire qu'il s'agit de repenser la culture et l'organisation des entreprises. Si on affirme que chacun est acteur du développement collectif et qu'on en tire toutes les conclusions, tout devient possible. Mais comme toujours, il suffit de quelques indices que la volonté de changement n'en est qu'au stade du discours et du marketing, pour que la méfiance prenne le dessus, en attendant des preuves concrètes et tangibles du changement annoncé. Si on affirme la confiance dans les collaborateurs, dans leur capacité à prendre les bonnes options, on doit pouvoir laisser à chacun, une fois formé s'entend, la possibilité de solder un litige avec un client à sa manière, par exemple. On peut lui donner une marge de manœuvre, mais au sein du périmètre attribué, il est autonome. Il peut en aller de même de l'organisation du travail. Non pas un "chacun fait ce qu'il veut", mais "travaillez ensemble à une nouvelle organisation". De la même manière, la résolution des problèmes n'est pas forcément du ressort du "N+1", surtout si des organisations beaucoup plus plates se mettent en place progressivement, mais être le résultat de discussions entre les parties prenantes. Il est intéressant d'observer comment certaines organisations sont parvenues à obtenir un engagement très fort de leurs équipes, en absence de possibilité de promotions ni de reconnaissance financière. C'est dans la libération des potentiels par la confiance et l'autonomie que cela a pu fonctionner. C'est ce qui est à la fois l'attente de la génération Y et la voie de la performance des entreprises.

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LES RÉSEAUX SOCIAUX ET L’ASSURANCE Vers un rééquilibrage des forces entre assureurs et assurés

Christian PARMENTIER Fondateur - LAB

Il peut paraître paradoxal de constater que l’Assurance n’est que très peu présente sur les Réseaux Sociaux et, quand elle l’est, il s’agit surtout de développements hors du cadre assurantiel au sens propre et visant le Grand Public plutôt que les clients ! Il faut admettre, à la décharge des assureurs, que la nature même de l’activité et l’image de marque de la profession incitent à la plus extrême prudence. En effet, le caractère anxiogène de l’activité Dommages (accidents, incendies, catastrophes naturelles, etc.) ainsi que, et c’est nouveau, de l’Epargne (chute des placements en UC, risque de faillite d’institutions centenaires) ne prédisposent pas à rassembler des millions de fans sur sa marque. Par ailleurs, l’expérience-client se situe quasi-exclusivement dans le cadre d’un événement malheureux qui – même s’il est bien instruit – ne laisse que rarement un souvenir positif. Ajoutons à cela la propension naturelle de nos concitoyens au mécontentement, ce que nous pouvons constater en consultant les sites d’opinions sur les assurances. Pour autant, la profession pourra- t-elle longtemps rester à l’écart du phénomène si celui-ci se confirme ? Là est la première question : s’agit-il d’un phénomène durable ou d’un effet de mode ? La majorité des observateurs, surtout sur la toile, s’accorde sur le caractère irréversible de la montée en puissance des Réseaux Sociaux, notamment avec l’arrivée aux responsabilités dans les entreprises de la génération Y. Il faut cependant se souvenir qu’il n’y a pas si longtemps, au début de ce siècle, il n’y avait de louanges que pour MySpace et Second Life. Aujourd’hui, on n’en parle plus ! Ceci montre aussi une accélération du temps ; même dans l’Assurance ? Les innovations y ont généralement pris « un certain temps » avant de devenir un standard. Pour ceux qui, comme moi, ont consacré toute leur carrière au secteur et arrivent au terme, ils ont connu l’époque de l’informatisation de la gestion. Et même des cartes perforées : les cours d’informatique de l’ENASS en 1975 comportaient des exercices sur cartes perforées et des calculs en Basic ! Le développement du Marketing à partir de cette époque (création en 1975 à l’UAP), promu par les travaux du CAPA (Centre d’Analyse et de Prospective de l’Assurance, aujourd’hui disparu) a mis deux décennies avant d’obtenir de vraies lettres de noblesse dans le secteur. Le lancement de la Bancassurance à la même époque par le Crédit Mutuel a du attendre celui du Crédit Agricole dans les années 80 pour la Vie et les années 90 pour l’IARD pour devenir vraiment visible dans les statistiques de parts de marché. Les tentatives de vente à distance en court-circuitant les réseaux traditionnels dans les années 80 se sont surtout traduites par son intégration dans les techniques de vente des compagnies à réseaux. L’Internet de 2000 et son cortège de start-up ont fait long feu. On a largement évoqué la bulle Internet d’alors. La réalité est qu’après cet engouement précipité, Internet est devenu

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incontournable pour les sociétés d’assurance : avant la vente, de plus en plus pendant la vente (même pour les réseaux physiques), pour la gestion (on demande de plus en plus au client d’effectuer lui-même des opérations de gestion (alors qu’il ne le souhaite pas forcément) et, bien sur, lors de la déclaration et l’instruction d’un sinistre. Les comparateurs ont d’abord inspiré le dédain de bon nombre de grands assureurs, voyant là un danger de nivellement des prix par le bas. Aujourd’hui 10% des nouveaux contrats auto proviennent de comparateurs et les plus grandes enseignent s’apprêtent à franchir le pas quand elles ne l’ont pas déjà fait. On peut donc penser que l’intégration des RS dans l’Assurance n’est qu’une affaire de temps, celui-ci ayant fortement tendance à s’accélérer. Reste à savoir quels réseaux ? Aujourd’hui Facebook est tout puissant auprès des particuliers, challengé par des RS professionnels comme Viadeo ou Linkedin. Mais demain, seront-ce les mêmes ? Pas sur. Cependant, ce qui est sur, c’est que le mode relationnel inspiré par ceux-ci sera largement intégré. On évoque déjà l’abandon de l’e-mail au profit du chat sur les RS ! Autre élément de changement parallèle aux NTIC, le parcours d’achat du consommateur et l’échange d’avis et de bons tuyaux. Pendant longtemps, l’acte d’achat d’une assurance mettait en présence un néophyte (l’assuré) et un sachant (l’assureur). Le premier ne comprenant rien à la matière s’en remettait entièrement au second qui décodait (ce qu’il avait envie de décoder ; n’oublions pas que longtemps les représentants des agents généraux ont été contre la simplification des conditions générales des contrats estimant qu’il était de leur mission de les traduire au client !). Aujourd’hui tout a changé – et ce n’est qu’un commencement ! L’exemple vient des autres secteurs d’activité : on n’achète plus un billet de voyage à un guichet (ou beaucoup plus rarement), on achète de plus en plus les voyages via Internet, on mène une recherche préalable sur le Net avant de décider, que ce soit une voiture, un bien immobilier, un voyage, etc. On consulte les avis des consommateurs (même si ceux –ci peuvent être biaisés), on compare les prix entre les différentes enseignes (la multiplicité des comparateurs nous y incite). Régulièrement, on entend le constat que les consommateurs sont mieux informés que les vendeurs et qu’ils se rendent dans les points de vente avec des questions précises et techniques. La seconde question est donc : Pourquoi l’Assurance serait épargnée par cette vague de fond ? D’autant plus qu’elle représente des budgets contraints importants et « sans plaisir ajouté », donc, en période de crise notamment, que l’on a tout intérêt à réduire. Parallèlement à la montée en compétence des clients, l’Assurance accuse un affaiblissement de celle des personnels. Alors que les années 90 étaient celles de la Qualité de Service, avec notamment les théories du Total Quality Management qui prônait « l’empowerment » des collaborateurs de front-office, les années 2000 sont devenues celles de la « processisation ». Désormais, tous les cas de figure sont dans la machine. Demandez à un collaborateur, qu’il soit sur le terrain ou du siège, de calculer un tarif sans utiliser l’ordinateur et vous serez édifié ! Demandez une extension de garantie qui n’est pas normée ou une assurance spécifique, et vous n’obtiendrez pas de réponse sinon parfois, la réponse habituelle qui hérisse tant les commerciaux : « on n’y tient pas ». Comme le constatait récemment Gérard LOBJEOIS, Secrétaire Général de l’Observatoire de l’Evolution des Métiers de l’Assurance, la dernière décennie a vu une re-taylorisation de l’Assurance. Sans doute cette industrialisation morcelant les tâches et obligeant les personnels à travailler uniquement à partir des processus informatisés a facilité l’émergence de nouveaux acteurs tels que les grossistes qui ont pu à loisir exploiter les niches laissées par les grands opérateurs.

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Cet affaiblissement de la compétence sera, n’en doutons pas, un facteur incitant les assurés à se prendre en charge par eux-mêmes grâce aux réseaux sociaux. Voici donc une première catégorie d’utilisation des RS pour l’Assurance : la prise en mains par les assurés eux-mêmes ; ce qui peut constituer un rééquilibrage des forces entre l’Assureur-pot de fer et l’assuré-pot de terre. Ainsi, trouver les bonnes réponses à des questions d’assurance auxquelles les assureurs ne savent plus répondre est un axe de développement de l’outil. Un autre usage peut être de se grouper pour obtenir des conditions ou tout simplement la prise en compte de son problème. Des sites comme Groupon connaissent déjà un franc succès pour l’achat groupé à des conditions exceptionnelles. A aujourd’hui, l’Assurance n’y est pas ou peu présente (si l’on excepte quelques tests sans grande portée). Pris en mains par les consommateurs, ce type de démarche peut développer une nouvelle forme de distribution : la constitution de mini-mutualités recherchant les meilleures conditions de garanties et de tarifs. La difficulté à appréhender correctement les problématiques d’assurance serait aisément surmontée si quelques seniors bons techniciens et dégagés d’obligation de réserve à l’égard des compagnies venaient prêter main forte aux clients. Les besoins sont une réalité : on se souviendra de la difficulté à trouver une garantie pour les précurseurs qui avaient installé des capteurs photovoltaïques sur leur toit ! On peut aussi expérimenter, je peux en témoigner, les propositions d’assurance pour des véhicules de collection : derrière la dénomination « spécialiste », souvent des lacunes sinon des pièges… L’instruction d’un sinistre est encore un domaine dans lequel les assurés auraient besoin de conseils avisés, de retour d’expérience, de décodage du jargon de l’Assurance. Doit-on croire sur parole l’assureur qui refuse une garantie, qui la réduit pour insuffisance de justificatifs, qui applique un taux de responsabilité ou d’invalidité à partir d’un barème qu’il est le seul à connaître ? Pourquoi telle clause est-elle réglée d’une façon par une compagnie et autrement par une autre, voire dans la même compagnie mais par des points de vente différents… ? Autant de sujets sur lesquels les internautes pourront échanger et s’informer. Si la prise de contrôle des RS par les clients peut révolutionner le Landerneau de l’Assurance, que dire du management des sociétés ? L’arrivée de la génération Y aux commandes, ou en tout cas à des postes de responsabilité suffisante, et, d’une manière générale le remplacement des effectifs du baby-boom par des générations plus jeunes, va nécessairement bouleverser le mode de fonctionnement des sociétés d’assurance. Quoi de plus hiérarchisé qu’une compagnie d’assurance (peut-être l’armée, mais, dans certains cas, c’est encore à voir !) ? Pendant longtemps, le pouvoir était détenu par la technicité : les techniciens d’assurance dictaient les règles et les meilleurs obtenaient les plus hautes fonctions. Au moins à cette époque, avait-on un chef dont on pouvait attendre quelque chose puisqu’il détenait le savoir technique. L’autorité était conférée par la connaissance et l’expérience. Avec la modernisation de l’Assurance, une nouvelle catégorie d’encadrants est née, celle des managers. Aujourd’hui, ils gèrent l’informatique, demain les RH, après demain la distribution. Autant éviter de leur poser des colles sur le métier ! Pour certains, ils possèdent de réelles qualités de management des équipes ; mais est-ce la majorité ? Rarement la formation –surtout lorsqu‘elle est de nature scientifique, technique – voire polytechnique – leur donne les armes pour gérer de façon dynamique des collaborateurs de plus en plus éduqués, informés et désireux de valoriser leur contribution. Mais une chose est restée : la hiérarchie. On pense là, bien sur, aux grands groupes qui ont longtemps été nationalisés, et au sein desquels il n’a jamais été de mise de mettre en cause la parole

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ou la décision de son supérieur, de la Direction, du Siège, surtout lorsqu’il est à l’étranger. En tout cas officiellement, car l’une des premières choses que l’on m’a apprises lors de mon entrée au GAN comme Directeur Marketing en 1999, c’est qu’il était de la mission des cadres dirigeants de ne pas appliquer les directives de la Direction Générale, seul remède pour que la compagnie survive ! Etonnement ! Comment ce fonctionnement hérité du siècle dernier, voire du précédent, peut-il coexister avec les usages des nouvelles générations pour qui l’échange est naturel, l’information prioritaire et gratuite, le débat incontournable ? Il ne suffit plus de décider pour que les équipes appliquent en réalisant leur tâche individuelle bien cantonnée ; les collaborateurs doivent travailler en mode projet, être émulés, reconnaître en leur chef une utilité indiscutable. Les années qui viennent vont voir changer en profondeur le management des sociétés. Comment ? Mystère car les process sont bien ancrés et relèvent d’une logique dépassée. L’utilisation des RS par l’entreprise la transforme en entreprise ouverte : ce qui se passe à l’intérieur est visible de l’extérieur. Ce qui veut dire que chaque collaborateur est susceptible de communiquer au nom de la marque ; un vrai challenge ! Dernier aspect : l’utilisation des RS pilotée par les assureurs. Laissons-leur le soin d’inventer des usages qui intéressent les internautes et, surtout leurs clients. Mais, néanmoins, une piste semble évidente : la Relation-Client. Depuis l’apparition de ce vocable dans le jargon des marketers de l’assurance (au même moment que celle du CRM), il n’est pas de société du secteur qui ne possède une soi-disant politique de Relation Client. En réalité, hors des actions de prospection sur portefeuille, il n’existe rien ; c'est-à-dire de plan concerté de communication avec le client. Les communications vers les clients concernent quasiment exclusivement des sollicitations pour accroître le nombre de contrats souscrits. Le seul événement-client demeure le sinistre ! Il est loin le temps où les « market-assureurs » rêvaient de mettre en place les techniques alors utilisées par Norwich Union comme, par exemple, le fait de souhaiter un bon anniversaire au client ! Communiquer avec le client de façon privilégiée, lui donner des informations utiles, lui indiquer des bons plans, lui permettre de faire des remarques et suggestions représentent des champs de possibilités immenses pour un usage des RS dans l’Assurance. Au-delà de l’information, l’Assurance y trouverait un moyen de retrouver son âme originelle, à savoir l’entraide en organisant les échanges entre clients rencontrant des difficultés ou simplement faisant face à une situation inédite, experts, techniciens et toutes les bonnes volontés qui existent naturellement au sein des entreprises. L’exemple des sites pour les aidants familiaux dans le cadre de la Dépendance est déjà une première illustration de ce type de réalisation.


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