Download - HMONP Mémoire Ludovic Legrand
Octobre 2014ENSA Paris la VilletteEncadré par Louis GuedjArchitecte tuteur Catherine GuillotCandidat Ludovic Legrand
HABILITATION à LA MAITRISE D’ŒUVREEN SON NOM PROPRE
L’ARCHITECTE ET LA
MAÎTRISE D’OEUVRE URBAINE
Octobre 2014École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris la VilletteEncadré par Louis Guedj / Directeur d’études
Structure d’accueil Diagram architectes urbanistesArchitecte tuteur Catherine GuillotAdresse : 73, rue Vergniaud - 75013 ParisTéléphone : 01 53 62 07 30 / courriel : [email protected] en situation professionnelle du 01.11.2013 au 30.05.2014Soutenance le 06.11.2014
Candidat Ludovic Legrand
« Ce qui donne sens et
signification, qui sauve, si l’on peut
dire, l’architecture, c’est l’articulation
et le dessin de l’espace urbain, des
espaces ouverts et publics ; et d’un
point de vue plus pragmatique,
que c’est le dessin des espaces
publics et ouverts qui doit poser des
interrogations, des problèmes et des
contraintes aux objets d’architecture,
et non le contraire. »
Extrait du texte Villes sans objet : La forme de la ville contemporaine, Bernardo Secchi, Sept 2008
Liste des abréviations
ANRU : Agence Nationale pour le Rénovation Urbaine
A.V.P : Avant Projet
B.E : Bureau d’Études
B.P.U : Bordereau de Prix Unitaires
C.C.T.P : Cahier des Clauses Techniques Particulières
D.E.C.V : Direction de l’Environnement et du Cadre de Vie
d.m.o : Direction de Maîtrise d’Ouvrage
G.P.V : Grand Projet de Ville
M.O.A : Maîtrise d’Ouvrage
M.O.E : Maîtrise d’Oeuvre
O.P.C.U : Ordonancement Pilotage Coordination Urbaine
P.M.R : Personne à Mobilité Réduite
P.P.R.I : Plan de Protection des Risques Innondation
P.P.R.T : Plan de Protection des Risques Technologiques
S.A.R.L : Société A Responsabilité Limité
S.C.M : Société Civile de Moyens
S.P.L.A : Société Publique Locale d’Aménagement
V.R.D : Voirie Réseaux Divers
Accord-Cadre : Un accord-cadre est type de contrat régissant les marchés à passer au cours d’une période sur la base d’un accord de rémunération par type de prestation ou de fourniture.
Ils sont particulièrement adaptés quand les contours d’un projets sont flous et que peuvent apparaitre des missions dites «subsé-quentes».
Partie I
Pourquoi la maîtrise d’œuvre urbaine ? 6
Extension des missions de l’architecte 7
Qu’est-ce que la maîtrise d’œuvre urbaine ? 8
Qu’est-ce que l’intérêt public ? 10
Le Paris du XIXème siècle : l’émergence d’une maîtrise d’œuvre urbaine 12
La maîtrise d’œuvre urbaine dans les 30 glorieuses 15
La D.D.E et l’espace public 18
Le code des marchés publics et la loi MOP 18
Qui est responsable de l’intérêt public ? 20
Partie II : Étude de Cas du projet d’aménagement des espaces de la « grande
transversale Ouest/Est » du quartier du Chemin Vert.
Plusieurs contrats pour un projet 24
Responsabilité publique 25
Intérêt public, vision utilitariste 27
Structure de l’équipe de maîtrise d’œuvre 27
Passation des marchés de maîtrise d’œuvre et de travaux et influence sur le projet 28
Rôle de l’architecte comme « manager » du projet urbain. 29
Partie III : Projet professionnel
Après demain 32
Demain 33
Aujourd’hui 34
Remerciements
Bibliographie
6
Pourquoi la maîtrise d’œuvre urbaine ?
Après un Baccalauréat spécialisé en arts appliqués, motivé par la
richesse et la liberté qu’offrait la conception d’espaces, je me suis
dirigé vers des études d’architecture intérieure aux arts décoratifs de
Paris. Si l’approche sensible et conceptuelle de l’espace, ainsi que
l’ouverture à de multiples disciplines et savoir-faire furent formateurs.
J’étais convaincu que la légitimité du concepteur d’espace se situait
davantage dans sa capacité à construire une dialectique entre espace
intérieur et extérieur ou public et privé que dans le déploiement d’une
créativité formelle sans autre fin que la satisfaction du demandeur.
Les études d’architecture m’ont attiré pour cette raison, car elles
abordent la discipline sans en réduire la complexité intrinsèque.
Produit de la tension entre des intérêts particuliers et l’intérêt général.
Au fil des studios, mon envie de comprendre les deux extrémités de
cette tension m’a conduit à élargir mes préoccupations à l’urbanisme.
Ce questionnement a d’ailleurs abouti à un projet de fin d’études dans
lequel je m’interrogeais sur la capacité d’une infrastructure publique
lourde comme le tramway 7 à métamorphoser une situation péri-
urbaine mono-fonctionelle (un hypermarché et son parking) en situation
urbaine plus équilibrée. Le projet reposant sur une complémentarité
entre les intérêts commerciaux et l’intérêt public matérialisé par des
équipements et un espace public.
C’est cette recherche d’équilibre entre acceptation et approche
volontariste qui intéressa Catherine Guillot et Refki Chelly, co-gérants
de l’agence Diagram. Ces derniers, actifs dans les domaines de
l’architecture et l’urbanisme me proposèrent un poste de chargé de
projet, sur les études urbaines et territoriales et par la suite, sur les
projets de maîtrise d’œuvre urbaine de l’agence.
C’est dans cette dernière et au cours de deux ans que j’ai découvert
l’inertie des processus de conception de la ville, composés d’études
pré-opérationnelles, de faisabilité, de programmation, d’impact, etc.
destinées à informer la décision politique dans l’espoir que l’intention
initiale ne se perde pas dans la succession d’échéances politiques.
Sans faire référence à la multiplicité des parties prenantes au projet,
prestataires intellectuels de l’espace, économie, environnement,
société civile, responsables des services techniques, financeurs, etc.
Ainsi, j’ai d’abord été impliqué dans des études urbaines et schémas
directeurs. Habitué par l’école à des études multi-scalaires laissant
toujours supposé que le fruit de notre réflexion pourrait suffire à
déclencher la mise en œuvre du projet. Il était à ce moment-là difficile
7
pour moi d’appréhender la limite opérationnelle ou prescriptive du
projet. J’apprenais alors le devoir de conseil de l’architecte mais aussi
la limite de celui-ci à partir du moment où il se trouve dans une posture
de prestataire intellectuel et non de maître d’œuvre. A l’inverse, je
travaillais quelques mois plus tard sur un projet de ZAC à Caen et sur
des projets de maîtrise d’œuvre d’espaces publics. J’apprenais à ce
moment-là à traduire une intention générale en détail de nivellement
du sol. L’importance du nivellement dans la définition de l’assise des
espaces publics mais aussi la responsabilité d’un travail ayant pour
finalité une concrétisation physique.
Cette évolution dans les types de missions et les échelles d’intervention
a aiguisé ma conscience de la transversalité du regard de l’architecte,
et, la variation de leurs portées opérationnelles m’ont permis de saisir
la différence de responsabilité qu’impliquaient chaque catégorie de
mission.
Bien que ces activités soient de nature différentes en terme
d’opérationnalité, elles me paraissent maintenant complémentaires et
renforçant la spécificité du regard de l’architecte.
La maîtrise d’œuvre urbaine est donc, pour moi un sujet qui permet de
parler de l’extension des missions de l’architecte, de la manière dont
il valorise ses compétences et sa culture face à d’autres professions
non moins légitime que lui en matière de maîtrise d’œuvre urbaine.
Extension des missions de l’architecte
L’architecture en tant que profession réglementée fait l’objet d’une
protection particulière permettant de réserver l’exercice de cette
activité à des professionnels habilités, compétents et répondant d’un
code de déontologie : les architectes. Dès lors, même si d’autres
professionnels sont capables de concevoir un bâtiment, seuls les
architectes peuvent en être les maîtres d’oeuvres déclarés. Cette
situation est le fruit de l’intervention de la loi (loi sur l’architecture et
sur la maîtrise d’ouvrage publique) et nous voyons aujourd’hui se
fissurer l’ouvrage de l’État qui ne parvient plus à maîtriser les mesures
dérogatoires à la loi MOP et les montages des industriels du bâtiment
qui parviennent à réduire l’autorité de l’architecte. D’autre part, la
maîtrise d’œuvre urbaine semble aux antipodes de cette configuration.
Cette activité ne fait l’objet d’aucune régulation (excepté le code des
marchés publics et dans certains cas, la loi sur la maîtrise d’ouvrage
publique) en faveur d’une profession réglementée. En conséquence, il
s’agit d’un marché « ouvert » aux architectes et aux autres professions
revendiquant des compétences en aménagement.
Plan au 1:10000 du schéma directeur du Corridor Est pour l’agglomération Maubeuge Val de Sambre
Plan au 1:200 du plan des aménagements du secteur centre commercial à Notre-Dame de Gravenchon
8
Il y a donc une concurrence de fait entre plusieurs corps professionnels ;
ingénieurs, des paysagistes, des urbanistes, des économiques,
des environnementalistes, etc. Il s’agit donc d’un environnement
concurrentiel dans lequel il ne convient pas uniquement de s’interroger
sur ces qualités en tant qu’architecte mais sur l’intérêt même d’être
architecte pour répondre à une demande.
Cette situation, attise mon intérêt car, si elle représente une fragilité
pour la profession des architectes héritière d’une tradition de
désintéressement et de service de l’intérêt général n’ayant pas
favorisé le développement d’une culture entrepreneuriale forte. La
maîtrise d’œuvre urbaine représente néanmoins un territoire neutre
où les architectes ont la possibilité de définir leur double identité
d’architectes et d’entrepreneurs en réfléchissant à leur culture fondée
sur l’intérêt général, la responsabilité et une déontologie particulière.
Enfin, cette activité non réglementée et ouverte à des cultures
professionnelles variées (architectes, urbanistes, ingénieurs,
paysagistes) interroge également et très profondément les savoir-faire
et les méthodologies de conception de la ville. Mais si les pratiques
restent mouvantes et à définir, le cadre, plus rigide nécessite lui aussi
d’être précisé notamment sous la pression de forces comme la
nécessité d’accomplir la transition énergétique, le désir d’intégrer la
société civile aux processus de fabrication de la ville, la modification
du rôle des collectivités, etc.
Ce mémoire sera donc conduit par ces trois thématiques ;
D’une part, l’usage de la culture professionnelle de l’architecte et
de ses savoir-faire spécifiques dans le cadre de la maîtrise d’œuvre
urbaine.
D’autre part, le positionnement en concurrence, partenariat ou
intégration des autres professions dans ce domaine.
Et enfin, la contribution permanente à la réinvention du cadre de la
maîtrise d’œuvre urbaine en fonction des grandes préoccupations
émergentes et à partir de la critique de l’organisation actuelle de ce
cadre.
Qu’est-ce que la maîtrise d’œuvre urbaine ?
Avec une définition termes à termes de l’expression « maîtrise d’œuvre
urbaine » on obtient une signification composée de «maîtrise» qui
suppose l’exercice d’un contrôle sur une «œuvre» elle-même définie
comme une série d’actions orientées vers une fin (petit robert 2012).
9
Ces deux termes associés expriment donc l’idée du contrôle d’une
série d’actions, en d’autres termes d’un processus orienté vers la
concrétisation d’un projet.
L’expression « maîtrise d’œuvre urbaine » désigne donc un processus
traversant différentes phases de la conception à la mise en œuvre
d’un projet urbain. Il participe d’une tradition intellectuelle française qui
considère la ville comme un objet de conception au même titre qu’un
édifice ou qu’un meuble. La différence se situe dans les instruments
de production de la ville qui, du fait de leur complexité varient selon les
lieux, les époques et la culture urbaine. Ainsi, aujourd’hui cohabitent
des conceptions de la ville polarisées par l’immobilier, le paysage,
l’espace public, ou encore sur l’intelligence technologique développée.
Cette activité, selon la manière de l’approcher sollicitera donc différents
outils projectuels, réglementaires, financiers et politiques. Le maître
d’œuvre urbain devra donc être capable de faire le lien entre des
intentions politiques, économiques et sociales et amorcer un projet
tangible qui mettra en lien cet ensemble de contrainte et intégrera les
changements internes ou externes au projet survenant dans le temps
de sa mise en œuvre. Le maître d’œuvre urbain est donc le lien entre le
projet en gestation et un résultat spatial, il est donc responsable de la
définition d’un cadre de faisabilité et les conditions de la construction
des bâtiments et espaces publics qui composeront le projet urbain
(alignement, nivellement, hauteur, volumétries, densités, matériaux,
programmation, etc.) sans avoir la responsabilité de construire.
C’est cet aspect qui distingue la maîtrise d’œuvre urbaine et la maîtrise
d’œuvre de construction des espaces publics qui est une mission
régulièrement imbriquée dans la précédente.
Enfin, la maîtrise d’œuvre urbaine semble être une activité encore
insuffisamment définie, entre autres, elle ne bénéficie pas de définition
légale. C’est probablement la raison qui lui vaut d’être assimilé en
décomposition des éléments de missions à la maîtrise d’œuvre
architecturale. Cette indéfinition, ne doit pas être prise pour argent
comptant, bien au contraire, elle doit stimuler tous les acteurs
concernés par cette question à proposer des définitions, modes
opératoires, composition des missions à l’image de la MIQCP qui,
dans sa publication sur la maîtrise d’œuvre urbaine en fait la définition
suivante «démarche intellectuelle aboutissant à un projet partagé et
des modes opératoires crédibles de mise en œuvre». Une définition
ouverte qui tend à exprimer la singularité de la maîtrise d’œuvre
urbaine vis-à-vis de la maîtrise d’œuvre architecturale.
10
Qu’est-ce que l’intérêt public ?
L’expression « intérêt public » désigne un ensemble de valeurs et
d’objectifs qui sont partagés par l’ensemble de membres d’une
société. Cette notion décrit donc une finalité de l’État sans en fixer le
contenu exact.1
Si cette notion est explicitement convoquée dès les premières lignes
de la loi sur l’architecture de 19772, elle n’est pas directement utilisée
pour définir les missions de la maîtrise d’œuvre urbaine. Ainsi nous
supposerons sans user d’une métonymie abusive que ce qui vaut
pour l’architecture, vaut aussi pour la maîtrise d’œuvre urbaine.
A la différence que la loi sur l’architecture précise en quoi l’architecture
est d’intérêt public et qu’il nous revient donc d’adapter les critères à
la maîtrise d’œuvre urbaine. Cela invite à une réflexion critique sur la
notion d’intérêt public qui peut faire l’objet d’ambiguïtés.
Il existe par exemple, deux grandes approches de l’intérêt public ;
celle dite « volontariste » à laquelle s’oppose une conception dite
« utilitariste »1. La conception volontariste suppose un intérêt commun
surplombant tous les intérêts individuels alors que la conception
utilitariste considère l’intérêt de chacun pris individuellement.
Le problème principal qui résulte de cette opposition est la difficulté à
reconnaître la légitimité d’une interprétation sur l’autre. Ainsi, l’architecte
– maître d’œuvre urbain se retrouve souvent dans des situations
ou les approches « utilitaristes » se superposent aux injonctions
« volontaristes » comme ce fut le cas à plusieurs reprises au cours
de mon expérience chez Diagram. La situation la plus caricaturale
à cet égard s’est présentée durant la préparation des études de
projet en phase de maîtrise d’œuvre des espaces publics à Notre-
Dame de Gravenchon. Il s’agissait alors, dans le but de revaloriser
les espaces urbains du centre-ville de redessiner une avenue aux
altimétries fortement irrégulières. Le projet est approuvé par la
mairie et l’aménageur, à condition que le projet prévoie l’accessibilité
P.M.R de l’ensemble des locaux commerciaux dont les bâtiments
sont pourtant voués à démolition. Afin de ne pas se mettre à dos le
moindre commerçant, l’aménageur reporte ainsi ses problèmes de
phasage d’opérations « tiroirs » sur l’équipe de maîtrise d’œuvre qui
doit maintenant concevoir, des ouvrages provisoires coûteux (rampes
1 Réflexions sur l’intérêt général, rapport public du conseil d’état : http://www.conseil-etat.fr/Decisions-Avis-Publications/Etudes-Publications/Rapports-Etudes/Reflexions-sur-l-interet-general-Rapport-public-1999
2 L’architecture est une expression de la culture. La création architecturale, la qualité des constructions, leur insertion harmonieuse dans le milieu environnant, le respect des paysages naturels ou urbains ainsi que du patrimoine sont d’intérêt public.
11
et murets de soutènements) pour permettre l’accès des personnes
handicapées aux commerces qui n’étaient déjà pas aux normes.
Ainsi, la protection de l’intérêt d’une somme de personnes (les
commerçants) est protégé au dépends d’aménagements plus chers,
de travaux en deux fois et des reprises d’études.
Sans dévaluer l’importance du respect des intérêts de chacun,
on assiste parfois à des situations où les intérêts de quelques-
uns vont infléchir un aménagement urbain pourtant destiné à une
« communauté » bien plus large.
Néanmoins, on peut à l’heure où l’intérêt public soutenu par les
politiques semble parfois se résumer à l’intérêt de chacun. Myopie qui
revient à rapporter tous les critères de l’intérêt public sur une échelle
économique et immédiate. A l’image de l’exemple où la protection
de l’activité des commerçants du centre-ville de Notre-Dame de
Gravenchon devient une cause supérieure au soutien d’un projet
urbain. On peut donc constater une crise de confiance dans l’action
publique et même dans la notion même d’intérêt public au sens
volontariste.
De mon point de vue, une telle crise est absolument nécessaire et
devrait même être l’occasion de deux changements majeurs.
Le premier concerne la mise au centre de l’intérêt public de la cause
environnementale. En adaptant les outils pour qu’elle soit mise en
œuvre dans ses dimensions techniques autant que culturelles et
sociales.
La seconde concerne l’intégration de manière profonde de la société
civile. Cela implique une révision très profonde de la position des
politiques dans le projet urbain et surtout des tendances à déléguer à
des sociétés privées.
Si le premier de ces deux enjeux à quelques chances d’aboutir y
compris au niveau légal, je crains que l’élaboration de la ville avec les
citoyens ne soit quelque chose de très lointain encore et qu’il ne faille
aborder cet objectif sous d’autres angles.
Plan du secteur du centre commercial à Notre-Dame de Gravenchon, en haut la rue et son interface avec les bâtiments existants.En bas, le projet en phase 2 (après construction des immeubles de logement)
12
Le Paris du XIXème siècle : l’émergence d’une maîtrise d’œuvre
urbaine
La période des grands travaux de Paris sous la direction du préfet
Haussmann constitue la première période où la fabrication de l’espace
public et de la ville présente un souci de qualité dans son détail et sa
généralité. C’est aussi l’époque où la municipalité s’attache à lier une
recherche esthétique de magnificence et un projet de modernisation
et d’assainissement de l’espace urbain.
Imbrication des échelles, du flux au pas.
L’intervention des services d’Haussmann se fait à deux échelles. D’une
part, il s’occupe de dessiner la rue selon les critères hygiénistes et de
confort élaborés par les ingénieurs des ponts et chaussées dans les
années 1830 ; d’autre part, il envisage la ville comme un ensemble qui
doit « fonctionner » c’est-à-dire permettre de relier des points éloignés
avec des déplacements efficaces. Cette approche de la ville sous
deux échelles emboitées renvoie au rôle du maître d’œuvre urbain
dont les prescriptions sont à définir relativement à une analyse d’un
ensemble plus large. La ville est « mise en ordre » et doit devenir un
outil productif : Haussmann utilise l’argument de « l’investissement
productif ». Pour lui, connecter les quartiers et hiérarchiser les voies
permet aux entrepreneurs, inventeurs et financiers de la ville de ne
plus être entravés par l’inertie des rues inconfortables, dangereuses,
insalubres et congestionnées. La ville est pensée comme un support
de l’économie productive.
Cette conception de l’emboitement des échelles et des enjeux à la
fois stratégiques et opérationnels est tout à fait nouvelle à l’époque
et donne les clefs d’une manière de concevoir la ville encore valable
aujourd’hui.
La structuration des services de la ville pour une conception unifiée de
l’espace urbain.
Une des premières actions menées par Haussmann concerne la
réorganisation des services sous un seul nom le « service des grands
travaux » lui-même distribué dans un service des promenades et
plantations dirigé par Adolphe Alphand et un service des Eaux et
égouts dirigé par Eugène Belgrand qui auront sous leurs ordre une
centaine d’ingénieurs3. Ces services se répartissent la conception des
réseaux, des jardins, des matériaux de voirie ou du nivellement de la
voirie. Cette coordination permettra à ces services de produire une
voie et un espace d’une conception unifiée en plan et en coupe. La
3 Dans La fabrication des rues de Paris au XIXè siècle, Cahier de la recherche urbaine
Coupe type d’une rue, montrant le profil de voie, les réseaux et le mobilier urbain. Extrait de Promenades de Paris, Adolphe Alphand
Plan du projet de Paris incluant les percements et le réseau de parcs et jardins. Extrait de Prome-nades de Paris, Adolphe Alphand
13
réunion de ces services permettra de tenir une cohérence dans l’action
de modernisation et surtout de capitaliser un savoir-faire important et
une capacité d’innovation.
En effet, les techniques de nivellements, les profils de voies (et leur
coupe complétée par les réseaux d’adduction d’eau potable, de
gaz et d’assainissement), les principes de nettoyage de la rue, la
généralisation d’un vocabulaire de mobilier urbain et des trottoirs
seront les moyens essentiels de la modernisation de l’espace public
et de l’intégration de la notion de confort de l’espace public.
La rue est alors envisagée comme un objet technique et la ville comme
une machine. Si cette conception accorde une place décisive aux
ingénieurs, elle promeut une pensée systémique des organes de la
ville. L’organisation des services de conception de l’espace urbain
révèle donc la prise en compte d’un problème considéré comme
rationnel et sa résolution par l’accomplissement d’une synthèse des
contraintes.
Il suffit de lire la liste de compétences sollicitées pour un marché de
maîtrise d’œuvre architecturale ou urbaine pour constater que la
maîtrise d’ouvrage d’aujourd’hui est héritière de cette vision rationaliste
de l’espace urbain.
L’intérêt public du point de vue hygiéniste
Nous avons vu plus haut le caractère fluctuant de la notion d’intérêt
public. A cette époque, il était urgent de réduire les causes de mortalités
liées à l’insalubrité des quartiers. L’action publique urbaine a donc
été dirigée vers l’assainissement et l’aération des vieux quartiers. Ces
exigences nécessitaient la percée de nouvelles rues, de changement
des gabarits des rues et la démolition d’un grand nombre d’immeubles.
Par ailleurs, ces importants travaux s’accompagnaient des réseaux
d’adduction d’eau potable et d’évacuation des eaux usées. Innovation
urbanistique et technique fonctionnait alors ensemble au service de
l’intérêt public.
Bien que cette expression n’appartienne pas au programme énoncé par
Napoléon III au préfet Haussmann, il s’agit bien de l’accomplissement
de l’intérêt public par le biais de l’urbanisme.
Cohérence, embellissement et sécurité
L’autre motivation de la mise en chantier des rues de Paris résidait dans
la volonté d’embellir la ville et de lui donner davantage de cohérence et
d’unité. Parallèlement, cela servait un objectif de maintien du pouvoir
Plan, Coupe et éléments de mobilier du boulevard Richard Lenoir. Extrait de Promenades de Paris, Adolphe Alphand
14
par le contrôle de l’espace public. Ainsi, on retrouve la nécessité, à
défaut de respecter un paysage, de le constituer permettant de s’y
orienter et de lui donner un caractère. On peut également entendre
ces éléments comme relevant de l’intérêt public.
L’approche financière des grands travaux
Le financement des travaux était réalisé par un montage dans lequel
la ville empruntait de l’argent aux banques qu’elle remboursait en
cédant les terrains avec les droits à construire. Ces terrains faisaient
l’objet d’expropriation avec indemnisation et subissaient une plus-
value après l’engagement des travaux d’élargissement. La banque
récupérait alors une grosse partie de l’argent prêté et pouvait construire
un immeuble soumis au respect de règles fixées par les services de
la ville et respectant les prescriptions de gabarit. Le règlement tient
en dix articles4 qui fixent les conditions d’expropriation, alignement,
nivellement, raccordement à l’égout, permis de bâtir, ravalement
décennal, gabarit et les frais de premier pavage. Véritable outil
d’urbanisme opérationnel ce document faisait office de contrat entre
propriétaires, services de la ville et entrepreneurs.
Ces deux aspects montrent le caractère décisif des procédures
opérationnelles dans la fabrication de la ville. Elle installe la vocation
d’ordonnateur de la puissance publique qui doit encadrer les activités
des personnes de droit privé. On constate que de nos jours, ces
préoccupations ont toujours la même acuité, la subordination du
privé au public est toujours une chose difficile à imposer. Malgré
les reproches qu’on peut leur faire, notamment sur la monotonie
d’une ville largement érigée grâce aux principes d’une spéculation
immobilière importante, les grands travaux d’Haussmann parviennent
à développer une logique efficace de modernisation profonde de la
ville.
Le bon usage de l’argent public
Depuis 1839, la ville a dissociée la fourniture de pierre des entreprises
de travaux. Cette opération permet à la ville de maîtriser l’évolution
des prix. Ainsi, elle fournit aux entrepreneurs les matériaux nécessaires
à leurs travaux. Cette disposition relève d’une attitude de protection
et de dépense raisonnée de l’argent public. Nous retrouverons cette
préoccupation plus tard.
4 Texte du décret d’application de la loi du 26 Mars 1852 relatif aux rues de Paris consultable : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6481897r/f5.image
15
Le rôle de l’architecte dans la planification urbaine des services
d’Haussmann
L’administration Haussmannienne dominée par les ingénieurs accorde
tout de même une place aux architectes, ils sont employés au service
des plans de Paris, en effet, leur tâche est de tracer les nouvelles voies et
leur nivellement. Leurs plans définissaient également le lotissement des
terrains en bordure des nouvelles voies. Ainsi, l’architecte Deschamps
avait en charge le dessin et la forme des parcelles constructibles ainsi
que le tracé des rues. La fonction de ces architectes était de mettre
en œuvre la géométrie du plan de Paris. Les architectes s’employaient
également à définir les rapports de hauteur des bâtiments avec la
largeur des rues.
L’architecte dans les services de Haussmann n’est maître d’œuvre
urbain qu’au titre d’une conception géométrique de l’espace,
sa principale compétence est encore sa maîtrise du dessin de la
conception géométrique et sa connaissance des nécessités en
surface et en géométrie de parcelle pour édifier.
Le départ d’Haussmann laissera un grand chantier à poursuivre, des
services municipaux restructurés et un savoir-faire de l’espace public
et de la voirie détenu par un corps professionnel légitime dans la
plupart des travaux d’aménagement de la ville; celui des ingénieurs
des ponts et chaussés. Ce modèle initié à Paris se diffusera en France
et dans certaines villes étrangères.
La maîtrise d’œuvre urbaine dans les 30 glorieuses
Les années d’après-guerre nécessitent une vaste reconstruction
des pays, en France, la formule du grand ensemble se développe
rapidement ; Elle permet de reloger massivement les citoyens sous
une forme rationnelle et rapide à mettre en œuvre. Les théories se
succèdent pour tenter de former une pensée capable de produire une
ville humaine et efficace.
La région parisienne aura également besoin de se renouveler et
d’augmenter sa capacité d’accueil en modernisant d’anciens secteurs.
Les quantités qui sont appelées à être construites engendrent de
nouveaux quartiers. Se pose alors la question de leur organisation.
Un personnage fait son apparition dans les années 60 et deviendra le
représentant d’un « urbanisme vertical » substituant à la ségrégation
horizontale des fonctions recommandé par la charte d’Athènes une
ségrégation verticale. Inventant ses propres outils méthodologiques
de programmation et de composition. Le quartier des Olympiades, Paris 13
Superposition du tracé de percement de l’avenue de l’Opéra et du parcellaire existant
16
De nouveaux outils méthodologiques et opérationnels
Michel Holley est architecte, il travaille au début de sa carrière aux cotés
de Raymond Lopez et développe très rapidement une expérience des
projets de quartiers comme la ZUP (Zone d’urbanisation prioritaire)
du Val Fourré à Mantes-la-Jolie ou encore le quartier du Front de
Seine. Dans ces années de forte confiance et de grands besoins,
Holley observe que l’importance des opérations qui lui sont confiées
est en décalage avec la légèreté avec laquelle les programmes
sont composés. En effet, l’époque ne connaît pas l’existence de
programmistes urbains ou de compétences équivalentes chez les
maîtres d’ouvrage. C’est donc à l’architecte d’évaluer les compléments
programmatiques à apporter aux commandes souvent lapidaires.
Pour ce faire, Michel Holley développera un outil nommé
« l’Urbanigramme », un outil synthétique qui permet de visualiser les
relations entre l’emprise au sol, le nombre de niveaux, la quantification
des programmes complémentaires (écoles, parkings, commerces…)
et les densités générées.
Cette recherche témoigne d’une aptitude à comprendre une situation
d’un type nouveau et à s’adapter à un certain manque méthodologique
de la part des commanditaires sans pour autant abandonner une
recherche de qualité.
L’autre outil de Michel Holley est le plan d’ordonnancement, ce
dernier permet d’exprimer des intentions de compositions entre les
pleins et les vides suffisamment abstraites pour rester ouvertes. Cet
outil est indispensable pour assumer sa fonction d’architecte en chef
notamment du secteur Italie (entre la place et la porte) à Paris. En effet,
le plan d’ordonnancement permet de laisser des intentions claires aux
financeurs et des lignes directrices sans pour autant figer un projet
avec un plan masse, qui à ce niveau d’études peut être considéré
comme très hypothétique.
Outils adéquat au type de procédure qu’est la ZAC ; faisant intervenir
des acteurs publics et privés. Il est un document assez robuste pour
encaisser les annulations et des changements d’orientations.
Par ces différents outils, Michel Holley s’efforcera de développer des
outils transmissibles permettant de comprendre et d’exploiter les
interactions entre les données quantitatives et des critères qualitatifs.
Il contribue ainsi à la définition des outils et méthodologies attachées
au développement d’une discipline encore peu définie.
Urbanigramme développé par Michel Holley
Plan d’ordonancement et sa légende
17
L’invention de la ZAC comme procédure de financement de la ville
La ZAC (Zone d’aménagement concerté) est mise au point en 1967.
Sa première mise en œuvre sera l’opération d’aménagement des
Olympiades succédant aux études du secteur Italie. La ZAC permet
contrairement à la ZUP qui la précède, de lancer des opérations
d’aménagement de quartiers en faisant entrer des acteurs privés dans
le montage financier. Pour la ZAC des Olympiades, il s’agit d’un accord
sur plan masse dans lequel le promoteur s’engage à réaliser le projet
décrit contre un apport en équipement ou en terrain de la part de la
puissance publique. Dans ce cas, la participation de la ville consiste
à autoriser le propriétaire du terrain –la Sncf- à construire la parcelle.
Ce dernier, satisfait d’avoir l’opportunité de rentabiliser sa parcelle
par un projet lucratif, accepte des conditions d’équipements et de
construction de logements sociaux. Cette opération, très coûteuse
(puisque la S.N.C.F posait comme conditions à la construction
du terrain la préservation de la gare et la création d’espaces de
stockage en vue de redévelopper cette gare pour l’acheminement de
marchandises dans Paris) n’aurait sans doute pas pu voir le jour sans
le partenariat entre la ville (qui a des besoins en logements) et l’acteur
privé (qui souhaite rentabiliser un site) sans cette procédure assez
souple. Néanmoins, on peut contester la procédure dans la mesure
où la force des intérêts privés ne permet pas toujours de mener le
projet à terme, le financeur se réservant la possibilité de « remettre à
plus tard » les besoins en équipements. On peut notamment citer la
piscine qui ne vit jamais le jour.
La mise en œuvre d’un urbanisme architectural et la dissociation avec
l’espace public
Bien loin des méthodes et « traditions » développées par Haussmann,
l’urbanisme vertical de Michel Holley n’est plus un urbanisme d’espace
public et de structure de la ville. Il est un urbanisme de programmation
en couches et de modulation de l’échelle d’un programme trop
lourd pour ne pas faire l’objet de stratagèmes de diminution de
l’effet de masse. Là où les architectes s’inséraient dans une trame
sous Haussmann se soumettant à des règles de banalisation de
l’architecture au profit de l’espace public, l’architecte qu’est Michel
Holley compose les masses tout en exhibant leur modernité. Il crée
l’urbanisme parisien qui satisfait les besoins d’une époque mais le
fait au dépend du caractère public de l’espace. En effet, même si cet
urbanisme génère des surfaces de dalles importantes ouvertes aux
usages des piétons qui y sont protégés du flux automobile, il reste
malgré tout un espace privé d’usage public. Sa situation en toiture
Coupe sur le principe de la dalle des Olympiades
Plan masse du quartier des Olympiades, Paris 13
18
d’un complexe logistique, son caractère bâti, sa nature privé et la
rupture avec l’espace public de la ville et le sol naturel opèrent une
ségrégation des usagers de cet espace, limitant ainsi le caractère
public de l’espace.
La D.D.E et l’espace public
Parallèlement à cette période où les architectes prennent la
responsabilité de construire à la fois quartiers et espace public liés
des ZAC, les services de la D.D.E (Direction départementale de
l’équipement) successeurs du service des Ponts et chaussées
occupent parmi d’autres des fonctions de maîtres d’oeuvres d’un
grand nombre d’aménagements publics.
Les trente glorieuses sont les années d’investissements très
importants dans la politique d’infrastructures de l’État français. Le
pays a besoin de construire et moderniser son réseau routier, ainsi le
ministère de l’équipement a besoin de structures localisées au niveau
des département relayant les décisions d’intérêt publiques prises au
niveau « central ». Les D.D.E seront les instruments de cette politique,
ainsi ils exécuteront en tant que maîtres d’oeuvres l’ensemble des
aménagements routiers nationaux et départementaux. En bordure
de ces missions, ils auront également la mission de répondre aux
commandes directes des communes nécessitant des aménagements
d’espaces publics ou de voirie.
Issue du service des ponts et chaussées c’est donc une vision
technicienne de l’aménagement qui est à l’œuvre. Cette dernière,
dépositaire de l’intérêt public par nature (émanation ministérielle)
prouve son efficacité et sa compétence technique. De plus, il est
une garantie de qualité d’exécution et bénéficie de la meilleure des
assurances ; celle de l’État.
Pourtant, un constat s’impose sur la banalisation des paysages
urbains de nombreuses communes. La culture technique n’est pas
forcément sensible à la recherche d’identité dont de nombreuses
communes éprouvent le besoin après les trente glorieuses et l’euphorie
de la modernité. Alors que la désindustrialisation du pays s’engage,
les communes vont tenter de retenir les populations, valoriser leur
paysage urbain et réorienter leur économie vers le tourisme. Ces
changements économiques et culturels se dérouleront sur un fond
d’intégration européenne qui dans les années 2000 exigera l’ouverture
à la concurrence des marchés d’aménagements urbain.
19
Le code des marchés publics et la loi MOP
Après avoir évoqué deux étapes importantes de la distribution des
rôles et organisations de la maîtrise d’œuvre urbaine française,
étudions à présent le mode d’organisation effectif aujourd’hui.
La maîtrise d’œuvre urbaine est aujourd’hui soumise au code des
marchés publics mais seule les missions de construction d’espaces
publics (aussi appelés les travaux d’infrastructure) sont soumis à la loi
sur la maîtrise d’ouvrage publique. En rupture avec les exemples de
l’urbanisme parisien du XIXème siècle et le fonctionnement des D.D.E,
une de ses caractéristiques est qu’elle prévoit la dissociation de la
maîtrise d’œuvre et la maîtrise d’ouvrage.
Elle institue également des règles de mise en concurrence et des
seuils à partir desquels les concours anonymes sont imposés. L’esprit
de la loi est de garantir une efficacité de la commande publique
et une impartialité censée laisser des chances égales à chaque
maître d’œuvre et assurer les meilleures prestations au prix le plus
avantageux. La loi sur la maîtrise d’ouvrage publique est donc en un
certain sens une protection de l’intérêt général en se prémunissant
contre des attributions « de complaisance » puisqu’anonymes et en
garantissant une qualité de prestation simultanément à une utilisation
raisonnée de l’argent public. Enfin, la loi MOP assure une certaine
normalisation du processus de maîtrise d’œuvre avec des éléments
de missions clairement identifiés et définis.
A ce titre, la maîtrise d’œuvre urbaine est dans une situation hybride,
puisqu’au sens de la loi MOP elle n’est pas vouée à réaliser un
ouvrage. La maîtrise d’œuvre urbaine de type conduite d’opération
d’aménagement comme une ZAC n’est donc pas encadrée de la
même manière, et même si elle bénéficie d’une maîtrise d’ouvrage
et de maîtres d’oeuvres, elle correspond, au regard de la MOP à une
prestation intellectuelle.
Cela a plusieurs conséquences ; sur les modes de passation des
marchés, sur l’univers concurrentiel, le mode de rémunération, la
définition des éléments de missions et enfin sur la responsabilité.
En effet, la maîtrise d’œuvre d’un projet urbain même relevant du
seuil le plus élevé (≥207 000 € pour les collectivités territoriales)
ne sera pas soumis à une obligation de concours contrairement à
un marché de maîtrise d’œuvre d’architecture ou d’infrastructure.
L’exclusion de la maîtrise d’œuvre urbaine de la loi MOP permet
également à n’importe quel groupe professionnel lié aux questions
d’aménagement de prétendre exécuter un marché de maîtrise d’œuvre
20
urbaine (paysagistes, ingénieurs, urbanistes, maîtres d’œuvre non-
architectes, etc.). En termes de rémunération, celle-ci ne peut pas
être calculée sur le montant des travaux puisqu’ils ne seront pas sous
la responsabilité de l’équipe de maîtrise d’œuvre du projet urbain.
Le mode de rémunération tient donc compte du temps à passer
sur l’étude. Enfin, l’ambiguïté réside dans le fait que les missions
de maîtrise d’œuvre urbaine ne bénéficient pas d’une définition des
éléments de mission aussi précis que ceux donnés par la MOP car
la définition du projet urbain et sa coordination ne font pas appel
aux mêmes configurations que la maîtrise d’œuvre architecturale.
Cependant, les missions de maîtrise d’œuvre urbaine sont souvent
définies sur la base des missions de la loi MOP. Ainsi il n’est pas rare
de retrouver les éléments A.V.P, PRO, A..C.T, D.E.T dans une mission
d’urbaniste coordonnateur de ZAC.
La maîtrise d’œuvre urbaine est donc un marché particulièrement
concurrentiel qui n’est pas figé dans un processus normalisé, cette
particularité par rapport à l’architecture peut être vue comme une force
mais aussi comme une faiblesse. En effet, les architectes n’y sont pas
avantagés par la loi mais bénéficient indéniablement d’avantages en
termes de maîtrise des méthodologies et outils de projet, nécessaires
à l’exécution de missions de maîtrise d’œuvre urbaine.
La maîtrise d’œuvre urbaine reflète donc un aspect projectuel très
stimulant, celui de pouvoir développer une autre méthodologie, ou
plutôt de pouvoir l’enrichir en fonction de situations urbaines ou
de programme invariablement spécifique et singulier. A l’image de
l’urbanigramme développé par Michel Holley dans son effort de définir
des méthodes d’urbanisme opérationnel.
Par ailleurs on peut envisager que l’émergence de l’intégration de
la société civile et du développement durable dans le projet urbain
aboutissent un jour à des processus radicalement différents de
définition du projets que ceux qui servent aujourd’hui régulièrement de
base aux marchés de maîtrise d’œuvre urbaine. En effet, la définition
du projet par « augmentation scalaire » de la représentation n’est
probablement plus très pertinente au regard des deux grands facteurs
de changements évoqués plus haut.
On rappellera la définition de la MIQCP qui reste à ce titre assez
ouverte quant au rôle qui incombe à la maîtrise d’œuvre urbaine.
«Démarche intellectuelle aboutissant à un projet partagé et des modes
opératoires crédibles de mise en œuvre»
21
Qui est responsable de l’intérêt public ?
Nous avons vu précédemment les contributions respectives des
grands travaux d’Haussmann, de l’urbanisme vertical, des services
de la D.D.E et les clarifications qu’y à introduit le code des marchés
publics et la loi sur la maîtrise d’ouvrage publique. Ces éléments nous
ont montrés des approches contrastées des modes de production de
la ville et de son espace, mettant en avant plan tour à tour ingénieurs,
politiques, financiers et architectes.
L’encadrement de la maîtrise d’œuvre urbaine est toujours allée vers
une exposition de plus en plus importante au marché et de moins en
moins d’intégration des compétences au sein de la puissance publique.
Ces choix imposés par un système économique et juridique ont un
effet bénéfique en termes de diversité des approches et de liberté
de conception mais ces avancées sur les plans méthodologiques
et culturels peut cacher des limites à la mise en œuvre de projets
confrontés à l’inertie et aux segmentations des responsabilités
politiques. En effet, toutes les périodes où la puissance publique
intervenait directement, la responsabilité politique était confondue
avec la responsabilité culturelle et juridique. Aujourd’hui, alors que
les responsabilités juridique et décennale pèsent sur une équipe de
maîtrise d’œuvre, la responsabilité politique semble se diluer. Or, sans
la responsabilité collective (chacun la sienne) les chances d’un projet
urbain de s’illustrer dans par sa qualité sont minimes.
Ma mise en situation professionnelle ne m’a pas permis de concevoir
un projet urbain sans avoir en perspective la maîtrise d’œuvre de ses
espaces publics. C’est peut-être pour cette raison que je perçois
aujourd’hui la conception de l’espace public non pas comme un
« plus » ou comme une mission de paysagiste ou d’ingénieur mais
bien comme une mission d’architecte par laquelle on accède au
sentiment de responsabilité.
Cette épreuve me aussi bénéfique à la pratique de la maîtrise d’œuvre
urbaine que l’est le suivi de chantier par rapport à la conception
architecturale. Acte par lequel on prend conscience des difficultés,
des obstacles et du réel de la mise en œuvre.
Acte qui nous imprime la mesure de la conception mais surtout de ce
qu’elle implique.
22
Réaménagement de la transversale Est-Ouest du Quartier du Chemin Vert à Caen
Maîtrise d’ouvrage : Ville de Caen
Maîtrise d’œuvre : Ingé-Infra B.E V.R.D - Mandataire
Diagram architectes urbanistes - co-traitant
Surface : 5 Hectares
Budget : 535 000 € 1ére tranche
Année : 2013 - 2014
Livraison : Septembre 2014
Lieu : Quartier du Chemin vert, Caen (Calvados)
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Étude de Cas du projet d’aménagement des espaces de la
« grande transversale Ouest/Est » du quartier du Chemin Vert à
Caen.
Le quartier du Chemin Vert est situé au Nord-ouest de Caen. Le quartier
regroupe avec 9000 habitants, 10% de la population caennaise1
et souffre d’une mauvaise image, en partie due aux ensembles de
logements sociaux collectifs dans la partie Nord. Le quartier fait l’objet
d’un projet de développement territorial avec un volet de créations
rénovations d’équipements et un volet de rénovation d’espaces
publics. Une équipe d’architectes-urbanistes avait travaillé sur un
schéma directeur d’espaces publics ainsi qu’un cahier de prescription
urbaines portant sur l’ensemble du périmètre. Cette étude n’ayant
pas été jugée satisfaisante, la ville de Caen a ainsi effectué une
nouvelle consultation destiné à fixer un parti d’aménagement des
espaces publics et à les réaliser. L’agence Diagram en co-traitance
avec une B.E V.R.D a obtenu cette mission en Novembre 2012 sur
la proposition de étudier le rôle des espaces publics en fonction de
plusieurs grandes hypothèses concernant des espaces situés entre la
rue de Champagne et la rocade mais aussi en fonction des hypothèses
de restructuration du groupe scolaire Authie Nord et du devenir de
l’espace laissé par la fermeture du collège Jacquard respectivement à
l’extrémité Ouest et au Sud du site.
Le secteur d’étude est composé de huit tours de 12 et 14 étages.
Orientées Nord-Est / Sud-Ouest, assemblées par couple sur les
côtés adjacents de parkings enterrés. La rue du Chemin Vert est
perpendiculaire à cette disposition linéaire et rejoins la rocade de
Caen située à l’arrière en séparant quatre tour en partie Est et quatre
en partie Ouest. Cette phase d’étude s’applique à l’ensemble de la
séquence des huit tours. Le travail consiste à envisager les possibilités
de densification du foncier libéré et des partis d’aménagements
Rapidement, la mission prend la forme d’un projet définit par des
« invariants » faisant l’objet d’un consensus avec la maîtrise d’ouvrage
et d’un ensemble de secteurs sur lesquels nous projetons plusieurs
scénarios d’évolutions, lorsqu’ils ne sont pas programmés ou plusieurs
partis d’implantation lorsque le programme à venir est connu. Le parti
d’aménagement se fonde sur une altérité première entre un espace
calme de promenade caractérisé par l’épaisseur et la qualité végétale
existante et des espaces récréatifs, différenciés et minéraux aux
pieds des tours. Ces deux univers seront reliés par des connexions
diagonales représentant les raccourcis entre ces différents espaces.
1 Article dans l’hebdomadaire tendance ouest http://www.tendanceouest.com/actualite-28772-chemin-vert-un-second-souffle.html
Situation du quartier du Chemin Vert au Nord-Ouest de la ville de Caen
Le quartier se compose de 4 couples de tours réu-nies autour d’un parking souterrain, l’ensemble est coupé en son centre par la rue du Chemin Vert.
24
Enfin, le long de la promenade seront installés quelques « salons
d’extérieurs » permettant d’accueillir des « usages de convivialité ».
Cette première étude de diagnostic et de programmation a permis
de mettre en exergue la complémentarité d’usages entre les espaces
publics de la ville et les espaces non plantés induits au-dessus des
parkings souterrains.
Le regard de l’architecte a permis de définir un parti d’aménagement
reposant sur les contraintes physiques de la présence de parking
souterrains. Cette approche intéressa le bailleur social Caen Habitat
qui nous fit part de la problématique d’accessibilité P.M.R de ses
bâtiments et de la mise aux normes de sécurité incendie des parkings.
Il envisage alors un appel d’offres de faisabilité sur ces questions
susceptibles de modifier le caractère des espaces vacants en surface.
Plusieurs contrats pour un projet
L’étude urbaine terminée, l’équipe débute la mission de maîtrise
d’oeuvre de la rénovation des espaces publics de la transversale Est –
Ouest du quartier du Chemin Vert en vue d’un lancement des travaux
début 2014 pour une réouverture du site au public au début de l’été
2014.
Parallèlement, l’agence Diagram répond avec le même B.E V.R.D
également à l’appel d’offres du bailleur social Caen Habitat. La
mission se limite à une étude de faisabilité sur la mise en accessibilité
pour les personnes à mobilité réduite des halls d’immeubles, la mise
aux normes de sécurité incendie des parkings souterrain ainsi que
la valorisation des espaces se stationnements souterrains qui ne se
louent pas assez bien.
Les deux missions de projet d’espace public pour la ville de Caen
et étude de faisabilité pour Caen Habitat se superposent dans les
échéances et dans l’espace. Catherine Guillot (co-gérante de Diagram
architectes) envisage de faire deux rendus à partir du même travail
afin d’aller plus loin dans la définition du projet d’ensemble et de
rentabiliser le temps d’études.
Ce genre de situation « d’emboitement » des commandes permet de
mettre en valeurs d’une part les capacités de l’architecte à aborder un
même projet et de mêmes enjeux sous plusieurs angles ou plusieurs
échelles. Prouvant ainsi sa capacité de synthèse, son sens de l’intérêt
public et surtout une grande flexibilité intellectuelle. Celle-ci lui permet
de faire le lien entre des orientations générales d’aménagement (étude
urbaine qui conclut à la nécessité d’optimiser le foncier à l’arrière afin
25
de donner une valeur de centralité à la transversale E-O) un projet
d’espace public (proposant de révéler le potentiel des pieds de tours
en en faisant une aire dynamique et récréative offerte aux enfants) et
enfin un projet de mise aux normes et valorisation des parkings et
halls par la création de rampe d’accès aux halls et de nouvelles sorties
venant stimuler les usages en surface et apporter de la lumière en
sous-sol.
L’architecte peut aussi profiter de ce genre de missions qui à priori
ne concernent que marginalement des questions d’espaces pour
développer une expertise dans des domaines non architecturaux ou
urbains mais ayant un impact spatial. La mise aux normes diverses
des espaces et le travail sur les équipements techniques semblent
à ce titre particulièrement porteurs. De plus, c’est aussi un moyen
parfaitement légitime puisque l’architecte y exerce simplement son
devoir de conseil et sa contribution à la qualité des espaces urbains
et paysagers.
Bien que séduisante, elle comporte certains risques, en effet, de
nombreux « points de contact » avec un même maître d’ouvrage
implique une dépendance qui peut compliquer la tâche en cas de
désaccord avec celui-ci. Dans le cas de la mission avec Caen Habitat,
ces derniers se sont permis d’ajouter des éléments à évaluer en
faisabilité en plus de ce qui était convenu au marché. La situation
du maître d’œuvre devient alors délicate, s’il se braque, les autres
missions ou les deux parties sont liés peuvent subir des tensions, s’il
accepte, le maître d’ouvrage ne se privera pas d’en profiter à nouveau.
C’est dans ce genre de cas que l’architecte doit faire preuve de tact
et d’autorité afin de pointer qu’il peut faire certaines choses à titre
exceptionnel.
Responsabilité publique
Les différentes présentations de l’étude urbaine se sont faites à l’aide
de documents et schémas, les idées du projet étaient énoncées par
Catherine Guillot que j’accompagnais à l’hôtel de ville de Caen. Le
public est alors composé d’élus (Adjoint à l’urbanisme à minima),
directeurs des services concernés, techniciens des mêmes services
et personnalités invités comme des représentants de Caen Habitat. De
multiples questions sont alors abordées, concernant les dimensions
sociales, les usages, les projets de transports, etc. que l’architecte –
urbaniste conciliant accepte de questionner et de représenter afin de
nourrir un débat et un avancement itératif dans les projets de ville.
C’est son rôle. Par ailleurs, cette souplesse vis à vis du cœur de mission
Le croquis de la directrice de l’urbanisme de Caen sollicite un plan définition clairement des limites fon-cières par des haies, abandon d’un espace ouvert caractérisant les quartiers sociaux à un espace «résidentiel» simplifiant les questions d’entretien et se référant à un autre imaginaire urbain.
Proposition Diagram, le projet cherche à valoriser les qualités de l’existant et notamment la perméa-bilité d’espaces soumis à des statuts fonciers différents. De plus, le projet imagine des espaces publics graphiques qui évoquent les expérimenta-tions des années 70 à la directrice de l’urbanisme.
26
semble toujours appréciée. Néanmoins, ces grandes réunions ne
permettent pas toujours de faire avancer le projet de manière sûre. En
effet, la notion de maîtrise d’ouvrage suppose une autorité de gestion
et de direction qui ne peut pas être assumée par plusieurs personnes
au risque que les désaccords internes ne se répercutent sur une
maîtrise d’œuvre qui devient alors l’instrument d’un jeu politique très
pénalisant pour la qualité d’un projet.
Ce fut le cas sur le projet du quartier Chemin Vert, le service de
l’urbanisme avait des réserves sur certains aspects du projet porté
par l’agence Diagram, les principes développés avaient fait l’objet de
plusieurs présentations et faisaient l’objet d’un consensus avec les
élus et techniciens. A l’origine de ce désaccord se trouve la proposition
de l’agence d’inciter au développement des usages sur les surfaces
situées au-dessus des parkings. Cette proposition ne convient pas à la
direction du service de l’urbanisme qui souhaite éliminer toutes formes
évocatrices d’une quelconque expérimentation qui se détacheraient
d’une ambiance urbaine banalisée. Celles-ci auraient une connotation
« quartier social ». Il convient donc selon elle de définir une spatialité
de « ville classique » en marquant le statut du foncier de limites claires.
Malgré l’expression de cette requête hors du comité, Catherine
Guillot proposera plusieurs alternatives au traitement de ses dalles
pour neutraliser la critique et remettre au débat les choix concernant
cet espace. Les alternatives seront présentées sur le traitement
graphique des pieds de tours mais Catherine Guillot ne céda pas à
la « résidentialisation » qui représentait une négation de l’analyse des
qualités du quartier ayant fait l’objet de plusieurs présentations.
Face à l’inertie et la difficulté à prendre des décisions en comités,
les maîtrises d’ouvrages sont parfois tentées de revenir sur des
décisions que l’on pensait prises où des principes admis depuis
le début de l’étude. Le projet passe parfois très proche d’un
déshabillage d’ambitions. A défaut d’un leader parmi les politiques
ou les techniciens, il appartient au maître d’œuvre de rappeler les
enjeux de la commande et de ne pas plier sur son devoir de conseil.
En revanche il lui appartient d’être critique sur le projet et de ne pas
se braquer sur des aspects non fondamentaux, en l’occurrence ; les
propositions d’aménagement des dalles pouvaient variées et servir
d’autres usages, prendre d’autres formes mais le parti général du
projet était d’exploiter le potentiel spatial de l’interpénétration des
espaces publics et privés en clarifiant leurs limites mais en éliminant
pas ce qui fonde cette structure spatiale au profit d’une approche
dogmatique.
27
Intérêt public, vision utilitariste
Fin Novembre, arrivé au terme des études d’avant-projet (A.V.P) la ville
de Caen souhaitait organiser une « présentation – concertation ». Deux
jours répartis sur deux semaines, un stand était installé dans un centre
commercial de quartier afin de présenter le projet aux habitants du
quartier et de les inviter à proposer leurs améliorations, ou au contraire
affirmer leur opposition au projet.
Alors que les études d’avant-projet sont terminées et que le projet
est tenu par un calendrier (électoral ?) de mise en chantier en
Décembre 2013 (livrable au printemps 2014…) une telle réunion ne
peut être vue comme autre chose qu’une séance de communication
du projet dans laquelle on soumet quelques détails à l’appréciation
des habitants. En l’occurrence, le contenu mobilier des espaces dits
« salons d’extérieur » n’avait pas encore été affermi. La réunion portait
en conséquence sur quelques aspects tels que le nombre de tables,
d’assises et la possibilité ou non d’y organiser un barbecue.
Alors que la première séance fut plutôt encourageante, les habitants
se montrant favorables à ces aménagements, la seconde réunion le
fut moins. En effet, les quelques personnes qui émirent des doutes sur
le bon entretien des installations de barbecue remportèrent la partie.
Bien sûr, on peut se demander si ces installations étaient vraiment
au service de l’intérêt public et bien nécessaire, mais on peut aussi
pousser plus loin et se demander si les conditions étaient bien réunies
pour réaliser une réunion publique porteuse d’envies communes. Je
crois que, réalisée de cette manière, la mobilisation des habitants
ne peut que conduire à des envies contradictoires et finalement à
déshabiller un projet de tout caractère « volontariste » appliquant ainsi
une formule inversée de celui-ci du type : « l’intérêt d’un seul élimine
la proposition pour le collectif. » Je regrette le caractère caricatural de
cet exercice pourtant fondé et précieux mais qui ne peut pas être fait
à moitié. J’espère avoir ultérieurement la possibilité de participer à de
vrais processus de concertation avec ce que cela suppose de temps
pour pratiquer l’itération.
Structure de l’équipe de maîtrise d’œuvre
Le projet d’aménagement des espaces publics de la transversale Est-
Ouest sous l’encadrement du B.E V.R.D mandataire a également été
l’occasion d’observer les divergences entre l’approche du projet de
l’agence Diagram et celle du bureau d’études.
En effet, si le fait de travailler avec un urbaniste en co-traitance engage
mandataire et co-traitant aux mêmes responsabilités juridiques, les
28
deux co-traitants n’abordent pas les éléments de missions de la
même manière. Sur le contrat, par exemple, figurent un certain nombre
d’éléments que n’a pas produit le bureau d’études dont le C.C.T.P
cahier des clauses techniques particulières. Le travail du bureau
d’études V.R.D, travaillant chaque élément de mission à minima
s’ajoutant à des revirements au sein de la maîtrise d’ouvrage entraina
une importante perte de temps sur le chantier et des problèmes qui
auraient pu être évité avec un bon suivi des éléments de mission.
Passation des marchés de maîtrise d’œuvre et de travaux et influence
sur le projet
La difficulté à mener cette mission à bien est aussi liée à une série de
changements des conditions du projet et de son exécution émanant
de la maîtrise d’ouvrage. Celle-ci, au dépôt du dossier d’avant-projet
informe qu’elle souhaiterait voir la livraison des espaces publics avant
les élections municipales. Face à notre réalisme, celle-ci nous assure
que l’échéance sera atteignable si elle mobilise des entreprises de
travaux liés par accord-cadre à la ville. L’équipe de maîtrise d’œuvre
n’a pas su être assez perspicace pour anticiper les déboires qui
l’attendaient.
En effet, nous avons compris que plus tard que l’entreprise de travaux
principale était détentrice d’un accord-cadre pour l’entretien de la
voirie, et non-familière de la mise en œuvre d’espaces publics. De
plus, en l’absence de C.C.T.P, l’entreprise de travaux était tout à
fait légitime de ne prendre aucune disposition particulière quant aux
engins utilisés. En effet, le parti d’aménagement du projet proposait
pour raisons économiques de ne refaire que les quelques dalles de
bétons qui étaient fendues. Et, pour les nouvelles séquences, de
mettre en œuvre une fabrication par dalles (environ 3 X 1,5 m) avec
deux types de finitions désactivé, avec gros granulat. Cette exigence
(coûteuse) sur l’aspect et le format des dalles était liée à la recherche
d’insertion dans l’environnement existant et à la mise en valeur des
aménagements déjà réalisés. Ainsi, le C.C.T.P. aurait permis d’exiger
de l’entreprise un mode opératoire adapté à l’objectif de préservation
d’un maximum de dalles permettant la conservation du niveau de
qualité souhaité.
Or, il n’en fut rien et l’entreprise utilisa tous ses engins roulants sur
la promenade en béton et en fissurant environ 500 m², alourdissant
d’autant le budget du projet en cours de chantier.
Un autre « incident » vint perturber considérablement l’économie du
projet ainsi que son périmètre. L’accord-cadre liant l’entreprise et
29
la ville arrivant à terme en Mars, il fallut évidemment, pour ne pas
pénaliser le déroulement du chantier renouveler l’entreprise. Hors le
renouvellement d’un accord-cadre est l’occasion d’actualiser des prix
unitaires. C’est comme ça que le budget du chantier augmenta de
90.000€ à mi-parcours. Le poste ayant subi la plus forte inflation était
des barrières empêchant l’accès au site qui étaient en location au
mètre linéaire/jour.
A ce moment du projet, seuls les terrassements et les bordures avaient
été posés. L’essentiel de la qualité matérielle du projet résidait dans le
travail sur les finitions de béton. Cette prestation, sous-traitée à une
entreprise spécialisée dans les bétons failli être réduite au minimum si
l’agence Diagram ne s’était pas mobilisée pour trouver des solutions
autres que la réduction extrême de tous les facteurs de qualité dans
le projet.
Dans cette situation, le rôle du bureau d’études fut à double tranchant,
prétextant prendre ses responsabilités de mandataire, il proposait
le déshabillage du projet. Le rôle de l’agence Diagram a été de
convaincre le maître d’ouvrage et le bureau d’études V.R.D. qu’il était
plus souhaitable de tronquer un quart de la surface de béton et de
la remplacer par du stabilisé que réduire la qualité pour réaliser sur
l’ensemble du site un projet amoindri.
Les deux jours succédant à cette visite de chantier furent entièrement
dédiées à l’équilibrage du budget. Les principales économies ont été
réalisées en oubliant quelques pièces de mobilier urbain prévu, en
réduisant l’épaisseur du béton de 18 cm à 12 cm et enfin en sortant
de l’enveloppe de travaux la réalisation de l’amorce d’une voirie
qui ne pourra de toute manière aboutir qu’après la réalisation de la
requalification du site du collège Jacquard.
Rôle de l’architecte comme « manager » du projet urbain.
Cette étude de cas me parait révélatrice de la valeur ajoutée d’un
architecte en matière de maîtrise d’œuvre urbaine.
En premier lieu, sa formation et sa sensibilité sont orientées vers la
manipulation de l’espace et l’articulation de celui-ci avec les usages.
Ce que démontre le parti d’aménagement de Diagram qui envisageait
une caractérisation des espaces en fonction de leurs emplacements
et de leurs potentiels de flux, tranquillité et d’activité.
Ensuite, sa compétence technique de la construction d’édifices lui
permet une grande perspicacité dans ses interventions. Il peut donc
anticiper les contraintes des édifices à proximité ou des ouvrages
La réduction successive du périmètre d’études :En haut : en phase d’étude urbaineEn dessous : En phase d’A.V.P (cumul A.V.P + étude de faisabilité accessibilité tours et parkings)Avant-dernière ligne : Au début de la phase chantierDernière ligne : En fin de phase chantier (déduction des abords de la tour molière pour des raisons de phasage et de la voie nouvelle pour raisons d’économies)
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en souterrains. Tel qu’illustré par le projet de Chemin vert avec les
parkings susceptibles de ne pas supporter de surcharge importante.
Enfin, je pense que l’approche synthétique et unitaire de l’espace est
à créditer à l’architecte qui, contrairement à l’ingénieur V.R.D et au
paysagiste n’aborde pas le projet en spécialiste d’un type particulier
d’objets. En l’occurrence, il ne se limite pas à se charger des interfaces
avec les bâtiments. Sa culture professionnelle se mue entièrement sur
un objet différent à concevoir : la ville et son espace.
Cette approche unitaire de l’espace répond au caractère profondément
interdépendant de la conception spatiale. En effet, celle-ci ne permet
pas d’isoler les parties et le «tout». On peut notamment penser aux
multiples occasions de conflits entre un arbre (et ses racines), des
réseaux, le nivellement, les usages permis et les bâtiments à proximité,
tous ces éléments qui doivent être pensé ensemble pour produire une
ville «qui marche».
A cette culture de la synthèse répond une culture de la responsabilité
inscrite dans la loi et dans la pratique, celle-ci est renforcée par le
rapport que l’architecte entretien entre la théorie et la pratique et entre
le détail et la généralité. Chaque aspect renseignant l’autre et donnant
à l’architecte une vision suffisamment pénétrante pour assumer
la responsabilité. C’est l’idée que je défends dans ce mémoire en
exprimant l’intérêt de construire des espaces publics en parallèle de
travaux sans maîtrise d’œuvre comme les études urbaines, schémas
directeurs ou encore les plans-guide.
Mais ce portrait des capacités de l’architecte à endosser les
responsabilités de la maîtrise d’œuvre urbaine ne serait pas tout à fait
juste si je n’essayais pas d’y voir quelques failles.
À ce titre, l’étude de cas en présente deux qui sont directement
imputable à l’architecte et qui présentent les limites de l’adéquation
entre la culture professionnelle de l’architecte et les exigences de la
maîtrise d’œuvre urbaine.
La première concerne ses compétences dans les processus de
concertation, comme nous l’avons vu, la concertation est une des
tendances de fond des marchés de maîtrise d’œuvre, et celle-ci est
particulièrement judicieuse dans le cas de projets urbains et d’espaces
publics. Mais la concertation est une approche qui bouleverse
radicalement les processus de projets et l’organisation des études de
maîtrise d’œuvre, elle ne peut pas être une option que l’on ajoute ou
enlève à un projet, elle doit être pleinement intégré à un processus qui
ne se contente pas de considérer le citoyen comme un client, mais
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comme un acteur. Cela impliquerait une démarche plus claire de la
part des maîtres d’ouvrage mais aussi aux architectes urbanistes de
développer de nouvelles compétences et une nouvelle délimitation
des responsabilités.
La seconde trouve sa source dans la question foncière qui s’est
posée à un moment du projet. Alors que le télescopage des missions
d’études urbaine, de maîtrise d’œuvre des espaces publics et d’étude
de faisabilité de mise aux normes des halls et parkings permettait de
concevoir un projet unique répartit sur plusieurs emprises, la réalité
des questions triviales de gestion, d’entretien et de phasage ont
pénalisé le projet tel qu’il était conçu.
En effet, alors que le projet prévoyait de vastes aires de jeux aux pieds
des tours et une promenade calme et arborée, l’incertitude de la
réalisation du projet suspendu aux financements du bailleur social a
permis à la ville de Caen d’exiger une aire de jeux sur la transversale.
Dès lors, l’équilibre du projet est compromis et il sera condamné a
présenter au mieux des redondances, au pire une mise à nue de ses
intentions.
Je pense donc que la connaissance du droit du sol et des modes
opératoires qui y sont associés font parti des compétences de
l’architecte à renforcer dans le cas de la maîtrise d’œuvre urbaine.
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Projet professionnel
Ce mémoire a mis en évidence les qualités de l’architecte dans les missions
de conception urbaine. Ces dernières reposent sur l’esprit de synthèse qui
lui confère un rôle de lien entre le domaine politique et du technique mais
aussi entre les différents intervenants.
De plus, nous avons fait apparaître le caractère « ouvert » des marchés de
maîtrise d’œuvre urbaine dont les processus de travail sont en évolution.
En témoigne les listes d’expertises sollicitées par les maîtres d’ouvrage et
les nombreux formats de missions qui sont développées pour obtenir des
réponses à des questions complexes par nature. Ces équipes «à rallonge»
supposent des configurations du partage des responsabilités qui indiquent
une certaine liberté dans l’organisation des équipes et les méthodes de
travail proposées. Malheureusement, les membres des groupements ne
sont pas toujours structurellement en capacité de travailler en synergie. Car
ce travail suppose un investissement considérable.
Par ailleurs, les groupements de maîtrise d’œuvre ont souvent tendance à
se répartir un travail bien cloisonné mais aussi de partager les rôles entre
« créatifs dessinateurs » et ceux qui évaluent la faisabilité technique et
économique d’un projet. Or, comme nous l’avons vu à plusieurs reprises la
qualité de la ville et de ses espaces relèvent de la faculté des concepteurs à
travailler en synergie. L’aboutissement de ce travail est un espace manifestant
une certaine unité.
A ce premier constat méthodologique s’ajoute un constat conjoncturel. En
effet, une des grandes évolutions en cours dans la nature des commandes
est celle liée à l’approche environnementale et à la transition énergétique,
thématiques complémentaires présentant des facettes techniques,
technologiques, biologiques, environnementales, sociales, économiques,
etc. On peut anticiper que celles-ci impliquent un grand nombre de
répercutions spatiales sur l’espace architectural et urbain qui ne sont pas
encore bien appréhendées et qui nécessiterons une collaboration accrue
entre les différents acteurs de la maîtrise d’œuvre. On peut supposer que
cela entraînera de nouvelles configurations d’équipes et des responsabilités
a l’intérieur de nouvelles géométries contractuelles.
Après demain - Une approche transdisciplinaire de la maîtrise d’œuvre
urbaine.
Mon objectif à moyen/long terme est donc fondé sur ces observations. Ce
que j’ai constaté dans les annonces de marchés de maîtrise d’œuvre urbaine
et autres marchés «collatéraux» au cours de mes veilles chez Diagram c’est
que ces marchés ont tendance à se «transdisciplinairiser».
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J’en déduis que ces marchés ne pourront pas être abordés avec pertinence
s’il ne s’opère pas de synthèse entre les disciplines. Cela définit une condition
sine qua none pour exercer : savoir travailler avec les autres, surtout ceux
qui ne font pas les mêmes choses que moi.
Par conséquent, il n’est pas nécessaire attendre que l’architecte soit
nécessaire dans une équipe de maîtrise d’œuvre urbaine pour y participer;
selon moi, il ne faut pas se contenter des études qui attendent un «projet
architectural ou urbain» mais pratiquer l’exercice transdisciplinaire sur un
plus grand nombre de sujets de l’espace sans écarter ceux qui ne semblent
pas appeler un « projet ».
Pour moi, former des équipes de maîtrise d’œuvre transdisciplinaires, répond
non seulement à l’enjeu d’améliorer la qualité des projets mais procède de
la conviction que l’approche transdisciplinaire est le pilier d’une conception
durable et pertinente de l’espace.
Demain - Apprendre des autres disciplines
Pour atteindre cet objectif de moyen-long terme, j’envisage deux grands
axes de travail.
Le premier concerne le développement de compétences servant cette idée.
Car celle-ci demande en effet de développer des savoir-faire spécifiquement
liés au travail transdisciplinaire. Il s’agit peut-être de s’engager dans une
formation complémentaire par exemple en génie urbain, gestion urbaine, droit
du sol, montage d’opération... Permettant d’avoir des doubles compétences
à mettre à profit dans le dialogue disciplinaire et méthodologique.
L’autre axe consiste à poursuivre une pratique en agence et d’orienter mon
parcours en fonction de ce projet de long terme. Tout en nourrissant des
relations avec des personnes aux motivations similaires.
Expérimenter des partenariats sur de petits projets, répondre à des
appels à idées en constituant une méthodologie. J’envisage également
d’expérimenter une approche transdisciplinaire par la réponse à des appels
d’offres.
Quelles que soient les trajectoires, je souhaite persévérer dans l’approche
multi-scalaires sur des sujets de très grande échelle qui ne supposent pas
de maîtrise d’œuvre, des projets de maîtrise d’œuvre urbaine d’échelle
moyenne et de la conception d’espaces publics dont je considère les
complémentarités comme une richesse.
Enfin, si mon expérience ne m’en a pas donné l’occasion, j’aimerai beaucoup
aborder la maîtrise d’œuvre architecturale, sur de petits projets de manière a
appréhender progressivement les spécificités et enjeux de cette activité. Elle
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est, de surcroît un domaine très nourrissant avec lequel la conception de la
ville est en constante interaction.
Aujourd’hui - Observer et apprendre
Alors que mon expérience au sein de l’agence Diagram a pris fin en Juillet
2014, j’ai rapidement trouvé un poste dans une agence d’une douzaine de
personnes spécialisées en maîtrise d’œuvre urbaine, et d’infrastructure de
transports. Je suis actuellement chargé d’un projet de bus à haut niveau de
service à Lens. Cet emploi s’inscrit dans un projet qui consiste à continuer
à apprendre les savoir-faire de la maîtrise d’œuvre urbaine et de travailler
progressivement sur des projets plus importants.
J’envisage aussi de poursuivre l’observation des modes d’exercices et la
gestion de la structure professionnelle mais aussi des relations entretenues
avec les partenaires, tout cela dans le but de me développer une culture «
managériale » de l’agence d’architecture.
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Remerciements
Écrire un mémoire est un travail qui demande beaucoup de temps de
préparation et de formulation des idées, il demande aussi une immersion
importante dans son sujet, conditions difficiles à réunir lorsqu’on commence
un activité professionnelle comme c’est le cas de tous les candidats à
l’H.M.O.N.P. Ce travail doit donc beaucoup à l’environnement dans lequel il
est pensé.
Je tiens donc à remercier Catherine Guillot et Refki Chelly pour leur accueil,
leur patience et leurs explications, et au delà pour ce qu’ils m’ont appris au
quotidien pendant deux années.
Louis Guedj pour ses conseils judicieux, la régularité de son suivi et la
perspicacité de son regard.
Jean-Luc Malgat, D.D.T Maine et Loire pour son aimable réponse à mes
questions.
Les enseignants et professionnels qui sont venus dispenser leurs cours avec
passion au sein de l’ENSA Paris La Villette, nous préparant à des réalités
difficiles tout en transmettant énergie et courage dans leurs exposés.
Sylvie Ly, pour sa relecture patiente et ses multiples suggestions.
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Éléments bibliographiques et webographiques
A propos de la maîtrise d’œuvre urbaine
CABANIEU, Jacques. Les contrats de maîtrise d’oeuvre urbaine [en ligne]. Guide méthodologique. La Défense : MIQCP, 2007, 105 p. Disponible sur : http://www.archi.fr/MIQCP/article.php3?id_article=321 (Consulté le 16 avril 2014)
CABANIEU, Jacques. Les espaces publics urbains [en ligne]. Guide méthodologique. La Défense : MIQCP, 2001, 176 p. Disponible sur : http://www.archi.fr/MIQCP/article.php3?id_article=79 (Consulté le 10 mai 2014)
A propos de l’intérêt public
Conseil d’État et la juridiction administrative. Réflexions sur l’intérêt général. [en ligne] (Publication le 30 novembre 1998) Disponible sur : http://www.conseil-etat.fr/Decisions-Avis-Publications/Etudes-Publications/Rapports-Etudes/Reflexions-sur-l-interet-general-Rapport-public-1999 (Consulté le 16 avril 2014)
A propos de la loi MOP
CABANIEU, Jacques. Procédures de passation des marchés de maîtrise d’oeuvre. Paris : ENSAPLV. HMONP Cours, 2014, 106 p.
A propos du Paris XIX siècle
ALPHAND, Charles Adolphe. Les promenades de Paris. Histoire, description des embellissements, dépenses de création et d’entretien des bois de Boulogne et de Vincennes, Champs-Elysées, parcs, squares, boulevards, places plantées : étude sur l’art des jardins et arboretums, 2 vol. (texte recueil des planches), Paris : J. Rothschild, 270 p.
DEJAMME JEAN. Application aux villes du décret du 26 mars 1852 sur les rues de Paris ; [en ligne]. Journal officiel, 1887. Disponible sur : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6481897r/f5.image (consulté le 21/07/2014)
LANDEAU, Bernard, La fabrication des rues de Paris au XIXe siècle, un territoire d’innovation technique et politique, Les annales de la recherche urbaine,1992 : n°57, p. 23-44
A propos de la D.D.E
Entretien téléphonique avec Monsieur Jean-Luc MALGAT, Chef de service construction, habitat, ville de la D.D.T Maine-et-Loire, réalisé le 28 août 2014
A propos de l’urbanisme vertical
HOLLEY, Michel. Urbanisme vertical & autres souvenirs, Paris : Somogy éditions d’art, 2012, 143 p.