A G I R
histoiregéographieterminale SProgrammes 2014
COORDONNÉ PAR VALÉRIE DAUTRESME
HISTOIREGÉOGRAPHIE
TERMINALE S
PROGRAMMES 2014
HISTOIREGÉOGRAPHIE-TERMINALES-PROGRAMMES2014
Coordination:ValérieDautresme,IA-IPRd’histoire-géographie
Auteurs:
ArnaudBeillard,professeurd’histoire-géographie,lycéeMarcel-Pagnol,Athis-Mons
FrançoisGallice,professeurd’histoire-géographie,lycéeJacques-Monod,Clamart
AmélieHart-Hutasse,professeured’histoire-géographie,lycéeMarcel-Pagnol,Athis-Mons
BarbaraJamindeCapua,professeured’histoire-géographie,lycéeLéonarddeVinci,Levallois-Perret
CarolineLatournerie,professeured’histoire-géographie,lycéeAuguste-Renoir,Asnières
AlexandreSaintin,professeurd’histoire-géographie,lycéeLe-Corbusier,Poissy
MarineSimon,professeured’histoire-géographie,lycéeJacques-Monod,Clamart
HélèneThevenet,professeured’histoire-géographie,lycéeLakanal,Sceaux
Dire eurdelapublication:Jean-MarcMerriauxDire ricedel’éditiontransmédiaetdelapédagogie:MichèleBriziouDire eurartistique:SamuelBaluretCoordinationéditoriale:PierreDanckersSecrétariatd’édition:AurélieChauvetDéveloppement:Jean-MarcLabat,FrançoisLarsonneurRele ure:MariePersiaux,PhilippeGodbillonMiseenpagesetgraphisme:PatriceRaynaud,WahidMendilSecrétariat:ChantaleLegaigneurConceptiongraphique:DESSIGNESstudioMuchiretDescloudsCouverture:PortdeValparaiso©IRD,SébastienVelut,www.indigo.ird.fr
Ouvrageréaliséàl’aidede«Lachaîneéditoriale»développéeparCanopéCréteil
HISTOIREGÉOGRAPHIE-TERMINALES-PROGRAMMES2014
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ISBN:978-2-240-03701-5ISSN:2425-9861©RéseauCanopé,2016(établissementpublicàcaractèreadministratif)Téléport1–bât.@41,avenueduFuturoscopeCS8015886961FuturoscopeCedex
Tousdroitsdetradu ion,dereprodu ionetd’adaptationréservéspourtouspays.
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HISTOIREGÉOGRAPHIE-TERMINALES-PROGRAMMES2014
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PRÉFACEHistoireGéographieTerminaleSestdestinéàaider lesprofesseursd’histoireet de géographie à s’approprier et à mettre en œuvre les nouveauxprogrammes de la classe terminale de la série S. Dans le contexte durétablissement de ces enseignements en terminale S, l’enjeu est de biendifférencier les séries littéraires et économiques et sociales de la sériescienti que,tantdupointdevueducontenudecequidoitêtreenseignéque de la préparation des épreuves du baccalauréat, puisque lesprogrammes, les horaires hebdomadaires et les exigences attendues sontdifférents.
Cetouvrageproposedesclésessentiellespourtraiterdemanièreréalisteetef cacel’histoireetlagéographieenclassedeterminaleS.Ilesttotalementconformeà l’espritetà la lettredesprogrammes,etrépondparfaitementaux nalitésdelapréparationdel’épreuvedubaccalauréatdecettesérie.
Pour chacune des questions du programme, chaque mise en œuvre faitl’objetd’unchapitreoùlesprincipauxélémentsdeproblématiquesontmisenévidence,puisrepris,àtraversdesscenariiconcretsdemiseenœuvre,chaque n de chapitre étant réservée à la préparation de l’épreuve dubaccalauréat. L’aide à l’enseignement revendiquée par cet ouvrage setraduitégalementparlarichessedesressourcesetsupportsproposés.
Au-delàdelastrictepréparationàl’examen,cettepublicationintègreaussipertinemment, au l des propositions, les capacités et les méthodes quisous-tendent désormais la construction d’une progressivité desacquisitionsdesélèvesdelasecondeauxclassesterminales.
Jetiensàremerciervivementlesauteursdecetouvrage,ainsiqueCanopéÎle-de-Francequil’apublié.Cettefoisencorel’objectifpremierestatteint:fourniràchaqueprofesseurlesoutilsindispensablespourcerner nementlesobjectifset lesattentesdesprogrammes, toutenpréservantsa libertéd’opérersespropreschoixetdedé nirsonitinérairepersonnel.
MichelHagnerelleDoyendel’In e iongénéraled’histoireetdegéographie
PRÉFACE
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INTRODUCTION
Les aménagements de programme concernant les terminales ES et Lavaientdonnélieuàunenouvelleéditiond’un«RepèrepourAgir»en2014.
Aujourd’hui, la nouvelle collection « Agir » vient poursuivre cetaccompagnement à l’enseignement en proposant une aide à la mise enœuvre des programmes d’histoire-géographie en terminale S, rétablie en2014commeenseignementobligatoiredanslecycleterminaldelasérieS.
Eneffet,danslanouvellecon gurationdé nieparl’arrêtédu19décembre2012, l’histoire-géographie sort du tronc commun des enseignements depremière puisque la série scienti que béné cie d’un horaire et d’unprogrammedifférentsdeceluidesdeuxautressériesgénérales,enclassedepremièrecommeenclassedeterminale.L’évaluationaubaccalauréat,sielleredevientuneépreuveécriteterminale,sedistingueégalementparsaduréeetlesexercicesquilacomposentdel’épreuvedesterminalesESetL.
Tout l’enjeude cetouvrageestdoncbiend’accompagner les enseignantsdans leur appropriation des programmes et de l’épreuve de terminale Sdansleursspéci citésparrapportàceuxdesdeuxautressériesgénérales.C’est dansune approche comparative que sa première partie analyse lesprogrammes,lesenjeuxdel’enseignementdanscettesérie,etl’épreuvedubaccalauréatdelasériescienti quepourendégagerun«espritcommun»àl’ensembledessériesgénéralesmaisaussidesspéci cités.Ladeuxièmepartieapourobjectifdeprésenterdespropositionsdemisesenœuvreetd’exercicesd’évaluationtypebaccalauréat,toutparticulièrementadaptéesau programme, aux horaires et au cadre de l’épreuve d’examen de laterminaleS.
Nousespéronsquecettenouvelleparutionserautileàtouslesprofesseursd’histoire-géographieenseignantenterminalescienti que.
ValérieDautresmeIA-IPRd’histoireetdegéographie
INTRODUCTION
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PRÉSENTATION
DesprogrammesdeterminaleS écifiquesàce esérie,adaptésdesprogrammesdeterminaledessériesESetL
Après deux années d’enseignement optionnel, l’histoire-géographie estrétablie de façon obligatoire en terminale S par l’arrêté du 19 décembre2012 qui précise également les horaires dédiés à ces disciplines : deuxheurestrenteenclassedepremièreetdeuxheuresenclassedeterminale(education.gouv.fr). L’objectif est à la fois d’assurer la transmission d’uneculture historique et géographique conséquente aux élèves de la série S,toutenassurant lavocationprincipalementscienti quedecettesérie,cequi explique l’horaire différent de cette discipline au regard des autressériesgénérales.
LeBOdu21février2013indique,quantàlui,leprogrammepourcesdeuxclasses(education.gouv.fr).Lechoixeffectuéparlegrouped’expertscomposéd’inspecteursgénéraux,d’universitaires,d’IA-IPRetdeprofesseursdelycéeen exercice a été de ne pas rédiger un tout nouveau programme, maisd’adapterlesprogrammesdeL-ES(AnnexeI,BOn°42,14nov.2013)aunouveaucontexte de la série S. Les arguments qui sous-tendent ce choix sont lessuivants:dupointdevuedesélèves,ils’agitdeconserverunecohérenceglobaledel’ensembledessériesgénéralespourcréeruneculturehistoriqueet géographique commune, tout en facilitant le changement éventuel desérieentrelapremièreetlaterminale;concernantlesprofesseursd’autrepart, ce choix permet de leur laisser la possibilité de s’appuyer sur lespréparations qu’ils ont travaillées pour le programme des séries ES et L,nécessitant,surcertainesthématiquesassezpointues,desmisesaupointscienti ques parfois importantes. Cependant, il est bien sûr impossiblepourlesenseignantsayantdesélèvesdeterminalesLouESdereprendretelsquelsleurscourspourcessériespuisque,au-delàdesadaptationsduprogramme évoquées ci-dessous, le cadre horaire est très différent.L’épreuveaubaccalauréatn’apaslemêmeformat(voirplusloin)etdoncl’approfondissement des questions traitées ne sera pas le même, selonqu’ontraiteleprogrammedeterminaleSoudeterminaleES-L.
L’adaptationduprogrammedeterminaleSs’estessentiellementfaiteselondeuxmodalités.D’unepart,unthèmeenhistoire(lethème2«IdéologiesetopinionsenEuropedela nduxix siècleànosjours»)etdeuxétudesdecas engéographie («unevillemondiale »dans laquestion intitulée « les
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territoiresde lamondialisation»et «Mumbai :modernité, inégalités » serapportant à la question « L’Asie du Sud et de l’Est : les enjeux de lacroissance»)ontétésupprimés.D’autrepart,certainespériodesétudiéesenhistoireontvuleurduréed’étuderéduite:danslaquestion«lescheminsdelapuissance»,lesrapportsentrelesÉtats-Unisetlemondenesontplusanalysésàpartirde1918,maisàpartirde1945;ilenestdemêmepourleProcheetleMoyen-Orient,étudiésentantquefoyerdecon itàpartirdelan de la seconde guerre mondiale et non plus de la première. Le cadre
chronologique de deux des trois questions concernant les échelles degouvernement dans le monde a été également restreint : l’étude del’échellecontinentalecommenceavec letraitédeMaastricht (etnonplusaveclecongrèsdeLaHaye),tandisquepourl’échellemondiale,lesommetduG6de1975remplaceladatede1944.
Onl’auracompris,au-delàd’intitulésproches,parfoismêmesemblables,ilest essentiel de différencier la mise en œuvre des questions pour tenircompte à la fois du cadre horaire très différent sur le cycle première-terminale(huitheuresenES-LcontrequatreheurestrenteensérieS)etdel’épreuvespéci queaubaccalauréat.L’indicationdunombred’heuressurlequellesprofesseurspeuventconstruireleurprojet,préciséeparitemdemiseenœuvresurles chesressources,rendcomptedecettenécessitéderompreavecunetendanceàl’exhaustivitépourmieuxdégagerlesenjeuxessentiels de la question étudiée. L’approche sera donc nécessairementplussynthétiqueensérieS.
Rappelons qu’une lecture attentive du programme et des ches Éduscoldoitprécédertouteconstructionducours.Lemanuelenusage,quimalgréses qualités demeure un objet commercial, ne peut guider la conceptiondesleçons.Leprofesseurdoitseréféreràunprincipesimple:toutcequin’est pas écrit dans le programme ne doit pas être évoqué en classe.Cela peut entraîner des frustrations, des regrets mais seul ce principepermet de traiter l’ensemble des questions prévues avec les horaireshebdomadaireslimitésàdeuxheures.Enhistoireparexemple,laquestionportantsur«Unfoyerdecon its»,«LeProcheetleMoyen-Orient,unfoyerde con its depuis la n de la première guerre mondiale » ne peut êtretraitée dans les cinq ou six heures imparties si le professeur choisit untraitement événementiel ou factuel de la question. Une approche trèsproblématisée est nécessaire pour montrer pourquoi cette région estparticulièrement une zone de con its et pourquoi ils ont une tellerésonnance. À travers l’étude de ces deux grands axes, on aborderaquelquescassigni catifs,ennombre limité,quipourrontêtreconvoqués,encomposition,pourétayerl’analyse.
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DesprogrammesdeterminaleS écifiquesàce esérie,quipartagentlesenjeuxdesprogrammesdeterminaledessériesESetL
Cesprogrammesspéci quesdeterminaleSs’inscrivent,toutcommeceuxdes sériesESetL,dans le cadrede la réformedu lycéeoù laplacede laclasse de terminale évolue. Il ne s’agit plus seulement de préparer lesélèves à l’épreuve du baccalauréat, car cette dernière année de lycéeremplitégalementunrôledecharnièreentrelesecondaireetlesupérieur,ce dont témoignent les orientations xées à l’accompagnementpersonnalisé pour ce niveau. Cet enjeu, clairement exprimé, imposed’initier les élèves aux débats et aux méthodes propres aux deuxdisciplines.Laconstructiond’unevéritablepenséecritiquepeutd’ailleursêtrefacilitéeparl’apportdel’enseignementenphilosophie.
Cet objectif s’exprimeparticulièrement dans le thème 1 introductif de lagéographie intitulé«Clésde lectured’unmondecomplexe»quidoitêtreobligatoirement traité en premier lieu. Ce thème, court (quatre à cinqheures,évaluationcomprise),imposedenepasmultiplierlesdocumentsetalavolontédedévelopperl’espritcritiquedeslycéensparrapportàl’outilpremierdugéographe:lacarte.L’expression«espritcritique»nesupposepasdesecontenterdereleverlesfauteséventuellesdansdescartesmaisde faire saisir aux élèvesqu’une carte, loind’êtreunephotographied’unterritoire,enestuneinterprétation,sous-tenduepardeschoixquel’élèvedoitapprendreàidenti er,àjusti er,voireàdiscuter.
Unobjectifcomparableapparaîtenhistoireaveclethème1introductif,quiconduitàré échirau«rapportdessociétésàleurpassé».Bienentendu,lesujet n’est pas nouveau car il sous-tend une majorité de questionsd’histoiredepuislasixième,maisleprogrammeinviteiciàré échirsurlesens même de la discipline, à travers la différence entre les notionsd’histoire et de mémoire, qui n’est pas toujours clairement comprise etadmise par la société, soumise aux émotions du présent. Nous sommesbienlàaucœurdutravaildel’historienquidoitaccomplirdeschoixpourprésenter des clés d’une lecture objective, face à des sujets avant toutsubjectifs. Pour des élèves de terminale qui suivent un enseignement dephilosophie,l’étudeduregarddel’historiensurlesmémoiresestl’occasiond’une fructueuse ré exion sur l’apport de la démarche historique à laconstructiondel’espritcritique.
L’objectifassignéàlaclassedeterminaledepréparerlesélèvesàl’entréedans le supérieur, implique qu’il ne peut simplement s’agir, dans cettedernière année du lycée, d’accumuler une couche supplémentaire deconnaissances factuelles, qui plus est en série S étant donné l’horairehebdomadairecontraint.Ilfautyaborderdesthèmes,desanglesdevueet
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d’analyse,desdémarches,quin’ontpasétéenvisagésauparavant.Danscetesprit sont valorisés les aspects, en histoire comme en géographie, ayanttrait à la géopolitique par exemple, qui n’était pas clairement présentedansnotreenseignementjusqu’àprésent:c’estdanscecadrequeselitlethème de géographie qui traite des espacesmaritimes, présentés commedes territoires stratégiques dans la recomposition de l’espace mondial.C’est dans cette optique que se lit aussi le thème 2 d’histoire « Grandespuissances et con its dans le monde depuis 1945 » qui permet decomprendrecommentseconstruitetévolueunepuissanceetcequesontles origines historiques d’une con ictualité quimarque profondément lemondedepuisl’après-secondeguerremondiale.
L’autre enjeu de ce programme, qui n’est pas propre à la série S, est deconjugueractualitéetdurabilité.Eneffet,lesquestionsproposéesàl’étudeontpourvocationd’yresteruncertainnombred’années.Or,lagéographietout particulièrement, ne « vieillit » pas toujours bien, tant lesrecompositions spatiales, mais aussi les avancées de la rechercheuniversitairebousculentdesvisionsquiparaissaientbienétablies.
Ainsi, si l’on prend l’exemple de la mondialisation, il ne s’agit pasd’enseigner lamondialisation d’avant-hiermais celle d’aujourd’hui, dansunmondemultipolaireetmouvant.D’oùletitreduthème2degéographie,«Lesdynamiquesdelamondialisation»:iloffrelapossibilitéau ldesansde modi er les leçons, de les in échir pour qu’elles rendent compte aumieuxdelaréalité.Delasorte,ilparaîtévidentquelesdébatsautourdelamondialisation,pourretenircetexemple,nesetraitentpasdanslesmêmestermes, avec les mêmes enjeux, aujourd’hui ou dans une décennie.Ce programme veut conserver une certaine plasticité, tout en restantcohérent.Lechoixdutraitementdecertainsthèmesparcontinents’inscritdans cette logique. Il ne s’agit bien évidemment pas de revenir à unepratiqueancienneenrecourantàdesdélimitationscontinentalesétanchesetpérimées.Ilestattendudesprofesseursqu’ilsabordentdesthématiques(la puissance pour l’Amérique, le développement pour l’Afrique et lacroissance pour l’Asie) de manière verticale, ce qui écarte en partie descoupures qui ont actuellement tendance à s’estomper. Ainsi, la ligneséparant le Nord du Sud est sujette à caution : non seulement elleressembledeplusenplusàunearabesquesurlesplanisphères,maiselleobligeàdescontorsionslangagièreslorsqu’onévoquelesSudsouleNorddanslesSudsouencorelesSudsduNord.Autantd’expressionsvalidessurle plan scienti quemais qui ont de quoi dérouter la plupart des élèves.Danslemêmeesprit,lanotiondeTriade,trèslongtempsstructurantedanslapenséegéographique,n’estplusdemiseaujourd’huidufaitdesnationsémergentes.
Enhistoire, on le sait, les problématiques changent grâce aux recherchesdes historiens et la demande sociale évolue. D’unemanière générale, lesthèmes choisis dans les programmes de ES et L et S rompent avec unelogique strictement chronologique. Ils reposent sur un traitement quiprivilégieletempsrelativementlong,dépassantledemi-siècle,pourquatre
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items demise enœuvre. L’étude se doit donc d’échapper au pointillismeévénementiel :ainsi lanotiondepuissanceabordéedans le thème2doitêtreétudiéedansladurée,defaçonàfaireapparaîtrelesdifférences,nonseulementderythme,maisencoredeformeetdenaturedansl’af rmationdelapuissancemondialedelaChineetdesÉtats-Unis.
En n, ce programme tente de répondre aux enjeux de continuité et deprogressivité essentiels pour cette classede terminale, dernière annéedelycée.
Les questions à l’étude en géographie en terminale s’inscrivent dans lacontinuité des thèmes qui structurent la pensée universitaire et quiirriguent l’enseignement depuis la sixième. En géographie, ce sont leterritoire, le développement durable et la mondialisation. Depuis« habiter », verbe récurrent en première année de collège jusqu’aux« territoires inégalement intégrés à lamondialisation », c’est toujours lamême notion qui est évoquée, étudiée et approfondie. Ce sont aussi cestrois termes qui ancrent résolument la géographie dans les scienceshumaines.Àtraverslavolontéclairementaf chéeenhistoiredepermettreaux élèvesde comprendre lemondeactuel, enutilisantdes temporalitésplus longues, plusieurs questions constituent, en quelque sorte, unesynthèsedeconnaissancesouunaboutissementdenotionsabordéesdansles programmes précédents (on peut citer celles de « puissance » ou«d’État»).Àcetitre,ilestindispensablequeleprofesseurs’appuiesurcesacquis a n de parvenir à une ré exion à la fois plus large et plusapprofondie.
Concernant l’ordre de traitement des thèmes, il est laissé à la libreappréciation du professeur (à l’exception des deux thèmes 1 dits«introductifs»).Enrevanche,ilimportederespecterlacohésioninternedechacund’euxetilenestdemêmepourlesquestions.Ainsi,unenseignantpeut, s’il le juge pertinent, traiter la géographie – après le thème 1 – enétudiant les grandes aires continentales et pour ce thème, débuter parl’Afriquepourpoursuivreparl’Asieetterminerparl’Amérique(alorsqueletexteof cieldonneunordredifférent).Enrevanche,auseindelaquestion,iln’estpasenvisageablededémembrer leprogramme : l’étudedecasenouverture,quandilyenaune,metenplaceuncertainnombred’analysesà une échelle assez ne. Puis, l’étude à l’échelle continentale permet deretrouvercesmêmesélémentsetde lesenrichird’autresproblématiques.En n, l’étude binationale entre dans une perspective comparative : leséléments étudiés auparavant produisent des effets spatiaux différentsselonlesterritoires.Delamêmemanièreenhistoire,l’ordredanslequellestroisautresthèmessontabordéspeutêtremodi é,mêmesiunecertainelogiquechronologiquemilitepourunrespectdel’ordredanslequelilssontprésentés par le programme. La liberté pédagogique, comme toutes lesautres,s’inscritdèslorsdanslerespectd’uncadre,iciétablipourfavoriserlaréussitedesélèves.
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En n, pour ce qui est de la maîtrise des compétences propres à nosenseignements mais également transférables dans d’autres, c’est untableaudes«capacitésetméthodes»identiquequi gureentêtedestroisprogrammes de lycée. Loin d’être accessoire, il en constitue une lignedirectriceetc’estpourcetteraisonque,chapitreaprèschapitre,cetouvragey fait explicitement référence dans l’encadré « capacités développées ».Dupointdevuedesdémarches, làencore, lacontinuitéestévidenteavecles classes antérieures. L’étude de cas en constitue un très bon exemple.Introduitedèslaclassedesixième,elleestproposéedansleprogrammedeterminale S à deux reprises (« un produit mondialisé » et « le Sahara :ressourcesetcon its»).Ils’agitd’unedémarchequirefused’entrerparlenotionnel,parl’explicationdecequ’onn’apasencorevu,pourprivilégierle concret. C’est par l’étude d’une situation géographique précise, danstoute sa complexité et à différentes échelles, que le lycéen est amené às’approprier les connaissances et les raisonnements. Cette approcheinductive dans la construction de la leçon (on part du particulier pouraborderensuitelegénéral)nesupposeenrevanchepasdemiseenœuvrepédagogiqueunique.
Lacontinuitéet laprogressivitédesapprentissagesconcernentégalementla préparation des épreuves du baccalauréat, toutes les séries généralesconfondues.
Eneffet,lorsquelesélèvesarriventaulycée,ilsontétéformésaucollègeautravail sur des capacités propres à nos disciplines (comme la capacitécartographique) ou plus transversales (l’analyse de document ou lacapacité rédactionnelle).Lesprincipauxexercicesdudiplômenationaldubrevet couronnent ces apprentissages.On trouved’unepart, la « réponsedéveloppéeàunequestion»quiaétéconstruitedepuislasixième,danslecadre de la pratique quotidienne de la classe, pour contribuer à faireacquérirlescapacités«raconter»,«décrire»et«expliquer».«Décrire»et« expliquer » sont liés : ces capacités signi ent toutes deux de choisir etd’ordonner,entissantdesrelations;ellesneserésumentpasàrépondreàla question « qu’est-ce que tu vois ? » car la description repose sur unedémarched’observationordonnée.«Raconter»signi emaîtriseruncertainnombredeconnaissances(onn’inventepasenhistoire-géographie)quel’onstructure dans le cadre xé par le professeur. D’autre part, l’analyse dedocument faitégalement l’objetd’unepartiede l’épreuvedubrevet :desquestions et/ou des consignes guident les élèves pour analyser ledocument,articulantprélèvementd’informationsetrecherchedusens,enrelationétroiteaveclescapacités«décrire»et«expliquer».
Le professeur doit à la fois s’appuyer sur ces acquis, les connaître et lesvaloriserpouramenersesélèvesàréussiretàprogressivementpréparerlesépreuves du baccalauréat. Cette progressivité des apprentissages estessentielleàconstruiresurlestroisannéesdulycée.Ainsi,ilapparaîtpeuef cace de préparer les élèves dès le début de l’année de seconde à lacomposition, d’autant qu’une partie de l’effectif s’orientera vers dessectionstechnologiquesoù lamaîtrisedecetexercicen’estpasattendue.
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Biensûr,celanesigni epasqu’ilnefautpasfairetravaillerlesélèvessurlacapacité rédactionnelle, mais proposer aux classes des évaluations tropdif ciles ou inadaptées, en décourage plus d’un et accroît le sentimentd’échec au lieu de sécuriser les élèves. Il s’agit plutôt, en seconde, des’appuyersurlesacquisducollègepourlesdévelopper.Ainsi,pourcequiestdel’analysededocument, ilconvientdelimiter,enparticulierauseindes cours, la place accordée au simple prélèvement d’informations, pourpasser davantage de temps à apprendre aux élèves à mobiliser lesconnaissances qui leur permettent de comprendre et d’analyser ledocument. Outre le fait que le prélèvement d’informations estchronophage,ilaccoutumelesélèvesàl’idéequ’ilsuf tderedirecequ’ilstrouventdansledocumentpourréussir.Cequiconduitimmanquablementaureprocherécurrentaumomentdelacorrectiondescopies:«Iln’yaquede la paraphrase ! ». Or, un élève habitué à cette pratique durant toutel’annéereproduirainévitablementlejourdubaccalauréatceàquoiilaétéentraîné. Il est par ailleurs intéressant de dépasser progressivement leguidagedutravailsurleoulesdocumentspardesquestions(commecelaest pratiquéà l’épreuvedubrevet) pour remplacer cesdernièresparuneconsignedetravail(ainsiqu’onlaretrouveaubaccalauréat).En n,onfaitprogresser les élèves en les invitant à rédiger en autonomie trèsrégulièrement, sur le tempsde laclasse,decourtessynthèses répondant,parexempleà laproblématiqueposéeendébutd’heureouà laconsigneaccompagnantl’étuded’undocument.
La classe de première constitue l’étape suivante dans cet apprentissage,mais,lànonplus,ilnes’agitpasd’atteindredirectementlesobjectifs xéspar le baccalauréat, même si les attendus de l’épreuve doivent êtremaîtrisés par les élèves : il est nécessaire d’inscrire les apprentissages làencore, dans la progressivité et dans le quotidien du travail de la classe.Plusquedesséancesdeméthodologiedelacompositionquineproduisentquedesrésultatslimités,laconstructiondecoursstructurésévitantlehorssujet, l’énoncé systématique d’une problématique à laquelle répond laleçon,constituentunepréparationef cace,parimitation,àconditionquele professeur donne à voir et à comprendre ce qu’il fait et de ne pasdépasserlecadreduprogramme–toutcommeonattendducandidatqu’ilnesortepasdusujet.Parailleurs,larédactionrégulièreparlesélèves,toutcommeenseconde,estaussitrèsformatrice.Encequiconcerneletravailgraphique,ilestpluspro tabledeconstruire,toutaulongdelaleçon,uncroquis ou un schéma, qui peut d’ailleurs utilement tenir lieu de traceécrite,plutôtquedeplaqueren ndeséquenceunexemple«toutfait»quidevraitêtreéventuellementrestituéàl’identiqueaumomentdel’examen.Onlecomprendra,lapréparationaubaccalauréats’intègreauquotidiendela classe et suppose, pour le professeur, une ré exion constante sur letravaildesélèvesencours.
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Uneépreuveaubaccalauréat écifique,quiévaluedescompétencesconstruitesdanstouteslesterminalesdessériesgénérales
De la même façon qu’il existe des programmes spéci ques pour laterminaleS,ilexisteuneépreuveparticulièred’histoire-géographiequineseconfondpasaveccelledeterminaleESetL.Cetteépreuveestdé nieparleBO.
Lechoixaété faitde reveniràuneépreuveécritemaisson format,ainsique ses attendus, (même si les compétences évaluées sont en cohérenceavecl’épreuvedevantêtrepasséeparlesélèvesdeterminaleséconomiquesetlittéraires)sontdifférents.Ils’agitbiend’acterladifférencedeformationenhistoire-géographieentrelesélèvesdessériesgénérales:quatreheurestrente hebdomadaires sur le cycle terminale en série S contre les huitheureshebdomadaires enpremière et terminale ES et L.Cettedifférenced’horaire ne permet pas l’acquisition de connaissances et de capacitésautantdéveloppéesenterminaleSquedanslessériesESetL.
L’épreuve de terminale S dure trois heures, et non quatre comme enterminaleESetL.Elleestcomposéededeuxexercices :unecompositiond’unepart,auquellecandidatpeutconsacrerenvironuneheureetdemieàuneheure trois quarts, et d’une analyse de document(s) ou d’un croquisd’autrepart(environuneheureàuneheureetquart).
La composition de terminale S doit s’entendre comme « une réponseorganiséecomportantuneintroduction,plusieursparagraphesetunebrèveconclusion ». Il s’agit bien d’être capable d’analyser un sujet, puis derépondre de façon pertinente à une problématique par un proposs’appuyant sur des connaissances maîtrisées et organisées, intégrant, sipossible, une production graphique. Mais les attendus ne sont pasexactementlesmêmesquepourlesélèvesdeterminaleESetLpuisqu’onnepeutpas consacrer lamêmeduréede travail à l’exercice.Deplus, leschapitres étant nécessairement traités de façon plus synthétique enterminaleS,lesconnaissancesserontobligatoirementmoinsapprofondies.En n, la formede lacompositiondeterminalescienti quepeutêtreplus«souple»quecelleterminaleESetL,cequinesigni eaucunementquelesidées ne doivent pas être claires et structurées pour former un véritableraisonnement.
Ladeuxièmepartiedel’épreuvepeutprendrelaformed’uneanalysed’unou deux documents. On attend des candidats qu’ils « fassent preuve deleur capacité à comprendre le contenu du ou des document(s) », à « en
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dégager les apports et les limites », et « lorsque deux documents sontproposés, qu’ils les mettent en relation en montrant l’intérêt de cetteconfrontation ». Là encore, l’exercice est différent pour les élèves determinaleSd’unepartetdeterminaleESetLd’autrepart,cequiestbienmarquéparl’intitulédifférent:«étudecritiqueduoudesdocument(s)»enséries économique et littéraire et « analyse de document(s) » en sériescienti que.Mêmesidanstouslescas,ils’agitdemontrerquel’onmaîtriselesdémarchesdel’analysededocumentenhistoireouengéographie,uneré exioncritiqueplusapprofondie estattenduepour l’épreuvedes sériesESetL.L’essentielestd’évaluerlacapacitéqu’aeuelecandidatàrépondrede façon pertinente à la consigne qui lui était donnée, sans attendre unplan particulier, même si les idées ici aussi doivent être structurées.La deuxième partie de l’épreuve peut consister en la réalisation d’uncroquis.CinqcroquispeuventêtredemandésaubaccalauréatensérieS :« Pôles et ux de la mondialisation » ; « Une inégale intégration desterritoires dans la mondialisation » ; « Les dynamiques territoriales desÉtats-Unis » ; « Les dynamiques territoriales du Brésil » ; « Le continentafricain : contrastes de développement et inégale intégration dans lamondialisation».
Oncomprendrabienque,du faitd’unhorairedifférentd’enseignementàpartir de la classe de première et durant l’année de terminale, d’unprogramme spéci que et d’une épreuve de baccalauréat plus courte etavec des attendus propres, l’enseignement d’histoire-géographie enterminale S doit être pensé différemment de celui en terminale ES et L.C’est tout l’enjeude lasecondepartiedecetouvrage.Ellecomprendà lafoisdesmisesaupointscienti quesconcernant leprogrammespéci quede terminale scienti que, ainsi que des propositions de scénariipédagogiques,accompagnéesderessourcespouvantêtreutiliséesencours,adaptéesauxhorairesdecetteclasseetdespages«Verslebac»prenantencomptelesattenduspropresàlaterminaleS.
PRÉSENTATION
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HISTOIRE
Rappelduprogrammed’histoireterminaleS
THÈME1INTRODUCTIF–LERAPPORTDESSOCIÉTÉSÀLEURPASSÉ(4-5HEURES)
QUESTION–LESMÉMOIRES:LECTUREHISTORIQUEL’historienetlesmémoiresdelasecondeguerremondialeenFranceL’historienetlesmémoiresdelaguerred’Algérie
THÈME2–GRANDESPUISSANCESETCONFLITSDANSLEMONDEDEPUIS1945(14-15HEURES)
QUESTION–LESCHEMINSDELAPUISSANCELesÉtats-Unisetlemondedepuis1945LaChineetlemondedepuis1949
QUESTION–UNFOYERDECONFLITSLeProcheetleMoyen-Orient,unfoyerdeconflitsdepuislafindelasecondeguerremondiale
THÈME3–DYNAMIQUESGÉOGRAPHIQUESDEGRANDESAIRESCONTINENTALES(17-18HEURES)
QUESTION–L’ÉCHELLEDEL’ÉTAT-NATIONGouverner la France depuis 1946 : État, gouvernement, administration et opinionpublique
QUESTION–L’ÉCHELLECONTINENTALEUnegouvernanceeuropéennedepuisletraitédeMaastricht
QUESTION–L’ÉCHELLEMONDIALEUnegouvernanceéconomiquemondialedepuislesommetduG6de1975
HISTOIRE
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Miseenœuvre
Principaux éléments de problématique
Ils’agitdedistinguerhistoireetmémoire:lamémoireentretientunerelationaffe iveetmouvanteaveclepassé,l’histoireenestunereconstitutionscientifique,avecunobje ifdevérité.Àpartirdesannées1980,leshistoriensneconsidèrentplusseulementlamémoirecommeunesource,maiscommeunobjetd’étude.Ils’agitd’unepart,demontrercommentleshistoriensparviennentàme reàjourles«oublis»etlesdéformationsdecertainesmémoires;d’autrepart,qu’ilsnesontpasquedeschercheurs,qu’ilsparticipentaussiàdesdébatspublicsouàdesprocèsentantqu’experts.Larestitutiondeladémarchehistorique(contextualisation,analysecritiquedessources)permetdefaireapparaîtrelesdifférentstempsmémorielsetlesfa eursquiontcontribuéàleurapparition.
LESTEMPORALITÉSDELAMÉMOIREOFFICIELLEDELASECONDEGUERREMONDIALE
Dèsletravailpionnierd’HenryRoussosurleSyndromedeVichy en1987,unepériodisationdel’histoiredesmémoiresdelasecondeguerremondialeestétablie,empruntantauxcatégoriesdelapsychanalyse.Lepointdebasculesesituedanslesannées1970:avantdominentdesmémoirespatriotiques,après apparaissent de nouveaux enjeux mémoriels. À la Libération, lessouvenirstraumatiques(défaite,collaboration,guerrecivile)sontrefoulés,a nderestaurerl’uniténationale.EndénianttoutelégitimitéaurégimedeVichy et en imposant l’image d’une France unanimement résistante,gaullistesetcommunistesdonnentnaissanceaumytherésistancialiste:laFrance aurait été majoritairement résistante, ce qui traduit une forteamnésie.Lesdébutsdelaguerrefroideouvrentlavoieàune«batailledesmémoires»,chaquecampveillantà l’entretenir.Lesgaullistesexaltent lechefcharismatiquedelaFrancelibreetlescommunistesmettentenavantle lourdtributpayé (mythedes«75000fusillés»),a ndefaireoublier lepactegermano-soviétique.Àpartirde1958,deGaulles’emploieàrefermerlesblessurescauséesparlaguerrede1939-1945.Lamémoiregaulliennedela seconde guerre mondiale devient mémoire of cielle, en célébrant laRésistance par-delà ses divisions. Ainsi, si des mémoires résistantes
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différentes s’organisent, c’est toujours l’image d’une France opposée àl’occupant qui est célébrée : le consensus résistancialiste l’emporte.LapanthéonisationdeJeanMoulinen1964représenteunpointd’orguedecetteconstructionmémorielle.
La mort du Général en 1970, le déclin du parti communiste et lerenouvellementgénérationnelmettent nàl’amnésie.Le lmLeChagrinetla PitiédeMarcelOphüls (1971)et l’ouvragedeRobertPaxton,LaFrancedeVichy (1973) ouvrent une période de démythi cation. Le cinéastemet enlumièrelescompromissionsdesFrançaispendantl’Occupation,tandisquel’historien américain procède à une révolution épistémologique ens’intéressantàl’Étatfrançaisplutôtqu’àl’occupantnaziouauxrésistants,démontrant que l’initiative de la collaboration revient àVichy. Des lmspopulaires(Papyfaitdelarésistanceen1983)etdesscandales,commeceuxqui rattrapent le vichysto-résistant FrançoisMitterrand (francisque, gerbesur la tombe de Pétain, amitié avec Bousquet) contribuent aussi à ladéconstructiondela gurehéroïquedurésistant.LesprocèsBarbie(1987),Touvier (1994), Papon (1997) pour crime contre l’humanité, puis lareconnaissanceof cielledelacomplicitédel’Étatfrançaisdanslamiseenœuvre du génocide par Jacques Chirac en 1995 contribuent à unapaisementmémoriel relatif. Le choix du président FrançoisHollande defaireentrerauPanthéon,enmai2015,quatre guresdelaRésistanceaprèsune consultation par internet qui a révélé un intérêt populaire vivace,montre que la Résistance est encore capable de produire du « cimentnational»(PierreNora).
LAPLURALITÉDESMÉMOIRESDELASECONDEGUERREMONDIALE
Iln’yapasunemémoiredelasecondeguerremondialemaisdesmémoireséclatées :ancienscombattants,victimesciviles,anciensdéportés,anciensdu STO, prisonniers de guerre, communistes, gaullistes, pétainistes,populationsjuives…formentdescatégoriesdistinctesquitententchacunedefairereconnaîtreleurexpérience,leurssouffrances,etencommémorentséparémentlesouvenir.
Les mémoires résistantes et juives occuppent une place prépondérante.Àpartirdesannées1960(procèsEichmannen1961),lacommunautéjuiveintensi eseseffortspourfairereconnaîtrelaspéci citédugénocide,cequicorrespond aussi à combattre la progression de l’extrême-droite et dunégationnisme.Organisésenassociations,résistants(Fédérationnationaledes déportés et internés résistants et patriotes) et juifs (Fils et lles desdéportés juifsdeFrance) obtiennentdespouvoirspublicsdes réparations(indemnisationdesorphelinsdelaShoahen2000),etunereconnaissancequisematérialiseparlacréationdemuséesetdemémoriaux(Mémorialdela Shoah en 2005), l’établissement de journées commémoratives, laconstructiondemonuments,voirelevoted’uneloimémorielle(loiGayssotcondamnantlenégationnismeen1990).Cetteomniprésencedelamémoire
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résistante puis juive aurait pour conséquence, selon certains, d’enmarginaliserd’autresdanslecadred'uneconcurrencedesmémoires.
L’historiographie récente se caractérise par la diversi cation des travauxproduits, surdes catégories jusqu’alorsnégligées (Tziganes,homosexuels,prisonniersdeguerre,soldatsdestroupescoloniales,«Malgré-nous»…)etprouvequel’histoiredesmémoiresnepeutselimiteràcellesquioccupenten priorité l’espace public. Ont ainsi cultivé une mémoire « sur ladéfensive », les travailleurs français requis enAllemagne, de peur qu’onleurreproched’avoirpréféréleSTOaumaquis,ainsiqueoulessoldatsetlesprisonniersdeguerreàqui l’onattribuaitenpartie ladéfaitede1940.La mémoire pétainiste et néo-vichyste, qui a œuvré pour que lescollaborateurs soient amnistiés (en 1951 puis en 1953) et que l’action dePétain soit reconsidérée (s’appuyant sur les travaux de l’historien RobertAron,selonlequelPétainauraitmenélemêmecombatquedeGaullepourprotéger les Français, mais avec des moyens différents), s’estprogressivementétiolée,saufpourl’extrême-droite.
Les différentes mémoires du con it, motrices ou discrètes, en voied’effacement ou de reconnaissance peuvent entretenir des relationscon ictuelles, liées à une concurrence victimaire. Ainsi, les déportés etinternés politiques obtiennent, en 1992, de la Cour de cassation que lesrequisduSTOnepuissentpasseprévaloirdustatutdedéporté.
LERÔLESOCIALDEL’HISTORIEN
Leshistorienssontégalementdesacteursdesmémoires,neserait-cequ’enélaborant unemémoire savante. Par leurs recherches et parfois par leurengagement (Les Assassins de la mémoire de Pierre Vidal-Naquet, paru en1987), ils contribuent à informer un public plus ou moins large.Les historiens fournissent également des renseignements indispensablesauxtribunauxpourcomprendrelecontexteetlesfaitshistoriques.Mais,siJean-Pierre Azéma et Robert Paxton acceptent de témoigner au procèsPapon, Henry Rousso s’y refuse. Il ne se satisfait ni du statut de simpletémoinqueluioffrelajustice,nid’êtreenfermédansunquestionnementjudiciairequin’estpasceluidel’historien.Laprofessionrépondégalementaux sollicitations des pouvoirs politiques et de diverses institutions.AnnetteWieviorkaparticipeàlamissiond’étudesurlaspoliationdesJuifsde France de 1940 à 1944 (Mission Mattéoli) mise en place en 1997,contribuantàlaréactivationdelamémoirejuive.
Néanmoins les historiens se mé ent de toute instrumentalisation del’histoire et de la mémoire. En 1990, Madeleine Rébérioux critique la loiGayssot, estimant qu’il n’appartient pas à la loi de dire le « vrai » enhistoire. En 2007, les historiens s’investissent largement dans le débatprovoquépar ladécisiondeNicolasSarkozyde faire lire la lettredeGuyMôquet dans les lycées, en donnant un statut héroïque à la résistance.Faceaudevoirdemémoirequiestunedemandesociale,l’historiendoitse
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dégagerdelapressiondesacteursetconfronterlesdifférentesmémoires:expliquer, et non commémorer telle ou telle mémoire, ni soutenir desvérités«of cielles».
Ressources
DouzouLaurent,LaRésistancefrançaise:unehistoirepérilleuse,L’histoireendébats,coll.«PointsHistoire»,LeSeuil,2005.
LaboriePierre,LeChagrinetleVenin:LaFrancesousl’Occupation,mémoireetidéesreçues,Bayard,2011.
PaxtonRobert,LaFrancedeVichy1940-1944,coll.«Pointhistoire»,LeSeuil,1973.
RoussoHenry,LeSyndromedeVichy,LeSeuil,1987.
ConnanÉric,RoussoHenry,Vichy,unpasséquinepassepas,Fayard,1994,rééditionaugmentée,coll.«Folio»,Gallimard,1996.
WieviorkaAnne e,L’Èredutémoin,coll.«Pluriel»,Hache e,2002.
WieviorkaOlivier,LaMémoiredésunie.LeSouvenirpolitiquedesannéessombresdelaLibérationànosjours,coll.«L’Univershistorique»,LeSeuil,2010.
«Histoireetmémoiresdesdeuxguerresmondiales»,Canopé.[Enligne]cndp.fr/crdp-reims/memoire/default.htm
«Cheminsdemémoire.Àladécouvertedeslieuxdemémoire»,siteinterministérielrecensantleslieuxdemémoiremilitaires.[Enligne]cheminsdememoire.gouv.fr
SitedumémorialdelaShoah.[Enligne]memorialdelashoah.org
RouxJean-Pierre,PapetPierre,parcourspédagogique«LesmémoiresdelasecondeguerremondialeenFrance»,Ina-Jalons.[Enligne]fresques.ina.fr/jalons/
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Propositiondemiseenœuvre
4HEURES
SÉANCE1:L’HISTORIENETLACONSTRUCTIONDESMÉMOIRESDE1945ÀLAFINDESANNÉES1960
Question l conducteur :Comment se constituent ces mémoires etpourquoiletravaildeshistoriensest-ildif cile?
LEMYTHERÉSISTANCIALISTEETSESÉVOLUTIONS(1945-1971)Lediscoursd’août1944montrequedeGaulleprésente laFrancecommeunanimement résistante. Le professeur explique que les communistess’associentàcetteconstructionmémorielle,pourdesraisonsdifférentes,encultivantleursspéci cités.Cesdeuxmémoiresrésistantess’imposentdansl’espace public, en lien avec les impératifs des contextes national etinternational (guerre froideet ndu tripartisme). LediscoursdeMalrauxpour l’entrée de Jean Moulin au Panthéon, visionné au préalable à lamaison,permetdetravaillersurl’apogéedurésistancialismeetlamiseenplaced’unemémoired’Étatof cielle.
LERÔLELIMITÉETDIFFICILEDESHISTORIENSLe professeur explique les lois sur la consultation des archives, rendantdif cile les travaux historiques. Les élèves analysent des extraits del’introduction de Robert Paxton, pour dégager la thèse de RobertAron etl’apparitiond’unemémoirevichyste.Leprofesseursynthétise:lessourcesd’AronsontcellesdesminutesduprocèsdePétainetnondesarchivesdurégime,conduisantàuneversionerronédelapériode.
DESMÉMOIRESOUBLIÉESL’exempledelamémoirejuiveestmobilisé.Ens’appuyantsurdesextraitsdeSimoneVeil,lesélèvesexpliquentpourquoilessurvivantsjuifsnesontpas écoutés en 1945.Déportationpolitique et raciale sont confondues audétriment de la seconde, ce que con rme le lm de Resnais (Nuit etbrouillard,1955).Letravailscienti quedeshistorienssurlessourcesn’apasétéréalisé.
Le professeur complète avec la « mémoire repliée » des prisonniers deguerre,quirappelleladéfaite,àuneépoqueoùlaFrancesouhaiteaf chersagrandeur.
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Supports
DeGaulleàl’hôteldevilledeParis,25août1944,Ina.[Enligne]ina.fr
Article17delaloide2008surlesdélaisdelaconsultationdesarchives,Legifrance.[Enligne]legifrance.gouv.fr
Discoursd’AndréMalrauxlorsdutransfertdescendresdeJeanMoulinauPanthéon,19décembre1964,Ina.[Enligne]ina.fr
PaxtonRobert,LaFrancedeVichy,1940-1944,LeSeuil,1999,2 éd.,p.7-10.
ExtraitsdudiscoursdeSimoneVeildu26janvier2006àAmsterdam,FondationpourlamémoiredelaShoah.[Enligne]fondationshoah.org
SÉANCE2:L’HISTORIENCONTRIBUEAURÉVEILDESMÉMOIRESETAURETOURDESOUVENIRSREFOULÉS(1970-1990)
Question lconducteur :Quellesévolutionsconnaissent lesmémoiresdelasecondeguerremondialeenFrance?
UNNOUVEAUCONTEXTEPOURLACONSTRUCTIONDESMÉMOIRESLeprofesseurexpliquelechangementimpulséparMai68etlamortdedeGaulle. Les élèves analysent des extraits de lms qui ont fait date etpourquoi ils constituent une rupture. Un travail préparatoire sur lesaf chesetletitredes lmsdepuis1945estreprisetmontrequelecinématémoigne de la mémoire dominante d’une période et contribue à faireévoluerlesmémoires.
LA«RÉVOLUTIONPAXTONIENNE»(JEAN-PIERREAZÉMA)LesélèvesmettentenévidencelesapportsdeRobertPaxtonsurlerégimedeVichy et lamanière dont il a travaillé en remobilisant le travail de laséance 1. Le professeur synthétise cette révolution épistémologique :l’historienchoisitdes’intéresseràl’Étatfrançaisplutôtqu’àlaRésistanceou aux responsabilités allemandes. L’étude des notes et télégrammesenvoyésparVichyàBerlindans lesarchivesallemandes rendcaduque lathèsedu«bouclieretdel’épée».
UNEMÉMOIREJUIVEQUISORTDEL’OUBLILe professeur contextualise les éléments qui permettent l’expression decettemémoire : leprocèsEichmann (1961), la réévaluationdeVichyet lamontéedesthèsesnégationnistes.
Laclasseestséparéeendeuxpouranalyserlesacteursdel’expressiondecettemémoire : un groupe travaille sur le parcours (motivations, actionsmenées…)ducoupleKlarsfeld,unautresurleprojetdeClaudeLanzmann.Le professeur synthétise en indiquant que l’expression de cettemémoire
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est certes le fait de nombreux acteurs (cinéastes, associations, instancesjudiciaireslorsdeprocès,médias,autoritéspolitiquesaveclaloiGayssot),maisn’estpossiblequeparlesrecherchesdeshistoriensquis’appuientsurdessourcesdiverses.
Supports
LesfilmsLeChagrinetlaPitié,deMarcelOphüls,1971,etLacombeLucien,deLouisMalle,1974.
ExtraitsdePaxtonRobert,LaFrancedeVichy,1940-1944,LeSeuil,1999,2éd.,p.7-10.oudusujetdubachistoire-géographiesérieSdonnéàPondichéry.
ClariniJulie,«BeateetSergeKlarsfeld,uncoupledejusticiers»,LeMonde.fr,26mars2015.[Enligne]lemonde.fr
ClaudeLanzmannexpliqueShoahaujournaltélévisédu21avril1985,Ina-Jalons.[Enligne]fresques.ina.fr/jalons
SÉANCE3:L’HISTORIENCONTRIBUEÀL’APAISEMENTDESMÉMOIRESDELASECONDEGUERREMONDIALE(ANNÉES1990-2000)
Question lconducteur:Pourquoipeut-ondirequ’unelectureapaiséedesmémoiresdelasecondeguerremondialeestdésormaispossible?
LACOMPLEXITÉDESPARCOURSINDIVIDUELS:LECASMITTERRANDLes élèves préparent la séance à lamaison en analysant le parcours del’ancien président et s’interrogent sur la notion de « vichysto-résistant ».Le professeur présente les travaux de Pierre Laborie (voir Vers le bac).En croisant ces deux apports, ils rédigent une synthèse en classe pourmontrer que les travaux des historiens aboutissent à une vision plusnuancéedesFrançaissousl’occupation.
L’ÉVOLUTIONDELAMÉMOIREOFFICIELLED’ÉTATLesélèvesanalysentlediscoursdeJacquesChiracen1995,d’unepartsousl’angledelarupturedanslesilencetraditionneldelaRépubliquefrançaise(reconnaissance indéniable d’une responsabilité dans la déportation),d’autrepartenmontrantquecetterupturen’estpastotaleavecledomainerésistantialistedelamémoired’État(référenceàl’héroïsmedesrésistantset hommage aux « Justes de France »). Les choix présidentiels pour lesdernièresentréesauPanthéon (JacquesChiracen2007pour les JustesdeFrance, François Hollande en mai 2015) attestent de cette dualité.Le professeur illustre par des monuments, des cérémonies ou des datescommémorativesquedesmémoirespluriellessontacceptées.
DESHISTORIENSQUILUTTENTCONTRELENÉGATIONNISME
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DESHISTORIENSQUILUTTENTCONTRELENÉGATIONNISMEEns’appuyantsurl’interviewdePierreVidal-Naquet,lesélèvesrepèrentlesargumentsdesnégationnistes,puis enquoi consiste lemétierd’historienface à ces mensonges. On souligne le ton de sa réaction (simplicité,argumentation, fermeté, absence de polémique). Le professeur expliquequelaluttecontrelenégationnismepermetdemultiplierlestravauxetlespublicationsetau-delà,lareconnaissancedelasingularitédugénocideetd’unemémoirejuivehexagonale.
Supports
«LedossierMi errand»,L’Histoire,n°253,avril2001.[Enligne]histoire.presse.fr
DiscoursdeJacquesChiracdu16juillet1995pourlacommémorationdelarafleduVel’d’Hiv.
Lajournéenationaleàlamémoiredesvi imesdescrimesracistesetantisémitesdel’Étatfrançaisetd’hommagesaux«Justes»deFrance.[Enligne]cheminsdememoire.gouv.fr
Décretn°93-150du3février1993etloin°2000-644du10juillet2000instituantle16juilletcommejournéecommémorative.
«Leshistoriensfaceaunégationnisme»,interviewdePierreVidal-Naquet,26o obre1987,Ina-Jalons.[Enligne]fresques.ina.fr/jalons
SÉANCE4:DENOUVELLESMISSIONSDEL’HISTORIENFACEAUXMÉMOIRESDELASECONDEGUERREMONDIALE
Question l conducteur :Comment se situe l’historien dans les débatscontemporainssurlesmémoires?
LESHISTORIENSQUESTIONNENTDESMÉMOIRESOUBLIÉESLesélèvestravaillentsurlamémoireoubliéedesTziganesàpartirdusiteinternetUnemémoirefrançaise.LesTsiganespendantlasecondeguerremondiale,1939-1946.Ilscherchentlesacteursactuelsdecesmémoires,émettentdeshypothèses sur les raisons de ces oublis, mais aussi sur les causes quiexpliquent le réveil de ces mémoires. Le professeur complète parl’évocationd’Oradour-sur-Glane,oùdifférentesmémoiresseréconcilientàla nduxx siècle.
LESHISTORIENSDANSLESPRÉTOIRES
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LESHISTORIENSDANSLESPRÉTOIRESLa classe est divisée endeux groupes pour ré échir sur les positions deshistoriens lors des procès Papon ou Touvier : un groupe cherche desarguments qui militent en faveur de la présence d’historiens dans lesprétoires, l’autre en défaveur. Le professeur synthétise : les historiensdoiventétablirlesfaitsetnonlesremémorer.Cesprocèsn’apportentrienàl’histoire.La justicen’éclairepas lepassé,aumieux,elleéclaire l’opinionpublique.Unprocèsn’estpasuntémoignagepour l’histoiremaisunactedejusticevisantunindividuàquilasociétédemandedescomptes.
LESHISTORIENSREFUSENTD’ÊTREINSTRUMENTALISÉSLeprofesseurrappellelapolémiquesuscitéeparlademandeduprésidentSarkozy en 2007 de lire la lettre de Guy Môquet à tous les lycéens.Lafondationducomitédevigilancefaceauxusagespublicsdel’histoireestcontextualisée.Lesélèvesanalysentdesextraitsdumanifestedececomitépourproposerenconclusionunedé nitiondel’histoire,delamémoireetlesrisquesdes loismémorielles.Faceà l’in ationdecesdernièresdepuis1990, leshistoriensœuvrentpourque lepolitiquen’interviennepasdansl’écrituredel’histoirea ndenepasdébouchersurunehistoireof cielle.
Supports
Unemémoirefrançaise.LesTsiganespendantlasecondeguerremondiale,1939-1946.[Enligne]memoires-tsiganes1939-1946.fr
WiederThomas,«ÀOradour-sur-Glane,mémoiresvivesfranco-allemandes»,LeMonde.fr,2septembre2013.[Enligne]lemonde.fr
Lévy-WillardAnne e,«LaFrancen’enapasfiniaveccesannéesnoires»,interviewdel’historienfrançaisHenryRousso,Libération.fr,19février2007.[Enligne]liberation.fr
WeillNicolas,«Ledilemmedeshistorienscitésàcomparaître»,LeMonde.fr,16o obre1997.[Enligne]lemonde.fr
«GuyMôquet,Sarkozyetleromannational»,L’Histoire,n°323,septembre2007.[Enligne]histoire.presse.fr
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L’HISTORIENETLESMÉMOIRESDELASECONDEGUERREMONDIALEENFRANCE-TABLEAUDESYNTHÈSE
MOTS-CLÉS Séances1et2
GroupesmémorielsHistoireLoiGayssotMémoireMémoireofficielleMémoiresconcurrentesRésistancialismeSourceshistoriquesShoahTravaildemémoire
Séances3et4
DevoirdemémoireJustesLoismémoriellesMalgré-nousMémoireofficielleMémoirenationaleNégationnismeTsiganesVichysto-résistant
CAPACITÉSDÉVELOPPÉES
Séances1et2
Réinvestirsesconnaissancesacquisesenclassedepremière.Comprendrelesensgénérald’undocumentet
leme reenrelationavecunesituationhistorique.Identifierdesdocuments(nature,auteur,
destinataire,contexte).Analyserdesimages.Exercerunregardcritiquesurdesdocuments
Séances3et4
Meneràbienunerechercheindividuelleoucolle ive.Visionnerundocumentaireetenexprimer
oralementlesidées-clés.Préleverdesinformations.Comprendrelesensgénérald’undocumentet
leme reenrelationavecunesituationhistorique.Consulteretanalyserdesressources
documentairesenligne.Me reenrelationlesthèmesd’a ualitéetle
programme.Périodiserlescontinuitésetruptures
chronologiques.
POURALLERPLUSLOIN
Ilestpossibledetraitercechapitreàpartirdudossiertrèscompletproposéparlesite Ina-Jalonspourl’histoire:«LesmémoiresdelasecondeguerremondialeenFrance».Ilmetenligneunesériedevidéosavecdesquestionnaires(adaptables)surce equestion,selonleplansuivant:A-Del’après-guerreauxannées1960B-Lesannées1970-1980C-Lesannées1990-2000Il est dès lors souhaitable, pour perme re aux élèves de se familiariser avec ce e ressourcedocumentaire gratuite, de leur demander de regarder certaines vidéos avant chaque cours, puis d’enreprendreenclassel’analyse.
RouxJean-Pierre,PapetPierre,parcourspédagogique«LesmémoiresdelasecondeguerremondialeenFrance»,Ina-Jalons.[Enligne]fresques.ina.fr/jalons
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Verslebac
ANALYSED’UNDOCUMENT
Consigne :Aprèsavoir rappelé le contextede la sortiedu lmdeMarcelOphüls,LeChagrinetlaPitié,vousmontrerezcommentcedocumentrelèvedifférentes visions de la résistance qui se sont succédées chez leshistoriens.
«OnsesertdelaRésistance,toutenladénigrant»
«OnsesertdelaRésistance,toutenladénigrant»,interviewdel’historienPierreLaborieparBéatriceVallaeysparuedansLibération,le29janvier2011,àl’occasiondelasortiesonlivre,LeChagrinetleVenin,LaFrancesousl’Occupation,mémoireetidéesreçues*.
Source:BéatriceVallaeys,«OnsesertdelaRésistance,toutenladénigrant», Libération,29janvier2011,[Enligne]Liberation.fr
PISTESDECORRECTION
Le contexte explique le changement dans les représentations de larésistance. 1971 voit le déclin du gaullisme et du communisme quiportaientlamémoirerésistancialiste.C’estaussil’atmosphèrede1968quipermetuneremiseencausedelaparoledesgénérationsprécédentes,parunegénérationnéeaprèsguerre.
TROISVISIONSDELARÉSISTANCEAPPARAISSENTSELONLESÉPOQUESLapremièrepériodeestcellede1945audébutdesannées1970,celledurésistancialiste, une sorte d’hagiographie de la résistance, quiminore lescollaborateurs et la responsabilité de Vichy au pro t d’une Francemajoritairement résistante. Cette vision est relayée par des historienscommeRobertAronetportéeparlescommunistesetlesgaullistes.
Ladeuxièmepériodecommenceavec le lmdeMarcelOphüls,qui« faitdate» (Jean-PierreAzema)dansl’histoiredesmémoires. Ilvaà l’encontredesmémoiresdominantesde lapériodeprécédente.MaisPierreLaborieyvoituneffet secondaire : la «vulgate »qui s’imposealorsest celled’unerésistance trèsminoritaire,voired’unmythede la résistance,deFrançais«mous,veules».Lescollaborateurssontaussidédouanésdeleursactions,aumilieudecesFrançaismajoritairementattentistes.
Latroisièmepériodedansl’historiographie,actuelle,danslaquelles’inscritl’ouvragedePierreLaborie,sedétachedel’hagiographiedelarésistanceetdelaremiseencausedesesactions.L’historienconsidèrequ’ilestdif cile
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de comptabiliser les résistants car il existe une résistance passive, unesociétédu«non-consentement»,quis’exprimepardesactionsdiscrètesetdif ciles à recenser. L’absence de révolte ne signi e pas la soumission.Leshistoriens,depuisvingtans,réexaminentlaRésistancedanstoutessesformesetpasseulementsesactionsarmées.
S’esquisse dans cette interview la nécessité d’une réécriture permanentede l’histoire, souvent à partir de sources identiques, réinterprétées selonl’époque. L’historienprend alors tout son rôle et retravaille lesmémoiresantérieures.
L’HISTORIENETLESMÉMOIRESDELASECONDEGUERREMONDIALEENFRANCE
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GÉOGRAPHIE
RappelduprogrammedegéographieterminaleS
THÈME1INTRODUCTIF–CLÉSDELECTURED’UNMONDECOMPLEXE(4-5HEURES)
QUESTION–DESCARTESPOURCOMPRENDRELEMONDEDescartespourcomprendrelemonde
THÈME2–LESDYNAMIQUESDELAMONDIALISATION(8-9HEURES)
QUESTION–LAMONDIALISATION,FONCTIONNEMENTETTERRITOIRESUnproduitmondialisé(étudedecas):l’iPhoneA eurs,fluxetdébatsDesterritoiresinégalementintégrésàlamondialisationLese acesmaritimes,approchegéostratégique
THÈME3–DYNAMIQUESGÉOGRAPHIQUESDEGRANDESAIRESCONTINENTALES(17-18HEURES)
QUESTION–L’AMÉRIQUE:PUISSANCEDUNORD,AFFIRMATIONDUSUDLecontinentaméricain:entretensionsetintégrationsrégionalesÉtats-Unis-Brésil:rôlemondial,dynamiquesterritoriales
QUESTION–L’AFRIQUE:LESDÉFISDUDÉVELOPPEMENTLeSahara:ressources,conflits(étudedecas)Lecontinentafricainfaceaudéveloppementetàlamondialisation
QUESTION–L’ASIEDUSUDETDEL’EST:LESENJEUXDELACROISSANCEL’AsieduSudetdel’Est,lesdéfisdelapopulationetdelacroissanceJapon-Chine:concurrencesrégionales,ambitionmondiales
GÉOGRAPHIE
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DESCARTESPOURCOMPRENDRELEMONDE
Miseenœuvre
Principaux éléments de problématique
Lechapitreconstitueuneintrodu ionauxproblématiquesduprogramme.Ilpermetdetravaillerlesméthodesdelagéographie(analysedecartesetréalisationdecroquis)etderéfléchirauxnotionslespluspertinentes.
Comprendrelemondeconstitueunenjeuciviqueetpermetunexercicedegéographiepro e ive.Cechapitreestuneétudedesproblèmesposésparlale uredecartesmaisaussiuneinvitationàunepremièrele uredel’organisationdumondeàtraversquatregrilles:géopolitique,géoéconomique,géoculturelleetgéoenvironnementale.
LESDYNAMIQUESDELAMONDIALISATION
On ne peut réduire le monde à la seule grille de lecture de lamondialisationéconomiqueet nancière.Outrelefaitqu’elleadesracinesanciennes que les géographes commeChristianGrataloup ont permis deprendreencompte,lamondialisationestsouventperçuesousl’angletropsimplistedufosséNord/Sud.Lesinégalitésdedéveloppementcontinuentàstructurer la grille de lecture du monde, mais la césure Nord/Sud,matérialiséeparuneligneépaisseaumilieuduplanisphère,n’enrendpluscompte,mêmeenévoquantlesNords,lesSuds,lesSudsduNordouencorelesNordsduSud (cette errance croissantedans ladénominationmontrequ’elleestdemoinsenmoinsopérante).
Lesmutationsontpermisledéveloppementdenouveauxacteurs,dontlespays émergents, à croissance rapide. Ils ont été dé nis par les banquesd’investissement (Goldman Sachs créa l’acronyme Bric – Brésil, Russie,Inde, Chine – en 2001 pour désigner les marchés particulièrementrentables). On mesure le succès de cette expression sans pour autanttoujoursbiencernerl’hétérogénéitédecetensemble.ChristopheJaffrelotamontréàquelpointlespaysémergentsconstituentunensemblepuissantet complexe car ces pays sont concurrents entre eux (L’Enjeu mondial, lespaysémergents, PressesdeSciencesPo,2008).Si laChineet l’Inde,quiontsuivi des stratégies différentes, s’imposent comme des puissancesincontournables,lepoidsdelaRussieetduBrésilestànuancer.LaRussieest un pays « ré-émergent » qui s’appuie sur les exportations
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d’hydrocarbures mais dont l’appareil industriel a été amoindri par latransition postsoviétique. Le Brésil, même s’il possède des atouts, risqued’êtrelimitéàunrôledepourvoyeurdematièrespremières.
La mondialisation redessine l’espace mondial puisque les puissancesémergentes cherchent à convertir leur développement économique enpositiongéopolitique.
D’AUTRESLOGIQUESÀPRENDREENCOMPTE
D’autres grilles doivent être mobilisées pour saisir le monde actuel.La première est démographique, la population mondiale continuera àaugmenter :plusdeseptmilliardsd’hommesaujourd’huietpresquehuitmilliards prévus en 2025. Pour autant, ce constat doit être cerné de plusprès:levieillissementdelapopulations’accélèreenEurope,enAmériqueduNordetenChine,alorsquelapopulationafricainepourraitpasserd’unmilliarden2011àdeuxmilliardsen2050.Lapopulationmondialeestausside plus en plus urbaine (63 % de la population en 2030). La grillegéoenvironnementaleest là,opérante, surtoutsielleestcroiséeavecuneproblématiquetellequel’émissiondesgazàeffetdeserre(GES).
Les dé s sont nombreux : en terminale, le professeur insiste sur leursaspectsgéopolitiquesenmontrantparexemplequefaceàl’augmentationde leur population, l’Asie, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord serontcontraintsd’importerdesdenréesalimentairesproduitesenAmériqueduSud.Cetensemblerégionalestdestinéàdevenirlegrenierdelaplanète,cequi pose des questions comme l’illustrent les polémiques produites parl’achatdeterresenAfriqueparlaChine.
Les ressources naturelles constituent aussi des enjeux géopolitiques.La montée en puissance des pays émergents fort demandeurs d’énergiemodi e notamment le marché du pétrole. Tandis que les paysconsommateurscherchentàdiversi erleurssourcesd’approvisionnement,les compagnies chinoises s’implantent directement enAfrique, demêmeque les compagnies étasuniennes qui cherchent à éviter les risquesinhérentsauMoyen-Orient.LaRussiedémontrequ’ellepeututiliserlegazcommemoyendepressionsurl’Ukraine.Lestensionsengendréesparlecontrôledesressources(hydrocarbures,eau,denrées alimentaires) se traduisent par des crises et des con its.Michel Foucher évoque ainsi trois cent quarante-cinq con its d’intensitédiverseen2008danslemonde,ceux-ciaugmententd’autantplusquelesacteursnonétatiques impliqués sontdeplusenplusnombreux (réseauxterroristesouma eux).
Cependant, faceaumaintiendescon its,c’estaussiunmondederéseauqui se constitue. Le développement d’un espace virtuel qui abolit lesdistances constitue aussi une clé de compréhension du monde actuel.Ainsi, même si les États-Unis gardent le contrôle de tous les organes
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centraux du réseau internet, les communications s’accélèrent (Twitter,Facebook), à tel point que les réseaux virtuels ont des conséquencespolitiques (Printemps arabe) alors que certains États tentent de lesverrouiller(Chine).
Malgréunetendanceà l’effacementdesÉtatsetde leurs frontières, leursalliances, leurs con its, leur rayonnement demeurent des principesd’organisationdumondeactuel,dansunegrilledelecturegéopolitique.
UNMONDEPOLYCENTRIQUE:UNENÉCESSAIRERELECTUREDESÉQUILIBRES
Les changements récents provoqués par l’accélération des échangeséconomiques mais aussi par les multiples pressions géopolitiques fontentrerlemondedans«l’èredelapuissancerelative».LesÉtats-Unisetdemanière plus générale l’Occident ne sont plus enmesure d’imposer leurmonopole sur les affaires du monde. En effet, même si la puissanceétasunienneestencoreprédominante,elles’effrite.Lemondemultipolaireen formation se traduit par l’accès des émergents aux réunions degouvernancemondiale.Ainsi,leG20réunitaujourd’huilesprincipauxpaysmoteurs, regroupe90%de lapopulationmondialeet lesdeux tiersde larichesse. Le principe d’une gouvernance mondiale progresse maisdif cilement, c’est pourquoi la réforme du Conseil de sécurité de l’ONU,avec de nouveaux membres dotés du droit de veto, s’avère délicate.Demême,lajusticepénaleinternationaleprogressedepuislacréationdelacourdeLaHayeen1998,maiscertainspays (Russie,États-Unis,ChineetInde)refusentdecoopérerouderati erletraitéquil’institue.
Ilconvientdereformulerladescriptiondumondeenimaginantunmondepolycentrique.BienloindesanciennesdivisionsEst/Ouest,Nord/Sud,ilestpossible d’imaginer un monde organisé autour de centres de pouvoir,d’États pivots (États-Unis, Chine) ou d’alliances régionales (Unioneuropéenne, Amérique latine). L’erreur serait de considérer que lamondialisationdes échangesproduitunmondeunique structurépardesvaleurspartagées,alorsqueprécisémentnousconstatonsunemultiplicitéde fractures à toutes les échelles. Il faut donc saisir toutes lescontradictions des phénomènes actuels qui, tout en raccourcissantl’espace-temps,produisentaussidesdiscontinuitésgéographiques.
L’approchegéoculturelles’avèrelà,féconde:lesgrandesaireslinguistiquesoureligieuses,l’inégaleconnexionàlatoile,lesgrandsévénementssportifsmondiaux (Jeux olympiques, championnat du monde de formule 1 oucoupedumondede football)dessinentunmondeà la fois fracturé,voireantagoniste,etenmêmetemps,deplusenplusorganiséselonlesmêmesstructures.C’estparlaconfrontationdesdifférentescartesquepeutselirela diffusion d’uneworld cultureet le maintien ou la renaissance defractures, parfois en réaction à cette pseudo-uniformisation culturelle.L’exerciceprospectif,consistantàanticiperleschangementsàvenir,forme
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les lycéens aux enjeux civiques et donne à la géographie toute sadimensionpédagogique.
Ressources
BonifacePascal,VédrineHubert,Atlasdumondeglobal,ArmandColin-Fayard,2008.
CarrouéLaurent,«LaMondialisationendébat»,LaDocumentationphotographique,n°8037,LaDocumentationfrançaise,2004.
FoucherMichel,LaBatailledescartes,FrançoisBourinÉditeur,2011.
FumeyGilles,GrataloupChristian,L’Atlasglobal,LesArènes,2014.
«Lesnouveaux(dés)équilibresmondiaux»,LaDocumentationphotographique,n°8072,LaDocumentationfrançaise,2009.
GiblinBéatrice(dir.),«Géographiedesconflits»,LaDocumentationphotographique,n°8086,LaDocumentationfrançaise,2012.
GrataloupChristian,«Représenterlemonde»,LaDocumentationphotographique,n°8084,LaDocumentationfrançaise,2011.
TertraisBruno,Atlasmilitaireetstratégique.Menaces,conflitsetforcesarméesdanslemonde,Autrement,2008.
TetartFranck(dir.),GrandAtlas2015,Autrement-Courrierinternational,2014.
VeyretYve eetArnouldPaul(dir.),Atlasdesdéveloppementsdurables,Autrement,2008.
«Nouveauregardscartographiquessurlamondialisation»,compterendudelajournéederéflexionorganiséeparl’ENSLyon,lesiteDgesco-Géoconfluencesetl’Institutfrançaisdel’Éducation(IFÉ),18mai2011,Géoconfluences,21septembre2013.[Enligne]geoconfluences.ens-lyon.fr
«Nord/Sud,unereprésentationdépasséedelamondialisation?»,entretienaveclegéographeChristianGrataloup,LesCafésgéographiques,14janvier2015.[Enligne]cafe-geo.net
«Atlasdelamondialisation2013–PressedeSciencesPo»,SciencesPoAtelierdecartographie.[Enligne]cartographie.sciences-po.fr
GéoCroquisBac,uneapplicationdestinéeauxélèvespourcomprendreetconstruiredescroquisenterminale,RéseauCanopé,2015.
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Propositiondemiseenœuvre
4HEURES
SÉANCE1:DESREPRÉSENTATIONSSIMPLIFIÉESDUMONDE,PASSÉETPRÉSENT
Question l conducteur : Une carte peut-elle dé nir le mondecontemporain?
L’HÉRITAGED’UNMONDEBINAIREETBIPOLAIREEnintroduction,lacartedurapport«Nord-Sud»initiéparWillyBrandten1980permetdediscuteraveclesélèvesdesreprésentationssymboliquesetcartographiquesdontnousavonshérité:unmonde«bipolaire»politiqueetéconomique(d’abordceluidelaguerrefroide,puisdesdisparitésNord-Sud)délimitéparune«ligne»arti cielle(d’abordle«rideaudefer»,puislaligne Nord-Sud). Onmontrera que cette représentation très simpli ée etobsolète conditionne encore notre lecture du monde en y ajoutant letroisièmeconceptopérantdansladernièredécennie,celuidelatriade.
QUELLECARTEPOURDÉCRIRELEMONDECONTEMPORAIN?LALECTUREGÉOÉCONOMIQUEDELAMONDIALISATIONEn apparence, la carte du commerce mondial de marchandises sembleinscrire la mondialisation économique, phénomène central du début deXXI siècle, dans une même logique simple d’explication. Les élèvesretrouvent une triade (qu’il faut commenter) et des écarts Nord-Sud.Pourautant,l’étudeprécised’unecartedescentpremiersportspermetdediscuter le concept d’émergence. On af nera encore, en changeantd’échelle, avec le commentaire d’une région portuaire (Richards Bay enAfriqueduSudparexemple)dontonpourramontrerl’importancedanslesroutesmaritimesinternationalesenutilisantlessitesdesuivienlignedesporte-conteneurs. L’importance de Richards Bay dans le commercemondialisé n’apparaît pas dans la carte du commerce mondial.Onconcluraavec lesélèves sur l’importanceduchangementd’échelleetsurlanécessitéd’avoird’autreslecturescartographiquesdumonde.
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Supports
L’imagedelacouverturedurapport«Nord-Sudunprogrammedesurvie»de1980,«LalimiteNord-Sud»,Mappemonde,décembre2007.[Enligne]mappemonde.mgm.fr;rubriquesImagedumois,Archives.
Carteducommerceinternationaldemarchandises,Atlasdelamondialisation,PressesdeSciencesPo,2013.
Cartedes«100premiersportsdemarchandisesdanslemondeen2013»,Questionsinternationales,LaDocumentationfrançaise,n°70,2014.[Enligne]diploweb.com
Cartedesportsd’Afriqueaustrale,Isemar,février2011.[Enligne]h p://isemar.asso.fr/fr/ressources/cartographie.php;rubriquesRessources,Cartographie.
Suividesporte-conteneurs:sitedeMarineTrafficetdeCMA-CGM.[Enligne]marinetraffic.cometcma-cgm.fr
SÉANCE2:UNMONDED’INÉGALITÉS
Question lconducteur:Lamondialisationréduit-elleslesinégalités?
DESINÉGALITÉSDERICHESSESETDEDÉVELOPPEMENTEncommentantlescartesparanamorphoseduproduitintérieurbrut(PIB)et de l’indicededéveloppementhumain (IDH), ondemanderaaux élèvesdemontrer la permanence d’inégalités de richesse et de développement.On pourra comparer les cartes les plus récentes aux cartes d’anciensmanuels.Pourautant, làencore,onremettraenperspective les inégalitéslocalesetlemanquedeprécisiondelareprésentationparanamorphoseàcetteéchelle,grâceàunecarteplusrégionale(l’Afriquesahélienne)enlescomparantaveclespayslesmoinsrichesducontinenteuropéen(Moldavie)ouaveclePIBparhabitantdel’Inde.
LESRESSOURCES,UNFACTEUREXPLICATIF?L’analyse au choix d’une ou deux cartes de ressources alimentaires,pétrolièresouaquifères,permetdemettreenperspectivelesdisparitésdedéveloppement en montrant à la fois que des disponibilités inégalespeuvent expliquer les inégalités de richesse,mais qu’elles peuvent aussiamener les élèves à trouver d’autres facteurs explicatifs de non-redistribution (dans lecasdesdisponibilitésénergétiquesde l’Afriqueparexemple).
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Supports
Cartesdel’Atlasdelamondialisation,PressesdeSciencesPo,2013.
Carte«PIBetPIBparhabitantauSahelen2011»,LaDocumentationfrançaise.[Enligne]ladocumentationfrancaise.fr;rubriqueCartes.
Carteintera ive«LacartedelaFAOdelafaimdanslemonde2015»,FAO.[Enligne]fao.org/hunger/fr
Carteintera ive«Ressourceseneaurenouvelabletotalesparhabitant(m3/hab.paran)»,Aquastat-FAO.[Enligne]fao.org/nr/water/aquastat/maps/World-Map.TRWR.cap_fra.htm
Dossiercartographiquesur«Lesénergiesdanslemonde:cartesetstatistiquesrécentes»,Géoconfluences,13juin2014.[Enligne]geoconfluences.ens-lyon.fr
SÉANCE3:UNELECTUREGÉOCULTURELLEDUMONDECONTEMPORAIN
Question lconducteur:Lamondialisationuniformise-t-ellelespratiquesculturelles?
L’OCCIDENTALISATION,UNEMONDIALISATIONCULTURELLE?La mondialisation est souvent assimilée trop rapidement à unehomogénéisation des cultures réduites à absorber l’in uence occidentaleet notamment américaine. Cette culturemainstream en provenance desÉtats-UnisouduRoyaume-Uniestabordéeàpartird’unplanisphèresurladiffusion des séries télévisées, de productions hollywoodiennes oumusicales. Cependant, ces « produits culturels mondialisés » nereprésententqu’unepartminoritairedelaproductionculturelle.Certes,ilsstandardisentunpeulesproductionsnationales,maisnemasquentpaslesspéci citésrégionalesquel’onpourraétudieràtraversl’exempledesjeuxvidéoouducinémaeuropéen.
LERÔLEDESNOUVELLESTECHNOLOGIESDEL’INFORMATIONETDELACOMMUNICATION(NTIC)Une carte montrant l’accès à internet dans le monde ou des câbles decommunication sous-marins permettra à la fois de rappeler que lamondialisationculturellepassepar lesNTIC,mais égalementqu’il y a làencoreunefortedisparitéentrelespayslesplusrichesetlesrégionsmoinsconnectées.
UNEGRANDEDIVERSITÉDESAIRESCULTURELLESÀ l’inverse, on utilisera les cartes des grandes aires linguistiques ou desreligions comme point de départ pour montrer, à la fois l’hétérogénéitéculturelle mais surtout la dif culté de cartographier ces phénomènes àl’échellemondialeounationalesanstenircomptedesminorités.
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Supports
CartesdeL’AtlasdesMondialisations,hors-série,LeMonde-LaVie,2011.
Petitecartographierécentedelaprodu iondejeuvidéos:«LaParisGamesWeek,unepetitecartographiedujeuvidéoen2014»,LeMonde.fr,5novembre2014.[Enligne]lemonde.fr/pixels
Sitedecartographiedescâblessous-marins,SubmarineCableMap.[Enligne]submarinecablemap.com
Cartedel’accèsinternetdanslemonde:«Lessurprisesdelacartedumondeselonlesconnexionsàinternet»,L’OBSRue89,23février2014.[Enligne]rue89.nouvelobs.com
«Cartographiemondialedesreligions»,émissionLeDessousdescartes,mai2011.[Enligne]ddc.arte.tv
SÉANCE4:LEMONDECONTEMPORAINENTRERÉSURGENCEDESÉTATSETGOUVERNANCEMONDIALE,UNELECTUREGÉOPOLITIQUE
Question lconducteur:Laglobalisationréduit-ellelacon ictualité?
LENUCLÉAIRE,FACTEURDESTABILITÉ?La carte du nucléaire militaire rappelle que l’ordre géopolitique a étéassurédepuisundemi-siècleparl’équilibredeladissuasion.Pourautant,plusieurs questions se posent : la dispersion du savoir-faire nucléaire,l’aspirationdecertainsémergentsàl’obtentiondunucléairemilitaireetlespolitiques de désarmement. Par ailleurs, si le nombre de guerresinterétatiquesdiminue,lerecoursàladissuasionnucléairen’empêchepaslamultiplicationdescon its.
LAMONTÉEDESNOUVEAUXCONFLITS:UNFACTEURD’INSTABILITÉ?LescartesdeL’Atlasdesguerresetcon itsamènentlesélèvesàs’interrogersur les notions de guerres asymétriques, d’États défaillants et plusglobalementsurlesdif cultésdemaintiendelapaix,alorsmêmequelesvictimes civiles sont de plus en plus nombreuses. On pourra changerd’échelleetétudierlecasduMalioudelaSyriea ndemontrerladif cultéde cartographier les con its les plus locaux. On peut aussi choisird’exploiter l’émission duDessous des cartes sur les con its potentiels d’ici2030a nd’initierlesélèvesàlaprospectivegéopolitique.
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UNEGOUVERNANCEGÉOPOLITIQUEMONDIALE:UNERÉALITÉ?En étudiant la carte de Michel Foucher, les élèves comprennent que laglobalisationnesigni eni la ndesÉtats,ni ladisparitiondesfrontières.Dèslors,l’enjeud’unegouvernancepolitiquemondialepeutêtreposé,soitparunecartedes interventionsdescasquesbleusdel’ONU,soitparcelledesinterventionsdel’Otanouencoreparunecartographiedela«nouvellegouvernance mondiale » qui montre que c’est désormais l’affaire,complexe,desanciennespuissancesdominantesmaisaussidesémergentsauseinduG20.
Supports
Ca aruzzaAmaël,Atlasdesguerresetconflits,Autrement,2014.
TertraisBruno,Atlasmondialdunucléaire:civiletmilitaire,Autrement,2011.
«Conflits2030:lesfa eurs»,émissionLeDessousdescartes.[Enligne]ddc.arte.tv
FoucherMichel,cartedes«NouveauxÉtatsetnouvellesfrontièresdepuis1990»,LaDocumentationfrançaise,20janvier2010.[Enligne]ladocumentationfrancaise.fr
Postel-VinayKaroline,«Nouvellegouvernancemondiale»,SciencesPo–Centrederechercheinternationale,septembre2012.[Enligne]science o.fr/ceri/fr
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DESCARTESPOURCOMPRENDRELEMONDE-TABLEAUDESYNTHÈSE
MOTS-CLÉS AsymétrieConflit,confli ualitéÉchellegéographiqueFrontièreGéopolitiqueInégalitéMondialisationMultipolaritéNouvellestechnologiesdel’informationetdelacommunication(NTIC).Proje ionPaysémergentRéseauxAiredepuissance
CAPACITÉSDÉVELOPPÉES
Nommeretlocaliserlesgrandsrepèresgéographiquesterrestresetunlieudansune acegéographique.Repérerunlieuouune acesurdescartesàéchellesousystèmesdeproje iondifférents.Lireundocument(carte)etenexprimerparécritlesidées-clés,lespartiesoucomposantes
essentielles.Cernerlesensgénérald’undocumentetleme reenrelationaveclasituationgéographique
étudiée.Développersonsenscritique.UtiliserlesTice.
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Verslebac
ANALYSEDEDOCUMENTS
Sujet:Lescartespermettent-ellesd’expliquerlacomplexitédumonde?
Consigne :En analysant les documents, vous vous demanderez si, d’unpointdevuegéopolitique,onpeutparlerd’unmondeinstableaudébutduXXI siècle.Puis,dansuneapprochecritique,vousmontrerezquelssontlesapportsetleslimitesdecesdeuxcartespourreprésenterlescon itsetleszonesdetension.
CartedelapuissancemilitaireaudébutduXXI siècle
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Source : ################################################################################################################################################©#####,####,2015.
Chaque carte ou graphique de l’ouvrage est également isolé en annexe,
agrandi en plein format pour faciliter son exploitation en classe.
(exemple fonctionnel en page suivante)
Propositiondecartographiedel’internationaledjihadiste
Source:«Autoroutedudjihadismeinternational»parPhilippeRekacewicz, orientxxi.info
PISTESDECORRECTIONS
LESGARANTIESDELASTABILITÉMONDIALEAUXXI SIÈCLEVingt-cinq ans après la guerre froide, les guerres interétatiques ontlargement diminué en lien avec une mondialisation qui favorise la paixpour accentuer les échanges. Les continents américains, européen,l’Océanie, l’Asie orientale et l’Asie du Sud sont épargnés, hormis lapermanence de contentieux historiques (Chine-Taïwan, Cachemire entreIndeetPakistan…)(premièrecarte).
Cettestabilitérelativeaétégarantieparlapuissancemilitaireaméricaine,lerôledeladissuasionnucléairemaisaussidestraitésdedénucléarisation(premièrecarte),ainsiquelesnégociationsauseinduConseildesécuritéde l’ONU et le poids des alliances militaires comme l’ONU (première etdeuxièmecarte).
LESFACTEURSD’INSTABILITÉSGÉOPOLITIQUESPour autant, des puissances anciennes et nouvelles accélèrent leurréarmement (Chine, Russie mais aussi Arabie Saoudite ou Iran), avecparfoisl’ambitiondesedoterdel’armementnucléaireetdedominerleurespace régional. Des « proto-États révolutionnaires » renforcent ladéstabilisationduProcheetMoyen-Orient.
Un nouvel « arc de crises » s’est redessiné de l’Afrique saharienne etsubsaharienne, en passant par le Proche-Orient jusqu’au Pakistan
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(première et deuxième carte) nourri par les con its d’un nouveau type :contestationsetrévolutionsdu«Printempsarabe»de2011,guerrescivilesrécurrentesenAfriquesubsaharienneetenAfriquede l’Est, terrorismeetguerrescivilesauProcheetMoyen-Orient(Syrie,Yémen,Irak…)enplusducon it israëlo-palestinien,pour l’instant, insoluble (premièreetdeuxièmecarte).
Sicescon itsrestentrégionaux,ilsdéclenchentuneréactioninternationalesousmandatdel’ONU(Afghanistan),delapartdecoalitionsoccidentales(Otan en Libye), ou sous l’égide d’un seul pays (la France au Mali).Les grandes puissancesmilitaires peinent cependant à régler ces con its(Afghanistan, Irak), notamment parce que les opinions publiquesoccidentales ne veulent pas d’intervention terrestre, ce qui encourage laguerreasymétriqueàdistance(attaquesdedrones,cf.deuxièmecarte).
CARTOGRAPHIERLESCONFLITS,UNDÉFISCIENTIFIQUEETUNENJEUPOLITIQUEPar dé nition, une carte des con its peut très vite devenir obsolète dèsqu’une résolution de cessez-le-feu ou un accord de paix est trouvé.Demême, l’échelle planétaire ne permet pas de visualiser la localisationprécise des interventionsmilitaires (Mali par exemple) et nemontre pas,dans le cas de la première carte, les rami cations terroristesinternationalesde«l’Étatislamique»parexemple.
LatentativedePhilippeRekacewiczapourobjectifdecartographier,doncde représenter spatialement, un phénomène géopolitique, le djihadisme,dontl’objectifaf chéestd’êtreprésentpartout,dansuntempstrèscourtet très médiatique (la carte est d’ailleurs intitulée « autoroute dudjihadisme », ce qui fait allusion aux « autoroutes de l’information »).Elle montre aussi que la fragilité ou l’effondrement des États sont leterreaudesorganisationsdjihadistes.
Onpourra cependant s’interroger sur le choixdes gurés et des intitulésquimettentsurlemêmeplanlesactionsmilitairesisraëliennesàGazaetlesinterventionsoccidentalesenAfghanistanparexemple.Danslamêmedémarchecritique,onpeutpointerles guréslinéairesquitendentàfairepenserquel’ensembledesorganisationsdjihadistesnesontqu’unseuletmêmeréseau.
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Proposition de cartographie de l’internationale djihadiste
Source : « Autoroute du djihadisme international » par Philippe Rekacewicz, orientxxi.info
A G I R
AGIR POUR VOUS ACCOMPAGNER AU QUOTIDIEN
ISSN 2425-9861ISBN 978-2-240-03701-5
Réf. 7800WT08
Histoire Géographie Terminale S est destiné à aider les professeurs d’histoireet de géographie à s’approprier et à mettre en œuvre les nouveaux programmesde la classe terminale de la série S. Dans le contexte du rétablissement de ces enseignements en terminale S, l’enjeu est de bien différencier les séries littéraires et économiques et sociales de la série scientifique, tant du point de vue du contenu de ce qui doit être enseigné que de la préparation des épreuves du baccalauréat, puisque les programmes, les horaires hebdoma-daires et les exigences attendues sont différents.
L’univers éditorial « Agir » propose des démarches pédagogiques concrètes, cet ouvrage donne des clés essentielles pour traiter de manière réaliste et efficace l’histoire et la géographie en classe de terminale S. Il est totalement conforme à l’esprit et à la lettre des programmes, et répond parfaitement aux finalités de la préparation de l’épreuve du baccalauréat de cette série.
Ouvrage coordonné par Valérie Dautresme, IA-IPR d’histoire-géographie.
Cet ouvrage existe en version ePub.