Explosions au Congo : au moins 146 morts à
Brazzaville, situation "très lourde" selon les autorités
Les habitations ont été soufflées dans un rayon de plusieurs centaines de
mètres autour du lieu de l'explosion.© Ifrikia Kengué, pour J.A.
Le bilan provisoire des explosions est de 146 morts, mais de nombreux
corps gisent encore sous les décombres. © Ifrikia Kengué, pour J.A.
« 400 jeunes recrues se trouvaient dans le régiment et ont été enterrées vite fait »
Un panache de fumée s'élève suite
aux explosions à Brazzaville. © AFP
04/03/2012 à 17h:23 Par T. Lubabu M.K. et E.
Colette
Suite aux explosions survenues dimanche matin à
Brazzaville, la capitale congolaise, les autorités
parlent d'une situation très grave. Il y aurait, pour le
moment, au moins 146 morts.
Plusieurs explosions ont secoué la capitale
congolaise, Brazzaville, dimanche matin. Elles sont
la conséquence « d’un petit incident survenu dans la
caserne du régiment blindé, située dans le quartier de
Mpila, en pleine ville », a expliqué à Jeune Afrique
le ministre de l’Intérieur congolais, Raymond
Zéphirin Mboulou, contacté dans l’après-midi. Dans
la nuit de dimanche à lundi, le gouvernement
congolais a finalement précisé les circonstances du
drame, qui serait dû à un incendie provoqué par un
court-circuit dans un dépôt d'armes et de munitions.
« La situation est lourde, très lourde. Les dégâts sont importants, pour ne pas dire très importants », a
reconnu Mboulou, qui, à l’heure de l’appel, vers 15 heures 30 (GMT) avait lui-même beaucoup de mal à
circuler dans Brazzaville pour se rendre à l’hôpital. « Il y a encore des flammes dans le secteur. On espère
qu’avec la tombée de la nuit, le temps va s’adoucir, ce qui permettra d’éteindre les incendies plus
facilement. La situation est maîtrisable d’ici la fin de la journée, mais elle n’est pas encore maîtrisée »,
expliquait-il.
De nombreuses personnes coincées sous les décombres
Les explosions ont détruit de nombreux bâtiments dans le secteur de la caserne. Et beaucoup d’habitants
étaient encore coincés dans les décombres. « Selon des sources à l'hôpital central, on parle d'environ 200
morts et de nombreux blessés », a déclaré Betu Bangana, chef du protocole de la présidence à Reuters. Le
dernier bilan établi dans la nuit fait quant à lui état d'au moins 146 morts.
Le secteur de Ouenzé étant en très grande partie détruit, les services de police et de secours avaient eux-
mêmes beaucoup de mal à y accéder. La déflagration a été si forte qu’elle a été ressentie de l’autre côté du
fleuve, à Kinshasa, la capitale de la République démocratique du Congo (RDC) qui a, elle aussi, été un
moment prise de panique.
À Brazzaville, les blessés ont d’abord été transportés vers trois hôpitaux : le CHU de Brazzaville et
l’hôpital militaire, dans le centre, et l’hôpital de Tala-Ngaï, au nord. Face à l’affluence des victimes, il a
fallu également recourir aux hôpitaux des quartiers sud.
Des casernes en pleine ville
Depuis l’indépendance du Congo (1960), les camps militaires sont toujours restés au cœur de Brazzaville.
Aujourd’hui, c’est donc une partie de l’arsenal militaire du Congo qui part en flammes.
Le ministre de la Défense congolais, Charles Zacharie Bowao, a expliqué à la télévision nationale
congolaise que c’était une erreur de manipulation qui avait déclenché un incendie dans la caserne.
D’autres incidents dans les dépôts d’armes étaient déjà survenus, sans jamais faire de vitimes. Notamment
en 1992, à Pointe-Noire, dans une caserne proche de l’aéroport, et en avril 2009, à Brazzaville. Les
autorités avaient prévu de déménager les dépôts d’armes de Brazzaville à 60 km au Nord de la capitale,
d’ici la fin de l’année.
Explosions à Brazzaville : une jeune
survivante raconte son calvaire
Bilan provisoire officiel de l’incendie qui a ravagé le dépôt
d’armes du régiment blindé de Mpila, provoquant de terribles
explosions meurtrières dimanche : près de 200 morts et plus de
1 300 blessés. Une jeune lycéenne, qui était à quelques dizaines
de mètres du lieu du drame, raconte comment elle a frôlé la
mort.
Comme tous les dimanches, à huit heure du matin, Julie Martiale (en photo ci-dessous, © Ifrikia Kengué)
et ses camarades de classe ont TD (cours de travaux dirigés) au CEG (Collège d’enseignement Général)
Gampo Ilolou. Cet établissement scolaire de Ouenzé, dans le 5e arrondissement de Brazzaville, est situé à
la lisière de la caserne militaire du régiment blindé de Mpila.
Mais ce matin-là, les TD prévus n’ont finalement pas lieu. Les enseignants sont absents. « D’habitude, on
trouve le directeur de notre école et nos professeurs sur place. Mais lorsque nous sommes arrivés, seul le
surveillant général était là », raconte Julie Martiale. Elle ne sait pas encore que cet imprévu va peut-être
lui sauver la vie.
Alors que les élèves se dispersent, elle se dirige avec ses camarades dans une parcelle voisine, en face de
l’école où la mère d’une de ses camarades tient une petite cantine. « Nous étions dans la parcelle, en train
d’attendre ma camarade lorsque tout a tremblé, on a entendu un gros boum. Je me suis retrouvée par terre
». Autour d’elle c’est l’hébètement total. Quelques pans de la maison à côté d’elle se sont écroulés, et des
parents s’y précipitent pour en sortir leurs enfants.
Horreur et désolation
Dans la rue, les gens accourent vers le lieu de l’explosion pour tenter de porter secours aux éventuelles
victimes. Lorsqu’une seconde détonation retentit, plus violente que la première (ce sera la plus forte des
cinq grosses de la journée). Le souffle propulse Julie à 10 mètres. « Je n’ai pas bien compris ce qui se
passait, les toilettes où se trouvait ma camarade se sont effondrées et j’ai vu que le mur de la parcelle
allait me tomber dessus. Je ne sais pas comment, mais j’ai dû rouler sur moi-même pour ne pas me
retrouver sous les décombres. Je sentais des brûlures sur mon genou ». Lorsqu’elle se relève, la rue est
plongée dans l’horreur et la désolation.
En face, son école est éventrée ; des corps sont allongés par terre ; les gens courent en tout sens. « Moi
aussi, je me suis mise à courir et j’ai pu voir dans la rue voisine, une femme qui semblait folle et qui
répétait : "Mon fils est mort, mon fils est mort". À côté, dans la rue, un petit garçon de 4 ans que je voyais
parfois dans le quartier était par terre, un bras et une jambe arrachés. J’avais l’impression de faire un
mauvais rêve », explique Julie, encore sous le choc vingt-quatre heure après le drame.
Dans la panique, elle abandonne ses affaires. Elle tente vainement de joindre ses parents par téléphone,
pas de réponse. « Alors, j’ai commencé à marcher et à courir, avec d’autres personnes. J’ai pensé au
pasteur de notre église qui habite à Bacongo, et je suis partie dans cette direction. Je ne m’étais pas rendu
compte que j’étais blessée ».
Pieds nus
C’est seulement lorsqu’elle atteint Bacongo, dans le 2e arrondissement, au sud de Brazzaville, à une
dizaine de kilomètres de Mpila, qu’elle remarque ses blessures. Elle finit par joindre une jeune tante qui
habite le quartier et qui va l’héberger. « Quand mon mari et moi l’avons vue, elle était pieds nus,
complètement traumatisée, sa tenue scolaire presqu’en lambeau. J’ai désinfecté ses coupures et lui ai
administré un anti-inflammatoire », témoigne Julia, sa tante, étudiante en 6e année de médecine. « J’ai
dormi avec elle, mais elle n’a pas fermé l’œil toute la nuit, elle sursautait au moindre bruit », poursuit-
elle.
Le lendemain, Julie Martial regagne enfin sa maison, qui par chance ne s’est pas écroulée comme
beaucoup de celles alentours. Seul le mur mitoyen et le portail ont été soufflés par la violence des
explosions. Pour l’instant, elle reste traumatisée et a du mal a réaliser ce qui lui est arrivé. Et elle ne
redeviendra sans doute jamais plus la jeune fille pleine d’innocence qu’elle était jusqu’à présent.
Chaos dans les hôpitaux de Brazzaville : "J’ai vu un homme qui
avait perdu son pied laissé sans soins dans la salle d'attente"
Plus de 48h après la série d’explosions dont le bilan provisoire est de 180 morts et 1 500 blessés, les
personnels des hôpitaux de Brazzaville tentent de faire face au flot de victimes. Notre Observateur, qui a
fait le tour des centres de soins, décrit une situation chaotique.
Lundi à 15h (heure locale), près de 250 blessés avait été enregistrés au CHU de Brazzaville, 150 à
l’hôpital militaire et plus de 300 à l’hôpital Makelekele. Un afflux auquel les centres hospitaliers ont
déclaré ne pas pouvoir faire face seuls. Il a donc été demandé à tout le personnel hospitalier disponible sur
le territoire de venir en aide aux médecins des hôpitaux de la capitale. Dans la foulée, la République
démocratique du Congo, dont la capitale Kinshasa fait face à Brazzaville, a dépêché une vingtaine de
médecins ainsi que des cliniques mobiles. Et les États-Unis, le Maroc ainsi que la France sont
actuellement en train de mettre en place des missions médicales d’urgence sur le terrain.
Le travail des services d’urgence congolais est en outre extrêmement difficile dans les quartiers aux
alentours du dépôt de Mpila, où s’est déroulé la catastrophe, le périmètre étant interdit d’accès à cause
des nombreuses munitions qui menacent encore d'exploser.
De son côté, le gouvernement a appelé les habitants à donner leur sang et à multiplier les gestes de
solidarité envers les 5 000 personnes sinistrées qui ont été installées dans des abris de fortune.
Contributeurs
Ndrezo
"J’ai vu une femme à la peau brûlée et un homme qui avait perdu son pied dans la salle
d’attente"
Andress Hordiland Tembo est étudiant à Brazzaville.
J’étais hier à l’hôpital de Makelekele et au CHU de Brazzaville. Et ce matin, je suis allé à l’hôpital
militaire mais, là-bas, on m’a empêché d’entrer et de filmer. La conclusion c’est que les hôpitaux sont
complètement saturés [Le directeur du CHU, Ignace Ngakala, a pourtant affirmé que la situation s’était
stabilisée.] Ici, on manque terriblement d’équipements. Les premiers blessés qui sont arrivés dimanche se
sont vite rendus compte que les hôpitaux ne pourraient pas faire face. La plupart des structures ont des
compresses et de l’alcool en quantité suffisante, mais pour tout le reste, c’est beaucoup plus compliqué.
Rares sont les blessés qui bénéficient d’un lit. La majorité d’entre eux attendent les soins à même le sol.
Et il ne s’agit pas que de blessés légers. J’ai vu une femme à la peau brûlée ainsi qu’un homme qui avait
perdu son pied attendre, avec les autres, dans une salle d’attente.
Le président a demandé à toutes les pharmacies de la ville d’approvisionner les hôpitaux urgemment en
leur assurant qu’elles seraient payées plus tard, ce qu’elles ont fait. Mais les pharmaciens s’inquiètent
maintenant de ne pas être payés car ils n’ont aucun reçu.
Ce matin vers 9-10h, on a entendu de nouvelles explosions. La panique est toujours aussi palpable dans
les quartiers les plus exposés. Ceux dont la maison a été détruite essayent de récupérer quelques affaires
alors qu’un autre dépôt, situé à une centaine de mètres de celui de Mpila, menace d’exploser à tout
moment. Les autorités affirment avoir pris des dispositions pour circonscrire les risques."
Commentaires
Peuples congolais Depuis les
Submitted by francylout on mer, 07/03/2012 - 06:22.
Peuples congolais
Depuis les évènements de 1997 le gouvernement congolais dans son ignorance n’a trouver d’important le
problème de délocalisation des sites ;camps militaire : le camps de transmission du 15 aout situe en plein
centre-ville ;le camps de la base situe à nfilou ; le camps du régiment blindée de Mpilla etc. …. chacun de
nous est tour à tour ;de quelque manière un criminel ou un saint <> cella c’est génocide du gouvernement
congolais Anvers sa nation plus de 200 morts et des blesses ; plusieurs familles sans abris des centaine
des orphelins la cpi doit juger les coupables ( puisque depuis 1997 ils savait et connaissait les risques )
aujourd’hui il sont les premier à venir distraire la population sur les tv et radio .
ta photo
Submitted by Jeandu Jour (non vérifié) on mar, 06/03/2012 - 21:37.
Merci pour mettre une photo de ce genre sur le site. Sachez seulement que ce genre de photo va être
utilisé pour montrer la détresse et la pauvreté des pays Afrique et non pas le drame qui s'est produit à
Brazza. Dites vous seulement, est-ce que vous voyez souvent ce genre de photo prévenant des pays
occidentaux ? Je crois pas !
La prochaine fois ayez la sensibilité de vous censurer un peu pour le bien de tous.
je pense le frere fait un
Submitted by edii (non vérifié) on mer, 07/03/2012 - 01:58.
je pense le frere fait un travail dde fond et oui des image plus choquand que cas ne cher pas protege le
pouvoire qui connaissent bien les causes ce pas la premiere ce arrive au pays ce goovernement connais qu
il sont fort pour brules les caches d arme a monsieur le general pouras livre a la justice tes apotres d armes
qui avait brule la poudriere de p/n afind de gagne la bataille de pointe noire en 97
Il a fallu qu'un tel drame se
Submitted by popo (non vérifié) on mar, 06/03/2012 - 18:22.
Il a fallu qu'un tel drame se produise pour que le gouvernement se rende compte que ce genre de dépôt de
munitions ne peut pas être installé dans un quartier populaire, le fait que la présidence de la république
soit à quelques mettre des régiments blindés afin de bien garder le pouvoir a fini par engendrer le malheur
de toute la république. Espérons que le gouvernement va se manifesté à 100%, c'est leur devoir.
Rien que de voir ces images si choquante, les souvenirs de la guerre reviennent et pour ceux que qui ont
perdu des parents c'est la tristesse totale. Le Congo doit aller de l'avant et il y'a certaines décisions qu'il
faut prendre bien avant que ça devienne difficile pour tout le monde.
Toute mes condoléances les plus attristées aux victimes et à tous ceux ou celles qui ont perdu un être
cher.
Que Dieu bénisse le Congo!
ho seigneur laisse que les
Submitted by jessy kokolo (non vérifié) on mar, 06/03/2012 - 17:45.
ho seigneur laisse que les congolais s mettent tous en bonne sante et qu'il n'y pas de probleme dans le
pays.
Congo : risque d'explosion d'un second dépôt d'armes à
Brazzaville
Certains habitants du quartier de Mpila ont tout perdu dans l'explosion. Y compris des proches. © Junior
Diatezua pour J.A. 06/03/2012 à 08h:44 Par Jeune Afrique
Alors que les Congolais et la communauté internationale s'organisent pour secourir les victimes de
l'explosion d'un dépôt d'armes à Brazzaville, dimanche, les autorités redoutent qu'un second magasin de
munitions ne prenne feu à son tour. On compte pour l'instant plus de 150 morts.
C'est la rumeur qui s'est emparé de Brazzaville lundi, avant qu'elle ne soit confirmée à l'AFP par une
source militaire sous couvert de l'anonymat : il existe un second dépôt souterrain de munitions à moins de
100 mètres de celui qui a explosé après avoir pris feu dimanche matin, tuant au moins 150 personnes. « Il
y a un risque de propagation, parce que le feu (...) peut atteindre l'autre dépôt », a expliqué la source,
précisant que des « techniciens » s'étaient rendus lundi sur les lieux du sinistre, qui aurait été provoqué
par un court-circuit.
« La priorité c'est vraiment d'éteindre » les petits foyers d'incendie qui couvent toujours à l'emplacement
du premier dépôt de munitions, a précisé Raymond Mboulou, ministre congolais de l'Intérieur. « Nous
sommes à plus de 150 personnes décédées, c'est provisoire (...). On compte plus d'un millier de blessés »,
a-t-il poursuivi.
Enfants séparés de leurs parents
Lundi, alors que des secours internationaux étaient attendus, au moins six corps ont été retrouvés dans les
décombres du quartier sinistré de Mpila où une odeur de cadavres commençait à se faire sentir près du
périmètre interdit.
Des obus éclatés jonchent le sol, notamment des roquettes d'Orgues de Staline (lance-roquettes multiples
montés sur camion). Le nombre des sans-abri est estimé à 3 000. Deux églises et un marché couvert les
accueillent, ce qui est totalement insuffisant. D'autres lieux devaient être aménagés.
Par ailleurs, suite au chaos provoqué par les explosions, des dizaines d'enfants ont été séparés de leurs
parents (lire ici : « Une jeune survivante raconte son calvaire »). La télévision nationale diffuse leurs
photos dans des spots ou sur les plateaux.
Scènes de mort et de désolation. Le quartier de Mpila a été totalement ravagé par les explosions.
© Junior Diatezua pour J.A.
Aide internationale Enfin, le drame révèle les conditions déplorables des installations sanitaires de la ville. Les hôpitaux sont
sous-équipés, les blessés s'entassent dans les couloirs et les chambres. Les autorités ont également eu du
mal à réagir et à prendre la mesure du drame. « On était débordés (dimanche) parce que le communiqué
(des autorités) demandant aux médecins de se mobiliser a un peu tardé, mais là ça va mieux. On a
renforcé les équipes et on reçoit de l'aide » de l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) Congo et de
Médecins sans frontières France, a déclaré une source au Centre hospitalier universitaire (CHU).
La France, l'Union européenne et la République démocratique du Congo RDC) voisine notamment, ont
annoncé l'envoi d'équipes médicales, de matériel et de médicaments. Le Maroc doit ouvrir un hôpital de
campagne. Les États-Unis préparent aussi une aide d'urgence. Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-
moon s'est dit quant à lui « profondément attristé par les pertes en vies humaines » et a assuré le Congo de
la coopération de l'ONU pour secourir les victimes.
(Avec AFP)
Brazzaville peine à se remettre des explosions meurtrières du quartier de Mpila
Un habitant déplace ses effets personnels du quartier de Mpila, touché dimanche 4 mars par une série
d'explosions dans un dépôt de munitions.
REUTERS/Jonny Hogg Par RFI
Dans la capitale du Congo-Brazaville, trois jours après la série d’explosions qui a causé la mort de
plus de 200 personnes, et en a blessé 1 300 autres, l’atmosphère est pesante. Au milieu des
décombres où s’affairent les démineurs, la population, accablée, tente de retrouver une semblant de
quotidien.
Brazzaville est triste, éteinte. « Seul Dieu peut désormais nous aider », racontait une veille femme
avachie en bordure de route. Dans le quartier ravagé de Mpila règne une ambiance étrange, entre odeur de
poudre et silence de mort.
Depuis la butte de Kangabanzi, tout près du cœur de l’explosion, il n’y a qu’un
immense champ de ruines, une vision d’apocalypse : des bâtiments il ne reste presque
rien, les arbres sont pliés, soufflés comme de vulgaires brins de paille. Filbert ne dort plus depuis trois jours, il reste au milieu des gravats. « On a tout perdu, dit-il. On mange
ce que l’on trouve dans les décombres. Nos vies sont foutues ». Et lorsqu’on lui demande pourquoi il ne
part pas, il répond, éteint : « partir pour aller où ? ».
Mouvements de panique
Seuls les militaires tentent de maintenir une présence. Ils bloquent les carrefours, empêchent la population
de passer. Le ton monte souvent. Les mouvements de panique se multiplient. Un homme vient en courant
vers le rond-point Ebina ; il crie : « les démineurs vont faire exploser des charges ! » En un quart de
seconde, tout le monde se met à courir. Dans l’urgence, des voitures font demi-tour. Quand on voit
quelques policiers courir, on se dit que l’alerte est réelle. Il n’en est rien ; dix minutes passent et tout
redevient comme avant.
Si la situation semble s’améliorer dans les centres de santé, elle reste difficile pour les rescapés. Le
traumatisme mettra du temps à s’effacer.
Congo: Brazzaville, champs de ruines
Les explosions provenant du dépôt d’armement du régiment blindé des Forces
Armées Congolaises ont rasé des centaines d’habitations à Brazzaville. Le bilan
provisoire fait état de plus de 200 morts et de milliers de blessés.
Le quartier de Mpila rasé par le souffle de l’explosion, Brazzaville, 5 mars. ©Erwan Morand
Entre 8h et 11h le 4 mars, cinq principales explosions ont retenti à Brazzaville et jusqu’à Kinshasa
(RDC), les deux capitales les plus proches au monde. La première explosion a sonné tel un coup de
semonce avant la deuxième, d’une telle force qu’elle a rasé des pans entiers de maisons sur un rayon d’au
moins 500 mètres.
Selon plusieurs témoignages, les habitants sortis de leurs maisons après la première déflagration ont été
plaqués contre le sol ou propulsés de plusieurs mètres. La force de l’onde de choc, propagée par le fleuve
Congo, a fait vibrer les bâtiments jusqu’à Kinshasa.
L’absence d’information dans les premières heures qui ont suivi le désastre a fait ressurgir le traumatisme
de la décennie de guerres (1993-2002) qu’a vécu le Congo. Les fabulations se sont rapidement propagées,
déclenchant l’hystérie dans l’ensemble de la ville. Les réactions de peur ont provoqué de nombreux
accidents de la route et des mouvements de foules, blessant les personnes brusquement prises de panique.
Désolation totale au cœur de la zone touchée, 5 mars. ©Erwan Morand
Un tas de ruines
L’impact des explosions est désastreux. L’ensemble du quartier Mpila et les zones alentours sont ravagés.
Le gouvernement congolais a établi un dernier bilan officiel de près de 200 morts. Le nombre de blessés
s’élèvent lui provisoirement à 1500 (source diplomatique européenne).
Vue panoramique du quartier de Mpila situé entre le régiment blindé et le fleuve Congo, rasé par le
souffle de l’explosion du principal dépôt d’armement de Brazzaville, 5 mars. ©Erwan Morand
Dans la panique qui a suivi l’explosion de nombreuses familles ont été déchirées. Un enfant qui a perdu
ses parents témoigne:
«J’ai vu mon père déchiqueté par un obus, ma mère morte écrasée par un mur. Alors que ma maison
menaçait de s’écrouler je suis parti sans pouvoir venir en aide à mon frère et ma sœur restés dans la
maison.»
Certaines personnes ont été mutilées ou amputées par les projectiles des obus. Alors qu’environ 3 000
Brazzavillois déplacés dans des zones sécurisées sont actuellement sans abris, de nombreuses familles
sont toujours à la recherche de leurs proches.
Malgré cette situation chaotique, la présence de services étatiques était, quelques heures après la dernière
déflagration encore quasiment inexistante: pas de service de soins, pas de services de sécurité pour éviter
les pillages. Même si la recherche des survivants s’est organisée une dizaine d’heures après le drame, de
nombreux habitants préfèrent s’aventurer eux-mêmes dans la zone sinistrée afin d’effectuer les fouilles
des décombres, et cela malgré les risques d’explosions persistants.
Autour du lycée de la Révolution, trois heures après la dernière déflagration,
Brazzaville, 4 mars. ©Erwan Morand
Alors que l’Hôpital de Talangaï (un des mieux équipés de la ville) a été soufflé par l’explosion, les
Hôpitaux de Makélékélé, le CHU et l’Hôpital Militaire sont débordés par l’afflux de blessés. Leurs
plateaux techniques ne permettent pas de répondre à une telle demande. Cependant, les premiers services
de soins mobiles ont été apportés par la communauté internationale qui a mobilisé des professionnels de
la santé du Maroc, de France et de la République Démocratique du Congo (RDC), arrivés 48 heures après
le drame. Ces équipes mobiles sont appuyées par une logistique importante: plusieurs tonnes de
médicaments et de matériel médical.
Vers une catastrophe humanitaire?
Dans la journée du 6 mars, une fumée s’élevait toujours du dépôt d’armement et des explosions
continuaient à se faire entendre. Une rumeur fait toujours état d’un risque d’explosion d’un autre dépôt,
potentiellement encore plus dangereux. Mais un autre danger immédiat est le risque d’épidémies que
pourrait provoquer une pluie, si fréquente en cette saison. Les secours doivent à tout prix dégager les
corps des débris pour limiter le risque sanitaire.
Quelques obus ayant provoqué la série d’explosions qui ont secoué Brazzaville, 4 mars. ©Erwan Morand
et des slogans politiques qui sonnent faux, Brazzaville, 4 mars. ©Erwan Morand
Une enquête a été demandée par la Présidence de la République. Mais différentes versions expliquent
l’origine de l’incendie qui a provoqué ces explosions. Celle officielle évoque un court-circuit alors que la
rumeur la plus importante parle d’un incendie provoqué accidentellement par des nouvelles recrues
militaires. Si les effets de la chaleur rendent dangereux le stockage d’explosifs, il est étonnant de
constater qu’un court-circuit puisse provoquer de tels dégâts malgré la rigueur des normes de sécurité
établies dans une caserne militaire de ce type (isolation des réserves d’armes qui doivent être bétonnées,
ventilation des pièces).
Cet événement met en lumière un des nombreux disfonctionnements organisationnels d’un pays aussi
militarisé que le Congo-Brazzaville. Pourquoi persister à installer des dépôts d’armement en pleine ville
alors même que le pays a subi à plusieurs reprises ce même type d’explosion entre 1997 et 2001 à Pointe-
Noire ou encore à Brazzaville entre 1996 et 2009?
La légèreté ou l’inefficience des normes de sécurité pour une structure de cette dangerosité semble
largement en cause. En effet, la même explosion aurait pu retentir un jour ouvrable. Les 3000
enfants inscrits au lycée situé en face de la caserne auraient alors à coup sûr péri dans l’explosion.
Deuil national au
Congo Brazzaville Les explosions dans un dépôt de munition
dimanche ont fait près de 200 morts. L’aide internationale arrive pour soigner les 1 300
blessés.
Un deuil national a été décrété à partir de mardi au
Congo Brazzaville après les explosions dans un dépôt
de munitions dimanche dans un quartier populaire de
la capitale Brazzaville, qui ont fait près de 200 morts
et plus de 1 300 blessés. Les autorités ont par ailleurs
évalué à 5 000 le nombre de personnes sans-abri,
hébergées dans des sites aménagés
.
Les deux foyers d’incendie qui restaient dans le dépôt
du régiment de blindés du quartier Mpila, dans l’est
de la capitale, avaient été maîtrises lundi et le
déminage du site va débuter, avec l’aide de MAG
(Mining advisory group), une ONG britannique spécialisée. Les autorités étaient cependant inquiètes du
risque que fait peser un deuxième dépôt de munitions, à une centaine de mètres de celui touché. « Il y a
encore des munitions qui peuvent exploser d’un moment à l’autre », a souligné le colonel Jean-Robert
Obargui, porte-parole du ministère de la Défense.
Lors d’une visite du Centre hospitalier universitaire (CHU) de Brazzaville, le ministre de la santé Georges
Moyen a indiqué que « les plus grands besoins » en matière médicale « sont dans l’orthopédie ».
Plusieurs dizaines de blessés par des éclats d’obus ou dans l’effondrement de leur maison étaient toujours
soignés, certains installés dans les couloirs ou sous des tentes à l’extérieur du bâtiment. D’autres étaient
soignés à l’hôpital de Makélékélé, la clinique municipale, et à l’hôpital militaire.
3000 sans-abri Des médecins français -urgentistes, chirurgiens, orthopédistes –, arrivés dans la nuit de lundi à mardi, ont
visité tous les secteurs du CHU avec leurs homologues congolais, et devaient commencer leur travail
mardi après-midi. La France a envoyé une équipe médicale de 25 personnes et 5 tonnes de matériel. Une
équipe de l’armée marocaine de 173 personnes, dont 20 médecins et 16 infirmiers, est également arrivée à
Brazzaville lundi soir, et doit installer un hôpital de campagne. Vingt médecins de la République
démocratique du Congo voisine sont sur place depuis lundi avec du matériel et des médicaments. Les
États-Unis ont promis une aide, Israël va envoyer du matériel médical, et le secrétaire général de l’ONU
Ban Ki-moon a assuré lundi le Congo de la coopération de l’ONU pour secourir les victimes.
Les agences onusiennes devraient notamment fournir du matériel et des vivres pour les 3 000 sans-abri
dont les habitations ont été détruites par les explosions et qui ont souvent tout perdu. Plusieurs sites ont
été ouverts dans la capitale pour accueillir ces personnes, notamment la cathédrale du Sacré-Cœur où se
trouvaient 1 500 réfugiés lundi soir. La France y a déployé 20 tentes. « Ces tentes ne vont peut-être pas
nous suffire mais mieux vaut ça que rien », a déclaré Dominique Makosso, 48 ans, chef d’une famille de
dix personnes. « J’ai tout perdu. Ma femme a une grosse blessure et ne peut pas sortir de l’hôpital. C’est
dur ». V. F. (avec AFP)