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CHALHOUB LIVRE BLANC

2016

L’EVOLUTION DU SECTEUR

DU LUXEDANS LE GOLFE:UNE NOUVELLE NORME ?

Vous pourrez trouver plus d’informationssur le site www.chalhoubgroup.com

ou en contactant l’équipe Corporate DELPRAT RELATION PRESSEAlexandra Renaud: [email protected]

Tél: 01 71 70 38 38

Cette brochure respecte l’environnement et est imprimée à partir d’huile végétale

et de papier 100 % recyclé.

TÜV AUSTRIA SERVICES GMBH

CO -EMISSIONEN2

GEPRÜFT

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Index

Introduction 3

1.1 Adversité économique 41.2 Changements structurels: nouveaux consommateurs,

nouveaux leviers 51.3 Un nouveau contexte commercial 7

2.1 Un environnement opérationnel plus complexe 92.2 Une métamorphose: des consommateurs arrivant

à maturité, des catégories en augmentation et l’émergence du numérique 13

2.3 Perspectives d’avenir positives 15

3.1 Acquérir une expertise du marché 163.2 Etre axé sur le consommateur 173.3 Rendre possible la compétitivité des prix 203.4 Encourager l’innovation 21

Conclusion 23

PARTIE I - Transition des pays du Golfe vers un modèle plus développé 4

PARTIE III - Un avenir prometteur: vers une nouvelle norme 16

PARTIE II - L’impact sur le secteur du luxe 9

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PARTIE I La transition des pays du Golfe vers un modèle plus mature1.1 Adversité économique

a. La fin d’un modèle fondé sur le pétrole et l’abondanceLe prix du pétrole est à des niveaux historiquement bas et ne devrait pas augmenter avant plusieurs années. La période d’abondance dont jouissaient les pays du Golfe, grâce aux importants revenus du pétrole, touche donc à sa fin.Après s’être maintenu entre 80 $ et 100 $ le baril pendant des années, le prix du pétrole a atteint environ 30 $ le baril au premier trimestre 2016, ce qui crée des déficits dans les finances publiques des pays de la région du CCG. Dans le même temps, les opérations militaires des Etats du Golfe au Yémen, en Irak et en Syrie ont creusé les dépenses budgétaires. Par conséquent, ces pays ont décidé de réduire, voire même pour certains d’éliminer les subventions qui existaient depuis longtemps sur le pétrole, le gaz naturel, le diesel, l’électricité et l’eau, envisageant également de mettre en place une TVA et d’augmenter la fiscalité des entreprises.

b. Des effets de change défavorablesLes fluctuations des taux de change dans la région ont aussi eu un impact sur la croissance économique des pays du CCG. Les monnaies locales étant arrimées au dollar américain, le raffermissement de celui-ci a eu un impact sur la compétitivité et le coût des biens importés dans les pays du Golfe comparativement aux prix pratiqués en Europe.Ces variations monétaires importantes ont mis sous pression les pays du CCG, qui doivent alors mobiliser leurs réserves pour maintenir la parité avec le dollar. La rapidité à laquelle les réserves diminuent (notamment en Arabie saoudite) et l’accélération des sorties de capitaux pourraient remettre en cause, à moyen terme, la pérennité du modèle de parité monétaire, comme on peut le constater actuellement avec les mouvements spéculatifs sur les marchés.

c. Le moral des ménages en berneLa consommation dans la région s’est ralentie, du fait de l’impact combiné des restrictions des dépenses publiques, de l’incertitude politique qui règne au Moyen-Orient, des actions militaires des Etats du Golfe et des fluctuations de change. L’indice de confiance des ménages a baissé à la fin 2015 aux Émirats arabes unis, où 53 % des ménages s’inquiétaient des risques de récession à la fin de l’année 2015 - soit une hausse de 10 points par rapport au troisième trimestre de la même année4.Les citoyens des pays du Golfe et l’importante communauté d’expatriés se montrent plus prudents dans la gestion de leur argent et repoussent ultérieurement leurs dépenses. Au cours du dernier trimestre 2015, 38 % des consommateurs moyen-orientaux avaient l’intention d’épargner et de diminuer les dépenses en matière d’habillement, de sorties et de repas pris hors du domicile5.

Introduction« Rien n’est permanent, sauf le changement. » - Héraclite, 535 avant J.-C.

Après un quart de siècle de forte croissance économique - de l’ordre de 5,6 % en moyenne par an de 1990 à 2015 - pour les six pays1 formant le Conseil de coopération du Golfe (CCG), la région est confrontée à des défis à la fois familiers et nouveaux. Dans un contexte de changements géopolitiques et fiscaux, la croissance économique ralentit, passant de 3,3 % en 2015 à 2,7 % selon les estimations, soit légèrement en dessous des prévisions mondiales de croissance de 2,9 % pour 20162. Le secteur du luxe suit une évolution similaire et se développe actuellement à rythme plus modéré, après 30 années de croissance rapide et soutenue.

En plus de ces nouvelles dynamiques, la région du Golfe traverse une période de transformations structurelles qui modifient l’environnement des affaires en place depuis des décennies.Les gouvernements de la région ont tous annoncé qu’ils allaient apporter des modifications à leur système de fiscalité et d’aides sociales, ainsi que mettre en place de nouvelles réglementations pour favoriser l’emploi de la population, la protection des consommateurs et le développement durable.Le secteur du luxe se métamorphose lui aussi, avec des changements dans la distribution et une évolution du profil des consommateurs. Ceci aboutira sans nul doute à de profonds bouleversements sur le marché du luxe dans les années à venir.

Dans ce Livre blanc, le quatrième du groupe Chalhoub, nous nous appuyons sur 60 années d’expérience au Moyen-Orient, sur nos études de marché exclusives, sur des entretiens avec des experts du secteur et une analyse de données externes. Notre objectif est de proposer un guide du marché actuel, de donner un aperçu de ce que pourrait être le nouveau visage du luxe dans le Golfe à la fin de cette période de transition et de suggérer quelques pistes pour faire face à ces évolutions.

« 2015 a été une année très difficile pour la région du CCG, tant sur les plans économique que politique. La chute des prix du pétrole et les fluctuations de taux de change ont eu un impact sur la croissance financière de notre groupe. En tant que partenaire privilégié du luxe au Moyen-Orient, il est de notre responsabilité de regarder au-delà de ces fluctuations géopolitiques et économiques et de creuser pour comprendre les forces profondes qui redéfinissent le secteur dans la région. Nous sommes implantés dans le Golfe depuis plus de 60 ans et nous avons déjà su relever de nombreux défis au cours de cette période. En surmontant chacun de ces défis, nous avons renforcé notre position de leadership. Nous nous efforçons d’anticiper les changements et d’aider nos partenaires à décrocher le succès dans la région. C’est notre devoir et notre rôle. Avec ce Livre blanc, nous souhaitons présenter ce que nous considérons comme le nouveau visage du luxe et partager nos connaissances avec nos partenaires. Ainsi, nous pouvons être prêts et faire face ensemble à cette nouvelle donne. »

ANTHONY CHALHOUB, co-PDG du groupe Chalhoub

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Prix du baril de pétrole Prix du pétrole

pour budget à l’équilibrepour les pays du CCG

Koweït 50 $/barilQatar 56 $/baril

EAU 74 $/baril

Arabie saoudite 93 $/barilOman 98 $/baril

Bahreïn 115 $/baril

Chute des prix du pétrole

Source: Groupe Chalhoub, février 20163

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Le renchérissement des monnaies locales a encouragé les citoyens de la région et les expatriés à réduire sur place leurs dépenses en produits de luxe et à se tourner vers l’Europe, où les prix moyens peuvent s’avérer significativement plus bas. Des recherches menées par le groupe Chalhoub en 2015 ont révélé qu’en moyenne, les produits de beauté achetés dans les pays du Golfe affichaient des prix plus élevés qu’en France et qu’aux Etats-Unis. Conséquence de ces écarts de prix entre les pays du Golfe et l’Europe, les achats de produits de luxe à l’étranger par des habitants de la région ont augmenté de 38 % entre 2014 et 20156.

1.2 Changements structurels: nouveaux consommateurs, nouveaux leviers

a. Des perspectives très encourageantes pour la consommationSi la situation peut sembler plus difficile dans la région du fait du contexte économique et financier actuel, elle bénéficie toujours, en profondeur, de dynamiques de consommation favorables.

Le nombre de particuliers fortunés et leur patrimoine sont, en effet, en hausse. Les pays du Golfe accueillent un nombre impressionnant de personnes fortunées, et ce chiffre devrait augmenter au Moyen-Orient de 40 % d’ici 2024, contre une croissance de 25 % en Europe et en Amérique du Nord7. Les EAU arrivent en tête des pays du Moyen-Orient avec 72 100 particuliers fortunés, suivi de l’Arabie Saoudite (59 000) puis du Qatar et du Koweït8. La richesse dans la région a même augmenté de 50 % au cours de la période 2009-2014 et le nombre de personnes fortunées s’est accru de 7,7 % en 20149.

Parallèlement, la classe moyenne se développe dans la région, grâce à une réglementation du secteur de l’emploi qui attire plus de citoyens du Golfe vers le monde du travail et grâce à la montée d’un esprit entrepreneurial. En Arabie saoudite, par exemple, on estime que 67 % des familles saoudiennes font partie de la classe moyenne10. Les consommateurs des classes moyennes sont connus pour leur goût pour les achats aspirationnels. L’essor de cette classe sociale suggère donc une demande croissante pour des biens et des services plus diversifiés.

La population féminine de la région constitue aussi un groupe de consommateurs en pleine expansion, avec un pouvoir d’achat prometteur. Par exemple, la participation des femmes à la main d’œuvre saoudienne et leur niveau croissant d’éducation contribuent à une demande grandissante pour certains produits, notamment dans l’habillement et les cosmétiques.Ce phénomène est amplifié par l’intérêt croissant que les femmes du Golfe portent pour la mode, du fait de leur exposition croissante aux tendances de la mode via Internet et de leurs voyages de plus en plus fréquents a l’étranger. Déjà, les femmes du Moyen-Orient contrôlent près d’un tiers de la richesse de la région: 105 femmes fortunées en Arabie saoudite et aux EAU détiennent presque 22 milliards de dollars11.

b. Des facteurs sociaux favorablesLes femmes ont accompli des avancées notables pour exercer plus d’influence dans les sociétés du Golfe et s’extraire des seuls domaines traditionnels de la maison et de la famille. Elles représentent une proportion de la population étudiante de plus en plus importante. Le taux d’alphabétisation des femmes au sein du CCG est passé d’un chiffre estimé de 84 % il y a environ dix ans à 91 %12. Les femmes du Golfe sont motivées et ambitieuses et elles occupent des postes de plus en plus en vue en tant que professeures, doyennes d’universités, chercheures, femmes d’affaires, médecins et ministres.

Les EAU, par exemple, cherchent à attirer les femmes sur le marché du travail en mettant en place des initiatives, telles le Conseil d’égalité entre les sexes. Comme Son Excellence Reem Al Hashimy, Ministre d’État pour la Coopération Internationale et Directrice Générale de Dubaï Expo 2020, l’a déclaré lors de l’édition 2016 du Global Women’s Forum, « La situation est en train d’évoluer lentement. [Les hommes et les femmes des EAU œuvrent ensemble] pour une amélioration de notre région, de notre pays et pour notre population. »13

Les femmes jouent aussi un rôle de plus en plus influent, en créant leur propre entreprise. Aujourd’hui, au Moyen-Orient, une start-up sur quatre est fondée par une femme notamment dans les domaines des technologies, de la mode et des médias14.

Il existe un véritable élan croissant dans la région en faveur de l’esprit d’entreprise: les gouvernements soutiennent les entrepreneurs et la culture des start-ups par le biais d’organisations d’incubateurs et de soutien aux entreprises comme le « Khalifa Fund for Enterprise Development » et « Dubai SME » (PME Dubaï). Ces initiatives gouvernementales ont été lancées pour soutenir l’envie grandissante des jeunes habitants du Golfe de réaliser leurs projets et de créer leurs propres emplois.

Ces jeunes ont envie de se lancer dans le monde du travail et considèrent un diplôme universitaire comme un « sésame ». Par conséquent, les taux d’inscription dans l’éducation supérieure sont en hausse et ont atteint 22 % en 2014 (pour 16 % en 2007) aux EAU. L’Arabie saoudite représente 70 % du budget total de l’éducation du CCG15. La création de campus satellites d’universités réputées comme l’INSEAD, New York University et La Sorbonne a contribué à améliorer la qualité de l’éducation et à développer les talents.

Sans surprise, ces jeunes, et tout particulièrement ceux qu’on appelle les « Millenials », jouent un rôle plus actif dans les mutations sociales et économiques qui touchent la région. 50 % de la population de la région a moins de 30 ans16, ce qui représente une opportunité pour les gouvernements de propulser leur nation vers l’avenir. Les jeunes gens du Golfe apportent créativité, énergie et productivité à l’économie et contribuent à l’accélération du développement des secteurs non liés au pétrole ainsi que des secteurs fondés sur l’économie de la connaissance.

« Les mutations profondes du paysage économique, démographique et social de la région vont continuer à avoir un impact sur le secteur des études universitaires aux Moyen-Orient. Les écoles d’études supérieures de la région sont dédiées à une population jeune et répondent à leurs besoins en tenant compte des exigences et besoins du marché. AUS s’inscrit dans ce contexte et, dans le cadre de sa vision stratégique, propose une grande diversité de cursus commerciaux qui préparent l’étudiant à un marché mondial dynamique et concurrentiel. »

BJÖRN KJERFVE - Président de l’Université Américaine de Sharjah (AUS)

Source: « The Wealth Report » (Rapport sur la richesse) 2015, Knight Frank7

Source: « World Wealth Report » (Rapport sur la richesse mondiale en 2015), Cap Gemini et RBC Wealth Management8

Source: « World Wealth Report » (Rapport sur la richesse mondiale en 2015), Cap Gemini et RBC Wealth Management9

Croissance du nombre de particuliers fortunés

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Nombre de particuliers fortunés

au CCG

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de la richesse

7.7 %croissance du nom

bre

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articuliers fortunés

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Moyen-Orient

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Europe et Amérique du Nord

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Les changements sont aussi à l’ordre du jour sur le marché de l’emploi, sous la forme d’une meilleure protection et d’une plus grande souplesse pour les expatriés travaillant dans des pays comme les EAU et le Qatar, et de la mise en place de lois exigeant des entreprises privées qu’elles emploient un pourcentage minimal de citoyens du Golfe. De plus, l’Arabie saoudite applique désormais des lois de « féminisation » qui stipulent que seules les femmes saoudiennes peuvent occuper certains emplois, essentiellement dans la vente.

LE GROUPE CHALHOUB ET LA FEMINISATIONDans le cadre des lois de féminisation en Arabie saoudite, les magasins vendant des parfums et du maquillage étaient parmi les premiers du secteur de la vente à passer à un personnel essentiellement composé de femmes saoudiennes. Wojooh, la chaine de parfumerie leader en Arabie saoudite et appartenant au groupe Chalhoub, s’est rapidement adaptée à cette nouvelle règlementation du travail.

Wojooh a déployé une campagne massive de sensibilisation et de publicité dans les journaux, sur les réseaux sociaux, dans les universités et dans les magasins, annonçant qu’elle recrutait des femmes saoudiennes. Au plus fort du processus de recrutement, l’équipe des ressources humaines de Wojooh rencontrait 50 à 60 femmes saoudiennes en entretien chaque jour. Les nouvelles employées, dont beaucoup n’avaient encore jamais travaillé, ont participé à une formation d’un mois conçue spécialement par la Retail Academy du groupe Chalhoub. En dépit des difficultés associées à cette nouvelle réglementation, notamment l’insuffisance de candidates qualifiées, due en partie au contexte culturel qui décourage l’emploi féminin, les femmes saoudiennes représentent plus de 50 % du personnel employé par Wojooh en Arabie Saoudite actuellement et certaines d’entre-elles réussissent de manière remarquable.

La protection renforcée des consommateursCes changements de réglementation s’étendent aussi à la protection des consommateurs. Cela se traduit par plus de transparence là où l’enregistrement des produits de beauté existait depuis des années, comme en Egypte, au Bahreïn et même en Arabie Saoudite, où la SASO (Saudi Arabia Standard Organization, organisme des normes de l’Arabie saoudite) délivre des certificats depuis les années 90. Les EAU songent à mettre également en place de telles règles. L’Arabie Saoudite et le Koweït, quant à eux, exigent maintenant que les composants soient testés en laboratoire avant la commercialisation des produits.

L’IMPLICATION DU GROUPE CHALHOUBPour s’assurer que le processus d’enregistrement se fasse de la façon la plus fluide possible, le groupe Chalhoub s’appuie sur des équipes chargées de la conformité qui préparent les documents nécessaires en arabe et dans d’autres langues pour chaque produit, puis effectuent le suivi du processus d’enregistrement auprès des autorités locales pour garantir une validation et autorisation rapides.

Une meilleure gouvernance d’entrepriseEn sus de ces modifications du cadre réglementaire, des mesures visant à améliorer la gouvernance d’entreprise ont été lancées. De plus en plus d’entreprises associent des membres extérieurs à leurs comités ou conseils d’administration pour inciter à réfléchir de manière plus novatrice et créative. Des organisations comme The Pearl Initiative, soutenues par 40 entreprises dont le groupe Chalhoub, encouragent à faire preuve de plus d’exigence en matière de gouvernance d’entreprise, de lutte contre la corruption, de code de conduite, d’intégrité et de reporting. De plus, la mise en place d’un système de fiscalité devrait amener les entreprises à assurer une plus grande transparence en matière comptable.

« Depuis des décennies, les entreprises privées, peut-être parce qu’elles n’avaient pas à payer d’impôts, ne voyaient pas vraiment l’intérêt de publier des rapports ou des comptes. La règlementation n’a pas beaucoup changé, sauf peut-être dans le cas des entreprises cotées, mais la tendance est maintenant très clairement en faveur d’une bonne gouvernance, et c’est exactement ce que The Pearl Initiative veut soutenir. »

BADR JAFAR - PDG de Crescent Group, Fondateur de Pearl Initiative

1.3 Un nouveau contexte commercialDans le cadre de leurs efforts pour développer les secteurs non pétroliers de leur économie, les gouvernements du CCG s’efforcent d’améliorer le climat des affaires, d’attirer des investissements étrangers et d’augmenter leurs exportations. Cela passe par des initiatives pour diversifier leur économie et la modification des politiques fiscales, de la règlementation et des systèmes de gouvernance.

a. Une économie plus diversifiéePendant des décennies, les pays du Golfe se sont efforcés de convertir leurs importants revenus pétroliers en un modèle économique plus durable. Ils ont utilisé les revenus du pétrole pour diversifier leurs économies, ont bâti des infrastructures importantes et amélioré les services sociaux essentiels que sont l’éducation et la santé. En diversifiant leurs économies, les gouvernements du Golfe veulent assurer un développement plus durable et moins volatile, autour des secteurs fondés sur la connaissance et non plus les hydrocarbures.

Les grands projets d’infrastructure et de développement, souvent associés à la diversification industrielle et à l’accueil d’évènements internationaux, ont constitué une des pierres angulaires de cette stratégie. Le Qatar, par exemple, devrait allouer 200 milliards de dollars à de grands projets sur les 10 prochaines années17, en partie en préparation de la Coupe du monde FIFA en 2022. Dubaï se prépare à accueillir l’Exposition universelle en 2020, Abou Dhabi construit trois nouveaux districts urbains, le Koweït édifie la « Cité de la soie » et l’Arabie saoudite bâtit six nouvelles villes économiques et industrielles18.

Le tourisme joue un rôle-clé dans cette stratégie de diversification : les pays du Golfe construisent plus de chambres d’hôtel, de galeries marchandes, de parcs d’attractions et organisent même plus de festivals de loisir dans le but d’attirer les visiteurs. Dubaï ambitionne, par exemple, d’attirer 20 millions de visiteurs d’ici 2020. Abou Dhabi pense accueillir plus de 7,9 millions de personnes, et le Qatar cible 7 millions d’ici 203019. L’un des projets les plus emblématiques est le District culturel d’Abou Dhabi, où s’ouvriront trois musées de réputation internationale: le Louvre, le Guggenheim et le Zayed National Museum.

On constate la même vitalité et le même dynamisme dans d’autres villes qui étoffent leur offre de musées d’arts et d’histoire. En Arabie saoudite, le tourisme religieux devrait faire venir 30 millions de visiteurs d’ici 202520, mais les principaux projets liés au tourisme sont prévus pour les 10 années suivantes. Nous pouvons notamment citer la nouvelle liaison ferroviaire à grande vitesse reliant les villes de La Mecque et Médine, distantes de 450 km, le plus grand site de développement touristique au sud de Damman, et l’expansion du souk historique de Taif, Okaz.

b. Un cadre règlementaire en pleine phase de maturation Pour pouvoir soutenir cette diversification dans un contexte de baisse des revenus pétroliers, les gouvernements examinent la faisabilité d’une réforme de leur cadres juridiques, fiscaux et règlementaires afin d’aligner davantage leurs modèles sur les normes internationales.

L’augmentation de la fiscalitéDans un contexte de prix bas du pétrole, il y a un consensus grandissant au sein du CCG, notamment en Arabie saoudite et aux EAU, visant à mettre en place une TVA dans la région - un sujet évoqué depuis longtemps. Ce taux de TVA ne devrait pas dépasser 5 %. La mise en place d’impôts des sociétés fait aussi l’objet de discussions. Le Koweït et le Qatar ont créé des systèmes d’impôts en 1955 et 2009 respectivement, et Oman, l’Arabie saoudite et les EAU devraient lancer les leurs dans les années à venir.

« Les économies du CCG sont en phase de maturation et ont donc besoin de sources de recettes publiques plus stables. Les bouleversements observés sur les prix du pétrole représentent une occasion idéale de réformer les politiques économiques, et notamment de lancer de nouveaux régimes fiscaux dans les pays producteurs de pétrole. »

Dr NASSER SAIDI - ancien ministre de l’Economie et de l’Industrie du Liban et ancien Vice-Gouverneur de la Banque Centrale libanaise

La modification des contrats de travail et des règles de propriété des entreprises Les pays du CCG modifient les lois portant sur la propriété des entreprises, qui dans certains cas prévoient actuellement qu’au moins 51 % de chaque entreprise appartiennent à un citoyen du pays d’implantation. Les EAU font exception à la règle : dans les zones franches, les entreprises peuvent être détenues à 100 % par des étrangers. L’Arabie saoudite a cependant annoncé un projet visant à faire passer le seuil maximal autorisé de détention par les étrangers de 75 % à 100 % pour certains secteurs, notamment celui de la vente.

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Mall of Qatar 2016, 190,000 m2

« Les études comparatives de prix que nous organisons régulièrement entre les principales destinations internationales de shopping montrent qu’il existe des écarts de prix très importants, et que les pays du Golfe font partie des destinations où les prix sont les plus élevés. C’est pour cela qu’en 2015, nous avons commencé à baisser certains prix de vente en réduisant nos marges et en renégociant nos commandes d’achats. »

FADI JABBOUR - COO de Chalhoub Group Retail

c. Des coûts opérationnels importantsLes coûts d’exploitation, déjà élevés, continuent d’augmenter, ce qui accroit la pression pesant sur le secteur. Ces dernières années, du fait du désir grandissant qu’ont les marques de s’implanter dans le Golfe, les charges dans le secteur du commerce de détail dans la région ont encore augmenté. Par exemple, certains loyers ont triplé. Ces prix sont comparables aux prix des adresses les plus prestigieuses du monde entier, comme les Champs-Elysées, et voire même encore plus élevés, bien qu’ils n’aient pas encore atteint les niveaux de Londres ou New York. Alors même que l’économie commençait à ralentir à Dubaï entre 2014 et 2015, les loyers de certains des meilleurs emplacements continuaient d’augmenter.

« Les coûts de location dans la région du Golfe doivent vraiment être suivis avec attention par les entreprises car ils atteignent des niveaux sans précédent. Dans une région où la culture du shopping est largement liée à la présence des centres commerciaux et de flagship stores, gérer ces coûts exige plus de discernement et d’agilité. À chaque échéance du bail, les responsables des boutiques doivent négocier les contrats et conditions de location, ainsi que trouver le moyen d’atténuer les effets de hausse de ces loyers. »

DAVID VERCRUYSSE, Ex-Directeur Géneral de Sephora Moyen-Orient

De plus, les coûts de personnel ont augmenté ces dernières années, et ce pour plusieurs raisons:• une grande amplitude des horaires d’ouverture, imposée par les centres commerciaux (7 jours par

semaine, de 10 heures du matin à minuit les week-ends), • des consommateurs exigeants qui s’attendent de plus en plus à recevoir le même niveau de service

qu’en Europe (ce qui nécessite des investissements pour développer les compétences et augmenter le nombre d’employés qui servent les clients),

• l’importance de disposer de personnel compétent et d’investir dans leur formation, • la nécessité de gérer le niveau de turnover des employés, supérieur à l’Europe qui implique donc des

coûts indirects plus élevés (recrutement, formation et gestion administrative).

d. Changements dans la taille et dans les types des magasins L’offre commerciale dans le Golfe est en pleine mutation, ce qui a un impact sur le secteur du luxe. Le développement continu de centres commerciaux, qui a beaucoup augmenté la surface totale de magasins, place de nombreuses villes de la région à un niveau comparable aux marchés développés (voire parfois au-delà) en matière de densité de l’offre commerciale. Par exemple, Dubaï va atteindre une SCU (surface commerciale utile) de 1,4 mètre carré (m2) par habitant dans les centres commerciaux, comparé à 2 m2 par habitant aux Etats-Unis29. De plus, environ 18 millions de m2 d’espace commercial

Mall of the World, Dubai 2020, 773,000 m2 Festival City, Riyad 2018, 250,000 m2

PARTIE IIL’impact sur le secteur du luxeLe contexte dans lequel opère le secteur du luxe a indéniablement évolué ces deux dernières années: des transformations qui semblaient perceptibles en surface ont en réalité profondément bouleversé la structure de cet univers. Ces profondes mutations modifient totalement l’environnement régional et le secteur du luxe dans le Golfe.

2.1 Un environnement opérationnel plus complexe

a. La croissance ralentitLes changements qui ont lieu actuellement sur le marché du luxe dans les pays du Golfe font suite à une période d’expansion datant des années 80. Cette période se caractérisait par une forte croissance du PIB, de grands projets de développement, un univers du commerce et de la distribution en pleine expansion et une gamme de plus en plus large de marques disponibles dans la région. Ces dynamiques étaient, de plus, amplifiées par une modernisation des circuits de distribution et de commercialisation. Pendant cette période, le marché est passé d’une présence limitée des produits de luxe, distribués principalement dans les souks ou les showrooms, à une importante présence dans des magasins en franchise et des grands magasins de classe internationale situés dans des centres commerciaux de réputation mondiale.

Les phases d’expansion de la présence des produits de luxe dans le Golfe

Mais au cours de ces 12-18 derniers mois, le marché du luxe a ralentit sa cadence dans le monde, ainsi que dans la région du Golfe. Après avoir enregistré une croissance annuelle de l’ordre de 6 % à 8 % ces cinq dernières années, à taux de change constant, la dynamique du luxe s’est ralentie avec une croissance réelle annuelle - toujours à taux de change constant - de 1 % à 2 % en 201522. Parallèlement à cela, l’appréciation des monnaies de la région, arrimées au dollar, comme mentionné précédemment, a gonflé artificiellement les prix en monnaie locale, à la fois pour les résidents et les touristes (notamment pour les voyageurs venant d’Europe, de Russie et de Chine). Depuis le début de l’année 2014, le yuan, l’euro et le rouble se sont dépréciés de 6 %, 20 % et 52 % respectivement par rapport au dollar23.

b. L’« effet tourisme » sur les achats de luxe Les touristes représentent historiquement un marché important pour les produits de luxe dans la région, mais le renchérissement récent du dollar et des monnaies locales a modifié cette donne. Bien que le volume des touristes venus dans le Golfe en 2015 ait été en hausse (+8 % à Dubaï et +15 % à Abou Dhabi)24, les touristes ont moins dépensé en produits de luxe(-7 % en 201525). Ces chiffres sont aussi la conséquence de la chute à Dubaï de près de 50 % du nombre de touristes russes, qui avaient toujours été les plus gros acheteurs de produits de luxe de la région (888 $26 par mois en vêtements, sacs et chaussures de luxe)27. Les dépenses des touristes chinois ont également baissé de 57 %, malgré une augmentation du nombre de ces touristes d’un tiers en 2015 à Dubaï. La dépréciation du yuan, ainsi que la campagne du gouvernement chinois contre la corruption et les cadeaux d’entreprise ont, en effet,eu un impact sur les touristes chinois, qui représentaient (avec les Russes) plus de 25 % des dépenses touristiques aux EAU en 201428.Ce contexte de diminution des dépenses de luxes malgré une augmentation du nombre de touristes souligne une modification dans la composition de la population touristique. Seules les marques qui comprennent qu’elles doivent adapter leur offre aux besoins de ces nouveaux consommateurs et capter leur attention pourront rester compétitives.

souks/showrooms

des importateurs

distributeurs s’élargissent aux points de vente régionaux

magasins en

franchise

grands magasins

internationaux

meilleurs centres

commerciaux du monde

Source: Groupe Chalhoub21

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2.2. Une métamorphose: des consommateurs arrivant à maturité, des catégories en augmentation et l’émergence du numérique

a. Des consommateurs qui changentLa rapidité et l’ampleur avec lesquelles les marques de luxe mondiales se sont implantées sur les marchés régionaux démontrent la passion des habitants du Golfe pour les biens de luxe. Les études menées par le groupe Chalhoub soulignent le niveau élevé de ces dépenses effectuées par les riches habitants du Golfe: 2 000 $ par mois, par exemple, en parfums et cosmétiques, prêt-à-porter, chaussures et sacs, 25 000 $ en montres et joaillerie et 10 000 $ par an en cadeaux32. Cette consommation reflète aussi la capacité des marques de luxe à répondre aux attentes des consommateurs, en particulier un besoin de distinction permettant de définir leur place et leur statut dans la société33.Cependant, les consommateurs du Golfe sont en train de changer, de même que leurs habitudes de consommation de produits de luxe. Ils sont de plus en plus matures et voyagent fréquemment, sont davantage reliés au reste du monde et connectés via le numérique. Cela les rend de plus en plus exigeants et conscients de ce qu’ils veulent: un choix varié, une qualité élevée, un prix équitable, de l’exclusivité et des produits uniques qui leur apporteront plaisir et reconnaissance. Comme nous l’avons décrit dans le Livre Blanc du groupe Chalhoub en 2014, Les consommateurs de luxe des pays du Golfe: un monde à part ?, les consommateurs de luxe du Golfe appartiennent généralement à un des archétypes de consommateur suivants: le cheval, le faucon ou la gazelle.

Traditionnellement, la plupart des consommateurs de luxe s’inscrivent dans la catégorie du cheval (66 % des consommateurs, motivés par le statut et la réassurance). Mais, la catégorie des gazelles (29 %) et des faucons (5 %) se développe. En effet, des recherches menées par le groupe Chalhoub et Bain & Co en 2015 ont identifié que les consommateurs de luxe commencent à passer d’une approche matérialiste du luxe à une vision plus axée sur le sentiment d’accomplissement et de plaisir. Ils apprécient de pouvoir partager les produits et les expériences. Comme ils sont à la recherche de plus de sens et de satisfaction, les consommateurs considèrent que les expériences luxueuses les comblent davantage que l’achat d’objets de luxe. Les consommateurs les plus jeunes s’intéressent à ce type de consommation « nouvelle » et plus axée sur l’expérience. Ce thème « expérientiel » s’applique tout particulièrement aux « Millenials », qui ont tendance à se définir par ce qu’ils font plutôt que par ce qu’ils possèdent.

devraient ouvrir d’ici 2020 dans de nouvelles galeries commerciales, essentiellement en Arabie saoudite, aux EAU et au Qatar.Cette tendance démontre non seulement que la surface des magasins continue de s’accroitre, mais aussi que la compétition est rude entre les marques du secteur. En fait, la présence des marques de luxe a presque atteint un niveau de saturation dans la région. Par exemple, Dubaï se classe deuxième, derrière Londres, en pourcentage de présence de marques internationales, et la capitale du Koweït arrive en 11ème position30.

La diversification de l’offre commerciale reflète également un besoin grandissant de différentiation dans un contexte de forte compétition. On voit apparaitre des magasins et galeries commerciales de plus en plus variés pour répondre à la demande des consommateurs. À Dubaï, l’attention s’est longtemps concentrée sur les grands centres commerciaux. La tendance actuelle se tourne de plus en plus vers des galeries marchandes plus petites dites « community malls » (comme Nakheel à Jumeirah Park Pavilion, Sunset Mall, J3 Mall) et des ensembles de boutiques ayant pignon sur rue (comme The Beach à JBR ou CityWalk à Jumeirah). En Arabie saoudite, en revanche, la tendance est à l’ouverture de centres commerciaux plus grands avec un positionnement davantage orienté vers le luxe (comme l’Al-Diriyah Festival City Mall et Riyadh Avenue Mall). Il s’agit d’un phénomène relativement récent pour un environnement qui se définissait historiquement davantage par des petites galeries commerciales et des magasins de luxe donnant directement sur rue.Cette expansion va permettre de soutenir la croissance du luxe jusqu’en 2020. Au-delà de cette date, il faudra privilégier la croissance organique, en tirant parti des réserves de croissance inexploitées de chaque magasin, au lieu de se concentrer exclusivement sur l’ouverture de nouveaux magasins.

« Depuis des années, les deux tiers de la croissance du marché du luxe sont dus à l’expansion de l’offre de magasins et à l’ouverture de nouvelles unités. Après 2020, cette expansion risque de ralentir, ce qui mettra sous pression la productivité et la croissance du secteur. Il ne suffira pas de répliquer et déployer avec succès des concepts qui ont fait leurs preuves ailleurs pour alimenter la croissance. Ce sont les stratégies de différenciation qui seront déterminantes. »

CYRILLE FABRE - Associé chez Bain & Company

Source: CB Richard Ellis, 201431

Le chevalstatut et réassuranceinfluences régionales

Le fauconexpérience

connaissance personnelle

La gazelleexpression de soi

influences occidentales

Source: Livre Blanc du groupe Chalhoub en 2014, « Les consommateurs de luxe du pays du Golfe: un monde à part »34

Doha

Abou Dhabi

Koweït

DubaïPénétration des marques

(% de commerces

présents)

n°2

n°11

n°33

n°44

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b. Les catégories émergentesLes dynamiques des catégories du marché reflètent ces mutations dans le comportement des consommateurs. Le marché de la beauté de prestige s’organisait auparavant principalement autour des parfums. Désormais, nous assistons à une augmentation des ventes des produits de maquillage, notamment aux EAU. Si les parfums représentent toujours 56 % de l’ensemble du marché de la beauté de prestige dans le Golfe en 2015, leur part de marché a baissé de 3 % par rapport à l’année précédente. Dans le même temps, la part de marché du maquillage a crû d’autant et représente 37 % de l’ensemble du marché du Golfe. Les soins de la peau, quant à eux, ne pèsent toujours qu’une faible part du marché (7 %)36.

Les nouveaux formats de distribution changent aussi la donne dans la région, avec la montée en puissance de marques de parfums de niche, de boutiques en propre (comme MAC, Make Up For Ever et Bobbi Brown) et le succès de Sephora.

« Le maquillage tire la croissance du secteur des cosmétiques de prestige partout dans le monde. Cette situation est due aux nombreuses innovations de grande qualité et aux prix raisonnables des produits, par rapport à d’autres catégories. Les marques phares de ce secteur ont émergé ces 10 dernières années et apportent beaucoup de fraicheur et de créativité, tout en étant beaucoup plus accessibles que les marques établies. On le constate en termes de positionnement et aussi en termes de prix. Benefit est peut-être le meilleur exemple de cette nouvelle génération de marques de maquillage. Compte tenu du fait que le maquillage a fait preuve d’une capacité de résistance notable dans un contexte économique mondial difficile, nous pouvons être confiants en la poursuite de cette progression au Moyen-Orient également. »

PATRICE BROSSON - Responsable régional de Benefit Cosmetics pour le Moyen-Orient et l’Asie

La montée du prêt-à-porter et en particulier du casualwear (style décontracté), avec notamment le phénomène des sneakers (chaussures de sport) et la baisse d’intérêt pour les vêtements plus habillés, le déclin des accessoires, et le retour de la joaillerie au détriment des montres ont aussi contribué à modifier le secteur du luxe. Par ailleurs, l’attachement des consommateurs de la région envers les traditions se manifeste dans l’émergence du maquillage halal et des collections d’abayas créées par les couturiers de marques réputées.

c. La montée en puissance du numériqueCes nouvelles dynamiques sont directement liées à l’entrée fracassante qu’a fait le numérique dans le secteur du luxe dans le CCG. Ce n’est pas une surprise dans une région où le taux de pénétration d’Internet est élevé: 91,5 % au Qatar, 90,5 % aux EAU et 63,7 % en Arabie saoudite, contre 87 % aux Etats-Unis37. Les jeunes, et particulièrement les « Millenials », qui, dans leur quête des meilleurs produits, passent sans peine des achats en ligne au shopping expérientiel en magasin, contribuent beaucoup à cette tendance.

Le marketing traditionnel et même les expériences conventionnelles en magasin en sont bouleversés. Les consommateurs sont maintenant connectés à tout moment et utilisent les réseaux sociaux comme Facebook et Instagram pour se connecter entre eux, partager leurs bonnes expériences avec des personnes ayant les mêmes centres d’intérêt et interagir avec les marques.

De plus, l’e-commerce - même s’il en est encore à ses débuts - se développe d’année en année (il a doublé en 2014 et augmenté de 50 % en 2015), car de plus en plus de consommateurs sont prêt à faire des achats en ligne. Les marques ont aussi développé des procédures adéquates pour répondre aux défis liés aux paiements en ligne et à la logistique.

Par conséquent, le marché du luxe du Golfe ne peut plus être considéré comme un marché de « deuxième classe », où les consommateurs seraient prêts à acheter quelque produit de luxe que ce soit tant qu’il est revêtu du logo d’une marque de luxe étrangère. Au contraire, une excellente expérience, qui donne le sentiment aux consommateurs d’être courtisés et désirés, est un vrai accélérateur pour les marques.

COUP DE PROJECTEUR: LEVEL SHOES PAR LE GROUPE CHALHOUBLe magasin Level Shoes au Dubai Mall propose aux consommateurs une expérience unique en réinterprétant la mode en matière de chaussures, d’art et de design.

Level Shoes est une expérience immersive autour des chaussures, répartie sur 9 600 m2 et proposant des collections de luxe et sur-mesure, des coupes branchées et une offre très avant-gardiste. Du service de conciergerie au salon de pédicure Sole Lounge pour un moment de détente, des services de stylistes dédiés à l’offre de cordonnerie sur-mesure The Cobbler, Level Shoes s’attache à apporter une expérience de shopping personnalisée. Les invités VIP peuvent bénéficier d’un grand nombre de services spécialisés, adaptés à leurs goûts et à leurs besoins.

Source: The Future Laboratory35

Acquisition et haut de gamme

Etape 1

Discernement et valeur

Etape 2

Émotion et expérience

Etape 3

Responsable et conscient

Etape 4

Intellectuel et poétique

Etape 5

20% 6%52%

US2,000-1,800$/sqm/year

Champs-ElyséesParis

New York

London

premiumshopping malls

Top Locations UA

E

US-6,000$US8,000$/sqm/year

LEASING RATES OF US650$/SQM/YEAR ARE INCREASINGLY COMMON

INTERNET PENETRATION

91,5 %QATAR

90,5 %EAU 63,7 %

Arabiesaoudite

87 %Etats-Unis

US DOLLAR

Source: Banque mondiale, 201437

Pénétration de l’Internet

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PARTIE III Un avenir prometteur: vers une nouvelle norme

Les mutations dans la région redéfinissent le contexte dans lequel opère le secteur du luxe, et les acteurs du luxe et du retail doivent maintenant s’adapter à un nouveau contexte. Les marques souhaitant se développer dans la région doivent donc adopter une approche plus stratégique pour tirer profit de cette nouvelle norme.Cette approche repose sur une connaissance approfondie d’une région perpétuellement en mutation, une compétitivité prix, une efficacité opérationnelle, un engagement à placer le consommateur au cœur de toutes les décisions et une forte importance accordée à l’innovation dans les stratégies de marques et de développement de nouveaux concepts.

3.1 Acquérir une expertise du marché

a. Connaitre la région et son cadre réglementaireLes pays du Golfe se transforment rapidement. Les règlementations évoluent. Il est donc crucial de savoir en quoi elles changent et comment s’y conformer. Du fait de l’importance accrue de la règlementation et de la gouvernance, les entreprises doivent faire preuve de plus de circonspection pour éviter les risques et saisir les opportunités qui s’offrent à elles.

Compte tenu de la nature complexe des dynamiques opérant dans la région, il est de plus en plus crucial de pouvoir s’appuyer sur des connaissances approfondies du contexte au sens large, des principaux acteurs et des us et coutumes. Cela est d’autant plus important que la région est composée de différents pays qui présentent certes des similarités, mais aussi des différences significatives dans des domaines comme la règlementation, les institutions, la culture et les personnes influentes.

De même, comme le processus de prise de décision est fondé sur une tradition de discussions consultatives privées et publiques, qui peut être difficile à appréhender pour les étrangers, les décisions officielles pouvant parfois sembler différées, avant de refaire surface ultérieurement pour être alors rapidement mises en œuvre.

Un tel environnement nécessite de faire preuve de réactivité, de flexibilité et d’une aptitude certaine à savoir appréhender les évènements présentant des risques importants pour ceux qui ne savent pas les anticiper.

b. Comprendre les consommateurs et marchés régionauxPour les marques de luxe, il est donc impératif de bien comprendre la région pour pouvoir y travailler. Les cadres dirigeants, marketeurs et designers doivent être en mesure d’allier une connaissance approfondie des tendances internationales avec une compréhension des cultures locales du CCG.

Armés de cette double expertise, les marques et les retailers peuvent concevoir des offres de produits adaptées aux consommateurs locaux (par example, en 2014, la marque H a lancé la première gamme de vernis à ongles halal dotés d’une perméabilité accrue pour que l’eau pénètre jusqu’à l’ongle, et pouvoir ainsi répondre aux impératifs des rituels de purification avant la prière).

« C’est important que le vendeur comprenne vraiment le produit qu’il vend. Il ne s’agit pas uniquement de vendre des chaussures, je veux savoir en quoi elles sont faites et comment elles ont été fabriquées. » Homme, Abou Dhabi

ENTRETIENS AVEC LES CONSOMMATEURS POUR LE GROUPE CHALHOUB par METHOS

Le personnel de vente, en première ligne avec les consommateurs, doit aussi bénéficier de ces connaissances. Comme l’a montré l’étude consommateurs la plus récente du groupe Chalhoub, 82 % des acheteurs de produits de luxe attendent des vendeurs et vendeuses qu’ils démontrent leur connaissance de l’histoire de la marque et des produits. Un nombre encore plus élevé d’entre eux, 85 %, souhaite que les vendeurs connaissent les dernières tendances. Pour le personnel de vente, acquérir une expertise et comprendre en profondeur les marques et les catégories qu’il représente, ainsi que le marché au sens large, permet de renforcer son professionnalisme et sa capacité à répondre aux attentes des consommateurs.

2.3 Perspectives d’avenir positives

a. La croissance sur le long termeEn dehors du développement de certains secteurs, les pays et marchés de la région ont de nombreuses raisons d’être optimistes. En dépit du contexte économique mondial et des changements sur le terrain de la fiscalité, les pays du Golfe devraient toujours afficher des taux de croissance de PIB plus élevés (2,9 % en moyenne par an jusqu’à 2018) que l’Europe (1,7 %) ou les Etats-Unis (2,4 %)38. En dépit des prix bas du pétrole, la région détient toujours l’une des plus importantes réserves en hydrocarbures de la planète, ce qui lui assure des revenus réguliers sur le long terme et permet de financer ses efforts de diversification économique.

b. De nouveaux horizons: l’Iran, l’Egypte et le MarocPlusieurs pays de la région, notamment l’Iran, l’Égypte et le Maroc, offrent des opportunités d’expansion intéressantes.

Du fait de la levée des sanctions, l’Iran devrait enregistrer une croissance annuelle du PIB de 6,2 % jusqu’en 201839. Marché important pour le groupe Chalhoub pendant les années 60 et 70, l’Iran représente une vraie opportunité pour les marques de luxe, avec ses 80 millions d’habitants (la population totale du CCG est de 52 millions), sa population jeune et éduquée, un peuplement assez largement urbain, une classe moyenne relativement nombreuse, des niveaux d’éducation élevés (surtout chez les femmes) et une forte adoption des technologies.

Les réseaux sociaux permettent actuellement à de nombreux jeunes iraniens d’échanger avec le monde extérieur. Les jeunes osent davantage dans le domaine de la mode, surtout en ce qui concerne les marques occidentales. Les marques de luxe ont témoigné d’un intérêt réciproque lors de la toute première Semaine de la Mode de Téhéran en 201440. Cela indique une évolution dans la manière dont les femmes et les hommes s’habillent et révèle également que certaines barrières sont en train d’être repoussées. Le milieu de la mode iranien est en pleine expansion, avec la montée de la mode à prix abordable (« high-street fashion ») et l’émergence de talents locaux (par exemple Poosh by Farnaz, Abdoli, Coralin Design, Naghmeh Kiumarsi).

« Les points de vente iraniens sont en train de basculer de la rue aux galeries commerçantes. La sortie du bazar traditionnel est accélérée par le phénomène d’occidentalisation des goûts des jeunes gens dans le pays. »

ALI AMIRI - PDG du centre d’étude MAAD Retailing Studies Centre

Dans le même temps, l’Égypte semble jouir d’une plus grande stabilité politique et pourrait afficher un taux de croissance du PIB de 4,6 % jusqu’en 2020. En dépit des défis financiers auxquels le pays est confronté, le marché semble prometteur: il bénéficie en effet d’une importante population de près de 90 millions d’habitants, les classes moyennes se développent et des facteurs, comme la découverte récente de vastes champs de gaz naturel et le lancement par le gouvernement de grands projets d’infrastructure, comme l’ambitieux développement du Canal de Suez, s’avèrent encourageants.

De son côté, le Maroc est aussi une destination potentiellement prometteuse. Les modes de consommation sont en train de changer, comme le témoigne l’intérêt croissant des classes moyennes supérieures et aisées pour les marques et produits de qualité. La croissance continue et la stabilité politique du Maroc représentent des facteurs majeurs dans l’influence grandissante du pays en Afrique, permettant de le positionner comme une passerelle commerciale vers l’Afrique du Nord et de l’Ouest.

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c. L’expérience prend le devant de la scèneForce est de constater que, si les experiences mediocres en magasin existent encore, les consommateurs ne les considèrent plus comme acceptables. De plus, l’hospitalité - une caractéristique intrinsèque de la culture du Golfe - est un aspect essentiel de l’expérience consommateurs dans la région. Les consommateurs s’attendent à être chaleureusement accueillis en tant que visiteurs, et non comme acheteurs, dans les magasins de luxe et à ce que le personnel anticipe et réponde à leurs besoins. Après tout, les compagnies aériennes de la région - comme Emirates Airlines, Etihad Airways et Qatar Airways - n’ont-elles pas habitué les citoyens du Golfe à un niveau très élevé en terme de service-client ?

Les magasins doivent être des lieux de confort, d’espace et de bien-être par excellence, et par certains côtés représenter une quasi extension du domicile de leurs clients. Les marques qui parviennent à instaurer une ambiance d’authenticité et d’hospitalité dans leurs magasins sont assurées de faire forte impression sur leurs clients.

De plus, l’expérience en magasin représente une opportunité pour les marques de faire le ou les petits plus qui surprendront et charmeront, pour mieux renforcer la relation entre la marque et le client. Les clients avertis de la région aiment qu’on les surprenne ou qu’on les impressionne: il faut toucher leur cœur et hypnotiser leurs sens dès qu’ils pénètrent dans le magasin. Pour cela, l’expérience en magasin se doit de créer des moments inoubliables qui immergent les clients dans l’univers de chaque marque.

COUP DE PROJECTEUR: L’INITIATIVE DU GROUPE CHALHOUB POUR L’EXPERIENCE EN MAGASINLa « Guest Experience » Initiative (projet pour l’expérience en magasin) du groupe Chalhoub vise à transformer le parcours d’achat d’une transaction, enune expérience. Notre personnel de vente s’appuie sur sa passion et son expertise de la marque pour tisser un lien avec les clients, que nous traitons comme des invités. Les clients doivent sentir que nous les considèrons comme des individus uniques. Pour cela, nous avons identifié huit « moments de vérité » qui sont cruciauxpour créer une expérience client mémorable. En magasin, nos équipes se concentrent sur ces moments et placent le client au cœur de leurs attentions.

Dans le cadre de cette initiative, nous avons aussi créé un outil unique destiné aux responsables de magasin et basé sur nos recherches concernant les préférences de nos clients. Cet outil aide les responsables à analyser régulièrement leurs magasins en se mettant à la place de leurs clients et à évaluer les efforts nécessaires pour apporter une excellente expérience à chaque client. L’objectif de cet outil est d’optimiser les résultats commerciaux (chiffres de vente, nombre de produits vendus par transaction, panier moyen et taux de conversion).

3.2 Être axé sur le consommateur

a. StorytellingLes entreprises de détail doivent s’appuyer sur leurs connaissances de la marque, leur expertise des magasins et leur compréhension des consommateurs pour proposer une excellente expérience au client. Cela passe par le fait de s’assurer que le personnel de vente sait évoquer l’histoire, l’héritage et les valeurs de la marque. Les marques de luxe qui réussissent savent tisser des relations authentiques avec leurs consommateurs, non parce qu’elles vendent des produits auxquels les consommateurs aspirent, mais parce qu’elles invitent ceux-ci dans leur univers. Grâce à cette capacité à être des narrateurs, les marques peuvent captiver les consommateurs et les entrainer dans un voyage auquel ils veulent participer.

Le personnel de vente représente sans aucun doute un excellent vivier d’ambassadeurs de la marque, car il peut partager des anecdotes sur celle-ci, expliquer ce qui la différencie et donner une identité aux produits. Le merchandising visuel joue aussi un rôle important dans la communication de l’image de la marque, car il leur permet de faire comprendre son positionnement en un coup d’œil. Les vitrines présentent souvent aux consommateurs des éléments évocateurs qui les accueillent dans l’univers de la marque. En théâtralisant l’expérience du shopping, le merchandising visuel est un outil puissant pour raconter une histoire, ce qui accroit l’engagement des consommateurs avec la marque.

Le storytelling aide à attirer l’attention du consommateur en permettant aux points de vente de présenter l’univers de leur marque, déclenchant par conséquent des émotions pour faire écho à l’expérience personnelle dudit consommateur. La pratique encore courante de vendre un produit de manière agressive n’est plus une stratégie de vente efficace. En fait, cette technique provoque la méfiance et amène les consommateurs à se poser des questions sur la qualité et l’intérêt du produit. Au lieu de cela, les marques doivent aider les clients à se plonger dans l’essence même de l’ADN de la marque.

Le storytelling devrait faire partie des stratégies de marketing et de vente afin de pouvoir apporter à chaque fois une expérience consommateur distinctive et signifiante. Compte tenu de la riche tradition de la région en matière de récits et d’histoires et son appétit qui n’est plus à démontrer pour le luxe, les stratégies fondées sur des récits authentiques et pertinents sont les plus à même de réussir sur un marché du luxe très concurrentiel.

b. La reconnaissance en magasinLes points de vente de luxe doivent aussi s’assurer que l’expérience consommateurs est si inoubliable que les consommateurs tisseront un lien avec les marques et entretiendront une relation sur le long terme avec elles. Dans cette bataille pour obtenir attention et considération, les techniques habituelles de la gestion de la relation clients (par exemple les programmes de fidélité basés sur l’accumulation et l’utilisation de points) ne suffisent plus à attirer les consommateurs. Dans la nouvelle relation clients, il s’agit de placer le consommateur au centre de tout ce que la marque fait. La relation tissée en magasin est précisément ce qui permet à l’expérience d’être réellement agréable: l’intimité, les petites attentions personnelles et surtout, la reconnaissance du client.

Pour avoir une bonne relation avec les consommateurs de luxe, les marques doivent s’assurer que ceux-ci se sentent reconnus et appréciés lors de chaque interaction avec les marques en question. Par exemple, les citoyens du Golfe apprécient particulièrement d’être identifiés par leur nom. C’est pour cette raison que les marques de luxe doivent faire en sorte que chaque client soit traité de manière individualisée et unique. Comme l’a montré l’étude consommateurs du groupe Chalhoub, 82 % des consommateurs de luxe attendent des marques qu’elles reconnaissent leurs clients fidèles et 77 % veulent que les marques se souviennent de leurs goûts et préférences.

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« Nous aimons l’idée d’habiller les femmes du monde entier. Par le passé, nous avons lancé des collections spéciales pour des pays comme la Chine, la Russie, le Brésil, le Mexique et nous voulions aussi créer quelque chose pour les femmes du Moyen-Orient et la population arabe - en tenant compte des goûts locaux et en y ajoutant une touche italienne »

DOMENICO DOLCE et STEFANO GABBANA - Fondateurs de DOLCE & GABBANA

Dans la lignée de ce désir de mélange entre l’offre de l’Occident et les normes et traditions de la région, les produits et services faits sur mesure, personnalisés et adaptés sont particulièrement attractifs pour les consommateurs de luxe du Golfe. La personnalisation est la nouvelle tendance ultime en matière de mode (par exemple les sacs en cuir avec de la calligraphie arabe gravée sur le fermoir). Les consommateurs de luxe du Golfe veulent des produits nouveaux et hyperpersonnalisés, que personne d’autre n’est parvenu à se procurer. L’exclusivité est désirable, car c’est cela même qui définit le vrai luxe. Les produits clairement exclusifs et uniques attirent sans aucun doute les consommateurs de toute la région, si bien que les marques lancent des produits spécifiques pour eux. En 2014, Gucci a par exemple créé un sac exclusif et unique en cuir de crocodile Bordeaux - le Lady Lock. Une seule pièce a été fabriquée et était destinée au marché de Dubaï, où elle a été vendue par le magasin Bloomingdale’s pour un montant de 98 350 Dhs42.

3.3 Rendre possible la compétitivité des prix

a. L’importance d’une valeur justeDans leur quête du tout dernier produit et des offres personnalisées, les consommateurs de luxe accordent beaucoup d’attention à la qualité des produits qu’ils achètent et au prix de ces produits. Du fait de leurs fréquents voyages à l’étranger et de leur utilisation croissante d’Internet, ils sont bien informés et exigent que les prix soient compétitifs.

Les écarts de prix sont plus manifestes que jamais, et les habitants du Golfe n’hésitent pas à rechercher des informations, vérifier les prix, en parler entre amis et comparer pour prendre des décisions plus éclairées. Ils se rendent ensuite là où le prix correspond à la valeur du produit. Ils ne paieront pas plus pour un produit si la qualité ou le niveau de service ne le justifie pas.Afin de conserver leur clientèle, les marques doivent donc aligner leur prix dans le monde. En ne répondant pas à cette exigence, les marques prennent le risque de discréditer leur réputation et leur image. Les points de vente qui demandent aux consommateurs de payer un prix beaucoup plus élevé pour des produits disponibles ailleurs à un tarif plus raisonnable risquent de nuire à la confiance que les consommateurs leur accordent, alors que celle-ci est pourtant la clé de voûte de la relation entre le consommateur et une marque de luxe.

b. Des activités opérationnelles efficaces et rationaliséesConfrontées à une plus grande sensibilité aux prix, les activités de distribution et de commerce de luxe doivent accroitre leur efficacité. Cela peut, en effet, permettre d’encourager la compétitivité des prix, tout en préservant les marges. Dans un contexte de plus grande volatilité, des opérations optimisées peuvent assurer une bonne gestion de la chaine de valeur. Une meilleure gestion des stocks, des politiques de distribution prudentes, une optimisation de la chaine logistique et du back-office, une gestion efficace des catégories et la capacité de réagir dans des délais courts sont autant de clés du succès dans ce domaine.

Les habitudes de consommation et la demande des clients devenant moins prévisibles, optimiser la supply chain et l’intégrer aux opérations commerciales est essentiel. Cela est d’autant plus vrai dans la mode et la gestion des catégories: seuls ceux qui définissent de nouvelles manières de planifier et gérer les catégories peuvent prendre l’ascendant sur les marchés. Par exemple, il est possible de mettre en place de meilleures prévisions de vente et un réassort automatique en déployant des systèmes informatiques performants. De cette manière, les marques peuvent lancer de nouveaux produits plus efficacement et plus fréquemment, les niveaux de stock et le fonds de roulement peuvent alors être constamment optimisés.

Comme le souligne le style « californien décontracté » d’Apple ou encore l’approche vibrante et divertissante de Séphora, il est évident que l’expertise dans le service et l’excellence de l’expérience en magasin doivent être adaptées à l’ADN de la marque. Les expériences en magasin doivent être cohérentes avec l’histoire, les valeurs, l’imaginaire et les émotions que les marques s’efforcent de projeter. Si assurer une excellente expérience est déjà une priorité au Moyen-Orient, il devient maintenant impératif pour les points de vente de luxe que l’expérience en magasin reflète l’univers de la marque.

d. Les stratégies de l’omnicanalAssurer une expérience client mémorable ne dépend pas juste de l’expérience en magasin: cela concerne tous les canaux et toutes les interactions avec la marque. Les consommateurs attendent une expérience aussi riche sur Internet qu’en magasin. Une approche omnicanale cohérente entre toutes les plateformes de la marque peut améliorer l’expérience qu’a le consommateur de la marque et renforcer sa fidélité. Au bout du compte, les consommateurs veulent une expérience de marque qui soit facile à apprécier.

Les consommateurs actuels utilisent de plus en plus les outils d’achat en ligne, les sites d’e-commerce et les réseaux sociaux pour trouver de l’inspiration et acheter des produits. Aux EAU, le secteur de l’e-commerce devrait représenter 10 milliards de dollars d’ici 2018 selon les estimations41. Le shopping au Moyen-Orient devrait se sophistiquer de plus en plus, car un nombre grandissant de magasins vendent leurs produits en ligne via des sites d’e-commerce comme Namshi.com, Hijabik.com et The Luxury Closet. Le groupe Chalhoub s’est aussi lancé dans l’e-commerce avec le lancement de plateformes en ligne pour Level Shoes, Wojooh et L’Occitane en 2015.

Si les consommateurs de produits de luxe adorent pouvoir toucher un produit avant d’acheter, les investissements dans l’omnicanal permettent aux consommateurs de suivre un parcours d’achat plus clair et attirant, depuis la navigation sur les sites web jusqu’à l’expérience en magasin.

e. Les derniers produits, des offres personnaliséesLe fait de proposer les derniers produits d’une marque, simultanément aux grandes capitales de la mode, est un autre facteur essentiel pour une expérience client mémorable. Les produits devraient être lancés en même temps dans le Golfe que dans le monde. 85 % des consommateurs de luxe du Golfe s’attendent à cela, ce qui n’a rien de surprenant compte tenu de leur utilisation fréquente du numérique. De plus, des lignes spécifiques pour les consommateurs du Golfe, en ce qui concerne les tailles, les coupes, les couleurs et les parfums, devraient être lancées de manière exclusive dans la région, ou au moins en avant-première par rapport au reste du monde. Ceci est particulièrement pertinent comme le montre la tendance croissante qu’ont les marques à adapter leurs collections pour répondre aux goûts des consommateurs du Golfe (par exemple des robes plus longues, plus de broderies, des sacs colorés, des sandales et des parfums orientaux). Dans le même temps, un groupe croissant de couturiers locaux très recherchés - notamment Bedouin, Bil Arabi, House of Nomad, etc. - attire l’attention des fashionistas locales. Le « Dubai Design and Fashion Council » (Conseil pour la mode et le design de Dubaï) a même été chargé de promouvoir ces talents au sein de la région.

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b. Des technologies alléchantes en magasinL’utilisation des technologies est indispensable pour les concepts de magasin innovants. La bonne exécution des technologies en magasin contribue à créer une expérience captivante pour les consommateurs. Les magasins doivent être totalement adaptés au numérique, proposer des expériences différentes, avec des surprises et des nouveautés, comme les approches à 360 degrés et la réalité augmentée. En utilisant des imprimantes 3-D, des miroirs intelligents, des iPads, des casques de réalité virtuelle, des hologrammes, des appareils de reconnaissance et des biocapteurs dans leurs magasins, les marques de luxe peuvent démontrer leur degré de sophistication à leurs clients et ainsi conserver leur intérêt.

3.4 Encourager l’innovation

a. Les innovations en matière de produits et de concepts de magasinsDans une région friande de nouveautés, les innovations en matière de produits et de concepts de magasins sont des moyens importants d’aider les marques à rester pertinentes et à se développer. Comme ce qui est nouveau est révéré, l’innovation produit - notamment dans la mode et la beauté - est un ingrédient essentiel du succès des marques de luxe.

COUP DE PROJECTEUR: ‘BEAT THE HEAT’ WOW DE WOJOOHDans la région du Golfe, le maquillage doit tenir sous la chaleur. Wow de Wojooh a donc formulé tous ses produits de manière à ce qu’ils soient adaptés aux climats caniculaires du Moyen-Orient, des fonds de teint liquides longue tenue aux Khôls waterproof.

L’innovation pour les concepts de points de vente est aussi un moyen de proposer aux clients la variété de choix qu’ils désirent. Le succès des boutiques spécialisées multimarques, qui ont apporté une offre plus pointue, atteste de l’importance de cette tendance.

« Les consommateurs actuels ne veulent pas simplement acheter un produit. Ils sont à la recherche d’une expérience unique, ils aspirent au dépaysement. TRYANO propose aux consommateurs une expérience à la fois VIVANTE, EXCITANTE, SPECIALISEE ET REMARQUABLE. Le magasin s’inspire des changements de saison dans la nature, qui évolue et change constamment. Nous proposons quelque chose de différent aux consommateurs d’Abou Dhabi: une destination pour vivre des expériences réellement exceptionnelles. »

LINTON CROCKFORD-MOORE, Directeur créatif du groupe Chalhoub

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Compte tenu de tous ces éléments, nous croyons en un avenir prometteur pour le luxe dans le Golfe. Cependant, réussir dans la région nécessitera plus de travail et de préparation, et plus d’énergie et d’agilité de la part de toutes les parties prenantes. Dans ce marché en plein processus de maturation, le rôle du distributeur régional est de devenir un partenaire régional, armé de l’expertise nécessaire pour aider les marques dans leur développement.

Un partenaire régional aujourd’hui:• partage les risques,• encourage l’efficacité opérationnelle pour maintenir les profits via des économies d’échelle et des

services partagés « plug and play »,• utilise ses réseaux, ses opportunités et son expertise pour aider à faire face au contexte réglementaire

de plus en plus complexe,• apporte sa connaissance profonde du client pour encourager le développement d’offres de

produits et services axées sur le client et personnalisées,• stimule l’innovation pour créer des expériences de shopping uniques qui répondent aux besoins du

marché,• est efficace et connait toutes les dernières évolutions.

« La région du Golfe a bénéficié d’une période d’abondance ces 25 dernières années, avec l’édification d’infrastructures incroyables et le développement de l’éducation pour sa population jeune et dynamique. Elle est actuellement en train de passer à une nouvelle phase de maturité, de connaissance, de sérieux et de plus solide gouvernance. En dépit des défis géopolitiques et économiques immédiats, cette région bénéficie d’une croissance régulière et d’une vraie richesse. Pour réussir, nous devons être aspirationnels, pertinents, compétitifs, apporter du sens et nous adapter aux changements et à cette nouvelle norme. »

PATRICK CHALHOUB - co-PDG du groupe Chalhoub

Conclusion

Le nouveau visage du luxe dans le Golfe n’est pas seulement une affaire de cycle lié au ralentissement économique, aux fluctuations des taux de change et aux variations du prix du pétrole. Ces phénomènes économiques ont sans aucun doute un impact sur le secteur du luxe actuellement. Cependant, ce nouveau visage du luxe dans le Golfe révèle des changements plus bien plus fondamentaux.

Le luxe, après s’être développé dans un esprit pionnier sur un marché à défricher, caractérisé par un énorme potentiel inexploité, devient maintenant un marché plus mature:

• Le contexte commercial est défini et encadré de manière plus formelle par une règlementation portant notamment sur la gouvernance, les lois du travail et la protection des consommateurs.

• La région affiche l’un des taux de pénétration des marques de luxe le plus élevé au monde.• L’offre commerciale s’est développée rapidement, tant en termes de surface commerciale utile que de

variété des types de magasins existants. Elle pourrait s’aligner sur les standards internationaux d’ici 2020.• Les consommateurs sont plus avertis et sensibles aux prix: ils voyagent beaucoup, comparent les prix, la

qualité des services et la disponibilité des derniers produits.

Nous nous attendons à ce que ce processus de maturation, maintenant qu’il est lancé, évolue très vite, comme c’est souvent le cas dans le Golfe. Les changements peuvent s’y produire rapidement, du fait de l’énergie et de l’ambition d’une population plus qualifiée, jeune et entrepreneuriale. La région a la capacité d’évoluer et de trouver son propre chemin, tout en s’inspirant des meilleures pratiques internationales.

CHANGEMENTS DES CONSOMMATEURS

ANCIEN PARADIGME NOUVELLE NORME

EN DEVELOPPEMENT

VOLUME

FONCTIONNEL

PUSH

VENTE AGRESSIVE

PRODUITS

MATURE

QUALITE

ASPIRATIIONEL

PULL

PERTINENCE

EXPERIENCE

FRU

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SIGN

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EVOLUTION DU MARCHE

CLASSE MOYENNE ET PLUS AVERTIS

PLUS DE CONCURRENCE ET SATURATION DE L’ENVIRONNEMENT COMMERCIAL

PRIX

DU

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Source: Groupe Chalhoub, février 201643

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REFERENCES

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dans les principaux pays émergents risquera de peser sur la croissance mondiale) - Banque mondiale, janvier 2016

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CHALHOUB LIVRE BLANC

2016

L’EVOLUTION DU SECTEUR

DU LUXEDANS LE GOLFE:UNE NOUVELLE NORME ?

Vous pourrez trouver plus d’informationssur le site www.chalhoubgroup.com

ou en contactant l’équipe Corporate DELPRAT RELATION PRESSEAlexandra Renaud: [email protected]

Tél: 01 71 70 38 38

Cette brochure respecte l’environnement et est imprimée à partir d’huile végétale

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