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Annales de pathologie (2012) 32, 177—183

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

MISE AU POINT

Cytopathologie thyroïdienne : le système deBethesda 2010

Thyroid cytopathology: Bethesda System 2010

Béatrix Cochand-Priolleta,∗, Philippe Vielhb,Bénédicte Royerc, Geneviève Belleannéed,Jean-Francois Collete, Isabelle Goubin-Versini f,Emmanuelle Leteurtreg, sous l’égide de la Sociétéfrancaise de cytologie clinique

a Service d’anatomie et cytologie pathologiques, université Paris-7, hôpital Lariboisière, 2,rue A.-Paré, 75745 Paris cedex 10, Franceb Département de Biopath, unité de cytopathologie, institut de cancérologie Gustave-Roussy,

114, rue Édouard-Vaillant, 94805 Villejuif cedex, Francec Centre de pathologie et d’imagerie, 14, avenue René-Coty, 75014 Paris, Franced Service d’anatomie et cytologie pathologiques, hôpital Haut-Lévêque, 33604 Pessac, Francee Cabinet de cytopathologie, 11, rue Cambronne, 75015 Paris, Francef Service d’anatomie et cytologie pathologiques, centre hospitalier R.-Dubos,95303 Cergy-Pontoise, Franceg Institut de pathologie, centre de biologie-pathologie, 59037 Lille, France

Accepté pour publication le 21 fevrier 2012Disponible sur Internet le 16 mai 2012

MOTS CLÉSTerminologie ;Bethesda ;Thyroïde ;Cytopathologie

Résumé La cytopathologie thyroïdienne représente, en nombre de prélèvements, avec lacytopathologie cervico-utérine, non seulement en France mais dans le monde, la pathologiela plus importante proposée à un diagnostic cytologique. C’est sur ce diagnostic que reposel’ensemble des décisions de surveillance ou de traitement dont le patient devra bénéficier.Jusqu’à une date récente, même si des classifications d’experts avaient été proposées, aucuneterminologie officielle et consensuelle n’était adoptée. La terminologie de Bethesda, publiée en2010 en langue anglaise, corrélée à une évaluation du risque de cancer par catégorie lésionnelleet à une attitude thérapeutique adaptée, offre la possibilité d’une prise en charge standardiséedes patients et l’opportunité d’une évaluation évolutive des diagnostics proposés. À ce titre, laSociété francaise de cytologie clinique (SFCC) a décidé de publier une version francaise officiellede cette terminologie. Son usage en est recommandé.© 2012 Publié par Elsevier Masson SAS.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (B. Cochand-Priollet).

0242-6498/$ — see front matter © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS.doi:10.1016/j.annpat.2012.02.015

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KEYWORDSTerminology;Bethesda;Thyroid;Cytopathology

Summary When consideriin France but also in the wmain pathology based on ctreatments will be done baconsensual terminology hasposed. The Bethesda termiof risk cancer for each of itthis terminology allows theopportunity of further assesClinical Cytology has decideIts use is highly recommend© 2012 Published by Elsevie

ntroduction

es pathologistes, dans leur pratique quotidienne, uti-isent pour les pathologies cancéreuses des classificationseconnues internationalement, le plus communément cellese l’OMS. Ces classifications sont régulièrement mises àour et adaptées aux nouvelles connaissances. Dans leomaine de la cytopathologie, il existe traditionnellementne grande liberté dans l’élaboration des comptes-rendusiagnostiques. Il aura fallu attendre 1988 pour qu’une pre-ière terminologie soit proposée aux cytopathologistes.

l s’agissait déjà d’une terminologie élaborée à Bethesdaoncernant alors les frottis cervico-utérins. Ce système delassification a fait l’objet de recommandations internatio-ales et a été modifié en 1991 puis en 2001, car il s’agit d’uneerminologie évolutive, adaptable à l’évolution des connais-ances. Elle est recommandée en France par la Sociétérancaise de cytologie clinique (SFCC) et la Haute Autoritée santé (HAS).

Une proposition de terminologie pour la cytopathologiehyroïdienne a été actée lors d’une conférence scientifiqueui s’est tenue au National Cancer Institute (NCI) du 22 au3 octobre 2007 à Bethesda, Maryland. Plusieurs articles sur

e sujet ont été publiés en 2008 [1]. Un atlas qui comportees définitions, des critères diagnostiques, des images et desotes explicatives, finalise cette conférence. Il a été publién 2010 et est disponible en Europe, en langue anglaise [2].e but de notre mise au point est d’informer les cytopatho-ogistes francais de la publication de cet atlas, de mettren exergue les principaux messages, de proposer une tra-uction francaise officielle et d’apporter, si nécessaire, uneide à la compréhension de cette terminologie. Ce projetst soutenu par la SFCC (http://www.francesfcc.org/) quin recommande l’usage.

Une réunion de travail sur la cytoponction thyroïdienne até organisée en septembre 2009 lors du 39e congrès euro-éen de cytopathologie à Lisbonne. Elle a montré la grandeisparité dans les terminologies utilisées, avec l’utilisation,ans le meilleur des cas, de terminologies nationales,illeurs institutionnelles ou personnelles, l’absence de toutonsensus, les réticences à changer les habitudes, et’évidente nécessité pour tous néanmoins d’une harmoni-ation des termes [3].

Avant le système de Bethesda pour la cytopathologiehyroïdienne, la Papanicolaou Society of Cytology [4], desroupes de travail américains [5] ou américains et européens6], ainsi que, très récemment, le collège des patholo-istes anglais [7] ont proposé des classifications. Toutes ces

gldcdns

rl

B. Cochand-Priollet et al.

e number of thyroid fine-needle aspirations performed not only then thyroid pathology, as well as Papsmears, represents thegical diagnoses. Decisions of clinical follow-up or of surgicalon the cytological results. Until recently, neither official norn adopted despite classifications by experts having been pro-y, published in 2010, in English, is linked with a percentage

gnostic category and with a suitable treatment. Furthermore,ibility of standardized management for the patients and thet of the cytological diagnoses. Therefore, the French Society ofublish this official French version of the Bethesda terminology.

sson SAS.

erminologies sont parfaitement recevables d’un pointe vue scientifique. Néanmoins, si chacune d’entre ellesomporte une catégorie bénigne et une catégorie maligne,our les cas dits « indéterminés », on observe un foison-ement impressionnant de termes. Si chaque clinicien,édecin généraliste, endocrinologue ou chirurgien s’adapte

ssez volontiers à la terminologie utilisée par « son » cytopa-hologiste, cette multiplication de terminologies empêchene réelle comparaison entre des séries publiées etomporte un risque majeur d’incompréhension et donc deraitement inadapté. Cela explique probablement la grandeisparité dans la prise en charge des nodules thyroïdiens.nfin, les différentes terminologies utilisées ne permettentas, en général, d’apprécier le risque potentiel de can-er pour une catégorie donnée, ce qui génère beaucoup’angoisse pour le patient, beaucoup d’interventions chi-urgicales inutiles et un rapport coût/efficacité faible.

Le système de Bethesda présente trois avantagesajeurs :

une définition et une description parfaites des imageslésionnelles microscopiques appartenant à chacune descatégories mentionnées. En clair, cela signifie que chaquecytopathologiste aura la possibilité d’utiliser le même

terme pour des images similaires quel que soit son lieud’exercice ;une corrélation, pour chaque catégorie lésionnelle don-née, avec le risque potentiel de cancer. Ce risquecorrespond au risque relevé dans la littérature en 2007.Cette corrélation offre au clinicien des données chiffréesréelles lui permettant de prendre des décisions thérapeu-tiques justifiées. Elles seront régulièrement actualisées ;des recommandations de prise en charge des patientsadaptées à chaque catégorie lésionnelle proposée ;ces recommandations pourront éventuellement êtremodifiées en fonction du risque de cancer retrouvé ulté-rieurement.

Le système de Bethesda offre donc aux cytopatholo-istes la possibilité de classer, sous un même terme, desésions identiques (reproductibilité interobservateurs) ; ilonne aux cliniciens la possibilité de proposer une prise enharge la mieux adaptée possible ; il permet enfin au patiente connaître le risque de cancer éventuel pour la lésion diag-ostiquée et de participer à la décision thérapeutique s’il leouhaite.

C’est pour ces trois raisons que la SFCC a choisi deecommander la terminologie de Bethesda, et pour aideres cytopathologistes francais dans l’utilisation de cette

Cytopathologie thyroïdienne : le système de Bethesda 2010 179

Tableau 1 Système de Bethesda 2010 : catégories et pourcentage de cas attendus par catégorie.Bethesda terminology 2010: categories and rate of expected cases for each category.

Catégories Sous-catégories Pourcentage de cas attendus

Non diagnostique < 15 %Bénin Adénome vésiculaire

ïde/e/

60 %

apillédueu dnapl

apillédueu dnapl

Nodule colloHyperplasiquThyroïdites

Lésion folliculaire de significationindéterminéeou Atypies de signification indéterminéeNéoplasme folliculaire / Néoplasmefolliculaire à cellules oncocytairesSuspect de malignité Carcinome p

Carcinome mCarcinome pCarcinome aMétastasesLymphomes

Malin Carcinome pCarcinome mCarcinome pCarcinome aMétastasesLymphomes

Le choix des termes utilisés est explicité dans le texte.

terminologie, de proposer une traduction francaise unique.Les termes utilisés ici sont donc les termes officiels. Ilssont synthétisés avec l’évaluation du risque de cancer etla conduite thérapeutique dans les Tableaux 1 et 2.

La terminologie de Bethesda : catégorieslésionnelles et critères cytologiques

La terminologie de Bethesda comporte six catégories :

• non diagnostique ou non satisfaisante ;• bénin ;• lésion folliculaire de signification indéterminée ou atypies

de signification indéterminée (ASI ou atypia of undeter-mined significance (AUS) ») ;

• néoplasme folliculaire incluant la variété néoplasme fol-liculaire à cellules oncocytaires ;

• suspect de malignité ;• malin.

La catégorie lésionnelle, selon la terminologie deBethesda doit clairement apparaître dans la conclusionde tout compte-rendu de cytoponction thyroïdienne. Àchaque catégorie correspond un pourcentage estimé de casattendus. Cette estimation permet aux cytopathologistesd’autoévaluer leur pratique diagnostique. Certaines catégo-ries sont elles-mêmes divisées en sous catégories qui doiventégalement être précisées (Tableau 1).

Un préalable sur le choix des termes proposés en languefrancaise est nécessaire.

Les termes « néoplasme » et « tumeur », ainsi que lestermes « folliculaire » et « vésiculaire », sont strictementsynonymes et tous utilisés en francais. Dans ce texte, cestermes sont utilisés indifféremment. En revanche, nousavons opté pour « néoplasme » et « folliculaire » pour la

vésiculaire/nodule

< 7 %

6—11 %

airellaireifférenciéasique

2—8 %

airellaireifférenciéasique

5—8 %

terminologie cytologique afin de rester au plus près dela version anglaise originale. Ces deux termes sont, parailleurs, ceux majoritairement choisis dans les pays euro-péens.

Le terme « cellules oncocytaires » est préféré à celui de« cellules de Hürthle », initialement proposé dans la termi-nologie américaine car ce dernier est impropre (Hürthle adécrit les cellules C) et « oncocyte » est le terme recom-mandé actuellement pour les descriptions histologiques [8],ce qui offre l’avantage de décrire les mêmes entités avec le

même mot, en cytopathologie comme en histopathologie.

Catégorie « non diagnostique » ou « nonsatisfaisante »

Cette catégorie inclut :• tous les cas où il existe moins de six groupes de cellules

folliculaires bien préservées avec au moins dix cellulespour chacun de ces groupes ;

• les cas où les cellules folliculaires apparaissent mal fixéesou colorées ;

• les ponctions de kyste avec ou sans histiocytes et compor-tant moins de six groupes de dix cellules vésiculairesbénignes chacun.

À noter un certain nombre d’exceptions à ce seuil de sixamas d’au moins dix cellules vésiculaires normales :• une ponction pauci-cellulaire ou acellulaire avec une

abondante colloïde car il s’agit certainement d’une lésionbénigne, macrovésiculaire (nodule colloïde) ;

• une ponction inflammatoire : une ponction de thyroïditelymphocytaire, d’abcès ou de thyroïdite granulomateusepeut ne contenir que des éléments inflammatoires.

Ces deux types de ponction sont à classer dans la caté-gorie « bénin ».

180 B. Cochand-Priollet et al.

Tableau 2 Système de Bethesda 2010.Bethesda terminology 2010.

Terminologie Risque de cancer Suivi clinique

%

%

%

métae du

pdn

C

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••

•••

•••

drucgs

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Cii

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Non diagnostique ?

Bénin 0—3 %

Lésion folliculaire de signification indéterminéeou atypies de signification indéterminée (AUS)

5—15 %

Néoplasme folliculaire / Néoplasme folliculaireà cellules oncocytaires

15—30

Suspect de malignité 60—75

Malin 97—99

US : échographie.a Dans certains cas la chirurgie est contre-indiquée ou inutile (miothérapie peuvent être indiquées en complément ou à la placdifférencié).

S’il existe des cellules atypiques, le spécimen estar définition adéquat pour l’interprétation. Ces cellulesoivent entraîner une classification dans la catégorie lésion-elle correspondant aux atypies observées.

atégorie « bénin »

ette catégorie inclut :les nodules vésiculaires bénins (correspondances histolo-giques : nodules colloïdes, hyperplasiques, goitreux ou aucours des maladies de Basedow, adénomes macrovésicu-laires) ;

l’ensemble des thyroïdites (le plus souvent lymphocytaireou thyroïdite d’Hashimoto, mais aussi granulomateuse outhyroïdite de Quervain, de Riedel et thyroïdite aiguë).

Critères diagnostiques des nodules vésiculaires bénins :préparations peu à modérément cellulaires ;cellules préférentiellement disposées en lambeaux mono-stratifés, au sein desquels elles sont régulièrementdisposées ;peu de microvésicules ;noyaux sombres et petits, de la taille d’une hématie ;substance colloïde plus ou moins abondante et de consis-tance variable ;histiocytes volontiers présents et souvent pigmentés,et/ou fibroblastes ;cellules inflammatoires en cas de thyroïdite ;oncocytes isolés ou en lambeaux ;cellules dystrophiques qui bordent parfois les kystes.

Le risque de cancer estimé est très faible, de l’ordree 0 à 3 %, et le risque attendu est souhaité comme infé-ieur à 2 % lors des études ultérieures. Pour les cliniciens,ne surveillance de ce nodule sur une période de trois àinq ans est recommandée avec un premier contrôle écho-raphique dans un délai de six à 18 mois. Si le nodule ne’est pas ou peu modifié, la surveillance se poursuit dans le

mcc••

••

fadpc[dà

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Si nodule solide, 2e ponction après un délai de3 moisSi nodule kystique, corréler avec la clinique etUS. Si zones suspectes ré-aspirer sous contrôleUS

Simple contrôle échographique à 6 — 18 moisd’intervalle pendant une période de 3 à 5 ans

2e ponction dans un délai approprié (3 à 6 mois)sous contrôle échographique

Contrôle chirurgical (lobectomie)

Contrôle chirurgical (thyroïdectomie totale oulobectomie)

Contrôle chirurgical (thyroïdectomie totale) outraitement médical spécifiquea

stases ; lymphomes) ; ailleurs une radiothérapie et/ou une chi- traitement chirurgical (carcinome anaplasique, carcinome peu

élai imparti ; une deuxième ponction de confirmation deénignité n’est pas recommandée ; ce n’est qu’en cas deodifications radiologiques significatives qu’une deuxièmeonction pourra être proposée.

atégorie « lésion folliculaire de significationndéterminée » ou « atypies de significationndéterminée »

l s’agit des cas où les critères cytologiques requis pourépondre « suspects de malignité » ne sont pas présents,ais avec quelques modifications cytonucléaires qui ne per-

ettent pas d’assurer le caractère bénin du nodule. Cette

atégorie inclut les cas de cytoponctions qui comportent lesritères diagnostiques suivants :

quelques micro-follicules ;une majorité d’oncocytes mais en nombre insuffisant pourévoquer une tumeur oncocytaire ;des modifications nucléaires focales faisant craindreun carcinome papillaire, (modifications chromatiniennes,augmentation de taille des noyaux, noyaux rainurés) ;une cellularité trop importante ;un infiltrat lymphoïde discrètement atypique.

Cette catégorie ne doit pas être un « fourre-tout ». Ilaut respecter strictement sa définition et les éléments quimènent à porter ce diagnostic ; les cas ainsi classés neoivent pas dépasser 7 % des ponctions thyroïdiennes. Lesremières publications ou présentations concernant cetteatégorie font état d’un pourcentage variant de 3,3 à 14,9 %9]. Des études ultérieures permettront de voir si les critèresiagnostiques s’affinent ou si effectivement un pourcentage

la hausse doit être accepté.Le risque de cancer estimé est de l’ordre de 5 à 15 %.Il est recommandé d’effectuer une deuxième ponction

ous contrôle échographique dans un délai de trois à sixois.

Cytopathologie thyroïdienne : le système de Bethesda 2010

Catégorie « néoplasme folliculaire » et« néoplasme folliculaire à cellulesoncocytaires »

La terminologie « suspect pour un néoplasme folliculaire »et « suspect pour un néoplasme folliculaire à cellules onco-cytaires » est également acceptée.

L’objectif de cette catégorie est d’identifier les nodulesqui pourraient être des carcinomes vésiculaires ou onco-cytaires pour les orienter vers une lobectomie, puisque lediagnostic de carcinome vésiculaire bien différencié ou decarcinome oncocytaire est impossible cytologiquement etrepose exclusivement sur la mise en évidence de signesd’invasion vasculaire ou capsulaire sur la pièce de résection.Cette entité est donc très exclusive et les cytopathologistesne doivent pas l’utiliser :• s’il existe des modifications cellulaires faisant suspecter

un autre carcinome, notamment un carcinome papillaire ;• comme catégorie de risque intermédiaire entre les lésions

folliculaires de signification indéterminée et les suspectsde malignité.

En principe, cette catégorie n’inclut pas les carcinomespapillaires d’architecture vésiculaire. Néanmoins, un cer-tain nombre de ces carcinomes papillaires sont inclus danscette catégorie, en particulier lorsque les critères nucléairesqui peuvent amener à suspecter un carcinome papillaire sontfocaux ou discrets. Il faut donc, devant tout prélèvementrichement cellulaire comportant de nombreuses structuresmicrovésiculaires, regarder avec attention les modificationsnucléaires. Si elles sont évocatrices d’un carcinome papil-laire, la lésion devra de préférence être classée dans l’unedes deux catégories suivantes (suspect de malignité oumalin).

Néoplasme folliculaire

Les éléments du diagnostic sont :• une richesse cellulaire ;• la présence de nombreuses structures microvésiculaires,

et de cellules isolées ;• des noyaux relativement uniformes, arrondis et parfois

augmentés de taille ;• des nucléoles discrets ou bien visibles ;• une colloïde rare ou absente.

Néoplasme folliculaire à cellules oncocytaires

Cette sous-catégorie inclut de facon exclusive les ponctionsthyroïdiennes constituées très majoritairement ou unique-ment d’oncocytes.

Critères diagnostiques :• une richesse cellulaire modérée à marquée ;• des oncocytes, c’est-à-dire des cellules de taille variable

avec un cytoplasme souvent abondant et finementgranuleux avec parfois des inclusions gris-bleu auMay-Grünwald-Giemsa et vertes à la coloration de Papa-nicolaou ;

• des noyaux augmentés de taille, excentrés, avec unnucléole proéminent ;

• des bi- ou multinucléations ;• des cellules en général peu cohésives ;• une colloïde habituellement absente ou peu abondante et

dense.

181

Qu’il s’agisse du néoplasme folliculaire ou du néoplasmefolliculaire à cellules oncocytaires, le risque estimé de can-cer est de 15 à 30 %. Ce risque relevé dans la littérature estprobablement surestimé et devrait être évalué à la baissedans les années qui viennent, compte tenu de la diminutiondes carcinomes vésiculaires.

Catégorie « suspect de malignité »

Dans cette catégorie sont inclus tous les cas pour lesquels lamalignité est vraisemblable, mais ne peut être affirmée, soitparce que le nombre de cellules est insuffisant, soit parcequ’il manque un ou deux critères pour permettre un diagnos-tic formel. Il est nécessaire dans chaque cas de préciser letype du cancer suspecté (carcinome papillaire, carcinomemédullaire, carcinome peu différencié, carcinome anapla-sique, lymphome ou métastase) (Tableau 1).

Cette catégorie inclut les différents types de cancers dela thyroïde, à l’exception des nodules suspects de pouvoircorrespondre à un carcinome vésiculaire ou à un carcinomeoncocytaire à classer dans la catégorie précédente.

Les critères de diagnostic cytologique sont les mêmes queceux décrits dans la catégorie suivante.

Le risque de cancer estimé est de l’ordre de 60 à 75 %.

Catégorie « malin »

Cette catégorie inclut toutes les tumeurs pour lesquellesun diagnostic cytopathologique de malignité est possible.Son utilisation suppose que tous les critères cytologiquesde malignité soient présents. La sous-catégorie doit êtrementionnée.

Carcinome papillaireLes critères diagnostiques, pour tous les types de carcinomespapillaires, sont :• amas cellulaires tridimensionnels ;• papilles ;• larges lambeaux monocouches, d’aspect syncytial ;• noyaux augmentés de taille, contours nucléaires irrégu-

liers ;• noyaux rainurés longitudinalement ;• chromatine granuleuse ou aspect en verre dépoli ;• inclusions cytoplasmiques intranucléaires ;• parfois microcalcifications ;• souvent cellules géantes histiocytaires ;• absence de colloïde ou colloïde peu abondante et épaisse,

voire métachromatique.

Pour les aspects des différentes variantes du carcinomepapillaire (architecture vésiculaire, oncocytaire, kystique,à cellules hautes. . .), il conviendra de se référer à l’atlas.

Carcinome médullaireCritères diagnostiques :• richesse cellulaire ;• cellules isolées, cubiques ou polygonales, parfois étirées

(aspect polymorphe assez caractéristique), d’aspect plas-mocytoïde (noyaux excentrés) ;

• binucléations fréquentes, chromatine poussiéreuse« poivre et sel » ;

• inclusions cytoplasmiques intranucléaires parfois pré-sentes (moins typiques que dans le carcinome papillaire) ;

• granulations intracytoplasmiques éosinophiles au May-Grünwald-Giemsa (MGG) ;

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dépôts d’amylose (métachromique après coloration avecle rouge Congo), ressemblant à de la colloïde épaisse.

Le diagnostic peut être difficile lorsqu’il s’agit d’uneonction peu productive car les cellules ont souvent unspect très régulier, peu inquiétant, et c’est le carac-ère isolé des éléments cellulaires et leur pléomorphisme,orsqu’il est présent, qui doivent inciter à la prudence.

arcinome peu différenciéritères diagnostiques :richesse cellulaire ;architecture microvésiculaire, insulaire, solide ou trabé-culaire ;rapport nucléocytoplasmique élevé avec des noyaux glo-balement plus volumineux que les noyaux des cellulesvésiculaires normales mais ronds, à contours réguliers, oualors plus petits, convolutés ;absence de colloïde, ou alors colloïde en goutte densedans les amas microvésiculaires ;parfois, nécrose et/ou mitoses.

L’aspect très régulier des noyaux peut être trompeur ete risque est d’inclure ces lésions dans la catégorie « bénin ».ependant, l’habituelle grande richesse des préparations et

’absence constante de colloïde amènent souvent à classeres ponctions dans la catégorie « néoplasme folliculaire »,e qui implique aussi une résection chirurgicale.

arcinome anaplasiqueritères diagnostiques :des cellules de taille variable, épithélioïdes ou fusi-formes ;des noyaux très volumineux, irréguliers, avec desnucléoles souvent proéminents ;des amas tridimensionnels ou cellules isolées ;parfois nécrose, mitoses ou inflammation à polynu-cléaires.

Le diagnostic de malignité est en général évident. Leiagnostic de carcinome indifférencié ne pose pas de pro-

lème majeur, que l’on soit en cytologie conventionnelleu en milieu liquide d’autant que la présentation cli-ique est tout à fait caractéristique. Cependant, devant’importantes modifications cytonucléaires, il faut savoirnvisager un carcinome médullaire avec des cellules géantesu bizarres, et surtout une métastase. Un complémentmmunocytochimique est nécessaire ainsi qu’une parfaiteorrélation avec les données cliniques et biologiques.

ymphomes et métastases :es critères cytologiques des lymphomes sont ceux connusour la cytopathologie ganglionnaire. Les origines les plusréquentes des métastases sont les carcinomes du rein, duein et bronchopulmonaires.

es examens complémentaires :mmunocytochimie et marqueurs

oléculaires

ors de la conférence de Bethesda, l’étude immunocyto-himique pour les ponctions des nodules thyroïdiens a étéecommandée dans des cas très particuliers [10] :

D

Lr

R

B. Cochand-Priollet et al.

pour les lésions bénignes :pour le diagnostic différentiel entre adénome thyroïdienet adénome parathyroïdien inclus dans la glande thy-roïde ;dans les nodules malins :◦ pour confirmer un diagnostic de carcinome médullaire,◦ pour le diagnostic différentiel carcinome indifférencié

primitif versus métastase,◦ dans le cas de lymphomes.

Aucune recommandation d’étude immunocytochimiqueu moléculaire n’a été émise pour les autres catégoriesésionnelles en considérant qu’il n’y avait pas de sérieubliée suffisamment importante.

onclusion

a terminologie de Bethesda semble réellement offrir auxytopathologistes l’opportunité d’aboutir à une meilleureomogénéité et standardisation de leurs diagnostics. L’atlasublié en 2010 est un outil de travail indispensable. Notreise au point n’a pas la prétention de s’y substituerais veut souligner les points essentiels permettant uneeilleure compréhension de ce système. À ce jour, cette

erminologie a été officiellement recommandée par deuxociétés nationales : la Société francaise de cytologie cli-ique et la Société grecque de cytologie ainsi que par laédération européenne des sociétés de cytologie (EFCS). Unest a été mis à disposition des cytopathologistes européensn 2011 sur le site internet de l’EFCS (http://www.efcs.eu).n dehors des avantages déjà discutés, cette termino-ogie est un système de classification évolutif dans leemps. D’ores et déjà, nous savons qu’il sera possible,’ici quelques années, d’analyser les différentes catégo-ies lésionnelles, de mieux définir le risque de canceru’elles comportent et donc d’adapter les thérapeutiquese la facon la plus appropriée pour le patient. Considérantu’aucune autre terminologie n’offre actuellement cettepportunité, l’usage de la terminologie de Bethesda poures comptes rendus cytopathologiques des ponctions thyroï-iennes paraît incontournable.

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

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