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IUFM DE BOURGOGNE –MACON CONCOURS DE RECRUTEMENT : professeur des écoles
Comment initier la poésie aux cycles 1 et 2 ?
LEMOINE Aurélie
Directeur de mémoire : Martine JACQUES
Année : 2007 n° de dossier : 0401310G
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SOMMAIRE Remerciements p.2 Introduction p.3 I L’école et la poésie
a) Qu’est-ce que la poésie ? p.4/5 b) La poésie selon les Instructions Officielles p.5/6/7 c) Pourquoi faire de la poésie à l’école ?
� Développement de l’imaginaire p.7/8/9 � Construction de soi, socialisation p.9/10 � Acquisition d’une lecture littéraire p.10/11 � Le rôle de l’école p.11/12
II Faire entrer la poésie dans la classe
a) Ecouter et lire la poésie
� L’écoute p.13/14 � Le rôle de l’enseignant p.14/15 � Les moments de poésie p.15/16
b) La poésie : une discipline transversale
� le lien avec les arts p.17/18/19
c) L’entrée dans l’univers poétique d’un auteur p.19/20
par la découverte d’un recueil en CE1/CE2
III Quelles pratiques poétiques en classe ?
a) L’oralisation, la mise en voix p.21/22 b) Trouver l’image poétique
� La création d’un album poétique en GS et la découverte p.23/24/25
de figures de style : la comparaison et la métaphore en CE1/CE2
c) Ecrire pour développer la créativité en CE1/CE2
� Les jeux poétiques p.26/27 � Ecrire « à la manière de » p.27/28/29 � Les créations poétiques, la finalité p.29/30
Conclusion p.31 Bibliographie p.32 Annexes p. I à XIX
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REMERCIEMENTS
Je tiens à remercier ma directrice de mémoire Me M. Jacques pour son aide et ses
conseils au sujet de ce mémoire. J’ai pu mener à bien ce projet grâce aux professeurs que j’ai
remplacés car j’ai eu la liberté de pratiquer la poésie comme je l’entendais. Je remercie
également les élèves de CE1/CE2 et de grande et moyenne section pour leur accueil
chaleureux et leur investissement lors de ces séances.
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INTRODUCTION
Qui n’a pas de souvenirs de poésies de son enfance ? On se souvient presque tous d’un
vers, d’un poème appris par cœur. Cependant, depuis l’école primaire a-t-on côtoyé de
nouveau la poésie ? La rencontre t-on souvent dans les magazines, à la télévision ? Pourtant,
les enfants apprécient particulièrement la poésie et ceci a été confirmé lors de mes stages. Si
la poésie est peu présente dans le mode adulte, elle l’est davantage à l’école en tant que
mémorisation et récitation. Beaucoup d’enseignants pensent qu’il faut être un expert dans ce
domaine pour pouvoir l’enseigner autrement. Il y a une seule exigence c’est de lire de la
poésie, de la côtoyer. Plus l’adulte en lira, plus il se familiarisera avec ces textes. Souvent, les
adultes pensent (à tort) que les enfants ne vont rien comprendre à la poésie si celle-ci est trop
complexe ou hermétique. J’ai pu constater que les enfants sont très sensibles aux textes
poétiques, il est nécessaire par contre de créer une atmosphère propice à cette discipline,
c’est-à-dire aux échanges, à la prise de parole et d’expliquer ses attentes lors de ces moments.
Il existe une telle variété de poèmes à la fois dans les formes, les contenus et les époques qu’il
serait faux de dire que la poésie est inaccessible car trop complexe.
Si j’ai choisi ce thème de mémoire, c’est parce que j’ai toujours été sensible aux
pouvoirs des mots, ce qu’ils évoquent, mais aussi à tous ces écrits qui permettent une
réflexion sur soi et sur le monde. C’est là le pouvoir de la poésie : elle remet constamment en
cause notre perception du monde. J.P Siméon déclare, dans le Journal Des Instituteurs
d’octobre 2002, que la poésie est « indispensable lorsque l’on veut construire des consciences
alertes, critiques et dynamiques mais aussi des consciences aptes à la découverte perpétuelle,
au démenti et au doute. » De plus, la poésie permet de développer plusieurs compétences : la
maîtrise de la langue, la production écrite et orale. Elle est intimement liée à l’éducation
artistique car elle procure des sensations, des émotions et développe l’imagination. Ceci me
paraît indispensable pour la formation d’un individu. Alors, comment initier la poésie aux
cycles 1 et 2 ? Il est nécessaire de s’interroger sur ce que représente la poésie à l’école
aujourd’hui et sur ce qu’elle peut apporter aux élèves. On verra qu’il existe divers moyens
pour faire entrer la poésie en classe et on s’interrogera sur les pratiques poétiques qu’il est
possible d’amener à l’école et sur la finalité d’un tel projet. Pour répondre à cela, j’ai pu
mettre en place plusieurs situations poétiques dans une classe de CE1/CE2 lors de mon stage
filé et dans une classe de moyenne et grande section en stage de responsabilité de trois
semaines.
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I L’ECOLE ET LA POESIE
a) Qu’est-ce que la poésie ?
Tentons de donner une définition de la poésie. Je dis bien « tentons » car cet exercice
me paraît difficile. En effet, l’étymologie du mot poésie vient du grec « poiein » qui signifie
« créer, fabriquer ». Cela ressemble donc à une forme d’artisanat, le poète étant le créateur qui
joue avec la langue, avec les mots. Selon J.P.Siméon, c’est « une langue remuée de
l’intérieur ». La poésie serait alors un autre langage.
En linguistique, on dira que c’est un discours centré sur le message. Roman Jakobson
dans ses Essais de linguistique générale définit la fonction poétique comme le moyen
d’inscrire dans la mémoire ou de préserver de l’oubli, de mettre en valeur les mots et les
qualités sonores d’une langue donnée. « La visée du message en tant que tel, l’accent mis sur
le message pour son propre compte, est ce qui caractérise la fonction poétique du langage. »
Mais attention, « Toute tentative de réduire la sphère de la fonction poétique à la poésie, ou de
confiner la poésie à la fonction poétique, n’aboutirait qu’à une simplification excessive et
trompeuse. »
Dans le dictionnaire du Littré, on lit au mot « poésie » : «Art de faire des ouvrages en
vers ; tout ce qui est vers n’est point prose. » Les dictionnaires les plus anciens définissent la
poésie par la présence de vers. Or, l’apparition au XIX ème siècle du vers libre puis de la
poésie en prose remet en cause ces définitions. Dans des définitions plus récentes comme
celle du Petit Larousse 2003 qui définit la poésie comme un « art de combiner les sonorités,
les rythmes, les mots d’une langue pour évoquer des images, suggérer des sensations, des
émotions. », le jeu sur les mots, qui suscite émotions et sensations, est rappelé. La difficulté
réside dans le fait que la poésie est multiple. Rien de plus varié tant dans les formes, dans les
textes, dans les messages. « La poésie est une perpétuelle métamorphose » d’après J.P.Siméon
et c’est bien là une difficulté certes mais c’est aussi sa richesse.
Si maintenant on demande à des enfants ce que représente la poésie pour eux, j’ai
souvent eu comme réponse « ça rime, c’est beau ». Ceci est une vision très réductrice et je
dirais même fausse de la poésie. J.P Siméon va plus loin en affirmant que ce sont des
contresens. Lors de sa conférence à l’IUFM, il a étayé son propos en donnant plusieurs
exemples. Le poème de Ronsard, «Mignonne, allons voir si la rose », évoque la
vieillesse, « Sous le pont Mirabeau » d’Apollinaire traite de la mort de l’amour sans oublier
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tous les poèmes parlant d’exil, de mort. Ce sont ces thèmes difficiles de l’existence qu’ont
choisis les poètes. La poésie est selon J.P Siméon « une façon radicale et brutale de monter les
questions existentielles de l’existence ». Elle n’est donc absolument pas le rêve mais elle nous
renvoie au plein cœur de notre existence. La poésie est qualifiée selon lui de « tension entre
notre monde réel intérieur et le monde qui nous entoure ». Ce sont ces concepts de beauté, de
rimes que les enseignants doivent faire évoluer en proposant des poésies contemporaines et
variées.
La poésie n’est pas seulement un travail sur la langue, elle permet aussi de remettre en
question notre rapport au monde et nos certitudes. Comme le disait René Char « le poète est
un éveilleur ». En effet, peut-on dire que l’on a compris un poème ? L’a-t-on réellement
compris ? Ne peut-on pas le relire plus tard et en découvrir un autre sens ? Rien n’est moins
sûr. Là aussi J.P Siméon a un avis très tranché. La compréhension d’un poème est
personnelle. Le terme de compréhension ne convient pas pour ce type de texte sauf si l’on
prend son premier sens qui vient du latin « comprehendere » qui signifiait prendre avec soi.
Selon notre vécu, nos expériences, les poèmes auront une résonance différente. Il n’y a donc
pas un sens mais bien plusieurs sens dans un poème.
Pour toutes ces raisons, aucune définition n’est assez précise. La poésie se définit par
sa variété, elle ne doit pas, par définition, se laisser enfermer. Elle est tout cela à la fois,
ancienne et moderne, en prose et en vers, visuelle, auditive… La poésie n’est pas non plus
une discipline, c’est à la fois un apprentissage linguistique, un genre littéraire, une pratique
artistique et c’est cela qui la rend riche et intéressante pour l’école.
b) La poésie selon les Instructions
Officielles de 2002.
Les programmes de 2002 sont tournés vers la maîtrise de la langue. C’est dans le domaine
intitulé « Littérature (dire, lire, écrire) » que l’on retrouve la poésie. En effet, elle ne fait pas
l’objet d’une étude à part comme cela avait été le cas auparavant, mais elle fait partie du
patrimoine littéraire qu’un enfant doit découvrir et travailler. Les programmes insistent sur le
fait que la poésie doit garder la même importance en cycle 2 qu’en maternelle.
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En maternelle, l’accent est mis sur les réalités sonores de la langue. En effet, la poésie
joue avec les constituants formels, rythme et sonorité, autant qu’avec les significations. Elle
permet une nouvelle relation au langage. Quant au cycle 3, les programmes préconisent aux
élèves de « prolonger l’interprétation en cherchant à la transmettre au public ». Elle est
également directement mise en liaison avec les activités artistiques. Les enfants doivent écrire
à partir de la littérature en prolongeant, complétant ou transformant un texte narratif mais
aussi poétique.
L’approche de la poésie à l’école a donc évolué, elle s’est directement intégrée à la
maîtrise de la langue. Elle participe donc de l’acquisition d’un patrimoine mais aussi d’un
moyen pour mieux comprendre et maîtriser la langue. Par ailleurs, le Ministère de l’Education
Nationale a publié une « liste de référence des ouvrages de littérature de jeunesse » pour le
cycle 3 dans laquelle la poésie a toute sa place. En effet, elle comporte 37 ouvrages aussi
divers les uns que les autres. Aux côtés des contes, des romans, des albums, des pièces de
théâtre et des bandes dessinées, les élèves côtoient des textes de poètes dits « classiques »
comme Paul Eluard, René Char ou Victor Hugo, mais également des textes plus
contemporains tels que ceux de J.P. Siméon ou de Jacques Roubaud. Elle propose également
des recueils étrangers comme les haïku de Bashô et de la poésie en prose de J.P Dubost par
exemple. Cette liste doit être utilisée par les enseignants pour les aider dans le choix des
lectures proposées aux élèves et permet de diversifier l’approche de la poésie. Ce document
d’application met l’accent sur la lecture. Dans le paragraphe intitulé, « De la lecture à la mise
en voix des textes », il est question de « lecture interprétative ». Cette compétence peut être
alors travaillée avec des lectures de poèmes.
En mars 2004, un dossier intitulé « La poésie à l’école » pour l’école primaire a été publié
par le Ministère de l’Education Nationale, preuve de l’intérêt porté à la poésie par l’école. Il
se compose de propositions d’activités pédagogiques, sur la diversité, les échanges et sur le
dire-lire-écrire en poésie, enfin il propose des éléments bibliographiques. Il se veut donc être
une aide aux professeurs pour enseigner la poésie à l’école. En effet, de nombreuses
compétences liées à celle-ci sont à acquérir tout au long de la scolarité. En voici le contenu.
Compétences à acquérir en fin de maternelle :
� dire ou chanter chaque année au moins une dizaine de comptines ou de jeux de doigts
et au moins une dizaine de chansons ou de poésies.
Concernant le langage écrit :
� produire des assonances ou des rimes.
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Compétences à acquérir en fin de cycle 2 :
� faire des propositions d’interprétation pour oraliser un texte appris par cœur ou pour
dire un texte en le lisant.
� dire un poème en l’interprétant.
Compétences à acquérir en fin de cycle 3 :
� restituer au moins dix textes parmi ceux qui ont été mémorisés.
� dire quelques-uns de ces textes en proposant une interprétation.
� pouvoir mettre sa voix et son corps en jeu dans un travail collectif portant sur un texte
poétique.
� pouvoir écrire un fragment de texte de type poétique en obéissant à une ou plusieurs
règles précises en référence à des textes poétiques.
On voit donc que la poésie ne se résume pas à la simple récitation. Elle fait partie
intégrante de la maîtrise de la langue française. A la lecture de ces Instructions Officielles, on
constate que la poésie doit être appréhendée à l’oral mais aussi à l’écrit. De même, on
remarque que la poésie est abordée dans d’autres domaines que la maîtrise de la langue, en
lien avec d’autres disciplines. Il est important de ne pas oublier ce domaine car, comme nous
allons le voir dans la suite de cette première partie, la poésie comporte des aspects qui
touchent à l’imaginaire et pas seulement à la langue.
c) Pourquoi faire de la poésie à l’école ?
Le développement de l’imaginaire, la socialisation et la lecture littéraire sont trois
objectifs importants de l’école. J’ai pu constater que la poésie pouvait répondre à ces
objectifs.
� Développement de l’imaginaire.
L’imagination cette « reine des facultés », comme le disait C. Baudelaire est mise en
valeur dans la poésie. En effet, la poésie est souvent assimilée à l’imagination, au sens de
fabrication d’images. Pourtant selon J.P Siméon, on ne peut pas réduire la poésie à cela
puisqu’elle « renvoie au plein cœur de notre existence ». Ce que confirme Roger Salomon
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dans sa préface de la Grammaire de l’imagination de Gioanni Rodari, « L’imagination n’est
pas une évasion mais un regard différent sur le réel (…) L’imagination est une énergie
transformatrice, une usine qui transforme la réalité, la décante, l’épure, l’enrichit, comme on
transforme une matière première en produit fini. » On se dit alors que les enfants qui ont une
bonne imagination, selon les adultes, seront peut-être à l’aise avec ces poèmes. G. Bachelard
disait : « L’enfant est sans cesse la proie d’images qui se métamorphosent : d’où cette
puissance visionnaire qui surprend l’adulte, et la pseudo-poésie des enfants de maternelle. »
Or, il est apparu lors de mes stages que les enfants restent très attachés au réel et au concret.
Lors de la création de l’album poétique en maternelle, je leur ai demandé ce qui était petit
pour eux. Evidemment les propositions sont restées « réelles » : une fourmi, une coccinelle.
Mais petit à petit, un enfant a pensé à un bébé oiseau, non seulement un oiseau est quelque
chose de petit pour eux mais un bébé l’est encore plus. Puis ils ont proposé un nounours.
Certes on peut qualifier une peluche de petite par rapport à la taille d’un humain mais
comparée à une fourmi, ceci est relatif. Ici, la notion de petit s’est vue attribuée une
connotation affective. En effet, un nounours est un objet affectif et cet enfant qui a proposé ce
mot a provoqué une image : petit/ tendresse.
En fait, les enfants peuvent faire preuve d’une grande imagination si on leur en donne
l’occasion. Il est vrai que l’école n’est pas un lieu où l’imagination est la plus libre. On assiste
plutôt à des raisonnements logiques, à une certaine rationalité. Le cas de la maternelle est
particulier, l’imagination y trouve plus de place. Dans cette même classe de maternelle, j’ai
lu « La fourmi » de Robert Desnos (Annexe I). A partir de ce poème je leur ai demandé
« Qu’est ce qui n’existe pas selon vous ? » J’ai obtenu plusieurs réponses telles que « un
carton avec des yeux, une assiette qui parle, une pomme de terre qui saute… » Ensuite les
propositions ont tourné en rond. Je leur ai alors montré des illustrations d’animaux et d’objets.
Je souhaitais amplifier leur imagination : « un cheval avec des lunettes » alors j’ai déplacé les
étiquettes pour obtenir : « des lunettes qui font du cheval ».
Il apparaît alors nécessaire de créer un milieu stimulant comme le souligne Michel
Cosem, Pour une culture de l’imaginaire, citation reprise par le groupe d’Ecouen : « Pour
qu’une culture de l’imaginaire soit possible et positive, il convient de créer les conditions
favorables à une prise en compte concrète des formes qu’elle peut prendre chez chaque
enfant… Pour que ces formes puissent se concrétiser, il faut qu’un milieu stimulant lève les
tabous tout en fournissant les moyens linguistiques ou graphiques qui sont nécessaires. »
C’est dans cette optique que le groupe de recherche d’Ecouen propose les TAI : tremplins
affectifs et imaginaires. Ils ont élaboré des objectifs d’ordre affectif et imaginaire : « faire
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fonctionner l’imaginaire et stimuler l’imagination pour structurer l’imaginaire. » Il peut s’agir
d’une écoute musicale, d’un évènement de vie de classe comme la visite d’un musée ou d’un
lieu particulier, l’enseignant peut présenter aussi des tableaux, des phrases inductrices. Ceci
correspond aux tremplins évoqués.
� Construction de soi, socialisation
Comme nous l’avons dit plus haut, la poésie permet de se confronter aux questions
fondamentales et universelles de notre existence. Elle permet alors de ne pas laisser les
enfants seuls devant ces questions. La poésie laisse aux enfants la possibilité de s’exprimer et
s’exprimer, c’est se libérer. Certains enfants n’osent pas parler car ils ne disposent pas de tous
les mots dont ils auraient besoin. Or le langage poétique permet aux élèves de trouver un écho
aux mots qu’ils s’inventent pour parler du réel. Il leur permet de communiquer ce qu’ils
voient, ce qu’ils ressentent, la poésie participe donc de la socialisation. Selon Georges Jean, la
pratique de la poésie peut constituer un premier acheminement vers la parole car c’est une
autre parole que la parole relationnelle dont la difficulté réside dans le fait d’aller de soi vers
l’autre. Les enfants alors en difficulté s’expriment plus facilement et plus librement car il n’y
a pas de jugement. En poésie, l’enfant prend la parole. Il devient actif dans la classe. Selon
Christiane Keller dans Les cahiers pédagogiques d’octobre 2003, qui consacrent tout un
dossier à la poésie, la poésie ainsi que d’autres disciplines artistiques offrent le moyen de
s’exprimer, de sortir l’enfant de sa solitude. Elle parle de possibilités d’intériorisation, de
symbolisation qui permettent de l’aider à prendre du recul par rapport au monde et au passage
à l’acte voire aux poings. Michel Cosem ajoute que « la poésie est découverte du monde,
découverte de soi, des autres ». L’enfant développe sa personnalité en apprenant à se
connaître et à découvrir les autres. La poésie lui permet de découvrir d’autres modes de
pensée et d’expression.
La création poétique en groupe classe peut avoir une fonction de socialisation et
d’affirmation. Les enfants apprennent à s’écouter, à compléter leurs propositions. Toutes les
idées sont admises, des plus concrètes aux plus imagées. A partir du poème de Jacques
Prévert « Quand la vie est », les élèves ont écrit plusieurs phrases pour compléter le poème,
puis, pour l’éditer dans le journal scolaire nous avons créé un poème collectif en suivant ce
modèle. Chacun venait compléter les idées des camarades, enrichissait les propositions pour
améliorer le poème collectif. Même les plus timides ou les moins à l’aise peuvent s’exprimer
puisque leurs propositions sont valorisées grâce à la production collective.
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Ce qui est important dans les productions c’est leur valorisation : j’ai choisi de valoriser les
poèmes des enfants par l’affichage et par l’édition. Ce poème collectif a trouvé sa place dans
le journal scolaire ce qui participe de la socialisation des élèves. L’édition dans le journal
scolaire est un acte purement scolaire qui ne correspond pas aux objectifs de la poésie
traditionnelle. En revanche, la poésie surréaliste a eu cette volonté de se faire diffuser grâce
aux journaux. L’édition fait donc partie de la poésie contemporaine.
Quant à la création individuelle, elle permet à l’enfant de se révéler de façon plus
intime. Georges Jean affirme que la création et la production d’un objet de langage comme un
poème peut avoir une fonction de socialisation et d’affirmation de la personne. Par la suite la
lecture de leur production participe aussi de la socialisation. En effet, le fait de lire son poème
aux autres suppose que l’on prenne en compte les auditeurs, il faut donc prendre la parole,
s’affirmer face à son poème. Cette exposition n’est pas sans risque : il faut accepter les
critiques. La poésie permet aux élèves d’exercer leur sens critique. Les élèves peuvent opérer
un choix à la lecture du poème.
� Acquisition d’une lecture littéraire
Annie Camenisch, dans le Journal Des Instituteurs d’octobre 2002, considère la
poésie comme propice à construire une attitude de lecteur littéraire du fait de ses aspects
formels et de sa résistance à livrer un sens immédiatement perceptible. Pour acquérir cette
attitude, de nombreuses compétences orales et écrites sont nécessaires. En effet, la poésie peut
développer ces domaines puisqu’elle permet une familiarisation avec le langage. Elle permet
de travailler, en maternelle, les syllabes, car il s’agit de produire des rimes, des assonances ou
des allitérations, ce qui peut rendre les élèves plus sensibles aux réalités phoniques de leur
langue. Les comptines peuvent apporter un vocabulaire « autre ». Soit les mots sont utilisés
dans un emploi insolite, soit ce sont des mots savants dans des discours fantaisistes.
De plus, les poètes utilisent des tournures syntaxiques et un lexique parfois complexes.
En mémorisant ces tournures, les élèves retiennent des structures. En grande section de
maternelle, lors de mon stage, j’ai travaillé sur l’album Rien n’est plus beau d’Armelle
Barnier. Celui-ci est composé de plusieurs « morceaux poétiques » sur chaque page qui
reprennent la même structure à chaque fois, à savoir : « rien n’est plus…….que ». Avant
d’entrer dans la création proprement dite, les élèves ont dû mémoriser cette structure. Cela
s’est passé à l’oral, en petit groupe. En répétant les phrases du livre, puis les leurs, les élèves
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ont petit à petit mémorisé cette tournure et cela ne leur a posé aucun problème de l’utiliser.
J’ai pu réaliser le même travail avec la classe des CE1 /CE2, lorsque l’on a écrit des poèmes
« à la manière de », il fallait reprendre la structure du poème de J. Prévert « Quand la vie
est……/ Chaque jour est……… »
Le groupe de recherche d’Ecouen considère qu’il y a trois objectifs d’apprentissage à
faire en poésie : créer une relation qui n’existe pas, un objectif d’ordre affectif et imaginaire et
des compétences linguistiques. Pour eux, les poèmes sont une superstructure au niveau de
l’architecture globale, de la mise en espace particulière et de leur schéma dynamique
(ouverture, attaque) ; ils ont un fonctionnement particulier du langage (connotations, figures
rhétoriques) ; enfin, ils nécessitent une lecture plurielle. En fréquentant des poèmes
régulièrement, les élèves deviennent familiers à la disposition des poèmes sur la page, aux
images convoquées, c’est pour cela qu’ils acquièrent une attitude de lecteur littéraire (ils
repèrent et comprennent tous les sens possibles d’une œuvre littéraire). Un bon lecteur est un
lecteur qui parvient à une lecture plurielle, qui croise ses lectures pour inférer.
� Le rôle de l’école
Comme je l’écrivais dans l’introduction, la poésie est très peu présente dans la vie de
tous les jours et si nous ne la côtoyons pas à l’école, nous la rencontrerons difficilement à
l’extérieur. Si beaucoup de personnes ne lisent plus de poèmes c’est parce que l’acculturation
ne s’est pas faite. Le meilleur endroit pour découvrir et partager la poésie c’est encore à
l’école. La poésie fait aussi partie de notre patrimoine littéraire et il est important de la
transmettre, ainsi que des références culturelles d’autres pays. Or les interrogations des
professeurs sont légitimes. Comment faire de la poésie à l’école puisque la poésie est en
dehors de toute définition, elle ne se laisse pas enfermer dans des explications toutes faites
quand l’école est le lieu où l’on tente d’expliquer les choses le plus souvent ?
Comme le préconise J. P. Siméon, il faut que l’école multiplie les voies d’accès au
poème. Il ne faut pas hésiter à donner des poèmes, aux élèves, qui peuvent nous paraître
opaques. Annie Camenisch dans le Journal Des Instituteurs, propose, pour favoriser une
pratique riche et multiple de la poésie, de travailler autour d’un projet qui alterne des activités
de lecture, d’écriture, d’oral en s’appuyant sur des pratiques culturelles et littéraires autour
d’un réseau de poèmes. La poésie participe de l’éveil aux choses et de la formation de l’esprit
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critique : elle a donc sa place à l’école car celle-ci construit la personnalité et forme le citoyen
de demain.
L’école doit donc favoriser la lecture régulière de poèmes en mettant en place un coin
poésie, ou un lieu où les poèmes peuvent être lus, relus en toute liberté. C’est pour cela que
j’ai amené dans la classe un classeur de poésie. Dans celui-ci, un grand nombre de poèmes
sont photocopiés, tirés de différents recueils ou anthologies. Les élèves peuvent le consulter
quand ils ont terminé un travail, recopier un poème qui leur a plu après lecture et l’emporter
chez eux pour le lire. Il convient également de favoriser l’écriture par des poèmes stimulants,
la poésie doit être un plaisir comme toute autre lecture d’ailleurs. L’école doit apporter un
climat d’écoute lors de ces moments. J’ai donc choisi de pratiquer la poésie en BCD sur des
banquettes, en cercle pour créer une atmosphère paisible et conviviale.
L’école est un lieu de culture et d’échanges, la poésie convient très bien pour favoriser ces
échanges. Ils peuvent se passer au sein de la classe, entre les différentes classes d’un même
établissement ou, à plus grande échelle, ils peuvent devenir des correspondances par
l’intermédiaire de l’outil informatique. L’école doit permettre de donner accès aux poèmes,
aux recueils et pourquoi pas d’organiser une rencontre avec un poète.
Son rôle est aussi de donner des « armes » pour entrer en poésie. Pour cela elle se doit
de familiariser les élèves avec ce nouveau langage, de leur proposer différentes formes de
poèmes : des classiques aux modernes, de la poésie en vers et en prose, des poésies « à voir »,
selon l’âge et le niveau des enfants. Elle ne doit pas vouloir expliquer les poèmes, elle doit
laisser entrer l’irrationnel, le sensible et l’imaginaire en classe. La poésie soulève les
questions fondamentales de notre existence, l’école permet à l’enfant de s’épanouir et de
réfléchir sur notre monde. La poésie représente une autre réflexion qui complète la réflexion
plus scientifique : les deux on leur place à l’école.
On peut conclure cette première partie en affirmant que la poésie a toute sa place à
l’école, malgré son caractère insaisissable, puisqu’elle favorise la construction personnelle des
élèves et développe des compétences essentielles pour acquérir une lecture littéraire. Il
convient alors de réfléchir aux moyens à mettre en place pour bénéficier de ces apports donc
pour faire en entrer de manière efficace la poésie en classe.
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II FAIRE ENTRER LA POESIE DANS LA CLASSE
a) Ecouter et lire de la poésie.
Pour entrer en poésie, deux activités sont primordiales : l’écoute et la lecture de
poèmes. L’enseignant doit alors faire des choix : à quels moments, dans quelles conditions,
quelles lectures?
� L’écoute
Georges Jean dit que le langage poétique est toujours à réinventer. Il n’existe pas et ne
vit pas s’il n’est pas réveillé, réanimé par l’imagination du lecteur. On constate donc que la
personne la plus importante dans un poème, c’est l’auditeur qui peut être le lecteur. Selon lui,
chaque écoutant interprète à sa manière le poème, le recréant à son image en fonction de sa
vie, de son imagination. J. P Siméon partage cet avis, chaque poème est différent puisqu’il
appartient à l’auditeur. Selon ses expériences, selon son vécu, il ne ressentira pas la même
chose devant tel ou tel poème. Certains lui rappelleront des souvenirs, des émotions et
d’autres ne lui évoqueront rien. C’est pour cela qu’il n’est pas nécessaire d’expliquer les
poèmes car derrière chaque poème plusieurs sens peuvent cohabiter selon l’expérience de
l’auditeur qu’il le reçoit. Pierre Reverdy dans son œuvre En vrac, considère que la poésie a
deux pôles : « La poésie de celui qui écrit est comme le négatif de l’opération poétique et le
positif se trouve dans le lecteur. Ce n’est que quand l’œuvre a pris toutes ses valeurs dans la
sensibilité du lecteur, qu’elle peut être considérée comme réalisée, telle l’image
photographique fixée sur l’épreuve. Avec cette différence que cette image dans l’âme du
lecteur personne ne la voit. Voilà pourquoi ce n’est pas au poète qui écrit de parler, mais à
ceux qui le lisent. » Il met en évidence l’importance du lecteur, de celui qui reçoit le poème.
C'est-à-dire que le poème n’a de valeur que dans sa réception.
Dès lors, on comprend que l’écoute est une étape essentielle en poésie. C’est pour cela
que j’ai mis en place un « coin spécial » pour la lecture de poèmes. Nous nous rendions à la
BCD, sur des canapés installés en cercle. Je faisais aussi partie de ce cercle, je n’étais plus en
position frontale. J’ai choisi ce dispositif pour favoriser l’écoute et pour montrer que je n’étais
pas là pour délivrer un savoir en ce moment ce qui signifiait que j’étais au même niveau
qu’eux en ce qui concerne la réception des poèmes. J’ai essayé par ce dispositif qu’il n’y ait
pas de jugements, que la parole soit la plus libre possible.
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Le groupe de recherche d’Ecouen a listé plusieurs conditions nécessaires pour une bonne
lecture et une bonne écoute d’un poème. Il faut une disponibilité totale d’écoute, pour cela on
peut mettre en place un rituel qui peut signaler que l’on va lire un poème (relaxation,
musique), il faut également une distanciation avec les activités scolaires en cours, une
centration sur le poème, une motivation de l’ordre du désir, du plaisir et une rencontre avec un
message. Pour le Ministère de l’Education Nationale cette entrée en poésie peut se faire grâce
à une consigne qui facilite l’entrée dans l’écoute. Il donne comme pistes : un travail
d’anticipation à partir du titre, d’un extrait, d’une liste de mots tirés du texte, un jeu
d’associations d’idées…
Dès lors, il paraît évident que c’est en écoutant beaucoup de poèmes que l’enfant
parviendra à s’imprégner de cette culture poétique et qu’il l’appréciera d’autant plus. Comme
le préconise J. P Siméon dans la préface de son recueil La nuit respire : « Un poème par jour.
Au moins ».
� Le rôle de l’enseignant
Comme nous l’avons vu, l’écoute est une étape essentielle et très importante, de même
que l’imprégnation poétique. Or, qui est garant de cela ? C’est à l’enseignant de mettre en
place ces conditions. C’est un médiateur entre les élèves et les poèmes. Il doit faire découvrir
plusieurs genres de poésie, plusieurs époques, plusieurs auteurs. Il peut bien sûr amener les
poèmes qui lui plaisent, je dirai même que c’est une obligation. En effet, il est plus aisé de
transmettre ce qui nous plaît. Il fait donc une lecture régulière de poèmes, ce qui est préconisé
par le Ministère de l’Education Nationale.
L’enseignant a alors un rôle fondamental car c’est lui qui fait découvrir cette culture aux
enfants. Cependant, si l’enseignant ne lit pas de poésies, comment peut-il se sentir à l’aise et
transmettre cette culture? Les différents auteurs du dossier « Poésie » dans la revue Les
cahiers pédagogiques d’octobre 2003, soulignent l’importance de l’enseignant qui doit
accompagner l’élève devant un poème « difficile » pour qu’il ne se lasse pas de déchiffrer ce
qui lui est obscur. Pour cela, il peut se charger de la lecture du poème en évitant une lecture
trop neutre si l’élève à des difficultés à saisir celui-ci. Par son questionnement, il peut inviter
l’élève à une relecture. Ce sont de ces multiples lectures que disparaîtra le sentiment
d’incompréhension.
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15
Une des conditions essentielles pour faire de la poésie à l’école est de lire de la poésie.
L’enseignant doit effectuer des choix face à l’offre poétique dense et il s’avère plus efficace
qu’il ait décidé lui-même des textes qu’il souhaite donner aux élèves et qu’il ne suive pas
forcément les poésies présentes dans les manuels. Celles-ci réduisent souvent la poésie à des
poèmes sur des animaux, ou des poèmes avec des rimes. L’enseignant doit combler le manque
de diversité dans les genres qui sont proposés aux élèves. Il peut prendre en charge la lecture
des poèmes pour laisser ensuite les élèves s’ils le souhaitent effectuer cette lecture, mais
attention celle-ci doit être préparée.
Il peut être important, qu’à certains moments, l’enseignant laisse le choix aux élèves du
poème à apprendre ou à lire. Selon le Ministère de l’Education Nationale, dans le dossier La
poésie à l’école, il convient d’encourager un rapport personnel à la poésie. En laissant le
choix, parmi un corpus de textes déjà lus, les élèves peuvent découvrir ce rapport et proposer
une interprétation personnelle de celui-ci. Il faut donc pour cela permettre aux élèves de
consulter un grand nombre de recueils ou de poèmes dans un espace aménagé pour qu’ils
puissent opérer un choix. C’est l’intérêt du classeur de poésies que j’ai évoqué précédemment.
Le rôle de l’enseignant est le suivant pour le groupe d’Ecouen : il anime, il est à la fois
participant et meneur du jeu, il améliore la qualité de communication, il veille à
l’appropriation des textes, il entraîne à avoir un comportement actif et il aide à gérer les
angoisses. Pour moi, l’important est qu’il donne confiance et qu’il favorise les échanges.
� Les moments de poésie
Il revient à l’enseignant d’amener un certain nombre de poésies, de préparer leur écoute
mais aussi d’organiser ces moments de poésie. Pour le groupe d’Ecouen, il faut pratiquer la
poésie et mettre en place au sein de la classe, un dispositif créateur de relations stimulantes et
dynamiques pour développer l’envie de lire, dire et produire.
Marie-Claire Martin et Serge Martin consacrent la deuxième partie de leur ouvrage Les
poésies, l’école à ces différents moments de poésie. Ils évoquent plusieurs durées : la minute,
le quart d’heure, la demi-heure, l’heure, la semaine. Selon les objectifs que l’on souhaite
mettre en place, on privilégiera une de ces durées. On peut travailler sur les exergues, sur les
répétitions, pendant une courte durée, en rituel avec des lectures du maître pour le quart
d’heure ; en une demi-heure, les élèves peuvent passer un « certain temps » avec le poème
pour se le répéter, l’écrire, le transformer. En ce qui concerne les durées plus longues (l’heure,
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16
la semaine), les auteurs préconisent de considérer l’ensemble dans lequel se trouve le poème
ainsi que les rencontres poétiques, le lien avec l’espace graphique et de pratiquer quelques
activités en lien avec l’anthologie.
Pour ma part j’ai mis en place plusieurs durées en poésie. J’ai eu à chaque fois un créneau
de 45 minutes, prévu à l’emploi du temps, intitulé « poésie », ce qui correspond à un
« moment institutionnalisé » pour le groupe d’Ecouen. Lors de ce temps, j’ai pu mener
différentes séances consacrées à la fois à des jeux poétiques, à des moments d’écriture ou à la
découverte d’un nouveau genre ou d’un auteur. En plus de ce créneau, j’ai choisi de lire des
poèmes à tout moment de la journée, en retour de récréation par exemple. Ceci a le mérite de
permettre un retour au calme et de favoriser une certaine attention. Ce sont, soit des lectures
offertes par moi-même, soit une lecture d’un poème choisi et préparé par un élève. J’ai
souhaité mettre en place ce « bain poétique » pour qu’il y ait une imprégnation, une
appropriation de la culture poétique. C’est d’ailleurs ce que préconise le Ministère de
l’Education Nationale, dans le dossier sur la poésie : « Une culture commune s’appuie donc
sur une imprégnation, sur une fréquentation assidue d’œuvres. » En maternelle, j’ai installé
une boîte à poèmes. Ce qui permet de lire des poèmes à n’importe quel moment de la journée.
Le groupe de recherche d’Ecouen parle aussi de rendez-vous poétiques réguliers qui sont des
moments privilégiés pour dire un poème, tenter de faire partager des émotions, communiquer
un poème qui leur a plu ou lire un poème en silence.
Il apparaît important voire essentiel de ne pas négliger ces étapes orales pour entrer en
poésie que ce soit en maternelle ou au cycle 2. Les poésies sont faites pour être lues et
écoutées. Les élèves doivent pouvoir ressentir le pouvoir des mots et comprendre ce qui fait la
spécificité de ce genre. Pour cela, le rôle de l’enseignant est primordial. C’est à lui d’établir
des liens avec les disciplines artistiques pour ouvrir les élèves à d’autres horizons poétiques.
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b) Une discipline transversale
� Le lien avec les arts
« La poésie s’inscrit au croisement de deux domaines que l’école a plutôt coutume de
tenir disjoints quand elle identifie les territoires de la maîtrise de la langue et de l’éducation
artistique ». L’école doit solliciter les sens. Elle va donc essayer de lier la poésie aux autres
domaines artistiques selon le Ministère de l’Education Nationale.
Lors de ma première séance, j’ai choisi deux poèmes différents tant par leur rythme
que par leur contenu : « La pendule » de Pierre Gamarra et « La Nuit » de Claude Roy
(Annexe II). J’ai commencé par un travail rythmique : choisir un rythme et le frapper dans les
mains, pour mettre en évidence les deux rythmes (lent et rapide) puis, à la fin de la séance, je
leur ai montré plusieurs images non figuratives. Je leur ai demandé d’associer une image à
chacun des deux poèmes. Le fait que ce soit des images abstraites ne leur a posé aucun
problème et ils ont tous associé une image à un poème. Ils ont ensuite explicité leur choix. La
grande majorité a associé une image composée de traits brefs, de cercles au poème « La
pendule » et les images plus sombres, avec des lignes courbes comme des ondulations au
poème « La nuit ».
En art visuel, j’ai travaillé aussi sur les écritures (arabe et chinoise). Nous avons mis
en évidence le côté bref de l’écriture chinoise par rapport au côté linéaire et souple de
l’écriture arabe. Ils se sont ensuite exercés à reproduire ces deux écritures pour qu’ils
comprennent mieux la notion de rythme par le geste. Un travail en musique est à faire pour
compléter cette notion mais je ne m’occupais pas de cette matière. Cependant, il y a plusieurs
liens à effectuer entre ces deux domaines.
J’ai également voulu associer les arts visuels à la poésie car c’est pour moi un côté
important de la poésie. De nombreuses poésies fonctionnent en parallèle avec les mots et les
images. Les mots prennent sens aussi du fait de leur disposition sur la page. Un poème est un
tout. R. Jakobson dit que la poésie est un langage exploité pour les « effets de matière et de
forme ». Effectivement, le poème est une forme sur une page. Il faut que les enfants
comprennent que la disposition spatiale du poème a un sens, qu’elle est particulière, ils
doivent la reconnaître. Elle ouvre sur une lecture particulière, pensons aux calligrammes par
exemple. J’ai donc proposé ce type de poésie aux élèves. Nous avons étudié un calligramme
de Madeleine le Floch « une fleur » (Annexe III), ensuite je leur ai apporté « la colombe »
et « le jet d’eau » d’Apollinaire (Annexe IV). Je leur ai simplement donné le calligramme de
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Madeleine le Floch et ils ont naturellement cherché à le lire. J’ai vu un certain désarroi devant
ce poème. Puis quelques uns ont commencé à tourner la page. Ce calligramme est difficile à
lire car on ne sait pas bien où il commence. Je leur ai demandé de trouver le début du poème.
Plusieurs propositions ont été faites et on a essayé de justifier chacune d’entre elles. Par la
suite, les élèves ont choisi un objet ou un animal dont ils souhaitaient faire le calligramme. Ils
étaient très enthousiastes. Ils m’ont demandé toute la journée quand est-ce qu’ils allaient faire
leur calligramme. Cela leur a beaucoup plu d’associer un dessin à un poème. Ils ont compris
que leur poème devait parler de leur objet mais durant la phase d’écriture cela a été difficile
de dépasser la description pure (Annexe V). Jacques Charpentreau dans l’ouvrage Le mystère
en fleur consacre une partie à ces « poèmes-objets ». Il les qualifie d’insolites. Il rappelle les
différents types de poèmes tels que les collages, les photos-montages, les cortèges, les
poèmes-découpages créés par les surréalistes. De plus, de nombreux ouvrages d’activités
poétiques proposent des pistes avec la musique ou les arts visuels comme inducteurs :« Si
cette musique était une fleur, ce serait… ; écrire des mots à propos d’un tableau, jeux sur la
forme avec des acrostiches »
Lors d’une séance d’écriture de poème sur une des quatre saisons, j’ai proposé, pour
favoriser l’écriture, des photographies qui représentaient la nature à différentes saisons ainsi
que des extraits de l’œuvre de Vivaldi Les quatre saisons. En écoutant les morceaux, des mots
ont été écrits concernant ce qu’ils ressentaient à cette écoute. Ces mots ont servi pour
l’écriture des poèmes par la suite. La musique et les images ont donc été des inducteurs pour
l’écriture. Serge et Marie-Claire Martin préconisent de consacrer quelques séances à la
question de l’espace poétique. Pour cela, ils proposent le tri d’espace poétique, la
retranscription informatique qui permet de bien approcher la notion de mise en page ou la
création de livres.
Cependant, il faut faire attention je pense à l’illustration des poésies. Souvent, on
demande aux élèves d’illustrer leur poésie ce qui revient à comprendre littéralement le poème
pour pouvoir dessiner quelque chose qui se rapporte au contenu. Or, comme nous l’avons
affirmé depuis le début de ce mémoire ce n’est pas le sens qui est le plus important ou du
moins il ne s’agit pas de cantonner la poésie à un sens particulier. C’est pour cela que
proposer des images abstraites peut s’avérer beaucoup plus riche. On peut aussi proposer aux
enfants de prendre des photographies de l’environnement de leur école avec un appareil
numérique pour ensuite associer ces photographies aux poèmes d’un recueil par exemple. Il
s’agit donc de trouver une association possible entre l’interprétation que peut faire un enfant
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19
au sujet d’un poème et ce qu’il ressent devant la photographie choisie. Ce n’est donc plus une
simple illustration où seul le contenu compte.
J’ai aussi privilégié l’affichage des productions et leur valorisation. Dans ce domaine,
les arts visuels sont une nouvelle fois sollicités. Les enfants ont créé un cadre photo en carton
qu’ils ont décoré pour mettre leur production. Cela permet de changer les poèmes au fur et à
mesure de leur création et de les afficher autrement. Ces cadres ont été affichés dans la salle
de classe mais aussi en BCD.
Les arts visuels sont donc une matière importante et essentielle pour travailler la poésie.
De nombreuses activités sont à faire en liant ces deux domaines et de nouveaux
apprentissages sont à découvrir par les enfants. L’enseignant peut encore varier les approches
en proposant d’étudier des recueils ou des poètes en particulier.
c) L’entrée dans l’univers poétique d’un auteur par
la découverte d’un recueil en CE1/CE2
Les poèmes souvent utilisés en classe sont des photocopies de poèmes sur des feuilles de
format A4. Pour varier les approches, à partir du mois de mars, j’ai donc amené en classe
deux recueils de Jean-Pierre Siméon, À l’aube du buisson et La nuit respire. En effet, il me
semble important que les élèves sachent que les poèmes sont tirés de recueils ou
d’anthologies. Ils savent bien que les contes sont extraits de livres par exemple, ils doivent
donc connaître l’origine des poèmes. En maternelle, j’ai fabriqué une boîte à poèmes. Dans
celle-ci, des photocopies de poèmes étaient déposées. Les poèmes étaient tirés d’une
anthologie que j’avais toujours en classe. D’ailleurs, les élèves me demandaient toujours « il
est où le poème dans ton livre ? » Je les laissais le feuilleter lors des moments d’accueil.
L’entrée en poésie par l’intermédiaire de recueils, d’un auteur en particulier, me paraît
indispensable puisqu’elle favorise la découverte d’un univers poétique, ce qui va au-delà
d’une simple lecture de poèmes particuliers. Je vais décrire les activités mises en place dans la
classe de CE1/CE2 sur les recueils.
Les élèves de CE1/CE2 ayant trouvé la signification du mot recueil, nous nous sommes
intéressés aux préfaces des deux ouvrages (Annexe VI). Dans celles-ci, le poète compare la
poésie à des lunettes « pour mieux voir » et il s’adresse à un « ami inconnu ». A l’oral, les
élèves ont expliqué leur compréhension des préfaces et, en particulier, de ces passages. Je leur
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ai ensuite demandé ce qu’ils pensaient eux-mêmes de la poésie. Puis, la consigne était de
souligner les mots qui, dans la préface, indiquaient les sentiments du poète. Cela a servi à
comprendre les raisons qui poussent l’auteur à écrire des poèmes. La deuxième séance a été
consacrée à la table des titres du recueil À l’aube du buisson. Nous y avons cherché les mots
qui revenaient le plus souvent. Nous en avons dégagé un thème récurrent dans les poèmes de
J.P Siméon (la nature), mais sans avoir encore lu les poèmes. J’ai proposé des titres de
poèmes d’autres poètes et ils devaient dire si ça pouvait être un poème de J.P Siméon et
pourquoi. Ils ont ensuite souligné tous les mots qui faisaient référence à la nature. Ils se sont
interrogés sur les mots « nuit, puits, ciel ». A partir de là, j’ai commencé de lire les poèmes
dans l’ordre de leur classement dans le recueil. Après avoir fini la lecture (en plusieurs fois),
ils ont choisi un poème qui leur plaisait. Nous nous sommes également penchés sur l’étude de
figures de style présentes dans ce recueil. Ceci est évoqué dans une autre partie.
Certaines activités à partir de cet auteur n’ont pas encore été conduites. Les élèves peuvent
être amenés à retrouver les recueils de J.P Siméon à travers un mélange de livres, remettre des
poèmes dans les bons recueils, écrire à la manière de ce poète, associer des photographies,
faites par les enfants, aux poèmes.
Nous avons pu constater qu’il existe diverses façons de faire entrer la poésie en classe.
Je dirais qu’il n’y a pas de meilleure « entrée » en poésie mais il y a de nombreuses
possibilités qu’il faut, je pense, tenter. C’est par ces multiples aspects que les élèves auront
une idée plus précise de ce qu’est la poésie et qu’ils pourront par là même acquérir une
attitude de lecteur. La poésie ne se résume pas à l’écoute de poèmes, il s’agit aussi, à l’école,
de familiariser les élèves à l’écrit poétique. Je vais donc maintenant exposer les pratiques
poétiques que j’ai pu mener en classe.
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III QUELLES PRATIQUES POETIQUES EN CLASSE ?
a) L’oralisation, la mise en voix La lecture de poèmes est l’activité qui débute toute séance sur la poésie. C’est aussi une
des activités principales de celle-ci. En effet, les poèmes sont faits pour être lus. Ce qui fait
dire à Paul Valéry « Le poème n’a pas de sens sans sa voix ».
J’ai choisi pour entrer en poésie de lire des poèmes, comme je l’ai dit, à tous moments de
la journée. Lors de ma première séance, j’ai donc commencé par une lecture à haute voix.
C’est moi qui ai pris en charge cette lecture pour que les enfants apprécient la force des mots,
le pouvoir de la poésie. Les enfants de CE1 ont encore du mal à déchiffrer rapidement donc
en lisant à voix haute j’ai souhaité qu’ils se concentrent sur le rythme, l’impression générale
du poème. Il y a plusieurs manières de lire des poèmes. On peut faire une lecture offerte, un
élève lit un poème qui lui a plu à ses camarades. Cette lecture permet de faire partager son
plaisir. J’ai mis en place des lectures offertes tous les lundis. L’élève disait simplement après
sa lecture où l’on pouvait trouver ce poème si quelqu’un voulait le relire. Les élèves sont tous
volontaires pour faire ces lectures offertes et lors de celles-ci ils sont extrêmement attentifs.
Ensuite nous avons lu des poèmes pour en dégager leur structure ou pour les apprendre.
Annie Camenisch dans le Journal Des Instituteurs d’octobre 2002, propose une liste
d’activités possibles en lecture : une lecture et réception personnelle avec des échanges sur
ces poèmes ; une lecture active qui consiste à reconstituer le poème (vers, strophes) ; une
lecture approfondie où l’on effectue des relevés sur le fonctionnement du poème et/ou une
écriture imitation ; enfin des lectures en réseaux de poèmes où les élèves recherchent des
points communs entre ceux-ci. Je leur ai également proposé des consignes de lecture (Annexe
VII). Par exemple, « lire le poème de plus en plus fort » ou « lire de façon neutre le poème
mais en mettant en valeur un seul mot », on peut également y associer des sentiments « lire en
étant triste, en colère… » Cela permet de varier les lectures et donc les interprétations. Il
s’agit ensuite pour les élèves de justifier leur choix. Quel mot a été mis en valeur ? Pourquoi ?
Il est nécessaire de lire beaucoup de poèmes variés pour favoriser la culture poétique mais
aussi de lire régulièrement et de lire plusieurs fois les poèmes. Souvent, il m’est arrivé
personnellement de lire un poème sans qu’il « me parle » ou m’évoque quelque chose puis en
le relisant plusieurs fois, à différents moments, tout à coup je l’ai « compris », il m’a plu. Il
faut un certain moment avec le poème. En le manipulant, en le mettant en bouche, on
l’apprivoise un peu plus. Le Ministère de l’Education Nationale confirme l’importance des
lectures dans le dossier sur la poésie : « Il importera d’organiser des confrontations de lectures
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communes (…) Chacun pourra proposer sa manière de le ressentir en faisant entendre aux
autres sa manière de le dire. Les « mises en voix » de chacun permettront de tisser des réseaux
d’interprétation en croisant les sens possibles ». Marie-Claire et Serge Martin précisent
également qu’il faut lire le poème dans tous les sens, d’où les reprises et les répétitions. Les
enfants doivent apprendre à lier leurs lectures. Dans le Journal Des Instituteurs d’octobre
2002, Jean-Claude Lallias détaille la manière de lire les poèmes parce que selon lui la lecture
du maître occupe une place centrale. Elle aide les élèves à la conquête progressive du sens et
de ses réseaux. Elle dynamise les efforts à tous les niveaux de lecture. Il précise qu’une
lecture met en jeu le corps ce qui nécessite une ritualisation de la position du lecteur. Toute
lecture doit être préparée pour en saisir toutes les possibilités. Enfin, toute lecture doit éviter
de préméditer trop rapidement un sens, une interprétation. « Lire c’est investir et pénétrer »
dit Jean-Pierre Siméon. Pour lui lire un poème suppose un engagement exigeant de toute la
personne. On voit donc là l’importance des lectures personnelles de l’enseignant. Le premier
enjeu est de faire des lecteurs subjectifs et passionnés du poème, le maître créant les
conditions d’émergence des modalités de lecture. Au cœur du débat interprétatif qu’il suscite,
il valorise l’autonomie et le pouvoir de décision de l’élève.
Quant à la diction du poème, elle fait aussi partie de la mise en voix. Le groupe d’Ecouen
préconise d’enregistrer les différentes dictions des élèves et de faire différents groupes de
besoins sur la posture, la voix, l’articulation, le souffle, le rythme et l’intonation. Pour Annie
Camenisch, « La diction nécessaire à la bonne communication du poème contribue autant au
développement de compétences orales qu’à l’expression d’une intention de lecture et à une
écoute plus réceptive des autres ».
Dernière activité qui fait partie de l’oralisation : la récitation. Que dire de celle-ci ? C’était
la seule activité demandée aux élèves et encore maintenant, parfois, la poésie se résume à la
récitation. Serge Martin affirme que « les poèmes sont à réciter parce ce qui fait leur force
c’est leur voix ». Cependant, Jean-Pierre Siméon pense que le problème avec la récitation est
que l’on demande aux élèves une performance sans construire les compétences. La récitation
ne doit pas être négligée (surtout si elle correspond à une demande des élèves) mais elle ne
doit pas être exclusive. Pour ma part, j’ai mis en place une grille d’observation pour la
récitation, dont les critères ont été trouvés par les élèves.
Cette phase orale est essentielle car elle permet de ressentir tout le pouvoir des mots et de
la poésie. Il faut donc jouer avec les différentes façons de lire un poème pour en dégager
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plusieurs interprétations, plusieurs sentiments. L’activité de lecture ne saurait suffire, il faut
également que les élèves produisent et entrent dans cette recherche sur les mots et les images.
b) Trouver l’image poétique
� La création d’un album poétique en GS et la
découverte de figures de style : la comparaison et
la métaphore en CE1/CE2
Le discours poétique se distingue du discours prosaïque par l’abondance ou la densité des
figures d’analogie telles que la comparaison, la métaphore, la métonymie, l’image. Selon la
définition du dictionnaire Le petit Larousse2002, la métaphore correspond à « un procédé par
lequel on transporte la signification propre d’un mot à une autre signification qui ne lui
convient qu’en vertu d’une analogie, d’une comparaison sous-entendue. » Pierre Reverdy
dans son ouvrage En vrac, explique « Le propre de l’image forte est d’être issue du
rapprochement de deux réalités très distantes dont l’esprit seul a saisi les rapports. »
Les poètes usent de ces figures de style car elles leur permettent d’évoquer un « ailleurs »,
d’ancrer l’imaginaire dans le réel. Paul Valéry donne une explication à l’usage des images,
« Le poète dispose des mots autrement que ne font l’usage et le besoin. Ce sont les mêmes
mots sans doute, mais point du tout les mêmes valeurs. » Les enfants sont très sensibles aux
images, ils ne sont pas déstabilisés par les images car ils ne cherchent pas à comprendre
rationnellement. Ils sont dans l’imaginaire.
Lors de mon stage en grande section de maternelle, j’ai pu installé une activité
poétique pendant trois semaines. Nous avons à cette occasion lu un poème par jour minimum.
Comme je l’ai dit, je voulais que les enfants soient imprégnés du langage poétique avant
d’entamer la séquence sur l’album poétique Rien n’est plus d’Armelle Barnier et Vanessa Hié
(Annexe VIII). A partir de cet album, les enfants ont créé leur album poétique collectif
(Annexes IX, X, XI, XII). Ils ont élaboré une page par groupe de quatre. Après la lecture de
certains passages de l’album, ils ont mémorisé la structure « rien n’est plus…que… ». Nous
avons expliqué le fonctionnement de l’album. A chaque page, un adjectif nouveau est associé
à cette structure. Ensuite, il y a quatre phrases qui donnent des exemples en ce qui concerne
l’adjectif en question. Les élèves ayant compris le fonctionnement, nous avons pu commencer
à rechercher les choses qui étaient grandes, petites, chaudes et froides. Il y avait un adjectif
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par groupe. A l’oral, les élèves ont donc proposé leurs idées. Il s’agissait, en demandant cet
exercice, d’associer un adjectif à un objet ou un évènement. Les élèves devaient donc faire
des associations d’idées, début d’un cheminement vers des images plus poétiques. Les enfants
sont au départ restés très concrets du fait qu’ils devaient associer la structure répétitive à un
mot : « Rien n’est plus grand qu’un dinosaure » a, par exemple, été proposé. Ce n’est que
lorsque je leur ai demandé de compléter leur phrase qu’ils ont pu solliciter leur imaginaire :
« Rien n’est plus grand qu’un dinosaure sur un pont ». Cette phrase prouve déjà qu’il y a une
volonté de provoquer une image. En effet, un dinosaure a bien sûr une taille élevée d’autant
plus pour un enfant mais lorsque l’élève met ce dinosaure sur un pont, ce qui est peu
probable, il fait place à son imaginaire et associe deux grandeurs pour donner plus de
profondeur à cette proposition. Les images se sont souvent développées à l’aide de la
confrontation avec les propositions des autres élèves. Ces séances ont donc permis de
développer l’écoute d’autrui et de participer à un projet collectif ce qui faisait partie du projet
d’école. Quant à la dernière phrase, elle reprend certains mots des quatre phrases précédentes
et forme une nouvelle image. Cette phase a été plus difficile car cela suppose de créer une
phrase avec des mots imposés cette fois. Il s’agit d’en trouver une qui tout en reprenant les
mots ait un sens ou évoque un imaginaire acceptable. J’ai donc procédé à l’aide de dessins qui
représentaient leurs propositions précédentes (un dessin d’un dinosaure et d’un pont). Grâce à
eux, ils se sont mieux représentés l’activité. Ils ont pu manipuler les dessins pour provoquer
des images insolites. Par exemple, une des dernière phrase dit ceci : « Rien n’est plus chaud
que le soleil mangeant un gâteau et buvant un café au coin du feu.» ou « Rien n’est plus petit
qu’une fourmi et une coccinelle qui dorment dans un nid d’oiseau avec leur nounours. » Cette
phase a nécessité mon aide. En effet, la tâche était complexe puisqu’il fallait créer des
propositions, reliées par des connecteurs et des subordonnées.
Après avoir joué avec la langue en écrivant par l’intermédiaire de jeux poétiques, nous
avons découvert un poète, Jean-Pierre Siméon, et un de ses recueils, À l’aube du buisson.
Celui-ci utilise, comme beaucoup de poètes, la comparaison et la métaphore. C’était
l’occasion de s’y attarder. Je leur ai proposé cet extrait du poème « Ce qu’il faudrait » :
« Le soir
il faudrait tirer le ciel
comme une nappe »
Je leur ai donc demandé ce qu’ils pensaient de cette strophe. Les premiers élèves furent
sceptiques : « C’est bizarre », « Il n’y a pas de nappe dans le ciel », « Ça serait bien ! Comme
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ça on le mettrait sur soi et on aurait chaud comme une couverture ». Je leur ai demandé si le
poète disait qu’il y avait une nappe dans le ciel. Ils ont répondu : « Non, il faudrait utiliser le
ciel comme une nappe : le laver, le plier… » A ce moment je leur ai expliqué que c’était une
comparaison : « Le poète a rapproché deux mots pour créer une image qui n’existe pas ». Ils
se sont beaucoup attachés au fait que ça ne pouvait pas exister. Nous avons retenté
l’expérience avec une autre strophe du recueil, tirée du poème « Si la lune tombe » :
« Si la lune tombe
comme un fruit
sur la paille »
Nous avons trouvé ce qui était comparé mais cela a pris du temps. Au départ, ils me disaient
que c’était le fruit et la paille ou la lune et la paille. Ensuite, ils ont saisi l’image : « Si elle
tombe on peut la ramasser » « Oui mais alors on se brûlerait les mains car la lune brûle »
Une fois que l’idée de comparaison était admise, les élèves sont passés à l’écriture d’une
comparaison. Pour les aider et stimuler leur imagination, je leur ai donné un mot inducteur. Je
leur ai dit qu’ils pouvaient utiliser une couleur et nous avons donné un exemple : bleu comme
la nuit. Les propositions ont été les suivantes : « blanc comme les nuages, jaune comme la
flamme d’un dragon, gris comme une souris et noir comme le soir ». Certains ont effectué une
recherche sur les rimes. Plusieurs CE2 ont voulu aller plus loin que la couleur et ont voulu
faire des phrases plus complexes avec un sens. Ce qui n’a pas toujours été réussi. Une fille de
CE2 a pourtant écrit : « Caresser le mystère comme un chat » et « Coller les étoiles dans le
ciel comme on colle une feuille dans un cahier ». « Caresser le mystère » lui a été inspiré par
le titre d’un des poèmes de J.P. Siméon du même nom puisqu’elle avait la table des titres sous
les yeux.
Nous avons par la suite travaillé sur la métaphore puisqu’elle est très présente dans le
recueil À l’aube du buisson de Jean-Pierre Siméon. Je leur ai donné des « poèmes à cinq
pattes » tirés du Bestiaire des Mots d’Alain Serres. J’ai sélectionné trois animaux : la
coccinelle, le renard et le crapaud. Les élèves ont dû trouver la métaphore qui correspondait à
chaque animal (Annexe XIII) Je souhaite par la suite retravailler cette figure dans le recueil
même de Jean-Pierre Siméon. Il s’agirait pour les élèves d’identifier, dans certains passages,
les métaphores utilisées.
Quels que soient les niveaux de classe, il est possible d’étudier, de manière plus ou moins
explicite, les images présentes dans les poèmes. S’il l’on veut que les élèves soient plus
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familiers avec la poésie, ce travail me paraît indispensable puisque l’essence de la celle-ci est
de convoquer les images propre à chaque lecteur. L’écriture poétique va pouvoir en révéler
quelques unes. C’est pourquoi il s’avère intéressant également d’inciter à la création
personnelle.
c) Ecrire pour développer la créativité
� Les jeux poétiques
Les élèves en CE1/CE2 ont commencé par pratiquer des jeux d’écriture poétique. Pour
moi, c’est un bon moyen d’entrer en poésie ou de motiver les élèves. Cependant, la poésie ne
se résume pas aux jeux poétiques. J.P Siméon rappelle que ceux-ci sont une très bonne chose
mais qu’ils doivent s’inscrire dans une familiarisation au long terme avec la poésie et qu’ils
ne doivent jamais être considérés comme une fin en soi. En effet, j’ai pu constater que ces
jeux permettent d’apprendre à mieux lire la poésie car en pratiquant l’activité d’écrire des
formes poétiques, les élèves sont plus aptes à les reconnaître par la suite. De plus, à travers
ces jeux, la langue est dédramatisée. En la « décortiquant », on l’étudie implicitement. On
peut considérer les jeux poétiques comme un entraînement, une manière de s’approprier les
outils poétiques pour les réinvestir dans des créations. Les jeux poétiques ont réellement leur
place en classe puisqu’ils permettent d’entrer progressivement dans l’écriture car il ne suffit
pas de vouloir écrire un poème pour y parvenir. La création poétique nécessite un travail
d’élaboration et suppose des maîtrises techniques.
De nombreux jeux peuvent être explorés en classe et beaucoup de manuels en
proposent. Les plus connus sont peut-être ceux de l’Oulipo qui sont des jeux à contraintes
(cadavre exquis, néologisme par exemple). Je n’ai pas pratiqué ceux-là avec les élèves de
CE1/CE2 car ils sont destinés davantage au cycle 3. Ils ont commencé par chercher des rimes
avec leur prénom. Contrairement à ce que l’on peut penser, ils ne sont pas si familiers avec les
jeux sur les sonorités. Cela n’a pas été chose facile pour eux. En effet, ils parvenaient bien à
trouver le même phonème mais pas en finale de mot. Par exemple, Lynna a proposé « lit »,
Théo a donné le mot « otarie »…Un rappel sur les rimes s’imposait. Ils ont donc complété un
poème en plaçant les mots manquants de façon à ce que les mots riment entre eux. En
collectif, nous avons élaboré des affiches de sons. Nous avons regroupé les mots qui
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contenaient la même sonorité en finale. Celles-ci leur ont été utiles par la suite lors des
séances de création.
Nous avons aussi pratiqué les mots-valises, nous pourrions même dire les « animots-
valises » car le premier mot correspond à un animal. Ce jeu consiste à prendre deux mots
(deux noms communs ou un nom commun et un adjectif ; le choix des mots pouvant être
complexifié selon l’âge des enfants), pour n’en faire plus qu’un, imaginaire, inventé. Pour
cela, la première syllabe du deuxième mot doit être la même que la syllabe finale du premier
mot. Par exemple, éléphant et fantastique donnent « éléfantastique » ou « éléphantastique ».
Ce jeu a permis de travailler sur les syllabes donc en maîtrise de la langue et sur l’imaginaire.
La difficulté a été de trouver des mots ayant les mêmes syllabes au bon endroit (début et fin
de mot). Ensuite lorsqu’ils ont tous trouvé un animal extraordinaire, ils ont écrit un petit
poème de quatre vers en essayant s’ils le voulaient de trouver des rimes. Seuls deux élèves les
ont tentées. Le poème devait donc décrire cet animal imaginaire de manière poétique. Ils ont
effectué plusieurs recherches avant d’obtenir le bon animal. Ils ont donc persévéré ce qui est
rare avec cette classe. Généralement ils s’arrêtent assez vite. Ils voulaient trouver l’animal le
plus loufoque possible (Annexe XIV).
Formidables inducteurs d’écriture, les jeux poétiques réconcilient les élèves avec l’écrit en
évacuant l’échec. Ils sont essentiels mais ne se substituent pas ni à la création personnelle ni à
la rencontre avec l’univers des poètes. En effet, la création personnelle permet d’aller plus
loin dans l’écriture poétique. L’élève doit effectuer des choix qui détermineront son message
(mise en page, thème, lexique, images…). De plus, la rencontre avec les écrits poétiques d’un
auteur en particulier permet de développer son écriture car toute écriture est imitation.
� Ecrire « à la manière de »
Une autre activité possible, que j’ai mise en place en stage filé plusieurs fois, est le célèbre
« écrire à la manière de ». Certains penseront que celle-ci n’est que pure imitation or on ne
s’improvise pas poète. Partir d’un poème existant pour en écrire un autre me semble un travail
intéressant. L’imitation est la définition de toute écriture, c’est pourquoi le groupe de
recherche d’Ecouen a proposé des « chantiers-poèmes à dominante linguistique ou « écrire à
la manière de ». Les élèves doivent trouver des clés linguistiques pour écrire à la manière d’un
auteur. Cela va les rendre attentifs aux particularités du poème. La démarche est la suivante :
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une première rencontre avec le poème choisi par l’enseignant, en collectif, qui permet
d’échanger sur celui-ci. Le poème doit être porteur d’émotions et créateur d’images. Les
contraintes de production permettent de lever les blocages : l’enfant a une consigne à réaliser,
il n’est pas seul devant sa feuille blanche. Cette phase collective devient de plus en plus
individuelle. Le travail de production s’effectue par étapes : premier jet, évaluation de celui-ci
avec des outils, réécriture et production finale. Toutes mes séances de production se sont
déroulées ainsi.
Les élèves ont écrit « à la manière de » à partir de deux poèmes de référence : celui de
J.P Develle « Autocritique » et celui de J.Prévert intitulé « Quand la vie… ». Comme je l’ai
affirmé plus haut, pour pouvoir écrire à la manière du poète, il faut avoir saisi la structure du
poème. Les élèves ont beaucoup apprécié le poème de J.P Develle et ils ont tout de suite
compris le fonctionnement : ce qui ne va pas sur Terre, ce sont les prédateurs selon les proies.
Le dernier vers a suscité plus d’interrogations. Un élève a conclu que « les hommes pouvaient
être méchants avec d’autres hommes. » Ensuite, je leur ai proposé d’écrire un vers à la
manière de ce poète. L’inspiration leur est très vite venue, à tel point qu’ils m’ont demandé
d’écrire plusieurs vers. Lorsque j’ai eu les productions en main, je me suis aperçue que
quelques uns d’entre eux avaient inversé les rôles : « C’est l’herbe dit la vache ». D’autres
n’avaient pas retenu la bonne structure syntaxique « C’est le/la…….dit le/la………. ».
Certains ont proposé : « C’est le……..qui dit à……. ». Ils ont considéré le poème comme un
dialogue entre les deux animaux. J’ai noté aussi : « C’est la vache qui mange l’herbe ».
Certaines propositions étaient déstabilisantes comme celle-ci : « C’est le vert dit le bleu ».
Enfin, un autre problème est apparu : celui de la mise en forme du poème. Quelques élèves
ont écris les vers les uns à la suite des autres. Un grand nombre d’élèves a réussi l’exercice
dès le premier jet. Les plus à l’aise se sont « échappés » du modèle des animaux et l’ont
appliqué aux humains ou aux objets en les anthropomorphisant (Annexe XV). Face aux
productions, j’ai organisé la séance suivante en trois groupes, selon les erreurs constatées. Ils
ont pu alors modifier leur premier jet. Puis nous avons regroupé les meilleures productions
pour réaliser un poème collectif (Annexe XVI).
L’exemple suivant concerne le poème de J.Prévert. Nous avons procédé de la même
manière que pour le précédent poème. Ici, le poème est intéressant car sa structure est comme
« emboîtée », il y a un enchaînement : « Quand la vie est un arbre/chaque jour est une
branche ». Le jour fait partie de la vie comme la branche fait partie de l’arbre. Je leur ai
demandé de repérer la structure qui se répète dans ce poème et cela s’est avéré que ce n’était
pas si évident pour eux. Puis, j’ai imposé un premier ou un deuxième vers pour laisser ensuite
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la création libre (Annexe XVII). Il y a eu comme dans le précédent exercice quelques
confusions entre la « vie » et le « jour ». Il y a eu beaucoup de sujets différents. J’ai insisté, au
début de l’activité, sur le fait qu’il n’y avait pas qu’une solution possible du moment que l’on
respectait la structure du poème. Cela a été difficile pour eux au début de comprendre cela.
Certains recopiaient les réponses de leur camarade, puis petit à petit, ils ont essayé d’écrire
quelque chose de personnel. Il y a eu une sorte d’émulation, chacun voulant avoir la meilleure
phrase. Puis en écoutant les propositions de tous les élèves, ils ont compris que tout était
acceptable alors ils ont apprécié les phrases de leurs camarades.
Tous ces exercices les ont enthousiasmés. Je n’ai remarqué aucun problème de
motivation même pour ceux qui n’aiment pas écrire ou qui sont en échec devant l’écrit. En
effet, tout le monde a pu s’exprimer, puisqu’il n’y avait pas qu’une seule solution. Ils étaient
fiers de donner leurs propositions. Quant à l’écriture, celle-ci était limitée (une phrase) et les
élèves n’avaient pas de pression quant à l’orthographe : on était dans l’action et la création et
non pas dans l’évaluation.
� Création poétique : la finalité
Je terminerai ce mémoire en m’intéressant à la finalité de la création poétique. Pourquoi
écrire en poésie ? Essaie t-on de former à l’école de futurs poètes ? Evidemment, la réponse
est négative. Cependant, l’école a un rôle très important à jouer dans le rapport que vont
entretenir les élèves avec l’écrit. En effet, ce rapport se construit en primaire. Comme il est
nécessaire d’amener la littérature de jeunesse en classe, il est également nécessaire de ne pas
oublier la poésie. Elle est source de création et porteuse de valeurs positives. Pour
dédramatiser le langage et l’écrit, il faut faire de ces derniers des objets de curiosité et de jeu.
La poésie se prête tout à fait à cela. Toutes les séances que j’ai menées en classe de CE1/CE2
n’ont posé aucun problème quant à l’écriture. Les élèves en difficulté avec l’écrit ou ceux qui
n’aiment pas écrire (donc qui écrivent de manière illisible car contraints) ont tous participé
aux activités et ont tous produit un écrit. En général, les élèves veulent à tout prix mettre par
écrit leurs propositions car ils ont conscience que celui-ci reste. J’ai remarqué cela lors de
l’écriture de poèmes élaborés collectivement. Ils apprécient de retrouver leurs propositions.
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Apprendre à lire et à écrire est un des objectifs essentiels du cycle II et il est certain que
ces deux apprentissages vont de pair, s’enrichissant mutuellement dans leur progression. Cette
interaction lecture-écriture s’effectue aussi en poésie. Pour mieux saisir la poésie, un constant
aller-retour doit être opéré entre la lecture et l’écriture de poèmes. Après avoir joué avec les
mots par l’intermédiaire de jeux poétiques, les élèves ont été confrontés à la production
« libre » d’un poème. La liberté n’était pas totale car comme je l’ai déjà écrit, les jeunes
enfants auront des difficultés à produire s’ils n’ont aucune contrainte ou direction car ils
auraient beaucoup trop de paramètres à gérer ce qui pourrait conduire à des blocages. J’ai
choisi le thème des saisons et comme je l’ai évoqué précédemment, j’ai mis à disposition des
élèves, des photographies représentant la nature lors des différentes saisons. L’écriture de
poèmes a permis de réinvestir les connaissances acquises en vocabulaire, sur le champ lexical
et les mots génériques. A partir des photographies, les enfants ont écrit les mots qui leur
venaient à l’esprit pour qualifier les quatre saisons. Donc, pour l’écriture du poème, les élèves
disposaient d’un grand nombre de mots. Des affiches ont été réalisées pour servir d’outil
collectif. Ensuite, la même démarche a été mise en point pour l’écoute des Quatre saisons de
Vivaldi. Ils se sont donc constitués un « bagage » lexical. Nous avons aussi lu plusieurs
poèmes sur les saisons (Annexe XVIII). Ils ont pu se servir de tous ces éléments lors de leur
production. En ce qui concerne les élèves qui auraient des difficultés avec l’écrit, la dictée à
l’adulte reste un moyen efficace pour que l’élève soit quand même confronté aux questions
inhérentes à une telle production (Annexe XIX).
Il s’avère intéressant de créer non seulement des poèmes mais également des recueils ou
des anthologies. Soit les élèves « compilent » leurs poèmes suivant un thème ou un auteur, par
exemple, soit ils fabriquent des anthologies en regroupant certains poèmes ce qui les oblige à
justifier leur choix donc à dégager des critères communs. Ils rentrent par là dans le
fonctionnement même de ces différents supports. Les recueils ou anthologies créés resteront
dans la classe ou en BCD mais ils pourront aussi être emportés à la maison ce qui entraîne une
valorisation de ces écrits et de leurs auteurs. Si l’on a l’occasion, l’édition est une formidable
expérience pour les élèves.
La création poétique doit tenir une place considérable à l’école primaire puisqu’elle
encourage, valorise les écrits des élèves. Il va sans dire que la valorisation à long terme doit
être recherchée également pour que les élèves acquièrent un « bagage poétique » qui les
accompagnera tout au long de leur scolarité ou tout au long de leur vie.
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CONCLUSION
J’ai voulu, par l’intermédiaire de ce mémoire, réhabiliter la poésie à l’école primaire.
Non pas qu’elle n’y soit pas présente, mais pour qu’elle prenne ou reprenne sa place en tant
que genre littéraire à part entière et non pas seulement comme instrument de vérification de la
mémoire des élèves. Nous avons le devoir, nous les professeurs, de former les futurs citoyens.
N’oublions pas que la poésie peut y contribuer. D’autant plus que, durant mes stages, celle-ci
a été accueillie à chaque fois avec grand plaisir. Faut-il être un sportif de haut niveau pour
enseigner l’Education Physique et Sportive à l’école ? Faut-il avoir un certain talent artistique
pour enseigner les arts visuels en primaire? Evidemment, non. Il ne s’agit pas d’être poète ou
grand expert de la poésie pour la transmettre. Alors, pourquoi fait-elle si peur ? Comme je l’ai
expliqué tout au long de ce mémoire, la poésie a un caractère indéfinissable. Elle est
également source d’émotions et cela peut inquiéter à l’école. Pourtant, la poésie peut apporter
beaucoup aux élèves. Ils acquièrent des compétences de maîtrise de la langue (orale et écrite)
ce qui est l’objectif principal du primaire. La poésie fait partie de notre patrimoine littéraire et
elle permet une ouverture culturelle puisqu’elle s’écrit dans le monde entier depuis des
siècles. En conciliant les disciplines artistiques et la maîtrise de la langue, elle offre des
perspectives non négligeables pour l’acquisition de compétences dans le domaine artistique.
Elle sollicite l’imaginaire et la créativité qui sont deux éléments constitutifs de la construction
de soi. La poésie peut présenter des solutions aux questions existentielles des enfants qui
n’ont pas toujours leur place en classe, du fait du regard de l’autre et des codes qui s’y
trouvent.
Je dirais que l’un des autres avantages de la poésie, qui me paraît essentiel à l’école,
est la formation de l’esprit critique. Les élèves comprennent que leur avis compte en poésie,
qu’il a de l’importance aux yeux de l’enseignant car la poésie se nourrit de confrontations, de
tous les sens que chaque individu lui confère. Elle est l’occasion de dialoguer, de s’exprimer
et de réfléchir à notre conception du monde en prenant en compte l’avis des autres. C’est ce
que l’on appelle la tolérance.
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BIBLIOGRAPHIE
� OUVRAGES GENERAUX
� Les Nouveaux Programmes 2004-2005 du Ministère de L’Education Nationale.
Qu’apprend-on à l’école maternelle ? XO éditions, CNDP.
� Les Nouveaux Programmes 2003-2004 du Ministère de L’Education Nationale.
Qu’apprend-on à l’école élémentaire ? XO éditions, CNDP.
� OUVRAGES SUR LA POESIE
� Le groupe de recherche d’Ecouen, J. Jolibert, C. Sraiki, L. Herbeaux. Former des
enfants lecteurs et producteurs de poèmes. Edition Hachette.
� Georges Jean, Comment faire découvrir la poésie à l’école. Retz pédagogie, 1997.
� Marie-Claire et Serge Martin, Les poésies, l’école. PUF l’éducateur, 1997.
� Jacques Charpentreau, Le mystère en fleur, les enfants et l’apprentissage de la
poésie. Les éditions ouvrières, collection Enfance heureuse.
� REVUES
� Le journal des instituteurs n°2 d’octobre