Collège des Enseignants de PneumologieRéférentiel pour la préparation de l’ECN
Pr Didier (Toulouse), Pr Godard (Montpellier)Pr Tillie-Lebond (Lille), Pr Charpin (Marseille)
Pr Chanez (Marseille) ; Pr Dusser (Paris)Pr Marquette (Nice)
ASTHME DE L’ADULTE
Item 226
Objectifs d’enseignements tels que définis dans le programme de l’ECN :
Diagnostiquer un asthme de l’enfant et de l’adulte
Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge
Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient
Décrire les principes de la prise en charge au long cours
Objectifs pédagogiques terminaux définis par le Collège des Enseignants de Pneumologie
1. Connaître les grandes tendances épidémiologiques de l’asthme et de la rhinite allergique :prévalence, mortalité…
2. Connaître le rôle de l’environnement domestique, professionnel et général dans l’allergie
3. Connaître les mécanismes intriquant l’asthme, la rhinite, la conjonctivite mais aussi chez le jeuneenfant l’eczéma atopique.
4. Connaître et hiérarchiser les différentes étapes du diagnostic des allergies respiratoires
5. Connaître la physiopathologie de l’asthme
6. Savoir établir le diagnostic positif et le diagnostic différentiel d’une rhinite allergique
7. Savoir établir le diagnostic positif et le diagnostic différentiel d’un asthme
8. Connaître les éléments de gravité d’une crise d’asthme et les modalités de sa prise en charge
9. Savoir évaluer la sévérité de l’asthme
10. Savoir évaluer le contrôle de l’asthme
11. Savoir identifier les principales causes de non contrôle de l’asthme
12. Connaître les mesures d'évictions allergéniques
13. Connaître la place, les précautions d'emploi et les effets secondaires des anti-histaminiques,corticoïdes, anti-leucotriènes et de l’immunothérapie spécifique (voies d’administration actuelles),dans la rhinite et dans l’asthme
14. Connaître la place, les précautions d'emploi et les effets secondaires des anticorps anti-IgE dansl’asthme
15. Savoir mettre en place le traitement de fond
16. Savoir définir les objectifs et les modalités de surveillance du traitement de fond de l’asthme
17. Connaître les principes de l’éducation thérapeutique de l’asthme et les plans d’action
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Points clés
1. L'asthme est une maladie inflammatoire chronique des voies aériennes qui provoque des
épisodes récurrents de sifflements, d’oppression thoracique, de respiration difficile et de toux
en particulier la nuit.
2. Les explorations fonctionnelles respiratoires (obstruction bronchique réversible ou hyper
réactivité bronchique) sont indispensables pour le diagnostic et le suivi de l’asthme.
3. En dehors de la crise, la prise en charge est fondée sur la notion de contrôle de l’asthme (état
clinique au moment de la consultation) et sur sa sévérité (intensité du traitement de fond, en
particulier doses des corticoïdes inhalés, nécessaire pour obtenir et maintenir de manière
durable un contrôle acceptable).
4. La base du traitement de fond reste la prescription d’une corticothérapie inhalée.
5. Le suivi médical doit être centré sur la vérification du contrôle de l’asthme; lorsque celui ci
n’est pas atteint les modifications thérapeutiques doivent tenir compte du niveau de traitement
déjà en place, sous réserve que l’observance et la prise des traitements inhalés soient
correctes.
6. Le contrôle de l’environnement est un paramètre important de la prise en charge de l’asthme.
7. L’éducation thérapeutique a une place essentielle dans la prise en charge au long cours de la
maladie et doit être intégrée au suivi du patient
8. L’asthme aigu reste un événement potentiellement dangereux dont la gravité doit être
rapidement évaluée pour permettre une prise en charge thérapeutique et une orientation
adaptées du patient.
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I. DEFINITION ET EPIDEMIOLOGIE
I.1. Epidémiologie
La prévalence de l’asthme en France est de 5-7 % chez l’adulte. Cette prévalence, comme
celle de l’ensemble des maladies atopiques (voir item 115 de l’ECN), a doublé au cours des
20 dernières années avec cependant une tendance à se stabiliser actuellement, au moins
dans les pays développés.
La mortalité par asthme en France est en diminution, un peu plus de 1000 décès en 2005
contre plus de 2000 décès par an dans les années 1990-95.
La morbidité est en augmentation régulière et une étude effectuée en 2004 évaluait le coût
global de la maladie à 1,5 milliards d’euros par an. La plus grande partie du coût de cette
pathologie est liée aux hospitalisations, aux soins d’urgences et au retentissement social de la
maladie.
I.2. Définition de l'asthme
La définition souligne les 3 éléments essentiels du diagnostic de la maladie asthmatique :
éléments physiopathologiques, cliniques et fonctionnels respiratoires.
L'asthme est une maladie inflammatoire chronique des voies aériennes au cours de
laquelle interviennent de nombreuses cellules, en particulier mastocytes, éosinophiles et
lymphocytes T.
Chez les individus présentant une prédisposition, cette inflammation entraîne des épisodes
récidivants d'essoufflement, d'oppression thoracique et de toux, accompagnés le plus
souvent de sifflements particulièrement à l’effort, la nuit et/ou au petit matin.
Ces symptômes sont généralement associés à une obstruction bronchique d'intensité
variable, réversible spontanément ou sous l'effet de la thérapeutique. Cette inflammation
entraîne une majoration de l'hyperréactivité bronchique à différents stimuli.
En pratique, pour porter un diagnostic d’asthme on s’appuie sur la présence d’éléments cliniques
compatibles avec la définition et sur la mesure des paramètres fonctionnels respiratoires. Le 3ème
élément (inflammation chronique des voies aériennes) est, pour l’instant, plus difficile à évaluer en
clinique.
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II. CONCEPTION PHYSIOPATHOLOGIQUE DE L'ASTHME
II.1. Génétique de l’asthme
L’implication de facteur génétique dans la transmission de l’asthme est une évidence en clinique.
Le risque, pour un enfant de développer de l’asthme est de 10% en l’absence d’antécédents
parentaux d’asthme.
Il augmente à 25 % lorsque l’un des deux parents est atteint et dépasse largement 50 % si les
deux parents sont asthmatiques.
Mais l’asthme n’est pas une maladie monogénique
Les gènes impliqués sont nombreux et encore incomplètement identifiés
Certains d’entre eux conditionnent l’existence de l’hyperréactivité bronchique
D’autres interviennent pour déterminer le caractère particulier de l’inflammation bronchique de
l’asthmatique (inflammation de type TH2).
II.2. Eléments impliqués dans les processus inflammatoires chroniques des voies
aériennes de l’asthmatique (figure1).
L'inflammation bronchique est quasi-constante chez l'asthmatique, présente même dans les
formes récentes et légères. Lors de son arrivée dans les voies aériennes, l'agresseur inhalé
(allergènes, micro-organismes, toxiques, irritants....) va être confronté à 3 types d'éléments :
II.2.1 Les cellules résidentes normales de l'appareil respiratoire (cellules épithéliales
macrophages, mastocytes) ou les cellules recrutées sur les lieux du conflit, provenant du
torrent circulatoire (polynucléaires neutrophiles, éosinophiles, lymphocytes, monocytes,
plaquettes).
Le polynucléaire éosinophile
cellule clef de l'inflammation dans l’asthme
sa présence dans les voies aériennes est corrélée à la sévérité de l'asthme. Elle
est capable de sécréter toute une série de médiateurs et de protéines (Major Basic
Protein, Eosinophil Cationic Protein), particulièrement toxiques pour les cellules de
voisinage, notamment l'épithélium.
Les lymphocytes T des voies aériennes
jouent également un rôle essentiel
sont capables de moduler dans un sens ou dans l'autre (amplification ou
diminution) les réponses des autres cellules des voies aériennes par le biais de la
sécrétion de différentes cytokines
dans l’asthme allergique ou non allergique l’inflammation bronchique est de type
TH2.
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II.2.2. Les particularités de la paroi bronchique
Plusieurs types d’anomalies sont observés chez l’asthmatique. Les plus marquantes sont :
L’existence d’une desquamation des cellules épithéliales qui favorise l’accès de
l'agresseur inhalé à la sous muqueuse bronchique et la mise à nu des terminaisons
nerveuses sensitives.
Une hyperperméabilité des vaisseaux de la sous muqueuse, source d’œdème de la
muqueuse et d’hypersécrétion dans la lumière bronchique.
Une contractilité exagérée du muscle lisse bronchique en réponse aux agressions
bronchiques participant au phénomène d’hyperréactivité bronchique.
Un remodelage bronchique, associant une hypertrophie du muscle lisse, un
épaississement de la membrane basale, une hyperplasie des cellules caliciformes et
de glandes à mucus.
II.2.3. Les structures nerveuses. L’innervation des voies aériennes est assurée par :
Le système cholinergique responsable d'une bronchoconstriction et par
Le système adrénergique bronchodilatateur, qui intervient par l’intermédiaire des
catécholamines sécrétées par les surrénales qui agissent sur des récepteurs -2 dont
la fonction est essentiellement bronchodilatatrice.
Il existe un 3ème
système nerveux, caractérisé immuno-histochimiquement par la
présence de neuropeptides dans les fibres nerveuses qui le composent.
Les fibres du système NANC (Non Adrénergique, Non Cholinergique) se distribuent
dans la paroi bronchique
Les agressions de l'épithélium favorisent la stimulation de celles-ci et la libération
de neuropeptides.
Certains de ces neuropeptides ont une puissante action pro-inflammatoire. Leur
cible est principalement vasculaire au niveau des vaisseaux de la couche sous
épithéliale. Ils entraînent une extravasation plasmatique intense et une
vasodilatation.
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Figure 1 : Les principaux acteurs de la réaction inflammatoire bronchique dans l'asthme
II.3. Rôle de l'inflammation dans l'asthme
Il existe une relation étroite entre la majoration de l'inflammation dans les voies aériennes et
l'aggravation de l'hyperréactivité et des symptômes cliniques
Dans les circonstances où l'inflammation augmente (exposition à l'allergène, inhalation
de substances toxiques ou d'irritants), l'hyperréactivité bronchique s’aggrave ce qui se
traduit par l'apparition de signes cliniques.
L'inflammation entretient l'obstruction bronchique et pourrait participer au déclin accéléré du
VEMS qui est observé chez certains asthmatiques par des phénomènes de remodelage
bronchique.
Ce remodelage, inconstant, explique que, dans certaines formes d’asthme sévère
(asthmes « vieillis »), le caractère réversible de l’obstruction bronchique puisse
disparaître pour laisser la place à une obstruction bronchique fixée proche de celle
observée au cours de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO).
III. ASPECTS CLINIQUES ET DIAGNOSTIQUES
III.1. Vocabulaire et définitions
III.1.1. Crises d'asthme :
L'asthme, est une maladie bronchique chronique qui a la particularité de pouvoir s'exprimer par la
survenue plus ou moins brutale d'épisodes aigus de dyspnée, avec sifflements (sibilants perçus
par le patient et l’entourage) expiratoires qui correspondent aux classiques crises d'asthme.
La crise est définie par un accès paroxystique de symptômes de durée brève (< 1 jour).
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III.1.2. Exacerbation :
L’enchaînement de crises d'asthme subintrantes sur une période de quelques jours définit une
exacerbation
Elle est dite grave si elle nécessite le recours à une corticothérapie orale ou si le DEP a chuté de
plus de 30 % au-dessous des valeurs initiales pendant 2 jours successifs
Elle peut aboutir en cas d'insuffisance thérapeutique à un asthme aigu grave, c'est à dire à une
détresse respiratoire aiguë liée à l'intensité de l'obstruction bronchique et ses conséquences
hémodynamiques et neurologiques.
III.1.3. Asthme aigu grave (AAG)
Dès lors que le pronostic vital est en jeu*°. Correspond à 2 situations de détresse respiratoire :
L’état de mal asthmatique qui s’est installé progressivement en quelques heures ou jours, à la
faveur, le plus souvent, d’une négligence des signes de gravité
La crise d’asthme brutale et d’emblée sévère (crise soudaine et grave) où le bronchospasme
joue un rôle majeur. Cette 2ème
éventualité est plus rare, mais est le plus souvent en cause
dans les décès brutaux par asthme aigu.
° Tableau 1 : Facteurs de risque d’asthme aigu grave et de mort par asthme
conditions socio-économiques défavorisées ;
co-morbidités en particulier psychiatriques
adolescent et sujet âgé ;
antécédent d’asthme « presque fatal » ou de séjour en réanimation pour asthme ;
VEMS < 40 % de la théorique ;
degré de réversibilité sous -2 mimétique supérieur à 50 % ;
visites fréquentes aux urgences ou chez le médecin généraliste ou hospitalisations itératives
patients « mauvais percepteurs » de leur obstruction bronchique ;
consommation tabagique supérieure à 20 paquets-année ;
mauvaise observance et/ou déni de la maladie ;
utilisation de 3 médicaments (ou plus) pour l’asthme ;
arrêt d’une corticothérapie orale dans les 3 mois
intolérance à l’aspirine
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*Tableau 2 : gravité des crises et exacerbations d’asthme :Paramètres Légère Modérée G
Dyspnée à la marche, peuts’allonger
en parlant, assis. au reposa
Parle avec phrases morceaux dephrases
m
Neurologique peut être agité souvent agité souv
Fréqu Respiratoire augmentée augmentée >
Mise en jeux musclesrespi accessoires
Non Oui
Sibilants modérés,expiratoires
bruyant bru
Fréqu Cardiaque <100 110-120 >
DEP initial (%prédit) > 80% 60-80% <50% (ad
PaO2 et/ou
PaCO2
normal (test nonnécessaire)< 45mmHg
> 60 mmHg
< 45 mmHg
< 60cyanos
> 45
SpO2 > 95 % 91-95 % <
III.2. Diagnostic positif de l’asthme
III.2.1. Crise d’asthme, exacerbation et AAG
Le diagnostic positif d’asthme en situation aiguë ne pose en génér
L’aspect de bradypnée expiratoire avec sibilances avec répo
broncho-dilatateurs sont caractéristiques et le clinicien doit sur
gravité de la crise afin d'adapter la prise en charge (cf infra).
L’évaluation de l’obstruction bronchique, au minimum par un DEP
de sa réversibilité doit être privilégiée dans tous les cas.
III.2.2. Diagnostic d’asthme en dehors de l’urgence
III.2.2.1. Eléments cliniques
L'asthme peut s’exprimer de façon chronique par des manifestat
classiques crises d’asthme: sensation d'oppression thoraciqu
transitoires, épisodes de gêne nocturne entraînant le réveil, dysp
l'effort accompagnée ou non de sifflements. Bien souvent le mala
comme des bronchites à répétition.
rave Arrêt respiratoireimminent
, penché envantots
ent agité confus, coma25
Oui épuisement
yants absence
120 bradycardie,hypotension
<100L/minultes).mmHg
e possiblemmHg
90 %
al pas de problème.
nse totale ou partielle aux
tout s'attacher à évaluer la
, au mieux par un VEMS, et
ions moins typiques que les
e, sifflements expiratoires
née ou toux déclenchée par
de présente ses symptômes
Asthme aigu grave
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L'examen de l’appareil respiratoire est pauvre entre les crises, les classiques râles sibilants
étant souvent absents.
Certains critères permettent cependant d’étayer le diagnostic d’asthme
Antécédents familiaux d'asthme,
Caractère fréquemment nocturne des symptômes,
Déclenchement des symptômes par certaines circonstances, effort, rire, exposition à
des irritants ou à des substances potentiellement allergéniques ou en atmosphère
polluée ou par les infections virales de la sphère ORL.
Autres maladies atopiques associées : rhinite allergique, eczéma atopique (enfant)
L’association de l’asthme avec une atteinte des voies aériennes supérieures (rhinite
ou rhinosinusite) est retrouvée dans plus de 80% des cas
La mesure du débit expiratoire de pointe (DEP) à l'aide d'un débitmètre de pointe
permet d'évaluer l'existence d'une obstruction bronchique en comparant le chiffre
obtenu aux valeurs théoriques du patient.
l'amélioration de cette valeur après prise d'un broncho-dilatateur témoigne du caractère
réversible de l'obstruction et représente un élément supplémentaire en faveur de
l'asthme.
peut être réalisée en ambulatoire par le patient sur plusieurs jours
l’une des caractéristiques de l’asthme non traité ou non contrôlé est l’existence d’une
grande variabilité du calibre bronchique qui se traduit par une différence de plus de 20
% entre les valeurs matinales du DEP (habituellement les plus basses) et les valeurs
du soir
le DEP ne se substitue pas à la réalisation d'une exploration fonctionnelle respiratoire
(EFR) qui reste indispensable lors du diagnostic initial de l'asthme et dans le suivi de la
maladie.
III.2.2.2. EFR
Recherche la caractéristique fonctionnelle de la maladie : l'existence d'un trouble ventilatoire
obstructif (TVO) réversible.
Courbe débit-volume
c’est la technique la plus utilisée (figure 2) ; elle permet d'exprimer les débits
expiratoires instantanés en fonction des volumes pulmonaires.
Chez l’asthmatique, la courbe débit-volume se caractérise par un aspect concave avec
diminution de l'ensemble des débits qui peut-être chiffrée par rapport aux valeurs
théoriques. La prise d'un bronchodilatateur restaure complètement ou partiellement
l'obstruction bronchique témoignant du caractère réversible de celle-ci.
Définition du TVO = VEMS/CVF < 0,7
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ATTENTION à la classique source de confusion : il s’agit bien du rapport VEMS
mesuré/ CVF mesurée. Il ne s’agit pas d’un pourcentage par rapport à une quelconque
valeur prédite ou théorique.
par exemple, quand on divise un VEMS mesuré à 1,2 L par une CVF mesurée à 1,9 L
on obtient la valeur de 0,63 qu’on peut exprimer sous la forme 63%, en pratique ce
rapport VEMS/CVF est bien < 0,7 (ou < 70%).
Définition de la réversibilité du TVO = VEMS/CVF < 0,7
On parle de réversibilité significative1
d’un TVO quand le VEMS augmente :
de plus de 200 ml par rapport à la valeur initiale
et de plus de 12% par rapport à la valeur initiale2
On parle de réversibilité complète d’un TVO en cas de normalisation :
Du rapport VEMS/CVF (> 0,7)
Et du VEMS (VEMS > 80 % de la valeur prédite)
Figure 2: Courbe debit-volume typique de TVO significativement réversible. Après broncho-dilatateurs (BD), le VEMS gagne 500 ml soit 14%.
1 La définition de la réversibilité d’un trouble ventilatoire obstructif a fait l’objet de nombreuses discussions au cours des 30 dernièresannées. Celle qui est donnée ici est la plus utilisée et la plus consensuelle, il s’agit de la définition retenue par GOLD (Global Initiativefor Chronic Obstructive Lung Disease). D’autres sont disponibles dans la littérature, par exemple celle de l’European RespiratorySociety : augmentation du VEMS et/ou de la capacité vitale expiratoire forcée (CVF) ≥ 12% de la valeur théorique et ≥ 200 ml par rapport à la valeur initiale ou celle de la British Thoracic Society : augmentation du VEMS ≥ 15% de la valeur initiale et de plus de 200 ml par rapport à la valeur initiale.2 (VEMS post – VEMS pré)/VEMS pré > 0,12
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Recherche d'une hyperréactivité bronchique (tests pharmacologiques)
lorsque qu’il n’y a pas de TVO mais que la présomption clinique reste forte
tests de provocation par des substances bronchoconstrictrices inhalées (métacholine).
l’hyperréactivité bronchique caractéristique de l'asthme, se traduit par l’obtention d’une
obstruction par de faibles concentrations de ces substances qui sont sans effet chez le
sujet normal.
une chute de plus de 15 % du VEMS à ces faibles concentrations témoigne d’une
hyperréactivité bronchique et est un élément supplémentaire en faveur du diagnostic.
L’EFR est un examen clé dans le diagnostic et l’appréciation de la sévérité d’un asthme.
Elle permet d’évaluer objectivement le degré d’obstruction bronchique.
Elle devra être répétée régulièrement dans le suivi de la maladie, l’un des objectifs du
traitement étant de normaliser les débits bronchiques ou de les maintenir à un niveau
optimal.
III.2.2.3.Imagerie
radiographie thoracique
indispensable lors de la 1ère
consultation d’un asthmatique, essentielle pour le
diagnostic différentiel (obstacle bronchique et trachéal)
indiquée lors des exacerbations graves, en cas de difficulté à contrôler durablement la
maladie ou en cas de suspicion de complications (pneumothorax, pneumonie).
n’est pas recommandée dans le suivi
tomodensitométrie thoracique, n’est pas nécessaire, sauf exception
III.3. Diagnostic différentiel
C’est celui d’une dyspnée sifflante
Chez l’adulte les principaux diagnostics différentiels à éliminer sont les suivants:
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Tableau 3 : principaux diagnostics différentiels de l’asthme :
Cardio-vasculaires Insuffisance cardiaque gauche (pseudo-asthme cardiaque)
Tumorales Tumeurs trachéo-bronchiques: bénignes et malignes
Inflammatoires Sténoses trachéales post-intubation ou trachéotomieou dysimmunitaires Poumons éosinophiles, bronchiolites …
Congénitales MucoviscidoseDyskinésie ciliaire
Fonctionnelles et autres Bronchopneumopathie obstructive chronique (fumeur++)Corps étrangers (enfant +++)Laryngées: dysfonction des cordes vocalessyndrome d’hyperventilation
asthmes hyperésosinophiliques Aspergillose bronchopulmonaire allergique(>1000/1500 éosinophiles/mm
3) Vascularite de Churg et Strauss
Les éléments suivants doivent remettre en question le diagnostic d’asthme
histoire clinique atypique
asymétrie auscultatoire
aspect en plateau de la courbe débit-volume
non réversibilité du trouble ventilatoire obstructif, y compris sous corticoïdes
manifestations cliniques atypiques ou extra-thoracique associées
intoxication tabagique
IV. RECHERCHE DE FACTEURS ETIOLOGIQUES ET/OU D’AGGRAVATION
L’asthme est une maladie d’origine génétique, mais son expression clinique est modulée par
différents facteurs souvent environnementaux.
IV.1. Facteurs allergiques
Les allergènes les plus souvent incriminés sont les pneumallergènes (acariens, pollens,
phanères animales, blattes, moisissures).
Une allergie alimentaire associée à l’asthme est un facteur de risque d’asthme aigu grave et
de mort par asthme.
L’enquête allergologique se fonde sur l’interrogatoire orienté tout particulièrement sur
l’environnement du patient (domestique, professionnel et général) et sur la réalisation
d’examens complémentaires : tests cutanés d’hypersensibilité immédiate (cf item 113 et 115).
La réalisation d’un bilan allergologique est recommandé chez tous les asthmatique
lors du bilan initial
ou lorsque le profil de sévérité de la maladie se modifie.
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La mise en évidence d’une composante allergique peut déboucher sur des mesures
spécifiques :
éviction des allergènes
immunothérapie spécifique encore appelée désensibilisation (cf item 113 et 115).
IV.2. Atteinte des voies aériennes supérieures
Rhinite et rhinosinusites chroniques
fréquentes chez l’asthmatique
leur prise en charge spécifique est susceptible d’améliorer le contrôle l’asthme.
polypose naso-sinusienne
doit systématiquement faire rechercher une intolérance à l’aspirine associée.
l’association asthme, polypose naso-sinusienne et intolérance à l’aspirine est une entité
particulière :
le Syndrome de Fernand Widal
l’asthme y est le plus souvent difficile à contrôler
la prise d’aspirine ou d’autres anti-inflammatoires non stéroïdiens peut déclencher,
chez eux des crises très sévères.
IV.3. Exposition aux irritants non spécifiques et à la pollution
tabagisme passif ou actif, autres irritants et pollution atmosphérique ou domestique
augmentent la difficulté à contrôler la maladie.
environnement professionnel
certaines professions sont susceptibles d’exposer à des irritants et/ou à des allergènes
susceptibles d’induire ou d’aggraver un asthme
Les six métiers les plus exposés au risque d’asthme professionnels sont : boulangers,
coiffeurs, métiers de santé, peintres, travailleurs du bois, agents d’entretien
IV.4. Médicaments
bétabloquants (y compris par voie oculaire)
majorent l’hyperréactivité bronchique en bloquant le système adrénergique
bronchodilatateur
peuvent déclencher des crises graves et sont donc formellement contre-indiqués chez
l’asthmatique.
aspirine et les AINS en général (cf ci-dessus)
peuvent déclencher des bronchospasmes sévères chez certains asthmatiques
toujours s’enquérir d’éventuels antécédents avant de les prescrire ou de les proscrire
chez l’asthmatique.
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IV.5. Infections respiratoires
surtout virales, de la sphère ORL (notamment rhinovirus)
causes majeures d’exacerbations et de perte de contrôle de l’asthme surtout chez
l’enfant en période épidémique
leur prévention est difficile sauf pour l’infection grippale
qui peut être prévenue par la vaccination. Il est logique de proposer une vaccination
anti-grippale à tous les asthmatiques qu’elle que soit la sévérité de la maladie
(recommandation HAS 2007)
doit être effectuée en dehors d’une période d’exacerbation.
IV.6. Facteurs hormonaux
leur influence sur la maladie asthmatique est évidente
les mécanismes précis de ces interactions sont mal connus, il est donc difficile d’en tirer des
conséquences thérapeutiques
chez l’adolescent, lors de la puberté il existe souvent une amélioration de l’asthme (ce qui ne
signifie pas guérison)
chez la femme
il peut exister des aggravations menstruelles de l’asthme
l’asthme d’apparition tardive est plus fréquent au moment de la ménopause (asthme
non –allergique)
IV.7. Facteurs psychologiques
anxiété, dépression sont plus fréquents dans la maladie asthmatique
ils sont associés à un plus grand risque de symptômes d’asthme
les stress émotionnels aigus de la vie quotidienne peuvent entraîner des crises d’asthme.
Le début de l’asthme est parfois rapporté à un stress majeur : décès d’un parent, divorce, etc
IV.8. Reflux gastro-oesophagien
augmente la difficulté à contrôler la maladie
doit être pris en charge lorsqu’il existe des symptômes digestifs évocateurs
doit aussi être recherché lorsque l’asthme reste non contrôlé malgré un traitement optimal
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IV.9. Obésité
le lien épidémiologique entre obésité et asthme est confirmé chez l’enfant et l’adulte
l’asthme est plus souvent difficile à contrôler lorsqu’il existe une obésité associée.
V. MODALITES DE SUIVI MEDICAL AU LONG COURS DES PATIENTS ASTHMATIQUES
V.1. Contrôle de l’asthme
C’est la base du suivi des asthmatiques
Il apprécie l’activité de la maladie sur une période courte (1 semaine à 3 mois)
Il doit être évalué à chaque consultation de suivi.
Il repose sur un score combinant des critères cliniques simples et des données EFR simples
Tableau 4 : Les critères de contrôle de l’asthme selon les recommandations internationales du GINA(Global INitiative for Asthma)
Contrôle total
(tous les critères)
Contrôle partiel
(> 1 critère)Non contrôlé
Symptômes diurnes ≤ 2 /semaine > 2 /semaine
Limitation des activités Aucune Présence
Symptômes nocturnes/réveils
Aucun Présence
Utilisation de β2-mimétiques de courte
durée d’action
≤ 2 /semaine > 2 /semaine
Fonction respiratoire(VEMS ou DEP)
Normale (> 80%)< 80% de la théorique
ou de la meilleurevaleur
3 critères ou plus du
contrôle partiel
Exacerbations Aucune ≥ 1 /an 1 1 exacerbation dans la
semaine2
1Chaque exacerbation implique de réévaluer si le traitement est adapté.
2Par définition, la présence d’une exacerbation dans la semaine d’évaluation correspond à un asthme non
contrôlé
A la notion de contrôle répond logiquement la notion de palier thérapeutique (de 1 à 5).
Un patient non contrôlé à un palier thérapeutique donné fera ainsi l’objet d’un ajustement dans le
sens d’une augmentation de palier (voir ci-dessous).
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V.2. Sévérité de l’asthme
La sévérité3
peut se définir simplement par le niveau de pression thérapeutique minimalenécessaire à l’obtention d’un contrôle durable de la maladie.
Elle correspond à l’histoire de la maladie sur une période longue (6 à 12 mois).
Après 6 mois ou 1 an de suivi sous traitement, on peut classer l’asthme en niveau de sévérité :intermittent, persistant léger, modéré ou sévère.
V.3. Gravité de l’asthme
Le terme de gravité apprécie l’intensité de l’événement aigu actuel: crise ou exacerbation (cfsupra)
VI. TRAITEMENT DE L’ASTHME
VI.1. Bases du traitement
Les crises d'asthme ne représentent que la partie visible de l'iceberg. L'asthme est caractérisé par
la présence, y compris entre les crises, d'une inflammation persistante des voies aériennes.
VI.2. Objectif du traitement
faire disparaître les crises et réduire au minimum la symptomatologie clinique par un
traitement efficace et bien toléré
permettre au patient d’avoir une vie normale (familiale, professionnelle et sportive)
normaliser la fonction ventilatoire
la réalisation de ce triple objectif doit tenir compte du rapport bénéfice/risque et des
contraintes de prise des différentes thérapeutiques.
3
Stades Symptômes EFR
Intermittent < 1 fois par semaine exacerbations brèves
VEMS>80% ou DEP >80%Variabilité du DEP <20%
Persistant léger < 1 fois par jour exacerbations affectant le sommeil > 2 fois / mois
VEMS ou DEP >80%variabilité du DEP < 20-30%
Persistantmodéré
symptômes quotidiens exacerbations affectant l’activité ou le sommeil > 1 fois /
sem utilisation quotidienne de B2 courte durée d’action
VEMS ou DEP entre 60-80%Variabilité du DEP >30%
Persistant sévère symptômes quotidiens exacerbations fréquentes symptômes nocturnes fréquents activités physiques limitées
VEMS ou DEP < 60%Variabilité du DEP >30%
17/30
VI.3. Les moyens
Ils comportent
La prise en charge des facteurs aggravants ou associés par les mesures sur l’environnement
La prise en charge médicamenteuse
L’éducation thérapeutique
VI.3.1. Prise en charge des facteurs aggravants, mesures sur l’environnement
Irritants
éviction des agents responsables d’une majoration de l’inflammation bronchique
(tabac, irritants, allergènes).
Atteinte ORL associée
existe dans prés de 80% des cas, elle sera prise en charge en fonction du type
d’atteinte
la rhinite allergique est la pathologie ORL le plus souvent associée à l’asthme, sa prise
en charge est codifiée (cf. item 113 et 115).
RGO à traiter
si symptômes digestifs évocateurs
si l’asthme reste non contrôlé malgré un traitement optimal
Médicaments à proscrire : ceux susceptibles de provoquer un bronchospasme
-bloquants sous toutes leurs formes (y compris collyre)
aspirine et les AINS chez les sujets ayant des antécédents d’intolérance à ces produits.
Sensibilisation
si sensibilisation à un ou plusieurs pneumallergènes a pu être identifiée des mesures
spécifiques d’éviction doivent être proposées (voir item 113 et 115).
l’intérêt d’une désensibilisation spécifique (immunothérapie spécifique) pourra être
discutée, après stabilisation de l’asthme et normalisation de la fonction ventilatoire.
VI.3.2. Les médicaments de l’asthme
Ils sont individualisés en deux catégories :
les bronchodilatateurs
les anti-inflammatoires bronchiques
18/30
VI.3.2.1. Les bronchodilatateurs
VI.3.2.1.1. -mimétiques
Bronchodilatateurs les plus efficaces.
Ils entraînent une bronchodilatation en relâchant le muscle lisse bronchique par action sur les
récepteurs -2 des voies aériennes.
On distingue
les -mimétiques à courte durée d’action et d’action immédiate, utilisés à la demande dans le
traitement des symptômes
par voie inhalée, agissent rapidement en quelques minutes mais leur durée d'action, en
moyenne de 4 à 6 heures
nécessitent des administrations répétées au cours de la journée
plusieurs dispositifs d’inhalation sont disponibles en fonction de la molécule utilisée:
aérosol-doseur, système d'inhalation de poudre sèche, système auto-déclenchant,
préparation pour nébulisation.
les formes injectables (terbutaline et salbutamol) sont utiles, en urgence, lorsque la
nébulisation est impossible ou a échoué.
les -mimétiques à longue durée d’action
salmétérol (Sérévent) et le formotérol (Foradil)
habituellement prescrits au long cours en traitement de fond en association avec un
anti-inflammatoire bronchique.
entraînent une bronchodilatation prolongée au moins jusqu'à la 12ème heure,
autorisant donc un traitement bi-quotidien
disponibles sous forme d’aérosol doseur ou d’inhalateur de poudre sèche
ne doivent être prescrits en traitement de fond qu’associés à un corticoïde inhalé.
Les effets secondaires des -2-mimétiques sont le plus souvent mineurs avec les formes inhalées.
Tremblements, tachycardie, palpitations sont les plus fréquents. Surtout observés en début de
traitement ils s'estompent généralement lors d'une utilisation régulière.
VI.3.2.1.2. anticholinergiques
entraînent une bronchodilatation en diminuant le tonus bronchoconstricteur cholinergique
leur mode d'action est complémentaire de celui des 2-mimétiques.
la bronchodilatation obtenue est moins rapide et moins importante qu'avec les 2-mimétiques
sont disponibles sous forme de spray ou de préparation pour nébulisation.
sont essentiellement utilisés dans l’asthme aigu grave (nébulisation)
VI.3.2.1.3. théophylline
19/30
exerce une action relaxante sur le muscle lisse par un mécanisme encore incomplètement
élucidé.
son activité bronchodilatatrice est moins rapide et moins puissante que celle des 2-
mimétiques
inactive par voie inhalée, doit donc être administrée par voie orale ou injectable
de nombreuses spécialités sont commercialisées sous forme retard à libération prolongée
fréquence des effets secondaires avec au 1er
plan des troubles digestifs
de nombreuses conditions physiopathologiques (âge, grossesse, tabagisme) et prescriptions
médicamenteuses peuvent interférer avec la théophylline et en modifier les taux sériques dans
un sens ou dans l'autre. Le risque de surdosage chez un patient traité par théophylline retard
n'est pas nul, l'exposant alors à des complications graves (troubles du rythme cardiaque,
convulsions).
toutes ces raisons tendent, à positionner la théophylline en 2ème
ligne comme thérapeutique
bronchodilatatrice d'appoint.
En pratique, ils sont exceptionnellement utilisés en France.
VI.3.2.2. anti-inflammatoires bronchiques
VI.3.2.2.1. corticostéroïdes inhalés (CSI)
leur développement a marqué un tournant décisif dans le traitement de fond de l'asthme.
sont disponibles en France le dipropionate de béclométhasone (Bécotide), le
budésonide (Pulmicort) et la fluticasone (Flixotide), sous forme d’aérosols doseurs,
et/ou d’inhalateurs de poudre sèche.
représentent le traitement de référence de l’asthme persistant.
on distingue des doses journalières faibles, moyennes et fortes de CSI chez l’adulte*:
Tableau 5 : doses journalières faibles, moyennes et fortes de CSI chez l’adulte
Molécules Doses faibles Doses modérées Doses fortes
béclométhasone 200-500 μg/j >500-1000 μg/j >1000-2000 μg/j
fluticasone 100-250 μg/j >250-500 μg/j >500-1000 μg/j
budésonide 200-400 μg/j >400-800 μg/j >800-1600 μg/j
* en caractère gras: les posologie habituellement suffisantes pour contrôler l’asthme
il existe des présentations en association (une seule présentation mais administration
d’un CSI avec un -2 agoniste à longue action) :
20/30
formotérol-budésonide : Symbicort
salmétérol-fluticasone : Sérétide
formotérol-béclométhasone :Innovair
ces associations fixes ont pour objectif de simplifier la prise du traitement de fond
les effets secondaires systémiques des corticoïdes inhalés sont exceptionnels, jusqu'à 1500
μg/j d’équivalent béclométhasone chez l'adulte
des effets secondaires locaux à type de mycose bucco-pharyngée ou de dysphonie sont
relativement fréquents
leur incidence est souvent liée à une mauvaise utilisation du système d’inhalation
peut être réduite par le couplage d’une chambre d'inhalation avec l’aérosol doseur et
par le rinçage de bouche après la prise du produit.
VI.3.2.2.1. corticostéroïdes systémiques (CS)
La CS peut être prescrite, en cure courte, au cours des exacerbations
Dans le traitement de fond, la CS doit être réservée aux asthmes particulièrement sévères
avec trouble ventilatoire obstructif important, ainsi qu'aux patients non stabilisés par la
corticothérapie inhalée à forte dose.
Peuvent être administrés par voie orale, intra-musculaire et intra-veineuse.
Prednisone (Cortancyl), prednisolone (Solupred) et la méthyl-prednisolone (Médrol) sont
les CS les plus utilisés.
VI.3.2.2.2. antileucotriènes (AL)
Les leucotriènes ont une action inflammatoire et bronchoconstrictrice puissante.
En thérapeutique ce sont les antagonistes des récepteurs qui ont été développés dans le
traitement de l’asthme.
Une seule molécule est commercialisée en France: le montélukast.
Les indications retenues sont le traitement de l’asthme persistant léger à modéré
en complément des CSI lorsque ceux-ci sont insuffisants pour permettre le contrôle
ou seuls dans le traitement préventif de l’asthme d’effort (surtout chez l’enfant)
Les effets secondaires sont rares et bénins (douleurs abdominales, céphalées).
21/30
VI.3.2.2.3. autres traitement
VI.3.2.2.3.1. anti-IgE.
Le développement de cette classe thérapeutique est récent.
L’Omalizumab (Xolair) est le 1er
traitement issu des biotechnologies utilisable dans le traitement
de l’asthme.
Il s’agit d’un anticorps monoclonal de type IgG1 humanisé qui lie sélectivement les IgE humaines.
L’Omalizumab inhibe la liaison des IgE au récepteur à IgE de haute affinité à la surface des
mastocytes et basophiles.
Leur prescription relève du spécialiste (pneumologues et pédiatres) et est réservée aux asthmes
allergiques non contrôlés malgré un traitement de fond de niveau élevé et bien conduit.
VI.3.2.2.3.3. antihistaminiques H1.
Ces produits sont efficaces sur les symptômes de rhinite fréquemment associés à l’asthme. Il
n’ont pas de place dans le dans le traitement de l’asthme.
VI.3.2.2.4. acupuncture et homéopathie.
Il n’existe pas d’essai contrôlé méthodologiquement satisfaisant permettant de valider leur
efficacité dans le cadre de la maladie asthmatique.
VI.3.3. L’éducation à l’utilisation des dispositifs d¹inhalation
La mauvaise utilisation des dispositifs d’inhalation est une des 1ères
causes du mauvais contrôle de
l’asthme.
Une explication et une démonstration de la technique de prise doivent être faites quel que soit le
système d’inhalation proposé,
La technique de prise doit être vérifiée à chaque consultation :
L’aérosol doseur exige une parfaite coordination main-poumons qui est parfois difficile à
obtenir et peut être améliorée par l’utilisation d’une chambre d’inhalation.
Les dispositifs d’inhalation de poudre sèche ne nécessitent pas de coordination main-
poumons mais nécessitent un flux inspiratoire suffisamment fort.
22/30
VII LE TRAITEMENT DE FOND EN PRATIQUE
VII.1. Les grands principes
1. Evaluer le contrôle de l’asthme en fonction des paramètres cliniques et des données de l’EFR
2. Supprimer les facteurs d'aggravation
3. Privilégier pour le traitement de fond les formes inhalées, en 1er
lieu les corticoïdes inhalés
4. Adapter le traitement de fond par palier d’intensité croissante
5. Réévaluer régulièrement l'efficacité clinique et l'évolution de l’EFR.
6. En cas d'échec, avant de mettre en route une corticothérapie générale prolongée, vérifierl'observance et la prise correcte des thérapeutiques inhalées.
VII.2. Les paliers thérapeutiques en fonction du contrôle de l’asthme
VII.2.1 Mise en route du traitement de fond
On recommande l’utilisation d’un système de 5 paliers thérapeutiques d’intensité croissante :
Figure 3: En fonction du niveau de contrôle, on augmente progressivement la pressionthérapeutique. Les choix les plus efficace sont en caractère gras (CSI =corticostéroïde inhalé, 2AR = 2-agoniste d’action rapide; 2LA = 2-agoniste delongue durée d’action ; CS = corticostéroïde systémique)
Lorsque l’asthme est non contrôlé et sans traitement, en fonction de l’intensité des signes, on
commencera par le palier 2 ou le palier 3.
23/30
Quel que soit le palier, il est conseillé de réserver la prise d'un 2-mimétique inhalé d’action rapide
au traitement à la demande des symptômes.
La consommation hebdomadaire ou quotidienne de 2-mimétique d’action rapide permet de
mesurer l'efficacité du traitement de fond.
Lorsque le traitement est efficace et le patient stabilisé, la consommation est minimale
(idéalement nulle).
L'augmentation de la consommation de ce type de produit témoigne d'une déstabilisation de la
maladie et doit conduire à renforcer le traitement de fond.
Cette notion doit être apprise à l'asthmatique. Elle constitue l'un des premiers volets essentiels
de l'éducation du patient.
La corticothérapie par voie générale dans le traitement de fond ne doit être utilisée qu’une fois
épuisées les autres solutions. La dose minimale efficace sera alors recherchée.
L’anti IgE (Xolair) est réservée aux asthmes non contrôlés malgré un traitement de fond de
niveau élevé et bien conduit.
VII.2.1 Adaptation du traitement de fond
La durée des paliers thérapeutiques recommandée est de 1 à 3 mois.
tout traitement initié, comme toute modification, doivent être réévalués à 3 mois
sauf lorsqu’une CS a été nécessaire pour stabiliser l’asthme
on préconise alors une consultation plus précoce à un mois
L’adaptation du traitement est fonction de 2 éléments principaux :
le niveau de contrôle de l’asthme
en cas de non contrôle on passe au palier supérieur
en cas de contrôle on passe au palier inférieur
le traitement de fond en cours.
Il est conseillé d’amorcer la décroissance de la corticothérapie inhalée lorsque l’asthme est
stabilisé depuis au moins 3 mois.
A l’inverse, un asthme mal contrôlé sous un palier thérapeutique donné, nécessite une
augmentation de niveau de traitement avec réévaluation dans le mois suivant du contrôle. Cet
ajustement nécessite bien sur de s’assurer qu’il n’existe pas d’autres causes expliquant le
mauvais contrôle de la maladie (observance, utilisation correcte des dispositifs d’inhalation,
24/30
persistance d’une exposition aux allergènes ou aux irritants non spécifiques, RGO, atteinte ORL
non contrôlée).
La fréquence de surveillance est ensuite adaptée à la sévérité et au contrôle de l’asthme.
Tous les asthmatiques doivent bénéficier d’une EFR au moins une fois par an, la
normalisation des EFR étant un des objectifs du traitement.
Un suivi à long terme est nécessaire (consultation spécialisée avec EFR par an), même
lorsque le traitement de fond est arrêté.
Les consultations doivent intégrer une démarche éducative.
VIII LE TRAITEMENT DE LA CRISE EN PRATIQUE
VIII.4.1. Asthme aigu (crise d’asthme et asthme aigu grave)
C’est une urgence médicale fréquente dont la gravité doit être évaluée rapidement à partir de
critères simples avant de démarrer le traitement.
Sa prise en charge comporte 3 étapes : évaluation, traitement, réévaluation.
VIII.4.1.1 Evaluation de l’urgence
Trois éléments doivent être considérés :
Le terrain.
Le risque de crise grave est particulièrement élevé chez certains malades identifiables
sur des éléments de l'interrogatoire (voir tableau 1)
Les circonstances de la crise.
la 1ère
circonstance est l’absence ou l’interruption d’un traitement anti-inflammatoire
correct
l'exposition massive à un allergène
la prise d'un médicament contre-indiqué (par exemple -bloquant en collyre)
la négligence depuis quelque jours d'une dégradation de l'état respiratoire nécessitant
une surconsommation de 2-mimétiques.
La présentation clinique (voir tableau 2)
La mesure du débit expiratoire de pointe (DEP) par le débitmètre de pointe (ou peak-
flow-meter) est précieuse pour quantifier l'obstruction bronchique
Un DEP infaisable ou inférieur à 150 l/min (ou inférieur à 50 % des valeurs
habituellement mesurées chez le patient) après prise d'un 2-mimétiques en spray est
un critère de gravité.
VIII.4.1.2 Traitement en urgence :
25/30
VIII.4.1.2.1 2-mimétiques à courte durée d’action
doivent être utilisées en 1ère
ligne
supériorité de la voir aérosol par rapport à la voie IV, en terme de rapport efficacité/tolérance,
dans le traitement initial
administrés soit en spray (dans ce cas idéalement administrés au moyen d'une
chambre d'inhalation), soit en inhalateur à poudre sèche,
posologie recommandée : 2 à 8 bouffées
à renouveler toutes les 20 minutes jusqu’à amélioration clinique
administrés en nébulisation (en milieu médicalisé : SAMU ou hôpital)
la nébulisation peut être utilisée même en cas d’obstruction bronchique majeure ou
de troubles de conscience débutants
nébulisés dans un masque spécifique
avec un débit de 6 à 8 L/min d’oxygène
à la posologie d’attaque de: 5 mg administrés sur une durée de 10 à 15 min
répétés toutes les 20 min durant la 1ère
heure.
suivis d’une nébulisation de 5 mg toutes les 3 h
En cas d'inefficacité du traitement inhalé, recours à la voie injectable
à domicile : injection sous cutanée de 0,5 mg de terbutaline (1 ampoule)
en milieu médicalisé (SAMU ou hôpital) : à la seringue électrique à posologie
progressivement croissante, en débutant à 0,25-0,5 mg/h (salbutamol)
VIII.4.1.2.2 oxygénothérapie
rarement réalisable au domicile
peut être utilisée sans danger
même en l'absence de gazométrie (l’aggravation potentielle de l’hypercapnie n’est que
théorique)
son indication est formelle dans toute crise sévère (cf tableau 2), lors du transport et dès
l’admission hospitalière
débit ≥ 6-8 L/min avec suivi de la SpO2
l’hypoxémie est liée à une inhomogénéité du rapport VA/Q
celle ci étant aggravée par l’utilisation des 2-mimétiques qui vont lever la
vasoconstriction hypoxémique.
l’hypoxémie est corrigée sans difficulté par un enrichissement en O2 du gaz inspiré.
Un monitorage de la SpO2 est indispensable, tant que persistent les signes de gravité
VIII.4.1.2.2 corticoïdes
agissent sur l'inflammation bronchique
26/30
leur délai d'action est d’au moins 4 heures
à utiliser systématiquement dès le stade de crise d’asthme modérée (cf tableau 2)
permettent d'éviter une rechute précoce de la crise.
prednisolone ou de prednisone
1 mg/kg/jour chez l’adulte et 2mg/kg/jour chez l’enfant
en une prise
pour une durée de 5 à 7 jours
per os (la voie parentérale n’a pas de supériorité par rapport à la voie orale)
Figure 4 : Algorithme de la prise en charge initiale d’une crise (exacerbation) d’asthme (àdomicile ou aux urgences).
Crise d’asthmelégère
Crise d’asthmemodérée
Crise d’asthmesévère
EVALUATION DE LA CRISEFacteurs de risque (ATCDs)
Clinique + DEP + SpO2
commencer le traitement à domicile2-mimétiques
fortes doses
2-mimétiques
2 à 8 bouffées
(chambred’inhalation)
2-mimétiques
fortes doses
chambred’inhalation
(n ≥ 3 en 1 h)
corticothérapieorale
2
CoH1
Transport médicalisé
Oxygénothérapie
-mimétiques nébulisés5 mg
toutes les 20 minutes(n ≥ 3) ou en continu
Hospitalisation
Réévaluation à
rticothérapie orale ou IV
27/30
VIII.4.1.2.3 les autres thérapeutiques de l’urgence :
Les anti-cholinergiques
ne sont pas recommandés de façon systématique.
peuvent apporter un bénéfice en cas de crise sévère
en association avec les 2-mimétiques en nébulisation
Les antibiotiques
n’ont pas d’indication dans la crise d’asthme aigu en 1ère
intention
sauf si contexte clinique évocateur d’une infection respiratoire associée
L'adrénaline a une seule indication : la crise d’asthme avec choc anaphylactique.
Le sulfate de magnésium
administré par voie intraveineuse sur 20 minutes
a été proposé dans les crises graves en plus des thérapeutiques habituelles.
VIII.4.1.2.3 les traitements non recommandés :
les 2-mimétiques à longue durée d’action n’ont pas de place dans la crise.
la théophylline (rapport bénef/risque défavorable)
une réhydratation (remplissage) agressive
les sédatifs (dépression respiratoire)
une kinésithérapie directive (inutilement stressante)
des mucolytiques ( toux et le bronchospasme)
VIII.4.1.3 Réévaluation
Les formes sévères d'emblée nécessitent une hospitalisation rapide (figure 4)
Dans les autres cas, l'efficacité du traitement de 1ère
ligne doit être rapidement réévaluée avant de
décider du maintien à domicile du malade.
L'amélioration sera appréciée sur des paramètres essentiellement cliniques les mêmes que
lors de l'examen initial.
mise en jeu des muscles respiratoires accessoires
fréquence respiratoire
fréquence. cardiaque
auscultation
débit expiratoire de pointe (DEP)
SpO2 si disponible
Si une hospitalisation est nécessaire, elle doit toujours se faire par un moyen de transport
médicalisé afin qu'il n'y ait pas de rupture dans la chaîne des soins.
28/30
Toute crise sévère (cf tableau 2), même si elle n’a pas nécessité d’hospitalisation doit être suivie
d'une corticothérapie par voie orale de 5 à 7 jours (1 mg/kg/j de prednisone ou de prednisolone en
une prise) afin d'éviter une rechute précoce.
La surveillance régulière du DEP permet alors de vérifier le retour aux valeurs optimales
antérieures. A distance, il sera nécessaire de refaire le point de la maladie et éventuellement de
reconsidérer le traitement de fond.
IX. EDUCATION THERAPEUTIQUE DANS L’ASTHME
Les recommandations élaborées par l’ANAES ont souligné son intérêt dans la prise en charge de
l’asthme de l’adulte et de l’adolescent.
L’éducation thérapeutique a une efficacité démontrée sur plusieurs critères d’évaluation du
contrôle de l’asthme
les hospitalisations
le recours aux soins d’urgence
et les consultations non programmées.
Elles ont également rappelé le rôle de l’éducation thérapeutique dans le renforcement de
l’observance.
La démarche éducative est un processus complet, personnalisé et continu qui comprend quatre
étapes :
1. le diagnostic éducatif qui repose sur un entretien individuel complet et structuré au cours
duquel les soignants recueillent les informations nécessaires à concevoir un programme
adapté. Ces informations concernent aussi bien la personnalité du patient (psychologie,
potentialités d’apprentissage) et ses conditions de vie (contexte socioprofessionnel, vie
quotidienne et projets de vie) que les caractéristiques de sa maladie et de ses traitements.
2. le contrat éducatif qui est la définition avec le patient des compétences qu’il doit acquérir dans
le but de parvenir à mieux gérer sa maladie et à adapter son traitement en particulier en cas
de crise
3. la mise en place d’activités éducatives structurées réparties dans le temps et privilégiant des
méthodes pédagogiques interactives afin de faciliter l’acquisition des compétences
prédéfinies.
4. l’évaluation des compétences acquises qui permet de réajuster le programme et d’amener le
patient vers des acquis de plus en plus complexes.:
le diagnostic éducatif
le contrat d’éducation qui permet, en partenariat avec le patient, de hiérarchiser les
objectifs à atteindre
29/30
la mise en oeuvre de la démarche à partir d’activités éducatives structurées et
l’évaluation des acquis du patient.
La démarche éducative est un processus continu qui doit être régulièrement réactualisé en
fonction de la progression du patient ou de la survenue d’incidents (exacerbations,
hospitalisations…).
Selon les recommandations de l’ANAES, le contenu d’un programme éducatif pour un adulte
asthmatique doit lui permettre d’acquérir les compétences suivantes :
être capable d’évaluer son asthme
comprendre sa maladie
exprimer ses représentations et son vécu de la maladie
connaître les signes précurseurs de la crise
savoir mesurer son DEP.
Concernant son traitement, l’asthmatique doit
en connaître les mécanismes d’action
faire la différence entre traitement de fond et traitement de crise
maîtriser les techniques de prise des médicaments inhalés.
être capable d’interpréter les valeurs du DEP et les symptômes ressentis afin de
favoriser l’autogestion de son traitement, le patient doit.
Concernant son environnement, l’asthmatique doit
savoir contrôler son environnement en repérant et en évitant les facteurs déclenchants
des crises,
moduler son activité physique en fonction de la pollution.
La pratique régulière de l’exercice physique, en fonction de sa tolérance à l’effort et l’arrêt du
tabac doivent aussi être appliqué.
Pour atteindre ces objectifs, les méthodes éducatives doivent privilégier l’interactivité. Le
programme doit contenir :
contenir des éléments d’information
contenir l’apprentissage à l’auto-gestion de la maladie
contenir la définition d’un plan d’action écrit (conduite à tenir en cas de crise)
le plus simple possible (de 2 à 4 composantes)
basé sur les symptômes ou sur le DEP (valeurs personnelles, surtout pour les
asthmatiques qui perçoivent mal leur obstruction bronchique)
30/30
doit aussi s’adresser à l’entourage du patient
L’approche éducative doit être interdisciplinaire et interprofessionnelle et s’inscrire dans la durée.
Si le maintien des acquis est favorisé par un suivi médical régulier, il est incontestablement
renforcé par un contact éducatif régulier.
L’acte éducatif reste en général un processus long et évolutif difficile à dispenser dans le cadre
d’une consultation médicale classique (encore que celle ci puisse être utilisée pour vérifier
l’acquisition de certaines compétences gestuelles ou intellectuelles). Ceci explique le
développement en France d’expériences spécifiques comme les centres d’éducation respiratoire
et les écoles de l’asthme ou la mise en place de réseaux de professionnels de santé sur cette
thématique. Néanmoins, dans l’avenir le développement de l’éducation de l’asthmatique à grande
échelle ne paraît possible que par une large diffusion des recommandations, par l’intégration de
ce concept à la formation initiale et continue des professionnels de santé et par une véritable
reconnaissance institutionnelle de l’acte éducatif.
X CONCLUSION
Avec les thérapeutiques actuelles, il est possible d’obtenir, dans la grande majorité des
cas, un contrôle de la maladie asthmatique permettant au patient de mener une vie normale. Cette
prescription médicamenteuse doit s’inscrire dans une prise en charge globale comportant
notamment une éducation du patient à la connaissance de sa maladie, des facteurs pouvant
l’aggraver et des principaux médicaments utilisés.