GENERALITE SUR LES FRACTURES DES MEMBRES
I. Recherche de fractures
A. Circonstances étiologiques
On va rechercher la circonstance du traumatisme :
AVP, polytraumatisme Ecrasement, énergie du traumatisme (tombe de sa hauteur, ou accident de moto, …) Chute d'un lieu élevé (échafaudage) Notion de malaise
On recherche le terrain de la fracture :
Fractures de l'enfant (consolide plus vite mais présente de possibles troubles de croissance) Fractures de la personne âgée (pronostic vital parfois engagé)
B. Mécanisme des fractures
Il existe deux grands types de traumatisme
Les traumatismes à choc direct (coup de batte de baseball sur l'avant bras) On aura des fractures transversales, comminutives Mais aussi des contusions, des lésions des parties molles
Les traumatismes indirects qui sont de 3 types En torsion. Exemple : La fracture spiroïde. En compression. Exemple : Chute d'un lieu élevé sur les talons : fracture du rachis. Par élongation : Fracture par arrachement d'une insertion tendineuse ligamentaire
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C. Signes recherchés
1. Signes fonctionnels
Ce sont les signes transmis par le patient.
La douleur est constante depuis le traumatisme et réveillée par la mobilisation.
On a une impotence fonctionnelle plus ou moins complète.
2. Signes physiques
Ce sont les signes retrouvés sur le patient, à l'inspection (regarder sans toucher) ou à la palpation.
On aura :
La (les) déformation(s) qui peuvent être due(s) à la fracture elle-même ou à d'autres choses (hématomes, …)
Un œdème Une ecchymose (sang qui s'insinue dans les tissus sans se collecter = bleu), un hématome
(collection de sang), une hémarthrose.
Une palpation douloureuse du foyer
Une mobilité anormale ou/et des craquements à la mobilisation du foyer
Le piège est la fracture engrenée où les deux fragments s'impactent l'un dans l'autre, on aura donc peu de malformations. On n'aura pas de craquement quand on mobilise les os. Ces fractures siègent surtout au niveau des épiphyses ou des métaphyses là où l'os spongieux est plus malléable, rarement au niveau des diaphyses.
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D. Examens paracliniques
1. La radiographie standard
On réalise un bilan radiographique standard avec au moins deux incidences orthogonales (coronale et profil). Ces deux incidences peuvent être complétées par des clichées de 3/4.
Ces clichés doivent toujours comprendre les articulations sus et sous jacentes pour une fracture diaphysaire.
Ici, on a une fracture diaphysaire mais on a aussi une fracture du col du fémur ! D'où l'intérêt d'avoir les articulations sus et sous-jacentes dans les fractures diaphysaires.
Sur une radiographie on ne regarde pas que l'os mais aussi les tissus mous. Ici, on a une hémarthrose qui peut indiquer une fracture.
On peut avoir une entrée d'air dans une articulation par appel d'air. En effet, la pression dans une articulation synoviale est négative par rapport à la pression de l'air ambiant.
2. Le scanner
On peut aussi réaliser un bilan scanographique 2D voire 3D. Le scanner est intéressant pour les fractures articulaires ou certains os comme le calcaneus, le rachis.
Scanner 2D
Il permet de préciser la fracture Permet de mettre en évidence cette luxation
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II. Caractérisation de la fracture
Il faut pouvoir préciser plusieurs éléments qui seront nécessaires à la bonne prise en charge de la fracture.
A. Le siège
On va dire quel est l'os concerné et la localisation de la fracture :
Diaphyse Métaphyse Epiphyse qui peut être
Articulaire si le trait de fracture rejoint l'interligne articulaire Extra-articulaire si le trait de fracture reste à distance de l'interligne articulaire
Apophysaire (épicondyle médial, latéral, …)
B. Le type de trait
On va dire si c'est une fracture simple avec un trait unique, transversale, horizontal, oblique, spiroïde, …
Si c'est une fracture plurifragmentaire, on aura :
Les fractures tri-fragmentaires (aile de papillon) Les fractures bifocales : 2 fractures sur le même os (Exemple : col et diaphyse fémorale) Les fractures plurifragmentaires Les fractures comminutives
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Dans ce type de fracture, les deux traits de fractures, spiroïdes, ne sont pas au même niveau.
La fracture est articulaire, le trait traverse l'articulation. La fracture est articulaire, le trait traverse l'articulation.
C. Déplacement des fragments
1. Fracture diaphysaire
Il existe 4 types d'informations à renseigner :
L'angulation de la fracture (on prend comme référence le fragment distal par rapport au fragment proximal) Dans le plan frontal : varus (vers l'intérieur), valgus (vers l'extérieur), Dans le plan sagittal : flessum (vers l'avant), recurvatum (vers l'arrière)
La translation de la fracture, c'est-à-dire le déplacement du fragment distal par rapport au fragment proximal Dans le plan frontal : médiale ou latérale Dans le plan sagittal : antérieure ou postérieure
Le chevauchement de la fracture, c'est l'ascension d'un fragment par rapport à l'autre
Le décalage de l'os, c'est la rotation selon l'axe longitudinal de l'os
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1 : Déplacement médial 2 : Déplacement latéral 3 : Fracture en valgus 4 : Fracture en varus
2. Fracture articulaire
On recherche un tassement du tissu osseux avec un affaissement des surfaces articulaires correspondantes.
On recherche aussi une séparation d'une partie de l'épiphyse articulaire par un trait vertical ou oblique.
La tête fémorale s'est brisée en deux morceaux
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La particularité de ces fractures est la présence d'une hémarthrose qui peut se constater de façon clinique quand l'articulation est superficielle mais aussi indirectement sur le bilan radiologique.
3. Cas particulier des fractures engrenées
Ce sont des fractures avec tassement de l'os spongieux et impaction des fragments. La conséquence est qu'on aura une stabilité inhabituelle du foyer de fracture. On retrouve ces fractures préférentiellement au niveau du radius distal et du col fémoral.
Le radius regarde en arrière Engrainement de la tête du fémur dans le col
4. Fracture de fatigue
C'est une fracture qui survient sans traumatisme. Elle survient surtout au niveau du pied.
On aura la douleur, parfois l'impotence fonctionnelle, mais la fracture ne sera pas visible en radio. Il faudra reconvoquer le patient 2-3 semaines plus tard et, si il y a toujours une fracture, réaliser une nouvelle radio.
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III. Complication des fractures
A. Complications cutanées
1. Ouverture cutanée
L'ouverture cutanée peut se faire :
De dedans en dehors (A) De dehors en dedans (B)
Parfois, cette ouverture cutanée est secondaire à une nécrose cutanée.
L'ouverture cutanée est une urgence car elle est un risque septique important.
Il existe 3 stades d'ouverture cutanée
STADE 1 STADE 2 STADE 3On a une plaie sans décollement. On peut réaliser une suture sans tension (sans que ça s'ouvre).
Les bords sont excisés, on a une suture simple mais sous tension entraînant un risque d'exposition secondaire.
Perte de substance non suturable.
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2. Complications cutanées
On peut retrouver :
PHLYCTENE ESCARRE NECROSEC'est l'équivalent d'une brûlure au second degré
Elle est souvent liée à une compression prolongée. Exemples : Plâtre qui comprime le
membre Patient incarcéré sous sa
voiture.
On peut avoir une nécrose secondaire sur une zone cutanée contuse initialement.
B. Lésions vasculaires
Pour rechercher une complication vasculaire, il faut rechercher :
Les pouls périphériques (pouls radial, ulnaire, pouls pédieux, tibial postérieur) La coloration cutanée à l'inspection La chaleur cutanée que l'on évaluera avec le dos de la main La recoloration (ou pouls capillaire) au niveau du bout des doigts ou des orteils. Quand on va
appuyer, la peau va devenir blanche et redevenir rouge. Si ce n'est pas le cas, le patient est en ischémie.
Le retour veineux. On vide les veines du dos de la main en les compressant et en poussant le sang de la distalité à la proximité et on regarde si elles se remplissent
Si on a ce type de signes, on réalisera un diagnostic par artériographie (angioscanner, angioIRM).
Les lésions vasculaires possibles sont variables. On peut avoir :
La section de l'artère La compression de l'artère par un os. Lors de la réduction de la fracture, le sang repassera
normalement. La dissection intimale du vaisseau.
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On peut avoir une plaie sèche si la paroi musculaire de l'artère se contracte.
C. Lésions nerveuses
On va rechercher une atteinte sensitive et motrice.
Il existe trois types de lésion :
La neurapraxie. C'est un simple bloc de conduction : le nerf est intact mais le courant ne passe plus. La récupération se fait en quelques heures ou quelques jours.
L'axonotmésis . C'est la rupture intraneurale des axones sans atteintes de la gaine de myéline. Le nerf, au bout d'environ 1 mois, repoussera dans la gaine de myéline et l'atteinte sera finie
La neurotmésis. C'est la section complète d'un nerf.
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Le déficit moteur et sensitif dépendra du territoire du ou des nerf(s) touché(s) et du niveau d'atteinte.
Il faut toujours rechercher une ischémie qui peut donner des signes neurologiques.
Les fibres sensitives sont les plus résistantes.
Exemple : Paralysie du nerf radial au niveau de l'humérus : main en col de signe (déficit de l'extension du poignet et des doigts).
D. Embolie graisseuse
Cela concerne les os de gros volume (humérus, fémur, bassin) qui va envoyer de la graisse dans le sang, ce qui peut entraîner :
Un collapsus cardio-vasculaire (baisse de tension brutale) Une hypoxémie La présence de pétéchies (petites tâches, ne blanchissant pas sous la pression) sur le
corps Un syndrome de confusion mentale Des signes au fond d'œil
E. Syndrome de loge
Les muscles sont inclus dans des loges inextensibles.
Ainsi, quand on a une fracture, on a un œdème. La pression dans les loges va augmenter et donc les éléments dans ces loges (nerfs, muscles) vont souffrir. On aura l'apparition d'un syndrome de loge qu'il faudra diagnostiquer et traiter en urgence car il est la source de séquelles irréversibles.
Les signes cliniques en faveur d'un syndrome de loge sont :
Une douleur qui résiste à tout, notamment à la morphine+++ Une douleur exacerbée par la mise en tension des masses musculaires. +++ Une sensibilité distale anormale (paresthésie). Les pouls distaux sont présents. On a une tension des masses musculaires, un œdème. La mobilité des orteils ou des doigts est diminuée
La conduite à tenir est la prise des pressions intra-tissulaires
On pourra réaliser une aponévrotomie pour libérer les masses musculaires.
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F. Complications thrombo-emboliques
Elles apparaissent souvent au niveau du membre inférieur.
Les signes cliniques en faveur d'une thrombose veineuse profonde sont :
Une douleur à la pression du mollet Un œdème de la cheville Une diminution de la souplesse, du ballottement du mollet Une fièvre (38°), un pouls rapide Une douleur à la dorsiflexion de la cheville (signe de Homans).
La conduite à tenir est de réaliser une écho-doppler
Le caillot peut se compliquer en réalisant une phlébite oblitérante. C'est la Phlegmentia alba dolens.
H. Résumé : Examen clinique à effectuer à l'arrivée aux urgences chez un patient souffrant d'une fracture
Il faut :
Evaluer l'importance du déplacement, l'énergie du choc
Evaluer l'état de la peau : contusions, ecchymoses ou ouverture (en déterminer le type)
Réaliser un examen vasculaire : Pouls artériel, pouls capillaire Chaleur des extrémités Retour veineux
L'examen neurologique Etude de la motricité et de la sensibilité des orteils ou des doigts
Réaliser un examen général Rechercher d'autres traumatismes (fractures, lésions viscérales) Rechercher les signes de choc (secondaire à une hémorragie massive)
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G. Signe des 4 "P"
C'est un petit moyen mnémotechnique pour retenir les étapes importantes de l'examen. On doit vérifier :
Peau Pouls Paralysie Polytraumatisme (ne pas se contenter de la lésion visible mais chercher d'autres atteintes).
V. Anomalies de la consolidation osseuse
A. Rappels : Principales phases de la constitution d'un cal osseux
Au moment de la fracture on a la phase de l'hématome péri-fracturaire qui contient des facteurs de croissances et de l'inflammation. Elle va de J0 à J20.
On a la constitution d'un cal conjonctif de J20 à J30
Ce cal va s'ossifier J30 à J60
On a ensuite une phase de remodelage du cal qui s'adapte aux contraintes auxquelles il est soumis. Ce remodelage est d'autant plus important que le sujet est jeune.
Une fracture épiphysaire consolide en 6 semaines
Une fracture diaphysaire consolide en 3 à 4 mois
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B. Anomalies de consolidation
Quand on n'a pas de consolidation on a une pseudarthrose.
Quand ce cal consolide mal, on a un cal vicieux qui doit être décrit comme une fracture. Il peut être:
Diaphysaire (baïonnette, raccourcissement, angulation, rotation) Epiphysaire. On a une destruction du profil et une désorientation des surfaces articulaires
1. Pseudarthrose
a. Facteurs
Les facteurs qui retardent cette consolidation osseuse sont
L'âge. Plus on est jeune, plus on consolide vite La localisation à la diaphyse, qui est moins vascularisée que l'épiphyse. L'évacuation de l'hématome péri-fracturaire. On va donc retirer les facteurs de croissance
présents dans l'hématome péri-fracturaire L'immobilisation insuffisante du foyer L'interposition musculaire L'infection Le tabagisme
b. Signes cliniques
Les signes cliniques d'une pseudarthrose sont :
Une douleur à la marche Si c'est un os superficiel qui est touché on aura une chaleur locale, une rougeur locale, un
œdème local Une mobilité du foyer à rechercher manuellement (pseudo serrée ou lâche)
c. Signes radiographiques
Les signes radiographiques sont :
Un aspect hypertrophié en "patte d'éléphant". Les deux aspects en contact vont s'élargir On a un trait de fracture plus ou moins large Une prolifération osseuse externe Une prolifération intra-canalaire (rétrécissement)
Une forme atrophique : On a une raréfaction de l'os au niveau du foyer de fracture
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2. Cals vicieux
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C. Autres complications tardives
On peut avoir des nécroses osseuses dues à la section des vaisseaux lors de la fracture. Les os les plus sensibles sont les os scaphoïdes, les os naviculaires, la tête fémorale et la tête humérale (plus rarement).
La nécrose se traduit par un effondrement de l'os spongieux.
On peut avoir des séquelles fonctionnelles (œdème, atrophie musculaire, raideur articulaire, …)
On peut avoir un syndrome douloureux régional complexe de type 2 (algodystrophie)
D. Complications possibles sous plâtre
On peut avoir
Un syndrome des loges Une escarre cutanée Une compression nerveuse (Par exemple : Paralysie du nerf fibulaire au niveau du col de la
fibula) Un déplacement secondaire Des complications thrombo-emboliques (phlébite et embolie pulmonaire).
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