-
10/09/2012 16:19
NOMBRE DE SUJETS SLECTIONNS : 849/849
RECHERCHE :
MODE DE RECHERCHE : TOUS LES TERMES
TYPE DE RECHERCHE : QUESTIONS
ANNE : TOUTES LES ANNEES
SRIE : TOUTES LES SERIES
DESTINATION : TOUTES LES DESTINATIONS
SESSION : TOUTES LES SESSIONS
EXTRACTION : LES 849 SUJETS
==============================
[1] SUJET N 1 - 11PHESIN1 - 2011 - Srie ES - INDE - SESSION NORMALE
Suis-je responsable de ce que je suis ?
L'Etat doit-il viser le bonheur des individus ?
Quelle est la fonction primitive du langage ? C'est d'tablir une communication en vue d'une coopration.
Le langage transmet des ordres ou des avertissements. Il prescrit ou il dcrit. Dans le premier cas, c'est
l'appel l'action immdiate ; dans le second, c 'est le signalement de la chose ou de quelqu'une de ses
proprits, en vue de l'action future. Mais, dans un cas comme dans l'autre, la fonction est industrielle,
commerciale, militaire, toujours sociale. Les choses que le langage dcrit ont t dcoupes dans le rel
par la perception humaine en vue du travail humain. Les proprits qu'il signale sont les appels de la
chose une activit humaine. Le mot sera donc le mme, comme nous le disions, quand la dmarche
suggre sera la mme, et notre esprit attr ibuera des choses diverses la mme proprit, se les
reprsentera de la mme manire, les groupera enfin sous la mme ide, partout o la suggestion du
mme parti tirer, de la mme action faire, suscitera le mme mot. Telles sont les origines du mot et de
l'ide. L'un et l'autre ont sans doute volu. Ils ne sont plus aussi grossirement utili taires. Ils restent
utilitaires cependant.
BERGSON, La Pense et le mouvant
[2] SUJET N 2 - 11PHSCIN1 - 2011 - Srie S - INDE - SESSION NORMALE
Est-il raisonnable de vouloir tout dmontrer ?
-
Rendre les hommes meilleurs, est-ce le but de la politique ?
L'homme est capable de dlibration, et, en vertu de cette facult, il a, entre divers actes possibles, un
choix beaucoup plus tendu que l'animal. Il y a dj l pour lui une libert relative, car il devient
indpendant de la contrainte immdiate des objets prsents, l'action desquels la volont de l'animal est
absolument soumise. L'homme, au contraire, se dtermine indpendamment des objets prsents, d'aprs
des ides, qui sont ses motifs lui. Cette libert relative n'est en ralit pas autre chose que le libre arbitre
tel que l'entendent des personnes instruites, mais peu habitues aller au fond des choses : elles
reconnaissent avec raison dans cette facult un privilge exclusif de l'homme sur les animaux. Mais cette
libert n'est pourtant que relative, parce qu'elle nous soustrait la contrainte des objets prsents, et
comparative, en ce qu'elle nous rend suprieurs aux animaux. Elle ne fait que modifier la manire dont
s'exerce la motivation, mais la ncessit de l'action des motifs n'est nullement suspendue, ni mme
diminue.
SCHOPENHAUER, Essai sur le libre arbitre
[3] SUJET N 3 - 11PHTEIN1 - 2011 - Srie TECHN. - INDE - SESSION NORMALE
Suffit-il d'tre certain pour avoir raison ?
Etre libre, est-ce n'obir qu' soi ?
La sauvagerie, force et puissance de l'homme domin par les passions, (...) peut tre adoucie par l'art,
dans la mesure o celui-ci reprsente l'homme les passions elles-mmes, les instincts et, en gnral,
l'homme tel qu'il est. Et en se bornant drouler le tableau des passions, l'art, alors mme qu'il les flatte,
le fait pour montrer l'homme ce qu'il est, pour l'en rendre conscient. C'est dj en cela que consiste son
action adoucissante, car il met ainsi l'homme en prsence de ses instincts, comme s'ils taient en dehors
de lui, et lui confre de ce fait une certaine libert leur gard. Sous ce rapport, on peut dire de l'art qu'il
est un librateur. Les passions perdent leur force, du fait mme qu'elles sont devenues objets de
reprsentations, objets tout court. L'objectivation des sentiments a justement pour effet de leur enlever
leur intensit et de nous les rendre extrieurs, plus ou moins trangers. Par son passage dans la
reprsentation, le sentiment sort de l'tat de concentration dans lequel il se trouvait en nous et s'offre
notre libre jugement. Il en est des passions comme de la douleur : le premier moyen que la nature met
notre disposition pour obtenir un soulagement d'une douleur qui nous accable, sont les larmes ; pleurer,
c'est dj tre consol. Le soulagement s'accentue ensuite au cours de conversations avec des amis, et
le besoin d'tre soulag et consol peut nous pousser jusqu' composer des posies. C' est ainsi que ds
qu'un homme qui se trouve plong dans la douleur et absorb par elle est mme d'extrioriser cette
douleur, il s'en sent soulag, et ce qui le soulage encore davantage, c'est son expression en paroles, en
-
chants, en sons et en figures. Ce dernier moyen est encore plus efficace.
HEGEL
QUESTIONS :
1 Dgagez la thse de ce texte et montrez comment elle est tablie.
2 En vous appuyant sur des exemples que vous analyserez, expliquez :
a) "l'art, alors mme qu'il les flatte, le fait pour montrer l'homme ce qu'il est" ;
b) "L'objectivation des sentiments a justement pour effe t de leur enlever leur intensit et de nous les
rendre extrieurs" ;
c) "ce qui le soulage encore davantage, c'est son expression en paroles, en chants, en sons et e n figures".
3 L'art nous libre-t-il de la violence des sentiments ?
[4] SUJET N 4 - 11PHSCAN1 - 2011 - Srie S - AMERIQUE DU NORD - SESSION NORMALE
L'hypothse de l'inconscient exclut-elle toute connaissance de soi ?
Le bonheur est-il un droit ?
Nous sommes cultivs au plus haut degr par l'art et par la science. Nous sommes civiliss, jusqu' en
tre accabls, par la politesse et les biensances sociales de toute sorte. Mais nous sommes encore loin
de pouvoir nous tenir pour dj moraliss. Si en effet l'ide de la moralit appartient bien la culture, la
mise en pratique de cette ide qui n'aboutit qu' une apparence de moralit dans l'amour de l'honneur et
la biensance extrieure, constitue simplement la civilisation. Or tant que les Etats je ttent toutes leurs
forces dans leurs projets d'extension vains et violents, tant qu'ils entravent ainsi sans cesse le lent effort
de formation intrieure du mode de penser de leurs citoyens, et qu'ils leur retirent ainsi toute aide en vue
de cette fin, une fin semblable ne peut tre atteinte, car sa ralisation exige que, par un long travail
intrieur, chaque communaut forme ses citoyens. Or, tout bien qui n'est pas greff sur une intention
moralement bonne n'est qu'apparence criante et brillante misre. C'est dans cet tat que l'espce
humaine restera jusqu' ce qu'elle s'arrache par son travail () l'tat chaotique de ses relations
internationales.
KANT, Ide d'une histoire universelle au point de vue cosmopolitique
[5] SUJET N 5 - 11PHSCLI1 - 2011 - Srie S - LIBAN - SESSION NORMALE
-
La connaissance scientifique ne repose-t-elle que sur l'observation ?
Pour gouverner, faut-il ncessairement sacrifier les intrts particuliers ?
-
NIETZSCHE
(1) un rayon de la grce : une intervention divine.
(2) Beethoven : compositeur allemand (1770-1827).
QUESTIONS :
1 Formulez la thse de ce texte et montrez comment elle est tablie.
2 Expliquez :
a) "l'imagination du bon artiste (...) ne cesse pas de produire, du bon, du mdiocre et du mauvais, mais
son jugement, extrmement aiguis et exerc, rejette, choisit, combine" ;
b) "c'est un bas niveau que celui de l'improvisation artistique au regard de l'ide choisie avec peine et
srieux pour une oeuvre".
3 La cration artistique repose-t-elle sur le jugement plutt que sur l'inspiration ?
[7] SUJET N 7 - 11PHLIME1 - 2011 - Srie L - METROPOLE - SESSION NORMALE
Peut-on prouver une hypothse scientifique ?
L'homme est-il condamn se faire des illusions sur lui-mme ?
Nous disons bonnes les vertus d'un homme, non pas cause des rsultats qu'elles peuvent avoir pour lui,
mais cause des rsultats qu'elles peuvent avoir pour nous et pour la socit : dans l'loge de la vertu on
n'a jamais t bien "dsintress", on n'a jamais t bien "altruiste" ! On aurait remarqu, sans cela, que
les vertus (comme l'application, l'obissance, la chastet, la pit, la justice) sont gnralement nuisibles
celui qui les possde, parce que ce sont des instincts qui rgnent en lui trop violemment, trop
avidement, et ne veulent aucun prix se laisser contrebalancer raisonnablement par les autres. Quand on
possde une vertu, une vraie vertu, une vertu complte (non une petite tendance l'avoir), on est victime
de cette vertu ! Et c'est prcisment pourquoi le voisin en fait la louange ! On loue l'homme zl bien que
son zle gte sa vue, qu'il use la spontanit e t la fracheur de son esprit : on vante, on plaint le jeune
homme qui s'est "tu la tche " parce qu'on pense : "Pour l'ensemble social, perdre la meilleure unit
n'est encore qu'un petit sacrifice ! Il est fcheux que ce sacrifice soit ncessaire ! Mais il serait bien plus
fcheux que l'individu penst diffremment, qu'il attacht plus d'importance se co nserver et se
dvelopper qu' travailler au service de tous !" On ne plaint donc pas ce jeune homme cause de
lui-mme, mais parce que sa mort a fait perdre la socit un instrument soumis, sans gards pour
-
lui-mme, bref un "brave homme", comme on dit.
NIETZSCHE, Le gai Savoir
[8] SUJET N 8 - 11PHSCME1 - 2011 - Srie S - METROPOLE - SESSION NORMALE
La culture dnature-t-elle l'homme ?
Peut-on avoir raison contre les faits ?
Chaque degr de bonne fortune qui nous lve dans le monde nous loigne davantage de la vrit, parce
qu'on apprhende plus de blesser ceux dont l'affection est plus utile et l'aversion plus dangereuse. Un
prince sera la fable de toute l'Europe, et lui seul n'en saura rien. Je ne m'en tonne pas : dire la vrit est
utile celui qui on la dit, mais dsavantageux ceux qui la disent, parce qu'ils se font har. Or, ceux qui
vivent avec les princes aiment mieux leurs intrts que celui du prince qu'ils servent ; et ainsi, ils n'ont
garde de lui procurer un avantage en se nuisant eux-mmes.
Ce malheur est sans doute plus grand et plus ordinaire dans les plus grandes fortunes ; mais les moindres
n'en sont pas exemptes, parce qu'il y a toujours quelque intrt se faire aimer des hommes. Ainsi la vie
humaine n'est qu'une illusion perptuelle ; on ne fait que s'entre-tromper et s'entre-flatter. Personne ne
parle de nous en notre prsence comme il en parle en notre absence. L'union qui est entre les hommes
n'est fonde que sur cette mutuelle tromperie ; et peu d'amitis subsisteraient, si chacun savait ce que son
ami dit de lui lorsqu'il n'y est pas, quoiqu'il en parle alors sincrement et sans passion.
L'homme n'est donc que dguisement, que mensonge et hypocrisie, et en soi -mme et l'gard des
autres. Il ne veut donc pas qu'on lui dise la vrit. Il vite de la dire aux autres ; et toutes ces dispositions,
si loignes de la justice et de la raison, ont une racine naturelle dans son coeur.
PASCAL, Penses
[9] SUJET N 9 - 11PHESME1 - 2011 - Srie ES - METROPOLE - SESSION NORMALE
La libert est-elle menace par l'galit ?
L'art est-il moins ncessaire que la science ?
Si c'est l'intrt et un vil calcul qui me rendent gnreux, si je ne suis jamais serviable que pour obtenir en
change un service, je ne ferai pas de bien celui qui part pour des pays situs sous d'autres cieux,
-
loigns du mien, qui s'absente pour toujours ; je ne donnerai pas celui dont la sant est compromise au
point qu'il ne lui reste aucun espoir de gurison ; je ne donnerai pas, si moi-mme je sens dcliner mes
forces, car je n'ai plus le temps de rentrer dans mes avances. Et pourtant (ceci pour te prouver que la
bienfaisance est une pratique dsirable en soi) l'tranger qui tout l'heure s'en est venu atterrir dans no tre
port et qui doit tout de suite repartir reoit notre assistance ; l'inconnu qui a fait naufrage nous donnons,
pour qu'il soit rapatri, un navire tout quip. Il part, connaissant peine l'auteur de son salut ; comme il
ne doit jamais plus revenir porte de nos regards il transfre sa dette aux dieux mmes et il leur
demande dans sa prire de reconnatre sa place notre bienfait ; en attendant nous trouvons du charme
au sentiment d'avoir fait un peu de bien dont nous ne recueillerons pas le fruit. Et lorsque nous sommes
arrivs au terme de la vie, que nous rglons nos dispositions testamentaires, n'est-il pas vrai que nous
rpartissons des bienfaits dont il ne nous reviendra aucun profit ? Combien d'heures l'on y passe ! Que de
temps on discute, seul avec soi-mme, pour savoir combien donner et qui ! Qu'importe, en vrit, de
savoir qui l'on veut donner puisqu'il ne nous en reviendra rien en aucun cas ? Pourtant, jamais nous ne
donnons plus mticuleusement ; jamais nos choix ne sont soumis un contrle plus rigoureux qu' l'heure
o, l'intrt n'existant plus, seule l'ide du bien se dresse devant notre regard.
SENEQUE, Les Bienfaits
[10] SUJET N 10 - 11PHTEME1 - 2011 - Srie TECHN. - METROPOLE - SESSION NORMALE
L'art est-il un moyen d'accder la vrit ?
Est-ce la loi qui dfinit ce qui est juste ?
Notre conscience nous avertit (...) que nous sommes des tres libres. Avant d'accomplir une action, quelle
qu'elle soit, nous nous disons que nous pourrions nous en abstenir. Nous concevons (...) divers motifs et
par consquent diverses actions possibles, et aprs avoir agi, nous nous disons encore que, si nous
avions voulu, nous aurions pu autrement faire. - Sinon, comment s'expliquerait le regret d'une action
accomplie ? Regrette-t-on ce qui ne pouvait pas tre autrement qu'il n'a t ? Ne nous disons -nous pas
quelquefois : "Si j'avais su, j'aurais autrement ag i ; j'ai eu tort." On ne s'attaque ainsi rtrospectivement
qu' des actes contingents ou qui paraissent l'tre. Le remords ne s'expliquerait pas plus que le regret si
nous n'tions pas libres ; car comment prouver de la douleur pour une action accomplie e t qui ne pouvait
pas ne pas s'accomplir ? - Donc, un fait est indiscutable, c'est que no tre conscience tmoigne de notre
libert.
BERGSON
QUESTIONS :
-
1 Dgagez la thse de ce texte et montrez comment elle est tablie.
2
a) Analysez ce que nous disons avant d'accomplir une action e t aprs avoir agi. En quoi ce tmoignage de
notre conscience montre-t-il que "nous sommes des tres libres" ?
b) en prenant appui sur un exemple, expliquez : "On ne s'attaque ainsi rtrospectivement qu' des actes
contingents ou qui paraissent l'tre" ;
c) expliquez : "Le remords ne s'expliquerait pas plus que le regret si nous n'tions pas libres".
3. Notre conscience tmoigne-t-elle de notre libert ?
[11] SUJET N 11 - 11PHTEME3 - 2011 - Srie TECHN. - METROPOLE - SESSION REMPL.
Le bonheur est-il inaccessible ?
La raison s'oppose-t-elle toute forme de croyance ?
L'galit est le fondement d'une bonne rpublique. Une rpublique est heureuse lorsque les citoyens
obissent aux magistrats (1), et que les magistrats respectent les lois. Or elle ne peut s'assurer de cette
obissance et de ce respect, qu'autant que par sa constitution elle confond (2) l'intrt particulier avec le
bien gnral ; et elle ne confond l'un avec l'autre, qu' proportion qu'elle maintient une plus grande galit
entre ses membres.
Je ne veux pas parler d'une galit de fortune , car le cours des choses la dtruirait d'une gnration
l'autre. Je n'entends pas non plus que tous les citoyens aient la mme part aux honneurs ; puisque cela
serait contradictoire l'ordre de la socit, qui demande que les uns gouvernent et que les autres soient
gouverns. Mais j'entends que tous les citoyens, galement protgs par les lois, soient galement
assurs de ce qu'ils ont chacun en propre, et qu'ils aient ga lement la libert d'en jouir et d'en disposer.
De l il rsulte qu'aucun ne pourra nuire, et qu'on ne pourra nuire aucun.
CONDILLAC
(1) magistrats (ici) : gouvernants.
(2) confondre (ici) : runir pour ne former qu'un seul tout.
QUESTIONS :
-
1 Dgagez la thse de ce texte et montrez comment elle est tablie.
2
a) Pourquoi faut-il que "les citoyens obissent aux magistrats, et que les magistrats respectent les lois"
pour qu'une rpublique soit "heureuse" ?
b) Pourquoi "l'intrt particulier" et "le bien gnral" doivent-ils former un seul tout ?
c) Condillac distingue entre trois sortes d'galit. Lesquelles ? Pourquoi seule la dernire est-elle
indispensable une "bonne rpublique" ?
3 L'galit est-elle le fondement d'une bonne rpublique ?
[12] SUJET N 12 - 11PHLIAG3 - 2011 - Srie L - ANTILLES - SESSION REMPL.
Sommes-nous tels que nous croyons tre ?
Une dmonstration peut-elle mettre fin au doute ?
Est-il plus avantageux d'tre gouvern par l'homme le meilleur ou par les lois les meilleures ?
Ceux qui sont d'avis qu'il est avantageux d'tre gouvern par un roi pensent que les lois ne peuvent
noncer que le gnral sans pouvoir rien prescrire concernant les situations particulires. Ainsi, dans
n'importe quel art, il est stupide de se d iriger seulement d'aprs des rgles crites ; et, en Egypte, il est
permis au bout de quatre jours aux mdecins de s'carter des traitements prescrits par les manuels, mais
s'ils le font avant, c'est leurs risques et prils. Il est donc manifeste que la constitution qui se conforme
des lois crites n'est pas, pour la mme raison, la meilleure.
Pourtant, il faut que cette rgle universelle existe pour les gouvernants, et celui qui n'est, d'une manire
gnrale, attache aucune passion, est meilleur que celui qui en possde naturellement. Or, la loi n'en a
pas, alors qu'il est ncessaire que toute me humaine en renferme. Mais sans doute semblerait-il, pour
rpliquer cela, qu'une personne dlibrera mieux propos des cas particuliers.
Qu'il soit donc ncessaire que cet homme (1) soit lgislateur et qu'il y ait des lois, c'est vident, mais
elles ne doivent pas tre souveraines l o elles dvient de ce qui est bon, alors qu'elles doivent tre
souveraines dans les autres domaines.
ARISTOTE, Les Politiques
[13] SUJET N 13 - 11PHESAG3 - 2011 - Srie ES - ANTILLES - SESSION REMPL.
-
Le dsir suppose-t-il autrui ?
La politique vise-t-elle raliser une socit parfaite ?
La dcouverte de la vrit est tout la fois difficile en un sens ; et, en un autre sens, elle est facile. Ce qui
prouve cette double assertion, c'est que personne ne peut atteindre compltement le vrai et que personne
non plus n'y choue compltement, mais que chacun apporte quelque chose l'explication de la nature.
Individuellement, ou l'on n'y contribue en rien, ou l'on n'y contribue que pour peu de chose ; mais de tous
les efforts runis, il ne laisse pas que de sortir un rsultat considrable. Si donc il nous est permis de dire
ici, comme dans le proverbe : "Quel archer serait assez maladroit pour ne pas mettre sa flche dans une
porte ?" ce point de vue, la recherche de la vrit n'offre point de difficult srieuse ; mais, d'autre part,
ce qui atteste combien cette recherche est difficile, c'est l'impossibilit absolue o nous sommes, tout en
connaissant un peu l'ensemble des choses, d'en connatre galement bien le dtail. Peut- tre aussi, la
difficult se prsentant sous deux faces, il se peut fort bien que la cause de notre embarras ne soit pas
dans les choses elles-mmes, mais qu'elle soit en nous. De mme que les oiseaux de nuit n'ont pas les
yeux faits pour supporter l'clat du jour, de mme l'intelligence de notre me prouve un pareil
blouissement devant les phnomnes qui sont par leur nature les plus splendides entre tous.
ARISTOTE, Mtaphysique
[14] SUJET N 14 - 11PHSCAG3 - 2011 - Srie S - ANTILLES - SESSION REMPL.
La culture nous unit-elle ?
Le sujet peut-il se comprendre en dehors de la socit laquelle il appartient ?
Quand nous supposerions l'homme matre absolu de son esprit et de ses ides, il serait encore
ncessairement sujet l'erreur par sa nature. Car l'esprit de l'homme est limit, et tout esprit limit est par
sa nature sujet l'erreur. La raison en est que les moindres choses ont entre elles une infinit de rapports,
et qu'il faut un esprit infini pour les comprendre. Ainsi, un esprit limit ne pouvant embrasser ni
comprendre tous ces rapports, quelque effort qu'il fasse, il est port croire que ceux qu'il n'aperoit pas
n'existent point, principalement lorsqu'il ne fait pas attention la faiblesse et la limitation de son esprit,
ce qui lui est fort ordinaire. Ainsi, la limita tion de l'esprit toute seule emporte avec soi (1) la capacit de
tomber dans l'erreur.
Toutefois si les hommes, dans l'tat mme o ils sont de faiblesse et de corruption, faisaient toujours bon
usage de leur libert, ils ne se tromperaient jamais. Et c'est pour cela que tout homme qui tombe dans
-
l'erreur est blm avec justice et mrite mme d'tre puni : car il suffit, pour ne point se tromper, de ne
juger que de ce qu'on voit, et de ne faire jamais des jugements entiers que des choses que l'on est assur
d'avoir examines dans toutes leurs parties : ce que les hommes peuvent faire. Mais ils aiment mieux
s'assujettir l'erreur que de s'assujettir la rgle de la vrit : ils veulent dcider sans peine et sans
examen. Ainsi, il ne faut pas s'tonner s'ils tombent dans un nombre infini d'erreurs et s'ils font souvent
des jugements assez incertains.
MALEBRANCHE, Recherche de la vrit
[15] SUJET N 15 - 11PHSCME3 - 2011 - Srie S - METROPOLE - SESSION REMPL.
L'oeuvre d'art ne s'adresse-t-elle qu' nos sens ?
Peut-on tre en conflit avec soi-mme ?
La plus ancienne de toutes les socits et la seule naturelle est celle de la famille. Encore les enfants ne
restent-ils l is au pre qu'aussi longtemps qu'ils ont besoin de lui pour se conserver. Sitt que ce besoin
cesse, le lien naturel se dissout. Les enfants, exempts de l'obissance qu'ils devaient au pre, le pre,
exempt des soins qu'il devait aux enfants , rentrent tous galement dans l'indpendance. S'ils continuent
de rester unis, ce n'est plus naturellement, c'est volontairement, e t la famille elle -mme ne se maintient
que par convention.
Cette libert commune est une consquence de la nature de l'homme. Sa premire loi est de veiller sa
propre conservation, ses premiers soins sont ceux qu'il se doit lui-mme, et, sitt qu'il est en ge de
raison, lui seul tant juge des moyens propres se conserver devient par l son propre matre.
La famille est donc, si l'on veut, le premier modle des socits politiques ; le chef est l'image du pre, le
peuple est l'image des enfants, et tous tant ns gaux et libres n'alinent leur libert que pour leur util it.
Toute la diffrence est que, dans la famille, l'amour du pre pour ses enfants le paye des soins qu'il leur
rend, et que, dans l'Eta t, le plaisir de commander supple cet amour que le chef n'a pas pour ses
peuples.
ROUSSEAU, Contrat social
[16] SUJET N 16 - 11PHESAG1 - 2011 - Srie ES - ANTILLES - SESSION NORMALE
Le langage n'exprime-t-il que ce que l'on veut communiquer ?
-
Faut-il apprendre se connatre soi-mme ?
Les hommes sont naturellement gostes ou dous seulement d'une gnrosit limite ; aussi ne sont-ils
pas aisment amens accomplir une action dans l'intrt d'trangers, sauf s'ils envisagent en retour un
avantage qu'ils n'auraient aucun espoir d'obtenir autrement que par cette action. Or, comme il arrive
frquemment que ces actions rciproques ne peuvent se terminer au mme instant, il est ncessaire que
l'une des parties se contente de demeurer dans l'incertitude et qu'elle dpende de la gratitude de l'autre
pour recevoir de la bienveillance en retour. Mais il y a tant de corruption parmi les hommes que,
gnralement parlant, il n'y a l qu'une faible garantie ; comme le bienfaiteur, suppose -t-on ici, accorde
ses faveurs dans une vue intresse, cette circonstance supprime l'obligation et tablit un exemple
d'gosme, et c'est la cause vritable de l'ingratitude. Si donc nous devions suivre le cours naturel de nos
passions et inclinations, nous n'accomplirions que peu d'actions l'avantage des autres sous l'influence
de vues dsintresses parce que notre bienveillance et notre affection sont, par nature, trs limites ;
nous n'en accomplirions que peu de ce genre sans gard notre intrt, parce que nous ne pouvons pas
dpendre de leur gratitude. Voici donc que se perd en quelque manire le commerce de bons offices entre
les hommes et que chacun se trouve rduit sa propre habilet et son propre travail pour son bien-tre
et sa subsistance.
HUME, Trait de la nature humaine
[17] SUJET N 17 - 11PHLIAG1 - 2011 - Srie L - ANTILLES - SESSION NORMALE
Faut-il chercher des vrits hors de la science ?
La politique a-t-elle affaire l'idal ou au rel ?
Les notions de succession et de dure ont pour origine une rflexion sur l'enchanement des ides que
l'on voit apparatre l'une aprs l'autre dans l'esprit ; cela me parat vident : on n'a en effet aucune
perception de la dure, sauf si l'on considre l'enchanement des ides qui se succdent dans
l'entendement. Quand cette succession d'ides cesse, la perception de la dure cesse avec elle ; chacun
l'exprimente en lui quand il dort profondment, que ce soit une heure ou un jour, un mois ou une anne ;
il n'a aucune perception de cette dure des choses tant qu'il dort ou ne pense pas : elle est totalement
perdue pour lui. Entre le moment o il arrte de penser et celui o il recommence, il lui semble ne pas y
avoir de distance. Il en serait de mme pour une personne veille, je n'en doute pas, s'il lui tait possible
de garder une seule ide l'esprit, sans changement ni variation ; quelqu'un qui fixe attentivement ses
penses sur une chose et remarque trs peu la succession des ides qui passent en son esprit, laissera
passer sans la remarquer une bonne partie de la dure : tant qu'il sera pris par cette contemplation stricte,
il croira que le temps est plus court. () Il est donc pour moi trs clair que les hommes drivent leurs ides
-
de la dure de leur rfle xion sur l'enchanement des ides dont ils observent la succession dans leur
entendement ; sans cette observation, ils ne peuvent avoir aucune notion de dure, quoi qu'il arrive dans
le monde.
LOCKE, Essai sur l'entendement humain
[18] SUJET N 18 - 11PHSCAG1 - 2011 - Srie S - ANTILLES - SESSION NORMALE
L'Etat est-il au service des individus ?
Faire son devoir exclut-il tout plaisir ?
Rien ne nous loigne plus du droit chemin pour la recherche de la vrit, que d'orienter nos tudes (...)
vers des buts particuliers (...) : ainsi, quand nous voulons cultiver les sciences utiles, soit pour les
avantages qu'on en retire dans la vie, soit pour le plaisir qu'on trouve dans la contemplation du vrai, e t qui
en cette vie est presque le seul bonheur qui soit pur et que ne trouble aucune douleur. Ce sont l , en effet,
des fruits lgitimes que nous pouvons attendre de la pratique des sc iences ; mais si nous y pensons au
milieu de nos tudes, ils nous font souvent omettre bien des choses ncessaires pour l'acquisition d'autres
connaissances, soit parce qu'au premier abord ces choses paraissent de peu d'utilit , soit parce qu'elles
semblent de peu d'intrt. Il faut donc bien se convaincre que toutes les sciences sont tellement lies
ensemble, qu'il est plus facile de les apprendre toutes la fois, que d'en isoler une des autres. Si
quelqu'un veut chercher srieusement la vrit, il ne doit donc pas choisir l'tude de quelque science
particulire : car elles sont toutes unies entre elles et dpendent les unes des autres ; mais il ne doit
songer qu' accrotre la lumire naturelle de sa raison, non pour rsoudre telle ou telle difficult d' cole,
mais pour qu'en chaque circonstance de la vie son entendement montre sa volont le parti prendre ; et
bientt il s'tonnera d'avoir fait de plus grands progrs que ceux qui s'appliquent des tudes
particulires, et d'tre parvenu, non seulement tout ce que les autres dsirent, mais encore de plus
beaux rsultats qu'ils ne peuvent esprer.
Descartes, Rgles pour la direction de l'esprit.
[19] SUJET N 19 - 11PHESME3 - 2011 - Srie ES - ANTILLES - SESSION REMPL.
La qute du bonheur est-elle vaine ?
Faut-il se fier sa propre raison ?
Le moyen de travail est une chose ou un ensemble de choses que l'homme interpose entre lui e t l'objet de
-
son travail comme conducteurs de son action. Il se sert des proprits mcaniques, physiques, chimiques
de certaines choses pour les faire agir comme forces sur d'autres choses, conformment son but. Si
nous laissons de ct la prise de possession de subsistances toutes trouves - la cueillette des fruits par
exemple, o ce sont les organes de l'homme qui lui servent d'instrument, - nous voyons que le travailleur
s'empare immdiatement, non pas de l'objet, mais du moyen de son travail. Il convertit ainsi des choses
extrieures en organes de sa propre activit, organes qu'il ajoute aux siens de manire al longer, en
dpit de la Bible, sa stature naturelle. Comme la terre est son magasin de vivres primitif, elle est aussi
l'arsenal primitif de ses moyens de travail. Elle lui fournit, par exemple, la pierre dont il se sert pour frotter,
trancher, presser, lancer, etc . La terre elle-mme devient moyen de travail, mais ne commence pas
fonctionner comme tel dans l'agriculture, sans que toute une srie d'autres moyens de travail soit
pralablement donne. Ds qu'il est tant soit peu dvelopp, le travail ne saurait se passer de moyens
dj travaills. Dans les plus anciennes cavernes on trouve des instruments et des armes de pierre. A
ct des coquillages, des pierres, des bois et des os faonns, on voit figurer au premier rang parmi les
moyens de travail primitifs l'animal dompt et apprivois, c'est--dire dj modifi par le travail. L'emploi et
la cration de moyens de travail, quoiqu'ils se trouvent en germe chez quelques espces animales,
caractrisent minemment le travail humain.
MARX, Le Capital
[20] SUJET N 20 - 11PHLIME3 - 2011 - Srie L - METROPOLE - SESSION REMPL.
La science peut-elle faire disparatre la religion ?
Un homme peut-il m'tre compltement tranger ?
Ce n'est ni par nature , ni contrairement la na ture que naissent en nous les vertus, mais la nature nous a
donn la capacit de les recevoir, et cette capacit est amene maturit par l'habitude. En outre, pour
tout ce qui survient en nous par nature, nous le recevons d'abord l'tat de puissa nce, et c'est plus tard
que nous le faisons passer l'acte, comme cela est manifeste dans le cas des facults sensibles (car ce
n'est pas la suite d'une multitude d'actes de vision ou d'une multitude d'actes d'audition que nous avons
acquis les sens correspondants, mais c'est l'inverse : nous avions dj les sens quand nous en avons fait
usage, et ce n'est pas aprs en avoir fait usage que nous les avons eus). Pour les vertus, au contraire,
leur possession suppose un exercice antrieur, comme c'est aussi le cas pour les autres arts. En effet, les
choses qu'il faut avoir apprises pour les faire, c'est en les faisant que nous les apprenons : par exemple,
c'est en construisant qu'on devient constructeur, et en jouant de la cithare qu'on devient citharis te ; ainsi
encore, c'est en pratiquant les actions justes que nous devenons justes, les actions modres que nous
devenons modrs, et les actions courageuses que nous devenons courageux. Cette vrit est encore
atteste par ce qui se passe dans les cits, o les lgislateurs rendent bons les citoyens en leur faisant
-
contracter certaines habitudes : c'est mme l le souhait de tout lgislateur, et s'il s'en acquitte mal, son
oeuvre est manque, et c'est en quoi une bonne constitution se distingue d'une mauvaise.
ARISTOTE, Ethique Nicomaque
[21] SUJET N 21 - 11PHSCIS1 - 2011 - Srie S - ISRAEL - SESSION NORMALE
Suffit-il d'avoir bonne conscience pour tre sr d'agir moralement ?
Connaissons-nous immdiatement le rel ?
Quoi que nous fassions nous sommes censs le faire pour "gagner notre vie" ; tel est le verdict de la
socit, et le nombre des gens, des professionnels en particulier, qui pourraient protester a diminu trs
rapidement. La seule exception que consente la socit concerne l'artiste qui, str ictement parler, est le
dernier "ouvrier" dans une socit du travail. La mme tendance rabaisser toutes les activits srieuses
au statut du gagne-pain se manifeste dans les plus rcentes thories du travail, qui, presque
unanimement, dfinissent le travail comme le contraire du jeu. En consquence, toutes les activits
srieuses, quels qu'en soient les rsultats, reoivent le nom de travail et toute activit qui n'est ncessaire
ni la vie de l'individu ni au processus vital de la socit est range pa rmi les amusements. Dans ces
thories qui, en rpercutant au niveau thorique l'opinion courante d'une socit de travail, la durcissent et
la conduisent ses extrmes, il ne reste mme plus l'"uvre" de l'artiste : elle se dissout dans le jeu, elle
perd son sens pour le monde. On a le sentiment que l'amusement de l'artiste remplit la mme fonction
dans le processus vital de travail de la socit que le tennis ou les passe -temps dans la vie de l'individu.
ARENDT, Condition de l'homme moderne
[22] SUJET N 22 - 11PHSCG11 - 2011 - Srie S - ETRANGER GROUPE 1 - SESSION NORMALE
Sommes-nous matres de nos penses ?
Faut-il considrer le travail comme un mal ncessaire ?
Si (...) je dis que cette chaise est une bonne chaise, cela veut dire qu'elle satisfait un certain but
prdtermin et, en ce cas, le mot "bon" n'a de signification que pour autant que ce but a t
pralablement fix. En fait, le mot bon pris au sens relatif veut simplement dire conforme un certain
standard prdtermin. Ainsi, quand nous disons d'un homme qu'il est un bon pianiste, nous voulons dire
qu'il peut jouer avec un certain degr de dextrit des partitions d'un certain degr de difficult. De mme,
si je dis qu'il m'importe de ne pas attraper froid, je veux dire qu'un re froidissement provoque, dans ma vie,
-
un certain nombre de dsagrments qui sont descriptibles, et si je dis d'une route qu'elle est la route
correcte, je veux dire qu'elle est correcte par rapport un certain but. Ces expressions, si elles sont
employes de cette faon, ne nous confrontent aucune difficult ni aucun problme profond. Mais ce
n'est pas ainsi que l'Ethique les emploie. Supposez que je sache jouer au tennis e t que l'un d'entre vous
qui me voit jouer dise : "Vous jouez vraiment mal", et supposez que je lui rponde : "Je sais que je joue
mal, mais je ne veux pas mieux jouer", tout ce qu'il pourrait dire est : "En ce cas tout est pour le mieux".
Mais supposez que j'aie racont l'un d'entre vous un incroyable mensonge et qu'il vienne vers moi en
me disant : "Tu te conduis comme un goujat", et que je lui rponde : "Je sais que je me conduis mal, mais
je ne veux pas mieux me conduire", pourrait-il dire alors : "Dans ce cas tout est pour le mieux" ?
Certainement pas. Il dirait : "Eh bien, tu dois vouloir mieux te conduire". Vous avez ici un jugement de
valeur absolu, alors que le premier exemple tait seulement un jugement relatif.
WITTGENSTEIN, Confrence sur l'Ethique
[23] SUJET N 23 - 11PHSCNC1 - 2011 - Srie S - NOUVELLE-CALEDONIE - SESSION NORMALE
Est-ce l'intrt qui fonde le lien social ?
La certitude est-elle une garantie de vrit ?
Le caractre de l'homme est invariable : il reste le mme pendant toute la dure de sa vie. Sous
l'enveloppe changeante des annes, des circonstances o il se tro uve, mme de ses connaissances et de
ses opinions, demeure, comme l'crevisse sous son caille, l'homme identique et individuel, absolument
immuable et toujours le mme. Ce n'est que dans sa direction gnrale et dans sa matire que son
caractre prouve des modifications apparentes, qui rsultent des diffrences d'ges, et des besoins
divers qu'ils suscitent. L'homme mme ne change jamais : comme il a agi dans un cas, il agira encore, si
les mmes circonstances se prsentent (en supposant toutefois qu'il e n possde une connaissance
exacte). L'exprience de tous les jours peut nous fournir la confirmation de cette vrit : mais elle semble
la plus frappante, quand on retrouve une personne de connaissance aprs vingt ou trente annes, et
qu'on dcouvre bientt qu'elle n'a rien chang ses procds d'autrefois. Sans doute plus d'un niera en
paroles cette vrit : et cependant dans sa conduite il la prsuppose sans cesse, par exemple quand il
refuse tout jamais sa confiance celui qu'il a trouv une seule fois malhonnte, et, inversement, lorsqu'il
se confie volontiers l'homme qui s'est un jour montr loyal. Car c'est sur elle que repose la possibilit de
toute connaissance des hommes, ainsi que la ferme confiance que l'on a en ceux qui ont donn des
marques incontestables de leur mrite.
SCHOPENHAUER, Essai sur le libre arbitre.
-
[24] SUJET N 24 - 11 PHLINC1 - 2011 - Srie L - NOUVELLE-CALEDONIE - SESSION NORMALE
Une pense peut-elle tre inconsciente ?
L'exprience peut-elle nous tromper ?
Etant donn en effet qu'il n'existe pas au monde de Rpublique o l'on ait tabli suffisamment de rgles
pour prsider toutes les actions et paroles des hommes (car cela serait impossible), il s'ensuit
ncessairement que dans tous les domaines d'activit que les lois ont passs sous silence, les gens ont la
libert de faire ce que leur propre raison leur indique comme leur tant le plus profitable. Car si nous
prenons le mot de libert dans son sens propre de libert corporelle, c'est--dire de n'tre ni enchan ni
emprisonn, il serait tout fait absurde, de la part des hommes, de crier comme ils le font pour obtenir
cette libert dont ils jouissent si manifestement. D'autre part, si nous entendons par libert le fait d'tre
soustrait aux lois, il n'est pas moins absurde, de la part des hommes, de rclamer comme ils le font cette
libert qui permettrait tous les autres hommes de se rendre matres de leurs vies. Et cependant, aussi
absurde que ce soit, c'est bien ce qu'ils rclament ; ne sachant pas que les lois sont sans pouvoir pour les
protger s'il n'est pas un glaive entre les mains d'un homme (ou de plusieurs), pour faire excuter ces lois.
La libert des sujets ne rside par consquent que dans les choses qu'en rglementant leurs actions le
souverain a passes sous silence, par exemple la libert d'acheter, de vendre, et de conclure d'autres
contrats les uns avec les autres ; de choisir leur rsidence, leur genre de nourriture, leur mtier, d'duquer
leurs enfants comme ils le jugent convenable, et ainsi de suite.
HOBBES, Lviathan
[25] SUJET N 25 - 11PHESNC1 - 2011 - Srie ES - NOUVELLE-CALEDONIE - SESSION NORMALE
Faut-il prfrer la vrit la paix ?
L'esprit est-il plus libre que le corps ?
Plus on remonte dans le cours de l'histoire, plus l'individu, et par suite l'individu producteur lui aussi,
apparat dans un tat de dpendance, membre d'un ensemble plus grand : cet tat se manifeste d'abord
de faon tout fait naturelle dans la famille, et dans la famille largie jusqu' former la tribu ; puis dans les
diffrentes formes de la communaut issue de l'opposition et de la fusion des tribus. Ce n'est qu'au XVIIIe
sicle, dans la "socit civile bourgeoise", que les diffrentes formes de l'interdpendance sociale se
prsentent l'individu comme un simple moyen de raliser ses buts particuliers, comme une ncessit
extrieure. Mais l'poque qui engendre ce point de vue, celui de l'individu singulier singularis, est
prcisment celle o les rapports sociaux (et de ce point de vue universels) ont atteint le plus grand
-
dveloppement qu'ils aient connu. L'homme est, au sens le plus littral, un zon politikon (1), non
seulement un animal sociable, mais un animal qui ne peut se constituer comme individu singulier que
dans la socit. La production ralise en dehors de la socit par cet individu singulier et singularis
fait e xceptionnel qui peut bien arriver un civilis transport par hasard dans un lieu dsert et qui possde
dj en puissance les forces propres la socit est chose aussi absurde que le serait le
dveloppement du langage sans la prsence d'individus vivant et parlant ensemble.
MARX, Introduction la Critique de l'conomie politique
[26] SUJET N 26 - 11PTSTMDLR1 - 2011 - Srie TECHN. - LA REUNION - SESSION NORMALE
Y a-t-il un sens rsister la technique ?
Est-ce l'ignorance qui nous fait croire ?
L'tat de socit s'est impos comme une solution naturelle, en vue de dissiper la crainte et d'liminer les
circonstances malheureuses auxquelles tous taient exposs. Son but principal ne diffre donc pas de
celui que tout homme raisonnable devrait s'efforcer d'atteindre - quoique sans aucune chance de succs
(...) - dans un tat strictement naturel. D'o l'vidence de ce tte proposition : alors mme qu'un homme
raisonnable se verrait un jour, pour obir son pays, contraint d'accomplir une action certainement
contraire aux exigences de la raison, cet inconvnient particulier serait compens, et au-del, par tout le
bien dont le fait bnficier en gnral l'tat de socit. L'une des lois de la raison prescrit que de deux
maux nous choisissons le moindre ; il est donc permis de soutenir que jamais personne n'accomplit une
action contraire ce que lui dicte sa raison, en se conformant aux lois de son pays.
SPINOZA
Pour expliquer ce texte, vous rpondrez aux questions suivantes, qui sont destines principalement
guider votre rdaction. Elles ne sont pas indpendantes les unes des autres et demandent que le texte
soit d'abord tudi dans son ensemble.
QUESTIONS :
1 Dgagez l'ide principale du texte, puis ses diffrentes tapes.
2 Expliquez :
a) "Son but principal ne diffre donc pas de celui que tout homme raisonnable devrait s'efforcer
-
d'atteindre" ;
b) "cet inconvnient particulier serait compens, et au-del, par tout le bien dont le fait bnficier en
gnral l'tat de socit" ;
c) "L'une des lois de la raison prescrit que de deux maux nous choisissons le moindre".
3 Est-il toujours raisonnable d'obir aux lois ?
[27] SUJET N 27 - 11PTSTMDNC1 - 2011 - Srie TECHN. - NOUVELLE-CALEDONIE - SESSION
NORMALE
La libert se dfinit-elle comme un pouvoir de refuser ?
La science a-t-elle le monopole de la vrit ?
Rien ne sert de s'tre dbarrass des causes de tristesse personnelle : quelquefois en effet, c'est le
dgot du genre humain qui nous envahit l'ide de tous ces crimes qui russissent leurs auteurs.
Quand on songe quel point la droiture est rare et l'intgrit bien cache ; quand on se dit que la loyaut
ne se rencontre gure que lorsqu'elle est intresse, que la dbauche recueille des profits aussi
dtestables que ses pertes, que l'ambition politique, incapable de rester dans ses limites, va jusqu'
trouver son clat dans la honte, alors l'me s'enfonce dans la nuit ; et devant les ruines des vertus qu'il est
aussi impossible d'esprer trouver qu'inutile de possder, on se sent envahi par les tnbres.
Aussi devons-nous prendre l'habitude de ne pas nous indigner de tous les vices de la foule, mais d'en rire,
et d'imiter Dmocrite plutt qu'Hraclite : celui-ci ne pouvait sortir en ville sans pleurer, celui-l sans rire ;
l'un ne voyait dans nos actes que misre, l'autre que sottise. Il faut donc ramener les choses leurs justes
proportions et les supporter avec bonne humeur : il est d'ailleurs plus conforme la nature humaine de rire
de la vie que d'en pleurer.
SENEQUE
QUESTIONS :
1 Dgagez l'ide principale du texte, puis les tapes de son argumentation.
2 Expliquez :
a) "c'est le dgot du genre humain qui nous envahit l'ide de tous ces crimes qui russissent leurs
auteurs" ;
b) "Aussi devons-nous prendre l'habitude de ne pas nous indigner de tous les vices de la foule, mais d'en
-
rire" ;
c) "Il faut donc ramener les choses leurs justes proportions et les supporter avec bonne humeur".
3 Peut-on tre heureux dans un monde injuste ?
[28] SUJET N 28 - 11PHLIJA1 - 2011 - Srie L - JAPON - SESSION NORMALE
Les conventions sociales peuvent-elles tenir lieu de morale ?
Toute ralit est-elle matrielle ?
L'histoire est une connaissance, sans tre une science, car nulle part elle ne connat le particulier par le
moyen de l'universel, mais elle doit saisir immdiatement le fait individuel, et, pour ainsi dire, elle est
condamne ramper sur le terrain de l'exprience. Les sciences relles au contraire planent plus haut,
grce aux vastes notions qu'elles ont acquises, et qui leur permettent de dominer le particulier,
d'apercevoir, du moins dans de certaines limites, la possibilit des choses comprises dans leur domaine,
de se rassurer enfin aussi contre les surprises de l'avenir. Les sciences, systmes de concepts, ne parlent
jamais que des genres ; l'histoire ne traite que des individus. Elle serait donc une science des individus, ce
qui implique contradiction. Il s'ensuit encore que les sciences parlent toutes de ce qui est toujours, tandis
que l'histoire rapporte ce qui a t une seule fois e t n'existe plus jamais ensuite . De plus, si l'histoire
s'occupe exclusivement du particulier et de l'individuel, qui, de sa nature, est inpuisable, elle ne
parviendra qu' une demi-connaissance toujours imparfaite.
SCHOPENHAUER, Le Monde comme volont et comme reprsentation
[29] SUJET N 29 - 11 PHSCJA - 2011 - Srie S - JAPON - SESSION NORMALE
Le rel est-il une construction de la raison ?
Travailler, est-ce s'accomplir ?
Le bonheur est un tat permanent qui ne semble pas fait ici-bas pour l'homme. Tout est sur la terre dans
un flux continuel qui ne permet rien d'y prendre une forme constante. Tout change autour de nous. Nous
changeons nous-mme et nul ne peut s'assurer qu'il aimera demain ce qu'il aime aujourd'hui. Ainsi tous
nos projets de flicit pour cette vie sont des chimres. Profitons du contentement d'esprit quand il vient ;
gardons-nous de l'loigner par notre faute, mais ne faisons pas des projets pour l'enchaner, car ces
projets-l sont de pures folies. J'ai peu vu d'hommes heureux, peut-tre point ; mais j'ai souvent vu des
-
curs contents , et de tous les objets qui m'ont frapp c'est celui qui m'a le plus content moi-mme. Je
crois que c'est une suite naturelle du pouvoir des sensations sur mes sentiments internes. Le bonheur n'a
point d'enseigne extrieure (1) ; pour le connatre il faudrait lire dans le cur de l'homme heureux ; mais le
contentement se lit dans les yeux, dans le maintien, dans l'accent, dans la dmarche et semble se
communiquer celui qui l'aperoit.
ROUSSEAU, Rveries du promeneur solitaire.
(1) Marque apparente.
[30] SUJET N 30 - 11PHSCPO - 2011 - Srie S - POLYNESIE - SESSION NORMALE
Le souci de l'ordre est-il une menace ou une garantie pour le citoyen ?
Une technique est-elle bonne parce qu'elle est efficace ?
-
Une technique est-elle bonne parce qu'elle est efficace ?
L'me commande au corps, et elle est immdiatement obie. L'me se commande elle -mme, et elle
rencontre une rsistance. L'me commande la main de remuer, et la chose se fait si facilement que c'est
peine si l'on peut distinguer l'ordre de son excution. Et pourtant l'me est me, la main est corps. L'me
commande de vouloir l'me, c'est--dire soi-mme, et elle n'agit pas. D'o vient ce prodige ? Quelle en
est la cause ? Elle lui commande, dis-je, de vouloir ; elle ne commanderait pas si elle ne voulait pas, et ce
qu'elle commande ne s'excute point.
C'est qu'elle ne veut pas totalement ; aussi ne commande -t-elle pas totalement. Elle ne commande que
dans la mesure o elle veut, et la dfaillance de l'excution est en relation directe avec la dfaillance de sa
volont, puisque la volont appelle l'tre une volont qui n'est pas autre chose qu'elle -mme. Donc elle
ne commande pas pleinement : voil pourquoi son ordre ne s'excute pas. Si e lle se mettait tout entire
dans son commandement, elle n'aurait pas besoin de se commander d'tre, elle serait dj. Cette volont
partage qui veut moiti, et moiti ne veut pas, n'est donc nullement un prodige : c'est une maladie de
l'me. La vrit la soulve sans russir la redresser compltement, parce que l'habitude pse sur elle de
tout son poids. Il y a donc deux volonts, dont aucune n'est complte, et ce qui manque l'une, l'autre le
possde.
AUGUSTIN, Les Confessions.
[31] SUJET N 31 - 11PHLILI1 - 2011 - Srie L - LIBAN - SESSION NORMALE
L'hypothse de l'inconscient est-elle ncessaire la connaissance de soi ?
De quoi l'exprience nous instruit-elle ?
Tous les ouvrages de l'art ont des rgles gnrales, qui sont des guides qu'i l ne faut jamais perdre de vue.
Mais comme les lois sont toujours jus tes dans leur tre gnral, mais presque toujours injustes dans
l'application, de mme les rgles, toujours vraies dans la thorie, peuvent devenir fausses dans
-
l'hypothse (1). Les peintres et les sculpteurs ont tabli les proportions qu'il faut donner au corps humain,
et ont pris pour mesure commune la longueur de la face ; mais il faut qu'ils violent chaque instant les
proportions cause des diffrentes attitudes dans lesquelles il faut qu'ils mettent les corps ; par exemple,
un bras tendu est bien plus long que celui qui ne l'est pas. Personne n'a jamais plus connu l'art que
Michel-Ange ; personne ne s'en est jou davantage. Il y a peu de ses ouvrages d'architecture o les
proportions soient exactement gardes ; mais, avec une connaissance exacte de tout ce qui peut faire
plaisir, il semblait qu'il et un art part pour chaque ouvrage.
Quoique chaque effet dpende d'une cause gnrale, il s'y mle tant de causes particulires que chaque
effet a, en quelque faon, une cause part : ainsi l'art donne les rgles, et le got les e xceptions ; le got
nous dcouvre en quelles occasions l'art doit soumettre (2), et en quelles occasions il doit tre soumis.
MONTESQUIEU, Essai sur le got
(1) "Hypothse" : ce mot dsigne ici une ide destine s'adapter un cas particulier.
(2) En quelles occasions les rgles de l'art doivent prvaloir.
[32] SUJET N 32 - 11PHLIAN1 - 2011 - Srie L - ANTILLES - SESSION NORMALE
Le bonheur est-il affaire de chance ?
Est-il juste d'interprter la loi ?
Tandis que la spcialisation est essentiellement guide par le produit fini, dont la nature est d'exiger des
comptences diverses qu'il faut rassembler et organiser, la division du travail, au contraire, prsuppose
l'quivalence qualitative de toutes les activits pour lesquelles on ne demande aucune comptence
spciale, et ces activits n'ont en soi aucune finalit : elles ne reprsentent que des sommes de force
de travail que l'on additionne de manire purement quantitative. La division du travail se fonde sur le fait
que deux hommes peuvent mettre en commun leur force de travail et "se conduire l'un envers l'autre
comme s'ils taient un" . Cette "unit" est exactement le contraire de la coopration, elle renvoie l'unit
de l'espce par rapport laquelle tous les membres un un sont identiques et interchangeables. ()
Comme aucune des activits en lesquelles le processus est divis n'a de fin en soi, leur fin "naturelle" est
exactement la mme que dans le cas du travail "non divis" : soit la simple reproduction des moyens de
subsistance, c'est--dire la capacit de consommation des travailleurs, soit l'puisement de la force de
travail. Toutefois, ni l'une ni l'autre de ces limites ne sont dfinitives ; l'puisement fait partie du processus
vital de l'individu, non de la collectivit, et le sujet du processus de travail, lorsqu'il y a division du travail,
est une force collective et non pas individuelle. L'"inpuisabilit" de cette force de travail correspond
exactement l'immortalit de l'espce, dont le processus vital pris dans l'ensemble n'est pas davantage
interrompu par les naissances et les morts individuelles de ses membres.
-
ARENDT, Condition de l'homme moderne
[33] SUJET N 33 - 11PHLILR1 - 2011 - Srie L - LA REUNION - SESSION NORMALE
N'y a-t-il de preuve que par la dmonstration ?
Est-il vrai que seul le prsent existe ?
Il est assez curieux qu'en parlant du devoir on pense quelque chose d'extrieur bien que le mo t
lui-mme indique qu'il s'applique quelque chose d'intrieur ; car ce qui m'incombe, non pas comme un
individu accidentel, mais d'aprs ma vraie nature, est bien dans le rapport le plus intime avec moi -mme.
Le devoir n'est pas une consigne, mais quelque chose qui incombe. Si un individu regarde ainsi le devoir,
cela prouve qu'il s'est orient en lui-mme. Alors le devoir ne se dmembrera pas pour lui en une quantit
de dispositions particulires, ce qui indique toujours qu'il ne se trouve qu'en un rap port extrieur avec lui. Il
s'est revtu du devoir, qui est pour lui l'expression de sa nature la plus intime. Ainsi orient en lui -mme, il
a approfondi l'thique et il ne sera pas essouffl en faisant son possible pour remplir ses devoirs.
L'individu vraiment thique prouve par consquent de la tranquillit et de l'assurance, parce qu'il n'a pas
le devoir hors de lui, mais en lui. Plus un homme a fond profondment sa vie sur l'thique, moins il
sentira le besoin de parler constamment du devoir, de s'inq uiter pour savoir s'il le remplit, de consulter
chaque instant les autres pour le connatre enfin. Si l'thique est correctement comprise, elle rend
l'individu infiniment sr de lui-mme ; dans le cas contraire elle le rend tout fait indcis, et je ne peux pas
m'imaginer une existence plus malheureuse ou plus pnible que celle d'un homme qui le devoir est
devenu extrieur et qui, cependant, dsire toujours le raliser.
KIERKEGAARD, Ou bien ou bien
[34] SUJET N 34 - 11PHTECG11 - 2011 - Srie TECHN. - ETRANGER GROUPE 1 - SESSION
NORMALE
Croire, est-ce renoncer la raison ?
Tout change est-il bienfaisant ?
C'est seulement partir du moment o la condition de la nature humaine est devenue hautement
artificielle qu'on a conu l'ide - ou, selon moi, qu'il a t possible de concevoir l'ide - que la bont est
naturelle : car ce n'est qu'aprs une longue pratique d'une ducation artificielle que les bons sentiments
sont devenus si habituels, e t ont si bien pris le dessus sur les mauvais, qu'ils s e manifestent
-
spontanment quand les circonstances le demandent. A l'poque o l'humanit a t plus proche de son
tat na turel, les observateurs plus civiliss d'alors voyaient l'homme "naturel" comme une sorte d'animal
sauvage, se distinguant des autres animaux principalement par sa plus grande astuce : ils considraient
toute qualit estimable du caractre comme le rsultat d'une sorte de dressage, expression par laquelle
les anciens philosophes dsignaient souvent la discipline qui convient aux tres humains. La vrit est
qu'on peine trouver un seul trait d'excellence dans le caractre de l'homme qui ne soit en nette
contradiction avec les sentiments spontans de la nature humaine.
MILL, La Nature
QUESTIONS :
1 Dgagez l'ide principale du texte et les tapes de l'argumentation.
2 Expliquez
a) "les bons sentiments sont devenus si habituels" ;
b) " la vrit est qu'on a peine trouver un seul trait d'excellence dans le caractre de l'homme qui ne soit
en nette contradiction avec les sentiments spontans de la nature humaine".
3 La culture nous rend-elle meilleurs ?
[35] SUJET N 35 - 11PHESAN1 - 2011 - Srie ES - ANTILLES - SESSION NORMALE
Peut-on tre heureux dans la solitude ?
Pourquoi l'tat devrait-il limiter son pouvoir ?
Ce qui fait la distinction essentielle de l'histoire et de la science, ce n'est pas que l'une embrasse la
succession des vnements dans le temps, tandis que l'autre s'occuperait de la systmatisation des
phnomnes, sans tenir compte du temps dans lequel ils s'accomplissent. La description d'un phnomne
dont toutes les phases se succdent et s'enchanent ncessairement selon des lois que font connatre le
raisonnement ou l'exprience, est du domaine de la science et non de l'histoire. La science dcrit la
succession des clipses, la propagation d'une onde sonore, le cours d'une maladie qui passe par des
phases rgulires, et le nom d'histoire ne peut s'appliquer qu'abusivement de semblables descriptions ;
tandis que l'histoire intervient ncessairement (...) l o nous voyons, non seulement que la thorie, dans
son tat d'imperfection actuelle, ne suffit pas pour expliquer les phnomnes, mais que mme la thorie la
plus parfaite exigerait encore le concours d'une donne historique. S'il n'y a pa s d'histoire proprement dite
l o tous les vnements drivent ncessairement et rgulirement les uns des autres, en vertu des lois
-
constantes par lesquelles le systme est rgi, et sans concours accidentel d'influences trangres au
systme que la thorie embrasse, il n'y a pas non plus d'histoire, dans le vrai sens du mo t, pour une suite
d'vnements qui seraient sans aucune liaison entre eux.
COURNOT, Essai sur les fondements de la connaissance et sur les caractres de la critique
philosophique.
[36] SUJET N 36 - 11PHESLI1 - 2011 - Srie ES - LIBAN - SESSION NORMALE
Parle-t-on seulement pour tre compris ?
Peut-on ne pas connatre son bonheur ?
La socit () est la source et le lieu de tous les biens intellectuels qui constituent la civilisation. C'est de
la socit que nous vient tout l'essentiel de notre vie mentale. Notre raison individuelle est et vaut ce que
vaut cette raison collective et impersonnelle qu'est la science, qui est une chose sociale au premier chef et
par la manire dont elle se fait et par la manire dont elle se conserve. Nos facults esthtiques, la finesse
de notre got dpendent de ce qu'est l'art, chose sociale au mme titre. C'est la socit que nous
devons notre empire sur les choses qui fait partie de notre grandeur. C'est elle qui nous affranchit de la
nature . N'est-il pas naturel ds lors que nous nous la reprsentions comme un tre psychique suprieur
celui que nous sommes et d'o ce dernier mane ? Par suite, on s'explique que, quand elle rclame de
nous ces sacrifices petits ou grands qui forment la trame de la vie morale, nous nous inclinions devant elle
avec dfrence.
Le croyant s'incline devant Dieu, parce que c'est de Dieu qu'il croit tenir l'tre, et particulirement
son tre mental, son me. Nous avons les mmes raisons d'prouver ce sentiment pour la collectivit.
Durkheim, Sociologie et Philosophie
[37] SUJET N 37 - 11PHLIAS1 - 2011 - Srie L - AMERIQUE DU SUD - SESSION NORMALE
L'homme peut-il devenir le produit de ses techniques ?
La dmonstration met-elle fin toute discussion ?
Substituer au gouvernement par la raison le gouvernement par l'amour, c'est ouvrir la voie au
gouvernement par la haine, comme Socrate semble l'avoir entrevu quand il dit que la mfiance en la
raison ressemble la mfiance envers l'homme. L'amour n'est ni une garantie d'impartialit, ni un moyen
d'viter les conflits, car on peut diffrer sur la meilleure manire d'aimer, et plus l 'amour est fort, plus fort
-
sera le conflit. Cela ne veut pas dire que l amour et la haine doivent tre placs sur le mme plan, mais
seulement que nul sentiment, ft-ce l'amour, ne peut remplacer le recours des institutions fondes sur la
raison.
Le rgne de l'amour prsente d'autres dangers. Aimer son prochain, c'est vouloir le rendre heureux ().
Mais vouloir le bonheur du peuple est, peut-tre, le plus redoutable des idaux politiques, car il aboutit
fatalement vouloir imposer aux autres une chelle de valeurs suprieures juges ncessaires ce
bonheur. On verse ainsi dans l'utopie et le romantisme ; et, vouloir crer le paradis terrestre, on se
condamne invitablement l'enfer. De l l'intolrance, les guerres de religion, l'inquisition, avec, la base,
une conception foncirement errone de nos devoirs. Que nous ayons le devoir d'aider ceux qui en ont
besoin, nul ne le conteste ; mais vouloir le bonheur des autres, c'est trop souvent forcer leur intimit et
attenter leur indpendance.
POPPER, La Socit ouverte et ses ennemis
[38] SUJET N 38 - 11PHLIIN1 - 2011 - Srie L - INDE - SESSION NORMALE
Percevoir est-ce connatre ?
Reconnat-on l'artiste son savoir-faire ?
Il n'y a pas de si grand philosophe dans le monde qui ne croie un million de choses sur la foi d'autrui, et
qui ne suppose beaucoup plus de vrits qu'il n'en tablit.
Ceci est non seulement ncessaire, mais dsirable. Un homme qui entreprendrait d'examiner tout par
lui-mme ne pourrait accorder que peu de temps et d'attention chaque chose ; ce travail tiendrait son
esprit dans une agitation perptuelle qui l'empcherait de pntrer profondment dans aucune vrit et de
se fixer avec solidit dans aucune certitude. Son in telligence serait tout la fois indpendante et dbile
(1). Il faut donc que, parmi les divers objets des opinions humaines, il fasse un choix et qu'il adopte
beaucoup de croyances sans les discuter, afin d'en mieux approfondir un petit nombre dont i l s'e st rserv
l'examen.
Il est vrai que tout homme qui reoit une opinion sur la parole d'autrui met son esprit en esclavage ; mais
c'est une servitude salutaire qui permet de faire un bon usage de la libert.
Il faut donc toujours , quoi qu'il arrive, que l'autorit se rencontre quelque part dans le monde intellectuel et
moral. Sa place est variable, mais elle a ncessairement une place. L'indpendance individuelle peut tre
plus ou moins grande ; elle ne saurait tre sans bornes. Ainsi, la question n'est pa s de savoir s'il existe
-
une autorit intellectuelle dans les sicles dmocratiques, mais seulement o en est le dpt et quelle en
sera la mesure.
TOCQUEVILLE, De la Dmocratie en Amrique
[39] SUJET N 39 - 11PHESIS1 - 2011 - Srie ES - ISRAEL - SESSION NORMALE
Peut-on connatre sans faire usage de la raison ?
Est-il injuste d'exploiter le travail d'autrui ?
Cette notion de "proprit" par quoi on explique si souvent l'amour ne saurait tre premire. Pourquoi
voudrais-je m'approprier autrui si ce n'tait jus tement en tant qu'Autrui me fait tre ? Mais cela implique
justement un certain mode d'appropriation : c'est de la libert de l'autre en tant que telle que nous voulons
nous emparer. Et non par volont de puissance : le tyran se moque de l'amour ; i l se contente de la peur.
S'il recherche l'amour de ses sujets, c'est par politique et s'il trouve un moyen plus conomique de les
asservir, il l'adopte aussitt. Au contraire, celui qui veut tre aim ne dsire pas l'asservissement de l'tre
aim. Il ne tient pas devenir l'objet d'une passion dbordante et mcanique. Il ne veut pas possder un
automatisme, et si on veut l'humilier, il suffit de lui reprsenter la passion de l'aim comme le rsultat d'un
dterminisme psychologique : l'amant se sentira dvaloris dans son amour et dans son tre. Si Tristan et
Iseut sont affols par un philtre , ils intressent moins ; et il arrive qu'un asservissement total de l'tre aim
tue l'amour de l'amant. Le but est dpass : l'amant se retrouve seul si l'aim s'est transform en
automate. Ainsi l'amant ne dsire-t-il pas possder l'aim comme on possde une chose ; il rclame un
type spcial d'appropriation. Il veut possder une libert comme libert.
SARTRE, L'Etre et le nant
[40] SUJET N 40 - 11PHESG11 - 2011 - Srie ES - ETRANGER GROUPE 1 - SESSION NORMALE
Se laisser guider par autrui, est-ce renoncer sa libert ?
Ne sommes-nous convaincus que par ce qui a t dmontr ?
Ins tinct et intelligence ont pour objet essentiel d'utiliser des instruments : ici des outils invents, par
consquent variables et imprvus ; l des organes fournis par la nature, et par consquent immuables.
L'instrument est d'ailleurs destin un travail, et ce travail est d'autant plus efficace qu'il est plus
spcialis, plus divis par consquent entre travailleurs diversement qualifis qui se compltent
rciproquement. La vie sociale est ainsi immanente, comme un vague idal, l'instinc t comme
-
l'intelligence ; cet idal trouve sa ralisation la plus complte dans la ruche ou la fourmilire d'une part,
dans les socits humaines de l'autre. Humaine ou animale, une socit est une organisation ; elle
implique une coordination et gnralement aussi une subordination d'lments les uns aux autres ; elle
offre donc, ou simplement vcu ou, de plus, reprsent, un ensemble de rgles ou de lois. Mais, dans une
ruche ou dans une fourmilire, l'individu est riv son emploi par sa structure, et l'organisation est
relativement invariable, tandis que la cit humaine est de forme variable, ouverte tous les progrs. Il en
rsulte que, dans les premires, chaque rgle est impose par la nature, elle est ncessaire ; tandis que
dans les autres une seule chose est naturelle, la ncessit d'une rgle.
BERGSON, Les deux Sources de la morale et de la religion
[41] SUJET N 41 - 11PHESJA1 - 2011 - Srie ES - JAPON - SESSION NORMALE
L'art nous rconcilie-t-il avec le monde ?
Une socit sans tat est-elle possible ?
Les hommes, pour la plupart, sont naturellement ports tre affirmatifs et dogmatiques dans leurs
opinions ; comme ils voient les objets d'un seul ct et qu'ils n'ont aucune ide des arguments qui servent
de contrepoids, ils se jettent prcipitamment dans les principes vers lesquels ils penchent, et ils n'ont
aucune indulgence pour ceux qui entretiennent des sentiments opposs. Hsiter, balancer, embarrasse
leur entendement, bloque leur passion et suspend leur action. Ils sont donc impatients de s'vader d'un
tat qui leur est aussi dsagrable, et ils pensent que jamais ils ne peuvent s'en carter assez loin par la
violence de leurs affirmations et l'obstination de leur croyance. Mais si de tels raisonneurs dogmatiques
pouvaient prendre conscience des tranges infirmits de l'esprit humain, mme dans son tat d e plus
grande perfection, mme lorsqu'il est le plus prcis et le plus prudent dans ses dcisions, une telle
rflexion leur inspirerait naturellement plus de modestie et de rserve et diminuerait l'opinion avantageuse
qu'ils ont d'eux-mmes et leur prjug contre leurs adversaires. Les ignorants peuvent rflchir la
disposition des savants, qui jouissent de tous les avantages de l'tude et de la rflexion et sont encore
dfiants dans leurs affirmations ; et si quelques savants inclinaient, par leur caractre naturel, la
suffisance et l'obstination, une lgre teinte de pyrrhonisme (1) pourrait abattre leur orgueil en leur
montrant que les quelques avantages qu'ils ont pu obtenir sur leurs compagnons sont de peu
d'importance si on les compare la perplexit et la confusion universelles qui sont inhrentes la nature
humaine. En gnral, il y a un degr de doute, de prudence et de modestie qui, dans les enqutes et les
dcisions de tout genre, doit toujours accompagner l'homme qui raisonne correctement.
HUME, Enqute sur l'entendement humain
-
(1) pyrrhonisme : scepticisme
[42] SUJET N 42 - 11PHLIGI11 - 2011 - Srie L - ISRAEL - SESSION NORMALE
Ne dsire-t-on que ce que dsire autrui ?
Le renouvellement des thories scientifiques doit-t-il faire douter de la vrit de la science ?
Les philosophes qui ont spcul sur la signification de la vie et sur la destine de l'homme n'ont pas assez
remarqu que la nature a pris la peine de nous renseigner l -dessus elle-mme. Elle nous avertit par un
signe prcis que notre destination est atteinte. Ce signe est la joie. Je dis la joie, je ne dis pas le plaisir. Le
plaisir n'est qu'un artifice imagin par la nature pour obtenir de l'tre vivant la conservation de la vie ; il
n'indique pas la direction o la vie est lance. Mais la joie annonce toujours que la vie a russi, qu'elle a
gagn du terrain, qu'elle a remport une victoire : toute grande joie a un accent triomphal. () Partout o il
y a joie, il y a c ration : plus riche est la cration, plus profonde est la joie. La mre qui regarde son enfant
est joyeuse, parce qu'elle a conscience de l'avoir cr, physiquement et moralement. Le commerant qui
dveloppe ses affaires, le chef d'usine qui voit prosprer son industrie, est -il joyeux en raison de l'argent
qu'il gagne et de la notorit qu'il acquiert ? Richesse et considration entrent videmment pour beaucoup
dans la satisfaction qu'il ressent, mais elles lui apportent des plaisirs plutt que de la joie, et ce qu'il gote
de joie vraie est le sentiment d'avoir mont une entreprise qui marche, d'avoir appel quelque chose la
vie.
BERGSON, L'Energie spirituelle
[43] SUJET N 43 - 11PHLIG11 - 2011 - Srie L - ETRANGER GROUPE 1 - SESSION NORMALE
Le dsir peut-il tre combl ?
Le savant doit-il fuir l'incertitude ?
Le despotisme de la coutume est partout l'obstacle qui dfie le progrs humain, parce qu'il livre une
dispute incessante cette disposition de viser mieux que l'ordinaire, et qu'on appelle, suivant les
circonstances, esprit de libert, esprit de progrs et d'amlioration. L'esprit de progrs n'est pas toujours
un esprit de libert, car i l peut chercher imposer le progrs un peuple rticent ; et l'esprit de libert,
quand il rsiste de tels efforts, peut s'allie r localement et temporairement aux adversaires du progrs ;
mais la seule source d'amlioration intarissable et permanente du progrs est la libert, puisque grce
elle, il peut y avoir autant de foyers de progrs que d'individus. Quoi qu'il en soit, le principe progressif,
sous ses deux formes d'amour de la libert et d'amour de l'amlioration, s'oppose l'empire de la
-
Coutume, car il implique au moins l'affranchissement de ce joug ; et la lutte entre ces deux forces
constitue le principal intrt de l'histoire de l'humanit.
MILL, De la libert
[44] SUJET N 44 - 11PHESPO1 - 2011 - Srie ES - POLYNESIE - SESSION NORMALE
Peut-on bon droit parler d'un homme sans culture ?
L'erreur peut-elle tre fconde ?
Nous ne savons ce que c'est que bonheur ou malheur absolu. Tout est ml dans cette vie ; on n'y gote
aucun sentiment pur, on n'y reste pas deux moments dans le mme tat. Les affections de nos mes,
ainsi que les modifications de nos corps sont dans un flux continuel. Le bien et le mal nous sont communs
tous, mais en diffrentes mesures. Le plus heureux est celui qui souffre le moins de peines ; le plus
misrable est celui qui sent le moins de plaisirs. Toujours plus de souffrances que de jouissances ; voil la
diffrence commune tous. La flicit de l'homme d'ici-bas n'est donc qu'un tat ngatif ; on doit la
mesurer par la moindre quantit de maux qu'il souffre.
Tout sentiment de peine est insparable du dsir de s'en dlivrer ; toute ide de plaisir est insparable du
dsir d'en jouir ; tout dsir suppose privation, et toutes les privations qu'on sent sont pnibles ; c'est donc
dans la disproportion de nos dsirs et de nos facults que consiste notre misre. Un tre sensible dont les
facults galeraient les dsirs serait un tre absolument heureux.
En quoi consiste donc la sagesse humaine ou la route du vrai bonheur ? Ce n'est prcisment pas
diminuer nos dsirs ; car, s'ils taient au-dessous de notre puissance, une partie de nos facults resterait
oisive, et nous ne jouirions pas de tout notre tre. Ce n'est pas non plus tendre nos facults, car si nos
dsirs s'tendaient la fois en plus grand rapport, nous n'en deviendrions que plus misrables ; mais c'est
diminuer l'excs des dsirs sur les facults, et mettre en galit parfaite la puissance et la volont.
C'est alors seulement que, toutes les facults tant en action, l'me cependant restera paisible, et que
l'homme se trouvera bien ordonn.
ROUSSEAU, Emile ou de l'ducation
[45] SUJET N 45 - 11PHESPO3 - 2011 - Srie ES - POLYNESIE - SESSION REMPL.
L'hypothse de l'inconscient psychique revient-elle admettre un autre moi en moi ?
-
La recherche de l'efficacit technique exclut-elle le souci de la vrit ?
On ne peut se dispenser d'exercer autant de pression qu'il est ncessaire pour empcher les spcimens
les plus vigoureux de la nature humaine d'empiter sur les droits des autres ; mais cela, on trouve ample
compensation, mme du point de vue du dveloppement humain. Les moyens de dveloppement que
l'individu perd par l'interdiction de satisfaire des penchants nuisibles aux autres s'obtiennent surtout aux
dpens du dveloppement d'autrui. Et lui -mme y trouve une compensation, car la contrainte impose
son gosme autorise du mme coup le meilleur dveloppement possible de l'aspect social de sa nature.
Le fait d'tre astreint suivre les rgles strictes de la justice par gard pour les autres dveloppe les
sentiments e t les facults qui ont pour objet le bien des autres. Mais le fait de se contraindre ne pas leur
dplaire dans les occasions o l'on n'est pas susceptible de leur nuire, ne dveloppe par ailleurs rien de
bon, sinon une force de caractre qui se manifestera peut-tre par une rsistance la contrainte. Si l'on
se soumet, cette contrainte mousse et ternit entirement le caractre. Pour donner une chance quitable
la nature de chacun, il faut que les personnes diffrentes aient la permission de mener des vies
diffrentes. Les poques o une telle latitude a t laisse sont celles qui se signalent le plus l'attention
de la postrit. Le despotisme lui-mme ne produit pas ses pires effets tant qu'il laisse subsister
l'individualit ; et tout ce qui crase l'individualit est un despotisme, quel que soit le nom qu'on lui donne,
qu'il prtende imposer la volont de Dieu ou les injonctions des hommes.
MILL, De la libert
[46] SUJET N 46 - 11PHESAS1 - 2011 - Srie ES - AMERIQUE DU SUD - SESSION NORMALE
Peut-on penser sans les mots ?
Puis-je tre certain d'tre dans le vrai ?
La compassion est une impression maladive produite par la vue des misres d'autrui ou encore un chagrin
caus par les maux d'autrui, que nous trouvons immrits ; or le sage n'est sujet aucune maladie morale
; son esprit est serein et nul vnement au monde n'est capable de l'assombrir. En outre, rien ne sied
l'homme autant que la grandeur des sentiments : or ceux-ci ne peuvent tre la fois grands et tris tes ; le
chagrin brise l'me, l'abat, la resserre.
C'est ce qui n'arrivera point au sage mme l'occasion de ses propres malheurs ; tous les traits de la
fortune acharne contre lui feront ricochet e t se briseront ses pieds ; il gardera toujours le mme visage,
calme, impassible, ce qui ne lui serait pas possible si le chagrin avait accs en lui.
Ajoute que le sage sait prvoir les choses et qu'il a dans son esprit des ressources toujours prtes : or
jamais une ide claire et pure ne vient d'un fond agit. Le chagrin sait mal discerner la vrit, imaginer des
-
mesures utiles, viter des dangers, apprcier quitablement les dommages ; donc le sage n'a point de
commisration, puisque ce sentiment ne peut exister sans misre morale.
Tout ce que j'aime voir faire aux personnes compatissantes, il le fera volontiers et d'une me haute ; il
viendra au secours de ceux qui pleurent, mais sans pleurer avec eux ; il tendra la main au naufrag,
donnera l'hospitalit au banni, l'aumne l'indigent, non point cette aumne humiliante que jettent la
plupart de ceux qui veulent passer pour compatissants - en montrant leur ddain pour ceux qu'ils assistent
et leur crainte d'tre souills par leur contact -, mais il donnera comme un homme qui fait part un autre
homme des biens communs tous.
SENEQUE, Entretiens
[47] SUJET N 47 - 11PHSCAS1 - 2011 - Srie S - AMERIQUE DU SUD - SESSION NORMALE
L'tat favorise-t-il la libert ?
Satisfaire ses dsirs peut-il rendre malheureux ?
Lorsqu'on commence, sans avoir acquis aucune comptence en la matire, par accorder son entire
confiance un raisonnement et le tenir pour vrai, on ne tarde pas juger qu'il est faux : i l peut l'tre en
effet, comme il peut ne pas l'tre ; puis on recommence avec un autre, et encore avec un autre. Et, tu le
sais bien, ce sont surtout ceux qui passent leur temps mettre au point des disco urs contradictoires qui
finissent par croire qu'ils sont arrivs au comble de la matrise et qu'ils sont les seuls avoir compris qu'il
n'y a rien de sain ni d'assur en aucune chose, ni en aucun raisonnement non plus ; que tout ce qui e xiste
se trouve tout bonnement emport dans une sorte d'Euripe (1), ballott par des courants contraires,
impuissant se stabiliser pour quelque dure que ce soit, en quoi que ce soit.
- C'est la pure vrit, dis-je.
- Mais ne serait-ce pas vraiment lamentable, Phdon, dit-il , d'prouver pareil sentiment ? Lamentable,
alors qu'il existe un raisonnement vrai, solide, dont on peut comprendre qu'il est tel, d'aller ensuite, sous
prtexte qu'on en rencontre d'autres qui, tout en restant les mmes, peuvent nous donner tantt l'o pinion
qu'ils sont v rais et tantt non, refuser d'en rendre responsable soi-mme, ou sa propre incomptence ?
Lamentable encore de finir (...) par se complaire rejeter sa propre responsabilit sur les raisonnements,
de passer dsormais le reste de sa vie les dtester et les calomnier, se privant ainsi de la vrit et du
savoir concernant ce qui, rellement, existe ?
Par Zeus, dis-je, oui, ce serait franchement lamentable !
Il faut donc nous prserver de cela avant tout, dit -il . Notre me doit se fermer entirement au soupon
que, peut-tre, les raisonnements n'offrent rien de sain.
-
PLATON, Phdon
(1) Euripe : nom d'un canal sparant l'ile d'Eube du continent grec. Ce canal est connu pour le
phnomne de ses courants alternatifs qui changent de direction plusieurs fois par jour.
[48] SUJET N 48 - 11PHESLR1 - 2011 - Srie ES - LA REUNION - SESSION NORMALE
Les faits historiques doivent-ils tre interprts ?
Travailler, est-ce s'affranchir de toute dpendance ?
L'tre humain parle. Nous parlons veills ; nous parlons en rve. Nous parlons sans cesse, mme quand
nous ne profrons aucune parole, et que nous ne faisons qu'couter ou lire ; nous parlons mme si,
n'coutant plus vraiment, ni ne lisant, nous nous adonnons un travail, ou bien nous abandonnons ne
rien faire. Constamment nous parlons, d'une manire ou d'une autre. Nous parlons parce que parler nous
est naturel. Cela ne provient pas d'une volont de parler qui serait antrieure la parole. On dit que
l'homme possde la parole par nature . L'enseignement traditionnel veut que l'homme soit, la diffrence
de la plante et de la bte, le vivant capable de parole. Cette affirmation ne signifie pas seulement qu' ct
d'autres facults, l'homme possde aussi celle de parler. Elle veut dire que c'est bien la parole qui rend
l'homme capable d'tre le vivant qu'il est en tant qu'homme. L'homme est homme en tant qu'il est celui qui
parle.
HEIDEGGER, Acheminement vers la parole
[49] SUJET N 49 - 11PHTEPO3 - 2011 - Srie TECHN. - POLYNESIE - SESSION REMPL.
Etre libre, est-ce faire ce que l'on veut ?
L'erreur nous loigne-t-elle toujours de la vrit ?
Il arrive frquemment qu'une disposition lgale utile observer pour le salut public, en rgle gnrale,
devienne, en certains cas, extrmement nuisible. Car le lgislateur, ne pouvant envisager tous les cas
particuliers, rdige la loi en fonction de ce qui se prsente le plus souvent, en ayant en vue l'utili t
commune. C'est pourquoi, s'il surgit un cas o l'observation de telle lo i soit prjudiciable au salut commun,
celle-ci ne doit plus tre observe. Ainsi, supposer que dans une ville assige on promulgue la loi que
les portes doivent demeurer closes, c'est videmment utile au salut commun en rgle gnrale ; mais s'il
arrive que les ennemis poursuivent des citoyens dont dpend la survie de la cit, il serait trs prjudiciable
-
cette ville de ne pas ouvrir ses portes. C'est pourquoi, en ce cas, il faudrait ouvrir les portes, contre les
termes de la loi, afin de sauvegarder l'intrt gnral que le lgislateur avait en vue.
THOMAS D'AQUIN
QUESTIONS :
1 Formulez la thse de ce texte et montrez quelles sont les tapes de son argumentation.
2
a) En vous appuyant sur un exemple diff rent de celui du texte , expliquez : "une disposition lgale utile
observer pour le salut public [devient] en certains cas, extrmement nuisible".
b) En analysant l'exemple propos dans le texte, montrez comment on peut aller "contre les termes de la
loi" sans aller contre la volont du lgislateur.
3 Peut-il tre conforme l'intrt gnral de ne pas appliquer la loi ?
[50] SUJET N 50 - 11PHTEAG3 - 2011 - Srie TECHN. - ANTILLES - SESSION REMPL.
Suffit-il de croire que l'on est heureux pour l'tre ?
Les lois peuvent-elles se passer de la force ?
Une oeuvre gniale, qui commence par dconcerter, pourra crer peu peu par sa seule prsence une
conception de l'art et une atmosphre artistique qui permettront de la comprendre ; elle deviendra alors
rtrospectivement gniale ; sinon, elle serait reste ce qu'elle tait au dbut, simplement dconcertante.
Dans une spculation financire, c'est le succs qui fait que l'ide avait t bonne. Il y a quelque chose du
mme genre dans la cration artistique, avec cette diffrence que le succs, s'il finit par venir l'oeuvre
qui avait d'abord choqu, tient une transforma tion du got du public opre par l'oeuvre mme ; celle -ci
tait donc force en mme temps que matire ; elle a imprim un lan que l'artiste lui avait communiqu ou
plutt qui est celui mme de l'artiste, invisible et prsent en elle.
BERGSON
QUESTIONS :
1 Formulez la thse de ce texte et montrez comment elle est tablie.
-
2
a) En vous appuyant sur un exemple, dites en quoi une "oeuvre g niale" se distingue d'une oeuvre
"simplement dconcertante" ;
b) pourquoi peut-on comparer la cration artistique la spculation financire ? En quoi cette
comparaison claire-t-elle le propos de Bergson ?
c) expliquez : un lan (...) qui est celui mme de l'artiste invisible et prsent en elle".
3 Une oeuvre d'art a-t-elle le pouvoir de transformer le got du public
[51] SUJET N 51 - 11PHTEPO1 - 2011 - Srie TECHN. - POLYNESIE - SESSION NORMALE
Faut-il se mfier des vidences ?
Est-ce la pense qui nous rend libres ?
J'apprends (...) rendre un service autrui, sans lui porter de tendresse relle, parce que je prvois qu'il
me le rendra dans l'esprance d'un autre service et afin de maintenir la mme rciprocit de bons offices
avec les autres ou avec moi. Et par suite, une fois que je lui ai rendu service et qu'il profite de l'effet
bnfique de mon action, il est conduit accomplir sa part, prvoyant les consquences qu'engendrerait
son refus.
Mais bien que cet change intress entre les hommes commence s'tablir et prvaloir dans la
socit, il n'abolit pas entirement les relations d'amiti et les bons offices, qui sont plus gnreux et plus
nobles. Je peux encore rendre des services des personnes que j'aime et que je connais plus
particulirement, sans avoir de profit en vue, e t elles peuvent me le retourner de la mme manire, sans
autre intention que de rcompenser mes services passs. Par consquent, afin de distinguer ces deux
sortes diffrentes d'change, l'intress et celui qui ne l'est pas, il y a une certaine formule verbale
invente pour le premier, par laquelle nous nous engageons l'accomplissement d'une action. Cette
formule verbale constitue ce que nous appelons une promesse, qui est la sanction de l'change intress
entre les hommes. Quand quelqu'un dit qu'il promet quelque chose, il exprime en ralit une rsolution
d'accomplir cette chose et, en mme temps, puisqu'il fait usage de cette formule verbale, il se soumet
lui-mme, en cas de ddit, la punition qu'on ne se fie plus jamais lui.
HUME
QUESTIONS :
1 Formulez l'ide directrice de ce texte et montrez quelles sont les tapes de son argumentation.
-
2
a) En vous appuyant sur le texte, expliquez ce qu'est un change intress ;
b) en vous appuyant sur le texte, expliquez ce qu'est un change dsintress ;
c) analysez le rle que joue la formule verbale de la promesse dans l'change intress.
3 Un change peut-il tre dsintress ?
[52] SUJET N 52 - 11PHTEAG1 - 2011 - Srie TECHN. - ANTILLES - SESSION NORMALE
Une vrit absolue est-elle possible ?
L'art est-il inutile ?
Les lois n'ont pas t inventes pour empcher les actions des hommes, mais afin de les conduire, de
mme que la nature n'a pas donn des berges aux rivires pour les arrter mais pour en diriger le cours.
L'tendue de cette libert doit tre tablie suivant le bien des sujets et l'intrt de l'Etat. C'est pourquoi
j'estime que c'est une chose particulirement contraire au devoir des souverains (1), et d e tous ceux qui
ont le droit d'imposer d