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DOSSIER PEDAGOGIQUE

Avenir Radieux,

une fission française.

de/par Nicolas Lambert

Une création de la compagnie Un Pas de Côté.

23 et 24 mars 2012 au Théâtre d’Auxerre

Dossier réalisé par Florence Monvaillier, professeur agrégée de lettres , missionnée auprès du

Théâtre Scène conventionnée d’Auxerre depuis septembre 2009.

Coordonnées : flomonvail@sfr.fr

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SOMMAIRE

I. Quel spectacle, pour quels élèves? p3

II. Présentation du spectacle: le projet de Nicolas Lambert p3

III. Autour du spectacle: quelques lectures p4

IV. Se préparer au spectacle par l'écriture et par le jeu p6

A . Ecrire en langue de bois p6

B. Confisquer la parole p6

V. Avant ou après le spectacle: travaux de recherche p8

A . Chercher ses mots p8

B. Se documenter p8

VI. Avant ou après le spectacle: analyse de style p9

A . Ignominie p9

B. De l'information à la propagande p9

VII. Organiser un débat en classe p12

Conclusion p14

Annexe p15

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I. Quel spectacle, pour quels élèves?

Le spectacle de Nicolas Lambert sur le sujet brûlant du nucléaire français intéresse tous les citoyens, donc potentiellement tous les élèves – simples habitants du territoire, futurs électeurs, futurs acteurs de la vie économique, consommateurs éclairés ou non... Le public lycéen est à privilégier, au vu de la complexité des problèmes abordés et de la richesse du texte. Les futurs bacheliers scientifiques comme les élèves des séries technologiques ou professionnelles y trouveront une approche originale des questions liées à l'énergie. Les filières économiques et sociales verront sur scène un débat qui touche à l'économie, à la politique, à l'équilibre de la société toute entière. Quant aux littéraires, leur lecture du spectacle abordera la place de l'art dramatique dans la société, du théâtre engagé, militant, politique, mais pourra également s'intéresser à la performance d'un acteur qui est seul en scène et interprète tous les rôles. La difficulté de notre approche tient au fait que le spectacle ne s'appuie pas sur une fiction, mais sur des documents existants, sur des archives, sur des débats qui ont réellement eu lieu. La triste réalité de certaines scènes, ainsi que les polémiques qui ne manqueront pas de s'élever dans nos classes , mettent le professeur en danger. La neutralité , l'objectivité, le détachement habituellement de mise seront sur ce sujet de réelles gageures! Mais ce danger-là fait aussi la grandeur de notre métier, qui, rappelons-le si besoin , est d'éduquer le citoyen et d'éveiller les consciences. L'auteur de ce dossier n'étant pas une spécialiste de la question nucléaire, les pistes de travail proposées ne sont pas toutes exploitées.

II. Présentation du spectacle : le projet de Nicolas Lambert

Avenir Radieux, une fission française est le deuxième volet de la trilogie BLEU - BLANC – ROUGE de Nicolas Lambert, consacrée à l’a-démocratie française du point de vue de ses grandes sources de richesse. Pétrole, nucléaire, armement... Après ELF la pompe Afrique (2004) qui à travers le procès des dirigeants d’ELF éclairait la politique néo-coloniale de la France et ses logiques de corruption, il s’agit ici d’explorer le discours officiel du pouvoir, et la confiscation de la possibilité de débattre. 2010 : la Commission Nationale du Débat Public organise une série de débats sur l'utilité et les modalités de la construction d'une deuxième centrale nucléaire de type EPR en France, sur le site de Penly. A partir des interrogations des rares citoyens présents, à partir des discours verrouillés d’Edf et de l’industrie nucléaire française en général, à partir du silence du donneur d’ordre, le spectacle remonte un fil de l’histoire du nucléaire français, ses ors républicains, ses non-dits étouffants. Nicolas Lambert fait monter sur scène les morceaux de notre histoire publique et les a-parte officieux, les débats de l’Euratom à l’assemblée nationale en 1956, les attentats à Paris dans les années 1980, le franc-parler d’un Pierre Guillaumat (agent des renseignements, administrateur du CEA, ministre gaullien), l’«indépendance énergétique», la «grandeur de la France» et le goût du pouvoir.

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III. Autour du spectacle : quelques lectures

Bibliographie réduite Dans le Manuel de Première Terres littéraires (édition Hatier 2011): * page 138 Science et vie sur le transport des déchets nucléaires 2010 * page 145 texte de Camus sur la bombe atomique: éditorial de Combat 8 août 1945 Extrait du roman La Centrale (explication simple de la fission) Revue XXI Automne 2011 Les moissons de l'atome , par Léna Mauger (pp. 52 à 65) « Au nom de l'avenir et parce que c'était le progrès, la Hague a sauté d'un coup de l'âge de la charrue à l'ère de l'atome. La région côtière du Cotentin est l'une des plus nucléarisées de la planète. Moitié paysan, moitié employé de la centrale, Papy Maurice a vécu toute l'aventure . Le dépôt de déchets radioactifs et la centrale de retraitement sont au bout de ses champs. Le progrès n'est plus aussi beau qu'hier. » Revue XXI Eté 2009 7000 Hiroshima, par Fabienne Lips-Dumas (pp.35 à 45) « Les îles Marshall ont été sacrifiées pour le bien de l'humanité . le mot est des Américains. A partir de 1954, et pendant douze ans, l'archipel a reçu l'équivalent de 1,6 Hiroshima par jour. Trois îles ont été rayées de la carte. La population a été irradiée. Des « bébés méduses » ou des « bébés grappes de raisin » sont nés. Aucune enquête officielle n'a jamais été menée. Les Etats-Unis disposent encore aujourd'hui d'une base aux îles Marshall. Ils y préparent la guerre des étoiles. » Dossier du Canard enchaîné: C'est par où la sortie? Octobre 2011 Fictions romanesques: La Centrale, Elisabeth Filhol, Folio (2011) Tu n'as rien vu à Fukushima, Daniel de Roulet, Buchet-Chastel 2011(voir annexe) Retour d'Iwaki, Christophe Fiat (récit d'un voyage à Fukushima après la catastrophe) L'Arpenteur Les sites à consulter: leur confrontation est particulièrement intéressante. Comparer d'une part: * site d' EDF http://energie.edf.com/nucleaire/accueil-45699.html * site d'Areva: http://www.areva.com/FR/notreoffre-422/un-recyclage-competitif-et-respectueux-de-lenvironnement. Html

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* site du CEA (centre de l'énergie atomique) http://www.cea.fr/jeunes/themes/l_energie_nucleaire/questions_sur_le_nucleaire/l_energie_nucleair e_en_france * site de l'Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs ) http://www.andra.fr/producteurs/index.html * site de l'ASN (autorité de sûreté nucléaire) http://www.asn.fr/index.php/Les-actions-de-l-ASN/L-ASN avec d'autre part: *site de Greenpeace : http://www.greenpeace.org/france/fr/campagnes/nucleaire/ * site de la Criirad (Commission de Recherche et d'Information Indépendantes sur la Radioactivité) http://www.criirad.org/ * Site d'information sur le nucléaire : http://www.dissident-media.org/infonucleaire/

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IV. Se préparer au spectacle par l'écriture et par le jeu

A. Écrire en langue de bois

Donner la consigne suivante: un personnage A propose à une assemblée un projet d'implantation industrielle. Il oublie de dire que cette implantation pose un problème de sécurité ou un problème moral (usine d'armement par exemple) Quels seraient ses arguments? Quelle serait sa stratégie? Comment parler sans dire? Quelles seraient les questions posées par la population ou les élus? Commentaire: l'argumentation en faveur de ce type d'industrie est toujours la même: elle s'appuie sur la peur du chômage, l'intérêt économique, les questions d'indépendance, de concurrence...

B. Confisquer la parole

Exercice d'écriture théâtrale ou de jeu improvisé:

Organiser un faux débat. Un personnage « A » vient présenter un projet et affirme qu'il sera porté au débat public mais les réactions des spectateurs/auditeurs sont systématiquement muselées. Par quels moyens est-ce possible? Commentaire: les ressources proposées par les élèves seront multiples, et la lecture de l'extrait suivant permettra de voir que dans la réalité, hélas, elles sont utilisées lors du débat. On peut répertorier: Le silence imposé brutalement. Plus subtil: « je ne comprends pas la question » ou question jugée hors sujet Atermoiement: la question sera traitée ultérieurement ou ce n'est pas le moment de la poser Humiliation de l'adversaire. Réponse ironique, pirouette verbale, plaisanterie pour discréditer l'adversaire On peut observer une séquence télé ou radio (type conférence de presse ou rencontre avec les syndicats lors d'une grève) et faire comprendre la notion de confiscation du débat public. Et enfin, lire avec les élèves un extrait du spectacle: ACTE [1] SCENE [4] Carton "Penly, 22 avril 2010 / Commission Particulière du Débat Public autour de l'EPR [...] Mr FABIANI : […] Je vous rappelle également que cette part de marché, j'allais dire, au-delà des prestataires qui travaillent pour les arrêts de tranche, c'est 70 000 salariés... M. Luengo : Sous payés !

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Mr FABIANI : ... 70 000 salariés, qui construisent des équipements pour les centrales nucléaires ; ce sont des gens qui ne vont jamais sur une centrale nucléaire, mais qui sont dans les ateliers pour fabriquer ces équipements.[...] Alors dans un système, j'allais dire quel qu’il soit, le risque zéro n’existe pas... Réactions dans la salle : ah bon, il n'y a pas de risque zéro dans le nucléaire ? .... M. ALA : Vous n'avez pas de micro s'il vous plait. S'il vous plait. Je vous remercie de respecter la présentation qui est faite par M. Fabiani. Mr FABIANI : Bien entendu... Nous sommes avec nos entreprises prestataires, dans une relation commerciale avec EDF. M. Luengo : 56 euros par jour pour vivre, c'est ça "commercial" ? M. ALA : S'il vous plait M. Fabiani, je vous remercie de présenter votre Cahier d'Acteur sans engager de discussion avec la salle... On aura l'occasion de l'engager ensuite dans les Questions/Réponses. Mr FABIANI : Bien entendu. Nous avons une relation contractuelle, le client EDF a ses exigences, nous avons nos exigences. Alors chacun peut penser ce qu'il veut sur la politique d'externalisation des métiers d'EDF […] Je crois que c’est une bonne chose. Mais il faut avoir en tête que sur les 70 000 salariés que nous avons en poste, nous avons un déficit actuellement de 5 000 à 10 000 postes suivant les années parce que nous ne trouvons pas de tuyauteur, nous ne trouvons pas de soudeur. Mr Luengo Les salaires ... C'est à cause des salaires que vous les payez, que vous les trouvez pas ! 9 euros 80 en vingt ans de boite ! 9€80 ! Mr ALA : S'il vous plait, S'il vous plait, S'il vous plait... Vous pourrez poser votre question après, respectez les règles du débat, s'il vous plait. Mr FABIANI : Merci. Bien entendu. Que certaines personnes ne soient pas satisfaites de leur salaire… Je connais d’ailleurs peu de gens qui sont satisfaits de leur salaire en règle générale. Mr Luengo Et le vôtre alors ? Jouez la transparence, dites le votre ! C'est 9€80 ? Ça commence à suffire, Vingt ans ! Vingt ans de boite, 9€80 pour un chef d'équipe ! Mr ALA : S'il vous plait, S'il vous plait, S'il vous plait... M. Luengo, S'IL VOUS PLAIT ! Pouvez-vous conclure, Monsieur Fabiani ? Mr FABIANI : Bien sûr, je vais conclure. Je ne voudrais pas, j'allais dire, créer de polémique. Je vais redire ce que j’ai dit au début, nous ne sommes pas parfaits. Par contre, moi j’ai une grande sincérité, à mon âge, cela fait 40 ans que je suis dans l’industrie, je suis pas un béni-oui-oui par rapport à qui que ce soit. N’oublions pas simplement que nous sommes sur un marché concurrentiel, que si nous voulons que nos entreprises perdurent, il faut aussi que nous ayons des parts de marché. Je veux

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simplement passer un message ici, un message très simple : nous avons besoin de travail, nous avons besoin de bons de commande, l’industrie nucléaire est un de nos clients parmi tant d’autres : la chimie, la pharmacie, le pétrole… : X : les énergies renouvelables ?

V. Avant ou après le spectacle: travaux de recherche

A . Chercher ses mots

Partir des représentations des élèves: les amener à distinguer le champ lexical du « nucléaire » avec d'une part les associations objectives: atome, fission, énergie, centrale... et d'autre part les connotations subjectives, liées à la peur et à la fascination.

B. Se documenter

Le sujet se prête particulièrement bien à des travaux de recherche autonomes, essentiellement sur Internet.

• Voici quelques pistes: * les dates, les chiffres: la production, le coût, les types d'installation... * la question des déchets * la différence entre le nucléaire civil et le nucléaire militaire et leurs diverses applications

Mr FABIANI : … les énergies renouvelables, parfaitement Monsieur ! Nous avons des entreprises de chaudronnerie qui fabriquent des éoliennes ; je peux vous en citer quelques-unes à côté de Chartres. Voilà, c’est tout ce que je voulais vous dire. nous avons besoin de part de marché. Je remercie l’assemblée de m’avoir écouté avec beaucoup de patience. Mr HOUI : Questions, réflexions, commentaires ? Monsieur ? Mr CORREA : Oui, Alain Correa du Collectif "Stop EPR, ni à Penly, ni ailleurs". Juste une remarque. En matière de création d’emploi, sur la banlieue de Rouen, à Tourville-la- Rivière, il y a un marchand de meubles nordique qui a créé 400 emplois, donc plus que le futur EPR pour beaucoup moins d’argent et beaucoup moins de risques, mais bon, c’est un détail.

Extrait de Avenir radieux, une fission française

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* les associations anti-nucléaire, leurs actions, leurs propositions, la cible de leur dénonciation * les organismes qui gèrent les questions de sécurité * les accidents de Tchernobyl et de Fukushima * la carte des centrales nucléaires en France, voire dans le monde; les usines de stockage ou retraitement des déchets; les mines d'uranium par exemple. (Initiation à la géopolitique)

• Se procurer puis faire lire une plaquette de EDF/Areva... et y débusquer les zones d'ombre.

• Commentaire:

Ces recherches peuvent avoir un intérêt scientifique, évidemment, mais on ne manquera pas de les assortir d'une réflexion sur l'accès du public aux informations ( facile? lisible? interactif? ) sur la notion de transparence.

VI. Avant ou après le spectacle: analyse de style

A. Ignominie

Faire commenter la phrase mise en exergue dans le dossier d'accompagnement du spectacle: "Cependant, du point de vue de la santé mentale, la solution la plus satisfaisante pour l'avenir des utilisations pacifiques de l'énergie atomique serait de voir monter une nouvelle génération qui aurait appris à s'accommoder de l'ignorance et de l'incertitude" (Rapport n°151 de l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), Palais des Nations, Genève, 1958)

B. De l'information à la propagande

Consignes:

• Repérer dans l'extrait suivant les figures de style , afin de rattacher ce discours, non pas à

l'information, mais à la propagande. ACTE [3] SCENE [4] Carton "Paris, Assemblée Nationale, 1956 " Le Perchoir : La Parole est à M. Guy Mollet, président du conseil. (Applaudissement) Le Pdt G. Mollet : Monsieur le président, mesdames, messieurs, je souhaite qu’à l’ouverture de ce débat portant sur Euratom, c’est à dire sur la création du marché commun de l’atome, l’assemblée veuille bien entendre deux commissaires du Gouvernement : Monsieur Perrin, Haut commissaire du CEA et Monsieur Armand, président de la commission de l'équipement industriel au CEA.

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Le Perchoir : La parole est à Monsieur Louis Armand, Commissaire du Gouvernement (Applaudissement) M. Louis Armand : Monsieur le président, mesdames, messieurs, je ressens lourdement la responsabilité qui m'échoit. La situation de la France, comme celle d'autres pays européens, est tragique en matière d'énergie, mais, entre toutes, celle de la France est la plus grave. De tous les pays de l'O.E.C.E., c'est le nôtre qui importe la quantité d'énergie la plus grande. Or, l'indépendance industrielle d'un pays est liée à ses importations d'énergie. A ce problème important, il n'y avait pas de solution, lorsqu'on a vu apparaître l'énergie atomique dont la caractéristique est d'être inépuisable. Mais il ne suffit pas d'avoir de l'uranium. Un départ vient d'être pris par les colosses , l'URSS et les USA, et nous impose une grande vigilance. Le fait, pour les pays européens, d'acheter du matériel atomique américain ou du matériel russe sera beaucoup plus grave que d'importer de l'uranium. Importer de l'uranium et savoir faire des réacteurs, c'est l'indépendance ; acheter des réacteurs pour y brûler notre uranium, c'est de la dépendance. Face aux difficultés, il y a la réaction des faibles. Les faibles n'osent pas dire que c'est difficile et qu'il faut s'associer. Les faibles rêvent de réaliser tout seuls. Ainsi les enfants, sur les plages, ne font jamais des maisons de sable, mais des châteaux. Devenus hommes, ils sont bien contents de faire des maisons. L'énergie atomique appartient à l'échelle des pays comme le nôtre. Voilà la position du fort. A qui ne veut pas le comprendre, il est trop long de l'expliquer; mieux vaut lui conter quelques histoires. Nous allons engager une très lourde responsabilité vis-à-vis des générations futures. S'il ne nous est pas possible d'occuper une place dans l'équipe de tête, les jeunes nous le reprocheront. Nous aurons beau les conduire rue Vauquelin pour leur montrer la plaque qui enseigne aux Français qu'ils ont découvert le radium; ils nous diront : à cette époque, les Français étaient à la dimension qui convenait; mais il fallait nous préparer, nous, à la dimension de notre siècle, c'est-à-dire à l'association avec d'autres pays. Ce que nous avons à protéger, à conserver, c'est essentiellement le génie inventif de la race. Monsieur le président, mesdames, messieurs, je vous remercie.

Extrait de Avenir radieux, une fission française

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• Commentaire: attirer l'attention des élèves sur les figures suivantes:

Hyperboles :lourdement la responsabilité qui m'échoit. La situation de la France, comme celle d'autres pays européens, est tragique en matière d'énergie, mais, entre toutes, celle de la France est la plus grave. les colosses , l'URSS et les USA Métaphores valorisantes, lyrisme, dramatisation, référence implicite au miracle, fausse naïveté : A ce problème important, il n'y avait pas de solution, lorsqu'on a vu apparaître l'énergie atomique dont la caractéristique est d'être inépuisable. Ainsi les enfants, sur les plages, ne font jamais des maisons de sable, mais des châteaux. Devenus hommes, ils sont bien contents de faire des maisons. Antithèse : Dramatisation et culpabilisation par connotations dégradantes/ valorisation registre épidictique, orgueil de la nation, mépris pour les autres : Face aux difficultés, il y a la réaction des faibles. Les faibles n'osent pas dire que c'est difficile et qu'il faut s'associer. Les faibles rêvent de réaliser tout seuls […] L'énergie atomique appartient à l'échelle des pays comme le nôtre. Voilà la position du fort. Ce que nous avons à protéger, à conserver, c'est essentiellement le génie inventif de la race. Registre polémique: attaque de la position adverse, balayée d'un revers et humiliation de l'adversaire, taxé de sottise, par l'ironie A qui ne veut pas le comprendre, il est trop long de l'expliquer; mieux vaut lui conter quelques histoires. Prosopopée : valorisation de l'action par le discours attribué aux générations futures , lyrisme de l'évocation de l'avenir les jeunes nous le reprocheront. Nous aurons beau les conduire rue Vauquelin pour leur montrer la plaque qui enseigne aux Français qu'ils ont découvert le radium; ils nous diront : à cette époque, les Français étaient à la dimension qui convenait; mais il fallait nous préparer, nous, à la dimension de notre siècle, c'est-à- dire à l'association avec d'autres pays. Conclusion: on remarquera avec les élèves que les ressources de la rhétorique sont utilisées, afin de montrer le bien fondé des décisions. Ne sont présentés que les avantages de la solution nucléaire, sans aucune réserve ni question à examiner. Sur le plan de la stratégie argumentative, on remarque que la persuasion l'emporte, et que le discours s'apparente à de la propagande.

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VII. Organiser un débat en classe

Extrait du spectacle de Nicolas Lambert, l'échange qui suit entre une adjointe au maire de la Somme et des représentants d'EDF et de l'Etat (ASN) peut amener les élèves à se poser la question suivante: a-t-on le droit/ le devoir de s'opposer à un train de déchets nucléaires? La lecture de cet extrait peut nourrir leur réflexion: ACTE [2] SCENE [2] Carton "Abbeville, 16 juin 2010 / Débat Public sur l'EPR d e Penly, " M.ALA : On reprend le tour de parole ! Questions, réflexions, commentaires ? Mme THEROUIN : Bonsoir à tous, Emilie Thérouin, je suis adjointe au maire d’Amiens en Picardie qui est la préfecture de région à quelque kilomètres d'ici. Alors, moi je me pose des questions ayant trait à la sécurité et à la prévention, la gestion des risques majeurs. Moi, ce que j’en connais, c’est que le maire est tenu d’informer sur les risques existant sur sa commune. Le risque nucléaire, on m’indique que comme il n’y a pas de centrale sur le territoire de notre département, et bien, je n’avais pas forcément à le signifier à mes concitoyens. Comme je suis un peu têtue, j’ai indiqué ce risque. Ce que j’en sais, c’est qu’il n’existe pas du tout d’engin pour intervenir en cas d’alerte nucléaire, alors qu’il y a des convois de déchets nucléaires qui passent plusieurs fois par mois dans le plus grand secret à Amiens et ça nous n’avons pas l’information. Nous avons la question de la gestion par les maires de la distribution de cachets d’iode, puisque nous, encore une fois, comme nous n’avons pas de centrale nucléaire dans notre département, il y a un vieil arrêté préfectoral de 2004 qui demande aux maires de conserver et donc de distribuer ces cachets d’iode en moins de 12 heures à nos administrés. Pour les 137 976 habitants d’Amiens recensés, nous avons moins de 12 heures pour distribuer ces cachets d’iode qui sont entreposés ...qui devraient être entreposés dans quelque 30 sites et organiser 60 sites de distribution, mobiliser 800 agents communaux, sachant que nous n’en avons que 3 500 et qu’ils ne sont pas du tout, évidemment, pour l’instant, formés à la gestion des risques majeurs et encore moins au déclenchement des risques nucléaires. Vous voyez un peu la difficulté des maires de la Somme. Mais quand je vois comment l'information a du mal à passer, qu’il n’y avait même pas un mot dans le journal aujourd’hui à Amiens pour indiquer qu’il existait ce débat de ce soir qui est censé être le grand débat national sur la construction de Penly, je me pose juste un petit peu des questions… Comment le maire doit se débrouiller ? Comment les sapeurs-pompiers doivent se débrouiller ? Comment le préfet doit-il se débrouiller ? Le préfet a de la chance, il est au courant. Le maire est tenu d’être au courant mais il ne l’est même pas quand des trains de déchets nucléaires passent… M. ALA : Très bien. La parole à EDF dans un premier temps, avec des compléments qui seront sûrement demandés à l’ASN, Autorité de Sûreté Nucléaire qui est présente dans la salle. M. DUPUIS : Bien sûr, Madame, nous connaissons votre obligation et l’obligation du maire de chaque ville d’informer ses administrés des risques et, bien sûr, nous, comme les services de l’État, sommes à votre disposition pour vous informer. Tout d'abord, je me présente. Je suis Joseph Dupuis, je suis, au sein d’EDF, le directeur du projet Penly 3 et

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j’ai fait ma carrière dans l’ingénierie des moyens de production, nucléaire mais aussi gaz et charbon... Vous devez savoir madame, qu’il y a des cellules mobiles radiologiques capables d’intervenir et qui couvrent l’ensemble du territoire français. Vous pensez spécifiquement au transport, sachez qu’EDF, le CEA, Areva, qui exploitent chacune des installations nucléaires, ont, et cela a été un des enseignements de l’accident de Tchernobyl, constitué un groupement ensemble, un GIE pour se doter eux-mêmes des moyens d’intervention en cas d’accident radiologique important. Ce GIE s’est doté de moyens pour aller rechercher des matériaux radioactifs répandus ou sortis de leur enveloppe de protection, des choses comme cela. Ce sont des moyens que l’on est capable de mobiliser pratiquement dans les 24 à 48 heures. Vous avez aussi posé une question sur les transports nucléaires. Les transports nucléaires sont régis par une réglementation d’origine européenne. C'est la réglementation TMD, qui a cours en France, et qui est la déclinaison de la réglementation européenne ADR pour les transports de matières dangereuses sur route ou RID pour les transports de matières dangereuses sur rail. Ces itinéraires ne sont pas secrets, contrairement à ce que vous pouviez penser ou que vous avez exprimé. Tout cela est extrêmement contrôlé par l’Autorité de sûreté nucléaire. Le dernier point que vous mentionniez portait sur la distribution de comprimés d’iode. Je ne sais pas s’il y a un représentant de l’État dans la salle, mais je pense qu’a minima, l’ASN peut peut-être nous en dire plus sur ce sujet.: M. ALA : La parole à l'Autorité de Sureté du Nucléaire M. HOUDRE : Bonjour. Thomas Houdré, je suis le responsable de l’Autorité de sûreté nucléaire en Normandie. Pour compléter la réponse d’EDF qu'est déjà assez complète, peut être pour commencer sur les pastilles d’iode, typiquement il y a deux choses qui sont faites : tout d’abord, dans un périmètre de 10 kilomètres autour des centrales nucléaires ... y a une distribution préventive dans chaque foyer, dans chaque lieu d’habitation ou lieu de travail de pastilles d’iode en cas d'accident sur une centrale nucléaire qui évidement ... en ce cas ... reste quand même extrêmement improbable ; ensuite, sur la question des éventuels accidents liés à des transports de matières radioactives, il est demandé à chaque préfet de département d’élaborer un plan qui doit faire partie du plan Orsec, plan d’organisation des secours. Pour la Picardie, je sais pas exactement où cela en est mais cela prévoit un certain nombre de dispositions qui doivent être prises soit(e) par le maire, soit(e) par les préfets, en fonction de la gravité de l’accident. M. ALA : Est-ce que les réponses apportées vous conviennent ? Mme THEROUIN : Vous voulez que je vous dise la vérité ? je ne suis pas spécialement rassurée. Sur la question de l’information, le maire le fait, mais le maire est tenu aussi d’organiser les secours et le maire n’a pas l’information puisque c’est classé « secret défense » en tout cas pour... M. HOUDRE : C’est pas vrai. Mme THEROUIN : Quoi, c’est pas vrai ? Attendez, Monsieur, quand on a l’information par la police, qui est informée puisqu’il faut changer les CRS qui gardent les wagons toutes les demi-heures parce que, les pauvres, deviennent radioactifs, on se fait disputer quand on suit le convoi et on a des amis qui vont en garde à vue parce qu’ils ont récupéré le trajet. Ne me dites pas que le nucléaire civil n’est pas secret défense… Depuis peu de temps, le nucléaire civil est classé « secret défense », les trajets également, l’information, on n’est pas censé la détenir. C'est ça la vérité, en tout cas en ce

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qui concerne la Somme,. Je ne me permettrai pas de parler de votre région monsieur. Mr HOUDRE : On peut pas dire que... 'fin... Y a un certain nombre de dispositions... Je maintiens que pour les... les... en ce qui concerne le secret défense spécifiquement, ça ne concerne que les matières nucléaires qui peuvent constituer une arme. Pour les autres matières radioactives l’information sur le tracé est... doit être donnée par l’expéditeur. Donc, si vous êtes intéressée, je vous invite à en faire la demande par écrit. Mme THEROUIN : J’ai écrit au préfet et on nous a dit que c’était classé « secret défense », qu’on n’avait pas à être tenu au courant.

Extrait de Avenir radieux, une fission française CONCLUSION Que l'on soit « pro- » ou « anti- nucléaire », le problème s'avère complexe et offre une matière à débat tout à la fois effrayante et passionnante. Le spectacle de Nicolas Lambert ne manquera pas d'interpeller nos élèves et de nourrir leur réflexion de citoyen, voire de déboucher sur leur engagement militant. Saluons au passage une entreprise artistique qui confirme, si besoin était, l'importance du théâtre dans la vie de la cité.

Florence Monvaillier,

Février 2012

Merci à Claire et Eddy.

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ANNEXES

• Quelques liens: Vidéo de l'émission Des mots de Minuit : Invités: Nicolas Lambert et Christophe Fiat, auteur de Retour d'Iwaki, récit d'un voyage à Fukushima après la catastrophe. http://www.dailymotion.com/video/xmsmpk_avenir-radieux-a-des-mots-de-minuit_creation

• Critique du spectacle de Nicolas Lambert: http://www.franceculture.fr/blog-les-trois-coups-2011-11-23-%C2%AB-avenir-radieux-une-fission-francaise%C2%A0%C2%BB-de-nicolas%C2%A0lambert-critique

• Extrait du roman de Daniel de Roulet, Tu n’as rien vu à Fukushima Daniel de Roulet est né à Genève en 1944. Après une formation d’architecte, il a gagné sa vie comme informaticien, spécialiste des réseaux de télécommunications. Depuis 1997, il se consacre entièrement à l’écriture. Une grande partie de son travail a été traduite en allemand. Ses romans ont aussi été publiés à New York et aux Pays-Bas. Il court les marathons à temps perdu et habite la France. Plusieurs de ses livres traitent du nucléaire, domaine dans lequel il a lui-même travaillé. Il a publié, entre autres : L’Homme qui tombe (Buchet-Chastel, 2005), Kamikaze Mozart (Buchet-Chastel, 2007), Le Silence des Abeilles (Buchet-Chastel, 2009)… Son prochain roman, à paraître, s’intitulera Fusions. Extrait « Chère Kayoko, Je voudrais avoir de vos nouvelles. Voilà que le temps change chez vous, Tokyo risque d’être sous le vent de la centrale de Fukushima pour le week-end. Que vont faire les trente-cinq millions d’habitants de la ville ? Qu’allez-vous faire ? Vous calfeutrer, sortir en combinaison étanche ? Est-ce que vous avez été avertie à temps ? J’ai essayé déjà vos deux adresses de courriel, n’ose pas utiliser votre portable pour me rassurer, moi qui suis bien à l’abri dans ma campagne française. Pas ajouter non plus le voyeurisme à votre affolement. Je fais donc la seule chose qui aide et fait passer l’angoisse, je vous écris une lettre que je traduirai en anglais pour que vous sachiez combien je pense à vous. » […] « Le nucléocrate a toujours raison face au catastrophiste qui lui dit : « Je vous avais prévenu, la fin du monde est proche, voyez ce que vous avez fait. » Et le nucléocrate de répondre : « Avez-vous une autre solution pour éteindre le réacteur, avez-vous des hélicoptères, des volontaires, des gens prêts à se sacrifier pour sauver les trente-cinq millions d’habitants de Tokyo ? Non ? Alors taisez-vous. » Et le catastrophiste retient sa colère, souhaitant malgré lui une prochaine fois pire encore pour qu’enfin le nucléocrate cesse de mentir. Voilà quarante ans qu’on aurait pu développer d’autres énergies. »

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• Extrait de La Centrale, d'Elisabeth Filhol

Sur la facilité d'embauche dans les centrales: «On pousse la porte, et c’est signé. Qui n’a jamais fait ce rêve? Tout de suite une embauche, un boulot, du travail et plutôt bien payé. Facile à première vue. Tout semble d’ailleurs sous contrôle. Une formation précise en forme de répétition inlassable des mêmes gestes. Pas question de perdre son sang-froid en intervenant près du réacteur. Consignes maintes fois reprises, propreté stricte, tenues de travail toutes blanches, de plus en plus étanches jusqu’à la combinaison la plus protectrice dite «Mururoa». (p.80) Sur l'inexplicable et inquiétante couleur bleue de la piscine de refroidissement: «Un bleu intense, quasi surnaturel, qui pourtant ne doit rien à la science et n’emprunte rien à la fiction, le bleu du ciel au-dessus des casbahs, illuminé, transfiguré de l’intérieur, un bleu d’artiste inventé puis breveté sous sa formule chimique, mais dans une transparence et un rayonnement que seule la nature dans ce qu’elle a de plus intime est capable de rendre sensible à nos yeux.» (p.112) Sur les formations payantes proposées aux intérimaires du nucléaire: « Pour les intérimaires ou les gars à durée de chantier qui changent d'employeurs tous les mois, concrètement il n'y a plus personne, en acceptant d'y être de votre poche, vous justifiez le régime actuel, EDF encaisse les profits, vous encaissez les doses [de radiations, ndlr] au milieu quelques patrons de la sous-traitance tirent leur épingle du jeu et le tour est joué, les années passent, à tous ceux qui font des économies sur votre dos, vous leur donnez de bonnes raisons de ne surtout rien changer. » (p.87)