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Mai 2006 n°36 Dossier: l’ISP, des racines et des ailes 30 ans d’histoire La revue trimestrielle du secteur de l'insertion socioprofessionnelle L'ESS R

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Mai 2006 n°36

Dossier:

l’ISP, des racines et des ailes30 ans d’histoire

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sommaire

Dossier: Etat des lieux et perspectives pour le secteur de l'ISP30 ans d’histoire du secteur ISP: de la guerre du feu à l’Homo-dispositif-intégré 4

De EAP consultance à l’Interfédé… reconnaissance, évolution et développement. 9

L'alphabétisation en Communauté française de Belgique 1965-2005 14

Le secteur ISP face au monde économique 18

La formation du personnel du secteur de l’ISP, un monstre à neuf têtes… 23

Du parcours d’insertion au dispositif integré d’insertion socioprofessionnelle 25

Le décret EFT-OISP et son arrêté 28

Regards bruxellois sur le décret Wallon 31

L’ISP à Bruxelles-Capitale: état des lieux en 2004 33

Le secteur ISP au tournant de son histoire 35

Entrefilets: Histoire du secteur à travers les glissements sémantiques

Un “A” peut en cacher d’autres! 13

“Lutte contre l’illettrisme – pour le droit à l’alphabétisation” 17

“Combattre l’exclusion” devient “réinsérer” puis “insérer” 22

“Que sont nos militants devenus?” 34

Trans-Formation

Programme de formation de l’Interfédé 2006-2007 38

Voilà un nouveau numéro. Ne soyons pas fétichistes ou mystiques. Ne versons

pas dans la numérologie. Ne cédons pas aux tentations de l’interprétation obsessionnelle des chiffres qui s’étalent devant nous. Le numéro 36 de “l’Essor” suit le numéro 35 et, espérons-le, précède le numéro 37. Il n’y a donc aucune magie à sortir de ces chiffres. Tout ce que l’on peut dire de lui c’est qu’il est encore plus nouveau: nouveau graphisme, nouvelle mise en page, nouveau logo …et même un nouveau nom, puisqu’on revient au nom d’ori-gine de notre périodique sectoriel; nouveaux articles aussi car il porte les nouvelles réflexions que susci-tent partout dans notre secteur les nouveaux décrets.

Depuis “EAP consultance”, il s’en est passé des choses. L’Interfédé a vu son visage radicalement lifté. C’est qu’elle a tout-de-même 25 ans. Manifestement, nous avons jugé bon de lui appliquer un traitement de faveur. On l’a enfin dotée d’un logo, un peu comme on dotait une jeune-fille à marier d’un trousseau. Elle est moins vieille que cela malgré tout. Elle est toujours ingambe et prompte sur la balle. N’est-ce pas exactement ce qu’on lui demande?

V

Le numéro 37 sortira en septembre 2006Son thème: Enracinement des EFT/OISP dans un environnement local A vos plumes : vos expériences, vos témoignages, vos démarches.Contact: Marjorie LACROIX 064/23 90 56 - E-mail: [email protected]

En couverture

Au Four et Au Moulin - EFT - Mons

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Outre cela, outre les relations renfor-cées avec les conseillers en formation des CEFo, avec les plate-formes associatives, avec les fédérations, outre la formation, les travaux de recherche, les actions relatives à la sécurité, à l’égalité des chances, la validation des compétences, l’In-terfédé bénéficie d’une équipe de travailleurs qui met toute son énergie à accompagner la professionnalisa-tion du secteur.

Là tout de suite, l’enjeu est de suivre de très près toutes les discussions relatives à l’arrêté d’application du décret EFT-OISP et, particulièrement, la circulaire interprétative que la Ministre adressera à son adminis-tration pour permettre l’exécution complète du décret. Les enjeux en

Les derniers travaux en date de l’Interfédé ont consisté, d’une part, à organiser la représentation du secteur auprès de nombreuses instances et de le défendre face aux décideurs envisageant de modifier les règles de subventionnement; et d’autre part, à coordonner de vastes programmes de formation destinés aux travailleurs du secteur. Ce faisant, l’Interfédé répondait aux deux princi-pales missions que lui avait confié le Ministère de la Région Wallonne.

Il lui restait alors à promouvoir la cohérence entre les pratiques et le professionnalisme. Le professionna-lisme étant déjà une chose acquise pour la plupart des membres, il restait à développer la cohérence. Quel autre outil utiliser pour démarrer que “l’Essor”?

sont importants et nous devrions être rapidement fixés sur les heures prises en compte, les modes de calcul et les montants qui seront alloués à chacun. Nous discutons pas à pas, dans l’intérêt de tous, au risque parfois d’être un peu agaçants.

Actuellement, si l’on en croit ce numéro de “l’Essor”, on peut dire que c’est avec un vrai professionnalisme que l’Interfédé vise à promouvoir la cohérence, représenter et former l’ensemble des membres du secteur qui le souhaitent.

Disons-le quand-même: ce numéro, c’est un sacré numéro. •

Eric GravaPrésident de l’Interfédé

EDIT RIAL

Le pont - EFT - Sprimont

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ier

C’est alors que voient le jour une série d’initia-tives issues du courant

communautaire et auto-gestionnaire dont l’objectif consiste à allier vie privée et vie professionnelle autour d’une idéologie ou d’une croyance (La Poudrière, SST-Les Ateliers de Baulers1) tout en y accordant une place significative aux “laissés pour compte”2. Les porteurs de ce type d’initiatives sont alors souvent considérés comme des intellectuels de gauche, des 68tards (pas encore attardés…) ou des babas-cools que d’aucuns voient comme un phéno-mène de mode. On ne parle pas encore de formation professionnelle, et encore moins de pré-qualification, mais plutôt de mise au travail de personnes défavorisées dans les liens de contrats supportés par les pouvoirs publics: chômeurs mis au travail (CMT), article 60 §7 ou 61. L’objectif est, alors, prioritairement de donner du boulot et un revenu décent, conditions nécessaires (mais pas toujours suffisantes) pour acquérir ou retrouver les premières marches de la dignité.

Les activités: la récolte et le recy-clage (déjà) des vieux papiers, des vêtements usagés et des encom-brants.

Si les organisations syndicales ne manifestent alors que peu d’intérêt pour ce type d’initiative, puisque

leur fonds de commerce est avant tout constitué des “travailleurs avec emploi”3, d’autres pans du secteur associatif ne sont pas en reste: la fin des années 70 et le début des années 80 voient aussi l’éclosion de nouvelles associations à l’ini-tiative de prêtres ouvriers, comme Roger Vanthournout à Monceau-sur-Sambre, d’organismes d’éducation permanente - la FUNOC à Charleroi, RTA à Namur, les A.I.D; (Actions Intégrées de Développement issues du MOC) et bien d’autres encore - mais aussi de personnes actives dans le secteur de l’aide à la jeunesse ou de l’accueil et l’hébergement d’adultes en difficulté.

La caractéristique principale de ces actions de formation profes-sionnelle est bien la suivante: “avec

un public adulte (jeunes adultes en décrochage scolaire et au passé judiciaire souvent mouvementé, travailleurs sans emploi depuis de nombreuses années, …), une formation n’a de chances de porter des fruits que si elle n’a pas les apparences d’une formation, mais bien celles du travail”. L’action de ces associations, le plus souvent axée sur les travaux du bâtiment, l’horeca, le nettoyage, se situe dès lors au cœur d’un ensemble composé de trois sous-ensembles: l’action sociale, l’activité économique et la formation professionnelle, la petite vingtaine d’organismes actifs à cette époque-là se situant respectivement, en fonction de leur ascendance, sur un continuum où l’accent est mis davantage, selon le cas, sur l’une ou l’autre de ces composantes.

30 ans d’histoire du secteur ISP: de la guerre du feu à l’Homo-dispositif-intégré1974, l ’année du premier choc pétrolier, révélateur d ’une situation économique qui se dégrade, avec, en corol -

laire, des cohortes de travail leurs privés d ’emploi, et à leur tête les moins qualifiés et donc les moins aptes à

entamer une formation dite qualifiante dans un centre de formation professionnelle du Forem. Ainsi , déjà la

fin des “30 glorieuses” était marquée par un discours dominant qui laissait accroire qu’une bonne formation

débouchait sur un bon emploi. Oui, quand emploi i l y avait!

C

Le Trusquin - EFT - Marloie

1 Devenu par la suite Science et Service, Travail, puis Le Bric.

2 L’on parlait aussi de “Quart-Monde”, de “Sous-prolétariat” …

3 Voir à ce sujet l’article de Pierre Georis “Le secteur ISP face au monde économique”.

4 Arrêté Royal n° 499 du 31 décembre 1986 portant réglementation de la sécurité sociale de certains jeunes défavorisés.

5 Décret du 17 juillet 1987 relatif à l’agrément et au subventionnement de certains organismes exerçant des activités d’insertion socio-pro-fessionnelle ou de formation professionnelle continuée, et Arrêté du 5 octobre 1987 de l’Exécutif de la Communauté Française fixant les conditions et les modalités d’agrément, de subventionnement et de conventionnement d’oragnsimes exerçant des activités d’inser-tion socio-professionnelle ou de formation professionnelle continuée.

6 Certaines de ces associations étaient déjà plus ou moins subventionnées par d’autres dispo-sitifs, tels que le Programme de Résorption du Chômage (PRC), l’éducation permanente, voire en tant que Centre d’Expression et de Créativité (CEC), …

7 Arrêté de l’Exécutif de la Communauté Fran-çaise relatif à l’agrément et au subventionne-ment d’entreprises d’apprentissage profes-sionnel.

8 Art. 2, 1er alinéa de l’arrêté du 16 septembre 1991.

Il faut attendre l’année 1986 pour que le monde politique, sous la pression des acteurs de terrain, se décide enfin à bouger. En effet, confrontés ouver-tement à de sérieux problèmes avec les administrations sociales (l’ONSS) et fiscales (la TVA), qui reprochent à ces associations qui octroient à leurs “jeunes” des rémunérations en-dehors d’un contrat de travail ou qui réalisent pour des clients des travaux de bâtiment sans être assu-jettis à la TVA, d’être dans l’a-légalité, certains de ces pionniers du secteur de l’insertion socio-professionnelle pressent les décideurs politiques de légiférer. C’est ainsi que l’A.R. 499 en décembre 19864 et le décret de la Communauté Française en juillet 19875, exécuté par un arrêté quelques mois plus tard, marquent le début de la reconnaissance (et d’un subventionnement corres-pondant6), mais aussi du premier cadrage de ces différentes actions (public, qualification des formateurs, commission d’agrément, …).

Le premier autorise les associa-tions à accorder une rémunération aux jeunes mis en formation par le travail tout en limitant les cotisations sociales aux allocations familiales et à l’assurance maladie-invalidité. Le recours à cette pratique, vécu aussi par beaucoup comme un levier fonda-mental de la motivation à s’inscrire dans un parcours de formation par le travail, reste cependant l’apanage de quelques organismes seulement,

plus impliqués que les autres dans la voie de l’activité économique, mais concerne quand même, bon an mal an, deux à trois cent jeunes, sans ressources et n’ayant pas accès au filet de la sécurité sociale.

Le second donne un cadre à une série de dispositifs relevant de la Communauté Française parmi lesquels ces organismes de formation par le travail, mais aussi tous ceux menant des actions d’alphabétisa-tion, ou de réinsertion de personnes incarcérées et même des actions de formation des formateurs. C’est ce décret qui constituera le cadre juri-dique de référence des EFT jusqu’en 1995 et des OISP jusqu’à ce jour.

Un second arrêté de la Communauté française vient compléter le dispositif, en septembre 1991, et cadrer davan-tage encore les pratiques, en orga-nisant l’agrément des Entreprises d’Apprentissage Professionnel (EAP.)7. Celui-ci s’adresse à ceux des organismes de formation pour lesquels “… le travail fait partie de la démarche de formation …”8. ›››

Idée 53 - AFT - Bruxelles

Le Trusquin - EFT - Marloie

Ciblant à l’époque les jeunes de 18 à 25 ans et, par exception, les jeunes de moins de 18 ans inscrits dans un CEFA9, l’on peut dire que cet arrêté jette les fondements du dispositif réglementaire que l’on retrouve dans le décret du gouvernement wallon du 1er avril 2004 sur les EFT et les OISP et de son arrêté d’exécution en phase de finalisation.

Ce dispositif révèle également les premières démarches de regroupe-ment au sein d’un secteur qui s’est particulièrement étoffé puisque l’on dénombre pas moins de 130 initia-tives d’insertion socio-professionnelle en Wallonie et à Bruxelles en janvier 1986. En effet, quatre fédérations ou coordinations sont associées aux négociations avec les ministres de la Communauté Française compétents: les AID, ALEAP, CAIPS et ACFI, la coordination issue d’un regroupe-ment de la FISSAAJ et de la FIAS. Non contents de défendre l’existence de ce nouveau secteur, les représen-tants de ces fédérations jettent les bases d’une action commune d’in-formation, de communication et de formation continuée des travailleurs. EAP Consultance voit le jour et

bénéficie même d’un financement de la Communauté Française pour développer ces trois axes.

Du côté du financement, n’allez pas croire que l’agrément en tant que EAP ou comme organisme de formation continuée permet un subvention-nement univoque. Depuis plusieurs années déjà, les associations ont pris, en effet, la fâcheuse habitude de devoir jongler avec diverses sources, parmi lesquelles les diffé-rents programmes de résorption du chômage (PRC) occupent une place de premier choix, complétée, pour quelques uns, à partir de 1984, par une reconnaissance en tant qu’Ate-liers Régionaux, préfigurant le co-financement plus généralisé par la suite du Fonds Social Européen. Si l’accès à ces modes de financement constituent, pour les associations, des ressources non négligeables leur permettant de soutenir et de développer leurs actions, elles ne se doutent pas qu’elles mettent là le doigt dans l’engrenage de la justification hybride, des retards de versement s’affichant parfois en “kilo-années” au décompteur de leur compte en banque et des

contrôles à répétition dont certains ont pris la détestable habitude de désavouer le niveau de contrôle qui les a précédé.

Mais ne faisons pas la fine bouche et ne dénions pas le plaisir que nous avons eu, pendant près de 23 années, d’entendre chaque année le même refrain de la part de nos interlocuteurs qui, la bouche en cœur, nous serinaient: “ne vous inquiétez pas, ça ira mieux l’année prochaine, nous nous y engageons!”.

En 1989, coup de tonnerre dans le ciel (presque) bleu de la construc-tion progressive du secteur de l’ISP. Le 28 juin, Roger Vanthournout est assassiné par l’un “des jeunes auxquels il avait consacré sa vie”. Au-delà de l’émotion vécue, devant cet acte terrible, par tous ceux qui l’avaient connu de près ou de loin, la mort de ce prêtre-ouvrier rappelle à d’aucuns que l’accompagnement de personnes en difficulté n’est pas toujours sans danger, que la violence n’est pas absente du parcours de certains, chahutés de longue date dans la délinquance entre place-ment, prison et autres institutions. Paradoxalement, elle permet aussi de mettre davantage en lumière tout le travail réalisé par le secteur associatif en matière d’insertion et donne un fameux coup de projecteur aux premières entreprises d’insertion naissantes et au secteur de l’éco-nomie sociale dans son ensemble.

›››Le Trusquin - EFT - Marloie

198019701975 1985

1974 création des premières

futures EFT/OISP

1983 création de Lire et Ecrire

Quelques années plus tard, sous les coups de butoir des partisans d’une fédéralisation accrue de notre pays, la formation professionnelle devient en 1994 une compétence des régions. Si les EAP font bien l’objet d’un arrêté du gouvernement wallon qui les reconnaît doréna-vant en tant que EFT (Entreprise de Formation par le Travail)10, les OISP restent, quant à elles, régies par le décret du 17 juillet 1987 de la Communauté Française. A ce titre et jusqu’à la mise en œuvre du nouveau décret, les OISP peuvent mener des actions de formation qualifiante ou des actions de préparation à une formation qualifiante, mais aussi des actions d’orientation, de re-sociali-sation, sans finalité professionnelle obligatoire au départ. Elles relèvent, cependant, pour leur agrément et leur financement de décisions de la Région Wallonne. Les EFT, pour leur part, voient leur champ d’action élargi en terme de public puisqu’elles peuvent dorénavant s’adresser à des adultes âgés de plus de 25 ans,

tandis que se restreint, par ailleurs, leur liberté d’action, particulièrement sur le plan économique. Est intro-duite, en effet, la notion de “ratios financiers” sensés limiter l’activité économique à la stricte réalisation de l’objet social. Comme le monstre du Loch Ness, personne n’en voit, cependant, la couleur car, après quel-ques enquêtes, analyses statistiques et réunions avec les organisations patronales, ce sujet sensible est reporté à plus tard11.

Dernière date marquante du siècle dernier, l’année 1997 voit l’émer-gence d’un nouveau concept, sous l’impulsion du Conseil de l’Europe: le parcours d’insertion, présenté en grande pompe et de façon (in)con-testablement théâtrale, tous les opérateurs étant invités - contraints devrions-nous plutôt dire -, le 15 mai 1997 à insérer leur pièce dans un gigantesque puzzle afin de marquer leur adhésion (leur allégeance diront certains) à un nouveau dispositif comprenant trois axes princi-paux:

1. renverser la logique de l’offre et développer une logique de réponse aux besoins du marché de l’emploi,

2. accorder la priorité au développe-ment des personnes ainsi qu’à leur problématique d’insertion sociale et professionnelle plutôt qu’aux logiques des institutions,

3. réaliser cette adéquation dans un équilibre entre le coût, la qualité et la performance,

et quatre étapes (ou type d’actions) qui en découlent:

a. socialisation,

b. remise à niveau, préqualification et orientation,

c. formation qualifiante,

d. transition à l’emploi.

S’ouvre alors un vaste chantier de construction de partenariats (dont naissent notamment les carre-fours-formation), de mise en place d’instances de concertation et d’avis au niveau sous-régional (les CSRC12) comme au niveau régional (la CCPI13).

9 Centre d’Education et de Formation en Alter-nance.

10 Arrêté du Gouvernement wallon du 6 avril 1995 relatif à l’agrément des entreprises de formation par le travail.

11 Voir, à ce sujet, l’article de Pierre Georis, “ Le secteur ISP face au monde économique”.

12 Commissions sous-régionales de coordination réunissant les différents acteurs et opérateurs impliqués.

13 Commission Consultative (régionale) du Par-cours d’Insertion.

›››Le Trusquin - EFT - Marloie

2007 entrée en vigueur

nouvelles législations EFT/OISP

1990 20001995 2005

1988 création EAP Consultance

future Interfédé

1987 premier décret OISP

1995arrêté EFT

1997 le Parcours d'Insertion

est mis en place

2004nouveau décret

EFT/OISP et décret DIISP1998

le Dispositif Carrefour Formation est mis en place

Le secteur associatif est, comme souvent, critique, mais il s’y implique (en devant parfois enfoncer des portes qui ne leur sont pas naturelle-ment ouvertes), recrute du personnel pour les carrefours-formation, afin d’accorder une attention plus parti-culière au public qui le concerne, et met en place les plate-formes associatives qui, au-delà de tous les clivages, réunit les EFT et les OISP dans un cadre sous-régional.

Au cours de la même époque, EFT Consultance se transforme et devient, avec un cinquième parte-naire, la coordination Lire & Ecrire, l’Interfédération des organismes de formation et d’insertion Wallonie-Bruxelles. L’Interfédé bénéficie, en tant qu’interlocuteur privilégié des partenaires et des pouvoirs publics, d’une reconnaissance et des finan-cements nécessités par les missions qui lui sont confiées.

Les premières évaluations sur le parcours d’insertion, effectuées par le Service des Etudes et de la Statistique de la Région Wallonne en 2000, sont plutôt sévères:

1. les objectifs du dispositif sont complexes, peu opérationnels et la classification des opérateurs entre quatre niveaux est inopérante,

2. il manque d’un pilote dans l’avion permettant d’assurer la cohérence de l’ensemble,

3. en dépit de réels efforts, il reste encore beaucoup à faire pour assurer la diffusion et la transpa-rence de l’offre de formation au profit des bénéficiaires, et, par ailleurs, le suivi du parcours de ceux-ci n’est toujours pas assuré, faute d’accord entre les acteurs concernés.

A son niveau, votre serviteur, associé depuis le début du parcours à la négo-ciation avec les autres partenaires, peut témoigner de la lourdeur (et parfois de l’immobilisme) qui ont marqué les innombrables réunions de concertation et de construction du dispositif.

Forte de cette évaluation, Marie Arena, devenue Ministre de l’emploi et de la formation professionnelle en Région Wallonne, initie une réflexion entre les différents acteurs qui se remettent autour de la table en vue de jeter les bases du dispositif intégré d’insertion socio-professionnelle (DIISP) dont le cadre juridique sera publié au Moniteur Belge le même jour que le décret sur les EFT et les OISP: le 1er avril 2004. Deux poissons pas facile à mettre au monde puisque de leur genèse à l’accouchement définitif, il faudra compter cinq ans pour le premier et près de sept années, sans doute, pour le second14.

Entretemps, deux autres chantiers de taille concernent directement notre secteur: la réforme des PRC et leur transfert en APE15 - rappe-lons que près de 75 % des 1.400 travailleurs du secteur sont employés via un contrat APE - et les (premiers?) accords du non-marchand qui déter-minent la mise en place d’un cadre dans les relations sociales entre employeurs et travailleurs. Ici aussi, une gestation particulièrement longue qui donne naissance en septembre 2002 à une Convention Collective de Travail (CCT) fixant une première classification de fonctions et des barèmes qui s’imposent à tous les employeurs du secteur. Il s’agit presque d’une révolution pour toutes ces associations tant les pratiques dans ce domaine étaient diversifiées, un cadre supplémentaire en tout cas qui permet de mieux organiser la

gestion des personnels du secteur, mais dont on ne peut encore mesurer aujourd’hui les effets financiers à long terme.

Le point d’orgue de ce mouvement de construction et de structuration de notre secteur de l’insertion socio-professionnelle en Région Wallonne sera, sans conteste, l’entrée en vigueur du décret et de l’arrêté sur les EFT et les OISP, prévue au 1er janvier 2007. Un souhait: qu’il ne marque pas l’entrée dans une phase d’immobilisme déterminé par l’ensemble des dispositions réglementaires, mais au contraire qu’il laisse une place à la souplesse et à la créativité qui ont toujours prévalu dans les réponses appor-tées par le secteur associatif aux besoins et aux attentes d’un public, malheureusement plus nombreux chaque année, en décrochage avec un monde du travail de plus en plus exigeant et une société chaque jour plus complexe. •

Eric Mikolajczak, avec Dan Wendorf

ALEAP Administrateurs de l’Interfédé

14 Nous devons à la vérité de dire que l’une des causes du retard pris dans l’élaboration de l’arrêté d’exécution du décret sur les EFT et les OISP est à mettre sur le compte d’une action intentée devant la Cour d’Arbitrage par l’une des fédérations ALEAP (en l’occurrence) et plusieurs EFT qui y sont affiliées contre l’une des dispositions du décret qui impose aux EFT d’accorder un défraiement de 1 €/heure maximum à leurs stagiaires, alors que ces EFT utilisent de longue date l’A.R. 499 mentionné plus haut. La Cour les a déboutés.

15 Aide à la Promotion de l’Emploi: décret du 25 avril 2002 et arrêté du 19 décembre 2002.

›››

Le Trusquin - EFT - Marloie

Doss

ier

Partant du constat que le modèle scolaire n’a pas su répondre à tous les

besoins de tous les enfants pour les préparer à leur vie d’adultes citoyens, conscients de leurs compétences et de leurs capacités d’action, des méthodes pédagogiques diffé-rentes vont proposer aux personnes peu qualifiées de rencontrer ces besoins.

Au début, on ne parlait pas encore d’EFT (ou d’EAP), ni d’OISP. Le modèle du compagnonnage, les formations centrées sur la participa-tion, la construction et l’appropriation par les stagiaires de leur projet de vie, couplés à un accompagnment psycho-social étaient encore des associations de fait ou des asbl sans agrément particulier.

Au fil du temps, ces initiatives ont eu besoin d’un cadre légal sur lequel s’appuyer et d’un financement. Le 1er cadre légal arrive le 17 juillet 1987 via le décret de la Communauté française relatif à l’agrément et au subventionnement des organismes exerçant des activités d’insertion socioprofessionnelle et de forma-tion continuée. Ce décret définit le public concerné par les actions de formation et d’insertion, les types d’actions possibles, et fixe des prio-rités pour l’agrément. Déjà, il met en avant les principes de complémen-tarité avec les autres opérateurs et la spécificité des méthodes et du public. Il met aussi en lumière l’apport innovant des actions de formation et d’insertion du secteur associatif.

Deux grandes notions se distin-guent et sont reconnues progres-sivement:

L’Entreprise d’Apprentissage Professionnel (EAP), - qui désigne les dispositifs qui utilisent le travail (en ce compris la partie commercia-lisation) comme outil pédagogique, reconnue par un Arrêté d’application le 23 janvier 1987;

L’Organisme d’Insertion Socio-Professionnelle, - qui désigne tous les autres dispositifs associatifs agréés de formation et d’insertion en Wallonie. L’OISP est reconnu via les Arrêtés de l’Exécutif de la Communauté française du 5 octobre 1987 modifié par l’Arrêté du Gouvernement wallon du 13 juin 1996 et de l’Arrêté de l’Exécutif de la Communauté française du 8 novembre 1988;

En 1988, les premières démarches de regroupement au sein d’un secteur naissent. Trois fédérations, l’ACFI1 (la coordination de la FIAS et de la FISAJ), ALEAP2 et CAIPS3 démar-rent un projet commun grâce à une première convention dans le cadre du décret du 17 juillet 1987. C’est la naissance de “EAP consultance”, le premier nom de l’Interfédé…

1 Actions coordonnées de formation et d’inser-tion socio-professionnelle.

2 Association libre d’entreprises d’apprentissage professionnel.

3 Concertation des ateliers d’insertion profes-sionnelle et sociale.

De EAP consultance à l’Interfédé … reconnaissance, évolution et développementLorsqu’est né le secteur de l ’ insertion socioprofessionnelle, au début des années 80’s, on ne parlait pas encore

de “secteur”. Quelques-unes et quelques-uns, issus des services d ’hébergement, des services d ’aide à la jeu-

nesse, de l ’éducation permanente, des organisations de travail leurs, travail leurs sociaux ou particuliers, prêts à

s’ investir, se sont lancés dans des actions de formation et d ’ insertion pour et avec des adultes ayant parcouru

des chemins de vie difficiles.

›››

PLe Bric - EFT - Nivelles

10

Le projet consiste en une mission d’information, de formation et de conseil aux EAP dans les domaines économique, social et pédago-gique. L’association soutient la coopération des fédérations membres et répond aux demandes des EAP non affiliées à ces fédérations. Le 15 février 1989, le premier numéro du trimestriel des EAP consultance était publié à 600 exemplaires. Aujourd’hui, notre magazine relooké est publié à 1400 exemplaires. 1989 est aussi la date de notre première Assemblée sectorielle, le 2 mars.

En 1992, une quatrième fédération se joint au groupement, les AID4.

En 1994, la compétence de la forma-tion professionnelle est transférée de la Communauté française vers la Région wallonne (et à la COCOF pour Bruxelles Capitale).

En 1995, les EAP sont rebaptisées EFT via l’Arrêté du Gouvernement wallon du 06 avril 1995, sous la tutelle du Ministre Liénard. “EAP consultance” devient alors “EFT consultance”. Son objet social reste inchangé.

Deux ans plus tard, en 1997, une cinquième fédération se joint à EFT consultance. Il s’agit de Lire et Ecrire, dont les membres sont OISP. EFT consultance devient alors l’In-terfédération des Organismes de formation et d’insertion Wallonie-Bruxelles asbl, nom statutaire actuel de l’Interfédé.

En 1998, l’Interfédération s’inscrit dans un projet partenarial d’enver-gure avec les acteurs de l’insertion - actuellement pièce maîtresse du Dispositif intégré d’insertion socio-professionnelle - les Carrefour Formation, devenus en 2004 les Carrefour Emploi Formation5.

L’Interfédération bénéficie alors par convention de 20 etp ACS qui sont engagés pour travailler comme “Animateurs et Animatrices péda-gogiques”. Au moment de la trans-formation des Carrefour Formation en Carrefour Emploi Formation, les animatrices et animateurs devien-nent des “Conseillères et des Conseillers en formation”. Le projet évolue, le vocabulaire s’adapte pour refléter les nouvelles réalités.

Ces trente dernières années, répon-dant aux évolutions sociales, les politiques de l’emploi prennent une nouvelle direction. Quittant l’Etat Providence pour l’Etat Social Actif, il ne suffit plus d’être “pauvre et indi-gent” pour bénéficier du “soutien” de l’Etat. Il s’agit, si l’on est dans cette situation, de prouver aujourd’hui son activation sur le marché de l’emploi. Exclu “dans” l’état providence, on devient une personne “devant s’in-sérer” dans l’Etat Social Actif, l’esprit et les exigences qui portent sur chaque personne ont changé.

Cette nouvelle politique de l’inser-tion et de l’emploi implique pour les pouvoirs publics une autre relation avec le secteur associatif. Dès lors, l’exigence des pouvoirs publics augmente. L’associatif doit faire les preuves de sa capacité à participer à l’insertion sociale et professionnelle des personnes.

Au fil de la dernière décennie, les associations ont été soumises à des contrôles administratifs, financiers et pédagogiques de plus en plus rigoureux. Dans le même temps, la confiance du secteur public envers le secteur semble se développer. Notre professionnalisme est reconnu. Pour l’Interfédé, cela sera synonyme aussi de nouvelles évolutions …

Confrontant les pratiques, les objec-tifs à atteindre, et les conditions d’opérationnalisation des actions de formation- insertion, les acteurs de l’insertion considèrent avec les années et l’expérience que le décret de 1987 est devenu trop vague et ne répond plus aux réalités du moment. Il est alors question de regrouper les EFT et les OISP dans un seul et même décret qui structure les pratiques et permettra plus tard de les inscrire dans un dispositif plus global centré sur une des idées maîtresses du décret de 1987: la complémentarité entre les opérateurs (idée que l’on retrouve évidemment dans le décret relatif au Dispositif Intégré d’Insertion Socioprofessionnelle).

Négocié par l’Interfédération pendant deux années avec les pouvoirs publics, le décret relatif à l’agré-ment et au subventionnement des organismes d’insertion sociopro-fessionnelle et des entreprises de formation par le travail est voté le 12 février 2004.

Ce décret marque un tournant dans l’histoire de notre secteur. Il est syno-nyme d’une forte reconnaissance par la Région wallonne des EFT, des OISP et de l’Interfédération.

›››Le Bric - EFT - Nivelles

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En ce qui concerne l’Interfédé, le décret la reconnaît comme l’organi-sation qui développera trois missions dans le champ de l’ISP associatif:

• Promouvoir la cohérence et la qualité des pratiques adminis-tratives, organisationnelles et formatives;

• Assurer la représentation des EFT et des OISP dans les instances de pilotage, d’accueil et d’information du DIISP ainsi que dans les autres instances de réflexion relatives à la formation des adultes;

• Coordonner l’offre de formation du personnel des OISP et des EFT et en assurer, le cas échéant, la formation continuée.

Ces trois missions décrétales n’en-lèvent en rien à l’Interfédé son objet social de départ, plus large. En 2003, avant même le vote du décret, l’Interfédération perd son agrément d’OISP au profit d’une reconnaissance annuelle (et peut-être prochainement tri-annuelle) qui conventionne chaque année avec la Région wallonne les lignes de son plan d’action et la mise en œuvre de ces missions décrétales dans un objectif de “professionnalisation” du secteur: “Professionnaliser, c’est construire ensemble6, en tenant compte de son environnement7 et des ressources de celui-ci, des

connaissances8 et des compé-tences9 pour faire son travail avec humanité10, en rendant cohérent11, au sein d’un centre l’ensemble de ses actions: accueil, orien-tation, formation, organisation, évaluation, communication… et en regard de l’appropriation qui est faite des valeurs de changement sociétal12...”13

En 2003, nous publions notre premier plan d’actions organisé selon les trois missions qui nous sont confiées par décret. Chaque année, nous publions notre nouveau plan d’actions orga-nisé selon ces mêmes missions.

En 2006, nous mettons l’accent sur les actions suivantes:

1. Le DIISP et le décret EFT-OISP: représenter et relayer les préoccu-pations du secteur et les besoins spécifiques du public précarisé dans les différentes instances du DIISP et au sein des instances relatives au décret des EFT et OISP;

2. Financement du secteur: dialo-guer avec les fonds et les pouvoirs subsidiants pour faciliter l’échange d’informations entre ceux-ci et les opérateurs, l’accès aux dispositifs pour les opérateurs et la cohérence administrative des projets;

3. Concertation sociale: relayer les préoccupations du secteur au sein des instances de concertation sociale et co-construire un cadre social renforçant la professionna-lisation des EFT et OISP;

4. Formation continuée et recherche: proposer aux direc-tions et au personnel des EFT et OISP un projet de formation qui réponde à leurs besoins en tant que professionnels de l’ISP. Permettre un cheminement indi-viduel et collectif pour développer en permanence sa profession-nalité. Le projet de formation continuée se co-construit avec les acteurs de l’ISP, et en s’alimen-tant, notamment, des évaluations et recherches menées avec les travailleurs du secteur;

5. Carrefour Emploi Formation: informer, orienter et conseiller au sein des CEFo, en apportant une expertise en matière d’inser-tion des publics fragilisés sur le marché de l’emploi;

4 Action intégrée de développement.5 Pour l’histoire de ce dispositif, le lecteur peut

se référer au numéro 31 du “Nouvel Essor”: “Petites et grandes histoire des Carrefours”, mars 2005, Interfédération EFT-OISP.

6 Idée de co-construction. Construire non pas en imposant une vision “d’en haut”, mais bien une vision “d’ensemble”: Interfédération, Fédéra-tions, EFT, OISP (travailleurs et responsables) et stagiaires.

7 On ne professionnalise pas partout de la même manière. Pas de standardisation.

8 Les compétences ne peuvent exister sans les connaissances.

9 Connaissances et compétences sont deux ingrédients au même terreau.

10 En ce sens ou l’objectif final est que la personne soit actrice de ce monde… Ce mot n’est pas à comprendre en référence à une idéologie.

11 L’autonomie de chaque EFT-OISP doit être pré-servée. Cela fait partie des valeurs défendues par l’Interfédération. Cela étant, l’Interfédé se positionne pour que chaque EFT/OISP défi-nisse sa propre cohérence interne; pour que chaque acteur agisse en cohérence avec les valeurs portées par son centre.

12 Objectif ultime: le changement de société… Le savoir est une construction et pas un état; et il est fondamental de le construire collecti-vement.

13 Cette définition de la professionnalisation a été construite avec les cinq fédérations membres de l’Interfédé et se veut un fil conducteur pour nos actions.

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6. Veille statistique: recenser et traiter les informations chiffrées essentielles du secteur afin d’in-former acteurs et partenaires des EFT et OISP, de préparer les évolu-tions légales et administratives, de mieux cibler nos actions, etc;

7. Communication: promouvoir le secteur, mieux faire connaître nos actions, améliorer leur impact, dialoguer avec les acteurs du secteur et leurs partenaires;

8. Sécurité: promouvoir la sécu-rité sur les lieux de formation et accompagner les EFT et OISP dans leurs démarches en favorisant leur autonomie en la matière;

9. Egalité des chances: faire connaître et promouvoir les politiques et pratiques positives d’égalité des chances du secteur, faciliter la prise en compte de cette dimension dans l’action quotidienne des EFT et OISP;

10.Validation des compétences: organiser la réflexion sur l’accès des stagiaires au dispositif.

Pour mettre en œuvre ces actions, l’Interfédé bénéficie d’une conven-tion avec la Région wallonne et du soutien du FSE, de 23 conseillers en formation dans les CEFo, de 6 travailleurs au siège social, de 19 relais via les représentants associa-

tifs dans les plateformes EFT-OISP et les CCSR et travaille en complète coopération avec les 5 fédérations et leurs permanents.

Notre dynamique met aujourd’hui l’accent sur une encore plus large concertation et participation des acteurs de l’ISP. Certaines de nos actions privilégient un contact plus direct avec les centres.

En Wallonie, on dénombre 150 centres (une trentaine à Bruxelles). Ils représentent un volume de 1500 travailleurs organisant ensemble 4 millions deux-cent mille heures de formation pour 18.000 stagiaires. Notre secteur peut ainsi se prévaloir d’être un protagoniste de poids.

La reconnaissance du secteur et de l’Interfédé (décret EFT-OISP, accords du non-marchand, subven-tions APE…), de l’importance du travail mené pour les besoins des personnes peu qualifiées, infra scolarisées et/ou en difficulté, est aussi une reconnaissance de notre professionnalisme et de la qualité de nos actions.

Ce professionnalisme implique pour les centres, des asbl et centres de CPAS, constitutifs d’un secteur encore très jeune (25 ans) une “énorme sollicitation dans la gestion quotidienne”14.

Le secteur aujourd’hui affirme son identité15. Une identité qui s’épanouit non seulement à travers le sens de l’action, à travers les spécificités de notre public, de nos méthodes, mais également à travers chaque métier. Les formateurs de l’insertion socioprofessionnelle, par exemple, sont des formateurs à part entière, qui allient à leurs savoir-faire, des compétences propres à la formation d’un public en difficultés, en rupture avec le modèle scolaire classique.

Cette auto-exigence de professionna-lisme, et cette exigence des pouvoirs publics, ne remettent pas en cause la capacité d’analyse critique, d’innovation, de souplesse et la promptitude des associations. Les associations conservent leur capacité d’analyse et peuvent porter leurs voix auprès des pouvoirs publics, notamment via l’Interfédé, comme organisation représentative.

14 Rapport de recherche de l’Association pour une Fondation Travail Université asbl: “Politiques de formation du personnel des entreprises de formation par le travail et des organismes d’insertion socioprofessionnelle en Wallonie et participation au programme de formation de l’Interfédération”, commanditée par l’Interfédé, p17, févr.2006.

15 Et l’Interfédé fait de même… La reconnais-sance des EFT et OISP et la reconnaissance de l’Interfédé évoluent conjointement…

Le Bric - EFT - Nivelles

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Cette faculté est une opportunité tant pour les pouvoirs publics qui trouvent là matière à déceler les probléma-tiques naissantes, les possibilités d’adaptation et d’innovation, que pour les associations elles-mêmes qui, tout en ambitionnant un objectif d’insertion que les pouvoirs publi-ques identifient également comme leur priorité, conservent- en sus - les logiques qui les ont vues naître.

L’Interfédé et les associations ne sont pas des paras régionaux. C’est une logique win-win, pour les pouvoirs publics, les associations et in fine les stagiaires qui résout l’équation.

Les logiques de service public et les logiques associatives sont complé-mentaires. Les services publics garantissent des droits égaux pour tous, régulent et arbitrent. Ils offrent un cadre cohérent pour chacun. Cela nécessite des infrastructures et une organisation complexes, qui mobi-lisent souvent beaucoup de temps lors des phases de construction ou de changement. Les associations peuvent répondre avec rapidité à certaines situations d’urgence et dénicher ce qui ne fonctionne pas dans le système régulé.

Ainsi, le service public a besoin d’un associatif fort et le secteur associatif a besoin d’un service public solide.

En tant qu’interlocuteur des pouvoirs publics et organisation représentative d’un secteur associatif en plein envol, l’Interfédé passe aujourd’hui d’un plan d’actions à un projet de dévelo-ppement. Ce projet est à construire ensemble, en tenant compte de nos diversités, de notre environnement, de nos valeurs. •

Maryline De BeukelaerDirectrice de l’Interfédé

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Connaissez-vous l’aïeul du centre public d’Aide sociale (CPAS)? C’est la commission d’Assistance publique (créée en 1925). Et son descendant au CPAS, c’est … le CPAS! Mais cette fois pour centre publique d’Action sociale (depuis 2000).

Quelles sont coquettes nos insti-tutions1, un petit lifting par ci, une reconstitution faciale par là et hop on nous refait une nouvelle politique sociale pleine de dynamisme et d’entrain.

Ainsi, le tout est de savoir si on préfère être assisté, aidé ou activé. A première vue, “Assisté”, “Aidé” ça ne sonne pas bien! Ca fait Belgique de papa, on imagine la bienveillance paternaliste et toute l’inertie qui y est liée. D’un autre côté si “action” a une connotation positive (“Debout les gars réveillez vous, on va aller en mettre un coup,…”), être “activé”, par contre, ça le fait moins. Tout de suite, la pression est palpable. C’est “bouge de là”! “Marche ou crève”! Mais surtout marche!

En forçant le trait, le message que fait passer un Etat qui se dit social et actif revient à démontrer que le pauvre est responsable de sa situation précaire et est responsable de la charge qu’il représente pour la société. Le pauvre doit donc tout mettre en œuvre pour s’extraire de sa situation et, pour l’y aider, dans sa “grande mansuétude”, l’Etat lui “impose” un contrat. On n’a de cesse de nous seriner avec la responsabilité individuelle, mais dans les faits, les premières attaques de ces nouvelles politiques sociales prennent pour cibles l’autonomie et la liberté individuelle. Paradoxal!

Parmi les différentes perversions de ces politiques sociales on iden-tifie notamment une inversion de la responsabilité et de la solidarité (de la société vers l’individu)2. Avec pour effet “collatéral” un déplacement du conflit de classe vers un conflit inter-classe (ce sont les pauvres qui sont mis en concurrence les un vis avis des autres dans la grande course au mérite). Quand aux institutions, il leur reste à compter les points, à “sélec-tionner les pauvres à haut potentiel”,

ceux qui font bonne figure, ceux qui garantiront les meilleurs résultats en taux d’insertion. Les autres? Bof, on les occupe, cause perdue!

Dans le secteur de l’insertion socio-professionnelle bon nombre refusent cette fatalité. Ils ne souhaitent pas jouer la carte de l’activisme: pas de sélection, ni d’occupationnel. Mais un réel travail d’émancipation indi-viduelle et collective avec tous. •

Eric AlbertuccioAID - Permanent

ntrefilets : Histoire du secteur à travers les glissements sémantiques

1 Evitons les malentendus, loin de nous la volonté de dénoncer de façon poujadiste et univoque les seul CPAS, ni même la qualité du travail ou la conscience professionnelle de la plus part de travailleurs de CPAS. C’est ici une façon de souligner le caractère symbolique d’un ravalement de façade, illustrant à sou-hait l’évolution des politiques sociales telles que décidées cette dernière décennie par nos femmes et hommes politiques.

2 Lire à ce propos Christian Arnsperger, L’avè-nement du solidarisme responsabiliste et l’in-version de la solidarité dans L’Etat social actif, vers un changement de paradigme, P.I.E.-Peter Lang, 2005

Attention, ça glisse! : Un “A” peut en cacher d’autres!

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Années 60 - “Golden Sixties” - la Belgique fait

appel massivement à une main-d’œuvre immigrée

Pour répondre aux besoins de ces travailleurs, dont la plupart n’ont jamais été scolarisés, des cours du soir d’alphabétisation se créent au sein des diverses structures, le plus souvent associatives et proches des mouvements ouvriers, qui les accueillent. Ces cours du soir sont animés par des militants bénévoles, centrés sur la problématique de l’immigration, financés peu ou prou par les pouvoirs publics chargés de cette main-d’œuvre.

De cette histoire, trois éléments sont fondateurs de l’alphabétisation d’aujourd’hui:

• un ancrage fort et très majoritaire dans le secteur associatif,

• un bénévolat important,

• un patchwork de multiples initia-tives citoyennes qui se créent au départ de besoins exprimés ou rencontrés en différents lieux, par des publics très divers, mais majoritairement immigrés, pour-suivant des objectifs variés, aux ressources éminemment varia-bles.

Années 70 - Crise écono-mique - Chômage

La crise économique des années 70 fera apparaître la persistance de l’analphabétisme parmi la population belge, et ce malgré une scolarité effectivement obligatoire depuis 1919. Jusqu’alors, la majorité des formateurs d’alphabétisation ne pouvait soupçonner qu’il existait des analphabètes belges.

Elle posera également le problème de la reconversion des chômeurs et par conséquent de la “remise à niveau des connaissances” de tous ceux qui, tout en n’étant pas analphabètes, étaient néanmoins peu scolarisés et dont les savoirs dits “de base” étaient insuffi-sants pour réussir une requalification sans accompagnement.

De ces années datent deux politiques qui vont avoir une importance capitale pour la reconnaissance et le dévelop-pement de l’alphabétisation:

• le Décret sur l’éducation perma-nente, qui permet d’ancrer l’alpha-bétisation dans le cadre culturel et politique et dans une perspective conscientisante et émancipa-trice.

• Les programmes de résorption du chômage qui financent aujourd’hui de manière stable et importante la majorité des emplois des forma-teurs.

L’alphabétisation en Communauté française de Belgique 1965-2005Jamais la réalité de l’analphabétisme n’a été aussi reconnue, jamais des moyens aussi conséquents n’ont été dégagés,

jamais la reconnaissance institutionnelle n’a été aussi forte que durant ces cinq dernières années. Et cependant…

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L'arbre à savoirs - Lire et Ecrire 2003

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Années 80 - Le chômage persiste - L’exclusion sociale grandit

Face aux constats de:

• l’importance d’un échec scolaire persistant (10% des jeunes sortent de l’enseignement obligatoire sans aucun diplôme),

• la non-adaptation de la forma-tion initiale aux changements de société,

• la faible prise en compte des moins scolarisés dans les dispositifs publics de formation d’adultes dépendant des ministères de l’Education et de l’Emploi.

Les mouvements ouvriers créent des associations d’insertion socio-professionnnelle qui vont définir, créer et mettre en place - à la place des pouvoirs publics défaillants - un réseau de formations profession-nelles et de remise à niveau, pour les adultes peu et/ou mal scolarisés.

Puis, en 1983, à partir de l’expérience du Collectif d’Alphabétisation et d’ATD - Quart-Monde ces mêmes associations vont créer Lire et Ecrire, qui se donnera pour objectifs:

• d’attirer l’attention de l’opinion publique et des pouvoirs publics sur le problème de l’analphabé-tisme des adultes,

• de démultiplier les lieux de forma-tion,

• de chercher les moyens et de créer les structures nécessaires pour garantir le droit à une alpha-bétisation de qualité pour tous.

Années 90 - Régionalisation - Déficits publics - Construction européenne - Pauvreté

Années de restrictions budgétaires, liées aux immenses déficits publics de l’Etat, dans un contexte de construction économique euro-péenne. Restrictions qui touchent l’enseignement, la culture, la sécurité sociale, …

Années de transfert aux Régions de compétences de formation profes-sionnelle des adultes, d’aide aux personnes, d’intégration des immi-grés, …

Les pouvoirs publics vont cepen-dant impulser, pour faire face aux nouveaux besoins de formation, des politiques qui vont avoir des effets sur l’offre d’alphabétisation.

Au niveau de la Communauté fran-çaise, le Ministère de l’Education va développer, dans le cadre de la formation initiale, les Centres de Formation en Alternance pour jeunes de 16 à 25 ans en échec scolaire. L’Enseignement de Promotion sociale, cours du soir de formation continuée des adultes qui dépend du Ministère de l’Education va se doter d’un nouveau décret, développer des cours du jour pour chômeurs, des modules de cours généraux permettant aux adultes d’obtenir les diplômes d’enseignement secondaire de premier cycle et d’enseignement secondaire de deuxième cycle, déve-lopper des modules d’alphabétisation et de formation générale de base. Le secteur de l’Education permanente

de l’administration de la Culture va reconnaître et soutenir les struc-tures régionales de Lire et Ecrire et certaines associations locales.

Les nouveaux pouvoirs régionaux vont développer et stabiliser les politiques d’intégration des immigrés et les politiques d’insertion socio-professionnelle. Ils vont également augmenter le nombre d’emplois attribués aux associations dans le cadre des programmes de résorption du chômage.

Les politiques d’intégration des immi-grés, pour la plupart développées à un niveau local, soutiennent alors, sur base de financements annuels, des projets variés dont notamment des initiatives d’alphabétisation de femmes immigrées.

Les politiques d’insertion socio-professionnelle se développent sur base de décrets qui reconnaissent explicitement une place à l’alpha-bétisation, les demandeurs d’emploi analphabètes bénéficiant des mêmes conditions d’accès que n’importe quel autre demandeur d’emploi.

Cette décennie voit donc un dévelop-pement important des moyens et de l’offre d’alphabétisation: les associa-tions d’alphabétisation accueillaient 3.000 apprenants en 1990, elles en accueillent 8.000 en 1999.

Pourtant, à l’aube du XXIème siècle et de la “société de la connaissance” que l’Europe appelle de ses vœux, on est loin, très loin, d’une situation idyllique.

L’école continue à produire des illettrés.

Les restrictions budgétaires dans les secteurs de l’Education empêchent la pleine réalisation des décrets centrés sur l’Education des adultes (Education permanente et Promotion sociale) et en diminuent fortement la portée, empêchant l’alphabétisation de s’y développer.

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L'arbre à savoirs - Lire et Ecrire 2003

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Les dispositifs d’insertion sociopro-fessionnelle des pouvoirs régionaux proposent un cadre contractuel de partenariat aux associations qui, bien sûr, leur assure des moyens, reconnaît la qualité et la pertinence de leur action, mais qui les implique dans des politiques de contrainte, de contrôle social et d’exclusion par l’Etat fédéral des “ratés du parcours”, ce qui est le comble pour des asso-ciations qui luttent contre l’exclusion de ces publics.

Les politiques d’intégration des immigrés n’ont rien prévu pour faire face à l’accueil et à l’insertion des nouveaux candidats réfugiés.

Et, faute de moyens, les associations d’alphabétisation doivent refuser des milliers de personnes.

Années 2000: de nouvelles avancées?

Face à cette situation, suite à la médiatisation des tensions dans les files d’attentes lors des inscriptions aux formations à Bruxelles et aux interpellations de Lire et Ecrire, dans un contexte international porteur (directives européennes, décennie des Nations unies pour l’alphabé-tisation), les gouvernements vont prendre de nouvelles initiatives.

Celles-ci se concrétiseront notam-ment par la signature d’un accord de coopération sur l’alphabétisation entre la Communauté française, la Région wallonne et la COCOF de la Région bruxelloise, qui institue une “conférence interministérielle sur l’al-phabétisation”. Cette Conférence, qui réunit tous les ministres concernés de ces trois niveaux de pouvoirs et qui s’est tenue pour la première fois le 8 septembre 2005, n’est néanmoins que l’aboutissement d’efforts politi-ques et financiers importants réalisés depuis le début des années 2000.

Il s’agit de:

• l’adoption d’un ‘Plan bruxellois pour l’alphabétisation”, conçu en collaboration avec Lire et Ecrire Bruxelles, décidé par le Gouvernement régional bruxellois le 23 mai 2002 et par le Collège de la Commission communautaire française le 30 mai 2002.

Ce plan dote Lire et Ecrire Bruxelles d’une centaine d’em-plois supplémentaires, ainsi que des moyens de financer l’ouverture de nouveaux locaux, et de créer, en partenariat avec un réseau associatif dense, 2000 places supplémentaires dans les forma-tions d’alphabétisation.

• A la Communauté française, le Gouvernement adoptait le 22 novembre 2001, une déclara-tion sur l’alphabétisation. Celle-ci se proposait de créer une Conférence interministérielle, de doubler en cinq ans les moyens mis à disposition de l’alphabétisa-tion dans le cadre de l’Education permanente et d’y créer un service spécialisé.

• A la rentrée de septembre 2002, la Ministre en charge de la promo-tion sociale créait à Bruxelles 300 places supplémentaires en alphabétisation, puis 150 autres en “Français Langue étrangère” à la rentrée de septembre 2003.

• En Région wallonne, c’est prin-cipalement dans le cadre de l’insertion socioprofessionnelle que l’offre de formation pour les demandeurs d’emploi et les travailleurs a pu se renforcer, notamment par la conclusion de plusieurs conventions qui visent l’augmentation de l’offre de formation pour les demandeurs d’emploi et les travailleurs ainsi que la sensibilisation des agents de l’insertion, pour une meilleure prise en compte des personnes en situation d’illettrisme.

De manière plus générale, pour l’ensemble du secteur associatif, ces années sont marquées par une intense activité “décrétale”: nouveaux décrets sur les Entreprises de Formation par le Travail et les Organismes d’Inser-tion Socioprofessionnelle, nouveau décret bruxellois sur la cohésion sociale, décret sur les écoles de devoirs, nouveau décret sur l’Edu-cation permanente… Mais aussi nouvelles lois sur les asbl et sur le volontariat.

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L'arbre à savoirs - Lire et Ecrire 2003

Ainsi que par de nouvelles activités patronale et syndicale: commission paritaire, fonds sectoriels, conventions collectives de travail… et revalorisa-tions salariales pour les travailleurs du secteur socioculturel.

Toutes ces mesures vont avoir des effets concrets: en cinq ans, entre 2000-2001 et 2004-2005, le nombre d’apprenants accueillis par les opérateurs d’alphabétisation va doubler, passant de 8.000 à 16.000 personnes.

A Bruxelles, le nombre de travailleurs, qui était resté stable entre 1990 et 1999, va tripler entre 2000 et 2004. En Wallonie, le nombre de travailleurs, qui avait lui triplé entre 1990 et 1999, va encore légèrement augmenter. Le nombre de bénévoles augmentant parallèlement au nombre de salariés.

Jamais la réalité de l’analphabétisme n’a été aussi reconnue, jamais des moyens aussi conséquents n’ont été dégagés, jamais la reconnaissance institutionnelle n’a été aussi forte que durant ces cinq dernières années.

Cependant, nous devons plus que jamais rester attentifs pour que le “patchwork de multiples initiatives citoyennes qui se créent au départ de besoins rencontrés en différents lieux, par des publics très divers poursuivant des objectifs variés” puisse vivre et se développer.

Les années 2005-2006 seront marquées par des jeux de transferts d’heures entre programmes, dans le cadre d’une enveloppe fermée dans l’enseignement de promotion sociale, par les nouvelles orientations de l’appel d’offre du décret wallon sur l’intégration des personnes étran-gères qui excluent certains publics,

par la difficulté de certaines associa-tions à maintenir leur reconnaissance dans le cadre du nouveau décret éducation permanente, …

Avec pour seule certitude qu’entre 2004 et 2007, tout le cadre législatif ou presque aura été modifié.

Dans le cadre de la décennie de l’alphabétisation, 2007 est “l’année de l’évaluation à mi parcours”. En Communauté française, à Bruxelles et en Wallonie, elle sera sans nul doute bien utile. •

Dominique BrasseurDirectrice a.i.

de Lire et Ecrire Wallonie

Catherine StercqCo-présidente de Lire et Ecrire

en Communauté française

Vers le début des années 90, on a vu fleurir un nouvel objet de focalisation médiatique: la lutte contre l’illet-trisme. Derrière cette focalisation, la lutte contre l’illettrisme prend les allures d’une véritable guerre sainte contre l’infidèle.

Dans ce contexte, on nous présente les illettrés comme une population tout à fait homogène aux caracté-ristiques sociales et culturelles bien connues de tous avec deux registres thématiques celui de la maladie (citoyens infirmes, handicapés, souf-frant d’un mal social qu’il s’agit de dépister) et celui de la peur (l’illet-trisme est associé aux phénomènes de délinquance, de marginalité contre lesquels il faut se mobiliser).

Le portrait de l’illettré réunit à lui seul, dans un décor de misère, toutes les caractéristiques du malheur. Ces séries d’approximations et d’extrapo-

lations hasardeuses, de projections fantasmatiques qui collent à la peau des illettrés les reléguant dans une sorte de no man’s land de misère où dignité, épanouissement personnel et bonheur n’existent pas.

Cette façon de présenter les choses, de parler des autres prend trop souvent les allures d’un reality show qui pourrait bien, si l’on n’y prend garde constituer le miroir déformant et mystificateur de notre quotidien.

Il n’existe pas d’exclu en soi. C’est la société qui désigne ses exclus. Vouloir lutter contre l’illettrisme en ne voyant qu’en lui un méprisable groupe social qu’il faut à tout prix instruire, civiliser, traiter, domestiquer nous paraît bien dangereux et bien mal adapté. Tout apprentissage quel qu’il soit s’enracine toujours sur une confiance réciproque et une recon-naissance préalable de l’autre.

C’est pour cette raison qu’il faut cesser de concevoir l’illettrisme comme un état de manque absolu par rapport à un état idéalisé de savoir lire-écrire et commencer par accepter toutes les lectures du monde à l’intérieur et hors du champ de l’écrit.

A l’heure d’internet et du mondialisme débridé, il nous semble que l’un des défis majeurs de la modernité au même titre que la maîtrise pour tous des outils de communication est de permettre à chacun dans sa précieuse singularité de trouver sa place et d’y être reconnu. •Extraits choisis de “L’illettrisme en toutes lettres “ouvrage collectif sous direction éditoriale de Camille-Frédérique Blind - Flohic éditions

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ntrefilets: Histoire du secteur à travers les glissements sémantiques

Attention, ça glisse! : Lutte contre l’illettrisme - lutte pour le droit à l’alphabétisation

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Chacun des acteurs en cause est moins homo-gène qu’il n’y paraît

au premier abord: identifier la complexité est aide précieuse à la compréhension.

L’acteur associatif

Le secteur ISP associatif s’origine dans un bouillonnement de projets pas toujours proches les uns des autres.

Une première série de projets est née dans le secteur de l’aide sociale, souvent à la jeunesse (que va-t-on faire pour les jeunes en difficulté qui quittent les structures d’hébergement et/ou qui zonent dans nos rues?), parfois aussi à d’autres catégories de personnes (par exemple en maison maternelle). Même si l’idéal est d’in-sertion professionnelle, les acteurs concernés savent pertinemment que le public en est très éloigné.

Ce qui est inventé, même si cela prend des allures de formation, et/ou même s’il y a une modeste activité économique, a d’abord pour fonction de structurer le temps, de renouer des dialogues, de constituer des petits groupes, bref de “resocialiser”. Globalement, le monde économique ne se sent pas concerné, même s’il peut éprouver parfois du mépris, d’autre fois de la sympathie1.

Un second groupe de projets a démarré sur l’hypothèse pédago-gique de “formation par le travail”: les personnes les plus en difficulté ne sont pas demandeuses de formation (même si on peut juger qu’elles en ont besoin); elles demandent plutôt travail et revenu. Pour avancer avec elles, le mieux est dès lors de leur offrir un revenu, via un travail sur chantier, ou en atelier, voire même en stage en entreprise. Dans tous les cas, il y a revenu parce qu’il y a une transaction commerciale.

A l’inverse du premier groupe, le second a d’emblée suscité le plus vif intérêt du monde économique. Les employeurs se sont énervés sur ce qu’ils percevaient comme des risques de concurrence déloyale. Les syndicats de leur côté étaient très préoccupés par les statuts des personnes: les initiatives ISP auraient fort bien pu servir de paravent à des pratiques de négriers, telles que, malheureusement, on en débusque régulièrement.

Le troisième groupe, issu des milieux d’éducation permanente, a tendu à offrir des initiatives ISP plus direc-tement structurées sur le mode de la formation, même si les méthodes ont fait l’objet d’adaptations, par exemple en alpha ou en mise à niveau. Lorsqu’elles ont repris le principe de “formation par le travail”, c’était dans une pratique aux effets plus modestes sur le chiffre d’affaires que celle du groupe précédent. Dès lors, l’intérêt qu’y a porté le monde économique ne l’a été qu’en effet collatéral de son intérêt porté au groupe précédent, et globalement moins hargneux dans le chef des entreprises. Par contre, le monde de l’enseignement et du service public de la formation se sont fort tracassés: c’est lui surtout qui s’est réapproprié, à sa sauce, la notion de “concurrence déloyale” (aux “vrais professionnels de la formation”, en stigmatisant le fait que l’initiative associative était réputée s’exercer par des personnes non qualifiées à enseigner).

Le secteur ISP face au monde économiqueVingt ans d ’Histoire des relations des associations ISP avec le monde économique en quelques lignes! Pour y

parvenir, on procédera en deux grands moments: le descriptif des acteurs qui s’y sont coltinés; l ’ identification

des lignes de force des questions qui les ont unis ou opposés.

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Avanti - OISP - Monceau-Fontaine

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Partenaires sociaux

Quand le monde des employeurs s’énerve, c’est à l’encontre des seules EFT; les autres situations le laisse indifférent. Ceci écrit, le monde des employeurs n’est pas moins complexe que celui des associations. Ainsi, la même EFT peut-elle, le matin, s’accorder avec un employeur concret, tout content d’engager un stagiaire, ou de sous-traiter quelque chose, et s’entendre passer un savon l’après-midi par un représentant des employeurs l’accusant des pires méfaits, en particulier de celui de concurrence déloyale aux entreprises. Dans ce jeu de rôles, les représentants des PME sont naturellement plus à cran: c’est plus dans leurs eaux que naviguent les associations. La solidarité des autres représentations patronales fonctionne assez bien, ne serait-ce que par réflexe. Mais, au quotidien, tout cela est très subtil: il arrive que des sympathies, parfois des compli-cités, s’établissent entre les uns et les autres. Elles se nouent autour du “mental d’entrepreneur”: des deux côtés de la barrière en effet, il y a des personnes qui témoignent d’esprit d’initiative, même si c’est dans des domaines fort différents, et qui réclament des espaces de liberté pour le mettre en œuvre.

Dans les syndicats, il faut distinguer les centrales et les interprofession-nelles.

Les centrales professionnelles des secteurs dans lesquels sont présentes les EFT ont naturellement un point de vue de secteur. Cependant, à l’exception du bâtiment, peu ont considéré qu’il y avait avec les EFT une question à traiter. Les interlocu-teurs de la construction témoignent quant à eux de toute la gamme des positionnements: de la méfiance à la sympathie. Au total, il se dégage une réalité assez immobile, qu’on peut expliquer par deux gros facteurs:

• la présence d’acteurs de l’édu-cation permanente dans l’ISP: de tels acteurs sont admis comme “peu suspects” dans nombre de milieux syndicaux (“ils sont un peu des nôtres”). Dès lors, on s’énerve moins;

• les centrales sont organisées sur une base fédérale: un “problème” qui n’est que francophone est moins crucial à traiter que celui qui touche indistinctement toutes les Communautés.

Dans les négociations globales de l’ISP, l’interlocuteur syndical est constitué de personnes déléguées par l’interprofessionnel. Il s’agit du pôle qui, dans les syndicats, a l’am-bition d’avoir le plus possible une vue d’ensemble; c’est aussi le pôle qui gère les dossiers des chômeurs, les accueille et tente vaille que vaille de les structurer. Bref, ce sont des interlocuteurs qui n’ignorent pas qu’il y a des problèmes. Le cœur de la préoccupation sera celui du statut donné aux stagiaires, la recherche de garanties que des parcours cohé-rents puissent s’accomplir sans que personne ne tombe dans un cul-de-sac, ainsi qu’une articulation avec le service public dont ils défendent la légitimité2.

Dans ce panorama, il ne faut pas oublier que les comités de gestion des services publics de l’emploi et de la formation3 sont paritaires: c’est l’interprofessionnel syndical qui y est à égalité avec les représentants des employeurs. Cela explique que, dès le moment où l’ISP, comme secteur, a réussi à prendre langues avec les partenaires sociaux, beaucoup de choses ont pu se réguler, par effet de cascade.

1 Ladite sympathie peut prendre des allures étonnantes. Ainsi, des “cochons” circulent-ils entre poire et fromage dans certains banquets de clubs huppés; les billets qui y sont glissés ont pour fonction d’aider des bonnes œuvres, au rang desquelles, occasionnellement, des initiatives ISP. Ne pas oublier d’enfiler veston cravate si vous êtes amené à plaider la bonne cause ainsi gratifiée, tout au moins si vous êtes homme. Certains de ces clubs sont unigenre masculin: il est dès lors très exceptionnel qu’une oratrice y soit invitée. Si cet honneur devait vous échoir, Madame, c’est évidem-ment moins le veston - cravate qui s’indique, que le tailleur sobre mais de bon goût. Le bijou doit réussir la performance d’être discret mais visible (!), de sorte que l’audience puisse conclure que “quand même, ça lui a coûté des sous assez nombreux”. En gros, les hommes doivent éviter le débraillé, et les femmes de passer pour des souillons. Décidément, l’ISP permet toutes sortes de passionnantes expé-riences de vie!

2 L’auteur des présentes l ignes aussi , d’ailleurs!

3 FOREM, ORBEM, Bruxelles Formation

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Concurrence loyale

Aux origines du système, la moitié des tirs de missiles se concentrait autour de l’hypothèse de concur-rence déloyale. C’est évidemment le banc patronal qui tirait. Mais les syndicats tiraient avec, à tout hasard, puisque eux, de leurs côtés, étaient tous énervés par le statut, et pour certains d’entre eux par la concur-rence déloyale que l’associatif de formation faisait à l’enseignement.

L’affaire était d’autant plus étrange que la notion de concurrence déloyale n’existe que dans la représentation qu’on se fait des lois, mais pas dans les lois elles mêmes! Ce que la loi régule, ce sont les pratiques de commerce. Ce qui est illicite, ce sont essentiellement deux choses:

• l’abus de position dominante: sauf à rire, il est évident qu’aucune asbl ISP n’est attaquable à ce titre!

• la vente à perte. Ici, c’est plus délicat. Il faut au moins ne pas établir ses tarifs à la légère, et pouvoir démontrer que tout a été bien compté. Par ailleurs, le subside doit financer les coûts de la formation, et non consister en une aide attractive pour … l’ache-teur (par baisse des prix de vente).

Beaucoup d’attaques se focalisent sur le tarif horaire des travaux. Il faut pouvoir expliquer (et montrer) que si le tarif horaire est plus bas que celui des professionnels, il y a aussi plus d’heures pour l’exécution du travail pour cause de situation de formation. Dès le moment où un facteur compense correctement l’autre, on se trouve généralement dans les mêmes eaux tarifaires que celles des PME de la région. Eventuellement, on se fâche encore parce qu’on n’aime pas la concurrence, mais on ne peut plus arguer d’une quelconque déloyauté dans ladite concurrence!

La dispute a avancé positivement sous l’effet de deux facteurs.

La pression était telle que le Gouvernement wallon a voulu réguler par priorité la situation des EFT, en mettant autour de la table les repré-sentants du monde économique et ceux des associations4. Il en est sorti l’arrêté de 1995 sur les EFT. Il ne réglait pas tout, mais il prévoyait un balisage ultérieur par la détermina-tion de ratios. Le simple fait que les associations aient accepté le principe a considérablement calmé le jeu.

Le second facteur favorable a été la médiation du Gouvernement wallon avec, cette fois, le secteur wallon de la construction5. On pensait que les palabres seraient longues, et néces-siteraient des finalisations par des textes pointus. Pas du tout: il a suffi de produire un cadastre du qui fait quoi, avec quel chiffre d’affaires, et quelle marge. Réaction surprise sur le banc de la construction: “ah? ça n’est que ça?”. Puis, plus de demande, sauf des années plus tard pour des rencontres fédérales.

Certes, il est resté des moments de tension, mais cela n’a plus eu que caractère ponctuel ou conjonc-turel: ce n’est plus sur le secteur dans son ensemble qu’a pesé le soupçon. Le fait qu’ils puissent accéder aux dossiers par la commis-sion d’agrément rassure grandement les employeurs: il y a un lieu pour la transparence, l’interpellation et le trai-tement des éventuels problèmes.

Statuts

La deuxième moitié des tirs de missiles se concentrait sur le statut des stagiaires. C’est du banc syndical que partaient les tirs, mais le patronat tirait avec, à tout hasard, parce qu’il avait à redire sur la concurrence.

Pour sortir de la difficulté, deux grandes options ont été prises par le secteur ISP:

• il s’est très tôt mis à table avec les interlocuteurs des interpro-fessionnelles syndicales, et on s’est parlé franchement. Cela n’a pas été qu’un fleuve tranquille, mais le fait que des rencontres se soient tenues à l’invitation de la Fondation Roi Baudouin a contribué à faire avancer la bille. On évoque ici des temps désormais éloignés: 1985-1986, déjà. Mais toute la manière dont les choses se sont organisées ensuite a permis de maintenir la présence des partenaires sociaux dans toutes les discussions: c’est extrêmement précieux.

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• Pendant plusieurs années, le posi-tionnement de l’ISP était confus, entre être acteur de l’enseigne-ment, fût-il alternatif (par les proxi-mités réelles avec les CEFA, ou la promotion sociale), ou être acteur de la formation professionnelle des adultes. Début des années 90, cela s’est décanté: les publics de l’ISP se vivent comme travailleurs sans emploi, pas comme élèves en échec; s’ils se mettent en route, c’est avec l’objectif d’obtenir un revenu par un emploi. A l’occasion des débats préalables à l’arrêté du Gouvernement wallon sur les EFT, en 1995, l’option a été claire: l’ISP est un des acteurs de la formation professionnelle. Ce choix straté-gique a eu une cascade d’effets: le statut de référence devenait clairement celui du stagiaire en FP FOREM6; parce que l’ISP était FP, son partenaire de référence deve-nait sans ambiguïté le FOREM: on voyait avec qui négocier les articulations; le FOREM étant par ailleurs en gestion paritaire, l’option contribuait à rassurer les partenaires sociaux relativement à l’ISP (c’est une très grosse différence avec l’enseignement: opter pour l’enseignement n’aurait pas entraîné une association aussi structurelle, fût-ce indirec-tement, ni avec le service public,

ni avec les partenaires sociaux); comme dans l’enseignement, on avait une perception de l’ISP comme concurrent incompétent, l’affaire s’arrangeait bien: il deve-nait absurde pour des acteurs de l’enseignement de continuer à tirer des missiles sur un adversaire qui n’occupait de toute façon pas leur terrain; à une époque où l’exercice de la compétence FP glissait de la Communauté française vers les Régions, et où donc il fallait faire un choix qui engageait aussi une dépendance institutionnelle, l’ISP se plaçait clairement dans le champ régional.

Stages

La situation des stagiaires mis en stage dans des entreprises exté-rieures aux EFT et OISP a également été sujette à quelques tensions.

Pour l’essentiel, elles se sont réglées en même temps que s’établissait la jurisprudence de la commission d’agrément des EFT, entre 1995 et 1999, et sur base de l’examen de quelques cas concrets. Grosso modo:

• en référence à la situation qui prévalait en FP FOREM, les stages d’observation, de courte durée, n’ont plus guère été contestés

• une grande clé de la régulation des autres situations est de s’assurer que l’EFT qui pratique le stage externe continue à donner de la formation. Les acteurs ont voulu éviter que l’EFT ne soit qu’une simple boîte aux lettres, service de placement à (très) bon marché dans les entreprises. Des balises ont été placées. Et, de toute façon, toute l’action est sous contrôle des partenaires sociaux.

• autre régulation qui a été néces-saire: vis-à-vis de CEFA qui, pour le 2ème mi-temps, placent des stagiaires en EFT. Elle s’est résolue en affirmant que, quand un jeune est aussi inscrit en CEFA, c’est le CEFA qui est le pilote de l’ensemble de la formation (et donc aussi de la partie pratique en EFT).

Emploi, socialisation

De manière générale, aux origines de l’ISP associative, lorsque des partenaires du monde économique admettaient que celle-ci était légi-time, l’unité de mesure était le plus souvent le taux d’insertion dans l’emploi. Une unité bien imparfaite à décrire et évaluer complètement ce qui se fait.

4 Au moment de la régionalisation de l’exercice des compétences de formation, à l’initiative du cabinet du Ministre Albert Liénard.

5 A l’initiative du cabinet du Ministre Jean-Claude Van Cauwenberghe.

6 Il faut admettre que, si cette référence a arrangé les acteurs des OISP et une fraction significa-tive de ceux des EFT, cela n’a pas exactement répondu aux désidérata des plus ambitieuses d’entre elles du point de vue économique (et rémunérant dès lors leurs stagiaires à une hauteur plus élevée que celle de l’indemnité de FP FOREM). Le présent papier n’est pas le lieu d’une dissertation approfondie sur cette question particulière, mais on peut dire que la tension vécue une petite décennie plus tard lors du vote du décret EFT-OISP autour de l’usage des dispositions de l’AR 499 est un effet collatéral de l’option prise dans la négo-ciation de l’arrêté EFT de 1995.

7 Le “parcours d’insertion” du cabinet de Jean-Claude Van Cauwenberghe, auquel a succédé le “dispositif intégré” du cabinet de Marie Arena.

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Au fil du temps, des discussions, de la bonne connaissance de ce qui se fait, le travail dit de “socialisation” a été reconnu et apprécié. A un point tel que c’est parfois trop: certains en viendraient presque à reprocher des mises à l’emploi par l’ISP. Au nom d’une distinction apportée au fil des initiatives gouvernementales7: il y aurait d’une part les “formations qualifiantes” et d’autre part les “pré-qualifications”. L’enjeu était sans doute surtout institutionnel: il permet en effet aux acteurs de la FP FOREM et de l’enseignement de s’auto-attri-buer la fonction “qualifiante”. Mais, franchement, le concept est loin d’être clair, même si un principe a commencé à sortir, sans cependant

s’être encore imposé: la formation qualifiante serait toute formation orientée vers l’acquisition d’un métier; le pré-qualifiant serait toute forma-tion organisée à partir des besoins résultant de la situation réelle des personnes.

Bref, le plan malin est d’admettre que les résultats de l’ISP peuvent s’exprimer indistinctement, stagiaire par stagiaire, en termes d’emploi, ou en termes de socialisation, ou les deux à la fois, et ce même s’il continue à y avoir un jeu de balan-cier dans les postures des différents interlocuteurs.

Marchand/Non marchand

Plus récemment, une nouveauté a pourri les débats: l’idée de distinguer une économie sociale marchande d’une économie sociale non marchande, avec, en arrière-plan, de donner un surcroît de légitimité (et donc aussi d’aides publiques) à l’économie sociale marchande, qui serait la “vraie” économie sociale, ou le “compartiment 1ère classe” de ladite économie sociale, sous l’argument, par ailleurs faux, que seul le marchand produirait de la richesse, alors que le non-marchand ne ferait que la consommer!

Pour l’ISP, pas d’alternative: elle se doit de revendiquer qu’elle relève bien de l’économie sociale, et qu’il n’y a pas lieu de l’organiser de manière duale! •

Pierre GeorisPrésident des AID

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Dans les années ’80 et au début des années ’90 on parlait souvent de nos actions comme des moyens de combattre l’exclusion. Notre devoir de bons militants était de changer la société; et ce changement serait initié par un combat. Dans les assemblées du secteur, on entendait le slogan: “l’exclusion n’est pas une fatalité!” ou “ensemble combattons l’exclusion!”. Le boulot des associations (qui allait devenir les EFT/OISP d’aujourd’hui) était de combattre l’exclusion - et la formation n’était qu’un outil parmi d’autres au service de ce combat.

Assez vite, ce combat contre l’ex-clusion est passé de mode (seuls quelques briscards continuaient la “lutte”….et d’ailleurs, il y en a toujours l’un ou l’autre par-ci par-là, heureu-sement!). On aimait alors dire de nos associations que leur boulot était de réinsérer les gens…ce qui laissait supposer que ces mêmes gens ont été à un moment donné ou l’autre de leur histoire “insérés”. Mais, suite à des expériences de vie personnelle ou professionnelle malheureuses, ils ont perdu leur qualité de “in” pour tomber “out”! Il leur faudrait

un petit coup de pouce dans une de nos associations pour retrouver le paradis perdu de l’emploi.

Enfin, on s’est vite rendu compte qu’avec les années de crise et de chômage de masse qui s’accumu-laient, la plupart des personnes se présentant à nos portes n’avaient jamais connu ce paradis de l’emploi. Donc, il n’était plus question pour nos associations de réinsérer, mais d’in-sérer tout court - dans la société, telle qu’elle est. Ne sommes-nous pas le secteur de l’insertion? Faisant partie du dispositif intégré d’insertion?

Voilà un glissement de terminologie interpellant; mais attention! beau-coup de travailleurs de nos centres souhaitent rouvrir le débat sur le type de société dans laquelle on insère les gens… après tout, un retour au combat n’est pas exclu! •

Dan WendorfALEAP - Coordinateur

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Attention ça glisse! : “Combattre l’exclusion” devient “réinsérer” puis “insérer”

ntrefilets : Histoire du secteur à travers les glissements sémantiques

Le Trusquin - EFT - Marloie

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Car, aussi loin que remon-tent les archives de l’Inter-fédé, il en est question. Et

tellement question que l’Interfédé s’est vue confiée par décret la mission de “coordonner l’offre de formation du personnel des OISP et des EFT et assurer, le cas échéant, la formation continuée de ce personnel”1.

Vous avez dit “professionnaliser”?

Cette mission s’inscrit dans un objectif de professionnalisation. Ce mot, quelque peu barbare, a bien eu besoin d’être précisé. “Professionnaliser, c’est construire ensemble2, en tenant compte de son environnement3 et des ressources de celui-ci, des connaissances4 et des compétences5 pour faire son travail avec humanité6, en rendant cohé-rent7, au sein d’un centre l’ensemble de ses actions: accueil, orientation, formation, organisation, évaluation, communication… et en regard de l’appropriation qui est faite des valeurs de changement sociétal8.”

Participer à ce que chaque personne qui chemine dans une EFT ou un OISP puisse être pleinement acteur de ce monde (c’est-à-dire prendre part de manière active et consciente aux activités sociales, politiques, culturelles et économiques), le faire dans une dynamique relationnelle, organisationnelle et institutionnelle cohérente, respectueuse des diffé-rents acteurs (stagiaires, travailleurs, partenaires…) et participative, telle est la finalité poursuive à travers la

professionnalisation par les acteurs de l’Interfédé. La personne engagée dans un processus d’insertion socio-professionnelle est considérée dans toute sa dimension d’être humain. Comme tous les acteurs du secteur de l’insertion9, elle est partie prenante du processus qui la concerne et parti-cipe dès lors à sa mise en oeuvre.

La professionnalisation du secteur suppose aussi un cadre structurant et constructif. Il s’agit de créer un contexte de travail dans lequel les identités professionnelles particu-lières soient identifiées, reconnues et assumées individuellement et collec-tivement. Cela suppose d’une part de clarifier les fonctions, les rôles et les missions de chacun et de mettre en œuvre des dynamiques transver-sales (entre métiers) qui permettent à chacun d’être partenaire d’un projet global et d’en mesurer la portée.

Il ne suffit pas de faire

Dans cet esprit, différents enjeux ont été soulevés que ce soit de permettre aux travailleurs et aux travailleuses d’avoir un statut d’intervenant de l’insertion (c’est-à-dire une identité et un statut professionnels), de leur assurer une formation profession-nelle de qualité centrée sur des besoins individuels et collectifs, de reconnaître et de valoriser les acquis de la formation continuée, d’accom-pagner la mise en œuvre du nouveau décret et les évolutions sociales ou encore de permettre à chacun de garder une capacité d’interpellation et d’analyse critique.

Mettre en œuvre un dispositif de formation du personnel du secteur, c’est toucher à ces questions qui elles-mêmes renvoient à d’autres questions. Prenons un exemple qui paraît simple: la reconnaissance de la formation.

La formation du personnel du secteur de l’ISP,

un monstre à neuf têtes…Si le secteur de l ’ Insertion socioprofessionnelle a plus de 20 ans, la

réflexion à propos de la formation du personnel du secteur en a sans

doute tout autant.

1 Article 18 du décret des EFT-OISP.2 Idée de co-construction. Construire non pas en

imposant une vision “d’en haut”, mais bien une vision “d’ensemble”: Interfédération, Fédéra-tions, EFT, OISP (travailleurs et responsables) et stagiaires.

3 On ne professionnalise pas partout de la même manière. Pas de standardisation.

4 Les compétences ne peuvent exister sans les connaissances.

5 Connaissances et compétences sont deux ingrédients au même terreau.

6 En ce sens ou l’objectif final est que la personne soit actrice de ce monde… Ce mot n’est pas à comprendre en référence à une idéologie.

7 L’autonomie de chaque EFT-OISP doit être pré-servée. Cela fait partie des valeurs défendues par l’Interfédération. Cela étant, la Commission Pédagogique de l’Interfédération prend posi-tion pour que chaque EFT/OISP définisse sa propre cohérence interne; pour que chaque acteur agisse en cohérence avec les valeurs portées par ce centre.

8 Objectif ultime: le changement de société… Le savoir est une construction et pas un état; et il est fondamental de le construire collecti-vement.

9 Partenaires institutionnels, Interfédération, Fédérations, EFT, OISP (travailleurs et respon-sables) et stagiaires.

Le Bric - EFT - Nivelles

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Or, il y a plusieurs formes de recon-naissance: reconnaissance sociale par l’obtention d’un “papier” (certificat ou autre), reconnaissance professionnelle qui peut se traduire par de nouvelles fonctions, une revalorisation baré-mique (et donc des moyens financiers), une modification de la structure de travail, une mobilité interne ou externe au centre ou au secteur…

A l’Interfédé, deux instances portent ces questions. Le Conseil d’Admi-nistration sur le plan politique et la Commission pédagogique sur le plan pédagogique et opérationnel. La structure de la Commission péda-gogique est telle que ses membres sont mandatés par les différentes fédérations et par le CA. Si chacun, de par son ancrage propre, alimente la réflexion et l’action de formation de l’Interfédération, chacun est également nourrit du travail réalisé ensemble. Ainsi, se construit une cohérence globale respectueuse des spécificités de chacun des centres et de chacune des fédérations.

Des résultats déjà engrangés

2004 a été une année charnière dans la manière de voir et penser la formation pour le personnel du secteur qui a permis de passer d’une dynamique de “programme de formation” à celle de “projet de formation” ou d’une juxtaposition de modules de formation à une proposition cohérente et articulée y compris dans le temps.

Ce passage s’est accompagné d’une clarification des options pédago-giques10 mises en œuvre dans les

offres de formation. Elle a donné lieu à la mise sur pied en 2005 de modules de formation longue pour chacun des métiers du secteur.

Il s’est également accompagné d’un renforcement de la participation de tous les acteurs (travailleurs, centres, fédérations, opérateurs de formation, formateurs intervenants dans le programme annuel…). Cette partici-pation s’accompagne d’une volonté de permettre à chacun de participer à la construction du projet de forma-tion, en ce compris du module de formation auquel il participe.

Les activités de formation déve-loppées en 2005 ont contribué à préciser la spécificité des forma-tions organisées par l’Interfédé. Les objectifs poursuivis sont les suivants: permettre de clarifier l’identité de chacun des métiers tout en la situant par rapport aux finalités, aux enjeux (pour un secteur dans une société donnée et dans un centre particu-lier); fournir des techniques, des informations, un cadre pour exercer au mieux son métier; permettre aux travailleurs et aux équipes d’acquérir les compétences individuelles et collectives nécessaires à l’exercice de leur mission et métier. Jusqu’à présent, les contenus proposés touchent à la connaissance du secteur, à l’analyse critique, à des contenus spécifiques par métiers, à des contenus transversaux.

Il n’est peut-être pas inutile de préciser que le programme de formation 2005 a rencontré un grand succès et que les évaluations des participants et des formateurs sont dans l’ensemble positives.

10 Le savoir est une construction et pas un état; et il est fondamental de le construire collecti-vement.

La formation et le(s) savoir(s) qui en découlent doivent avoir du sens pour les participants aux formations.

L’évaluation et “le transfert des acquis” font parties intégrantes du processus de forma-tion.

L’observation, l’analyse, la mise en perspective et en relation sont fondamentales mais elles doivent toujours être accompagnées d’une phase d’expérimentation, de “vie”, pour être appropriables et transférables.

L’hétérogénéité des points de vue, des expé-riences, des métiers est source d’apprentissage et de co-construction de savoirs et projets.

Les “bénéficiaires finaux”, les personnes infra-scolarisées et/ou peu qualifiées doivent sans cesse rester au centre du processus de for-mation, de ceux qui encadreront leur insertion socioprofessionnelle.

Les valeurs de coopération, d’égalité des chances (dans tous les sens du terme!), de participation, d’émancipation sociale, sont au cœur de nos objectifs et de nos pratiques.

La formation doit être sans cesse centrée et reliée aux réalités et à l’expérience profession-nelle des participant-e-s.

Construire ensemble

Pour 2006, le premier enjeu est de continuer sur notre lancée, d’être nous-mêmes professionnels dans notre manière de travailler au sens de la définition présentée au début de cet article, de consolider et de renforcer les orientations prises, mais aussi de continuer à développer notre projet en y associant un maximum d’acteurs.

Concrètement, et outre le programme annuel (premier semestre 2006 et 2006-2007), la Commission péda-gogique s’est donné comme plan de travail d’avancer sur le trans-fert des acquis, la politique de formation et l’articulation de ses travaux et réflexions avec les autres groupes de travail de l’Interfédéra-tion (Communication, Egalité des chances…). De son côté le Conseil d’administration appuiera ces actions en y associant une réflexion plus politique. •

Marina Mirkes Coordinatrice pédagogique

à l’interfédé

Quelque chose à faire - EFT - Monceau-Fontaine

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Un peu d’histoire récente: le parcours d’insertion

En 1997, la région wallonne met en place le parcours d’insertion1. Celui-ci s’appuyait sur trois grands principes:

1. Renverser la logique de l’offre et développer une logique de réponse aux besoins du marché de l’emploi;

2. Accorder la priorité au dévelop-pement des personnes ainsi qu’à leur problématique d’insertion sociale et professionnelle plutôt qu’aux logiques des institutions;

3. Réaliser cette adéquation dans un équilibre entre le coût, la qualité et la performance et quatre étapes (ou type d’actions) qui en découlent a. Socialisation, b. Remise à niveau, préqualifica-

tion et orientation, c. Formation qualifiante;d. Transition à l’emploi.

Cette schématisation du parcours d’insertion (on parle bien du parcours d’un individu) était une approche linéaire: le stagiaire partait d’un point A, allait à un point B (un autre opéra-teur) pour terminer au point D, final, c’est-à-dire l’emploi. Cette concep-tion est très vite apparue comme une vision de l’esprit, ne correspondant à aucune réalité et niant l’individu dans ses trajectoires.

En 2000, une évaluation du Parcours d’insertion est réalisée par le SES2&3 et fait apparaître les difficultés suivantes:

• Les objectifs du dispositif sont complexes, peu opérationnels et la classification des opérateurs entre quatre niveaux est inopérante;

• Il manque d’un pilote dans l’avion permettant d’assurer la cohérence de l’ensemble;

• En dépit de réels efforts, il reste encore beaucoup à faire pour assurer la diffusion et la trans-parence de l’offre de formation au profit des bénéficiaires, et, par ailleurs, le suivi du parcours de ceux-ci n’est toujours pas assuré, faute d’accord entre les acteurs concernés.

La Ministre Madame Arena a pris en compte cette évaluation et a “remplacé” le parcours d’insertion par le Dispositif Intégré d’Insertion SocioProfessionnel (DIISP).

Du Parcours d’Insertion au Dispositif Intégré d’insertion SocioProfessionnel

Le DIISP veut répondre aux critiques émises dans l’évaluation du parcours d’insertion. Pour cela, on clarifie les objectifs: Un emploi durable et de qualité. On nomme un pilote: FOREm Conseil4. On développe les structures de diffusion de l’offre de formation et d’emploi (CEFo et Maison Locale de l’Emploi). FOREm Conseil en tant que “régisseur-ensemblier” est chargé de mettre en place un outil permettant de centraliser l’information à propos du parcours du stagiaire afin de garantir un service efficace et cohérent5.

Le décret DIISP est un “décret-cadre” auquel s’articule tous les autres décrets régissant les différents acteurs.

Du parcours d’insertion au dispositif intégré d’insertion socioprofessionnelle (dIISP)L’organisation des modalités et étapes de l ’ insertion du demandeur d ’emploi a été au centre des préoccupa-

tions des différents ministres wallons de l ’emploi et la formation depuis près de 10 ans. Après le bien nommé

“parcours d ’ insertion”, voici qu’est entré en vigueur, en ce début 2006, le “DIISP”.

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1 Concept mis en place sous l’impulsion du Conseil de l’Europe et qui a été mis en pratique de manière très différente en Wallonie, à Bruxel-les et en Flandre (régionalisation oblige).

2 SES: Service d’Etudes et des Statistiques de la Région Wallonne.

3 Voir article de Eric Mikolajczak: 30 ans d’his-toire.

4 La réorganisation du FOREm (impulsé par le vote d’une convention à l’OIT) en trois entités distinctes a permis d’identifier une de ces 3 entités comme “régisseur-ensemblier” du dis-positif.

5 Autant nous ne pouvons que trouver les objec-tifs de qualité et de cohérence comme des objectifs incontournables, si l’outil proposé (c’est vers cela que l’on va) est “job pass”, cela nous pose de nombreuses questions éthiques et nous ne sommes pas persuadés que c’est comme cela que l’on rendra les sta-giaires acteurs de leur propre parcours.

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L'arbre à savoirs - Lire et Ecrire 2003

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On peut dire que la philosophie est différente: en mettant le stagiaire au centre, le dispositif a comme rôle d’identifier ce que chaque acteur peut apporter et de veiller à ce qu’il y ait un avant et surtout un après, le tout devant conduire le stagiaire vers un emploi durable et de qualité.

Des objectifs “modestes” mais qui ne sont pas gagnés d’avance:

Un emploi durable6 et de qualité: nous sommes partie prenante de cet objectif, mais ne nous trompons pas de niveau de responsabilité. Ce ne sont pas les opérateurs de formation ni les opérateurs d’inser-tion qui engagent (sauf leurs propres travailleurs). Il doit donc y avoir une responsabilité et un engagement réel et effectif du monde patronal. Aujourd’hui, en ce qui concerne la commission consultative régionale (lieu de concertation au niveau de la région wallonne), l’absence du monde patronal se fait cruellement ressentir.

Par ailleurs ne nous leurrons pas et ne leurrons pas les gens, le DIISP ne créera aucun emploi, mais pourra mettre en place les conditions opti-males afin d’atteindre l’objectif. Il y a aujourd’hui 600.000 demandeurs d’emploi et leur difficulté n’est pas uniquement manque de formation. S’il y avait de l’emploi pour tous, cela se saurait et nous n’aurions plus

de problème pour le paiement des pensions, pour les soins de santé, pour l’équilibre de la sécurité sociale. Nous devons admettre que même si l’objectif est l’emploi, il n’y en aura pas pour tous. La formation en tant que telle, même si elle ne débouche pas sur un emploi durable et de qualité, a du sens. Quand les gens entrent dans une démarche de prise en main de leur vie, dans une démarche citoyenne, cela aussi a du sens.

On parle beaucoup de pénurie, d’emploi non couvert, de plombier qu’il faut aller chercher en Pologne faute de travailleur qualifié ici. Une étude récente coupe partiellement les ailes à ce canard. La question n’est pas seulement des pénuries, mais du niveau d’exigence des employeurs pour des postes de travail ne néces-sitant pas nécessairement toutes les qualifications demandées (dans les années 80, on appelait cela la cascade des qualifications).

Concrètement:

Des filières et des passerelles:

Le décret cadre du DIISP organise un système construit sur la mise en place de passerelles et de filières. Les décrets qui régissent ou régiront les opérateurs de formation et d’insertion sont articulés, en lien avec le décret du Dispositif. Le législateur a créé une série de “boîtes” qui identifient les

opérateurs: ses missions, son public, sa pédagogie…. Les filières et les passerelles sont la matérialisation du dispositif: c’est la “tuyauterie”. Ce sont les “tuyaux” qui relient ou qui devraient relier les opérateurs non seulement entre eux mais aussi avec une “boîte” EMPLOI.

Attention, l’ensemble des acteurs doivent bien avoir en tête un élément important d’évaluation du parcours d’insertion: la classification en 4 niveaux est inopérante. Ne commet-tons pas l’erreur du parcours d’in-sertion dans sa première version. En mettant des étiquettes sur les boîtes, on est vite tenté de les placer sur une ligne avec un “tuyau” orga-nisant le flux du 1er vers le 2ième, du 2ième vers le 3ième puis vers le 4ième et vers l’emploi. Oerait recréé de la sorte, mais avec un autre look, les 4 étapes du parcours d’insertion.

Restons bien dans la logique de la “tuyauterie” qui organise le flux mais aussi le reflux. Le stagiaire est au centre du dispositif. En fonction de son évolution, il doit pouvoir circuler via ces tuyaux en évitant les impasses. Le dispositif ne doit pas être une planche sur laquelle on a disposé les différentes boîtes mais un cercle autour duquel se trouve ces boîtes toutes reliées entre elles et permettant le passage des uns vers les autres, en prenant en compte l’évolution de la personne dans sa globalité.

›››Lire et Ecrire Bruxelles 2003

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Le contrat crédit insertion:

Ce contrat qui devait “protéger” de tous contrôles le demandeur d’emploi pendant son parcours, afin de faciliter la fluidité du parcours, est mort-né. Il nécessitait un accord de coopération entre la région wallonne et l’état fédéral qui n’a jamais été signé. La “protec-tion” n’existe pas. Par contre, le contrat crédit insertion lorsqu’il est signé par le demandeur d’emploi engage FOREm Conseil à un suivi, un accompagne-ment plus intensif pendant une période minimale de deux ans. L’accord de coopération n’ayant pas été signé, rien n’empêchera un stagiaire de signer un nouveau contrat7.

L’objectif n’est pas gagné d’avance, la mise en place du DIISP néces-site des conditions de réussite:

Pour être partenaire, collaborer, il faut être au moins deux et être d’accord. Il faut une volonté commune.

Être partenaire, c’est discuter d’égal à égal avec l’autre en vue d’atteindre un but commun. Aucun des deux parte-naires ne doit se sentir menacé. Il ne doit pas y avoir d’ingérence de l’un chez l’autre. On parle bien de partenariat et pas de sous-traitance. Le rôle8 de FOREm Conseil sera essentiel.

Les partenariats ne tiendront que s’ils partent du terrain local. Les accords d’institution à institution peuvent aider, faciliter les choses, mais ils ne créeront pas de partenariat effectif. Cela nécessite la connaissance et la reconnaissance de l’autre. Il faut une relation de confiance.

Le secteur associatif espace d’interpellation

Nous sommes partie prenante du DIISP, cela ne nous empêche pas d’être critique, d’interpeller, d’alerter lorsque certaines questions se posent, des dérives pourraient arriver.

Développer des partenariats, des collaborations réelles, effectives dans l’intérêt des stagiaires prend du temps et des moyens. En aurons-nous les moyens? Dans le cadre du futur décret EFT-OISP9, ce temps et donc ce financement n’est, actuel-lement, pas prévu.

Le monde de la formation, de l’in-sertion est en mutation. On met en place différents dispositifs: le dispo-sitif intégré d’insertion, le dispositif de validation des compétences, la mise en place d’outil: le REM10. Quelle cohérence entre ces différents dispositifs?

Pour démontrer une politique volon-tariste en matière de formation et d’insertion ne devra-t-on pas faire du chiffre? L’inventivité, l’adaptabilité aux situations vécues par les stagiaires aura-t-elle encore une place?

Autant nous pouvons être d’ac-cord qu’il faut que l’information circule entre les opérateurs. Que l’on connaisse et reconnaisse ce que l’autre a fait ainsi que les acquis que les stagiaires possèdent au sortir de chez un opérateur. Autant les outils de récolte des informations qui seront mis en place à propos du

parcours du stagiaire nous inquiètent. Ils dépossèdent le stagiaire de son parcours, de la maîtrise de celui-ci. Ils stigmatisent et médicalisent la question de l’exclusion du marché de l’emploi. Nous ne sommes pas partisans de la mise en place d’un système de traçabilité du demandeur d’emploi. La volonté de mettre le stagiaire au centre du dispositif doit bien être une volonté présente chez l’ensemble des partenaires. Il s’agit que le stagiaire reste bien le maître de son propre parcours.

Il ne fonctionnera que si les acteurs de terrain sont mobilisés, que les CCSR11 fonctionnent et que tous les partenaires qui doivent y être y soient effectivement. Le monde de l’entre-prise est-il prêt à descendre dans l’arène et prendre ses responsabilités où restera-t-il au balcon? •

Joël GillauxDirecteur des AID

Administrateur de l’Interfédé

6 Il doit être au moins d’une durée égale à 6 mois.

7 Si le Conseiller en Accompagnement profes-sionnel de FOREm Conseil est d’accord.

8 Faut-il voir dans le rôle donné à FOREm Conseil les prémices, un laboratoire à une question posée dans le livre vert à propos du pacte associatif? Auquel cas, l’enjeu dépasse lar-gement la mise en place du DIISP

9 Voir article suivant.10 REM: Référentiel Emploi Métier11 Commissions consultatives sous régionales:

organes de concertation intégrés dans l’archi-tecture du DIISP où sont prévu de siéger les partenaires sociaux, et tous les opérateurs de formation reconnus par le décret du DIISP.

Lire et Ecrire Bruxelles 2003

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Le décret

Comme tout texte de loi, un décret est toujours

très ardu à lire et aussi très technique. L’intérêt ici n’est pas justement de faire une lecture technique mais de dégager les grandes lignes du décret et ses orientations.

Ce décret s’appelle: décret relatif à l’agrément et au subventionnement des EFT et des OISP. Comme le laisse sous-entendre le titre, le décret déter-mine des objectifs, des missions et des conditions objectives d’agrément (un cadre), lié à cet agrément, il y a un subventionnement.

Le décret EFT-OISP ses missions et ses objectifs s’articulent avec le décret DIISP.

Les objectifs

• Préparer l’insertion socioprofes-sionnelle des bénéficiaires en s’ins-crivant dans le Dispositif intégré d’insertion socioprofessionnelle, ci-après dénommé le Dispositif, tel qu’institué par le décret du 1er avril 2004 relatif au Dispositif intégré d’insertion socioprofessionnelle;

• Favoriser la promotion de l’égalité des chances des bénéficiaires dans l’accès à la formation et à l’emploi;

• Optimaliser les trajectoires de chaque bénéficiaire par une approche intégrée, basée sur le partenariat entre opérateurs de formation ainsi que sur les diffi-cultés qu’il rencontre par rapport au marché de l’emploi;

• Assurer à tous les bénéficiaires des pratiques de formation favo-risant l’émancipation sociale, indi-viduelle et collective.

On entend par promotion de l’égalité des chances toute action permettant de lutter contre toute discrimination, au sens de l’article 2 de la loi du 25 février 2003 tendant à lutter contre la discrimination et modifiant la loi du 15 février 1993 créant un Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme.

De même, on entend par optimalisa-tion des trajectoires la coordination d’actions au sein du Dispositif en vue de permettre aux bénéficiaires d’acquérir le maximum de compé-tences afin de leur garantir un accès durable au marché de l’emploi et de maximaliser les acquis de chaque action de formation et d’insertion.

Ces objectifs sont déclinés en missions

• Développer ses capacités à se former en l’aidant à acquérir des comportements professionnels et des compétences techniques lui permettant l’accès à des forma-tions qualifiantes et, à terme, au marché de l’emploi;

• L’amener à définir un projet profes-sionnel, en ce compris un projet de formation professionnelle;

• L’amener à faire un bilan de compétences;

• L’amener à devenir acteur de son projet professionnel et à retisser des liens sociaux;

• L’amener à développer son auto-nomie sociale.

La réorganisation du “parcours d ’ insertion” au sein du DIISP1, était une raison supplémentaire pour revoir le

décret régissant le champ d’activité des EFT et OISP. C’est chose faite depuis mars 2006 et on nous annonce la

mise en œuvre pour janvier 2007. Présentation du nouveau décret.

Le decret EFT - OISP et son arrêté d’application

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Cynorhodon - EFT - Haccourt

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Ces objectifs sont de deux ordres

• Le 1er et le 3ième qui visent l’inser-tion professionnelle du stagiaire à terme obligent également les associations à travailler en parte-nariat. Elles doivent s’inscrire dans le DIISP et donc construire des filières et des passerelles avec d’autres opérateurs de formation. Une association ne peut plus “travailler” toute seule, elle doit être en connexion avec d’autres;

• Le 2ième et le 4ième ont une autre porté beaucoup plus sociétale. C’est d’une part favoriser l’égalité des chances dans l’accès à la formation et à l’emploi et d’autre part, c’est reconnaître, dans le cadre d’une démarche d’insertion socioprofessionnelle, l’importance de la formation à la citoyenneté. C’est acté comme un objectif que les EFT et les OISP doivent poursuivre. On retrouve cette dimension dans la déclinaison des missions et plus particulièrement dans le 4ième objectif où l’on parle de retisser des liens sociaux, de développer l’autonomie sociale du stagiaire.

Tout cela se déclinant en vue de l’objectif final: l’insertion dans un emploi durable et de qualité.

Le décret fixe également des conditions, un cadre

Le premier élément à relever, concerne le public.

Nous ne devons, et nous ne pouvons pas travailler avec tous les deman-deurs d’emploi. Les missions qui nous sont confiées, nous devons les réaliser avec un public identifié comme le plus éloigné de l’emploi. Pour déterminer cet éloignement, deux critères sont utilisés: le niveau d’étude et/ou la durée d’inoccupa-tion2.

Ce terrain d’action nous est “réservé”.

La commission d’agrément

Pour être reconnu et subventionné comme EFT ou OISP, il faut un agrément, accordé par la Ministre, sur base de l’avis d’une commis-sion. Il est important de relever que l’association représentant le secteur (l’interfédération) siège à cette commission au même titre que les autres acteurs que sont les parte-naires sociaux, le FOREm, l’AWIPH et les CPAS. De plus, des représentants du secteur (les fédérations) y siègent également même si c’est avec une voie consultative.

La reconnaissance d’une méthodo-logie et d’une approche globale du stagiaire:

Le décret reconnaît et impose une spécificité méthodologique. Le décret fixe “la manière” de travailler. La pédagogie utilisée doit être spéci-fique aux adultes, participative ou innovante, adaptée à la spécificité des bénéficiaires. Elle doit combiner des approches de formation indivi-dualisée et dynamique de groupe, de travail collectif et travail d’équipe. Elle doit combiner une approche théo-rique et des applications concrètes prenant en compte les réalités du quotidien des stagiaires et de la vie professionnelle.

Elle doit également mettre en œuvre, d’une part, une évaluation continue, formative et participative, et, d’autre part, une vérification des acquis en termes de compétences profession-nelles, qu’elles soient sociales ou techniques.

De nouveau, on insiste sur le fait que les associations doivent se situer dans le cadre du dispositif. L’association doit avoir conclu, une ou plusieurs conventions partena-riales avec d’autres opérateurs de formation et d’insertion socioprofes-sionnelle ou, à défaut, avoir identifié, pour chaque filière, les partenariats nécessaires.

Dans le cas des EFT, le décret recon-naît la méthodologie de la formation par le travail. Il permet l’activité économique tout en la balisant par des ratios3. Ceux-ci sont précisés dans les arrêtés d’exécution.

1 Voir article précédent2 En OISP, il faut ne pas avoir le certificat de

l’enseignement secondaire supérieur. En EFT, il faut n’avoir ni le diplôme du 2ème

cycle de l’enseignement secondaire, ni le certi-ficat de l’enseignement secondaire inférieur.

Soit les demandeurs d’emploi sont inoccupés pendant deux ans avant l’entrée en forma-tion.

Concrètement, cela élargi un peu le public des EFT et réduit (il n’y avait aucune limite) le public des OISP.

3 Le mode de calcul est déterminé dans les arrêtés d’exécution. Ces ratios ont comme objectif d’éviter les tensions avec le monde des employeurs. Voir article ISP et mondé économique.

Le Bric - EFT - Nivelles

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Le subventionnement

En contrepartie de la réalisation de ces missions4, le gouvernement s’en-gage à financer les opérateurs.

Quelques éléments à souligner:

Comme tous les décrets, une première balise est fixée, le subventionnement se fait dans les limites des crédits budgétaires.

La philosophie qui sous-tend le mode de subventionnement s’ap-puie sur deux éléments: d’une part, l’équité de traitement dans la prise en charge des coûts horaire entre tous les opérateurs5, d’autre part la prise en charge de 100 % du coût de l’heure de formation.

Les arrêtés d’exécution précisent trois taux de subventionnement suivant le type de filière développé: pour les EFT, un financement de 12 euros de l’heure, pour les OISP alpha, remise à niveau, développement personnel un financement également de 12 euros de l’heure et pour les OISP “filières métiers”, un finance-ment de 9 euros de l’heure.

Les subventions prises en compte sont les subventions dépendant de la Région wallonne (APE et subvention de fonctionnement).

Concrètement, tenant compte des limites budgétaires, cela signifie que toutes les heures de formation réalisées actuellement ne seront pas financées.

Le financement actuel étant très différent d’une association à l’autre, les calculs déterminant la subvention horaire ayant été calculée sur base de la moyenne, cela aura comme consé-quence que certaines associations auront demain plus de subventions qu’aujourd’hui et à contrario, d’autres moins de moyens. Tant dans le cas d’une augmentation des moyens que dans le cas d’une diminution importante, un phasage est prévu dans les arrêtés d’exécution.

En conclusion

On pourrait être beaucoup plus long, entrer plus dans le détail de chaque article tant du décret que de l’arrêté.

Si les fédérations, qui au travers de l’Interfédération ont été associées aux discussions, ont accueilli posi-tivement le contenu du décret et des arrêtés d’exécution, il nous reste quelques insatisfactions et nous en relevons deux majeures:

• Le financement des OISP “filières métier” est insuffisant et n’a pas été calculé en respectant la philo-sophie qui a prévalu au calcul pour les autres filières de formation OISP et pour les EFT;

• La limitation de l’enveloppe budgé-taire va obliger les associa-tions à continuer la chasse aux subsides (FSE, FOREm, Fonds sectoriels, …) si elles veulent continuer à offrir le même service avec le même volume d’heures qu’actuellement.

L’application du décret va avoir deux conséquences directes: l’institution-nalisation et la stabilisation dans son financement.

Des questions et des orientations importantes vont se poser au secteur dans les années à venir. On peut les synthétiser en trois options (il en existe peut-être d’autres):

• Le secteur va-t-il devenir un opérateur institutionnel régi par une forme de contrat de gestion comme le FOREm ou l’AWIPH, même si cela se fait centre par centre? Que sommes nous prêts à laisser tomber en contre partie de cette “tranquillité”?

• Le secteur se dirigera-t-il vers une forme de marchandisation de la formation? Si oui à quelle condition?

• Le secteur gardera-t-il toute sa dimension associative tout en s’articulant avec le service public? Quelles formes d’articulations, de complémentarités à organiser entre un service public fort et des associations fortes?

Les réponses ne sont pas noires ou blanches. Chaque option a ses avantages et ses inconvénients, son mode d’organisation.

Le positionnement et les options du secteur mais aussi du pouvoir politique par rapport à ces questions seront les enjeux pour les années à venir. •

Joël GillauxDirecteur des AID

Administrateur de l’Interfédé

4 Former des personnes en vue de leur insertion sociale et professionnelle est une mission qui relève de la responsabilité de l’Etat. Dans le cadre du décret, cette mission est confiée aux associations.

5 Que l’on soit une EFT bâtiment située à Mous-cron, Namur ou Verviers, la subvention à l’heure de formation sera la même.

Cynorhodon - EFT - Haccourt

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Et si un tel décret poin-tait le bout de son nez à Bruxelles? Qu’en serait-il

pour mon association? La fiction est lancée. Quelques opérateurs ISP1 de la capitale sont mis à contribu-tion. Premières réactions: surprise et circonspection. Pourquoi nous donner la parole sur le système wallon? Entre l’ISP wallonne et bruxelloise, il n’existe pas seulement une distance géographique… Le fait de se sentir peu concerné par ce qui se passe en Wallonie vient surtout d’une méconnaissance de l’autre, précise M. Swinne. Pourtant, leurs expériences pourraient servir de modèle ou de contre-exemple. A ce titre, M. Devos nous parle d’échanges très productifs avec la Wallonie et la Flandre autour des projets du

réseau FLORA2: c’était parti de cette volonté de sortir du petit Bruxelles. Personnellement, j’aime beaucoup ces réunions et j’en sors toujours gagnante. Pour moi, on a donc tort de ne pas établir plus de liens… Le temps d’une lecture, faisons la navette entre Namur et Bruxelles.

Le dispositif intégré d’insertion socio-professionnelle (DIISP)

Ce décret pourrait être intéres-sant pour le stagiaire, entame D. Masquelier. Mais, il part du Forem et revient au Forem. Le DIISP laisse-t-il suffisamment de place à la diversité et à la richesse des opérateurs de formation? Le ton est donné: plus on centralise, plus on déshumanise.

M. Devos acquiesce. Selon elle, le projet est tout simplement démesuré. A la COBEFF, avec 30 employés, mettre le stagiaire au centre de sa formation n’est pas évident. C’est déjà une équipe très lourde à gérer: beaucoup de réunions, difficulté de conserver la philosophie de la maison, de ne pas déshumaniser certaines choses.

Et quand il s’agit de limiter la période d’insertion à deux ans, les réactions sont plus virulentes. En effet, chaque personne inscrite en formation, vient avec une vie sociale et personnelle particulière, mais aussi un bagage scolaire différent. Pour cette raison, M. Devos n’aime pas les contrats qui sont calculés dans le temps. Maximum deux ans, cela ne veut rien dire! Pour certains, il faudra trois mois, pour d’autres dix. L’AFT de D. Masquelier organise une préformation qualifiante d’une durée de 18 mois. Mes stagiaires ne pourraient plus entreprendre de formation qualifiante, sous peine de dépasser la durée spécifiée dans le contrat… Etablir des contrôles pour les stagiaires qui tournent en rond, ce n’est pas une mauvaise chose. Mais se former en deux ans, si on n’a pas un bagage relativement important au départ, on ne peut rien faire!

1 Entretiens avec Dominique Masquelier, AFT Boulot (construction); Georges Bernaerts, AFT ARPAIJE (HORECA); Marianne Swinne, OISP CEFIG (formation de base, formation qualifiante en bureautique et préformation police); Martine Devos, OISP COBEFF (aide aux personnes, vente).

2 Réseau pour la formation et la création d’em-ploi avec des femmes.

Regards bruxellois sur le décret WallonAller simple Bruxelles-Namur. Quatre directeurs font le voyage. Doutes, critiques, comparaisons et parallèles.

Quand le décret wallon parle aux Bruxellois…

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Quelque chose à faire - EFT - Monceau-Fontaine

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La formation qualifiante

Par expérience, nous confie G. Bernaerts, on peut constater une meilleure qualité de l’offre quand les formations ne sont pas données par un organisme public. Pourquoi? Une raison toute simple: la mise sur pied d’une formation qualifiante nécessite une connaissance approfondie du terrain. A la COBEFF, par exemple, M. Devos s’occupe de tout ce qui est “service aux personnes”: en tant qu’infirmière sociale de formation, j’ai pu développer l’aide familiale à domicile, l’assistance logistique en hôpital… parce que je connais ce domaine”. Dès lors, pas question d’abandonner la formation qualifiante entre les mains de généralistes!

Les missions

M. Swinne salue “la part faite à la fois au projet professionnel et à l’aspect social du travail en ISP. A Bruxelles, on se sent en porte à faux entre la COCOF /Bruxelles-Formation d’une part (volet formation) et l’Orbem d’autre part (volet emploi)”. Aucun des pouvoirs publics bruxellois ne prend en compte l’entièreté du champ d’action ISP.

G. Bernaerts, lui, émet quelque réserve quant à la formulation:

“permettre à tout bénéficiaire de développer ses capacités à se former en l’aidant à acquérir des comportements professionnels et des compétences techniques lui permettant l’accès à la formation qualifiantes et, à terme, au marché de l’emploi”.

Il suggère de remplacer l’expression “à terme” par “voire”. A partir de là, l’esprit du texte change: “il faut encourager la qualification mais en faire une exclusive, ce n’est pas voir la réalité”, déclare-t-il. “Pour des raisons financières, le stagiaire ne peut pas toujours se permettre de passer par une formation qualifiante”.

Le financement

Du côté de Boulot AFT, c’est carton plein! Un tiers du budget supplémen-taire, s’enthousiasme D. Masquelier. Le CEFIG OISP ne partage pas cet avis: neuf euros de l’heure?…C’est ceinture avec ça!, s’exclame M. Swinne à la suite de quelques calculs. On est bon pour limiter un maximum ses moyens, compter sur la générosité des donateurs etc. Ce ne sont vraiment pas des conditions confortables. M. Devos fulmine: il faut conventionner le travail effectué et non la présence des stagiaires. Un financement sur base d’heures effectives? C’est non! Selon G. Bernaerts, un financement linéaire, pour toutes initiatives, sans spécifier le secteur, ne se justifie pas. Une formation en peinture n’exigera pas le même encadrement qu’une formation en ferronnerie pour laquelle on utilise des machines outils. Appliquer une règle “équitable” qui rend impossible l’organisation d’une formation, cela n’a pas de sens!

De même, lorsqu’on insiste sur le respect des règles de sécurité et hygiène, on ne peut en faire une obli-gation sans donner les moyens d’y parvenir. Quand on sait que certains projets ont commencé dans une arrière-cuisine, l’ensemble des inves-tissements nécessaires au respect des normes peut coûter les yeux de la tête, ajoute G. Bernaerts.

La nécessité d’avoir un cadre est pourtant loin d’être remise en ques-tion. A Bruxelles, le flou du statut des AFT implique des justifications incessantes à propos de leur activité commerciale: si vous produisez, vous avez de l’argent, alors pourquoi vous payer? Grâce au ratio de production, les règles du jeu sont établies pour les EFT wallonnes. Reconnaître les choses, c’est les rendre oppo-sables, précise G. Bernaerts. Dès lors, le travail et les analyses sont possibles.

L’évaluation et ses critères

M. Devos est favorable à une évalua-tion renforcée de ce qui se fait avec l’argent public. Mais pas de n’im-porte quelle manière: un contrôle intelligent qui ne titille pas sur les pourcentages de ceci et de cela, mais sur la qualité du travail. Par exemple, pouvoir expliquer combien la mise à l’emploi dans les hôpitaux devient plus difficile depuis 2001 et l’arrivée des Maribels sociaux. Laisser aux opérateurs le pouvoir de justifier leurs choix, c’est aussi le souhait de M. Swinne. A Bruxelles, c’est le niveau de qualification des formateurs qui compte aux yeux de la COCOF, spécifie-t-elle. A partir de là, même si le formateur fait bien son travail mais qu’il n’a pas le CESS, on ne laisse pas à l’opérateur la possibilité de le garder à son poste. L’idée d’une qualification “conforme” du formateur pose aussi question à G. Bernaerts: beaucoup de gens n’ont pas de titres scolaires tels qu’on les exige. Parfois, on est obligé d’oublier tous les diplômes pour engager…Le risque est là: accentuer la contrainte administrative au lieu de faciliter le travail de terrain.

Et voilà le terminus. Si ce voyage en province a quelque peu désorienté nos amis bruxellois, nous espérons que ce récit vous aura un tant soit peu éclairé… •

Stéphanie DevlesaverPour l’ACFI

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Quelque chose à faire EFT - Monceau-Fontaine

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La région de Bruxelles-Capitale

Concernant l’emploi, la région de Bruxelles-Capitale offre 600.000 emplois. Elle est le principal bassin d’emplois du pays mais seuls 298.203 postes sont occupés par des bruxel-lois. Le taux de chômage avoisinant les 20 %, est le plus important du pays.

Les emplois disponibles sont forte-ment concentrés dans les fonctions tertiaires et/ou fortement qualifiées. C’est pourquoi le chômage frappe surtout les personnes peu quali-fiées et parmi elles, les moins de 25 ans.

Le dispositif ISP

Le dispositif d’insertion sociopro-fessionnelle (ISP), qui rassemble les OISP (opérateurs de formation dont les Ateliers de Formation par le Travail et les Missions Locales agréés par la Commission Communautaire

Française), compte 700 emplois, un budget total de 22 millions € impliquant une cinquantaine d’ASBL, membres de la Fédération Bruxelloise des Organismes d’Inser-tion Socioprofessionnelle et d’Eco-nomie Sociale d’Insertion (FeBISP, http://www.febisp.be).

En 2004, les OISP ont organisé 149 actions. 1.277.164 heures ont été suivies par 3716 stagiaires conventionnés dont 3253 stagiaires distincts.

Public visé:

Décret du 27 avril 19952: “Sont visés les demandeurs d’emploi de la Région de Bruxelles-Capitale qui sont dans l’impossibilité de répondre aux offres d’emploi disponibles sur le marché du travail en raison de la faiblesse ou de l’absence de qualification professionnelle, de leur dénuement social ou du fait de discriminations visant le groupe spécifique auquel ils appartiennent.”

Catégories d’actions:

Détermination ciblée (6,7 %), déter-mination généraliste (4,7 %), alpha-bétisation (6 %), formation de base (12,1 %), préformation (18,8 %), atelier de formation par le travail (8,7 %), formation qualifiante (37,6 %), forma-tion qualifiante innovante (5,4 %). Cela représente 48,5 % des heures suivies à Bruxelles en formation professionnelle par les OISP, hors partenariat externe, à Bruxelles par le public ISP. Si on compte égale-ment l’offre de formation qualifiante organisée en collaboration avec l’Enseignement de Promotion sociale par les OISP, leur activité s’élargit à 53,4 % du champ bruxellois de la formation professionnelle.

Domaines visés:

70,5 % des actions de formation dans le dispositif visent une pratique profes-sionnelle et touchent les domaines suivants: bureautique (15 %), infor-matique (13 %), construction (13 %), aide aux personnes (10 %), horeca (8 %), électricité (5 %), animation (5 %), autres (8 %). •

Tatiana Vial Grösser FeBISP - Attachée communication

relation publique

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1 Les chiffres de 2005 ne sont pas encore dis-ponibles

2 Décret du 27 avril 1995 relatif à l’agrément de certains opérateurs d’Insertion Sociopro-fessionnelle et au subventionnement de leurs activités de formation professionnelle en vue d’accroître les chances des demandeurs d’em-ploi inoccupés et peu qualifiés de trouver ou de retrouver du travail dans le cadre des dis-positifs coordonnés d’insertion socioprofes-sionnelle.

L’ISP à Bruxelles-Capitale: état des lieux en 20041

Au Four et Au Moulin - EFT - Mons

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Au début des années 70’, le Décret Education Permanente vient donner un cadre formel aux actions de milliers de bénévoles actifs sur le terrain de la militance citoyenne, de l’éducation populaire ou permanente des travailleurs, et notamment des jeunes. On parle alors de militants associatifs préoccupés par les questions de participation sociale et culturelle de tous, et notamment des minorités.

Dans les années 80’, ces associa-tions d’Education Permanente (école de devoir, alphabétisation, anima-tion socioculturelle, …) se trouvent confrontées aux problèmes d’emploi de leurs jeunes participants. Ces mili-tants vont alors développer, avec peu de moyens à l’époque, un embryon de dispositif socio-pédagogique de formation, visant la qualification professionnelle des jeunes. Le Décret sur l’insertion socioprofessionnelle (ISP) viendra soutenir ces efforts. En se professionnalisant (pendant près de vingt ans), ces militants de la première heure deviendront des travailleurs ou des professionnels du social qui viseront l’insertion des jeunes dans l’emploi par la qualification.

Fin des années 90’, le rôle joué par l’Etat en matière de politiques sociales et de gestion des dispositifs sociaux se transforme profondément. Nous passons d’une logique “assu-rantielle” de l’Etat providence, à une logique active “de traitement et de projet individualisé et contractualisé”, de l’Etat social actif. Cette évolution idéologique des politiques sociales de l’Etat et de ses dispositifs sociaux d’intervention, “transforment en profondeur les rôles professionnels de ceux qui en sont les opérateurs. Garants et gardiens de la norme à l’égard de ceux qui sont à la marge les ‘’métiers de l’intégration’’ sont ainsi confrontés à des recompositions de leurs rôles et de leur identité”.

Cette situation a été porteuse de certaines tensions quant aux missions des centres d’ISP, aux pratiques à privilégier au sein des équipes et à la définition de l’identité professionnelle des travailleurs du social. Cela étant, les opérateurs de l’ISP ont réussi une vingtaine d’années à se constituer en secteur socioéconomique reconnu et structuré.

Enfin, et dans le prolongement, les années 2000’ voient les pouvoirs publics et certains travailleurs du social focaliser leurs efforts et leurs attentes sur l’économie sociale comme nouveau secteur d’inter-vention sociale active permettant de développer de l’emploi. L’époque est aux entrepreneurs sociaux qui veulent créer de nouveaux emplois par le développement d’activités économiques.

Toute cette évolution s’est bien faite en relation (d’alliance et d’opposition) avec les changements normatifs et idéologiques de la société, dans une sorte de continuum historique entre trois modalités d’action: la militance, l’institutionnalisation et l’initiative entrepreneuriale… qui reflètent bien l’idéologie de leur époque.

J’invite chacun à se demander, à l’instar du vieux Villon: “Que sont nos militants devenus…?”. •

José Matéos,AID - Cf2m

ntrefilets : Histoire du secteur à travers les glissements sémantiques

Attention ça glisse! : Que sont nos militants devenus?Militant associatif - Professionnel du social - Entrepreneur social

Au Four et Au Moulin - EFT - Mons

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Avec ses deux décrets phares1, le secteur ISP est à un tournant de

son histoire. Le choix a été opéré entre les différentes options qui s’offraient2 à lui: la parastatalisation, la marchandisation ou la tutellisation. L’une ou l’autre de ces options, prise individuellement, aurait probable-ment recruté autant de partisans que de détracteurs. Tout n’est pas rose et, quoiqu’on en pense, nous y avons échappé. Bien que les jeux soient faits, le risque existe néan-moins encore de subir les travers de chacune des orientations. Je souhaite dès lors les examiner ici plus en détail.

La parastatalisation

La création de l’AWISP (pour “Agence Wallonne pour l’Intégration Socio-Professionnelle”) en a fait fantasmer plus d’un sur l’avenir que l’on aurait

pu réserver au secteur ISP via l’In-terfédé et les fédérations. A l’image de l’AWIPH3, para-régional ayant succédé au Fonds Communautaire, l’AWISP aurait pu, selon certains, tenir le rôle d’organisme de soutien aux opérateurs de formation, voire même celui de l’institution les agréant et les subventionnant.

Cette idée, toute saugrenue qu’elle paraisse aujourd’hui, ne l’est pas pour autant et, en tout cas, ne l’a pas toujours été. Plusieurs rôles sont déjà tenus par l’Interfédé ou par les fédérations. Je citerai pour exemple la place laissée dans les Commissions d’agrément, l’implication de l’Interfédé dans la formation des formateurs ou encore le rôle qu’à un moment donné on aurait voulu lui faire jouer dans la vérification des compétences à l’embauche des nouveaux formateurs.

Un secteur (ou un sous-secteur) qui s’autorégule à la manière d’un para-régional ou d’un organisme wallon d’intérêt public, n’est pas non plus une nouveauté en Wallonie. Nous ajouterons à l’AWIPH, les AWEX4, SWDE5, SWL6 et autres ORPAH7. Cela se fait d’ailleurs depuis longtemps tout près de nous: je pense au Forem. Il est clair dès lors qu’un statut de para-régional aurait pu être réaliste, mais également utile, pour situer avec précision notre secteur par rapport à nos bénéficiaires tout autant que par rapport à nos partenaires.

Enfin, avouons qu’en matière de finan-cement, un para-régional bénéficie d’autres garanties que celles que peuvent avoir l’Interfédé et les fédéra-tions ensemble. Nous savons tous qu’il est indispensable que notre secteur continue à parfaire sa professionnali-sation, mais nous savons également qu’il est difficile de réaliser ce travail dans un contexte d’insécurité financière ou, tout au moins, en devant négocier au cas par cas et année par année la subvention allouée à la réalisation d’activités d’encadrement.

Nous ne bénéficierons donc pas de tous les avantages de la parastata-lisation par l’application des décrets EFT-OISP et DIISP mais, reconnais-sons-le, nous n’en aurons pas non plus les inconvénients.

1 Le décret EFT-OISP et le décret DIISP.2 Le verbe n’est peut-être pas des plus heu-

reux.3 Ne confondons pas, il s’agit donc bien de

l’Agence Wallonne pour l’Intégration des Per-sonnes Handicapées.

4 Agence Wallonne à l’Exportation et aux inves-tissements étrangers.

5 Société Wallonne Des Eaux.6 Société Wallonne du Logement.7 Office Régional de Promotion de l’Agriculture

et de l’Horticulture.

Le secteur ISP au tournant de son histoireDeux décrets phares pour l ’ ISP: plus qu’un aboutissement, un tremplin pour l ’avenir.

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AID Sleilmont - Filière entretien et réparation vélo - Charleroi

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Le Conseil d’Administration de l’In-terfédé, comme d’ailleurs les CA de toutes les fédérations, jouit des plus grandes libertés. Certains les jalousent d’ailleurs avec beaucoup de naïveté. D’autres voudraient en abuser sans plus de lucidité. Il n’empêche que nous avons la faculté de proposer, d’inter-peller, de réagir sans nécessairement attendre la demande.

Par ailleurs, c’est toujours l’Interfédé qui permet de faire converger les idées et de les défendre jusqu’à ce qu’elles remontent, au besoin, au sein des instances de concer-tation et de décision comme les Commissions d’Agrément ou la Commission Paritaire.

Enfin, ne perdons jamais de vue cette richesse issue de la multiplicité des idées qui y sont développées. Si la convergence n’y est pas toujours atteinte du premier coup, avouons qu’il s’agit là d’un signe plutôt tangible de l’expression démocratique. Ainsi, il faut bien reconnaître que la diversité des opinions constitue la meilleure garantie du reflet des idées et des positions du secteur. De plus, la quasi totalité des décisions résulte d’un consensus. Il y a peu d’organes de décision démo-cratiques non absolus qui peuvent se vanter d’y arriver aussi souvent.

Nous avons donc évité le piège de la parastatalisation.

La marchandisation

Une des perspectives clairement annoncées par le Décret EFT-OISP, comme du reste par le Décret DIISP, c’est de soumettre le système de financement des centres à une évaluation quantitative de la produc-tion8. Le financement nouveau sera, à terme, basé sur un savant calcul, s’appuyant sur l’évaluation des heures de formation réalisées. En d’autres termes, d’un financement au projet, nous allons passer à un finance-ment à l’heure de formation. D’un financement forfaitaire, nous allons développer un système de finance-ment à l’unité de production.

Ce faisant, notre secteur sera soumis de plus en plus aux risques liés à la production: soumission aux lois du marché, contraintes liées à l’offre et à la demande, obligation de réaliser un minimum d’heures de forma-tion, opportunité des investisse-ments, responsabilité des ressources humaines9, etc..

La réalisation de ces risques pourra entraîner des pertes mais, parado-xalement, ne pourra pas engendrer de bénéfices, ou très peu. Ainsi, une institution qui l’année x aura réalisé une perte de quelques milliers d’Euros, aura, l’année x+1, toutes les peines du monde à le compenser.

Les raisons en sont que la marchan-disation n’est pas non plus devenue la panacée du secteur. En effet, il semblerait (le risque est grand du moins, à l’heure de rédiger ces lignes), que les contrôles des pièces justificatives ayant pour but d’éviter le double subventionnement (“syndrome La Carolo” oblige!), soient maintenus. Cela pourra avoir comme effet le rejet de toute forme de subvention non immédiatement justifiée par une pièce de l’année inspectée.

Nous ne pourrons même pas compter sur la flexibilité et la dévotion de nos collègues. Les heures supplémen-taires doivent être récupérées à des tarifs souvent supérieurs. Quant au bénévolat, n’y songeons même plus et c’est bien normal dans le cadre d’une saine gestion du temps de travail et du respect des lois sociales. Notons, pour ceux qui malgré tout en rêveraient, qu’une mise à dispo-sition est immédiatement dénoncée à l’Inspection des Lois Sociales qui se met à chercher dans les centres les nouveaux fraudeurs.

En revanche, les motifs pour réaliser une mauvaise opération sont légion: cela va de la responsabilisation rela-tive aux heures de formation mini-males à réaliser pour un projet donné, à la braderie des heures de formation payées dans le cadre des conventions article 6 avec le Forem, en passant par les contrôles TVA dans les EFT modifiant les taux d’assujettissement et engendrant des redressements avec effet rétroactif.

Peut-être suis-je pessimiste, mais il me semble que les chances de perdre de l’argent deviennent supérieures à celles d’en gagner. Si l’on peut comprendre la volonté de chasser la fraude et la coercition qui en découle, on peut en craindre l’excès. En tout cas, il me paraît clair que la marchan-disation ne nous sera pas imposée comme système de référence, du moins totalement. L’institution qui trébuche aura pourtant de la peine à se relever.

AID Tubize - Filière menuiserie - Tubize

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La tutellisation

Entre Charybde et Scylla10, notre secteur a pu naviguer sans perdre ni son autonomie, ni ses moyens11. Encore fallait-il ne pas perdre son identité. Depuis le pacte associatif, nous savons que l’Etat doit se poser en régulateur et ne plus se posi-tionner sur le mode concurrentiel vis-à-vis du monde associatif. Le Forem, dans ce cadre, a opéré une énorme modification: en dehors d’une structure support centra-lisée, il s’est divisé en deux entités distinctes, l’une continuant à opérer sur le terrain de la formation et l’autre occupant les fonctions de régisseur ensemblier dans les domaines de l’emploi et de la formation. Si cela n’a pas fort changé dans le cadre des relations entre notre secteur et Forem Formation, les efforts mobi-lisés par Forem Conseil, notamment par de nombreux Services Relations Partenariales, commencent ça et là à porter des fruits en termes de relations constructives avec des opérateurs du secteur. Les prochains mois nous diront si, oui ou non, notre secteur est envisagé sur le même pied que les opérateurs plus insti-tutionnels. C’est vrai que l’on peut se demander parfois à quoi peuvent servir certaines conventions parte-nariales, mais généralement, dans l’attente, nous jouons le jeu. Dans beaucoup de cas, on souhaiterait voir se concrétiser l’exécution,sur le terrain, des conventions signées.

Pour qu’il y ait collaboration, il faut qu’il y ait reconnaissance réciproque et pour qu’il y ait reconnaissance, il faut d’abord qu’il y ait connaissance. A l’heure actuelle, nous sommes encore trop nombreux à ignorer ce que peut faire l’autre. Gageons que cela n’est pas volontaire et que la mise en application complète du DIISP dans les sous-régions devrait amener un apprentissage mutuel, voire, s’il le faut pour les plus têtus, un arbitrage bienveillant.

En attendant, nous n’avons pas à rougir de notre travail. Pour ne prendre que les aspects quanti-tatifs, les 4,2 millions d’heures de formation dispensées à quelques 15.000 stagiaires en 2004 auraient augmenté de quelque 7% en 2005. Cela, c’est sans compter la métho-dologie qui nous caractérise et l’obligation qui nous est faite -bien que, pour beaucoup d’entre nous, la volonté suffit- de travailler avec un public particulièrement éloigné de l’emploi.

Clairement, sans crainte d’une éven-tuelle volonté de nous placer sous la tutelle bienveillante d’un autre partenaire du DIISP, nous sommes totalement ouvert à une forme de dialogue constructif qui permettrait de faciliter le cheminement des stagiaires au sein des dispositifs. A titre d’exemple, nous demandons toujours à connaître les socles de compétence à l’entrée des formations qualifiantes12 de sorte que nous puissions adapter nos programmes en conséquence.

En d’autres termes, l’Interfédé a toujours défendu l’idée que nous étions un secteur prêt à s’adapter et à adopter le fond et la forme de ce qu’il conviendrait de développer pour permettre aux personnes d’accéder à d’autres niveaux de formation. Encore faut-il que nous sachions de quoi il devrait s’agir. Pourquoi sinon vouloir nous tutelliser?

Les perspectives offertes par les Décrets, semblent positionner le secteur comme un partenaire incon-tournable. Dans ce cadre, l’Interfédé est destinée à y jouer un rôle majeur. Au delà du fait de savoir si ce rôle réside dans un travail qu’elle se sera assigné ou qu’elle se sera vu assi-gner, il convient de relever que celui-ci sera multi-axial et portera tant sur la représentation générale vis-à-vis d’autres groupements d’opérateurs et des autorités de tutelle que sur l’amélioration de la qualité du travail au sein du secteur, par la proposi-

tion de programmes de formation ou d’autres formes d’instruments de développement personnel des travailleurs et des institutions.

Dans ce cadre, l’Interfédé ne paraît manquer à aucun de ses devoirs en ce qui concerne le travail qu’elle s’est vu assigner par les autorités par convention et dont elle a proposé le contenu pour améliorer la compé-tence de chacun.

Elle ne manquera non plus aucun devoir en ce qui concerne les missions qu’elle s’est assignées en vue de réagir promptement à défendre collectivement tous les membres ou individuellement chaque membre via les fédérations.

Le secteur évolue. Les opérateurs s’adaptent, mais ils doivent être sûrs de toujours trouver sur leur chemin, pas loin, une structure profession-nelle pour les y aider. Cette structure n’est ni parastatale, ni marchande, ni sous la tutelle contraignante d’une quelconque autorité. Cette structure, c’est l’Interfédé de demain. •

Eric GravaPrésident de l’Interfédé

8 L’expression est choisie à dessein.9 Ce dernier risque n’est pas nouveau; il date

de la réforme des PRC wallons entre-autres le passage des Primes en APE.

10 Monstres: l’un buveur et l’autre mangeur de l’Odyssée. Je vous invite à en découvrir plus à leur sujet.

11 Cela reste encore à voir, notamment pour les OISP, mais les discussions actuelles avec le Cabinet de Mme la Ministre vont bon train.

12 Du moins, sensées être plus qualifiantes que nos formations dites “pré qualifiantes”…nous préférons le terme “autrement qualifiantes”.

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Les modules organisés en juin et juillet 20061

• Les 1er, 2 et 16 juin: “Gestion du stress”, approche corporelle du stress

• Les 6 et 13 juin: “Quel cadre légal: entre secret profes-sionnel, devoir de discrétion et déontologie”;

• Le 12 juin: “Le statut du stagiaire en regard du droit du travail et de la sécurité sociale” pour les travailleurs assurant le suivi administratif des stagiaires et travaillant depuis moins de 2 ans dans le secteur;

• Les 3, 4 et 5 juillet: “Mon métier, formateur théorique en ISP”, démarrage du module de forma-tion2.

L’Interfédé propose aux centres qui le souhaitent d’organiser avec leurs travailleurs (et éventuellement leurs stagiaires) un module de formation de 3 jours sur le thème “Interculturel, multiculturel, diver-sité culturelle… et s’il s’agissait de vivre ensemble?”.

A partir de septembre 20063

Orient-Express

Il s’agit de modules de forma-tion d’environs 10 jours, destinés aux différents métiers du secteur de l’insertion socioprofessionnelle. Chaque module de formation aborde 4 axes:

• L’axe de l’identité du métier: qu’est-ce qui est propre au métier de secrétaire, de formateur, d’in-tervenant psycho sociopédago-gique, de directeur en ISP?

• L’axe organisationnel: dans quel cadre travaillons-nous? comment s’organise le centre? quelle place j’occupe dans l’organigramme?

• L’axe pédagogique: comment formons-nous? pourquoi? dans quelle perspective pédago-gique?

• L’axe relationnel ou communica-tionnel: comment améliorer notre communication entre pairs, avec les stagiaires et en équipe?

Ainsi, dès le mois d’octobre, les modules à destination des secré-taires “Les secrétaires au four et au moulin” et des intervenants psycho sociopédagogiques “IPSP, métier caléidoscope” seront organisés.

Un module Orient-Express sera également proposé aux “directeurs et directrices”. Il comprendra une première étape qui permettra de réaliser une auto-évaluation de ses compétences et de ses besoins dans la fonction dirigeante. Sur base de cette évaluation, les participants pourront composer leur programme de formation en participant à des modules abordant des thèmes précis (analyse organisationnelle, travail avec les collaborateurs, gestion des conflits, plan de formation…). La formation comprendra également des supervisions collectives et des temps de coaching individuels.

Connaissance du secteur

“L’ISP, une réponse à l’exclusion, décret, enjeux & Cie” (les 9, 19, 26 octobre et 7 novembre) pour les travailleurs engagés depuis moins de 2 ans dans le secteur.

“Quel cadre légal: entre secret professionnel, devoir de discré-tion et déontologie” et “Le statut du stagiaire en regard du droit et de la sécurité sociale” (premier semestre 2007).

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Embarquez sur la bonne voieProgramme de formation de l’Interfédé 2006-2007

Idée 53 - AFT - Bruxelles

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Les nouveautés

“Etablir un cadre de classement” (premier semestre 2007):

Pourquoi et comment classer des documents: pour s’y retrouver person-nellement, pour que les documents soient accessibles par d’autres, pour ne pas tout garder ou tout jeter. Le module de formation a pour ambition de permettre aux participants de construire ou d’affiner leur cadre de classement. Il sera proposé au premier semestre 2007.

“Déminons l’extrême droite” (premier semestre 2007):

Que faire face à des propos d’ex-trême droite? Comment réagir de manière adéquate? Ce module de formation proposera de réfléchir aux réponses apportées mais aussi d’analyser leurs limites. Il permettra de creuser les mécanismes qui provoquent ces réactions: Que signi-fient ces propos? Quelle image de la société donnent-ils? Et pourquoi

émergent-ils? Enfin, les participants seront invités à identifier les modes d’action possibles dans le champ professionnel et dans celui de l’action collective.

“Quand prison rime avec Insertion” (à partir d’octobre 2006)

De plus en plus de centres accueillent des personnes en semi-liberté, en liberté conditionnelle, sous bracelet électronique ou ayant purgé une peine de prison. Cela génère souvent une série de questions ou de nouvelles situations qui, outre des réponses concrètes, méritent d’être situées dans une réflexion plus large. C’est pourquoi, dans le cadre de ce module de formation, nous proposons de situer les acteurs du monde carcéral et de l’Insertion socioprofessionnelle (qui sont-ils? comment intervien-nent-ils? quels sont leurs rôles et leurs missions?), de comprendre le système judiciaire, de s’interroger sur les enjeux (contrôle social, production de la violence, trauma-

tisme carcéral, stigmatisation d’un public, dignité des détenus…), de s’informer sur les pistes d’action en cours (Loi Dupont, justice réparatrice, courant abolitionniste…) et préciser son positionnement professionnel. Cette démarche de formation sera productrice d’un savoir collectif construit en articulation avec les pratiques des participants. •

Marina Mirkes,Coordinatrice pédagogique

à l’interfédé

Toutes les informations relatives au programme de formation peuvent être obtenues auprès de Marina Mirkes, coordinatrice pédagogique à l’Interfédé au 081/74.32.00, e-mail:[email protected]

1 Si vous souhaitez y participer, contactez-nous le plus rapidement possible car le nombre de places est limité.

2 28 et 29 août, 9 et 10 novembre, une date à fixer en décembre 2006, 25 et 26 janvier 2007.

3 Le contenu du programme de formation 2006-2007 est en cours d’élaboration. Il pourrait connaître des modifications dans sa forme finale par rapport à ce qui est annoncé ici.

L’Essor “nouveau” est arrivé. Comme tout nouveau né il doit se construire, se développer en tenant compte,

dans la mesure du possible, des remarques émises par nos lecteurs dans l ’enquête lancée début 2006. Déjà, i l

s’est paré de couleurs estivales, s’est aéré… Bientôt, de nouvelles rubriques apparaî tront. Pour que l ’Essor nous

rapproche tous, n’hésitez pas à nous transmettre vos remarques, vos suggestions, vos bil lets d ’humeur, vos

articles. D’avance, le Comité de rédaction vous en remercie. Bonne lecture et merci pour votre fidélité.

Le Comité de rédaction

Nous remercions les Fédéra-

tions et les centres de nous

avoir fourni les photos et les

documents qui relatent les évè-

nements marquants de l'his-

toire de notre secteur.

Quelque chose à faire - EFT - Monceau-Fontaine��

Remerciements

Les illustrations de l’ESSOR 36

Les cinq fédérations membres de l’Interfédération EFT-OISP sont:

ACFI - Action Coordonnée de Formation et d’Insertion Socio-professionnelle - www.acfi.be - tél. 02 640 44 07

AID - Actions Intégrées de Développement - www.aid-com.be - tél. 02 246 38 61 (62 ou 65)

ALEAP - Association Libre d’Entreprises d’Apprentissage Professionnel - www.aleap.be - tél. 081 24 01 90

CAIPS - Concertation des Ateliers d’Insertion Professionnelle et Sociale - www.federationcaips.be - tél. 04 337 89 64

Lire et Ecrire Wallonie - www.lire-et-ecrire.be - tél. 071 20 15 20

Contribution permanente à la revue:

FeBISP - Fédération Bruxelloise des organismes d'insertion socioprofessionnelle et d'économie sociale d'insertion - www.febisp.be - tél. 02 537 72 04

Le Comité de rédaction:

Eric ALBERTUCCIO - Marc CLEPKENS - Isabelle GHISLAIN - Marie-José KALININGONDO - Véronique KINET - Marjorie LACROIX - Tatiana VIAL GRÖSSER - Dan WENDORF

Secrétaire de rédaction:

Marjorie LACROIX: 064/23 90 56 - [email protected]

L'ESSOR de l'Interfédé: La revue trimestrielle du secteur de l'insertion socioprofessionnelleConception du layout: SCB Communication - Mise en page et production: Kaligram - www.kaligram.beEditeur responsable: Maryline De Beukelaer - rue Marie-Henriette, 19-21 - 5000 Namur - tél. 081 / 74 32 00 - fax 081 / 74 81 24 - [email protected] données diffusées pourront être reproduites par tout utilisateur qui sera tenu d’en indiquer la source.

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avec le soutien de la Région Wallonne et du Fonds Social Européen