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DOSSIER Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 186 711 Dans ce numéro : > 1/ Le Top 5 de la pathologie inflammatoire ��������������������������������������������������������������������������������P� 72 « La corticothérapie par voie orale à forte dose validée dans les traitements des poussées » Marc Coustans (Quimper) > 2/ Le Top 5 de la pathologie neuromusculaire����������������������������������������������������������������������������P� 80 « Le début d’une nouvelle ère dans les neuropathies dysimmunitaires… » Thierry Maisonobe (Paris) > 3/ Le Top 5 de la pathologie extrapyramidale ����������������������������������������������������������������������������P� 86 « L’espoir est de pouvoir mettre en évidence sur une simple biopsie de peau les biomarqueurs de certaines maladies dégénératives » Frédéric Bourdain (Suresnes) Dans le numéro de janvier (n° 184) : Introduction La session « Top 5 » des Rencontres de Neurologies a 7 ans Thomas de Broucker (Saint-Denis) > 1/ Le Top 5 de l’épilepsie « L’idée serait d’avoir des molécules visant à empêcher le cerveau de devenir épileptique » Gilles Huberfeld (Paris) > 2/ Le Top 5 de la pathologie neurovasculaire « Une année riche en matière de traitement à la phase aiguë de l’infarctus cérébral » Mikael Mazighi (Paris) > 3/ Le Top 5 de la pathologie cognitive « Des avancées importantes dans la compréhension des aphasies primaires progressives » Marc Teichmann (Paris) Retrouvez toutes les interventions du « TOP 5 » de la neurologie en vidéo sur ou en scannant le code ci-dessous. LES « TOP » 5 DE LA NEUROLOGIE Coordonné par Thomas de Broucker (Saint-Denis), avec la collaboration de Claude Mékies (Toulouse) — 2 e partie —

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DOSSIER

Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 186 711

Dans ce numéro :

> 1/ Le Top 5 de la pathologie inflammatoire ��������������������������������������������������������������������������������P� 72 « La corticothérapie par voie orale à forte dose validée dans les traitements des poussées » Marc Coustans (Quimper)

> 2/ Le Top 5 de la pathologie neuromusculaire ����������������������������������������������������������������������������P� 80 « Le début d’une nouvelle ère dans les neuropathies dysimmunitaires… » Thierry Maisonobe (Paris)

> 3/ Le Top 5 de la pathologie extrapyramidale ����������������������������������������������������������������������������P� 86 « L’espoir est de pouvoir mettre en évidence sur une simple biopsie de peau les biomarqueurs de certaines maladies dégénératives » Frédéric Bourdain (Suresnes)

Dans le numéro de janvier (n° 184) :

Introduction La session « Top 5 » des Rencontres de Neurologies a 7 ans Thomas de Broucker (Saint-Denis)

> 1/ Le Top 5 de l’épilepsie « L’idée serait d’avoir des molécules visant à empêcher le cerveau de devenir épileptique » Gilles Huberfeld (Paris)

> 2/ Le Top 5 de la pathologie neurovasculaire « Une année riche en matière de traitement à la phase aiguë de l’infarctus cérébral » Mikael Mazighi (Paris)

> 3/ Le Top 5 de la pathologie cognitive « Des avancées importantes dans la compréhension des aphasies primaires progressives » Marc Teichmann (Paris)

Retrouvez toutes les interventions du « TOP 5 » de la neurologie en vidéo sur

ou en scannant le code ci-dessous.

LES « TOP » 5 DE LA NEUROLOGIE

Coordonné par Thomas de Broucker (Saint-Denis), avec la collaboration de Claude Mékies (Toulouse)

— 2e partie —

DOSSIER

72 Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 1863

*Centre hospitalier de Cornouaille, Quimper

1. SYNDROME CLINIQUEMENT ISOLÉ

• Tintore M, Rovira A, Rio J et al. Defi-ning high, medium and low impact prognostic factors for developing multiple sclerosis. Brain 2015 ; 138 : 1863-74.

■■ INTRODUCTION Les années 1990 ont connu une littérature riche concernant les études épidémiologiques dans la SEP, elles sont actuellement moins nombreuses. L’équipe de Barcelone présente de nouveaux résultats de sa cohorte de patients ayant présenté un syndrome clini-quement isolé (SCI).

■■ OBJECTIFS Cette nouvelle publication avait pour pour but de définir des facteurs pro-nostiques prédictifs d’une conver-sion vers une SEP et du risque de handicap chez des patients ayant présenté un SCI à partir des don-nées initiales démographiques, cli-niques, de la ponction lombaire et des IRM de 1 015 patients avec un suivi moyen de 81 mois.

■■ ÉTUDELa cohorte barcelonaise a été ini-tiée en 1995, et le gel de la base

début des symptômes.La sclérose en plaques était définie si le patient présentait une deu-xième poussée ou sur les critères de Barkhof 2005. L’étude statis-tique était univariée et multivariée.

■■ RÉSULTATS Les résultats de l’étude montrent des données cliniques habituelles

Le top 5 de la pathologie inflammatoire« La corticothérapie par voie orale à forte dose validéedans les traitements des poussées »

Marc Coustans*

a été réalisé en juin 2013. Elle a inclus 1 015 patients présentant un SCI, âgés de moins de 50 ans qui ont bénéficié d’un suivi standar-disé clinique et IRM. Les patients étaient vus moins de 3 mois après le début des symptômes et suivis régulièrement. Une IRM encépha-lique et médullaire initiale était réalisée, puis 1 an et 5 ans après le

TABLEAU 1 - RÉSULTATS DE LA COHORTE DE 1 015 PATIENTS.

Données initiales RésultatsFemmes 686 (67,6 %)

Âge de début 31,1Névrite optique 373 (36,7 %)Tronc cérébral 271 (26,7 %)

Médullaire 261 (25,7 %)Autres 110 (10,8 %)

PL (792 : 78,6 %) BO > 0 453 (57,2 %)BO avec IRM normale 19,1 %

BO avec IRM anormale 73,5 %IRM : normale 299 (31,4 %)

IRM avec 1-3 lésions 137 (14,4 %)IRM avec 4-9 lésions 137 (14,4 %)

IRM ≥ 10 lésions 378 (39,7 %)Critères de Barkhof : 0 375 (36,9 %)

Critères de Barkhof : 1-2 198 (20,9 %)Critères de Barkhof : 3-4 375 (36,9 %)

Patients traités 388 (38,3 %)Patients traités avec IRM 3-4

Barkhof > 0 281 (75,3 %)

DOSSIER

74 Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 1863

Développement de SEP et score EDSS de 3 selon le nombre de lésions à l’IRM de référence.

■ : ≥ 10 lésions■ : 4-9 lésions■ : 1-3 lésions■ : 0 lésions

Prob

abili

té cu

mul

ativ

e de

dév

elop

per

une

SEP

clin

ique

men

t déf

inie

Prob

abili

té cu

mul

ativ

e de

dév

elop

per

un s

core

EDS

S de

3

Temps depuis la première poussée (mois)0

0,0

0,2

0,4

0,6

0,8

1,0

24 48 72 96 120 144 168 192 216 240

0

0,0

0,2

0,4

0,6

0,8

1,0

24 48 72 96 120 144 168 192 216 240

FIGURE 1 - Risque de développer une SEP ou un handicap selon le nombre de lésions à l’IRM initiale.

avec un âge moyen de 31  ans et 67,6  % de femmes, la névrite optique était le symptôme le plus fréquent et concernait 36  % des patients (Tab. 1).62,6  % des patients ont bénéfi-cié d’une ponction lombaire et la recherche de bandes oligoclo-nales (BO) était positive pour 57 % d’entre eux. À noter que 19,1  % des patients qui présentaient une IRM normale avaient des BO.Concernant les IRM, les auteurs ont classé les patients en quatre groupes selon que l’IRM était normale, présentait une à trois lésions, quatre à neuf lésions ou ≥ dix lésions.Les données IRM montrent que près d’un tiers des patients ont une IRM normale initialement (31,4 %), près de 40 % des patients ont au moins dix lésions.Les résultats montrent qu’avec un suivi moyen de 81 mois (Fig. 1) :• Pour les patients avec une IRM normale, 7  % font une deuxième poussée, 9  % atteignent les cri-tères de McDonald 2005.• Pour les patients avec une IRM anormale (une lésion ou plus)  : 56 % font une deuxième poussée, 72  % atteignent les critères de McDonald 2005.• Pour les patients avec une IRM avec au moins dix lésions  : 64 % font une deuxième poussée, 81 % atteignent les critères de McDo-nald 2005. L’analyse univariée et multivariée montre que le sexe n’est pas un facteur pronostique à la diffé-rence d’un âge de début jeune, de la présence de BO, d’un nombre de lésions sur l’IRM initiale ≥ dix. Cliniquement, débuter par une névrite optique est de meilleur pronostic tout comme la prise d’un traitement avant la deuxième poussée.

■■ CONCLUSION Cette étude prospective portant sur un nombre important de patients avec un suivi moyen de 7  ans met en évidence des fac-teurs pronostiques de conver-sion vers une SEP avec un impact faible (les facteurs démogra-phiques, cliniques), un impact modéré (la ponction lombaire) et un impact pronostique fort (l’IRM).

2. SYNDROME RADIOLOGIQUEMENT ISOLÉ

• Lebrun C, Cohen M, Chaussenot A et al. A prospective study of patients with brain MRI showing incidental T2 hyperintensities adressed as mul-tiple sclerosis: a lot of work to do before treating. Neurol Ther 2014 ; 3 : 123-132.

■■ INTRODUCTION Une étude d’incidence du syn-drome radiologiquement isolé (RIS) en Suède a été présentée à l’ECTRIMS 2015 portant sur un comté suédois avec une popu-lation de 259 000 habitants en 2013. 1 907  IRM pour différents motifs ont été réalisées et analy-sées. L’incidence retrouvée du RIS était de 0,1 % (deux patients), les auteurs notent un cas de RIS pour dix nouveaux cas de SEP/an [1]. De nombreux neurologues se posent la question de l’indication d’un traitement chez ces patients, les auteurs apportent leur expé-rience de la confirmation du dia-gnostic pour des patients adres-sés pour suspicion de RIS ou de SEP à l’IRM.

■■ ÉTUDE Les auteurs ont analysé de façon prospective des patients adressés

les « top 5 » de la neurologie

Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 186 751

par des médecins généralistes et des neurologues en consultation spécialisée pour une suspicion de RIS ou de SEP suite à la décou-verte d’hypersignaux sur une IRM encéphalique réalisée pour des symptômes aspécifiques et non évocateurs de SEP.Cette étude a porté sur 220  pa-tients adressés pour un avis de façon prospective de 2009 à 2012, l’âge moyen des patients était de 42,7 ans.L’imagerie était analysée par les neurologues et les neurora-diologues selon les critères de Barkhof. Les patients ont béné-ficié de bilans complémentaires avec bilans biologiques et ponc-tions lombaires, et un suivi IRM a été proposé à 3, 6, 12 et 24 mois. Les symptômes ayant motivé la demande de l’IRM les plus fré-quents étaient les céphalées (39 %), des troubles sensitifs aty-piques (12  %) et des troubles de l’humeur (10 %).

■■ RÉSULTATSAprès examen clinique, bilan et suivi, le diagnostic de RIS a été retenu pour 18 patients et celui de SEP pour 78 patients. Seulement 35 % des patients avaient une ma-ladie inflammatoire avérée et 8 % un RIS.

■■ CONCLUSION Comme les auteurs le soulignent, l’analyse IRM reste difficile avec un risque de diagnostic erroné de RIS ou maladie inflammatoire. Cela implique la nécessité d’avoir un avis spécialisé de neurologues et neuroradiologues. L’indication d’un traitement pour les RIS reste en cours de discussion, mais ces données incitent à la prudence devant la découverte d’hypersignaux possiblement

évocateurs d’une maladie in-flammatoire.

3. NEUROMYÉLITES OPTIQUES

• Wingerchuk DM, Banwell B, Ben-net JL et al. International consensus diagnostic criteria for neuromyelitis optica spectrum disorders. Neuro-logy 2015 ; 85 : 177-89.

■■ INTRODUCTIONDe nouveaux critères diagnostiques des neuromyélites optiques (NMO) ont été publiés. On rappellera que les critères diagnostiques précé-dents dataient de 2006. Ils étaient assez simples avec deux éléments cliniques retenus (névrite optique et myélites aiguës) à l’IRM : une at-teinte médullaire >  trois segments vertébraux et une IRM encéphalique non évocatrice de SEP et des anti-corps anti-AQP4 positifs. Les nou-velles descriptions cliniques et IRM plus récentes des NMO ont amené des experts à revoir ces critères.

■■ ÉTUDEDix-huit neurologues experts de neuf pays se sont réunis à sept reprises entre octobre 2011 et novembre 2013 afin de définir des critères diagnostiques révi-sés. Ces experts souhaitaient un consensus sur deux points :• Le terme de spectre de neu-romyélite optique devait inclure toutes les pathologies.• Les nouveaux critères devaient prendre en compte les données cliniques (six signes cliniques), biologiques (positivité ou non des anticorps anti-AQP4) et IRM (quatre types de lésions) en pre-nant en compte des patients avec une sérologie des anticorps anti-AQP4 négatifs.

Le tableau 2 résume les nouveaux critères diagnostiques. La classification peut être sépa-rée en deux catégories selon la positivité ou non des anticorps anti-AQP4.• Si les anticorps anti-AQP4 sont positifs, un seul élément clinique est suffisant.• Si les anticorps sont négatifs, les nouveaux critères nécessitent deux éléments cliniques dont un majeur, des critères de dissémi-nation dans l’espace et des cri-tères IRM supplémentaires.

Les auteurs rappellent aussi les drapeaux rouges qui pourraient orienter plutôt vers une SEP ou d’autres pathologies inflamma-toires ou infectieuses comme la présence de BO à la ponction lombaire.

Concernant les anticorps anti-AQP4, la technique référente est la technique Cell-Based Assay (CBA), sensible à 76  %, alors que la sensibilité des tests est moindre pour les autres tech-niques. Les auteurs rappellent l’intérêt de retester les patients initialement séronégatifs.

■■ CONCLUSION L’intérêt de ces nouveaux cri-tères est d’intégrer les signes cliniques autres que la névrite optique et l’atteinte médullaire et de prendre en compte la sérolo-gie négative et les nouveaux cri-tères IRM qui sont décrits dans la maladie depuis quelques années.

4. CORTICOÏDES ET POUSSÉES DE SEP

• Le Page E, Vieillard D, Laplaud DA et al. Oral versus intravenous high-dose

DOSSIER

76 Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 1863

methylprednisolone for treatment of relapses in patients with multiple sclerosis (COPOUSEP): a randomised, controlled, double-blind, non inferio-rity trial. Lancet 2015 ; 386 : 974-81.

■■ INTRODUCTIONLes auteurs présentent une étude ayant pour but de valider l’effica-cité des corticoïdes à fortes doses par voie orale dans les poussées de SEP.

■■ OBJECTIFSL’objectif principal de l’étude était d’évaluer la non-infériorité de l’efficacité du traitement par méthylprednisolone à forte dose (1 g/jour pendant 3 jours) admi-

nistré par voie orale versus voie intraveineuse, sur l’évolution des poussées de SEP à 28 jours du début du traitement. Les objectifs secondaires étaient d’évaluer la non-infériorité de la voie orale sur la récupération des poussées de SEP à 3 jours, 8 jours et 180 jours du début du trai-tement, le nombre de récidives (nouvelles poussées traitées par corticoïdes) au cours des 6 mois suivant l’inclusion, la tolérance “ressentie” par les patients. Le critère de jugement principal était le nombre de patients amé-liorés à J28. L’amélioration était définie par la diminution ≥ 1 point du score fonctionnel principale-

ment touché par la poussée, en l’absence de toute corticothérapie complémentaire.Dans cette étude prospective, 200  patients ont été randomisés avec un suivi de 180 jours (Fig. 2).

■■ RÉSULTATSLe critère principal, à savoir l’absence de différence entre les deux groupes de patient traités, est atteint. Il n’existe pas de diffé-rence significative pour le nombre de patients améliorés à J28 (81 % des patients traités par voie orale versus 80 % par voie IV). Ces ré-sultats cliniques sont confirmés à 6  mois. Concernant la tolérance, la seule différence significative

TABLEAU 2 - CRITÈRES DIAGNOSTIQUES NMOSD POUR PATIENTS ADULTES.Diagnostic criteria for NMOSD with AQP4-IgG1. At least 1 core clinical characteristic2. Positive test for AQP4-IgG using best available detection method (cell-based assay strongly recommended)3. Exclusion of alternative diagnosesDiagnostic criteria for NMOSD without AQP4-IgG or NMOSD with unknown AQP4-IgG status1. At least 2 core clinical characteristics occurring as a result of one more clinical attacks and meeting all of the

following requirements:a. At least 1 core clinical characteristic must be optic neuritis, acute myelitis with LETM, or area postrema

syndromeb. Dissemination in space (2 or more different core clinical characteristics)c. Fulfillment of additional MRI requirements, as applicable

2. Negative tests for AQP4-IgG using best available detection method, or testing unavailable3. Exclusion of alternative diagnosisCore clinical characteristics1. Optic neuritis2. Acute myelitis3. Area postrema syndrome: episode of otherwise unexplained hiccups or nausea and vomiting4. Acute brainstem syndrom5. Symptomatic narcolepsy or acute diencephalic clinical syndrome with NMOSD-typical diencephalic MRI lesions6. Symptomatic cerebral syndrome with NMOSD-typical brain lesionsAdditional MRI requirements for NMOSD without AQP4-IgG and NMOSD with unknown AQP4-IgG status1. Acute optic neuritis: requires brain MRI showing normal findings or only nonspecific white matter lesions, OR

optic nerve MRI with T2-hyperintense lesion or T1-weighted gadolinium-enhancing lesion extending over > 1/2 optic nerve length or involving optic chiasm

2. Acute myelitis: requires associated intramedullary MRI lesion extending over ≥ 3 contiguous segments (LETM) OR ≥ 3 contiguous segments of focal spinal cord atrophy in patients with history compatible with acute myelitis

3. Area postrema syndrome: requires associated dorsal medulla/area postrema lesions4. Acute brainstem syndrome: requires associated periependymal brainstem lesionsAQP4 : aquaporin-4 ; IgG : immunoglobulin G ; LETM : longitudinally extensive transverse myelitis lesions ; NMOSD : neuromyelitis optica spectrum disorders.

les « top 5 » de la neurologie

Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 186 771

entre les deux groupes est un nombre un peu plus élevé d’in-somnie pour les patients traités par voie orale (77  versus 64  %). À noter que dans cette étude, 36  % des patients ne récupèrent pas totalement de la poussée à 6 mois.

■■ CONCLUSIONL’étude COPOUSEP montre que l’administration de méthylpred-nisolone 1g/jour pendant 3 jours n’est pas moins efficace par voie orale que par voie intraveineuse et la tolérance est similaire. On retiendra les avantages de la voie

orale du traitement des pous-sées pour le confort du patient et le coût économique. Cependant, afin d’éviter une banalisation de l’utilisation des corticoïdes dans la SEP, la poussée doit être vali-dée par le neurologue ainsi que la prescription des corticoïdes.

5. DACLIZUMAB

• Kappos L, Wiendl H, Selmaj K et al. Daclizumab HYP versus interferon beta-1a in relapsing multiple sclero-sis. N Engl J Med 2015 ; 373 : 1418-28.

■■ INTRODUCTIONLe daclizumab est un anticorps monoclonal humanisé, inhibiteur compétitif de la sous-unité alpha (CD25) du récepteur à l’IL2, qui est surexprimé à la surface des lymphocytes T activés. L’anticorps

Début de la poussée

Période de sélection Max 15 jours Groupe 1 (N = 100)

MP IV 1 g/j + PLC en gélules pendant 3 j

J2 J3 J4 J8 (J8-J10)

J28 (+/- 2 j)

V 4 - Examen neuro - AV si NORB - Q. tolérance n°4 - Recueil des EI

Inclusion et randomisation

DÉROULEMENT DE L’ÉTUDE COPOUSEP

J1

V 1 Bilan clinique : - Critères I et E - Antécédents - Liste traitements - Examen clinique - Examen neuro - AV (+/- CV) si NORB - SEP-59 et EIF-SEP Bilan paraclinique : - BU +/- ECBU - ECG - RP si foyer pulm. - NFS + CRP + ionogr + ALAT + ASAT

V 2 - Examen général - Q. tolérance n°1 - Recueil des EI

V 3 - Examen général - Examen neuro - AV si NORB - Q. tolérance n°2 - Recueil des EI

- Q. tolérance n°3

V 5 - Examen neuro - AV (+/-) CV si NORB - Q. tolérance n°5 - Recueil des EI - Donner SEP-59 et EIF- SEP (à remplir à J60)

V 6 - Examen neuro - AV (+/- CV) si NORB - Vérification des visites de poussées

traitées par corticoïdes entre J28 et J180

- Recueil des EI - Modification traitement de fond de la SEP - SEP-59 + EIF-SEP

PLC = placebo ; I et E = Inclusion et Exclusion ; AV = acuité visuelle ; CV = champ visuel ; NORB = névrite optique rétro-bulbaire ; SEP-59 et EIF-SEP = auto-questionnaire de qualité de vie ; BU = bandelette urinaire ; ECBU = examen cyto-bactériologique des urines ; ECG = électrocardiogramme ; RP = radio des poumons ; Ionogr = ionogramme ; TA = tension artérielle ; T° = température ; Q. tolérance = auto-questionnaire de tolérance ; EI = événements indésirables

Groupe 2 (N = 100) MP 1 g/j en gélules + PLC IV pendant 3 j

IV

J60

Appel tél IDE : SEP-59 + EIF-SEP

J180 (+/- 7 j)

FIGURE 2 - Schéma de l’étude.

IM IFN bêta-1a 30 µg chaque semaine (n = 922)

Période de traitement semaines 96-144 1:1 Randomisation

Patients RRMS (n = 1 841)

Critères d’inclusion• Âge 18-55 ans• RRMS confirmé• IRM cohérente avec SEP• Baseline EDSS 0-5• ≥ 2 poussées en 3 ans (≥ 1 au cours de l’année précédant l’étude)• ≥ 1 poussée (ou nouvelle lésion IRM) en 2 ans (≥ 1 au cours de l’année précédant l’étude)

Tous les patients ont un traitement de 2 ans minimum et de 3 ans maximum.L’essai s’est terminé quand les derniers patients randomisés ont eu 2 ans de traitement.

Temps (semaines)

0

Suivi

EDSS* EDSS* EDSS* EDSS* EDSS* EDSS*

SC DAC HYP 150 mg toutes les 4 semaines (n = 919)

4 8 12 16 20 24 28 32 36 40 44 48 96

Cerveau IRM

FIGURE 3 - Schéma de l’étude.

DOSSIER

78 Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 1863

monoclonal anti-CD25 diminue, in vitro, l’activation et la prolifé-ration des cellules T et induit la prolifération d’un sous-type de cellules régulatrices NK (Natural Killer), les cellules NK CD56+, qui sont associées à une réduction de l’activité de la SEP.

■■ SCHÉMA DE L’ÉTUDE (Fig. 3) Il s’agit d’une étude de phase  III comparant le traitement par daclizumab 150 mg par voie sous-cutanée toutes les 4 semaines au traitement IFNβ-1a (30 µg) par voie intramusculaire (IM) (1/se-maine). 1 841 patients ont été ran-domisés dans 28 pays de mai 2010 à avril 2012 pour une durée de 96 semaines (maximum 144  se-maines). Le tableau 3 résume les caractéristiques des patients.Le critère principal était le taux annualisé de poussées (ARR) à 96  semaines, les principaux critères secondaires étaient le nombre de nouvelles lésions, la progression des lésions en T2, une progression confirmée à 144 semaines et le nombre de pa-tients libres de poussée à 144 se-maines.

■■ RÉSULTATS Le taux annualisé de poussées, critère principal de l’étude, était diminué de 45 % (p < 0,001) sous daclizumab (Fig. 4), qui s’avérait également meilleur en termes de critères secondaires, avec : • Réduction de 54 % du nombre de nouvelles lésions T2 (p < 0,001).• Diminution du nombre de nou-velles prises de contraste en gadolinium (65  %) et de lésions hypoT1 (52 %), (p < 0,001) (Fig. 5).• Le nombre de patients libres de poussée à 144 semaines était signi-ficativement augmenté (p < 0,001). • La réduction de la progression du handicap n’est significative qu’à 6 mois, de 27 % avec une tendance observée dès 3 mois de traitement.

• Un bénéfice est observé sur l’atrophie cérébrale à 2 ans de traitement.

■■ TOLÉRANCE Les effets indésirables obser-vés ont été cutanés, avec rash et atteinte cutanée, un risque accru d’infections et enfin des cytolyses hépatiques parfois supérieures à cinq fois la normale. Un décès a été observé dans le bras daclizumab et non rattaché au traitement (Tab. 4).

■■ CONCLUSION Cette étude montre une effica-cité clinique et IRM supérieure du daclizumab par rapport à l’interféron bêta-1a. Son profil de tolérance (infectieux, cutané et

0,45

AAR

IFN bêta-1a 30 µg(n = 922)

DAC HYP 150 mg(n = 919)

0,393

0,216

45 % de réduction (95 % CI : 35,5 %, 53,1 %)p < 0,00010,4

0,350,3

0,250,2

0,150,1

0,050

FIGURE 4 - Critère principal de l’étude : taux annualisé de poussées.

TABLEAU 3 - CARACTÉRISTIQUES DES PATIENTS.Caractéristiques des patients

Daclizumab HYP(n = 919)

Interféron bêta-1a(n = 922)

Âge, années, moyenne (DS) 36,4 (9,4) 36,2 (9,3)Femme, n (%) 625 (68) 627 (68)Temps depuis le début des symptômes, années, moyenne (DS) 7 (6,3) 6,9 (6,3)Temps depuis le diagnostic, années, moyenne (DS) 4,2 (5) 4,1 (4,7)Poussées dans les 12 derniers mois, moyenne (DS) 1,5 (0,7) 1,6 (0,8)Préalablement traités, n (%) 380 1) 376 (41)EDSS, moyenne (médian) 2,5 (2) 2,5 (1,3)Patients avec lésions Gd+, n (%) 398/900 (44) 172 (42,5)Nombre de lésions Gd+ T1, moyenne (DS) 2,3 (5,9) 1,7 (4,2)Nombre de lésions T2, moyenne (DS) 49,2 (35,5) 51,8 (37,4)

les « top 5 » de la neurologie

Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 186 791

TABLEAU 4 - RÉSULTATS DE LA TOLÉRANCE.Daclizumab HYP

(n = 922 )Interféron bêta-1a

(n = 919)Effets secondaires 91 % 91 %Effets secondaires graves 15 % 10 %Arrêts secondaires aux effets secondaires 14 % 9 %

Infections 65 % 57 %Infections sévères 4 % 2 %Atteintes hépatiques 16 % 14 %Élévation des transaminases > 5 6 % 3 %Atteintes cutanées 37 % 19 %Arrêt des traitements 5 % 1 %Cancer 7 8Décès 1 4

hépatique) sera déterminant pour apprécier sa place dans nos traite-ments actuels. ■

CorrespondanceDr Marc CoustansCentre hospitalier de Cornouaille14, avenue Yves Thépot29000 QuimperE-mail : [email protected]

✖ Marc Coustans déclare avoir des conflits d’inté-rêts avec Biogen, Novartis, Genzyme et Teva.

Mots-clés Sclérose en plaques, Syndrome cliniquement isolé, Syndrome radiologiquement isolé, Neuromyélite optique, Corticoïdes, Poussées de SEP, Daclizumab

Nom

bre

moy

en d

e lé

sion

s

■ IFN bêta-1a 30 µg ■ DAC HYP 150 mg

910

9,4

4,3

n = 841 n = 864

876543210

1,2

Nouvelle/Lésions T2 agrandies nouvellement

54 % de réductionp < 0,0001

Nouvelles lésions Gd+65 % de réduction

p < 0,0001

Lésions T1 hypointenses nouvelles “trous noirs”

52 % de réductionp < 0,0001

1,0 1,0

0,4

n = 909 n = 9000,0

0,2

0,4

0,6

0,8

4,55

4,4

2,1

n = 908 n = 899

43,5

32,5

21,5

10,5

0

FIGURE 5 - Résultats IRM.

1. Turpin KVL, Carroll LJ, Cassidy JD, Hader WJ. Potentially modifiable pro-gnostic factors for disability progression in multiple sclerosis: the symptom triad of fatigue, depression and bladder dysfunction. Abstr. P303, ECTRIMS 2015.

Bibliographie

DOSSIER

80 Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 1863

*Polyclinique du parc, Toulouse**Département de neurophysiologie et neuropa-thologie, hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris

1. UN BIOMARQUEUR DANS LES PIDC

1. Dyck PJ, Lais AC, Ohta M et al. Chronic inflammatory polyradiculo-neuropathy. Mayo Clin Proc 1975 ; 50 : 621-37. 2. Ogata H, Yamasaki R, Hiwatashi A et al. Characterization of IgG4 anti-neurofascin 155 antibody-positive polyneuropathy. Ann Clin Transl Neu-rol 2015 ; 2 : 960-71. 3. Miura Y, Devaux JJ, Fukami Y et al. Contactin 1 IgG4 associates to chronic inflammatory demyelinating polyneuropathy with sensory ataxia. Brain 2015 ; 138 : 1484-91. 3. Querol L, Rojas-García R, Diaz-Ma-nera J et al. Rituximab in treatment-resistant CIDP with antibodies against paranodal proteins. Neurol Neuroim-munol Neuroinflamm 2015 ; 2 : e149.

Le concept de polyradiculoné-vrite inflammatoire démyélini-sante chronique (PIDC) a vu le jour dans les années  1980. Le tableau classique était celui d’un déficit plutôt moteur, proximal et distal, et symétrique, en rapport avec une démyélinisation d’ori-

concept de nodo-paranodopathie. Autour du nœud de Ranvier, là où se trouvent les canaux sodiques, on retrouve un certain nombre de glycoprotéines en région pa-ranodale, qui pouvaient être des cibles antigéniques, modifier la répartition des canaux ioniques et entraîner des aspects de blocs de conduction. Par rapport à la démyélinisation classique où la myéline est détruite par le macro-phage, il y a cette notion qu’il peut y avoir des aspects de bloc de conduction, sans démyélini-sation, mais uniquement par des modifications de la répartition et de l’ouverture de canaux ioniques, ce qui explique parfois des levées ou des améliorations de blocs très rapides sous traitement.Parmi ces cibles antigéniques, on a mis en évidence un anticorps dirigé contre une glycoprotéine paranodale : l’anticorps anti-neu-rofascine 155. Dans l’étude d’Oga-ta et al. [2], 55 patients présentant une PIDC ont été recrutés. L’anti-corps anti-neurofascine 155 a été retrouvé dans 18 % des cas (9/55), avec comme particularité d’être tous des Ig4, ce qui est très inté-ressant par rapport à une certaine résistance aux immunoglobulines. Par ailleurs, cet anticorps a une bonne spécificité (non retrouvée

Le top 5 de la pathologie neuromusculaire« Le début d’une nouvelle ère dans les neuropathies dysimmunitaires… »

Claude Mékies*, d’après l’intervention de Thierry Maisonobe**

gine idiopathique, corticosensible [1]. Depuis 15 à 20 ans, ce concept a évolué avec un spectre beau-coup plus large et hétérogène comportant des phénotypes très différents (on décrit des formes très sensitives, parfois très asy-métriques), des présentations électrophysiologiques également très variées et des réponses thé-rapeutiques différentes selon ces différents phénotypes. Pour résoudre cette équation entre ces différentes formes et ces diffé-rentes réponses aux traitements, on cherche depuis des années des biomarqueurs comme l’anticorps anti-MAG, l’anticorps anti-GM1 ou d’autres anticorps anti-ganglio-sides polysialylés. On sait qu’il y a actuellement 60 à 70 % de réponse aux corticoïdes, aux immunoglo-bulines polyvalentes (IgIV) ou aux échanges plasmatiques (EP), mais il existe des formes dépendantes (nécessitant un traitement au long cours) ou résistantes (15 à 20  % des cas). On ne sait toujours pas quel traitement choisir en pre-mière intention, mais également quel immunosuppresseur utiliser pour la deuxième intention. Ces dernières années, nous avons assisté à l’émergence d’un concept qui a révolutionné les neuropathies dysimmunitaires : le

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D E F

FIGURE 1 - Corrélation entre hémoglobine glycosylée et intensité des scores de douleurs.

dans la SEP, le syndrome de Guil-lain-Barré ou d’autres neuropa-thies). Les patients avec anticorps anti-neurofascine 155 avaient des caractéristiques particulières  : âge plus jeune, déficit moteur dis-tal important (steppage), ataxie sévère, tremblement, démyé-linisation distale, hypertrophie des racines, hyperprotéinorachie élevée, résistance aux IgIV, cor-ticosensibilité et réponse aux échanges plasmatiques.À côté de neurofascine 155, un autre biomarqueur a fait l’objet d’une étude par Miura et al. [3]. Il s’agit de contactin1-caspr, un complexe protéique situé juste à côté de neu-rofascine 155. Treize patients avec PIDC et anticorps anti-contactin1-caspr ont été explorés. Tous ces anticorps étaient des IgG 4. Sur le plan clinique, on retrouve égale-ment cette ataxie sévère proprio-ceptive, une perte axonale impor-tante, un tremblement et la faible réponse aux IgIV.Ce biomarqueur va peut-être nous aider à mieux traiter nos patients comme le suggère cet article de Querol et al. [3] qui a montré une amélioration chez quatre patients présentant une PIDC avec anti-corps dirigés contre des protéines paranodales, résistants aux IgIV et aux corticoïdes, mais dans les suites sensible à un traitement par rituximab.

2. LES NEUROPATHIES DIABÉTIQUES SUBAIGUËS ET DOULOUREUSES : UNE ENTITÉ CONNUE D’ORIGINE IATROGÈNE

1. Gibbons CH, Freeman R. Treat-ment-induced neuropathy of diabetes: an acute, iatrogenic, complication of diabetes. Brain 2015 ; 138 : 43-52.

À ce jour, il n’y a pas de traitement spécifique de la neuropathie dia-bétique. On progresse cependant dans la compréhension et l’iden-tification des formes de neuropa-thie périphérique, surtout dans le diabète de type 2, l’hypertrigly-céridémie et le syndrome méta-bolique. À côté des formes clas-siques (troubles sensitifs distaux longueur-dépendant d’installation progressive sur plusieurs années et formes dysautonomiques), on voit parfois chez nos patients des formes subaiguës et extrême-ment douloureuses, dont la prise en charge n’est pas codifiée et parfois difficile. Ce type de neu-ropathie est en rapport avec une atteinte des petites fibres A delta et C (syndrome des petites fibres ou des pieds brûlants) où l’élec-troneuromyographie est prise en défaut (car normale). Dans ce cadre-là, les potentiels évoqués laser (complexe  N2P2) et/ou la biopsie cutanée (anticorps anti-PGP  9,5 en immunofluorescence) permettent de faire le diagnostic. Cette biopsie cutanée est assez ca-

ractéristique, avec une disparition des fibres nerveuses intra-épider-miques. D’autres approches sont classiques, notamment l’étude du réflexe cutané sympathique ou la mesure de l’espace R-R sur l’ECG permettant de mettre en évidence la neuropathie dysautonomique avec atteinte des petites fibres. Une étude publiée en 2015 dans Brain [1] fait écho à des neu-ropathies déjà connues, assez classiques dites “neuropathies insuliniques”. Il s’agit de patients diabétiques qui, après mise en place d’un traitement par insuline, ont vu apparaître des neuropa-thies extrêmement douloureuses, à type de brûlures intenses et d’allodynie marquée. Cette étude a montré clairement que la cor-rection trop rapide de l’hémoglo-bine glycosylée était à l’origine de la survenue de ces neuropathies subaiguës. Les auteurs décrivent une corrélation parfaite entre la rapidité de correction de l’hémo-globine glycosylée sur les 3 mois (selon qu’elle chutait de 2 ou de plus de 4  %) et l’intensité des

DOSSIER

82 Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 1863

scores de douleurs, mais égale-ment avec l’intensité de la neu-ropathie périphérique (Fig.  1). Cette atteinte concerne 20 % des patients pour une diminution de 2-3  % de l’hémoglobine glycosy-lée et va jusqu’à 80 % des patients pour une diminution > 4 %. Il est donc très important de porter une attention particulière à ce type de patients. On pense que cette neuropathie est liée à une atteinte microvascu-laire (car il a été mis en évidence des complications identiques au niveau de la rétine ou du rein). Il existe également des modifi-cations d’ordre immunologique avec un “orage” cytokinique pro-inflammatoire. À noter que ces neuropathies surviennent dans les deux types de diabètes (1 et 2), même si celles-ci sont surtout liées au diabète de type 1, et quel que soit le traitement du diabète (ces neuropathies ont également été décrites sous traitement par voie orale lorsque la correction est trop rapide). Dans le même ordre d’idée physiopathologique, une attention particulière doit être portée également aux patients qui viennent de bénéficier d’une chirurgie bariatrique, avec une supplémentation vitaminique cor-recte, mais qui développent des neuropathies aiguës, très doulou-reuses, sensitives.Sur le plan thérapeutique, il n’y a pas de grande nouveauté. L’arse-

nal thérapeutique reste basé sur les grandes classes connues (anti-dépresseurs tricycliques, inhibi-teurs de recapture de la séroto-nine, anticonvulsivants, agonistes des récepteurs à la morphine, an-tagonistes NMDA). Cependant, il faut noter la plupart du temps une efficacité très partielle, comme en témoignent les retours des pa-tients. Ceux-ci sont souvent sous-dosés, parfois du fait des effets indésirables classiques et connus.

3. LES NEUROPATHIES AMYLOÏDES HÉRÉDITAIRES LIÉESÀ LA TRANSTHYRÉTINE

• Mariani LL, Lozeron P, Théaudin M et al. Genotype-phenotype correlation and course of transthyretin familial amyloid polyneuropathies in France. Ann Neurol 2015 ; 78 : 901-16.

Très récemment, un réseau fran-çais coordonné par D. Adams s’est constitué et a permis un travail collaboratif, dont l’objectif était de recenser les cas de neuropathies amyloïdes héréditaires liés à la transthyrétine (TTR). Les auteurs ont ainsi pu analyser une grande cohorte de patients et mettre en évidence des corrélations entre le génotype et le phénotype. Quatre-vingt-quatre patients français porteurs de mutations du gène de la TTR ont été comparés à 110 patients portugais porteurs de la mutation Val30Met. Les pa-tients français TTR présentaient plusieurs mutations (Ile107Val, Ser77Tyr et pour les formes tar-dives Val30Met). Sur le plan épidémiologique, il a été noté une atteinte très ubiqui-taire avec une répartition dans tout le territoire français. L’âge

moyen de début de la maladie était plus tardif chez les Français – 54 à 64 ans – que chez les Portugais (Val30Met) – 32 ans en moyenne. L’histoire familiale a été plus rare-ment rapportée en France (cas sporadiques  ++). Les signes ini-tiaux classiques (paresthésies, douleurs, déficit moteur) ont été retrouvés, mais des formes dites atypiques ont également été dé-crites : début aux membres supé-rieurs, amyotrophie sévère, multi-névrites, formes démyélinisantes mimant des PIDC (Ile107Val). La dysautonomie a été moins fré-quemment retrouvée dans les formes françaises que dans les formes portugaises. Sur le plan pratique, les auteurs signalent qu’il est important d’en-visager ce diagnostic devant des formes évolutives, surtout s’il y a un amaigrissement, qui reste un signe clinique majeur, en recher-chant d’emblée une mutation du gène de la TTR. En effet, la biopsie neuromusculaire peut être trom-peuse, car les dépôts amyloïdes sont parfois absents, notamment chez les patients TTR de la cohorte française. Sur le plan évolutif, les auteurs notent une progression plus ra-pide et plus péjorative de la ma-ladie (Ile107Val++). L’apparition plus rapide d’une tétraparésie et de troubles de l’équilibre est fréquemment retrouvée chez les patients Ile107Val et dans la forme tardive  Val30Met de la cohorte française. La survie médiane est nettement plus courte chez les patients français comparative-ment aux patients portugais  Val-30Met.Les corrélations entre ces dif-férents phénotypes et le géno-type sont représentées dans le tableau 1.

« Neuropathies diabétiques : l’arsenal thérapeutique reste basé sur les grandes classes connues »

les « top 5 » de la neurologie

Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 186 831

Sur le plan thérapeutique, un ar-ticle a été publié en 2015, concer-nant le patisiran, un chélateur de la TTR mutée permettant de ré-duire de façon considérable cette molécule anormale dans le sang. Vingt-neuf patients TTR mutés ont été inclus, 26 ont complété l’étude. La durée de cette étude a été de 4 mois. Les auteurs ont mis en évi-dence une réduction de 85 à 96 % de la TTR sauvage et mutée chez les patients traités, dès le premier mois après le début des perfu-sions intraveineuses de patisiran,

administré à la dose de 0,3 mg/kg/jour toutes les 3 semaines. La to-lérance a été globalement bonne. Les premiers résultats de cette étude ont permis l’initiation d’une étude de phase III, multicentrique, actuellement en cours.

4. LES MYOSITES

1. Mammen AL, Chung T, Christo-pher-Stine L et al. Autoantibodies against 3-hydroxy-3-methylglutaryl-coenzyme A reductase in patients

with statin-associated autoimmune myopathy. Arthritis Rheum 2011 ; 63 : 713-21. 2. Allenbach Y, Drouot L, Rigolet A et al. Anti-HMGCR autoantibodies in European patients with autoimmune necrotizing myopathies: inconstant exposure to statin. Medicine (Balti-more) 2014 ; 93 : 150-7. Actuellement, on ne parle plus de polymyosite ou de dermatomyo-site, mais de myosite en rapport avec un certain nombre d’auto-anticorps. On décrit le groupe des myosites avec anti-synthétases, le grand groupe des dermatomyosites avec des sous-groupes en rapport avec des auto-anticorps différents, et le groupe des myosites nécrosantes à médiation auto-immune.Le syndrome des anti-synthétases comprend une atteinte myosi-tique associée à une arthrite, une atteinte cutanée (avec syndrome de Raynaud, fissures au bout des doigts ou mains de “mécaniciens”) et une atteinte pulmonaire sous la forme d’une pneumonie inters-titielle. Ces atteintes sont parfois discrètes ou infracliniques.Les myosites nécrosantes à anti-corps anti-SRP se caractérisent par un tableau de déficit muscu-laire sévère, associé parfois à une atteinte cardiaque, dont l’installa-tion peut être aiguë, avec une évo-lution rapide ou au contraire très chronique. Les CPK sont élevées. Cette entité est en rapport avec une nécrose sans inflammation.Les myosites en rapport avec des auto-anticorps HMG-CoAR ont été décrites en 2011 chez des patients traités par statines, dont on connaît les rapports avec le muscle [1]. Malgré l’arrêt des sta-tines, ces patients ont développé une myosite, comme s’il y avait

TABLEAU 1 - PRÉSENTATION DES PHÉNOTYPES VAL107, TYR77 ET MET 30 DES POLYNEUROPATHIES FAMILIALES AMYLOÏDES.Caractéristiques Val107 Tyr77 LateMet30 PortMet30Âge initial (années) 65 60 32 30Sexe ratio (h/f) 7/1 3/1 4/1 1/1Antécédents familiaux positifs + ++ + +++

Perte de poids +++ ++ ++ +++NeuropathieDissociation sensorielle ++ + +/++ +++

Déficience sensorielle profonde +++ ++ +++ +

Faiblesse +++ ++ +++ +Dysautonomie + + ++ +++Modèle de conduction nerveuseAxonal +++ ++ ++ +++Démyélinisant +++ ++ ++ +Dépôts amyloïdes positifs ++ ++ ++ +++

Implantation d’un pacemaker + ++ ++ +

RésultatTroubles de la démarche +++ + ++ +/++

Temps médian jusqu’au décès (années)

7 10 8 11

Aperçu semi-quantitatif de la fréquence : + : peu fréquent ; ++ : moyennement fréquent ; +++ : fréquent. LateMet30 = Val30Met mutation TTR chez les patients avec apparition tardive (> 50 ans) ; PortMet30 = Val30Met mutation chez les patients d’origine portugaise ; Tyr77 = Ser77Tyr mutation TTR ; Val107 = Ile107Val mutation TTR

DOSSIER

84 Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 1863

eu une réponse auto-entretenue immune clairement mise en évi-dence sur les biopsies. En 2015, un travail collaboratif coordonné par Yves Allenbach [2] a été publié et a permis d’étudier 45 patients présentant une myo-site avec anticorps anti-HMG-CoAR. Les auteurs ont pu montrer que ces myosites pouvaient tout à fait survenir chez des patients qui n’avaient jamais été exposés aux statines dans plus de la moitié des cas (56  %). Le tableau est assez classique, souvent d’installation subaiguë, mais qui peut être très lente pouvant mimer une maladie musculaire génétique, d’autant plus qu’il n’y a pas d’inflamma-tion à la biopsie musculaire, ce qui peut être trompeur. Les CPK sont élevées. Contrairement aux myosites avec anti-synthétase, il y a assez peu de manifestations ex-tramusculaires. On retrouve très rarement des néoplasies asso-ciées (Tab. 2).

Il existe une forte corrélation entre le taux d’anticorps, le taux de CPK et l’intensité du déficit moteur. Le traitement n’est pas codifié et la réponse thérapeutique difficile à obtenir. Ce traitement devrait faire appel aux biothérapies, telles que les immunosuppresseurs ou le rituximab.

5. GMPPB : UN GÈNE COMMUN ENTRE LES SYNDROMES MYASTHÉNIQUES CONGÉNITAUX ET LES MYOPATHIES DES CEINTURES 1. Belaya K, Rodríguez Cruz PM, Liu WW et al. Mutations in GMPPB cause congenital myasthenic syndrome and

TABLEAU 2 - CARACTÉRISTIQUES DES PATIENTSANTI-HMG-COA RÉDUCTASE (N = 45).CaractéristiquesÂge moyen (années) 48,9 ± 21,9Sexe ratio (h/f) 0,36Exposition aux statines 44,4 % (n =20)Atteinte musculaireDéficit musculaire 97,7 % (n = 44)Apparition subaiguë 64,4 % (n = 29)Apparition progressive 33,3 % (n = 15)Déficit sévère (≤ 3) 75,5 % (n = 34)Myalgie 53,3 % (n = 24)Dysphagie 26,7 % (n = 12)Niveau de CPK 6 941 ± 8 802 IU/lAtteintes musculaires extrasquelettiques Perte de poids 20 % (n = 9)Maladie pulmonaire interstitielle 2,2 % (n = 1)Insuffisance cardiaque 2,2 % (n = 1)Arthralgie 11,1 % (n = 5)Phénomène de Raynaud 11,1 % (n = 5)

bridge myasthenic disorders with dystroglycanopathies. Brain  2015 ; 138 : 2493-504.

Tous les ans, de nouveaux gènes sont mis en évidence dans les ma-ladies musculaires. Cette publication [1] fait réfé-rence à la mise en évidence d’un gène dans les syndromes myas-théniques congénitaux. Il s’agit de maladies génétiques qui en-traînent des mutations sur un cer-tain nombre de gènes qui codent pour des protéines au niveau de la jonction neuromusculaire. Dans les myasthénies auto-im-munes, on sait qu’au-delà du ré-cepteur à l’acétylcholine, il existe de nombreuses protéines qui ont un rôle important dans la jonc-tion neuromusculaire (MUSK, Agrin, Rapsyn, DOK7, LRP4). Des phénotypes différents ont été individualisés selon les anticorps

impliqués dans ces myasthénies auto-immunes. Par ailleurs, ces différentes formes de myasthé-nies sont importantes à diagnosti-quer, car l’approche thérapeutique est différente.En 2015, un article publié dans Brain [1] a permis de faire le lien entre le groupe des myasthénies congénitales et un groupe de dys-trophies des ceintures en rapport avec un complexe  : le dextrogly-cane. On parle d’alpha-dystrogly-canopathies. Les auteurs ont mis en évidence un gène commun  : le GMPPB, responsable d’une atteinte combinée de ces deux pathologies. On savait déjà que, devant un tableau de myopathie congénitale, il fallait réaliser une étude systématique de la jonction neuromusculaire. Ce gène GMPPB est un gène de glycosylation qui peut intervenir au niveau de l’en-semble des acteurs de la jonction

les « top 5 » de la neurologie

Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 186 851

neuromusculaire, ce qui explique le fait qu’il puisse être à l’origine de tableaux phénotypiques divers. On peut donc pour un même gène avoir les myasthénies congéni-tales, mais également, des dystro-phies des ceintures classiques et des formes intermédiaires, ou on peut avoir l’association des deux, sachant que les caractéristiques communes sont l’association : gros mollets et CPK élevées. n

CorrespondanceDr Thierry MaisonobeDépartement de neurophysiologie et neuropathologieHôpital Pitié-Salpêtrière47-83 boulevard de l’Hôpital75013 Paris Mots-clés

Biomarqueur, Polyradiculonévrite inflammatoire démyélinisante chronique, Neuro-pathies diabétiques, Neuropathies amyloïdes héréditaires, Transthyrétine, Myosite, GMPPB, Syndromes myasthéniques congénitaux, Myopathies des ceintures

maladie d’alzheimer

Réactiver les souvenirsS’il est bien connu que la maladie d’Alzheimer se caractérise par un dé-clin progressif de la mémoire, tous les mécanismes de cette amnésie ne sont pas encore déterminés. Une équipe de chercheurs américains du MIT apporte un éclairage nouveau. Leurs expériences ont été menées sur un modèle de souris Alzheimer. Celles-ci ont subi dans un premier temps un choc électrique. Les souris saines refu-saient de revenir à l’endroit où elles ont reçu le choc, contrairement aux souris mutées qui avaient oublié ce choc.Ils ont ensuite utilisé la méthode opto-génétique afin d’activer les neurones

de l’hippocampe (dont le rôle est es-sentiel pour la mémoire épisodique). Cette technique a permis de réactiver le souvenir du choc électrique chez les souris Alzheimer. Cela montre que le souvenir n’avait pas été effacé.Si ces résultats, publiés dans la revue Nature, sont certes prometteurs, ils restent à confirmer chez l’Homme... •

+ Pour en savoir plus :Roy DS, Arons A, Mitchell TI et al. Memory retrieval by activating en-gram cells in mouse models of early Alzheimer’s disease. Nature 2016.

EN BREF> SANTÉ CARDIOVASCULAIRE DES FEMMES Selon le bulletin épidémiologique de l’InVS, la progression du nombre d’hospitalisations pour un infarctus du myocarde chez les femmes de 45 à 54 ans est passé de + 3 %/an entre 2002 et 2008 à + 4,8 %/an entre 2009 et 2013.

> SEP ET JEU VIDÉO Selon une étude (menée auprès de 24 patients), l’utilisation du jeu Dr Kawashima Brain Training (Nintendo) chez des patients atteints de sclérose en plaques a entraîné une réorgani-sation des circuits neuronaux. Source : De Giglio L et al. Multiple Sclerosis: Changes in Thalamic Resting-State Functional Connectivity Induced by a Home-based Cogni-tive Rehabilitation Program. Radiology 2016.

ACTUALITÉS par Charlène Catalifaud

Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 186 85

CONCLUSIONS

• Devant tout tableau déficitaire “myopathique” qui n’a pas fait la preuve de son diagnostic, il faut toujours faire une étude de la jonction neuromusculaire (surtout sur le nerf spinal ou le nerf de l’anconé), que les CPK soient élevées ou non.

• Des traitements voient le jour même dans des affections génétiques, notamment concernant les neuropathies amyloïdes héréditaires, mais également les syndromes myasthéniques congénitaux et certaines dystrophies musculaires.

• Ces études génétiques permettent une meilleure compréhension des mécanismes d’action de ces gènes (notamment de la glycosylation), parfois communs à plusieurs maladies différentes et qui pourront bénéficier d’une piste thérapeutique commune.

• Des neuropathies subaiguës et douloureuses peuvent se voir dans des corrections trop rapides du diabète.

• Les premiers anticorps apparaissent dans des formes particulières de PIDC et peuvent avoir des implications thérapeutiques.

✖ Thierry Maisonobe a déclaré des liens d’intérêts avec LFB-Biomédicament et Société de matériel médical Natus.

DOSSIER

86 Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 1863

*Polyclinique du Parc, Toulouse**Hôpital Foch, Suresnes

ALGORITHME DE PRISE EN CHARGE DES PATIENTS FLUCTUANTS

1. Odin P, Ray Chaudhuri K, Slevin JT et al. Collective physician pers-pectives on non-oral medication approaches for the management of clinially relevant unresolved issues in Parkinson’s disease: Consensus from an international survey and discus-sion programm. Parkinsonism and related disorders 2015 ; 21 : 1133-144.

Dans une publication récente [1], un groupe d’experts a étudié le recours possible à trois techniques de prise en charge de patients at-teints de maladie de Parkinson, au stade des fluctuations motrices, en dehors des classiques médi-caments par voie orale : stimula-tion cérébrale profonde, pompe à apomorphine et Duodopa® gel intestinal. Ils recommandent de demander un avis spécialisé si votre patient a plus de cinq prises de dopa par jour, un temps OFF invalidant supérieur à 30 minutes par jour et malgré un traitement ajusté. Les auteurs signalent que l’atteinte cognitive est assez dis-criminante dans la stratégie de choix thérapeutique. La survenue

60 ans), avec un bon état cognitif (138 en moyenne sur l’échelle de Mattis). Les résultats concluent à une efficacité assez proche. Il n’y a pas de déclin cognitif supérieur avec une approche par rapport à l’autre. On retrouve simplement dans le groupe GPi un meilleur score concernant certains sub-tests (Stroop, TMT B et similitudes WAIS). La qualité de vie était iden-tique dans les deux groupes.

L’AMANTADINE

1. Pahwa R, Tanner CM, Hauser RA et al. Amantadine extended release for levodopa-induced dyskinesia in Par-kinson’s disease (EASED Study). Mov Disord 2015 ; 30 : 788-95.

L’année 2015 a été difficile concer-nant la prise en charge de nos pa-tients du fait de l’annonce du pos-sible retrait de l’amantadine. Cette molécule a certes un effet symp-tomatique modeste (si on tient compte des études réalisées dont le niveau de preuve est faible). En revanche, elle a un effet anti-dys-kinétique net. Une étude récente [1] a permis d’évaluer une forme retard (en une prise le soir), à trois posologies différentes, ayant mis en évidence une posologie opti-male de 340 mg par jour (Fig. 1).

Le top 5 de la pathologie extrapyramidale« L’espoir est de pouvoir mettre en évidence sur une simple biopsie de peau les biomarqueurs de certaines maladies dégénératives »

Claude Mékies*, d’après l’intervention de Frédéric Bourdain**

de chutes est un facteur de gravité. Le tableau 1 résume les contre-in-dications et les risques des trois techniques.

STIMULATION CÉRÉBRALE PROFONDE : QUELLE CIBLE ?

1. Odekerken VJ, van Laar T, Staal MJ et al. Subthalamic nucleus versus globus pallidus bilateral deep brain stimulation for advanced Parkinson’s disease (NSTAPS study): a rando-mised controlled trial. Lancet Neurol 2013 ; 12 : 37-44.2. Odekerken VJ, Boel JA, Geurtsen GJ et al. Neuropsychological outcome after deep brain stimulation for Par-kinson disease. Neurology 2015 ; 84 : 1355-61.

Odekerken et al. [1] avaient déjà publié en 2013 les résultats d’une étude visant à étudier la cible de choix concernant la stimulation cérébrale profonde, mettant en évidence une équivalence entre le noyau sous-thalamique (NST) et le globus pallidus interne (GPi). En 2015 [2], cette même équipe s’est intéressée au devenir et à la qualité de vie à 1 an de ces deux groupes de patients. Il s’agissait de patients jeunes (début de la maladie avant 50 ans, implantés vers l’âge de

les « top 5 » de la neurologie

Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 186 871

LE NERF VAGUE : UN LIEN ÉTROIT ENTRE LE SYSTÈME ENTÉRIQUE ET LE SYSTÈME NERVEUX CENTRAL

1. Svensson E, Horváth-Puhó E, Thomsen RW et al. Vagotomy and sub-sequent risk of Parkinson’s disease. Ann Neurol 2015 ; 78 : 522-9.

Les auteurs de cette étude [1] ont repris, à partir d’une cohorte ex-haustive du registre national da-nois entre 1977 et 1995, des pa-tients qui avaient bénéficié d’une vagotomie tronculaire dans le cadre d’une pathologie ulcéreuse et ceci selon les recommanda-tions de l’époque. Ils ont regardé, dans cette cohorte, le nombre de patients ayant présenté une maladie de Parkinson. Ainsi,

TABLEAU 1 - CONTRE-INDICATIONS RELATIVES ET ABSOLUES DES THÉRAPIES ASSISTÉES PAR DES DISPOSITIFS DANS LA GESTION DE LA MALADIE DE PARKINSON1.Thérapies assistées par des dispositifs

Risque croissant Contre-indications absolues

Stimulation profonde cérébrale

• Non-compliance avec thérapies non invasives• Âge biologique > 70-75 ans2

• Dépression sévère• Condition qui augmente le risque chirurgical,

incluant la cardiomyopathie

• Absence de réponse de lévodopa, à l’exception des tremblements de repos

• Démences• Atrophie cérébrale sévère ou lésions

interférant avec la planification de la trajectoire

Pompe à apomorphine

• Non-compliance avec thérapies non invasives• MCI ou démences• Dérégulation actuelle ou antérieure de dopamine,

martèlement ou troubles du contrôle des impulsions

• Démences modérées à sévères

• Absence de réponse de lévodopa• Incapacité du patient et de l’aidant à gérer

les médicaments et le dispositif

Gel intestinal de lévodopa

• Non-compliance avec thérapies non invasives• Neuropathies périphériques préexistantes3

• Dérégulation actuelle ou antérieure de dopamine et martèlement

• Démences modérées à sévères• Fragilité du patient (incapable de supporter le

poids de l’appareil)

• Absence de réponse de lévodopa• Incapacité du patient et de l’aidant à gérer

les médicaments et le dispositif• Contre-indications relatives ou absolues à

la chirurgie abdominale

MCI : mild cognitive impairment1Pour une liste complète des contre-indications absolues liées aux dispositifs, le clinicien peut se référer aux informations produit du fabricant.2Les cliniciens doivent tenir compte de la fragilité du patient, en plus des comorbidités.3Les cliniciens doivent rechercher la cause de la neuropathie pour déterminer si elle est cliniquement symptomatique.

0

-5

Placebo (n = 22)A.

B.

0 2 4Semaines d’étude

6 8

Mod

ifica

tion

du s

core

UDy

sRS

Mod

ifica

tion

du sc

ore

UDys

RS

260 mg ADS-5102

(n = 19)

340 mgADS-5102

(n = 20)

420 mgADS-5102

(n = 19)

Placebo (n = 22)260 mg ADS-5102 (n = 19)340 mg ADS-5102 (n = 20)420 mg ADS-5102 (n = 19)

-10

-15

-20

-25

5

0

-5

-10

-15

-20

-25

-6,7

-12,3

-17,9

p = 0,05 p = 0,013

-16,7

FIGURE 1 - Comparaison de trois posologies différentes d’amantadine (forme retard).

DOSSIER

88 Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 1863

14  883 vagotomies ont été réali-sées et ont fait l’objet d’un suivi supérieur à 5 ans. Deux groupes ont été individualisés, ceux qui avaient eu une vagotomie tron-culaire (VT) et ceux qui avaient eu une vagotomie hypersélective (VHS) (Fig. 2). Certains de ces pa-tients ont développé une maladie de Parkinson (45 dans le groupe VT versus 59 dans le groupe VHS). Ces deux groupes ont été ajustés par rapport à la population géné-rale. Cette étude conclut à une diminution du risque de dévelop-per une maladie de Parkinson dans le groupe VT, le groupe VHS ayant un risque semblable à celui de la population générale. Tou-tefois, les odd ratios ne sont pas statistiquement significatifs. Les auteurs suggèrent que la vagoto-mie tronculaire pourrait protéger de la maladie de Parkinson, ou qu’à l’inverse, avoir un nerf vague intact et fonctionnel augmente-rait le risque d’avoir une maladie de Parkinson.

Ces données font suites aux tra-vaux de Braak, qui avaient évoqué une progression caudo-rostrale des lésions à partir du système ner-veux entérique, mais également des travaux de Hawkes qui avaient fait l’hypothèse d’une propagation prion-like via les voies olfactives. Cependant, toutes les données histologiques ne sont pas toujours concordantes avec cette hypothèse. L’idée serait donc que la maladie puisse se propager par l’intermé-diaire du nerf vague, et que la va-gotomie ait déconnecté le système entérique du système nerveux.

LES SYNUCLÉINOPATHIES : UNE MALADIE PRION-LIKE ?

1. Bousset L, Pieri L, Ruiz-Arlandis G et al. Structural and functional cha-racterization of two alpha-synuclein strains. Nat Commun 2013 ; 4 : 2575. 2. Peelaerts W, Bousset L, Van der

Perren A et al. α-Synuclein strains cause distinct synucleinopathies after local and systemic administration. Nature 2015 ; 522 : 340-4.

Nous savons que le marqueur de la synucléinopathie est le corps de Lewy. Ces synucléinopathies regroupent plusieurs affections  : maladie de Parkinson, atrophie multisystématisée et démence à corps de Lewy. La localisa-tion de ces corps de Lewy diffère entre ces trois entités. Ces corps de Lewy sont liés à la présence d’agrégats d’alpha-synucléine qui se déposent dans les tissus neu-ronaux. L’alpha-synucléine agit en présynaptique au niveau des membranes vésiculaires dans le système d’exocytose. Elle existe sous forme monomérique, sous forme multimérique (riche en hélice alpha), ou sous forme fibril-laire et peut à ce moment-là avoir une configuration bêta-plissée. On sait que toutes les maladies neurodégénératives (maladies

4

3

2

1

00 5 10 15 20

Années depuis la vagotomie

Cohorte de comparaisonPatients ayant subi une vagotomie tronculaire

Cohorte de comparaisonPatients ayant subi une vagotomie supersélective

Risq

ue c

umul

é de

la m

alad

ie d

e Pa

rkin

son

25 30 35

4

3

2

1

00 5 10 15 20

Années depuis la vagotomie

Risq

ue c

umul

é de

la m

alad

ie d

e Pa

rkin

son

25 30 35

A. Courbes d'incidence cumulée de la maladie de Parkin-son pour des patients qui ont subi une vagotomie troncu-laire comparativement à une cohorte de population géné-rale appariée.

B. Courbes d'incidence cumulée de la maladie de Parkin-son pour des patients qui ont subi une vagotomie supersé-lective comparativement à une cohorte de population générale appariée.

FIGURE 2 - Lien entre vagotomie et maladie de Parkinson.

les « top 5 » de la neurologie

Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 186 891

d’Alzheimer, de Parkinson, de Huntington) ou presque font l’objet d’une hypothèse prion, tout comme la maladie de Creutzfeldt-Jakob, dans laquelle cette hypothèse avait été décrite par Prusiner. On parle de protéinopathies avec des dépôts intra- ou extracellulaires de macroprotéines. On sait égale-ment qu’in vitro, l’alpha-synucléine fibrillaire s’agrège comme dans les inclusions connues in vivo et peut se répandre d’une cellule à l’autre. Chez des patients greffés dans le cadre d’une maladie de Parkin-son, ces greffons, provenant d’une autre personne, ont pu acquérir des corps de Lewy dans les années qui ont suivi. Dans la maladie de Parkinson, les inclusions sont neuronales. Dans l’atrophie mul-tisystématisée, les inclusions sont gliales. En 2013, cette équipe avait mis en évidence, la présence de deux formes principales d’alpha-sy-nucléinopathie : une forme dite fibrillaire et une forme en ruban [1]. Ces deux protéines donnent des maladies différentes et ont des modes de propagation diffé-rents d’une cellule à l’autre, mais qui peuvent le faire in vitro et in vivo. Dans les suites de ces travaux, cette même équipe a publié en 2015 des résultats très intéres-sants. Des injections d’alpha-sy-nucléine dans des cerveaux de rats et même dans le sang ont pu être à l’origine de la formation de nouveaux agrégats. Dans le cer-veau, ces agrégats ont été mis en évidence à distance du site d’in-jection. Lors de l’injection dans le sang, l’alpha-synucléine peut aller se déposer dans les centres ner-veux avec des agrégats dont on a observé le déplacement le long des axones. La forme en ruban

correspondrait à la maladie de Parkinson et la forme fibrillaire à l’atrophie multisystématisée. Cette hypothèse prion est une piste très intéressante et pourra amener à de nouvelles perspec-tives thérapeutiques, en particu-lier l’immunothérapie.

SAFINAMIDE : UN NOUVEAU MÉDICAMENT DANS LA MALADIE DE PARKINSON

1. Borgohain R, Szasz J, Stanzione P et al. Randomized trial of safinamide add-on to levodopa in Parkinson’s disease with motor fluctuations. Mov Disord 2014 ; 29 : 229-37.

Safinamide est une nouvelle entité chimique au mode d’action origi-nal puisqu’il associe une inhibition réversible et sélective de la MAO-B, une inhibition de recapture de la dopamine et une modulation de la libération excessive du gluta-mate. Cette molécule est en cours d’évaluation par la FDA.Les auteurs [1] rapportent les résultats d’une étude de phase III, multicentrique, randomisée, en double aveugle, réalisée sur 52  sites (en Italie, en Inde et en Roumanie) visant à étudier deux doses de safinamide (50 et 100  mg/j) versus placebo, chez des patients fluctuants, en com-plément d’un traitement dopami-nergique stable depuis 4 semaines

11,5

Étude 016 Étude 018

11,0

10,5

10,0

9,5

9,0Baseline 016 Semaine 24 Semaine 48

PlaceboSafinamide 50 mgSafinamide 100 mg

10,710,710,6

10,1

9,59,49,3

10,5

9,8

Points de temps (semaines d’étude)

Tota

l quo

tidie

n te

mps

ON

(heu

res)

Semaine 76 Semaine 102-EOS

FIGURE 3 - Comparaison de deux doses de safinamide chez des patients parkinsoniens fluctuants.

Safinamide50 mg/jour

Safinamide100 mg/jour

LS moyen (h) 1,01 1,18Différence de LS versus placebo (h) 0,67 0,83

95 % CI de la différence de LS (h) (0,23-1,11) (0,39-1,27)

Valeur de p versus placebo 0,0031 0,0002

LS : least squares (moindres carrés)

DOSSIER

90 Neurologies • mars 2016 • vol. 19 • numéro 1863

(Fig. 3). 699 patients ont été inclus et randomisés en trois bras. Cette étude a été évaluée à 6 mois puis les résultats d’une extension à 24 mois ont été présentés.Le critère principal était le score de sévérité des dyskinésies. Les résultats sur ce critère principal sont une réduction du score de dyskinésies de 31 % dans le groupe safinamide 50 mg/j, de 17 % dans le groupe safinamide 100  mg/j contre 3 % dans le groupe place-bo. À 6 mois, les patients gagnent une heure de temps ON sans dys-kinésies ou sans dyskinésies gê-nantes. Ce gain de temps ON est maintenu dans l’étude à 24 mois.Cette molécule vient d’être ap-prouvée par l’agence européenne pour des patients atteints de maladie de Parkinson à un stade intermédiaire ou avancé.

UN NOUVEAU GÈNE DANS LA MALADIE DE PARKINSON : CHCHD2

• Ogaki K, Koga S, Heckman MG et al. Mitochondrial targeting sequence va-riants of the CHCHD2 gene are a risk for Lewy body disorders. Neurology 2015 ; 85 : 2016-25.

Le gène CHCHD2 a été mis en évi-dence dans une famille japonaise. Une mutation faux sens a été dé-tectée. Cette protéine a une inte-raction avec les mitochondries, qui interviennent dans le dysfonction-nement des neurones. Ce gène a été étudié dans les corps de Lewy

à partir d’une étude de séquen-çage d’exons dans des popula-tions caucasiennes atteintes de la maladie de Parkinson, démence à corps de Lewy et témoins. Il n’a pas été retrouvé de mutation, mais neuf variants liés à ces deux synu-cléinopathies différentes.

DES BIOMARQUEURS DES MALADIES NEURODÉGÉNÉRATIVES DANS LA PEAU

• Castanedo-Cazares JP, Rodriguez-Leyva I. Skin biomarkers for neurode-generative disease: a future perspec-tive. Neurodegener Dis Manag 2015 ; 5 : 465-7.

Le rationnel est que la peau et le système nerveux ont la même origine embryologique et que des stigmates cutanés de maladies neurologiques pourraient consti-tuer un miroir des anomalies his-tologiques (moins accessibles) du système nerveux. Ainsi, de nom-breuses études ont montré une expression de l’alpha-synucléine dans la peau des patients parkin-soniens, qu’on ne retrouvait pas chez des patients sains, et qui était minime dans les syndromes parkinsoniens atypiques. On sait par ailleurs que les gènes de plu-sieurs maladies neurodégénéra-tives sont exprimés dans la peau et ses annexes : maladie de Hun-tington, maladie de Parkinson, SLA. La parkine, l’APP et la présé-niline sont également exprimées

dans la peau de personnes âgées. Enfin, on sait qu’on peut trouver des corps de Lewy dans la peau de sujets parkinsoniens alors qu’on ne les retrouve pas chez des témoins. Des agrégats d’al-pha-synucléine ont également été retrouvés dans des terminaisons nerveuses cutanées. Une protéine Tau phosphorylée a été détectée dans la peau de patients atteints de maladie d’Alzheimer. Sur la base de ces travaux, l’espoir est de pouvoir mettre en évidence sur une simple biopsie de peau les biomarqueurs de certaines mala-dies dégénératives. Cela permet-trait de limiter des investigations difficiles, coûteuses et invasives. n

CorrespondanceDr Frédéric BourdainDépartement de neurologieParkinson, mouvements anormaux, toxine botulique, neuromodulationHôpital Foch40, rue Worth BP 3692151 Suresnes CedexE-mail :[email protected]

✖ Frédéric Bourdain déclare n’avoir aucun lien d’intérêts.

Mots-clés Fluctuations, Stimulation cérébrale profonde, Amantadine, Nerf vague, Synucléinopathies, Démence à corps de Lewy, Safinamide, Maladie de Parkin-son, CHCHD2, Peau, Biomarqueurs