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Dénombrement - Combinatoire Cours La combinatoire (ou analyse combinatoire) étudie comment compter des objets. Elle fournit des méthodes de dénombrement particulièrement utiles en probabilité. Un des principaux exemples que nous verrons est la formule du binôme de Newton. Commençons par nous intéresser à deux exemples très simples. Exemples : On effectue trois tirages successifs de pile ou face. Les différents tirages possibles sont PPP , PPF, PFP , PFF, FPP , FPF, FFP , FFF, soit 2 3 = 8 tirages possibles. Si on s’intéresse, par exemple, aux tirages avec au moins une fois pile, on s’aperçoit qu’il y en a 7 sur 8. On peut également présenter la liste des tirages sous forme d’un arbre : P P P F F P F F P P F F P F Les différents tirages sont alors représentés par chacun des huit chemins de l’arbre. Ici, l’ordre d’apparition de P ou F est important et il peut y avoir des répétitions. Remarques importantes!! Malheureusement, les situations où on peut faire la liste exhaustive de toutes les possibilités sont assez rares. Si on cherche à compter le nombre de codes secrets (par exemple, de carte bleue) à 4 chiffres, il est hors de question de faire la liste de tous les codes possibles. En revanche, chaque chiffre du code est entre 0 et 9, soit 10 possibilités. Comme on a 4 chiffres dans le code, on a au total 10 4 = 10000 possibilités. Ainsi, il n’existe que 10000 codes à 4 chiffes différents. 1

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Dénombrement - Combinatoire

Cours

La combinatoire (ou analyse combinatoire) étudie comment compter des objets. Elle fournit des

méthodes de dénombrement particulièrement utiles en probabilité. Un des principaux exemples

que nous verrons est la formule du binôme de Newton. Commençons par nous intéresser à deux

exemples très simples.

Exemples :

• On effectue trois tirages successifs de pile ou face. Les différents tirages possibles sont

PPP,PPF,PF P,PF F,F PP,F PF,F F P,F F F,

soit 23= 8 tirages possibles. Si on s’intéresse, par exemple, aux tirages avec au moins une fois pile,

on s’aperçoit qu’il y en a 7 sur 8. On peut également présenter la liste des tirages sous forme d’un

arbre :

P

P

P

F

F

P

F

F

P

P

F

F

P

F

Les différents tirages sont alors représentés par chacun des huit chemins de l’arbre.

Ici, l’ordre d’apparition de P ou F est important et il peut y avoir des répétitions.

Remarques importantes!!

Malheureusement, les situations où on peut faire la liste exhaustive de toutes les possibilités sont

assez rares.

• Si on cherche à compter le nombre de codes secrets (par exemple, de carte bleue) à 4 chiffres, il est

hors de question de faire la liste de tous les codes possibles. En revanche, chaque chiffre du code

est entre 0 et 9, soit 10 possibilités. Comme on a 4 chiffres dans le code, on a au total 104= 10000

possibilités. Ainsi, il n’existe que 10000 codes à 4 chiffes différents.

1

1 Rappels sur les ensembles

Soit E un ensemble et A et B deux sous-ensembles de E . On définit

A∪B := {x ∈ E , x ∈ A ou x ∈ B } ,

A∩B := {x ∈ E , x ∈ A et x ∈ B } ,

E\A := A := {x ∈ E , x ∉ A} .

Définition

On suppose à présent que E est fini i.e. qu’il ne posséde qu’un nombre fini d’éléments. On

appelle ce nombre le cardinal de E et le note Card(E ).

Définition

On a les égalités suivantes :

Card(A∪B ) =Card(A)+Card(B )−Card(A∩B ) ,

Card(E\A) = Card(E )−Card(A) .

Propriété

2 Arrangements

Commençons tout d’abord par rappeler la définition de la fonction factorielle.

Soit n un entier naturel. On définit le nombre n!, appelé factorielle n, par

n!= n × (n −1)× (n −2)×·· ·×3×2×1.

Par convention, 0! = 1.

Définition

Ex : On a 3! = 3×2×1 = 6, 5! = 5×4×3×2 = 120.

Soit n et p deux entiers tels que p ≤ n. On considère E un ensemble à n éléments :

E = {e1, . . . ,en}. Un arrangement à p éléments parmi n est une liste ordonée de p éléments

distincts parmi les n éléments de E . On parle aussi de liste sans répétition à p éléments

parmi n.

Définition

2

Ici, l’ordre est important mais il n’y a pas de répétitions.

Remarques importantes!!

Si E est un ensemble à n éléments alors le nombre de liste sans répétition de p éléments

de E est donné par :

n × (n −1)× (n −2)×·· · ×(

n − (p −1))

= n × (n −1)× (n −2)×·· ·×(

n −p +1))

=n!

(n −p)!.

Propriété

Démonstration.

On utilise un raisonnement par cases :

1er élément 2ième élément 3ième élément . . . p ième élément

n possiblités × (n −1) possibilités × (n −2) possiblités × . . . × (n −p +1) possibilités

On a n possiblités pour choisir le premier élément de la liste, puis comme on n’a pas droit aux répé-

titions, on n’a plus que (n −1) choix possibles pour le deuxième élément, et ainsi de suite jusqu’au

p ième élément pour lequel, on a (n −p +1) possibilités. Ainsi le nombre total de telles listes est bienn!

(n −p)!.

On dispose d’une urne contenant trois boules différentes, numérotées 1, 2 et 3 et on en tire

deux (sans remise) parmi les trois. Combien de tirages différents peut-on effectuer ?

Solution : Un tirage correspond à un arrangement de deux éléments parmi trois. En effet,

l’ordre de tirage est important mais on effectue le tirage sans remise donc il ne peut y avoir

de répétitions. On a donc3!

(3−2)!= 6 tirages possibles. Dans ce cas, on peut encore faire la

liste exhaustive de ces différents tirages, par exemple sous forme d’arbre.

Exercice résolu

Un raisonnement du même type permet de voir facilement que si on considère des listes

de p éléments avec répétitions, alors le nombre de ces listes est de np .

Remarques importantes!!

3

3 Permutations

A présent, nous allons nous intéresser plus particulièrement au cas où p = n.

Soit n un entier naturel et E un ensemble de n éléments. Une permutation de E est une

liste des n éléments de E . Autrement dit, une permutation est de E est une façon de ranger

les différents éléments de E .

Définition

Ex : Si E = {a,b,c ,d }, alors (a,b,c ,d ) et (a,c ,d ,b) sont deux permutations de E .

Ici aussi, l’ordre est important mais il n’y a pas de répétitions.

Remarques importantes!!

Soit E un ensemble de n éléments. Le nombre de permutations de E est donné par n!.

Propriété

Démonstration.

Là encore, on peut faire un raisonnement par cases :

1er élément 2ième élément 3ième élément . . . nième élément

n possiblités × (n −1) possibilités × (n −2) possiblités × . . . × 1 possibilité

On a n possiblités pour choisir le premier élément de la liste, puis (n − 1) choix possibles pour le

deuxième élément, et ainsi de suite jusqu’au dernier élément pour lequel, on n’a plus qu’une seule

possibilité. Ainsi le nombre total de permutations est bien n!.

Une permutation est en fait une liste sans répétition de n éléments de E , et donc en

utilisant les résultats de la partie précédente pour p = n, on obtient bien qu’il y an!

(n −n)!=

n!

0!= n! telles listes.

Remarques importantes!!

Combien y a-t-il de façons de placer huit personnes autour d’une table ?

Solution : On cherche les nombre de permutations d’un ensemble à 8 éléments. Il y a donc

8! = 40320 façons de placer 8 personnes autour d’une table.

Exercice résolu

4

4 Combinaisons

Soit n et p deux entiers naturels tels que p ≤ n. On considère E un ensemble à n éléments.

Une combinaison de p éléments parmi n est un sous-ensemble de cardinal k de E .

Définition

Ex : Si E = {a,b,c}, alors les combinaisons de 2 éléments de E sont {a,b}, {a,c} et {b,c}.

BDans ce cas, on ne tient pas compte de l’ordre et il n’y a pas de répétitions.B

Remarques importantes!!

Le nombre de combinaisons de p éléments d’un ensemble à n éléments est

(

n

p

)

=n!

p !(n −p)!.

On note parfois ce nombre Cpn et on dit “p parmi n”.

Propriété

Démonstration.

On considère E un ensemble à n éléments : on souhaite dénombrer les parties de E à p éléments.

On sait déjà qu’il y an!

(n −p)!listes ordonnées sans répétitions à p éléments. Or chaque combinai-

son de p éléments permet de constituer p ! listes ordonnées : c’est le nombre de permutations d’un

ensemble à p éléments. On peut donc en déduire que le nombre de combinaisons à p éléments est

(

n

p

)

=Nombre de listes ordonnées à p éléments

Nombre de permutations à p éléments=

n!

(n −p)!

p !=

n!

p !(n −p)!.

5

On tire 5 cartes d’un jeu de 32 et on appelle une main l’ensemble de ces 5 cartes.

1) Combien y a-t-il de mains de 5 cartes ?

2) Combien y a-t-il de mains contenant exactement deux cœurs ?

3) Combien y a-t-il de mains contenant au moins un roi ?

Solution :

1) Une main de 5 cartes représente en fait une combinaison de 5 cartes. En effet, on ne

tient pas compte de l’ordre dans lequel on reçoit les cartes et on ne peut pas avoir deux

fois la même carte ! Donc le nombre total de mains de 5 cartes vaut

(

32

5

)

= 201376.

2) Pour fabriquer une main avec exactement 2 cœurs, il faut choisir 2 cœurs parmi 8, soit(

8

2

)

puis il reste 3 cartes à choisir parmi les 24 qui ne sont pas des cœurs, soit

(

24

3

)

. Au

final, on a donc

(

8

2

)

×

(

24

3

)

= 56672 mains avec exactement 2 cœurs.

3) Pour déterminer le nombre de mains avec au moins un roi, on peut compter celles avec

exactement un roi, puis celles avec exactement deux rois, et ainsi de suite puis tout

ajouter. En fait, il est plus simple de compter le nombre de mains avec aucun roi, puis

de le soustraire du nombre total de mains. Le nombre de mains sans roi est de

(

28

5

)

et

donc le nombre de mains avec au moins un roi vaut

(

32

5

)

(

28

5

)

= 103096.

Exercice résolu

5 Propriétés des coefficients binomiaux

Soit n et p deux entiers naturels tels que p ≤n. On a

(

n

0

)

= 1,

(

n

1

)

= n,

(

n

n −1

)

= n,

(

n

n

)

= 1 et

(

n

p

)

=

(

n

n −p

)

.

Propriété

Démonstration.(

n

0

)

représente le nombre de partie à zéro élément parmi n ; or la seule partie à zéro élément est

6

le vide donc

(

n

0

)

= 1.

Ensuite, on cherche le nombre de partie à 1 élément : il y en a évidemment n. Donc

(

n

1

)

=n.

Intéressons-nous ensuite à

(

n

n

)

. On cherche les parties de E contenant n éléments. Or la seule partie

à n élément est E lui-même donc

(

n

n

)

= 1.

Puis, on cherche le nombre de partie à (n − 1) éléments parmi n ; cela revient en fait à écarter un

élément et on vient de voir qu’il y avait n façons de choisir un élément. Donc

(

n

n −1

)

.

Ce raisonnement permet de justifier aussi que

(

n

n −p

)

=

(

n

p

)

; en effet, choisir (n −p) éléments, cela

revient à en écarter p .

Pour tout n et p deux entiers naturels, on a

(

n

p

)

+

(

n

p +1

)

=

(

n +1

p +1

)

.

Propriété

Démonstration.

Par définition, on a(

n

p

)

+

(

n

p +1

)

=n!

p !(n −p)!+

n!

(p +1)!(n −p −1)!

=(p +1)n!+ (n −p)n!

(p +1)!(n −p)!

=(n +1)n!

(p +1)!(n −p)!

=(n +1)!

(p +1)!(n +1−p −1)!

=

(

n +1

p +1

)

.

On peut également montrer ce résultat de manière un peu plus élégante en utilisant des méthodes

de dénombrement. On cherche le nombre de parties de (p +1) éléments parmi (n +1) éléments. On

considère E un ensemble de (n+1) éléments et a un élément de E . Alors les parties de (p+1) éléments

de E sont de deux sortes :

• celles qui ne contiennent pas a : il y en a

(

n

p +1

)

. Il faut choisir (p +1) parmi les n éléments de E

qui ne sont pas a.

• celles qui contiennent a : il y en a

(

n

p

)

. Il faut choisir p éléments (puisqu’on sait déjà qu’un élément

est a) parmi les n éléments de E qui ne sont pas a.

7

En conclusion, on a

(

n +1

p +1

)

=

(

n

p +1

)

+

(

n

p

)

.

Cette propriété permet d’obtenir ce qu’on appelle le triangle de Pascal donnant les valeurs des

(

n

p

)

:

Soit a,b ∈R et n ∈N. On a

(a +b)n= an

+

(

n

1

)

an−1b +

(

n

2

)

an−2b2+·· ·+

(

n

n −1

)

abn−1+bn

=

n∑

k=0

(

n

k

)

ak bn−k .

Propriété (Formule du binôme de Newton)

Démonstration.

On utilise une démonstration par récurrence.

Pour n ∈N, on pose P(n) : (a +b)n=

n∑

k=0

(

n

k

)

ak bn−k .

P(0) est vraie car (a +b)0= 1 et

n∑

k=0

(

n

k

)

ak bn−k=

(

0

0

)

a0b0= 1.

Soit n ∈N tel que P(n) est vraie. On a

(a +b)n+1= (a +b)(a +b)n

= (a +b)n∑

k=0

(

n

k

)

ak bn−k

= an∑

k=0

(

n

k

)

ak bn−k+b

n∑

k=0

(

n

k

)

ak bn−k

=

n∑

k=0

(

n

k

)

ak+1bn−k+

n∑

k=0

(

n

k

)

ak bn+1−k

=

n+1∑

k=1

(

n

k −1

)

ak bn+1−k+

n∑

k=0

(

n

k

)

ak bn+1−k

8

(a +b)n+1=

n∑

k=1

[(

n

k −1

)

+

(

n

k

)]

ak bn+1−k+an+1

+bn+1

=

n∑

k=1

(

n +1

k

)

ak bn+1−k+

(

n +1

n +1

)

an+1b0+

(

n +1

0

)

a0bn+1

=

n+1∑

k=0

(

n +1

k

)

ak bn+1−k

Ainsi P(n+1) est vraie et alors le principe de récurrence assure que, pour tout n ∈N,P(n) est vraie.

Soit E un ensemble à n éléments. Déterminer le nombre de parties de E .

Solution : Pour déterminer le nombre de parties de E , il faut calculer la somme

(

n

0

)

+

(

n

1

)

+

(

n

2

)

+·· ·+

(

n

n −1

)

+

(

n

n

)

.

En effet, les parties de E compte zéro élément, ou 1 élément, ou 2 élément..., ou (n − 1)

éléments ou n éléments. Et pour calculer cette somme, nous allons utiliser la formule du

binôme de Newton :

2n= (1+1)n

=

n∑

k=0

(

n

k

)

1k 1n−k=

n∑

k=0

(

n

k

)

.

Donc le nombre de parties d’un ensemble à n éléments est 2n .

Exercice résolu

9