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1 Louis THOMAZO Mars octobre 2014 Diagnostic Agraire à Katongo Kapala et dans ses environs, Mpika District, Zambie Mémoire (Photographies : Thomazo) Professeur Tuteur : Hubert COCHET

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Page 1: Diagnostic Agraire à Katongo Kapala et dans ses environs, Mpika … · 2018. 11. 13. · Modification du système de production et du calendrier de travail ..... 45 II.4 Une politique

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Louis THOMAZO Mars – octobre 2014

Diagnostic Agraire à Katongo Kapala et dans ses environs, Mpika

District, Zambie

Mémoire

(Photographies : Thomazo)

Professeur Tuteur : Hubert COCHET

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Remerciements

Mener cette étude a été source de grandes découvertes et de grandes joies, cela en grande partie grâce

à l’accueil très bienveillant des zambiens. Je tiens particulièrement à remercier tous les agriculteurs de

la localité de Katongo-Kapala et de ses environs ainsi que leurs familles pour le temps qu’ils m’ont

consacré et pour leur gentillesse et leur patience à toute épreuve. Je remercie également les

représentants du Ministère du l’Agriculture Zambien pour leur soutien technique et leurs conseils

précieux tout comme pour leur accueil au sein de leur équipe lors de mes passages au Ministère. Il me

faut aussi remercier chaleureusement l’école de Katongo-Kapala et Charles Chisanga, son directeur,

qui m’ont offert un logement pour la durée de mon étude.

Je remercie l’excellent Alex Sampa pour son travail de traduction et de guide à travers la région, mais

aussi Cécilia Kasonde pour sa bonne humeur et son attention quotidienne envers moi.

Mes remerciements vont évidemment aussi vers l’AFD, initiatrice et soutien financier indispensable

au lancement et au bon déroulement de cette étude.

Je remercie les anciens élèves d’AgroParisTech expatriés en Zambie pour leur accueil, leurs conseils

et leur amitié ; particulièrement Clémentine Rémy et Ariane Degroote.

Enfin je remercie Esther Laske avec qui j’ai découvert la Zambie et qui m’a ouvert aimablement les

conclusions de sa propre étude réalisée à 500 km de la mienne.

Je remercie Hubert Cochet pour son rôle de tuteur et pour son implication dans mes recherches, tant

dans leurs réalisations pratiques (visite de terrain) que sur le fond des sujets traités (relectures et

discussions multiples).

Je n’oublie pas non plus ceux qui m’ont accueilli en France pour la rédaction de ce mémoire et qui

m’ont soutenu pendant cette phase un peu plus aride, en particulier ma famille, l’Abbaye Saint Pierre

de Solesmes et la Maison Saint Jean-Baptiste.

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Sommaire Remerciements ....................................................................................................................................... 3

Sommaire ................................................................................................................................................ 5

Table des illustrations .............................................................................................................................. 8

Glossaire ................................................................................................................................................ 12

Principales espèces botaniques............................................................................................................. 12

Unités, Sigles et Abréviations ................................................................................................................ 13

Introduction ........................................................................................................................................... 14

La Zambie, une ancienne colonie britannique en difficulté économique ......................................... 14

Les commanditaires de cette étude : l’Agence Française de Développement et le Ministère de

l’Agriculture zambien ........................................................................................................................ 14

Méthodologie du diagnostique agraire ................................................................................................. 16

L’analyse-diagnostic d’un système agraire, un outil de compréhension pour une aide à la décision

........................................................................................................................................................... 16

Déroulement de l’étude .................................................................................................................... 16

I. Présentation de la région d’étude ...................................................................................................... 18

I.1 Situation géographique de la zone ............................................................................................... 18

I.2 Le climat de la zone : tropical sec d’altitude ................................................................................ 19

I.3 Quels sont les bouleversements climatiques en cours observables et les hypothèses

d’évolution ? ...................................................................................................................................... 20

I.4 La géomorphologie, l’hydrographie et la végétation découpent les différentes zones agro-

écologiques ........................................................................................................................................ 26

I.5 Présentation du projet IDSP ......................................................................................................... 34

II. Evolution du système agraire de la fin du XIXème siècle à nos jours .................................................. 36

II.1 Avant l’indépendance de 1964 : une région en peuplement ...................................................... 36

Un peuplement lent par une population bien organisée .............................................................. 36

Une exploitation de la biomasse de l’agro-écosystème Mutengo ................................................ 37

II.2 Les débuts de l’Etat indépendant (1964 – 1972) ........................................................................ 41

Modernisation et programme de développement de l’agriculture .............................................. 41

Immigration et début du maraichage ........................................................................................... 42

II.3 Première crise de la politique de soutien (1972 – 1985) ............................................................ 44

Crise et nouveau programme de développement ........................................................................ 44

Conséquences sur la propriété et exode massif ........................................................................... 45

Modification du système de production et du calendrier de travail ............................................ 45

II.4 Une politique de soutien à large impact (1985 – 1992) .............................................................. 48

Nouvelle politique agricole et promotion du ‘paquet technique’ ................................................ 48

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Généralisation du Chisebe pour ouvrir le milieu ........................................................................... 49

Comparaison du Chitemene et du Chisebe ................................................................................... 50

II.5 Ajustement structurel, le système agraire entre en crise (1992 – 2001) .................................... 52

Crise économique zambienne et intervention du FMI : impact sur les prix agricoles .................. 52

Retour au Chitemene .................................................................................................................... 54

Développement de la production maraichère .............................................................................. 55

La production charbonnière, un revenu supplémentaire pour les familles en difficulté ............. 56

Développement de l’élevage bovin ............................................................................................... 57

II.6 De 2001 à nos jours : des agriculteurs en quête de nouvelles stratégies ................................... 57

Retour du soutien à la production de maïs et au contrôle des prix .............................................. 57

Appauvrissement des familles propriétaires d’un seul type d’écosystème (Mutengo ou Icipya) 60

L’innovation permet la diversification des systèmes ................................................................... 61

Le maraichage : source de revenus pour beaucoup de familles ................................................... 62

Développement du gardiennage ................................................................................................... 62

III. Des systèmes de culture mettant à profit les ressources des écosystèmes et des agriculteurs ..... 66

III.1 Méthodologie suivie ................................................................................................................... 66

III.2 Le système de culture traditionnel d’exploitation du Mutengo : le Chitemene ........................ 67

III.3 Le Chisebe : ouverture du milieu Icipya et exploitation du Mutengo dégradé .......................... 70

III.4 Comparaison du Chitemene et du Chisebe ................................................................................ 72

III.5 Le système de culture proposé par le ‘paquet technique’ du gouvernement : culture pure de

maïs et fertilisation chimique ............................................................................................................ 73

III.6 La culture du maïs en association avec une légumineuse.......................................................... 77

III.7 Comparaison des systèmes de culture pure de maïs et de culture du maïs en association ...... 79

III.8 Les productions potagères ......................................................................................................... 80

III.9 La production de charbon de bois .............................................................................................. 84

IV. L’élevage, petit capital sur pied ....................................................................................................... 86

IV.1 L’élevage de volailles : deux modèles aux ambitions différentes .............................................. 86

Le ‘village chiken’, peu coûteux mais sensibles aux épidémies .................................................... 86

L’atelier d’engraissage du ‘broiler chiken’, coûteux mais rémunérateur ..................................... 87

IV.2 L’élevage caprin : peu exigent et adapté au milieu ................................................................... 88

IV.3 L’élevage bovin : très demandeur en surface ............................................................................ 89

V. Le système agraire d’aujourd’hui : une inégalité d’accès aux différents écosystèmes .................... 92

V.1 Méthodologie .............................................................................................................................. 92

Calcul de la valeur ajoutée brute (VAB), de la valeur ajoutée nette (VAN) et du revenu (REV) des

systèmes de production ................................................................................................................ 92

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Modélisation d’un seuil de survie ................................................................................................. 93

V.2 Les systèmes de production basés sur l’exploitation de l’écosystème Mutengo ....................... 94

SP I, Propriétaire dans le Mutengo – 4 actifs ................................................................................ 94

SP II, Propriétaire dans le Mutengo + petite surface irrigable – 5 actifs ....................................... 96

SP XIII Eleveur bovin sans gardiennage – 5 actifs .......................................................................... 97

SP XIV Eleveur bovin avec gardiennage – 5 actifs ......................................................................... 98

V.3 Les systèmes de production basés sur l’exploitation du Mutengo dégradé............................... 99

SP III Petit propriétaire dans le Mutengo dégradé – 3 à 4 actifs ................................................... 99

SP IV Petit propriétaire dans le Mutengo dégradé avec troupeau caprin – 4 actifs ................... 100

SP V Petit propriétaire dans le Mutengo dégradé + petite surface irrigable – 4 actifs ............... 101

SP VI Petit propriétaire dans le Mutengo dégradé + grande surface irrigable – 5 actifs ............ 102

V.4 Les systèmes de production basé sur l’exploitation de l’écosystème Icipya ............................ 103

SP VII Très petit propriétaire sur l'Icipya + double actif – 2 actifs .............................................. 103

SP VIII Propriétaire sur l'Icipya - 3 actifs ..................................................................................... 104

SP IX Propriétaire sur l'Icipya + petite surface irrigable .............................................................. 105

SP X Propriétaire sur l'Icipya + grande surface irrigable – 4 actifs familiaux .............................. 106

SP XI Propriétaire sur l'Icipya + production diversifiée – 3 actifs ................................................ 107

SP XII Maraichers sur une grande surface irriguée – 4 actifs ...................................................... 108

V.5 Analyse et comparaison des performances technico-économiques ........................................ 110

Un accès aux différents écosystèmes, aux moyens de production et à un capital à investir sur les

parcelles variable selon les systèmes de production .................................................................. 110

VI. Etude de l’impact de l’irrigation sur les systèmes de production et perspectives d’évolutions du

système agraire dans le cadre IDSP et face à l’aléa climatique .......................................................... 113

VI.1 Estimation de l’impact d’un fort aléa climatique sur les différents systèmes de production . 113

VI.2 Impact et intérêt de l’irrigation déjà en place dans la zone .................................................... 115

VI.3 Mise en place du projet : freins et intérêts du projet IDSP ...................................................... 116

VI.4 Perspective d’avenir pour les agriculteurs de Katongo-Kapala ............................................... 117

Dans le scénario sans mise en place du projet IDSP ................................................................... 117

Dans le scénario avec mise en place du projet IDSP ................................................................... 117

Bibliographie........................................................................................................................................ 119

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Table des illustrations Figure 1 : Représentation de la Zambie et localisation de la région d’étude (Source : Geographic

Department of Zambia) ......................................................................................................................... 18

Figure 2 : Vue satellitaire de Mpika et Katongo-Kapala (Source : GoogleEarth, réalisation : Thomazo)

............................................................................................................................................................... 18

Figure 3 : Diagramme ombro-thermique du district de Mpika, d’après les données récoltées lors des

vingt dernières années. (Source : Station météorologique de Mpika, Réalisation : Thomazo) ............. 20

Figure 4 : prévision de modification des rendements de certaines productions zambiennes selon les

hypothèses du modèle 'humide' (rouge) et ‘sec’ (bleu) (Source : IAPRI) ............................................ 21

Figure 5 : Précipitations annuelles pour la ville de Mpika. (Source : Station météorologique de Mpika,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 23

Figure 6 : Volume des précipitations tombées le jour le plus pluvieux de l’année à Mpika. (Source :

Station météorologique de Mpika, réalisation : Thomazo) ................................................................... 23

Figure 7 : Température moyenne annuelle pour la ville de Mpika depuis vingt ans. (Source : Station

météorologique de Mpika, réalisation : Thomazo) ................................................................................ 24

Figure 8 : Température moyenne de la ville de Mpika pour chaque mois depuis vingt ans (Source :

Station météorologique de Mpika, Réalisation : Thomazo) .................................................................. 24

Figure 9 : Tableau récapitulatif des données de régression linéaire pour les températures moyennes

mensuelles et annuelles depuis vingt ans (Source : Station météorologique de Mpika, réalisation :

Thomazo) .............................................................................................................................................. 25

Figure 10 : Vue satellitaire de la région d'étude (Source : GoogleEarth, réalisation : Thomazo) ......... 26

Figure 11 : Vue satellitaire de la région d’étude et quelques zooms associés (Source : GoogleEarth,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 29

Figure 12 : Coupe présentant les modes d’exploitation du milieu de part et d’autre d’une rivière

permanente (Réalisation : Thomazo)..................................................................................................... 30

Figure 13 : Coupe présentant les modes d’exploitation du milieu de part et d’autre d’une rivière

temporaire (Source et Réalisation : Thomazo) ...................................................................................... 30

Figure 14 : Bloc diagramme de la région d’étude présentant les unités agro-écologiques (Source et

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 31

Figure 15 : Prise de vue de la vallée de la Mukungwa depuis les montagnes (Source et réalisation :

Thomazo) .............................................................................................................................................. 32

Figure 16 : De gauche à droite, de haut en bas : champs de Chitemene dans le Mutengo, bas-fond non

mis en culture, parcelle labourée dans l’Icipya, parcelle de maraichage irriguée (Source : Thomazo) 33

Figure 17 : Projet de répartition des Tiers et de localisation du barrage. (Source : document de

préfaisabilité du projet) ......................................................................................................................... 35

Figure 18 : Etapes de préparation de la parcelle de Chitemene (Source : entretiens historiques,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 38

Figure 19 : Photo d’une parcelle d’environ 1lima de Chitemene en année 1. On aperçoit les souches

calcinées et l’éleusine qui apparait vert clair. (Source : Thomazo) ...................................................... 39

Figure 20 : Modélisation de l'intégration au marché des systèmes de production, période avant

indépendance (Source : entretiens historiques, réalisation : Thomazo) ................................................ 40

Figure 21 : Calendrier de travail (1890-1964) (Source : entretiens historiques, réalisation : Thomazo)

............................................................................................................................................................... 41

Figure 22 : Description du 'Programme de développement de l'agriculture rurale' (Source : entretiens

historiques, réalisation : Thomazo) ....................................................................................................... 42

Figure 23: Calendrier de travail de la monoculture pure de maïs (Source : entretiens historiques,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 42

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Figure 24 : Prise d’eau (g.) du canal d'irrigation et son prolongement (d.) sur la rive sud de la

Mukugwa River (Source : Thomazo) .................................................................................................... 43

Figure 25 : Localisation sur le bloc diagramme des zones de peuplement et des nouveaux

aménagements (Source : entretiens historiques, réalisation : Thomazo) ............................................... 44

Figure 26 : Billonnage des parcelles de maïs (Réalisation : Thomazo) ................................................ 46

Figure 27 : Billons (Source : Thomazo) ................................................................................................ 47

Figure 28 : Calendrier de travail s’imposant peu à peu entre 1972 et 1992 (Source : entretiens

historiques, réalisation : Thomazo) ....................................................................................................... 48

Figure 29 : Récapitulation des étapes de préparation du champ de Chisebe (Réalistion : Thomazo) ... 50

Figure 30 : Modélisation de l'intégration au marché des systèmes de production, période 1985-1992

(Source : entretiens historiques, réalisation : Thomazo) ....................................................................... 50

Figure 31 : Tableau récapitulatif des rendements possibles en fonction du milieu et de son mode

d’exploitation (Source : enquêtes de terrain, Réalisation : Thomazo).................................................. 51

Figure 32 : Tableau présentant les rendements en maïs de différentes parcelles (Source : entretiens

techniques, réalisation : Thomazo) ........................................................................................................ 51

Figure 33 : Evolution des prix aux producteurs dans le Northern Province (Kazama Town) pour le

manioc, l'éleusine et le maïs entre 1994 et 2002 en Kwacha courant. (Source : FAOSTAT, réalisation :

Thomazo) .............................................................................................................................................. 52

Figure 34 : Evolution des prix aux producteurs dans le Northern Province (Kazama Town) pour le

manioc, l'éleusine et le maïs entre 1994 et 2002 en Kwacha constant de 2011. (Source : FAOSTAT,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 53

Figure 35 : Exemple de calendrier alimentaire chez les habitants de la région d'étude (Source :

entretiens, Réalisation Thomazo) .......................................................................................................... 54

Figure 36 : Modélisation de l'intégration au marché du système de production basé sur le Chitemene,

période 1992-2001 (Source : entretiens, réalisation : Thomazo) ........................................................... 55

Figure 37 : Modélisation de l'intégration au marché du système de production basé sur la culture

maraichère, période 1992-2001 (Source : entretiens, réalisation : Thomazo) ....................................... 56

Figure 38 : Modélisation de l'intégration au marché des familles les plus pauvres, période 1992-2001

(Source : entretiens, réalisation : Thomazo) .......................................................................................... 57

Figure 39 : Production annuelle de maïs en Zambie (Source : MAL)................................................... 58

Figure 40 : Evolution de l'importation et de l'exportation de maïs en zambie (Source : MAL) ............ 58

Figure 41 : Evolution des prix aux producteurs dans le Northern Province (Kazama Town) pour le

manioc, l'éleusine et le maïs entre 1994 et 2012 en Kwacha courant. (Source : FAOSTAT,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 59

Figure 42: Evolution des prix aux producteurs dans le Northern Province (Kazama Town) pour le

manioc, l'éleusine et le maïs entre 1994 et 2012 en Kwacha constant de 2011. (Source : FAOSTAT,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 59

Figure 43 : Evolution intra-annuelle des prix de vente des cultures suivantes : de gauche à droite,

éleusine, manioc, maïs (Source : entretiens techniques, Réalisation : Thomazo) ................................. 61

Figure 44 : Chronologie récapitulative de l’évolution de l’agriculture locale depuis l’arrivée des

Bembas à nos jours. (Source : Enquêtes historiques, Réalisation : Thomazo) ...................................... 63

Figure 45 : Evolution des systèmes de production au cours de l'histoire (1890-1985) (Source :

entretiens historiques, réalisation : Thomazo) ....................................................................................... 64

Figure 46 : Evolution des systèmes de production au cours de l'histoire (1985-2014) (Source :

entretiens historiques, réalisation : Thomazo) ....................................................................................... 65

Figure 47 : Les différentes étapes du calcul de la valeur ajoutée brute ................................................. 66

Figure 48 : Système de prix utilisé dans les calculs économiques des systèmes de culture pour les

principales productions (Source : entretiens technico-économiques, Réalisation : Thomazo) ............. 67

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Figure 49 : Itinéraire technique pour une parcelle de Chitemene d'un lima cultivée 4 ans de suite

(Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) ..................................................... 68

Figure 50 : Calendrier de travail pour une parcelle de Chitemene d'un lima cultivée 4 ans de suite

(Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) ..................................................... 69

Figure 51 : Performances techniques du Chitemene (Source : entretiens technico-économiques,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 69

Figure 52 : Récolte des épis d'éleusine et séchage au soleil (Source : Thomazo) ................................. 69

Figure 53 : Itinéraire technique pour une parcelle de Chisebe d'un lima cultivée 4 ans de suite (Source :

entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) .................................................................... 71

Figure 54 : Calendrier de travail pour une parcelle de Chitemene d'un lima cultivée 4 ans de suite

(Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) ..................................................... 71

Figure 55 : Performances techniques du Chisebe (Source : entretiens technico-économiques,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 72

Figure 56 : Comparaison des valeurs ajoutées des systèmes de culture Chitemene et Chisebe (Source :

entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) .................................................................... 72

Figure 57 : Description du 'paquet technique' proposé par le gouvernement (Source : entretiens

technico-économiques, réalisation : Thomazo) ..................................................................................... 73

Figure 58 : Itinéraire technique pour une parcelle d’Icipya en rotation h/m/a/m. (L’an 2 et l’an 4

suivant le même itinéraire ont été regroupés par souci de simplification) (Source : entretiens technico-

économiques, réalisation : Thomazo) .................................................................................................... 74

Figure 59 : Calendrier de travail pour la rotation h/m/a/m sur Icipya (4 limas) (Source : entretiens

technico-économiques, réalisation : Thomazo) ..................................................................................... 75

Figure 60 : Labour d'une parcelle par un groupe de travail (Source : Thomazo) .................................. 76

Figure 61 : Performances techniques de la rotation h/m/a/m (Source : entretiens technico-

économiques, réalisation : Thomazo) .................................................................................................... 76

Figure 62 : Tri des haricots par les femmes après le battage (Source : Thomazo) ................................ 77

Figure 63 : Itinéraire technique pour une parcelle d’un lima d’Icipya en association m+h. (Source :

entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) .................................................................... 78

Figure 64 : Calendrier de travail pour l’association m+h sur un lima (Source : entretiens technico-

économiques, réalisation : Thomazo) .................................................................................................... 78

Figure 65 : Performances techniques de l’association m+h (Source : entretiens technico-économiques,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 79

Figure 66 : Comparaison des valeurs ajoutées des systèmes de culture de production de maïs (Source :

entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) .................................................................... 79

Figure 67 : Comparaison des valeurs ajoutées et des consommations intermédiaires (CI) des systèmes

de culture de production de maïs (Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) 80

Figure 68 : Itinéraire technique pour une parcelle irriguée de 0,25 lima de tomate cultivée en saison

sèche (Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) ........................................... 81

Figure 69 : Parcelles de tomate (g.) et de colza (d.) en saison sèche (Source : Thomazo) .................... 81

Figure 70 : Itinéraire technique pour une parcelle irriguée de 0,25 lima de colza cultivée en saison

sèche (Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) ........................................... 82

Figure 71 : Comparaison des valeurs ajoutées et des consommations intermédiaires (CI) des

productions maraichères (Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) ............. 83

Figure 72 : Comparaison des valeurs ajoutées des systèmes de culture de type 1 et 2 (Source :

entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) .................................................................... 83

Figure 73 : Comparaison des valeurs ajoutées et des consommations intermédiaires (CI) des systèmes

de culture potagère (Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) ..................... 83

Figure 74 : Performances techniques et productivité journalière de la fabrication de charbon de bois

(Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo) ..................................................... 84

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Figure 75 : Les étapes de la production du charbon ; du haut vers le bas, de la droite vers la gauche :

abattage des arbres, empilement des troncs, fermeture et allumage et surveillance du four, mise en

culture après vente du charbon. (Source : Thomazo) ............................................................................ 85

Figure 76 : Performances techniques et économiques de l'élevage de 'village Chiken' (Source :

entretiens technico-économiques, Réalisation : Thomazo) ................................................................... 86

Figure 77 : Conduite pour l'engraissage de 100 poussins de type 'broiler chiken' (Source : entretiens

technico-économiques, Réalisation : Thomazo) .................................................................................... 87

Figure 78 : Performances technico-économiques de l'élevage de 100 'broiler chikens' (Source :

entretiens technico-économiques, Réalisation : Thomazo) ................................................................... 87

Figure 79 : Performances techniques et économiques de l'élevage caprin (Source : entretiens technico-

économiques, Réalisation : Thomazo) .................................................................................................. 88

Figure 80 : Conduite des troupeaux, chargement et gestion des bas-fonds (Source : entretiens technico-

économiques, Réalisation : Thomazo) .................................................................................................. 89

Figure 81 : Performances techniques et économiques de l'élevage bovin (Source : entretiens technico-

économiques, Réalisation : Thomazo) .................................................................................................. 90

Figure 82 : Comparaison des valeurs ajoutées et des consommations intermédiaires par vache en

propriété des différents systèmes d’élevage bovin (Source : entretiens technico-économiques,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 90

Figure 83 : Troupeau bovin dans son ‘padock’ (Source : Thomazo) .................................................... 91

Figure 84 : Les différentes étapes du calcul du revenu agricole familial .............................................. 93

Figure 85 : Détails du calcul des dépenses alimentaires du seuil de survie (Source : entretiens,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 93

Figure 86 : Détails du calcul des dépenses non alimentaires du seuil de survie (Source : entretiens,

réalisation : Thomazo) ........................................................................................................................... 94

Figure 87 : Représentation des résultats économiques pour chaque SP en fonction de la surface utile

(Source : enquêtes technico-économique, réalisation : Thomazo) ...................................................... 110

Figure 88 : Représentation des résultats économiques pour chaque SP (sauf SP bovins) en fonction de

la surface utile. (Source : enquêtes technico-économique, Réalisation : Thomazo) ........................... 111

Figure 89 : Impact de l'aléa climatique sur les rendements des systèmes de culture (Source : entretiens

historiques et technique, réalisation : Thomazo) ................................................................................. 114

Figure 90 : Graphe présentant les résultats économiques en fonction de la surface utile pour les SP

VIII, IX, X. (Source : enquêtes technico-économiques, réalisation : Thomazo) ................................. 115

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12

Glossaire Chisebe : technique de défriche-brûlis utilisée en savane peu arborée (Icipya)

Chitemene : technique d’abattis-brûlis traditionnelle en forêt claire (Mutengo)

Dambo : zone herbacée et humide voire temporairement marécageuse aux abords des rivières

Icipia : savane pas ou peu arborée

Mutengo : forêt claire de type Miombo

Principales espèces botaniques Arachide : Arachis hypogaea

Aubergine : Solanum melongena

Bananier: Musa sp.

Canne à sucre : Saccharum sp.

Choux chinois : Brassica rapa

Concombre : Cucumis sativus

Citrouille : Cucurbita pepo

Eleusine : Eleusine coracana

Manguier : Mangifera indica

Manioc : Manihot esculenta

Patate douce : Ipomoea batatas

Tomate : Sloanum lycopersicum

Vouandzou : voandzeia subterranea

Impolo : Hyparrhénia amthistiroides

Mutondo : Arbre à Charbon

Sensele : Sporobolus pyramidalis

Umusanse unono : Hyparrhenia filipendula

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Unités, Sigles et Abréviations L’unité monétaire choisie pour la rédaction de ce mémoire est le Kwacha (Kw) qui est la devise

officielle de la Zambie. Les données les plus importantes seront converties en euros selon le taux de

change en cours lors de l’étude : 8,5 Kw = 1 €.

L’unité de superficie qui est utilisée dans cette étude est le Lima. Il s’agit de l’unité de mesure utilisée

par tous les agriculteurs de la région d’étude. 1 Lima = ¼ ha. Etant adaptée à la taille des parcelles

cultivées, son utilisation évitera l’utilisation à l’excès de fraction d’hectare pour décrire les pratiques

des agriculteurs.

Plusieurs unités volumétriques ont cours dans la région d’étude : ninty bag, fifty bag, gallon, calabash,

box … Par souci de simplification nous emploierons dans la présente étude les unités détaillées ici :

Fiftybag : sac de toile en plastique vendu par l’Etat pour la gestion du commerce du Maïs. Plein, il

contient 50 kg de maïs grain, mais il est aussi utilisé pour le transport et le commerce de farine de

maïs, d’éleusine, de gousses de haricot, de haricot en grain, de feuille de colza, d’oignon, de tiges de

manioc … Il est donc bien utilisé comme unité volumétrique. Gallon : issu du système anglo-saxon de

mesure, cette unité désigne une masse variant selon la précision du peseur de 4 kg à 4,5 kg. Box : boite

standard en bois, utilisée pour le transport et la vente des certaines productions potagères (tomate,

aubergine, oignon …). Il s’agit d’une boite pouvant contenir une cinquantaine de kilo de tomates.

AFD : Agence Française de Développement

FISP : Farmer Input Support Program

FMI : Fond Monétaire International

H.Jour : Homme Jour, i.e. la quantité de Travail produite lors d’une journée de travail par un Homme

en condition de santé normale

IDSP : Irrigation Development Support Project

MAL : Ministry of Agriculture and Livestock (Ministère de l’Agriculture Zambien)

Rev. : Revenu

SP : Système de production

VAB : Valeur Ajoutée Brute

VAN : Valeur Ajoutée Nette

WB : World Bank (Banque Mondiale)

Arachide/maïs/haricot : succession culturale au sein d’une même parcelle avec en année 1 une

plantation d’arachide, en année 2 du maïs et en année 3 des haricots.

Manioc-arachide-citrouille : association lors d’une saison de culture au sein d’une même parcelle de

manioc, d’arachide et de citrouille.

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Introduction La Zambie, une ancienne colonie britannique en difficulté économique

La Zambie se trouve en Afrique Australe, à l’ouest de la Tanzanie et du Malawi, au sud du Congo

(RDC), au nord du Zimbabwe et à l’est de l’Angola et a une frontière avec 12 pays. Elle n’a pas

d’espace littoral si ce n’est avec le lac Tanganyika sur la rive sud du lac. Indépendant depuis 1964, le

pays connait une paix relativement stable depuis ce temps là. Auparavant, la domination britannique

imposait ses lois, ses taxes et ses visions raciales ; elle profitait des réserves minières dans le nord du

Pays mais se chargeait aussi d’assurer un développement du pays par la construction d’infrastructures,

l’extension progressive de l’éducation et la création de Farm Blocks sur le modèle sud-africain à

l’avantage des colons. Le départ du gouvernement colonial sous la pression des ‘Freedom fighters’ a

permis à une République populiste de s’installer, assumant le rôle d’un Etat fort et interventionniste

notamment dans la politique agricole. 1991 voit une flambée de violence agiter la capitale car l’Etat

est en faillite, le pays entier a faim suite à une hausse soudaine du prix des denrées alimentaires et

demande des élections ouvertes. Le deuxième gouvernement depuis l’indépendance fait

immédiatement après son élection appel au FMI qui en échange d’un soutien financier impose un

ajustement structurel supprimant toute subvention aux agriculteurs et ouvrant le marché national à la

libre concurrence mondiale. Cet abandon du soutien au monde rural s’estompe à partir des années

2000 qui voient un retour progressif des subventions à la production et le rétablissement d’un marché

intérieur piloté par l’Etat.

A l’heure actuelle, l’économie zambienne repose sur deux piliers, le secteur minier (extraction de

cuivre et de cobalt) et la production agricole qui emploie encore 70% de la population active. Bien que

généralement alphabétisée, cette population rurale largement majoritaire est souvent dans une grande

pauvreté. L’agriculture ne représente que 20% du PIB et 60% de la population vit sous le seuil de

pauvreté.

Les commanditaires de cette étude : l’Agence Française de Développement et le Ministère de l’Agriculture zambien

Financée entièrement par l’AFD, cette étude a été soutenue et facilitée sur le terrain par le Ministère de

l’Agriculture zambien. Ces deux sponsors s’y sont investis pour des objectifs différents.

Anticipant la tenue en 2015 de la conférence internationale sur le climat à Paris, l’AFD a financé une

série de stages de recherche en partenariat avec la chair d’Agriculture Comparée d’AgroParisTech

visant à évaluer l’impact des bouleversements climatiques en cours ou à venir sur les systèmes

agraires traditionnels. L’agriculture zambienne étant encore très largement marquée par l’utilisation

d’un outillage manuel et pratiquée sur des terres à tenures coutumières, il semblait pertinent d’y mener

une étude de ce genre dans le cadre de cette problématique.

Par ailleurs, le choix de la Zambie s’est fait aussi en fonction des possibilités pratiques d’y mener

l’étude dans des conditions satisfaisantes. Or il se trouve que depuis plusieurs années le Gouvernement

zambien, en lien avec la Banque Mondiale, met en place un plan de soutien à l’agriculture rurale -

nommé Irrigation Development Support Project (IDSP) - via la construction, avec des fonds

publiques, d’aménagements permettant l’irrigation de grandes surfaces sélectionnées par le Ministère

de l’Agriculture au profit à la fois des populations rurales mais aussi d’investisseurs privés. Trois

premiers sites voient déjà aujourd’hui la mise en place de ce projet tandis que six autres sont encore à

l’étude avant l’application du projet. Le Ministère a donc vu d’un bon œil la proposition de mener

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cette étude en l’orientant vers un des six sites encore à l’étude et se trouvant dans le district de Mpika,

dans la région entourant la localité de Katongo-Kapala.

Face à ces deux angles d’approche focalisés sur l’agriculture d’une petite région du nord de la Zambie

proposés par ces deux partenaires, une analyse-diagnostic a d’abord été faite pour appréhender dans sa

profondeur la réalité du tissu agricole de la région et en cerner les enjeux et problématiques. Ce

diagnostic a été réalisé de mars à août 2014 et ses conclusions ont permis d’apporter des réponses aux

deux commanditaires, i.e. sur l’impact des bouleversements climatiques sur l’agriculture locale

comme sur l’intérêt que peut présenter ou non la mise en place du projet IDSP pour le développement

de cette région rurale. Le présent rapport se propose de faire part à la fois du contenu de l’analyse-

diagnostic, de ses conclusions et des réponses aux problématiques soulevées par l’AFD et par le MAL.

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Méthodologie du diagnostique agraire L’analyse-diagnostic d’un système agraire, un outil de compréhension pour une aide à la décision

Un système agraire « englobe à la fois le mode d’exploitation et de reproduction d’un ou plusieurs

écosystèmes et donc le bagage technique correspondant (outillage, connaissances, savoir-faire), les

rapports sociaux de production et d’échange qui ont contribué à sa mise en place et à son

développement, les modalités de la division sociale du travail et de répartition de la valeur ajoutée, les

mécanismes de différenciation entre les unités de production élémentaires, ainsi que les conditions

économiques et sociales d’ensemble, en particulier le système des prix relatifs, qui fixent les modalités

de son intégration plus ou moins poussée au marché mondial »1. Etant issue des sciences sociales,

mêlant géographie rurale, histoire, économie, anthropologie, ethnologie, sociologie, l’analyse-

diagnostic d’un système agraire suit une méthodologie visant à étudier les évolutions récentes et la

situation actuelle de l’agriculture d’une petite région agricole, par la modélisation technico-

économique de grands types d’exploitations agricoles et de leur fonctionnement. ‘ Cette démarche

repose sur le principe selon lequel, où qu’ils se trouvent dans le monde, les agriculteurs « ont de

bonnes raisons de faire ce qu’ils font ‘. Si les agriculteurs sont des êtres rationnels et prennent

généralement des décisions conformes à leur intérêt, dans la limite des moyens (matériels, humains,

cognitifs) auxquels ils ont accès, rien n’indique en revanche que tous aient les mêmes intérêts, ni que

la maximisation de leur production ou de leur revenu aie leur préférence »2. Les premiers objectifs de

cette étude sont d’acquérir une compréhension approfondie du fonctionnement du système agraire de

la petite région agricole entourant la localité de Katongo-Kapala, d’en dessiner ses possibles

évolutions suivant quelques scénarii plausibles au regard des enjeux actuels et à venir auxquels font

face les différents acteurs sur le terrain (notamment celui du changement climatique), et de

comprendre comment pourrait s’intégrer le projet du MAL et de la WB dans le cadre d’un

développement du tissu rural. En ce sens, elle ne constitue pas une fin en soi, mais un véritable outil de

compréhension et de décision.

Déroulement de l’étude

L’analyse-diagnostic se base sur un travail de terrain de six mois (entre mars et août 2014) - assorti

d’un travail bibliographique - dont les étapes sont détaillées ci-dessous.

Lecture et compréhension du paysage : Etude des potentialités et des contraintes du milieu.

La lecture et la compréhension de paysage a pour objectif d’observer et de comprendre les liens

existants entre écosystèmes, territoires, aménagements et pratiques agricoles. Le paysage est en effet

l’expression visuelle d’un mode d’exploitation du milieu actuel comme de son histoire. Cette première

étape permet ainsi de délimiter la région d’étude, d’aboutir à un zonage des différentes unités agro-

écologiques et de formuler des hypothèses concernant le fonctionnement actuel et passé des

exploitations agricoles en rapport avec les potentialités et les contraintes du milieu. Cette étude du

milieu se fait à partir d’observations directes sur le terrain complétées par une analyse détaillée des

cartes topographiques et géologiques disponibles ainsi que par des observations satellites tirées

d’outils tels que Google Earth. Elle est aussi affinée par la confrontation des analyses avec le point de

vue d’acteurs locaux connaissant bien la région.

1 Hubert Cochet, L’agriculture comparée, 2011

2 Dufumier M. (1985) Systèmes de production et développement agricole dans le Tiers-Monde. Les cahiers de la recherche

et du développement n°6. Montpellier, avril 1985

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Approche historique de l’évolution des exploitations agricoles : Comment les agriculteurs de la

région d’étude entourant Katongo-Kapala en sont arrivés à faire ce qu’ils font aujourd’hui ?

L’approche historique cherche à identifier les différents systèmes de production de la région d’étude

ayant existé au cours des cinquante dernières années et de comprendre les facteurs de différenciation

de ces systèmes au cours du temps, en recueillant les faits marquants et les différentes étapes-clés

ayant fait évoluer le contexte jusqu’au paysage actuel. Elle permet ainsi de réaliser une pré-typologie

des exploitations agricoles actuelles. Des entretiens historiques avec des agriculteurs âgés permettent

de « remonter dans le temps » en s’attachant à retracer l’évolution de leur propre exploitation agricole

au cours du temps et de dégager les principales tendances d’évolution et de différentiation au sein du

système agraire de la région. Pour l’étude présentée ici, une soixantaine d’entretiens historiques ont pu

être recueillis.

Étude technico-économique du fonctionnement des systèmes de production actuels : Quelles sont

les tâches effectuées, par qui, comment et à quel moment ? Quelle est la limite de la taille des

exploitations ? Quelles sont les productions vendues, échangées, consommées ? Quels sont les besoins

des ménages ?

Cette phase permet d’identifier et de caractériser le fonctionnement technico-économique des systèmes

de production mis en œuvre par les agriculteurs, systèmes de production identifiés lors de la phase

historique. Un système de production est défini comme étant la façon de produire utilisée par un

ensemble d’exploitations disposant des mêmes moyens de production (terre, capital, main d’œuvre…)

et mettant en œuvre la même combinaison de systèmes de culture et d’élevage.

Des entretiens technico-économiques approfondis sont menés auprès d’agriculteurs en activité ;

l’échantillonnage est raisonné en fonction de l’étude du paysage et de l’étude historique dans le but

d’avoir une matière suffisante pour modéliser chaque type identifié. Les données recueillies permettent

de comprendre, pour chaque exploitation, les itinéraires techniques des systèmes de culture et

d’élevage, les calendriers de travaux mettant en évidence les périodes de pointes de travail, la

localisation des terres de l’exploitation par rapport au zonage, le niveau d’équipement, les sources de

dépenses et celles d’entrée d’argent. Suite à ce travail, il est possible de modéliser le fonctionnement

technico-économique des systèmes de production identifiés, afin de représenter de façon cohérente et

raisonnée la diversité des exploitations agricoles de la région d’étude. La modélisation permet ainsi de

comprendre quels sont les éléments pouvant conditionner les rapports de productivité et de

performance économique entre les différentes exploitations et ainsi favoriser la survie de certaines et

la disparition d’autres. La modélisation permet en effet de mieux prendre en compte les limites

techniques et/ou économiques des différents systèmes de production, dans l’objectif de trouver des

solutions permettant de lever ces contraintes.

Une cinquantaine d’entretiens technico-économiques ont été menés lors de l’étude de terrain.

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I. Présentation de la région d’étude I.1 Situation géographique de la zone

Figure 1 : Représentation de la Zambie et localisation de la région d’étude (Source : Geographic Department of

Zambia)

Figure 2 : Vue satellitaire de Mpika et Katongo-Kapala (Source : GoogleEarth, réalisation : Thomazo)

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Katongo-Kapala est un village situé à 30 km au Nord de la ville de Mpika et à 600 km au Nord-Est de

Lusaka, capitale du pays, sur un haut plateau à 1400 mètres d’altitude, au pied d’une petite chaine de

reliefs plissés (au nord-est, culminant à 1700 mètres) d’où coulent une série de rivières permanentes

(orientées du nord-est vers le sud-ouest) traversant la région d’étude. Cette dernière est grossièrement

un carré de 20 sur 20 km (soit 400 km2) recouvrant en partie le bassin versant de la Mukungwa River

issue des montagnes du nord-est puis pivotant vers le sud.

A l’Ouest et au Nord-Ouest, la limite de la région est la ligne de partage des eaux avec le bassin de la

Kanchibya River ; un peu en aval de cette ligne de partage des eaux, soit plus vers l’est se trouvent les

sources de nombreuses petites rivières temporaires rejoignant la Mukungwa River après un rapide

parcours sur le haut plateau. Cette ligne de partage est particulièrement peu visible sur le terrain à

cause du peu de relief que l’on trouve sur le plateau, cependant, elle est soulignée par une ligne de

chemin de fer la suivant ainsi que par la route reliant Mpika à Kasama. Plus au sud, la limite de la

région est l’interface avec un grand territoire vide appartenant principalement à l’Etat Zambien et géré

par un lycée agricole situé à quelques kilomètres de là. A l’est et au nord-est, la région prend fin au

niveau des premiers sommets encore peu élevés (1500 mères) et inclut une zone de piedmont plus ou

moins étendue selon les endroits. Sur toute l’étendue de la zone on trouve 6 villages, eux-mêmes

souvent subdivisés en sections réparties sur les terres du village. Il n’existe pas de recensement précis

concernant cette zone, mais la population totale peut être estimée à 8 000 personnes, très

majoritairement paysanne. Cela correspond à une densité démographique de l’ordre de 23 habitants au

kilomètre carré, ce qui est supérieur à la densité du district entier de Mpika qui était de 14,2 (Lwendo,

2010). La présence de deux écoles sur la zone est également à mentionner, elles accueillent

gratuitement tout élève capable de payer son uniforme et ses cahiers de 7 à 15 ans.

I.2 Le climat de la zone : tropical sec d’altitude

Située à quelques degrés au nord du tropique du capricorne, la Zambie est soumise à un climat de

régime tropical. On y trouve une saison des pluies courte - seulement quatre mois et demi -

concentrant plus de 90% des pluies annuelles de novembre à début avril durant laquelle sont mises en

culture la majorité des terres cultivées aussitôt après les premières pluies, suivie d’une saison sèche

longue - de plus de sept mois - comprenant une première partie fraiche et une seconde très chaude,

d’août à octobre. Sur la région d’étude, les précipitations annuelles cumulées excèdent souvent les

1 000 mm mais la variabilité interannuelle est grande et les années avec moins de 800 mm ne sont pas

rares (une tout les 10 ans en moyenne) comme celles dont les précipitations dépassent les 1 200 mm.

L’altitude élevée de ce plateau donne une certaine fraîcheur au climat, notamment en début de saison

sèche, lorsque des vents frais descendent des montagnes du nord-est. Les températures maximales

journalières sont contenues entre 22 et 32°C tout au long de l’année. La conjugaison entre août et

octobre d’une forte chaleur et d’une absence de pluie crée une forte évapotranspiration qui met à rude

épreuve les cultures d’irrigation de cette période. C’est aussi en cette période d’étiage que toutes les

rivières temporaires (i.e. celles coulant de l’ouest vers l’est) sont parfaitement sèches et que les rivières

permanentes (i.e. celles provenant des sommets du nord-est) sont à leur plus bas niveau.

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Figure 3 : Diagramme ombro-thermique du district de Mpika, d’après les données récoltées lors des vingt dernières

années. (Source : Station météorologique de Mpika, Réalisation : Thomazo)

I.3 Quels sont les bouleversements climatiques en cours observables et les hypothèses d’évolution ?

La problématique du changement climatique est difficile à aborder en Zambie car les études sur le

sujet sont encore peu nombreuses et sont souvent faites à l’échelle de la région de l’Afrique Australe

ou de la Zambie entière. Cependant, des hypothèses sérieuses – comme celle du IAPRI Institut -

annoncent des évolutions possibles du climat au niveau national. Deux scénarii sont envisagés ; en

voici un résumé :

Le modèle dit ‘sec’ prévoit :

- Chute des précipitations

- Hausse de la fréquence et de l’intensité des événements violents

- Hausse des températures

Le modèle dit ‘humide’ prévoit :

- Hausse des précipitations

- Hausse des températures

A partir de ces hypothèses, le IAPRI institut, sur la base d’analyses statistiques à grande échelle de

rendements de culture a également émis des hypothèses sur l’évolution des rendements selon que

l’hypothèse du modèle ‘sec’ ou ‘humide’ se vérifie. L’impact serait grand sur les productions de maïs,

d’arachide et d’éleusine qui verraient les rendements fortement diminuer d’après ces analyses.

0

20

40

60

80

100

120

0

50

100

150

200

250

J F M A M J J A S O N D

Rainfalls (mm)

Temperature (°C)

mm °C

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Figure 4 : prévision de modification des rendements de certaines productions zambiennes selon les hypothèses du

modèle 'humide' (rouge) et ‘sec’ (bleu) (Source : IAPRI)

Sans prétendre avoir une analyse fine comme pourrait la produire un météorologue, il a été possible de

se procurer des informations auprès de la station météorologique du district de Mpika sur les 20

dernières années et de chercher à en comprendre les tendances – ou leur absence. Le graphique

présentant les précipitations annuelles depuis 20 ans ne montre pas clairement une évolution à la

hausse ou à la baisse du cumul annuel des pluies, car ce qui domine est une impression d’aléa fort

entre les différentes années. Toutefois, le calcul d’une régression linéaire pour cette courbe donne une

droite de pente positive (pente = 7,4 mm/an) indiquant par là même une tendance légère à la hausse

des précipitations au cours des 20 dernières années. En revanche, le coefficient de régression, très

proche de 0 (R2=0,08), relativise ce résultat en marquant très nettement la supériorité de l’effet de

l’aléa au cours de ces 20 années sur une tendance quelconque à la hausse ou à la baisse. De la même

façon, l’étude de la courbe représentant pour chaque année - depuis 10 ans - la quantité de pluie

tombée le jour le plus pluvieux offre un résultat mitigé : la pente de la droite de régression est bien

positive (pente = 2 mm/an), ce qui accrédite la thèse d’une hausse rapide de l’intensité des événements

violents - dont font parties les fortes pluies - , mais le caractère aléatoire semble encore devoir

l’emporter sur la tendance, le coefficient étant toujours loin de 1 (R2 = 0,5).

Pour ce qui est des températures, les données fournies par la station de météorologie de la ville de

Mpika permettent de reconstituer l’évolution des températures mois par mois depuis 20 ans. De la

même manière que pour les précipitations annuelles, aucune tendance à la hausse ou à la baisse ne

saute aux yeux quant à la température moyenne annuelle car ce qui frappe, c’est la variabilité

interannuelle. La régression linéaire issue de cette courbe est légèrement négative (pente = - 0,013

°C/an) mais le coefficient de corrélation est encore une fois très proche de 0 (R2 = 0,05), ce qui

indique que l’effet de la variabilité interannuelle est beaucoup plus fort que celui de cette tendance à la

baisse de la température moyenne. Une analyse de l’évolution des températures de chacun des mois de

l’année au cours de cette même période donne cependant un résultat intéressant. On découvre que

malgré un aspect très variable de l’évolution des températures de chaque mois au cours des années (les

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R2 sont proches de 0), la pente de régression linéaire est souvent négative – comme celle des

températures moyennes annuelles – sauf pour trois mois. On remarque que les trois mois dont la pente

de régression est positive font partis des mois 4 mois les plus chauds de l’année, c'est-à-dire : juillet,

septembre et octobre. On peut donc émettre l’hypothèse suivant laquelle - d’après ces résultats à

confirmer - la tendance actuelle est au refroidissement des mois froids et au réchauffement des mois

chauds. Par ailleurs, sachant que la température se rafraichit toujours en fin de saison chaude grâce à

l’arrivée des nuages annonçant les premières pluies de la saison, la pente de régression fortement

positive du mois d’octobre peut indiquer en plus d’une hausse des températures aux fil des ans, un

recul de la date d’arrivée de nuages et donc des pluies en début de saison des pluies.

Au regard des ces résultats dégageant certaines tendances au cours des vingt dernières années pour la

ville de Mpika et ses environs – y-compris la région d’étude – mais dont la fiabilité est modeste et

qu’il serait bon de valider par des analyses plus poussées, et des prévisions faites à l’échelle du pays, il

est difficile de retenir un scénario précis d’évolution du climat local. Cependant, le modèle ‘humide’

semble se confirmer avec une hausse lente des précipitations et une augmentation, au moins pour les

mois les plus chauds de l’année, des températures moyennes. De la même manière, une hausse de

l’intensité des événements violents est déjà constatée et pourrait se poursuivre.

Cependant, le constat le plus évident à faire et dont il est facile de croire qu’il a un impact fort sur les

pratiques agricoles est la très grande variabilité du climat : variabilité du volume des précipitations

annuelles (comprises entre 700 et 1250 mm de pluie), de la date d’arrivée des premières pluies, des

températures moyennes annuelles (comprises entre 26,1 et 27,2 °C) et mensuelles. De plus, les

nombreux entretiens auprès des agriculteurs de la région de Katongo-Kapala ont permis de valider ces

constats tout comme d’accréditer l’hypothèse d’une plus grande inquiétude des acteurs de la région

face à la variabilité climatique que face aux changements climatiques en cours ou à venir. Et, sans

exclure l’impact possible de ces changements sur l’agriculture locale, il est apparu de plus en plus

clairement au cours de l’étude que cette incertitude résultant des aléas du climat est un frein au

développement local bien plus important que celui entrainé par les bouleversements climatiques, à ceci

près que cet aléa déjà constaté a de fortes chances de s’accroitre avec l’apparition de ces changements

climatiques.

Enfin, il semble important de dire que l’impact réel d’une évolution du climat telle qu’elle est décrite

par le IAPRI institut tout comme de l’aléa climatique ne peut en être bien compris qu’en ayant une

compréhension fine des pratiques agricoles locales et des systèmes de production dans leur ensemble.

C’est ce que nous avons voulu faire dans la présente étude.

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Figure 5 : Précipitations annuelles pour la ville de Mpika. (Source : Station météorologique de Mpika, réalisation :

Thomazo)

Figure 6 : Volume des précipitations tombées le jour le plus pluvieux de l’année à Mpika. (Source : Station

météorologique de Mpika, réalisation : Thomazo)

600

700

800

900

1000

1100

1200

1300

19

93

/94

19

94

/95

19

95

/96

19

96

/96

19

97

/98

19

98

/99

19

99

/00

20

00

/01

20

01

/02

20

02

/03

20

03

/04

20

04

/05

20

05

/06

20

06

/07

20

07

/08

20

08

/09

20

09

/10

20

10

/11

20

11

/12

20

12

/13

précipitations annuelles

regression

R² = 0,4912

45

50

55

60

65

70

75

80

85

90

2013 2012 2011 2010 2009 2008 2007 2006 2005 2004 2003 2002

mm

Jour le plus pluvieux de l'année

Régression

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Figure 7 : Température moyenne annuelle pour la ville de Mpika depuis vingt ans. (Source : Station météorologique

de Mpika, réalisation : Thomazo)

Figure 8 : Température moyenne de la ville de Mpika pour chaque mois depuis vingt ans (Source : Station

météorologique de Mpika, Réalisation : Thomazo)

R² = 0,059

25,9

26,1

26,3

26,5

26,7

26,9

27,1

27,3 °C

moyenne annuelle

Régression

Février Mars Avril

Mai

Juin Juillet

Août

Septembre

Octobre

Novembre

Décembre

21,5

23,5

25,5

27,5

29,5

31,5

°C

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Régression linéaire

Pente de

régression R

2

Saison des

pluies

Janvier -0,018 0,021

Février -0,008 0,007

Mars -0,061 0,136

Avril -0,022 0,033

Saison

froide

Mai -0,021 0,052

Juin -0,003 0,001

Juillet 0,010 0,006

Saison

chaude

Août -0,011 0,007

Septembre 0,012 0,008

Octobre 0,055 0,171

Saison des

pluies

Novembre -0,011 0,002

Décembre -0,072 0,237

Moyenne annuelle -0,013 0,059

Figure 9 : Tableau récapitulatif des données de régression linéaire pour les températures moyennes mensuelles et

annuelles depuis vingt ans (Source : Station météorologique de Mpika, réalisation : Thomazo)

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I.4 La géomorphologie, l’hydrographie et la végétation découpent les différentes zones agro-écologiques

L’observation des paysages de la région, notamment depuis les sommets surplombant l’ensemble au

nord-est permet de repérer les grands types d’environnement.

Figure 10 : Vue satellitaire de la région d'étude (Source : GoogleEarth, réalisation : Thomazo)

La première impression donnée par les photos satellites données par GoogleEarth et confirmée par la

traversée à pied de la région, est l’abondance d’arbres dans le milieu. Ils sont présents des sommets

jusqu’aux vallées, seuls les bas-fonds n’ont qu’une strate herbacée. Ce type d’environnement forestier

typique d’Afrique Centrale est appelé Miombo. Les essences principales appartiennent aux genres

Brachystegia et Julbernardia, dont les caractéristiques sont proches de celle de la famille des plantes

légumineuses (Fabaceae). Sous cette strate forestière dont la cime atteint 15 à 20 mètres de haut, on

trouve partout une strate herbacée dont la hauteur et la densité est inversement proportionnelle à la

densité des arbres. Ces herbes sont pour la plupart du genre Hyparrhenia, mais on trouve aussi des

fougères et des graminées plus rases. Cependant, comme nous allons le voir en détail, l’environnement

de la région est loin d’être homogène, tout comme son exploitation.

Deux grands ensembles se dégagent rapidement. Le premier, situé au nord-est de la région, est un

ensemble montagneux dont le sous-sol est marqué par la présence de grès et de quartzite en couches

alternées et plissées et hébergeant quelques vallées d’altitudes. Le second, occupant le reste de la

région, est une pénéplaine entaillée de vallées peu encaissées. Le sous-sol y est fait essentiellement

d’altérite que le climat tropical a partiellement transformée en cuirasse latéritique.

Ces deux ensembles essentiellement définis par la géologie et l’hydrographie la modelant, peuvent à

leur tour être divisés en unités agro-écologiques suivant la composition du sol, le type de colonisation

végétale, l’exposition, l’exploitation par l’homme… Ce découpage aboutit donc à un zonage de la

région d’étude et à une première approche des modes d’exploitation du milieu.

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Figure 10 : Coupe géologique de la région d’étude (Source et réalisation : Thomazo)

1. La première zone est l’ensemble constitué des montagnes et des collines de mi-pente qui les

accompagnent, au nord-est. Le sous-sol présenté ci-dessus explique la présence d’arrêtes en haut de

pente où seule une végétation particulière peut se développer. Le sol est peu profond sauf en quelques

endroits peu étendus qui correspondent à de petites dépressions ou à des vallées de dimensions très

réduites (20 mètres de large) où s’accumulent beaucoup de sable et parfois un peu d’argile. Certaines

de ces vallées d’altitudes sont mises en culture selon une méthode d’abattis-brulis (appelé en Bemba,

Chitemene) que nous détaillerons plus en avant. Le reste de la zone est colonisé par une forêt claire de

type Miombo sauf dans les endroits où la roche ne permet pas la pénétration profonde des racines. La

végétation herbacée sous les arbres est elle aussi clairsemée mais parfois de haute taille. De ces

montagnes sont issues les trois rivières principales de la zone (Mukungwa, Mwateshi et Buleya

Rivers) suivant généralement les failles géologiques au sein des plis de la roche, dans des vallées

encaissées (profils en V). Aux abords de ces vallées la végétation se densifie et renferme une faune

d’oiseaux et d’insectes importante.

2. Dans la deuxième zone, celle du piedmont, l’on trouve des pentes beaucoup plus faibles. La

roche mère est certainement de même nature que plus haut dans les montagnes mais elle est

abondamment couverte par une épaisseur de colluvions issue de l’érosion de cette dernière et le sol y

est plus épais (plus d’un mètre), riche en sable et en argile. Un grand nombre de ces pentes est mis en

culture chaque année à la faveur de la saison des pluies. Le système d’abattis-brulis déjà évoqué y est

pratiqué mais l’on trouve aussi des parcelles pérennes issues du défrichement où le maïs, l’arachide et

le haricot sont cultivés en majorité. Les quelques espaces non mis en culture offrent un couvert boisé

clair sous lequel une strate herbacée dense et haute se développe facilement (forêt de type

intermédiaire entre la savane et le Mutengo).

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Plus loin encore des sommets, vers l’ouest, on trouve, comme nous l’avons vu, le haut plateau dont les

reliefs sont sans commune mesure avec ceux évoqués précédemment. Il s’agit d’une vaste étendue

d’aspect plat, de part et d’autre de la ligne Nord-Sud tracée par la vallée de la Buleya puis de la

Mukungwa river. On y trouve un enchainement de basses-collines traversé à l’est par les trois rivières

permanentes et à l’ouest par cinq rivières temporaires, le tout rejoignant la vallée principale d’axe

nord-sud. Ces collines larges, à sommets très plats (culminant en moyenne à vingt mètres au dessus du

lit de la rivière) et à pentes douces sont séparées par des vallées peu encaissées dont les flancs laissent

souvent affleurer la cuirasse sous-jacente à mi-pente. Le sous-sol de ce haut plateau est constitué

essentiellement d’une couche d’altérite issue de la roche-mère au sein de laquelle s’est développée en

de nombreux endroits une cuirasse latéritique dure dont la profondeur varie avec la distance aux

vallées (Alexandre, 2002). En certains endroits peu étendus, elle affleure ce qui ne permet le

développement que d’une végétation très rase et vite sèche. Ailleurs, le sol peut être profond (plus de 2

mètres) et est composé d’un mélange de sable, d’argile et de limon. La composition du sol en argile et

en limon est forte près des rivières où il prend alors une teinte allant du rouge vif au noir sombre alors

que le sable est majoritaire en sommet de colline ; le sol est alors beaucoup plus clair, alternant entre le

jaune pâle et le blanc crème. Malgré une géomorphologie apparemment uniforme, cette dernière zone

comprend deux grands types d’environnements différents.

3. On peut d’abord y distinguer une troisième zone, largement représentée à l’ouest et au nord de

la vallée principale de la Mukungwa, où la composition du sol dominée par le sable, permet le

développement d’une forêt claire de type Mutengo (3 à 4 mètres d’espacement entre les arbres) mais

où la strate herbacée faute de lumière et d’une concentration en nutriments suffisante est peu

développée ; ce type d’environnement est nommé ‘Mutengo’ en Bemba, ce qui signifie littéralement

‘forêt’. Il s’agit en effet du type d’espace le plus densément boisé de la région. Le mode principal

d’exploitation de ce milieu est l’abattis-brulis (Chitemene) déjà cité. Une grande partie de cette forêt

est secondaire (les arbres sont d’anciennes souches ayant produit des repousses) et plus ou moins

dégradée par une exploitation trop importante.

4. Une autre zone, au sud-est, est couverte d’une végétation de savane nommée ‘Icipya’ ce qui

veut dire en Bemba : ‘prairie de hautes herbes parsemée de grands arbres’ ; il s’agit en effet d’un

espace où le sol, comparativement plus riche, permet le développement d’une strate herbacée haute

(1,5 à 2 mètres) et dense où seuls quelques arbres ayant la capacité de résister au feu et de gros

diamètre se développent. Le faible nombre d’arbre peut s’expliquer par l’extraordinaire puissance des

feux de brousse permise par ce tapis d’herbes hautes, brulant ainsi un grand nombre des jeunes

pousses d’arbres qui tenteraient de croître entre les herbes. Les feux de brousse se déclenchent entre

août et septembre, à la fin de la saison sèche, de façon naturelle, accidentelle ou artificielle et touchent

toute la région sauf certains bas-fonds trop humides. On notera que leur intensité, c'est-à-dire la

chaleur qu’ils produisent ainsi que la durée de leur action est très dépendante de la quantité de

biomasse sèche proposée et que celle-ci est essentiellement constituée par le tapis herbacé. Le milieu

est aujourd’hui largement défriché et mis en culture avec des champs pérennes de maïs, haricot et

arachide.

5. Enfin une dernière zone agro-écologique doit être mentionnée, il s’agit des fonds de vallée.

Peu d’arbres y poussent sauf quelques palmiers le long des rivières permanentes. Le sol est

essentiellement couvert par une végétation herbacée hydrophile de hauteur moyenne. Il repose sur une

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couche importante d’alluvion et est composé d’un mélange de sable, d’argile et en certains endroits

humides tout au long de l’année, de tourbe. Cet espace n’est que très peu mis en culture en dehors de

quelques potagers mais sert de lieu de pâture en saison sèche pour les troupeaux bovins et caprins.

On peut ajouter à cette zone de bas-fond, l’interface qu’elle a avec les espaces de savane (Icipya) ou de

forêt (Mutengo) nommés plus haut. En effet, on dénombre une dizaine de canaux d’irrigation à ciel

ouvert mis en place dans ces interfaces, à la faveur de la proximité avec une rivière et permettant

d’irriguer par gravitation l’espace de terre non saturées d’eau entre le canal et le bas-fond. Les parties

de cette interface où l’irrigation est en place sont largement exploitées pour des cultures maraichères

tout au long de l’année.

Figure 11 : Vue satellitaire de la région d’étude et quelques zooms associés (Source : GoogleEarth, réalisation :

Thomazo)

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Figure 12 : Coupe présentant les modes d’exploitation du milieu de part et d’autre d’une rivière permanente

(Réalisation : Thomazo)

Figure 13 : Coupe présentant les modes d’exploitation du milieu de part et d’autre d’une rivière temporaire (Source

et Réalisation : Thomazo)

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Figure 14 : Bloc diagramme de la région d’étude présentant les unités agro-écologiques (Source et réalisation :

Thomazo)

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Figure 15 : Prise de vue de la vallée de la Mukungwa depuis les montagnes (Source et réalisation : Thomazo)

Les difficultés d’accès à l’eau en saison sèche expliquent une localisation des habitations le long des

cours d’eau principaux dans lesquels l’eau est puisée toute l’année pour l’alimentation comme pour les

besoins ménagers. La proximité à la piste principale qui permet l’accès à la ville de Mpika à 30 Km au

sud est aussi un critère dans la localisation de l’habitat. On trouve ainsi les plus grosses localités à

l’intersection de cette piste avec la Mwateshi, la Mukungwa et la Buleya Rivers. La construction

récente d’une demi-douzaine de puits (financés par des ONG étrangères) a permis d’étendre un peu

l’étalement des villages principaux (Katongo-Kapala et Chilikisha) loin des rivières.

On distingue donc au sein de la région d’étude décrite plus haut les zones agro-écologiques suivantes :

- Les zones perchées d’accumulation des résidus de l’érosion (sable et argile) dans les

dépressions et les vallons en V de la zone montagneuse

- Les zones de piedmont couvertes par une forêt ‘intermédiaire’ entre Icipya et Mutengo

- Les collines couvertes de la forêt claire de type Miombo (dite Mutengo)

- Les collines couvertes par la végétation de savane (dite Icipya)

- Les bas-fonds des rivières parcourant le plateau

Les habitants des villages de la région de Katongo-Kapala combinent l’exploitation des ces différentes

zones agro-écologiques. Cette exploitation du milieu est majoritairement agricole et pastorale mais

aussi sylvicole et parfois piscicole.

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Figure 16 : De gauche à droite, de haut en bas : champs de Chitemene dans le Mutengo, bas-fond non mis en culture,

parcelle labourée dans l’Icipya, parcelle de maraichage irriguée (Source : Thomazo)

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I.5 Présentation du projet IDSP

Il semble tout d’abord important de préciser que seule une étude de préfaisabilité du projet a été

réalisée et que sa mise en place est encore soumise aux conclusions et propositions qui sortiront des

prochaines études de faisabilité. Ce qui est présenté ici n’est donc pas nécessairement le projet tel qu’il

sera définitivement.

Le projet a pour but premier affiché de développer l’irrigation en milieu rural chez les

agriculteurs pour permettre un développement économique de ces populations en réduisant leur

pauvreté. Il est prévu que ce projet touche une dizaine de sites différents. Sur le site de Katongo-

Kapala, il est prévu la construction d’une retenue d’eau sur la rivière Mukungwa, en amont du village

afin d’alimenter un système d’irrigation permettant la mise en culture de quelques 1000 ha. Ce barrage

serait financé par un prêt (à taux zéro) accordé au gouvernement zambien par la banque mondiale.

Mais le gouvernement ne souhaitant pas assumer la totalité des frais de ce développement veut y

associer des investisseurs privés qui pourront participer aux frais et bénéficier d’une grande surface

irriguée. Une des particularités du projet est donc cette association public/privé, en théorie bénéfique

aux plus pauvres, c'est-à-dire aux agriculteurs déjà sur place qui n’auraient pas à entretenir le barrage

et ne paieraient l’eau qu’à un prix modique encadré par l’Etat.

Les 1000 ha irrigués seraient divisés entre ces acteurs selon trois ‘Tiers’ de la façon suivante :

-Tier 1 : ensemble de lopins de 2 ha irrigués distribués aux agriculteurs de la région

-Tier 2 : ensemble de lopins de 3 à 5 ha irrigués distribués à des agriculteurs locaux sélectionnés selon

leurs capacité à mettre en culture ces hectares irrigués

-Tier 3 : 500 ha irrigués par pivot gérés par l’investisseur privé. L’idée serait de faire de cette surface

importante une plantation d’une culture de rente (caféier, coton ou autre). Le gérant du domaine aurait

également pour mission de fournir les services nécessaires aux Tier 1 et 2 par prestation de services

ainsi que d’entretenir le barrage et les canalisations et de collecter les redevances.

Cette répartition se ferait après la construction du barrage et nécessiterait forcément le déplacement

d’une partie de la population pour l’installation de l’investisseur et l’attribution des nouveaux lopins.

Très concrètement, et comme le montre la figure ci-dessous tiré du document de préfaisabilité, le

barrage serait construit en amont du village et permettrait l’irrigation de 8 pivots (60 ha par pivot) pour

le Tier 3 et des surfaces restantes pour les Tier 1 et 2.

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Figure 17 : Projet de répartition des Tiers et de localisation du barrage. (Source : document de préfaisabilité du

projet)

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II. Evolution du système agraire de la fin du XIXème

siècle

à nos jours II.1 Avant l’indépendance de 1964 : une région en peuplement

Un peuplement lent par une population bien organisée

Bien qu’une colonisation ancienne du milieu par un groupe ethnique autre (probablement l’ethnie des

Bisas) que l’actuel soit prouvée par les vestiges nombreux et facilement observables de fourneaux de

fonte de métaux, il est difficile d’émettre des hypothèses sur le sort de ces premiers habitants comme

sur leurs occupations, les autres traces de leur passage n’étant pas visibles. Il parait clair cependant que

leurs dernières activités ne soit pas postérieures aux années 1890, époque de l’arrivée des premiers

Bembas dans la région d’étude. Lors que ceux-ci sont arrivés, ils n’ont pas - d’après la mémoire

collective des anciens parlant des grands-parents de leurs propres grands-parents - rencontré âme qui

vive. Le cadre de cette colonisation par les Bembas à la fin du XIXème siècle s’inscrit dans celui plus

large de la descente vers le sud-est de certains groupes ethniques issus des grands royaumes africains

d’Angola et du sud du Congo, pressées par une expansion démographique et fuyant les guerres

intertribales. Dans le même lapse de temps, les armées britanniques prenaient possession du pays par

les armes. Aucun document bibliographique n’a pu être consulté en Zambie pour confirmer ces récits

rapportés par les plus âgés des habitants locaux ; il serait bon toutefois, si le temps et l’occasion se

présentent, de consulter les archives coloniales britanniques qui permettraient certainement de préciser

ces informations.

Ce peuplement du milieu par l’ethnie des Bembas s’est fait selon une manière de faire éprouvée par les

nombreuses générations précédentes. Tout d’abord, une fois qu’un espace pas ou peu peuplé était

repéré, un premier village s’installait au milieu de ce grand espace (environ 5 000 km2) et devenait le

lieu de résidence d’un Chef de secteur. Dans le cas de notre région d’étude, ce village existe encore et

est toujours le lieu d’habitation du Chef (village Chikwanda). Une fois établi, ce Chef organisait le

peuplement des grands espaces entourant le village en règlementant l’installation progressive des

arrivants. Notre région d’étude a été rapidement peuplée car elle ne se trouve qu’à une dizaine de

kilomètre à l’ouest du village du Chef. Les familles les premières installées dans notre région d’étude

ont donc trouvé un environnement vierge de type Miombo et ont reproduit ce que leur ancêtres leur

ont enseigné.

Avant d’enter dans le détail du mode d’exploitation du milieu par ces familles, rappelons le contexte

particulier dans lequel il s’est mis en place. L’ethnie des Bembas suit une organisation patriarcale et

matrilinéaire. Cela signifie que la famille nucléaire est « dirigée » par le père de famille qui peut

d’ailleurs être polygame dans le cas où il est animiste. De même chaque petit village regroupant

quelques familles d’un même lignage a à sa tête un homme. Mais l’héritage passe par les femmes,

qu’il s’agisse du droit à exploiter une parcelle ou bien à commander un village. Ainsi, lorsqu’un

homme se mariait pour la première fois, il s’installait chez sa belle famille et lorsqu’un chef de village

venait à mourir c’est le plus âgé descendant mâle de sa mère qui prenait sa suite. Cette organisation a

comme conséquence d’aboutir à de nombreuses querelles pour le pouvoir des villages. En effet, il

n’est pas rare qu’à la mort du chef, le successeur légitime se soit déjà marié et soit donc déjà installé

dans le village de sa femme. Alors, son retour en tant que chef n’est pas facilement accepté par les

habitants du village qui le voient arriver souvent d’un mauvais œil. Ces successions difficiles étaient

régulièrement à l’origine de l’éclatement du lignage en deux villages distincts. Cependant l’installation

d’un nouveau village se fait toujours avec le consentement du Chef de secteur à qui il faut d’ailleurs

payer un droit d’installation d’un poulet ou deux. Comme nous le verrons, l’exploitation du milieu

utilisait notamment un système de culture basé sur l’abattis-brûlis forçant les populations à des

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déplacements réguliers, qui étaient toujours sous le contrôle du Chef de secteur. De ce fait, il n’existait

aucune tenure fixe, tout espace non cultivé et non habité était à tous et chacun était libre de candidater

auprès du Chef de secteur pour s’y installer ou y cultiver. De plus, étant sous domination britanniques

depuis 1890, les hommes adultes de chaque famille devaient se soumettre à une taxe annuelle de

capitation connue sous le nom de personal levy. Leur production agricole n’étant pas ou très peu

vendue, mais plutôt troquée, il était difficile de trouver les quelques schillings demandé par l’Etat. Une

solution utilisée massivement était l’envoi par le lignage d’un ou deux hommes à la mine de sel non

loin de là ou au chantier de construction de la grande route reliant Dar Es Salaam à Lusaka, passant à 5

kilomètres, pour gagner la somme nécessaire et s’acquitter de la taxe.

Bien que pratiquant tous le même mode d’exploitation du milieu décrit ci-dessous, il semble clair

d’après les témoignages recueillis que des catégories sociales existaient. En effet des différences dans

la capitalisation (nombre de chèvre et de poulet) comme dans la répartition du pouvoir ou des

influences entre les familles étaient à la source d’une échelle sociale assez peu marquée mais

relativement stable à travers les générations du fait de la possibilité pour la famille riche ou puissante

d’employer des ‘pieces workers’ issus des familles du même village contre un faible part de la récolte.

Certains privilèges étaient également couramment accordés à la famille du chef de village, comme le

prélèvement de pièces de viandes dites nobles sur tout animal sauvage chassé sur les terres du village.

Une exploitation de la biomasse de l’agro-écosystème Mutengo

Les familles, en arrivant dans cet espace vierge, ont mit en place un système de culture importé et

adapté à ce type d’environnement. Il s’agit d’une technique particulière d’abattis-brulis en forêt claire

de type Mutengo appelée Chitemene.

En voici une description, basée sur les témoignages recueillis et sur l’analyse de la méthode

contemporaine de pratiquer le Chitemene :

Le Chitemene

Comme nous l’avons vu, le Mutengo typique de cette région est une forêt claire au sol pauvre car

sableux et contenant peu de matière organique en conséquence des feux de brousse annuels qui

empêchent tout processus d’humification des débris végétaux. En conséquence, l’agriculture n’est pas

aisée dans ce milieu car la biomasse disponible est faible et l’espacement entre les arbres de la forêt

laisse place à la pousse d’une strate herbacée non continue mais dense et résistante. D’autre part, une

longue saison sèche (avril à novembre) réduit le temps possible pour la culture. La technique toute

particulière de l’abattis-brûlis pratiquée ici répond à ces différentes contraintes.

Classiquement pour une famille, au cours des premiers mois de saison sèche, une parcelle ronde

d’environ quatre limas (soit un hectare) de forêt est abattue à la hache par les hommes de la famille.

Puis les végétaux ligneux (principalement des branches chargées de leurs feuilles) tombés au sol sont

ramassés par les femmes et concentrés au centre de l’espace abattu en formant un petit cercle d’une

surface d’un à deux limas. Une fois secs, à la fin de la saison sèche, vers octobre, le tas de branches

densément accumulées dans l’espace central est brûlé intégralement, entrainant la combustion totale de

la strate herbacée (ainsi que des graines), la mort des souches d’arbres et le dépôt des cendres sur une

zone de faible surface. Ne reste plus aux agriculteurs qu’à mettre en culture ce terrain assaini

d’adventices et enrichi par la concentration de cendres, à la faveur de l’arrivée de la saison des pluies

courant novembre.

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La première année de culture est une association de manioc, d’éleusine, de courge et parfois de

quelques placettes de maïs. Le manioc reste en place entre 2 et 4 ans alors que les autres cultures sont

récoltées à la fin de la saison des pluies. La deuxième année, sont semés des arachides ou des

voandzou entre les pieds de manioc. Et enfin, le manioc reste seul dans le champ et est récolté

généralement au cours de la troisième année en fonction des besoins. Après l’arrachage du manioc, la

parcelle peut être semée d’haricot ou d’arachide pendant 1 à 3 ans, selon la fertilité du sol et la

compétition de certaines plantes adventices particulièrement rapides à coloniser les espaces cultivés.

Après cette dernière phase, la parcelle est abandonnée et la forêt reprend ses droits. Il est à noter que

jusque dans les années 1980, il était quasiment impératif d’ériger une palissade de protection contre

l’attaque des cultures par les antilopes et les phacochères voire même contre les éléphants. Ce travail

se faisait dans la foulée du premier semis et était restauré tout les ans.

Figure 18 : Etapes de préparation de la parcelle de Chitemene (Source : entretiens historiques, réalisation : Thomazo)

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Figure 19 : Photo d’une parcelle d’environ 1lima de Chitemene en année 1. On aperçoit les souches calcinées et

l’éleusine qui apparait vert clair. (Source : Thomazo)

Une fois la parcelle abandonnée, un recru forestier est possible. Celui-ci doit durer de 15 à 25 ans,

selon la qualité du sol, pour reconstituer le taux de biomasse d’origine et permettre un éventuel nouvel

abattage et une nouvelle mise en culture dans des conditions de fertilité du sol optimales. Cette

méthode d’utilisation du milieu repose donc sur l’abondance de la biomasse disponible et entraine une

‘dépendance’ à celle-ci. Ceci est la principale raison poussant ces populations à se déplacer

régulièrement de quelques kilomètres à la recherche d’un autre coin de forêt permettant de renouveler

le système de culture. Ce mode d’exploitation du milieu, du fait du besoin chaque année de forêt

‘vierge’ et du long temps de régénération entre deux coupes ne permet l’utilisation d’une parcelle

qu’une année sur cinq (4 à 6 ans de culture puis 15 à 25 ans de recru forestier).

Ces villages temporaires étaient donc toujours situés en pleine forêt dite Mutengo, souvent le long

d’une rivière permanente. Les habitants avaient ainsi accès à l’eau tout au long de l’année. Cet

emplacement leur permettait aussi de mettre à profit l’abondance encore forte à cette époque

d’animaux sauvages (buffles, antilopes, singes et parfois éléphants) en pratiquant différentes pratiques

de chasse (piégeage, chasse au filet …). La présence de ces animaux les forçait aussi à protéger leurs

cultures par la construction de clôtures hautes entourant les parcelles et de huttes temporaires, qu’ils

occupaient aux moments critiques - comme avant la récolte - pour effrayer la faune. Le gros travail

d’érection des clôtures se faisait au moment de la germination des cultures, c'est-à-dire entre décembre

et février. La proximité avec une rivière permettait de remplir les quelques trous du calendrier par une

activité de pêche, à la ligne ou à la nasse.

Au système de culture tout particulier du Chitemene était souvent conjugué un autre du type Jardin

potager/verger. De taille très petite (20 à 30 mètres carrés), il était proche des habitations et des

haricots, des courges, des patates douces, du maïs de variété locale et quelques tomates locales étaient

cultivées en association pendant toute la durée de la saison des pluies. Une termitière était utilisée pour

l’emplacement du potager, mettant ainsi à profit la concentration des nutriments accumulés par les

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termites pendant des décennies au même endroit ; une autre pouvait être plantée de bananiers, de

canne à sucre ou de manguiers.

Chaque famille, dès cette époque était propriétaire d’un petit troupeau de chèvres dont ils

consommaient la viande aux grandes cérémonies sacrées ou profanes de l’année, et de quelques

poulets. La vente de ces animaux en ville ou sur le bord de la roue offrait aussi un revenu aux familles

lorsque la reproduction du troupeau était suffisante. La conduite de ces animaux était simple et basée

sur la grande disponibilité en biomasse de l’écosystème : les chèvres étaient en divagation totale toute

l’année. Les poulets étaient simplement un peu alimentés en fin de saison sèche.

Figure 20 : Modélisation de l'intégration au marché des systèmes de production, période avant indépendance

(Source : entretiens historiques, réalisation : Thomazo)

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Figure 21 : Calendrier de travail (1890-1964) (Source : entretiens historiques, réalisation : Thomazo)

II.2 Les débuts de l’Etat indépendant (1964 – 1972)

Outre l’arrivée et l’installation d’un certain nombre de ‘Freedom Fighters’ suite aux trois années

troublées de combat précédant l’indépendance, ces années sont marquées par une forte volonté du

nouvel Etat de moderniser l’agriculture pour ‘nourrir la nation’.

Modernisation et programme de développement de l’agriculture

La poursuite des enquêtes auprès des ‘anciens’ encore en activité ou non à permis de retracer les

grandes lignes des changements survenus suite à l’indépendance.

Une politique publique volontariste de développement des espaces ruraux a permis la construction

rapide de plusieurs écoles primaires mais aussi une amélioration des pistes d’accès aux principaux

espaces peuplés de la région. Soucieux d’augmenter la production agricole du pays, dans chaque

village ont été choisis des familles dites ‘modèles’ pour être soutenues et commencer la rénovation de

l’agriculture qui paraissait nécessaire aux promoteurs de ce programme financé par l’Etat. Il a été

proposé à ces familles de suivre le ‘programme de développement de l’agriculture rurale’ décrit ci-

dessous.

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Figure 22 : Description du 'Programme de développement de l'agriculture rurale' (Source : entretiens historiques,

réalisation : Thomazo)

L’idée était de former une ‘élite paysanne’ rapidement autofinancée qui pourrait être le fer de lance

d’une modernisation plus générale. En effet, bien que le nombre des familles concernées fut faible

dans la région, ce programme eut semble-t-il, un impact profond sur l’ensemble de l’agriculture et les

modes de vie de la région. Les familles sélectionnées étaient les plus riches ou les familles dirigeantes

(chefs de villages), elles avaient donc un fort rôle d’exemplarité et certaines de leurs nouvelles

pratiques ont rapidement été imitées et se sont peu à peu diffusées auprès des autres agriculteurs.

Figure 23: Calendrier de travail de la monoculture pure de maïs (Source : entretiens historiques, réalisation :

Thomazo)

Immigration et début du maraichage

L’arrivée de nouveaux venus poussés soit par la fuite des combats ou tout simplement à la recherche

de terres pour s’installer va aussi provoquer quelques changements. Alors que certains s’installent et

pratiquent les méthodes traditionnelles de l’agriculture locale (Chitemene, petit élevage, petit

potager/verger…) sur les espaces encore vierges et libres de la partie de la région couverte par la forêt

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Mutengo, d’autres arrivent avec des méthodes encore inédites dans cette partie du territoire zambien. Il

s’agit de la culture sous irrigation par gravité. Son développement s’est fait lentement car fait avec des

moyens très limités, mais - comme nous le verrons - il va peu à peu s’imposer comme un modèle

essentiel du système agraire de la région.

Si les moyens des populations ayant la volonté de mettre ce système de culture en place étaient limités

(aucun outillage motorisé, aucune possibilité de modélisation préalable …) la région présentaient

quelques atouts indispensables pour son développement dans ces conditions. Tout d’abord, l’accès à

l’eau toute l’année est permis par la présence de trois rivières permanentes dans la région. De plus, la

configuration hydrographique et géomorphologique de la région offre des possibilités multiples de

faire des prises d’eau en altitude suffisamment élevée par rapport aux parcelles à irriguer. Enfin, la

proximité d’espaces couvert par la végétation Icipya au niveau de la pénéplaine avec la bordure des

rivières permanentes a permis de trouver les espaces peu peuplés où s’installer et cultiver les premières

parcelles irriguées. Par ailleurs, la construction de pistes de bonne qualité a aussi eu son importance en

rendant plus facile l’accès aux marchés que représente Mpika et plus généralement la grande route

Lusaka-Dar Es Salaam vers lesquels ont rapidement été transportés et vendus des surplus de

production.

Très concrètement, la construction du premier canal à ciel ouvert a débuté en 1959 et s’est achevé plus

de 15 ans après. Il fait 5 km de long et offre aujourd’hui la possibilité théorique d’irriguer plus de 30

hectares. La construction s’est faite à la pelle et à la pioche et la progression s’est faite au fur et à

mesure des installations de familles le long de son tracé, chaque famille se chargeant de prolonger le

canal jusqu’à ses parcelles.

Figure 24 : Prise d’eau (g.) du canal d'irrigation et son prolongement (d.) sur la rive sud de la Mukugwa River

(Source : Thomazo)

Ces canaux rendant l’accès à l’eau possible toute l’année, de nouveaux calendriers de culture se sont

développés, d’abord en se calquant sur celui des petits potagers existant déjà et en les mixant parfois

avec la culture du maïs en association avec du haricot et des courges. Ces nouveaux venus sont aussi

arrivés avec quelques espèces potagères ou variétés non utilisées jusque là. Ils ont notamment introduit

des variétés de tomates dont la peau épaisse permet le transport et donc la vente à une distance de

quelques kilomètres.

Cette idée toute nouvelle va au fil des années faire de plus en plus d’émules en fonction bien sur de

l’extension de ce premier canal et de ceux qui seront creusés par la suite.

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Figure 25 : Localisation sur le bloc diagramme des zones de peuplement et des nouveaux aménagements (Source :

entretiens historiques, réalisation : Thomazo)

II.3 Première crise de la politique de soutien (1972 – 1985)

Crise et nouveau programme de développement

Ce soutien massif aux agriculteurs les mieux lotis se révèle vite être un échec. Rapidement le

gouvernement se trouve incapable de payer le maïs produit par les agriculteurs et de leur fournir les

engrais suffisants. Les causes invoquées par les témoins de cette époque pour expliquer cet échec de la

politique de soutien sont à la fois la corruption montante des fonctionnaires chargés de la mise en

œuvre de la politique et d’une faillite dans de nombreux secteurs du nouvel Etat qui ne peut plus

importer l’engrais depuis l’étranger et acheter tout le maïs produit de plus en plus massivement dans le

pays. D’autre part, le matériel agricole loué se dégrade et n’est pas remplacé alors qu’aucun

agriculteur n’est capable d’investir pour équiper sa propre exploitation. En plus de cela, des dégâts

plus graves s’annoncent déjà, il s’agit de ceux causé par la monoculture pure de maïs. En 1972 les

parcelles suivant l’itinéraire imposé par le ‘paquet technique’ sont cultivé de cette façon depuis 7 ans

au maximum et souvent moins, mais au fil de ces années des phénomènes liés à cette pratique

apparaissent : l’utilisation d’engrais entraine une acidification des sols (marqué par une invasion de

fougères) ; l’absence de couverture du sol une partie de l’année, la culture pure, l’absence de rotation

culturales et les brûlis successives des résidus de cultures entrainent une invasion d’adventices

particulièrement résistantes (Sporobolus pyramidalis notamment) et un appauvrissement progressif du

sol en minéraux et en matière organique.

Face à cet échec économique - et non en réponse à la problématique agronomique évoquée ci-dessus -

le gouvernement au pouvoir décide de mettre en place un autre projet de modernisation des zones

rurales qu’il juge plus efficace et surtout moins cher mais aussi, malheureusement, autrement plus

brutal : il s’agit du ‘village regrouping’ ou villagisation. L’idée est d’obliger les populations à se

regrouper en villages ‘géants’, proches des pistes principales, des cliniques et des écoles. Le

gouvernement cherche à forcer les familles d’agriculteurs à abandonner le système de production du

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Chitemene qu’il juge dépassé et à l’origine d’un processus de déforestation du pays. Cette politique

nationale a eu des effets plus ou moins important selon les régions, mais l’impact dans le district de

Mpika a été fort ; la région étudiée est passée ainsi en moins de 10 ans d’un habitat dispersé en petit

villages de 10 à 20 familles nucléaires se déplaçant tout les dix à vingt ans à d’importants villages

sédentaires de plus de 80 familles.

Conséquences sur la propriété et exode massif

Ces décisions vont avoir un impact considérable et rapide sur l’évolution de l’agriculture. La fin du

déplacement des villages fixe de façon pérenne la propriété des terres. Jusque là, il n’existait pas de

propriété fixe, et sous réserve de l’accord du Chef de secteur, chacun pouvait cultiver la parcelle qu’il

avait abattue tant qu’il ne s’approchait pas trop d’un autre village. A partir de ce moment, avec

l’éloignement aux champs de Chitemene que produit inévitablement la villagisation, il devient vital

pour chaque famille de délimiter un terrain le plus grand possible pour s’assurer la possibilité de

poursuivre l’abattis-brulis les années à venir sans être forcé de partir trop loin. Il va donc y avoir une

attribution de l’ensemble des terres proches des villages entre les différentes familles. La répartition

des terres, entièrement sous le contrôle du Chef de secteur et des chefs de village, fut plus ou moins

égalitaire en fonction des influences et de la situation sociale des familles. Et certains agriculteurs, du

fait de l’éloignement à leurs parcelles, se voient même forcés de bâtir de petits abris de fortune dans

leurs parcelles où il est possible de passer quelques nuits et ainsi éviter de faire l’aller-retour tous les

jours. Par ailleurs, la production de maïs chute rapidement et les familles qui s’étaient déjà pleinement

lancé dans cette culture se trouvent face à un mur (pas d’engrais, pas d’argent pour payer des

travailleurs et pas de débouchés).

Devant ces difficultés rencontrées par les deux systèmes de culture majoritaires (Chitemene et

monoculture de maïs subventionnée), un grand nombre de jeunes décide de quitter la région pour la

‘Coppert belt’ où l’exploitation des mines propose à cette époque de nombreux emplois.

Modification du système de production et du calendrier de travail

Les difficultés rencontrées favorisent le développement, jusque là encore timide, des canaux

d’irrigation qui permettent de mettre en culture des terres proches de l’habitat et où un travail intensif

tout au long de l’année est possible. Les familles déjà impliquées dans les systèmes de culture irriguée

poursuivent et accélèrent la construction du premier canal tandis que d’autres familles, attirées par

cette nouvelle méthode d’exploitation du milieu s’organisent pour creuser de nouveaux canaux sur

l’autre rive de la Mukungwa River et le long d’autres rivières permanentes. Les familles concernées

décident alors souvent de conjuguer un petit jardin potager (1/4 de lima) en plus du Chitemene et de

quelques mètres carrés de maïs, d’autant plus que la construction de clôtures contre la faune se fait de

moins en moins nécessaire avec la concentration de la population, et libère ainsi du temps pour

cultiver le maïs. En l’absence d’engrais et de semences subventionnés par le gouvernement, il n’était

pas possible pour la très grande majorité des habitants de s’en fournir, les parcelles étaient donc

semées de variétés traditionnelles de maïs moins chères et moins exigeantes en nutriments, souvent

associées à des plants de haricot ou de vouandzou (ou encore d’arachide). Cette association repose sur

les propriétés des ces plantes légumineuses, capables de fixer l’azote atmosphérique dans le sol, celui-

ci peut alors être utilisé par les plants de maïs semés dans la même parcelle. Par ailleurs les parcelles

cultivées de cette manière étaient parfois d’anciennes parcelles de Chisebe – cette technique de

défriche-brûlis toute récente dans la région étaient un moyen d’ouvrir le milieu tel que cela est décrit

ci-dessous – sur lesquelles un simple brûlis des chaumes étaient suffisant pour préparer le sol. Une

alternative au brûlis était le billonnage du sol à la houe qui présente de nombreux avantages malgré le

travail qu’il demande. En effet, comme le présente la figure ci-dessous, il permet à la fois d’éviter le

brûlis, ce qui favorise la présence de matière organique dans le sol mais il permet aussi de concentrer

la biomasse (chaumes et adventices) à l’emplacement même ou seront semées les nouvelles rangées de

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maïs. L’alternance annuelle de l’emplacement des billons (le nouveau billon se trouve toujours entre

deux anciens billons) donne aussi la possibilité d’exploiter au maximum la fertilité de la parcelle sans

perdre un espace.

Les familles n’ayant pas de possibilité d’accès à une surface irriguée sont contraintes de maintenir

quelques champs de Chitemene dans le Mutengo, loin des villages et de commencer à défricher selon

la technique du Chisebe le petit espace qui leur a été attribué au moment de la villagisation pour y

cultiver des associations de variétés locales de maïs avec des haricots ou des arachides.

Figure 26 : Billonnage des parcelles de maïs (Réalisation : Thomazo)

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Figure 27 : Billons (Source : Thomazo)

La villagisation pose également un autre problème, celui de l’accès à une biomasse abondante pour les

troupeaux familiaux de chèvres et celui de l’intrusion de ces mêmes chèvres dans les parcelles

cultivées maintenant qu’elles sont proches des habitations. Une nouvelle conduite est alors établie à

l’échelle des villages qui impose de maintenir les chèvres au piquet pendant toute la saison des pluies

qui est aussi la saison de culture. Durant cette saison les chèvres doivent donc être sortie le matin et

attachée une à une dans la savane, déplacée à la mi-journée et rentrée le soir. Cela entraine des

dépenses pour l’achat de cordes mais aussi pour la construction d’étables bien résistantes pour la nuit.

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Figure 28 : Calendrier de travail s’imposant peu à peu entre 1972 et 1992 (Source : entretiens historiques, réalisation :

Thomazo)

II.4 Une politique de soutien à large impact (1985 – 1992)

Nouvelle politique agricole et promotion du ‘paquet technique’

C’est dans ce climat un peu morose d’exode et de diminution des revenus que le gouvernement lance à

nouveau une politique agricole audacieuse. Sans réel souci de l’impact agronomique que cela peut

avoir sur les sols et les systèmes de production en place, il met en place un réseau de coopératives

(deux s’installent dans la région d’étude) visant la distribution d’engrais et de semences de maïs

améliorées subventionnés en début de saison de culture à tout agriculteur intéressé de le but

d’augmenter massivement la production de maïs du pays. Encore une fois, l’Etat garanti l’achat de la

production de maïs. L’impact est donc beaucoup plus large qu’en 1964 car toutes les familles sont

concernées par ce système de soutien, mais bien sûr la quantité d’engrais et de semences n’est pas

illimitée et chaque agriculteur n’est autorisé à percevoir que de quoi cultiver 2 limas de maïs, ce qui ne

peut en aucun cas lui suffire pour nourrir sa famille toute l’année. On assiste donc à un léger

déplacement du curseur entre la production de maïs qui augmente un peu et la culture selon la méthode

du Chitemene qui diminue un peu plus. Mais la culture de maïs est aussi avantagée par la proximité

des champs avec les habitations ; il est donc plus facile d’y consacrer son travail et de nouvelles

associations voient le jour (maïs + arachide + courge ou encore tomate + maïs) ainsi que des rotations

entre ces mêmes cultures. Cela donne un nouveau coup d’accélération au morcellement en terres

individuelles ou familiales des terres proches des villages car nombreux sont ceux qui veulent mettre

en place cette méthode plus intensive en travail (notamment pendant la saison des pluies), mais

possible non loin de leur habitation.

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Généralisation du Chisebe pour ouvrir le milieu

Cette période est aussi celle de la généralisation du nouveau mode d’exploitation du milieu, appelée

‘Chisebe’ (conférez encart ci-dessous). Elle est avantageuse à cette période car elle requiert moins de

place que le Chitemene et permet de défricher des terres ensuite utilisées pour la culture du maïs.

Le Chisebe peut être pratiqué dans tous types de forêt rencontré dans la zone d’étude mais il n’apporte

pas les mêmes avantages que le Chitemene. Il s’agit ici d’une technique de défriche-brûlis d’un milieu

faiblement boisé en vue d’en faire une parcelle pérenne ou non. Elle est majoritairement utilisée là où

le Chitemene n’est pas possible ou ne l’est plus (après surexploitation du milieu forestier par exemple,

c'est-à-dire dans un Mutengo dégradé), car il demande plus de travail que cette dernière technique. En

effet, nous avons vu que le Chitemene permet de se débarrasser de la strate herbacée par le brûlis de

l’amas de branche. Ici, pas question d’amas de branche recouvrant toute la surface de la future

parcelle, seuls les arbres présents dans la future parcelle sont abattus (pas de concentration de

biomasse comme pour le Chitemene). Leurs branches sont simplement accumulées en petits tas au

pied des troncs. La biomasse végétale accumulée est donc moindre et cela a deux conséquences : le

feu est moins intense et ne peut pas bruler toute la strate herbacée et la production de cendre

fertilisante est réduite. Avant le brulis, reste donc à faucher la strate herbacée non recouverte de

branches à l’aide d’une petite faux (appelée ‘slasher’) puis labourer à la houe toute cette surface (qui

représente de ¾ à 9/10 de la surface, selon l’abondance des arbres). La succession de culture est

sensiblement la même que dans la technique du Chitemene (Manioc + éleusine + courge / Manioc +

arachide / Manioc), mais les rendements sont moindre, spécialement pour l’éleusine (il est parfois nul,

par manque des nutriments nécessaires). Par la suite, la concurrence des adventices est aussi plus vive

et arrive plus vite, les désherbages doivent donc être fait à des rythmes plus rapides.

Toutefois cette technique, bien que plus laborieuse et moins efficace dans la pousse de l’éleusine et du

manioc a ses avantages : elle permet d’ouvrir la forêt là ou le Chitemene est impossible et notamment

dans les zones de savane (Icipya) dont le sol est ‘lourd’ et riche en nutriment et est très favorable à la

culture du maïs. Le champ, une fois ouvert et après la récolte du manioc (au bout de 2 à 4 ans), peut

donc être mis à profit pour des cultures de maïs, souvent en rotation avec le haricot et l’arachide,

intercalées chaque saison par des labours à la houe. Elle est aussi un moyen de poursuivre

l’exploitation de forêts dégradées de type Mutengo où un recru trop court ne permet pas de pratiquer le

Chitemene.

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Figure 29 : Récapitulation des étapes de préparation du champ de Chisebe (Réalistion : Thomazo)

Figure 30 : Modélisation de l'intégration au marché des systèmes de production, période 1985-1992 (Source :

entretiens historiques, réalisation : Thomazo)

Comparaison du Chitemene et du Chisebe

Si comme on l’a vu l’apparition et la généralisation de la technique du Chisebe répond aux nouvelles

conditions qu’affrontent les agriculteurs (éloignements des champs de Chitemene, diminution du

temps de recru forestier, peuplement de la savane Icipya …) il n’en reste pas moins qu’elle est moins

économe en travail pendant la saison des pluies (désherbages supplémentaires) et que ses rendements

sont moins élevés que ceux du Chitemene. Ceci est particulièrement flagrant lorsque le Chisebe est

pratiqué dans la savane Icipya, les rendements sont alors divisés par 2 à 5 selon la production. Cela

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s’explique par le faible apport en nutriment du brûlis dans la technique du Chisebe, relativement à la

forte accumulation en nutriment dans le cas du Chitemene.

Figure 31 : Tableau récapitulatif des rendements possibles en fonction du milieu et de son mode d’exploitation

(Source : enquêtes de terrain, Réalisation : Thomazo)

L’on peut alors se demander pourquoi la transition du Chitemene vers le Chisebe s’est faite à cette

époque sans trop de difficultés. Cela ne s’explique pas tant que l’on ne regarde pas ce qui suit la

récolte du manioc. Ci-dessous sont présentées les potentialités de rendement en maïs de ces deux types

de parcelles après la récolte du manioc, en fonction de l’utilisation d’engrais et/ou de semences

améliorées ou locales.

Figure 32 : Tableau présentant les rendements en maïs de différentes parcelles (Source : entretiens techniques,

réalisation : Thomazo)

Il apparait clairement que la culture du maïs est plus favorable dans le milieu Icipya après une

ouverture du milieu par la pratique du Chisebe. Cela pour deux raisons ; la première est qu’en trois ans

de culture, le stock en nutriments de la parcelle de Chitemene s’est rapidement réduit (prélèvements

par les cultures elles-mêmes, lessivage par la pluie …), la seconde est que le sol de la savane Icipya

est, comme on l’a dit plus haut, plus ‘lourd’ et plus fertile en dehors de toute opération de brûlis.

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Le contexte politique aidant (utilisation d’engrais et de semences améliorées subventionnées), la même

parcelle cultivée après le Chisebe peut produire 25 sacs/lima de maïs alors que si elle est cultivée après

le Chitemene, elle ne peut en produire au maximum que 15.

II.5 Ajustement structurel, le système agraire entre en crise (1992 – 2001)

Crise économique zambienne et intervention du FMI : impact sur les prix

agricoles

Dès la fin des années 1980, la situation économique de la Zambie se détériore. La dette extérieure du

pays s’alourdi, les ressources minières diminuent et les émeutes urbaines que cela provoque poussent

le gouvernement en place depuis 1964 à la démission et à organiser pour la première fois depuis

l’indépendance des élections ouvertes. L’opposition (Movement for Multiparty Democracy) bat le

parti du président Kenneth Kaunda (United National Independence Party). Le nouveau gouvernement

se voit proposer et accepte un plan d’ajustement structurel par le FMI pour relever le pays qui traverse

une mauvaise passe. Il s’en suivra dix années de libéralisation des frontières et d’arrêt de toute

subvention directe à la production agricole. Cela entraine immédiatement une chute des cours du maïs

et l’apparition jusque là inconnu de la volatilité des prix sur le marché intérieur. Le même effet se fait

sentir sur le prix des engrais qui, n’étant plus subventionné, se trouve indexé au prix du pétrole

mondial.

La consultation des prix payés aux producteurs pour la province dans laquelle se trouve notre région

d’étude n’est possible qu’à partir de l’année 1994 (source : FAOSTAT). Il n’est donc pas possible de

valider de cette façon le récit fait par les témoins d’une chute brutale des cours de maïs, mais l’étude

de l’évolution des prix relatifs entre trois grandes production de l’époque (à savoir le manioc,

l’éleusine et le maïs) est tout à fait intéressante et explique en grande partie l’évolution du système

agraire que nous allons décrire. Par ailleurs, ces changements majeurs sont aussi à l’origine d’un exode

non négligeable de population rurale vers les villes. La localité de Mpika est alors en pleine expansion

et le marché qu’elle représente à partir de ce moment pèsera lourd dans l’évolution du système agraire.

Figure 33 : Evolution des prix aux producteurs dans le Northern Province (Kazama Town) pour le manioc, l'éleusine

et le maïs entre 1994 et 2002 en Kwacha courant. (Source : FAOSTAT, réalisation : Thomazo)

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Figure 34 : Evolution des prix aux producteurs dans le Northern Province (Kazama Town) pour le manioc, l'éleusine

et le maïs entre 1994 et 2002 en Kwacha constant de 2011. (Source : FAOSTAT, réalisation : Thomazo)

Les deux graphiques ci-dessus nous montrent d’une part la variabilité du prix du maïs qui si l’on en

croit les témoins de l’époque est un phénomène sans précédent depuis 1985. D’autre part, on observe

une évolution sensiblement similaire entre les prix du manioc et ceux du maïs. Cela s’explique par le

fait que l’un est substituable à l’autre dans le régime alimentaire des populations de cette partie de la

Zambie. La crise de revenu des familles qu’a provoqué la chute des prix du maïs a donc été accentuée

par celle des prix du manioc. En revanche, les prix de l’éleusine ont explosé au cours de ces années là.

Cela s’explique par différents facteur. Le premier tient au fait que la consommation de l’éleusine est

liée à celle du manioc (cf encart ‘Le régime alimentaire de la région d’étude’ ci-dessous). Le second

est la forte diminution de la pratique du Chitemene dans la région d’étude qui comme on l’a vu est le

moyen le plus efficace pour produire de l’éleusine en grande quantité.

Le régime alimentaire de la région d’étude

Le plat consommé par les familles du milieu rural en Zambie est le même le matin, à midi et le soir. Il

s’agit du N’shima. Il est composé d’une pate cuite de farine de maïs pure ou de farine de manioc

agrémentée de farine d’éleusine, auquel s’ajoute une viande, un poisson ou des légumes en sauce selon

la saison et le revenu de la famille. Sous l’influence de la consommation des zones urbaines et de la

politique agricole de l’Etat telle qu’on l’a vu depuis 1964 mettant en avant la production de maïs, le

régime alimentaire s’est vu de plus en plus riche en maïs. Avant l’indépendance, seul un peu de maïs

frais issus du petit potager est consommé en avril-mai. Puis l’explosion de la production de maïs dans

la région d’étude conjuguée à la difficulté certaines années de le vendre (cf II.3) a introduit la

consommation de farine de maïs en lieu et place de celle du manioc mélangée à l’éleusine. Cette

pratique s’est généralisée par le prestige attribué au maïs face au manioc qui a la réputation d’être le

plat du pauvre. Enfin, le manioc pouvant, à la différence du maïs, être conservé en place dans le

champ jusqu’à la consommation, son utilisation est réservée à la période de soudure entre la fin de la

réserve de maïs et la prochaine récolte.

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Alors que la farine de maïs est utilisée pure pour cuisiner le N’shima, celle de manioc doit

nécessairement être mélangée à un peu de farine d’éleusine, autrement la pâte ne prends pas. Il faut

entre 1/5 et 1/3 d’éleusine dans la préparation.

L’arrêt de tout soutien à la production de maïs et la chute des cours a eu un impact immédiat et

dévastateur sur l’ensemble des agriculteurs dont les revenus monétaires sont jusqu’en 1992

essentiellement basés sur la vente du maïs. Les familles se trouvent face à deux défis : celui de

remplacer au moins en partie le maïs dans le régime alimentaire et celui de trouver une autre source de

revenu monétaire.

Pour les familles ayant choisi de ne pas fuir vers la ville (où la vie n’est pas forcement plus facile),

différentes stratégies ont été suivies pour répondre à ces défis.

Retour au Chitemene

Dans ce contexte de crise, beaucoup de familles n’hésitent pas à braver loi de villagisation - qui est

loin maintenant - et à coloniser à nouveau l’ensemble de l’espace de la région. C’est ainsi que de

nombreux petits hameaux se fondent ça et là dans le Mutengo regroupant les familles d’un même

lignage comme c’était le cas avant 1964. Mais cette fois-ci, plus question de déplacements réguliers,

les familles qui s’installent le font selon les critères de l’époque, c'est-à-dire en s’appropriant en accord

avec le chef de village une partie de la savane ou de la forêt. Cette dispersion des familles va permettre

un accès à nouveau aisé à des espaces de forêt de type Mutengo où la pratique du Chitemene est

possible et donne de bons résultats. Cependant un nombre assez peu élevé de familles choisit cette

option d’une part parce que l’espace disponible est vite répartie entre les premières familles installées

et d’autre part parce que la culture du Chitemene produisant manioc et éleusine a mauvaise réputation

et est souvent considéré comme une agriculture dépassée. Malgré la chute du cours du manioc, cette

stratégie s’est vite montrée gagnante grâce à la forte hausse des prix de l’éleusine au cours de ces

années.

Figure 35 : Exemple de calendrier alimentaire chez les habitants de la région d'étude (Source : entretiens,

Réalisation Thomazo)

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Figure 36 : Modélisation de l'intégration au marché du système de production basé sur le Chitemene, période 1992-

2001 (Source : entretiens, réalisation : Thomazo)

Développement de la production maraichère

Fortes d’une expérience maintenant ancienne, les familles ayant accès à une surface irriguée

choisissent souvent d’y consacrer plus de travail, la culture du maïs n’étant plus rémunératrice. La

surface est souvent encore très faible (environ 1/2 lima soit 1/8 d’hectare ou à peine plus), mais le

travail s’y fait de façon plus intensive. Deux à trois cycles de culture sont pratiqués par an, les

associations se multiplient, par exemple entre un maïs pour l’autoconsommation et une légumineuse

pour la vente. Le fort développement urbain qui a lieu à ce moment là représente un débouché

important pour les cultures maraichères. Mais les 30 km qui séparent la région d’étude à la ville de

Mpika ne sont pas faciles à franchir pour y acheminer la production. Un réseau de transport modeste

se développe sur un système de ‘taxi brousse’ ce qui permet de ne pas limiter la production à une

capacité de transport. Face au succès rapide de cette agriculture, de plus en plus de familles se pressent

autour des canaux d’irrigation ou en creusent de nouveau aux abords des rivières permanentes selon la

même technique. Face à l’affluence, des comités de gestion sont créés pour gérer l’accès à l’eau et

intervenir en cas de conflit.

Cet accroissement rapide des cultures maraichères se fait surtout en vue de la vente sur les marchés

urbains qui sont friands de tomates, de choux chinois, de feuilles de colza, d’aubergines… Mais la

production de ces légumes sur des surfaces concentrées atour des canaux, sur deux à trois cycles par

an entraine inévitablement des problèmes phytosanitaires et de fertilité des sols. De plus l’exigence en

qualité des marchés urbains n’est pas la même que celle des villages. En réponse à cela, les maraichers

se voient obligés d’introduire de nouvelles variétés, plus exigeantes en nutriments et plus sensibles aux

maladies et donc d’acheter engrais et produits phytosanitaires en ville. Ainsi, l’intégration de ce

système de production au marché se fait rapidement mais rend les agriculteurs de plus en plus

nécessiteux d’une trésorerie initiale élevée nécessaire au lancement d’un cycle de culture.

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Figure 37 : Modélisation de l'intégration au marché du système de production basé sur la culture maraichère, période

1992-2001 (Source : entretiens, réalisation : Thomazo)

En parallèle à l’extension des canaux, certains agriculteurs n’ayant pas accès à des terrains irrigables

de cette façon défrichent des zones de bas-fond dans lesquelles l’humidité résiduelle (ces terres sont

inondées en saison des pluies) permet de mettre en place un à deux cycles de cultures maraichères

pendant la saison sèche. Ces familles ne pouvant se reposer uniquement sur ce système de culture,

maintiennent aussi quelques parcelles de Chisebe, ce qui leur fournit le manioc et le maïs suffisant

pour se nourrir. L’achat des engrais et des produits phytosanitaires se fait souvent – au moins au début

– par la décapitalisation du troupeau caprin.

La production charbonnière, un revenu supplémentaire pour les familles

en difficulté

Nous l’avons vu, deux unités agro-écologiques se trouvent rapidement saturées de population : la forêt

Mutengo qui permet la pratique du Chitemene et les zones de savane arborée où l’irrigation est

possible. Il s’agit donc d’un renversement complet car jusqu’en 1992, les terres privilégiées étaient

celles où le maïs pousse le mieux, c'est-à-dire l’Icipya. Les familles n’ayant accès qu’à ce type de

milieu n’ont d’autres solutions que de partir vers la ville ou de survivre modestement avec les

rendements peu élevés du Chisebe en manioc et en éleusine. La décapitalisation rapide du troupeau

caprin ne permet pas longtemps de maintenir une grande surface de maïs pur (nécessitant l’achat de

semences améliorées et d’engrais). Ces familles se tournent donc vers les espaces du milieu peu

exploités jusque là. Il s’agit des vallées perchées dans les zones montagneuses et des espaces très

sableux du Mutengo. Elles y cultivent de petites parcelles de Chitemene où la concentration de

biomasse se fait sur 1/10 de la parcelle abattue. La production charbonnière, interdite par la loi, y est

aussi possible et devient pour ces familles une source efficace de revenu. Face à l’augmentation de la

population urbaine, la demande en charbon de bois ne cesse d’augmenter. Cela conduit au

déplacement des zones de production vers des régions de plus en plus éloignées de Mpika.

L’augmentation du prix du charbon induit par l’augmentation de la demande permet de compenser les

coûts de transports importants entre la région de Katongo-Kapala et Mpika. L’activité charbonnière,

pouvant être pratiquée tout au long de l’année, prend alors de l’importance constituant une source de

revenu monétaire d’autant plus indispensable à la survie des familles cultivant des parcelles dans des

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écosystèmes à faible potentiel. C’est bien la combinaison de ces deux activités qui permet leur

alimentation.

Figure 38 : Modélisation de l'intégration au marché des familles les plus pauvres, période 1992-2001 (Source :

entretiens, réalisation : Thomazo)

Développement de l’élevage bovin

Un autre épiphénomène apparait : quelques familles tentent l’aventure jusque là inconnue dans la

région, de l’élevage bovin. Un petit nombre de familles étaient déjà en possession d’une vache ou

deux en capital mais ils ne s’agissaient jamais de l’activité principale. Ces familles (qui sont moins de

15 dans la région), souvent influencées par le voyage d’un des leurs plus au sud de la Zambie, là où

l’élevage bovin est très développé, s’installent là où leur nouvelle production ne dérangera personne,

loin des villages dans les coins les plus sableux de la forêt mais toujours à proximité des rivières. Elles

mettent en place un système de production basé sur un pastoralisme mettant à profit la strate herbacée

discontinue du Mutengo en saison des pluies et l’abondante biomasse herbacée présente dans les bas-

fonds, en saison sèche, quand ceux-ci sont accessibles. Le troupeau moyen est d’une quinzaine de têtes

pâturant sur 80 ha de forêt et 6 ha de bas-fond. Là encore, la demande de viande vient de la ville qui

‘envoie’ ses bouchers acheter et abattre sur place les bêtes en les payant d’un prix rémunérateur. A ce

système d’élevage est combiné un ou plusieurs systèmes de culture. Il s’agit souvent de parcelles de

Chitemene que l’environnement de Mutengo permet mais aussi parfois d’un potager de saison sèche

au niveau d’un bas-fond inondable.

II.6 De 2001 à nos jours : des agriculteurs en quête de nouvelles stratégies

L’accroissement démographique se poursuit : la population a doublé en trente ans dans la région (de

4000 en 1980 à 8000 habitants en 2010) et atteint une densité de 23 hab./km2

(la densité globale en

Zambie est de 18 hab/km

2). Le morcellement des terres à chaque héritage réduit les surfaces

auxquelles ont accès les agriculteurs.

Retour du soutien à la production de maïs et au contrôle des prix

La fin des mesures mises en place lors de l’ajustement structurel permet dès 2001 un retour progressif

voulu par le gouvernement à un soutien public au secteur agricole. Cela se fait par la mise en place du

FISP (Farmer Input Support Program) qui est chargé d’organiser la distribution, via des coopératives

locales, d’engrais vendus à moitié prix aux agriculteurs selon un ‘paquet technique’ comprenant les

semences améliorées de maïs et les engrais nécessaires pour mettre en culture 2 limas de maïs par

famille. Tandis que la FRA (Food Reserve Agency) se charge d’acheter tout le maïs produit à un prix

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fixé par le parlement zambien. (Ce dernier est actuellement de 65kw/50kg, soit de 1300kw/tonnes de

maïs grain.). Cette politique appliquée à l’échelle de la Zambie a rempli ses objectifs de parvenir à

l’autosuffisance. La Zambie a exporté en 2013 plus de 3000 milliers de tonnes de maïs.

Figure 39 : Production annuelle de maïs en Zambie (Source : MAL)

Figure 40 : Evolution de l'importation et de l'exportation de maïs en zambie (Source : MAL)

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Figure 41 : Evolution des prix aux producteurs dans le Northern Province (Kazama Town) pour le manioc, l'éleusine

et le maïs entre 1994 et 2012 en Kwacha courant. (Source : FAOSTAT, réalisation : Thomazo)

Figure 42: Evolution des prix aux producteurs dans le Northern Province (Kazama Town) pour le manioc, l'éleusine

et le maïs entre 1994 et 2012 en Kwacha constant de 2011. (Source : FAOSTAT, réalisation : Thomazo)

La figure 41 nous montre l’évolution des prix payés aux producteurs pour le manioc, l’éleusine et le

maïs en Kwacha courant. La période 2001-2002 apparait comme une période de progression tranquille

des prix du manioc et du maïs, mais cela n’est qu’une apparence car la forte inflation que subit

l’économie zambienne ne permet pas à cette tendance de peser dans les revenus des agriculteurs, tel

que le montre la figure 42. On y voit au contraire une stagnation des prix du maïs en Kwacha constant.

L’étude de l’évolution des prix relatifs des trois productions représentés sur ce graphique nous apprend

deux choses :

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- les prix de la période 2002-2012 sont beaucoup plus faibles que pour la période précédente

(1994-2002) pour les trois productions mais ils sont aussi beaucoup plus stables d’une année

sur l’autre

- l’effondrement des prix de l’éleusine est très important et ramène la céréale à un prix très

légèrement supérieur à celui du maïs et du manioc.

Par ailleurs, il est regrettable que des données similaires ne soient pas disponibles pour l’ensemble des

productions trouvées dans la région d’étude, et notamment celles concernant les productions

potagères. Cependant, les enquêtes de terrain ont permis d’obtenir les prix de vente actuels de ces

productions maraichères mais aussi de confirmer par de nombreux témoins que la tendance des dix

années passées est à une forte hausse surtout si on la compare à l’évolution des prix du maïs et du

manioc.

Ces évolutions et ces changements tant sur le plan politique, économique que démographique vont

avoir de forts impacts sur le système agraire en place.

Appauvrissement des familles propriétaires d’un seul type d’écosystème

(Mutengo ou Icipya)

Sous la pression forte d’une démographie en rapide expansion, les propriétés fixées depuis les années

1970-80 se trouvent divisées à chaque génération entre les 2 à 5 enfants. Les familles pour qui cela est

le plus difficile sont celles n’ayant accès qu’à un seul type d’écosystème. Par exemple, les familles

propriétaires d’un terrain dans le milieu Mutengo ne peuvent y pratiquer le Chitemene de manière

durable que si la surface est suffisamment grande pour permettre un recru forestier capable de

renouveler la fertilité. En dehors d’une très faible minorité de familles - possédant l’espace suffisant

pour permettre un long recru forestier (cf SP I) - ces familles, en raccourcissant le temps de recru

forestier, sont contraintes d’agrandir la taille des parcelles abattues tout en réduisant l’espace où la

biomasse est concentrée puis brûlée afin de ne pas voir les rendements baisser. Mais la solution est

souvent de basculer vers la pratique du Chisebe qui demande moins d’effort d’abattage et permet de

cultiver une plus grande surface annuelle. L’activité charbonnière et le travail comme ‘piece worker’

chez des voisins plus aisés vient souvent conforter le revenu familial (cf SP III). Chez certaines

familles, le troupeau caprin (cf SP IV) hérité des parents permet aussi des entrées financières souvent

utilisées pour envoyer un enfant en classe.

La diminution de la production diminue d’autant les revenus des familles que le stockage devient

difficile (manque de trésorerie) ce qui empêche les familles de profiter des prix hauts en vendant la

part de surplus au moment de la récolte.

La même difficulté se présente pour les familles ne possédant des terres que dans l’écosystème Icipya.

Les divisions entre les héritiers poussent certains à partir dans l’espoir de trouver une meilleure

situation en ville. Ceux qui restent se trouvent dans des situations très inégales : les mieux lotis ont une

propriété vaste leur permettant d’exploiter au maximum de leur force de travail familiale (soit 21 limas

pour 3 actifs) tout en bénéficiant à plein des aides de l’Etat qui réduisent le coût des engrais de moitié

pour 2 limas de maïs (cf SP VIII). Tandis que les plus démunis n’ont la propriété que de 3 à 4 limas

pour 2 à 3 actifs sans avoir la trésorerie pour bénéficier des subventions étatiques (cf SP VII). Ils

deviennent souvent par nécessité des doubles actifs en travaillant une grande partie de l’année comme

‘piece worker’ ou en produisant du charbon de bois.

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Figure 43 : Evolution intra-annuelle des prix de vente des cultures suivantes : de gauche à droite, éleusine, manioc,

maïs (Source : entretiens techniques, Réalisation : Thomazo)

L’innovation permet la diversification des systèmes

Les dix dernières années ont vu l’apparition de nouveaux systèmes d’élevage que certains agriculteurs

- souvent des jeunes n’ayant que peu de ressources – ont développé en réponse aux difficultés

mentionnées ci-dessus. Les deux principaux sont l’élevage de poulets ‘broilers’ en batterie, et le

développement d’une petite pisciculture le long des canaux d’irrigation.

Nous l’avons vu, l’élevage avicole est présent dans la région depuis longtemps déjà sous forme d’un

petit cheptel de 5 à 20 animaux par famille, peu nourrit si ce n’est au moment de l’étiage fourrager en

fin de saison sèche. Cet élevage est pratiqué tant pour les œufs que pour la chair. Mais le nouveau type

d’élevage dont il est question ici est tout différent. Il repose sur l’achat en ville de poussins de 3 jours

destinés à être engraissé pendant 6 à 7 semaines dans un atelier de petite taille se trouvant à proximité

de la maison de l’agriculteur. L’engraissage se fait avec des aliments achetés en ville et dont la

composition est adaptée aux étapes de croissance des animaux. Le principal débouché de cette

production est le marché urbain de Mpika. Si ce système d’élevage hors-sol ne demande pas de grands

savoirs agricoles, il exige un investissement dans un bâtiment et du matériel mais aussi une trésorerie

permettant l’achat des poussins et de leur nourriture. Toutefois, il a l’avantage considérable de

n’exiger que très peu d’espace et ne demande qu’un petit temps de travail quotidien. Par ailleurs, le

cycle de production étant court, il peut être reproduit 3 à 4 fois dans l’année. Ce système est pratiqué

par une vingtaine de familles de la région (cf SP XI) qui le conjuguent souvent avec des systèmes de

culture mettant à profit l’écosystème Icipya et quand elle est possible l’irrigation d’une petite surface.

La pisciculture, présente aujourd’hui chez moins de cinq familles dans la région (cf SP XI), a été

importée par une ONG américaine de développement agricole aux environs de l’an 2000. Elle est

pratiquée dans de petits bassins creusés à la houe le long des canaux d’irrigation et où des alevins

capturés dans les rivières de la région sont alimentés quotidiennement avec tantôt des légumes feuilles

(Choux chinois, feuilles de colza …) poussant dans le potager familial, tantôt à l’aide d’aliments

achetés dans le commerce. Le ramassage effectué en vidant les bassins peut se faire deux fois par an et

ne nécessite aucun matériel spécial. Une fois séchés au soleil, les poissons sont vendus sur les places

des villages, ils sont très appréciés par la population locale qui ne pratique guère plus la pêche comme

autrefois. Ce système est lui aussi très économe en espace mais donne également un certain

investissement de départ (creusement des bassins) et exige la proximité avec un canal dans lequel l’eau

ne vient jamais à manquer, même en période d’étiage sévère, en fin de saison sèche.

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Le maraichage : source de revenus pour beaucoup de familles

A l’instar du premier canal creusé entre 1960 et 1970, pas moins de 10 canaux ont vu le jour dans les

années suivantes. D’autres se construisent encore aujourd’hui. Ce développement impressionnant du

réseau s’est fait sans l’aide des pouvoirs publics et à été géré par les populations locales qui ont su

trouver les arrangements nécessaires pour contenter les différents acteurs tout en répondant à une forte

demande du marché urbain tout proche en produits maraichers. Cette croissance du réseau a permis à

de nombreuses familles de cultiver une petite surface irriguée. Ainsi, quelque fut l’écosystème dans

lequel se trouvaient les familles, ces dernières ont toujours mis à profit les possibilités – quand elles

existaient - de développer un maraichage, même modeste. Bien sûr, les familles fondatrices des

premiers canaux sont celles ayant les plus grandes surfaces d’Icipya irrigables (1 à 3 hectares) et se

concentrent aujourd’hui uniquement sur l’exploitation de cet espace à haut potentiel. Certaines y ont

installé des plantations d’arbres fruitiers (bananier, orangers, citronniers …) ou de canne à sucre.

D’autres ont favorisé le maraichage, employant nécessairement un grand nombre de saisonniers issus

des familles les plus pauvres de la région (cf SP XII). Les besoins en produits phytosanitaires et en

engrais étant facilement compensés par un faible coût de la main d’œuvre et un marché urbain très

demandeur. D’autres familles, suite aux divisions des terres par héritages successifs ou en raison d’une

installation plus tardive à proximité d’un canal, n’ont accès qu’à une plus petite surface irrigable (de 1

à 3 limas). Elles conjuguent alors dans leur calendrier de travail l’exploitation de ce petit potager avec

l’exploitation de l’autre écosystème qui est à leur disposition, qu’il s’agisse du Mutengo (cf SP II), du

Mutengo dégradé (cf SP V et SP VI) ou de l’Icipya (cf SP IX et SP X). Nombreuses aussi sont celles

n’ayant pas accès à un canal d’irrigation mais qui ont eu l’opportunité de défricher un bas-fond non

loin de leur habitation pour y cultiver, une partie de l’année, un ou deux cycles de plantes potagères.

Développement du gardiennage

Face au rétrécissement de la surface des propriétés de nombreuses familles et à l’augmentation du

nombre de jardins potagers cultivés tout au long de l’année, il devient difficile dans certains lieux de

maintenir sur pied le petit capital que représente le troupeau caprin sans créer des problèmes de

voisinage à cause des dégât causé par les animaux. C’est pourquoi, au cours des dernières années, les

familles affrontant ce problème ont pu vendre d’un coup leur troupeau caprin et acheter le cas échéant

une ou deux têtes de bovin pour les placer en gardiennage chez des éleveurs (cf SP XV) déjà installés

plus loin des villages qui ont vu d’un bon œil ce moyen d’augmenter leur troupeau sans augmenter

beaucoup le temps de travail. En effet, le contrat passé entre la famille d’éleveur assurant le

gardiennage et la famille propriétaire d’une tête de bétail est le suivant :

- partage des frais en proportion du nombre de têtes (vétérinaire, matériel …)

- partage du temps de travail pour la garde et le temps de réparation du padock proportionnellement au

nombre de têtes

- le premier veau revient à l’éleveur, les suivants au propriétaire.

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Figure 44 : Chronologie récapitulative de l’évolution de l’agriculture locale depuis l’arrivée des Bembas à nos jours.

(Source : Enquêtes historiques, Réalisation : Thomazo)

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Figure 45 : Evolution des systèmes de production au cours de l'histoire (1890-1985) (Source : entretiens historiques, réalisation :

Thomazo)

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Figure 46 : Evolution des systèmes de production au cours de l'histoire (1985-2014) (Source : entretiens historiques, réalisation :

Thomazo)

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III. Des systèmes de culture mettant à profit les ressources

des écosystèmes et des agriculteurs III.1 Méthodologie suivie

Il est intéressant de considérer les différents systèmes de culture identifiés dans la zone

afin de comprendre les itinéraires techniques mis en place par les agriculteurs et d’évaluer

leurs performances économiques. Sans oublier qu’un tel travail reste artificiel dans la mesure

où chaque système de culture ne peut être mis en œuvre que par la mobilisation des moyens

de l’agriculteur et des ressources à sa disposition dans le cadre de son système de production,

cela peut nous permettre de mieux appréhender la place des systèmes de culture mis en place

au sein des systèmes de production, les choix des agriculteurs et les contraintes auxquelles ils

doivent faire face.

Pour chaque système de culture, nous avons établi un calendrier de travail. Il rend

compte de l’itinéraire technique suivi par les agriculteurs et du temps consacré à chaque étape

culturale. Ce temps est indiqué en H.Jour c'est-à-dire en quantité de travail que peut fournir

un Homme en un Jour : nous considérons qu’un H.Jour correspond à 7 heures de travail par

un agriculteur Zambien en bonnes conditions physiques.

Afin de comparer les systèmes de culture entre eux en terme de création de richesse par unité

de surface (productivité de la terre), nous avons calculé la valeur ajoutée brute par unité de

surface (le plus souvent VAB/lima).

Figure 47 : Les différentes étapes du calcul de la valeur ajoutée brute

Il est également intéressant de comparer la productivité du travail des différents

systèmes de culture : il s’agit de ramener la valeur ajoutée brute des systèmes de culture au

temps de travail total nécessaire pour leur mise en place, on obtient ainsi la valeur ajoutée

brute par H.Jour. Cela permet de mesurer la création de richesse obtenue pour chaque journée

de travail consacrée à un système de culture donné.

Nos calculs on été effectués à l’aide d’un système de prix des productions agricoles qui prend en

compte le fait que la majorité des agriculteurs consomment une partie de leur propre production. De

plus, la variation intra-annuelle du prix des productions a également été prise en compte. Cela permet

de mieux rendre compte de l’intérêt du stockage pour les agriculteurs en ayant les capacités.

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Figure 48 : Système de prix utilisé dans les calculs économiques des systèmes de culture pour les principales

productions (Source : entretiens technico-économiques, Réalisation : Thomazo)

III.2 Le système de culture traditionnel d’exploitation du Mutengo : le Chitemene

Le mode opératoire de ce système de culture ayant été détaillé dans la partie II.1, nous proposons au

lecteur de s’y référer pour en comprendre les grands principes. Nous nous attarderons ici sur les

ressources que requiert ce système de culture (surface, temps de travail, intrants …) et sur ses

performances techniques.

Pour être pratiqué de façon durable, le temps de recru forestier entre deux cycles de culture du

Chitemene doit être de 15 à 20 ans. Ainsi, pour une parcelle de Chitemene de 1 lima mise en place

tous les ans, la surface nécessaire est en fait de 20 à 25 hectares. En effet, il faut abattre un hectare

pour cultiver un lima selon la méthode du Chitemene. De plus, une parcelle peut être cultivée 4 à 5

ans, ce qui signifie qu’une famille qui ouvre chaque année une parcelle d’un lima, cultive en fait 4 à 5

limas en même temps. Une parcelle est cultivée 4 ou 5 ans puis, abandonnée, son recru dure 15 à 20

ans, ce qui fait 20 à 25 ans pour un cycle de culture. De nos jours, aucune famille pratiquant ce

système de culture ne dispose d’une surface aussi grande. Deux possibilités se présentent alors, la

première est de n’abattre une nouvelle parcelle que certaines années, par exemple un an sur deux, en

conjuguant cela avec un autre système de culture moins exigeant en espace. La seconde est de réduire

le temps de recru. Cette solution est rarement celle choisie par les agriculteurs car les années passant,

la surface abattue doit être agrandie pour que la biomasse à brûler soit suffisamment conséquente pour

couvrir un lima, ce qui augmente considérablement le temps de travail consacré à la concentration de

cette biomasse.

Nous proposons ci-dessous l’itinéraire technique du cycle de culture réalisé dans les conditions

normales, notamment en termes de recru forestier et de main d’œuvre familiale disponible.

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Figure 49 : Itinéraire technique pour une parcelle de Chitemene d'un lima cultivée 4 ans de suite (Source : entretiens

technico-économiques, réalisation : Thomazo)

Le calendrier de travail ci-dessous, issu de l’itinéraire technique, montre la grosse quantité de travail

que demande la préparation de la parcelle lors de l’an 1. En revanche, les associations qui suivent

(manioc + éleusine + citrouille et manioc + arachide) ont l’avantage considérable de n’exiger aucune

opération entre le semis et la récolte. En effet, la première année, le brûlis détruit toutes les graines et

racines des adventices qui n’ont que peu de chance de repousser. La deuxième année et la troisième

année, la haute taille du manioc et l’ombre qu’il donne au sol ralenti leur apparition. Ce n’est qu’au

cours de la quatrième année que l’agriculteur se trouve confronté à l’impact des adventices sur les

cultures. Mais là aussi, celui-ci est limité par l’enfouissement des premières repousses lors du

billonnage précédant le semis des haricots, après deux mois de saison des pluies. Un désherbage est

toutefois nécessaire pendant cette quatrième année. Selon le rendement et l’invasion de la parcelle lors

de cette quatrième année, l’agriculteur peut l’ensemencer une nouvelle fois en arachide ou haricot sur

billon selon le même itinéraire que pour la quatrième année.

Pour ce qui est des consommations intermédiaires, elles sont faibles, il ne s’agit en effet que du prix

des semences et du coût de leur stockage d’une année sur l’autre. Le manioc étant bouturé d’une année

sur l’autre, il n’entraine aucune dépense. Les semences d’éleusine, d’arachide et de haricot sont

simplement conservées d’un an à l’autre dans un coin de la maison.

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Figure 50 : Calendrier de travail pour une parcelle de Chitemene d'un lima cultivée 4 ans de suite (Source : entretiens

technico-économiques, réalisation : Thomazo)

Figure 51 : Performances techniques du Chitemene (Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo)

Figure 52 : Récolte des épis d'éleusine et séchage au soleil (Source : Thomazo)

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III.3 Le Chisebe : ouverture du milieu Icipya et exploitation du Mutengo dégradé

Comme pour le Chitemene, le mode opératoire du Chisebe ayant été détaillé dans la partie II.4, nous

proposons au lecteur de s’y référer pour en comprendre les grands principes. Nous nous attarderons ici

sur les ressources que requiert ce système de culture (surface, temps de travail, intrants …) et sur ses

performances techniques.

L’apparition de cette technique culturale est relativement récente comme nous l’avons vu, et a permis

de répondre au besoin d’ouvrir le milieu de savane arborée appelée Icipya où la technique

traditionnelle du Chitemene n’est pas envisageable. En dehors du fait qu’il est pratiqué sur un espace

agro-écologique différent, le Chisebe, même s’il permet la culture des mêmes espèces que le

Chitemene, présente d’autres différences notables avec ce dernier. La première est le devenir de la

parcelle ouverte. En effet, après l’arrachage du manioc, la fertilité de la parcelle est suffisante pour y

poursuivre l’agriculture pendant plusieurs années, en y cultivant du maïs par exemple en rotation ou en

association avec des légumineuses (haricot, arachide), tel que nous le verrons dans les parties

suivantes. La seconde est le fait que l’ouverture de la parcelle de Chisebe ne se fait pas à la faveur du

brûlis, il n’est donc pas nécessaire d’attendre un long temps de recru forestier pour relancer un cycle

de Chisebe sur l’emplacement d’une ancienne parcelle. Une friche de 4 à 10 ans seulement est souvent

mise en place, selon l’espace dont dispose les familles. Ainsi, si une famille ouvre un lima de Chisebe

par an, entre 8 et 13 limas lui sont nécessaire pour le faire de manière durable (sans prendre en compte

une éventuelle mise en culture des parcelles après la quatrième année).

Toutefois, au fil des ans, cette technique de mise en culture s’est aussi développée dans les espaces ou

le Chitemene devenait impossible faute d’un recru suffisant, c'est-à-dire dans un écosystème de type

Mutengo dégradé. Bien que suivant le même itinéraire que dans l’Icipya, le Chisebe ne produit pas les

mêmes performances techniques, comme cela est présenté ci-dessous.

Si le temps d’abattage est ici moins conséquent que pour le Chitemene, un temps de labour long est

imposé par la faiblesse du brûlis qui ne suffit pas à détruire la strate herbacée (Hyparrhénia

amthistiroides). De plus, des temps de désherbage doivent être consacrés à la parcelle dès la deuxième

année car le brûlis n’a pu détruire les racines et les graines des adventices qui repoussent alors

rapidement. Enfin, la quantité de biomasse brûlée étant faible, la fertilisation par le brûlis est aussi

faible, ce qui a un impact direct sur les rendements en manioc, éleusine et arachide.

Les consommations intermédiaires de ce système de culture sont similaires à celle du Chitemene, les

densités de semis étant les mêmes.

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Figure 53 : Itinéraire technique pour une parcelle de Chisebe d'un lima cultivée 4 ans de suite (Source : entretiens

technico-économiques, réalisation : Thomazo)

Figure 54 : Calendrier de travail pour une parcelle de Chitemene d'un lima cultivée 4 ans de suite (Source : entretiens

technico-économiques, réalisation : Thomazo)

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Figure 55 : Performances techniques du Chisebe (Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo)

III.4 Comparaison du Chitemene et du Chisebe

Les performances techniques - présentées ci-dessus - de ces deux systèmes nous montrent de meilleurs

rendements pour le Chitemene que pour le Chisebe, ce qui s’explique par la différence de quantité de

biomasse brulée lors du brûlis et par une moindre compétition avec les adventices dans le cas du

Chitemene.

Figure 56 : Comparaison des valeurs ajoutées des systèmes de culture Chitemene et Chisebe (Source : entretiens

technico-économiques, réalisation : Thomazo)

Ce graphique nous montre bien les avantages et les inconvénients de chacun de ces systèmes de

culture. La richesse créée par jour de travail est plus grande pour le Chitemene, mais la richesse créée

par lima est aussi beaucoup plus faible, à cause du long temps de recru nécessaire à la reproduction du

système dans le temps. Ceci peut expliquer en partie l’attachement de familles à cette forme

traditionnelle d’exploitation du milieu face à l’alternative du Chisebe, lorsqu’elles en ont la possibilité.

Par ailleurs, les différences entre les performances du Chisebe selon qu’il est pratiqué dans l’Icipya ou

dans le Mutengo dégradé s’expliquent par le fait que ce système de production n’est pas bien adapté au

Mutengo. En effet, il conjugue alors les inconvénients des deux systèmes décrit, à savoir : un long

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temps d’abattage (les arbres sont de petites tailles dans le Mutengo dégradé, mais ils sont bien

présents) qui ne réduit pas de beaucoup le temps de labour et une moindre fertilisation par la petite

quantité de biomasse brûlée.

III.5 Le système de culture proposé par le ‘paquet technique’ du gouvernement : culture pure de maïs et fertilisation chimique

Les différentes phases de soutien de l’Etat zambien à l’agriculture ont imposé un ‘paquet

technique’ dont le contenu concret est actuellement le suivant :

Figure 57 : Description du 'paquet technique' proposé par le gouvernement (Source : entretiens technico-

économiques, réalisation : Thomazo)

Suivant la capacité financière des agriculteurs, ils peuvent se fournir auprès de coopératives locales en

engrais subventionnés suivant un petit format qui permet de cultiver un lima de maïs, ou un grand

format qui permet d’en cultiver deux. Ils ont ainsi accès à des sacs d’engrais à moitié prix et à des

semences améliorées ‘offertes’ avec le paquet. Ceux qui le peuvent et le veulent se fournissent en sacs

d’engrais supplémentaires dans le commerce à plein tarif (200 Kw/sac d’engrais). A certaines périodes

de l’histoire récente, les conseils techniques et le paquet proposé incitaient fortement à pratiquer la

monoculture pure de maïs (cf II.2). Face à la dégradation rapide de la qualité des sols ayant subi ces

pratiques, ce système a rapidement diminué et est aujourd’hui disparu. Il a été remplacé par des

rotations entre maïs pur et plantes légumineuses, du moins chez les agriculteurs ayant accès au paquet

technique. Ci-dessous est proposé un itinéraire technique pour une parcelle d’un lima d’Icipya suivant

la rotation haricot / maïs / arachide / maïs. Le temps de friche après le dernier maïs dans ce type de

système de production est rarement supérieur à 7 ans mais souvent de plus de 3 ans. La surface

nécessaire pour mettre en place ce système est donc de 7 à 11 limas. Toutefois, nous tenons à préciser

qu’une grande souplesse est observée par les agriculteurs quand à l’itinéraire proposé ici. Il n’est pas

rare par exemple qu’une même parcelle soit semée de maïs 3 années consécutives si l’agriculteur

l’estime particulièrement fertile. De même, une parcelle peut-être laissée en friche plus longtemps si

ses rendements ne satisfont pas le propriétaire (et s’il a suffisamment d’espace par ailleurs).

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Figure 58 : Itinéraire technique pour une parcelle d’Icipya en rotation h/m/a/m. (L’an 2 et l’an 4 suivant le même

itinéraire ont été regroupés par souci de simplification) (Source : entretiens technico-économiques, réalisation :

Thomazo)

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Figure 59 : Calendrier de travail pour la rotation h/m/a/m sur Icipya (4 limas) (Source : entretiens technico-

économiques, réalisation : Thomazo)

L’itinéraire technique de ce système de culture est exigent en travail, mais pas aux mêmes périodes de

l’année que dans les systèmes de culture présentés précédemment. Chaque année il faut refaire des

billons (par décalage des anciens billons), ce qui mobilise toute la famille pendant plusieurs jours, puis

les phases de désherbage imposées par la compétition forte d’adventices adaptées au milieu sont

également gourmandes en temps de travail. Devant être rapidement effectuées sous peine de pénaliser

la croissance des cultures, ces désherbages sont souvent faits dans le cadre de groupe de travaux dans

lesquels les membres travaillent chez les uns puis chez les autres, tout comme les labours. Les

applications d’engrais au pied des plants de maïs n’est pas une tâche longue mais là encore le respect

du timing est déterminant pour la réussite de la croissance du maïs. Une première application (NPK)

se fait quand les plants ont trois feuilles, une seconde (Urée) quand ils en ont 5. Janvier et février sont

donc les deux mois cruciaux dans ce cycle cultural, ils sont aussi les deux moins les plus chargés en

travail. Enfin, la période de récolte est déterminée par l’arrêt des pluies qui permet le séchage des

gousses de haricot et des épis de maïs. Les gousses d’arachide sont ramassées rapidement après l’arrêt

des pluies, par crainte d’une destruction de la récolte par les taupes qui sont parfois un vrai fléau.

Les consommations intermédiaires de ce système de culture sont beaucoup plus élevées que pour les

systèmes précédents et sont en grande partie dues au coût des engrais et des semences de maïs.

A la fin du cycle de culture du maïs, le gouvernement, via la FRA, rachète tout les sacs de maïs

(fiftybags) à un prix fixé par le parlement (de 65 Kw/fiftybag en 2014). Pour vendre son maïs, un

agriculteur doit donc le mettre en sacs achetés auprès de la FRA et le transporter à Mpika. Ces

opérations ont évidement un coût (prix du sac vide et du transport motorisé) qui sera pris en compte

dans l’analyse économique des systèmes de production en fonction des moyens utilisés par chaque

type de producteur.

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Figure 60 : Labour d'une parcelle par un groupe de travail (Source : Thomazo)

Figure 61 : Performances techniques de la rotation h/m/a/m (Source : entretiens technico-économiques, réalisation :

Thomazo)

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Figure 62 : Tri des haricots par les femmes après le battage (Source : Thomazo)

III.6 La culture du maïs en association avec une légumineuse

Malgré le large impact du plan de soutien du gouvernement à la culture de maïs, certaines familles n’y

ont pas accès par manque de trésorerie. Ces familles qui sont parmi les plus pauvres sont souvent

celles qui n’ont accès qu’à une très petite surface d’Icipya non irrigable où ni le Chitemene, ni le

Chisebe ne sont possible. Devant ces contraintes très fortes, elles cherchent à mettre en place des

cultures intensives en travail et n’utilisant que peu d’intrants. Il s’agit souvent d’associations entre le

maïs et une légumineuse. Parfois s’y ajoute aussi des plants de citrouille tout les cinq mètres ou des

plants de patate douce à l’extrémité des billons. Face au manque de place, le temps de friche est

souvent absent ou bien très court (1 an). Les difficultés d’accès aux engrais subventionnés

n’impliquent pas forcement l’absence totale de leur utilisation, les agriculteurs peuvent se fournir en

petite quantité d’engrais dans le commerce, par exemple après avoir travaillé quelques jours chez un

agriculteur plus aisé comme ‘piece worker’. Ci-dessous est présenté l’itinéraire technique pour lima

cultivé en association maïs + haricot, avec une utilisation moyenne d’engrais, à savoir un sac de 50 Kg

pour l’ensemble de la parcelle (soit deux fois moins que ce qui est préconisé par les conseillers

techniques). Toutefois, notons bien que ces agriculteurs ne pratiquent pas la même association tous les

ans sur la même parcelle. Ils mettent en place des rotations qui font alterner cette association m+h ou

une autre du même genre (maïs + arachide) avec une monoculture d’arachide par exemple ou de

haricot, telles qu’elles ont été décrites plus haut (cf III.5) ou encore de patate douce sur billon.

L’agriculteur pratiquant ce système de culture minimise ainsi le montant des consommations

intermédiaires tout en bénéficiant de la complémentarité de l’association m+h et m+a. En effet, le

haricot et l’arachide, plantes légumineuses ont la capacité de fixer l’azote atmosphérique dans le sol

lors de leur croissance (en association ou en culture pure) qui peut être ensuite prélevé par le maïs lors

de sa croissance qui trouve ainsi une part non négligeable des nutriments dont il a besoin.

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Figure 63 : Itinéraire technique pour une parcelle d’un lima d’Icipya en association m+h. (Source : entretiens

technico-économiques, réalisation : Thomazo)

Figure 64 : Calendrier de travail pour l’association m+h sur un lima (Source : entretiens technico-économiques,

réalisation : Thomazo)

On aperçoit bien sur le calendrier de mise en culture d’une parcelle d’association que ce système de

production exige une grande quantité de travail tout au long de la saison des pluies, à la fois pour les

phases de semis, de désherbage, d’application des engrais et de récolte. Toutes ces opérations sont en

effet complexifiées par rapport aux mêmes opérations qui auraient lieu en culture pure. Par exemple, le

désherbage doit être plus précis car la densité de plant est plus grande, la récolte des haricots doit se

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faire au fur et à mesure de la maturation, plusieurs passages sont nécessaires pour ne rien perdre de la

récolte …

Figure 65 : Performances techniques de l’association m+h (Source : entretiens technico-économiques, réalisation :

Thomazo)

III.7 Comparaison des systèmes de culture pure de maïs et de culture du maïs en association

L’objet de cette partie est de comparer les performances techniques et économiques des deux systèmes

de culture incluant la production de maïs. Les données utilisées sont celles des itinéraires techniques

suivant :

- la culture pure de maïs en rotation : a/m/h/m

- l’association du maïs suivant la rotation : a/m+h/h/m+a

Figure 66 : Comparaison des valeurs ajoutées des systèmes de culture de production de maïs (Source : entretiens

technico-économiques, réalisation : Thomazo)

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Figure 67 : Comparaison des valeurs ajoutées et des consommations intermédiaires (CI) des systèmes de culture de

production de maïs (Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo)

Si les performances de rendement sont à l’avantage de la rotation a/m/h/m, ces deux graphiques nous

montrent comment les agriculteurs mettant en place des associations m+h ou m+a parviennent à

contourner les contraintes qui sont les leurs (manque d’espace, pas d’accès aux subventions). Ainsi on

voit que la culture en association permet de dégager une VAB/lima beaucoup plus grande que la

simple rotation avec maïs pur, même si la VAB/H.Jour est inférieure car le temps de travail exigé est

plus grand. De plus, la faible consommation d’intrant permet à ces agriculteurs de n’avoir qu’un faible

taux de consommations intermédiaires.

III.8 Les productions potagères

La production de plantes potagères est très largement représentée dans la région d’étude. Elle est

principalement le fait d’agriculteurs ayant accès à une surface irrigable ou à une surface de bas-fond

défrichée. Son cycle de culture court (4 à 6 mois) et les capacités d’irrigation permettent de faire

plusieurs cycles par an sur une même parcelle. Selon la plante cultivée, l’itinéraire technique varie et

pour une même plante, la période de culture (saison sèche ou saison des pluies) a aussi une influence

sur l’itinéraire technique mis en place. Deux types de production sont présents, les légumes-fruits

comme la tomate et l’aubergine et les légumes-feuilles comme le colza et le choux chinois. La

conduite tout les légumes-fruits étant similaire, dans un souci de ne pas surcharger le présent rapport,

nous ne présenterons dans le détail que celle d’un seul : la tomate. De même, pour les légumes-

feuilles, nous ne présenterons que celui du colza.

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Figure 68 : Itinéraire technique pour une parcelle irriguée de 0,25 lima de tomate cultivée en saison sèche (Source :

entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo)

Figure 69 : Parcelles de tomate (g.) et de colza (d.) en saison sèche (Source : Thomazo)

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Figure 70 : Itinéraire technique pour une parcelle irriguée de 0,25 lima de colza cultivée en saison sèche (Source :

entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo)

L’itinéraire de la tomate en saison des pluies est sensiblement le même que celui en saison sèche à ceci

près que les billons y sont fait plus haut et que l’irrigation n’est pas nécessaire sauf en cas de

sécheresse de plus de 3 semaines (ce qui est rare). Les températures étant plus hautes, les plants

poussent plus vite et la récolte est plus abondante (90 box/0,25 lima). L’humidité étant un facteur

d’augmentation des attaques fongiques, les applications de produits phytosanitaires doivent être faites

après chaque pluie, ce qui multiplie leur nombre (et les dépenses en conséquence).

Les mêmes changements s’opèrent pour la culture du colza en saison des pluies : arrêt de l’irrigation,

récolte plus abondante et besoin en protection phytosanitaire plus grande aussi.

En plus de ces deux types de culture (légumes-fruits et légumes-feuilles) les jardins potagers peuvent

être mis en culture avec des oignons ou encore avec du maïs. L’itinéraire technique des oignons est

très proche de celui de la tomate à ceci près qu’il n’est pas nécessaire de fixer des tuteurs et que la

récolte se fait en une seule semaine. Enfin, celui du maïs suit étape par étape l’itinéraire décrit dans la

parie III.5, en y ajoutant l’irrigation nécessaire. Dans la majorité des cas, la culture du maïs sous

irrigation se fait pour anticiper l’arrivée des premières pluies de 3 à 5 semaines, afin de pouvoir

profiter, pour la vente de la récolte, des prix hauts du maïs qui ont cours avant la fin de la saison des

pluies. Le temps d’irrigation est alors d’environ 1 mois seulement, et non pas tout au long du cycle de

culture.

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Figure 71 : Comparaison des valeurs ajoutées et des consommations intermédiaires (CI) des productions maraichères

(Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo)

On peut distinguer 2 grands systèmes de culture potagère selon les ressources disponibles (trésorerie,

main d’œuvre…). Le premier est la rotation de type maïs/légume-fruit (rotation type 1). Le second est

la rotation maïs/légume-feuille (rotation de type 2).

Figure 72 : Comparaison des valeurs ajoutées des systèmes de culture de type 1 et 2 (Source : entretiens technico-

économiques, réalisation : Thomazo)

Figure 73 : Comparaison des valeurs ajoutées et des consommations intermédiaires (CI) des systèmes de culture

potagère (Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo)

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La comparaison des VAB de ces deux types de production montre une rentabilité plus forte du type 1

sur le type 2 quant à la surface mais également quant au temps de travail. Cependant, le graphique

suivant met en exergue le très faible besoin en trésorerie qu’exige la mise en place du système de

culture de type 2. Cela explique pourquoi il est parfois préféré par les familles moins aisées.

III.9 La production de charbon de bois

La présence dans la région de zones où aucune agriculture n’est possible permet aux agriculteurs les

plus pauvres de s’y servir librement en arbre pour la fabrication de charbon de bois. Cette tâche,

extrêmement ingrate et pénible, est longue. Cependant, elle présente l’avantage de pouvoir se diviser

en plusieurs étapes réparties dans le temps. En effet, une fois abattu, le bois peut être stocké sous

forme de troncs ou de tronçons de bois prêts à être assemblés en four qui peut être réalisé dans un

second temps. Ces tâches peuvent donc être intégrées au sein du calendrier de travail des cultures.

C’est souvent la nécessité économique qui motive les agriculteurs à se consacrer à l’activité

charbonnière.

Les arbres sont abattus à la hache ; les troncs sont empilés en tas et maintenus à l’aide de piquets de

bois afin de former un four rectangulaire de dimensions variables, selon la quantité de bois à brûler.

Les troncs de plus gros diamètres sont réunis en place centrale du four. Les branches de plus petits

diamètres viennent combler les interstices vides. Le tas est recouvert de feuillages. Le four est ensuite

couvert d’une importante épaisseur de terre (10 à 20 cm) rendant le four totalement hermétique. Enfin,

une fois le travail de construction du four terminé, une cheminée est dégagée et des braises sont

introduites afin que le four se consume. Il reste allumé durant une à deux semaines selon son volume.

Le four est ensuite ouvert et le charbon ramassé, trié et mis en sac. Ces derniers sont portés et vendus

en ville où la demande est suffisante et permet de tirer un bon prix (20 à 25 Kw/sac). Une fois vidé,

l’emplacement du four, s’il n’est pas trop loin des zones de culture, est propice à une mise en culture

pendant un an ou deux avec par exemple un semis de citrouille ou d’haricot.

Figure 74 : Performances techniques et productivité journalière de la fabrication de charbon de bois (Source :

entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo)

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Figure 75 : Les étapes de la production du charbon ; du haut vers le bas, de la droite vers la gauche : abattage des

arbres, empilement des troncs, fermeture et allumage et surveillance du four, mise en culture après vente du charbon.

(Source : Thomazo)

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IV. L’élevage, petit capital sur pied La grande majorité des exploitations de la zone dispose d’un petit cheptel constitué de quelques

volailles auxquelles s’ajoutent éventuellement un troupeau caprin et une à deux têtes de bovins en

gardiennage. Ces élevages sont souvent réduits à quelques têtes ; ils demandent néanmoins un suivi et

des soins journaliers qu’il convient de comptabiliser dans le calendrier de travail des agriculteurs.

Appréhender le fonctionnement de ces systèmes d’élevage est essentiel afin de mieux comprendre le

rôle clé que les animaux jouent dans la trésorerie des exploitations. Enfin, à ces exploitations

s’ajoutent les éleveurs proprement dits, ayant 15 à 25 bovins en propriété et d’autres en gardiennage.

IV.1 L’élevage de volailles : deux modèles aux ambitions différentes

Le ‘village chiken’, peu coûteux mais sensibles aux épidémies

L’élevage de volaille est le seul élevage systématiquement présent au sein des exploitations de la

région. Entre cinq et vingt poules évoluent en liberté autour de la maison, éventuellement élevées avec

quelques cannes. Ces animaux de basse-cour ne demandent quasiment aucun soin si ce n’est de veiller

à ce qu’un point d’eau leur soit accessible en saison sèche. Elles sont nourries avec des déchets

alimentaires, les résidus du battage des céréales et trouvent dans les espaces avoisinant les maisons des

graines assurant leur alimentation. Une assiette de maïs ou de farine de manioc est également

distribuée aux volailles tous les deux à trois jours à la fin de la saison sèche, au moment où la

végétation brulée n’offre plus grand chose.

Figure 76 : Performances techniques et économiques de l'élevage de 'village Chiken' (Source : entretiens technico-

économiques, Réalisation : Thomazo)

Un petit poulailler est bâti tous les ans pour héberger les poules (temps de construction : ½ journée).

Le ramassage, la consommation et la vente d’œufs sont difficiles car les poules ne pondent jamais aux

mêmes endroits : la majorité des œufs est fécondée et couvée par les poules au milieu de la savane. Le

principal débouché de cet élevage est la consommation familiale et la vente à Mpika. Cet élevage peu

couteux est cependant risqué : les poules connaissent une très forte mortalité du fait d’épizooties

régulières qui déciment parfois l’ensemble des animaux. Il faut alors réinvestir en achetant au moins

une poule à des voisins (les coqs circulants librement, il n’est pas nécessaire de posséder un coq pour

que la poule soit couverte). Le fort taux de mortalité avant le sevrage est dû à la prédation par des

oiseaux de proie qui en sont friands.

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La race de poule localement utilisée n’est pas très charnue, elle est haute sur patte et court vite. Sa

viande est très appréciée et constitue l’aliment de base pour la préparation d’un plat traditionnel pour

les jours de cérémonie.

L’atelier d’engraissage du ‘broiler chiken’, coûteux mais rémunérateur

Ce type d’élevage est beaucoup moins répandu que le précédent, il n’est le fait qu’une dizaine

d’agriculteurs de la région. Il s’agit en fait d’un atelier d’engraissage de poussins achetés en ville et

nourris avec des aliments achetés aussi à Mpika dans le but de produire de jeunes poulets de six

semaines destinés à être vendus à Mpika. Ci-dessous est présentée la conduite de cet élevage.

Figure 77 : Conduite pour l'engraissage de 100 poussins de type 'broiler chiken' (Source : entretiens technico-

économiques, Réalisation : Thomazo)

Figure 78 : Performances technico-économiques de l'élevage de 100 'broiler chikens' (Source : entretiens technico-

économiques, Réalisation : Thomazo)

Si les performances économiques de cet élevage sont bonnes (VAB/H.Jour = 27,4 Kw), il n’en reste

pas moins que le taux CI/PB est très élevé (70%) ce qui veut dire qu’une grosse trésorerie est

nécessaire pour le mettre en place. De plus, il exige des investissements initiaux pour la construction

du poulailler (petit bâtiment en brique) et pour l’achat du matériel d’alimentation (mangeoires et

abreuvoirs). Toutefois, le cycle court de cet élevage (12 semaines en comptant le temps de ‘repos’

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nécessaire au poulailler pour éviter le développement de maladie) permet d’en faire deux à trois dans

l’année et ainsi amortir rapidement les investissements.

IV.2 L’élevage caprin : peu exigent et adapté au milieu

L’élevage caprin est répandu dans la région et existe depuis la période pré-indépendance. Les chèvres,

animaux rustiques, peuvent valoriser tous les espaces. Les consommations intermédiaires liées à cet

élevage sont très faibles. Ces animaux jouent ainsi un rôle d’épargne pour les agriculteurs qui les

vendent pour couvrir des besoins en liquidités, tels que l’achat d’engrais.

Les cheptels sont en moyenne composés de quatre à cinq mères. Elles sont libres en saison sèche au

cours de laquelle un droit de vaine pâture est donné au tous et partout (sauf zones maraichères) et

menées au piquet en saison des pluies, sauf en de rares lieux où la densité de population permet de les

laisser en liberté toute l’année. Elles sont mises à la saillie dès l’âge de six mois. Le renouvellement

des mères reproductrices a lieu suite à quatre ou cinq portées. Les portées sont composées d’un à trois

petits. Les jeunes destinés à être vendus sont gardés le plus longtemps possible (12 à 24 mois) afin

d’en tirer le meilleur prix, la différence de consommation intermédiaire étant quasiment nulle. Le

déplacement des animaux lorsqu’ils sont conduit au piquet exige une disponibilité en temps : ce sont la

plupart du temps les enfants qui sont en charge des caprins. Les chèvres et leurs petits sont ramenés

dans une étable à la fin du jour pour passer la nuit sans risquer d’attaques nocturnes de prédateurs ou

de chiens errants.

L’engraissement des chevreaux et leur vente plus ou moins tardive varie selon la capacité des

agriculteurs à conserver leurs animaux. L’engraissement ne constituant pas un pôle de dépense

puisque les chevreaux valorisent les espaces non cultivés, la vente à terme d’animaux finis (18-24

mois) dépend donc de la trésorerie des agriculteurs.

Figure 79 : Performances techniques et économiques de l'élevage caprin (Source : entretiens technico-économiques,

Réalisation : Thomazo)

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IV.3 L’élevage bovin : très demandeur en surface

Deux types de familles possèdent des bovins, celles dont l’activité principale est l’élevage bovin et

celles dont l’activité principale n’est pas l’élevage mais dont les ressources leur permettent d’investir

dans une ou deux têtes de bovins et de les confier en gardiennage. Une seule race bovine est présente

dans la région, elle est de type rustique et de petite taille. Nous avons vu que le milieu de savane

arborée est très densément peuplé et largement mis en culture. L’élevage bovin n’étant apparu que

tardivement dans la région (cf II.5), il a dû se développer dans les zones peu peuplées, c'est-à-dire dans

l’écosystème Mutengo. La conduite et l’alimentation des troupeaux sont donc basées sur la

disponibilité en fourrage de cet espace. La strate herbacée du Mutengo étant discontinu, la charge

(nombre de bêtes par unité de surface) doit être faible. Cependant, pendant la saison sèche, il est

possible aux éleveurs d’avoir accès avec leur troupeaux à certaines surfaces de bas-fonds non inondés

et de mettre à profit l’abondante strate herbacée de ce milieu dont le sol reste humide même au cours

des moins les plus secs de l’année. Cette surface n’étant pas très étendue, un système de brûlis de sa

strate herbacée après le passage des animaux permet un recru rapide d’un fourrage tendre pour les

animaux. La conduite se fait toute l’année sous l’œil d’un berger qui est soit un des enfants de la

famille, soit un employé. Il a pour rôle d’éviter toute sortie du troupeau hors de la propriété, mais aussi

de diriger deux fois par jour le troupeau vers un point d’eau. C’est lui aussi qui, lorsque le fourrage

manque, prends l’initiative de couper des branches d’arbre pour en nourrir les bêtes ou de les diriger

vers les parcelles familiales dont la récolte est terminée pour y consommer les résidus de culture. Le

soir, il conduit le troupeau au ‘padock’ situé près de la maison pour qu’il y passe la nuit en sécurité.

Figure 80 : Conduite des troupeaux, chargement et gestion des bas-fonds (Source : entretiens technico-économiques,

Réalisation : Thomazo)

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Figure 81 : Performances techniques et économiques de l'élevage bovin (Source : entretiens technico-économiques,

Réalisation : Thomazo)

Les familles pratiquant le gardiennage pour d’autres familles ont en général un plus petit troupeau en

propriété que celles ne le pratiquant pas ; elles profitent des avantages des règles du contrat de

gardiennage (cf II.6) tel qu’il s’est mis en place depuis les années 2000. L’analyse des résultats

économiques présentés par le graphe ci-dessous montre bien que si le produit brut par vache en

propriété est similaire entre les familles pratiquant le gardiennage et celles ne le pratiquant pas, les

dépenses en consommations intermédiaires sont bien plus grandes pour les familles ne gardant pas de

vaches. Cela s’explique par les dépenses que doivent faire ces familles dans l’emploi d’un berger

pendant une partie de l’année.

Figure 82 : Comparaison des valeurs ajoutées et des consommations intermédiaires par vache en propriété des

différents systèmes d’élevage bovin (Source : entretiens technico-économiques, réalisation : Thomazo)

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Figure 83 : Troupeau bovin dans son ‘padock’ (Source : Thomazo)

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V. Le système agraire d’aujourd’hui : une inégalité d’accès

aux différents écosystèmes En étudiant l’histoire de l’agriculture de la région, nous avons vu les différents parcours de

différentiation empruntés par les agriculteurs et l’accès progressif aux différents écosystèmes. Ces

parcours expliquent les causes historiques de l’état actuel du système agraire de la région et

notamment les différences techniques et économiques entre les familles. Chaque famille pratique une

agriculture qui lui est propre mais une vision globale de l’agriculture régionale permet de classer les

exploitations dans une typologie. Afin de peaufiner cette typologie et d’y voir plus clair dans les

différences entre types, des entretiens technico-économiques ont été réalisé chez des familles

représentant chacun des types recensés.

V.1 Méthodologie

Un système de production est défini comme un ensemble d’exploitations qui disposent des mêmes

moyens de production (terre, capital, travail) et qui mettent en œuvre la même combinaison de

systèmes de culture et d’élevage. Les systèmes de production présentés sont donc le résultat d’une

modélisation à partir des enquêtes technico-économiques que nous avons menées.

Calcul de la valeur ajoutée brute (VAB), de la valeur ajoutée nette (VAN) et

du revenu (REV) des systèmes de production

Afin de pouvoir comparer les différents systèmes de production, nous avons déterminé la valeur

ajoutée brute dégagée par chaque système de production (VAB). Lorsqu’on y retranche les

dépréciations du capital fixe on obtient la valeur ajoutée nette (VAN). Ces valeurs mesurent les

performances économiques du système de production (VAN/actif et VAN/ha). En soustrayant les

salaires versés aux ouvriers agricoles et en ajoutant les subventions touchées on obtient le Revenu

Agricole (REV). Dans le cas de notre région, une partie des agriculteurs produisent avant tout pour se

nourrir ; en ce sens, ils toucheront réellement qu’une seule partie de ce revenu, le reste constitue un

moindre achat d’aliments pour la famille. Ce revenu, calculé par actif familial, est en partie

proportionnel à la superficie de chaque système de production. L’étude des performances économiques

des systèmes de production permet de comparer à la fois la productivité du travail (valeur ajoutée

créée par actif) et la rentabilité de l’exploitation (revenu agricole par actif familial).

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Figure 84 : Les différentes étapes du calcul du revenu agricole familial

Modélisation d’un seuil de survie

Le seuil de survie est une modélisation des besoins vitaux, alimentaires et non alimentaires, pour une

famille.

Figure 85 : Détails du calcul des dépenses alimentaires du seuil de survie (Source : entretiens, réalisation : Thomazo)

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Figure 86 : Détails du calcul des dépenses non alimentaires du seuil de survie (Source : entretiens, réalisation :

Thomazo)

Le seuil annuel de survie d’une famille s’élève à 3950 Kw, dont 60% du budget correspond aux frais

alimentaires. Cela revient à considérer un seuil de survie de 1975 Kw/an par actif familial.

Notons que les frais de scolarité sont pris en charge par l’Etat jusqu’à l’âge de 14 ou 15 ans, ceci

explique pourquoi nous n’en avons pas tenu compte.

V.2 Les systèmes de production basés sur l’exploitation de l’écosystème Mutengo

SP I, Propriétaire dans le Mutengo – 4 actifs

Qui sont-ils ?

Il s’agit de familles possédant une grande propriété dans le Mutengo, loin des zones peuplées. Elles se

sont installées dans ces endroits excentrés suite à l’ajustement structurel de 1992 qui a marqué pour un

temps l’arrêt de tout soutien à la production de maïs. La grande surface de forêt dont elles disposent

(plus de 50 limas) leur permet de l’exploiter en partie selon la technique du Chitemene. Ceci dit, la

pression démographique n’est pas sans porter quelques menaces sur les dernières familles pratiquant

cette agriculture.

Fonctionnement du système de production

La grande surface de Mutengo non dégradé permet à ces agriculteurs de pratiquer un an sur deux le

système de culture de l’abattis-brûlis traditionnel (pas plus régulièrement, au risque de trop réduire le

temps de recru). Les rendements sont bons et assurent en grande partie l’alimentation de la famille en

manioc, citrouille, éleusine, arachide et haricot. Une partie de l’éleusine peut même être stockée puis

vendue lors des prix haut et assurer une entrée monétaire pour la famille. Les années où le Chitemene

n’est pas mis en place, les familles pratiquent le Chisebe dans les parties les moins boisées de leur

propriété. D’une part pour assurer la plantation chaque année d’une parcelle de manioc, aliment de

base de ces familles, et d’autre part pour ouvrir des parcelles où se mettra en place après la récolte du

manioc une rotation haricot/maïs/arachide/maïs en bénéficiant des subventions de l’Etat, ce qui

augmentera les revenus monétaires de la famille par la vente du maïs malgré les rendements moyens

du maïs dans ce milieu. La localisation de l’exploitation au cœur du Mutengo facilite le petit élevage

qui trouve facilement les ressources fourragères dans la nature environnante : les chèvres sont en

liberté toute l’année et les poulets ne sont presque pas alimentés. Ce petit capital est mobilisé pour les

dépenses exceptionnelles ou pour combler les manques d’argent en période de soudure.

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Le faible taux VAN/H.Jour (11,6 Kw/H.Jour) s’explique par la forte demande en travail de l’abattis

dans le Chitemene et du labour dans le Chisebe. Mais cela est un peu compensé par un calendrier de

travail relativement équilibré : l’alternance entre le Chitemene et le Chisebe ne les fait pas se

concurrencer entre eux et la forte demande de travail préparatoire de ces deux types de parcelle (saison

sèche) n’est pas en concurrence avec les pointes de travail de la rotation h/m/a/m. Cela permet à ces

familles de dégager un revenu un peu supérieur au seuil de pauvreté. Ces faibles revenus poussent

certains à combler les trous du calendrier (septembre, décembre, mai …) par une petite activité

charbonnière ‘d’appoint’ complétant le revenu agricole.

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SP II, Propriétaire dans le Mutengo + petite surface irrigable – 5 actifs

Qui sont-ils ?

Ces familles ont la même origine que celle pratiquant le SP II. Une différence cependant est qu’elles

ont pu mettre en place au cours de l’histoire une petite surface potagère. Il peut s’agir parfois d’une

surface de bas-fond défrichée le long d’une rivière proche ou d’une parcelle irriguée à la raie. A cause

de la localisation de leur habitation dans le milieu, cette parcelle irriguée est souvent loin du reste de la

propriété familiale et a été obtenu par arrangement avec un autre agriculteur ou en remerciement pour

l’aide apportée pendant la construction du canal.

Fonctionnement du système de production

Le fonctionnement du système est construit sur le même principe que celui du SP I, en y ajoutant le

système de culture du jardin potager. Nous avons vu que les revenus dégagés par les systèmes du SP I

(Chitemene, Chisebe, rotation h/m/a/m, petit élevage) sont relativement faibles. Les mêmes causes

produisant les mêmes effets, c’est le cas aussi dans le SP II. Ces faibles revenus permettent de dégager

une trésorerie suffisante pour mettre en place une culture potagère de type 2 (cf III.8), moins lucrative

mais plus abordable que celle de type 1.

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SP XIII Eleveur bovin sans gardiennage – 5 actifs

Qui sont-ils ?

Ces familles, issues elles aussi de la fuite des zones trop peuplées ont trouvé refuge dans le Mutengo

dans les années 1990. Elles s’y sont installées avec un petit cheptel bovin qui s’est depuis agrandi.

Aussitôt installées avec l’idée de se spécialiser dans l’élevage bovin, elles se sont approprié auprès du

chef de secteur une grande surface de forêt (>350 limas), indispensable à la conduite du troupeau.

Fonctionnement du système de production

Le système de production repose sur la combinaison du système d’élevage bovin avec l’exploitation

du Mutengo environnant selon les techniques du Chitemene et du Chisebe, sur le même principe que

les familles pratiquant le SP I. Pendant les périodes de pointe du calendrier des systèmes de culture

(mai, juin, juillet et janvier, février) le temps de travail consacré aux parcelles ne permet pas d’assurer

la conduite du troupeau. Un berger doit alors être employé, ce qui augmente les frais. La viande

bovine est tellement rare dans la région que les bouchers viennent eux-mêmes depuis la ville de Mpika

pour acheter, abattre et dépecer sur place les animaux. Les résidus de culture servent de pâture pour les

animaux en période de soudure vers le mois de mai, alors que le Mutengo est déjà sec et que le bas-

fond est encore trop humide pour y faire paitre les animaux.

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SP XIV Eleveur bovin avec gardiennage – 5 actifs

Qui sont-ils ?

Suivant la même volonté de s’extraire des zones peuplées que les familles suivant le SP XIII, ces

familles se sont également installées dans des zones d’écosystème Mutengo afin d’y mettre en place

un élevage bovin, mais elles l’on fait plus tardivement que les familles ne pratiquant pas le

gardiennage, c'est-à-dire dans les années 2000-2010. N’ayant pas un capital suffisant pour acheter un

grand troupeau, elles ont choisit d’opter pour le gardiennage d’animaux d’autres familles. Cela leur

permet à la fois de diminuer le temps à consacrer à la conduite du troupeau grâce au partage du travail

avec les autres familles, mais aussi d’espérer augmenter la taille de leur troupeau plus rapidement

grâce au payement en nature des familles leur confiant leurs vaches (le premier veau leur revient).

Fonctionnement du système de production

Le système de production est très proche de celui des familles suivant le SP XIII à ceci près que ces

familles ne pratiquent pas le Chitemene. En effet, s’étant installée en dernière, elles n’ont plus le faire

que sur les espaces où le Mutengo était trop dégradé ou trop peu dense pour le Chitemene. Elles se

sont donc tournées vers à les cultures du Chisebe et de la rotation h/m/a/m. Par ailleurs, les revenus de

l’élevage sont moindres car le troupeau en propriété est souvent assez petit même si ces familles

espèrent pouvoir en augmenter la taille dans les années à venir.

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V.3 Les systèmes de production basés sur l’exploitation du Mutengo dégradé

SP III Petit propriétaire dans le Mutengo dégradé – 3 à 4 actifs

Qui sont-ils ?

Il s’agit de famille ayant hérité de petites surfaces (10 à 15 limas) dans un écosystème Mutengo

dégradé par sa trop forte exploitation selon la technique du Chitemene, elles n’ont accès qu’a cet

écosystème pauvre. Cela est le résultat de la division du domaine de leur grands-parents ou arrière

grands-parents sur lequel ils pratiquaient le Chitemene alors que l’espace était suffisant. N’ayant

d’autre endroit où s’installer, leurs descendants ont hérité génération après génération de surfaces

réduites pour aboutir à l’état actuel des choses.

Fonctionnement du système de production

Ayant de maigres ressources naturelles, ces familles n’ont d’autres moyens que de pratiquer le Chisebe

dans un environnement qui ne lui est pas très propice. Cela leur permet néanmoins d’ouvrir des

parcelles où elles peuvent cultiver du maïs. N’ayant que très peu de revenu, il leur est difficile de se

fournir en engrais malgré les subventions, elles mettent donc en place des associations du type m+h ou

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m+a en rotation avec arachide, haricot ou patate douce. Cela leur permet tant soit peu de compenser

les rendements moyens de ces systèmes de culture dans cet écosystème tout en remplissant leur

calendrier de culture efficacement.

SP IV Petit propriétaire dans le Mutengo dégradé avec troupeau caprin – 4

actifs

Qui sont-ils ?

Ils ont la même origine que les familles pratiquant le SP III. Toutefois, leur niveau de capital est un

peu plus élevé et leur permet d’avoir un petit troupeau de chèvre, ce qui leur assure une position

sociale un peu plus élevée et quelques revenus supplémentaires.

Fonctionnement du système de production

Le système de production est très proche du SP III si ce n’est que la capacité de dépense plus grande

de ces familles leur permet de se fournir en engrais à prix subventionnés et de mettre en culture des

parcelles de maïs pur en rotation avec des parcelles de plantes légumineuses. Cela diminue le temps de

travail par unité de surface et allège un peu le calendrier de travail.

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SP V Petit propriétaire dans le Mutengo dégradé + petite surface irrigable –

4 actifs

Qui sont-ils ?

Encore une fois, ces familles ont la même origine que les familles pratiquant le SP III. Toutefois, un

deuxième écosystème leur est accessible : une petite surface irriguée (1 lima). Elle leur vient la plupart

du temps du fait de leur participation à la construction d’un des canaux de la région d’étude, même si

celui-ci ne passe pas à proximité directe des terres que la famille possède. Certaines ont plutôt accès à

des bas-fonds défrichés et cultivables une partie de l’année (cultures potagères).

Fonctionnement du système de production

Les deux écosystèmes disponibles sont mis à profit au maximum des capacités des familles. Le

Mutengo dégradé permet le Chisebe suivit de la rotation a/m/h/m. La parcelle irriguée est mise en

valeur par le système de production maraichère de type 2, qui ne demande pas une grande disponibilité

en trésorerie. C’est d’ailleurs un manque de trésorerie qui pousse les familles à introduire dans ce

système de culture potagère des friches qui répondent plus à un manque passager (mais fréquent) de

liquidité qu’à des besoins agronomiques. Par ailleurs la superposition des calendriers de travaux des

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trois systèmes de culture impose d’employer quelques semaines par an des ‘piece workers’ pour les

phases de labour ou de désherbage par exemple.

SP VI Petit propriétaire dans le Mutengo dégradé + grande surface irrigable

– 5 actifs

Qui sont-ils ?

Ces familles sont très proches, par l’origine, des familles pratiquant le SP IV. La seule différence

notable est la taille de la surface irrigable qui leur est accessible : 2 limas.

Fonctionnement du système de production

La parcelle irrigable est exploitée au maximum grâce à la mise en place du système de culture

potagère de type 1 (rotation de type tomate/maïs) et à l’emploi de ‘piece worker’ pendant quasiment la

moitié de l’année. Un grand besoin en trésorerie est nécessaire et est trouvé dans les recettes mêmes du

jardin potager. Le Mutengo est mis en culture selon ce qui est pratiqué dans les SP IV et V.

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V.4 Les systèmes de production basé sur l’exploitation de l’écosystème Icipya

SP VII Très petit propriétaire sur l'Icipya + double actif – 2 actifs

Qui sont-ils ?

Il s’agit des familles descendantes des populations installées dans l’écosystème Icipya dans l’idée de

s’y spécialiser dans la production de maïs grâce au soutien de l’Etat. Cependant, la pression

démographique n’a pas permis à leur parents ou grands-parents de s’approprier une grande surface et

celle-ci après les divisions d’un ou deux héritages est réduite à très peu : 3 à 4 limas seulement.

Fonctionnement du système de production

En s’appuyant sur l’assurance que la vente de maïs produit rapportera quelques Kwacha, et n’ayant

que très peu de ressources financières (pas de capital) et agronomiques (un seul écosystème) elles se

concentrent sur la mise en place d’une petite parcelle où une association plus riche qu’ailleurs est

pratiquée : maïs + haricot ou arachide + citrouille + patate douce, en rotation avec des cultures pures

de légumineuse et d’un temps court de friche.

Nécessairement, ces petites parcelles exigeantes en temps de travail ne parviennent pas à nourrir les

deux actifs et les enfants de la famille. C’est pourquoi les enfants, dès l’âge de 12-14 ans quittent le

foyer familial pour aller travailler chez un cousin ou un voisin qui a besoin de main d’œuvre et qui se

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charge en contre partie de nourrir l’enfant. De plus, ayant un calendrier de travail très inégal entre les

mois, les actifs de la famille en profitent pour pratiquer une activité de charbonnage ou pour travailler

en temps qu’employé saisonnier chez tel ou tel agriculteur ayant une telle surface (SP XIII par

exemple) qu’il peut employer des travailleurs pendant plusieurs mois d’affilée. Les actifs deviennent

ainsi des doubles actifs par la force des choses pour assurer les revenus que l’agriculture pratiquer de

donne pas à la famille.

SP VIII Propriétaire sur l'Icipya - 3 actifs

Qui sont-ils ?

Ces familles sont proches de celles pratiquant le SP VII, à ceci près que l’héritage de leurs parents leur

a laissé l’accès à une plus grande surface d’Icipya (15 à 20 limas).

Fonctionnement du système de production

L’accès à l’écosystème d’Icipya permet à la famille d’associer deux systèmes de culture dont les

rendements sont bons dans ce type d’environnement : le Chisebe et la rotation h/m/a/m. Un long temps

de friche (7 à 9 ans) permet à la savane arborée de se reconstituer après la récolte du dernier maïs et

permet de recommencer un cycle défriche-brûlis par le Chisebe, culture de maïs par la rotation et ainsi

de suite. Les grandes surfaces en maïs et légumineuses sont mises en culture grâce à l’appel de

groupes de travail (paroisse, club de foot, association de conseil agricole …) dont les tarifs sont

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moindres que ceux des ‘piece workers’ et dont les bénéfices reviennent au groupe (achat de maillots,

action de charité …).

SP IX Propriétaire sur l'Icipya + petite surface irrigable

Qui sont-ils ?

Ces familles sont proches de celles pratiquant le SP VIII, à ceci près que l’héritage de leurs parents

leur a laissé l’accès à une surface irriguée ou qu’ils ont put y avoir accès par eux-mêmes (construction

de canal, arrangement …). Certaines ont plutôt accès à des bas-fonds défrichés et cultivables une

partie de l’année (cultures potagères).

Fonctionnement du système de production

Le système de production allie donc l’exploitation de l’Icipya et de la petite surface irriguée (< 1lima).

Le calendrier de travail chargé du Chisebe et de la rotation h/m/a/m et la présence de périodes de

pointe imposent l’emploi de ‘piece workers’ en plus de groupes de travail qui n’ont pas la même

disponibilité que ces derniers. Ce besoin en main d’œuvre extérieure est accentué par le calendrier très

régulier du potager qui demande une attention presque quotidienne. Ayant peu de capital, ces familles

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parviennent difficilement à avoir une trésorerie suffisante pour mettre en place une rotation de type 1,

gourmande en intrants. La présence d’une friche est souvent due à un manque de moyen pour payer la

main d’œuvre ou pour se fournir en intrant en temps voulu. Par exemple, la période d’achat des

engrais subventionnés pour la culture du maïs étant limitée dans le temps, celle-ci peut retarder l’achat

des intrants destinés au potager.

SP X Propriétaire sur l'Icipya + grande surface irrigable – 4 actifs familiaux

Qui sont-ils ?

Ces familles sont proches de celles pratiquant le SP IX, mais elles ont pu conserver une surface sous

irrigation plus grande (3 limas). Toutefois, le deuxième écosystème à leur disposition (Icipya) n’est

pas bien grand (10 limas).

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Fonctionnement du système de production

Du fait de leur accès une surface réduite d’Icipya, il n’est plus possible d’y pratiquer le Chisebe, mais

seulement une rotation m/a/m avec un temps friche de 1 à 2 ans. Ce gain de temps par abandon du

Chisebe permet à ces familles de s’investir plus intensément dans la mise en culture du potager. Celui-

ci étant vaste, sa mise en culture tout au long de l’année impose l’emploi de saisonnier qui passent

plusieurs semaines sur place et ne sont pas employés ‘à la tâche’ comme le serait un ‘piece worker’.

Les recettes très abondantes du potager tout au long de l’année permettre un investissement en intrants

couteux et donc de pratiquer une rotation exigeante : tomate/maïs/oignon/tomate.

SP XI Propriétaire sur l'Icipya + production diversifiée – 3 actifs

Qui sont-ils ?

Il s’agit de familles à peu près dans la même situation que celles suivant le SP IX : surface d’Icipya

moyenne (15 limas) conjuguée à un petit potager de moins de 1 lima. La vraie différence est qu’elles

ont eu à un moment de leur histoire une capacité d’investissement qui leur a permis de se diversifier

vers des systèmes marginaux dans la région. Cette capacité a souvent été le fruit d’un travail en ville

pendant quelles années.

Fonctionnement du système de production

La surface d’Icipya est mise à profit, là aussi, par l’enchainement du Chisebe et de la rotation

a/m/h/m. Le système d’élevage fait la particularité de ce système de production, il s’agit de l’élevage

de poulet ‘broilers’ (300 poussins par an) ou de la gestion de deux bassins piscicoles. Le temps de

travail demandé par ces systèmes d’élevage vient s’additionner au calendrier des systèmes de culture

et impose l’emploi de saisonniers. Les forts revenus dégagés par ces systèmes d’élevage permettent

d’investir dans les intrants nécessaires pour cultiver la surface irriguée et en tirer le meilleur profit.

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SP XII Maraichers sur une grande surface irriguée – 4 actifs

Qui sont-ils ?

Ces familles sont les descendantes des familles fondatrices des premiers canaux de la région et

bénéficient du travail considérable qu’ont entrepris leurs ancêtres pour irriguer de grandes surfaces

d’Icipya. Celles-ci se sont bien vues réduites par les héritages mais sont aujourd’hui encore

conséquentes (> 1ha).

Fonctionnement du système de production

Le fonctionnement de ce système de production repose essentiellement sur l’emploi de saisonniers

quasiment tout au long de l’année dans le but d’exploiter au mieux la surface irrigable. Les

propriétaires sont alors comme des chefs d’une petite entreprise gérant à la fois la main d’œuvre

familiale et les employés, négociant farouchement les prix de transport des productions potagères vers

Mpika et les prix de l’achat d’intrants en ‘gros’. Une certaine diversification des productions permet

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d’aller chercher les prix hauts des marchés urbains (aubergine, oignon, variété de tomate rare…)

même dans les périodes creuses. La culture d’un grand nombre de parcelles de tomate tout au long de

l’année permet de s’assurer la vente d’une production dans les périodes difficiles et à anticiper de prix

haut de la tomate.

Remarque : Deux exploitations de la région ayant la même origine que les familles du SP XII ont au

cours de l’histoire développé un petit espace de plantation (bananier, cane à sucre, agrume) dont les

revenus s’ajoutent à un espace de maraichage. Nous n’avons pas développé ce type à cause de son

manque de représentants dans la région et de sa probable très faible importance dans l’avenir du

système agraire.

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V.5 Analyse et comparaison des performances technico-économiques

Un accès aux différents écosystèmes, aux moyens de production et à un

capital à investir sur les parcelles variable selon les systèmes de production

L’analyse des performances technico-économiques des 14 types d’exploitation que nous avons

présentés va être simplifiée par l’aide de représentations graphiques permettant de comparer les

résultats des différents SP entre eux.

Figure 87 : Représentation des résultats économiques pour chaque SP en fonction de la surface utile (Source :

enquêtes technico-économique, réalisation : Thomazo)

Il est bon d’observer en premier lieu sur ce graphique que le revenu agricole par actif familial de la

majorité des systèmes de production mis en œuvre par les agriculteurs est supérieur au seuil de survie.

L’alimentation est donc assurée pour toutes ces familles. Celles se situant en dessous du seuil de

survie conjuguent l’activité agricole avec un double emploi ou avec des activités de charbonnage ce

qui leur permet de s’approcher de ce seuil.

Avant d’aller plus en avant dans l’interprétation de ce graphique, remarquons que deux courbes se

détachent nettement des autres, il s’agit des systèmes de production reposant sur l’élevage bovin. L’on

voit clairement que la surface requise pour ces systèmes est considérable par rapport aux autres

systèmes de production. Ceci explique la pente très faible de la courbe.

Afin de mieux analyser le reste du graphe, un zoom est proposé ci-dessous où les courbes des

systèmes de production des éleveurs ont été ôté.

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Figure 88 : Représentation des résultats économiques pour chaque SP (sauf SP bovins) en fonction de la surface utile.

(Source : enquêtes technico-économique, Réalisation : Thomazo)

A nouveau, deux courbes semblent être nettement détachées des autres, sur la droite du graphique. Il

s’agit des courbes des familles propriétaire de grandes surfaces de Muteno et l’exploitant en

Chitemene. La pente est encore une fois ‘douce’ de ce fait là. Notons la présence d’une courbe

entièrement en dessous du seuil de survie, c’est celle du SP VII. Cela s’explique d’une part par un

manque de surface agricole limitant de facto la production et d’autre part par le fait qu’il s’agisse de

surfaces non irrigables où seul un cycle de culture est possible par an.

Les différences observées de valeur ajoutée par actif s’expliquent d’une part par un accès inégal aux

ressources : l’accès aux terres irrigables permet la mise en place de systèmes de culture à plus haute

valeur ajoutée. Par ailleurs, le capital et la surface dont disposent les agriculteurs conditionnent le

mode d’exploitation des écosystèmes. Les agriculteurs ayant de faibles disponibilités monétaires lors

de la mise en culture des terres ne pourront valoriser pleinement ces terres. Cela explique que la valeur

ajoutée dégagée par unité de surface par classes sociales moins aisées soit plus faible : ayant accès aux

écosystèmes les moins fertiles et dans l’impossibilité de les valoriser correctement, ils se voient

contraints de mettre en place des systèmes à plus faible valeur ajoutée. Plus les agriculteurs ont accès à

des écosystèmes fertiles qu’ils peuvent mieux valoriser à l’aide de leur capital, plus la valeur ajoutée

par unité de surface augmente.

Par souci de répondre aux problématiques annoncées en introduction, nous allons poursuivre le

traitement de ces données sous les angles annoncés en introduction, c'est-à-dire celui proposé par le

projet IDSP (Irrigation Development Support Program) du gouvernement Zambien et celui du

changement climatique.

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Remarque : nous avons considéré le coût d’opportunité de la main d’œuvre quasi-nul étant donné la

très faible demande des autres secteurs économiques susceptibles d’employer de la main d’œuvre non

qualifiée dans la région. Cela explique que nous n’ayons pas représenté de seuil de reproduction.

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VI. Etude de l’impact de l’irrigation sur les systèmes de

production et perspectives d’évolutions du système agraire

dans le cadre IDSP et face à l’aléa climatique

VI.1 Estimation de l’impact d’un fort aléa climatique sur les différents systèmes de production

Le recueil des entretiens techniques n’a pas permis d’avoir accès à des données chiffrées très précises

de l’impact de l’aléa climatique sur les rendements. Toutefois, les agriculteurs évoquent de ‘bonnes

années’ et de ‘mauvaises années’. Ces résultats variables d’une année sur l’autre peuvent être le fait de

causes différentes : un problème de trésorerie momentané dû à une grosse dépense qui empêche

l’achat d’intrants en temps voulu, un délai de livraison des semences améliorée ou des engrais par le

gouvernement qui retarde la mise en culture du maïs ou sa fertilisation, ou encore l’impact de l’aléa

climatique sur les cultures. Les discussions avec les agriculteurs laissent émerger différents types

d’aléas climatiques ayant un impact fort sur certaines cultures : l’arrivée en retard des premières

pluies, un épisode de sécheresse immédiatement après les premières pluies et un orage violent.

Le tableau ci-dessous donne les estimations de l’impact de ces trois types d’événements climatiques

sur les rendements des productions selon le système de culture.

Il est intéressant de voir que les rendements des systèmes de culture en association (Chitemene,

Chisebe, association m+h) sont moins affectés d’une manière générale que les systèmes en culture

pure (rotation a/m/h/m). De plus, on remarque que les rendements du maïs, quelque soit son mode de

culture, est très influencé par la date d’arrivée des pluies ou par la période de sécheresse (sauf lorsqu’il

est irrigué). Enfin, les orages violents ont un fort impact sur les cultures potagères dont une grande

partie de la récolte peut être détruite, selon le stade de croissance au moment de l’orage.

La combinaison de ces systèmes de culture au sein des systèmes de productions va rendre ces derniers

plus ou moins sujets à des baisses de revenu suite à l’un ou autre de ces événements. Par exemple, Le

SP VIII dont la production principale est le maïs en monoculture subit de plein fouet la baisse de

rendement du maïs lors des années de retard des premières pluies, car c’est toute sa surface qui est

affectée par la baisse des rendements. Les rendements du maraichage peuvent être lourdement

diminués à l’échelle d’une parcelle en cas de gros orage, mais le système de production étant basé sur

une rotation de 3 cycles de culture de plantes potagères différentes sur différentes parcelles au cours de

l’année (semis échelonné dans le temps et dans l’espace) l’impact d’un orage ne porte que sur une

partie de la récolte annuelle. Les revenus des familles sont donc affectés en proportion moindre.

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Figure 89 : Impact de l'aléa climatique sur les rendements des systèmes de culture (Source : entretiens historiques et

technique, réalisation : Thomazo)

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On constate donc que si l’aléa qui existe dans les productions agricoles de la région est le fait de tous

les systèmes de culture et donc de tous les systèmes de production, il est beaucoup plus important dans

le système de culture proposé (voire imposé) par le ‘paquet technique’ mis en place progressivement

depuis l’indépendance. Sans revenir sur les hypothèses climatiques présentées au début de l’étude, il

semble vrai d’affirmer que le risque lié à l’aléa climatique a pour origine le changement technique

opéré vers la production de maïs plus que le changement climatique.

VI.2 Impact et intérêt de l’irrigation déjà en place dans la zone

Comme nous l’avons vu, l’irrigation est déjà bien en place dans la zone et son utilisation est connue

depuis plus de 50 ans. La gestion des canaux est organisée par les communautés elles-mêmes, selon

des règles décidées en leur sein. Par exemple, une division des utilisateurs d’un canal est effectuée et

des tours de rôle pour l’utilisation de l’eau organisée afin d’éviter que ceux se trouvant en bout de

canal soit forcés d’attendre que les autres aient fini leur propre utilisation pour se servir. De même un

comité élu gère les conflits lorsqu’ils arrivent et aussi la répartition des tâches d’entretien. Ce système

permet donc à un nombre relativement élevé de famille d’avoir accès à un petit potager. Son

inconvénient est d’être limité dans l’espace (il est difficile d’avoir accès à une grande surface irriguée

et impossible d’avoir un potager si l’on est loin d’une rivière) et parfois aussi dans le temps : il n’est

pas rare que la fin de la saison sèche, et la diminution du niveau des rivières qu’elle entraine, voit le

débit des canaux se réduire ou se stopper totalement, ce qui est bien sûr un vrai frein à la culture

maraichère à cette période de l’année.

Cependant, comparons l’impact économique de l’irrigation sur ceux qui la pratiquent avec ceux qui

n’y ont pas accès.

Figure 90 : Graphe présentant les résultats économiques en fonction de la surface utile pour les SP VIII, IX, X.

(Source : enquêtes technico-économiques, réalisation : Thomazo)

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Le graphe ci-dessus reprend celui présenté plus haut en affichant les mêmes résultats mais pour les SP

VIII, IX et X seulement. Pour rappel, ces trois systèmes sont similaires à ceci prêt que le SPVIII n’a

pas accès à la culture d’irrigation et n’a donc pas de potager, le SP IX a un petite surface irrigable et le

SP X a une grande. L’on voit bien ici l’impact immédiat de l’accès à l’irrigation sur les résultats

économiques des familles paysannes. Par accès à un potager de seulement 3 limas, un paysan peut voir

son revenu passer de 1 200 Kw à plus de 4 000 Kw.

Ce résultat est généralisable pour tous les systèmes de production dès lors qu’il y a un accès possible à

l’irrigation. Le résultat le plus spectaculaire est bien sûr pour les acteurs ayant pour seul activité le

maraichage (SP XII). Leurs revenus sont compris entre 5 500 et 8 000 Kw par actif et par an.

Par ailleurs, nous avons vu que si un changement climatique n’est pas clairement ressenti par les

agriculteurs, il est certain que l’aléa du climat est parfois une contrainte forte, notamment pour la date

d’arrivée des premières pluies de la saison de culture. Ainsi, à cet impact très positif de l’irrigation sur

les revenus des agriculteurs, s’ajoute le fait que les cultures irriguées ne sont pas dépendantes de cette

date et plus encore, l’irrigation permet de résister à d’éventuelles périodes de sécheresse au sein de la

saison des pluies. Cette gestion des risques climatiques est déjà mise en œuvre au sein des

communautés et est un atout clé en faveur du développement de l’irrigation.

VI.3 Mise en place du projet : freins et intérêts du projet IDSP

D’après le diagnostic réalisé et ses conclusions, notamment d’un point de vue économique, il semble

que l’irrigation soit un moyen privilégié pour augmenter les revenus des agriculteurs et donc réduire la

pauvreté rurale (objectif principal du projet IDSP). Or, dans la situation actuelle, tous les acteurs n’ont

pas accès à des terres irrigables, même si les possibilités d’extension du réseau de canaux ne sont pas

épuisées. Le projet IDSP, en répondant à cette attente de la part des agriculteurs serait un formidable

levier de développement. Cependant, des limites au projet apparaissent aussitôt celui-ci envisagé :

- Premièrement, le projet prévoit un accès à l’eau et à une surface d’au moins 2 ha par famille.

Or il se trouve que très peu des agriculteurs locaux n’ont la capacité de labourer et de cultiver

2 ha en culture maraichère. Ils en sont même très éloignés ! A moins d’un soutien financier

spécifique à cela, le projet ne pourrait pas remplir ses propres objectifs.

- Deuxièmement, comment trouver un investisseur privé voulant bien partager le bien qu’il

entretient (barrage + réseau) avec des familles ne cultivant que 2 à 5 ha et n’ayant quasiment

aucune part dans la gestion de ces installations ?

- Enfin, comment être sûr que l’investissement extrêmement lourd de l’état zambien

(construction du barrage, du réseau de canalisation et des sur-presseurs permettant le

fonctionnement des pivots envisagés) soit rentabilisé par le développement du tissu rural

local ? Une étude d’impact du projet comparant le scénario avec projet et celui sans projet

permettrait sans doute de répondre à cette question cruciale quand au développement du pays

dans son ensemble.

A cela s’ajoute une question sur le bon déroulé du déplacement de population nécessaire à

l’installation de l’investisseur dans une région déjà fortement peuplée.

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VI.4 Perspective d’avenir pour les agriculteurs de Katongo-Kapala

Dans le scénario sans mise en place du projet IDSP

Alors que l’analyse du système agraire actuel dépeint une région qui affronte différents problèmes

(dégradation de la fertilité des sols, manque d’espace disponible, impact fort de l’aléa climatique sur

certains systèmes de production …), elle permet aussi d’entrevoir des solutions et des perspectives

d’avenir pour les agriculteurs de la région, indépendamment du projet IDSP. En voici quelques unes.

Diminution du maïs

Nous avons vu que la monoculture pure de maïs et l’utilisation d’engrais en grande quantité a valu à

certaines parcelles une acidification et un appauvrissement en matière organique du sol entrainant une

diminution des rendements. Et si ce processus n’a pas été poussé jusqu’au bout partout, ce n’est que

grâce à la diminution progressive du soutien à la production de maïs. De plus, l’évolution relative des

prix a joué en défaveur des prix du maïs. C’est ainsi que sa production a chuté dans la région. Il

probable que cette tendance se poursuive dans les années à venir. D’une part parce les conditions

économiques ont peu de chance de s’améliorer (la Zambie exporte son maïs depuis quelques années

déjà), d’autre part parce que les agriculteurs sont de plus en plus conscients des effets agronomiques

négatifs produits par la culture pure du maïs.

Extension des surfaces potagères

Beaucoup de canaux ont déjà été creusés dans la région, mais - sans avoir porté une analyse technique

idoine - il semble bien que d’autres pourraient être construit sur le même principe que les précédents.

Une aide technique et financière publique - bien moindre que le coût de construction d’un barrage et

de sur-presseurs - permettraient certainement d’étendre ce réseau et d’augmenter l’espace irrigable de

la région et donc de répondre au manque de surfaces irrigables. Par ailleurs, nous avons vu qu’une

possibilité pour cultiver un potager est de défricher une surface de dambos dans les bas-fonds,

inondable en saisons des pluies mais cultivable en saison sèche grâce à l’humidité résiduelle et à la

richesse en nutriment du limon tourbeux de cette unité agro-écologique. Or les observations de terrain

montrent que ces espaces sont encore très majoritairement inexploités ou seulement pâturés par les

troupeaux bovins. La défriche à la houe de ces espaces est longue (1 à 2 mois de travail pour moins de

1 lima) à cause de la strate herbacée très profondément enracinée, mais une fois fait, ce travail n’a pas

besoin d’être renouvelé. Un soutien public de faible ampleur spécialement destiné à cela pourrait

accélérer le processus.

Dans le scénario avec mise en place du projet IDSP

Le projet IDSP, nous l’avons vu, est porteur d’un certain nombre de contradiction ou d’interrogation.

Cependant, nous pouvons nous intéresser au changement qu’il ferait subir aux systèmes de la région et

plus généralement au système agraire dans son ensemble.

Notons tout d’abord que le projet ne toucherait qu’une partie de l’espace de la région d’étude (environ

25%), il s’agit certes de la partie la plus peuplée, mais cela signifie que les populations hors de cette

zone d’impact ne bénéficieront pas du barrage. La redistribution des terres donnerait à chaque famille

concernée un accès à l’irrigation, elles auront donc l’occasion de se tourner vers des systèmes de

productions à haute valeur ajoutée grâce à la mise en culture de potagers. Par ailleurs, il est prévu que

certains agriculteurs aient accès à de plus grandes surfaces irriguées. Se pose alors la question de la

sélection de ces quelques familles : la hiérarchie de la société Bemba en place sera-t-elle suivie pour

sélectionner les familles (comme cela s’est fait par le passé) ou les critères de jugement seront-ils

technico-économique ?

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L’explosion de la production maraichère de la région aura certainement comme impact le

développement d’un réseau de transport des productions des villages vers la ville de Mpika plus

efficace que le réseau actuel basé sur des petits taxis-brousses engendrant ainsi la baisse des coût de

transport. En revanche, il est difficile d’évaluer l’impact de la hausse de la production dans la petite

région en question sur les prix du marché de Mpika, lui-même étant alimenté par différentes régions.

………

Quoi qu’il en soit de la mise en place de ce projet de développement ou de l’abandon du projet, il

semble clair que l’avenir du système agraire de la région se trouve dans la poursuite du développement

de l’irrigation qui permet aux agriculteurs de se prémunir contre les aléas du climat tout en répondant à

la demande du marché urbain. Là où l’irrigation n’est pas possible, la culture pure du maïs,

responsable de la dégradation de certaines terres et d’une grande vulnérabilité des producteurs face

aux caprices du climat est appelé à disparaitre pour laisser place à des cultures d’association, plus

respectueuses de la santé des sols, moins sensibles à l’aléa climatique et permettant une meilleure

valorisation d’une surface agricole familiale qui se fait de plus en plus petite.

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