développer l'engagement dans les organisations modernes

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DEVELOPPER LENGAGEMENT DANS LES ORGANISATIONS MODERNES MEMOIRE par Julien Foulquier https://fr.linkedin.com/in/julienfoulquier Décembre 2016

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Leadership & Management


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DEVELOPPER L’ENGAGEMENT DANS LES

ORGANISATIONS MODERNES

MEMOIRE

par

Julien Foulquier

https://fr.linkedin.com/in/julienfoulquier

Décembre 2016

SOMMAIRE

1 INTRODUCTION 3

1.1 Préface 3 1.2 Contexte du livre blanc et objectifs 3 1.3 Copyright 4

2 L’ENGAGEMENT 5

2.1 Cela ne se limite pas à la motivation, à l’implication ou à la satisfaction 5 2.2 L’engagement, c’est… 6 2.3 Une prise de conscience émergeante 7 2.4 Les avantages attendus du développement de l’engagement 8

3 COMMENT DEVELOPPER L’ENGAGEMENT 12

3.1 Quelques fausses idées 12 3.1.1 Sur la rémunération 12 3.1.2 Sur la carotte et le bâton 16

3.2 Créer les conditions préalables pour obtenir la satisfaction 16 3.2.1 Environnement de travail 16 3.2.2 Sécurité et perspectives 17 3.2.3 La rémunération 17

3.3 La satisfaction, un objectif intermédiaire 17 3.3.1 Les différences fondamentales entre la satisfaction et l’engagement 18 3.3.2 Le piège de la satisfaction comme objectif en soi 18

3.4 L’employé doit disposer de ressources personnelles adéquates 19 3.5 Développer l’engagement 20

3.5.1 Donner du sens à leur action 20 3.5.2 Avoir de l’impact 22 3.5.3 Permettre l’autonomie : les 4 « T » 24 3.5.4 Encourager le développement personnel 27 3.5.5 Se sentir connecté 29 3.5.6 Développer la confiance 32

3.6 Synthèse du modèle de l’engagement 35 3.7 Analyse systémique du développement de l’engagement 36

4 LA GENERATION Y OU « MILLENNIALS » 38 4.1.1 Une définition encore floue 38 4.1.2 Les spécificités réelles de la génération Y 40

5 CONCLUSION 49

6 BIBLIOGRAPHIE 50

7 TABLE DES FIGURES ET TABLEAUX 56

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 3

1 INTRODUCTION

1.1 PREFACE

En besoin croissant de talents, confrontées à une concurrence mondiale, les organisations sont

aujourd’hui confrontées à la problématique du recrutement, de la fidélisation des talents et de

leur engagement dans ses équipes. Véritable clé de voute de la réussite des organisations

modernes, l’engagement est aujourd’hui recherché comme le St Graal de beaucoup

d’organisations. Certaines y mettent des moyens considérables, avec des résultats parfois

mitigés. D’autres le considèrent comme une chimère, l’engagement étant à leurs yeux

uniquement du fait du collaborateur et non de l’organisation. Mais qu’est-ce que réellement cet

engagement ? Comment le développer réellement ? Qu’en disent les dernières avancées des

sciences sociales ? L’arrivée de la nouvelle génération dite « Y » chamboule-t-il la donne ? Et

qu’en attendre ? Ce livre blanc tente de répondre à toutes ces interrogations, en concluant par

une analyse systémique complète permettant d’appréhender l’implication de l’ensemble des

leviers.

1.2 CONTEXTE DU LIVRE BLANC ET OBJECTIFS

Dans le cadre du Cycle Supérieur de Management de l’EDHEC (équivalent Master II) que j’ai

pu suivre en parallèle de mon travail 2015, il m’a été donné l’opportunité de réaliser un mémoire

sur ce sujet. Le livre blanc est le résultat de mes recherches et de mes convictions, qui guident

aujourd’hui mon style managérial et ma communication. J’ai également eu la grande chance de

pouvoir m’immiscer au sein de l’entreprise CrossKnowledge - que je remercie encore - basée

à Sophia-Antipolis, afin de transformer les travaux de mes recherches en plan d’action « sur le

terrain ». Ce livre blanc n’intègre pas le résultat de mes travaux sur le terrain, qui resteront

confidentiels.

Ce livre blanc a pour objectif de faire un état complet et structuré des connaissances actuelles

et réelles sur le développement de l’engagement. Il se destine :

Aux professionnels de tous les secteurs d’activité.

A toutes les organisations, principalement celles confrontées à une forte concurrence.

A tous ceux qui cherchent à comprendre le fonctionnement des acteurs au sein de leur

organisation.

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 4

1.3 COPYRIGHT

Tous les éléments présentés dans ce livre blanc peuvent être reproduits, sur demande, dès lors

qu’ils indiquent la source et proposent un lien vers le document d’origine.

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2 L’ENGAGEMENT

Demandez à 10 personnes ce qu’est l’engagement des salariés, vous obtiendrez 10 réponses

différentes. D’autant plus qu’il existe dans le dictionnaire beaucoup de mots proches, pour ne

pas dire synonymes aux yeux des managers : implication, motivation, esprit d’initiatives ou

encore satisfaction des employés. Il est donc important de définir exactement ce qu’est

l’engagement, de comprendre les éventuelles différences avec les autres termes, avant d’aller

plus loin dans nos réflexions.

2.1 CELA NE SE LIMITE PAS A LA MOTIVATION, A L’IMPLICATION OU A LA

SATISFACTION

Commençons par les mots proches. La motivation, de la famille étymologique « mouvoir »,

est une « action des forces (conscientes ou inconscientes) qui déterminent le comportement

(sans aucune considération morale)1 ». La motivation peut aider l’engagement à prospérer,

mais elle n’en est qu’une partie et ne suffit pas à elle seule.

L’implication quant à elle est très proche de l’engagement, si bien que les deux termes sont

souvent confondus ou considérés de manière homonymique. S. Baggio et P.E. Sutter2 nous

éclairent toutefois sur la différence : selon eux, dans ce contexte managérial, l’engagement

sous-entend une idée de contrepartie : quand on s’engage, on attend quelque chose en retour.

Tandis que l’implication semble dépourvue de conditionnalité et est motivée par le souhait

intrinsèque de l’employé. Une distinction confirmée par les travaux de de Macey, W.H. &

Schneider B3.

Nous éviterons également un amalgame très répandu, celui de mélanger l’engagement des

salariés avec leur niveau de satisfaction. Comme nous le rappellent Tracy Maylett et Paul

Warner4, la satisfaction est nécessaire au développement de l’engagement, mais elle ne

1 Le Petit Robert 2014 2 S. BAGGIO ET P.E. SUTTER (2008), Neuf salariés sur dix impliqués par leur travail – Etude sur 3000 salariés

français 3 MACEY, W.H., & SCHNEIDER, B. (2008), The meaning of employee engagement. Industrial and Organizational

Psychology 4 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 6

l’entraine pas, et il est très possible d’obtenir leur satisfaction sans leur engagement, à coups de

dépenses de confort par exemple. Une différenciation confirmée par d’autres recherches5.

2.2 L’ENGAGEMENT, C’EST…

Selon Wikipedia

La version anglaise de Wikipedia définit ainsi l’engagement6 : « L’engagement est une

propriété de la relation entre une organisation et ses employés. Un employé engagé est

totalement absorbé et enthousiasmé par son travail et prend des initiatives afin

d’améliorer la réputation de l’organisation et ses intérêts. ».

Selon Gallup

La définition de Gallup est dans le même esprit : « Un haut niveau de connexion

émotionnel qu’un employé ressent pour son organisation, qui le pousse à produire un

effort discrétionnaire supplémentaire ».

Selon Tracy Malylett et Paul Warner7 de DecisionWise

« L’engagement est un état émotionnel dans lequel nous nous trouvons passionné,

énergique, et impliqué dans notre travail. Nous investissons le meilleur de nous-mêmes –

notre cœur, notre esprit, notre intellect et nos mains – dans le travail que nous

réalisons. ».

Selon Wilmar B. Schaufeli

Dans son modèle sur l’engagement au travail, Wilmar B. Schaufeli8 définit l’engagement

comme un état d’esprit positif, accompli et dédié au travail caractérisé par la vigueur, le

dévouement et l’absorption. Dans ce modèle, la vigueur est caractérisée par l’énergie et

la résilience ; le dévouement par l’implication dans son travail, son sens, l’enthousiasme

et le challenge ; tandis que l’absorption n’est autre que de la forte concentration, de celle

qui fait passer le temps rapidement. En résumé, les employés engagés déborderaient

d’énergie et d’enthousiasme.

5 MACEY, W.H., & SCHNEIDER, B. (2008), The meaning of employee engagement. Industrial and Organizational

Psychology 6 https://en.wikipedia.org/wiki/Employee_engagement, consulté le 12/08/2015 7 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement 8 WILMAR B. SCHAUFELI (2002)

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 7

En synthèse…

De ces définitions, nous pouvons retenir l’état émotionnel qui habite le salarié engagé, et en

conséquence duquel il déploie les fameux efforts discrétionnaires recherchés par les

organisations en vue d’atteindre des performances supérieures aux autres.

2.3 UNE PRISE DE CONSCIENCE EMERGEANTE

Au-delà de la simple définition de ce qu’est l’engagement, il nous a semblé important de

démontrer que l’intérêt porté à l’engagement des collaborateurs est relativement nouveau. Si

l’on se réfère à l’évolution de l’intérêt de la recherche pour « Employee Engagement » sur

Google, nous pouvons voir que la progression est soutenue depuis 2005. Nous pouvons

supposer que les organisations tentent à présent de s’approprier cette problématique.

Figure 1 Evolution de l'intérêt de la recherche "Employee Engagement" par Google Trends

Cet indice, basé sur la recherche des mots clés « Employee Engagement » ou tout autre

expression ou suite de mots jugée similaire par Google, est en progression constante depuis

2007, et a augmenté de près de 30% entre 2012 et 2015 (562 de janvier 2012 à août 2012 contre

728 sur les mêmes mois de 2015), et encore de 8% entre 2014 et 2015. Nous pouvons noter que

dans le même temps, les expressions « Employee Satisfaction » ou « Employee Motivation »

ont décru dans les mêmes proportions que la progression de « Employee Engagement ».

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 8

2.4 LES AVANTAGES ATTENDUS DU DEVELOPPEMENT DE L’ENGAGEMENT

Afin de vérifier que l’engagement réponde à la problématique posée, faisons le tour des études

sérieuses sur le sujet ayant eu pour objectif de corréler les objectifs visés avec le développement

de l’engagement.

Un meilleur recrutement par les pairs

Répondant ainsi directement à l’une des problématiques immédiates des organisations, une

enquête d’IPSOS de 20069 confirme que 67% des salariés engagés recommanderaient à un

proche d’y travailler.

En plus de diminuer les coûts de recrutement, d’accélérer les processus et d’attirer les talents,

soulignons également l’impact positif sur l’image de l’entreprise, qu’il s’agisse de l’image

renvoyée au public comme de l’image de la marque recruteur plus spécifiquement.

Moins de turnover et moins d’absentéisme

De la même manière que le recrutement, le départ d’un collaborateur coûte également cher aux

organisations. Perte de savoir-faire et de connaissance, pour lesquels l’organisation a investi du

temps et qui va profiter à une autre organisation, sans compter le coût du remplacement, de la

formation et de l’intégration d’un remplaçant. Les organisations ont donc tout intérêt à fidéliser

leurs talents le plus longtemps possible.

Dans cette optique, une étude de 200410 a ainsi confirmé que les salariés engagés sont 87%

moins susceptibles de quitter leur organisation. Mais qui dit moins susceptibles, ne dit pas

forcément démissions effectives mais seulement une absence de volonté de quitter

l’organisation au moment où la question est posée au collaborateur. Nous pouvons également

citer une enquête de Towers Perrin11 qui conclut par exemple que 66% des employés engagés

n’ont aucune intention de quitter leur employeur, contre 12% des non engagés.

Il faut toutefois comparer ce qui est comparable. En rentrant dans le détail, Gallup indique12

que dans les secteurs structurellement à fort turnover, les 25% d’organisations obtenant les

meilleurs résultats connaissent un turnover de 27% moins important que les 25%

9 IPSOS MORI (2006), Improvement and Development Agency, Lessons in Leadership 10 CORPORATE LEADERSHIP COUNCIL & CORPORATE EXECUTIVE BOARD (2004), Driving Performance through

Employee Engagement : a quantitative analysis of effective engagement strategies 11 TOWERS PERRIN, 2004 European Talent Survey: Reconnecting with Employees: Attracting, Retaining, and

Engaging. 12 http://www.gallup.com/services/169328/q12-employee-engagement.aspx, le 26/09/2015

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 9

d’organisations obtenant les plus mauvais résultats. Un bénéfice qui monte à 67% dans les

secteurs connaissant structurellement un turnover moins important.

Secteurs à turnover structurellement importants

Les plus mauvais résultats Gallup Q12 Les meilleurs résultats

25% 25% 25% 25%

De la même manière, le quart des organisations obtenant les meilleurs résultats au test Q12 de

Gallup connaissent ainsi 37% moins d’absentéisme.

Une analyse confirmée par une étude13 soulignant l’importante corrélation entre le turnover et

l’engagement des salariés.

Moins de présentéisme

Problème de beaucoup d’organisations modernes, le présentéisme désigne le fait d’être

physiquement présent sur son lieu de travail, mais sans y travailler. Difficile à identifier et plus

encore à mesurer, ce gaspillage a été évalué par une enquête de salary.com et AOL14 qui ont

évalué que les salariés gaspillaient ainsi 2 heures par jour en moyenne de travail, soit un coût

annuel estimé à plus de 750 milliards de dollars aux Etats-Unis.

Une meilleure qualité

Sur son site Internet15, Gallup annonce que les entreprises engagées (meilleur quart) connaissent

41% de moins de défauts de qualité que les entreprises dont les salariés sont peu engagés

(dernier quart).

De meilleurs résultats financiers

13 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement 14 SALARY.COM ET AOL (2008) (Source Business Digest n° 196 – mai 2009) 15 http://www.gallup.com/services/169328/q12-employee-engagement.aspx, le 26/09/2015

27% de turnover en moins dans

les 25% d’entreprises obtenant les

meilleurs résultats

Figure 2 Gain de turnover sur les secteurs à

turnover structurellement importants

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 10

L’amélioration des résultats de l’entreprise, c’est bien l’objectif final recherché. Des études

confirment ce que nous pouvions présupposer à la lecture de tous ces bénéfices. Par exemple,

des chercheurs anglais ont démontré que des entreprises avec un plus faible engagement des

salariés gagnent 32,7% de moins que celles avec un meilleur engagement des salariés, et

croissent 19,2% plus lentement16.

Une autre étude17 datant de 2006 a tenté directement de corréler l’engagement des salariés avec

les résultats financiers de leurs employeurs, se basant en l’occurrence sur leur résultat

d’exploitation. Selon les résultats de cette étude, le premier groupe d’entreprises, constitué

d’entreprises dont les salariés sont engagés, a constaté une hausse de 19,2% du résultat

d'exploitation. Le deuxième groupe, quant à lui, n'a pu que déplorer une baisse de 37,7 %.

Synthèse des bénéfices de l’engagement

Nous pouvons nous rendre compte ici que l’engagement des salariés peut apporter beaucoup

aux organisations. Bien que les bases de comparaison et les méthodologies utilisées pour obtenir

ces données soient hétérogènes, nous proposons ci-après une synthèse des avantages

documentés.

Figure 3 Gain espéré entre des organisations composées de collaborateurs engagés comparé aux moins engagés

* : nombre de défauts constatés dans les chaines de fabrication

16 D. MACLEOD ET N. CLARKE (2009), Engaging for Success: Enhancing Performance Through Employee

Engagement: A Report to Government 17 TOWERS PERRIN (2006)

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

Recrutement parles pairs

Turnover Absentéisme Qualité (nbdéfauts*)

Bénéficesentreprise

Croissanceentreprise

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 11

La question centrale posée est donc celle de l’engagement des équipes. Comment le

développer ?

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 12

3 COMMENT DEVELOPPER L’ENGAGEMENT

3.1 QUELQUES FAUSSES IDEES

Avant d’aller plus en détail sur le développement de l’engagement, il est important de faire le

point sur de fausses idées, pourtant très ancrées dans l’esprit des managers d’aujourd’hui. Des

idées qu’il nous faut battre en brèche afin de poursuivre la réflexion.

3.1.1 SUR LA REMUNERATION

De nombreuses études se sont penchées sur la question de l’impact de la rémunération sur

l’engagement des salariés. Leurs résultats démontrent l’impact très limité de l’évolution de la

rémunération sur l’engagement. Nous le savons depuis longtemps : des premières

expérimentations sur des animaux et la nourriture ont été publiées en 194918 pour valider cette

hypothèse. Une théorie confirmée par d’autres études depuis19, sur des humains cette fois. La

motivation par le monétaire peut dans certains cas avoir un effet très court terme, qui s’estompe

rapidement et n’a aucun impact sur le plus long terme.

La rémunération peut entrainer une baisse de la motivation intrinsèque

Voyons ensemble une parfaite illustration. Si vous pouviez retourner dans les années 1990, et

que vous auriez eu à deviner laquelle de ces approches permettrait d’imposer une encyclopédie :

18 HARLOW (1949) 19 EDWARD DECI (1969)

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 13

Figure 4 Encyclopédie : modèle rémunéré contre modèle libre

Depuis, Microsoft Encarta est tombé dans l’oubli, tandis que Wikipedia réunirait sans problème

des contributeurs, qui y passent parfois plusieurs dizaines d’heures par semaine, sans

compensation financière, juste pour la beauté du geste et la motivation du résultat au bénéfice

de la société ? Et l’exemple n’est pas isolé, le monde de l’Open Source étant là pour nous donner

quantité d’autres exemples : Mozilla Firefox, Linux, standards Internet… Leur motivation ?

Interrogés à ce sujet, ces contributeurs mettent en avant le challenge de résoudre une

problématique et la volonté de faire un cadeau à la communauté20.

Autre exemple saisissant : dans une étude21, des enfants que l’on récompense pour faire des

dessins passent non seulement moins de temps à faire des dessins que les enfants qui ne

bénéficient d’aucune récompense ; mais deux semaines après, le groupe d’enfants ayant eu des

récompenses démontrent toujours un intérêt significativement moins important pour le dessin

que le groupe qui n’en a pas reçu.

Depuis, de nombreuses expériences similaires chez des adultes ont démontré des résultats

similaires, notamment une grande méta-analyse de 199922. Des résultats tellement significatifs

que l’on peut raisonnablement en conclure, comme l’ont fait les auteurs de cette méta-analyse,

que « l’étude approfondie des effets des récompenses dans 128 expérimentations amènent à la

20 J. FELLER, B. FITZGERALD, S. HISSAM, ET K. R. LAKHANI (2005), Why Hackers Do What They Do:

Understanding Motivation and Effort in Free/Open Source Software Projects 21 MARK LEPPER, DAVID GREENE ET ROBERT NISBETT (1973), Undermining Children’s Intrinsic

Interest with Extrinsic Rewards: A Test of the ‘Overjustification’ Hypothesis,” Journal of

Personality and Social Psychology 28, no. 1 : 129-37 22 EDWARD DECI ET DEUX DE SES COLLEGUES (1999), dans une méta-analyse de 128 expérimentations

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Wikipedia

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 14

conclusion que des récompenses tangibles ont tendance à avoir un effet significativement

négatif sur la motivation intrinsèque ».

La rémunération peut entrainer une baisse des performances

Mais l’impact négatif des récompenses monétaires ne s’arrête pas là. Nous pourrions également

citer cette étude en Inde23 où le groupe le plus généreusement rémunéré est celui qui a obtenu

les moins bonnes performances.

La Federal Reserve américaine elle-même a confirmé le constat, en déclarant, à l’issue de ses

expérimentations, que « dans huit des neuf tâches que nous avons examinées lors de trois

expérimentations, de plus grosses récompenses ont mené à de plus mauvaises

performances »24.

La rémunération peut entrainer une baisse de la créativité

De la même manière, des études ont démontré l’impact négatif de la motivation extrinsèque

que représente la récompense en matière de créativité. L’exemple de la célèbre étude dite « de

la bougie »25 dans laquelle un individu doit trouver une solution pour fixer une bougie sur un

mur en utilisant le matériel fourni, a démontré que les participants ne bénéficiant pas de

récompense faisaient preuve de plus de créativité pour résoudre le problème.

La rémunération peut entrainer une addiction

Rémunérer spécifiquement un employé pour une tâche donnée, c’est également le meilleur

moyen pour s’assurer que ledit employé n’exécute plus jamais cette même tâche sans

contrepartie, nous enseigne Daniel Pink26. Et cette même prime d’être réclamée, ou tout du

moins attendue, la prochaine fois que l’employé l’exécutera. Le versement de cette prime ne

sera alors plus vécu comme un bonus, mais comme un dû, un statu quo. Là encore, de

nombreuses enquêtes sont venues illustrer ce phénomène27. Mais cela va plus loin, des études

23 DAN ARIELY, URI GNEEZY, GEORGE LOEWENSTEIN, NINA MAZAR (2005), Large Stakes and Big Mistakes 24 FEDERAL RESERVE BANK OF BOSTON (2005), Working Paper No. 05-11, 23/07/2005, dont un résumé peut être

trouvé dans “What’s the Value of a Big Bonus?” New York Times 20/11/2008. 25 GLUCKSBERG SAM (1962), Journal of Experimental Psychology, The influence of strength of drive on functional

fixedness and perceptual recognition, Vol 63(1), Jan 1962, 36-41 26 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us 27 ANTON SUVOROV, Addiction to Rewards, présentation lors de l’European

Winter Meeting of the Econometric Society le 25 octobre 2003. Mimeo (2003) disponible à l’adresse

http://www.cemfi.es/research/conferences/ewm/Anton/addict_new6.pdf.

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 15

ayant montré la forte proximité entre l’addiction à une drogue, et l’addiction aux récompenses

financières : du fonctionnement du cerveau au relâchement de dopamine28. Troublant !

La rémunération peut entrainer une déviance des comportements

Dans le même phénomène de contractualisation des tâches, Daniel Pink29 nous fait également

prendre conscience qu’une bonne action, comme le don du sang, est significativement réduite

lorsqu’on introduit une récompense financière : 52% d’un groupe a accepté de donner son sang

sans contrepartie, alors qu’ils n’étaient plus que 30% après la mise en place d’une rémunération

pour les donneurs.

Dans le même esprit, une étude israélienne30 a démontré que l’introduction de sanction

financière en cas de retard pour venir chercher son enfant à l’école n’entrainait aucune

amélioration de la situation, et avait même eu tendance à l’aggraver. Seul l’attachement des

parents au professeur a pu dans ce cas réduire significativement les retards.

La rémunération peut entrainer un court-termisme

Les entreprises poursuivant des objectifs financiers à court-terme, généralement le trimestre,

sont également les entreprises qui obtiennent les moins bonnes performances à plus long terme.

Enseignements sur la rémunération

Les enseignements concernant l’impact de la rémunération et plus spécifiquement sur la

récompense financière (ex prime) sur l’engagement sont multiples. Si cette technique peut

fonctionner avec des tâches dites algorithmiques, de type « Si […] Donc il faut […] » qui ont

bercé les générations précédentes (taylorisme), elles deviennent souvent contreproductives

lorsqu’il s’agit d’encourager du travail plus intellectuel et heuristique.

Nous comprenons maintenant que la financiarisation d’un certain nombre de tâches les

transforment en travail et, au-delà de cela, en relation contractuelle, ce qui va à l’encontre de la

recherche de l’engagement. Nous comprenons également que l’enjeu représenté par une

récompense – financière à fortiori –, réduit le périmètre de réflexion des individus en détournant

leur concentration sur cette récompense.

28 BRIAN KNUTSON (2001), Behavioral Addictions : Do They Exist ? 29 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth about What Motivates Us 30URI GNEEZY ET ALDO RUSTICHINI (2000), A Fine Is a Price, publié dans le Journal of Legal Studies 29

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 16

3.1.2 SUR LA CAROTTE ET LE BATON

Encore prégnante dans les pratiques du management d’aujourd’hui, la théorie de la carotte et

du bâton a eu ses heures de gloire. Et pour cause : cela a bien fonctionné pendant des décennies.

Illustration de cette pensée, le Taylorisme veut que des procédures très précises soient

communiquées aux salariés, qu’ils soient récompensés s’ils les exécutent parfaitement et dans

les conditions voulues, et qu’ils soient punis lorsque ce n’est pas le cas, le tout sous une

surveillance rapprochée. Une approche basique, tellement simple qu’elle a l’avantage d’être

comprise par tout le monde. Hors, nous savons aujourd’hui que si cette tâche fonctionne avec

des tâches algorithmiques, elles ne fonctionnent plus avec des tâches heuristiques, qui

demandent plus de créativité, de travail intellectuel et d’autonomie. C’est pourtant dans cette

direction que la société tend, les tâches algorithmiques ayant tendance à être automatisées,

tandis que l’univers des services, parfait représentant des tâches heuristiques, est devenu

prépondérant.

3.2 CREER LES CONDITIONS PREALABLES POUR OBTENIR LA SATISFACTION

Avant de parler de développement de l’engagement, différentes études que nous allons

développer nous apprennent que nous devons tout d’abord acquérir la satisfaction préalable de

l’employé. Purement transactionnelle, la satisfaction peut être achetée grâce à un

environnement de travail approprié, de la sécurité (mentale et physique), des perspectives, et

par une rémunération suffisante. A la condition, bien entendu, que l’état d’esprit de l’employé

soit propice.

3.2.1 ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL

Des études récentes nous éclairent sur l’importance grandissante que les employés accordent à

leur environnement de travail. Par exemple, l’étude 2015 de Paris Work Place 201531 nous

apporte de nombreux éclairages. Citons notamment :

88% des cadres interrogés jugent que leur bureau influe sur leur bien-être personnel.

80% d’entre eux sur leur motivation.

75% d’entre eux sur leur efficacité.

31 PARIS WORK PLACE 2015 (2015), Les cadres franciliens jugent leurs bureaux

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 17

80% estiment que leurs bureaux ont un impact sur l’image et la réputation de

l’entreprise.

74% sur la fierté des salariés.

73% sur le recrutement de nouveaux talents.

72% sur la fidélisation des salariés.

3.2.2 SECURITE ET PERSPECTIVES

Libérer l’esprit du collaborateur : pour cela, il ne faut pas que le collaborateur se demande de

quoi son lendemain sera fait au sein de l’organisation. S’il ne peut s’imaginer pouvoir rester

longtemps dans l’organisation, l’engagement ne pourra pas être développé32. De la même

manière, il doit pouvoir se projeter des perspectives d’évolution. Bref, les collaborateurs

doivent pouvoir être émotionnellement sécurisés.

3.2.3 LA REMUNERATION

Le troisième pilier des facteurs d’hygiène est la rémunération. Les organisations doivent offrir

des niveaux de rémunération compétitifs par rapport au marché, afin que le niveau de

rémunération ne devienne pas un facteur d’insatisfaction.

3.3 LA SATISFACTION, UN OBJECTIF INTERMEDIAIRE

Les recherches sur l’engagement font consensus : avant même de parler d’un éventuel

développement de l’engagement, certaines conditions doivent obligatoirement être remplies.

Sans elles, toute tentative de développement de l’engagement se ferait en pure perte. Nous

pouvons aisément faire le parallèle avec le restaurant. Si les couverts ne sont pas propres, votre

expérience sera négative, et ce peu importe si le plat servi est bon ou non. A l’inverse, si les

couverts sont propres, cela n’aura aucune incidence sur votre éventuelle expérience positive.

La propreté des couverts est tout simplement une condition obligatoire mais insuffisante. Nous

pouvons faire le parallèle avec l’engagement. Afin de développer l’engagement des salariés,

ceux-ci doivent avant tout être satisfaits. A contrario de l’engagement, la satisfaction est quant

à elle complètement transactionnelle et contractuelle. Elle peut s’acheter !

32 DAVID AUTISSIER ET FREDERIC WACHEUX (2006), Manager par le sens

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 18

3.3.1 LES DIFFERENCES FONDAMENTALES ENTRE LA SATISFACTION ET L’ENGAGEMENT

Pour nous aider à mieux comprendre cette distinction, les auteurs de MAGIC: Five Keys to

Unlock the Power of Employee Engagement33 nous dressent une liste des différences

fondamentales :

La satisfaction est transactionnelle ; l’engagement est transformationnel.

L’organisation a le pouvoir sur la satisfaction ; l’employé et l’organisation partagent

une responsabilité 50-50 dans l’engagement. La satisfaction est en ce sens imposée

(payée) par l’organisation, tandis que les employés doivent choisir de s’engager.

La satisfaction et la motivation impliquent seulement des sentiments ; l’engagement

implique sentiments et action.

La satisfaction permet d’atteindre le bonheur à court terme ; l’engagement est un

sentiment à long terme de but, vision, de sentiment d’appartenance, d’accomplissement

personnel et collectif.

La satisfaction intervient lorsque les facteurs dits d’hygiène sont remplis ; l’engagement

lorsque les employés ont la capacité, les raisons de le faire, la liberté de le faire, et savent

comment s’engager.

La satisfaction implique des facteurs d’hygiène, qui ne motivent pas les employés mais,

lorsqu’ils sont supprimés, les démotivent ; l’engagement est affaire de cœur, de

« tripes », d’esprit.

La relation employeur-employé basée sur la satisfaction est une relation contractuelle

dans laquelle chaque partie fait le minimum pour remplir sa partie du contrat ;

l’engagement contribue à ce que les employés effectuent les fameux efforts

discrétionnaires de bon cœur.

La satisfaction est coûteuse : augmentations de salaires, primes, aménagements de

bureau ; l’engagement demande de l’effort.

La satisfaction est une question de survie ; l’engagement est question de prospérité.

3.3.2 LE PIEGE DE LA SATISFACTION COMME OBJECTIF EN SOI

A ce petit jeu, de nombreuses organisations tombent dans le piège et confondent engagement

et satisfaction. En investissant des sommes considérables pour obtenir la satisfaction de leurs

employés, comme par exemple l’installation de complexes sportifs ou de détente, les entreprises

33 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 19

pensent développer leur engagement et tombent de leurs nuages quelques années après en ne

constatant pas d’amélioration. C’est donc un enseignement important : la satisfaction fait bien

partie des éléments indispensables à un futur développement de l’engagement, mais est

totalement insuffisante pour le développer.

3.4 L’EMPLOYE DOIT DISPOSER DE RESSOURCES PERSONNELLES ADEQUATES

Avant toute chose, nous l’avons évoqué, l’employé « à engager » doit se trouver prêt à l’être,

ou prédisposé. Il s’agit d’une condition sine qua non contre laquelle l’organisation ne peut rien.

Pour cela, l’employé doit posséder des ressources personnelles propres :

Figure 5 Les ressources personnelles nécessaires pour que l'individu soit engageable

Ces trois qualités peuvent se résumer par un capital psychologique positif minimum et ont été

démontrées comme étant significativement corrélées avec l’engagement au travail34. Une

corrélation confirmée par une étude de 200735. Par exemple, le sentiment de réaliser un travail

de qualité permet à l’engagé de générer ses propres feedbacks positifs, de l’appréciation, de la

reconnaissance et, in fine, du succès.

De ces traits, nous pouvons assumer que les employés les plus « facilement engageables »,

développent également cet engagement, cet optimisme et cette générosité à l’effort en dehors

34 BAKKER, A.B., & LEITER, M.P (2010), Work engagement: A handbook of essential theory and research 35 XANTHOPOULOU, D., BAKKER, A.B., DEMEROUTI, E., & SCHAUFELI, W.B. (2007), The role of personal resources

in the job demands-resources model

Sentiment d'efficacité, estime de

soi

Optimisme, espoir

Résilience

Prêt pour l'engagement

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 20

du travail, comme par exemple au sein d’une association. Une hypothèse que tendent à

confirmer des interviews menées sur des personnes ayant réalisé le test d’engagement UWES

(Utrecht Work Engagement Scale). D’autres études indiquent également que les personnes

ayant des attitudes positives prennent de meilleures décisions36, qu’elles sont plus motivées

pour atteindre leurs objectifs de carrière37, sont plus préoccupées par le développement

personnel de leurs pairs, résolvent plus efficacement les problèmes38, sont plus enclines à

obtenir de bons résultats dans leurs organisations39. Rien que ça ! Et nous aurions pu continuer

la liste.

3.5 DEVELOPPER L’ENGAGEMENT

Une fois les conditions nécessaires au développement de l’engagement réunies, nous pouvons

étudier les leviers de son développement. Par chance, la littérature scientifique est plutôt fournie

et globalement convergente. Pour développer l’engagement, il faut donc actionner des leviers

de plus haut niveau, que nous pourrions communément appeler les ressources professionnelles.

L’ensemble des leviers que nous allons développer ont été puisés dans la littérature scientifique,

en évitant les modèles lyriques des spécialistes auto-proclamés qui ne basent pas leurs

interventions sur des recherches sérieuses. Ces recherches sont cohérentes dans leur très grande

majorité, et nous avons puisé majoritairement dans les recherches ou méta analyses de Bakker

et Demerouti (2007), Schaufeli et Salanova (2007), Schaufeli et Al40, Daniel Pink41, James M.

Kouzes et Barry Z. Posner (2012), Tracy Maylett et Paul Warner42, Herzberg43, Edward Deci

et Richard Ryan.

3.5.1 DONNER DU SENS A LEUR ACTION

Donner du sens à son action, c’est le « pourquoi » : un besoin humain fondamental trop souvent

oublié et mal compris dans nos sociétés. Mal compris car il est souvent associé ou confondu

36 ALICE M. ISEN AND BARBARA MEANS (1983), The Influence of Positive Affect on Decision-Making Strategy 37 C. M. HAASE, M. J. POULIN ET J. HECKHAUSEN (2012), Happinness as a Motivator : Positive Affect Predicts

Primary Control Striving for Career and Educational Goals 38 ABIGAIL HAZLETT, DANIEL C. MOLDEN, AARON M. SACKETT (2011), Hoping for the Best or Preparing for the

Worst? Regulatory Focus and Preferences for Optimism and Pessimism in Predicting Personal Outcomes 39 J. BOEHM ET S. LYUBOMIRSKY (2008), Does Happiness Promote Career Success 40 SCHAUFELI ET AL. (2002), Utrecht Work Engagement Scale 41 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us 42 ABIGAIL HAZLETT, DANIEL C. MOLDEN, AARON M. SACKETT (2011), Hoping for the Best or Preparing for the

Worst? Regulatory Focus and Preferences for Optimism and Pessimism in Predicting Personal Outcomes 43 HERZBERG (1959), The Motivation to Work

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 21

avec la joie de vivre. Pourtant, on peut être heureux de vivre et ne pas ressentir de sens. C’est

ce qui se passe si un de nos souhaits immédiat est exaucé. A l’inverse, on peut ressentir le sens

de son action, tout en travaillant dans des conditions de travail difficiles44.

Peut-être parce qu’il est impossible de décrire cette sensation unique et propre à chacun. Mais

à un certain point, tout le monde est amené à se demander pourquoi il fait ce qu’il est en train

de faire, et ne pas avoir de réponse conduit à de mauvaises performances45. Probablement

l’étape la plus importante pour développer l’engagement, c’est aussi une étape dont la

responsabilité incombe à 50/50 entre l’employé et l’organisation. L’organisation ne peut donc

que créer un environnement où le sens peut se développer. Voici une petite revue de

l’environnement à développer pour permettre cet épanouissement.

Exprimer une vision partagée

Attention ici, cette partie est souvent mal comprise par les managers. Oui, un leader doit

exprimer sa vision, et fixer un cap via des objectifs partagés. Toutefois, il ne faut pas s’attendre

à ce que les employés se les approprient tels quels. Il faut développer une vision et des objectifs

dans lesquels la propre vision des collaborateurs peut s’exprimer en congruence avec celle du

leader. Le leader doit ici inspirer en touchant le cœur des gens, en générant des émotions, et ne

pas vendre outre-mesure sa vision. Une expérience racontée par Buddy Blanton46, programs

manager for strategy and development à Northrop Grumman Corporation, permet de

comprendre qu’une vision partagée et exprimée du leader ne suffit pas, et que le processus que

le leader a suivi pour se forger sa propre vision compte beaucoup afin que tout le monde soit

« à la même page ». Personne en effet n’apprécie de se voir imposer quoi faire ou où aller,

même si le chemin est bon. Les leaders doivent donc passer du temps à discuter avec leurs

collaborateurs, à écouter, à échanger sur ce sujet afin que des visions congruentes parmi les

employés puissent se propager dans l’organisation.

Au final, la vision stratégique doit être exprimée de façon succincte, simple et idéale, de façon

à ce que les collaborateurs puissent se projeter dans cette vision et mettre en perspective leur

travail ou « mission » dans cette vision à plus long terme.

Partage des valeurs

44 ROY F. BAUMEISTERA, KATHLEEN D. VOHSB, JENNIFER L. AAKERC & EMILY N. GARBINSKYC (2012), Some Key

Differences Between a Happy Life and a Meaningful Life, publié dans le Journal of Positive Psychology 45 ABE ARKOFF (1994), The Illuminated Life 46 JAMES M. KOUZES ET BARRY Z. POSNER (2012), The Leadership Challenge

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 22

Les valeurs de l’organisation doivent être clairement identifiées et communiquées. C’est

aujourd’hui le cas de la plupart des organisations. Le piège dans lequel elles tombent le plus

souvent est de ne pas s’y conformer. L’authenticité des valeurs affichées est primordiale. Les

valeurs ne se décrètent pas, ne s’énoncent pas, mais se démontrent par des actes récurrents.

Dans le cas contraire, les salariés perçoivent bien les différences entre les valeurs telles qu’elles

ont été communiquées avec les pratiques managériales qu’ils constatent. Cela dévalorise

l’organisation, ne permet pas d’aligner les valeurs des collaborateurs avec celles de

l’organisation, et peut même donner la sensation d’une manipulation cynique.

Donner du sens autrement

On n’y pense pas forcément au premier abord, mais il y a également d’autres moyens de donner

du sens à l’action des collaborateurs. Car le sens que l’on donne à son action pouvant être

différent d’une personne à l’autre comme nous l’avons vu, voici une liste non exhaustive

d’éléments qui peuvent permettre de donner du sens :

Le mentorat de nouveaux arrivants.

Participer à la préservation de l’environnement.

Améliorer la santé de ses pairs.

Gagner correctement sa vie afin d’envoyer ses enfants dans de grandes écoles.

Développer un produit innovant.

Un lien direct avec l’impact

Le chapitre suivant traite en profondeur de l’importance de l’impact. Avant de l’ouvrir, il

semble important de faire le lien avec le chapitre en cours. Donner du sens à son action, c’est

aussi faire prendre conscience aux équipes de la manière dont leur travail va affecter les

personnes qu’elles essaient de servir, au premier chef les clients, car personne n’aime à penser

que son travail est futile. L’impact doit exister et avoir un sens !

3.5.2 AVOIR DE L’IMPACT

Le résultat est à l’impact ce que l’objectif est au sens, les deux sont intimement liés. Souvent

confondu à tort avec l’intensité de l’effort fourni, l’impact est plus ici une sensation que son

travail est utile, produit des résultats et s’inscrit dans la démarche globale de l’organisation.

L’impact, c’est le « quoi », c’est ce qui permet de faire la différence, de compter pour quelque

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 23

chose. Et c’est exactement ce dont ont besoin les individus afin de se sentir investis d’une

mission. Pour arriver à ce stade, les individus ont besoin de :

Sentir des progrès dans leur travail, ce qui nous ramène à la thématique du

développement personnel.

Comprendre comment leur travail aide l’organisation à atteindre ses missions (ce qui

nous ramène à la vision de l’entreprise). Sans voir l’impact de leur travail, les individus

peuvent se sentir inutiles – voire impuissants –.

Nous pouvons également noter que l’impact contribue positivement à la sensation d’être

reconnu pour son travail, et donc à l’estime de soi… une des ressources personnelles nécessaires

pour qu’un employé soit engageable !

Parmi les pistes évoquées par les différents auteurs pour améliorer l’impact ressenti par les

individus, nous pouvons noter :

Exploiter la loi dite « law of impact proximity », soit la « loi de la proximité de

l’impact », qui stipule que l’impact ressenti est plus important lorsqu’il y a proximité

entre le travail réalisé et l’impact. Une loi depuis validée par de sérieuses recherches.

Dans l’une d’elles47, des individus à qui l’on demandait d’assembler des legos pour

former des robots ont obtenu de bien meilleures performances lorsque le résultat de leur

travail leur était montré pendant plusieurs minutes... même s’ils savaient que ces robots

legos seraient démontés quelques minutes plus tard !

Les feedbacks des managers, qui doivent être réguliers. Le salarié doit en effet avoir le

sentiment que ses actions sont reconnues dans l’organisation, et qu’on y prête attention.

Il est donc primordial de prendre le temps de vivre et consacrer les réussites48

Faire sentir aux individus que leur effort est utile et apprécié : leur donner des signes de

reconnaissance. Une étude49 a d’ailleurs démontré que les individus ressentant cela

avaient moins d’exigence salariale que les autres et travaillaient plus longtemps.

47 DAN ARIELY (2008), What Managers Can Learn from Legos 48 DAVID AUTISSIER ET FREDERIC WACHEUX (2006), Manager par le sens 49 JAMES HEYMAN ET DAN ARIELY (2004), Effort for Payment : A Tale of Two Markets

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Une information partagée à tous les étages de la hiérarchie permet d’améliorer

l’engagement. C’est ce qu’ont démontré tour à tour plusieurs études menées par

Rodwell et al50, Dillon et Flood51, ou encore Caldwell et al52.

Pour conclure, citons une étude qui exprime à elle seule l’étendue que la sensation d’avoir de

l’impact peut avoir. Dans une étude de 2007, des employés de call-center à qui une mission de

collecte de dons a été confiée ont augmenté les dons récoltés de 171% - excusez du peu -,

lorsqu’il leur a été permis de constater par eux-mêmes le résultat de leur collecte, en

l’occurrence une simple conversation de 5 minutes avec une personne ayant bénéficié de cette

récolte.

3.5.3 PERMETTRE L’AUTONOMIE : LES 4 « T »

L’autonomie laissée aux collaborateurs est un élément fondamental pour le développement de

l’engagement. Mais précisons ce qu’est à ce stade l’autonomie : c’est la faculté pour un individu

de choisir librement ses horaires de travail (Time), ses tâches (Tasks), comment effectuer ses

tâches (Technique), et avec qui les effectuer (Team). Ces quatre composantes forment les 4 T

de l’autonomie53.

Figure 6 Les 4 "T" de l'autonomie

50 RODWELL ET AL (1998) 51 DILLON ET FLOOD (1992) 52 CALDWELL ET AL (1990) 53 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us

Time Tasks

Technique Team

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L’autonomie a été identifiée comme un des trois piliers de la motivation par Daniel Pink54, et

le plus important des trois piliers des besoins humains par Edward Deci et Richard Ryan55, dont

les travaux font référence. Cette recherche de liberté est prégnante dans notre société, et cette

demande est plutôt en expansion, comme nous le démontrerons dans le chapitre sur la

génération Y. Nous pouvons nous en apercevoir en constatant la multiplication des

changements de carrière, de vocation, qui vont à l’encontre de l’intérêt financier des concernés,

ou de la multiplication des personnes souhaitant travailler pour leur propre compte. Pour s’en

convaincre, des expériences à grande échelle ont déjà prouvé l’incroyable efficacité de

l’autonomie.

Citons-en une : 360 petites entreprises américaines étudiées, dont la moitié a laissé de

l’autonomie à leurs collaborateurs, et l’autre moitié a fonctionné en mode « contrôle » avec une

direction « top-down ». Le résultat ? Les entreprises qui ont misé sur l’autonomie ont crû quatre

fois plus vite que le groupe « contrôle » et ont connu 66% de turnover en moins56 !

Time : le choix des heures de travail

Plusieurs recherches et expérimentations récentes tendent à démontrer l’intérêt que peut avoir

un employeur à laisser une latitude dans le choix du temps à ses collaborateurs, vécue comme

une véritable marque de confiance, une reconnaissance et un avantage certain. Nous pouvons

citer l’expérience récente de la chaine américaine Best Buy, ayant introduit le programme

ROWE (Results Only Work Environment), soit « Seul le résultat compte ». Chaque individu a

la possibilité de travailler quand il le souhaite, d’où il le souhaite, tant que le travail est fait.

Développé par Cali Ressler et Jody Thompson57, le programme a obtenu des résultats très

positifs pour Best Buy : HBR fait état d’une économie de 2,2 millions de dollars d’économies

en trois ans. En date de mars 2013, 40 autres organisations auraient déjà suivi cette voie58. Au

global, la productivité grâce au programme aurait augmenté de 35%, le turnover serait

nettement abaissé, et les employés auraient arrêté de compté leurs heures59.

Tasks : le choix des tâches

54 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us 55 EDWARD L. DECI ET RICHARD M. RYAN (2008), Facilitating Optimal Motivation and Psychological Well-Being

Across Life’s Domains 56 PAUL P. BAARD, EDWARD L. DECI, ET RICHARD M. RYAN (2004), Intrinsic Need Satisfaction: A Motivational

Basis of Performance and Well-Being in Two Work Settings 57 CALI RESLER ET JODY THOMPSON (2010), Why Work Sucks and How to Fix It : The Results-Only Revolution 58 https://hbr.org/2013/03/goodbye-to-flexible-work-at-be/, consulté le 05/12/2015 59 TAMARA J. ERICKSON (2008), Task, Not Time: Profile of a Gen Y Job (HBR)

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Il s’agit ici d’impliquer les collaborateurs en leur laissant une latitude pour choisir les tâches

qu’ils vont exécuter. L’illustration la plus célèbre de cette politique est la fameuse politique des

20% de Google, où les employés peuvent choisir librement les projets sur lesquels ils travaillent

durant cette période, à la seule condition de montrer ce qui aura été réalisé à la fin. Si elle est la

plus célèbre, Google n’est toutefois pas la seule entreprise à avoir tenté cette approche. Nous

pouvons citer 3M par exemple, ou encore Atlassian qui, après avoir introduit cette démarche,

l’a renforcée à plusieurs reprises face aux excellents résultats.

Technique : le choix du « comment »

Laisser l’autonomie des individus sur le « comment », c’est l’antithèse du taylorisme. Pourquoi

donc remettre en cause un modèle qui a eu un tel succès passé ? Parce que nous avons démontré

que ce fonctionnement fonctionne bien dans un environnement « algorithmique », où chaque

geste peut être pensé à l’avance et que la créativité de l’individu n’a aucune importance. Mais

dès lors que l’organisation souhaite faire appel à la créativité d’un individu, lui laisser de

l’autonomie a un résultat positif sur ses performances. C’est ce que nous avons démontré dans

le chapitre sur les fausses idées sur la rémunération et sur la carotte et le bâton. Des

organisations ont pu tester cette approche avec succès. Citons l’exemple de Zappos.com, site

de e-commerce (depuis propriété d’Amazon), qui, au lieu d’installer son call-center de support

offshore, l’a développé aux Etats-Unis, avec une directive simple et unique à ses

collaborateurs : « répondre au client et lui apporter des solutions ». Entreprise de taille pourtant

modeste face à des mastodontes, Zappos.com s’est régulièrement classée dans les meilleures

entreprises américaines pour son support au client, tout en connaissant un turnover de ses

effectifs particulièrement bas, un fait rarissime dans ce secteur. D’autres entreprises sont allées

plus loin, et un mouvement se développe aux Etats-Unis permettant aux répondants de call-

centers d’exercer depuis leur domicile (« homeshoring »).

Team : choisir ses collègues de travail

Dernier pilier de l’autonomie, celui du choix des hommes et femmes avec lesquels nous

pouvons travailler. Traditionnellement, les collègues de travail sont, à l’instar d’une famille,

composés de personnalités que nous n’avons pas choisies. « On choisit ses amis, pas sa

famille », nous pourrions donc ajouter « ni ses collègues de travail ». Or, en nous inspirant

d’expériences réussies, nous pouvons imaginer des voies pour permettre aux collègues de

sélectionner leurs collègues, en les impliquant davantage et favorisant l’esprit tribal « bande de

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 27

potes », dont nous soulignerons l’importance pour le développement de l’engagement dans un

chapitre suivant.

Nous pouvons ainsi citer l’exemple de GORE-TEX, qui délègue aux membres d’une équipe le

choix de leurs futurs collègues, responsabilité traditionnelle d’un manager ou d’un responsable

des ressources humaines. Nous pouvons également développer cette autonomie dans le cadre

de l’autonomie sur les tâches : si pendant une période limitée les collaborateurs travaillent sur

ce qu’ils souhaitent, une opportunité leur est offerte de choisir des collègues partageant leur

motivation. Des équipes ainsi co-construites ont « doucement, mais sûrement, poussé

l’organisation sur son axe », a pu constater Bharat Mediratta à propos de Google60.

L’autonomie laissée aux collaborateurs a également des ramifications dans les autres leviers du

développement de l’engagement. Premièrement, elle est vécue comme une marque de

confiance. Impliquée plus en profondeur dans les processus de l’organisation, elle développe la

sensation d’être connecté à l’organisation, aux tâches et avec ses collègues (voir chapitre « Se

sentir connecté »). Elle permet enfin aux individus concernés d’avoir plus d’impact (voir

chapitre précédent). Et cela sans parler des autres avantages reconnus de l’autonomie, comme

la réduction du stress.

Toutes ces théories sont fascinantes, mais il convient de garder raison. Toutes ne sont pas

transposables facilement dans toutes les organisations. Elles nécessitent une organisation rodée,

un savoir-faire, une exécution par étapes, une maturation, et un délai pour la mise en place que

toutes les organisations ne peuvent pas forcément s’offrir dans le flot de leurs contraintes

quotidiennes. Mais en s’inspirant de ces éléments, une exploitation de ces concepts est possible

en gardant à l’esprit que l’autonomie doit avoir des limites : celles fixées par l’organisation au

sein de laquelle elle peut et doit s’exprimer.

3.5.4 ENCOURAGER LE DEVELOPPEMENT PERSONNEL

Le développement personnel est un autre des piliers nécessaires au développement de

l’engagement des organisations. Le développement personnel, menant à la maîtrise et à

l’accomplissement, est également un besoin humain universel pour certains61, un point essentiel

à la motivation pour d’autres62. Dans tous les cas, et quelle que soit la manière dont les grands

60 BHARAT MEDIRATTA (2007), à Julie Bick dans The Google Way: Give Engineers Room (NYT) 61 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement 62 DANIEL PINK (2009), Drive, the Surprising Truth About What Motivates Us

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 28

auteurs s’étant penchés sur ces thématiques le modélisent, on retrouve bien cette idée liée au

développement de l’individu comme puissante source de libération des énergies.

Pour permettre le développement personnel des individus, l’organisation doit les pousser à

sortir de leur zone de confort afin de les faire progresser, en veillant bien à ne pas tomber dans

le travers de la génération de stress.

Figure 7 L'équilibre entre stress et challenge

On comprend dès lors qu’il ne doit pas être confondu avec la promotion ou à de quelconques

primes, qui s’apparenteraient ici plutôt à de la motivation extrinsèque. Autre risque identifié :

celui de mal apprécier la façon dont les individus peuvent percevoir une opportunité de

développement personnel : comme une invitation, ou comme une menace ? L’autre avantage

du développement personnel c’est que les individus ont tendance à exprimer leurs meilleurs

talents quand ceux-ci sont requis. Et quoi de mieux pour exprimer tous leurs talents que de les

faire progresser pour aller chercher – sans jamais les dépasser – leurs limites ?

Un autre modèle se dégage des études qui ont été réalisées sur le sujet. Nous pouvons

comprendre qu’offrir régulièrement des opportunités de développement, du support et de

l’accompagnement dont ils peuvent avoir besoin poussent une majorité des individus vont

s’engager. A l’inverse, fermer les opportunités peut désengager les individus, qui peuvent

devenir apathiques, voire quitter l’organisation.

Le développement personnel permet également d’atteindre un niveau émotionnel appelé

« Flow » rendu célèbre par Csikszentmihalyi, pour qui il s’agit d’« une personne effectuant une

activité dans laquelle il est complètement immergé, avec une sensation de concentration

énergique, d’implication totale, et de plaisir à effectuer ladite activité. En substance, Flow est

caractérisé par une absorption complète dans ce que quelqu’un fait. »63. Une définition qui

n’est pas sans rappeler… la définition de l’engagement. La leçon que nous pouvons en retenir,

c’est que nous sommes plus engagés dans des tâches volontairement et assurément difficiles,

mais réalisables, que l’on a choisies, dont l’objectif en vaut la chandelle, dans une recherche

63 MIHALY CSIKSZENTMIHALYI (1990), Flow : The Psychology of Optimal Experience

Challenge

Stress

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pleine et entière d’atteindre l’excellence. Une voie menant à la compétence inconsciente, dont

le modèle vous est résumé ci-dessous.

Figure 8 Les quatre étapes de l'apprentissage

3.5.5 SE SENTIR CONNECTE

Développer les connexions des collaborateurs, c’est développer le “nous” en lieu et place du

“je”. C’est développer l’esprit d’équipe et les valeurs qui y sont associées, comme l’entraide.

C’est leur permettre de s’épanouir dans leur travail. Un besoin humain profond, qui pousse les

individus. Pour s’en convaincre, on peut se rappeler qu’il y a sur terre plus d’individus disposant

d’un téléphone portable que d’individus disposant de toilettes64 ! Un besoin somme toute

identifié de longue date : il s’agit de la 3e strate des besoins de la pyramide de Maslow, juste

au-dessus des besoins dits de sécurité. Marissa Meyer ne s’y est pas trompée. Arrivée à la tête

de Yahoo, elle a interdit le télétravail à ses collaborateurs. Bien qu’admettant que les

télétravailleurs étaient plus productifs car moins dérangés, elle y préfère la collaboration et

l’innovation qui, selon ses dires, sortent du travail d’équipe65. Elle a ainsi mis les connexions,

carburant de la collaboration, avant l’autonomie et la productivité à court terme. Un choix

discutable dont l’avenir nous dira s’il était juste, mais qui démontre l’importance des

connexions.

64 ONU (2013), Deputy UN chief calls for urgent action to tackle global sanitation crisis, consultable sur

http://www.un.org/apps/news/story.asp?NewsID=44452 (consulté le 30/11/2015) 65 http://fortune.com/2013/04/19/marissa-mayer-breaks-her-silence-on-yahoos-telecommuting-policy/, consulté

le 01/12/2015

Incompétence inconsciente

Incompétence consciente

Compétence consciente

Compétence inconsciente

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 30

Les connexions, ce sont là encore une sensation : celle d’appartenance à quelque chose de plus

grand que soi. Mais qu’appelle-t-on exactement les connexions ? Tracy Maylett et Paul

Warner66 nous éclairent à ce sujet en dénombrant cinq types de connexions :

Sociales : le groupe de personnes autour de vous, avec lequel vous passez votre temps.

Avec l’organisation : elle se crée grâce à des facteurs tels qu’être reconnu par

l’organisation, ou une expérience de travail très agréable. Elle s’illustre souvent par une

identification de l’individu à son organisation.

Avec la mission : lorsque l’individu s’approprie la mission de l’organisation, et va

jusqu’à mettre – jusqu’à un certain point –, ses besoins après ceux de l’organisation.

Avec les valeurs : lorsque l’organisation respecte et partage vos propres valeurs, et que

l’objectif de l’organisation est congruent avec ces valeurs.

Avec les tâches : lorsque la tâche, et l’importance de son accomplissement, pousse des

personnes à se connecter afin de mener ces tâches à bien.

Avec les tâches et la mission

Des connexions s’avèrent indispensables au développement du sens donné à son action. Le

développement de connexions pouvant transcender, comme lorsque les employés de Mercedes-

Benz en Afrique du Sud ont rapidement amélioré la qualité des voitures sortant de leur usine

dès qu’il leur a été donné l’opportunité de fabriquer une voiture pour Nelson Mandela à sa sortie

de prison. Et, dans le sens contraire, une absence de connexion peut mener à une perte de sens,

dans son travail et dans la vie67.

Nous pouvons par ailleurs établir là encore un pont avec la vision qui doit être partagée de façon

congruente. Comme nous l’avons vu, la vision doit être propagée à l’aide de discussions et

d’explications sur le cheminement intellectuel ayant mené à cette vision. Dès lors, nous

comprendrons aisément que si la « base » n’a jamais l’occasion de discuter avec son (ses)

leader(s), cela risque bien de ne jamais arriver !

Avec ses collègues

L’expérience des études récurrentes autour du Gallup Q12 par DecisionWise leur fait affirmer

qu’on retrouve significativement plus d’amitiés réelles entre certains collaborateurs dans les

66 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement 67 TYLER F. STILLMAN, ROY F. BAUMESTEIR ET FRANK D. FINCHAM (2009), Alone and Without Purpose : Life

Loses Meaning Following Social Exclusion, publié dans le Journal of Experimental Social Psychology 45

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organisations engagées que dans les autres, d’où l’existence de la question « J’ai un de mes

meilleurs amis […] » dans le questionnaire d’engagement que nous utiliserons.

Une grande entreprise a joué la carte de cette approche. Unilever, en 2008, après une baisse du

moral de ses employés suite à de difficiles réorganisations, a lancé le programme « Agile

Working » auprès de 100 000 de ses 170 000 collaborateurs. L’idée était de développer la

connexion à l’entreprise cette fois, en imposant l’idée que les collaborateurs sont une part

entière et appréciée de l’organisation. Cela s’est concrétisé par la liberté donnée aux individus

de travailler où ils le souhaitent, quand ils le souhaitent, tant que le travail est fait. Et pour ceci,

Unilever a fourni des moyens de communication très souples (ex Skype). Grâce à cette

expérience les employés d’Unilever se sont sentis reconnus et ont ressenti le soin que leur

portait leur direction. Les résultats : hausse de la productivité, de la satisfaction perçue au

travail, d’employés souhaitant rester chez Unilever, de la santé des employés (plus d’exercices,

de sommeil), de la facilité à recruter, moins de turnover et une réduction des coûts (surface des

bureaux, moins de déplacements professionnels)68.

Avec l’organisation

Pour évoluer au stade où l’individu se sent faire partie intégrante de l’organisation, avec donc

cette sensation recherchée, créatrice de valeur, la connexion de l’individu avec l’organisation

doit passer par trois stades.

Figure 9 Les quatre étapes de connexion à l'organisation

68 TRACY MAYLETT ET PAUL WARNER (2014), MAGIC: Five Keys to Unlock the Power of Employee Engagement,

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S'accorder

Sentiment d'appartenance

Se sent partie de l'organisation

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Durant la première étape, l’individu se sent en accord avec l’organisation : il répond à un besoin,

et ce besoin est rempli. Vient ensuite un sentiment d’appartenance : il partage les valeurs de

l’entreprise, aime son travail, y trouve une source de motivation et est récompensé. Vient enfin

l’intégration, où l’individu se sent partie intégrante de l’organisation. Lorsqu’on parle de

l’organisation, l’individu se sent directement concerné.

Pour comprendre le cheminement menant un individu à se sentir pleinement connecté avec

l’organisation, Jos De Neve nous fournit la matrice de lecture de l’état d’esprit tribal des

individus en fonction de leur langage69 :

Figure 10 Langage utilisé par le groupe/individus traduisant leur état d’esprit

3.5.6 DEVELOPPER LA CONFIANCE

La confiance est une composante essentielle au développement de l’engagement. Dans une

étude de 201070 dédiée à l’effet de levier sur la confiance dans les PME, des auteurs en viennent

à modéliser l’effet que les différentes composantes de la confiance ont sur l’engagement. Une

modélisation illustrée par la figure ci-dessous :

69 JOS DE NEVE, Le changement, les cultures (2014) 70 ELSA BELLIATO, CAROLINE CHAMPAGNE, ISABELLE PRIM-ALLAZ ET MARTINE SEVILLE (2010), L'effet de levier

de la confiance sur l'engagement dans l'hypercroissance durable des PME

1 : Hostilité et désespoir

"La vie est une merde"

2 : Victime apatique

"Ma vie est une merde"

3 : Le guerrier solitaire

"Je suis bon, vous ne l'êtes pas"

4 : La fierté de la tribu

"Nous sommes bons, pas les

autres"

5 : L'émerveillement

innocent

"La vie est magnifique"

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Figure 11 L’effet de la confiance sur l’engagement

Au-delà de cette modélisation, on comprend aisément le désengagement qui peut résulter d’un

manque de confiance, résumée en ces mots par Valérie Petit, professeur EDHEC lors de sa

présentation « Résultats de l’enquête nationale sur le leadership » le 27 mars 2015 :

« Je reste à ma place, ce n’est pas mon boulot ; c’est à quelqu’un d’autre de le faire ».

« Une perception que l’on se fait avoir et que d’autres employés ont plus qu’ils ne

méritent ».

« La peur de prendre des risques, de s’exposer au regard malveillant des autres ou

d’avoir tort ».

Dans une autre étude71, Robert M. Morgan et Shelby D. Hunt ont pu établir des connexions

directes entre la confiance et l’incertitude, la fonctionnalité des conflits, la coopération et, bien

entendu, l’engagement. Cette étude nous éclaire également sur les ingrédients nécessaires à

l’établissement de la confiance : des valeurs partagées, une bonne communication et l’absence

de comportement opportuniste. Un modèle illustré par le schéma ci-dessous :

71 ROBERT M. MORGAN ET SHELBY D. HUNT (1994), The Commitment-Trust Theory of Relationship Marketing

• Compétence

• Bienveillance

• Honnêteté

Confiance• Calculé

• AffectifEngagement

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Figure 12 Causes et effets sur la confiance et l'engagement

James M. Kouzes et Barry Z. Posner72 ont quant à eux démontré que la création d’un climat de

confiance avait un impact important sur les relations des membres d’une organisation, et plus

précisément sur leur collaboration. La mise en place de cette confiance initiale étant même

d’après ces auteurs une condition sine qua non pour l’émergence du “nous”.

Le développement de la confiance a également un lien direct avec le levier « Donner du sens ».

En effet, des études ont montré que les organisations délivrant en fonction du sens et de la

performance étaient perçues comme des modèles et inspiraient une plus grande confiance73.

Dans le même sens, les organisations qui, en plus de communiquer sur les aspects financiers,

communiquent largement sur le sens de son action et l’objectif final (la vision) exprimée

inspirait également la confiance74.

Le développement de la confiance a également un impact direct sur le développement des

connexions en jouant un rôle fondamental dans leur construction. La faculté des organisations

à établir une confiance à tous les étages permet aux connexions de s’épanouir pour l’intérêt de

l’organisation. C’est aussi là que les valeurs de l’organisation entrent en jeu. Les valeurs sont-

72 JAMES M. KOUZES ET BARRY Z. POSNER (2012), The Leadership Challenge 73 BURSON-MARSTELLER (2008), Corporate Success - Driven by Purpose or Performance? 74 TANIA BRAGA, JOHN WEEKS, AILEEN IONESCU-SOMERS, PHILIPPE MARGERY ET APARNA DOGRA (2010),

Communicating Corporate Purpose

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 35

elles congruentes avec les individus en place ? Les valeurs affichées sont-elles bien

communiquées, affichées ? Mais surtout, sont-elles dignes de confiance ? Les actions

démontrent-elles les valeurs communiquées ?

Pour conclure, nous soulignerons que la confiance s’acquiert à tous les niveaux. Confiance entre

la direction et les collaborateurs, entre les managers et les collaborateurs, entre les

collaborateurs eux-mêmes. L’avantage pour l’organisation est que la confiance est purement

transactionnelle. Si une organisation décide de gagner la confiance de ses équipes, elle n’a

« qu’à » faire preuve dans le temps de fiabilité entre ce qu’elle dit et ce qu’elle fait, et démontrer

qu’elle fait siens les intérêts de ses collaborateurs.

3.6 SYNTHESE DU MODELE DE L’ENGAGEMENT

Nous vous proposons une synthèse des différents leviers du développement de l’engagement

que nous venons d’examiner. Cette synthèse permet de proposer aux organisations un modèle

simplifié, compréhensible et actionnable facilement.

Figure 13 Synthèse du modèle de l'engagement

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 36

3.7 ANALYSE SYSTEMIQUE DU DEVELOPPEMENT DE L’ENGAGEMENT

L’analyse systémique du développement de l’engagement nous permet quant à elle

d’appréhender la complexité de ses mécanismes déclencheurs. En nous basant sur notre

démonstration, notre analyse permet d’identifier en un seul graphique la majorité des relations

de causes à effets permettant de développer cet engagement.

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 37

Figure 14 Analyse systémique du développement de l'engagement

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 38

4 LA GENERATION Y OU « MILLENNIALS »

Les organisations interpellent également sur la problématique liée aux adaptations rendues

nécessaires par l’émergence de la génération Y qui, nous expliquent-t-elles, leur posent des

problèmes pour les satisfaire. Une première impression que nous partageons partiellement :

dans le cadre des ateliers, les participants, pour beaucoup de la génération Y, ont manifesté

beaucoup d’attente de flexibilisation du travail notamment, mais aussi d’exigences sur les

critères dits d’hygiène (environnements et outils de travail, rémunération).

Les Millenials sont un sujet d’actualité et représentent un enjeu majeur pour assurer le

développement serein des organisations. Au-delà des préjugés et des idées préconçues, nous

engagerons donc des recherches complémentaires sur ce sujet afin de déterminer quelles sont

les spécificités des membres de cette génération, et comment nous pouvons utiliser cette

connaissance pour développer leur engagement.

4.1.1 UNE DEFINITION ENCORE FLOUE

La génération Y succède ainsi à la génération X, et précède la génération Z, qui n’est pas encore

rentrée sur le marché du travail.

Figure 15 Frise chronologique des générations

Au-delà de cette lapalissade, il convient de préciser les dates retenues qui définissent la

génération Y afin d’en préciser les spécificités. Et pour les préciser, il n’existe pas de consensus,

aucune source ne faisant autorité. Voici une tentative de récapitulatif des dates couvertes par

cette génération en fonction des sources qui nous ont semblé faire le plus autorité. Le tableau

ci-dessous représente les bornes d’années de naissance retenues en fonction des

sources retenues :

Génération Z Génération Y Génération X Baby-

boomers

Génération

silencieuse

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 39

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

Josiam & Al75

Sullivan & Heitmeyer76

Yeaton77

Bruce Horovitz78

Pew Research79

PwC & Université South California80

Marc McCrindle81

Marc McCrindle82

Time Magazine83

Sarah Sladek84

Morton L.P.85

Pew Research Center86

Tulgan, B & Al87

Vaisilescu, R.88

Raines, C. & Armsparger A.89

Wilson, M. & Gerbeer, L.E.90

Figure 16 Bornes d'âge retenues pour la qualification de la génération Y

Ces différences, loin d’être exhaustives, permettent d’entrevoir la difficulté des bases

méthodologiques utilisées dans les différentes enquêtes.

Toutefois, afin de nous faire une idée sur le poids démographique de cette génération, et donc

de l’importance de ses éventuelles spécificités pour les organisations, faisons le choix purement

arbitraire de considérer les personnes nées entre 1981 et 2000. L’étude des données

75 JOSIAM ET AL. (2009) 76 SULLIVAN & HEITMEYER (2008) 77 YEATON (2008) 78 BRUCE HOROVITZ, (2012), After Gen X, Millennials, what should next generation be? 79 http://www.pewresearch.org/fact-tank/2015/01/16/this-year-millennials-will-overtake-baby-boomers/ (2015),

consulté le 8 août 2015 80 PWC, LONDON BUSINESS SCHOOL ET UNIVERSITÉ SOUTH CALIFORNIA (2013), PwC’s NextGen: A global

generational study 81 MARC MCCRINDLE (2005), Report on the Attitudes and Views of Generations X and Y on Superannuation 82 MARK MCCRINDLE (2011), Generations Defined 83 TIME MAGAZINE (mai 2003) 84 SARAH SLADEK (2014), Kowing Y: Engage the Next Generation Now 85 MORTON L.P. (2002), Targeting generation Y, public relation quarterly. 86 PEW RESEARCH CENTER (2010) generation 2010, en ligne :http://pewinternet.org/Reports/2010/Generations-

2010.aspx consulté le 18/3/2011 87 TULGAN, B & AL (2001), Managing generation Y: global citizens born in the late seventies and early eighties 88 VASILESCU, R. (2011), The Romanian generation Y, preparing today’s students for tomorrow’s job market,

Annals of Spiru Haret University, Economic Series. 89 RAINES, C. & ARMSPARGER A. (2010), Millenials at work 90 WILSON, M. & GERBER, L.E (2008), How generational theory can improve teaching: strategies for working with

the Millenials, current in teachning and learning, vol. 1, n°1,

http://www.worcester.edu/Currents/Archives/Volume_1_Number_1/CurrentsV1N1WilsonP29.pdf, consulté le

09/08/2015.

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 40

démographiques au 1er janvier 2015 de la France métropolitaine publiées par l’INSEE nous

démontre que les Millennials représenteront en 2016 34% des personnes en âge de travailler

(2391 à 6292 ans). Si nous nous projetons 5 ans plus loin, en 2021, les Millennials représenteront

alors 44% du total.

4.1.2 LES SPECIFICITES REELLES DE LA GENERATION Y

Capricieuse, irrespectueuse, réclamant ses droits en oubliant ses devoirs, égocentrique, infidèle,

superficielle, indifférente. Voici quelques-unes des idées reçues dont est affublée la génération

Y, largement relayées par les titres de la presse managériale bienpensante. Qu’en est-il

exactement ? Comment faut-il, le cas échéant, adapter les organisations pour développer

l’engagement de cette population ?

L’étude de la bibliographie moderne et des enquêtes laisse toutefois songeur lorsque nous

rentrons dans les détails méthodologiques. Les résultats de ces enquêtes poussent à les

relativiser : ces enquêtes ont l’habitude de comparer des populations d’âge différents (ne

retenant pas toutes les mêmes bornes d’âge), en retenant dans leurs échantillons des populations

à des moments de leur socialisation très différents, retenant par exemple bien souvent des

étudiants pour représenter la génération Y. Ces enquêtes sont également dépourvues d’axe

scientifique, se contentant le plus souvent la méthodologie de l’enquête par questionnaire.

Enfin, les résultats semblent caricaturaux. Un individu né en 1979 serait donc si différent d’un

autre né quelques jours plus tard, en 1980 ? Pourtant, personne ne nie la réalité des différences

culturelles entre les jeunes d’aujourd’hui et ceux d’il y a 30 ans.

Nous avons trouvé des recherches avec des protocoles sérieux apportant un peu de contradiction

dans ce monde policé des consultants spécialistes auto-proclamés.

4.1.2.1 QUELLE REALITE SCIENTIFIQUE ?

C’est Jean Pralong93, dans son étude « La génération Y au travail : un péril jeune ? » (2009),

qui met le premier les pieds dans le plat. Aucune recherche scientifique n’est venue appuyer

jusqu’à présent toutes les déclarations de la presse managériale spécialisée. L’occasion pour

Jean Pralong de combler ce manque. Son étude conclue que les différences supposées liées à la

génération Y tiennent principalement à l’appartenance sociale des individus plus qu’à leur âge

91 INSEE (2007), http://www.insee.fr/fr/insee_regions/idf/themes/dossiers/mobilite/docs/mob_chap2.pdf 92 CNAV (2015), http://www.statistiques-recherches.cnav.fr/retraites-de-droit-personnel.html 93 JEAN PRALONG (2009), La génération Y au travail : un péril jeune ?

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 41

de naissance. L’effet de la socialisation est ainsi plus puissant que l’effet générationnel et

pousse à une normalisation des comportements au fur et à mesure que les individus s’installent

dans la vie sociale. Et de conclure que le plus gros risque auquel les managers font face avec la

nouvelle génération est celle du désengagement.

4.1.2.2 QUELLES DIFFERENCES RESTE-T-IL ?

La deuxième étude est celle de François Pichault et Mathieu Pleyers dans « Pour en finir avec

la génération Y… Enquête sur une représentation managériale » (2010). Cette étude a voulu

vérifier si les différences entre les générations énoncées par les consultants et illustrées dans les

enquêtes tenaient vraiment à la borne d’âge ou plutôt à l’état de socialisation des individus.

Cette enquête conclue que la majorité des enquêtes publiées sont biaisées par le fait que les

répondants « Y » sont encore étudiants. Les mêmes questions aux mêmes générations quelques

années après leur premier emploi, et les réponses se rapprochent significativement de celles des

générations précédentes.

Ci-dessous, le tableau issu de l’enquête de Pichault et Pleyers :

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 42

Catégories Caractéristiques Items de l’enquête Différences

significatives

entre

générations

Recherche de sens

au travail

Sens moral et civique, besoin d’un

travail avec signification

Sentiment d’être utile aux

autres Non

Besoin

d’accomplissement

Intérêt pour le travail et les défis

proposés, attentes en matière

d’éducation continuée, attitude

positive à l’égard du travail

Réalisation d’un projet

personnel clair Non

Développement des

compétences

Oui : plus

important

Possibilité de se

développer Non

Importance des

programmes de formation

continuée pour

attirer/retenir

Non

Recherche

de feedback

Besoin de gratification rapide en

termes monétaires ou de promotion,

une fois les objectifs atteints,

recherche de feedback par rapport à

l’engagement professionnel

Besoin de reconnaissance Non

Souci de bénéficier d’une

rémunération nette

suffisante Non

Intégration vie

privée/ vie

professionnelle

Indifférenciation temps de travail/

temps de loisir, forte importance

accordée au loisir, au divertissement,

aux amis, à la famille, recherche du

plaisir et de l’épanouissement au

travail, capacité d’être multitâche

Equilibre vie privée/vie

professionnelle Non

Possibilité d’aménager

son temps de travail Non

Crainte de ne pas trouver

un emploi qui plaît

Oui : plus

important

Opportunisme Poursuite d’un agenda personnel,

opportunisme, agissements de franc-

tireur, individualisme, estime de soi,

besoin de s’affirmer

Comportement

individualiste comme

source de démotivation

Non

Construire soi-même son

futur et ne compter que

sur soi

Non

Non-respect de règles de

déontologie ou de valeurs

Oui : moins

important

Esprit de groupe Intérêt pour le travail en équipe et les

collaborations

Plus forts ensemble Non

Solidarité et esprit

d’équipe Non

Faible loyalisme

institutionnel

Peu de sentiment d’appartenance à

l’entreprise, méfiance envers l’autorité

et les institutions,

Besoin de changer

régulièrement

d’environnement

Oui : plus

important

Garantie de l’emploi Non

Difficulté à se

projeter dans le long

terme

Incertitude sur l’avenir, difficulté de

se projeter dans le futur, difficulté à

s’engager et à faire des choix, primat

de l’instantané

Attente que l’entreprise

fasse preuve d’innovation

et d’anticipation du futur Non

Tableau 17 Réalités scientifiques établies de la génération Y selon Pichault & Pleyers

En plus de cette recherche, nous avons voulu vérifier l’existence supposée d’une plus grande

exigence de cette génération concernant leur environnement de travail. L’étude de Paris Work

Place 2015 nous apporte un éclairage complémentaire. Et c’est une surprise là encore : il s’agit

de la génération la plus satisfaite de ses bureaux : 82% le sont, contre une moyenne de 76%

pour les autres générations. A l’inverse, c’est aussi la génération qui juge la présence de lieux

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 43

de convivialité au sein de l’entreprise comme étant la plus primordiale : 58% l’estiment

primordiale, contre 37% en moyenne pour les autres générations.

Les préjugés sur la génération Y et la littérature produite par les spécialistes auto-proclamés

font largement état de l’intérêt pour la balance vie privée / vie publique qui serait la marque de

fabrique de la nouvelle génération Y. Pourtant, comme les études94 nous l’ont démontré, la

recherche de cet équilibre est partagée par toutes les générations. Un autre éclairage peut être

apporté pour l’importance de l’intégration vie privée / vie professionnelle par l’étude de Paris

Work Place 2015. Dans cette étude, les auteurs ont posé la question à des cadres « Pour vous,

la possibilité d’aménager ses horaires à sa convenance est-elle primordiale ? ». A contrario des

clichés sur la génération Y, voici les résultats :

18-29 ans 30-39 ans 40-55 ans + 55 ans

Figure 18 L'importance de l'aménagement des horaires selon les générations

L’enseignement paraît clair : ce n’est pas tant la génération qui dicte l’importance accordée à

cette souplesse, mais plutôt l’effet « jeunes parents ».

4.1.2.3 ENSEIGNEMENTS

4.1.2.3.1 DES DIFFERENCES MOINS CARICATURALES QU’ANTICIPE

En conclusion de ces différentes études, il apparaît que les caractéristiques de la génération Y

sont nettement moins caricaturales que celles avancées par la presse managériale. Nous

pouvons nous demander à ce stade pourquoi tant d’efforts pour mettre sur les épaules des

membres de la génération Y l’ensemble des difficultés que rencontrent les organisations pour

s’adapter aux nécessaires changements perpétuels. Afin d’acquérir une lecture plus

94 FRANÇOIS PICHAULT ET MATHIEU PLEYERS (2010), Pour en finir avec la génération Y… Enquête sur une

représentation managériale

49%51

%

Oui Non

64%

36%

Oui Non

58%

42%

Oui Non

53%

47%

Oui Non

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 44

pragmatique et anticiper les changements nécessaires, il est nécessaire de prendre plus de recul

et d’observer les changements sociétaux sur une plus grande période.

4.1.2.3.2 LA GENERATION Y… OU LA JEUNESSE ?

En prenant ce recul, nous nous apercevons que bon nombre de qualificatifs utilisés à propos de

cette génération sont en réalité des qualificatifs de la jeunesse, presque intemporels. La nouvelle

génération « Y » bouscule l’ordre établi ? « Il est interdit d’interdire », scandaient pourtant les

étudiants de 1968, celle de la génération des Baby-boomers. Et la génération X ? C’est elle qui

a affronté les us et coutumes de l’époque pour faire tomber l’obligation de la cravate et du

vouvoiement. Une célèbre histoire illustre bien le phénomène. En 1974, un jeune homme est

embauché chez Atari, entreprise très à la mode à ce moment. Ce jeune homme refuse de se

laver. L’odeur qu’il dégage pousse alors la direction à le cantonner à une équipe de nuit, dans

laquelle il est le seul représentant. Ce jeune homme donne ensuite sa démission pour

entreprendre un voyage en Inde rencontrer son gourou. Il revient sept mois plus tard, tête rasée,

habits traditionnels indiens, réclamer son poste chez Atari. Son nom ? Steve Jobs95.

Une conviction renforcée par la théorie de la biographie professionnelle de Pascal Paillé96, selon

laquelle la première étape de la vie professionnelle d’un individu commence par l’intégration

du développement professionnel. Durant environ 8 ans, les jeunes salariés recherchent un

employeur susceptible de les valoriser et de répondre à leurs valeurs. Ils n’hésitent alors pas à

changer d’employeur. Cela correspond pourtant exactement à la vision que nous avons des

jeunes de la génération Y.

Toutes ces déclarations de consultants spécialistes « Millennials » auto-proclamés laissent

comme un petit arrière-goût d’opportunisme. N’ont-ils pas créé le marché sur lequel ils

prospèrent ?

Maintenant que les différences réelles de cette génération ont été identifiées, attardons-nous

quelque peu sur celles-ci.

4.1.2.3.3 MOINS D’ATTACHEMENT AUX INSTITUTIONS ET AUX TRADITIONS

Nous commencerons par un point qui a pu être testé dans d’autres études sérieuses, et qui fait

consensus chez les managers, c’est le plus faible attachement aux institutions et aux traditions.

95 WALTER ISAACSON (2012), Steve Jobs 96 PASCAL PAILLE (2004), La fidélisation des ressources humaines

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 45

Une spécificité mise en lumière par plusieurs études97, qui explique d’ailleurs un fort déclin des

adhésions d’une manière générale, que ce soit auprès d’acteurs privés ou d’associations98.

Toutefois, ne tombons pas dans l’amalgame entre le manque d’attachement à ces institutions et

un éventuel manque de loyauté. C’est ce que nous rappelle notamment Sarah Sladek99, la

loyauté n’est pas absente des esprits de la nouvelle génération comme on veut bien l’entendre,

elle est différente. Contrairement aux générations précédentes, elle n’est plus centrée sur

l’organisation, mais plutôt sur les personnes : « La génération Y est loyale. Elle n’est pas

seulement loyale aux institutions, elle est loyale envers les personnes ». Nous comprenons ainsi

comment l’engagement peut se développer : moins sur une organisation que sur des personnes.

Sarah Sladek ne dit pas autre chose : « Gen Y commits when meaningful relationships and great

experiences are actively present. To them, loyalty is not something you do just because; it is

something that is earned”, soit « La generation Y s’engage lorsque des relations porteuses de

sens et d’expérience sont présentes. Pour eux, la loyauté n’est pas quelque chose que l’on

applique par principe, c’est quelque chose qui doit être gagné ».

4.1.2.3.4 LE DEVELOPPEMENT DES COMPETENCES

Ceci est une différence significative d’attente entre les générations. Toutefois, nous pouvons

aussi nous poser la question : est-ce réellement une différence générationnelle ou est-ce plutôt

lié à l’âge des répondants ?

4.1.2.3.5 LA CRAINTE DE NE PAS TROUVER UN EMPLOI QUI PLAIT

Pour la génération Y, la crainte de ne pas trouver un emploi qui plait est plus important que

pour les générations précédentes comme a pu le démontrer l’étude de François Pichault et

Mathieu Pleyers. Peut-être est-ce là l’origine de la constatation que beaucoup d’employeurs en

font : cette génération est difficile à fidéliser et a tendance à multiplier les expériences. Selon

Sarah Sladek100, cette génération est plus à la recherche de sens dans son travail et de la culture

idoine. Les études pour tenter de le démontrer sont toutefois peu nombreuses. Nous avons

toutefois identifié l’étude Cost of Millennial Retention (2013)101, menée aux Etats-Unis, qui a

identifié les raisons principales des démissions de cette génération : avoir reçu une meilleure

97 PEW RESEARCH (2014), Millenials in Adulthood 98 U.S. CHAMBER OF COMMERCE FOUNDATION (2012), The Millenial Generation Research Review 99 SARAH SLADEK (2014), Knowing Y: Engage the Next Generation Now 100 SARAH SLADEK (2014), Knowing Y: Engage the Next Generation Now 101 http://millennialbranding.com/2013/cost-millennial-retention-study/, consulté le 03/11/2015

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 46

offre (30%), l’impression que leurs objectifs de carrière ne sont pas compatibles avec ceux de

l’organisation (27%), et l’impression d’une absence d’opportunités de carrière (13%). Cette

même étude conclue que les membres de cette génération sont donc plus coûteuses, car il faut

prévoir plus de remplacements et que les remplacements coûtent cher, surtout pour les postes

de managers.

4.1.2.3.6 BESOIN DE CHANGER REGULIEREMENT D’ENVIRONNEMENT

« Ils ont la bougeotte » est une des idées reçues qui circulent à propos de la génération Y.

L’étude de François Pichault et Mathieu Pleyers le confirme. Nous pouvons toutefois nous

demander si ce besoin de changement est vraiment lié à leur génération ou bien à leur jeunesse.

Dans tous les cas, il faut prendre en compte cette différence. Afin de leur permettre de pouvoir

changer d’air au sein de la même organisation, celle-ci pourrait réfléchir à un moyen de

développer les changements de poste, changements d’équipe, changements de technologie

(pour les développeurs) ou même changements d’environnement.

4.1.2.4 L’ETUDE DES EMPREINTES SOCIETALES

Pour autant nul n’est besoin de nier les différences sociétales émergentes qui attendent de pied

ferme les managers d’aujourd’hui. Si la réalité des différences liées strictement aux générations

est comme nous l’avons vu galvaudée et caricaturale, les changements sociétaux existent bien,

et les expériences incongrues des managers se multiplient.

Pour expliquer ces différences, il suffit de sortir un peu de la caricature, prendre de la hauteur

sur les événements. Françis Boyer l’explique très bien102. Pour lui, les comportements des

individus s’expliquent avant tout par le contexte socio-économique dans lequel ils ont grandi,

qui mêle éducation, milieu social et contexte économique.

Années 1920 : l’empreinte tradition

Education Entreprise

Traditionnelle (maintien et reproduction

des traditions et des usages)

Paternaliste (taille humaine, artisanat,

entraide)

Années 1940 : l’empreinte force

Education Entreprise

102 FRANÇIS BOYER (2015), Du management intergénérationnel à l’innovation managériale

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 47

Force (guerres mondiales, crise

financière…)

Directif (production de masse, taylorisme…)

Années 1960 : l’empreinte ordre

Education Entreprise

Ordre (reconstruction gaulliste,

développement de l’Etat Providence…)

Bureaucratique (les cadres issus des grandes

écoles prescrivent le travail)

Années 1980 : l’empreinte succès

Education Entreprise

Réussite (ascension sociale possible,

recherche du plaisir de la vie souvent

matériel caractérisé par la propriété…)

Stratégique (mondialisation)

Années 2000 : l’empreinte bien-être (Génération Y)

Le futur devient plus incertain, poussant les individus à essayer de profiter du bonheur

rapidement, plutôt que d’en espérer plus à l’avenir. La précarisation pousse à rechercher

l’équilibre travail / temps personnel qui tend à changer la perception de la réussite, moins axée

sur la propriété et plus sur l’atteinte du bonheur.

Développement parallèle de la méfiance envers les institutions (économiques, politiques, de la

famille).

Education Entreprise

Bien-être (aspiration à l’épanouissement

maintenant, plus qu’à un avenir futur

incertain, méfiance envers les institutions,

la réussite devient associée à

l’épanouissement personnel)

Collaboratif (besoin du développement de

l’intelligence collective, combler les attentes

bien-être des individus)

Années 2010 : l’empreinte liberté (Génération Y)

Le monde en perpétuel mouvement pousse à s’affranchir et à se remettre continuellement en

question, et à profiter du moment présent, étant donné que l’avenir est incertain. Développement

de l’autonomie et de la flexibilité. D’où les demandes des salariés qui se multiplient sur la

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 48

flexibilité des horaires, le télétravail… Des attentes qui ne sont pas sans rappeler le

développement de l’entreprise libérée de Jean-François Zobrist.

Education Entreprise

Liberté Co-responsable

Cette vision a le grand avantage d’éviter de tomber dans la caricature, dans la recherche des

explications des changements sociétaux en cours. Le graphique ci-dessous, issu du site Internet

de Françis Boyer, illustre ainsi l’évolution des différentes tendances, qui s’entremêlent dans la

société.

Figure 19 Emergence des empreintes sociétales en France depuis 1940, par Françis Boyer103

103 http://www.innovationmanageriale.com/concepts/du-management-intergenerationnel-a-linnovation-

manageriale/, consulté le 10/08/2015

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 49

5 CONCLUSION

Nous avons montré à quel point l'engagement est difficile à identifier, à appréhender et à

mesurer. L’engagement présente une caractéristique singulière, qui peut représenter un

véritable challenge pour le management : il ne peut ni se décréter ni s’acheter, au grand dam

des organisations dépensant en pure perte des millions pour offrir le meilleur environnement de

travail possible à leurs collaborateurs.

L’engagement ne se développe chez les collaborateurs que lorsque ceux-ci en ont la capacité.

Il leur faut également trouver des raisons profondes, intrinsèques aux méthodes de management.

Cela passe notamment par une certaine liberté pour le collaborateur et par le fait qu'il sache

comment s’engager, en donnant du sens au travail. Cette démarche demande une forte volonté

politique qui, si elle est effectuée correctement, permettra d’assurer une croissance sereine et

facilitera la prospérité des organisations.

Nous avons également proposé une méthode et un modèle complet afin de développer

l'engagement des salariés dans leurs organisations. Si les différentes études citées dans notre

document illustrent la puissance des retombées d'un management permettant le développement

de l'engagement, les expériences des organisations modèles ont également montré que le

processus, mené jusqu’à son terme, peut prendre des années.

Dans notre étude, le développement de cet engagement est en effet le levier le plus efficace

pour répondre globalement aux objectifs exprimés par les organisations. Les résultats de la

mesure de l’engagement de ses collaborateurs sont apparus modérément positifs. Le

développement de l'engagement de ses collaborateurs passe à court terme par l'évolution de la

satisfaction de ses salariés. Pourront ensuite être mis en œuvre des leviers puissants de

développement de l’engagement, que nous avons détaillés dans nos recommandations

opérationnelles et qui permettront à notre client d’accroitre la productivité et la créativité de ses

hommes et femmes, d’attirer de nouveaux talents, de les fidéliser, de développer leurs

compétences et, in fine, d’améliorer les performances de l’organisation.

JULIEN FOULQUIER - fr.linkedin.com/in/julienfoulquier 50

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7 TABLE DES FIGURES ET TABLEAUX

Figure 1 Matrice de motricité sur dépendance .............................................................. Erreur ! Signet non défini.

Figure 2 Gain de turnover sur les secteurs à turnover structurellement importants ................................................ 9

Figure 3 Gain espéré entre des organisations composées de collaborateurs engagés comparé aux moins engagés

..................................................................................................................................................................... 10

Figure 4 Evolution de l'intérêt de la recherche "Employee Engagement" par Google Trends ................................ 7

Figure 5 Encyclopédie : modèle rémunéré contre modèle libre ............................................................................ 13

Figure 6 Les ressources personnelles nécessaires pour que l'individu soit engageable ......................................... 19

Figure 7 Les 4 "T" de l'autonomie ........................................................................................................................ 24

Figure 8 L'équilibre entre stress et challenge ........................................................................................................ 28

Figure 9 Les quatre étapes de l'apprentissage ....................................................................................................... 29

Figure 10 Les quatre étapes de connexion à l'organisation ................................................................................... 31

Figure 11 Langage utilisé par le groupe/individus traduisant leur état d’esprit .................................................... 32

Figure 12 L’effet de la confiance sur l’engagement .............................................................................................. 33

Figure 13 Causes et effets sur la confiance et l'engagement ................................................................................. 34

Figure 14 Synthèse du modèle de l'engagement ................................................................................................... 35

Figure 15 Analyse systémique du développement de l'engagement ..................................................................... 37

Figure 16 Frise chronologique des générations ..................................................................................................... 38

Figure 17 Bornes d'âge retenues pour la qualification de la génération Y ............................................................ 39

Tableau 18 Réalités scientifiques établies de la génération Y selon Pichault & Pleyers ...................................... 42

Figure 19 L'importance de l'aménagement des horaires selon les générations ..................................................... 43

Figure 20 Emergence des empreintes sociétales en France depuis 1940, par Françis Boyer ................................ 48