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les deux orbites (hyper-télé-orbitisme). Il peut correspondre aussi à des encéphalocèles avec issue hors de la boîte crânienne d’une partie de l’encéphale et de ses méninges. Les formes les moins graves sont les kystes congénitaux du dos du nez ou des régions naso-frontales qui peuvent être associées à des fistules cutanéo-méningées. Trois groupements cellulaires débutent leur différenciation : — les neuroblastes du tube neural : ce sont les futurs neurones et cellules gliales qui vont ensuite migrer pour former le cortex du cerveau, à 3 puis à 5 vésicules, — les cellules de l’ectoderme, qui sont situées en bordure de la plaque. Le revêtement épiblastique va constituer la peau de la tête et du cou avec, dans certaines zones, un épaississement réalisant les placodes avec des neurones qui vont migrer pour constituer les ganglions sensoriels des nerfs crâniens, — les cellules des crêtes neurales céphaliques (CNC) qui sont issues des bords de la gouttière au moment de sa fermeture. Ces cellules ont pour particularité de migrer sous l’ectoderme embryonnaire pour gagner leur territoire facial ou cervical défi- nitif où elles se différencient et forment divers contingents cel- lulaires (fig. 1). La particularité de ces phénomènes est qu’ils sont territorialisés de sorte que l’origine des cellules des crêtes neu- rales qui se détachent du tube a des implications dans leur loca- lisation dans un territoire facial et cervical spécifique. Les multiplications cellulaires pendant la migration expli- quent l’apparition de structures macroscopiques que sont les bourgeons de la face et les arcs branchiaux dont le dévelop - pement embryologique est simultané (fig. 2). En fin de migra- tion, les cellules se différencient. La participation des cellules des CNC est primordiale pour la morphogenèse de la face et du cou (tableau). L a biologie du développement est une science nouvelle dont les différents domaines recouvrent : — l’embryologie, dès la fécondation avec une phase d’histo genèse (formation des tissus avec leurs contingents cellulaires spécifiques) et d’organogenèse, — la fœtologie : à partir du 3 e mois in utero, les premières séquences de l’oralité du fœtus apparaissent avec le début de la succion. Le développement de la face est indissociable de celui du cerveau et des organes sensoriels tant en période anténatale qu’après la naissance ; le cerveau et les organes sensoriels ont un rôle morphogénétique majeur jusqu’à 5 ans. EMBRYOLOGIE FACIALE ET ANOMALIES Les connaissances ont été révolutionnées par l’embryologie expé- rimentale réalisée chez le batracien ou le poulet (chimères de caille et de poulet). Stades de plaque et de gouttière neurales Au début de la troisième semaine de vie de l’embryon, les futures structures céphaliques s’individualisent lors de la neurulation à partir de l’ectoblaste. La plaque neurale a la forme d’une raquette à manche pos- térieur avec des bourrelets latéraux. Elle subit des déformations associant allongement (x 3), élargissement antérieur (x 2), puis déformation de la plaque en gouttière neurale à son extrémité antérieure avec un enroulement ventral. Le tube neural s’individualise du 21 e au 32 e jour. Dès ce stade du développement, des malformations compa- tibles avec la vie et visibles en échographie consistent en l’ano- malie de fermeture du tube neural en avant avec un défaut de rapprochement des placodes olfactives et des deux hémipyramides nasales. La conséquence faciale est la distance importante entre Développement bucco-dentaire et anomalies P r Danielle Ginisty Service de stomatologie, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, 75014 Paris [email protected] LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 30 JUIN 2007 I-3-Q35 1371 • Dépister les anomalies du développement maxillo-facial et prévenir les maladies bucco-dentaires fréquentes de l’enfant. Objectifs

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les deux orbites (hyper-télé-orbitisme). Il peut correspondre aussià des encéphalocèles avec issue hors de la boîte crânienne d’unepartie de l’encéphale et de ses méninges.

Les formes les moins graves sont les kystes congénitaux du dosdu nez ou des régions naso-frontales qui peuvent être associéesà des fistules cutanéo-méningées.

Trois groupements cellulaires débutent leur différenciation :— les neuroblastes du tube neural : ce sont les futurs neuroneset cellules gliales qui vont ensuite migrer pour former le cortexdu cerveau, à 3 puis à 5 vésicules,— les cellules de l’ectoderme, qui sont situées en bordure de laplaque. Le revêtement épiblastique va constituer la peau de latête et du cou avec, dans certaines zones, un épaississementréalisant les placodes avec des neurones qui vont migrer pourconstituer les ganglions sensoriels des nerfs crâniens,— les cellules des crêtes neurales céphaliques (CNC) qui sontissues des bords de la gouttière au moment de sa fermeture. Cescellules ont pour particularité de migrer sous l’ectodermeembryonnaire pour gagner leur territoire facial ou cervical défi-nitif où elles se différencient et forment divers contingents cel-lulaires (fig. 1). La particularité de ces phénomènes est qu’ils sontterritorialisés de sorte que l’origine des cellules des crêtes neu-rales qui se détachent du tube a des implications dans leur loca-lisation dans un territoire facial et cervical spécifique.

Les multiplications cellulaires pendant la migration expli-quent l’apparition de structures macroscopiques que sont lesbourgeons de la face et les arcs branchiaux dont le dévelop -pement embryologique est simultané (fig. 2). En fin de migra-tion, les cellules se différencient. La participation des cellulesdes CNC est primordiale pour la morphogenèse de la face et ducou (tableau).

La biologie du développement est unescience nouvelle dont les différentsdomaines recouvrent :

— l’embryologie, dès la fécondation avec une phase d’histo genèse(formation des tissus avec leurs contingents cellulaires spécifiques)et d’organogenèse,— la fœtologie : à partir du 3e mois in utero, les premières séquencesde l’oralité du fœtus apparaissent avec le début de la succion.

Le développement de la face est indissociable de celui du cerveau et des organes sensoriels tant en période anténatale qu’après la naissance ; le cerveau et les organes sensoriels ontun rôle morphogénétique majeur jusqu’à 5 ans.

EMBRYOLOGIE FACIALE ET ANOMALIESLes connaissances ont été révolutionnées par l’embryologie expé-rimentale réalisée chez le batracien ou le poulet (chimères decaille et de poulet).

Stades de plaque et de gouttière neuralesAu début de la troisième semaine de vie de l’embryon, les futures

structures céphaliques s’individualisent lors de la neurulation àpartir de l’ectoblaste.

La plaque neurale a la forme d’une raquette à manche pos-térieur avec des bourrelets latéraux. Elle subit des déformationsassociant allongement (x 3), élargissement antérieur (x 2), puisdéformation de la plaque en gouttière neurale à son extrémitéantérieure avec un enroulement ventral.

Le tube neural s’individualise du 21e au 32e jour.Dès ce stade du développement, des malformations compa-

tibles avec la vie et visibles en échographie consistent en l’ano-malie de fermeture du tube neural en avant avec un défaut derapprochement des placodes olfactives et des deux hémipyramidesnasales. La conséquence faciale est la distance importante entre

I-00-Q000

Développement bucco-dentaire et anomalies

Pr Danielle GinistyService de stomatologie, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, 75014 Paris

[email protected]

L A R E V U E D U P R A T I C I E N , V O L . 5 7 , 3 0 J U I N 2 0 0 7

I-3-Q35

1371

• Dépister les anomalies du développement maxillo-facial et prévenir les maladies bucco-dentaires fréquentes de l’enfant.

Objectifs

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Bourgeons faciaux et stomodeum

Au cours des 5e et 6e semaines embryonnaires, les bourgeonsde la face et les arcs branchiaux sont le résultat de divisions cel-lulaires des cellules de la CN en migration.

Ces bourgeons entrent en contact les uns avec les autres surla ligne médiane ou latéralement et fusionnent. Cette fusionnécessite :— un développement volumétrique suffisant des bourgeons,— une disparition de l’ectoderme par mort cellulaire,— des propriétés physico-chimiques du liquide amniotique favo-risant le contact ectodermique.

1. Formation du palais primaireElle comprend (fig. 3) :

— les bourgeons nasaux internes (BNI) et externes (BNE) qui sedéveloppent à la face inférieure et ventrale du bourgeon naso-frontal (BNF), de part et d’autre des placodes olfactives,— latéralement les bourgeons maxillaires (BM) qui se développentsous les ébauches optiques,— au cours de la 6e semaine, l’ectoderme des 3 bourgeons encontact s’accole avant de disparaître, ce qui permet la fusiondes 3 bourgeons et la constitution d’un mésenchyme continuentre BM droit et gauche, BNI et BNE. Le palais primaire estconstitué.

I-3-Q35Développement bucco-dentaire et anomalies

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?

Il s’agira donc plus probablement d’unequestion au sein d’un dossier pédiatrique.Il est possible de devoir argumenter lessituations (dont les malformations facia-les font partie) nécessitant soit une priseen charge spécifique d’un nouveau-né (y

compris le conseil génétique) dans lecadre d’une dysmorphologie éventuelle-ment déjà diagnostiquée par échographie,soit à l’occasion de la prise en charge d’unedétresse respiratoire du nouveau-né, carl’obstruction des voies aériennes supé-

rieures fait partie du syndrome de Pierre-Robin et d’autres malformations.La prévention des caries dentaires peutêtre posée dans tout dossier concernantla carie et ses complications, en particulierlors d’un cas clinique sur les cellulites cervico-faciales ou dans le cadre des algies faciales.Il y a tout lieu de penser qu’au cours d’unpanorama des stades évolutifs des carieson revienne sur leur prévention. !

Il est très difficile de construire un dossier uniquement sur les pathologies du développement facial, car il s’agit d’un domaine extrêmement spécialisé,transversal entre pédiatrie et pathologie maxillo-faciale.

CN prosencéphaliques et mésencéphaliques

CN rhomb-encéphaliqueantérieure

P. opt

P. ot

CN rhomb-encéphaliquepostérieure

Cœur

Placodeolfactive

Bourgeonnaso-frontal

Cellules des crêtesneuralescéphaliques

CN CN CN CN

CN

CN CNCN

BNFPl.olt

BNEBM

BNI

BNE

BM

BNI

BMd

S

34 Jours28 Jours

Éxtrémité céphalique de l’embryon humain au débutdu 2e mois (d’après G. Couly).Figure 1 Évolution morphologique du pôle céphalique de

l’embryon humain au cours du 2e mois (d’après G. Couly).Figure 2

V. D

ELV

AL

V. D

ELV

AL

François Petitpierre

Les peauciers de la face ont pour origine les CNC qui migrentau 50e jour pour former les peauciers périorificiels (œil, nez, etpeaucier du cou). Les myocytes fusionnent sur la ligne médianepour réaliser l’orbiculaire des lèvres et les muscles naso-labiaux ;ce phénomène a lieu après la fusion des bourgeons ; c’est ainsique se forme la lèvre rouge sous le philtrum dont l’origine est lebourgeon naso-frontal.

Les fentes labio-maxillaires résultent d’anomalies à ce stade :— l’absence de morts cellulaires de l’ectoderme des BM, BNI etBNE est à l’origine de la non-fusion des bourgeons et de la cons-titution d’une fente labio-maxillaire. Elle peut être complète ounon, uni- ou bilatérale (fig. 4 et 5),

— elles peuvent survenir dans le cadre plus large des holo-prosencéphalies (fig. 6) qui consistent en des malformationsdu cerveau antérieur et de la face qui ont pour point communl’absence d’un corps calleux visible, structure qui relie les deuxhémisphères cérébraux, et qui s’accompagnent de malfor -mations oculaires et de l’axe hypothalamo-hypophysaire avecun déficit hormonal ; une trisomie 13 ou 18 est fréquemment associée,— l’absence de morts cellulaires de l’ectoderme peut concerner :BNF et BM plus latéralement dans la région orbitaire réalisantdes fentes colobomateuses (fig. 7), BM et bourgeon mandibulaireréalisant une macrostomie.

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Les règles de prévention des caries : limiter les apports de sucre, le grignotage, la prise de biberons sucrés à l’endormissement et surveiller le brossage des enfants.

Le suivi chez un odontologiste doit débuter dès l’éruption des molaires lactéales et continuer 2 à 3 fois par an.

Les malformations les plus fréquentes sont les fenteslabio-maxillo-palatines (FLMP) (1 pour 900 naissances) ;leur prise en charge est multidisciplinaire.

Une fente vélo-palatine est le marqueur d’une anomalieprécoce de l’oralité fœtale avec des risques de dyspnéeobstructive à la naissance.

Les dents sont des marqueurs pertinents des anomalies du développement cranio-facial et des pathologies embryo-fœtales.

POINTS FORTSà retenir

(v. MINI TEST DE LECTURE, p. 138

50 Jours 60 Jours

BNEBNE

BM BM

MyocytesMyocytes

BNI

Évolution morphologique du pôle céphalique del’embryon humain au cours du 2e mois (d’après G. Couly).Figure 3

Fentes labio-maxillaire et labio-maxillo-palatine unilatérales.Figure 4

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François Petitpierre
François Petitpierre
François Petitpierre
François Petitpierre
François Petitpierre
François Petitpierre
François Petitpierre
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François Petitpierre
François Petitpierre

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Au niveau des zones frontières des bourgeons de la face, lesfistules et kystes correspondent à des non-morts cellulaires lorsde la fusion des bourgeons : kyste de la queue du sourcil et fibro-chondromes sur la ligne de fusion maxillo-mandibulaire (fig. 8 a et b).

2. Formation du palais secondaire (fig. 9)

Au cours de la 7e semaine, les bourgeons maxillaires continuentleur développement volumétrique en arrière du palais primaireet viennent au contact du septum (du bourgeon nasal) de l’avantvers l’arrière. Le palais secondaire est formé lors de cette fusion,terminant la séparation entre cavités nasales et buccale.

En cas de non-fusion, une fente vélo-palatine (FVP) est alorsréalisée : elle peut être associée à une fente du palais primaireconstituant une fente labio-maxillo-palatine totale (FLMPT) ou être

I-3-Q35Développement bucco-dentaire et anomalies

Dérivés mésectodermiques " squelette facial (os, cartilages)céphaliques " ondoblastes (dents)

" paroi des arcs aortiques (IIIe, IVe, Ve)

" derme de la face et du cou,muscle oripilateur

" conjonctif # thymus# parathyroïdes# thyroïde

" squelette viscéral des glandes# salivaires# lacrymales# hypophyse

" participation musculaire faciale" sclérotique, muscles ciliaires

Cellules nerveuses" Neuroblastes bipolaires " ganclions rachidiens

(stomato-sensibles) " ganglions des nerfs crâniens (V, VII, IX, X)

" Neuroblastes multipolairesCellules des ganglions du " à phénotype cholinergique système nerveux autonome (parasympathique bulbaire)

" à phénotype adrénergique (sympathique)

Cellules de soutien " de Schwann" des méninges

(pie-mère, arachnoïde)" satellites

Cellules pigmentaires

Cellules endocriniennes " Cellules C à calcitonine (thyroïde)(phénotypes peptidiques " Cellules I et II du corps carotidienet para-endocriniennes) " Glande médullo-surrénale

et paraganglionnaire

Dérivés cellulaires de la crête neurale céphalique*

Tableau

* D’après Le Douarin.

isolée : en effet, les premières séquences motrices les plus pré-coces de l’embryon sont objectivées vers le 60e jour au niveau oral.

Parallèlement à la déflexion céphalique, le réflexe d’ouverturebuccale à la stimulation labiale, l’approche des mains vers les lèvreset la face, l’ébauche des premiers mouvements de succion appa-raissent à la 10e semaine et ceux de déglutition vers la 13e.

En cas d’asynchronisme céphalique et oral, la perturbation del’intégration linguale dans la cavité buccale fait d’elle un obsta-cle à la fermeture du palais secondaire, d’où une fente vélo-pala-tine qui est le marqueur d’une anomalie précoce du développe-ment de l’oralité (syndrome de Robin) [fig. 10].

3. Délimitation du stomodeum fœtal

Les bourgeons mandibulaires droits et gauches fusionnentdès la fin de la 5e semaine sur la ligne médiane ; simultanémentse forment le plancher buccal puis la langue, dont les premiersnodules apparaissent dans la partie postérieure et médiane duplancher. L’épiblaste en assure la couverture de toute la bouche.

La communication entre stomodeum et pharynx primitif sefait avec la disparition de l’accolement entre l’ectoderme et l’en-doderme (membrane pharyngienne en arrière). L’anomalie defusion des bourgeons est rare et réalise une fente médiane dumenton qui peut être associée à une bifidité linguale et à unefente du plancher buccal jusqu’à l’os hyoïde dans les formes com-plètes ; les fistules de la lèvre inférieure relèvent également denon-morts cellulaires ectodermiques.

Arcs branchiaux (fig. 11)

Au 30e jour, 5 arcs sont individualisés ; le premier arc a undéveloppement important : le cartilage de Meckel est le premierélément squelettique du premier arc, en quelque sorte « tuteur »de l’ossification membraneuse mandibulaire qui apparaît dansun deuxième temps et persiste seule avec l’articulation temporo-mandibulaire. À ce niveau apparaît une zone cartilagineuse par-ticulière faite de cartilage secondaire par opposition à la maquetteprimaire du cartilage de Meckel. L’unification des deux maquettesosseuses au niveau du menton est plus tardive.

L’absence de fusion correspond à une fente osseuse mandi-bulaire qui n’existe que dans les formes complètes de fentemédiane du menton. Le syndrome du premier arc (fig. 12) com-porte une malformation du pavillon de l’oreille (microtie), duconduit auditif externe, d’une partie de l’oreille moyenne (mar-teau et enclume), d’où une hypoacousie. Il existe une hypoplasiede l’hémimandibule avec agénésie de l’articulation temporo-man-dibulaire ; dans les cas les plus graves, elle est associée à unehypoplasie maxillo-malaire et des muscles masticateurs qui défi-nit le syndrome de Franceschetti.

Développement de la langue (fig. 11)

Elle apparaît dans les régions internes et médianes des 4 premiersarcs branchiaux ; l’épithélium provient de l’ectoderme du plancherdu stomodeum (l’ectoderme du premier arc pour la partie anté-rieure mobile de la langue) et de l’endoderme des deuxième, troisièmeet quatrième arc, pour la base de langue.

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Fentes bilatérales. Labio-narinaire incomplète (à gauche). Labio-maxillo palatine totale (à droite).Figure 5

Hypoplasie du BNF avec fente labio-maxillo-palatine totale et microcéphalie (à droite).Figure 6

Crête neurale prosencéphalique

Télencéphale

Diencéphale

Mésencéphale

Métencéphale

Cervelet

MyélencéphalieCrête

neurale rhomb-

encéphalique

Crête neurale

mésencéphalique

Colobomes : malformations complexes oculofaciales avec fentes entre BNF et BM.Figure 7

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Au deuxième mois de vie embryonnaire, des papilles se dif-férencient : ce sont des récepteurs sensitifs épicritiques, noci-ceptifs, thermiques et gustatifs (dont les papilles caliciformes).

La musculature linguale provient en majorité des cellules myo-blastiques des 5 premiers somites céphaliques ; celles-ci migrentle long du pharynx jusque dans le plancher du stomodeum. Toutesles cellules convergent vers le plancher des 4 premiers arcs bran-chiaux, au-dessus du cœur et assurent le développement de lalangue à partir des deux tubercules latéraux (TL) et un médian,le tuberculum impar (TI), qui est refoulé vers l’arrière du fait dudéveloppement plus rapide des deux latéraux.

La base de langue (C) est formée de plusieurs petits tuber-cules faisant saillie dans le plancher postérieur du stomodeum(au niveau des 3e et 4e arcs). L’ensemble fusionne vers le 40e jourembryonnaire avant le cloisonnement du stomodeum par le palaissecondaire.

Les deux nerfs hypoglosses (XII) rachidiens innervent lamuscu lature linguale. Les afférences sensorielles de la cavitébuccale, centripètes (vers les ganglions crâniens), et le dévelop-pement centrifuge des efférences motrices (V, VII, IX, X, XII) avecune jonction myoneuronale dans la langue, les muscles masti-cateurs, le pharynx et le cou expliquent l’apparition des premièresséquences motrices de l’embryon au niveau oral vers le 60e jour.Parallèlement à la déflexion céphalique, le réflexe d’ouverturebuccale à la stimulation labiale, l’approche des mains vers les lèv-res et la face, l’ébauche des premiers mouvements de succionapparaissent à la 10e semaine et ceux de déglutition vers la 13e :c’est le début de l’oralité fœtale.

L’ébauche thyroïdienne d’origine endodermique s’invagine àla jonction du tuberculum impar (langue mobile) et des copules(base de langue) et migre vers le cou ; le canal thyréoglosse dispa-raît au 4e mois en laissant le foramen cæcum.

I-3-Q35Développement bucco-dentaire et anomalies

BNF

B. max.B. max.

B. mand. B. mand.

BNE

NI

BNE

BNI BNI

Proc. pal.du B. max.

Lignes de fusion des 5 bourgeons péristomodéaux (d’après G. Couly).Figure 9

La fente vélo-palatine est le marqueur del’asynchronisme entre la déflexion céphalique et l’absencede séquences motrices de succion. Elle est large et associéeà une bride intermaxillaire droite

Figure 10Les reliquats embryonnaires.A — Kyste de la queue du sourcil sur la ligne de fusion BNF-BM.B — Fibrochondromes sur la ligne de fusion BM-premier arc.

Figure 8

1er arc

2e arc

3e arc

4e arc

5e arc

Sinuscervical

Poches endobranchiales

Foramencancum

L’appareil branchial à 5 semaines embryonnaires.Figure 11

A BV.

DE

LVA

L

V. D

ELV

AL

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— les lames primitives et dentaires sont des épaississements épi-théliaux de l’ectoderme du stomodeum qui s’enfoncent dans l’ec-tomésenchyme pour constituer un mur cellulaire plongeant. Lescellules des crêtes neurales s’organisent autour de ce mur. À sonversant interne se forme une expansion épithéliale interne dansl’ectomésenchyme : c’est la lame dentaire au sein de laquelle desrenflements épithéliaux apparaissent, les futurs bourgeons,— les bourgeons ou ébauches dentaires : les renflements épithé-liaux s’individualisent et s’organisent. Chaque bourgeon comporteune composante épithéliale et une composante ectomésenchy-mateuse, avec une limitante mésenchymateuse, futur sac dentaire,— le stade de la cupule avec deux couches cellulaires dont l’in-terne qui va former l’épithélium adamantin interne. La présencedes cellules de crêtes neurales est indispensable pour ces diffé-renciations cellulaires de l’épithélium buccal,— l’organe en cloche correspond à la différenciation morphologiquede la couronne de la dent en fonction de la zone de l’épithéliumbuccalconsidéré (antérieur : région incisive ; postérieur : région molaire).L’ectoderme du premier arc est le seul à avoir cette actioninductrice,— la formation des racines commence au niveau de la zone deréflexion entre l’épithélium adamantin interne et externe (futurcollet de la dent). Cette zone s’enfonce dans le mésenchyme recou-vert par la papille. Les odontoblastes à ce niveau élaborent la den-tine radiculaire. La formation d’émail est alors déjà terminée. Cettemorphogenèse est tardive et se termine pour chaque dent aprèsson éruption. La formation du cément et du desmodonte se fait aucontact de la dentine radiculaire à partir de fibroblastes.

Anomalies du nombre des dents : germe surnuméraire et agénésie

La présence d’un germe surnuméraire comme l’agénésie d’unseul germe sont le plus souvent une particularité familiale sansvaleur pathologique.

1. Agénésies

L’anodontie ou absence totale de germes est exceptionnelle ; ils’agit plus souvent d’une oligodontie. Elle survient dans les dyspla-sies ectodermiques hypohidrotiques qui sont génétiques liées àl’X (fig. 14) et impliquent l’ensemble des dérivés de la crête neuraleau sein de l’ectoderme : dents, glandes sudoripares, folliculespileux, glandes sébacées et cellules pigmentaires. La forme la plusgrave masculine associe l’absence de cheveux, de sourcils, de cils,de germes dentaires et de graves anomalies de la régulation ther-mique liées à l’absence des glandes sudoripares. La forme féminineest plus discrète, sans hypohidrose, et les agénésies ne concer-nent que quelques dents, voire une seule (incisive latérale supé-rieure lactéale et définitive le plus souvent) [fig. 15].

2. Germes surnuméraires

La présence de nombreux germes surnuméraires répartisentre dents lactéales et germes de dents définitives explique lapersistance des dents lactéales et est pathognomonique de ladysplasie cléïdo-crânienne, affection génétique autosomiquedominante associant des anomalies squelettiques à une agénésie

Hypoplasies maxillo-mandibulaires.A — Aplasie maxillo-malaire du syndrome de Franceschetti.B — Aplasie du pavillon d’oreille du syndrome du premier arc.

Figure 12

Anomalies linguales. A — Ankyloglossie.B — Macroglossie congénitale. Syndrome de Wiedemann-Beckwith.

Figure 13

A B

A

Les anomalies linguales les plus fréquentes concernent lapointe (apex) dont le revêtement ectodermique est souvent hypo-plasique, réalisant une ankyloglossie, avec à l’extrême une bifi-dité linguale (fig. 13 a et b).

La persistance du canal thyréoglosse est à l’origine de fistulesou de kystes au niveau de la région hyoïdienne médiane avecune fistule résiduelle au niveau du foramen cæcum. Les kystes dutractus thyréoglosse sont hyoïdiens et mobiles à la déglutition.

EMBRYOLOGIE DENTAIRE ET ANOMALIESElle est indissociable de l’embryologie céphalique, puisque lescellules des crêtes neurales y jouent un rôle inducteur comme danstoute cette région. Chaque dent est l’aboutissement d’inter actionscellulaires entre les cellules de l’épithélium oral du premier arc etles cellules des crêtes neurales. Plusieurs stades sont distingués :

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B

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de la clavicule et une non-fermeture des sutures crâniennes. L’avulsion des germes surnuméraires permet de favoriser l’é-ruption des dents définitives.

Anomalies de forme des dentsElles sont très nombreuses et touchent soit l’ensemble de la

dent réalisant en excès une macrodontie ou à l’inverse une micro-dontie qui sont souvent associées aux agénésies : les dents sontconoïdes. Concernant les racines, il s’agit surtout d’hypoplasie. Lesanomalies de forme sont isolées familiales ou associées à des ano-malies malformatives crânio-faciales. Les dents sont des marqueursdes neurocristopathies. Les microdonties et agénésies sont alorsterritorialisées : BNF et bloc incisif supérieur, arcades maxillaireslatérales et BM, dents mandibulaires et premier arc.

Anomalies de minéralisation ou dysplasies (fig. 16)

Elles ont pour caractéristique une anomalie constatée dès l’éruption de la dent par opposition aux anomalies acquises du tissudentaire. Les amélogenèses imparfaites concernent l’émail et doncla couronne ; l’émail n’est pas blanc mais brunâtre rugueux avecdes reliefs anarchiques et une usure rapide. On distingue les hypo-plasies et les hypominéralisations. Les dentinogenèses imparfaitesconcernent la dentine et se caractérisent par une couronne demorphologie initialement normale mais translucide, brun grisâtre,« sucre d’orge », dont l’usure est très rapide. Les dentinogenèsespeuvent être associées à une ostéogenèse imparfaite puisque oset dentine ont un collagène commun. Toutes ces anomalies sontgénétiques, le plus souvent autosomiques dominantes.

Dents comme marqueurs du développement embryo-fœtal

Historiquement, la syphilis congénitale est l’infection materno-fœtale la plus connue ; elle se manifeste par une malformationdentaire (dent de Hutchinson) qui est hypoplasique en forme detonneau avec une échancrure du bord incisif.

Dans les dyschromies, l’anomalie et sa répartition sur la den-ture permet de dater avec précision la date de survenue de lapathologie. Ainsi, en cas d’ictère par malformation des voies biliai-res, toutes les dents lactéales ont l’émail jaune verdâtre ainsi queles incisives et premières molaires définitives. Si l’ictère ne per-siste pas au-delà de 2 ans, les prémolaires et les autres molairesdéfinitives seront blanches. De même, en cas de porphyrie

I-3-Q35Développement bucco-dentaire et anomalies

Agénésies.A — Agénésies multiples touchant les incisives (12, 22, 31, 32, 41, 42) de toutes les prémolaires et des molaires (17 et les 4 dentsde sagesse).B — Une radiographie est indispensable au diagnostic.

Figure 15 Anomalies de minéralisation : les dysplasies.A — Dès l’éruption, là où les dents sont anormales.B — L’anomalie est constitutionnelle, elle peut être génétiquetouchant l’émail (amélogenèse imparfaite) ou la dentine(dentinogenèse imparfaite).

Figure 16

La dysplasie ectodermique hypohidrotique liée à l’X.Sujet masculin. Risque majeur d’hyperthermie maligne du faitde l’absence de glandes sudoripares. L’anodontie est rarementcomplète mais invalidante : la réhabilitation prothétique estprécocement proposée.

Figure 14

A

B

A

B

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congénitale, les dents présentent toutes la même colorationrouge (érythrodontie).

La prise prolongée de tétracyclines chez le nourrisson entraîne la survenue d’une bande dyschromique gris-marron,plus ou moins grande en fonction du temps de traitement. Ceciexplique que l’emploi de ces médicaments soit contre-indiquéchez l’enfant.

ÉRUPTIONS DENTAIRES ET ANOMALIES La dentition est le phénomène dynamique d’éruption des dents.La denture est l’ensemble des dents présentes dans la bouche.La denture lactéale (temporaire) comporte normalement 20 dents.La denture définitive (adulte) en comporte 32 (fig. 17 et 18).

Dentition temporaire$ La dentition précoce (dent néonatale) (1/6 000 naissance) n’apas de caractère pathologique ; elle concerne une ou deux incisivesmandibulaires.$ La dentition compliquée se traduit par des accidents qui sontle plus souvent bénins associant fièvre, salivation excessive, rou-geur des pommettes et douleurs qui peuvent entraîner des dif-ficultés d’alimentation avec au maximum une gingivo-stomatite.$ L’absence de chute des dents lactéalesdoit alerter et faire pra-tiquer un examen clinique et radiologique. Il peut s’agir de l’ab-sence d’une dent définitive (agénésie), de l’anomalie du germequi peut être mal posé ou mal formé, enfin de la présence d’ungerme surnuméraire.

Dentition permanente$ L’inclusion d’une dent : la dent n’a pas fait son éruption dansles délais habituels ; il n’y a aucune communication entre le sacpéricoronaire et la cavité buccale. Ceci est très fréquent au niveaudes canines supérieures mal posées qui restent incluses dans lepalais. Ceci correspond le plus souvent à un manque de place surl’arcade (dysharmonie dento-maxillaire) ; le même phénomène estfréquent pour la troisième molaire ou dent de sagesse inférieure.$ L’éruption difficile concerne de ce fait les germes de dents desagesse inférieures avec des accidents infectieux correspondantà la désinclusion du germe avec une péri-coronarite. L’avulsionde la dent après traitement médical de l’accident infectieux permetd’éviter la survenue d’un kyste mandibulaire marginal postérieur.

CROISSANCE CRANIO-FACIALE ET ANOMALIES

Base du crâneElle est cartilagineuse ; sa croissance est liée à l’activité de

synchondroses génétiquement programmées comme les carti-lages de croissance des os longs. Elle positionne les orbites etles os temporaux. Au niveau facial, l'élément prédominant estcentral : c'est le mésethmoïde, son élément le plus antérieur estla cloison nasale (septum) dont la croissance continue jusqu'à20-25 ans. Il positionne les os nasaux, frontaux et prémaxillaires.

L’achondroplasie (1/10 000 naissances) associe nanisme parhypoplasie des cartilages sériés des os longs et du mésethmoïde,d’où un déficit de croissance de l’étage moyen de la face.

Autres os cranio-faciauxCe sont des os de membrane (fig. 19) : leur croissance est en

rapport avec l'activité des sutures dites membraneuses. Ces suturesrépondent à des sollicitations biomécaniques. Les os de cette régionforment ainsi un puzzle de pièces osseuses en croissance. Le prin-cipe de conformateur est un élément important de la croissance

RQ

35

55

18 17 16 15 14 13 12 11 21 22 23 24 25 26 27 2838

373635343332314142434445464748

54 53 52 51 61 62 63 64 657574738485 7271818283

DENTURE LACTÉALE : 20 dents

DENTURE ADULTE : 32 dents

Dentitions pour 2 dentures successives : lactéalepuis adulte.% 1re dentition de 6 mois à 36 + ou — 6 mois.% 2e dentition de 6 à 12 ans : éruption des premières molaires à6 ans, des incisives à 7-8 ans.% Des prémolaires de 9 à 11 ans, des canines de 11 à 12 ans, et des2es molaires vers 12 ans.% Les éruptions sont à + ou — 6 mois avec une symétrie surchaque arcade.

Figure 17 Deux dentitions pour deux dentures successives :lactéale puis adulte. Numérotation des dents.Figure 18

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au niveau céphalique ou orbitaire par l’intermédiaire du fonc-tionnement des sutures membraneuses. La croissance cérébraleet oculaire fixe la croissance respective de la boîte crânienne etde l'orbite. Les microcéphalies sont ainsi le résultat d'une crois-sance cérébrale limitée, comme la micro-orbite est la consé-quence d'une anophtalmie. À l'inverse, une tumeur intra-orbi-taire entraîne le développement d'une macro-orbite commel'hydrocéphalie se mesure par l'augmentation du périmètre crânien.

La langue est le conformateur des maxillaires du fœtus.La tétée est la première fonction à être mise en place après

la déflexion céphalique. Chez le fœtus puis le nouveau-né, la suc-cion est prééminente, avec une action modelante linguale sur lamorphologie palatine et du maxillaire supérieur, mais aussi surla position de la mandibule. Toute microglossie entraîne un déficitde croissance (rétrognathisme ou anomalie de classe II squelettique)et toute macroglossie congénitale un développement exagéré delamandibule (prognathisme ou anomalie de classe III squelet tique).

Après la première dentition, l’oralité alimentaire s’oriente versla mastication. Les rapports d’occlusion des arcades dentairesdeviennent l’élément majeur de la croissance mandibulaire quinormalement s’adapte à celle du maxillaire supérieur.

Les facteurs fonctionnels de croissance sont des élémentsmorphogénétiques aussi importants que les facteurs anatomiques,ce qui explique qu’on puisse normaliser la croissance des maxil-laires de l’enfant par des traitements d’orthopédie dentofaciale.

1. Anomalies des sutures cranio-faciales

Les synostoses correspondent à un arrêt de fonctionnementprécoce. Elles réalisent des synostoses crâniennes ; la pertur-bation est fonction du nombre des sutures atteintes ; le défautde croissance se fait perpendiculairement à la suture atteinte.Associées à des synostoses faciales, elles réalisent des crânio-facio-sténoses dont les plus graves sont la maladie de Crouzonou d’Apert. Il s’agit d’affections graves mettant en jeu le pronosticvital du fait de l’hypertension intracrânienne, puisque la crois-sance de la voûte crânienne n’est pas adaptative à la croissancecérébrale. Le pronostic fonctionnel concerne également la vision,du fait des risques de compression des nerfs optiques, ainsiqu’une grave obstruction des voies aériennes supérieures, dufait de l’absence de développement de la face.

2. Anomalies de croissance squelettique

$ Les anomalies avec occlusion de classe III ont comme signe d'alarme l'inversé d'articulé incisif (fig. 20) alors que toutes lesdents temporaires ont terminé leur éruption (à 30-36 mois). Il seconstate en occlusion centrée obtenue après une déglutition. L'ar-ticulé inversé peut s'associer à une béance ou au contraire à unesupraclusie.

L'hypomaxillie supérieure est généralement associée voiredéclenchante ; c'est le cas des hypoethmoïdismes ethniques desxanthodermes, des hypomaxillies supérieures en cas de multi-ples agénésies au maxillaire supérieur alors qu'à la mandibule lenombre de dents est normal. C'est aussi le cas des enfants pré-sentant une cranio-facio-sténose, une achondroplasie ou chezles enfants opérés de fentes labio-maxillo-palatines : le déve-loppement du maxillaire supérieur est le plus souvent symétriquesi l'anomalie est symétrique (fentes bilatérales) ; il est asymé-

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11121314

23456

Les os et sutures membraneuses du massif facial(d’après G. Couly).% 1. Frontal % 8. Sphénoïde% 2. Nasal % 9. Temporal% 3. Unguis % 10. Pariétal% 4. Prémaxillaire % 11. Pétreux% 5. Post-Maxillaire % 12. Occipital% 6. Dentaire % 13. Hyoïde et apophyse styloïde% 7. Zygomatique % 14. Cartilages laryngiens

Figure 19 Le déclenchement d’une dysmorphose squelettiquese produit souvent en denture lactéale : l’inversion d’articuléincisif est caractéristique de la classe III.

Figure 20

L A R E V U E D U P R A T I C I E N , V O L . 5 7 , 3 0 J U I N 2 0 0 7 1381

trique en cas de fente unilatérale. Le même désordre avec béanceintermaxillaire est constaté chez les enfants atteints de macro-glossie (syndrome de Wiedemann-Beckwith). $ Les anomalies avec occlusion de classe II reposent sur la rétro-position de toute l'arcade dentaire inférieure par rapport au maxil-laire supérieur. En occlusion, les incisives inférieures sont com-plètement cachées derrière les incisives supérieures et touchentla muqueuse palatine (supraclusie) ou au contraire en sont sépa-rées par une béance. S'y associe un menton « fuyant » (fig. 21).

Les rétrognathismes peuvent être malformatifs ou secon-daires à un trouble de la motricité mandibulaire congénitale, oupostnatale précoce, comme dans les ankyloses temporo-mandi-bulaires de l'enfant. Les rétrognathismes malformatifs entrentdans le cadre des syndromes du premier arc ou de malforma-tions plus complexes. C'est l'agénésie des deux branches mon-tantes mandibulaires qui entraîne le rétrognathisme le plus graveavec une obstruction des voies aériennes supérieures. Si le syn-drome du premier arc est unilatéral, le développement de la man-

dibule est asymétrique (latéro-mandibulie) ; dans ce cas, le pointinterincisif est toujours dévié du côté mal formé (fig. 22).

3. Anomalies alvéolaires

Elles sont les plus fréquentes et relèvent de l’orthodontie. Ellesportent sur la partie alvéolo-dentaire de l’os dans les trois sens del’espace. Elles correspondent à un développement anormal vers l’avant (pro-alvéolie) ou vers l’arrière (rétro-alvéolie). L’exemple typeest lié à la succion d'un doigt ou d'une tétine avec une pro-alvéoliesupérieure ; le doigt est un obstacle empêchant la progression ver-ticale des incisives des deux arcades ; l’absence de contact entredeux ou plusieurs dents homologues est une béance (fig. 23).

PRÉVENIR LES MALADIES BUCCO-DENTAIRESFRÉQUENTES DE L’ENFANT

Carie dentaireLa carie dentaire (fig. 24) est une maladie infectieuse pluri-

factorielle. Sa survenue est liée :— à la qualité de l'émail plus ou moins résistant à l'attaque chi-mique. Cette qualité de l'émail est génétiquement contrôlée ;c'est à ce niveau que l'ion fluor agit,

Rétrognathisme du syndrome du premier arc (classeII squelettique).Figure 21

RQ

35

Syndrome du premier arc gauche avec agénésie de la branche montante de la mandibuleFigure 22

Anomalies dans le sens vertical : béance de molaireà molaire. La succion des doigts, dont le pouce, est la causela plus fréquente d’une béance

Figure 23

L A R E V U E D U P R A T I C I E N , V O L . 5 7 , 3 0 J U I N 2 0 0 71382

— à la qualité de l'alimentation : plus celle-ci est molle et sucréeet plus le risque de développement de caries est grand, quelleque soit la forme de l'apport (sucreries, boissons sucrées, biberonde lait à l’endormissement, médicaments), — à la qualité du brossage : l'efficacité préventive du brossagetriquotidien est prouvée, car il élimine la plaque dentaire. Unepellicule alimentaire blanchâtre résiduelle au niveau des cou-ronnes apparaît en l'absence de brossage efficace. C'est le lieude pullulation d'une flore microbienne variée. La structure micro-bienne est complexe avec bactéries anaérobies en profondeur,en particulier au niveau sous-gingival, et des bactéries aérobiesen surface,— à la qualité et au débit salivaires : la salive a un rôle importanten tant que fluide de la cavité buccale. Si le volume diminue, lafréquence des caries augmente, par exemple après irradiationcervico-faciale bilatérale. Leur prévention repose sur l’applicationquotidienne de gel fluoré.

Prévention de la carieSa prévention repose sur la limitation des apports sucrés, la

surveillance du brossage et l’utilisation de dentifrices fluorés.D’autres topiques (gel ou laque à haute teneur en fluor) sontréservés à des enfants à risque ou ayant une pathologie parti-culière des tissus dentaires (dentinogenèse ou amélogenèseimparfaites). Une prévention efficace nécessite dans tous les casune surveillance par un professionnel tous les 3 à 6 mois, dèsque les molaires lactéales sont présentes. La prescription de fluo-rures par voie orale ne peut se concevoir sans une informationcomplète sur les sources alimentaires de fluor de chaque famillepour éviter toute fluorose. &

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Polycaries liées à la prise d’un biberon de lait àl’endormissement. Caries évoluées (flèche de gauche), cariedébutante flèche de droite).

Figure 24

MINI TEST DE LECTURE

L’absence d’éruption d’une dent adulte peut être liée à la présence d’un germe surnuméraire.

Le diagnostic d’agénésie dentaire repose sur l’examen radiologique.

Un anodonte sans aucune dent lactéale peut néanmoins présenter quelques dents définitives.

La présence de multiples germes surnuméraires est associée aux cranio-facio-sténoses.

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A / VRAI OU FAUX ?

À propos des fentes labio-maxillaires…

Ce sont les plus fréquentes des malformations faciales.

Ce sont les plus fréquentes des malformations del’enfant.

Elles sont toujours associées à des troubles de ladéglutition.

Elles sont toujours associées à des malformationscérébrales.

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B / QCM

' Chirurgie maxillo-faciale et stomatologie pour le 2e cycle des études médicale Collège hospitalo-universitaire français de chirurgie maxillo-faciale et stomatologieParis: Elsevier

' Développement céphaliqueCouly GIn : Embryologie Croissance Pathologie, éditions CdP

' Développement embryonnaire de la faceCouly G Stomatologie Encycl Med Chir

' Embryologie dentaireBenoit R, Lemire M, Pellerin CIn : Julien Prélat éditeur, Introduction à la biologie du développement

Pour en savoir plus

L’auteur déclare n’avoir aucun conflit d’intérêts concernant les données publiées dans cet article.