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Nom : Prénom : Classe : 1e S SI-SVT (29 élèves) DESCRIPTIF DES LECTURES ET ACTIVITES FRANÇAIS 1e S SI-SVT Lycée François Rabelais 45 rue Rabelais 85200 Fontenay le Comte Séquence 1 : La plume dans le cambouis Objet d’étude : Le personnage de roman, du XVIIe siècle à nos jours Problématique(s) : - Quelles représentations de l’Homme nous sont données par Émile Zola dans le récit de ses relations avec les machines ? - La machine peut-elle devenir un personnage de roman ? Pour l’exposé Pour l’entretien Lectures analytiques (extraits de romans d’Émile Zola) : - L’Assommoir, chapitre 2 - Germinal, première partie, chapitre 3 - La Bête humaine, chapitre 5 - Au Bonheur des Dames, chapitre 1 Histoire des arts : Variations autour des rapports entre l’Homme et la machine au cinéma - extraits des Temps modernes (film), de C. Chaplin (sortie des ouvriers du métro, le héros « mangé » et recraché par la machine) - extraits de Metropolis (film), de Fritz Lang (dans les sous-sols de la cité : « Moloch », le monstre-machine anthropophage) Textes complémentaires : - Émile Zola, La Bête humaine, chapitre 10 (destruction ou « mort » de la Lison) - L. F Céline, Voyage au Bout de la Nuit (description des usines Ford)

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Page 1: descriptif 1eS SI-SVT...-extraits de Metropolis (film), de Fritz Lang (dans les sous-sols de la cité : « Moloch », le monstre-machine anthropophage) Textes complémentaires : -Émile

Nom : Prénom : Classe : 1e S SI-SVT (29 élèves)

DESCRIPTIF DES LECTURES ET ACTIVITES FRANÇAIS 1e S SI-SVT

Lycée François Rabelais 45 rue Rabelais 85200 Fontenay le Comte

Séquence 1 : La plume dans le cambouis

Objet d’étude : Le personnage de roman, du XVIIe siècle à nos jours

Problématique(s) : - Quelles représentations de l’Homme nous sont données par Émile Zola dans le récit de ses

relations avec les machines ? - La machine peut-elle devenir un personnage de roman ?

Pour l’exposé Pour l’entretien

Lectures analytiques (extraits de romans d’Émile Zola) :

- L’Assommoir, chapitre 2 - Germinal, première partie, chapitre 3 - La Bête humaine, chapitre 5 - Au Bonheur des Dames, chapitre 1

Histoire des arts :

Variations autour des rapports entre l’Homme et la machine au cinéma - extraits des Temps modernes (film), de C.

Chaplin (sortie des ouvriers du métro, le héros « mangé » et recraché par la machine)

- extraits de Metropolis (film), de Fritz Lang (dans les sous-sols de la cité : « Moloch », le monstre-machine anthropophage)

Textes complémentaires :

- Émile Zola, La Bête humaine, chapitre 10 (destruction ou « mort » de la Lison)

- L. F Céline, Voyage au Bout de la Nuit (description des usines Ford)

Page 2: descriptif 1eS SI-SVT...-extraits de Metropolis (film), de Fritz Lang (dans les sous-sols de la cité : « Moloch », le monstre-machine anthropophage) Textes complémentaires : -Émile

Séquence 2 : Corniche Kennedy, Maylis de Kerangal

Objets d’étude : Le personnage de roman du XVIIème siècle à nos jours

Problématique(s) : Ce que plonger veut dire… Les héros plongeurs de ce roman sont-ils seulement des représentations fictives des adolescents contemporains ?

Pour l’exposé Pour l’entretien

Lectures analytiques :

NB : Les pages renvoient à l’édition Gallimard, collection folioplus. - Extrait 1 : pages 27-29 du début du chapitre à

"voleuse, voleuse, je t'ai vue » - Extrait 2 : pages 37-39 de "Il s'est placé dans

le flux de sa lumière" à la fin. - Extrait 3 : pages 64-66 de "La fille se lève,

rassemble ses affaires..." à la fin - Extrait 4 : pages 116-118 : de "La peur les

saisit" à "vers l'hôpital le plus proche"

Étude(s) d’ensemble :

- Le motif du plongeon : un art de la fuite ? une transgression ritualisée ? une manière d’affirmer sa liberté ?

- Le mélange des genres : roman d’apprentissage sur la jeunesse ou roman policier ?

- La construction du roman - La mer dans le roman

Texte complémentaire :

Ovide, Les Métamorphoses, Livre VIII, « Dédale et Icare » (extrait)

Histoire des arts

C o r n i c h e K e n n e d y , a d a p t a t i o n cinématographique de Dominique Cabrera (Film vu en classe par une partie de la classe seulement en raison du blocage du lycée)

Travail d’écriture personnel : rédaction d’un entretien fictif avec Maylis de Kerangal

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Séquence 3 : Regarde les Lumières mon Amour, Annie Ernaux

Objet d’étude : La question de l'Homme dans les genres de l'argumentation du XVIème à nos jours

Problématique(s) : quels regards les artistes, et en particulier la littérature, peuvent-ils porter sur la société de consommation ?

Pour l’exposé Pour l’entretien

Lectures analytiques

Quatre extraits ou regroupements d’extraits en lien avec des thématiques ont été sélectionnés et étudiés. Les pages renvoient à l’édition Folio (F) et Flammarion, étonnants classiques (EC).

- Extraits 1 : début (préface), pages 11-14 (F) et 25-27(EC), du début jusqu’à « l’inaccessible et fin « Mardi 22 octobre », pages 88-89 (F) et 94-95 (EC)

- Extrait 2 : « Lundi 4 février », à partir de « Il faut que je sois descendue au niveau I » à la fin. Pages 58-59 (F) et 65-66 (EC), avec une extension proposée, page 77 (folio) et 83-84 (EC) de « À la fin de mes courses » jusqu’à la fin du passage.

- Extrait 3 : « mercredi 13 février », pages 62-64 (F) et 69-71 (EC)

- Extrait 4 : « Jeudi 7 février », pages 59-61 (F) et 66-69 (EC)

Questions d’ensemble

- Quelles écritures dans ce livre, fruit d’une commande faite à l’autrice par l’historien Pierre Rosenvallon : autobiographie, journal, étude sociologique, œuvre engagée ?

- Le regard de l’autrice-consommatrice : entre empathie et critique sociale.

- L’écriture d’Annie Ernaux : entre sécheresse et recherche de style.

Textes complémentaires

Regards d’auteurs sur la société marchande :

- Voltaire, Candide, chapitre 19 (arrivée de Candide à Surinam)

- Georges Perec, Les Choses - Jacques Prévert, « La grasse matinée », in

Paroles

Histoire des arts

Regards d’artistes et de plasticiens sur la société de consommation à lier avec des thématiques abordées dans l’ouvrage d’Annie Ernaux :

- Andy Warhol, Campbell’s soup - Andreas Gursky, 99 cents - Duane Hanson, Supermarket Lady, 1969 - Liu Jianhua, Yiwu Survey

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Séquence 4 : Le Parti-pris des Choses, Francis Ponge

Objet d’étude : Écriture poétique et quête de sens du Moyen-âge à nos jours

Problématique(s) : - Qui prend parti ? le poète pour les choses ou les objets pour la poésie ? - Qu'est-ce qu'un recueil, notamment lorsque celui-ci, à l'instar du Parti-pris des Choses n'a pas été

élaboré par son auteur, mais par son éditeur ?

Pour l’exposé Pour l’entretien

Lectures analytiques

- « Pluie » - « Le cageot » - « Le pain » - « Les plaisirs de la porte »

Questions d’ensemble - Quel sens donner à la préposition « des » dans le

titre - Qu’est-ce qu’un poème ? Comment caractériser

l’écriture poétique dans ce recueil ? - Quelle est la cohérence de ce recueil?

Textes complémentaires

Pour la cohérence du recueil : À partir d'un travail sur la table du recueil, la réflexion a porté sur l'élaboration de l'œuvre par l'éditeur Jean Paulhan. Quelles intentions l'ont guidé? Quels sens F. Ponge a-t-il cherché à donner à sa poésie ?

Pour la question portant sur l’écriture poétique de Ponge :

- Rémy Belleau, Petites inventions (1556), « L’huître » (vers 29-56)

- Albert Mérat, "L'huître", Les Chimères (1866) - Francis Ponge, "L'huître"

Histoire des arts Trois œuvres de Marcel Duchamp : - Roue de bicyclette (1913) - Porte-bouteilles (1914) - Fontaine (1917)

Une réflexion a porté sur les liens que le lecteur tisser entre la démarche poétique de Francis Ponge et le ready-made de Duchamp

Lectures cursives approfondies en classe "Escargots", un des poèmes longs extrait du Parti-pris des Choses

Travail d’écriture personnel : rédaction d’une lettre de Jean Paulhan à Francis Ponge

(Travail pas encore réalisé au moment du bac blanc)

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Séquence 1 : La plume dans le cambouis

Objet d’étude : Le personnage de roman, du XVIIe siècle à nos jours

Problématique(s) : - Quelles représentations de l’Homme nous sont données par Émile Zola dans le récit de ses

relations avec les machines ? - La machine peut-elle devenir un personnage de roman ?

Pour l’exposé Pour l’entretien

Lectures analytiques (extraits de romans d’Émile Zola) :

- L’Assommoir, chapitre 2 - Germinal, première partie, chapitre 3 - La Bête humaine, chapitre 5 - Au Bonheur des Dames, chapitre 1

Histoire des arts :

Variations autour des rapports entre l’Homme et la machine au cinéma - extraits des Temps modernes (film), de C.

Chaplin (sortie des ouvriers du métro, le héros « mangé » et recraché par la machine)

- extraits de Metropolis (film), de Fritz Lang (dans les sous-sols de la cité : « Moloch », le monstre-machine anthropophage)

Textes complémentaires :

- Émile Zola, La Bête humaine, chapitre 10 (destruction ou « mort » de la Lison)

- L. F Céline, Voyage au Bout de la Nuit (description des usines Ford)

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Séquence 1 Lecture analytique

Émile Zola, L’Assommoir, 1877, extrait du chapitre 2

Trois semaines plus tard, vers onze heures et demie, un jour de beau soleil, Gervaise et Coupeau, l'ouvrier zingueur, mangeaient ensemble une prune, à l'Assommoir du père Colombe. Coupeau, qui fumait une cigarette sur le trottoir, l'avait forcée à entrer, comme elle traversait la rue, revenant de porter du linge; et son grand panier carré de blanchisseuse était par terre, près d'elle, derrière la petite table de zinc. L'Assommoir du père Colombe se trouvait au coin de la rue des Poissonniers et du boulevard de Rochechouart. L'enseigne portait, en longues lettres bleues, le seul mot : Distillation, d'un bout à l'autre. Il y avait à la porte, dans deux moitiés de futaille, des lauriers-roses poussiéreux. Le comptoir énorme, avec ses files de verres, sa fontaine et ses mesures d'étain, s'allongeait à gauche en entrant; et la vaste salle, tout autour, était ornée de gros tonneaux peints en jaune clair, miroitants de vernis, dont les cercles et les cannelles de cuivre luisaient. Plus haut, sur des étagères, des bouteilles de liqueurs, des bocaux de fruits, toutes sortes de fioles en bon ordre, cachaient les murs, reflétaient dans la glace, derrière le comptoir, leurs taches vives, vert-pomme, or pâle laque tendre. Mais la curiosité de la maison était, au fond, de l'autre côté d'une barrière de chêne, dans une cour vitrée, l'appareil à distiller que les consommateurs voyaient fonctionner, des alambics aux longs cols, des serpentins descendant sous terre, une cuisine du diable devant laquelle venaient rêver les ouvriers soûlards. […] Et elle se leva. Coupeau, qui approuvait vivement ses souhaits, était déjà debout, s'inquiétant de l'heure. Mais ils ne sortirent pas tout de suite ; elle eut la curiosité d'aller regarder, au fond, derrière la barrière de chêne, le grand alambic de cuivre rouge, qui fonctionnait sous le vitrage clair de la petite cour ; et le zingueur, qui l'avait suivie, lui expliqua comment ça marchait, indiquant du doigt les différentes pièces de l'appareil, montrant l'énorme cornue d'où tombait un filet limpide d'alcool. L'alambic, avec ses récipients de forme étrange, ses enroulements sans fin de tuyaux, gardait une mine sombre ; pas une fumée ne s'échappait ; à peine entendait-on un souffle intérieur, un ronflement souterrain ; c'était comme une besogne de nuit faite en plein jour, par un travailleur morne, puissant et muet. Cependant, Mes-Bottes, accompagné de ses deux camarades, était venu s'accouder sur la barrière, en attendant qu'un coin du comptoir fût libre. Il avait un rire de poulie mal graissée, hochant la tête, les yeux attendris, fixés sur la machine à soûler. Tonnerre de Dieu ! elle était bien gentille ! Il y avait, dans ce gros bedon de cuivre, de quoi se tenir le gosier au frais pendant huit jours. Lui, aurait voulu qu'on lui soudât le bout du serpentin entre les dents, pour sentir le vitriol encore chaud l'emplir, lui descendre jusqu'aux talons, toujours, toujours, comme un petit ruisseau. Dame ! il ne se serait plus dérangé, ça aurait joliment remplacé les dés à coudre de ce roussin de père Colombe ! Et les camarades ricanaient, disaient que cet animal de Mes-Bottes avait un fichu grelot, tout de même. L'alambic, sourdement, sans une flamme, sans une gaieté dans les reflets éteints de ses cuivres, continuait, laissait couler sa sueur d'alcool, pareil à une source lente et entêtée, qui à la longue devait envahir la salle, se répandre sur les boulevards extérieurs, inonder le trou immense de Paris. Alors, Gervaise, prise d'un frisson, recula ; et elle tâchait de sourire, en murmurant : C'est bête, ça me fait froid, cette machine... la boisson me fait froid...

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Séquence 1 Lecture analytique

Emile Zola, Germinal, 1885, première partie, chapitre 3

Lentement, Étienne revint à la recette. Ce vol géant sur sa tête l’ahurissait. Et, grelottant dans les courants d’air, il regarda la manœuvre des cages, les oreilles cassées par le roulement des berlines. Près du puits, le signal fonctionnait, un lourd marteau à levier, qu’une corde tirée du fond, laissait tomber sur un billot. Un coup pour arrêter, deux pour descendre, trois pour monter : c’était sans relâche comme des coups de massue dominant le tumulte, accompagnés d’une claire sonnerie de timbre ; pendant que le moulineur, dirigeant la manœuvre, augmentait encore le tapage, en criant des ordres au machineur, dans un porte-voix. Les cages, au milieu de ce branle-bas, apparaissaient et s’enfonçaient, se vidaient et se remplissaient, sans qu’Étienne comprît rien à ces besognes compliquées. Il ne comprenait bien qu’une chose : le puits avalait des hommes par bouchées de vingt et de trente, et d’un coup de gosier si facile, qu’il semblait ne pas les sentir passer. Dès quatre heures, la descente des ouvriers commençait. Ils arrivaient de la baraque, pieds nus, la lampe à la main, attendant par petits groupes d’être en nombre suffisant. Sans un bruit, d’un jaillissement doux de bête nocturne, la cage de fer montait du noir, se calait sur les verrous, avec ses quatre étages contenant chacun deux berlines pleines de charbon. Des moulineurs, aux différents paliers, sortaient les berlines, les remplaçaient par d’autres, vides ou chargées à l’avance des bois de taille. Et c’était dans les berlines vides que s’empilaient les ouvriers, cinq par cinq, jusqu’à quarante d’un coup, lorsqu’ils tenaient toutes les cases. Un ordre partait du porte-voix, un beuglement sourd et indistinct, pendant qu’on tirait quatre fois la corde du signal d’en bas, « sonnant à la viande », pour prévenir de ce chargement de chair humaine. Puis, après un léger sursaut, la cage plongeait silencieuse, tombait comme une pierre, ne laissait derrière elle que la fuite vibrante du câble.

— C’est profond ? demanda Étienne à un mineur, qui attendait près de lui, l’air somnolent.

— Cinq cent cinquante-quatre mètres, répondit l’homme. Mais il y a quatre accrochages au-dessus, le premier à trois cent vingt.

Tous deux se turent, les yeux sur le câble qui remontait. Étienne reprit :

— Et quand ça casse ? — Ah ! quand ça casse…

Le mineur acheva d’un geste. Son tour était arrivé, la cage avait reparu, de son mouvement aisé et sans fatigue. Il s’y accroupit avec des camarades, elle replongea, puis jaillit de nouveau au bout de quatre minutes à peine, pour engloutir une autre charge d’hommes. Pendant une demi-heure, le puits en dévora de la sorte, d’une gueule plus ou moins gloutonne, selon la profondeur de l’accrochage où ils descendaient, mais sans un arrêt, toujours affamé, de boyaux géants capables de digérer un peuple. Cela s’emplissait, s’emplissait encore, et les ténèbres restaient mortes, la cage montait du vide dans le même silence vorace.

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Séquence 1 Lecture analytique

Emile Zola, La Bête humaine, 1890, extrait du chapitre 5

Dans le vaste hangar fermé, noir de charbon, et que de hautes fenêtres poussiéreuses éclairaient, parmi les autres machines au repos, celle de Jacques se trouvait déjà en tête d’une voie, destinée à partir la première. Un chauffeur du dépôt venait de charger le foyer, des escarbilles rouges tombaient dessous, dans la fosse à piquer le feu. C’était une de ces machines d’express, à deux essieux couplés, d’une élégance fine et géante, avec ses grandes roues légères réunies par des bras d’acier, son poitrail large, ses reins allongés et puissants, toute cette logique et toute cette certitude qui font la beauté souveraine des êtres de métal, la précision dans la force. Ainsi que les autres machines de la Compagnie de l’Ouest, en dehors du numéro qui la désignait, elle portait le nom d’une gare, celui de Lison, une station du Cotentin. Mais Jacques, par tendresse, en avait fait un nom de femme, la Lison, comme il disait, avec une douceur caressante. Et, c’était vrai, il l’aimait d’amour, sa machine, depuis quatre ans qu’il la conduisait. Il en avait mené d’autres, des dociles et des rétives, des courageuses et des fainéantes ; il n’ignorait point que chacune avait son caractère, que beaucoup ne valaient pas grand-chose, comme on dit des femmes de chair et d’os ; de sorte que, s’il l’aimait celle-là, c’était en vérité qu’elle avait des qualités rares de brave femme. Elle était douce, obéissante, facile au démarrage, d’une marche régulière et continue, grâce à sa bonne vaporisation. On prétendait bien que, si elle démarrait avec tant d’aisance, cela provenait de l’excellent bandage des roues et surtout du réglage parfait des tiroirs ; de même que, si elle vaporisait beaucoup avec peu de combustible, on mettait cela sur le compte de la qualité du cuivre des tubes et de la disposition heureuse de la chaudière. Mais lui savait qu’il y avait autre chose, car d’autres machines, identiquement construites, montées avec le même soin, ne montraient aucune de ses qualités. Il y avait l’âme, le mystère de la fabrication, ce quelque chose que le hasard du martelage ajoute au métal, que le tour de main de l’ouvrier monteur donne aux pièces : la personnalité de la machine, la vie. Il l’aimait donc en mâle reconnaissant, la Lison, qui partait et s’arrêtait vite, ainsi qu’une cavale vigoureuse et docile ; il l’aimait parce que, en dehors des appointements fixes, elle lui gagnait des sous, grâce aux primes de chauffage. Elle vaporisait si bien, qu’elle faisait en effet de grosses économies de charbon. Et il n’avait qu’un reproche à lui adresser, un trop grand besoin de graissage : les cylindres surtout dévoraient des quantités de graisse déraisonnables, une faim continue, une vraie débauche. Vainement, il avait tâché de la modérer. Mais elle s’essoufflait aussitôt, il fallait ça à son tempérament. Il s’était résigné à lui tolérer cette passion gloutonne, de même qu’on ferme les yeux sur un vice, chez les personnes qui sont, d’autre part, pétries de qualités ; et il se contentait de dire, avec son chauffeur, en manière de plaisanterie, qu’elle avait, à l’exemple des belles femmes, le besoin d’être graissée trop souvent.

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Séquence 1 Lecture analytique

Emile Zola, Au Bonheur des Dames, 1883, chapitre 1 Madame Baudu, l’autre commis et la demoiselle, vinrent s’attabler à leur tour. Denise, de nouveau, resta seule, assise près de la porte, en attendant que son oncle pût la conduire chez Vinçard. Pépé jouait à ses pieds, Jean avait repris son poste d’observation, sur le seuil. Et, pendant près d’une heure, elle s’intéressa aux choses qui se passaient autour d’elle. De loin en loin, entraient des clientes : une dame parut, puis deux autres. La boutique gardait son odeur de vieux, son demi-jour, où tout l’ancien commerce, bonhomme et simple, semblait pleurer d’abandon. Mais, de l’autre côté de la rue, ce qui la passionnait, c’était le Bonheur des Dames, dont elle apercevait les vitrines, par la porte ouverte. Le ciel demeurait voilé, une douceur de pluie attiédissait l’air, malgré la saison ; et, dans ce jour blanc, où il y avait comme une poussière diffuse de soleil, le grand magasin s’animait, en pleine vente. Alors, Denise eut la sensation d’une machine, fonctionnant à haute pression, et dont le branle aurait gagné jusqu’aux étalages. Ce n’étaient plus les vitrines froides de la matinée ; maintenant, elles paraissaient comme chauffées et vibrantes de la trépidation intérieure. Du monde les regardait, des femmes arrêtées s’écrasaient devant les glaces, toute une foule brutale de convoitise. Et les étoffes vivaient, dans cette passion du trottoir : les dentelles avaient un frisson, retombaient et cachaient les profondeurs du magasin, d’un air troublant de mystère ; les pièces de drap elles-mêmes, épaisses et carrées, respiraient, soufflaient une haleine tentatrice ; tandis que les paletots se cambraient davantage sur les mannequins qui prenaient une âme, et que le grand manteau de velours se gonflait, souple et tiède, comme sur des épaules de chair, avec les battements de la gorge et le frémissement des reins. Mais la chaleur d’usine dont la maison flambait, venait surtout de la vente, de la bousculade des comptoirs, qu’on sentait derrière les murs. Il y avait là le ronflement continu de la machine à l’œuvre, un enfournement de clientes, entassées devant les rayons, étourdies sous les marchandises, puis jetées à la caisse. Et cela réglé, organisé avec une rigueur mécanique, tout un peuple de femmes passant dans la force et la logique des engrenages. Denise, depuis le matin, subissait la tentation. Ce magasin, si vaste pour elle, où elle voyait entrer en une heure plus de monde qu’il n’en venait chez Cornaille en six mois, l’étourdissait et l’attirait ; et il y avait, dans son désir d’y pénétrer, une peur vague qui achevait de la séduire. En même temps, la boutique de son oncle lui causait un sentiment de malaise. C’était un dédain irraisonné, une répugnance instinctive pour ce trou glacial de l’ancien commerce. Toutes ses sensations, son entrée inquiète, l’accueil aigri de ses parents, le déjeuner triste sous un jour de cachot, son attente au milieu de la solitude ensommeillée de cette vieille maison agonisante, se résumaient en une sourde protestation, en une passion de la vie et de la lumière. Et, malgré son bon cœur, ses yeux retournaient toujours au Bonheur des Dames, comme si la vendeuse en elle avait eu le besoin de se réchauffer au flamboiement de cette grande vente. — En voilà qui ont du monde, au moins ! laissa-t-elle échapper.

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Séquence 1 Texte complémentaire

Emile Zola, La Bête humaine, 1890, extrait du chapitre 10

Enfin, Jacques ouvrit les paupières. Ses regards troubles se portèrent sur elles, tour à tour, sans qu’il parût les reconnaître. Elles ne lui importaient pas. Mais ses yeux ayant rencontré, à quelques mètres, la machine qui expirait, s’effarèrent d’abord, puis se fixèrent, vacillants d’une émotion croissante. Elle, la Lison, il la reconnaissait bien, et elle lui rappelait tout, les deux pierres en travers de la voie, l’abominable secousse, ce broiement qu’il avait senti à la fois en elle et en lui, dont lui ressuscitait, tandis qu’elle, sûrement, allait en mourir. Elle n’était point coupable de s’être montrée rétive ; car, depuis sa maladie contractée dans la neige, il n’y avait pas de sa faute, si elle était moins alerte ; sans compter que l’âge arrive, qui alourdit les membres et durcit les jointures. Aussi lui pardonnait-il volontiers, débordé d’un gros chagrin, à la voir blessée à mort, en agonie. La pauvre Lison n’en avait plus que pour quelques minutes. Elle se refroidissait, les braises de son foyer tombaient en cendre, le souffle qui s’était échappé si violemment de ses flancs ouverts, s’achevait en une petite plainte d’enfant qui pleure. Souillée de terre et de bave, elle toujours si luisante, vautrée sur le dos, dans une mare noire de charbon, elle avait la fin tragique d’une bête de luxe qu’un accident foudroie en pleine rue. Un instant, on avait pu voir, par ses entrailles crevées, fonctionner ses organes, les pistons battre comme deux cœurs jumeaux, la vapeur circuler dans les tiroirs comme le sang de ses veines ; mais, pareilles à des bras convulsifs, les bielles n’avaient plus que des tressaillements, les révoltes dernières de la vie ; et son âme s’en allait avec la force qui la faisait vivante, cette haleine immense dont elle ne parvenait pas à se vider toute. La géante éventrée s’apaisa encore, s’endormit peu à peu d’un sommeil très doux, finit par se taire. Elle était morte. Et le tas de fer, d’acier et de cuivre, qu’elle laissait là, ce colosse broyé, avec son tronc fendu, ses membres épars, ses organes meurtris, mis au plein jour, prenait l’affreuse tristesse d’un cadavre humain, énorme, de tout un monde qui avait vécu et d’où la vie venait d’être arrachée, dans la douleur.

Page 11: descriptif 1eS SI-SVT...-extraits de Metropolis (film), de Fritz Lang (dans les sous-sols de la cité : « Moloch », le monstre-machine anthropophage) Textes complémentaires : -Émile

Séquence 1 Texte complémentaire

Louis-Ferdinand Céline, Voyage au Bout de la Nuit, 1932

Tout tremblait dans l’immense édifice et soi-même des pieds aux oreilles possédé par le tremblement, il en venait des vitres et du plancher et de la ferraille, des secousses, vibré de haut en bas. On en devenait machine aussi soi-même à force et de toute sa viande encore tremblotante dans ce bruit de rage énorme qui vous prenait le dedans et le tour de la tête et plus bas vous agitant les tripes et remontait aux yeux par petits coups précipités, infinis, inlassables. À mesure qu'on avançait on les perdait les compagnons. On leur faisait un petit sourire à ceux-là en les quittant comme si tout ce qui se passait était bien gentil. On ne pouvait plus ni se parler ni s'entendre. A mesure qu’on avançait on les perdait les compagnons. On leur faisait un petit sourire à ceux-là en les quittant comme si tout ce qui se passait était bien gentil. On ne pouvait plus ni se parler ni s’entendre. Il en restait à chaque fois trois ou quatre autour d’une machine. On résiste tout de même, on a du mal à se dégoutter de sa substance, on voudrait bien arrêter tout ça pour qu’on y réfléchisse, et entendre en soi son cœur battre facilement, mais ça ne se peut plus. Ça ne peut plus finir. Elle est en catastrophe cette infinie boîte aux aciers et nous on tourne dedans et avec les machines et avec la terre. Tous ensembles ! Et les mille roulettes et les pilons qui ne tombent jamais en même temps avec des bruits qui s’écrasent les uns contre les autres et certains si violents qu’ils déclenchent autour d’eux comme des espèces de silences qui vous font un peu de bien. Le petit wagon tortillard garni de quincaille se tracasse pour passer entre les outils. Qu'on se range! Qu'on bondisse pour qu'il puisse démarrer encore un coup le petit hystérique ! Et hop ! il va frétiller plus loin ce fou clinquant parmi les courroies et volants, porter aux hommes leur ration de contraintes. Les ouvriers penchés soucieux de faire tout le plaisir possible au machines vous écœurent, à leur passer les boulons au calibre, et des boulons encore, au lieu d’en finir une fois pour toutes, avec cette odeur d’huile, cette buée qui brûle les tympans et le dedans des oreilles par la gorge. C’est pas la honte qui leur fait baisser la tête. On cède au bruit comme on cède à la guerre. On se laisse aller aux machines avec les trois idées qui restent à vaciller tout en haut derrière le front de la tête. C’est fini. Partout ce qu’on regarde, tout ce que la main touche, c’est dur à présent. Et tout ce dont on arrive à se souvenir encore un peu est raidi aussi comme du fer et n’a plus de goût dans la pensée. On est devenu salement vieux d’un seul coup. Il faut abolir la vie du dehors, en faire aussi d’elle de l’acier, quelque chose d’utile. On l’aimait pas assez telle qu’elle était, c’est pour ça. Faut en faire un objet donc, du solide, c’est la Règle.

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Quatre images extraites du film Les Temps modernes de Charlie Chaplin (1936) Documents complémentaires

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Quatre images extraites du film Metropolis de Fritz Lang (1927)

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Séquence 2 : Corniche Kennedy, Maylis de Kerangal

Objets d’étude : Le personnage de roman du XVIIème siècle à nos jours

Problématique(s) : Ce que plonger veut dire… Les héros plongeurs de ce roman sont-ils seulement des représentations fictives des adolescents contemporains ?

Pour l’exposé Pour l’entretien

Lectures analytiques :

NB : Les pages renvoient à l’édition Gallimard, collection folioplus. - Extrait 1 : pages 27-29 du début du chapitre à

"voleuse, voleuse, je t'ai vue » - Extrait 2 : pages 37-39 de "Il s'est placé dans

le flux de sa lumière" à la fin. - Extrait 3 : pages 64-66 de "La fille se lève,

rassemble ses affaires..." à la fin - Extrait 4 : pages 116-118 : de "La peur les

saisit" à "vers l'hôpital le plus proche"

Étude(s) d’ensemble :

- Le motif du plongeon : un art de la fuite ? une transgression ritualisée ? une manière d’affirmer sa liberté ?

- Le mélange des genres : roman d’apprentissage sur la jeunesse ou roman policier ?

- La construction du roman - La mer dans le roman

Texte complémentaire :

Ovide, Les Métamorphoses, Livre VIII, « Dédale et Icare » (extrait)

Histoire des arts

C o r n i c h e K e n n e d y , a d a p t a t i o n cinématographique de Dominique Cabrera (Film vu en classe par une partie de la classe seulement en raison du blocage du lycée)

Travail d’écriture personnel : rédaction d’un entretien fictif avec Maylis de Kerangal

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Lecture analytique n°1 : pages 27-29 du début du chapitre à "voleuse, voleuse, je t'ai vue »

Il y en a une qui regarde, justement, qui n'en perd pas une miette,

ramasse tout ce qui se passe sur la Plate, accroupie dans l'ombre bleutée

d'un rocher à profil animal – crête de stégosaure –, et retient son souffle

quand ses yeux grands ouverts scrutent, repèrent et enregistrent visages

et déplacements, fixent voix et rires – puisque là-devant, à quelques

mètres, ça discute sec, ça rigole, ça s'esclaffe et ça chantonne, ça mange

des frites mayonnaise, des beignets, ça boit du Coca, ça commente les

magazines, ça se crème le dos, ça se paluche, ça fume, ça prend ses

aises, ça se croit chez soi. Sept, huit minutes qu'elle est là et elle n'en

revient pas elle-même, la voilà comme une Apache en planque, tendue à

mort, prête à saisir l'instant ou jamais qui couronne le bon geste, prête à

bondir.

Elle a reconnu Eddy quand il s'est élancé le premier au-dessus de la

mer. Elle le reconnaît toujours, même de loin, sait par cœur sa silhouette

de flèche, ses plongeons et ses sauts, la manie qu'il a de se dresser sur la

pointe des pieds deux fois de suite avant de se précipiter dans le vide,

l'extension de son corps quand il le déploie, ses maladresses feintes, ses

figures préférées, son plongeon de la mort – qui enchaîne saut de l'ange,

saut carpé et plongeon missile –, depuis le temps qu'elle soulève le

rideau de sa chambre vanille et espionne la Plate, depuis tout ce temps.

Elle se mord l'intérieur de la bouche, dans l'ombre a chaussé des

lunettes noires et ajusté son sac de plage sur son épaule nue. Elle attend,

attend le moment propice, immobile, pliée sur les talons, la paume de sa

main posée sur le frais granuleux de la roche, a passé les taillis de fer et

marché dans les éboulis qui déséquilibrent, se tient le regard happé dans

l'échancrure de rochers, repère le lieu, les fissures et les bosses du relief,

épie, compte et recompte, et devant, à quatre ou cinq mètres, trois filles

se lèvent maintenant, les serviettes se plissent, un cabas se déverse

doucement, dégorge trousse, foulard, petite bouteille d'eau, photos et

cigarettes, téléphone portable, lequel sonne – un tube, Beyoncé –, les

filles ne l'entendent pas, aucune des trois ne se retourne, elles traversent

lentement la plate-forme vers la mer, elles sont grandes en contre-jour,

toutes noires découpées dans les flots du soleil, leur corps ensuqué

peine à se stabiliser, leur silhouette ondule, évasive, leur peau est

onctueuse, gorgée de soleil et de paroles, elle sent la mer : peut-être

qu'elles rigolent, qu'elles se tordent de rire, mais on ne les entend pas,

on n'entend que la voix de la star mondiale, déhanchée de plus belle,

boucles irisées tournoyantes, cuisses lustrées, lèvres glossy, peau dorée

de la fille qui bouge, peau de la voix onctueuse qui irrigue l'espace, le

tend et le repulpe, et celle qui jusque-là retenait son souffle bondit hors

de l'ombre – saut de détente d'un jaguar –, atterrit en plein soleil, à

découvert, les jambes fléchies au milieu des serviettes, éblouie, elle

plonge en avant pour saisir le téléphone portable – un geste si rapide

qu'on le dirait flouté avec effet de sillage dans l'atmosphère –, une fois

redressée elle s'immobilise soudain, ne sait quoi faire, l'appareil à

hauteur du visage, panique, fourre le téléphone au fond de son sac,

chancelle, fait un écart, un pas de côté hors des serviettes, mais alors

tombe, littéralement se cogne sur un visage tendu en travers du sien,

c'est un garçon, Nissim, sa bouche ouverte déjà alerte le groupe, sa

main droite lui menotte le poignet, qu'est-ce que tu fais, salope, hé

venez, y a une meuf qui fait les sacs, qu'est-ce que t'as fait, tu sais ce

que t'as fait, là, merdeuse, espèce de pute, rends le portable ou je t'éclate

ta sale petite gueule, ou je t'explose le fion, salope, voleuse, voleuse, je

t'ai vue, rends-le.

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Lecture anlytique n°2 : pages 37-39 de "Il s'est placé dans le flux de sa lumière" à la fin.

Il s'est placé dans le flux de sa lumière, et l'accompagne, intelligent,puisque c'est l'heure, après tout, heure pyromane, nuit/jour, nuit/ jour, tictac, tic tac, cliquètement du monde terrestre, dominos, tout cela est affairede course orbitale, rien de plus régulier. Par ailleurs il n'est pas certainqu'elle soit si moche. T'as peur, t'as peur, mais tu l'as jamais fait, commenttu peux savoir ? Comment tu peux savoir ce que ça fait le vertige si tu assi peur ? Il a parlé dans un souffle, depuis quelques secondes, la filleresplendit sous le soleil horizontal, ciblée en pleine tête comme le naos aufond du temple, et sa peau s'est dorée d'un coup, peau d'héritière, lisse etdouce, irisée d'ambre solaire, pieds bronzés, ongles nacrés, un paréotahitien, trois glaçons dans un verre à orangeade, tchin-tchin, va faire tonpiano chérie, Eddy trouve qu'il n'y a rien de plus passionnant à cetteminute que cette peau de fille, là, toute concrète, membrane qui palpite,absorbe et transmet, tissu qui capte et décongestionne, rien de plustroublant que cette peau. Il réagit, n'est pas dupe, se demande pourquoicette fille chourave dans les sacs, il y a quelque chose qui cloche, il n'aimepas trop ces histoires-là, se méfie des tordues, vaguement inquiet donc, çane correspond pas, mais précisément – on s'en doute –, cette torsion lemobilise. Aussi, l'écoute-t-il comme s'il nageait à contre-courant, et prendla mesure de chacune de ces paroles quand elle lui répond je peux lesavoir parce que justement, le vide, ça m'attire, c'est pour ça. Eddy hausseles épaules. Cette réponse lui déplaît. Dix minutes qu'ils sont seuls sur le Just Do It, l'air fermente la lumière dusoir décolore peu à peu le Cap, faut faire quelque chose, faut y allermaintenant. À contre-jour les peaux s'assombrissent quand les dentsrutilent d'un blanc de céruse.Eddy coupe court à la conversation, se racle la gorge et annonce d'unevoix ferme ouais, ouais, alors on est pareils, t'as qu'à me suivre, t'as qu'àfaire comme moi – il hésite à se rétracter soudain, sait qu'il joue gros : s'ilsaute le premier, il prend le risque que la fille s'échappe par l'arrière duCap et atteigne la quatre voies avant que les autres soient remontés à

temps pour la retenir, il sait aussi que ceux qui l'observent comme ons'obsède du chef ne seront pas dupes, et qu'il met en jeu son autorité. Lafille l'interroge, t'as peur alors ? Eddy jette un œil en bas, lui aussimordoré maintenant, la peau brune piquetée de minuscules auréolesblanches et poudreuses que le sel séché aura déposées, et qui sent le BigMac, la Marlboro et la mer à cargos, lui aussi les boucles épaisses, mais ladent de requin sur le ras du cou coquillages, et souple, nerveux, mobile,les yeux vifs sous les paupières gonflées, il lui plaît tout autant, vu deprès, que lorsqu'elle l'épiait à s'en brûler les prunelles derrière sa fenêtre.Il opte pour précipiter le mouvement, elle fait tout pour prolonger leurface-à-face, il le sent et elle l'entend qui approuve. Ils savent tout et, fortsde cet axiome sensible – une autre attraction, latérale celle-là –, ilsmélangent leurs présences physiques et aléatoires, entremêlent leur force,s'agencent et se combinent sans même se toucher ; sont comme les fauvesqui se cherchent dans le bruissement des clairières tropicales : leurs corpssont leur messager, leurs mouvements leur porte-parole.C'est le grand rodéo qui se met en branle, qui prend corps entre eux etdilate leur cœur. Ouais j'ai le vertige, c'est sûr, Eddy rigole, quand je saute,j'hallucine, je me disloque, je deviens gigantesque, puis il regarde au loinet ajoute, s'enfoncer là-dedans, j'aime ça. Elle l'écoute, ajuste sonmaillot – les index lissent l'ourlet de la culotte, à même la peau desfesses –, puis il déclare ok, on va y aller en même temps. Elle hoche latête, et un frisson la parcourt tout entière, passe sous sa peau, des picotschair de poule apparaissent, les minipoils se dressent au garde-à-vous.Une fois en position de départ, d'un coup la voilà pâle, les cernes creusés,elle est exsangue. Eddy ne dit rien. Il voudrait tout arrêter mais sur le JustDo It, le scénario s'est emballé. Il vient à son tour se mettre en place à côtéd'elle, ils font la même taille, trente centimètres les séparent. Ils prennentleur respiration, décomptent les secondes, trois, deux, un... go !, seprécipitent alors dans le ciel, dans la mer, dans toutes les profondeurspossibles, et quand ils sont dans l'air, hurlent ensemble, un même cri,accueillis soudain plus vivants et plus vastes dans un plus vaste monde.

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Lecture analytique n°3 : Pages 64-66 de "La fille se lève, rassemble ses affaires..." à la fin

La fille se lève, rassemble ses affaires à grands gestes, les fourre dans

son cabas, se met en route, retraverse la Plate. Arrivée au niveau du

rocher à échine de dinosaure, au lieu de tourner à gauche en direction de

la quatre voies, elle continue droit vers le Cap. On la voit qui marche

vite, butée, la bandoulière de son cabas lui griffe l'épaule, ses lunettes

tressautent sur son nez qui transpire, ses tempes battent un rythme d'enfer

sous son visage de pierre. Une fois atteint la base de la péninsule, elle

commence à grimper suivant le tracé de la fois dernière, en chemin ôte

ses lunettes noires et niche ses affaires dans une anfractuosité de roche,

tapote dessus à plusieurs reprises pour bien les caler, puis poursuit

l'ascension, de prise en prise gagne enfin le Face To Face, s'y poste

debout, les pieds parfaitement parallèles sur le pas de tir exigu, espacés

de vingt centimètres, et ainsi dressée, regarde droit devant elle : la

corniche roule vers les montagnes et se métamorphose, file à pleine

vitesse, disjonctant de la mer qui est mate ici, et lente, et lourd le ressac

en contrebas des rochers.

Combien de temps reste-t-elle postée de la sorte à douze mètres au-

dessus de la mer ? Au moins cinq minutes, peut-être davantage, le temps,

en tout cas, pour Eddy et Mario – qui, l'ayant observée depuis le poteau

repère, ont fait demi-tour criant aux autres, allez-y, on vous rejoint – de

descendre, bondissants, aériens, d'ôter à nouveau leurs vêtements, et de

monter la retrouver sur le Face To Face afin de la surprendre en douceur

comme on apprivoise un animal farouche, un voyou pris en flagrant délit

de braquage à main armée, un éploré suicidaire. Quand ils arrivent, elle

est en mauvaise posture, bloquée, grise, une statue, prête à vomir ses

poumons. Écoute-moi – c'est Eddy qui parle, la fille est de dos, figée, la

configuration du promontoire est telle qu'il est impossible de la faire

reculer –, t'arrêtes de faire la conne et tu m'écoutes : Mario va passer

devant toi pour te montrer comment faire pour éviter le ressac, tu te

décales de vingt centimètres sur la gauche, vas-y tu as la place, ensuite je

viens et ce sera ton tour.

Les garçons ne surent jamais quel fut le sourire de la fille – sa durée et

son style, sa forme de flammèche – qui, calme, posa les yeux sur la cosse

terrestre, puis s'écarta pour laisser passer Mario dont elle put voir de près

les bras calibrés allumettes – dont le droit, tatoué d'un bracelet de

barbelés à hauteur du biscoteau. Au moment de s'élancer, il se tourne

vers elle et lui demande, hé, c'est quoi ton prénom au fait ? La fille,

exsangue comme la dernière fois et le visage crispé, articule Suzanne, et,

entendant cela, Mario contracte son corps avant de le déployer soudain

d'un coup et de se projeter en avant, hurlant moi Mario, toi Suzanne, la

fille de ma... Il saute comme un ange malingre – comme si la gravitation

terrestre était un frayage, comme si le ciel dissimulait des lignes de fuite

qu'il fallait saisir tels les pompons du manège – et quand il réapparaît à la

surface de la mer, poisson pilote tout sourire, il renverse la tête vers elle,

et clame tu m'as bien regardé ?, trop pur, tu vas voir, tu m'as vu ?

Eddy l'a rejointe et la prenant par les épaules – dures comme du bois –, il

la redécale vers la droite, comment t'as dit que tu t'appelais déjà ?

Suzanne, elle réarticule, la langue cimentée par le vertige. Il répète,

feignant d'être songeur, Suzanne... ah ouais, genre ma grand-mère, quoi !

Il la regarde de haut, ludique, elle est franchement moche tellement elle

est blafarde, décolorée, les traits grossiers, la peau sèche et les lèvres

fripées. Genre, ouais, elle réplique à voix basse, les sourcils soudain

dessinés en accent circonflexe inversé. Moi, c'est Eddy, il reprend, une

main sur la hanche, vedette décontractée. Elle étrangle un rire, trop stylé !

Silence. Bon on y va ? il demande. Yes, let's go. Ils ne décomptent pas

les secondes mais respirent ensemble, une grosse lampée d'air, et

décochent du Face To Face l'un après l'autre, Suzanne puis Eddy, et une

fois dans l'air ce qu'ils éprouvent est un soulèvement général, celui du

monde qui palpite en eux, l'écho de leur présence sous le ciel en coupole,

et quand leurs deux têtes émergent à la surface de la mer, elles viennent

s'agencer à celle de Mario, se disposent comme les pointes d'un triangle

isocèle, et ils nagent sur place, ont les yeux grands ouverts, des sourires

mouvants, soleil coulé entre le feuillage ou bancs de sardines irisées

argent, sont cernés de mille désirs qui claquent, bruitent comme la

canopée, et la nuit qui monte au-dessus de leurs trois têtes décore de ses

lumières la corniche tout entière.

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Lecture analytique n°4 : pages 116-118 : de "La peur les saisit" à "vers l'hôpital le plus proche"

La peur les saisit quand ils penchent la tête en bas, cherchant les repères

habituels, ne voient rien, l'eau est noire et lourde, festonnée de mousse

claire au pourtour des rochers, bave lactescente, agitée, dégradée,

renouvelée sans cesse car la mer est grosse, et forte, si bien qu'on s'y

perd. Aussi les gosses vont-ils devoir tout se rappeler : les plongeons et

les sauts, les élans, les angles, les impulsions et les détentes, tout se

rappeler, au millimètre près, au newton et au kilojoule, au bar près, tout

se rappeler pour pouvoir tout refaire, à l'aveugle. Ils vont devoir libérer

la mémoire de tous les bonds contenus dans leur corps. Une poignée de

secondes plus tard, on entend la voix d'Eddy hurler dans la nuit depuis

le Face To Face que taillade un mistral rugueux : ok, mise à feu ! alors

aussitôt chaque voltigeur enflamme ses torches avant de les maintenir

dressées à la verticale, à bout de bras, genoux joints, christs en croix

photophores.

Fumées rouges, fumées blanches, fumées rapides. Elles écument le ciel

humide, aspergent les plongeurs d'une lumière crue, très blanche, qui

troue l'atmosphère de lueurs blafardes, s'amplifient et auréolent le Cap

d'un halo neige tramé au magenta, lequel mousse et se propage à toute

vitesse si bien que les premières silhouettes apparaissent aux balcons

des hôtels, aux terrasses que parfument l'eucalyptus et le gardénia, aux

hublots des voiliers qui croisent dans la baie, si bien que les voitures

intriguées ralentissent sur la corniche, les dîneurs penchent la tête au-

devant du caboulot, les girafes dodelinent du cou derrière les grilles du

zoo, les goélands halètent, gonflent et vident le torse, si bien que les

chiens aboient et que Sylvestre Opéra tressaille derrière ses jumelles,

putain qu'est-ce qui se passe en bas ?

Les corps des voltigeurs se découpent maintenant, bas-reliefs en avant

de la pénombre, en avant de la pierre, yeux graves et joues creusées

sous le noir charbon qui les masque, prêts à s'élancer sous le dôme pâle

issu des torches ficelées à leurs poignets, ils attendent le dernier cri, ils

l'attendent mobilisés, nerveux, explosifs – je sais cependant qu'Eddy

pivote à cet instant vers Suzanne, et lui prodigue un regard lourd, trop

pudique ou trop bête encore pour lui balancer direct ce regard amoureux

qui pousse dans la nuit du monde, limpide et univoque ; et peut-être

aussi qu'il pose ensuite deux doigts sur ses lèvres et qu'il les embrasse

comme on embrasse la crosse d'un Colt avant de donner de la voix une

dernière fois : let's gooooo ! Wouah, c'est la grande figure, la cascade

pétillante des Muchachos de la Plate, la fontaine kalach' ! Les derniers

trompe-la-mort de la corniche Kennedy s'envoient en l'air et

tourbillonnent comme des feux follets.

C'est l'heure où le Jockey et les siens se lèchent les doigts après les

petits-fours, pincent les lèvres sur la dernière gorgée de champagne,

déglutissent avec application, tous pompettes et parlant fort, et soudain

ébahis par ce qu'ils voient sur les écrans de contrôle qui diffusent les

images du Cap, lesquels sont les seuls où quelque chose se passe,

lesquels s'animent, des corps, des mouvements, des lumières, des

traînées pâles, des fumerolles, les invités sont tellement ébahis qu'ils se

croient ivres, et honteux de l'être ils finissent par se taire et continuent à

grenouiller autour du Jockey qui se décompose, bouche ouverte langue

pendante et yeux cloués sur les téléviseurs comme sous l'emprise d'une

substance hallucinogène, et tombe à la renverse, les quatre fers en l'air

sur le parquet du salon d'honneur, on crie, on s'agite, on éteint tous les

écrans puis on s'attroupe autour de lui qui passe maintenant du blême au

rouge, congestionné par la colère, fortement congestionné même, mais

voilà, c'est une colère beaucoup trop grosse pour un abdomen aussi

court et étroit que le sien, de sorte que le voilà muet, paralysé, la cage

horacique soulevée de hoquets convulsifs, le cerveau asphyxié, il est

urgent de l'évacuer en ambulance vers l'hôpital le plus proche.

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Étude d’ensemble Entretien

Ce que plonger veut dire…

� 23/27 Ceux de la Plate y déboulent, chahutent, y opèrent un appel du pied tandis que l'autre s'envole pointe tendue vers la ligne d'horizon, pour enjamber cette ligne justement, bras, tête et buste l'accompagnant dans une même asymptote de flèche, et leur corps est propulsé à l'avant, à l'avant de la corniche, à l'avant de la ville, à l'avant du bourbier qu'ils laissent dans leur dos, le bourbier de l'enfance et des secrets pourris, (…).

� 24/29 Quand ils montent faire un Just Do It, ils changent de vitesse, leurs mouvements sont plus lents, empreints de majesté, même si surjoués, même si rigolards – finis les créatures hyperactives, les gosses excités, les personnages élastiques et dopés, je te poursuis, hé ho petite flotte, je te double, je saute plus loin, plus haut et plus vite que toi : à présent, ils se concentrent. […] Leurs narines se pressent contre leur paroi nasale, leur cage thoracique se gonfle, ils écartent les bras, Just Do It, font un pas en avant, Just Do It, et sautent raides, tendus comme des bâtons, des allumettes de plomb : à sept mètres, les plats sont des brûlures. Ils prennent de l'élan pour plus d'amplitude, recherchent la courbe pour réduire leur vitesse, ne pas tomber tête la première et perpendiculaire mais ouvrir leur angle de pénétration dans la mer, Just Do It !, ils crient cela en remontant à la surface, hilares, Just Do It !, splash, wooow !, et c'est tout.

� 25/30 [… ] pour eux le Face To Face est le promontoire des duels, celui où cogne le soleil des westerns, celui de l'épate et du grand jeu. Situé à douze mètres, il est si exigu que seuls deux pieds peuvent s'y tenir assez espacés pour que le corps demeure en équilibre – le départ de saut est crucial, aucun faux mouvement ne se tolère, l'envol se doit d'être précis –, et se trouve sur le versant oriental du Cap, ce qui n'est pas bon : par vent d'est – vent de merde, brutal et glacé – les flots déchiquetés s'y précipitent, pointes dures en hameçon, si bien qu'après le saut il faut encore savoir s'extirper du ressac puis contourner la pointe du Cap afin de retrouver le passage dans les rochers et grimper facilement. Ils y montent tous pourtant. Sautent. Plus rares sont ceux qui plongent – Eddy, Rachid, Ptolémée et Mario. Et quand ils se précipitent de là-

haut, c'est la même crue qui les traverse, une crue de l'espace et du temps, une amplification de la lumière, une saisie de la joie.

� 11/13 […] tandis qu'en face, sur le front de mer, les rideaux s'écartent aux fenêtres des hôtels luxueux et des villas rococo, éblouissantes à travers le feuillage citronné des jardins – et, parmi eux, ceux de la chambre d'une adolescente qui a collé son front contre la vitre pour en éprouver le contact glacé, s'y écrase maintenant la face comme si elle cherchait l'air du dehors, et regarde en bas, bouche ouverte, nez tordu, cœur palpitant –, et plus loin encore, en arrière de la route, sur la haute façade d'un immeuble blanc de belle architecture, les stores bougent aux ouvertures – et, parmi eux, ceux du bureau d'un homme solitaire qui a glissé ses prunelles orageuses et veloutées entre deux lattes, bientôt sortira braquer sur la plate-forme ses jumelles de haute précision, et observe, silhouette corpulente, masse sombre à l'affût […].

� 27/33 Elle a reconnu Eddy quand il s'est élancé le premier au-dessus de la mer. Elle le reconnaît toujours, même de loin, sait par cœur sa silhouette de flèche, ses plongeons et ses sauts, la manie qu'il a de se dresser sur la pointe des pieds deux fois de suite avant de se précipiter dans le vide, l'extension de son corps quand il le déploie, ses maladresses feintes, ses figures préférées, son plongeon de la mort – qui enchaîne saut de l'ange, saut carpé et plongeon missile –, depuis le temps qu'elle soulève le rideau de sa chambre vanille et espionne la Plate, depuis tout ce temps.

28/35 […] et celle qui jusque-là retenait son souffle bondit hors de l'ombre – saut de détente d'un jaguar –, atterrit en plein soleil, à découvert, les jambes fléchies au milieu des serviettes, éblouie, elle plonge en avant pour saisir le téléphone portable – un geste si rapide qu'on le dirait flouté avec effet de sillage dans l’atmosphère […].

39/48 C’est le grand rodéo qui se met en branle, qui prend corps entre eux et dilate leur cœur. Ouais j'ai le vertige, c'est sûr, Eddy rigole, quand je saute, j'hallucine, je me disloque, je deviens gigantesque, puis il regarde au loin et ajoute, s'enfoncer là-dedans, j'aime ça. Elle l'écoute, ajuste son maillot – les

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Étude d’ensemble Entretienindex lissent l'ourlet de la culotte, à même la peau des fesses –, puis il déclare ok, on va y aller en même temps. Elle hoche la tête, et un frisson la parcourt tout entière, passe sous sa peau, des picots chair de poule apparaissent, les minipoils se dressent au garde-à-vous. Une fois en position de départ, d'un coup la voilà pâle, les cernes creusés, elle est exsangue. Eddy ne dit rien. Il voudrait tout arrêter mais sur le Just Do It, le scénario s'est emballé. Il vient à son tour se mettre en place à côté d'elle, ils font la même taille, trente centimètres les séparent. Ils prennent leur respiration, décomptent les secondes, trois, deux, un... go !, se précipitent alors dans le ciel, dans la mer, dans toutes les profondeurs possibles, et quand ils sont dans l'air, hurlent ensemble, un même cri, accueillis soudain plus vivants et plus vastes dans un plus vaste monde.

� 42/52 En conséquence de quoi, les divers sauts et plongeons dangereux opérés depuis les rochers de la corniche seraient passibles de fortes sanctions au même titre que les chiens sur les plages qu'ils soient ou non muselés, tenus en laisse, les feux, les concerts spontanés, les tam-tams et les djembés, les nudistes hors du périmètre autorisé […]

� 54/66 Sylvestre ne s'est pas trompé, couve le couple, leur verse whiskys secs et gin-tonics, évalue l'abdomen de l'homme, repère le bosselage du flingue sous le veston crème hypercintré, remplit les coupelles de cacahuètes, tranche des citrons, sucre la bordure des verres, distingue le fort accent russe de la fille quand elle lui demande du feu et manque de chuter quand leurs regards se croisent […]

66/81 Bon on y va ? il demande. Yes, let's go. Ils ne décomptent pas les secondes mais respirent ensemble, une grosse lampée d'air, et décochent du Face To Face l'un après l'autre, Suzanne puis Eddy, et une fois dans l'air ce qu'ils éprouvent est un soulèvement général, celui du monde qui palpite en eux, l'écho de leur présence sous le ciel en coupole, et quand leurs deux têtes émergent à la surface de la mer, elles viennent s'agencer à celle de Mario, se disposent comme les pointes d'un triangle isocèle, et ils nagent sur place, ont les yeux grands ouverts, des sourires mouvants, soleil coulé entre le feuillage ou bancs de sardines irisées argent, sont cernés de mille désirs qui claquent, bruitent comme

comme la canopée, et la nuit qui monte au-dessus de leurs trois têtes décore de ses lumières la corniche tout entière.

� 93/112 Il est assailli par un paquet de sensations contradictoires, repense à l'exaltation fugitive qui l'a traversé sur le plongeoir précédent, ce transport violent avec élancement du torse : se mettre en danger sans même y penser, ne voir dans toute prise de risque que la promesse d'une intensité nouvelle, vivre plus fort, rien d'autre. À nouveau, il regarde le vide : c'est sombre en bas, ça remue, un ourlet hostile à traverser avant d'atteindre la mer plus lisse et bleue que tout, un périmètre farci de raies noires, de tanches et de cœlacanthes à peau buboneuse, peuplé de gueules préhistoriques du temps de la Pangée. Abysses, ténèbres. Hop, plouf, et la mort au fond qui leur gobe les orteils, leur suce le rebondi des joues.

� 107/129 Une journaliste, qui se passionnait pour l'affaire, élabora un comptage de points qu'elle proposa sur la Toile au matin du quinze août : un plouf égale un point pour les plongeurs, une heure sans plouf égale un point pour la Sécurité du littoral. Or, à peine cette règle fut-elle mise en ligne qu'une fièvre corrosive s'empara du rivage. Les agents de la Sécurité, pas plus que les plongeurs, n'entendaient se faire humilier au vu et au su de toute une ville qui vivait l'oreille tendue vers la mer et bruissait des paris consignés au grand jour dans les bars, les escaliers, sur les marchés et les parvis.

� 116/139 La peur les saisit quand ils penchent la tête en bas, cherchant les repères habituels, ne voient rien, l'eau est noire et lourde, festonnée de mousse claire au pourtour des rochers, bave lactescente, agitée, dégradée, renouvelée sans cesse car la mer est grosse, et forte, si bien qu'on s'y perd. Aussi les gosses vont-ils devoir tout se rappeler : les plongeons et les sauts, les élans, les angles, les impulsions et les détentes, tout se rappeler, au millimètre près, au newton et au kilojoule, au bar près, tout se rappeler pour pouvoir tout refaire, à l'aveugle. Ils vont devoir libérer la mémoire de tous les bonds contenus dans leur corps. Une poignée de secondes plus tard, on entend la voix d'Eddy hurler dans la nuit depuis le Face To Face que taillade un mistral rugueux : ok, mise à feu !

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Étude d’ensemble EntretienLa mer dans Corniche Kennedy : ce qu’elle dit des personnages…

� Eddy est apparu le premier dans un fracas liquide, oreilles bouchées paupières dégoulinantes, l'a cherchée aussitôt, ne l'a pas vue, rien, pas de tête claire, pas une épaule, pas un morceau de tissu rouge, il a balayé du regard la surface de la mer, et tourné sur lui-même, deux ou trois pirouettes, qu'est-ce qu'elle fout, où est-elle passée, enfin a pivoté vers le Cap d'un coup gigantesque vu ainsi en contre-plongée, montagne haute sur l'eau – une coque de transatlantique, dure, noire, menaçante – et s'est couché en arrière pour faire la planche : le Just Do It a jailli au-dessus de lui comme une lame de couteau, vide, putain la meuf n'a pas sauté, c'est ça, elle est restée sur le promontoire et s'est cassée par la corniche, […].

� Eddy crawle à présent, crawle comme un malade pour faire le tour du Cap par l'avant, se dit qu'elle a tenté peut-être de remonter par le côté est et qu'il ne l'a pas vue, un espoir, mais rien, c'est désert, et maintenant tout est de plus en plus sombre, le soir descend, la mer bruite son clapot trompeur, les lumières brodent la ville, des paillettes, des arabesques, des pointillés, il crawle à nouveau, fonce, fonce à mort, contourne à nouveau le Cap, les autres l'attendent c'est sûr, il faut dire à Mario de ne pas toucher au sac de la fille, ça pue les emmerdes une nana pareille, il voulait pas, c'est un accident, il crawle à toute vitesse, n'a jamais fendu l'eau de la sorte, n'a jamais activé au bout de ses pieds une telle force motrice, […].

� Une fois atteint la base de la péninsule, elle commence à grimper suivant le tracé de la fois dernière, en chemin ôte ses lunettes noires et niche ses affaires dans une anfractuosité de roche, tapote dessus à plusieurs reprises pour bien les caler, puis poursuit l'ascension, de prise en prise gagne enfin le Face To Face, s'y poste debout, les pieds parfaitement parallèles sur le pas de tir exigu, espacés de vingt centimètres, et ainsi dressée, regarde droit devant elle : la corniche roule vers les montagnes et se métamorphose, file à

pleine vitesse, disjonctant de la mer qui est mate ici, et lente, et lourd le ressac en contrebas des rochers.

� Certes, il y a bien aujourd'hui des trios de mémères énormes et matinales qui y déplient péniblement des sièges de toile, devisent en rang et se baignent à voix haute – la mer est leur lieu de prédilection, porte à leur place leur corps trop lourd, elles y frétillent comme des sirènes –[…].

� Ce n'est pas la peur qui le freine, mais l'éblouissement. L'espace est profus autour de lui, très échancré, saturé de milliards de particules microscopiques qui planent et vibrent, pollinisent, diffractant doucement la lumière. Opéra sent son corps qui se débride, visage élargi, front et narines mêmement dilatés, thorax bombé, tendu soudain, peinant à contenir l'élan qui le soulève, son cœur prend de la vitesse, il oscille, le voilà transfuge, pris dans un emballement, celui d'une vie bigger than life, innervé de la tête aux pieds par une émotion très matérielle, il se découvre puissant, frontal, aimant, et la mer tout autour de lui est surfacée de plis sereins, étoffe soyeuse que le tailleur amoureux présente à la sultane, ça dure une poignée de secondes puis, comme percuté – la sensation d'un enivrement adolescent dans son corps qui n'est plus fait pour ça ? –, Sylvestre chancelle, haletant, le cœur vrillé et recule sur le Just Do It, prenant à rebours la paroi qu'il frotte tout du long de son derrière imposant.

� À nouveau, il regarde le vide : c'est sombre en bas, ça remue, un ourlet hostile à traverser avant d'atteindre la mer plus lisse et bleue que tout, un périmètre farci de raies noires, de tanches et de cœlacanthes à peau buboneuse, peuplé de gueules préhistoriques du temps de la Pangée. Abysses, ténèbres. Hop, plouf, et la mort au fond qui leur gobe les orteils, leur suce le rebondi des joues. C'est ça qu'ils cherchent, ces p'tits cons ? C'est à ça qu'ils jouent ? Il ne comprend plus rien.

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Étude d’ensemble Entretien

� À deux cents mètres, ceux de la Plate se gondolent sur leur serviette, la plage est noire de monde à cette heure, ils y sont à l'abri, y ont rejoint le reste de la bande, les couples enlacés et les filles qui n'ont pas sauté, et à présent racontent, comment ils ont trouvé le passage sous-marin au revers du Cap, parcouru le conduit en apnée sur dix mètres, un truc de héros, de mad man de la mort, et comment ils y ont frôlé des rascasses et des bonites, putain, une raie, j'ai bien reconnu, l'œil mi-clos, la gueule gluante, putain ouais ça fait trop peur, ça vit dans le noir absolu et ça supporte des pressions pas possibles, c'est invincible, c'est ça t'as raison, une raie, faudrait pas me prendre pour un con, pourquoi pas un octopus ou un requin-marteau, oh ça voit son petit poiscaille et ça veut sa maman, tu chies dans la colle […].

� Le vingt et un août, le temps change. La corniche se tait. Les orages approchent. Un mistral hostile souffle dans un ciel décoloré, les nuages d'argent se jointent au safran, les vignes se tordent au flanc de la montagne, la mer vire limaille de fer, hérissée au large de pointes crochues, la rade se vide, les parasols s'envolent, on interdit aux enfants les bateaux et matelas pneumatiques.

La peur les saisit quand ils penchent la tête en bas, cherchant les repères habituels, ne voient rien, l'eau est noire et lourde, festonnée de mousse claire au pourtour des rochers, bave lactescente, agitée, dégradée, renouvelée sans cesse car la mer est grosse, et forte, si bien qu'on s'y perd.

Mario ouvre les yeux sous l'eau. Il ouvre toujours les yeux sous l'eau : le jour, les flots de lumière perçant la surface découpent sous la mer des rais verticaux, matière aléatoire dans laquelle manigancent une friture possible, des algues et du plancton, dans laquelle il aime passer un bras, une jambe, la main, jouer de leurs contours flous, et parfois même, après inspection rapide des fonds, il rebascule tête la première et, main tendue, descend

récolter ce qui miroitait dans un reflet, un caillou, une coque nacrée, le pendentif qu'une baigneuse aura perdu dans le pli d'une trop forte houle. À cet instant, il ouvre les yeux sous l'eau, comme chaque fois, mais rien ne se passe. Répète plusieurs fois ce mouvement de paupières sans parvenir à sortir du noir. Une opacité telle qu'il est saisi par la trouille : il ne perçoit ni les fonds ni la surface, ne distingue pas son corps, ne s'oriente plus. Tout est fondu dans le même caviar indistinct. Pris de panique, il bat des pieds à toute vitesse pour remonter à l'air libre, là où, pense-t-il, il retrouvera les notions les plus élémentaires : la Plate, le ciel, la terre, la mer et son corps au beau milieu de tout.

Un paquet plastifié flotte, Mario le reçoit dans le visage, l'écarte d'un revers du bras, continue à nager, mais ses mouvements ramènent continuellement le colis sur sa trajectoire. Il jette un œil sur la côte qui brille ce soir Riviera grand genre et oriente le paquet sous les lumières, pour voir. C'est un colis de la taille d'une boîte à chaussures, langé dans du gros Scotch, parfaitement hermétique, les coins sont arrondis, aucune inscription.

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Chronologie des intrigues dans Corniche Kennedy

Opéra observe les

jeunes depuis son bureau.

Le quotidien d'Opéra

Le maire exige d'Opéra

qui'il fasse cesser les plongeons.

Analepse : l'enquête d'Opéra, rencontre

avec Tania.

Opéra observe

Suzanne et Mario

s'embrasser.

Analepse. Suite de

l'enquête : Opéra

retrouve Tania. Ils

s'embrassent, Tania

disparaît.

Opéra observe la dispute.

Opéra tente un pacte

avec Eddy. Opéra

raccompagne Mario, il

passe un pacte avec

lui.

.

Opéra présent sur la

Plate car il prépare

l'interception d'une

livraison de drogue.

Arrestation d’une partie de la bande.

Interrogatoire de deux russes

arrêtées à bord du voilier

suspect. Opéra

s'emporte et s'enivre seul

dans son bureau.

Opéra retouve

Mario. Sous la menace,

Mario révèle le lieu que

Suzanne et Eddy sont

partis vers les calanques.

Opéra rejoint les fugitifs

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Rocher de La Plate, après le quartier de Malmousque.Chambre de Suzanne CommissariatDurée indéterminée, début de l'été (juin)

Commissariat date indéterminée, une journée.

La Plate. Juin, date et durée indéterminées

La Plate. Après-midi, quelques minutes.

La Plate Just Do It, quelques minutes, fin d’après-midi.

CommissariatQuelques minutes.

Mer, La Plate, Corniche. Après-midi et soirée.

Boîte de nuit dans l’arrière-pays marseillais (loin de la mer)Commissariat

La Plate Le Face to Face La mer. Une semaine après le 1er saut. Après-midi et soir.

La Corniche, soir.

La Corniche L’arrière-pays marseillais (La Garde-Freinet, massif des Maures, autoroute A8…, 24 heures.

La Plate, 20 juillet, 15h00.

Corniche CommissariatQuartiers Nord de Marseille. Après-midi, août.

La ville, les lieux d'où il est possible de plonger, la plage près de la Plate

La Plate,les plongeoir, 21 août, nuit).

MerPlate-forme Cabane. 22 août.

Commissariat22 août.

Plage, près des plongeoirs, 22 août.

Près de la plage,voiture d’Opéra,Hôpital 22 août.

Les calanques 22 août.

Juin, arrivée des jeunes.

Suzanne observatrice

depuis sa chambre.

La bande de la Plate.

Description des

plongeoirs

Arrivée de Suzanne, vol du portable,

sentence d'Eddy

1er saut de Suzanne

(Just Do It). Suite

immédiate du chap.

précédent.

Suite du 1er saut.

Suzanne veut recommencer

, colère d'Eddy.

Retour de Suzanne,

négociation avec Mario, Refus, puis

accord d'Eddy. Le trio saute depuis le

Face To Face

Suite du plongeon. Suzanne embrasse

Mario.

Dispute entre Suzanne et sa mère, sur

la Plate, devant la bande.

Arrestation des

plongeurs, conduits au

commissariat jusqu'à la venue des parents.

Confrontation d’Eddy avec

son père.

Élargissement du cadre :

rude « compétition »entre les

plongeurs et la police, à

l'échelle de la ville.

Les plongeons de nuit. Malaise

et crise cardiaque du

maire.

Eddy, Suzanne et Mario ont réussi à

échapper à la police. Mario,

blessé a trouvé un paquet

contenant de la drogue. Ils

passent la nuit dans une

cabane de plage.

Projet de fugue vers l'Italie et en scooter du

trio. Suzanne et Eddy sont

contraints d'abandonner Mario blessé

et affaibli.

Face à la mer, du haut d'une falaise,

Eddy et Suzanne vident la drogue.

�1

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Texte complémentaire

OVIDE, MÉTAMORPHOSES, LIVRE VIII, « Dédale et Icare » (extrait)

Lorsqu'il eut mis la dernière main à l'oeuvre entreprise, l'artisan équilibra lui-même son corps entre ses deux ailes et resta suspendu dans l'air qu'il mettait en mouvement. Il équipa aussi son fils et dit : « Icare, je te conseille de voler sur une ligne médiane, car, si tu vas trop bas, l'eau risquerait d'alourdir tes plumes, et trop haut, le feu du soleil pourrait les brûler. Vole entre les deux. Ne regarde ni le Bouvier, ni Hélicé ni l'épée brandie d'Orion, c'est mon ordre ; suis ta route, en me prenant pour guide ! » En même temps, il lui transmet les règles du vol et adapte à ses épaules des ailes qu'il ne connaît pas. Pendant que l'homme mûr s'affairait et donnait ses conseils, ses joues se mouillèrent et ses mains de père se mirent à trembler. Il donna à son fils des baisers qu'il ne répéterait plus et, soulevé par ses ailes, il s'envole le premier, soucieux de son compagnon, comme l'oiseau qui pousse du nid dans l'espace sa tendre progéniture ; Dédale l'exhorte à le suivre, l'initie à son art maudit, agite ses propres ailes et se retourne, regardant celles de son fils. Un pêcheur prenant des poissons à l'aide d'un roseau tremblant, un berger appuyé sur son bâton, un laboureur penché sur sa charrue, les virent, restèrent interdits et prirent pour des dieux ces êtres capables de voyager dans l'éther.

Déjà, sur leur gauche, se trouvait l'île de Junon, Samos – ils avaient dépassé Délos et Paros – ; sur leur droite se trouvaient Lébinthos et Calymné, riche en miel. C'est alors que l'enfant se sentit grisé par son vol audacieux, et cessa de suivre son guide ; dans son désir d'atteindre le ciel, il dirigea plus haut sa course. La proximité du soleil bientôt

ramollit la cire parfumée qui servait à lier les plumes. La cire avait fondu ; Icare secoua ses bras dépouillés et, privé de ses ailes pour ramer, il n'eut plus prise sur l'air, puis sa bouche qui criait le nom de son père fut engloutie dans la mer azurée, qui tira de lui son nom. De son côté, son malheureux père, qui n'est plus père désormais, déclara : « Icare, où es-tu ? Dans quel endroit dois-je te chercher ? » « Icare, » disait-il ; il aperçut sur l'eau des plumes, maudit son art et honora d'un tombeau le cadavre de son fils, et cette terre fut désignée par le nom du défunt inhumé.

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Séquence 3 : Regarde les Lumières mon Amour, Annie Ernaux

Objet d’étude : La question de l'Homme dans les genres de l'argumentation du XVIème à nos jours

Problématique(s) : quels regards les artistes, et en particulier la littérature, peuvent-ils porter sur la société de consommation ?

Pour l’exposé Pour l’entretien

Lectures analytiques

Quatre extraits ou regroupements d’extraits en lien avec des thématiques ont été sélectionnés et étudiés. Les pages renvoient à l’édition Folio (F) et Flammarion, étonnants classiques (EC).

- Extraits 1 : début (préface), pages 11-14 (F) et 25-27(EC), du début jusqu’à « l’inaccessible et fin « Mardi 22 octobre », pages 88-89 (F) et 94-95 (EC)

- Extrait 2 : « Lundi 4 février », à partir de « Il faut que je sois descendue au niveau I » à la fin. Pages 58-59 (F) et 65-66 (EC), avec une extension proposée, page 77 (folio) et 83-84 (EC) de « À la fin de mes courses » jusqu’à la fin du passage.

- Extrait 3 : « mercredi 13 février », pages 62-64 (F) et 69-71 (EC)

- Extrait 4 : « Jeudi 7 février », pages 59-61 (F) et 66-69 (EC)

Questions d’ensemble

- Quelles écritures dans ce livre, fruit d’une commande faite à l’autrice par l’historien Pierre Rosenvallon : autobiographie, journal, étude sociologique, œuvre engagée ?

- Le regard de l’autrice-consommatrice : entre empathie et critique sociale.

- L’écriture d’Annie Ernaux : entre sécheresse et recherche de style.

Textes complémentaires

Regards d’auteurs sur la société marchande :

- Voltaire, Candide, chapitre 19 (arrivée de Candide à Surinam)

- Georges Perec, Les Choses - Jacques Prévert, « La grasse matinée », in

Paroles

Histoire des arts

Regards d’artistes et de plasticiens sur la société de consommation à lier avec des thématiques abordées dans l’ouvrage d’Annie Ernaux :

- Andy Warhol, Campbell’s soup - Andreas Gursky, 99 cents - Duane Hanson, Supermarket Lady, 1969 - Liu Jianhua, Yiwu Survey

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Duane Hanson, Supermarket Lady, 1969

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Andy Warhol, Campbell’s soup,1962

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Andreas Gursky, 99 cents

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Liu Jianhua, Yiwu Survey, 2006

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Texte complémentaireJacques Prévert, « La grasse matinée », publié dans le recueil Paroles (1946)

Il est terrible le petit bruit de l'oeuf dur cassé sur un comptoir d'étain il est terrible ce bruit quand il remue dans la mémoire de l'homme qui a faim elle est terrible aussi la tête de l'homme la tête de l'homme qui a faim quand il se regarde à six heures du matin dans la glace du grand magasin une tête couleur de poussière ce n'est pas sa tête pourtant qu'il regarde dans la vitrine de chez Potin il s'en fout de sa tête l'homme il n'y pense pas il songe il imagine une autre tête une tête de veau par exemple avec une sauce de vinaigre ou une tête de n'importe quoi qui se mange et il remue doucement la mâchoire doucement et il grince des dents doucement car le monde se paye sa tête et il ne peut rien contre ce monde et il compte sur ses doigts un deux trois un deux trois cela fait trois jours qu'il n'a pas mangé et il a beau se répéter depuis trois jours Ça ne peut pas durer ça dure trois jours trois nuits sans manger

et derrière ces vitres ces pâtés ces bouteilles ces conserves poissons morts protégés par les boîtes boîtes protégées par les vitres vitres protégées par les flics flics protégés par la crainte que de barricades pour six malheureuses sardines... Un peu plus loin le bistro café-crème et croissants chauds l'homme titube et dans l'intérieur de sa tête un brouillard de mots un brouillard de mots sardines à manger oeuf dur café-crème café arrosé rhum café-crème café-crème café-crime arrosé sang !... Un homme très estimé dans son quartier a été égorgé en plein jour l'assassin le vagabond lui a volé deux francs soit un café arrosé zéro franc soixante-dix deux tartines beurrées et vingt-cinq centimes pour le pourboire du garçon. Il est terrible le petit bruit de l'oeuf dur cassé sur un comptoir d'étain il est terrible ce bruit quand il remue dans la mémoire de l'homme qui a faim.

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Texte complémentaireGeorges Perec, Les Choses, une histoires des années soixante (1965)

Dans Les Choses, Perec décrit la vie quotidienne d'un jeune couple de la classe moyenne. Il développe dans ce récit l'idée que ces jeunes gens se font du bonheur et surtout les raisons pour lesquelles ce bonheur leur reste inaccessible. Celui-ci, lié aux choses que l'on achète, conduit les personnages à devenir asservis à ces objets. Le roman est une réflexion sociologique sur la société de consommation.

Ils se promenaient souvent le soir, humaient le vent, léchaient les vitrines. Ils laissaient derrière eux le Treizième tout proche, dont ils ne connaissaient guère que l’avenue des Gobelins, à cause de ses quatre cinémas, évitaient la sinistre rue Cuvier, qui ne les eût conduits qu’aux abords plus sinistres encore de la gare d’Austerlitz, et empruntaient, presque invariablement, la rue Monge, puis la rue des Ecoles, gagnaient Saint-Michel, Saint-Germain, et, de là, selon les jours ou les saisons, le Palais-Royal, l’Opéra, ou la gare Montparnasse, Vavin, la rue d’Assas, Saint-Sulpice, le Luxembourg. Ils marchaient lentement. Ils s’arrêtaient devant chaque antiquaire, collaient leurs yeux aux devantures obscures, distinguaient, à travers les grilles, les reflets rougeâtres d’un canapé cuir, le décor de feuillage d’une assiette ou d’un plat en faïence, la luisance d’un verre taillé ou d’un bougeoir de cuivre, la finesse galbée d’une chaise cannée. De station en station, antiquaires, libraires, marchands de disques, cartes des restaurants, agences de voyages, chemisiers, tailleurs, fromagers, chausseurs, confiseurs, charcuteries de luxe, papetiers, leurs itinéraires composaient leur véritable univers : là reposaient leurs ambitions, leurs espoirs. Là était la vraie vie, la vie qu’ils voulaient connaître, qu’ils voulaient mener : c’était pour ces

saumons, pour ces tapis, pour ces cristaux, que, vingt-cinq ans plus tôt, une employée et une coiffeuse les avaient mis au monde. Lorsque, le lendemain, la vie, de nouveau, les broyait, lorsque se remettait en marche la grande machine publicitaire dont ils étaient les pions minuscules, il leur semblait qu’ils n’avaient pas tout à fait oublié les merveilles estompées, les secrets dévoilés de leur fervente quête nocturne.

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Texte complémentaireVoltaire, Candide, chapitre XIX (1759)

Candide est un conte philosophique qui raconte le voyage initiatique du jeune Candide à travers le monde. Dans l’extrait, le jeune héros accompagné de Pangloss, son maître de philosophie et de Cacambo, jeune métis rencontré au cours de son périple, arrive près de la ville de Surinam, colonie hollandais d’Amérique du Sud.

En approchant de la ville, ils rencontrèrent un nègre étendu par terre, n'ayant plus que la moitié de son habit, c'est-à-dire d'un caleçon de toile bleue ; il manquait à ce pauvre homme la jambe gauche et la main droite. "Eh, mon Dieu ! lui dit Candide en hollandais, que fais-tu là, mon ami, dans l'état horrible où je te vois ? - J'attends mon maître, monsieur Vanderdendur, le fameux négociant, répondit le nègre. - Est-ce M. Vanderdendur, dit Candide, qui t'a traité ainsi ? - Oui, monsieur, dit le nègre, c'est l'usage. On nous donne un caleçon de toile pour tout vêtement deux fois l'année. Quand nous travaillons aux sucreries, et que la meule nous attrape le doigt, on nous coupe la main ; quand nous voulons nous enfuir, on nous coupe la jambe : je me suis trouvé dans les deux cas. C'est à ce prix que vous mangez du sucre en Europe. Cependant, lorsque ma mère me vendit dix écus patagons sur la côte de Guinée, elle me disait : "Mon cher enfant, bénis nos fétiches, adore-les toujours, ils te feront vivre heureux ; tu as l'honneur d'être esclave de nos seigneurs les blancs, et tu fais par là la fortune de ton père et de ta mère." Hélas ! je ne sais pas si j'ai fait leur fortune, mais ils n'ont pas fait la mienne. Les chiens, les singes, les perroquets sont mille fois moins malheureux que nous. Les fétiches hollandais qui m'ont converti me disent tous les dimanches que nous sommes tous enfants d'Adam, blancs et noirs. Je ne suis pas généalogiste ; mais si ces prêcheurs disent vrai, nous sommes tous cousins issus de germains. Or vous m'avouerez qu'on ne peut pas en user avec ses parents d'une manière plus horrible.

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Séquence 4 : Le Parti-pris des Choses, Francis Ponge

Objet d’étude : Écriture poétique et quête de sens du Moyen-âge à nos jours

Problématique(s) : - Qui prend parti ? le poète pour les choses ou les objets pour la poésie ? - Qu'est-ce qu'un recueil, notamment lorsque celui-ci, à l'instar du Parti-pris des Choses n'a pas été

élaboré par son auteur, mais par son éditeur ?

Pour l’exposé Pour l’entretien

Lectures analytiques

- « Pluie » - « Le cageot » - « Le pain » - « Les plaisirs de la porte »

Questions d’ensemble - Quel sens donner à la préposition « des » dans le

titre - Qu’est-ce qu’un poème ? comment caractériser

l’écriture poétique dans ce recueil . - Quelle est la cohérence de ce recueil?

Textes complémentaires

Pour la cohérence du recueil : À partir de d'un travail sur la table du recueil, la réflexion a porté sur l'élaboration de l'œuvre par l'éditeur Jean Paulhan. Quelles intentions l'ont guidé? Quels sens F. Ponge a-t-il cherché à donner à sa poésie ?

Pour la question portant sur l’écriture poétique de Ponge :

- Rémy Belleau, Petites inventions (1556), « L’huître » (vers 29-56)

- Albert Mérat, "L'huître", Les Chimères (1866)

Histoire des arts Trois œuvres de Marcel Duchamp : - Roue de bicyclette (1913) - Porte-bouteilles (1914) - Fontaine (1917)

Une réflexion a porté sur les liens que le lecteur tisser entre la démarche poétique de Francis Ponge et le ready-made de Duchamp

Lectures cursives approfondies en classe "Escargots", un des poèmes longs extrait du Parti-pris des Choses

Travail d’écriture personnel : rédaction d’une lettre de Jean Paulhan à Francis Ponge

(Travail pas encore réalisé au moment du bac blanc)

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Textes complémentaires

�Rémy Belleau, « L’huître» (extrait), in Petites inventions (1556)

Voyez comme elle est béante, Afin de sucer les pleurs De l’Aurore larmoyante Les rousoyantes douceurs, Que de sa couche pourprée Elle bigarre l’entrée Du matin de ses couleurs. Puis sitôt qu’elle est comblée Jusques aux bords pleinement, De cette liqueur, coulée Du céleste arrosement,

Soudain elle devient grosse Dedans sa jumelle fosse D’un perleux enfantement, Car suçotant elle attire Peu à peu le teint pareil, Dont la nue se remire Par les rayons du soleil : Si pure, elle est blanchissante ; S’elle est pâle, pâlissante ; Si rouge, ell’prend le vermeil.

�Albert Mérat, « L’huître », publié dans le recueil Les Chimères (1866)

Je ne vois pas tes yeux, mais je vois ton sourire : Tout ton être respire un grand air de bonté. À te sentir si fraîche en ta calme beauté, Chavette ému tressaille, et Monselet soupire.

Ta rondeur savoureuse aux poètes inspire Des rêves d'embonpoint et de satiété... L'abbé hâte pour toi son benedicite. On peut te manger crue, ou bien te faire frire ;

La plupart des gourmets te gobent, simplement ; Pour d'autres, il vaut mieux te mâcher doucement, Beaucoup à t'épicer ressentent de la joie.

Tout embaumée encore d'algue et de goémons, Paris te sollicite, et Cancale t'envoie, Ô toi qui fais aimer, ô toi que nous aimons !

�Francis Ponge, Le Parti-pris des Choses, « L’huître » (1942)

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LA n° 1 : «Pluie »

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Documents complémentairesMarcel Duchamp et le ready-made

Roue de bicyclette (1913)

« Quand j’ai mis une roue de bicyclette sur un tabouret la fourche en bas, il n’y avait aucune idée de readymade ni même de quelque chose d’autre… » (Marcel Duchamp)

Sa première version fut conçue, en 1913, dans son atelier de Neuilly, qu’il abandonna en quittant la France pour les États-Unis, en août 1915. Ce n’est qu’en 1916, à New York, que la notion de readymade (d’objet tout fait, déjà-là) s’impose à Marcel Duchamp. Dans son atelier américain, il assemble une seconde roue de bicyclette et un tabouret. L’objet « promu au rang d’œuvre d’art » – selon la définition qu’André Breton donnera du readymade – devient, dès lors, une véritable machine à produire du discours sur l’art. Comme readymade, elle pose la question de la nature de l’art que détermine son contexte (le musée), celle du rôle qui revient à l’artiste (artisan ou bien « pur esprit »).

Source : www.centrepompidou.fr

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Documents complémentaires

Source : www.centrepompidou.fr

Portes-bouteilles (1914)

En 1914, Marcel Duchamp acquiert, au rayon quincaillerie du Bazar de l’Hôtel-de-Ville, un porte-bouteilles. Plus tard, il justifie cet achat : « Ce choix était fondé sur une réaction d’indifférence visuelle, assortie au même moment à une absence totale de bon ou mauvais goût… en fait une anesthésie complète ». La lettre que Duchamp adresse à sa sœur Suzanne pour lui annoncer son invention du readymade donne de l’objet une description qui en fait le véritable premier des readymades : « […] Si tu es montée chez moi, tu as vu dans l’atelier une roue de bicyclette et un porte-bouteilles. […] J’ai une intention à propos de ce porte-bouteilles. Écoute […] prends pour toi ce porte-bouteilles, j’en fais un readymade à distance. Tu inscriras en bas et à l’intérieur du cercle du bas, en petites lettres peintes avec un pinceau à l’huile en couleur blanc d’argent, l’inscription que je vais te donner ci-après et tu signeras de la même écriture comme suit Marcel Duchamp » En 1921, lors d’un séjour à Paris, Duchamp refait le Porte-Bouteilles pour l’offrir à sa sœur. Il sera présenté, en 1936, dans l’exposition d’objets surréalistes de la galerie Charles Ratton. Dès sa naissance, le readymade comme d’ailleurs la plupart des œuvres de Marcel Duchamp, est doté d’une double dimension : plastique (visuelle) et scripturaire (intellectuelle).

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Fontaine (1917)

L'original (perdu) a été réalisé à New York en 1917.Cette réplique, exécutée d'après la photographie de l'original prise en 1917 par Alfred Stieglitz, et réalisée sous la direction de Marcel Duchamp en 1964 par la Galerie Schwarz de Milan, en constitue la 3e version.

En 1917 à New York, Marcel Duchamp présente un urinoir au comité d’accrochage du Salon des artistes indépendants dont il fait partie, afin d’en éprouver le principe fondateur : ne refuser aucune œuvre. Présenté à plat, signé sous le pseudonyme de R. Mutt et titré Fountain, l’objet postule au statut d’œuvre d’art. La proposition divise le comité, qui décide de ne pas l’exposer. Photographiée par Albert Stieglitz avant de disparaître, Fountain passe à la postérité, officialisant l’invention du readymade, innovation radicale qui instaure un art de l’idée. L’œuvre conservée dans les collections du Musée est une réédition de l’original perdu, produite en 1964 sous la supervision de Duchamp.

Source : www.centrepompidou.fr

« C’est le regardeur qui fait l’œuvre. » (Marcel Duchamp)