des routes du tour aux tranchées de la guerre 14-18

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3 _ Lorsque les militaires deviennent cyclistes : les ‘Diables noirs’ belges La bicyclette comme substitu- tion du cheval. Telle était l’idée qui fit peu à peu son chemin parmi les états-majors euro- péens à la fin du 19e siècle, du moins lorsqu’il s’agissait de réaliser des missions de liai- son rapides. Les Italiens furent les pionniers avec leurs ciclisti, mais les grandes puissances ne tardèrent pas à suivre leur exemple. L’officier français H. Gérard alla même encore plus loin : il voulait développer des unités d’infanterie ‘cycliste’, ca- pables de se déplacer rapide- ment et de frapper par surprise. Une bicyclette traditionnelle faisait parfaitement l’affaire sur les routes, mais dans le paysage ou à proximité d’ennemi, il fal- lait un vélo que l’on pouvait fa- cilement porter. C’est la raison pour laquelle Gérard créa une bicyclette pliante qui fut utilisée comme modèle standard par plusieurs armées dès 1910. En Belgique, les fantassins furent également transformés en cyclistes dès 1890. C’était à l’École du Régiment des Ca- rabiniers à Wavre que les pre- miers recyclages eurent lieu. Une formation à prendre au pied de la lettre, car certains carabiniers durent encore ap- prendre à faire du vélo. On leur accorda une semaine pour y parvenir. Ensuite, des sorties de 30 à 75 km, par tous les temps et sur toutes sortes de routes. La vitesse fut également accélérée jusqu’à une moyenne de 15 km à l’heure. Enfin, ils apprirent des manœuvres dans des situations de combat. Lorsque la guerre éclata, l’ar- mée belge avait un bataillon de Carabiniers Cyclistes, que l’on pouvait qualifier d’unité d’élite. Missions de reconnaissance, infiltrations rapides, tirer et disparaître aussi soudainement qu’ils étaient venus. L’un des effets secondaires de leurs at- taques-éclairs fut que l’armée allemande pouvait invoquer le mythe des Francs-Tireurs, des civils armés qui lançaient des attaques en guérilla contre l’ar- mée régulière, avec toutes les conséquences qui s’en suivirent pour la population civile belge. Chez les Allemands pourtant, les cyclistes belges furent très vite connus sous le nom de ‘die Schwarze Teufel’, d’après leur tenue sombre. Les Carabiniers Cyclistes belges se distinguèrent à plusieurs reprises, notamment lors des combats d’Halen du 12 août 1914, la Bataille dite des Casques d’Argent. Plus tard, ils furent également mobilisés lors de la Bataille de l’Yser, la guerre des tranchées et l’offensive fi- nale. ‹‹‹ Bicyclette pliante (modèle Gérard, 1910). WieMu, Roeselare Lorsque les cyclistes deviennent militaires... La première édition du Tour de France eut lieu en 1903. Les dix premières éditions furent incontestablement dominées par les Français, mais dès 1912, les Belges se firent également remarquer, avec Odiel De- fraeye (1912) et Philippe ys (1913,1914). La Belgique, grand pays du cyclisme amateur, rêvait déjà d’une nouvelle hégémo- nie, mais la guerre en décida autrement : pendant les quatre années de guerre, le Tour ne fut pas organisé car de nombreux cyclistes se trouvaient dans les tranchées. La guerre exigea ‘leurs meilleures années’ de beaucoup de cyclistes. Defraye dut servir auprès du corps de transport de la 6e Division mili- taire, alors que ys rejoignit le Corps d’Aviation belge. Avant la guerre, Defraeye et ys avaient déjà revendiqué leur place dans les annales de l’histoire du cyclisme. De jeunes talents – Jules Vanhevel et Hen- ri Van Lerberghe, pour n’en nommer que deux – venaient toutefois pointer le nez dans le sport de plus en plus populaire du cyclisme, mais leur progres- sion fut arrêtée par la guerre. Vanhevel, originaire d’Ichte- gem, (‘la longue asperge’, selon Henri Van Lerberghe), roula sa première course en 1911. Bien que tous les grands coureurs du moment y participaient, l’inconnu Vanhevel les prit tous de vitesse, à la grande surprise générale. Après l’invasion alle- mande, Vanhevel s’enfuit vers la France. Les Belges qui se trou- vaient en territoire allié, furent appelés au service obligatoire lorsqu’ils avaient atteint «l’âge de combat». En juillet 1916, Jules Vanhevel se retrouva dans le 1er régiment d’Artillerie. Suite à une réorganisation, il déménagea vers le 7e régiment d’Artillerie. Il eut sa première expérience au front à Pervijze. Vanhevel était cycliste au sein de son unité : il devait passer les messages entre l’état-major et l’unité. Durant la guerre, il obtint trois permissions pour pouvoir participer à des courses cyclistes (loin) derrière le front : deux fois à Stamford-Bridge et une fois à Gravelines. Des occa- sions rêvées pour tester l’esprit compétitif d’avant-guerre. Henri ‘Ritten’ Van Lerberghe (‘le chauffard de Lichtervelde’) se fit déjà remarquer dans le cyclisme à l’âge de seize ans lors d’une course de kermesse à Gits. La victoire lui valut 15 francs et il y avait pris goût. Il enchaîna les victoires entre 1905 et 1907 et avec l’argent gagné, il s’offrit un nouveau vélo de course, un vrai ALCYON de trois cents balles. En 1913, il participa pour la première fois au Tour de France. Il dut abandonner lors de la septième étape, mais le principal était sans doute qu’il avait pu explorer le chemin vers la France. Car ce fut également le chemin de la fuite lors de la progression allemande en 1914. Son parcours ressembla fort à celui de Vanhevel: en avril, il rejoignit la Troisième Division militaire où il devint également courrier-cycliste. Il put parti- ciper à une course de temps à autre. Le goût des permissions ne fut jamais aussi doux qu’à ces occasions-là. Après la guerre, les courses cy- clistes régulières furent relan- cées. Étaient-ils endurcis par les combats ou était-ce génétique ? Quoi qu’il en soit, ‘Ritten’ Van Lerberghe et Jules Van- hevel donnèrent une nouvelle Jules Vanhevel WieMu, Roeselare ‹‹‹ WieMu, Roeselare interprétation mythique à la notion de ‘Flandrien’ pendant les années d’après-guerre. Van Lerberghe remporta le premier Tour des Flandres depuis 1914 après une course légendaire. Il se révéla également un pistard doué. Van Hevel gagna ‘la plus belle course de Flandre’ en 1920, la même année que son titre de Champion de Belgique. Ils par- ticipèrent également tous les deux au Circuit des Champs de Bataille en 1919. Philippe ys prouva qu’il n’avait rien perdu de son talent lors du Tour de 1920. Il rem- porta non seulement quatre étapes, mais également le clas- sement général avec 57 minutes d’avance. Ce fut sa façon de ré- pondre à ses détracteurs. Tout le monde n’avait pas la chance de pouvoir de nouveau affronter les pavés et les cols sur la route de la gloire. Ainsi, les classements du Tour de France de 1907 – 1910 étaient désormais dotés d’un bandeau noir en guise de deuil puisque les gagnants de ces édi- tions étaient morts au combat. Haut : Philippe ys dans son uniforme militaire et sa tenue de cycliste Rangée en bas à gauche : Henri Van Lerberghe, en bas au milieu : Jules Vanhevel WieMu, Roeselare Lucien Georges Mazan (‘dit’ Petit-Breton, classement final 1907 et 1908) mourut le 20 décembre 1917 à l’hôpital de Troyes des suites d’un tragique accident de voiture. Lors de l’une de ses missions en tant que planton du 20e Escadron du Train (section Automobile), sa voiture entra en collision frontale avec un véhicule venant en sens inverse. Le Luxembourgeois François Faber (‘le Géant de Colombes’, classement final 1909) fut en- rôlé dans la Légion étrangère. Lorsque le front s’était immobilisé, il apprit très vite que la vie dans les tranchées était bien plus pénible qu’une course éprouvante sur les pavés ou les cols. Son unité prit part à l’offensive du printemps dans l’Artois, lorsqu’on avait bon espoir de mettre fin à l’impasse de la guerre. Mais l’offensive fut un sanglant échec et Faber devint le premier gagnant du Tour de France à tomber sur le champ de bataille. Le 9 mai 1915, il ‘disparut’ lors des combats près du Bois de Berthonval, Carency. Son unité subirait près de 2000 pertes sur un total de 2900 hommes. Son corps ne fut jamais retrouvé mais on célèbre sa mémoire encore aujourd’hui dans l’église de Notre- Dame-de-Lorette. Au début de la guerre, Louis Octave Lapize (‘le frisé’, classement final 1910) s’était pré- senté comme engagé volontaire et fut enrôlé dans l’infanterie française. En 1915, il passa à l’armée de l’air. Lors d’un vol de reconnaissance au-dessus du front près de Flirey, il dut affronter plusieurs avions allemands. Son avion fut touché et s’écrasa derrière les lignes françaises. Mortellement bles- sé, Lapize fut évacué vers l’hôpital de Toul où il décéda le 14 juillet 1917, le jour de la Fête nationale française. Et que penser de Marcel Kerff ? En tant que fils de boucher dans les Fourons, son amour du cyclisme lui était venu par son métier : avec ses frères, il fit des allers-retours réguliers entre Liège et Paris, pour des ventes à la criée ou des livraisons de viande. Convaincu des possibilités du cy- clisme, Marcel se mit à rouler des courses. En 1903, il s’inscrivit pour une nouvelle grande course organisée pour la première fois et baptisée le Tour de France. Six étapes, pour un total de 2.428 km. Kerff n’était pas mauvais, loin de là, car il termina sixième. Ce fut son premier et son dernier Tour de France, car il s’arrêta à l’âge de quarante ans en 1904. Lors de l’invasion allemande, Fou- ron-Saint-Martin fut l’un des premiers villages à subir la violence guerrière. Marcel Kerff n’avait pas beaucoup de chance. Lorsqu’il alla jeter un coup d’œil près d’un campement allemand, ils le prirent pour un espion. Il fut arrêté et exécuté le 7 août 1914. Au carrefour Mouland – Fouron-le- Comte, un monument commémore ce triste événement. Ce site se trouve quasiment sur le croise- ment entre deux courses classiques : l’Amstel-Goldrace et Liège-Bastogne-Liège. Mazan Faber Kerff Jules Vanhevel WieMu, Roeselare

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Des routes du Tour aux tranchées de la guerre 14-18

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Page 1: Des routes du Tour aux tranchées de la guerre 14-18

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Lorsque les militaires deviennent cyclistes : les ‘Diables noirs’ belgesLa bicyclette comme substitu-tion du cheval. Telle était l’idée qui fit peu à peu son chemin parmi les états-majors euro-péens à la fin du 19e siècle, du moins lorsqu’il s’agissait de réaliser des missions de liai-son rapides. Les Italiens furent les pionniers avec leurs ciclisti, mais les grandes puissances ne tardèrent pas à suivre leur exemple. L’officier français H. Gérard alla même encore plus loin : il voulait développer des unités d’infanterie ‘cycliste’, ca-pables de se déplacer rapide-ment et de frapper par surprise. Une bicyclette traditionnelle faisait parfaitement l’affaire sur les routes, mais dans le paysage ou à proximité d’ennemi, il fal-lait un vélo que l’on pouvait fa-cilement porter. C’est la raison pour laquelle Gérard créa une bicyclette pliante qui fut utilisée comme modèle standard par plusieurs armées dès 1910.

En Belgique, les fantassins furent également transformés en cyclistes dès 1890. C’était à l’École du Régiment des Ca-rabiniers à Wavre que les pre-miers recyclages eurent lieu. Une formation à prendre au pied de la lettre, car certains carabiniers durent encore ap-

prendre à faire du vélo. On leur accorda une semaine pour y parvenir. Ensuite, des sorties de 30 à 75 km, par tous les temps et sur toutes sortes de routes. La vitesse fut également accélérée jusqu’à une moyenne de 15 km à l’heure. Enfin, ils apprirent des manœuvres dans des situations de combat.

Lorsque la guerre éclata, l’ar-mée belge avait un bataillon de Carabiniers Cyclistes, que l’on pouvait qualifier d’unité d’élite. Missions de reconnaissance, infiltrations rapides, tirer et disparaître aussi soudainement qu’ils étaient venus. L’un des effets secondaires de leurs at-taques-éclairs fut que l’armée allemande pouvait invoquer le mythe des Francs-Tireurs, des civils armés qui lançaient des attaques en guérilla contre l’ar-mée régulière, avec toutes les conséquences qui s’en suivirent pour la population civile belge. Chez les Allemands pourtant, les cyclistes belges furent très vite connus sous le nom de ‘die Schwarze Teufel’, d’après leur tenue sombre. Les Carabiniers Cyclistes belges se distinguèrent à plusieurs reprises, notamment lors des combats d’Halen du 12 août 1914, la Bataille dite des

Casques d’Argent. Plus tard, ils furent également mobilisés lors de la Bataille de l’Yser, la guerre des tranchées et l’offensive fi-nale.

‹‹‹Bicyclette pliante (modèle Gérard, 1910). WieMu, Roeselare

Lorsque les cyclistes deviennent militaires... La première édition du Tour de France eut lieu en 1903. Les dix premières éditions furent incontestablement dominées par les Français, mais dès 1912, les Belges se firent également remarquer, avec Odiel De-fraeye (1912) et Philippe Thys (1913,1914). La Belgique, grand pays du cyclisme amateur, rêvait déjà d’une nouvelle hégémo-nie, mais la guerre en décida autrement : pendant les quatre années de guerre, le Tour ne fut pas organisé car de nombreux cyclistes se trouvaient dans les tranchées. La guerre exigea ‘leurs meilleures années’ de beaucoup de cyclistes. Defraye dut servir auprès du corps de transport de la 6e Division mili-taire, alors que Thys rejoignit le Corps d’Aviation belge.

Avant la guerre, Defraeye et Thys avaient déjà revendiqué leur place dans les annales de l’histoire du cyclisme. De jeunes talents – Jules Vanhevel et Hen-ri Van Lerberghe, pour n’en nommer que deux – venaient toutefois pointer le nez dans le sport de plus en plus populaire du cyclisme, mais leur progres-sion fut arrêtée par la guerre.

Vanhevel, originaire d’Ichte-gem, (‘la longue asperge’, selon Henri Van Lerberghe), roula sa première course en 1911. Bien que tous les grands coureurs

du moment y participaient, l’inconnu Vanhevel les prit tous de vitesse, à la grande surprise générale. Après l’invasion alle-mande, Vanhevel s’enfuit vers la France. Les Belges qui se trou-vaient en territoire allié, furent appelés au service obligatoire lorsqu’ils avaient atteint «l’âge de combat». En juillet 1916, Jules Vanhevel se retrouva dans le 1er régiment d’Artillerie. Suite à une réorganisation, il déménagea vers le 7e régiment d’Artillerie. Il eut sa première expérience au front à Pervijze. Vanhevel était cycliste au sein de son unité : il devait passer les messages entre l’état-major et l’unité. Durant la guerre, il obtint trois permissions pour pouvoir participer à des courses cyclistes (loin) derrière le front : deux fois à Stamford-Bridge et une fois à Gravelines. Des occa-sions rêvées pour tester l’esprit compétitif d’avant-guerre.

Henri ‘Ritten’ Van Lerberghe (‘le chauffard de Lichtervelde’) se fit déjà remarquer dans le cyclisme à l’âge de seize ans lors d’une course de kermesse à Gits. La victoire lui valut 15 francs et il y avait pris goût. Il enchaîna les victoires entre 1905 et 1907 et avec l’argent gagné, il s’offrit un nouveau vélo de course, un vrai ALCYON de trois cents balles. En 1913, il participa pour la première fois au Tour

de France. Il dut abandonner lors de la septième étape, mais le principal était sans doute qu’il avait pu explorer le chemin vers la France. Car ce fut également le chemin de la fuite lors de la progression allemande en 1914. Son parcours ressembla fort à celui de Vanhevel: en avril, il rejoignit la Troisième Division militaire où il devint également courrier-cycliste. Il put parti-

ciper à une course de temps à autre. Le goût des permissions ne fut jamais aussi doux qu’à ces occasions-là.

Après la guerre, les courses cy-clistes régulières furent relan-cées. Étaient-ils endurcis par les combats ou était-ce génétique ? Quoi qu’il en soit, ‘Ritten’ Van Lerberghe et Jules Van-hevel donnèrent une nouvelle

Jules Vanhevel WieMu, Roeselare

‹‹‹WieMu, Roeselare

interprétation mythique à la notion de ‘Flandrien’ pendant les années d’après-guerre. Van Lerberghe remporta le premier Tour des Flandres depuis 1914 après une course légendaire. Il se révéla également un pistard doué. Van Hevel gagna ‘la plus belle course de Flandre’ en 1920, la même année que son titre de Champion de Belgique. Ils par-ticipèrent également tous les deux au Circuit des Champs de Bataille en 1919.

Philippe Thys prouva qu’il n’avait rien perdu de son talent lors du Tour de 1920. Il rem-porta non seulement quatre étapes, mais également le clas-sement général avec 57 minutes d’avance. Ce fut sa façon de ré-pondre à ses détracteurs. Tout le monde n’avait pas la chance de pouvoir de nouveau affronter les pavés et les cols sur la route de la gloire. Ainsi, les classements du Tour de France de 1907 – 1910 étaient désormais dotés d’un bandeau noir en guise de deuil puisque les gagnants de ces édi-tions étaient morts au combat.

Haut : Philippe Thys dans son uniforme militaire et sa tenue de cycliste

Rangée en bas à gauche : Henri Van Lerberghe, en bas au milieu : Jules Vanhevel

WieMu, Roeselare

Lucien Georges Mazan (‘dit’ Petit-Breton, classement final 1907 et 1908) mourut le 20 décembre 1917 à l’hôpital de Troyes des suites d’un tragique accident de voiture. Lors de l’une de ses missions en tant que planton du 20e Escadron du Train (section Automobile), sa voiture entra en collision frontale avec un véhicule venant en sens inverse.

Le Luxembourgeois François Faber (‘le Géant de Colombes’, classement final 1909) fut en-rôlé dans la Légion étrangère. Lorsque le front s’était immobilisé, il apprit très vite que la vie dans les tranchées était bien plus pénible qu’une course éprouvante sur les pavés ou les cols. Son unité prit part à l’offensive du printemps dans l’Artois, lorsqu’on avait bon espoir de mettre fin à l’impasse de la guerre. Mais l’offensive fut un sanglant échec et Faber devint le premier gagnant du Tour de France à tomber sur le champ de bataille. Le 9 mai 1915, il ‘disparut’ lors des combats près du Bois de Berthonval, Carency. Son unité subirait près de 2000 pertes sur un total de 2900 hommes. Son corps ne fut jamais retrouvé mais on célèbre sa mémoire encore aujourd’hui dans l’église de Notre-Dame-de-Lorette.

Au début de la guerre, Louis Octave Lapize (‘le frisé’, classement final 1910) s’était pré-senté comme engagé volontaire et fut enrôlé dans l’infanterie française. En 1915, il passa à l’armée de l’air. Lors d’un vol de reconnaissance au-dessus du front près de Flirey, il dut affronter plusieurs avions allemands. Son avion fut touché et s’écrasa derrière les lignes françaises. Mortellement bles-sé, Lapize fut évacué vers l’hôpital de Toul où il décéda le 14 juillet 1917, le jour de la Fête nationale française.

Et que penser de Marcel Kerff ? En tant que fils de boucher dans les Fourons, son amour du cyclisme lui était venu par son métier : avec ses frères, il fit des allers-retours réguliers entre Liège et Paris, pour des ventes à la criée ou des livraisons de viande. Convaincu des possibilités du cy-clisme, Marcel se mit à rouler des courses. En 1903, il s’inscrivit pour une nouvelle grande course organisée pour la première fois et baptisée le Tour de France. Six étapes, pour un total de 2.428 km. Kerff n’était pas mauvais, loin de là, car il termina sixième. Ce fut son premier et son dernier Tour de France, car il s’arrêta à l’âge de quarante ans en 1904. Lors de l’invasion allemande, Fou-ron-Saint-Martin fut l’un des premiers villages à subir la violence guerrière. Marcel Kerff n’avait pas beaucoup de chance. Lorsqu’il alla jeter un coup d’œil près d’un campement allemand, ils le prirent pour un espion. Il fut arrêté et exécuté le 7 août 1914. Au carrefour Mouland – Fouron-le-Comte, un monument commémore ce triste événement. Ce site se trouve quasiment sur le croise-ment entre deux courses classiques : l’Amstel-Goldrace et Liège-Bastogne-Liège.

Mazan

Faber

Kerff

Jules Vanhevel

WieMu, Roeselare