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Département des relations internationales et de la coopération
INSTITUT NATIONAL DE LA STATISTIQUE ET DES ETUDES ECONOMIQUES DEPARTEMENT DES RELATIONS INTERNATIONALES ET DE LA COOPERATION
Division Etudes et méthodes statistiques pour le développement
SOMMAIRE
n° 63 - Septembre 1990 ISSN : 0224-098-X
Pages
- Editorial 3
- Alain QUINET 5 Méthodologie pour l'élaboration d'un compte provisoire des administrations publiques dans les pays en développement
- Anne GOUEZEL-JOBERT et Gérard CHENAIS 19 L'aide française dans les systèmes statistiques internationaux
- Pierre MULLER 51 Deux commentaires sur l'article : "L'aide française dans les systèmes statistiques internationaux"
- Jacques CHARMES 57 Mesurer la pauvreté, identifier les groupes vulnérables : enquêtes et méthodes utilisées en Tunisie
- Jean-Paul MINVIELLE 85 Problématique des systèmes d'information pour les politiques alimentaires en Afrique occidentale
- Daniel MARTINET 93 Mise en oeuvre d'un système d'information sur le marché des céréales au Burkina Faso
- Edouard CADET et Annie CHANUT 109 Elaboration d'un indice des prix des produits de base exportés par les Etats d'Afrique et de l'Océan indien
STAIECO : Bulletin de liaison non officiel des statisticiens et économistes exerçant leur activité dans les pays du Tiers-Monde
Rédacteur en chef Michel BLANC
Secrétariat de La revue
Division des études et méthodes statistiques pour Le développement 18 boulevard Adolphe Pinard 75675 PARIS CEDEX 14
EDITORIAL
par Michel BLANC
Les deux premiers articles de ce numéro 63 de STATECO sont
relatifs à des méthodes de comptabilité nationale.
Dans le premier, A. QUINET montre l'intérêt d'élaborer un compte
provisoire des administrations publiques et en expose la méthodologie. Explicitant
les circuits d'informations habituellement mobilisés pour un compte définitif, il
précise la démarche permettant de réaliser des estimations avant l'obtention des
données définitives.
Le second traite de la prise en compte de l'aide étrangère dans la
comptabilité nationale, ou plus généralement dans les systèmes statistiques
internationaux (comprenant aussi balance des paiements et statistiques des
finances publiques). Il s'agit en effet d'un sujet très peu abordé jusqu'à présent,
tout au moins de manière suffisamment précise et détaillée, alors que les
conséquences des traitements retenus sur l'interprétation des agrégats macro-
économiques sont importantes. A. GOUEZEL-JOBERT et G. CHENAIS proposent
une manière de traiter cette question à partir du cas de Djibouti, et
particulièrement de l'aide bilatérale française fournie à ce pays.
Ces propositions sont suivies de commentaires formulés par
P. MULLER, spécialiste des concepts et méthodes de comptabilité nationale, qui
fait valoir un point de vue quelque peu différent concernant principalement le
traitement de l'aide alimentaire et celui de l'assistance technique. On notera que
P. MULLER a rédigé lui-même un document synthétique sur le traitement des
aides non remboursables en comptabilité nationale, qui fera l'objet d'un article
dans un prochain numéro de STATECO.
L'identification et la caractérisation de ménages ou d'individus
pauvres, ou susceptibles de le devenir dans un processus de transformation
économique, sont des problèmes posés aux statisticiens de manière de plus en plus
aiguë, alors que ceux-ci ne disposent pas de tous les outils souhaitables pour y
répondre. Parmi toutes les recherches et expériences menées en ce sens, celles
relatées par J. CHARMES sur les enquêtes et méthodes utilisées en Tunisie pour
- 4 -
mesurer la pauvreté et identifier les groupes vulnérables sont intéressantes à plus
d'un titre. Il s'agit d'abord d'un pays où de nombreuses mesures des niveaux de
vie et de la pauvreté ont été tentées, et par ailleurs l'auteur met en relation
des résultats d'enquêtes statistiques qu'on pourrait qualifier de "classiques" avec
ceux d'une enquête réalisée auprès de "familles nécessiteuses", dont une liste a
été établie par un ensemble de travailleurs sociaux du Ministère des Affaires
Sociales.
De nombreux travaux ont été réalisés au cours de ces dernières
années en vue d'améliorer les systèmes d'information pour les politiques
alimentaires. STATECO a déjà évoqué certains d'entre eux, notamment dans les
numéros 47 de septembre 1986 et 56 de décembre 1988. D'autres ont donné lieu à
des publications du groupe AMIRA (Amélioration des méthodes d'investigation et
de recherche appliquées au développement) ou sont évoqués dans divers colloques
ou séminaires qui se tiennent régulièrement dans les pays du Sahel notamment.
Nous avons choisi de présenter ici un extrait d'un texte de référence (à savoir
les brochures AMIRA n° 54 et n° 55, rédigées par J. EGG, D. MARTINET et
J.P. MINVIELLE) sur la "connaissance du marché céréalier au Sahel". Il s'agit de
la partie du texte de D. MARTINET traçant les grandes lignes du système
d'information sur le marché des céréales au Burkina Faso. Cet article est précédé
d'un bref texte de J.P. MINVIELLE sur la "problématique des systèmes
d'information pour les politiques alimentaires en Afrique occidentale", qui montre
le besoin d'''organiser" l'information, "information" entendue comme ensemble de
données complémentaires devant répondre à des critères de fiabilité et de
cohérence.
Enfin E. CADET et A. CHANUT exposent la méthode d'élaboration
d'un indice des prix des produits de base exportés par des pays d'Afrique et de
l'Océan indien. Ils viennent en effet de changer la base de cet indice mensuel,
calculé à l'INSEE depuis 1976, d'en augmenter la couverture, en nombre de pays
et en nombre de produits, et d'en améliorer le mode de calcul informatique. Cet
indice est actuellement utilisé pour des études de conjoncture réalisées et
publiées par le ministère de la coopération et la Caisse centrale de coopération
économique, mais il pourrait être diffusé également à des pays ou organismes qui
le souhaiteraient.
- 5 -
METHODOLOGIE POUR L'ELABORATION D'UN
COMPTE E PROVISOIRE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
DANS I ES PAYS EN DEVELOPPEMENT
par Alain QUINET1
Le regroupement des agents économiques en "secteurs institutionnels"
constitue un des découpages et une des approches de la comptabilité nationale.
Un secteur institutionnel est défini comme le regroupement d'unités
institutionnelles caractérisées par une unicité de comportement et une autonomie
de décision dans l'exercice de leur fonction principale. Ainsi le secteur
institutionnel des administrations publiques regroupe toutes les unités
institutionnelles dont la fonction économique principale consiste à produire des
services non marchands destinés à toutes les unités ou à effectuer des opérations
de répartition du revenu ou du patrimoine national.
Dans les pays en développement, le secteur des administrations
publiques revêt une importance particulière, tant en raison de son poids propre
dans l'économie que de sa capacité à refléter à travers les recettes l'évolution
de l'activité économique et à travers les dépenses l'orientation imprimée par les
finances publiques.
Le présent article a pour objet de présenter l'importance qui
s'attache, avant le bouclage d'un compte définitif, à la réalisation d'un compte
provisoire des administrations publiques et de proposer pour ce faire une
méthodologie d'élaboration.
On se placera, pour la commodité de l'exposé, dans le cas où les
comptes nationaux sont élaborés par une direction de la statistique appartenant
au ministère de l'économie et des finances, mais tout ce qui suit reste valable si
le service statistique dépend d'un autre ministère.
1 Au moment de la rédaction de l'article, A. QUINET appartenait au bureau des administrations
de la direction de la prévision (ministère de l'économie, des finances et du budget.- Paris).
I - LES LOURDEURS HABITUELLES D'UN COMPTE DEFINITIF
Les comptes définitifs sont construits à partir du dépouillement de
l'ensemble des écritures comptables relatives aux différentes unités
institutionnelles qui composent le secteur des administrations publiques (APU).
Cette procédure, indispensable si l'on veut disposer d'une base
statistique suffisamment complète et fiable, pose cependant plusieurs types de problèmes :
1 - Elle est tout d'abord très lourde à mener. La direction ne
bénéficie en effet généralement, au titre des documents qu'elle reçoit, d'aucun
travail de présynthèse, si bien qu'il lui revient de dépouiller elle-même les
comptes de chacune des unités institutionnelles, c'est-à-dire :
- de l'Etat ;
- des administrations de sécurité sociale (ASS) : caisse de sécurité
sociale et éventuellement régime propre aux agents de l'Etat ;
- des administrations publiques locales (APUL) : différents niveaux
de collectivités territoriales, chambres de commerce et d'industrie, chambres de métier ;
- des organismes divers d'administration centrale (ODAC), en nombre
généralement élevé compte tenu de la taille et de la structure du secteur public dans les pays en développement.
2 - Cette procédure n'est menée à bien qu'au terme d'un délai relativement long, de l'ordre de 3 ans à compter de la fin de l'année civile.
Les délais de production des documents comptables d'exécution par
les autres directions peuvent être en eux-mêmes importants. A ces délais
techniques s'ajoutent trois difficultés administratives :
- la diversité des sources d'information : s'agissant du seul compte
de l'Etat par exemple, le budget ordinaire et le budget d'équipement relèvent
généralement de directions différentes du ministère des finances ;
- la difficile insertion administrative de la direction de la
statistique : la statistique ne fournit de produit fini qu'avec beaucoup de retard,
à un moment où celui-ci présente un intérêt souvent amoindri pour les autres
directions du ministère des finances. Aussi celles-ci sont-elles peu mobilisées pour
fournir spontanément à la statistique en temps et en heure et de manière
exhaustive les informations nécessaires. Ainsi s'enclenche un cercle vicieux,
source de démotivations pour l'ensemble des agents ;
- peut s'ajouter à cela l'éloignement géographique de la statistique
par rapport aux autres directions du ministère, qui distend les relations
personnelles qui pourraient se nouer entre personnes de formation identique et
complique un peu plus les transmissions d'informations.
3 - Du fait de ces carences, la procédure d'élaboration des comptes, au lieu d'être ramassée en une campagne de quelque deux ou trois mois, s'étire en longueur au rythme de l'arrivée des documents comptables.
Au total, la procédure actuelle ne satisfait personne : les délais sont
tels que le compte des administrations publiques n'est pas suivi comme indicateur
économique pertinent, les autres directions des ministères élaborant, en liaison
avec le FMI, un tableau des opérations financières limité au seul agent Etat,
construit indépendamment des principes et des données de la comptabilité
nationale mais qui, rapidement disponible, constitue de fait le document de
référence.
II - INTERET DE LA REALISATION RAPIDE D'UN COMPTE DES ADMINISTRATIONS
L'ensemble des difficultés recensées amène à mettre en évidence
l'intérêt de la réalisation rapide d'un compte des administrations.
1 - L'intérêt économique tout d'abord est évident: La direction de la prévision disposerait ainsi pour ses projections à
court terme d'une base de calcul plus fiable, l'année n-2 présentant encore, en
l'état actuel des choses, un caractère prévisionnel. La direction de la
planification pour sa part, dans la cadre de son travail de modélisation,
disposerait rapidement d'un compte couvrant l'ensemble des administrations
publiques et non plus le seul Etat, et bâti dans un langage - la comptabilité
nationale - qui facilite le bouclage des comptes de l'ensemble des secteurs institutionnels.
2 - Intérêt administratif ensuite : Dans la mesure où l'élaboration rapide d'un compte provisoire
correspond à une demande d'autres services gouvernementaux, il serait l'occasion
pour la direction de la statistique de se positionner, non en simple quémandeur
d'information, mais aussi en prestataire de services.
Les autres directions du ministère de l'économie et des finances
seraient notamment intéressées à disposer d'éléments synthétiques sur le compte
des sous-secteurs tels que les ODAC, les comptes des chambres de commerce et
d'industrie et des chambres de métier.
Ce rééquilibrage des relations pourrait permettre d'enclencher un
cercle plus vertueux du point de vue des échanges d'information entre directions.
III - LES CIRCUITS D'INFORMATIONS
On peut tenter de recenser l'ensemble des sources d'informations
nécessaires d'une part, disponibles d'autre part, et de voir dans quelle mesure il
est possible d'améliorer les circuits existants.
1 - un compte définitif des APU suppose de disposer des informations suivantes :
la situation détaillée des recettes budgétaires ;
la situation des dépenses ;
les situations des comptes spéciaux du Trésor ;
- les comptes des ODAC ;
les comptes des communes ;
les comptes des chambres de commerce et des chambres de métiers ;
les comptes des organismes de sécurité sociale.
Le tableau ci-après recense par sous-secteur :
- les documents existants dans l'administration ;
- leur périodicité ;
- les organismes producteurs ou détenteurs de ces documents.
9
Ce tableau, construit à partir d'un exemple (celui du Sénégal début
1990), pourrait être adapté en fonction des structures administratives propres à
chaque pays et diffusé sous une forme ou une autre aux organismes et directions
intéressées ainsi qu'aux responsables économiques du pays afin de donner une vue
claire et complète des besoins de la direction de la statistique.
IV - RECOMMANDATIONS DE METHODOLOGIE POUR L'ELABORATION D'UN COMPTE PROVISOIRE DES ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
L'élaboration d'un compte provisoire des administrations visant à
pallier le problème de la longueur des délais suppose de disposer :
- d'un compte définitif pour servir de base de calcul ;
- d'éléments d'information rapides et fiables sur les principaux postes ;
- d'une table de passage comptabilité budgétaire-comptabilité
nationale ;
- d'une méthodologie suffisamment légère pour que la tâche puisse être
assumée rapidement par les mêmes personnes qui ont en charge la réalisation du
compte définitif.
Aussi faut-il s'attacher à répondre aux questions suivantes :
- Quelles informations peuvent être mobilisables au cours de l'année
n + 1 ?
- Est-il possible à partir de décisions de politique économique ou
d'informations extra-comptables d'établir l'évolution d'un poste indépendamment de
données comptables ?
- Comment peut-on exploiter ces informations en conciliant précision
du compte et légèreté de la procédure ?
Les ODAC et les ASS ne posent généralement pas de problème
particulier, car les informations comptables sont disponibles peu de temps après la
clôture de l'exécution budgétaire et présentent un degré d'exhaustivité suffisant.
On se concentrera donc sur l'Etat et les APUL.
I - ETAT
Informations nécessaires Documents existants Périodicité Organismes détenteurs
1 - Détail des recettes ordinaires et extraordinaires
- situation de l'exécution des recettes - semestrielle - Trésorerie générale (service central des
recettes)
2 - Dépenses :
- détail des dépenses exécutées - situation des crédits - semestrielle - Direction du budget
- effectifs - note de conjoncture - tous les deux mois - Service central de la solde ;
Direction de la prévision
- stock de dette et intérêts - note de conjoncture - tous les deux mois - Direction de la dette et des investissements
Direction de la Prévision
- programmes d'investissements - programme triennal d'investissement
et d'action prioritaires (PTIP) et
bilan d'exécution du plan
- annuelle - Direction de la planification du Ministère
du Plan et de la Coopération
Direction de la dette et des investissements
3 - Comptes spéciaux du Trésor
- situation des comptes - Balance du Trésor - mensuelle (seule
est nécessaire la
balance de fin
de semestre)
- Trésorerie générale
- opérations de la Caisse autonome - Trésorerie générale
d'amortissement (partage entre
remboursements et paiement
d'intérêts)
- ODAC
Informations nécessaires Documents existants Périodicité Organismes détenteurs
Opérations
- des établissements publics - bilans - annuelle - Centre des établissements publics
- de l'université de Dakar - Direction du contrûle financier
ou ODAC eux-mêmes
- de la zone franche industrielle
de Dakar
- des sociétés SODEVA, SOSEPRA,
SAED, SODAGRI (sociétés de
développement agricole)
III - APUL
- Opérations des collectivités locales - budgets approuvés - annuelle - Direction des collectivités locales
- synthèse effectuée par la recette
municipale de Dakar
- annuelle du ministère de l'intérieur
- Opérations des chambres de - bilans - annuelle - Direction du budget
commerce et des chambres de métiers
IV - sEcuRrrE SOCIALE
Opérations
- de la caisse de sécurité sociale - bilan - annuelle - Centre des établissements publics
- de l'IPRES (régime des fonctionnaires) - bilan - annuelle - IPRES
- 12 -
A - Eléments de méthodologie pour l'élaboration d'un compte provisoire de l'Etat
Il convient tout d'abord de s'assurer que l'ensemble des opérations
relatives au compte de l'Etat sont retracées dans la loi de finances initiale et les
écritures comptables d'exécution, y compris notamment les dépenses
d'investissement effectuées sur financement extérieur. Si c'est effectivement le
cas, trois lacunes continuent cependant généralement de gêner l'élaboration d'un
compte :
- les crédits d'équipement militaires, imputés par la comptabilité
nationale en consommation intermédiaire, peuvent être couverts par le secret
défense, si bien que l'on doit traiter une enveloppe globale de dépenses en capital
sans pouvoir faire le départ entre ce qui relève de l'Etat civil et ce qui relève
de l'Etat militaire. En conséquence, il est inévitable que la FBCF publique soit
surévaluée et la consommation intermédiaire en contrepartie sous-évaluée ;
- la Caisse autonome d'amortissement, compte d'affectation spéciale
abondé par transfert du budget général et emprunt, paie le service de la dette,
sans que les écritures comptables permettent toujours de distinguer entre
remboursement du principal d'une part, versement d'intérêts d'autre part. Il serait
donc souhaitable de pouvoir disposer d'informations plus détaillées sur les opérations de la CAA ;
- les modifications apportées au cours de l'exécution aux dispositions
de la loi de finances initiale ne sont pas retracées dans un document public à
caractère législatif (collectif budgétaire) ou réglementaire (décrets d'avance,
d'annulation de crédits, etc.), si bien qu'un suivi direct de l'exécution par la
direction de la statistique est de facto impossible.
Ces trois problèmes étant connus - et chaque direction devant
s'efforcer de les résoudre au cas par cas - on trouvera ci-après quelques
propositions de méthodologie qui permettraient d'évaluer correctement les
principaux postes de dépenses en s'affranchissant de données comptables détaillées.
1 - La masse salariale
L'évolution de la masse salariale peut se décomposer en trois éléments :
- 13 -
- les augmentations générales ou catégorielles (modification du
salaire indiciaire ou des indemnités) ;
- le glissement-vieillissement-technicité (GVT-solde), qui retrace
l'effet conjugué de trois phénomènes : . l'évolution du salaire des individus au cours de leur carrière,
dont la moyenne constitue le "GVT-positif",
. le remplacement des départs d'anciens par des jeunes,
. la modification de la structure de la population employée ;
- la variation due aux effectifs.
Il est possible de construire, indépendamment des données
comptables, une évolution de masse salariale :
- les augmentations générales et catégorielles sont peu nombreuses
et connues : il convient donc simplement de tenir à jour une fiche annuelle
recensant les quelques décisions prises en ce domaine ;
- le GVT est généralement calculé par les directions en charge des
travaux de planification ou de modélisation, en liaison avec les organismes de
coopération multilatérale.
Il suffit donc de renseigner le tableau suivant en pourcentage
d'évolution :
Augmentations générales
+ Augmentations catégorielles
+ GVT des présents-présents
+ Effet des entrées-sorties
Salaire moyen par tête
+ Variation due aux effectifs (variation d'effectifs x salaire moyen)
= Variation de masse salariale
Rappelons que les évolutions doivent être ramenées à des moyennes
annuelles : une augmentation de 1% au 1er juillet correspond à une augmentation
de 0,5% sur l'année civile (avec effet report de 0,5% sur l'année suivante).
- 14 -
2 - Les intérêts Les intérêts peuvent également être appréciés avec une précision
satisfaisante. On connatt, grâce aux statistiques nationales ou internationales,
l'encours de la dette publique. Celle-ci est essentiellement une dette à taux fixe
et largement concessionnel : son coût moyen, au demeurant faible, est donc peu
sensible aux variations de taux d'intérêt. En conséquence, appliquer le coût moyen
de la dernière année au déficit de l'année en cours donne une bonne estimation
de la dérive des intérêts.
3 - Les investissements Les investissements peuvent être appréhendés dans le programme
triennal d'investissement et d'actions prioritaires (PTIP). La seule difficulté
consiste à isoler au sein des dépenses ce qui relève de l'investissement pur et ce
qui relève de la consommation intermédiaire. En l'absence d'informations plus
précises, il semble raisonnable de répartir les dépenses conformément aux ordres
de grandeur déja observés.
4 - Les transferts aux autres APU Les transferts aux autres administrations peuvent être appréhendés à
partir des comptes des autres sous-secteurs -ODAC et ASS- dont on dispose
habituellement dans des délais satisfaisants.
5 - Les comptes spéciaux du Trésor Les comptes spéciaux du Trésor sont généralement classés en
5 catégories :
- les comptes d'affectation spéciale ;
- les comptes de commerce ;
- les comptes de réglement avec les pays étrangers ;
- les comptes d'opérations monétaires ;
- les comptes de prêts et d'avances.
Seuls les deux premiers retracent des opérations à caractère réel. En
outre, parmi ceux-ci, beaucoup ne retracent que des mouvements peu importants.
Au niveau d'un compte provisoire, il suffit donc de réunir et traiter les
informations relatives aux quelques comptes les plus importants (moins d'une
dizaine en règle générale). S'agissant des autres comptes spéciaux on se
contentera de faire évoluer la base de calcul comme le taux de croissance inscrit en loi de finances initiale.
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B - Recommandation pour l'élaboration du compte provisoire des administrations
publiques locales
1 - Les collectivités locales Les collectivités locales sont constituées de régions, communes et
communautés rurales. Cependant, il n'existe généralement pas de statistiques
relatives à ces communautés. Le problème essentiel est donc de repérer celles des
collectivités locales dotées de comptabilité qui brassent les masses financières les
plus significatives.
La confection d'un compte provisoire des collectivités locales ne
devrait pas poser de problème majeur, pour trois raisons :
- Les recettes et dépenses des communes sont peu diversifiées.
Les recettes sont exclusivement constituées de recettes locales
fiscales ou tarifaires. Il n'existe pas ou peu de transferts venant de l'Etat, ni en
pratique de recettes d'emprunts.
Les dépenses, en l'absence de transferts économiques, de prestations
sociales et d'intérêts, sont constituées de salaires, de consommations
intermédiaires et de formation brute de capital fixe.
- L'exécution budgétaire, calée sur celle de l'Etat, s'écarte peu des
budgets initiaux. En effet, les recettes locales sont largement déconnectées des
fluctuations de l'activité économique et la tutelle de l'Etat empêche toute dérive
importante des dépenses.
- L'activité économique est géographiquement concentrée dans un
nombre très limité de villes.
L'on pourrait en conséquence adopter la démarche suivante :
a) constituer un fond de dossier sur les collectivités locales. Celui-ci doit comprendre notamment :
- des séries statistiques ;
- des articles ou études sur les comportements économiques,
financiers et fiscaux des collectivités locales ;
b) l'exploiter hors les périodes des comptes pour repérer : - les principales tendances ;
- leurs facteurs explicatifs.
- 16 -
L'acquisition d'une culture générale sur les comportements et les
comptes des collectivités locales constitue un préalable indispensable à la
réalisation d'un compte provisoire fiable. Il permet de cadrer l'exercice et
constitue un "garde fou" en cas de lacune des données comptables ;
c) la réalisation du compte provisoire pourrait elle-même se faire en trois temps :
- recueil dès le début de l'exécution budgétaire des budgets primitifs
des principales villes ;
- retranscription en comptabilité nationale ;
- prise en compte des écarts en exécution par rapport aux budgets
votés.
2 - Les chambres de commerce et d'industrie et les chambres de métiers
Outre les collectivités locales, les administrations publiques locales
comprennent les chambres de commerce et les chambres de métier, classées en
organismes divers d'administration locale (ODAL). Les informations les concernant
sont lentes à remonter.
Il convient cependant de noter que seules les chambres concentrant
une activité économique significative méritent un traitement statistique minutieux.
Au niveau d'un compte provisoire on pourra se contenter d'exploiter les bilans
relatifs à ces chambres et de faire évoluer ensuite les autres de manière similaire.
L'élaboration rapide d'un compte provisoire, indépendamment de
données comptables exhaustives, présente un risque d'imprécision non négligeable
qui serait préjudiciable à l'appréciation de la situation des finances publiques s'il
ne s'inscrivait pas dans le cadre d'un suivi régulier par la direction de la
statistique de l'activité et des principales décisions de politique économique du
pays. Au-delà des strictes questions de méthodologie, on formulera donc deux types de recommandations :
- l'élaboration d'un compte provisoire de qualité suppose de recenser
tout au long de l'année les décisions de politique économique influant sur les
finances publiques : mesures salariales et de recrutement, décisions
- 17 -
d'investissement, transferts économiques et sociaux. Ainsi disposera-t-on en fin
d'année d'informations sur l'exécution qui pallieront utilement les éventuelles
lacunes dans les données comptables ;
- il importe aussi de prendre un certain recul sur les chiffres de
l'année, ce qui suppose :
. de constituer des séries en valeur et en volume sur les finances
publiques ; . de constituer un fond de dossier sur les principaux problèmes (salaires,
dette, investissement, droits de douane) ;
. d'identifier les facteurs d'évolution.
Fondamentalement, l'enjeu d'un compte provisoire est d'associer de
manière plus dynamique travail statistique et analyse économique. L'analyse
économique permet de cadrer l'exercice annuel d'élaboration d'un compte
provisoire et de l'enrichir d'un commentaire explicatif sur l'évolution des finances
publiques qui pour l'heure reste en règle générale peu développé. A l'inverse,
l'élaboration rapide d'une base statistique fiable facilite le travail économique
prospectif, et donc la préparation de l'avenir.
— 19 —
L'AIDE FRANCAISE DANS LES SYSIEMES
STATISTIQUES INTERNATIONAUX
par Anne GOUEZEL-JOBERT et Gérard CHENALS1
INTRODUCTION GENERALE
Ce document présente une synthèse de l'état des réflexions menées
par les auteurs sur l'aide bilatérale dans le cadre de leurs travaux sur la
comptabilité nationale, la balance des paiements et les statistiques des finances
publiques. En traitant de l'aide française on peut raisonnablement espérer couvrir
les manifestations les plus importantes de l'aide bilatérale ; l'étude thérorique de
l'intervention des autres pays devrait se résumer à quelques cas très spécifiques.
La plupart des pays en développement ont choisi officiellement
d'utiliser les cadres d'analyse statistique proposés par les organismes
internationaux liés à l'Organisation des Nations Unies. Dans cet article, il sera
fait référence, en permanence et exclusivement, au Système de Comptabilité Nationale des Nations Unies (SCN)2, au Manuel de la Balance des Paiements du FMI3
et au Manuel de Statistiques de Finances Publiques du FMI4. Pour certaines
opérations financières ou budgétaires, les trois cadres d'analyse offrent chacun
une approche particulière. Il en est ainsi pour les dons et aides accordés aux
pays en voie de développement que cet article se propose d'étudier dans leur
généralité, avec toutefois en filigrane le cas précis de l'aide publique française
accordée à Djibouti. Les aides extérieures ont en effet une forte incidence sur
l'économie djiboutienne et, parmi elles, l'aide française est importante et
diversifiée du fait des relations privilégiées qu'entretiennent les deux pays. On
trouvera en annexe la description et les modalités des principales relations bilatérales franco-djiboutiennes.
1 G. CHENAIS fait partie de la Direction Nationale de la Statistique de DJIBOUTI. Au moment de
la rédaction de l'article, A. GOUEZEL-JOBERT en faisait également partie.
2 Etudes méthodologiques - Série F n°2 rév.3.
3 Quatrième édition - FMI - 1977.
4 FMI - 1987.
Les auteurs se sont particulièrement attachés à rechercher dans les
ouvrages cités plus haut les interprétations respectant le plus scrupuleusement, et
en toute indépendance d'esprit, les réalités observées au niveau micro-économique
du pays bénéficiaire ; il est en effet peu souhaitable qu'une représentation
macro-économique formelle ignore, inverse ou déforme des flux réels. Par la suite
il sera beaucoup plus facile de mettre en lumière les faiblesses du cadre
théorique et de procéder aux nécessaires compromis imposés par l'état des
informations quantitatives utilisables.
Les problèmes liés à la conversion des unités de compte et aux
décalages entre dates d'enregistrement ont été ignorés.
La recherche des diverses opérations d'assistance et de coopération
menées par la France permet de distinguer principalement :
1- l'aide budgétaire directe ;
2- les dons en nature directs, avec et sans constitution de fonds de
contrepartie ;
3- l'assistance technique de longue et courte durée ;
4- les projets ;
5- les prêts à taux d'intérêt bonifiés ;
6- la remise de dettes ;
7- les bourses et stages de formation.
Le cas des subventions et aides aux écoles françaises n'est pas
traité spécifiquement. On transposera les traitements décrits en changeant
l'administration par une IPSBL (Institution Privée Sans But Lucratif).
I - L'AIDE BUDGETAIRE DIRECTE
Il s'agit d'un don en espèces qui s'inscrit en recettes du budget
général de l'Etat.
Du point de vue de la balance des paiements, elle représente une
augmentation d'avoirs financiers et s'inscrit donc au débit des réserves de la
section Capitaux. Mais il s'agit aussi d'un transfert sans contrepartie ; en effet,
dans ce cas là, il n'y a pas échange mais don d'avoirs financiers sans qu'il y ait
de mouvement inverse réel ou financier. Le respect de la convention de base de
- 21 -
la balance des paiements ("toute transaction enregistrée doit être représentée par
deux inscriptions de montants strictement égaux" - Balance des paiements § 21)
exige que soit passée une contre-écriture, en crédit, ici, sur une ligne spéciale
de transferts sans contrepartie de la section Transactions courantes (Balance des
paiements § 22). Il en sera ainsi pour tout don en nature ou en espèces
(respectivement ressources réelles ou avoirs financiers) en provenance d'un non-
résident.
BALANCE des PAIEMENTS
CREDIT DEBIT
I TRANSACTIONS COURANTES
A. Biens et services
B. Transferts sans contrepartie + De
II CAPITAUX
A. Autres que réserves
B. Réserves + De
De = don en espèces.
Du point de vue du système de comptabilité nationale des Nations
Unies (SCN), un don en espèces est enregistré en transfert courant non
contractuel n.d.a. reçu par les administrations publiques (APU) en provenance
d'administrations non-résidentes (reste du monde RM) dès lors qu'il s'agit de
financer le déficit courant du budget de fonctionnement et non de la formation
brute de capital fixe. Les opérations financières correspondant aux variations
respectives d'avoirs financiers des administrations publiques résidentes (variation
de créances) et du reste du monde (variation de dettes) seront parallèlement enregistrées pour un même montant.
OPERATIONS avec l'EXTERIEUR
Opérations courantes
Autres transferts courants du RM
+ De
Opérations en capital
Variation des créances sur RM
+ De
ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
Compte de production
Compte de revenu et dépenses
Epargne nette +De
Transferts courants nda du reste du monde
+ De
Compte de capital et financement
Capacité de finan. + De
Epargne nette + De
Pour le Manuel des Finances Publiques du FMI, l'aide budgétaire
directe française représente un don, c'est-à-dire un "encaissement sans
contrepartie et non remboursable correspondant à un versement non obligatoire au
profit d'une administration publique et provenant d'une autre administration
publique" (B1.15 - IIII.C.Dons). Elle s'inscrit en dons reçus de l'étranger (Finances
publiques IV.31 § 17).
- 23 -
Dans le cas particulier de Djibouti, comme on a traité l'aide
budgétaire dans les trois systèmes, on traitera les retenues sur les salaires des
militaires français versées au titre de l'impôt sur les traitements et salaires par
l'armée française au budget djiboutien. En effet, ces retenues sur des salaires
de non-résidents sont calculées par l'armée française directement en dehors des
règles fiscales locales et versées par elle mensuellement.
II - LIS DONS EN NATURE DE BIENS ET SERVICES MARCHANDS
Ils correspondent à la fourniture gratuite de biens ou de services
marchands. Leur évaluation se fait au coût supporté par le donateur (Balance des
paiements § 88 - SCN § 6.71 et évaluation de la production des administrations
§ 6.41).
2.1. Pas de fonds de contrepartie Du point de vue de la balance des paiements, toute entrée de biens
ou de services marchands en provenance d'un non-résident fait l'objet d'une
inscription brute au débit des Transactions courantes (biens, services et revenus).
Cependant, dans le cas d'un don, comme c'était le cas pour l'aide budgétaire, il
n'y a pas échange. Le respect de la convention de base de la balance des
paiements exige donc que soit passée une inscription, égale au crédit des
Transactions courantes (transferts sans contrepartie).
BALANCE des PAIEMENTS
CREDIT DEBIT
I TRANSACTIONS COURANTES
A. Biens et services
B. Transferts sans contrepartie +Dn
+Dn
II CAPITAUX
A. Autres que réserves
B. Réserves
Dn= montant du don en nature
- 24 -
Du point de vue du SCN, le don en nature aux administrations est
enregistré d'abord en importation et en transfert reçus du reste du monde dans le
compte des opérations avec l'extérieur, puis en emploi de l'administration :
consommation intermédiaire s'il s'agit de biens non durables ou de services
destinés à ses opérations courantes, formation brute de capital fixe s'il s'agit
d'équipement ou de matériel, enfin variation positive des stocks s'il s'agit de
marchandises devant faire partie de stocks stratégiques ou d'importance
particulière (SCN § 6.65). En ressources des administrations, on inscrit : un
transfert courant n.d.a. s'il s'agit de biens ou de services de consommation
courante (SCN § 7.60), un transfert en capital reçu du reste du monde dans le
cas d'un don en matériel ou équipement ou de biens stratégiques ou d'importance
particulière (SCN § 7.75 à 7.77). Cette opération évite que ne soit affectée la
capacité ou le besoin de financement.
Ces dons en nature peuvent être des aides alimentaires d'urgence
destinées à être distribuées directement aux ménages. Cette distribution doit être
considérée de nature non marchande dans la mesure où l'administration règle et
énonce en détail les termes et conditions dans lesquelles elle fournit les biens ;
l'administration doit donc être considérée comme le producteur (SCN § 6.72) et
l'acquéreur (SCN § 6.74) ; par conséquent les denrées et les coûts de distribution
doivent être enregistrés dans sa consommation intermédiaire, sa production non
marchande et sa consommation finale. Il n'y a donc pas de transfert aux ménages
ni d'allocation d'assistance, cette dernière étant, par définition, en espèces (SCN Tableau 7.1).
On peut se poser la question de savoir si l'aide d'urgence reçue doit
être préalablement entrée en stock (à la suite d'un transfert en capital) puis
ressortie pour distribution, ou bien être considérée directement comme une
consommation intermédiaire (à la suite d'un transfert courant). La seconde
solution est à préférer lorsque la distribution se fait dans l'année ou que les
stocks résiduels de fin d'année sont insignifiants.
Si le volume des aides distribuées est très important, il convient de
créer une branche marchande des administrations qui effectue la distribution de l'aide pour le compte de l'administration.
Opérations co urantes
Importations + Dn
Autres transferts courants du RM
+Dn
- 25 -
Cas des dons en nature, sans fonds de contrepartie ni stocks
OPERATIONS avec l'EXTERIEUR
ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
Compte de production
Consommation interm. + Dn
Autres coûts + Cd
Prod. de services non marchands pour compte propre
+Dn+Cd
Compte de revenu et dépenses
Consommation finale
+Dn+Cd
Epargne nette -Cd
Transfert courants nda du reste du monde
+ Dn
Compte de capital et financement
Cap. de financement - Cd
Epargne nette -Cd
Dn= montant du don en nature Cd= coût de la distribution (y compris rémunérations et consommations intermédiaires)
- 26 -
Du point de vue des finances publiques, les dons en nature de biens
et services ne sont pas compris dans les statistiques (Finances Publiques -
Ils apparaissent dans des postes pour mémoire, en recette et en dépense pour un
montant égal.
2.2. Existence d'un fonds de contrepartie Les dons de denrées alimentaires, par exemple, peuvent être liés à
la mise en place d'un fonds de contrepartie. Un organisme public ou privé est
alors chargé de leur vente. Les fonds récupérés lors de la vente sont versés sur
un compte spécial qui sert, en accord avec le donateur initial, à financer des
projets de développement.
Par rapport au cas précédent les enregistrements à la Balance des
paiements ne changent pas. Pour le SCN, au compte des opérations avec
l'extérieur, le transfert est maintenant un transfert en capital. Pas de
changement non plus pour les emplois des comptes des administrations. Par
contre, en ressources apparaissent une production marchande égale au montant
des ventes, un excédent net d'exploitation égal à la recette des ventes diminuée
de la valeur des marchandises vendues et des frais de commercialisation.
L'épargne nette des administrations se sera accrue du montant net des ventes.
Comme en l'absence de fonds de contrepartie, on peut juger
préférable de ne pas passer par l'intermédiaire de stocks.
Cas des dons en nature, avec fonds de contrepartie, stocks et service de distribution.
OPERATIONS avec l'EXTERIEUR
Opérations courantes Importations
+Dn
Opérations en capital Transferts en capital du RM
+Dn
- 27 -
ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
Compte de production
Consommation intermé- diaire
+ Ss +Cc
Production de biens marchands
+Ve
Compte de revenu et dépenses
Epargne nette +Ve-Ss-Cc
Excédent net d'expl. +Ve-Ss-Cc
Compte de capital et financement
Variation de Stocks +Dn-Ss
Capacité de financement Ve-Cc
Epargne nette +Ve-Ss-Cc
Transfert en capital du reste du monde
+ Dn
Dn= montant du don en nature Cc= coût de la commercialisation Ss= sortie de stock Ve= ventes de denrées sur le marché
Du point de vue des finances publiques, on n'enregistre que ce qui
concerne des encaissements et décaissements. Le don en nature du départ n'est
toujours cité que pour mémoire. La vente des denrées alimentaires est inscrite en
dons reçus de l'étranger (Finances publiques IV.31 § 17) pour son montant total,
et la commission inscrite en dépenses.
On remarquera que, lorsque la France fait un don en nature d'un
bien ou service acheté localement (bien de consommation courante, bien
d'équipement), il y a tout d'abord exportation de service pour le montant du bien
- 28 -
ou du service acheté, correspondant à un achat sur place d'un non-résident
(Balance des paiements § 227 - SCN tableau 6.4 opération 2.11.4 ou 1.11.4. et
1.12.2). La contrepartie en est une entrée de devises. Au moment du don, celui-ci
est enregistré pour le coût supporté par la France ; son montant peut alors être
différent de celui du service exporté car il peut inclure des frais de gestion.
111 - L'ASSISTANCE TECHNIQUE
La toute première question à se poser est celle de la nature de
cette assistance. En annexe, on trouvera une description de la situation des
assistants techniques à Djibouti, cas particulier de celle de la plupart des
assistants techniques fournis par la France. Compte tenu de cette situation, au
niveau micro-économique il est difficilement concevable de considérer les
assistants techniques comme employés de l'administration du pays d'accueil ; ils
doivent donc rester employés de l'organisme qui les met à disposition.
Pour le pays d'accueil, la nature de la prestation est la même, que
l'assistant soit fourni à titre onéreux ou sur financement extérieur, par une
entreprise marchande ou par une administration, ou même par une administration
qui aurait préalablement loué les services d'une entreprise (de conseil par
exemple). Il s'agit le plus souvent de conseiller, d'effectuer des études, de
participer à la réalisation de projets, ou d'assurer temporairement des fonctions en attendant la nomination de nationaux.
Enfin, les relations entre l'administration française et celle du pays
d'accueil sont des relations de partenaires, et donc les choix des assistants
techniques et de leurs prestations sont établis d'accord partie. Les conventions de
coopération officialisent ces accords.
On peut en conclure que, pour le pays d'accueil, la prestation des
assistants techniques doit être considérée comme un service marchand, librement
choisi, financé soit sur fonds propres soit par une aide extérieure, et fourni par
une administration ou une entreprise marchande non-résidente.
Pour maintenir la cohérence avec ce qui est retenu dans les pays
d'accueil, les comptes de la France doivent donc enregistrer la production et
l'exportation des services marchands correspondants, ainsi que des transferts courants au reste du monde.
- 29 -
L'enregistrement dans nos cadres d'analyse doit s'aborder sous deux
aspects différents : celui de l'acquisition de services par l'administration
résidente et celui des revenus et des dépenses des assistants techniques.
3.1. Les services d'assistance technique L'évaluation de ces services doit comprendre tous les coûts
supportés par la France dans l'envoi de l'assistant technique (rémunération y
compris les cotisations sociales, transports, logement, frais de gestion, formation,
etc.). Concernant le cas du logement fourni gratuitement, il faut le considérer
comme une créance de la mission de coopération sur l'administration résidente
(qui s'est engagée à fournir ce service) qui est transférée aux assistants
techniques au titre d'avantage en nature dans la rémunération des salariés.
Il faut noter le cas particulier d'assistants techniques pris en charge
totalement ou partiellement par le pays d'accueil. Les remboursements à effectuer
doivent être considérés comme des créances de l'Etat français en compensation
de services rendus et doivent être traités comme tels dans la balance des
paiements et le SCN. La créance s'éteint lors du paiement effectif. Ne se traite
alors sous forme de don de service que la différence entre le coût total du
service et le montant total des créances (logement fourni et prise en charge).
Les activités d'un assistant technique au sein de l'administration
résidente induisent des coûts de fonctionnement qui doivent être simplement
comptés comme consommation intermédiaire de l'administration au même titre que
le service d'assistance technique.
Finalement ces dons de services marchands se traitent de la même
façon qu'au 2 ci-dessus et en tenant compte des services de logement et des
prises en charge.
BALANCE des PAIEMENTS
CREDIT DEBIT
I TRANSACTIONS COURANTES
A. Biens et services
B. Transferts sans contrepartie
II CAPITAUX
A. Autres que réserves
B. Réserves
+Lg(*)
(+Ds-Lg-Pc)
+Pc+Lg
Rb
+Ds
+Rb+Lg
OPERATIONS avec l'EXTERIEUR
Opérations courantes
Rémunérations reçues du RM +Lg(*)
Autres transferts courants du RM
+Ds-Pc-Lg
Importations + Ils
Opérations en capital
Variation des engagements +Pc-Rb
(*) Comme composante de la rémunération de l'assistant technique
Ds= valeur du service (y compris le logement) Lg= valeur du service de logement fourni estimé à son coût Pc= valeur de la prise en charge de services d'assistance Rb= remboursements effectués dans l'année.
- 31 -
ADMINISTRATIONS PUBLIQUES
Compte de production
Consommation interm. + Ds
Coût de production des services de logement
+Lg
Production de services non marchands pour compte propre
+Ds Production marchande de service de logement
+Lg
Compte de revenu et dépenses
Consommation finale +Ds
Epargne nette -Lg-Pc
Excédent net d'exploitation +Lg-Lg
Transfert courants nda du reste du monde
+Ds-Lg-Pc
Compte de capital et de financement
Capacité de financement -Lg-Pc
Num. et dépôts -Lg-Rb
Epargne nette -Lg-Pc
Capacité de financement -Lg-Pc
Autres engagements +Pc-Rb
Ds= valeur du service (y compris le logement) Lg= valeur du service de logement fourni estimé à son coût Pc= valeur de la prise en charge de services d'assistance Rb= remboursements effectués dans l'année.
3.2. Revenus et dépenses des assistants techniques
On doit distinguer les missions de courte durée (moins d'un an) des
missions de longue durée ; les services rendus, étant toutefois de nature similaire, ont été traités ci-dessus.
- 32 -
L'assistant technique en mission de courte durée reste résident dans
son pays d'origine; ses dépenses effectuées sur le territoire constituent une
exportation de service pour le pays d'accueil, équilibrée par une créance sur le
reste du monde.
Les assistants techniques en mission de longue durée deviennent
résidents du pays d'accueil, employés par un agent non-résident dont ils reçoivent
des salaires. On doit donc considérer trois aspects distincts de leur séjour :
- à leur arrivée, il doivent être considérés comme des migrants et
l'ensemble de leur patrimoine doit être ajouté à celui du pays d'accueil, ainsi que
leurs engagements vis-à-vis de résidents de leur ancienne économie ou d'une
économie tierce ;
- durant leur séjour ils sont considérés comme de simple résidents
ayant toutefois des relations étroites avec leur pays d'origine (envoi de fonds à
la famille, dépenses au cours des congés annuels, cotisations à la sécurité sociale,
à des mutuelles, à des caisses de retraites, souscription d'assurances,
investissements mobiliers ou immobiliers, etc.) ;
- à l'expiration de leur séjour, ils sont alors des émigrants dont le
patrimoine et les engagements du moment sont déduits du pays d'accueil et
transférés au nouveau pays de résidence qui n'est pas nécessairement la France.
Au niveau macro-économique certaines compensations s'effectuent du
fait du remplacement des émigrants par des immigrants, ce qui peut conduire à
des simplifications lors de l'élaboration des comptes.
Arrivées et départs des assistants techniques en mission de longue durée
A l'arrivée, la Balance des paiements enregistre le transfert de
l'ensemble du patrimoine et des engagements : les effets personnels en
importation de marchandises dans la section Transactions courantes lorsqu'ils sont
dédouanés et la variation des avoirs financiers privés dans la section Capitaux,
globalement compensés par une inscription équivalente dans les transferts privés
sans contrepartie (transferts de migrants) de la section des Transactions
courantes. Les logements ou biens immobiliers dont les assistants techniques sont
propriétaires en France deviennent des créances financières de résidents sur une
unité fictive résidente française qui, elle, détient le logement ou le bien
immobilier (Balance des paiements § 350).
- 33 -
Les opérations inverses doivent être inscrites lors du départ d'un
assistant technique émigrant vers la France ou ailleurs. En année courante, à
part les importations et exportations de marchandises qui sont enregistrées en
brut, les variations d'éléments financiers sont entrées en net, immigrants et
émigrants confondus.
Dans le compte des opérations avec l'extérieur, en opérations
courantes, le SCN enregistre les effets personnels en importations ou en
exportations et les écritures de contrepartie en Autres transferts courants en
provenance du, ou payés au, reste du monde (SCN - Tableau 7.1). Les variations
de créances et d'engagements sont inscrites dans les rubriques correspondantes
des opérations en capital, équilibrées par un montant net équivalent en Transferts
en capital reçus nets en provenance du reste du monde (SCN § 7.82).
Dans les comptes des ménages, les importations d'effets personnels
peuvent être portées en consommation finale et équilibrées par un Transferts
courant n.d.a. en provenance du reste du monde; pour les exportations de ces
effets, l'enregistrement peut se faire en Transferts courants au reste du monde,
par contre l'écriture d'équilibre est moins immédiate car il s'agit de biens usagés
déjà comptés en consommation finale ; compte tenu des montants en jeu, on peut
réduire la consommation finale de la période du même montant. Concernant les
créances et engagements, leurs variations doivent être réparties selon leur nature,
dans le compte de capital et financement, équilibrées globalement à la ligne
Transferts en capital reçus nets.
Séjour des assistants techniques en mission de longue durée
Durant son séjour, le ménage de l'assistant technique doit être
traité comme un ménage résident quelconque du pays d'accueil, employé par une
unité non-résidente. Les opérations qui le concernent plus particulièrement ont trait éventuellement à :
- ses rémunérations totales, en espèces, en nature et imputées, dues par son employeur ;
ses dépenses locales de consommation ;
une acquisition de logement sur place ;
des paiements locaux de taxes et impôts ;
des paiements de primes d'assurance-dommage, d'assurance-vie, et
des paiements de cotisations sociales et aux caisses de retraites, pour la plupart auprès d'organismes français ;
- 34 -
- des encaissements d'indemnités d'assurance, de remboursements de
frais médicaux, etc., payés surtout par des organismes français ;
- des dépenses effectuées à l'étranger lors des congés ;
- des dépenses d'entretien courant de son éventuel logement en
France ;
des impôts et taxes payés en France ;
des dépenses occasionnées par les études des enfants ;
- des transferts faits au bénéfice de parents ;
- des emprunts contractés ;
des revenus de natures diverses ;
des acquisitions de biens immobiliers ;
des acquisitions de titres financiers ;
des droits sur les réserves d'assurance-vie et de pension ;
des mouvements bancaires ;
etc.
Il est à remarquer que les transferts courants ne concernent que les
impôts et taxes payés en France, les études des enfants, l'entretien courant du
logement et les transferts aux parents. Le reste concerne des revenus, des
importations de services (services d'assurance, dépenses en congé), des primes et
indemnités d'assurance, des variations de créances et d'engagements. En cours de
séjour, il serait donc inexact de traiter comme transfert la totalité de la
différence entre les rémunérations et les dépenses effectuées localement ; les
ajustements sont à reporter au moment de l'émigration comme on l'a vu plus
haut.
Les traitements par la balance des paiements, la comptabilité
nationale et les finances publiques sont les mêmes que pour des résidents
employés par un organisme non-résident (ambassade, armée étrangère, organisme
régional ou international, etc.).
3.3. Quelques réflexions Bien qu'en accord avec les principes et conventions du SCN, les
évaluations à effectuer s'avèrent particulièrement difficiles du fait du manque
d'informations détaillées. De plus, on peut se demander si l'interprétation des
agrégats obtenus n'est pas rendue plus délicate et plus incertaine par la présence
d'opérations greffées de manière quasi-artificielle sur l'économie résidente. La
valeur des services rendus par les coopérants est sans commune mesure avec les
niveaux des coûts locaux, en particulier si on cherche à étudier le coût de
- 35 -
substitution par des cadres locaux. Le compte de capital et de financement des
ménages d'assistants techniques est quasi-exclusivement tourné vers l'extérieur et
sans impact sur l'économie d'accueil. L'effort à consentir pour élaborer
correctement les comptes n'améliore pas l'utilité des données, peut-être même
est-ce le contraire.
Ce qui a réellement un impact sur l'économie, c'est la participation
à la production de l'administration et les dépenses effectuées localement ou liées
directement au séjour (transports, effets personnels, congés, sécurité sociale, par
exemple).
On pourrait se sortir de cette situation en faisant l'hypothèse
supplémentaire selon laquelle l'assistant technique remplit en fait deux fonctions :
- la première, classique, de production de services marchands comme
on l'a vu plus haut ;
- la seconde, de production pour la France d'un service non-
marchand qui correspondrait à l'intérêt qu'a la collectivité française à coopérer
avec les pays en développement.
Ainsi le coût total de la prestation de l'assistant technique pourrait
être scindé en deux parties, l'une correspondrait au service marchand transféré
au titre de don à l'administration d'accueil, l'autre au service non-marchand
consommé par l'administration française.
De même on pourrait considérer qu'il existe deux ménages :
- Fun résident dans le pays d'accueil, sans patrimoine, qui produit
le service marchand et reçoit une rémunération qui couvre l'ensemble de ses
coûts de séjour;
- et l'autre résident en France, qui détient le patrimoine, est
intégré à l'administration française et perçoit le complément de rémunération, et
n'est pas pris en compte dans les comptes du pays d'accueil.
3.4. Traitement dans le SECN français Dans la pratique, la contribution des assistants techniques est un
transfert en nature, et non un transfert en devises comme le laisse supposer le
traitement actuel du SECN français. Celui-ci en effet, enregistre en "Transferts
courants sans contrepartie n.d.a. (coopération internationale)" (R67) le montant
des traitements et salaires versés par la France. Concrètement cela correspond
- 36 -
à des versements sur des comptes de non-résidents.
Du point de vue du pays d'accueil , s'inscrivent alors des transferts
courants aux ménages en provenance du reste du monde. Il n'y a donc plus de
rémunération de salariés.
Pour contourner cet inconvénient on utilise un subterfuge qui
suppose que l'administration d'accueil enregistre un transfert courant en
provenance du reste du monde pour payer les salaires des assistants techniques
mis à sa disposition. Or cette ressource supplémentaire n'existe pas réellement :
c'est une recette fictive pour une dépense fictive. Elle est ainsi incompatible
avec les statistiques des finances publiques, qui ne prennent pas en compte
d'encaissements et de décaissements fictifs et qui, par ailleurs, ne l'inscriront pas sous forme de don en nature.
La seule façon de maintenir la cohérence des données entre les
trois systèmes statistiques internationaux consiste donc à considérer l'assistance
technique de longue durée comme une importation de service évaluée au coût
supporté par la France dont les assistants techniques restent les salariés.
IV - LES PROJETS
Il convient de distinguer :
-les projets mis en oeuvre par la mission (y compris l'appui logistique aux coopérants) ;
-les projets mis en oeuvre par l'Etat d'accueil ;
-les projets mis en oeuvre par le ministère français de la coopération.
Dans un projet mis en oeuvre par la mission de coopération , celle-
ci est ordonnateur pour les dépenses quelles qu'elles soient. On traite donc les
dépenses courantes (personnel et fonctionnement) du projet comme un don de
service produit par la mission évalué au coût supporté par celle-ci (voir § 2 ci-
dessus). Lorsque le projet prévoit l'achat de matériel, celui-ci est traité comme un don de biens et non de service.
- 37 -
Dans le cas particulier d'un projet qui concerne la construction d'un
bâtiment (école, dispensaire par exemple), celle-ci peut se poursuivre sur plusieurs
années. Pour chacune de ces années, on considère qu'il y a acquisition par la
France d'une créance sur une unité fictive qui acquiert le bâtiment ; la valeur
des travaux effectués est comprise dans la FBCF de l'acquéreur (SCN -§ 6.107),
ici de l'unité fictive ; la balance des paiements et le compte des opérations avec
l'extérieur enregistrent des augmentations de créances en devises et des
augmentations d'engagements financiers. Lors de la remise aux autorités, il y a
extinction de la créance sur l'unité fictive par un transfert en capital en
provenance du reste du monde (SCN § 7.81) ; la balance des paiements et le
compte des opérations avec l'extérieur enregistrent un transfert en capital sans
contrepartie et une diminution d'engagement ; entre l'unité fictive et
l'administration, il y a un transfert de propriété, qui n'est pas un flux, et qui
n'est donc enregistré que dans un éventuel compte de patrimoine... L'unité fictive
se classe tout naturellement dans le secteur institutionnel des Administrations
publiques.
Cette approche est préférable car, tant que la remise n'a pas eu
lieu, aucune écriture n'est passée dans les comptes de l'administration ; et même
après, il n'est pas sûr que l'on trouve trace de ce transfert de propriété ; par
contre les comptes de la mission enregistrent régulièrement les paiements
effectués ainsi que la remise de propriété, ce qui permet d'évaluer les opérations
beaucoup plus sûrement.
La mission dispose de crédits d'appui logistique destinés à financer
des dépenses pour l'amélioration du service rendu par les assistants techniques.
Ces crédits d'appui logistique sont assimilés à des projets mis en oeuvre par la
mission. Ils représentent donc un don de service dans le cas de financement de
dépenses courantes et un don de biens en cas d'équipement.
Pendant la réalisation d'un projet mis en oeuvre par l'Etat d'accueil,
le Ministère des Finances est seul ordonnateur des dépenses. Le règlement des
dépenses correspond donc au financement d'une activité nationale équivalent à
une aide budgétaire affectée.
La balance des paiements enregistre à chaque règlement un transfert
sans contrepartie d'un montant égal à celui des dépenses et une entrée de devises équivalente.
- 38 -
Le SCN inscrit en ressources du compte de revenus et dépenses des
administrations, un transfert courant n.d.a. (ou un transfert en capital) en
provenance du reste du monde égal à la consommation finale du projet (ou à sa
FBCF).
Les finances publiques inscrivent ces projets dans les dons reçus de
l'étranger (Finances publiques - III.15 - BI.C.Dons et IV.31 § 17) et simultanément
en dépenses. Il y a en effet encaissement et décaissement.
Les projets mis en oeuvre par le ministère français de la
coopération concernent essentiellement le financement de mission de courte durée
et la fourniture d'équipement. Ils sont traités respectivement comme un don de
service produit par un non-résident, et comme un don de bien.
V - LES PRETS A TAUX d'INTERET BONIFIE
Ils sont accordés aux pays en voie de développement afin d'alléger
le service de leur dette. Les conventions de ces prêts contiennent des taux
d'intérêt très inférieurs aux taux pratiqués sur le marché et souvent aussi des
périodes de remboursement incluant des différés. Ces conditions particulières plus
avantageuses que les conditions du marché sont résumées dans le calcul de
"l'élément de libéralité" ou "élément don" du prêt.
La Balance des paiements ainsi que le SCN enregistrent les
opérations au prix du marché (Balance des paiements § 75- SCN évaluation de la
production).
La balance des paiements inscrit donc les intérêts dus aux
conditions du marché en "autres revenus des investissements". L'élément don est
inscrit en compensation en transfert courant sans contrepartie.
Le traitement du SCN est équivalent : inscription du montant des
intérêts dus aux conditions du marché en emplois du compte de revenus et
dépenses des administrations "revenus de la propriété - intérêts de la dette publique". L'élément don est inscrit en ressources de ce même compte en
transfert courants n.d.a. en provenance du reste du monde.
- 39 -
Les finances publiques inscrivent les intérêts réellement payés en
versements d'intérêts. La partie don est signalée pour mémoire comme don de
service.
La question reste ouverte de savoir s'il convient de prendre en
compte l'élément don en une seule fois lors de la signature du prêt, ou à chaque
échéance de remboursement.
VI - LA REMISE DE DETTE
Elle s'entend comme l'annulation pure et simple par le créancier de
la dette de son débiteur et non pas dans le cas inverse.
La balance des paiements traite la remise comme une diminution des
engagements du secteur officiel résident vis-à-vis de non-résidents (capitaux à
long terme-autres engagements). L'écriture d'équilibre de cette diminution
d'engagements est un transfert sans contrepartie n.d.a.
Le SCN procède d'une manière équivalente : diminution de dettes
par le don de la créance aux administrations ou à la société publique concernée,
et transfert en capital en provenance du reste du monde d'un montant équivalent
en ressources du compte de capital des administrations ou de la société publique.
Les finances publiques n'inscrivent pas la remise de dettes dans les
dons puisqu'elle ne donne lieu à aucun paiement (Finances publiques 111.16 et
W.32 § 17). Elle est reprise pour mémoire en même temps que tous les autres
dons qui ne donnent pas lieu à paiement.
VII - LES BOURSES ET STAGES DE FORMATION
Il convient de distinguer ceux de longue durée (supérieure à un an),
et ceux de courte durée (inférieure à un an).
Dans le cas d'une formation de longue durée, l'étudiant boursier
devient non-résident de son pays d'origine. Dans ces conditions, l'attribution d'une
bourse par la France est une opération entre deux non-résidents. Elle n'intéresse
ni la balance des paiements, ni les comptes nationaux (la bourse est versée dans
- 40 -
le pays d'études), ni bien sûr les finances publiques car il ne s'agit plus de
l'administration. Les opérations doivent par contre être prises en compte dans
l'économie où l'étudiant étranger en formation de longue durée devient un
migrant.
Dans le cas où le cycle de formation est inférieur à un an,
l'étudiant reste résident dans son pays d'origine, quel que soit le pays qui
l'accueille dans lequel il se trouve en voyage. La bourse peut être payée en
espèces ou en nature (logement gratuit ou billet d'avion).
Pour la balance des paiements, un règlement en espèces correspond
à un transfert sans contrepartie vers le secteur privé (ménages résidents)
équilibré par une entrée de devises. Les dépenses sur place correspondent à des
importations de services et à des sorties de devises.
Pour le SCN, si le règlement est en espèces les ménages reçoivent
une allocation d'assistance (SCN - tableau 7.14 6.5) en provenance du reste du
monde. Celle-ci a une incidence directe et positive sur l'épargne des ménages.
Les dépenses sur place augmentent la consommation finale et diminuent l'épargne.
Si la bourse comprend la fourniture gratuite de biens ou services, la
balance des paiements la traite comme un don en nature au secteur privé
(importation de service compensée par un transfert sans contrepartie au secteur
privé).
Le SCN inscrit un transfert courant n.d.a. en provenance du reste
du monde dans le compte de revenus et dépenses des ménages et simultanément
une consommation finale du service importé en emplois de ce même compte.
EN GUISE DE CONCLUSION
La prise en compte de l'assistance des organisations internationales
et de la CEE (seule autorité supranationale) est une suite naturelle à ce travail;
le sujet est d'autant plus intéressant que des propositions sont actuellement
avancées pour que des comptes soient bâtis pour ces entités qui actuellement ne
sont résidentes nulle part et donc non-résidentes pour tous. On peut dès à
présent entrevoir les conséquences d'un tel choix sur : le statut des
fonctionnaires internationaux, la structure des comptes du reste du monde, la
- 41 -
balance des paiements, la production du système de l'ONU, etc.
A notre connaissance certains des traitements que nous avons
retenus sont en désaccord avec la pratique en France et dans d'autres pays
d'Afrique ; les raisons peuvent en être des différences de situation ou
d'interprétation des principes et recommandations contenus dans les documents de
référence. Cette constatation amène à se poser la question suivante : les
statisticiens de l'INSEE et de la coopération française ne devraient-ils pas
chercher à rendre cohérentes leurs pratiques et les statistiques qu'ils élaborent
surtout lorsqu'elles concernent des relations économiques ou financières entre les
pays où ils travaillent?
Notre réponse personnelle est : si.
C'est pourquoi nous souhaiterions vivement :
- connaître les avis et les critiques de nos collègues statisticiens et
en particulier ceux des assistants techniques ;
- connaître les choix du SECN et la pratique dans les comptes
français ;
- une assistance de INSEE-Coopération pour nous faciliter l'accès
aux informations d'origine française et nécessaires à l'établissement de
statistiques crédibles dans nos pays.
TABLEAU SYNOPTIQUE du TRAITEMENT de l'AIDE BILATERALE dans le SCN. (pays bénéficiaire)
APU : Administrations Publiques (résidentes); RM : Reste du Monde.
Forme de l'aide Statut des intervenants Opérations sur biens et services
Transferts Opérations financières
Aide budgétaire directe
.APU .RM
.Transferts courants reçus par les APU
du RM
.Créances sur RM (en devises)
Dons en nature .APU .Importation de biens .Transferts en sans fonds
de contrepartie (sans stock)
.RM . FBCF capital reçus par les APU du RM
.Importation de biens (aide alimentaire)
.Consommation intermédiaire
.Production non marchande
.Transferts courants reçus par les APU
du RM
.Consommation finale des APU
Dons en nature .APU .Importation de biens avec fonds de .RM (aide alimentaire) contrepartie .SQS de ./ Stocks .Transferts en .Créances en
(avec stocks) commercialisation .Consommation intermédiaire de
biens et services
capital reçus par les APU du RM
monnaie nationale
.Production marchande
.Consommation finale
TABLEAU SYNOPTIQUE du TRAITEMENT de l'AIDE BILATERALE dans le SCN. (pays bénéficiaire) ; suite.
APU : Administrations Publiques (résidentes); RM : Reste du Monde.
Forme de l'aide Statut des intervenants Opérations sur biens et services
Transferts Opérations financières
Assistance technique Les assistants restent .Importation de services de courte durée résidents de leur pays (don de service)
(< 1 an) d'origine, employés .Exportation de services .Transferts courants .Créances sur RM par une unité non (dépenses de non-rés.) reçus par les APU (en devises)
résidente. (généralement une APU)
.APU
.Consommations intermédiaires de
services
du RM
.RM .Production non marchande
.Consommation finale des APU
Assistance technique Les assistants sont .Importation de services de longue durée résidents du pays (don de service)
(>1 an) d'accueil, employés .Importations de biens .Créances sur RM par une unité non et services .Transferts courants en devises et
résidente. (généralement une APU)
.APU
(effets personnels, dépenses en congé,
services d'assurance,..)
reçus par les APU et les ménages
du RM
financières
.RM .Exportations de biens .ménages (effets personnels)
.Exportation de services .Transferts courants (logement) versés par les .Engagements
.Consommations ménages envers RM intermédiaires
de biens et services au RM en devises et
financiers (des APU résidentes) .Production marchande (services de logement)
.Production non marchande
.Consommation finale (des APU)
.Consommation finale (des ménages)
TABLEAU SYNOPTIQUE du TRAITEMENT de l'AIDE BILATERALE dans le SCN. (pays bénéficiaire) ; suite.
APU : Administrations Publiques (résidentes) ;RM : Reste du Monde.
Forme de l'aide Statut des intervenants Opérations sur biens et services
Transferts Opérations financières
Projet mis La mission est une .Importation de services en oeuvre par unité non-résidente (don de service)
la mission (sans .APU .Exportation de services remise de bien) .RM (dépenses de non-rés.) .Transferts courants .Créances sur RM
(si achats locaux) .Consommations intermédiaires de services
reçus par les APU du RM
(en devises)
(des APU résidentes) .Production non
marchande .Consommation finale des APU
Projet mis .Mission de coopération .Importation de biens .Transferts en .Créances sur RM en oeuvre par la . APU .Exportation de services capital reçus (en devises) mission (remise d'équipement)
(si achats locaux) . FBCF
par les APU du RM (si achats locaux)
Projet mis .Mission de coopération . FBCF .Engagement en oeuvre par .Unité résidente (de l'unité fictive) envers RM la mission fictive .Créances sur RM
(construction) . APU (en devises)
.Opération sur .Transferts en .Annulation (remise de la patrimoine capital reçus de l'engagement construction) transfert de biens
d'occasions par l'unité fictive
(construction)
Projet mis en .APU .Consommations .Transferts courants .Créances sur RM oeuvre par le .RM intermédiaires reçus par les APU (en devises)
pays d'accueil (des APU résidentes) du RM .Production non
marchande .Consommation finale des APU
.Transferts en capital reçus
par les APU du RM
TABLEAU SYNOPTIQUE du TRAITEMENT de l'AIDE BILATERALE dans le SCN. (pays bénéficiaire) ; suite et fin.
APU : Administrations Publiques (résidentes); RM : Reste du Monde.
Forme de l'aide Statut des intervenants Opérations sur biens et services
Transferts Opérations financières
Bonifications d'intérêt sur
emprunts
Remises de dettes
Bourses d'études d'une durée < 1 an (allocation en
espèces)
.APU .RM
.APU .RM
L'étudiant reste résident de son pays d'origine
.
.Importations de services
.Consommation finale des ménages
.Transferts courants reçus par les APU
du RM
.Transferts en capital reçus
par les APU du RM
.Allocation d'assi- stance reçue par les ménages du RM
(Intérêt de la dette publique)
.Engagement envers RM (prêts)
.Créances sur RM (en devises)
— 46 —
ANNEXE
Dans quel cadre l'aide française s'exerce-t-elle à Djibouti?
Depuis de nombreuses années, la France est présente par ses interventions pour le développement dans tous les pays d'Afrique francophone. On y retrouve donc les mêmes structures de base qui lui servent pour la mise en place, la gestion et le suivi de ses actions, ainsi que les mêmes intervenants pour le financement et l'assistance technique. A part quelques particularités de la coopération avec Djibouti, la description ci-après est donc valable pour de nombreux autres pays.
La Mission de Coopération et d'Action Culturelle (MCAC) est un service du Ministère français de la Coopération. Son existence n'a pas de raison d'être en dehors de la volonté de l'administration française d'être présente sur place compte tenu des programmes de coopération qu'elle conduit.
Elle est chargée de la mise en oeuvre de la plupart des projets et des financements prévus par le Fonds d'Aide et de Coopération (FAC) du Ministère français de la Coopération, ainsi que de la gestion sur place (congés, transports) des assistants techniques mis à la disposition du pays où elle se trouve. Elle assure également le suivi de l'appui financier, de l'aide d'urgence, des bourses, de l'appui logistique aux coopérants et des missions d'experts.
Le budget de la Mission est inclus dans le budget français (titre III - moyens des services). Son personnel, mis à part les employés recrutés localement, est affecté, géré et payé par celui-ci. Il dispose, à Djibouti, des mêmes avantages que les diplomates en poste à l'ambassade de France : immatriculation "corps diplomatique", détaxes sur certains produits, logement dans des bâtiments de l'ambassade.
En conséquence, la mission de coopération est assimilée à une ambassade et son personnel à des diplomates. Ils sont donc non résidents du pays où ils se trouvent (SCN § 5.112 - Balance des paiements § 56 - Finances publiques 1:11-31)
Les assistants techniques sont régis administrativement par le droit français et restent légalement dépendants de leur employeur initial bien que participant à l'activité de gouvernements étrangers.
La présence des assistants techniques sur le territoirg économique du pays d'accueil pour une mission d'une durée supérieure à un an en fait des résidents de ce pays ( et plus précisément des migrants) et des non-résidents en France (SCN -§ 5.115 à 5.117 - Balance des paiements § 59 à 61 - Finances publiques III.32). Ils ne disposent d'ailleurs, à Djibouti, d'aucun des avantages accordés aux diplomates et assimilés.
Leurs salaires, indemnités et prestations sociales sont versés en France et leur transport dans le pays d'accueil est à la charge de l'administration française. De plus, d'après les accords de coopértion, à Djibouti, le logement sur place leur est fourni gratuitement.
5 Les contrats du ministère français de la coopération sont en général d'une durée de 2 ans.
- 47 -
A Djibouti, ils n'ont d'aucune manière le statut d'employés de l'Etat djiboutien. On doit donc les assimiler à des intérimaires, employés par le gouvernement français. Le "contrat d'intérim" est la convention de coopération remise à jour au cours des réunions bilatérales.
On remarquera que, la plupart du temps, les assistants techniques paient leurs impôts dans le pays d'accueil en bénéficiant parfois d'un aménagement de la fiscalité• locale, comme c'est le cas à Djibouti.
Les assistants techniques en mission de courte durée (inférieure à un an) restent résidents en France, et non-résidents du pays où ils effectuent leur mission. On doit les assimiler à des consultants.
Le Ministère français de la Coopération est intégré à l'ensemble de l'administration française. Tout comme la mission de coopération, son existence et ses fonctions sont indissolubles de la volonté du gouvernement français de maintenir des actions de coopération auxquelles il est entièrement dévoué.
Il est chargé de la mise en oeuvre et de la gestion de l'ensemble de la politique de coopération du gouvernement français pour les pays qui relèvent de sa compétence notamment par le Fonds d'Aide et de Coopération (FAC).
Il reste, ainsi que ses représentants, résident du point de vue français et non-résident du point de vue des pays où il intervient.
La Caisse Centrale de Coopération Economique participe au dispositif français d'aide au développement. C'est un établissement public autonome, qui a double mission d'organisme de développement et d'établissement financier.
La Caisse Centrale est le payeur du FAC, l'ordonnateur demeurant le ministère de la coopération ou la mission. Elle prête, à taux d'intérêt bonifié, à des sociétés privées et publiques ou pour des projets qui sécrètent leur propre rentabilité. Elle prend également des participations au capital des sociétés. Enfin elle intervient dans la formation des cadres nationaux de haut niveau en finançant des cycles d'études de courte ou moyenne durée.
Elle est présente dans pratiquement tous les pays où intervient l'aide technique des ministères des affaires étrangères et de la coopération.
A Djibouti, son agence ainsi que son représentant et son personnel possèdent le même statut que les organisations internationales et le corps diplomatique et se comportent donc comme tels. On les classera ainsi parmi les agents économiques non-résidents.
Le Centre Culturel est, tout comme la mission de coopération, un service du ministère de la coopération.
Sa situation est, à Djibouti, semblable en tous points à celle de la mission (budget, personnel, avantages sur place, logement).
Il est chargé d'une mission culturelle auprès du pays où il est en place. A ce titre, il gère une bibliothèque, organise et promeut des spectacles qui lui fournissent parfois des recettes en dehors de la subvention de fonctionnement française qui lui est allouée.
Comme la mission de coopération, il est considéré comme non-résident à Djibouti, ainsi que son personnel, excepté le personnel recruté localement.
- 48 -
L'Ecole Française est, à Djibouti, une association djiboutienne de loi 1901, qui reçoit une subvention de fonctionnement de l'Etat français (titre IV - Etablissements français à l'étranger) et une subvention d'équipement (titre V -investissements exécutés par l'Etat).
Sa situation est celle d'un agent économique résident à Djibouti assimilé à une Institution Privée Sans But Lucratif au service des ménages (IPSBL).
Son directeur a le même statut que le personnel de la mission de coopération. Les enseignants sont soit des Volontaires du Service National Actifs (VSNA), soit des coopérants enseignants, du personnel de l'éducation nationale française mis à disposition directe, ou encore des personnes recrutées sur contrats locaux.
L'Ecole Française est accessible à tous les enfants français ou étrangers, excepté les enfants djiboutiens. Une grande partie des inscrits est issue de ménages militaires français.
L'ambassade de France et le consulat sont des enclaves territoriales françaises et ne font pas partie du territoire économique djiboutien. Leur personnel, en dehors du personnel recruté localement, est, en conséquence, non-résident à Djibouti.
On notera à Djibouti, la présence permanente de la base militaire française. Celle-ci fait partie des enclaves territoriales françaises à Djibouti au même titre que l'ambassade et le consulat (SCN : § 5.112 - Balance des paiements : § 56 - Finances Publiques : page III-31).
En dehors de l'incidence importante sur les circuits économiques djiboutiens de la présence de l'armée française, celle-ci intervient pour des actions ponctuelles qui sont équivalentes à de l'aide publique dès lors qu'elles sont effectuées gratuitement.
Il peut s'agir de la réfection de pistes non revêtues, de la construction d'aires de sports dans les districts de l'intérieur, de la fourniture de biens et services à l'armée djiboutienne, notamment lors de manoeuvres communes, ou encore de l'assistance en cas de catastrophe naturelle.
L'armée française entretient sur le territoire, et pour son personnel, un Centre Hospitalier militaire. Celui-ci est accessible sous certaines conditions aux militaires djiboutiens et à certains civils résidents français ou djiboutiens.
Il faut signaler par ailleurs que l'armée française effectue une retenue mensuelle sur le traitement des militaires français à Djibouti qui est versée au titre de l'impôt sur les traitements et salaires au budget djiboutien.
De même, elle est soumise pour partie à la fiscalité locale indirecte ; par exemple, elle n'est exonérée que partiellement de Taxe Intérieure de Consommation sur ses importations. S'agissant d'une unité non-résidente, il faut créer une unité résidente fictive (SQS de courtage international) qui reçoit un transfert courant de l'extérieur pour payer les taxes.
Inversement, elle utilise gratuitement la piste et les services de l'aéroport pour sa base aérienne et des parties isolées du territoire pour ses exercices de manoeuvre.
- 49 -
L'aide française publique peut passer par d'autres canaux que ceux décrits ci-dessus. Il n'existe pas d'exemple concret à Djibouti de ce type de coopération. Il s'agit de la coopération dite "décentralisée" des collectivités locales, et des actions ponctuelles des autres ministères français (santé et agriculture notamment).
On signalera également, pour mémoire, les actions des Organisations de coopération Non Gouvernementales (ONG). S'il s'agit d'aide française, celle-ci n'est pas publique. Cependant, l'Etat français choisit parfois de les subventionner, considérant leur structure comme efficace pour mener à bien certaines opérations de développement.
- 51 -
DEUX COMMENTAIRES SUR L'ARTICLE :
"L'AIDE FRANCAISE DANS LES SYSTEMES
STATISTIQUES IN'IERNATIONAUX"
par Pierre MULLER1
L'article pose deux problèmes principaux. D'une part, il propose un
traitement de l'aide alimentaire reposant sur l'enregistrement de celle-ci en
consommation intermédiaire des administrations publiques. D'autre part, l'assistance technique, qu'elle soit de courte ou de longue durée, est appréhendée
comme une production de service marchand de la part des administrations
d'origine, dont l'emploi est une consommation intermédiaire des administrations
des pays bénéficiaires. Ces deux propositions méritent d'être discutées puisqu'elles
ne correspondent pas aux pratiques généralement suivies en comptabilité
nationale.
L'AIDE ALIMENTAIRE
Le SCN 1968 ne précise pas explicitement (§ 6.65) que l'aide
alimentaire fait partie des biens acquis par les administrations publiques et qui
doivent être enregistrés en stocks et non en consommations intermédiaires. Il ne
cite à ce niveau que les stocks de matériaux stratégiques et les autres stocks
d'une importance particulière pour la nation. Cependant, au § 6.105, il est bien
précisé que ces derniers comprennent, par exemple, les opérations sur des stocks
de céréales. En outre, le § 6.65 du SCN rappelle qu'il est impératif de ne pas
fausser le niveau des consommationns intermédiaires des administrations publiques
en y enregistrant des achats de biens faisant partie des stocks. Il précise même
que des corrections rétrospectives sont envisageables.
1 P. MULLER est Chef de la Division "Concepts et définitions statistiques et comptables" de
l'INSEE.
- 52 -
Il est vrai que la lecture des § 6.72 à 6.76 du SCN peut laisser
supposer que l'aide alimentaire entre dans la catégorie des biens et services
fournis directement aux ménages par une administration publique et entrant dans
leurs consommations intermédiaires. Toutefois, il est probable que ce que vise ici
le SCN est bien plutôt le cas des biens et services acquis par une administration
publique dans le cadre d'une activité productive non marchande. Il s'agira par
exemple d'achats de biens scolaires prêtés (ou distribués) gratuitement ou encore
d'achats de médicaments délivrés gratuitement, ou à un prix très réduit, dans le
cadre du système national de santé. En outre, les critères avancés dans ces
paragraphes, afin de distinguer les biens et services entrant dans la consommation
intermédiaire des administrations publiques de ceux repris dans la consommation
finale, ne sont pas toujours très opérationnels. Enfin, on voit mal comment l'aide
alimentaire pourrait entrer dans l'évaluation de la production de services non
marchands et à quelle activité on pourrait la rattacher précisément. En
définitive, si l'aide alimentaire n'est pas explicitement citée parmi les biens
entrant dans les stocks des administrations publiques, son intégration comme telle parait bien dans l'esprit du SCN de 1968.
Il est bien évident que l'inscription de l'aide alimentaire en stocks
détenus par les administrations publiques suppose que ces stocks ne sont pas
attribués à une autre unité, par exemple un office de commercialisation ou une
entreprise publique. Dans le cas contraire, l'Etat détient une créance sur
l'organisme chargé de la commercialisation ou de la distribution de l'aide, créance
apurée au fur et à mesure des versements de l'organisme à l'Etat. Dans les deux
cas (stocks attribués à l'Etat ou créance de l'Etat sur l'organisme de
commercialisation), l'activité de distribution ou de commercialisation ne génère
pas de marge commerciale et les ménages bénéficient d'un transfert de la part
des administrations publiques, égal à la différence entre le coût de l'aide
effectivement distribuée pendant l'exercice et son prix de vente (qui peut être nul).
Un tel traitement permet d'enregistrer l'aide alimentaire dans la
consommation des ménages (et non dans celle des administrations publiques),
quelles que soient les modalités de sa distribution. En outre, il est parfaitement
homogène au regard des différentes situations concrètes que l'on peut rencontrer.
Toutefois, sa mise en oeuvre peut se heurter à des difficultés pratiques, qui rendent nécessaires certaines approximations.
— 5 3 —
L'ASSISTANCE TECHNIQUE
Le SCN de 1968 ne définit pas de manière très explicite la
séparation entre production marchande et production non marchande. Il précise
toutefois que "les branches d'activité marchande sont constituées par les
établissements dont les ressources principales proviennent de la vente de biens et
services. Ils produisent ces biens et ces services pour les vendre sur le marché à
un prix qui est normalement fixé de façon à couvrir les coûts de production"
(§ 5.7 du SCN de 1968). D'autres paragraphes du SCN pourraient être rappelés
(par exemple les § 5.10 et 5.11 ou encore 5.24). En tout état de cause, il est
claire que la notion de production marchande de bien et service, qui fonde celle
de bien et service marchands, est explicitement liée à l'existence de ventes
couvrant la majorité des coûts de production. Inversement, celle de production
non marchande, à partir de là de biens et services non marchands, est introduite
dans le système pour décrire des activités de production pour lesquelles il n'y a
pas de vente, ou des ventes faibles au regard des coûts afférents à ces activités.
Il est vrai, là aussi, que certaines formulations du SCN de 1968 sont ambiguës et
pourraient laisser croire que la nature du bien ou du service compte autant, pour
la séparation entre production marchande et production non marchande, que le
critère de la couverture des coûts par les ventes. En réalité, pour le SCN 1968,
ces deux éléments ne sont pas indépendants l'un de l'autre : par nature, il existe
des biens et des services toujours marchands, d'autres qui sont toujours non
marchands et enfin des biens et des services qui peuvent être produits sur une
base marchande ou sur une base non marchande2.
Dans ces conditions, l'assistance technique effectuée par une
administration publique au profit d'une administration publique étrangère ne
pourra être considérée comme une production de service marchand que si elle
donne naissance à une vente couvrant les coûts de production de l'administration
en cause. Si ce n'est pas le cas, on est en présence de la production d'un
service non marchand, quelles que soient les caractéristiques de cette production.
Ce sont là les conséquences logiques des principes du SCN de 1968 (principes qui
seront réaffirmés et précisés dans le SCN révisé) : en ce sens, l'assistance
technique doit être considérée comme un service mixte, c'est-à-dire pouvant être effectué sur une base marchande ou sur une base non marchande.
2 - Deux remarques complémentaires peuvent être faites ici. D'une part, le SCN de 1968 prévoit
l'existence d'une production non marchande de biens mais, en fait, il considère que toute
production de bien s'opère toujours (ou presque) sur une base marchande. D'autre part,
tous ces principes devraient être clarifiés et précisés dans le SCN révisé.
Dans le cas d'assistance technique de courte durée (les assistants
restent salariés de leur administration d'origine et résidents de leur pays
d'origine), la production non marchande est naturellement inscrite dans le compte
de cette administration. Aucun flux n'apparaît à ce titre dans les comptes du
pays bénéficiaire, si ce n'est les dépenses de consommation des assistants dans ce
pays (qui constituent des exportations) et les frais de mission pris en charge par
son administration (qui sont considérés comme une rémunération des salariés
versés à des non-résidents).
Dans le cas de l'assistance technique de longue durée, il faut
déterminer au préalable l'unité qui emploie les assistants eux-mêmes. Celle-ci ne
peut être que l'administration du pays bénéficiaire de l'aide, à moins d'assimiler
cette dernière à une enclave extra-territoriale de l'administration du pays
donateur ou encore à une organisation internationale, ce qui n'est pas
envisageable. C'est bien dans le compte de l'administration du pays bénéficiaire
qu'il faut inscrire une production de service non marchand, dont la principale
composante est constituée par la rémunération des assistants. En contrepartie,
celle-ci est équilibrée par un transfert en provenance de l'unité qui verse
effectivement les rémunérations, c'est-à-dire l'administration du pays d'origine. On
notera que ce traitement attribue la valeur ajoutée issue de l'assistance au pays
bénéficiaire et non au pays d'origine, ce qui est tout à fait logique s'agissant
d'une activité ayant une durée supérieure à un an. Il n'y a là aucun "subterfuge"
mais la simple conséquence des principes fondamentaux de la comptabilité
nationale (séparation "marchand-non marchand", détermination de la résidence des
activités et des unités...), qu'il s'agisse du SECN ou du SCN.
CONCLUSION
Au delà des problèmes posés par le traitement de l'aide alimentaire
et de l'assistance technique, l'article montre bien que le cadre théorique de la
comptabilité nationale fournit une description complète des conséquences des
différentes formes d'aide. On notera en particulier les analyses et les propositions
liées aux revenus et aux dépenses des assistants techniques. En outre, la notion de don de services qui structure la démarche en matière d'assistance technique,
si elle apparaît contestable au regard des principes mêmes de la comptabilité
nationale, n'en est pas moins intéressante en soi et illustre bien certaines des
insuffisances de cette comptabilité.
- 55 -
De telles insuffisances pourraient être surmontées dans trois
directions complémentaires. D'une part, en distinguant, pour chaque secteur
institutionnel, les unités qui sont parties prenantes des aides. Il s'agirait par
exemple de subdiviser le secteur des administrations publiques entre celles dites à
financements externes et celle dites à financements internes. Les ressources des
premières comprendraient les transferts liés à l'aide alimentaire, aux dons en
nature au profit de ces administrations (transferts courants ou en capital), aux
aides budgétaires directes ou encore aux rémunérations d'assistants techniques de
longue durée. On définit de même les emplois liés à ces ressources, ainsi que les
transferts entre les deux catégories d'administrations. Une démarche analogue
peut être mise en oeuvre pour les secteurs des ménages et des institutions sans
but lucratif. Ces subdivisions devraient apparaître explicitement dans la
publication des comptes des secteurs institutionnels.
La deuxième direction consiste à élaborer des tableaux de synthèse
des transferts liés aux aides. On obtient des tableaux permettant d'analyser et de
décomposer par secteur les transferts dits initiaux, contrepartie directe des
différentes formes d'aides, et des tableaux portant sur les transferts entre unités
résidentes issus du système des aides. Cette deuxième direction complète la
première en s'appuyant sur la distinction entre secteurs à financements internes
et secteurs à financements externes.
La troisième et dernière direction est celle de l'élaboration d'un
compte satellite des aides, qui permettrait de rassembler de manière exhaustive
les flux monétaires qui leur sont liés tout en les structurant de façon à faire
apparaître les grandeurs intéressant prioritairement les gestionnaires du domaine.
Il s'agirait ainsi de développer les éléments inclus dans le cadre central, donc
porteurs des contraintes induites par ce cadre, mais également des approches
comportant des degrés de liberté vis-à-vis de ce dernier. Pour cela, il est
nécessaire au préalable de définir une triple nomenclature :
celle des aides et de leurs formes ;
celle des agents financeurs ;
celle des opérations.
- 57 -
MESURER LA PAUVRE I E,
IDENTIFIER LES GROUPES VULNERABLES :
ENQUE'l'ES ET METHODES UTILISEES EN TUNISIE
par Jacques CHARMES'
La préoccupation des pouvoirs publics tunisiens à l'égard des populations
défavorisées est ancienne puisque des programmes de lutte contre la pauvreté tels
que le programme de développement rural ou celui de la famille productive
existent depuis 1970 et 1978.
La Tunisie est également, en Afrique, l'un des pays où la mesure des
niveaux de vie et de la pauvreté a été tentée depuis des dates assez reculées, et
à intervalles réguliers. Les 4 enquêtes sur le budget et la consommation des
ménages réalisées par l'Institut National de la Statistique (INS) en 1965-68, 1975,
1980 et 1985 permettent d'avoir, sur deux décennies, une vue diachronique du
phénomène -fait relativement exceptionnel sur ce continent-.
Selon la définition du seuil de pauvreté adoptée par PINS (95 dinars2
par personne et par an en milieu rural et 190 dinars en milieu urbain, pour
l'année 1985), la pauvreté absolue aurait touché, cette année-là, 7 % de la
population rurale et 8 % de la population urbaine (contre 14 et 12 %
respectivement en 1980, 18 et 27 % en 1975, 20 et 27 % en 1966). Mais la
fixation d'un seuil de pauvreté absolue, malgré des efforts d'objectivité
apparente, contient immanquablement un certain degré d'arbitraire et des
estimations moins optimistes peuvent être faites. En fixant le seuil à 172 D et
239 D, sur la base d'un panier minimum de subsistance, Radwan, Jamal et Ghose
(1987) aboutissent à des proportions de 31 et 16 % en 1985 (contre 42 et 22 %
en 1980, 43 et 34 % en 1975, 49 et 34 % en 1966).
1 Directeur de recherche à l'ORSTOM, Département des Relations Internationales et de la
Coopération de l'INSEE.
Cet article a été écrit à la suite d'une étude du Bureau international du travail sur les
seuils et profils de la pauvreté en Tunisie.
2 1 dinar tunisien = 10,8 francs français en 1985, 7,3 FF en 1987, 6,7 FF en 1989.
- 58 -
Selon les deux estimations, la pauvreté a reculé mais, alors qu'une
inversion est constatée entre milieu rural et milieu urbain selon la première
estimation, le phénomène reste à dominante rurale dans la seconde estimation et
traduit une persistance des inégalités.
Mais si elle permet de prendre la mesure et l'étendue du fléau,
l'approche par le seuil de pauvreté et les enquêtes budget-consommation ne
permet pas de connaître véritablement les profils de la pauvreté, c'est-à-dire les
caractéristiques des familles qui vivent dans cette condition (ce n'est d'ailleurs
pas son rôle, et la faiblesse des sous-échantillons concernés limite l'intérêt d'une
adjonction de questions supplémentaires dans une enquête déjà fort lourde). Or
une telle connaissance apparaît indispensable lorsque l'on cherche à définir des
politiques et des programmes adaptés en vue de contenir et faire régresser la pauvreté.
En 1986-87, la Direction du Développement Social du Ministère des
Affaires Sociales, s'appuyant sur le réseau dense de ses travailleurs sociaux, a
dressé une liste de familles nécessiteuses. Pour être inscrites sur la liste, les
familles devaient répondre à l'un des critères suivants :
ne pas avoir de soutien ;
- ne pas disposer de revenus, avec un chef en chômage du fait de son
incapacité à travailler ;
avoir un revenu insuffisant, compte tenu de sa taille.
Un comité local d'éligibilité examinait l'opportunité de l'inscription,
après étude des renseignements collectés par les travailleurs sociaux. Une liste de
près de 125.000 familles a ainsi été dressée. Un noyau dur de 80.000 familles a,
par la suite, été identifié, familles auxquelles un mandat trimestriel de 20 à 23
dinars est alloué, dans le cadre du programme "familles nécessiteuses".
Il est remarquable de constater que ce chiffre de 80.000 familles
correspond approximativement au nombre de familles vivant en-dessous du seuil de
pauvreté d'après l'enquête de PINS en 1985. Bien que différents des critères de
définition de la ligne de pauvreté, les critères d'éligibilité au programme "familles
nécessiteuses" débouchaient sur un effectif comparable. En outre, l'existence
d'une liste précise et mise à jour (les mandats devant parvenir à leurs
destinataires) permettait d'envisager le tirage d'un échantillon représentatif
- 59 -
auprès duquel passer un questionnaire statistique détaillé en vue de collecter
toutes les caractéristiques jugées utiles à la définition des profils de la pauvreté
en Tunisie et de politiques de lutte contre ce fléau.
Nous examinerons en premier lieu l'approche par les enquêtes budget-
consommation et le seuil de pauvreté qui permet de prendre la mesure du
phénomène et de connaître son évolution dans le temps. En outre, l'exploitation
de certaines données spécifiques sur les groupes de population ainsi définis peut
être d'une grande utilité, notamment par comparaison avec les résultats de
l'enquête sur les familles nécessiteuses.
En second lieu, seront présentés les résultats de l'enquête réalisée en
1988 par le Ministère des Affaires Sociales, conjointement avec le Bureau
International du Travail, dont les objectifs -spécialement orientés vers la
connaissance des familles nécessiteuses, de leurs handicaps et de leurs
potentialités- doivent permettre de répondre aux besoins d'orientation et de
définition d'une politique de lutte contre la pauvreté.
I - DIFFERENTES DEFINITIONS DU SEUIL DE PAUVRETE
Les niveaux de vie sont connus, en Tunisie, à travers la série
d'enquêtes budget-consommation réalisés par l'Institut National de la Statistique
(INS) en 1965-1968, 1975, 1980 et 1985, sur des échantillons de près de 5.000
ménages. Ces enquêtes ont pour principale utilisation le calcul des coefficients de
pondération de l'indice des prix à la consommation ainsi que le calcul de la
consommation finale des ménages nécessaire à l'établissement des équilibres
emplois-ressources par produit en comptabilité nationale. L'analyse de la
distribution des revenus, des niveaux de vie et de l'état nutritionnel de la
population constitue également une utilisation importante des données ainsi
collectées.
Les enquêtes budget-consommation ne portent pas sur les revenus (dont
on estime, sans doute à juste titre, qu'ils seraient extrêmement sous-estimés dans
un relevé simple et direct), mais sur les dépenses alimentaires et non alimentaires
(y compris en biens durables). Ces relevés se doublent, pour la moitié des
ménages de l'échantillon, d'une enquête alimentaire et nutritionnelle consistant en
la mesure précise des quantités des divers produits consommés à chaque repas.
- 60 -
Les dépenses alimentaires sont relevées par pesée durant une semaine entière,
pour chacun des 3 repas de la journée, alors que les dépenses non alimentaires
sont relevées à l'aide d'un questionnaire rétrospectif sur une durée d'un mois.
L'enquête dure une année, avec un échantillon tournant : si l'échantillon est de
n ménages, chaque semaine seront enquêtés n/52 ménages. Cette méthode permet
d'intégrer les variations saisonnières dans le processus même d'agrégation et
d'extrapolation.
La liaison entre les aspects nutritionnels et budgétaires est importante
puisque c'est elle qui permet d'envisager la définition d'un seuil de pauvreté.
L'idée qui est à l'origine du concept de seuil de pauvreté est la définition d'une
norme en-deçà de laquelle les ressources sont insuffisantes pour permettre la
satisfaction des besoins essentiels. Dans le domaine nutritionnel et alimentaire, de
telles normes ont été proposées par la FAO et l'OMS : elles portent sur les
besoins en les divers nutriments (calories, protéines, calcium, fer, vitamines). En
revanche, il n'existe pas de normes semblables pour les besoins non alimentaires
(habillement, logement, etc.). En ce qui concerne les besoins nutritifs, ce sont
évidemment les besoins en calories qui sont essentiels puisque leur non-couverture
non seulement se traduit par des carences, mais encore remet en question
l'activité et donc la survie de l'individu. C'est donc par rapport à un besoin
minimal de calories que va tout d'abord être défini le seuil de pauvreté.
En Tunisie, les divers plans de développement ont régulièrement fait
référence à un seuil de pauvreté dont la méthodologie de fixation n'a jamais été
réellement définie. Ce n'est que vers 1980 qu'est intervenue une première
tentative de fixation du seuil de pauvreté, à partir des résultats des enquêtes
budget-consommation. Depuis lors, comme toutes les variables statistiques qui ont
acquis une signification hautement politique, le seuil de pauvreté est devenu un
indice particulièrement sensible et suivi de l'évolution économique et sociale du
pays. C'est pourquoi il est important de se pencher sur la façon dont il est
établi : celle-ci n'a pas toujours été très clairement exposée, ni même toujours
rigoureusement suivie, et cette absence d'explication et ces hésitations ont
suscité de nombreuses controverses, des interprétations parfois erronées et de
nouvelles propositions.
On peut distinguer, aujourd'hui en Tunisie, quatre méthodes de calcul du
seuil de pauvreté.
- 61 -
1) la méthode dite "de la Banque Mondiale" a été élaborée et présentée
à l'occasion d'une mission de la Banque sur les aspects sociaux du développement
(Banque Mondiale, 1980). Il ne semble pas cependant que cette méthodologie ait
été présentée de façon précise ou même appliquée ailleurs qu'en Tunisie. En
réalité, les travaux entrepris par FINS et la FAO sur les résultats de l'enquête
budget-consommation de 1975 (Kamoun et Périssé, 1979) avaient déjà largement
préparé sa conception. Ces deux auteurs calculent, à partir des normes
FAO/OMS, la ration calorique minimale requise pour satisfaire les besoins
d'entretien de l'individu et le coût d'obtention de cette ration. Ce coût diffère
et peut être calculé pour les diverses classes de revenus à partir des résultats
des enquêtes budget-consommation. Connaissant le niveau calorique de la ration
alimentaire de la population divisée en classes de revenus (= de dépenses) à
partir de l'enquête nutritionnelle, et le niveau de la dépense alimentaire de cette
même population, à partir de l'enquête budgétaire, on en déduit un prix moyen de
la calorie qui apparaît être une fonction croissante du niveau de revenu. Bien
entendu, on observe que, dans chaque classe de revenu, une certaine fraction de
la population n'atteint pas le minimum énergétique requis, mais c'est dans les
classes de revenus les plus faibles que le déséquilibre touche la plus grande
proportion de la population. Dès lors, on peut essayer de connaître, compte tenu
des habitudes alimentaires et des contraintes budgétaires de cette ou de ces
classes de revenus, et du prix correspondant de la calorie, combien il en
coûterait à cette ou ces fractions de population pour pouvoir atteindre ce
minimum requis : ainsi est défini un seuil en-dessous duquel la ration énergétique
n'est pas atteinte ; et le prix de la calorie est un indice synthétique du régime
et des habitudes alimentaires, et des contraintes qui s'exercent sur la population
étudiée dans sa recherche de l'équilibre énergétique.
L'apport de la Banque Mondiale consistera à prendre les habitudes
alimentaires et la structure des dépenses de la catégorie des 20 % les plus
pauvres, ou plutôt du 20ème centile, comme bases de calcul du prix de la calorie
applicable au minimum requis ; et comme, même dans les classes de revenus les
plus faibles, une partie du revenu est consacrée à des dépenses non alimentaires,
un minimum sera fixé pour celles-ci qui correspond à la part qu'elles représentent
dans le total des dépenses du 20ème centile : en l'absence de normes dans ce
domaine, cette proportion est simplement appliquée au minimum alimentaire trouvé
précédemment.
- 62 -
Ainsi se trouve fixé le seuil de pauvreté. Si la méthode paraît simple
et logique, son application est plus délicate et implique parfois des choix qui
peuvent paraître discutables.
Tout d'abord, il apparaît bien que le coût moyen de la calorie n'a pas
été calculé sur l'ensemble des 20 % : ainsi en 1980, le 20ème centile se situait
en-dessous du seuil de dépenses de 150 dinars en milieu urbain et de 75 dinars en
milieu rural, et le prix moyen de la calorie a été calculé sur la population dont
la dépense se situe entre 145 à 155 dinars, et 70-80 dinars respectivement
(Oueslati, 1987). Cela permet d'éviter d'inclure dans les calculs les queues de
distribution qui comprennent souvent des cas aberrants : il en résulte un
relèvement du coût moyen de la calorie attribué aux personnes se situant en-
dessous du 20ème centile.
Inversement, le calcul des besoins énergétiques requis tend à être
minimisé. Il s'agit là d'un point crucial qui mérite d'être examiné de près. La
FAO et l'OMS ont établi des normes de besoins caloriques qui sont fonction de
l'âge, du sexe, des mesures anthropométriques (poids et taille) et du type
d'activité (légère, moyenne ou forte) des individus. Ces normes, appliquées à une
structure par âge, sexe et profession donnée, permettent de définir un niveau
moyen de besoins énergétiques pour un pays donné. Ce calcul, effectué par
Kamoun et Périssé, donne un chiffre de 2176 calories par personne et par jour
pour l'ensemble de la Tunisie en 1975. A titre de comparaison, Dubois et Odounfa
(1986) ont estimé à 2011 calories par personne et par jour les besoins
énergétiques des ménages urbains de Côte d'Ivoire en 1979. De tels chiffres sont
des moyennes : ils reflètent la structure démographique d'un pays à une période
donnée, et parce que cette structure est différente selon le milieu (urbain, rural)
et selon la classe de revenus, les besoins énergétiques requis diffèrent
également ; la raison pour laquelle les ménages pauvres du milieu rural ont moins
de besoins caloriques par personne que les ménages riches en milieu urbain est
qu'ils constituent plus souvent des familles nombreuses où le nombre d'enfants en
bas âge est important relativement aux adultes. En Tunisie et en 1975, les
ménages pauvres en milieu rural avaient des besoins énergétiques évalués à 2042
calories/personne/jour contre 2436 pour les ménages urbains les plus riches.
Le point en discussion est le suivant : la norme FAO/OMS a été fixée
de façon à correspondre à l'apport énergétique requis pour assurer le besoin
d'entretien et de croissance chez les enfants, et les besoins d'entretien chez les
- 6 3 -
adultes, tout en leur fournissant le surcroît d'énergie nécessaire au minimum
d'activité indispensable à l'existence. "On admet que, si l'apport réel de la ration
journalière est en dessous de ce besoin minimum, les individus qui composent le
ménage considéré ne pourraient guère s'adapter à une réduction d'énergie
alimentaire par un ralentissement de l'activité physique volontaire, d'où un risque
nutritionnel, c'est-à-dire une probabilité de carence énergétique" (Oueslati, 1987).
L'Institut National de Nutrition et de Technologie Alimentaire (INNTA) a vivement
critiqué cette interprétation du niveau des besoins requis car leur limitation à
l'exercice d'une activité légère est en contradiction avec les objectifs
d'accroissement de la production et de la productivité que se fixe la politique de
développement (INNTA, 1979).
En réalité, il semble que le minimum requis retenu par PINS corresponde
à un besoin énergétique excluant toute dépense physique, le passage en-dessous
du seuil ne permettant pas une adaptation par diminution de l'activité : Kamoun
et Périssé avaient estimé ce seuil à 1895 calories en milieu urbain et 1822
calories en milieu rural, en 1975. C'est bien là le niveau minimum retenu pour le
calcul du seuil de pauvreté (1868). A peu de choses près (Oueslati, 1987), c'est
ce même minimum qui a été retenu en 1980 (1870 et 1830 calories), alors que les
changements dans la structure démographique par milieu rendent fort improbable
un tel hasard.
On peut donc conclure de ce qui précède que la méthode INS/Banque
Mondiale constitue une approche intéressante et valable de la pauvreté, mais on
doit peut-être lui reprocher d'avoir fixé le minimum des besoins énergétiques
requis, et donc le seuil de pauvreté, à un niveau trop bas.
C'est exactement le reproche inverse que l'on peut adresser à la
méthode de l'INNTA.
2) La méthode de l'Institut National de Nutrition et de Technologie Alimentaire consiste à déterminer non pas un revenu minimum, mais le revenu
souhaitable qui permettrait d'acquérir une ration alimentaire équilibrée, non
seulement du point de vue calorique, mais aussi dans divers autres nutriments
(protéines, vitamines, calcium, fer).
A partir des produits les plus usuellement consommés, l'INNTA définit la
ration alimentaire équilibrée qui est composée de :
62 % de calories glucidiques (céréale, sucre...) ;
28 % de calories lipidiques (huile et corps gras) ;
10 % de calories protidiques (viandes, poissons, lait, oeuf...).
A titre de comparaison, ces proportions étaient respectivement de
88 %, 11 % et 1 % pour les ménages ruraux les plus pauvres en 1975 (Kamoun
et Périssé, 1979).
Pour atteindre cet équilibre nutritionnel, la dépense alimentaire
monétaire aurait dû s'élever à 102 dinars par personne et par an en 1980. Près
des deux tiers de la population se seraient situés en-dessous de ce seuil, cette
année-là. C'est dire qu'un tel seuil peut difficilement être considéré comme un
minimum, mais plutôt comme un objectif à atteindre.
Appliquant la méthode de calcul du seuil INS-Banque Mondiale (minimum
de 1870-1830 calories, coût de la calorie au 20ème centile) au régime alimentaire
recommandé par l'INNTA, tout en négligeant les besoins en autres nutriments, la
sous-commission de synthèse des revenus des travaux préparatoires du VIe Plan
(Ministère du Plan, 1981) était parvenue à un seuil de pauvreté légèrement plus
élevé (voir tableau 2 ci-après).
3) Le Bureau International du Travail, dans le cadre d'une mission
conjointe avec la Ligue des Etats Arabes sur les transformations structurelles et
l'emploi rural en Tunisie, a proposé une méthode proche de celle de l'INNTA,
mais plus réaliste (Radwan, Jamal et Ghose, 1987). Critiquant le principe de
l'utilisation d'une enquête budget-consommation pour définir un seuil de pauvreté,
ces auteurs partent d'un niveau requis des besoins énergétiques égal à 2200
calories par personne et par jour et cherchent à évaluer le coût d'obtention des
ces calories à travers un régime (un panier) alimentaire plus proche de la réalité
observée que celui de l'INNTA, mais aussi plus équilibré que celui du 20ème
centile qui apparaît insuffisant pour un pays à revenu intermédiaire comme la
Tunisie. Ce régime correspondrait à celui des ménages se situant au niveau du 30ème centile.
- 65 -
Tableau 1 : Composition de la ration alimentaire selon les méthodes de calcul du seuil de pauvreté, 1975 (en %).
Composantes de la ration calorique
INS Banque Mondiale (20ème centile)
BIT (30ème centile)
INNTA
Calories glucidiques 88 78 62
Calories lipidiques 11 18 28
Calories protidiques 1 4 10
Total ration 100 (2000 cal.) 100 (2200 cal.) 100 (2200 cal.)
Sources : Kamoun et Périssé (1979) Radwan, Jamal et Ghose (1987) Ministère du Plan (1981)
Une autre différence fondamentale entre la méthode du BIT (et de
l'INNTA) et celle de l'INS-Banque Mondiale est que la première estime le coût
des apports caloriques à partir des prix des produits (en différenciant selon le
milieu urbain/rural) et non à partir du prix moyen de la calorie correspondant au
20ème centile. Le recours aux prix du marché peut être délicat, notamment
lorsqu'il s'agit de différencier selon les milieux, mais il présente l'avantage
incontestable de faciliter les comparaisons d'une année à l'autre, alors que le
coût moyen de la calorie au 20ème centile reflète à la fois les prix et les
régimes alimentaires. Il est vrai aussi que l'enquête budget-consommation pourrait
fournir des estimations de prix par produit selon le milieu.
L'utilisation des prix du marché pour calculer le seuil de pauvreté à
partir d'un panier déterminé ou non sur la base d'une enquête budget-
consommation permet de faire glisser facilement le seuil dans le temps et de
mesurer l'évolution du phénomène. Au contraire l'interpolation des valeurs du
seuil aux années 1966, 1980 et 1985, à partir de sa valeur calculée en 1975, par
le glissement de l'indice des prix à la consommation familiale est une méthode
moins satisfaisante dans la mesure où les catégories les plus pauvres ont une
structure de consommation différente de celle de l'ensemble de la population. Elle
a eu pour effet, selon Radwan, Jamal et Ghose, de fixer à un niveau plus faible
qu'il n'aurait dû être le seuil de pauvreté pour les années interpolées.
- 66 -
4) LINS a ainsi calculé des seuils de pauvreté relative. Du fait de son
double contenu (prix et régime alimentaire), le coût de la calorie ne permet pas
de calculer de façon comparable un seuil de pauvreté pour chaque année
d'enquête. Ou plutôt, ce calcul donne une autre signification au seuil de pauvreté
puisqu'il intègre dans l'évolution les changements intervenus dans les habitudes
alimentaires et dans le régime énergétique.
Cette approche, appelée "seuil de pauvreté relative", par opposition au
seuil de pauvreté absolue calculé sur une année de référence que l'on interpole
ensuite, consiste pour chaque année d'enquête à calculer le besoin énergétique
minimum, le coût moyen de la calorie du 20ème centile et un seuil de pauvreté
indépendant de ceux des autres années.
Il est clair que l'importance et les caractéristiques de la pauvreté ne
sont pas indépendantes des méthodes de mesure adoptées.
II - SEUILS, DIMENSIONS, EVOLUIION DE LA PAUVRETE SELON LES DIVERSES APPROCHES ET CARACTERISATION DE LA POPULATION CONCERNEE
Dans un excellent article, Shariff (1986) a passé en revue les thèses et
les méthodes de mesure du niveau de subsistance. La diversité des approches,
l'écart entre leurs résultats, ne doivent pas être interprétés comme une
impossibilité à saisir le phénomène de la pauvreté, mais bien comme des avancées
et des tâtonnements dans une démarche qui se cherche.
Ainsi les écarts existants dans les tableaux 2 et 3 ne doivent pas être
considérés comme des résultats décourageants, mais comme la preuve de l'intérêt
extrême accordé à la mesure de la pauvreté et à la lutte contre ce fléau.
- 67 -
Tableau 2 : Seuils de pauvreté selon les diverses méthodes (en dinars/personne/an)
Années
Méthodes Milieu
1966-67 1975 1980 1985
Urbain Rural U R U R Absolu U R
Relatif U R
INS-Banque Mondiale (*)
BIT
INNTA
INNTA/INS-BM
63 31
68 47
87
101
43
71
120 60
151 109
208
130 70
190
239
95
172
220 105
(*) Pour 1966-67 et 1975, il existe deux estimations différentes pour la Banque Mondiale et PINS. Nous ne retenons plus ici que le seuil calculé par FINS selon la méthode dite de la Banque Mondiale.
Sources : INS, Enquêtes budget-consommation 1980 et 1985. BIT, Radwan, Jamal et Ghose (1987) Ministère du Plan, sous-commission de synthèse des revenus (1981).
En 1980 et 1985, le seuil BIT correspondait à un accroissement de
26 % par rapport à la valeur du seuil INS en milieu urbain, et de 81 % en milieu
rural. Globalement, cela se traduit par un écart de plus de 15 points dans la
proportion de la population vivant en-dessous du seuil de pauvreté, en 1975, 1980
et 1985 (cf. tableau 3).
On notera que si, en 1980, FINS avait adopté la norme de 2200 calories
pour fixer le seuil de consommation alimentaire, le seuil de pauvreté se serait
trouvé fixé à 133 dinars en milieu urbain et à 67 dinars en milieu rural (au lieu
de 120 et 60, respectivement).
- 68 -
Tableau 3 : Effectifs et proportions de la population vivant en-dessous du seuil de pauvreté, selon les diverses méthodes.
Années 1966-67 1975 1980 1985
Effectifs Absolu Relatif Méthodes Milieu en
milliers % N % N % N % N %
INS-Banque Urbain 786 700 26,5 393 11,8 325 8 485 12,5 Mondiale Rural 747 523 18,0 430 14,1 229 7 314 9,6
U + R 1533 33,0 1223 22,2 823 12,9 554 7,7 799 11,2
BIT U 34 845 43 599 42 602 31 R 49 1220 34 1220 22 1020 16
U + R 2065 37,5 1819 28,6 1622 22,7
INNTA U + R 84 68 64
INNTA/ INS.BM U 506 18
R 726 21 U + R 1232 20
Sources : idem Tableau 2.
Selon VINS, les effectifs de population vivant en-dessous du seuil de
pauvreté auraient diminué de près des 2/3 depuis 1966-67, passant de 33 % à
7,7 %, et de plus de moitié depuis 10 ans (1975-85). Les pauvres urbains ont
toujours été plus nombreux que les ruraux, sauf en 1980 ; en revanche, alors que
la pauvreté affectait une plus faible proportion de la population en milieu urbain
par rapport au milieu rural en 1980 (11,8 % contre 14,1), l'inverse s'observait en
1975 (26,5 % contre 18,0) et en 1985 (8 % contre 7).
Selon le BIT au contraire, la population pauvre n'a diminué que de
21 % en 10 ans (1975-85), passant de 37,5 % de la population totale à 22,7 %.
Les ruraux ont toujours représenté la plus grande fraction de la population
pauvre (entre 60 et 68 %), mais la proportion des pauvres a toujours été plus
importante en milieu urbain qu'en milieu rural. En 1985 encore, la pauvreté aurait
touché 31 % de la population urbaine, ce qui est considérable, contre seulement
16 % de la population rurale. En fait, la stabilisation des effectifs de pauvres en
milieu urbain autour de 600.000 personnes semble traduire des difficultés à lutter
efficacement contre ce fléau dans les villes.
- 69 -
De la fixation du seuil de pauvreté dépend donc la vision que l'on peut
avoir des progrès ou des retards enregistrés depuis 20 ans : que 8 % seulement
de la population vivent en-deçà du seuil de pauvreté, c'est là un résultat
remarquable ; que la pauvreté touche un peu moins de 25 % de la population
d'un pays à revenu intermédiaire est par contre une observation qui mérite d'être
relevée.
Un certain nombre de caractéristiques de la pauvreté peuvent être
mises en relief à partir des résultats de la dernière enquête de 1985. La
pauvreté touche certaines régions, certaines catégories socio-professionnelles et
certains types de ménages plus que d'autres. Les gouvernorats du Nord-Ouest, du
Sud et du Centre-Ouest sont ceux qui fournissent les plus forts contingents de la
population défavorisée, et le Sud est la seule région à avoir connu une
aggravation de la pauvreté en termes absolus. C'est parmi les chômeurs que l'on
trouve le plus grand nombre d'individus appartenant à des ménages pauvres
(18,6 % des effectifs de la catégorie), puis viennent les ouvriers agricoles
(12,8 % de la catégorie) et les ouvriers non agricoles (9,1 %) ; c'est parmi les
employés et cadres moyens qu'il s'en trouve le moins (1,1 % de la catégorie). En
1985 toujours, les ménages de 5 personnes et plus représentaient 95,1 % de la
population défavorisée alors que les ménages de 1 et 2 personnes n'en
représentaient guère que 0,7 %, soit à peine 5 % des ménages pauvres.
Le tableau 4 ci-après présente un certain nombre de caractéristiques
démographiques des ménages pauvres.
Tableau 4 : Caractéristiques démographiques des ménages selon le montant de la dépense annuelle par tête (seuil de pauvreté), en 1985.
Milieu Urbain Rural Ensemble urbain-rural
Seuil Caractéristiques
<190D <95D <seuil de Ensemble pauvreté population
Taille du ménage 6,98 7,59 7,22 5,79
Nombre d'actifs occupés 1,08 1,09 1,08 1,35
Nombre d'enfants scolarisés 2,09 2,52 2,26 1,38
- 70 -
La taille du ménage pauvre est en moyenne très élevée : 7,22 personnes
(spécialement en milieu rural : 7,59) contre 5,79 pour l'ensemble de la population
tunisienne. Le nombre d'actifs occupés est nettement inférieur à la moyenne
nationale (1,08 contre 1,35), alors que le nombre d'enfants scolarisés est très
supérieur (2,26 contre 1,38).
L'image de la pauvreté qui ressort de ce tableau est donc celle d'une
famille nombreuse dont seul le chef est actif et dont les enfants sont pour moitié
non scolarisés ou en dessous de l'âge scolaire et, pour l'autre moitié, sont
scolarisés.
*
En définitive, on ne doit pas oublier que le seuil de pauvreté
représente simplement une limite en-deçà de laquelle une personne a de fortes
chances de ne pas pouvoir satisfaire ses besoins les plus essentiels et de
connaître des carences alimentaires. Mais il peut se faire qu'en-dessous de ce
seuil certaines personnes ou certaines familles arrivent à satisfaire ces besoins,
de même qu'il peut arriver qu'en dessus de ce seuil, certaines personnes ou
certaines familles ne parviennent pas à les satisfaire. Le seuil définit donc une
probabilité de pauvreté.
Dans l'enquête sur les familles nécessiteuses qui va être maintenant
présentée, il ne s'agit plus, en principe, d'une simple probabilité, mais bien d'une
certitude : les familles qui se trouvent sur la liste y ont été inscrites parce
qu'elles sont objectivement considérées comme pauvres. Dès lors il est intéressant
d'étudier plus précisément leurs caractéristiques afin de pouvoir mieux leur venir
en aide en premier lieu, mais aussi afin de comparer le profil qui en ressort avec
celui que nous donnent les enquêtes budget-consommation de PINS. Car si l'on
peut être certain que les familles inscrites sur la liste par les travailleurs
sociaux répondent bien aux critères de la pauvreté, en revanche on ne peut être
assuré que toutes les familles répondant à ces critères aient été recensées sur la
liste. Et l'intérêt des enquêtes budget-consommation, par rapport à la liste, est
de pouvoir donner une mesure du phénomène sur la base d'un seuil de pauvreté
que les enquêtes sur les familles nécessiteuses pourraient permettre de fixer de
façon plus objective.
- 71 -
DI - PROFILS DE LA PAUVRETE EN TUNISIE, D'APRES L'ENQUETE AUPRES DES FAMILLES NECESSITEUSES
1) Méthodologie de l'enquête
a) La liste des familles nécessiteuses comme base de sondage
Les travailleurs sociaux de la Direction du Développement Social ont
pour tâche d'identifier les familles en situation de pauvreté et de leur venir en
aide à travers un certain nombre de programmes sociaux. En fait, les programmes
existants supposaient qu'il existait une possibilité d'aider ces familles à sortir de
leur situation de pauvreté, en s'appuyant sur certaines de leurs potentialités et
en leur donnant par exemple un petit équipement et des matières, ou du petit
bétail, etc. (famille productive, programme de développement rural, emploi des
jeunes...), ou encore ils visaient à lutter contre un aspect particulier de la
pauvreté (dégourbification, handicapés, bourses scolaires, etc.).
En 1986-87, la Direction du Développement Social a fait dresser par ses
travailleurs sociaux une liste des familles nécessiteuses censée contenir des
familles qui ne bénéficient d'aucun programme existant et qui se caractérisent
par l'absence de soutien, ou l'absence de revenu avec un chef en chômage du
fait de son incapacité à travailler ou encore une insuffisance de revenus, compte tenu de la taille de la famille.
Une fois l'identification effectuée par les travailleurs sociaux,
l'inscription devait être prononcée par un comité local d'éligibilité qui enregistra
ainsi 125.000 familles, parmi lesquelles un noyau dur de 80.000 fut finalement
retenu, afin de recevoir un mandat trimestriel de 20-25 dinars, au titre du
programme des "familles nécessiteuses". Il s'agit donc d'une liste parfaitement
mise à jour, puisque le mandat doit parvenir à son destinataire.
b) Choix de l'échantillon
C'est sur cette base qu'a été réalisée, en 1988, l'enquête dont les
résultats sont ici analysés : l'échantillon a été tiré sur les listes des 6 localités
censées présenter la diversité des situations de pauvreté, et appartenant à
- 72 -
chacune des 6 régions économiques : Ettadhamen (gouvernorat de l'Ariana,
banlieue de Tunis), Kalaa Kbira (gouvernorat de Sousse), El Hamma (Gabès), Tela
(Kasserine), Sejnane (Bizerte), Nefza (Béja). Le tableau 5 suivant montre la
répartition de l'échantillon dans ces 6 localités et le tableau 6 en précise la
répartition selon le milieu urbain/rural.
Tableau 5 : Population-mère, échantillon et taux de sondage
Localités Population
mère (liste)
Echantillon (liste)
Echantillon Taux de sondage global
Taux de sondage liste complé-
mentaire INS
complé- mentaire
DDS
final réalisé
Ettadhamen 772 313 5 20 338 43,8 40,5 Kalaa Kbira 336 124 2 19 145 43,2 36,9 El Hamma 605 214 10 11 235 38,8 35,4 Tela 293 130 8 19 157 53,6 44,4 Sejnane 375 139 8 18 165 44,0 37,1 Nefza 715 240 9 15 264 36,9 33,6
Ensemble 3096 1160 42 102 1304 42,1 37,5
L'échantillon de 1.304 familles est constitué pour 89,1 % (1.160) à
partir de la liste des familles nécessiteuses. Deux échantillons de contrôle y ont
été adjoints : 42 ménages de l'enquête INS 1985 vivant dans les localités
enquêtées en dessous du seuil de pauvreté et non inscrits sur la liste, et 102
familles non inscrites sur la liste, mais présentant des caractéristiques apparentes
indiquant qu'elles pourraient y être éligibles. Ces deux échantillons
complémentaires ont été mis en place dans un but de contrôle. Les résultats ici
présentés portent sur le seul échantillon tiré de la liste. Il pouvait être fait
référence aux échantillons de contrôle, à travers l'échantillon global, lorsqu'il
apparaissait nécessaire d'insister sur une caractéristique particulière des familles
de la liste (assez différente de celle qui ressort de l'échantillon global) ou au
contraire pour montrer que la référence à l'échantillon global ne modifiait pas
énormément le résultat qui ressortait de l'échantillon-liste.
- 73 -
Au total, l'échantillon porte sur 37,5 % des familles pauvres des
localités enquêtées, soit moins de 1,5 % de l'ensemble de la liste. Cependant, le
choix des localités, dans des régions différentes, assure une représentativité
suffisante de l'échantillon.
D'une façon générale, le taux de sondage varie d'une localité à
l'autre : dans les localités où le nombre de familles pauvres est peu important,
on a augmenté le taux de sondage de manière à ce que l'échantillon soit
suffisant, et inversement on a diminué le taux de sondage dans les localités où
les familles pauvres étaient nombreuses. Deux exceptions cependant : Ettadhamen,
localité populaire de la banlieue de Tunis, pour laquelle le taux de sondage a été
augmenté afin de pouvoir saisir la variété des situations de pauvreté urbaine ; et
Nefza, localité rurale où, au contraire, le taux de sondage a été diminué en
raison de la relative similitude des situations de pauvreté rurale. La structure de
l'échantillon reste cependant peu différente de celle de la liste, de sorte qu'il
n'a pas été jugé nécessaire de redresser les résultats et que l'échantillon a été
analysé tel qu'il se présente. Cela implique que le critère du milieu (urbain/rural)
est particulièrement important à prendre en compte dès que l'on veut parvenir à
un certain degré de généralisation. Le tableau 6 donne la répartition de
l'échantillon selon ce critère du milieu.
Tableau 6 : Répartition de l'échantillon par localité et par milieu en effectifs et en pourcentage
Localités
Milieu
Ettadha- men
Kalaa Kbira
El Hamma
Tela Sejnane Nefza Ensemble
Urbain 297 105 151 48 15 616 (94,89) (84,68) (70,56) (36,92) (10,79) (0,00) (53,10)
Rural 16 19 63 82 124 240 544 (5,11) (15,32) (29,44) (63,08) (89,21) (100,00) (46,90)
Ensemble 313 124 214 130 139 240 1160 (26,98) (10,69) (18,45) (11,21) (11,98) (20,69) (100,00)
- 74 -
c) Le questionnaire relevait d'une part des données individuelles sur les
divers membres de la famille (caractéristiques démographiques, d'éducation-
formation, handicaps, activités principale et secondaire et revenus
correspondants), ainsi que des données globales ou contextuelles concernant
l'ensemble de la famille (logement, scolarité, dépenses notamment de
consommation alimentaire, sources et montant des revenus autres que ceux
provenant de l'activité, aides et programmes reçus, formes d'aide souhaitées...).
2) Caractéristiques de la pauvreté chez les familles nécessiteuses
Les profils de la pauvreté d'après l'enquête sur les familles
nécessiteuses peuvent être décrits à partir des caractéristiques des familles elles-
mêmes (taille, nombre d'actifs, nombre d'enfants scolarisés, revenus...) et des
caractéristiques de leurs chefs ou de leurs soutiens, ainsi que celles de leurs
membres : la description des caractéristiques individuelles doit permettre de
déceler certaines potentialités (âge, formation, activité) ou certains handicaps
(âge, analphabétisme, chômage, invalidité), tandis que les caractéristiques
collectives permettent de mieux comprendre comment s'opèrent les équilibres
entre revenus et dépenses et quel est le rôle joué par les programmes d'aide.
Les résultats de l'enquête font ressortir deux noyaux durs de la
pauvreté.
Un premier noyau dur important, qui représente 36 % des familles
nécessiteuses, concerne les familles de 1 ou 2 personnes, vieilles femmes vivant
seules et qui, par suite de veuvage, divorce ou maladie du conjoint, se retrouvent
sans aucune ressource et sans aucune possibilité d'entreprendre une activité
permettant d'assurer les moyens minimaux d'existence. Pour ces catégories de
familles, le mandat du programme de la famille nécessiteuse est un impératif et
son montant devrait être revu en hausse.
Un second noyau dur de la pauvreté, qui représente 29 % des familles
nécessiteuses, semble être constitué par des familles nombreuses (6 personnes et
plus, la taille 5 apparaissant comme un seuil critique) pour lesquelles la
déchéance provient de la perte d'emploi ou de la maladie. Les potentialités de
ces familles existent et il s'agit de les mobiliser au mieux en essayant d'intégrer
leurs actifs dans des petits métiers par la mise à disposition d'un capital ou de
- 75 -
moyens de production, en parallèle avec d'indispensables actions de formation et
de suivi.
Les familles de taille intermédiaire (3 à 5 personnes, particulièrement
de taille 5) constituent également un domaine d'intervention privilégié pour
l'action sociale dans la mesure où de fortes potentialités y existent du fait que
la proportion des actifs y est importante et que la déchéance provient d'une
insuffisance des ressources en regard des besoins en constante augmentation (avec
l'arrivée du Sème enfant notamment). Il est symptomatique que le revenu total
par tête augmente jusqu'à la taille 4, à partir de laquelle il se met à décroître.
Il est clair qu'un effort doit être fait à ce niveau, effort susceptible de contenir
l'augmentation du nombre des familles nécessiteuses. En effet, autant il paraît
difficile, pour les personnes ou couples âgés, d'agir autrement que par simple
distribution de ressources monétaires, autant il convient de donner aux
familles nombreuses ou à celles qui sont en passe ou en train de le devenir, les
moyens de se procurer par elles-mêmes et par leur propre activité les ressources
dont elles ont besoin.
Afin de mieux comprendre et de mieux cerner ces profils de la
pauvreté, il est intéressant de résumer les principales caractéristiques de ces
diverses catégories de familles à partir de ce qui pourrait constituer une grille
d'évaluation des risques de pauvreté (tableau 7).
On remarque le très fort taux d'analphabétisme des chefs de famille
(96,4 %) qui n'est pas sans relation avec leur âge : 76 % d'entre eux ont plus de
50 ans. Egalement lié à l'âge est le taux de veuvage et de divorce (52,3 %).
L'absence de formation est tout aussi patente (97,3 %) surtout si l'on considère
que la formation reçue dans la famille (et qui concerne la plupart du temps
l'apprentissage sur un métier à tisser) n'en est pas réellement une. Le poids des
handicaps est également énorme : 39,3 % des chefs de famille sont handicapés et
cette caractéristique n'est pas uniquement liée à l'âge. De même le taux
d'inactivité et le taux de chômage sont très élevés.
En ce qui concerne les membres des ménages (y compris le chef de
famille), leur taux d'analphabétisme reste élevé, bien que moindre que pour les
seuls chefs. Mais si l'on considère que le fait de ne pas avoir achevé le cycle
primaire équivaut à être analphabète, alors les taux restent très élevés (bien que
moindres que les chiffres qui apparaissent sur le tableau et qui incluent les
- 76 -
jeunes en cours d'étude). Les formations non scolaires sont un petit peu plus
fréquentes que chez les seuls chefs de famille, mais guère plus. Les personnes à
charge (inactives et non scolaires) représentent le quart des effectifs (et 20 %
dans les familles de plus de 2 personnes) alors que les enfants d'âge scolaire
représentent le tiers des effectifs dans les familles de 6 personnes et plus. Le
poids des handicapés est également très élevé (16,5 % de la population enquêtée,
contre 0,9 % pour l'ensemble de la population tunisienne). Les taux de chômage
sont particulièrement forts puisque le fléau frappe en moyenne 47,1 % des actifs.
Les actifs occupés exercent leur activité dans les petits métiers et le
tâcheronnage (45 %) ou comme salariés (30 %), mais près de 40 % d'entre eux ne
l'exercent que pendant moins de 6 mois de l'année (et 18 % pendant moins de 3
mois) pour des gains n'excédant pas 50 dinars par mois dans 56 % des cas.
Le revenu familial par tête et par mois est en moyenne de 13 dinars :
il est à son maximum dans les familles de taille 3 et 4, et commence à baisser à
partir de la taille 5 dont on a déjà dit qu'elle constituait un seuil critique.
La maladie apparaît comme l'une des causes principales de la chute
dans la situation de pauvreté (34,3 % des réponses). Vient ensuite la perte de
l'emploi (23,7 %), puis les décès, accidents et divorces (15,4 %). Parmi les autres
raisons, la vieillesse est une cause fréquemment avancée. Accéder à un emploi ou
à des moyens de travail est le souhait de plus de 40 % des familles interrogées ;
particulièrement parmi celles où la population des personnes d'âge actif est
élevée (56 % dans les familles de taille 3 à 5 et 43 % pour les tailles 6 et
plus). Mais pour le plus grand nombre et particulièrement pour les familles de
taille 1 et 2, c'est l'augmentation du montant du mandat qui représente la seule
solution.
D'une façon générale, le tableau 7 montre que le risque (représenté par
le pourcentage d'une caractéristique) diminue avec la taille de la famille, sauf en
ce qui concerne les caractéristiques suivantes : veuvage (ou divorce), chômage,
perte d'emploi. On ne peut cependant pas dire qu'il suffit qu'une famille réponde
à l'une ou à quelques-unes de ces caractéristiques pour appartenir à la catégorie
des familles nécessiteuses. Et il est peu probable qu'il soit nécessaire qu'elle
réponde à toutes à la fois pour entrer dans cette catégorie.
- 77 -
Tableau 7 : Grille d'évaluation des risques de pauvreté en %
Taille de la famille
Caractéristiques
1 et 2 3 à 5 6 et + Ensemble
Chef de famille
. Taux d'analphabétisme 98,8 96,6 93,2 96,4 y c. primaire non achevé 99,8 99,0 96,8 98,6
. Sans formation 91,0 85,5 88 0 , 88,2 y c. formation famille 98,5 97,2 96,0 97,3
. Agés de plus de 50 ans 91,3 69,5 65,1 76,0
. Veufs ou divorcés 63,4 52,7 71,0 52,3
. Handicapés 42,9 36,6 28,3 39,3
. Inactifs 89,9 77,2 61,5 77,2
. Taux de chômage 21,4 30,4 35,1 31,3
Individus
. Taux d'analphabétisme 91,8 59,7 45,1 56,8 y c. primaire non achevé 96,5 85,2 79,6 83,9
. Sans formation 88,9 79,5 78,4 80,6 y c. formation famille 97,7 90,4 88,9 91,0
. Age actif 35,8 59,1 47,3 49,8
. Age scolaire 0,3 21,1 33,3 25,3
. Age inactif et non scolaire 61,1 19,8 19,4 24,8
. Handicapés 37,3 16,9 11,2 16,5
. Inactifs 83,4 49,3 37,7 48,3
. Taux de chômage 35,8 48,7 47,4 47,1
Familles
. Niveau de revenu par tête en D par mois
12 14 12 13
. Causes de la pauvreté Perte emploi 11,7 28,4 32,8 23,7 Maladie, décès, divorce 53,4 50,9 43,2 49,6
. Souhaits Emploi 4,3 20,7 18,1 13,4 Moyens de travail 16,0 35,3 25,5 26,9
- 78 -
Il reste à savoir quelles sont les conjonctions de risques qui entraînent
le plus fréquemment les situations de pauvreté. De même, certaines familles
présentent des caractéristiques qui sont à faible risque : il serait intéressant de
mieux comprendre pourquoi les familles dont le chef a moins de 50 ans, a reçu
une éducation primaire ou post-primaire, n'est pas handicapé ni au chômage, sont
néanmoins dans une situation de pauvreté : et d'abord existe-t-il des familles
présentant de telles caractéristiques ou bien une telle conjonction de
caractéristiques ne se retrouve-t-elle jamais ou rarement ? Ainsi l'analyse des
correspondances peut apporter une connaissance déterminante pour la
compréhension des situations de pauvreté et une telle analyse devrait constituer
une priorité pour la phase à venir d'autant plus qu'elle devrait permettre de
mieux cerner les situations de pauvreté conjoncturelles ou accidentelles auxquelles
il est en principe plus facile de remédier.
L'enquête sur les familles nécessiteuses dont les résultats viennent
d'être présentés permet une meilleure connaissance des critères de pauvreté, et
l'étude de la répartition des risques mis en relief par l'enquête sur l'ensemble de
la population (à partir d'enquêtes nationales auprès des ménages) devrait
permettre de prendre une plus juste mesure de l'extension du fléau et des moyens
à mettre en oeuvre pour y remédier.
S'il est certain que la combinaison des deux approches présentées
mérite d'être poursuivie et encouragée, il convient toutefois de s'interroger
auparavant sur les éventuelles distorsions que présentent les résultats obtenus à
partir de ces deux types d'enquête.
IV - DISTORSIONS ET CONVERGENCES DANS LES RESULTATS DES ENQUETES BUDGET-CONSOMMATION ET DE L'ENQUETE SUR LES FAMILLES NECESSITEUSES
La comparaison de certaines caractéristiques des familles pauvres se
situant en dessous de la ligne de pauvreté dans les enquêtes budget-
consommation, avec celles des familles nécessiteuses dans l'enquête spécifique fait
apparaître une importante distorsion concernant la taille moyenne de la famille
et sa composition, ainsi qu'il ressort du tableau 8 ci-après :
- 79 -
Tableau 8 : Caractéristiques moyennes des familles pauvres selon les enquêtes
Enquête budget- consommation 1985
Enquête familles nécessiteuses 1988
Ensemble population
1985 Caractéristiques
Taillé 7,22 4,09 5,79
Nombre d'actifs occupés 1,08 0,45 1,35
Nombre d'enfants scolarisés 2,26 0,84 1,38
Nous avons déjà vu que la population vivant en dessous du seuil de
pauvreté selon l'enquête budget-consommation était essentiellement (à plus de
95 %) constituée de familles de 5 personnes et plus, alors que cette même
catégorie ne représente guère plus de 40 % des familles nécessiteuses. Dans cette
population, les familles de 1 ou 2 personnes (constituée de vieillards et de
handicapés) représentent près de 36 % de l'ensemble. La répartition des familles
nécessiteuses a donc une allure bi-modale (d'autant plus que la catégorie des
familles de 3-4 personnes qui représente 24 % de l'ensemble est une catégorie de
transition vers l'une ou l'autre extrémité) qui explique donc la faiblesse des
caractéristiques moyennes.
Il est important de s'interroger sur les raisons de ces différences dans
celles-ci ne sont pas claires ni
ou en couple, les femmes divorcées
classique des services de l'action
la composition des deux populations, mais
évidentes : les personnes âgées vivant seules
et les handicapés constituent une clientèle
sociale et il est donc normal que cette catégorie soit bien représentée sur la
liste, d'autant plus que l'évolution de cette population est lente et prévisible. En
revanche, les familles nécessiteuses de 5 personnes et plus représentent une
catégorie plus nombreuse en constante et rapide évolution et dont il est sans
doute difficile de prévoir à l'avance que l'augmentation de leur taille va les faire
tomber dans la pauvreté (d'autant plus que cette déchéance est souvent due à
- 80 -
une cause accidentelle : maladie, perte de l'emploi...). Inversement, il se peut
que, dans l'enquête budget-consommation, un certain nombre de vieillards ou de
couples âgés, qui bénéficient de la solidarité du milieu, n'aient pas été considérés
ou ne soient pas apparus comme des unités de consommation indépendantes et
aient été inclus dans des familles plus larges : c'est d'ailleurs un biais
relativement classique de ce type d'enquête.
En ce qui concerne les dépenses et les revenus au contraire, les deux
enquêtes aboutissent à une intéressante concordance dans les résultats. Certes,
dans l'enquête sur les familles nécessiteuses, les dépenses monétaires mensuelles
s'élèvent à 33 dinars par famille ou encore à 8 dinars par tête, équivalant à 96
dinars par an, soit un niveau inférieur à la dépense moyenne des personnes se
situant en dessous du seuil de pauvreté selon l'enquête budget-consommation
(121 dinars) : il est probable que l'enquête sur les familles nécessiteuses sous-
estime fortement les dépenses notamment alimentaires qui n'ont pas été relevées
de façon aussi détaillée que dans l'enquête budget-consommation (laquelle procède
par relevés quotidiens pendant une semaine, puis par relevés rétrospectifs
mensuels et annuels).
En revanche, le revenu mensuel moyen dans l'enquête sur les familles
nécessiteuses s'élève à 46 dinars, et à 13 dinars par tête, ce qui équivaut à un
revenu annuel moyen de 156 dinars, soit un niveau supérieur à la dépense
moyenne des personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté. Néanmoins
l'enquête budget-consommation portant sur l'année 1985, il est nécessaire de tenir
compte du taux d'inflation et l'on peut dire, en fin de compte, que le revenu
moyen par tête pour les familles nécessiteuses se situe légèrement au dessus de , la dépense moyenne des personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté3 : sans
que l'on puisse l'affirmer avec netteté, cela pourrait tendre à accréditer
l'hypothèse selon laquelle ce seuil est actuellement fixé à un niveau légèrement
trop bas, pour les raisons déjà indiquées dans la première partie de cet article.
Ce résultat semble également réhabiliter l'intérêt et la possibilité de
relever des informations suffisamment fiables sur les revenus dans les enquêtes
budget-consommation. Autrefois, de tels relevés étaient systématiquement faits
dans ce que l'on appelait alors les enquêtes sur les revenus et dépenses des
3 Or il est tout à fait justifié, dans le cas des familles pauvres, d'assimiler dépenses et
revenus, ce qui l'est moins pour l'ensemble de la population. .
- 81 -
ménages, et ils continuent d'ailleurs à l'être dans nombre de pays anglophones.
Sans doute les familles pauvres et a fortiori celles qui bénéficient d'une aide,
sont-elles, de ce point de vue, plus faciles à enquêter que les familles plus
aisées. Mais il serait intéressant de renouer avec une ancienne pratique, tout en
tenant compte des expériences récentes en matière de relevés des revenus,
notamment en ce qui concerne les travailleurs indépendants.
Le bilan des recettes et des dépenses des familles nécessiteuses montre
en outre que ce sont le plus souvent les familles de faible taille qui connaissent
un déficit, ce qui montre bien qu'il s'agit là des situations de pauvreté les plus
difficiles et rend leur sous-représentation dans les enquêtes budget-consommation
particulièrement regrettable.
*
En définitive, les deux types d'enquête examinés présentent des biais.
Les enquêtes budget-consommation se caractérisent par une sous-représentation
des familles pauvres constituées d'une ou deux personnes et il serait utile que les
statisticiens d'enquête en identifient les raisons méthodologiques. Et l'enquête sur
les familles nécessiteuses peut souffrir du biais causé par la subjectivité
inhérente à la démarche d'inscription sur une liste ou à l'image que les
travailleurs sociaux se font de la pauvreté (n'y a-t-il pas des pauvres qui ne se trouveront jamais sur la liste ?).
Les deux enquêtes se révèlent cependant parfaitement complémentaires
et quelques améliorations pourraient vraisemblablement faire de leur
complémentarité un instrument efficace de lutte contre la pauvreté.
L'enquête budget-consommation permet de mesurer l'importance du
phénomène, sa localisation, son évolution et sa plus ou moins grande extension
lorsqu'on modifie les critères de définition des seuils. L'enquête sur les familles
nécessiteuses permet d'entrer plus directement dans les causes de la déchéance et
d'explorer les éventuelles potentialités sur lesquelles peut s'appuyer une action :
elle permet ainsi de distinguer une pauvreté structurelle, une nouvelle pauvreté
conjoncturelle touchant les familles vulnérables, et une pauvreté accidentelle et
récente contre laquelle il est plus facile de lutter.
- 82 -
Il serait intéressant et utile d'étudier, dans les deux enquêtes et par
leur comparaison, quelle est la conjonction de critères qui aboutit à la pauvreté,
ou plus précisément à ses diverses formes. A partir de l'enquête budget-
consommation, il conviendrait d'identifier les autres caractéristiques des familles
présentant cette même conjonction de critères et qui, pourtant, ne se trouvent
pas en situation de pauvreté : mais peut-être en sont-elles très proches et alors
cela pourrait constituer un argument en faveur de la réévaluation du seuil de
pauvreté. Etudier les familles qui se rapprochent de cette conjonction et qui sont
donc particulièrement vulnérables est un autre objectif d'une analyse qui cherche
à comprendre et à agir.
L'enquête sur les familles nécessiteuses a vocation à passer du sondage
à l'exhaustivité : en sélectionnant, à partir de l'enquête, les critères qui
paraissent les plus significatifs, il est naturel de les relever sur toute la
population recevant une aide de l'Etat, et de les inclure également dans les
enquêtes budget-consommation.
De nouvelles perspectives s'ouvrent ainsi en vue de l'élucidation des
causes de la pauvreté et d'une meilleure protection des populations vulnérables
dans les situations difficiles de l'ajustement structurel.
- 83 -
BIBLIOGRAPHIE
Banque Mondiale (1980), Tunisie : les aspects sociaux du développement, 161 p.
Dubois, J.L. et Odounfa, A (1986), Evaluation de l'équilibre énergétique d'une population. Stateco N° 46, INSEE, pp. 75-103
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INS (1978), Enquête nationale sur le budget et la consommation des ménages 1975, 506 p.
INS, Enquête sur le budget et la consommation des ménages 1980 - Vol. 1 : Aspects méthodologiques de l'enquête, 151 p. - Vol. 2 : Présentation des résultats de l'enquête budgétaire, 198 p. - Vol. 3 : Partie alimentaire et nutritionnelle, 188 p.
INS, Enquête nationale sur le budget et la consommation des ménages 1985 - Vol. A : Présentation des résultats de l'enquête budgétaire, 237 p.
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Radwan, S ; Jamal, V and Ghose A. (1987), Rural Labour and Structural Transformation in Tunisia. ILO, League of Arab States. 143 p.
Shariff, M. (1986), The Concept and Measurement of Subsistence : A Survey of the Literature. World Development, Vol. 14 p.5, pp. 555-577
- 85 -
PROBLEMATIQUE DES SYS'1EMES D'INFORMATION
POUR LES POLITIQUES ALIMENTAIRES
EN AFRIQUE OCCIDENTALE
par Jean-Paul MTNVIELLE1
"Quel que soit l'objet qu'on observe, on risque de tomber dans une totale
confusion si dès le départ on n'essaie pas d'avoir des idées ou au moins des
hypothèses à peu près claires sur la consistance des phénomènes que l'on
entreprend d'étudier.."2.
1. LA SITUATION ACTUELLE : L'ABONDANCE DES DONNEES ET LA CARENCE D'INFORMATION
Des besoins d'information importants...
NOUAKCHOTT 1979 : premier colloque CILSS/Club du Sahel sur la politique
céréalière dans les pays du Sahel :
"Le colloque recommande :
- que soient créées ou renforcées les structures chargées de la
collecte et de l'exploitation des informations nécessaires à l'élaboration d'une
politique céréalière ;
- .. l'harmonisation de la collecte des données dans les pays
sahéliens... "3
1 J.P. MINVIELLE est économiste de l'ORSTOM.
2 P. COUTY "Voir et comprendre le changement dans les sociétés paysannes africaines, un point
de vue d'économiste" in STATECO n° 56, décembre 1988, pp. 5 à 25.
3 In "La politique céréalière dans les pays du Sahel. Actes du colloque de Nouakchott -
Juillet 1979" CILSS/Club du Sahel, page 414.
- 86 -
MINDELO 1986 : second colloque CILSS/Club du Sahel sur les politiques
céréalières dans les pays du Sahel :
"Considérant que l'information est une composante essentielle de la sécurité
alimentaire et que le manque de données utilisables constitue encore un des
obstacles majeurs à l'amélioration des politiques céréalières...
le colloque recommande :
- que soient renforcés les réseaux d'information existants ;
- que soient engagés des programmes de création d'informations
opérationnelles ;
- que soient diffusées auprès des acteurs économiques et politiques
les informations recueillies...
Le colloque recommande en particulier :
- la généralisation des systèmes d'information sur les marchés
céréaliers. "4
Ces deux références à elles seules, fondamentales en ce que ces
forums orientèrent les politiques céréalières dans le Sahel depuis 1979, montrent
l'importance de l'information dans la détermination et l'élaboration de politiques
alimentaires. Les réunions, colloques et rapports actuels, sur le constat des
mêmes carences, réaffirment inlassablement ces priorités.
mais des données de base inadaptées...
Et pourtant, des données existent : mercuriales de prix, évaluations
de production, statistiques commerciales, etc. Sur le papier, la plupart des
domaines d'investigation intéressant de près ou de loin les politiques alimentaires
sont, dans la plupart des pays, plus ou moins bien couverts. Au Niger, par
exemple, lors d'une mission d'évaluation effectuée en avril 1988 préalablement à
la mise en place d'un Système National d'Information sur le marché céréalier, je
recensais 5 sources nationales d'information sur les prix des produits vivriers,
souvent contradictoires tant dans les valeurs absolues que dans les tendances
4 In "Les politiques céréalières dans les pays du Sahel. Actes du colloque de Mindelo -
Décembre 1986" CILSS/Club du Sahel, pages 51 et suiv.
- 87 -
relevées, toutes très mal diffusées.5
Manifestement, le problème se pose donc moins en terme de volume
global de la production de données qu'en terme d'adéquation de cette offre de
données à la demande d'information. En effet, ces renseignements se révèlent, le
plus souvent, mal ou non exploités. Les raisons pour lesquelles ces accumulations
de données ne constituent pas une information utilisable valent d'être explicitées.
Elles se ramènent, en général, à une inadéquation aux exigences de l'un ou
l'autre des deux grands déterminants d'une véritable "information" :
- validité : l'information se doit d'être correctement ciblée,
complète et cohérente avec le système d'analyse socio-économique dans lequel
elle doit s'intégrer. Pour être valide, l'information pourra combiner plusieurs
types de données (prix, stocks, flux par exemple), organisées au sein d'un
processus analytique clairement identifié visant à expliciter la signification, la
dynamique et la rationalité des faits socio-économiques constatés ;
- fiabilité : utilisation de méthodologies clairement explicitées,
scientifiquement et institutionnellement adaptées. En particulier, en ce qui
concerne la représentativité spatiale et temporelle des données recueillies
(intervalles de confiance), l'acception des variables (journée de travail, unités de
mesure), etc.
Du respect de ces deux critères de validité et fiabilité découlera la
crédibilité de l'information obtenue, déterminant ainsi son utilisation effective.
On notera par ailleurs que la détermination et le suivi de politiques
alimentaires rendent nécessaire une certaine permanence dans la création d'information.
5 Cf : J. P. MINVIELLE "Première évaluation pour la réalisation d'un Système d'Information sur
le marché céréalier au Niger" CILSS/DIAPER, Niamey, mai 1988.
Pour des informations plus détaillées sur ce point, on pourra se rapporter au document de
P. THENEVIN "Politiques céréalières et informations statistiques" Paris, AMIRA, avril 1988,
64p.
- 88 -
... qui ne sont pas de l'information.
La raison première de cette inadaptation de la production de
données réside dans une assimilation un peu trop rapide entre données
constitutives de l'information et l'information elle même.
Un des meilleurs exemples sera donné par les études de prix. En
effet, celles-ci sont trop souvent réduites à la seule prise en compte de relevés
de leurs niveaux. Ces mercuriales ne fournissent qu'une partie, nécessaire mais
non suffisante, des données de base constitutives de ce que l'on pourrait appeler
1' 'information prix". Faute d'avoir été clairement perçue, cette assimilation
abusive conduit à une mauvaise identification des potentialités informatives d'une
variable qui demeure, bien que fort mal utilisée jusqu'à présent dans le cadre qui
nous intéresse ici, fondamentale pour l'économiste.
Une des manifestations les plus flagrantes de cet abus est fournie
par les prétendues études de dynamique de formation des prix qui se limitent à la
mise en parallèle de séries de prix relevés sur des marchés de production et des
marchés de consommation, sans que soient pris en considération les déterminants
effectifs de leur formation : relations entre l'offre et la demande (types
d'intervenants, quantités unitaires échangées, etc.), identification des circuits de
commercialisation et des agents qui y opèrent, quantification des flux, etc. Ces
simples constats de différentiels de prix, ne fournissant pas l'explicitation de la
combinatoire offre/demande, ne peuvent prétendre au statut d'information valide
pour la détermination de politiques alimentaires.
Par ailleurs, des contraintes institutionnelles existent, qui favorisent
la fragmentation de la création de données, et rendent difficile l'organisation
d'opérations cohérentes de création d'information. Ainsi les données de base à
caractère permanent (relevés de prix, évaluations de production, etc.) sont
produites dans le cadre d'institutions nationales, seules à même de garantir une
certaine continuité dans la collecte. Spécialisées par secteurs (agriculture,
commerce, douanes, etc.), ces institutions s'attachent bien évidemment à la
création des seules données les intéressant directement. Créées pour informer,
leurs cellules (de suivi, d'évaluation ou d'enquête) informent... en vase clos! En
l'absence de concertation et de coordination nationale, les résultats obtenus
laissent souvent à désirer et n'aboutissent, dans le meilleur des cas, qu'à des
catalogues hétéroclites de données de base impossibles à croiser.
- 89 -
C'est à la mise en cohérence de ces critères de validité et de
fiabilité, par la fédération des intervenants de tous types et l'organisation d'une
véritable "information" basée sur la complémentarité entre données, que s'efforce
de répondre la problématique des Systèmes Nationaux d'Information.
2. LA PROBLEMATIQUE DES SYSTEMES D'INFORMATION : L'ORGANISATION DES DONNEES POUR L'INFORMATION
Il est souvent exprimé que la création d'information coûte cher et
que les moyens des Etats, en particulier sahéliens, sont limités. On relève d'autre
part que la création de données, même inutilisées (ou inutilisables), est loin d'être
négligeable et fait même souvent l'objet de duplications dispendieuses. Dans ces
conditions, le coût de l'information utile obtenue dépasse, de fait, les estimations
les plus pessimistes. Bien que cela ne soit pas sa justification première, la
réalisation de systèmes d'information nationaux cohérents et rationnels répond,
dans une certaine mesure, à ce besoin de réduction des coûts de création de
l'information.
Néanmoins, la justification première de la démarche demeure
l'organisation de la création de données pour la production d'une information
valide et fiable, adaptée aux besoins de la prise de décision.
Schématiquement, cette démarche peut être décomposée en trois
étapes essentielles :
1. L'identification des besoins d'information pour la détermination de
politiques alimentaires, en relation avec l'analyse macro-économique des
phénomènes sur lesquels il est estimé nécessaire d'intervenir.
2. La transcription de ces besoins par la structuration des
opérations de collecte, déjà existantes ou nouvelles, en éliminant les duplications
et en respectant les cohérences nécessaires à la constitution d'une information
valide et utilisable.
3. L'évaluation et l'amélioration des méthodologies utilisées en
s'appliquant tout particulièrement à leur adaptation aux conditions locales de mise
en oeuvre.
— 90 —
Cette pratique rend nécessaires deux niveaux de concertation :
- tout d'abord entre consommateurs (demande) et producteurs (offre)
d'information ;
- ensuite entre producteurs eux-mêmes, de façon à éviter les
duplications et organiser les complémentarités et le décloisonnement de
l'information.
Par ces concertations est déterminée l'information valide (c'est-à-
dire correctement ciblée et présentée en des termes directement utilisables par
son destinataire) qui procède de la combinaison entre données complémentaires.
Pouvant être produites indépendamment les unes des autres, ces données sont
conçues et organisées dès le départ pour s'inscrire dans un cadre analytique
clairement identifié et précisé.
Ces opérations de création de données relèvent de plusieurs types
complémentaires. Bien que simplificatrice, la différenciation entre données de
type structurel et conjoncturel, utilisée en 1986 au Burkina Faso6, apparaît tout
à fait opérationnelle. En effet, elle renvoie à la fois à des approches et des
intervenants différents.
Les opérations de création de données de type structurel
appartiennent à la catégorie des enquêtes ponctuelles, souvent lourdes, complexes
et coûteuses, menées dans le cadre de projets particuliers avec l'aide
d'intervenants internationaux. Il en sera ainsi, par exemple, des études de
comportement des producteurs agricoles, de budgets familiaux, de circuits de
commercialisation, de recensement du cheptel, etc. Ces investigations
approfondies, qu'il ne serait ni possible ni souhaitable de reproduire trop souvent,
sont destinées à fournir un référentiel de base que l'on supposera relativement
stable dans le court ou le moyen terme. Elles fournissent, en quelque sorte, le
6 Cf : Système d'information sur le marché céréalier au Burkina Faso, conçu dans le cadre du
projet Diagnostic Permanent du CILSS, et en particulier les documents suivants :
- Johny EGG et Daniel MARTINET "Connaissance du marché céréalier au Sahel - Volume I -
Approche macro-économique et mise en oeuvre d'un système d'information au Burkina Faso"
Brochure AMIRA N° 54 - CILSS/DIAPER, avril 1988, 132 p.
- Jean-Paul MINVIELLE "Connaissance du marché céréalier au Sahel - Volume II - Méthodologies
d'un système d'information au Burkina Faso" Brochure AMIRA N° 55 - CILSS/DIAPER, avril 1988,
121 p.
- 91 -
paramétrage de départ à partir duquel deviendront signifiantes les données
quantitatives recueillies par les enquêtes permanentes, nécessairement plus
simples, tant dans leur gestion et leur organisation que par les variables
recueillies.
Les opérations de création de données de type conjoncturel, à
l'inverse, sont basées sur le recueil continuel (ou répété) de quelques variables
quantitatives dont le traitement sera, si possible, automatisé : niveaux de prix, de
productions, de stocks, etc. Isolées, ces variables quantitatives ne revêtent qu'une
signification limitée et, souvent, sont insuffisantes pour l'analyse. Combinées
entre elles et avec les informations obtenues dans le cadre des enquêtes de type
structurel, elles participeront de manière essentielle à la création d'ensembles
informatifs cohérents avec la problématique retenue. Un exemple en a été donné
en ce qui concerne ce que nous avons appelé 1' information prix".
Cette différenciation se retrouvera au niveau des intervenants dans
la production de données. Les opérations de création d'information de type
structurel seront, nous l'avons dit, le domaine privilégié de l'action ponctuelle des
intervenants internationaux. Les institutions nationales, par leurs structures et
leurs réseaux dans les pays, seront parfaitement adaptées pour la collecte
permanente des données conjoncturelles.
On le voit, la démarche des systèmes d'information se ramène, pour
l'essentiel, à la structuration d'une filière de production de l'information qui,
partant de la demande des consommateurs (décideurs, planificateurs) détermine et
organise de façon rationnelle et fiable l'offre des producteurs (institutions,
statisticiens, chercheurs, techniciens de terrain, etc.). On notera que ce schéma
est intrinsèquement inverse de celui jusqu'à présent dominant, dans lequel les
consommateurs d'information devaient nécessairement s'adapter à une offre de
données sur laquelle ils n'influaient pas, celle-ci se trouvant, par voie de
conséquence, rarement cohérente avec leurs besoins réels.
- 93 -
MISE EN OEUVRE D'UN SYS'IEME D'INFORMATION
SUR LE MARCHE DES CEREALES AU BURKINA FASO
par Daniel MARTINET1
Ce texte est un extrait d'un document intitulé "connaissance du
marché céréalier au Sahel" publié en avril 1988 par le groupe AMIRA
("Amélioration des méthodes d'investigation et de recherches appliquées au
développement", INSEE, Paris), et qui comprend deux volumes.
Le premier volume (Brochure AMIRA n° 54) comprend lui-même deux
parties :
- première partie : approche macro-économique d'un système
d'information sur le marché des céréales au Burkina Faso (Johny EGG) ; - deuxième partie : mise en oeuvre d'un système d'information sur le
marché des céréales au Burkina Faso (Daniel MARTINET).
C'est donc de cette deuxième partie qu'est extrait le texte ci-après,
qui trace les grandes lignes du système d'information. Il est suivi dans la
brochure AMIRA d'une présentation plus détaillée des investigations et de la
situation des travaux en mai 1987.
Quant au deuxième volume (Brochure AMIRA n° 55), intitulé
"méthodologies d'un système d'information au Burkina Faso" et rédigé par Jean-
Paul MINVIELLE, il présente un exposé des méthodologies concrètes d'enquêtes
retenues pour certaines opérations.
Le document publié ici est donc une invitation à prendre
connaissance de l'ensemble de ces travaux, comme de ceux qui ont été réalisés
depuis. Bien qu'écrit en mai 1987, ce texte garde toute son actualité.
N.D.L.R.
1 D. MARTINET, économiste planificateur, travaille en qualité d'assistant technique sur le
projet Diagnostic Permanent du CILSS au Niger depuis 1988. Il travaillait auparavant au Burkina Faso sur le même projet.
1. UN SYSTEME D'INFORMATION : POURQUOI ?
Deux raisons fondamentales expliquent et justifient la définition, puis
la mise en oeuvre d'un "Système d'Information sur le Marché des Céréales" :
- la première est qu'il apparaît de plus en plus clairement aux
décideurs concernés que la meilleure façon d'aborder le problème de la sécurité
alimentaire est de donner la priorité à l'information ;
- la seconde est qu'il apparaît non moins clairement aux collecteurs
d'informations qu'ils ne peuvent répondre à cette demande relativement nouvelle
des décideurs que dans le cadre d'un système intégrant en permanence les
informations concernant l'évolution de chacun des multiples paramètres de la
sécurité alimentaire.
Ces raisons principales sont valables pour l'ensemble des Etats
membres du CILSS2. Mais trois raisons plus spécifiques expliquent que ce système
d'information ait été mis en place au Burkina Faso, en mars 1986 :
- l'existence, au sein de la Composante Nationale Burkinabe du
projet "Diagnostic Permanent", d'un consensus sur ce type d'approche3 ;
- la présence permanente à Ouagadougou de l'ECA (Equipe de
Coordination et d'Appui du Projet Diagnostic Permanent), placée ainsi en
meilleure position d'appui que dans les autres Etats-membres ;
- enfin, la volonté exprimée à cette époque par un certain nombre
de bailleurs de fonds de financer diverses études et enquêtes sur des aspects
particuliers du marché céréalier.
2 Comité permanent inter-Etats de lutte contre la sécheresse dans le Sahel.
3 Ceci se réfère à 'l'approche macro-économique d'un système d'information sur le marché des
céréales au Burkina Faso", première partie de la brochure AMIRA N° 54, rédigée par Johny EGG.
- 95 -
1.1. La priorité à l'information Eléments essentiels des politiques alimentaires, les politiques
céréalières mises en oeuvre depuis plus d'une décennie ont donné des résultats
médiocres et se révèlent en fin de compte inaptes à apporter une solution
correcte au problème majeur posé aux gouvernements sahéliens : la garantie de
l'approvisionnement des villes et des zones déficitaires. Face aux menaces de
crise à court terme, le système de mise en oeuvre des secours d'urgence a certes
connu des progrès. Mais il est permis de se demander si ces progrès ont été
accomplis au moindre coût, et donc si d'importantes ressources utilisées à cette
fin n'auraient pu être économisées ou être mieux rentabilisées dans le
développement de l'appareil productif.
Dans une perspective plus structurelle, le développement de la
production céréalière pose un problème de fond qui est celui de ses débouchés.
Les politiques de "prix incitatifs" aux producteurs, quand elles ont été appliquées,
n'ont pas atteint leur cible : l'accroissement des revenus des producteurs. Par
contre, elles ont souvent permis aux intermédiaires de réaliser de substantiels
profits et ont toujours contribué à creuser le déficit de l'Office céréalier.
Dans le même temps, les effets pervers de l'aide alimentaire,
souvent nécessaire pour combler ce déficit, renforcent la tendance des citadins à
délaisser les produits locaux et vérouillent de plus en plus solidement toute
possiblité d'accroissement de la production locale, faute de débouchés. Devant ce
sombre tableau, les décideurs nationaux et ceux qui les aident s'interrogent.
Dans une conjoncture internationale marquée par la plus grande
rareté des ressources financières et un accroissement insupportable de la dette
des pays les plus pauvres, on ne peut guère songer à poursuivre la politique
interventionniste des Offices telle qu'elle a été pratiquée jusqu'ici. Par ailleurs,
s'en remettre au seul jeu de l'offre et de la demande des opérateurs économiques
pour assurer l'équilibre alimentaire serait pure inconscience de la part de
n'importe quel gouvernement, sahélien ou non. Le problème n'est donc pas de
savoir si l'Etat doit ou non intervenir, mais de savoir comment optimiser l'efficacité de son intervention ainsi que celle des ressources qui y sont consacrées afin d'atteindre l'objectif légitimement pris en charge.
Cet objectif réaliste impose aux responsables de la politique
céréalière d'abandonner pour un moment leur rôle d'opérateur principal sur le
- 96 -
marché, pour adopter -le temps de l'analyse et de la réflexion- le poste
d'observateur (d'où ils seront aussi, de ce point de vue, "observés"). Il impose
donc de donner, opérationnellement parlant, la priorité à l'information.
1.2. Quelle information ? Les quelques paragraphes ci-dessus montrent bien qu'il ne s'agit pas
de n'importe quelle information, mais de celle qui permettra de repérer de façon
rapide les carences du système, les rouages défectueux qui l'empêchent
conjoncturellement ou structurellement de remplir correctement son objectif
d'approvisionnement des consommateurs des villes et zones déficitaires en produits
alimentaires (à partir des zones excédentaires ou des importations), à la satisfaction des uns et des autres.
Il faut donc observer d'un même regard l'ensemble des opérateurs
économiques concernés (producteurs, importateurs, intermédiaires, artisans,
consommateurs) et leurs opérations (production, importations, stockage, transport,
collecte, distribution, transformation, consommation) puis tenter, à partir de
l'inventaire de ce que l'on connaît, d'en décrire le fonctionnement en formulant,
lorsqu'on n'a pas d'autre élément certain d'appréciation, des hypothèses quant aux
relations existant entre ces différents éléments.
Ainsi aura-t-on créé un cadre global (provisoire) d'analyse, dont le principal mérite sera d'orienter la recherche d'information vers les points du
système que l'on estime être, d'après les premières hypothèses, déterminants pour
les performances de l'ensemble.
Ces informations, recueillies en des points bien spécifiques de la
chaîne qui va des producteurs aux consommateurs et reliées entre elles par un
véritable tissu d'hypothèses, constituent un "système d'information" dans lequel,
on le voit, chaque information prise isolément n'a que peu de sens.
1.3. L'organisation en réseau Aucun pays sahélien ne dispose d'un service administratif couvrant,
de par sa compétence, l'ensemble du système. Trois ou quatre services relevant
de ministères différents sont le plus souvent concernés et, comme pour la mise en
place des SAP (Systèmes d'Alerte Précoce), la constitution d'une équipe
interministérielle est nécessaire à la création d'un système d'information sur le
marché céréalier. Dès lors, un obstacle nouveau apparaît : celui du cloisonnement
- 97 -
administratif né de la lourdeur des procédures, souvent aggravé par le
cloisonnement des sources de financement.
L'expérience prouve que, tout en respectant, sur le fond, les
méthodes de l'administration (notamment par une information sans faille des hauts
responsables), des relations souples de type réseau sont possibles entre les
responsables de l'information dans les différents secteurs : ainsi fonctionnent les
Composantes Nationales du Projet Diagnostic Permanent.
2. UN SYSTEME D'INFORMATION : COMMENT ?
Le système d'information mis en place au Burkina Faso est un
système évolutif, guidé par quelques principes d'action. Il consiste en un système d'hypothèses et d'enquêtes, fondé sur une approche macro-économique du marché
des céréales.
2.1. Un système évolutif, précisant progressivement l'esquisse initiale On ne connaît encore que peu de choses sur la chaîne qui relie les
producteurs de céréales des zones excédentaires aux consommateurs des villes et
des zones déficitaires. Dans cette situation de carence d'informations,
l'élaboration d'une esquisse du système de commercialisation peut paraître un
exercice inutile et décourageant. Elle ne permet pas en effet -dans l'immédiat-
d'apporter une réponse précise aux questions cruciales que
l'observateur/responsable de la sécurité alimentaire doit légitimement se poser.
Par exemple, pour l'année 1987, une telle esquisse ne permet pas
d'anticiper les décisions d'emblavements en céréales des producteurs après
l'effondrement des prix observés jusqu'à présent. Elle ne permet pas non plus de
prévoir à coup sûr quel sera le comportement des détenteurs de stocks privés
(dont on ne connaît pas le volume) en cas d'effondrement de la production au
cours de la prochaine campagne, ni quel sera le comportement (ou la situation)
des catégories les plus défavorisées de consommateurs en cas de hausse probable
des prix. C'est cependant par cette esquisse imparfaite qu'il faut commencer. Elle
a en effet un double mérite :
a. Le premier est d'utiliser un cadre unique et reconnu par tous
(celui de la comptabilité nationale) pour l'intégration des informations déjà existantes, même si ces dernières sont imprécises et fragmentaires. Ainsi en est-il
des données sur la production, la consommation en produits importés, les ventes,
achats et distributions gratuites de l'Office, des relevés de prix (même ponctuels),
et des résultats d'études monographiques concernant telle zone, tel opérateur
économique ou telle filière.
Ces informations ont été le plus souvent collectées en fonction
d'objectifs aussi divers que partiels : justification de l'activité de certains
services administratifs, évaluation économique d'un projet, élaboration d'un
mémoire universitaire... Intégrées dans une esquisse macro-économique unique, ces
données vont tout d'abord permettre de repérer les incohérences grossières
existant entre elles (par exemple : la production dépasse la consommation dans
une zone structurellement déficitaire). Puis, une fois "mises en cohérence", ces
données vont s'expliquer mutuellement et, ainsi mises en relation, vont contribuer
à la création d'informations nouvelles (par exemple : la mise en relation des prix
du coton et des superficies emblavées en céréales pourrait contribuer à créer une
information du type : il existe ou n'existe pas de relation entre les évolutions de
ces deux variables).
b. Le deuxième mérite de cette esquisse est de fournir un
instrument d'identification des données à préciser en fonction, prioritairement, des
réponses à apporter aux questions initialement posées par les décideurs de la
politique céréalière.
Ces questions, on le sait, concernent essentiellement la prévision des
flux de céréales et, finalement, des flux d'importations. Ceux-ci, on le sait aussi,
sont fonction de deux variables "simples", la production et les stocks, dont les
variations dépendent de facteurs plus complexes que sont le comportement des
producteurs et des différents intermédiaires face aux contraintes que leur
imposent les aléas climatiques et l'environnement économique et social (dont la
politique céréalière).
Ces variables sont mal connues et font l'objet de bon nombre
d'hypothèses... et d'idées reçues, qu'un système d'information devra confirmer ou infirmer.
- 99 -
Est-ce à dire qu'en attendant les résultats des enquêtes, les
responsables ne devront rien décider ? Certainement pas. Il faudra simplement au
début se contenter de qualitatif, se servir des données sur la production en
sachant que, si elles sont probablement entachées de grosses erreurs, leurs
variations ont une grande importance qualitative. On pourra ainsi qualifier les
différentes années (dans les différentes zones) de "bonnes", "très bonnes" ou
"médiocres", on pourra en déduire des hypothèses sur l'importance des stocks
paysans et aussi, compte tenu des prix du bétail par exemple, faire d'autres
hypothèses sur la solvabilité des consommateurs des zones déficitaires. Toutes ces
hypothèses ne sont pas "gratuites" : elles s'appuient sur une expérience des années écoulées qui, malheureusement, n'a pas été systématiquement exploitée
jusqu'ici.
C'est en vertu de cette expérience, "matérialisée" par des séries
chronologiques longues, comparant la production aux mouvements de céréales des
Offices (importations notamment), que, dans un premier temps, on fournira la
moins mauvaise réponse aux décideurs. Cette référence au passé suppose bien
entendu que la stratégie des différents opérateurs face à leur environnement n'ait
pas fondamentalement changé.
Les décisions prises en fonction de ces différentes hypothèses
deviendront à leur tour (par leurs effets) des données (connues), dont il sera de
la plus haute importance de suivre l'impact : c'est à partir de ce dernier que
pourront être confirmées ou infirmées les hypothèses de départ.
Ainsi, l'esquisse initiale va-t-elle se préciser progressivement, de
deux façons complémentaires :
- par la mise en oeuvre d'études et d'enquêtes visant à mieux
conna1tre les variables clefs du système ;
- par l'étude de l'impact de chaque décision prise, en tant que
résultante d'un système d'hypothèses clairement explicité.
2.2. Quelques principes d'action La référence constante à quelques principes simples est la garantie
d'une mise en place correcte et d'un bon fonctionnement du système.
- 100 -
a. La simultanéité de mise en place des fonctions d'information et de diagnostic. Les fonctions d'analyse et de diagnostic constituent à la fois le
fondement et la finalité des systèmes d'information. Elles doivent donc être mises
en place en même temps que le système d'information, et non lui succéder. Elles
constituent la passerelle indispensable entre le système d'information et les
structures nationales de décisions en matière de sécurité alimentaire. Il faut en
effet se rappeler que c'est le besoin de diagnostic qui. est à l'origine de la
recherche d'informations, et non l'inverse.
b. L'adéquation des méthodologies à mettre en oeuvre au cadre insitutionnel, humain et matériel dans lequel le système doit fonctionner.
Il est nécessaire, dès la conception du système, d'évaluer les
potentialités nationales disponibles en matière d'enquête et d'étude et de
procéder à une estimation correcte des appuis extérieurs possibles et souhaitables,
en tenant compte du fait qu'un déséquilibre en faveur de ces derniers nuirait à
la permanence du système et aurait sans doute des incidences sur la qualité de la
"passerelle" à établir ente le diagnostic et les décisions politiques.
Ce savant dosage entres moyens nationaux et appuis extérieurs est
sans doute le principe d'action le plus délicat à mettre en oeuvre ; son
importance pour la réussite finale est déterminante.
c. L'intégration des démarches d'enquête. La définition d'une problématique unique et globale à partir de
l'esquisse macro-économique présentée ci-dessus et des questions que se posent
les responsables, ne suffit pas à concevoir un système intégré d'enquêtes. Il faut
encore, plus concrètement :
- que les choix d'échantillonnage pour chaque enquête soient
complémentaires : les échantillons de marchés, de producteurs, de commerçants,
de consommateurs devront se recouper, de manière à permettre la mise en
relation (par exemple) des comportements des producteurs de telle zone avec ceux
des commerçants opérant dans cette zone, avec le volume des flux issus de cette
zone, avec les prix et le comportement des consommateurs dans les zones de destination, etc. ;
- que les moyens logistiques et matériels soient mis en commun, afin d'alléger les coûts de l'ensemble ;
- 101 -
- que les informations qualitatives recueillies en cours d'enquête (et
complétant les données quantitatives) circulent rapidement entre tous les
responsables d'enquête, ce qui suppose de fréquentes réunions de coordination ;
- enfin, qu'un rythme soit imposé, et tenu, pour les publications
partielles (par enquête) et intégrées (synthèse de plusieurs enquêtes).
d. La progressivité dans la mise en oeuvre des enquêtes et études
Le système peut démarrer avec de très faibles moyens (le cas du
Burkina peut en témoigner). Mais la limitation des moyens disponibles au moment
du démarrage implique des choix. S'il est exclu de démarrer avec une seule
enquête (pourrait-on alors parler de système ?), il est possible de commencer
avec deux opérations seulement, ce qui s'est précisément passé au Burkina avec
l'enquête "marchés" et l'étude "comportement des producteurs dans la mise en marché".
e. Les retours périodiques au cadre global d'analyse
Une fois chaque enquête identifiée et sa méthodologie élaborée, le
risque existe de voir se développer des collectes de données et des analyses
micro-économiques qui se prendraient elles-mêmes pour fin. Le danger est celui
qui guette tout chercheur isolé qui, polarisé par son thème de recherche, n'aura
point de cesse qu'il n'ait fait le tour de toutes les faces du problème, alors que
seuls quelques-uns de ces aspects sont nécessaires pour apporter une réponse à la
question posée à l'ensemble du système. Ainsi, les études de comportements de
producteurs ou de commerçants peuvent-elles être l'objet d'études longues et
détaillées du fonctionnement des exploitations rurales ou du marché.
Des retours périodiques au cadre global d'analyse, par le biais de
réunions de synthèse, permettront d'élaguer en cours de réalisation les parties
superflues de l'enquête, celles dont on se dit "c'est toujours bon à prendre au
passage", mais qui aboutissent à un alourdissement et quelquefois à l'impossibilité
de sortir des résultats, faute d'avoir les moyens de traiter toutes les données.
f. Un dosage optimal entre collecte de données répétitives (et permanentes), études de structure et "enquêtes de référence"
- Les enquêtes permanentes
Le système mis en place doit permettre, grâce à des enquêtes
permanentes effectuées en des points bien spécifiques de la filière alimentaire, de
- 102 -
collecter les données nécessaires à l'actualisation des diagnostics. Ces enquêtes
porteront sur :
. le suivi des cultures et la prévision des récoltes (SAP) ;
. le volume des stocks paysans ;
. les marchés des céréales et du bétail (prix, volume des
transactions, qualité des intervenants) ;
. les flux (de céréales principalement).
Ces enquêtes doivent être légères et, eu égard à la nécessaire
rapidité d'obtention des résultats et au budget limité, certaines d'entre elles ne
pourront bien souvent que quantifier des évolutions.
- Les enquêtes de référence
Bien qu'ayant par elles-mêmes une signification, les évolutions
quantifiées par les enquêtes permanentes ne peuvent permettre un diagnostic
suffisamment précis de la situation si les valeurs absolues des variables, dont
l'évolution est ainsi observée, ne sont connues qu'avec une trop grande
incertitude. Ainsi en est-il de la production, de la consommation, des stocks, des
effectifs du cheptel et, bien entendu, de la démographie.
La quantification de ces variables nécessite l'utilisation d'un
échantillon national important et le coût de l'opération est relativement élevé.
Cependant, compte tenu de l'existence des enquêtes permanentes légères permettant une actualisation continue, les "enquêtes de référence" visant à caler
périodiquement les valeurs absolues pourront être espacées dans le temps, avec
une fréquence longue (10 ans).
- Les études de structure
Le mot "étude" est ici préféré au mot "enquête", car il s'agit de
démarches de recherche visant à améliorer la connaissance sur des domaines peu
connus (et pourtant essentiels pour la compréhension des mécanismes de la
sécurité alimentaire). Ce sont par exemple les études sur :
. les systèmes de production et toutes les connaissances qui s'y
rattachent, comme les coûts de production, les temps de travaux, les revenus des producteurs ;
- 103 -
. le comportement des producteurs dans la mise en marché (lié à
l'étude précédente) ;
les circuits commerciaux ;
la stratégie des intermédiaires commerciaux ;
le comportement des consommateurs face aux variations de prix
relatifs de produits substituables.
Ces études ont un caractère ponctuel et peuvent être mises en
oeuvre avec des moyens humains et financiers limités dans le temps. Elles sont
indispensables à l'amélioration et à l'allègement des enquêtes permanentes car,
fournissant une meilleure compréhension du fonctionnement du système
alimentaire, elles permettent de mieux situer (dans le système, dans l'espace
géographique et dans le temps) les points où doivent être collectées en
permanence certaines données (par exemple : repérage des lieux géographiques et
des périodes pour les enquêtes de flux).
Notons enfin que les troix types de collecte d'information énoncés
ci-dessus font partie d'un même système et sont donc indissociables.
2.3. Un système de questions et d'hypothèses Les principales questions posées et hypothèses formulées à chaque
niveau de la chaîne qui va du producteur au consommateur sont détaillées dans
le document présentant l'approche macro-économique du système d'information.
Elles sont mentionnées ci-après à titre d'illustration.
a. Les flux inter-régionaux
La question initiale est posée par l'existence de zones déficitaires
en céréales (dont les zones urbaines). Si des flux de céréales adéquats
n'aboutissent pas à ces zones en temps opportun, c'est la crise.
Alors que les flux de blé et de riz sont relativement faciles à
identifier, ceux de mil, sorgho et maïs nécessitent le repérage des zones
habituellement "excédentaires", "équilibrées" ou "déficitaires". Deux voies (se
recoupant) conduisent à ce repérage :
- d'une part, les séries chronologiques de population (fiables au
Burkina depuis le recensement de 1985) permettent une estimation des besoins
(grâce à l'utilisation d'un taux de consommation per capita) qui peut être
confrontée, année par année, aux données de la production ;
- 104 -
- d'autre part, les séries chronologiques de flux d'aide alimentaire,
de ventes ou d'achats de céréales par l'Office donnent une bonne idée qualitative
de la situation alimentaire de chaque zone, année par année.
On devra dans un premier temps faire l'hypothèse que les données
sur la production sont fiables et déduire un taux "apparent" de consommation per
capita cohérent avec les indicateurs qualitatifs de la situation alimentaire connus
par ailleurs. Ce taux permettra une première évaluation des excédents et déficits
par zone et, par superposition avec une carte des voies de communication, une
première esquisse des flux "apparents". Cette esquisse devra tenir compte :
- des flux d'importation "officiels" (s'il y en a eu) ;
- des flux tr ansfr ont aliers si les différentiels de prix ou les
fluctuations des taux de changes de part et d'autre des frontières ne laissent
aucun doute sur l'existence de tels mouvements.
b. Les emblavements et la production Dans les zones de monoculture céréalière, on fera l'hypothèse que la
totalité de la force de travail disponible est employée à la culture des céréales
et que les variations des superficies emblavées ne dépendent que du facteur
climatique.
Dans les zones à culture de rente, les variations des superficies
emblavées dépendent, en plus, des décisions que prennent les producteurs au vu
des informations qu'ils possèdent sur les fluctuations des prix des principaux
produits : céréales, coton, arachide, etc. ; leur appréciation du stock local de
céréales et de celui des zones avoisinantes n'est pas sans incidence importante
sur leur décision.
c. La mise en marché On fera l'hypothèse que les producteurs cherchent d'abord à assurer
leur propre sécurité alimentaire, puis qu'ils visent une maximisation et une
sécurisation de leurs revenus. Il doit donc y avoir (en toutes zones) une relation
très étroite entre la mise en marché des céréales et les besoins monétaires.
Ceux-ci dépendent non seulement du "train de vie familial", mais aussi des autres
sources de revenus possibles dans le contexte de la zone : revenus des cultures
de rente, de la cueillette (karité), de l'élevage, de l'émigration.
- 105 -
Dans un premier temps, l'hypothèse ainsi formulée conduira à un
découpage de l'espace national en zones supposées homogènes du point de vue des
possibilités de revenus (zone coton, zone karité, zones maraîchage, etc.), au sein
desquelles on pourra procéder à une étude du comportement des producteurs selon
une typologie tenant compte à la fois de la "surface financière" des exploitations
et de leur accès à l'information sur les marchés. Les coûts de production seront
nécessairement pris en compte par cette étude qui devra bien entendu être
couplée à une enquête sur les prix des marchés des zones concernées.
d. Circulation et distribution des céréales locales C'est sans doute le maillon le moins connu de la chaîne. On fera
l'hypothèse que la profession de "commerçant" n'est pas homogène et l'on
distinguera au moins les intermédiaires locaux des commerçants à grand rayon
d'action. On fera aussi l'hypothèse que, comme les producteurs, les commerçants
cherchent à maximiser et sécuriser leurs revenus, donc à diversifier leurs
activités. Cela conduira à donner la priorité aux études ayant pour but
l'établissement d'une typologie des commerçants et l'identification des circuits
commerciaux.
Ces études faciliteront par la suite celles du comportement des
commerçants (selon les catégories) et les enquêtes sur les flux (transitant par les
circuits).
e. Importations et flux transfrontaliers On fera les hypothèses suivantes :
- les flux d'aide alimentaire (ou les distributions de céréales à bas
prix) ont, s'ils sont importants, un impact dépressif sur les prix et donc sur la production ;
- les flux transfrontaliers, s'ils ont une certaine ampleur, peuvent
créer des pénuries analogues à celles issues d'une mauvaise récolte ou au
contraire avoir, comme l'aide alimentaire, un effet dépressif sur les prix.
Dans le cas des flux transfrontaliers, les fortes variations de taux
de change donneront l'alerte, de même que les relevés de prix sur les marchés
frontaliers. Des enquêtes plus fines devront alors être engagées pour déterminer le volume des flux.
- 106 -
f. Consommation L'hypothèse principale est que la demande de céréales locales n'est
pas rigide : elle varie selon les prix, les lieux, les époques de l'année. Il existe
donc des produits de substitution : lesquels, à quels prix, à quels moments ?
Des enquêtes légères sur la consommation, couplées aux enquêtes
flux/marchés de consommation, apporteront une réponse à ces questions en même
temps qu'elles permettront de préciser les taux de consommation per capita.
2.4. Un système d'études et d'enquêtes Les hypothèses énoncées très brièvement ci-dessus ont permis
d'identifier neuf "opérations de recherche d'information" prioritaires :
Opération 1 Opération 2
Opération 3
Opération 4
Opération 5
Opération 6 Opération 7
Opération 8
Opération 9
: Evaluation des productions (par zone)
: Cartographie des niveaux de production
: Comportement des producteurs dans la mise en marché
: Identification des circuits et des opérateurs commerciaux
: Stratégie des commerçants
: Etude des marchés et des prix
: Quantification des flux
: Informations sur les flux externes de céréales
: Approche des choix des consommateurs.
Parmi ces opérations, on peut distinguer :
- celles qui existaient avant la mise en route du système : c'est le cas de l'opération 1. Il s'agit donc ici d'améliorer la précision des résultats obtenus ;
- celles qui nécessitent une compilation de données déjà collectées : exploitation de sous-produits de l'activité administrative ou mise en relation
d'informations préexistantes. C'est le cas de l'opération 2 (cartographie des
niveaux de production) et de l'opération 8 (information sur les flux externes de céréales) ;
- celles qui vont préciser des données de structure. Elles constituent en quelque sorte des programmes de recherche ayant un caractère ponctuel dans
le temps, dont les résultats permettront de mieux cibler et d'alléger les enquêtes
- 107 -
permanentes. Il s'agit des opérations 3 (comportement des producteurs), 4
(identification des circuits et opérateurs commerciaux), 5 (stratégie des
commerçants) et 9 (approche du choix des consommateurs) ;
- et enfin celles, permanentes, qui vont essentiellement collecter des
données conjoncturelles : les opérations 6 (étude des marchés et des prix) et 7
(quantification des flux).
2.5. La mise en oeuvre institutionnelle du système Au terme de l'élaboration du système en avril 1986, la Composante
Nationale du Projet "Diagnostic Permanent" du Burkina Faso a décidé de mettre
en route, dans le courant de la campagne agricole 1986/87, un certain nombre
d'opérations. La responsabilité d'exécution de celles-ci a été confiée à chacun
des membres de la Composante selon son domaine de compétence :
- L'opération 1 ("évaluation des productions par zone") continue de
relever de la responsabilité du Ministère de l'Agriculture et de l'Elevage,
Direction des Etudes et Projets, Service des Statistiques Agricoles (chef de file
de la Composante Nationale). L'opération est financée par plusieurs sources dont
le projet "Diagnostic Permanent".
- L'opération 2 ("cartographie des niveaux de production") est une
opération de compilation confiée à l'Office National des Céréales (OFNACER)
avec l'appui de l'équipe de coordination du projet "Diagnostic Permanent".
- L'opération 3 ("comportement des producteurs") est une étude
exécutée sous la responsabilité de l'Institut National de la Statistique et de la
Démographie (INSD) avec l'appui de l'Assistance Technique Italienne au CILSS, qui
finance l'opération.
- Les opérations 4 et 7 ("identification des circuits et opérateurs
commerciaux" et "quantification des flux") ont été jumelées compte tenu des
contraintes de financement (assuré par la FAO) et leur exécution a été confiée à
l'INSD.
- L'opération 6 ("étude des marchés et des prix") a été placée sous
la responsabilité de l'OFNACER (Cellule de Planification et des Statistiques). Son
financement est assuré par le CILSS (fonds du Projet Diagnostic Permanent).
- 108 -
- L'opération 8 ("information sur les flux externes de céréales"),
opération de compilation de données fournies par l'administration, a été confiée à
l'INSD.
Les méthodologies détaillées des opérations donnant lieu aux
enquêtes de terrain ont été élaborées entre mars et juin 19864 et les relations
entre ces différentes opérations ont été clairement définies. Enfin, les modalités
de la coordination entre les différentes équipes responsables ont été précisées. Le
1er août 1987 a vu le début de la première opération de terrain nouvellement
conçue.
4 On voudra bien se reporter à ce sujet aux documents de Jean-Paul MINVIELLE : CILSS (Projet
Diagnostic Permanent, Ouagadougou, 1986) et brochure AMIRA n° 55.
— 109 —
ELABORATION D'UN INDICE DES PRIX DES PRODUITS DE BASE
EXPORTES PAR LES ETATS D'AFRIQUE ET DE L'OCEAN INDIEN
par Edouard CADET et Annie CHANUT1
INTRODUCTION
La division "Etudes et Méthodes Statistiques pour le Développement"
de l'INSEE calcule depuis 1976 un indice mensuel des prix des produits de base
exportés par certains Etats d'Afrique et de l'Océan Indien (E.A.O.I.) signataires
de la Convention de Lomé.
L'objectif est de suivre l'évolution des prix de ces matières
premières dont l'importance est évidemment considérable dans les économies de
ces pays. Les recettes d'exportation des pays en voie de développement (surtout
pour les pays africains) proviennent en effet très majoritairement de ce
commerce et on a longtemps considéré qu'elles devaient être un des moyens de
financer leurs efforts de développement, notamment de couvrir le coût de leurs
importations.
Cet indice est donc utilisé pour des études sur la conjoncture de
certains pays. Il est diffusé à plusieurs organismes dont le Ministère de la
Coopération et la CCCE (Caisse Centrale de Coopération Economique) qui le
publient dans "Conjoncture des Etats d'Afrique et de l'Océan Indien" (périodique
trimestriel). Il est toutefois possible d'étendre sa diffusion aux Etats d'Afrique et
de l'Océan Indien qui le souhaiteraient.
Les différents résultats accompagnés d'une documentation sur
l'indice sont déposés à la bibliothèque du Département des Relations
Internationales et de la Coopération, à l'INSEE, où ils peuvent être consultés par
toute personne intéressée.
1 E. CADET et A. CHANUT appartiennent à la Division "Etudes et Méthodes Statistiques pour le
Développement" de l'INSEE.
- 110 -
L'indice calculé jusqu'à fin 1989 avait pour base l'année 1980. Etant
donné que depuis 1980 les structures des exportations ont changé, il nous a
semblé nécessaire de procéder à un changement de base. La nouvelle année retenue est 1985.
Nous avons mis à profit ce changement de base pour, d'une part,
modifier le champ couvert par l'indice et, d'autre part, rendre plus complets les résultats qui seront diffusés.
Ainsi le nombre de pays pour lesquels l'indice est calculé a été
augmenté et certaines modifications sont intervenues dans le choix des produits.
Parallèlement, nous avons souhaité rendre plus souple le logiciel servant au calcul
de l'indice et lui ajouter d'autres applications possibles.
Cet article se propose d'exposer, à l'occasion de ce changement de
base, la méthodologie employée pour confectionner l'indice, les problèmes
rencontrés et l'amélioration de la mise en forme informatique.
Nous décrirons dans la première partie le champ de l'indice, les
différentes démarches utilisées pour la collecte des données ainsi que la méthode de calcul.
Dans une deuxième partie, nous étudierons succinctement le
fonctionnement du logiciel PRINCE (PRix-INdice-Commerce Extérieur) mis au
point en vue du traitement et de l'édition des différents résultats.
Enfin une troisième partie sera consacrée à la présentation de quelques résultats.
I - PRESENTATION GENERALE DE L'INDICE
Ll Le champ de l'indice
I.1.1 - Les pays concernés
Il s'agit de certains Etats d'Afrique et de l'Océan Indien (EAOI)
signataires de la Convention de Lomé. Cette dernière codifie les relations
commerciales entre la Communauté Economique Européenne (CEE) et les pays
d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique, dits pays ACP.
Tout d'abord, nous rappelons brièvement les points essentiels de la
Convention de Lomé.
Plusieurs accords entre la CEE et quelques pays africains et
Madagascar ont précédé ceux de Lomé : Rome (1957), Yaoundé (1964 et 1969).
Ils ont instauré des préférences commerciales réciproques accompagnées d'une
aide financière.
La première Convention de Lomé, dite Lomé I, a été signée en 1975
avec 46 pays ACP. Elle reprenait les deux idées des accords précédents mais
avec un système de préférences commerciales non réciproques. Les produits
exportés par les ACP étaient exonérés de taxes et le marché de la CEE leur
était totalement ouvert.
Lomé II, qui recouvrait 57 pays en 1980, ajouta une prise en charge
financière d'opérations de promotion commerciale pour ces produits. Lomé HI fut
signée en 1984 en accord avec 66 pays.
Les Conventions ont aussi innové avec la mise en place de deux
formes d'assurance pour les ressources d'exportation:
a) le STABEX : stabilisation des exportations.
Il garantit les recettes d' exportation pour certains produits
agricoles. Son champ s'élargit au fur et à mesure des conventions. Il couvre 49
produits depuis Lomé III (1984).
b) le SYSMIN.
Il concerne les produits miniers (qui n'étaient pas pris en compte
dans le STABEX). Il ne porte pas directement sur les exportations mais consiste
plutôt en une aide à l'exploitation.
Mais, selon les pays ACP, STABEX et SYSMIN ne couvrent pas
encore suffisamment de produits et surtout sont faiblement dotés en moyens
financiers.
Lomé IV a été signée en Décembre 1989 et concerne maintenant
soixante-huit pays. Dans cette nouvelle convention, le STABEX et le SYSMIN ont
- 112 -
été améliorés. Il s'agit de les rendre plus facilement opérationnels et surtout de
faire en sorte qu'ils répondent mieux aux difficultés commerciales rencontrées par
les pays ACP.
L'indice calculé jusqu'en 1989 (base 1980) ne concernait que
Madagascar et vingt-quatre pays africains (dont les quatorze faisant partie de la
zone franc). Dans un premier temps nous avons élargi le champ à trente-et-un
pays et nous envisageons ensuite d'y intégrer d'autres pays également signataires
de la Convention de Lomé.
Pour la nouvelle année de base, 1985, le champ de l'indice couvre
donc trente-et-un pays sur les 68 signataires de Lomé. La plupart sont situés en
Afrique de l'ouest et en Afrique du centre. On trouvera, en annexe 1, une carte
superposant pays ACP et pays concernés par l'indice.
Sur ces 31 Etats, 17 font partie des pays les moins avancés dont le
critère est, pour 1983, un PNB inférieur à 400 $ par habitant (le PNB moyen des
pays industrialisés à économie de marché était de 10 660 $).
Selon des données du FMI pour l'année 1985, les exportations
africaines ont été au total de 62.4 milliards de dollars et les exportations des
pays ACP d'environ 40 milliards de dollars. La représentativité des 31 Etats
retenus est donc de :
43.2 % des exportations africaines
68.6 % des exportations des pays ACP.
1.1.2 - Caractéristiques générales des produits
Ce sont des produits dits de base. En 1948, les Nations Unies les
définissaient ainsi dans la Charte de la Havane :
"Tout produit de l'agriculture, des forêts, de la pêche et tout
minéral, que ce produit soit sous sa forme naturelle", par exemple les fèves de
cacao, "ou qu'il ait subi la transformation qu'exige communément la vente en
quantités importantes sur le marché international", par exemple le beurre de
cacao.
- 113 -
Plus précisément, pour l'agriculture et la pêche, il s'agit de produits
alimentaires essentiels (céréales, oléagineux, produits animaux...), de boissons et
fruits tropicaux (café, cacao, bananes ...), de matières premières agricoles (coton,
essences de bois, caoutchouc ...). Les produits miniers se composent de minerais,
de produits non métalliques et de combustibles.
Ces produits jouent dans l'économie des pays en voie de
développement un rôle prédominant. Il existe de véritables phénomènes de
dépendance : plusieurs pays basent la majorité de leurs recettes d'exportation sur
un, deux ou trois produits de base . On estime, par exemple, qu'en 1986, treize
PMA (pays les moins avancés) tiraient plus de 85 % de leurs recettes
d'exportations de trois produits seulement.
Ces produits de base représentaient 32 % des exportations mondiales
en 1966 et seulement 17 % en 1982. Or ils constituent toujours les 3/4 des
exportations des pays les moins avancés alors que l'on constate une régression de
leur part dans les exportations africaines de 86 à 62 % et de 73 % à 35 % dans
celles de l'ensemble des pays en développement.
Cette dépendance est d'autant plus préoccupante que les marchés de
ces produits de base souffrent de fortes instabilités et que la plupart des
facteurs entrant en jeu échappent aux pays exportateurs.
1.1.3 - Sélection des produits et sources utilisées
La sélection s'opère en deux étapes. La première tient compte du
poids des produits (part relative de chaque produit dans le total des exportations
d'un pays). La seconde dépend des possibilités de suivi des prix relevés ; elle
sera étudiée plus en détail dans le paragraphe 1.2.2 .
Nous avons recherché, pour chaque pays, les valeurs des exportations
pour différents produits de base durant l'année 1985. Le total de ces valeurs ne
représente naturellement pas toutes les exportations du pays. L'importance des
produits retenus par rapport à l'exportation totale d'un pays peut être définie
par un taux de couverture :
Total des exportations retenues x 100
Total des exportations du pays
Dans la mesure du possible nous avons essayé d'atteindre pour
chaque pays un taux de couverture voisin de 70 %.
En général, nous n'avons pas retenu, pour un pays donné, tout
produit dont les valeurs à l'exportation sont faibles (inférieures à 0.03% dans les
exportations totales du pays). Bien entendu, certains produits non retenus pour un
pays peuvent être pris en compte pour un autre pays.
Cette recherche a mis en évidence plusieurs problèmes. Il existe peu
de statistiques complètes pour les pays concernés. Certaines données sont parfois
des estimations et le détail des valeurs par produit n'est pas toujours
suffisamment précis pour permettre le calcul direct des pondérations.
Il nous a semblé préférable de prendre pour référence une source
unique. Les valeurs peuvent en effet être très différentes selon les organismes.
Après plusieurs recherches, la source la plus sure s'est avérée être l'annuaire de
l'Organisation des Nations Unies. Les divers bulletins statistiques produits par les
pays retenus ne sont pas à jour.
Ont donc été utilisés pour le relevé des valeurs les annuaires du
commerce extérieur, notamment ceux de la FAO.
Cependant le besoin de détail pour certains produits a posé quelques
difficultés. Il s'agit surtout des bois tropicaux et du café. Pour ce dernier il est
nécessaire de distinguer l'arabica du robusta car leurs prix sont très différents.
De même, il existe plusieurs essences de bois tropicaux dont les prix diffèrent.
Aussi était-il important, dès le départ, de faire ces distinctions dans les relevés
des valeurs afin de pouvoir définir la pondération adéquate pour chacun de ces
produits détaillés.
Dans un souci d'amélioration et dans l'optique du prochain
changement de base, il serait souhaitable que nous puissions obtenir directement
des pays une documentation sur leurs statistiques douanières.
On trouvera, en annexe 2, la liste des produits sélectionnés pour le
calcul de l'indice.
- 115 -
1.1.4 - Le choix de l'année de base
L'indice calculé doit mesurer l'évolution d'une variable (ici les prix)
par rapport à une période donnée. Nous avons retenu une période de référence
assez large, une année complète, de façon à éviter de prendre en compte des
fluctuations saisonnières.
Notre souci a été de trouver une période relativement stable donc
n'ayant pas subi de grandes variations concernant les données utilisées
(importantes fluctuations boursières, crise économique ou aléas climatiques
réduisant les récoltes et donc la quantité de produit disponible).
Notre choix s'est porté sur l'année 1985, d'une part pour des raisons
de disponibilité des données (pas de données sûres au delà de 1986) et, d'autre
part, en raison de l'environnement international que nous présentons ci-après.
Isolément l'année 1985 appara1t plutôt comme une mauvaise année
pour les produits de base. Mais il faut la situer dans le contexte général des
années 1980.
Entre 1980 et 1986, les cours des matières premières baissent
(surtout en 1986) puis remontent vers la mi-1987. Le contexte international en
1985 est loin d'être exceptionnel mais les conditions seront finalement plus
favorables aux pays en voie de développement : maintien d'un bon niveau
d'activité dans les pays industriels, poursuite de la désinflation.
Trois facteurs ont déterminé l'évolution des exportations :
- ralentissement de la demande mondiale en matières premières et
baisse de leurs cours ;
- baisse du taux de change du dollar ;
- chute des prix du pétrole en fin d'année.
Les fluctuations du dollar et la baisse du prix du pétrole ont
affecté diversement les pays en voie de développement selon leur structure
d'exportation.
Cependant l'effet d'ensemble n'a pas été aussi défavorable que l'on
s'y attendait sauf pour le coton, les oléagineux et le pétrole.
- 116 -
1.2 - Calcul de l'indice
Nous allons d'abord préciser la formule utilisée pour le calcul de
l'indice. Nous verrons ensuite les relevés des prix et enfin les différentes
opérations conduisant à l'élaboration des indices par pays et groupes de produits.
1.2.1 - La formule générale
a/ Choix du type d'indice
L'objectif est l'étude des variations des prix. Il s'agit donc d'un
indice de prix. La pondération ne varie pas, c'est celle de l'année de base. Ce
qui nous conduit à un indice du type de Laspeyres.
En effet, l'idéal serait de pouvoir calculer un indice de Paasche et
d'aboutir à un indice de Fisher. Mais cette méthode ne peut être utilisée ici en
raison de difficultés dans la collecte des données. Les valeurs des exportations
sont souvent connues avec beaucoup trop de décalage.
b/ Formule du calcul
La formule de l'indice de Laspeyres des prix est la suivante : pi ni
‘°‘ 0
z pi Qi o o
j indicateur du produit, varie de 1 à NPROD
(NPROD = nombre total de produits)
Po prix moyen de l'année de base
Q0 quantité exportée pendant l'année de base
(On a donc Po Q0 : valeur de l'exportation du produit j
pendant l'année de base)
P : prix courant, soit le prix moyen du produit j
pour le mois de calcul de l'indice.
On peut aussi l'exprimer de la façon suivante :
2 Qi pi 0 0
L =
2 Qi pi o o
L =
x Pi
Pi o
- 117 -
On remarque que cet indice est donc la moyenne pondérée des
rapports des deux prix (prix à l'époque courante / prix à l'époque de base). Les
pondérations sont établies à partir des valeurs à l'exportation durant l'année de
référence.
Si on veut obtenir l'indice en base 100 pour une lecture plus facile,
il suffit de le multiplier par cette valeur. On a donc:
Z Qio Pio x Pi
Pi o L = x 100
rL Qi j o P o
1.2.2 - Relevés des prix
a/ Choix des prix utilisés
Pour le calcul de l'indice, nous avons besoin de séries de prix
mensuels. Ces prix sont sélectionnés suivant plusieurs critères. Leur parution doit
être régulière afin que le suivi du produit soit possible. Ils doivent être
représentatifs de ce qui se passe sur les marchés. Ainsi nous n'avons pas pris en
compte les prix indicatifs d'accords commerciaux sur certains produits (le cacao
ou le café par exemple) car il apparaît que ces prix sont rarement suivis ou ne
concernent qu'une faible part des marchés des produits concernés. Cependant il
n'en est pas de même pour le sucre dont le prix retenu est celui garanti par un
accord entre les pays ACP et la CEE.
Lorsque les cours sont publiés quotidiennement, on effectue la
moyenne mensuelle. En effet, selon l'offre et la demande sur le marché, le prix
quotidien peut varier, or cette variation ne doit pas venir fausser l'indice qui,
lui, est mensuel.
Pour certains produits (le café par exemple), plusieurs prix sont
disponibles et réguliers. Dans ce cas, nous choisissons bien sûr parmi ceux
concernant les pays de l'indice. Puis, nous sélectionnons celui qui est le plus
proche de l'évolution de l'ensemble de ces prix. Cependant il peut exister de
grandes différences d'évolution ou un écart trop important suivant les différentes
variétés au sein d'un même produit. Dans ce cas plusieurs prix seront retenus. Il
en est ainsi pour les essences de bois tropicaux et le phosphate de calcihm.
Par contre le problème inverse peut aussi se poser : absence de
cours ou parution trop irrégulière. Dans ce cas nous opérons par agrégation : le
poids du produit concerné sera agrégé avec celui d'un produit similaire dont on
retiendra le prix pour le calcul.
Par exemple la valeur des exportations de pâte de cacao est ajoutée
à celle du beurre. A cette pondération totale pourra être appliqué le prix du
beurre de cacao, les deux produits étant proches et l'évolution de leur prix
considérée comme similaire.
Lorsque, pour un mois donné, on ne dispose pas de prix pour un
produit ou lorsque la parution de ce prix est retardée, deux procédés peuvent
être utilisés. Le premier consiste à étudier la tendance d'évolution du prix et à
extrapoler suivant cette dernière pour avoir un prix estimé. Le second revient à
utiliser un produit dit "de substitution" ayant une variation de prix similaire à
celle du produit concerné. Cette variation sera appliquée au dernier prix connu.
b/ Sources des relevés
Les prix relevés proviennent en général de trois types de marchés.
Premièrement des marchés à terme qui sont des contrats précisant
la qualité, la quantité et le lieu de livraison d'une marchandise. On peut citer en
exemple le London Metal Exchange où se pratiquent les marchés à terme pour les
métaux non ferreux.
Deuxièmement, il s'agit aussi de prix pratiqués par certains
producteurs en situation de quasi-monopole ou d'oligopole (ceci concerne quelques
minerais et métaux).
Enfin, troisièmement, ils peuvent venir des cours observés à l'aide
de sondages sur les marchés libres, beaucoup moins organisés que les deux
précédents mais ayant encore une grande importance. C'est le cas pour le riz ou
le poivre par exemple.
Les prix que nous utilisons sont relevés dans trois sources
principalement.
— 119 —
Il s'agit premièrement de la revue Marchés Tropicaux et
Méditerranéens où sont relevés une grande majorité des prix des produits
agricoles. Les cours y sont exprimés pour une date donnée, on en effectue donc
la moyenne. Deuxièmement, plusieurs prix sont collectés dans le Bulletin Mensuel
des Prix des Produits de Base publié par la CNUCED2 et, troisièmement, quelques
relevés sont effectués dans le bulletin mensuel du FMI, l'International Financial
Statistics.
Enfin les deux quotidiens Public Ledger et Financial Times, ainsi
que le bi-hebdomadaire Metal Bulletin viennent compléter ces trois sources pour
des produits particuliers tels que les produits pétroliers ou certains métaux.
Les cotations des produits sont exprimées dans des unités monétaires
différentes selon leur marché de référence. Une fois les prix relevés, les cours
sont convertis en francs français. Les taux de change utilisés sont bien entendu
aussi des moyennes mensuelles établies à partir des cours de la monnaie donnés
dans "Marchés tropicaux et méditerranéens". Les monnaies ainsi converties sont le
dollar et la livre sterling.
c/ Les autres prix suivis
Lors du relevé des valeurs des exportations à l'année de base, nous
avons retenu des produits pour lesquels nous n'avons pas trouvé régulièrement
les cours (huile de coprah ou certaines essences de bois par exemple). Il s'agit
souvent de produits récemment apparus dans le commerce ou dont la part a
augmenté depuis quelques années. Par conséquent les séries de prix disponibles ne
remontent pas jusqu'en 1985.
En général nous avons agrégé ces produits comme expliqué
précédemment. Mais dans l'optique de pouvoir les intégrer au prochain
changement de base, il nous est apparu intéressant de relever leurs prix lorsque
cela est possible. Ainsi parallèlement aux séries utilisées pour l'indice est
constituée une série de tous ces prix relevés pour former en quelque sorte une
base de données.
Ces prix pourront aussi servir de prix de substitution si des lacunes
apparaissent dans les cours utilisés pour le calcul de l'indice.
2 CNUCED : Conférence des Nations Unies pour le Commerce et le Développement.
- 120 -
1.2.3 - Les différents niveaux de calcul
L'indice est calculé à deux niveaux : par pays et par groupes de
produits.
Dans chaque pays il existe un indice d'ensemble, concernant tous les
produits exportés par le pays, et plusieurs indices calculés par groupes de
produits. Ces groupes sont différents d'un pays à l'autre pour deux raisons.
Premièrement, les pays n'exportent pas tous les mêmes produits.
Leurs structures de groupes sont donc différentes. Par exemple, pour la Côte
d'Ivoire, dans le groupe "Produits de l'agriculture et de la pêche", on trouvera le
café. Par contre, pour la Gambie et l'Ile Maurice, celui-ci ne figurera pas dans
ce groupe puisqu'il n'est pas exporté par ces pays.
Deuxièmement, un produit peut avoir une importance particulière
dans les exportations d'un pays (d'autant plus qu'il y a souvent forte dépendance
comme remarqué précédemment). Par conséquent on l'isole afin de mieux suivre
ses variations de prix. C'est souvent le cas pour le pétrole et ses dérivés ou
pour le café et le cacao.
Enfin un indice est aussi calculé pour tous pays confondus et par
groupes de produits. L'ensemble des pays couverts par l'indice est alors considéré
et traité comme un "pays" parmi les autres.
En illustration nous donnons à la page suivante deux exemples de
découpage par groupes dans deux pays, suivis d'un commentaire.
Exemple de découpage pour le CONGO et le BENIN :
Groupes du CONGO :
Ensemble des produits
Ensemble des produits sauf pétrole et dérivés
Produits de l'Agriculture-Elevage-Pêche (AEP)
Produits miniers
Produits miniers sauf pétrole et dérivés
Bois
Pétrole et dérivés du pétrole
- 121 -
Groupes du BENIN :
Ensemble des produits
Produits de l'Agriculture-Elevage-Pêche sauf cacao
Produits AEP sauf matières premières agricoles
Cacao
Coton
Commentaires :
Pour le Bénin, le cacao a été extrait parce qu'il a une part
importante dans les exportations du pays. Le Congo en exporte aussi mais dans
une moindre mesure. C'est pourquoi il n'a pas été isolé (il est contenu dans le
groupe "produits de l'agriculture"). Par contre le pétrole, ayant une forte
pondération, fait l'objet d'un groupe particulier pour le Congo.
Nous envisageons, par la suite, de calculer aussi un indice par
groupes de pays. Une étude sera effectuée sur les pays afin de déterminer les
regroupements les plus pertinents et d'aboutir ainsi à des indices par zones
géographiques, économiques ou monétaires.
II - LE TRAITEMENT INFORMATIQUE
Un logiciel, nommé PRINCE (PRix-INdice-Commerce Extérieur), a été
conçu pour le calcul et l'édition de l'indice. Nous avons essayé de faire en sorte
qu'il soit le plus souple possible sur deux points.
D'une part, toutes les informations et données de base nécessaires
au fonctionnement du logiciel sont paramétrées, ce qui permet leur changement
rapide en cas de modification importante (par exemple, annulation ou ajout d'un
produit, changement de structure de groupe, voire changement de base de
l'indice).
D'autre part, nous avons essayé de rendre son utilisation la plus
aisée possible, c'est-à-dire n'exigeant aucun apprentissage préalable. Toutes les
informations nécessaires au bon fonctionnement du logiciel s'affichent à l'écran
et permettent à l'utilisateur de préciser ses choix.
- 122 -
Les résultats des traitements peuvent être édités sur écran ou sur
papier, ou encore stockés dans des fichiers.
Nous décrirons successivement les types de fichiers utiles aux
différents traitements puis les modules composant le logiciel.
11.1 - Les fichiers
Les fichiers concernés peuvent être répertoriés en deux catégories :
fichiers de base, fichiers périodiques.
11.1.1 - Les fichiers de base
Ils se décomposent eux aussi en deux sous-groupes. Premièrement, il
s'agit de petits fichiers précisant la valeur de certains paramètres utiles au
fonctionnement des programmes tels que : le titre des produits et leur nombre,
l'année de base, le titre des pays et le nombre de groupes de produits dans
chaque pays...
Deuxièmement, d'autres fichiers, plus volumineux, servent à
structurer l'ensemble soumis au traitement. Il s'agit du fichier des prix à l'année
de base, du fichier contenant les pondérations ou encore du fichier servant à
gérer les relations entre pays et produits exportés.
Un autre fichier, n'intervenant pas dans le fonctionnement des
programmes, a été construit lors de ces travaux : il s'agit d'un fichier de
références pour les prix relévés. Ce fichier contient pour chaque produit:
l'intitulé exact, l'unité et la source du prix relevé.
11.1.2 - Les fichiers périodiques
Les plus simples d'entre eux sont les fichiers des prix mensuels. Ce
sont des fichiers qui sont créés lors de la saisie des prix. Ils ont autant
d'enregistrements que de produits et un seul champ où est porté le prix du produit.
Cette catégorie englobe aussi les fichiers où sont stockés certains
résultats tels que les indices mensuels ou les moyennes de prix pour une période donnée.
- 123 -
Ces fichiers, créés au cours du déroulement des programmes,
peuvent être utilisés en entrée pour d'autres types de traitements dont la
réalisation de graphiques.
11.2 - Les modules du logiciel
Le nom et la fonction de chacun de ces modules sont donnés ci-dessous.
INFEAOI Informations sur les programmes du logiciel
PRIXMOIS Saisie des prix mensuels
CINDEAOI Calcul des indices de prix
EDPRIX Edition des prix retenus pour une période donnée
COMPPRIX Comparaison des prix à des périodes distinctes
CORPRIX Correction des prix
EDPRIXAN Edition des prix mensuels par année
EDINDAN Edition des indices mensuels par année
PAYSPROD Recherche correspondance pays/produits ou produits/pays
GRAPHE Utilisation directe d'un logiciel graphique
PMOYENS Calcul des prix moyens
ACDOS Accès au DOS (système d'exploitation du micro-ordinateur)
SORTIE Sortie du logiciel
Nous n'allons détailler que quelques-uns de ces modules. En effet,
certains tels que PRIXMOIS, CORPRIX ou EDINDAN ne nécessitent pas
d'explications complémentaires.
- EDPRIX et COMPPRIX
Le programme EDPRIX permet l'édition sur papier ou sur écran de
fichiers contenant des prix. Il peut s'agir aussi bien de prix mensuels saisis
préalablement avec PRIXMOIS que de prix moyens calculés à l'aide du module
PMOYENS.
Le programme COMPPRIX compare les prix de plusieurs périodes
(prix mensuels, moyennes trimestrielles...) prises deux à deux. Il calcule, pour
chaque produit, la différence entre les deux prix ainsi que l'écart relatif en
pourcentage. L'édition sur papier des prix et des écarts se fait automatiquement,
en même temps que les calculs.
- 124 -
COMPPRIX peut servir dans deux cas. D'une part, à titre indicatif,
il permet d'apprécier l'évolution des prix et, d'autre part, il sert à détecter
d'éventuelles erreurs dans la saisie des prix, erreurs mises en évidence par un
écart trop important entre des prix mensuels successifs. En général on procède à
une vérification du prix saisi lorsque l'écart relatif dépasse 20 % .
11.2.2 - PMOYENS
Ce module calcule des moyennes de prix pour toute période
fractionnée en un nombre de mois déterminé. On peut ainsi obtenir des moyennes
trimestrielles, semestrielles ou annuelles. Ces résultats, stockés dans des fichiers,
peuvent ensuite servir à différentes études statistiques.
11.2.3 - PAYSPROD
Ce programme permet de visualiser une partie de la structure de
l'indice. Il comporte deux options. Dans la première, pour un pays donné, on
obtiendra la liste des produits qu'il exporte. Dans la seconde, pour un produit
donné on pourra retrouver la liste des pays exportateurs.
11.2.4 - ACDOS
Le DOS est le système d'exploitation du micro-ordinateur. Il peut
être utile d'y accéder alors que l'on est dans un logiciel pour effectuer quelques
commandes simples. Mais aussi, grâce à cet accès et à la structure des fichiers
créés, il est facile de faire appel, sans quitter PRINCE, à des utilitaires et à
certains logiciels d'analyse et de traitement statistique pour des études plus poussées.
Par exemple, on pourra ainsi faire appel à FISOPERA3 pour une
analyse factorielle permettant d'apprécier la structure des exportations des EAOI
ou mener des études en vue d'une classification des pays pour le calcul d'indices par zones.
- GRAPHE
Le module GRAPHE sert à accéder à des logiciels graphiques
(LOTUS, GRAPHWRITER, FRAMEWORK ou QUATTRO par exemple) sans quitter
PRINCE. Plusieurs représentations sont ainsi élaborées :
3 Pour une présentation de ce logiciel de traitement et d'analyse statistique sur micro-
ordinateur, dû à E. CADET, voir STATECO n° 60 de Décembre 1989.
- 125 -
- courbes représentant l'évolution de l'indice pour un pays donné ou
pour un groupe de produits;
- courbes d'évolution des prix par produit;
- histogrammes représentant les indices par groupes dans un (ou
plusieurs) pays donné(s).
N.B. : d'autres modules relatifs au traitement de séries chronologiques sont en
cours d'étude et viendront s'intégrer au logiciel.
III - PRESENTATION DE QUELQUES RESULTATS
Nous faisons figurer ci-après, à titre indicatif, certains résultats
obtenus :
TABLEAU 1
GRAPHIQUE 1
TABLEAU 2A
GRAPHIQUE 2A :
TABLEAU 2B
GRAPHIQUE 2B :
indices annuels de 1986 à 1989 par pays et par groupes de
produits (base 100=1985)
évolution des indices annuels pour certains grands groupes de
produits dans l'ensemble des pays
évolution des prix mensuels de trois produits agricoles (café
robusta, cacao et arachides) pour 1989
représentation de l'évolution des prix de ces trois mêmes
produits
prix mensuels de deux produits miniers (cuivre et aluminium)
pour 1989
représentation de l'évolution des prix de ces deux produits
Nous précisons que les tableaux et graphiques ici présentés (excepté
le tableau n°1) ont été réalisés avec le logiciel LOTUS et ses applications
complémentaires.
• • 0,\§1/4 o
P-Ir •
•
ANGOLA • . •
République d'Afrique du Sud
WI. •
'V- • •
SWAZILAND
SOTHO
ZAMBIE • • • •
ZIMBABWE • .
.MAURICE
Réunion
- 126 -
ANNEXE 1
Etats d'Afrique et de l'Océan Indien signataires de Lomé et Etats couverts par l'indice
Canaries it90•==>
Sahara Occidental
Egypte
L DU • CAP
VERT .4,0„
*I
• Il •
• MALI.
• • •
' •
TdHALII
MAURITANIE. • • • •
• NIGER • .
• •
Algérie
•
Libye
SOUDAN
•
EdAL • • d •
• • il
• g
. OI
• I •
GAMB
GUINE BISSAU
SIERR LEONE
Equateur
• • • COTE
•D'IVPIR
GUINEE EQUATORIAL SAO TOME & PRINCIPE,› •
I •
• ETHIOPIE
TANZANIE • • •
DJIBOUTI
cp
L
ÙYC'HELLES aPI r • 0 q
• NIGERIA • CC
0 ANDA KENYA
• • •
C.ENTRAFflIQUE
• • • •
• • • • , • AND
ZABRE • RW •
• • BURUND
• t • • • • •
. • •
• • •
GUINEE
Convention de Lomé
Pays s'apprêtant à joindre la Convention dès son indépendance (avril 1990)
Pays couverts par l'indice
• • • (/ COMORES
40 • •
- 127 -
ANNEXE 2
COMMERCE EXTERIEUR DES E.A.O.I.
Liste des produits couverts par l'indice
Viande bovine Poissons frais ou congelés Crustacés-mollusques Conserves de poisson Riz Bananes Ananas Sucre Café arabica Café robusta Fèves de cacao Beurre et pâte de cacao Thé Poivre Vanille Cannelle Girofles Tourteaux d'arachide Tourteaux palmistes Farine de poisson Tabac Peaux de bovins Arachides Graines de sésame Coprah et dérivés Palmistes Caoutchouc naturel (Essences de bois tropicaux)
Bosse Douka Framire Fraqué (ou limba) Kotibé
Niangon Okoumé (Congo) Okoumé (Gabon) Ozigo (Gabon) Samba (ou obéché) Sapelli (Cameroun-Centrafrique) Sapelli (Congo-Gabon) Sipo (Cameroun-Centrafrique) Sipo (Congo-Gabon) Sipo (Côte d'Ivoire) Tiama (Congo)
Coton Sisal Huile d'arachide Huile de palme Huile de palmiste Essence d'ylang Phosphate de calcium ( Sénégal) Phosphate de calcium (Togo) Fer Cuivre Aluminium Zinc Etain Manganèse Chrome Pétrole Gaz oil Fuel oil Uranium Diamants Cobalt Or
- 128 -
TABLEAU 1
INDICE DES PRIX A L'EXPORTATION DES E.A.O.I.
INDICES ANNUELS (base 100=1985)
PAYS ET GROUPES 1986 1987 1988 1989
ANGOLA ENSEMBLE DES PRODUITS 41.46 44.10 35.14 45.19 Ensemble sauf pétrole et dérivés 94.27 58.14 52.31 50.91
BENIN ENSEMBLE DES PRODUITS 68.00 70.50 62.73 64.95 Produits Agriculture-Elevage-Pêche sauf cacao 63.16 77.44 68.38 79.44 Produits A-E-P sauf matières lères agricoles 69.85 58.10 53.34 46.07 Cacao 70.45 57.97 50.72 41.94 Coton 61.72 83.19 70.38 85.53,
BURKINA ENSEMBLE DES PRODUITS 63.52 81.52 72.62 84.17 Produits A-E-P sauf matières lères agricoles 70.47 63.71 81.32 64.86 Coton 61.72 83.19 70.38 85.53
BURUNDI ENSEMBLE DES PRODUITS 109.25 56.82 62.20 60.66 Produits Agriculture-Elevage-Pêche 110.18 54.91 60.70 59.36 Produits miniers 90.80 94.75 91.91 86.38 Café 112.43 54.74 60.81 58.43
CAMEROUN ENSEMBLE DES PRODUITS 61.04 53.69 46.46 50.90 Ensemble sauf pétrole et dérivés 88.17 66.29 62.04 58.80 Produits A-E-P sauf café et cacao 95.57 97.90 103.72 106.54 Produits A-E-P sauf matières lères a&ricoles 86.13 58.48 51.78 47.09 Produits A-E-P sauf café-cacao-mat.leres agricoles 81.84 84.08 87.08 89.67 Café et cacao 86.22 57.95 51.04 46.20 Matières premières agricoles 96.75 99.08 105.14 107.99 Bois 107.02 107.56 108.70 114.41 Pétrole et dérivés 39.39 43.63 34.02 44.59
CAP VERT ENSEMBLE DES PRODUITS 107.86 104.41 104.43 124.65 Produits de la pêche 109.62 103.56 104.10 128.35
CENTRAFRIQUE ENSEMBLE DES PRODUITS 95.15 82.78 80.57 81.22 Produits Agriculture-Elevage-Pêche 88.53 71.87 66.19 70.22 Produits miniers 107.62 103.31 107.62 101.92 Café 97.10 57.83 51.52 48.90 Matières premières agricoles 77.92 89.27 84.39 96.65 Bois 98.43 98.44 102.09 111.33
COMORES ENSEMBLE DES PRODUITS 81.09 69.42 67.83 68.08 Epices 78.98 65.01 60.66 60.00
CONGO ENSEMBLE DES PRODUITS 42.39 45.83 37.65 48.42 Ensemble sauf pétrole et dérivés 91.85 83.95 91.31 106.89, Produits Agriculture-Elevage-Pêche 94.56 86.47 89.58 88.21 Produits miniers 40.99 44.74 36.26 47.36 Produits miniers sauf pétrole et dérivés 89.49 81.76 92.82 123.14 Bois 103.44 104.00 107.60 107.75 Pétrole et dérivés 39.45 43.57 34.46 44.95
COTE D'IVOIRE ENSEMBLE DES PRODUITS 79.41 64.07 59.02 56.12 Produits Agriculture-Elevage-Pêche 82.06 65.52 60.67 56.78 Produits A-E-P sauf café et cacao 84.97 89.72 92.84 94.76 Produits A-E-P sauf matières lères agricoles 80.78 60.85 55.14 50.21 Produits A-E-P sauf café-cacao-mat.leres agricoles 78.13 80.24 85.62 85.89 Café et cacao 81.16 58.05 50.73 45.04 Bois 109.59 110.33 109.27 111.80 Pétrole et dérivés 43.05 44.02 36.33 47.05
GABON ENSEMBLE DES PRODUITS 48.22 50.00 43.57 56.18 Ensemble sauf pétrole et dérivés 88.10 79.49 84.12 106.58 Produits Agriculture-Elevage-Pêche 98.21 97.10 96.84 98.34 Produits miniers 44.07 46.09 39.14 52.68 Produits miniers sauf pétrole et dérivés 80.59 66.39 74.65 112.72 Bois 100.19 100.10 100.08 102.35 Pétrole et dérivés 39.48 43.54 34.68 45.13
- 129- GAMBIE
ENSEMBLE DES PRODUITS Produits Agriculture-Elevage-Pêche Produits A-E-P sauf oléagineux Oléagineux
GHANA ENSEMBLE DES PRODUITS Produits Agriculture-Elevage-Pêche Produits miniers Produits A-E-P sauf cacao Cacao
GUINEE BISSAU ENSEMBLE DES PRODUITS Produits A-E-P sauf oléagineux Oléagineux
GUINEE EQUATORIALE ENSEMBLE DES PRODUITS Produits A-E-P sauf cacao Cacao
LIBERIA ENSEMBLE DES PRODUITS Produits Agriculture-Elevage-Pêche Produits miniers Produits A-E-P sauf matières lères agricoles Matières premières agricoles
MADAGASCAR ENSEMBLE DES PRODUITS Produits Agriculture-Elevage-Pêche Produits A-E-P sauf café Produits A-E-P sauf épices Café Epices
MALI ENSEMBLE DES PRODUITS Produits Agriculture-Elevage-Pêche Produits miniers Produits A-E-P sauf matières lères agricoles Matières premières agricoles
MAURICE ENSEMBLE DES PRODUITS Produits Agriculture-Elevage-Pêche Produits A-E-P sauf sucre Sucre
MAURITANIE ENSEMBLE DES PRODUITS Produits Agriculture-Elevage-Pêche Produits miniers
MOZAMBIQUE ENSEMBLE DES PRODUITS Produits Agriculture-Elevage-Pêche Produits miniers Produits Agriculture et Elevage Produits de la pêche
NIGER ENSEMBLE DES PRODUITS Produits miniers
NIGERIA ENSEMBLE DES PRODUITS Ensemble sauf pétrole et dérivés Produits Agriculture-Elevage-Pêche Produits miniers Produits miniers sauf pétrole et dérivés Pétrole et dérivés
RWANDA ENSEMBLE DES PRODUITS Produits Agriculture-Elevage-Pêche Produits A-E-P sauf café Café
SAO TOME ENSEMBLE DES PRODUITS Cacao
SENEGAL ENSEMBLE DES PRODUITS Produits Agriculture - Elevage-Pêche Produits miniers Produits Agriculture et Elevage Produits de la pêche Oléagineux
72.09 61.86 63.11 72.73 67.67 56.71 57.58 69.11 90.28 92.36 88.34 107.22 61.94 47.66 49.77 59.43
70.20 59.17 48.15 44.65 70.20 59.16 48.11 44.57 67.08 66.89 66.50 83.53 97.41 92.68 94.43 107.13 70.18 59.12 48.07 44.52
68.28 60.50 63.23 70.42 96.74 97.37 95.16 114.43 60.28 50.14 54.25 58.05
73.75 58.96 51.95 44.20 98.79 66.52 61.32 61.39 70.45 57.97 50.72 41.94
84.85 76.68 84.80 85.52 90.52 81.81 103.87 90.54 81.61 73.75 73.89 82.66 84.88 58.27 53.42 48.93 92.58 90.41 122.30 105.74
91.31 63.91 58.55 56.03 91.83 64.07 58.46 55.55 85.55 71.52 66.75 63.48 95.86 63.78 58.58 56.83 97.10 57.83 51.52 48.90 83.74 64.65 58.22 52.98
65.17 83.81 72.74 86.04 62.22 82.48 70.38 85.26 100.64 99.76 101.10 95.47 64.70 51.70 52.94 61.27 62.15 83.42 70.91 85.99
90.05 87.05 98.02 98.78 89.62 86.65 97.79 98.71 78.90 68.47 72.32 80.25 90.85 88.73 100.70 100.82
89.49 85.04 84.55 94.70 104.92 105.37 105.08 113.54 76.54 67.99 67.32 78.91
80.15 83.18 83.00 86.72 87.83 92.03 93.32 95.36 46.57 44.49 37.94 48.94 66.74 71.89 75.94 81.12 101.58 105.16 104.64 104.64
86.50 74.05 66.12 49.74 86.49 73.97 66.00 49.55
40.51 44.09 35.35 45.22 70.97 60.14 57.12 49.71 71.33 60.30 57.21 49.20 39.49 43.56 34.63 45.09 58.17 54.33 53.91 67.75 39.47 43.55 34.61 45.07
105.60 54.51 60.10 59.87 109.55 55.46 61.30 60.30 76.34 63.71 66.96 81.84
112.43 54.74 60.81 58.43
65.25 56.30 52.24 44.30 70.45 57.97 50.72 41.94
82.67 78.34 79.85 92.51 83.79 80.66 82.05 94.34 77.11 66.95 69.03 83.53 55.84 52.67 53.53 68.92 99.36 96.22 97.86 108.47 49.25 37.44 43.56 61.18
- 130- SEYCHELLES ENSEMBLE DES PRODUITS 50.72 48.89 43.89 56.02 Produits Agriculture-Elevage-Pêche 78.57 78.37 83.72 103.46
SIERRA LEONE ENSEMBLE DES PRODUITS 92.04 84.79 98.95 109.65 Produits Agriculture-Elevage-Pêche 84.76 62.21 57.27 53.01 Produits miniers 97.18 100.75 128.43 149.70 Produits A-E-P sauf café et cacao 96.15 99.03 99.26 99.72 Café et cacao 85.47 57.89 51.17 45.86
TCHAD ENSEMBLE DES PRODUITS 61.74 83.18 70.39 85.53 Coton 61.72 83.19 70.38 85.53
TOGO ENSEMBLE DES PRODUITS 79.13 70.27 64.98 75.02 Produits Agriculture-Elevage-Pêche 79.02 66.56 58.16 61.03 Produits miniers 79.22 73.31 70.56 86.44 Produits A-E-P sauf café et cacao 62.44 80.03 68.79 82.83 Café et cacao 89.73 57.87 51.29 46.97
ZAIRE ENSEMBLE DES PRODUITS 73.59 71.37 89.13 100.88 Ensemble sauf pétrole et dérivés 78.82 75.64 97.49 109.44 Ensemble sauf cuivre 72.52 59.71 57.85 59.73 Ensemble sauf cuivre-pétrole et dérivés 84.37 65.51 66.16 64.96 Produits Agriculture-Elevage-Pêche 92.32 58.76 55.95 52.41 Produits miniers 69.85 73.88 95.74 110.54 Produits miniers sauf pétrole et dérivés 75.62 79.65 107.35 122.98 Produits miniers sauf cuivre 62.78 60.18 58.79 63.32 Produits miniers sauf cuivre-pétrole & dérivés 77.92 70.99 74.44 75.13 Café et cacao 96.02 57.83 51.48 48.62
ENSEMBLE DES PAYS ENSEMBLE DES PRODUITS 54.43 52.98 47.81 55.42 Ensemble sauf pétrole et dérivés 82.99 71.02 73.13 75.28 Ensemble sauf cuivre 53.75 51.97 45.37 52.51 Ensemble sauf cuivre-pétrole et dérivés 83.85 69.75 68.16 68.27 Produits Agriculture-Elevage-Pêche 84.18 68.46 65.77 63.63 Produits miniers 44.72 47.93 41.94 52.75 Produits A-E-P sauf café et cacao 84.90 86.88 90.52 94.12 Produits A-E-P sauf oléagineux 85.62 69.32 66.17 63.87 Produits A-E-P sauf café-cacao et oléagineux 89.17 91.34 94.32 98.07 Produits A-E-P sauf matières lères agricoles 84.22 63.78 59.93 56.70 Produits miniers sauf pétrole et dérivés 79.98 77.49 91.78 104.81 Produits miniers sauf cuivre 43.38 46.35 38.41 48.72 Produits miniers sauf cuivre-pétrole & dérivés 82.62 74.63 77.24 85.89 Café et cacao 83.76 57.81 51.45 45.99 Oléagineux 44.90 45.12 55.00 57.08 Matieres premières agricoles 83.98 92.10 95.28 98.59 Bois 105.40 105.80 105.55 108.49 Pétrole et dérivés 39.51 43.56 34.58 45.06 Cuivre 74.67 83.23 120.96 142.76
- 131 -
GRAPHIQUE 1
INDICES ANNUELS A L'EXPORTATION DES E.A.0.1.
Evolution par grands groupes de produits
(Base 1985)
1985
1986
1987
1988
1989
LÉGENDE: 1 Ensemble des produits 2 Ensemble des produits sauf pétrole et dérivés 3 Produits de l'agriculture-élevage-pêche 4 Produits miniers 5 Produits miniers sauf pétrole et dérivés
COMMENTAIRES :
On remarque la chute des indices en 1986 suivie d'une relative stabilité pendant les années 1986 à 1989, excepté pour le groupe des produits miniers excluant le pétrole. L'indice de ce dernier groupe augmente effectivement à partir de 1987.
- 132 -
TABLEAU 2.A Exemple de prix de quelques produits agricoles
1989 Café Fèves de Arachides robusta cacao
Janvier 1360 1187.0 1853.85 Février 1360 1127.0 1911.00 Mars 1360 1055.0 1905.47 Avril 1255 1007.0 1899.31 Mai 1295 817.5 1977.80 Juin 1315 807.5 2086.06 Juillet 1000 882.5 1927.09 Aout 990 890.0 1775.08 Septembre 1040 812.5 1838.95 Octobre 980 720.0 1714.88 Novembre 860 662.5 1763.37 Décembre 820 592.5 1859.28
Unités FF/100Kg FF/100Kg FF/t
GRAPHIQUE 2.A Evolutions des prix du café, du cacao et des arachides
Année 1989
' Janvier I Mars Mai Fevrier
l I Septebre I Novem m bre Dec embre
Ei
2.2
2.1
2
1.9
1.8
1.7
1.6
1.5
1 . 4
1.3
1.2
1 . 1
1
0.9
0.8
0.7
0.6
0.5
Avril Juin Mut Octobre
o lu min i urn
- 133 -
TABLEAU 2.B Exemple de prix de deux produits miniers
1989 Cuivre Aluminium
Janvier 21019.47 14430.55 Février 19538.55 13910.17 Mars 20632.83 12997.95 Avril 19679.82 13413.80 Mai 18026.82 14414.33 Juin 17327.03 12922.76 Juillet 15940.46 11470.42 Aout 18154.78 11359.86 Septembre 18974.7 11529.69 Octobre 18522.5 11602.50 Novembre 16151.78 10817.64 Décembre 14448.3 9956.60
Unités FF/t FF/t
GRAPHIQUE 2.B Evolution des prix du cuivre et de l'aluminium
Année 1989
I Janvier I Mars Mai Juillet -I- Septembre Novembre F
Février /avril Juin Aout Octobre Décembre
22
21
20
19
18
17
16
15
14
13
12
11
10
9
1 NS E Ë.D340.0490.90.0.