cp debussy mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables....

50
Debussy, Mahler Michel Tabachnik, direction Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique Vendredi Vendredi Vendredi Vendredi 23 23 23 23 mai mai mai mai 20h 20h 20h 20h Samedi 24 mai 17h Samedi 24 mai 17h Samedi 24 mai 17h Samedi 24 mai 17h Opéra Berlioz Durée : 1h30 environ Cahier Cahier Cahier Cahier pédagogique pédagogique pédagogique pédagogique Saison 2013-2014 Service Jeune Public et Actions Culturelles - 04 67 600 281 - www.opera-orchestre-montpellier.fr

Upload: others

Post on 22-Sep-2020

3 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Page 1: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Debussy, Mahler

Michel Tabachnik, direction

Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon

Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique

Vendredi Vendredi Vendredi Vendredi 23232323 maimaimaimai 20h20h20h20h Samedi 24 mai 17hSamedi 24 mai 17hSamedi 24 mai 17hSamedi 24 mai 17h

Opéra Berlioz Durée : 1h30 environ

Cahier Cahier Cahier Cahier pédagogiquepédagogiquepédagogiquepédagogique Saison 2013-2014 Service Jeune Public et Actions Culturelles - 04 67 600 281 - www.opera-orchestre-montpellier.fr

Page 2: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Programme

Claude DebussyClaude DebussyClaude DebussyClaude Debussy Jeux Gustav MahlerGustav MahlerGustav MahlerGustav Mahler Symphonie n°5 en ut dièse mineur Michel TabachnikMichel TabachnikMichel TabachnikMichel Tabachnik direction musicaledirection musicaledirection musicaledirection musicale Orchestre national Montpellier LanguedocOrchestre national Montpellier LanguedocOrchestre national Montpellier LanguedocOrchestre national Montpellier Languedoc----RoussillonRoussillonRoussillonRoussillon

Page 3: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Claude Debussy Claude Debussy Claude Debussy Claude Debussy Biographie Biographie Biographie Biographie Compositeur français (Saint-Germain-en-Laye 1862-Paris 1918). Nul compositeur, au XXe siècle, n'a plus que Claude Debussy changé la manière d'entendre et de penser la musique. Musicien de la liberté, il développa dans les registres les plus variés une écriture d'une éloquence et d'un raffinement incomparables.

Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohèmeJeunesse et années de bohèmeJeunesse et années de bohèmeJeunesse et années de bohème Né dans une famille de petits commerçants, Claude Debussy apprend le piano et entre en 1872 au Conservatoire de Paris, où il passera douze années. Lauréat du prix de Rome en 1884, avec l'Enfant prodigue, il s'installe à Paris en 1887. Revenu « follement wagnérien » de ses séjours à Bayreuth (1888-1889), il découvre aussi le Boris Godounov de Moussorgski, en même temps que la musique d'Extrême-Orient à l'Exposition Universelle. Après celle du Quatuor à cordes (1893), la première audition du Prélude à l'après-midi d'un faune (1894), d'après Mallarmé, marque la fin de sa période bohème. Le début de la notoriétéLe début de la notoriétéLe début de la notoriétéLe début de la notoriété En 1893, Debussy assiste à la création parisienne de la pièce Pelléas et Mélisande de Maeterlinck et décide d'en tirer un opéra, auquel il travaillera pendant dix ans. Au cours de cette période naissent des chefs-d'œuvre comme Pour le piano (1896-1901), les Trois Chansons de Bilitis, sur des poèmes de Pierre Louÿs (1897-1898), ou encore les trois Nocturnes (Nuages, Fêtes, Sirènes) pour orchestre (1897-1899), qui triomphent aux concerts Lamoureux en décembre 1900. Debussy commence alors à être admiré ; il fréquente les cafés élégants, il rencontre peintres et écrivains (tel Marcel Proust). Monsieur Croche, antidilettante, recueil de ses articles qui paraîtra en 1921, témoigne de son anticonformisme absolu et de sa verve impitoyable. La création tumultueuse deLa création tumultueuse deLa création tumultueuse deLa création tumultueuse de Pelléas et MélisandePelléas et MélisandePelléas et MélisandePelléas et Mélisande La création de Pelléas et Mélisande, le 30 avril 1902, qui sera ensuite acclamé sur les plus grandes scènes du monde, marque dans la carrière de Debussy un tournant décisif, même si elle a lieu dans le tumulte. En effet, lorsque l'opéra est inscrit au répertoire de l'Opéra-Comique, Maeterlinck veut que le rôle de

Page 4: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Mélisande revienne à sa femme, la cantatrice Georgette Leblanc. Mais Debussy lui préfère la jeune Écossaise Mary Garden : « C'était, dit-il, la même voix douce que j'avais entendue au plus profond de mon âme. » Maeterlinck retire alors son autorisation, intente une action en justice, mais Debussy obtient de cause. Le jour de la création, Maeterlinck et ses amis fomentent une cabale et, à l'entracte, les partisans des deux hommes en viennent aux mains ; la police doit intervenir. Grâce à André Messager, au pupitre de direction, la première est menée à son terme. Les critiques font preuve, dans leur majorité, d'une totale incompréhension. Toutefois, la deuxième représentation est triomphale, et l'opéra est joué pendant trois mois à guichets fermés. Une vaste œuvre pour pianoUne vaste œuvre pour pianoUne vaste œuvre pour pianoUne vaste œuvre pour piano Le compositeur devient chef d'école malgré lui – ce qui le conduit à railler, et même à maudire, les « debussystes ». Entre 1903 et 1908, il écrit une part importante de son œuvre pour piano (la plus vaste de la musique française avec celle de Fauré) : Estampes (1903), Masques et l'Isle joyeuse (1904), les deux recueils des Images (1905-1908), Children's Corner (1906-1908). En 1905 a eu lieu la première audition de la Mer, poème symphonique en trois parties, que suivent les Trois Images pour orchestre (1905-1912) et les deux livres de douze Préludes chacun (1909-1912). Un musicien «Un musicien «Un musicien «Un musicien « françaisfrançaisfrançaisfrançais »»»» Dès 1910, Diaghilev invite Debussy à collaborer avec D'Annunzio sur le thème du Martyre de Saint Sébastien, œuvre en forme d'oratorio que créent les Ballets russes en 1911, puis il lui commande le ballet Jeux (1913), chorégraphié par Nijinski. La Première Guerre mondiale éveille en Debussy des sentiments nationalistes violents. On peut y voir la raison de l'hostilité qu'il témoigne à Schoenberg, et de sa décision de signer ses œuvres, en particulier les trois Sonates de 1915-1917, « Claude Debussy, musicien français ». De 1915 datent les Douze Études pour piano, dédiées à Chopin, et la suite En blanc et noir pour deux pianos, œuvres visionnaires d'un homme sur sa fin. La modernité «La modernité «La modernité «La modernité « debudebudebudebussystessystessystessyste »»»» Créateur de formes inédites pour chaque nouvelle œuvre, Debussy est en avance d'un demi-siècle sur son temps. Sa trajectoire, qui bouleverse les notions de temps et d'espace en musique, est d'une remarquable unité. Au dynamisme dramatique issu de Beethoven, il oppose le statisme de ses formes ouvertes, fragments d'éternité sans commencement ni fin, et de ses harmonies non fonctionnelles, qui sont les juxtapositions d'agrégats autonomes. Par-delà toute technique, il se réclame des « concordances mystérieuses entre la nature et l'imagination ». Debussy est un maître de l'osmose panthéiste, des paysages sans hommes. Dans Pelléas et Mélisande,dont les personnages apparaissent comme des silhouettes sans visage, on trouve à profusion ses mots, ses parfums et ses images – clarté, obscurité, mer, forêt, nuit, brume, ombre, vent, eau, soleil, lumière –, qui sa vie durant le frappèrent tant. Ses héritiers se nomment Varèse, Messiaen, Boulez. Répertoire des autres œuvresRépertoire des autres œuvresRépertoire des autres œuvresRépertoire des autres œuvres Il s'agit d'œuvres de musique instrumentale et de musique vocale. –––– Musique pour pianoMusique pour pianoMusique pour pianoMusique pour piano : Petite Suite à 4 mains (1888-1889), Deux Arabesques (1888-1891), Suite bergamasque, avec le célèbre Clair de lune (1890-1905), Hommage à Haydn (1909), Six Épigraphes antiques à 4 mains (1914). –––– Musique de chambreMusique de chambreMusique de chambreMusique de chambre : Danse sacrée et Danse profane pour harpe et cordes (1904), Syrinx pour flûte seule (1913), Sonate n° 1 pour violoncelle et piano (1915), Sonate n° 2 pour flûte, alto et harpe (1915), Sonate n° 3 pour violon et piano (1916-1917). –––– MuMuMuMusique orchestralesique orchestralesique orchestralesique orchestrale : Printemps (1887), Fantaisie pour piano et orchestre (1889-1890), trois Images (Gigues, Iberia, Rondes de printemps) [1905-1912].

Page 5: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

–––– Musique vocaleMusique vocaleMusique vocaleMusique vocale : la Damoiselle élue, cantate (1887-1888) ; mélodies, dont Ariettes oubliées (1887-1888), Cinq Poèmes de Baudelaire (1887-1889), Fêtes galantes I (1891-1892) et II (1904) ; Rhapsodie pour clarinette et orchestre (1909-1910) ; Khamma, ballet (1912-1913). CitationsCitationsCitationsCitations « Il fallait désormais chercher après Wagner et non d'après Wagner. » Claude Debussy, à l'époque de Pelléas et Mélisande. « L'art est le plus beau des mensonges. » Claude Debussy, Monsieur Croche, antidilettante. « De tout temps la beauté a été ressentie par certains comme une secrète insulte. » Claude Debussy, Monsieur Croche, antidilettante.

Source : http://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Claude_Debussy/115872 Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique

Page 6: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

JeuxJeuxJeuxJeux, poème, poème, poème, poème dansédansédansédansé

Ce « poème dansé », - la dernière grande partition d’orchestre de Debussy – fut une commande de Serge de Diaghilev pour les Ballets Russes ; il fut composé durant la seconde moitié de 1912, achevé au début de 1913. La création eut lieu le 15 mai 1913 au Théâtre des Champs Elysées, à Paris, dans une chorégraphie de Nijinski, - qui en avait écrit l’argument : succès très mitigé. Surtout étant donné le fait que la création, deux semaines plus tard, du Sacre du Printemps de Stravinski devait créer l’ « évènement » parisien que l’on sait, éclipsant complètement les mérites de Jeux, - beaucoup moins tapageurs. L’œuvre, cependant, fut reprise en version de concert le 1er mars 1914 chez Colonne : si sa carrière scénique reste encore incertaine, elle demeure une pièce importante du répertoire symphonique. Il est vrai que le public des salles de concert ne peut aujourd’hui ignorer l’influence que cette partition aura exercé sur la musique contemporaine, - ni les analyses qu’elle a suscitées, d’un Pierre Boulez, d’un Jean Barraqué, d’un Bernd-Aloys Zimmermann entre autres. A présent l’on tient Jeux pour l’œuvre la plus hardie de son auteur, pour la plus « prophétique ».

« Une apologie plastique de l’homme de 1913 », avait suggéré Diaghilev. Le prétexte de Nijinski tint en quelques lignes qu’on reproduit ici, - nullement indispensables pour goûter l’œuvre, mais utiles pour en définir l’esprit : « Dans un parc, au crépuscule, une balle de tennis s’est égarée ; un jeune homme, puis deux jeunes filles, s’empressent à la rechercher. La lumière artificielle des grands lampadaires électriques qui répand autour d’eux une lueur fantastique leur donne l’idée de jeux enfantins ; on se cherche, on se perd, on se poursuit, on se querelle, on se boude sans raison ; la nuit est tiède, le ciel baigné de douces clartés, on s’embrasse. Mais le charme est rompu par une autre balle de tennis jetée par on ne sait quelle main malicieuse. Surpris et effrayés, le jeune homme et les deux jeunes filles disparaissent dans les profondeurs du parc nocturnes ». Banal prétexte à « flirts » chorégraphiés, donc, - que, sur le plan musical, un Messiaen a su résumer en une formule d’une brève exactitude : « un marivaudage orchestral ». Mais aussi une sorte d’hommage à la jeunesse et à la beauté, en cette « musique de geste » (Michel Chion) toute frémissante de rythmes et d’un lyrisme subtilement érotique.

Dans le détail, la partition de Jeux compte certainement parmi les plus difficiles à analyser de tout le répertoire symphonique ; aussi faut-il se limiter ici à une vue d’ensemble et à quelques indications indispensables. La première impression est celle d’un morcellement continu, et d’un éparpillement de la matière sonore échappant à toute compréhension de la structure de l’œuvre. La forme, cependant, est assimilable à celle du rondo : mais pseudo-rondo, en ce sens que l’habituel refrain s’y trouve remplacé par d’autres formes « ouvertes » aussi imprévisibles que les « jeux » des protagonistes. Il n’y a donc, dans toute la partition, ni reprises, ni redites, - sinon de petites répétitions de motifs à de brefs intervalles telles que Debussy a toujours su les pratiquer. Il s’agit, en réalité, de l’exploitation organique de simples cellules thématiques de base – des micromotifs – vouées à toutes les métamorphoses possibles (type de composition – notons-le – fort proche de celui de Sibelius travaillant sur la « croissance organique »). Ainsi, en d’autres termes, a-t-on pu parler de « développement absent » (Jean Barraqué), et un analyste aussi minutieux qu’Harry Halbreich conclure que … « à la limite, tout est transition ». Toutefois, ce qui frappera d’emblée l’auditeur est l’extrême mobilité des timbres – sorte de dispersion de la sonorité orchestrale –, ainsi que les raffinements de l’harmonie (la tonalité de base, toute implicite, est la majeur ; mais l’agitation permanente du fond harmonique, passant avec vivacité d’un instrument à un autre, pourrait en faire douter) ; enfin les subtilités de l’écriture rythmique (sur la base d’un 3/8 sans cesse contrarié, prêtant à toutes les équivoques sans jamais les résoudre) : écriture rythmique aussi légère, bondissante que les balles de tennis perdues.

L’œuvre, néanmoins, maintient une logique implacable et quasiment « objective » : chorégraphie oblige ! Le miracle est qu’elle n’en fait pas moins la part du cœur et de ses juvéniles intermittences, -

Page 7: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

captant à merveille la fragilité des moments successifs et des sentiments amoureux qu’ils donnent l’occasion de suggérer… On présentera, pour terminer, deux micromotifs de base à partir desquels s’effectuent variations et métamorphoses, - d’ailleurs aisément repérables dans l’introduction qui prélude à l’ « action » : le premier, de très faible ambitus, apparait scherzando à la harpe dès les premières mesures, puis est repris en renversement par le cor anglais :

Le second, également scherzando, vient un peu plus tard à la clarinette :

C’est lui qui jouera le rôle de « refrain », - mais précisons qu’on aura quelques peine, par la suite, à le reconnaître. Le plus sage étant de se livrer sans réticence aux magies sonores de l’œuvre – de ce chef-d’œuvre –, et d’en savourer les finesses et les imprévus.

Guide de la musique symphonique, sous la direction de François-René Tranchefort, Les Indispensables de la Musique, édition Fayard

Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique

Page 8: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Gustav Mahler, Gustav Mahler, Gustav Mahler, Gustav Mahler, Symphonie n°5 en ut dièse mineuSymphonie n°5 en ut dièse mineuSymphonie n°5 en ut dièse mineuSymphonie n°5 en ut dièse mineurrrr

Une alchimie des contraires ou comment partager sa vie «Une alchimie des contraires ou comment partager sa vie «Une alchimie des contraires ou comment partager sa vie «Une alchimie des contraires ou comment partager sa vie « entre la plus haute entre la plus haute entre la plus haute entre la plus haute contemplation et le tumulte le plus terrestrecontemplation et le tumulte le plus terrestrecontemplation et le tumulte le plus terrestrecontemplation et le tumulte le plus terrestre » (Gustav Mahler)» (Gustav Mahler)» (Gustav Mahler)» (Gustav Mahler) Création à Cologne, le 18 octobre 1904, sous la direction de Gustav Mahler. Selon la maxime Per aspera ad astra, elle célèbre la victoire de l’homme et du créateur sur la douleur et sur la mort comme l’ensemble des symphonies de Mahler et la frise de Klimt, Beethoven. Quatre évènements bouleversent la vie de Mahler pendant l’hiver et l’automne de l’année 1901 et Quatre évènements bouleversent la vie de Mahler pendant l’hiver et l’automne de l’année 1901 et Quatre évènements bouleversent la vie de Mahler pendant l’hiver et l’automne de l’année 1901 et Quatre évènements bouleversent la vie de Mahler pendant l’hiver et l’automne de l’année 1901 et provoquent, dans sa manière de composer, une révolution, un changement de style.provoquent, dans sa manière de composer, une révolution, un changement de style.provoquent, dans sa manière de composer, une révolution, un changement de style.provoquent, dans sa manière de composer, une révolution, un changement de style. Dans la nuit du 24 au 25 février1901, Mahler échappe de justesse à la mort, sauvé, à une demi-heure près, d’une hémorragie intestinale par l’arrivée du docteur Hochenegg. « J’ai perdu pendant cette nuit-là un tiers de mon sang ! Sans aucun doute je récupèrerai mais cette maladie ne m’aura pas moins coûté dix ans de ma vie. » Il rencontre, le 7 novembre 1901, Alma Schindler, lors d’un dîner auquel étaient aussi conviés le peintre Gustav Klimt et Max Buckhard, ancien directeur du Burgtheater. Alma Schindler est la fille du peintre paysagiste Emil Jacob Schindler et belle-fille de Karl Moll, peintre lui aussi, membre, comme Klimt, du mouvement de la Sécession. Coup de foudre réciproque : ils se marient le 9 mars 1902. Belle, intelligente, musicienne, vive, elle a vingt ans de moins que lui. Rescapé de la mort, Mahler l’est aussi de la solitude. Dans cette période, Mahler relit les Motets de Bach. Autre coup de foudre ! « Dans Bach, toutes les cellules vitales de la musique sont réunies, comme en Dieu le monde. » « Jamais il n’a existé plus grande polyphonie. » Fin juillet 1902, Mahler part se détendre dans le Tyrol du Sud à Toblach, devenu Tobiacco et découvre l’un des sites les plus saisissants des Dolomites, les Tre Cime di Lavaredo. A partir de l’épreuve de la maladie, l’obsession de la mort habite plus que jamais le compositeur ; le funèbre, le tragique, la douleur, dominent plusieurs des compositions de l’été 1901: Der Tamboug’sell, les Kindertotenlieder. Mais aussi l’euphorie, la joie cynique d’un homme conscient de l’avoir échappé belle. L’affirmation de la vie dans l’exubérance et la luxuriance côtoie alors l’expression absolue du funeste. Les deux données de cette Ve Symphonie. Cinq mouvements mais trois parties organisées en arche comme un arc de triomphe, forme inaugurée par le XVe quatuor de Beethoven et qui bientôt sera chère à la Deuxième Ecole de Vienne. Pas de tonalité globale mais une tonalité progressive, évolutive. Do # mineur (1er mouvement), La mineur (2ème mouvement), Ré Majeur (3ème mouvement), Fa Majeur

(4ème mouvement), Ré Majeur (5ème mouvement). Une progression allant de l’ombre à la lumière suivant la maxime de Beethoven : Per aspera ad astra (« par des chemins difficiles jusqu’aux étoiles »).

Page 9: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

La première partie, premier portant de l’arche, comprend : 1) TrauermarschTrauermarschTrauermarschTrauermarsch (marche funèbre) 2) Stürmisch bewegtStürmisch bewegtStürmisch bewegtStürmisch bewegt (orageux et animé). Mit grosser VehemenzMit grosser VehemenzMit grosser VehemenzMit grosser Vehemenz (avec une grande véhémence). Bedeutend Bedeutend Bedeutend Bedeutend langsamerlangsamerlangsamerlangsamer (sensiblement plus lent) pour le second thème. 3) Le ScherzoScherzoScherzoScherzo, , , , cœur de la symphonie, sommet de l’arche, occupe la deuxième partie. La troisième partie, deuxième portant de l’arche, rassemble : 4) L’AdagiettoAdagiettoAdagiettoAdagietto et 5) Le RondoRondoRondoRondo----FinaleFinaleFinaleFinale Pris entièrement par ses fonctions de chef d’orchestre et de directeur artistique à l’Opéra de Vienne, Mahler ne peut se consacrer entièrement à la composition que pendant l’été à Maiernigg, isolé du monde, au milieu de la nature dans un Hauschen, une cabane, proche de la maison qu’il vient de se faire récemment construire sur les bords du Wörthersee. On pense que la première partie et la deuxième ont été écrites pendant l’été 1901, c’est à dire les trois premiers mouvements puisque Mahler a séparé la Trauermarsch (la Marche funèbre) de l’Allegro, Stürmisch bewwegt (orageux et animé), Mit grosser Vehemenz (avec une grande véhémence), Bedeutend langsamer (sensiblement plus lent), génétiquement, biologiquement relié à l’Allegro par ses éléments thématiques. On peut considérer alors la Trauermarsch comme l’introduction du second mouvement.

Première partiePremière partiePremière partiePremière partie : premier portant de la forme en arche: premier portant de la forme en arche: premier portant de la forme en arche: premier portant de la forme en arche 1 1 1 1 –––– TrauermarschTrauermarschTrauermarschTrauermarsch Tonalité : Do # mineur. C’est une marche funèbre de structure relativement symétrique :

Marche Trio Marche Trio Marche

La symphonie commence par un appel de trompette, tragique et sombre, dérivé d’un signal appartenant au répertoire de l’armée autrichienne sous la dénomination de Generalmarsch ; elle évoque le monde de son enfance à Iglau, les défilés militaires qui passaient devant la maison de ses parents mais aussi le début de la Ve Symphonie de Beethoven ! Elle se transforme très vite en fanfare, rejointe par tout l’orchestre. Variée, transposée, réduite à ses premières mesures, passant des trompettes aux cors, aux timbales, elle revient, point de repère et lien entre les différents épisodes.

Page 10: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Plongé dans la composition du dernier des Wunderhorn Lieder, der Tamboursg’sell, Mahler enchaîne différents épisodes dont les significations expressives se rapportent toutes à la mort : lamentation du premier thème, la consolation, la douleur, la révolte mais aussi la douceur, la résignation, la plainte, la lassitude, le découragement.

Page 11: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Hélas me voici, pauvre tambour ! On vient me tirer de mon cachot. …………………………………….. O potence, haute demeure, Tu es tellement effrayante Je ne veux plus te regarder ……………………………… Bonne nuit, falaises de marbre, Et vous, montagnes et douces collines. …………………………………………… Je crie à tous les échos mon adieu, Je prends congé de vous ! Bonne nuit, bonne nuit. Voilà ce que chante « Le petit tambour », der Tamboursg’sell, condamné à mort pour désertion. Comme cet enfant-soldat, la fanfare, montant dans l’aigu, à la fin, se dissout dans la nuit : roulement de timbale, appel de la trompette solo avec sourdine, roulement de la grosse caisse, dernier appel ppp à la flûte solo, roulement de la grosse caisse, pizzicato des altos, violoncelles et contrebasses : Klangfarbenmelodi. Cette mélodie de timbres, innovée par Beethoven dans l’allegretto de la VIIe Symphonie, annonce la pièce de Schoenberg, Farben, « couleur », qui ici, crée une sensation d’éloignement, spatialise la fin de cette marche funèbre. 2 2 2 2 –––– Pas de dénomination pour ce second mouvementPas de dénomination pour ce second mouvementPas de dénomination pour ce second mouvementPas de dénomination pour ce second mouvement qui est en réalité le premier allegro de la symphonie, la marche funèbre occupant la place stratégique d’une introduction. Stürmisch bewegt : orageux et animé. Mit grosser Vehemenz : avec une grande véhémence. Bedeutend langsamer : sensiblement plus lent pour le second thème. Ce mouvement a la structure bi-thématique d’un Allegro. Tonalité : La mineur, Fa mineur (2ème thème). De nombreuses modulations font fluctuer le développement : Sol mineur, Si Majeur, La b Majeur… Lors de la réexposition, le second thème est donné en mi mineur. Mesure : 2/2 Forme : Sonate.

Page 12: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 13: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 14: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 15: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 16: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 17: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 18: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

La violence domine cet allegro : dans la dramaturgie de l’œuvre, il a pour fonction de rompre à la fois l’accablement de la Trauermarsch, son immobilisme et la fureur propulse tous les épisodes en la mineur. Reprenant les thèmes de la Marche funèbre, Mahler leur apporte ici une vie dynamique dans les développements en les intercalant entre les épisodes construits sur les deux thèmes essentiels dans des tonalités qui oscillent, qui « tanguent » sans cesse. Il les réveille comme un magicien donnant vie et mouvement à des statues de granit. La lutte toute beethovenienne entre le premier et le second thème débouche sur un Choral en Ré Majeur, « apparition fantasmagorique d’une apparition céleste » (Adorno) qui par sa tonalité, anticipe, annonce le 3ème et surtout le 5ème mouvement.

Page 19: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 20: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Le choral disparaît, reste du domaine de l’apparition. La violence et l’angoisse atteignent leur climax dans la coda, puis comme la trauermarsch, ce moment-là de vie s’écroule ; l’écriture se déconstruit, se désincarne : motifs de gammes, tierces répétées en staccato aux bois et harpes alternent avec les élans de 9èmes, derniers soupirs du mouvement, donnés successivement par le violon solo et la clarinette basse, puis l’alto solo et le 1er basson, puis par tous les altos, suivis des violoncelles, des contrebasses, tous jouant maintenant en glissando. La harpe fait entendre la dernière tierce suivie des deux pizzicati des violoncelles et contrebasses. Le la du timbalier, que Mahler souhaite gut stimmen ! (« bien juste »), conclut en La mineur, dominante mineure de la tonalité initiale, Ré Majeur, cette première partie tragique, violente, funèbre, aux limites du silence. Après ce mouvement, le compositeur réclame une longue pause, folgt lange Pause avant d’attaquer la deuxième partie, le Scherzo.

Deuxième partieDeuxième partieDeuxième partieDeuxième partie : sommet de l’arche: sommet de l’arche: sommet de l’arche: sommet de l’arche Première entrée du terme Scherzo dans la production du compositeur. Le Scherzo, troisième mouvement et centre de gravité de la symphonie entre les portants que sont les première et troisième parties, a été le premier achevé. Chant de reconnaissance d’un rescapé de la mort, à la manière du mouvement central du XVe Quatuor de Beethoven. Version ici exubérante de l’esprit d’action de grâce, il est une glorification de la vie. Le plus ample des cinq mouvements (819 mesures), cœur de la symphonie : il est l’Autriche (selon Gustav Mahler), l’Autriche rurale à travers ses Ländler, aux trois temps marqués, son Tyrol dans les grands intervalles mélodiques des Jodler, l’Autriche des villes de villégiatures aux couleurs raffinées, arachnéennes parfois, d’un orchestre de ville d’eau et... Vienne et ses valses ! Et à Vienne, on est, à cette époque, en pleine « Beethovenmania ». Gustav KlimtGustav KlimtGustav KlimtGustav Klimt prépare, pour la XIVe exposition du groupe de la Sécession,Sécession,Sécession,Sécession, la Frise Beethoven.Frise Beethoven.Frise Beethoven.Frise Beethoven. On sait que Beethoven a introduit le premier le Scherzo et son cadre obligé, dans les formes la Symphonie. Mais il y a autant de différences entre un scherzo beethovenien et celui-ci, qu’entre une barque et un paquebot qui transporte ses passagers, leurs vies multiples. A Maiernigg, Mahler écoute la nature, les oiseaux dont il stylise ici les chants sans jamais les noter ni les reproduire littéralement. L’inspiration vient, foisonnante, exubérante. En 1895, il avait écrit : « Evidemment, c’est de la nature que nous recevons tous les rythmes et les thèmes originels. » Dans cet été de 1901, il semble que ce soit la complexité de la nature qui le pousse vers la recherche d’une écriture en mesure d’apporter ordre et harmonie tout en transmettant la sensation de la liberté originelle de la nature. Avant Iannis Xenakis, Mahler ici, pressent l’écriture stochastique, l’écriture musicale du hasard.

Page 21: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

« Ce mouvement exige une suprême maîtrise artistique, il est d’une difficulté colossale... Comme dans une cathédrale gothique, la confusion apparente doit, en effet se résoudre en un ordre et une harmonie suprême. » (Mahler) Le 5 août, il poursuit : « Quelle peine il me donne !... Surtout à cause de la simplicité des thèmes. » En effet, les tournures populaires des thèmes sont une constante de l’écriture mahlérienne. « Tous basés sur des accords de tonique et de dominante… Pour cette raison, l’enchaînement des accord présente des difficultés redoutables, surtout à cause de mon principe selon lequel rien ne doit se répéter, et tout doit se rien ne doit se répéter, et tout doit se rien ne doit se répéter, et tout doit se rien ne doit se répéter, et tout doit se développer sans cesse, et de soidévelopper sans cesse, et de soidévelopper sans cesse, et de soidévelopper sans cesse, et de soi----même.même.même.même. » Mahler affirme, pour la première fois, le principe de la nonnonnonnon----répétitionrépétitionrépétitionrépétition qui sera au cœur de l’esthétique de la deuxième école de Vienne. Selon le compositeur, ce scherzo est « complètement différent de tout ce que j’ai composé auparavant », tous les éléments y sont « malaxés », si bien qu’il « ne contient pas une seule petite graine ou cellule qui n’y soit broyée et transformée... Chaque note est d’une vitalité radicale et l’ensemble tourne comme un tourbillon, comme une ronde ou comme la chevelure d’une comète. C’est l’homme dans la pleine lumière, dansC’est l’homme dans la pleine lumière, dansC’est l’homme dans la pleine lumière, dansC’est l’homme dans la pleine lumière, dans l’éclat du jour, l’éclat du jour, l’éclat du jour, l’éclat du jour, parvenu au point culminant de sa vie… tout ici est exprimé par des moyens purement musicaux.parvenu au point culminant de sa vie… tout ici est exprimé par des moyens purement musicaux.parvenu au point culminant de sa vie… tout ici est exprimé par des moyens purement musicaux.parvenu au point culminant de sa vie… tout ici est exprimé par des moyens purement musicaux. » » » » (Mahler) Et c’est le cor obligato qui, debout, conduit le bal. Tonalité : Ré Majeur. La structure est irrégulière et asymétrique. Globalement, elle peut être appréhendée selon le schéma :

Page 22: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

• Scherzo

Page 23: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 24: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

• Trio 1

Page 25: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 26: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

• Scherzo

• Trio 2

Page 27: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

• Scherzo • Trios 1 et 2 • Coda

Page 28: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

« C’est de la polyphonie que je trouve ici ! », s’écrie-t-il alors qu’il était à la foire, au milieu des manèges, des balançoires, des baraques de tir, des théâtres de guignols, des fanfares, des sociétés chorales. Là, pour la première fois, il introduit ses thèmes les uns à côté des autres selon l’usage mais en les traitant suivant les techniques du contrepoint, les tissant les uns avec les autres, n’attendant pas que leur exposition se termine avant qu’un autre intervienne. Mahler devient diabolique, lorsqu’il démultiplie le procédé : l’orchestre, atteint littéralement de fièvre éruptive, fait intervenir plusieurs fragments thématiques constamment diversifiés qui coupent la parole et l’élan au thème en cours d’exposition. Et il applique ce mixage à l’organisation globale du Scherzo, bousculant les schémas traditionnels : « tradition égale négligencetradition égale négligencetradition égale négligencetradition égale négligence ». Chaque fois que le thème principal revient, une ou deux mesures sont supprimées ou ajoutées, la phrase est différemment accentuée, des syncopes brisent le rythme ternaire des ländler ou des valses. De cette stabilité instable naît un sentiment de profonde ambiguïté, typique de Vienne, vivant son « Apocalypse joyeuse » entre 1880 et 1938. Gustav Klimt, Arthur Schnitzler, Joseph Roth traitent eux aussi de la complexité de la nature et de l’homme, cachées par un conformisme apparent. « Et le publicEt le publicEt le publicEt le public ! O Ciel! O Ciel! O Ciel! O Ciel ! Quelle figure il va faire devant ce chaos qui sans cesse enfante un nouveau ! Quelle figure il va faire devant ce chaos qui sans cesse enfante un nouveau ! Quelle figure il va faire devant ce chaos qui sans cesse enfante un nouveau ! Quelle figure il va faire devant ce chaos qui sans cesse enfante un nouveau monde, pour se désagréger un instant plus tard, devant ces sons primitifs d’un monde en gestation, devant monde, pour se désagréger un instant plus tard, devant ces sons primitifs d’un monde en gestation, devant monde, pour se désagréger un instant plus tard, devant ces sons primitifs d’un monde en gestation, devant monde, pour se désagréger un instant plus tard, devant ces sons primitifs d’un monde en gestation, devant cette mer quicette mer quicette mer quicette mer qui hurle, qui mugit, qui gronde, devant ces étoiles qui dansent et ces vagues qui chatoient et hurle, qui mugit, qui gronde, devant ces étoiles qui dansent et ces vagues qui chatoient et hurle, qui mugit, qui gronde, devant ces étoiles qui dansent et ces vagues qui chatoient et hurle, qui mugit, qui gronde, devant ces étoiles qui dansent et ces vagues qui chatoient et qui vous coupent le souffle.qui vous coupent le souffle.qui vous coupent le souffle.qui vous coupent le souffle. »

Troisième partieTroisième partieTroisième partieTroisième partie : un colloque sentimental : un colloque sentimental : un colloque sentimental : un colloque sentimental (été 1902) Elle est le reflet lumineux de la première partie et le deuxième portant de la forme en arche. 4 4 4 4 ---- Adagietto.Adagietto.Adagietto.Adagietto. Double signification de ce mouvement qui est à l’origine de la résurrection des œuvres de Mahler, grâce à la bande originale du film de Lucchino Visconti, Mort à Venise. Si l’on fait confiance au témoignage de Willem Mengelberg, chef d’orchestre hollandais et ami intime de Gustav et Alma, il serait une déclaration d’amour du compositeur à Alma : aussitôt achevé, Mahler aurait envoyé le manuscrit à Alma et elle serait venue immédiatement le rejoindre, ayant compris le message. On peut faire confiance à son témoignage, d’une part parce que les deux époux lui ont raconté la même anecdote et que, d’autre part, Mengelberg a noté sur la partition les paroles certainement dictées par le compositeur. Cependant, l’Adagietto semble être tout proche, par l’écriture et l’expression, du lied Ich bin der Welt abhanden gekommen (« Me voilà coupé du monde »), du cycle des Rücker-lieder, écrit l’été précédent, qui exprime des sentiments tout autres. Je vis seul dans mon paraJe vis seul dans mon paraJe vis seul dans mon paraJe vis seul dans mon paradis,dis,dis,dis, Dans mon amour, dans mes chants.Dans mon amour, dans mes chants.Dans mon amour, dans mes chants.Dans mon amour, dans mes chants.

Page 29: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Après tout, la solitude, le recueillement, l’amour ne sont pas incompatibles ! Tonalité : Fa majeur, celle de la VIe Symphonie de Beethoven, la Pastorale. Mesure : 4/4 ;Tempo : Sehr langsam(très lent). Nicht schleppen. Etwas flüssiger als zu Anfang (ne pas traîner. Un peu plus allant qu’au début). Forme : lied pour orchestre, l’Adagietto se moule dans la structure lied varié, A B A’, la partie centrale développement modulant de la première partie, conduit à une réexposition amplifiée de la première. Après les déferlements du Scherzo, c’est le temps de l’intimité élégiaque. L’orchestre titanesque du 3ème mouvement n’est plus ; seuls les cordes demeurent, accompagnées des arpèges de la harpe. Les premiers violons, pianissimo, murmurent la première phrase qui, typique de l’écriture mélodique de Mahler, monte par degrés conjoints. Les violoncelles puis les altos en relais, poursuivent ce chant, immense mélodie hors temps, en apesanteur.

Page 30: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

La partie centrale, Fliessender, amplifie la première phrase. Elle fait intervenir l’aigu des violons, elle module en Sol b M, Mi M, puis RéM avant la réexposition de la première section en Fa M par un glissement chromatique inattendu.

Page 31: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Dans cette section, la harpe a disparu. Mahler augmente la résonance harmonique des cordes par la division des altos et des violoncelles, apportant ainsi une véhémence encore plus convaincante. Ce colloque sentimental s’achève par la disparition progressive de la phrase initiale des cordes dans le grave des violons. 5 5 5 5 ---- RondoRondoRondoRondo----FinaleFinaleFinaleFinale.... Tonalité/Ré Majeur Mesure : 2/2 Tempo : Allegro ; Allegro giocoso. Frisch (« frais »). Grazioso… le tempo fluctue à chaque séquence. Il est la « volonté de vivre », un « hymne à la vie, au bonheur et à la solitude de la création », « un chef-d’œuvre de concentration musicale dans un style brillant ». Dans sa structure : Un rondo, certes, mais qui applique le principe de la non-répétition : le refrain, traité en fugato, n’est jamais repris identique à sa première présentation. Les motifs des couplets sont des thèmes développés par une écriture sans cesse évolutive. Ces thèmes, tous identifiables, émergent sans prévenir de la vie grouillante de l’orchestre. Trois dominent :

• Le premier, joué malicieusement par le cor solo, dès la courte introduction, cite l’un des Wunderhornlieder : Lob des hohen Verstandes - l’éloge du jugement supérieur. Mahler met ici en garde la critique qui vient de siffler sa IVe Symphonie. Ce lied raconte un match de bel canto entre le coucou et le rossignol. (Ce thème ressemble à l’une de nos chansons populaires : Dansons la capucine).

Page 32: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 33: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Avec l’autorisation du rossignol, le coucou choisit pour arbitre l’âne, qui, bien évidemment accorde la victoire au coucou !

• Le deuxième élément, premier thème puisqu’il débute l’Allégro dès la fin de l’introduction, a une couleur rustique. Il est entendu aux cors accompagnés d’une double pédale de musette tonique, dominante des violoncelles.

• Le troisième n’est autre que la mélodie centrale de l’Adagietto. Accéléré comme un film passé à

grande vitesse, dénaturé, il en perd son sublime tout en restant parfaitement identifiable.

Page 34: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 35: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse
Page 36: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Mahler joue avec ses thèmes, toujours repérables grâce à leur allure d’air populaire, leur impact mélodique (l’Adagietto), les intégrant à une technique contrapuntique qui se moque du sérieux de cette discipline. L’écriture évoque les mouvements d’un kaléidoscope géant pris de vertige puisque aucun d’eux n’aboutit jamais et qui, par moments, retrouve l’équilibre lorsqu’interviennent les périodes en écriture verticale, homophonique. Globalement, la structure repose sur l’alternance de périodes homophoniques, contrapuntiques, soudées par les fugatos (technique dérivée du contrepoint) qui jouent en quelque sorte le rôle de refrain. Vers la fin, les cuivres font entendre par deux fois un choral, emblème de la germanité issu du second mouvement. Il n’aboutit pas à une affirmation triomphale comme le Choral du Final de la Ière Symphonie de Brahms. La coda mêle, dans une accélération effrénée, tous les motifs et fragments thématiques du mouvement. Ce Rondo-Finale est bien un rondo. Cependant, la présence des deux thèmes contrastés et développés télescope la structure du rondo en lui associant celle de la sonate bi-thématique. De nouveau, retour à Beethoven, puisque c’est lui qui est à l’origine de ce combiné. On peut citer le 3ème mouvement de la 8e Sonate pour piano, opus 13, dite « pathétique ». Par la maîtrise absolue de tous les procédés classiques d’écriture, ce Rondo est un climax dans l’œuvre du compositeur. Unité organique de la symphonieUnité organique de la symphonieUnité organique de la symphonieUnité organique de la symphonie Mahler a cherché à créer une unité organique entre chaque mouvement et l’a trouvée en inaugurant une sorte de parenté génétique : autre innovation issue, elle aussi, de la pensée beethovénienne. Dans le finale de la IXe Symphonie, Beethoven cite le début des mouvements précédents. Le thème du Trio de la Trauermarsch devient le second thème du second mouvement, l’Allegro. Le thème en triolets de noires des violons (à partir de la mesure 165) revient dans l’Allegro à la mesure 117. Les élans de 9ème du second trio, envahissent à leur tour ce deuxième mouvement qui cite, à la fin de son développement, le thème de la Marche donné à partir la mesure 120. Un fragment de l’Adagietto se met à danser dans le Rondo, traité comme thème mélodique contrastant. Les Chorals de l’Allegro, et du Rondo sont apparentés. Le Scherzo et l’Allegro ont la même tonalité, Ré Majeur. La symphonie est terminée, au moins dans sa version piano, le 24 août 1902. « Tout ne doit exister qu’à sa place, dans un rapport organique avec le tout et en relation harmonieuse Tout ne doit exister qu’à sa place, dans un rapport organique avec le tout et en relation harmonieuse Tout ne doit exister qu’à sa place, dans un rapport organique avec le tout et en relation harmonieuse Tout ne doit exister qu’à sa place, dans un rapport organique avec le tout et en relation harmonieuse avec toutes les parties.avec toutes les parties.avec toutes les parties.avec toutes les parties. »

A nouveau style,A nouveau style,A nouveau style,A nouveau style, nouvelle instrumentationnouvelle instrumentationnouvelle instrumentationnouvelle instrumentation Dès la première lecture par l’orchestre de Cologne, l’opacité de son instrumentation le surprend.

Page 37: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

« Tu as écrit une symphonie pour percussion et rien d’autre », , , , s’écrit Alma Mahler en sortant de l’une des premières répétitions de la Symphonie, précédant sa création le 18 octobre 1904 à Cologne. Mahler raya à la craie rouge une partie des timbales et une partie de caisse claire. Ce n’est là que le début du remaniement de son orchestration. Une écriture aussi serrée, enchevêtrée, tissée, pressentant celle d’Alban Berg, devait impliquer en contrepartie la transparence de l’orchestre et son corollaire, la virtuosité de ses instrumentistes : « les différentes parties sont si difficiles à jouer qu’en réalité elles exigent purement les différentes parties sont si difficiles à jouer qu’en réalité elles exigent purement les différentes parties sont si difficiles à jouer qu’en réalité elles exigent purement les différentes parties sont si difficiles à jouer qu’en réalité elles exigent purement et simplement des solisteset simplement des solisteset simplement des solisteset simplement des solistes, voulant construire grâce à son art un univers avec tous les moyens techniques un univers avec tous les moyens techniques un univers avec tous les moyens techniques un univers avec tous les moyens techniques possibles.possibles.possibles.possibles. »»»» Intransigeant avec lui-même parce que « la composition exige l’autocritique la plus sévèrela composition exige l’autocritique la plus sévèrela composition exige l’autocritique la plus sévèrela composition exige l’autocritique la plus sévère »,,,, il a écrit sa symphonie suivant la méthode par lui découverte et adoptée à l’âge de huit ans : se mettre au piano et jouer tout ce qui lui passe par la tête. Mais le piano n’est pas l’orchestre ! Alors, minutieusement, il va reprendre son orchestration jusqu’à sa mort, inaugurant aussi bien le pointillisme de Webern que le tellurisme de Xenakis. La dernière révision sera l’un des derniers travaux de Mahler : « J’en ai terminé avec la J’en ai terminé avec la J’en ai terminé avec la J’en ai terminé avec la CinquièmeCinquièmeCinquièmeCinquième. Il m’a fallu littéralement la ré. Il m’a fallu littéralement la ré. Il m’a fallu littéralement la ré. Il m’a fallu littéralement la ré----instrumenter. Je n’arrive pas à instrumenter. Je n’arrive pas à instrumenter. Je n’arrive pas à instrumenter. Je n’arrive pas à comprendre comment j’ai pu alors me tromper si complètement, tel un débutancomprendre comment j’ai pu alors me tromper si complètement, tel un débutancomprendre comment j’ai pu alors me tromper si complètement, tel un débutancomprendre comment j’ai pu alors me tromper si complètement, tel un débutant. Il est évident que la t. Il est évident que la t. Il est évident que la t. Il est évident que la routine que je m’étais acquise m’a entièrement abandonné routine que je m’étais acquise m’a entièrement abandonné routine que je m’étais acquise m’a entièrement abandonné routine que je m’étais acquise m’a entièrement abandonné parce qu’un nouveau style exigeait une parce qu’un nouveau style exigeait une parce qu’un nouveau style exigeait une parce qu’un nouveau style exigeait une nouvelle techniquenouvelle techniquenouvelle techniquenouvelle technique.... » (8 février 1911) Cette partition a pour l’instant disparu. C’est la version révisée en 1910, éditée par les éditions Kalmus qui est actuellement jouée. Composition de l’orchestre : 4 flûtes dont le piccolo 3 hautbois dont le cor anglais 3 clarinettes avec la clarinette basse 6 cors 4 trompettes 3 trombones 1 tuba Percussions : 4 timbales, cybales, grosse caisse avec cymbales, caisse claire, triangle, glockenspiel, tamtam, fouet 1 harpe Quintette à cordes En juxtaposant le répertoire de tous les jours, quotidien voire banal, au colossal, au pathétique, en associant la tendresse et le raffinement, Mahler transfère dans le monde de la symphonie sa propre perception de la vie. Cette œuvre compacte, qui introduit le procédé de la non-répétition, des tonalités évolutives, celui des télescopages des formes (5ème mouvement), de l’union organique des mouvements, soudés entre eux par éléments motiviques traités comme des gènes et qui considère chaque mouvement dans la totalité de l’ensemble, marque l’entrée de Gustav Mahler dans la maîtrise de la grande forme.

Page 38: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Par le traitement minutieux de son instrumentation, elle crée l’orchestre des XXe et XXIe siècle. Tournant le dos à toute affirmation, elle crée une langue de l’incertitude et du hasard, tout cela en étant viscéralement liée à la vie « terrestre » du compositeur entre 1901 et 1902. De la réalité au sublimeDe la réalité au sublimeDe la réalité au sublimeDe la réalité au sublime : c’: c’: c’: c’est le dernier plan de est le dernier plan de est le dernier plan de est le dernier plan de Mort à VeniseMort à VeniseMort à VeniseMort à Venise : Tadzio pointe un doigt vers le ciel : Tadzio pointe un doigt vers le ciel : Tadzio pointe un doigt vers le ciel : Tadzio pointe un doigt vers le ciel pendant que meurt l’homme qui l’a aimépendant que meurt l’homme qui l’a aimépendant que meurt l’homme qui l’a aimépendant que meurt l’homme qui l’a aimé : victoire de la vie sur la mort.: victoire de la vie sur la mort.: victoire de la vie sur la mort.: victoire de la vie sur la mort.

Geneviève Deleuze Tous droits réservés, diffusion limitée et gratuite à l’usage pédagogique

Page 39: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Gustav MahlerGustav MahlerGustav MahlerGustav Mahler ((((1860 1860 1860 1860 –––– 1911191119111911))))

Gustav Mahler, d’après Orlik (1902), Illustration Mikka « Si l’on savait comment Mahler nouait sa cravate, on en apprendrait plus qu’en trois années de contrepoint. » Arnold Schoenberg Si effectivement la création musicale de Gustav Mahler magnifie l’anecdote jusqu’à lui donner les dimensions d’un monde, elle demeure aussi viscéralement nouée au déroulement continu de sa vie, l’une réagissant sur l’autre, en synergie. Moi, Gustav MahleMoi, Gustav MahleMoi, Gustav MahleMoi, Gustav Mahlerrrr (Texte imaginaire, seules les phrases en italique sont des citations de Mahler) Mort depuis cent ans, je n’ai jamais été aussi vivant. Chaque jour un peu mieux, je me rends compte à quel point les expériences spirituelles et les impressions de ces années ont donné à ma vie future sa forme et son contenu. Avant ma rencontre avec Sigmund Freud, je savais que l’enfant était le père de l’homme. Ma vie entière est alimentée par ce que j’ai absorbé et assimilé pendant ces années cruciales de mon enfance. Je suis donc né juif d’Europe Centrale, à Kalischt, officiellement un 7 juillet 1860, selon mon acte de naissance conservé par les Archives de Prague. Cette petite communauté rurale est située dans une région pauvre, dans les collines tchéco-moraves du Sud-est de la Bohème, aux confins de la Bohème et de la Moravie. C’est dans ces régions moins peuplées de l’Empire Austro-hongrois que l’Impératrice Marie-Thérèse

Page 40: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

permit aux minorités juives de s’installer après avoir songé à leur expulsion totale. Elle a eu du flair : d’autres familles juives chassées de Vienne et de Prague s’installent dans ces mêmes régions déshéritées : celles de Freud, Kafka, Stéfan ZweigFreud, Kafka, Stéfan ZweigFreud, Kafka, Stéfan ZweigFreud, Kafka, Stéfan Zweig. Je suis autrichien comme Mozart et Schubert mais comme juif, j’assume des siècles d’émigrations, de persécutions et de massacres. L’émancipation définitive des Juifs d’Europe Centrale n’intervient qu’en 1867, après des siècles de périodes alternant oppression et tolérance. D’autre part, le nationalisme tchèque, qui s’oppose au pouvoir autrichien, ne cesse de maintenir un climat de révolte dans cette région où j’ai vécu ma petite enfance. Le 3 juillet 1886, (six ans après ma naissance), la monarchie autrichienne est confrontée à sa défaite à Sadowa devant l’armée prussienne, à la désintégration qui succède à la Première Guerre Mondiale, 1914-1918 (quatre ans après ma mort), aux problèmes insolubles qui lui sont propres. Elle est avant tout confrontée aux problèmes que pose cette mosaïque de nationalités et qui lui fait perpétuellement douter de sa propre identité. Cependant, je parle allemand comme les juifs de cette région qui se considèrent comme les représentants de la culture allemande en pays tchèques mais toute ma petite enfance j’ai parlé tchèque. Je suis trois fois sans patrieJe suis trois fois sans patrieJe suis trois fois sans patrieJe suis trois fois sans patrie : un Bohémien parmi les Tchèques, un Autrichien p: un Bohémien parmi les Tchèques, un Autrichien p: un Bohémien parmi les Tchèques, un Autrichien p: un Bohémien parmi les Tchèques, un Autrichien parmi les Allemands armi les Allemands armi les Allemands armi les Allemands et un Juif parmi tous les peuples du monde.et un Juif parmi tous les peuples du monde.et un Juif parmi tous les peuples du monde.et un Juif parmi tous les peuples du monde. Que l’on s’étonne alors que j’introduise dans le monde de la création symphonique l’incertitude Que l’on s’étonne alors que j’introduise dans le monde de la création symphonique l’incertitude Que l’on s’étonne alors que j’introduise dans le monde de la création symphonique l’incertitude Que l’on s’étonne alors que j’introduise dans le monde de la création symphonique l’incertitude ainsi qu’une sorte d’instabilité. ainsi qu’une sorte d’instabilité. ainsi qu’une sorte d’instabilité. ainsi qu’une sorte d’instabilité. Dans un premier temps, ma famille vit pauvrement à Kalischt. Cependant, le désir de promotion sociale ainsi que la nécessité de nourrir et d’éduquer convenablement une progéniture nombreuse incitent mon père, Bernhard, à s’installer à Iglau en Moravie entre Vienne et Prague comme distillateur d’alcool et boulanger, métiers plus rémunérateurs et plus valorisants que celui de charretier par lequel il débuta dans la vie active. Doté de l’énergie hors normes de ma grand-mère, mon père étend et développe ses commerces tout en étant dévoré par la fureur d’apprendre, lisant sans cesse, surnommé, au temps de son métier de charretier, savant de siège de charrette. Grâce à sa réussite matérielle, il constitue une bibliothèque classique et moderne qui sera l’une des premières d’Iglau. Brutal, intransigeant, colérique, violent, humiliant son épouse, « draguant » ostensiblement ses employées, mais intelligent et curieux, il entend que ses enfants se suffisent à eux-mêmes tout en souhaitant leur donner l’éducation la plus adaptée à leurs dons et la plus complète. Effectivement, en arrivant à Vienne, la première de mes préoccupations sera d’assurer mon autonomie matérielle en donnant des leçons de piano. Nous nous installons donc dans un appartement puis dans une grande maison citadine toute proche d’une caserne. Je découvre les sonneries et les musiques militaires et j’ai même le droit d’assister aux répétitions ainsi qu’aux concerts de l’harmonie du régiment. Dans la région, il existe aussi des fanfares qui n’ont rien de militaire, constituées d’anciens soldats, qui participent aussi bien aux mariages, aux fêtes qu’aux enterrements.

Page 41: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Les styles divers de ces ensembles sont aux sources de cette mosaïque d’écritures, l’un des traits le plus essentiel de mes compositions. Ma première œuvre n’est-elle pas intitulée Polka avec introduction de marche funèbre ? Le rituel funèbre et la fête représentent association qui domine ma production symphonique. Ainsi, depuis le temps d’Iglau jusqu’à mon départ à Vienne, les sonneries militaires vont rythmer ma vie d’enfant et d’adolescent ! Elles sont présentes dans chacune de mes symphonies, tout d’abord par la présence importante dans leur orchestration des vents, bois et cuivres et de la percussion ; de plus, chacune d’elles comporte une marche funèbre ou dionysiaque, même ma 4e, ma seule symphonie à la couleur d’enfance. Je n’ai pu m’empêcher de faire entendre un appel strident de trompette qui sera le motif initial de ma 5e Symphonie. A propos d’IglauA propos d’IglauA propos d’IglauA propos d’Iglau Troisième ville de Moravie, depuis le XVIe siècle, la musique y occupe une place importante et j’habite la cité dans laquelle l’un des fondateurs de l’Ecole de Mannheim, Stamitz, a fait ses études au lycée des Jésuites. Curieuse coïncidence que de vivre dans la ville dans laquelle a vécu l’un des initiateurs de l’orchestre symphonique, des créateurs de la symphonie, moi qui ai donné à cette forme une dimension colossale. Dussek et surtout Smetana, que j’affectionne particulièrement, y ont aussi fait leurs études. L’héritage de mon pèreL’héritage de mon pèreL’héritage de mon pèreL’héritage de mon père

J’ai connu, par mon père, c’est vrai, l’intransigeance, la brutalité mais aussi l’énergie, la réalité d’un combat quotidien, continu, nécessaire à la réalisation de mes projets, combat qui me conduira en 1897 à abandonner le judaïsme pour me convertir au catholicisme afin d’obtenir le poste le plus prestigieux de l’univers musical, celui de directeur artistique et de chef d’orchestre de l’Opéra de Vienne, interdit aux juifs. J’en démissionnerai en 1907, mon année noire, sous des attaques ouvertement antisémites de plus en plus virulentes. Intransigeant, perfectionniste, impitoyable, ne ménageant ni moi-même ni les autres, mon comportement a dû aussi compter dans cette animosité violente qui s’est concentrée sur ma personne.

1907 est mon année noire parce que je suis frappé par trois fois par le fatum, les trois coups du destin. La scarlatine tue ma fille aînée, j’apprends que je suis atteint d’une maladie de cœur génétique incurable et je suis contraint de démissionner de l’Opéra de Vienne où j’ai créé, avec le peintre-décorateur Alfred Roller, entre 1904 et1907, mes plus grandes mises en scène, à l’origine de la tradition prestigieuse de cette grande maison. Ayant hérité de mon père un amour cynique et colossal de la vie, j’ai surmonté ces épreuves. Je suis un battant : voilà la raison pour laquelle, la Frise-Beethoven, (voir document joint) peinte par Gustav Klimt, me représente sous les traits du Chevalier en armure. Grâce aux violences conjugales de mon père, j’ai découvert le pouvoir magique des chansons de rue. A l’âge de cinq ans, complètement traumatisé par une querelle particulièrement violente de mes parents, j’ai fui dans la rue où, là, sur le trottoir, un musicien jouait une célèbre chanson populaire, O du lieber

Page 42: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Augustin. Voilà la raison pour laquelle, lorsque je compose et qu’une poussée d’émotion me fait délirer malgré moi, un air populaire s’impose. A l’âge de cinquante ans, j’ai raconté cet épisode de ma petite enfance à Sigmund Freud, mon compatriote à Vienne. L’héritage de ma mèreL’héritage de ma mèreL’héritage de ma mèreL’héritage de ma mère Mariée contre son gré à mon père de dix ans plus âgé qu’elle, c’est une mère de douleur, une mater dolorosa. Quatorze enfants, trois filles et onze fils. A cette époque où la mortalité infantile sévit durement, elle voit mourir sept de mes frères en bas âge puis Ernst, mon frère préféré, à l’âge de treize ans. Sans se plaindre, ma mère subit ces deuils, ces grossesses enchaînées de 1858 à 1879, unie à un mari comme l’eau au feu dans une vie conjugale sans amour. Etre angélique, plein de sagesse et de compréhension, elle était toute douceur, toute bonté. Sa voix m’éloignait du monde, toute sa personne rayonnait, m’attirait par magie. Elle m’a transmis le sens du sublime et révélé que la douleur pouvait générer une sorte de bonheur qui peut être à l’origine de la douleur pouvait générer une sorte de bonheur qui peut être à l’origine de la douleur pouvait générer une sorte de bonheur qui peut être à l’origine de la douleur pouvait générer une sorte de bonheur qui peut être à l’origine de l’exl’exl’exl’expression si prenante de mes mouvements lents et de mes thèmes de lamentationpression si prenante de mes mouvements lents et de mes thèmes de lamentationpression si prenante de mes mouvements lents et de mes thèmes de lamentationpression si prenante de mes mouvements lents et de mes thèmes de lamentation. La fin du temps de l’enfanceLa fin du temps de l’enfanceLa fin du temps de l’enfanceLa fin du temps de l’enfance La mort de mon frère Ernst fut à la fois le deuil le plus cruel de ma vie, la première expérience de la douleur avant la mort de Marie, ma fille aînée, en 1907, dont jamais, je ne me consolerai. D’un an plus jeune que moi, intelligent, doué, il était tout à la fois : le complice de mes jeux et mon auditeur de prédilection. Il était atteint d’une péricardite et j’ai suivi pendant des mois, jour après jour, la progression de sa maladie, essayant de l’amuser, de le distraire en inventant de nouvelles histoires. Quelques mois après, je quitte Iglau pour Vienne où je suis admis au Conservatoire. J’ai quinze ans. Mon enfance est finieMon enfance est finieMon enfance est finieMon enfance est finie Enfance au cours de laquelle, très tôt, s’est révélée ma fascination pour toute musique, ainsi que des dons exceptionnels remarqués par tout mon entourage, servis par une mémoire prodigieuse, et que s’est définie l’origine populaire et instinctive de ma vocation musicale. J’ai développé, au contact d’une réalité rendue insupportable par les morts successives de mes frères, le comportement violent, tyrannique, brutal de mon père, la mésentente de mes parents, une aptitude très particulière à l’abstraction, me mettant dans une sorte de concentration proche de la transe, indispensable à mon activité de compositeur. J’ai aussi découvert la lecture, mon plus ardent désir étant de lire nuit et jour, autre moyen d’échapper au quotidien ! Elle m’a ouvert l’imaginaire de la poésie, cœur de mes lieder. Aîné des six enfants restants, j’ai fait l’apprentissage du pouvoir avec mes frères et sœurs. Autoritaire, tyrannique comme mon père, j’ai appris aussi avec eux la patience, l’équité, la compassion, la responsabilité, vertus essentielles au meneur d’hommes que je suis devenu en tant que chef d’orchestre.

Page 43: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Dans les environs d’Iglau, j’ai aimé la nature, le plaisir de l’effort sportif en pratiquant la natation, le canotage et la marche. Ce contact physique avec la nature me sera, viscéralement, essentiel à mon activité créatrice et longtemps je marcherai par tous les temps, après les concerts par moi dirigés. Ma double carrièreMa double carrièreMa double carrièreMa double carrière Après mes études de piano, d’harmonie, de contrepoint, (à dire vrai, j’ai suivi en amateur ces deux disciplines et vais le regretter, découvrant vraiment le contrepoint en relisant les Motets de Johann Sébastien Bach en 1901), j’entreprends une double carrière de compositeur et de chef d’orchestre. J’ai vingt ans ! Ma carrière de compositeur me conduit notamment à Prague (1885-1886), à Leipzig (1886-1888), Budapest, (1886-1891), Hambourg (1891-1897), toutes des capitales de la musique et qui le sont toujours. Finalement, après ma conversion au catholicisme, je suis nommé en 1897, chef de l’Opéra de Vienne, poste que je conserve dix ans. Pendant mes années viennoises, les plus prestigieuses de ma carrière, je compose l’été en pleine nature à Maiernigg-am-Wörthesee où je me suis fait construire une maison. Là, je me sens pour ainsi dire un instrument dont joue l’univers. Naissent ici, les Quatrième, Cinquième, Sixième, Septième et Huitième Symphonies ainsi que les Rückert-lieder et les Kindertotenlieder. Lassé des attaques antisémites, je démissionne de l’Opéra de Vienne. Terrassé par la mort de ma fille aînée et la découverte d’une maladie incurable, j’accepte l’invitation du Metropolitan Opera de New york. Toscanini m’en chasse ! Néanmoins, pendant quatre ans, je dirige les concerts de l’Orchestre philharmonique de la ville. Pendant l’été, je reviens en Europe où j’achève Le Chant de la terre (1908) et la Neuvième Symphonie à Toblach dans les Dolomites. En 1911, j’attrape une angine gravissime aux Etats-Unis et suis rapatrié d’urgence à Vienne où je meurs le 18 mai 1911. Mon plus cher désirMon plus cher désirMon plus cher désirMon plus cher désir : : : : ressusciterressusciterressusciterressusciter !!!!

Je laisse en mourrant le souvenir d’un chef de génie. Mes œuvres, elles, tombent dans l’oubli. Et c’est grâce au film de Lucchino Visconti, Mort à Venise, chef-d’œuvre parmi les chefs-d’œuvres, que tout à coup je ressuscite ! Brahms, considéré en France comme compositeur de musique folklorique (manuel scolaire d’Histoire de la Musique des années 60) n’a-t-il pas retrouvé lui aussi une existence grâce au film Aimez-vous Brahms ? d’Anatole Litvak, d’après le roman de Françoise Sagan ? « C’est seulement après avoir connu les fours crématoires d’Auschwitz, les jungles frénétiquement bombardées du Vietnam, après ce qui s’est passé avec la Hongrie, Suez, la Baie des cochons…, le Black Power, les Gardes rouges, l’encerclement d’Israël par les Arabes la plaie du

maccarthisme, l’absurde course aux armements, c’est

seulement après tout cela qu’on peut enfin écouter la musique de Mahler et comprendre qu’elle présageait tout. » (Leonard Bernstein)

Caricature de Mahler dirigeant la 6ème

Page 44: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Geneviève Deleuze Tous droits réservés, diffusion limitée et gratuite à l’usage pédagogique

GlossaireGlossaireGlossaireGlossaire pour la pour la pour la pour la VVVVeeee SymphonieSymphonieSymphonieSymphonie de Mahlerde Mahlerde Mahlerde Mahler SymphonieSymphonieSymphonieSymphonie Vaste composition instrumentale en plusieurs mouvements destinée à un orchestre symphonique. ContrepointContrepointContrepointContrepoint Punctus contra punctus, « note contre note » : technique d’écriture musicale basée sur la superposition de plusieurs lignes mélodiques qui conservent leur autonomie tout en étant interdépendantes. Il aurait pour équivalent « l’entrelacs » en art ornemental. On dit que le contrepoint relève d’une écriture « horizontale », alors que l’harmoniel’harmoniel’harmoniel’harmonie est une écriture « verticale » résultant de l’émission simultanée des différentes voix. Le canonLe canonLe canonLe canon (« Frère Jacques ») et la fugue,fugue,fugue,fugue, fondés sur le principe de l’imitation, sont des codifications particulières du contrepoint. FugatoFugatoFugatoFugato Style d’écriture issu de la technique d’écriture de la fugue. FugueFugueFugueFugue Composition de style contrapuntique issue du canon. La fugue développe à l’extrême les possibilités de l’écriture d’imitation. Il s’agit de faire vivre, évoluer, de deux à six lignes mélodiques, à partir d’un thème unique, le sujet, en obéissant à des lois contrapuntiques et tonales strictes tout en disposant d’une grande flexibilité dans la succession de ses différentes séquences : exposition, divertissement, strette, trajectoire des modulations. Il s’agit de fuir, d’échapper au contexte, avec la plus grande liberté tout en respectant certaines règles pour que la fuite soit réussie. ChorChorChorChoralalalal Style d’écriture issu du choral, introduit dans la musique allemande par Luther (1483-1546) afin de généraliser l’office religieux en langue allemande. Le choral luthérien est alors constitué de phrases courtes, de caractère populaire, d’intonation facile et de carrure marquée. Symbole de la germanité, il est devenu une technique d’écriture musicale basée, à l’inverse du contrepoint, sur la verticalité obtenue par l’émission simultanée des voix, en homophonie ou en homorythmie. Dans le cas particulier de la Ve Symphonie de Mahler, il est une mélodie diatonique, harmonisée dans la verticalité et jouée par les cuivres, sans référence religieuse. Le seul dieu invoqué ici, c’est Richard Wagner : ce choral évoquant l’ouverture de Tannhäuser. PolyphoniePolyphoniePolyphoniePolyphonie Polus : nombreux, abondant Phônè : son, voix, langage, phrase, parole HomophonieHomophonieHomophonieHomophonie Homos : semblable Phonos : voir au-dessus Le terme vient du Grec homophonia (identité de langage). Il désigne toute musique exécutée à l’unisson, à l’octave ou à la double octave. Par extension, on l’emploie pour désigner l’exécution de parties vocales ou

Page 45: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

instrumentales, ou les deux à la fois, suivant les mêmes valeurs rythmiques, en identité rythmique simultanée. Dans ce cas, il devient synonyme d’Homorythmie.Homorythmie.Homorythmie.Homorythmie. Orchestration, instOrchestration, instOrchestration, instOrchestration, instrumentationrumentationrumentationrumentation

Distribuer les différentes parties d’une composition musicale entre les instruments de l’orchestre.

Geneviève Deleuze Tous droits réservés, diffusion limitée et gratuite à l’usage pédagogique

Page 46: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

La frise BeethovenLa frise BeethovenLa frise BeethovenLa frise Beethoven Gustav KlimtGustav KlimtGustav KlimtGustav Klimt Lors de la quatorzième exposition de la « Sécession » en 1902, consacrée à la musique de Beethoven, Klimt présente une fresque en sept panneaux représentant la Neuvième Symphonie, destinée à illustrer un décor pour l’architecte Josef Hoffmann, chargé de réaliser un monument en mémoire du musicien. Cette œuvre d’art où la musique, les beaux-arts et l’architecture s’unissent dans une illustration éloquente de la Gesamtkunstwerk (œuvre d’art totale), est encouragée par Gustav Mahler lui-même. Elle représente une aspiration au bonheur de la part de l’humanité souffrant, en cherchant son apaisement dans les arts. Cette œuvre est une nouvelle fois l’objet de critiques violentes a nom de la morale.

Gustav Klimt, La Fresque Beethoven Tous droits réservés, diffusion limitée et gratuite à l’usage pédagogique

« L’aspiration au bonheur trouve son apaisement dans la poésie » (détail) 1902, huile sur panneau illustrant le dernier mouvement de la IXe Symphonie de Beethoven : « L’Hymne à la joie » (220x240 cm) © Osterreichiches Galerie, Vienne

Page 47: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Gustav Klimt, La Fresque Beethoven Tous droits réservés, diffusion limitée et gratuite à l’usage pédagogique

« Les Forces du Mal – les trois Gorgones » (détail), 1902, huile sur panneau © Osterreichiches Galerie, Vienne

Page 48: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Gustav Klimt, La Fresque Beethoven Tous droits réservés, diffusion limitée et gratuite à l’usage pédagogique

Détail du premier panneau montrant la quête du bonheur chez l’homme. Klimt a peint le chevalier en armure qui part à la conquête du bonheur sous les traits de Mahler. On y voit un homme et une femme nus implorant le chevalier. Au-dessus du chevalier, une femme tient une couronne de laurier.

Page 49: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

Biographies Biographies Biographies Biographies Michel Tabachnik, Michel Tabachnik, Michel Tabachnik, Michel Tabachnik, directiondirectiondirectiondirection

Depuis la saison 2008/09 Michel Tabachnik joue un rôle déterminant comme directeur artistique du Brussels Philharmonic. Avec cet orchestre, il combine des programmes créatifs qui associent le répertoire traditionnel aux œuvres du XXème siècle, montrant qu’aucun fossé ne sépare les musiques d’hier et d’aujourd’hui. Michel Tabachnik a étudié le piano, la composition et la direction d’orchestre à Genève. Ses études à peine terminées, il est remarqué par plusieurs grands chefs

d'orchestre qui lui ont témoigné un précieux soutien : Pierre Boulez, Herbert von Karajan et Igor Markevitch. Il fut d’abord l’assistant de Markevitch à l’Orchestre de la Radiotélévision Espagnole à Madrid puis, pendant quatre ans, fut celui de Pierre Boulez, principalement auprès du BBC Symphony Orchestra à Londres. Cette collaboration l’a rapproché de la musique nouvelle. Proche de Stockhausen, Berio, Ligeti, Messiaen… il a dirigé de nombreuses premières mondiales, en particulier une vingtaine d’œuvres de Iannis Xenakis, qui le considérait comme son interprète favori. Michel Tabachnik a été le chef titulaire de l’Orchestre de la Fondation Gulbenkian à Lisbonne, de l’Orchestre Philharmonique de Lorraine et de l’Ensemble Intercontemporain à Paris. Des collaborations avec le Berliner Philharmoniker, l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam, l’Orchestre de la NHK de Tokyo, l’Orchestre de Paris et des festivals comme ceux de Lucerne, Salzbourg, Aix-en-Provence et bien d’autres viennent enrichir son parcours. Après avoir été pendant 6 ans, le chef titulaire du Noord Nederlands Orkest, il en est aujourd'hui le Chef émérite. Dès sa nomination en septembre 2008 à la direction musicale du Brussels Philharmonic, l’influence de Michel Tabachnik sur cet orchestre est spectaculaire. La Cité de la Musique à Paris leur réserve une résidence de 3 concerts par saison. Ils se produisent à Berlin, Londres, Vienne, Amsterdam, Rotterdam, Salzburg… Leurs tournées les emmènent en Extrême-Orient, en Allemagne, en Grande-Bretagne, en France… Dans le domaine de l’opéra, Michel Tabachnik a dirigé les orchestres des opéras de Paris, Genève, Zurich, Copenhague, Lisbonne, Rome, Montréal, Gênes, Bolshoi Theater … Il a notamment été régulièrement invité par la compagnie d’Opéra Canadienne à Toronto, où il a dirigé de nombreuses représentations de Lohengrin, Madama Butterfly, Carmen, The Rake’s Progress. Michel Tabachnik consacre beaucoup de son temps aux jeunes musiciens. Il a dirigé plusieurs orchestres internationaux de jeunes. Il a été directeur artistique de l’Orchestre des Jeunes du Québec et, pendant douze ans, de l’Orchestre des Jeunes de la Méditerranée, qu’il a lui- même fondé en 198 4. Pédagogue respecté, il a donné de nombreuses master classes, notamment à Hilversum, Lisbonne (Fondation Gulbenkian), et aux conservatoires de Paris, Bruxelles et Stockholm. Il a été nommé professeur

Page 50: CP Debussy Mahler2 - opera-orchestre-montpellier.fr · et d'un raffinement incomparables. Claude Debussy, Prélude à l'après-midi d'un faune Jeunesse et années de bohème Jeunesse

de direction d’orchestre à l’Université de Toronto (1984-1991) et à l’Académie Royale de Musique de Copenhague (1993-2001). Sa discographie (chez Erato et Lyrinx) reflète l’éclectisme de son répertoire, qui s’étend de Beethoven à Honegger, de Wagner à Xenakis. Son enregistrement du Concerto pour piano de Schumann (avec Catherine Collard) a été plébiscité par le jury international de la Radio Suisse Romande qui l’a désigné comme la meilleure exécution de cette œuvre.