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Couverture:©conradov/Shutterstock

©HachetteLivre,2017,pourlaprésenteédition.HachetteLivre,58rueJeanBleuzen92170Vanves

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Chapitre1

Ben

Sefairegratterledosenpleinenuitauraitdequoimedonnerdessueursfroides,sijenemesouvenaispastrèsclairementquemoncoupdusoirs’étaitbarréenclaquantlaportedèsmonaffairefinie.Etpourforcerlesplusrécalcitrantesàdéguerpir,j’aiunearmeinfaillible:macolocataireetmeilleureamie.Ellesechargepourmoidecettebesognedepuisqu’elleestentréedansmavie,etonpeutdirequesamanièredefaireestpourlemoinsradicale.Àceniveau-là,rienn’achangé.MalgrélapropositiondeJay,Lolan’est pas encore prête à plier bagage pour aller vivre chez lui. Et, clairement, je ne vais pas m’enplaindre.C’est d’ailleurs elle quime caresse le dos dubout des doigts depuis cinqminutesmaintenant.Moi

prétendantdormirpourprofiteraumax,elleessayantapparemmentdemeréveillerendouceur.Lesyeuxencorelourdsdesommeil,jetentemalgrétoutd’enouvrirunmaislalumièrerougeduréveilmebrûlelarétine.Jevaislatuer!—Bordel,Lola,ilest4heuresdumat’,t’abuses!Fallaitsuivretonmecendéplacementsitunesais

pasdormirsanslui!—JesaistrèsbiendormirsansJayden…—…ditcellequimerejointdansmonlitquandelles’estdisputéeavecluioulorsqu’ilpartquelques

jours…—Hey,cequisepasseàVegas,resteàVegas,alorsonn’enparlepas.Jenedonnepascherdenotre

peausiJaydécouvrequ’ilnousarrivededormirensemble!—C’est pas comme si on couchait ensemble. J’ai juste la primeur de te voir baver sur l’oreiller,

ronfleroutéterleboutdetalanguecommeunmiochesuceraitsonpouce.—Menteur!Jefaispasça!Turonflesàpeinecouché,jenevoispascommenttuauraispulevoir!—Croiscequetuveuxmais,quandtupionces,ondiraitungrosbébé.Mon meilleur pote, soi-disant sans cœur, se tape depuis plusieurs mois ma meilleure amie, une

sentimentale qui ne croyait plus en l’amour. Bref, deux personnes qui n’auraient pas dû se trouver…Commequoiledestinfaitbienleschosespourcertains.Maisducoup,moi,jemeretrouveentrecesdeuxbaiseurscompulsifsquis’aimentautantqu’ilssedéchirent.L’Amour,c’estvraimentdelamerde!Jemeretourne,poselatêtesurleventredeLolaetprendssamainpourlamettredansmescheveux.

Messagereçu:ellefourresesdoigtsdansmatignassequ’ellemassecommej’aimetant.L’extasetotale!J’enronronneraispresque.Cinqminutesdepluset,obligé,jemerendorscommeunemasse.Jesuisprêtàme laisser allermais il y a quelque chose qui cloche dans son attitude.Habillée, bien réveillée, sonéternelparfumàlavanille,ettoutçaenpleinenuit?—Qu’est-cequetufousdéjàprête?Tucherchesàimpressionnertonchefenarrivantàl’aube?—Non,riennepourraitl’impressionner,cecon!

Jesourisetnepeuxqu’approuver:leconc’estmoi!—Chouchou…Nemedispasquetuasoublié?Ellemedemandeçad’unepetitevoix,déçue.Lagueuleenfarinée,enpleinmilieudelanuit,elleveut

quejeréfléchisse?Sérieux,jemedemandecommentjefaispourlasupporter,c’estlapiredeschieuses,cettefille!Çasentlecoupfourré.—Lejourdetoncouronnement?Tupassesdeprincesseàreinedesemmerdeuses?Ellemetirelescheveuxetmalgrélapénombrejepeuxdevinersonsourire.—Mieuxqueça,c’estaujourd’huiquemachéried’amourarrive!Bordel.De. Bordel.De.Merde. Rectificatif : la pire des chieuses est incontestablement cette Zoé.

Princesse Lola est une enfant de chœur à côté de sameilleure amie.Comment j’ai pu zapper qu’elledébarquait de France aujourd’hui pour venir me pourrir la vie ? L’excitation de Lola me casse lescouilles,ellem’imposesacopinedansMONappartet,commeledernierdescons,j’aijurédefairedesefforts.Mais comment j’ai pu accepter un truc pareil ? Je nem’en souviens absolument pas, à croirequ’elle a attendu que je sois bourré pour m’entraîner dans ce traquenard. Vise le délire : être encohabitationaveclafillequiterebuteleplus.Sansrire,elleaautantdetestostéronequecertainsmecs,lescouillesenmoinsheureusement.Franchement,jenecomprendraijamaiscommentcesdeux-làpeuventêtremeilleuresamies.—Putain,non!—Oharrêtedefairel’enfant,Ben!Etpuisenlaconnaissantmieux,tunepourrasquel’apprécier.—Qu’elleplantesesgriffesailleursquedansmondosetonenreparle!—Arrête!Etbougetoncul,tum’aspromisdem’accompagneràl’aéroport!Moij’auraispromisd’allercherchermameilleureennemie?Jenecroispasnon!Elleestsousecstasy

ouquoilà?—J’airienditdutoutetjenecomptepasmeleveraveclespoulespourqu’ellepuissemegonflerdès

sonarrivée.—Trèsbien…Danscecastumedonnestesclésdevoiture?Jesensdéjàsonsouriremenarguer,ellesaitcommentmefaireréagir.OK.Voilàpourquoijeluiaidit

quejeviendrais!Horsdequestionqu’elleretoucheàmonPorscheCayenne.Plusjamaiselleneposeralesmainssurmonbébésansmonautorisation.Quejenesuispasprèsdeluidonner.—Jelèveraisbienmonmajeurmaistuneleverraispas!—Oh,monchouchou,lavulgariténetevapas,jetel’aidéjàdis!Jesaisquejesuispuniedepuisque

jetel’aipiquéepourallerchezJay,maistunevaspasm’envouloirindéfiniment?Alorslàjememarre:siellecroitquejevaisoublierdujouraulendemainqu’elleestvenuefouiller

dansmespochespendantquejedormaispourmetirerlesclésetsebarrerentrombe…Elleseplantecarrément.J’ailarancunetenaceetunefiertésurdimensionnée,àcroirequ’ellenemeconnaîtpassibienqueça!Bon,pluslechoix…—C’estbon,t’asgagné,jemelève.J’allume la lampe de chevet, et la lumière blanche m’explose les yeux. Après seulement quelques

heuresdesommeil,jemedirigeversmacommodeenmoderadarpourprendremesaffaires.Ricanementsdansmondos.C’estpasvrai,elleestencorelà.—Maintenant,dégagedemachambrequejemeprépare.

Un petit coup de pied au cul pour la virer plus vitemais elle n’est pas décidée àme lâcher aussifacilement.Ellerigoleetsefoutlittéralementdemagueuleetdemaprétenduerelationfusionnelleavecmavoiture.—Ouais,j’ytiensàmacaisse,etalors?—T’esbeaucoupplussoigneuxavectonjouetqu’aveclesfemmes.—Trouve-moiunenanaavecuneaussibellecarrosserieetonen reparle.Enattendant, sorsdema

chambresinonc’estentaxiquetuiraschercherl’autre!—Elle s’appelleZOÉ !!!T’es pasmarrant quand t’as pas assezdormi, chouchou.T’avais l’air de

meilleurehumeurhiersoiravectablonde!Ellemelesbrise,maispourlecoupellen’apastord.Jenepeuxm’empêcherdesourireenrepensantà

hier.Commentelles’appelaitdéjà?Ana?Tania?Peuimporte,toutcequejeretiensc’estqu’elleavaitchaudaucul!Sonnuméroestdéjàclassédansmesfavoris:unclicetjem’assureuneputaindedose,untrip baise dansmavie déjà bien remplie.Une fille de ce genre, etmon radar s’affole. Pas besoin deconnaîtrelafille,c’estmonérectionquichoisitsesproies.Jenesuispasunsalaud,jedonneautantdeplaisirquej’enprends.UncommerceéquitableversionBen.—C’estladernièrefoisquejetedemandedetebarrer,princesse,parcequedansdeuxminutessit’es

encorelàtudevrasexpliqueràJaycommenttuesaucourantpourmontatouage!—Pfff,t’aspasdetatouage!Tupassestontempsàtraînerdansl’appartenboxeralorsjel’auraisvu

depuislongtemps!—T’enessûre?Ellerigolequelquessecondesets’étouffeenvoyantquejesuissérieux.—Maisoùil…Non,laissetomber,jeveuxriensavoir!Enfinelleselèveetdéguerpitdemachambreenuntempsrecord.Jerisàmontourenrepensantàses

jouesrougesquandelleaenfineucompris.Ehoui,ilsembleraitquej’arriveencoreàlasurprendre!Sachantquej’aiuneréunionavecuninvestisseurenl’absencedeJay,partinégocierungroscontrat,il

fautquejefasseplusclassequed’habitude.L’apparenceauneplaceimportantedansmavie:séduire,conquérir.Uncoupd’œilàmapenderie,monchoixestvitevu:j’attrapemoncostardtroispiècesgrisanthracite, une chemise bleue à laquelle j’ajoute les boutons demanchettes en platine queLola et Jaym’ontoffertàmonanniversaire.Çapue le luxe,maisque j’aimeça !Aumomentoù je fais tomber leboxer,laportes’ouvreengrand.Àpeineletempsdemettrelamainsurmaqueueetdemetourner,quejeluiexposemonculenpleinelignedemire.—Ohputain…Merde!Je…Vraimentjesuis…—Putain,Lola,meréveillerc’estunechosemaisrevenirmatermonculenestuneautre.—Jevoulaispas…Désolée…Je…—Retourne-toiaumoins!Elle se tourne rouge de honte avant de partir dans un rire nerveux. J’enfile rapidement le sous-

vêtement,prêtàm’occuperdesoncas.Jenesuispaspudique,maisêtreàpoildevantellec’estcommem’exhiberdevantmasœur.Bon,jen’aipasdesœurmaisjesupposequeceseraitpareil.Unefoismonpetit,quedis-je,mongrospaquetensûreté,jeluibalancemonoreillerderrièrelatêtepourcalmersescouinements.Ellenevajamaiss’enremettre!—Qu’est-cequet’aspascomprisquandj’aiditquej’allaism’habiller?Sérieux,Lola,jevaisfinir

parmeposerdesquestions!

Direction la salle de bains avecma sangsue sur les talons.Alors que je commence àme laver lesdents,elles’adosseauchambranledelaporteetmefixeavecunpetitsourireencoin.—Quoi?Mon tonestplus secque jene l’avaisprévumais il fautdireque je suisàboutdepatience. Il fait

toujoursnuit, j’enpeuxplusetellemecolleautrain.Qu’est-cequ’ilyaencore?Lolaneréagitpasàmonintonationetsonsourires’élargitaucontraire.—Tum’asmenti!Ledentifriceextramentholm’arrachelatroncheetjerestebraquésurellesanspouvoirparler.—J’aivutesfesses,tun’aspasdetatouage!Putain, elle est encore là-dessus ! Je lève les yeux au ciel et me reconcentre sur mon reflet.Mes

cheveuxsontenbataille,descernesmebouffentlevisage,mabarbebrunejureavecmonteintlivideetmesyeuxsontencoreàmoitiéfermés.Bref,merciLola!Ellemesortdemoninspectionenagitantsonportable,maisc’estsurtoutsonairgênéquiattiremon

attention.Ellefuitmonregardetsemordillelalèvreinférieurecommeàchaquefoisqu’ellen’osepasmedire quelque chose.Mauvais signe. Dernier dérapage en date : une chaussette rouge oubliée dans lamachineàlaver.Résultat:mesluxueuseschemisesblanchesdevenuestoutesroses.Toutçapourdirequesonexpressionsentlamerdeàpleinnez–etmadernièreoncedepatienceestprêteàsefairelamalle.Unrinçagedeboucheavantdeluifaireface,croisantlesbrassurmontorse.—Vas-y,raconte,qu’est-cequetuasencorefaitcommeconnerie?—Bah…Enfait,j’étaisvenuetedirequej’avaismallulemessagedeZoé.—Et?—Ellen’arrivequecetaprès-midi.—QUOI?Elleinspireungrandcoupetavecunepetitemoueboudeuse,meregardedenouveaudanslesyeux.—J’avaiscrulirequ’ellearrivaità5h30,maisenfaitc’estl’heureàlaquellesonaviondécollede

Paris.—Putain,jevaistetuer,t’esentraindemedirequetum’aséjectédemonpieuenpleinenuitpour

rien?Etvoilàqu’ellerecommenceàsemordiller la lèvre.Çayest…Jesuisàboutdepatience,crevéet

assurémentdemauvaisehumeurpour le restede la journée.Dégagede là,Ben,avantdebalancerdesmots que tu pourrais regretter. Je n’ai pas le temps de la dépasser qu’elle m’attrape par surprise enserrantsespetitsbrasautourdemonbuste,sonvisagecolléàmondos.Soupir.Uncâlin improvisé,etcettefillemedésarme,cherchezl’erreur.Ellesaitcommentm’avoir,lagarce!—Jesuisdésolée,Ben,jesuistellementpresséedelavoirquejen’aipasprisletempsdebienlire

sonmessage.Je soupire un grand coup et caresse tendrement ses doigts qui sont noués sur mon ventre pour lui

montrerquejeneluienveuxpas.Dumoins,pasautantquejenel’ailaisséparaître.Bizarrementmonagacement se reporte surZoé, après tout c’est sa faute à elle !Ouais, c’est elle qui vient bouleversernotreroutine.Etpuissoyonsfranc,jesuisincapablederesterfâcheravecLolabienlongtemps.—C’estbon,princesse,maintenantsitulepermetsjeretournemecoucher.Ellenerépondpasmaisnemelâchepaspourautant.Lesfemmessont trop tactiles :constammentà

câlinerouàembrassersansraison.Çafaittellementlongtempsquejen'aipaseudevéritablerelation,

qu'à chaque fois ces moments d'effusion me prennent aux tripes.Même si le geste reste agréable, lasituationmedéstabiliseencore.—Aufait,iln’estpassurmesfessescetatouage!Bingo!Elledesserreenfinsonétreinteetsonhoquetdesurprisearrivemêmeàmefairerire.Cette

fille n’est pas croyable !Obligé, elle a une double personnalité. Parfois si prudemais complètementdéluréequandelleestavecJay.Je regagnemachambreetme laisse tombersur lematelas, fermantaussitôt lesyeuxenespérantme

rendormirrapidement.6heuresdumat’etjen’arrivetoujourspasàdormir.7heures:jemetourneetmeretournedanslelit.Jedoismerendreàl’évidence,manuitestbeletbienfinie.Uneseulefautive:mameilleureennemie,etvucommentlajournéedémarre,jesensquejel’aimeencoremoins,enfinsic’estpossible.L’odeurducaféetlessonsétouffésdelatéléparviennentjusquedansmachambre.JefinisparmeleveretrejoindreLolasurlecanapéaprèsm’êtreserviunmugdecebreuvagenoirqui,jel’espère,vame rendreunpeuplus nerveux.Mesyeuxn’arrivent pas à s’ouvrir entièrement et je bâille àm’endécrocher lamâchoire. Je crois que pour la beau gosse attitude c’est loupé. Aujourd’hui, ça va plusressembleràduWalkingDead.—T’aspasessayédeterecoucher?Ellemeregardeetsonsourireesttellementgrandquesesyeuxseplissent.Jeregrettedéjàdeluiavoir

posécettequestion.—Impossible,jesuistropexcitée!Tuterendscompte,dansquelquesheuresellevaêtrelà!Ellem’a

tellementmanqué!Jelèvelesyeuxaucieletmebrûlelalangueaveclecafépouréviterdedireuneconnerie.Incroyable!

Jesaisquec’estsameilleureamie,qu’elleluimanqueetblablablamais,bordel,c’estuneemmerdeuse,cettefille.Sijenemetienspasàcarreau,elleseraitcapabledefoutrelamerdedansmarelationavecLola,etilenesthorsdequestion.Lajalousie,c’estpasmontruc,commeJays’amuseàmelerépéter,maismerde,c’estmameilleureamieaussi!Mêmepasencorelàetcettefillearrivedéjààcontaminermonhumeur.Commeunconjemesurprends

àcompterlesheuresjusqu’àdemain.Quecettejournéesetermine,etvite!

*

14h30:lebilanestaccablant.Autantdirequ’aujourd’huiilnefallaitpasmefairechier,jedémarraisauquartdetour.MêmeLolam’aévitéautantquepossible.C’estsimple,jen’aiprisaucunappeletj’aipréférédécalerma réuniondumatin.Çanevapasplaireaugrandpatronmais rienà foutre.De toutefaçonJay,avecsonéternelleinsatisfaction,auraittrouvéuneautreraisonpourmedirequ’ensonabsencejegèremal.Entouteamitiébiensûr…Envoyer un simple mail relevait du défi alors me concentrer sur une discussion c’était juste

impossible.PluslesheurespassentetpluscetteZoés’immiscedansmatête.Sansavoirbougéleculdedernière

monbureau,nos joutesverbales,sonregardnoirdecolère, lesclaquagesdeporteetsavoixsi fluettequ’onlacroiraittoutdroitsortied’undessinanimémepolluentpeuàpeulecerveau.17 heures : je touche le fond. Garé devant l’aéroport à attendre comme un gentil toutou que Lola

revienneaveccetyran,leflashd’unsouvenirdeZoéàParismepercutedepleinfouet.Seslèvrescontrelesmiennes,unbaiserenflammésortidenullepart,arrivéentreun«salaud»etun«connasse»,maisquiasuffiàmefairepartirenvrille.Engrandssauveurs,LolaetJaynousontsortisd’unbeaumerdieren

débarquantàl’improviste.Jenesaispascequ’ilenestpourelle,maisdemoncôtél’affaireestclassée.Enfin,Lolapasselesportesvitréesentraînantderrièreelleuneénormevalise.Aussitôt,jedétachema

ceintureetmesdoigtssefigentsurlapoignéequandjel’aperçoiselle…Bordeldemerde,messouvenirsneluirendaientpasjustice,elleestsublime.Enfait,elleestaussibandantequ’elleestinsupportable.Etcommejen’aijamaiseuaffaireàunetelleemmerdeuse,pasdifficiled’imaginerlabeautédecettefille.Belle blonde, avec une coupe à la garçonne,mais féminine jusqu’au bout des ongles.Une valise à lamain,elleavancedansmadirectionavecunlargesourireauxlèvres.Heureuse,elleestheureused’êtreici. Attends de voir, ma belle ! Sans gêne, je la mate à travers mes vitres teintées et savoure sondéhanchement chaloupé.Sa chemise légèrement entrouverte laissedeviner lanaissancede ses seins etsonshortbeaucouptropcourtpourêtredécentdévoiledesjambesinterminables.Mesyeuxremontentsurcettebouchepulpeuseetinsolentedontlegoûtetladouceurmereviennentsoudainenmémoire.Elle sautille de joie comme une hystérique quand Lola se dirige vers le coffre pour y déposer les

valises.Droitsurmonsiège,jeretardelesretrouvaillesnesachantpasàquoim’attendre.Savoixsefaitentendre et je souris de fierté quand elle parle de ma voiture. Même s’il ne m’est pas directementadressé,c’estlepremiercomplimentdesapart,alorsjesavoure.—J’aipasencoredevoiture,alorsBens’estgentimentproposé.Proposé?Monculoui!J’avaispasvraimentlechoixsijenevoulaispasvoirdisparaîtremesclés.—TuveuxdirequeceCayenneestàlui?Putain,ils’emmerdepas!Etiln’apaspeurdeteleprêter?

Nonparcequet’enaspliécombiendevoituresàParis?Le coffre se ferme d’un coup et je n’entends pas la réponse deLola.Une chose est sûre, elle peut

définitivementfaireunecroixsurmacaisse.Plusjamais!Laportièrecôtépassagers’ouvreetjefaisrugirlemoteur,prêtàdécoller.Unsourcilarqué,jeregarde

Zoé se glisser à côté demoi.Vu le regard qu’elleme jette, je pense qu’elle ne s’attendait pas àmetrouver ici. Elle sort aussi sec et s’installe derrière en croisant les bras sous sa poitrine, les lèvrespincéesetleregardnoir.—J’avaispascomprisqueleprêtdelavoitureincluaitaussilechauffeur!Finalement,n’importequel

taximerdiqueauraitfaitl’affaire.Letonestdonné.Sij’avaisencoreundoute,ellemeconfirmequecesretrouvaillesnel’enchantentpas

nonplus.Elle répondun trucen français àmonmajeurdressédans sadirection.Pasbesoind’êtreungéniepoursavoirqu’ellem’insulte.Noteàmoi-même:fairedesavieunenfer!

Chapitre2

Zoé

J’ai senti le poids de son regard sur moi tout le long de la route, comme si le rétroviseur étaitdirectementbraquédansmadirection.Pasuneseulefoisjeluiaidonnélasatisfactiondeleverlesyeux.Petitmerdeux,pourquituteprends?Bond’accord,j’aiconsciencequelapiquequejeluiaiadresséeàpeine débarquée n’était peut-être pas nécessaire, mais j’ai été prise au dépourvu. En fait, je nem’attendaispasàcequ’ilsoit là,à le revoiraussi tôt.Etcommejeneconnaispasd’autresfaçonsdecommuniquer avec lui, j’ai préféré attaquer direct. Je remue surmon siège,mal à l’aise et avec unefurieuseenviedel’envoyerchierunebonnefoispourtoute.Arrêtedemeregarderetconcentre-toisurlaroute,crétin!Ouimaisvoilà,j’aidéjàeudroitàlamoraledeLolaavectouteslessupplicationsquivontavec.Jedoismettredel’eaudansmonvin…Pourtantencemomentj’auraisdavantagebesoind’unbonverredebulles!Lenezsurlavitre,jeprofitedupaysage,despalmiers,desgrandesroutesquejen’aivusqu’àlatélé.Cesbillesbleuazurquicherchentàcaptermonattentionn’offrentpaslemoindreintérêtcomparéàmafascinationpourleslieux.JesuisauxStates!!!Lolaquiétaitsiheureusedemerevoirseretrouveunefoisdeplusentrenousdeux,essayantdumieuxqu’ellepeutdedétendrel’atmosphère.Peineperdue!Ouvrelesyeux,Lola,tesmeilleursamiss’entendentcommechienetchat.Notrechauffeursegareenfindevantunimmenseimmeublegrandstandinget,sanssesoucierdenous,

commencedéjààs’yengouffrer.—Ben,lesvalisessontlourdes!Ilse tourneversLolaet,malgré lamoueboudeusequ’elleaffiche,secouela têteénergiquement, les

mainsdanslespoches.—Elleasusedémerderjusque-là,non?Pasunseulregarddansmadirection…Aprèsm’avoirzieuté toutelaroute,maintenant ilm’ignore!

J’aienviedeluicrierun«dégaget’asraison,j’aipasbesoindetoi»maisunefoisdeplusjeserrelesdents.Lolarestequelquessecondesàl’attendreavantdecomprendrequesonchevalierservantestplusque sérieuxetqu’ilnecomptepasnousaider.Enfinplutôtm’aidermoi ! Ildisparaîtdans l’immeublesansmêmesedonnerlapeinedenoustenirlaporte.Pfff,elledisaitquoisurluidéjà?Ungentlemandestempsmodernes?Lablague!Ellem’adresseunsourireconfusets’excusepourlecomportementdesonami,maisjen’enattendais

pasmoinsdesapart.Jehausselesépaulesluisignifiantmondésintérêttotaletextirpedifficilementmesdeux énormes valises du coffre. Heureusement pour nous, un immeuble comme le sien est équipéd’ascenseurs,cequinousfacilitegrandementlatâche.Quandjedécouvrel’appartement, lesbrasm’entombentetjemeretiensdem’extasier.—Etvoilàtoncheztoi!!!Lolasautillesurplace,heureuseetexcitéecommeunegamine,m’entraînantdansl’antredudiableen

metirantparlamain.Leplusstoïquementpossible, jedétaillelagrandepièceàvivreavecseshautes

baiesvitrées,sadécoultramodernedansdescouleurspopetstylées.J’adore!Maissurmonvisageriennetransparaît.—Ouais,c’estunappartquoi!J’aurais voulu dire que c’est juste énorme, mais je ne voudrais pas que Ben se réjouisse. Valérie

Damidotpeutfairetombersasalopette,cemecaungoûtindéniable.Jen’enrevienspas…rienquecettepièce estplusgrandequemonappart àParis.Enfinquemonancienappart, vuque je l’ai rendupourvenirvivreici…C’estvraimentdécoréavecgoûtetbienquejesacheàquiappartiennentleslieux,jem’yplaisaussitôt.J’avanceinstinctivementverslebalconetmesyeuxbrillentfaceàlavuepanoramiquedeLosAngeles et ses lumières.Vivre audernier étage a ses avantages.Lola se lancedansunevisiteguidée,me laissant découvrir des pièces spacieuses et toutes aussi belles les unes que les autres. Lavache… Je crois que je pourrais vivre dans la salle de bains ! Sérieux, la baignoire spa avec ledspourraitcontenirauminimumtroispersonnes!Onrevientdanslesalon,oùBenestaffalésurlecanapé.Lespiedssurlatablebasse,latélécommande

poséesursacuisse…Manqueplusqu’unemaindanslefutepourparfairelestéréotypemêmedubeauf.Oncontinuelavisitedel’autrecôté,oubliantvolontairementuneportesouslesgrognementsdumaître

deslieux.Paslapeinedemefaireundessin:cesontlesappartementsprivésdeMonsieur.Commesiçam’intéressait!Lolafinitparouvrirladernièreporte,machambre.Lapluspetitepiècedel’appartettrèspeudécoréemaisc’estsurtoutlefaitqu’ellesoitaccoléeàcelledeBenquimedéplaît.—C’étaitlebureaudeBen.C’estunpeupetitmaisjevaistel’arrangerpourquetut’ysentescomme

cheztoi!Finalementjel’aimebiencettechambre.J’entirelasatisfactiond’avoirpiquélaseulepiècequiétait

entièrementconsacréeàBenet,cerisesurlegâteauj’aiunevueimprenablesurlaville.Alorsd’accordelleestpetite,maisellerestedeuxfoisplusgrandequemonanciennechambre.Etpuisc’estpascommesijecomptaism’éterniserici,àlamoindreopportunitéjefouslecamp.—T’espashabituéeauxgrandsespaces.Ont’aréservélapluspetitepièce,aumoinstuneteperdras

pas.Désolé,j’aipasdecageàlapinsenstock.Je sursaute en entendant sa voix derrièremoi, assez près pour pouvoir sentir son souffle dansmes

cheveux.Jemedécalebrusquement,gênéeparcetteproximité.—C’estpasunpalacenonplus!Maist’inquiètepas,tonbureaumevatrèsbien.Enfin…tonancien

bureau!—Etpuistupourraslepeindreetledécorerselontesgoûts,machérie!NouveaugrognementdelapartdeBen.Pourtantilnerelèvepas,etj’aicommel’impressionqu’ilne

refusepasgrand-choseàLola.— Génial ! Un rose flashy me plairait assez. Oh oui, avec des plumes, des paillettes… Je sais

parfaitementquoienfairedecettechambre!Jemeretournepourluifairefaceenluiadressantmonplusbeausourirehypocriteavantdelepousser

pourpouvoirpasser.Jedétestelerose,maissiçapeutl’emmerderdevoirsonbureausetransformerenbonbonnièrejesuisprêteàm’enaccommoder!—Lola…Benalavoixposéemaislourdeetmenaçante.Jeledevineentraindefusillersaprincesseduregard.

Celle-ci rigole avant deme rejoindre dans le canapé, etme prend lamain avec un large sourire auxlèvres.—Elleplaisante,voyons!

—Oupas.Quoi?Jepeuxletitillerencoreunpeu,non?C’estsifaciledelefoutreenrogne!Lolamebousculegentimentenmefaisantlesgrosyeux,c’estsamanièrediscrèteetgentilledemedire

qu’il fautque jemecalme.Trèsbien,marouquine,maisc’estbienparcequec’est toicar,perso, j’enauraisbienremisunecouche!D’ungestedelamain,jeluifaissignequemeslèvressontscellées.Pasunmot ni un regard vers lui, ignorance la plus totale quand il nous rejoint. L’ambiance promet d’êtresympathique!—Allez,champagne!Un silence pesant règne soudain, Lola se lève d’un bond et disparaît derrière l’îlot central de la

cuisine.Descoupesdansunemainetunebouteilledebullesdansl’autre,ellerevienttoutsourire.Ouais,saoulons-nous pour oublier la superbe cohabitation qui prend forme ! Bon sang, j’aurais dû être plusfermeavecelleetprendrel’appartencolocationquej’avaisvupasloind’ici.Delonguessemainesderecherchesfoutuesenl’airparcequejen’aipassuluidirenon!—Tiens,chouchou,faispéterlebouchon!Ils’emparemachinalementdelabouteillequeLolaluitendmaislatournedanssesmainsetlaregarde

d’unairblasé.—Parcequ’enplusc’estmoiquidoisouvrirlesfestivités?Lolamedevanceetluiassèneuneclaquederrièrelatêteavantdeserasseoirentrenous,commesielle

espéraitfairebarrièreavecsescinquantekilostoutemouillée.Benfinitquandmêmeparfairesauterlebouchonetnousservir.Champagnecalifornienmaisquin’enportepourtantquelenom.EnFranceçaserapprocherait plus d’unbonmousseux !Faut que j’arrête demeplaindre, surtout quandma chériemeregardeavectendresse,heureusequel’onsoitenfinréunies.Confortablementinstalléesdanslecanapé,nospiedsemmêléscommeànotrehabitude,ellepiquelatélécommandepourchangerdechaîne.Notresériefétiches’affichesurceténormeécranplat,etc’estavecunsouriredeconnivencequeLolaetmoinousregardons.—ManqueplusquelepaquetfamilialdeM&M’sentrenousetonsecroiraitunjeudisoiràlamaison

enpleineséancederediffusion!—Genreunetélécommelamienneauraitpuentrercheztoi!—Ben… Chouchou, bois un coup et laisse les grandes personnes parler. Quand tu auras quelque

chosed’intéressantàdiretupourraslaramener!—Espècede…La main sur la cuisse de Ben, Lola l’implore silencieusement de ne pas rentrer dans mon jeu. Il

s’enfoncedanslecanapé,lesbrascroisésetleregardmauvais.Jeluisourisenlevantmonverredanssadirection.Àlatienne!J’ai de vagues souvenirs d’une ancienne conversation où elleme parlait de son colocataire qu’elle

avaitconvertiàcettesériepourfilles.Àentendreleslongssoupirsprovenantduboutducanapé,passûrqu’ilapprécieautantqu’elle lepense.Raisondepluspourprendreplaisiràregarder larediffusiondecette série déjà vue un nombre incalculable de fois. Mais au bout d’une heure de visionnage et decommentairesaussifutilesqueniaisautourd’unsaladierdechips,delégersronflementssefontentendre.Comme une seule et même personne, nos regards se tournent vers Ben. Les ronflements cessentrapidementmais sa respiration forte nous fait comprendre qu’il dort paisiblement.Maintenant que j’ypense,c’estvraiqu’ilnes’estpasfoutudenousdepuisunmoment.D’accordonbavelittéralementàlamoindreapparitiondeDamon,etalors?Cemecc’estlasex-attitudeenpersonne,ledieudutrempagede

culotte!Lola adresse à Ben un regard attendri et fait glisser un plaid sur lui. Ce simple geste a le don de

m’irriterunpeuplus.Ilestgrossier,imbudesapersonneetpourtantilfauttoujoursqu’ellesoitauxpetitssoinspourlui.Jefixeducoindel’œillascène,enmemordantl’intérieurdesjouespournepassoufflerd’exaspération. Si je ne la savais pas folle amoureuse de son mec, il y aurait de quoi se poser desquestions!Lasonneriedutéléphonemetfinàcettescènesurnaturelle,jecroisavoiréchappédejustesseàLolaen

modechanteusedeberceuses.Avecunejoienondissimulée,elledécrocheets’éloignesurlapointedespiedsaussivitequepossible.Paslapeinededemanderdequiils’agit.Sonmec,Jayden,ouMonsieurOrgasme-garanticommejelesurnomme,estleseulàlafairesourirecommeça.Jemeretrouveseule,enfinplusoumoins,etbienévidemmentc’est lemomentque lachaînechoisit

pourpasserde lapub. Je résiste, je résiste…Et je craque !Oui,moi aussi jepeuxêtre faible !Monregard se tourne sur cecorpsendormietpour lapremière foisde la journée jeprends le tempsde ledétailler. Il a beaucoup changé physiquement depuis que l’on s’est vus. Regardez-le avec ses longscheveuxnoirsattachésenbuncommeonvoitpartout,sapetitebarbedetroisjoursparfaitementtaillée,sesfringuesbiencoordonnées.Ilvitdansunmagazinedemodeouquoi?Sijeletouche,ilvasefroissercommedupapierglacéoupas?Bon,d’accordilestcanon,etalors?Dommagequedèsqu’ilouvrelabouche, son unique qualité passe inaperçue. Peut-être qu’en le gardant dans cet état, j’arriverais àl’apprécier? Jepourrais l’étoufferavec leplaid…l’étrangleravecmaceinture…luipéter lecrâneàcoupdetélécommande?—T’asfinidemereluquercommeça?Savoixensommeilléemefaitcomprendrequec’esttroptardpourpasseràl’action.Merde,j’ailoupé

lecoche,laprochainefoisjeseraiplusréactive!—Tereluquer?T’esencoreenpleinrêvelà!D’ailleursceseraitsympasitupouvaisallerronfler

danstachambre.—Çafaitunmomentquejenedorsplusalorsjesaistrèsbiencequejedis.Paslapeined’avoirles

yeuxouvertspoursentirlestiensbraquéssurmoi.Ilouvrelespaupièresetpenchesatêteversmoiavecunsourireencoin,fierdem’avoirprisenflag.À

coupsûr,c’estlasonneriedutéléphonequil’aréveillé.MauditMonsieurOrgasme-garanti!—Jet’emmerde,Ducon!—Pasautantquemoi,lachieuse,maisenattendantt’éviterasdefantasmersurmoi.Jeveuxpasêtre

danstatête,c’estdéjàassezpénibledet’avoirchezmoi.—Rassure-toi,leseulfantasmequetumeprocuresc’estceluidet’étriperdanstonsommeil.T’asun

egosurdimensionné,monpauvre!—Siseulementj’avaisqueçadesurdimensionné!Unsourire lubriquesedessinesur sonvisage tandisqu’il relève lebassinpourmettreenavant son

entrejambe.—Non,apparemmentt’aslaconnerieaussi.Vousmefaitesrirevous,lesmecs,toujoursàparlerdela

tailledevotresexe!Tusaiscequ’ondit:«C’estceuxquienparlentleplusquienontlemoins.»—J’aiuneputaind’ogivenucléaireentrelesjambes.Lesfemmesfontlaqueue,sansmauvaisjeude

mots,pourfairepartiedeschanceuses.—Passûrqueleschanceusessoientcellesquetupenses!Bahdis-toiquet’enaurasdéjàunedemoins

!Jeneseraipasunedecesfolles!

—Commesijepouvaisavoirenviedetoi!Faudraitmepayercherpourtetoucher!Tul’asdéjàfaitettut’enespasplaint,connard!Premièreconversation(sionpeutappelerçacommeça)etilmegonfledéjà.MonDieu,ayezpitiéde

moi, je ne vais jamais réussir à le supporter. Et Lola qui ne revient pas… Si je ne m’en vais pasmaintenant,ellevameretrouveràcalifourchonsurlui,mesdoigtsautourdesoncou,àserreraussifortquepossible.Ben,lesyeuxexorbités,leteintrougeetlalanguependante:levoilàmonfantasme!Jemelèveenluijetantlatélécommandedansleventredetoutesmesforces.Aucuneréaction…Iladesabdosenbétonarméouquoi?Àcourtderepartie,jeluidressefièrementmonmajeuravantdetournerlestalons.Apparemmentilne

s’yattendaitpas,caravantdemeretournerj’aieuletempsdevoirsonairchoqué.Jesaisaccepterunedéfaite, mais je ne vais pas non plus capituler sans rien dire. S’il est habitué à vivre avec le douxcaractèredeLola,ilvaapprendreàmeconnaître.Jen’aipasdemandéàvenirvivreaveceux.Jevoulaisjusteprendreunpetitapparticimaismameilleureamienel’apasvusouscetangle.SijevenaisàLosAngeles,c’étaitpourvivreavecelle,pointbarre.Impossibledelafairechangerd’avis.JesupposequeBen, de son côté, a dû aussi capituler. Alors nous voilà,meilleurs ennemis sur le point de cohabiterensemble.J’enaidéjàdessuées,autantdirequelesflammesdel’enfersontproches.Lola,jel’aimepar-dessustout.C’estmasœurdecœur,maseuleetuniquefamille,maisc’estaussiune

filleàfleurdepeauquicraquefacilement.Jenesuispascommeelle,jeneprendspastoutàcœur.Alorss’il s’attendàmevoirpleurer, ilpeut toujoursespérer.De toute façon, jenesaismêmepassi je suisencorecapabledelefaire.Jeclaquelaportedemachambre.Lematelass’affaissesousmonpoidsetjelibère tout l’air demes poumons dans un soupir de lassitude.À peine une journée passée avec lui etj’appréhendedéjàlesautres.Ahhhh,jeledéteste,cemec!

Chapitre3

Zoé

—Çafaitunesemaine,Lola!Unesemainequejesuislàetjesuisdéjààlalimitedepéterunplomb.Tum’énerves,lasituationm’énerve.Je…j’enpeuxplus!T’asvouluquejeviennepourquoiaujuste?Jefermelaportedesachambrepourplusd’intimité,quandj’entendssonlourdinguedecopainrentrer

duboulot.Uneengueuladeàlafois!Ellearrêtedefourrersesaffairesdanssonsacetmeregarde,ahurie.Elle bogue surmoi et je peux la comprendre. Je n’aimerais pas voirma tête vu l’état de transe danslequeljesuis.Jetourneenronddanssachambre,lesmainsfourrageantnerveusementdansmescheveuxcourtsquej’aienviedetireràenavoirmal.—Çat’embêtequejedormechezJaydencesoir?—Oui !!! Je sais que je t’ai dit le contrairequand tum’as envoyéun texto cet aprèmmaisoui, ça

m’emmerdeprofondément.T’esjamaislà!—T’abuses,c’estqueladeuxièmefoiscettesemainequejedécouche!Et merde, je n’ai pas envie de me fâcher avec elle mais ça me bouffe de l’intérieur. Si je ne lui

expliquepasàquelpointjemesensmal,jevaisfinirparrassemblermesaffairesetmetirersuruncoupdetête.Alorsdésolée,Lola,maisj’aibesoindevidermonsac,quitteàégratignertonmondeparfait.—Je suis enmode saturation,Lola. Jemedemande réellement ceque je suisvenue faire ici.Si tu

savais à quel point je regrette de t’avoir écoutée ! J’aurais dû prendre cette colocation que j’avaistrouvéeetvousenvoyervousfairevoir,toiettonenviedem’avoirprèsdetoi!Jesuisunpeudurdansmespropos,jem’enrendscompteenjetantuncoupd’œildanssadirection.

Elle ne dit rien, accuse le coup difficilement. Je vois bien que je lui faismalmais je n’arrive pas àm’arrêter.Jepensaissincèrementréussiràprendresurmoietàremonterlapentemaisjen’yparvienspas.Jen’aiplusenviedefaired’efforts.—T’esconstammentavec lui.Attention, je suisheureusepour toi…Mais si je suisvenue icic’est

avanttoutpourteretrouver.Jesuisseuletoutelajournéependantquet’esautaf,quandtureviensc’estavec lui…Quand iln’estpas là : t’es au téléphoneavec lui…Tonmonde tourneautourde Jay, alorspourquoias-tuvouluquejeviennevivreavectoi?Yapasdeplacepourmoiici!—Jet’interdisdedireça,biensûrquetuastaplaceici.Écoute,jesuisdésolée,jenemerendaispas

comptequejetemettaisdecôté.Jesuistellementheureusequetusoislà!Ellealesyeuxbrillants,elleseretientpournepascraqueretjem’enveuxaussitôt.Jel’accable,elle,

alorsquecen’estpasuniquementsafaute.Jetombesursonlitensoupirant.J’enaimarredemesentirmal.—C’estpasseulementça…J’enaimarredetournerenrond.Jenetrouvepasdeboulotetpourtant

j’arrête pas de chercher ! J’ai démarché toutes les boîtes de communication, de marketing et mêmed’événementieldetoutLosAngelesetsesenvirons!Qu’onnemeparleplusdurêveaméricain,toutça

c’estdelaconnerie.Lessériesaméricainesneserventqu’àatrophiernoscerveaux,àlesbourrerd’idéespréconçues.Ellerigoleetse laisse tomberàcôtédemoi,samainseglissantdans lamienne.Je laserreforten

continuantmesplaintes.—Sansrire,j’aiuséunepairedechaussuresàtournerdanstoutelaville.Maseuleconsolation,c’est

quej’aitrouvéuncoinsuperbepourmonfooting.—Toujoursàcourir?Jenecomprendraijamaiscetteenviedefairesouffrirsoncorps.L’ascenseurdu

boulotsignelafindemaviechaquefoisqu’iltombeenpanne.—C’estpasseulementuneenvie,c’estunbesoinpourmoi.T’imaginesmêmepaslebienqueçafait.

C’estlaseulechosequej’aiici…Etpuisdis-toiquemedéfoulersurlebitumem’évitedelefairesurtoncoloc!—Maispourquoivousn’arrivezpasàvousentendre?C’estvraiquoi,vousêtespourtantpareilstous

lesdeux!—Jet’interdisdemecompareràcetemmerdeur!Luietmoi,onn’arienencommun.Elleselaissetomberàlarenverseetsecouelatêteenrigolant.J’ailoupéuntruclà…Jenesaisispas

biensaréaction.—Quoi?—Turéagispourtantdelamêmemanièrequelui!Ilaprisçapouruneinsultequandjeluiaisortile

mêmediscourslesoirdemonanniversaire.Pourtantilvenaitàpeinedefairetaconnaissance!—Nonmaispourquiilseprend,cecon?Cemecestunemmerdeurfini,unfêlé!C’estvraiquoi,il

passesontempsàmepousseràbout,àmemalmeneretc’estluiquisupportepaslacomparaison?Pfff,lablague!—N’exagèrepas,Zoé,Benaimesefaireremarquermaisiln’estpasméchant.Chouchou…Chouchou

estunmecgénial!Situétaismoinssurladéfensiveaveclui,tut’enrendraiscompte.—Et toi, tudevraisallerconsulterpour tefaireretirer lekilodemerdecolléaucoinde tesyeux!

Lola, tonchouchoufaitsescoupsendouce, ilestconstammentderrièremoncul!Toutes lesconneriespossibles se fontdèsque tuas ledos tourné. Je saispascequ’il cherche,peut-êtremevoirpartir enchialant…—Toi, craquer ?Envingt ansd’amitié, je ne t’ai jamaisvuverser une seule larme.Mêmegamine

quandtut’égratignaislesgenoux:pasuneseulefoistun’aspleuré.—Valuidirealors,etqu’ilmefoutelapaix.Elle finit par se relever et reste unmoment à regarder son sac àmoitié fait. Je prends les affaires

restéessurlelitetlesjettededans.—VadormirchezJay.—T’essûre?Nonparcequesituveuxque…—Jayt’attenddéjà.Vas-y,Lola,onseverrademain.—D’accord,maisavantonsefaitunesoiréejustetoietmoi,commeavant.Ouais,onvaallermanger

unbout,etensuiteoniraaucinéoutraînerdanslesbars…Ons’enfout,onverraoùleventnousmène!Jemerelèvesurlescoudesetunlargesourirefranchitmeslèvresquandjevoismarouquinefourrer

avecdéterminationuneminijupeetunhautàlacetsdanssonsac.Ça,c’estpasunetenuedeboulot!—Jevaisdéposermesaffaires chez Jay, toi tu teprépares. Je te retrouve icidansuneheure eton

rattrapeletempsperdu.Jet’aime,machérie!

*

J’aienfinmaLolaàmoitouteseule:pasdeBennideJay,justeelleetmoicommeaubonvieuxtemps.Pourlecoup,toutelapressionestredescendue.J’ensuistoutexcitée.C’étaitlimitemissionimpossiblepourqueJayaccepte,maismapetiterouquineabienchangéetneselaisseplusfaire.Jesuisfièred’elle.Quandellel’aappelépourleprévenirduchangementdeprogramme,ellenes’estpaslaissédémonterparlemanqued’enthousiasmedesonhomme.Commesielleallaitfairedesconneriesensonabsence!C’estplusmongenrequelesien.Normalement,elledoitmeprévenirquandellepartdechezJay.Elleveuts’assurerquejeseraiprête

quandellearrivera.Ouais,d’accord…ellemeconnaîtbien!Maisjesuistellementheureusedequittercetappartquecette fois jenecomptepasêtreenretard !Jesorsencourantde lasalledebainspourrécupérermonportablerestésurmonlit.UnappelenabsencedeLola,merde!Demi-touretretouràlacasedépartpourlesdernièresretouchesmaquillage.—Qu’est-cequetufouslà?Benestdéjàentraindesedésaperpourallersousladouche.Lesbrascroisés,jelefusilleduregard

pouréviterdematersontorsedéjànu.Jenetedonneraipasceplaisir,Ben,sinontuvascroirequetum’intéresses!—Çafaitplusd’uneheurequej’attendssansriendirequeMadameaitfinidefairesonravalementde

façade.C’estbon,j’enaimaclaque!—Alorspourcommencer,monravalementde façadeetmoi,on t’emmerde.Ensuite, t’attendrasque

j’aifinipourlaprendretadouche!Ilfaitstyledenepasm’écouter,faitsauter lesboutonsdesonjeanetfinitpar leretirerdevantmon

manquederéaction.S’ilcroitquejevaismesauverencourantpoursipeu!Sansmequitterduregard,ilpasse lespoucesdans l’élastiquedesonboxeretcommence lentementà lebaisser.Sérieux, ilcomptequandmêmepassefoutreàpoildevantmoi?—Jetejurequesitusorstonengindevantmoi,jehurleàtelpointquelesvoisinsvontappelerles

flics!Donne-moideuxminutesetjetelarendstasalledebains!—OK,maispropre.T’aslaissétoutetamerde!—Maispuisquejetedisquej’avaispasfini!!!Ilme regarde, rouge de colère, et se baisse pour attraper rageusement ses affaires.Un appart d’au

moinsdeuxcentsmètrescarréetuneseulesalledebains,c’estdébileetc’estpasmonproblème!—Maisc’estquoitouscescris?Onvousentendducouloir,çavapasouquoi?C’estdingue,jepeux

pasvouslaisseruneheuretoutseuls!Ma petite Lola, toute belle et pomponnée, fait son apparition. Pas de jupe comme c’était prévu,

j’imaginequeJayaquandmêmeréussiàmarquerunpoint.Ellenousdévisageàtourderôle,attendantuneexplication.—Regardelamerdequ’ellelaissesursonpassage!Benindiqued’ungestelaserviettemouilléerestéeausol,monmaquillageétaléprèsdulavabo,etmes

affairessalesentasséesdansuncoin.Lesalaud!Jeserrelesmâchoiresàm’enfairegrincerlesdents.Jesaisexactementcequ’ilchercheàfaire.—J’avais.Pas.Fini.

Mon ton est lourd, empreint de menaces. Donnez-moi une mitraillette à la place des yeux et jem’occupedesoncas.—Bahvoyons!Ilafalluquejelarappellepourluidirederanger.—Zoé,t’abuses!Benfaitbeaucoupd’effortspourêtreplussoigneux.Fautquechacunymettedusien

sinononn’yarriverajamais!—Nonmaisc’estuneplaisanterie?Ben,jevaiste…J’aienviede…Bordelcequejetehais!—Pasautantquemoi!Savoixestcalmeetdouce,cequialedondem’énerverunpeuplus.Jefaisunpasversluimaisme

retrouvevitearrêtéeparLola.—Bonçasuffittouslesdeux!Zoé,t’esentort:assume.Maintenantviens,onvaêtreenretardetj’ai

réservéunetable.Ellemeprendparlebrasetm’emmèneàsasuitedevantlesouriresatisfaitdecefouille-merde.Une

foisdeplus,ilagagnéunebataille.Jel’auraiunjour!Jecroisqu’elleneserendpascomptedelasituation.Elleadelachancequejetiennelecoupetque

j’aiducrancarsinonilyalongtempsquej’auraiscramécetappart,avecluidedans.Cetteidéemefaitsourire.J’essaiesincèrementdeprendresurmoietdel’ignorer,maisilchercheréellementàmepousseràbout

et,bienévidemment, il agiten fourbe,histoiredese fairepasserpour lavictimedemon tempéramentcolérique.Jesaisqu’illefaitexprès,maisàchaquefoisjeparsauquartdetour,etlepirec’estqu’ils’enamuse.Lesourireangéliquequ’ilm’adresseaprèsmedonneenviede lecogner,de lui fairemalpourqu’ilarrêtedesourirecommeuncon!Etcequimefoutlesboules,c’estqueLolanes’enrendmêmepascomptealorsqu’onenaparlétoutàl’heure.Ellenesaitpluscommentfairepourcalmerleschosesentrenous,ellecroitencoreaupèreNoëlsielle

pensequ’unjourluietmoionarriveraàêtreamis.Qu’ellearrête,c’esttroptard.Depuislepremierjouroù ellem’a parlé de lui : je le déteste.On se déteste.Mot assez fort et pourtant si faible dans notresituation.Soyonshonnêtes,sionnevapasplusloinquelespiquesc’estuniquementpournotremeilleureamie.Voilà leseulpointcommunquenouspartageons :notreprofondeamitiéenversLola.Jepeuxluireprochertouslesmauxdelaterremaisjesaisqu’ill’aimeprofondément.Jeplaidecoupablesanshonte:jecrèvedejalousiedevantleurcomplicité.Jeleremercied’avoirgardémaplaceauchaudmaisjesuislàmaintenant,et jecomptebienrécupérer l’exclusivité.Jesuispossessiveenamourcommeenamitié,Lolaestàmoiseuledepuisdetropnombreusesannéespourquejelapartageavecce…Merde,leseulmotauqueljepenseest«beaugosse»,pourtantj’aipleind’autresadjectifsquimeviennentquandjel’aien facedemoi, etpasdesplusélogieux ! Jen’aurais jamaisdûposerunœil sur luiquand il était enboxer, mon cerveau semble avoir gardé son image en mémoire. Je me fous des claques imaginaires.Oublie-le,cesoirt’astaLolapourtoi.

Chapitre4

Ben

Enfinenweek-end!!!Jekiffemontafmaisputaincequ’ilestprenant.Cinqjoursavecdeshorairesillimités,desréunionsquis’enchaînent,desfournisseursquitraînent…Jesuissurlesrotules.Maisquiditweek-end,ditsoirée.Jayenorganiseunepetitetranquille…Ouais,maischezmoi.Allezcomprendrepourquoimais depuis qu’il est avec Lola, plus aucune fête ne se passe chez lui. C’est limite défensed’entrer.Maintenantc’estleursanctuaire,leurbulle,commeildit.Monpoteestentraindesetransformeren lopette !Perso, je pensequ’ils baisent tellement et partout que lesmursdoivent être imprégnésdeleursodeurs!Detoutefaçon,lesfiestaschezmoi,çanemedérangepas.Aumoins,jepeuxboire,boire,reboire…Bref,décompresser.C’estsurtoutmaprincessequeçaemmerdepuisquec’estellequiastiquel’appartderrière.Etmanquedebolpourelle,onestunebellebandedecrados.Quec’estbond’avoirunefemmeàlamaison!Cetaprès-midi,j’aidûquittéletafplustôt,jediraimêmetrèstôt.Maisfranchement…aucunremords

delaisserdesmerdessurmonbureau.Detoutefaçon,ellesserontencorelàlundi.Onm’afaituneoffrequejenepouvaispasrefuser.Maqueuefrétilledéjàd’impatienceàl’idéedelaretrouver.MevoilàdoncdevantmonpiedàterredeKinston,monappartementauborddelaplage,magarçonnière.J’adorecetendroit. C’est petit et simple mais je m’y sens bien. Je n’aurai sûrement plus l’occasion de venirtravaillerdanslasuccursaleinstalléeici,maisjen’aipaseulecouragederésiliermalocation.C’esticiquejeviensquandj’aibesoindemeressourcer,dem’isoler,oudemedéfoulersurmaplanchedesurf.Esquisse de sourire. Sur le trottoir, je repère déjà ma belle brune qui patiente en battant du pied.T’inquiètepas,mabeauté,Benvas’occuperdetoi!J’aicommel’impressionquelaplanchedesurfserainutileaujourd’hui,jesaissurquijevaismedéfouler.Jesorsdelavoitureetm’avanceversCharlotteenladétaillantde la tête auxpieds avecce sourire carnassierqui a ledonde la faire rougir.Gagné.Sapetiterobeenjeannetientqu’avecdefinesbretellesetlesboutonsouvertsenhautlaissententrevoirlerougedesonsoutien-gorge.Jen’aiqu’uneenvie:ypasserlamainetfairesautertouslesboutonsunparun.—Salut,mabelle!—Salut,toi.Toujoursaussibeau!Ellemefaitlabise,petitehabitudefrançaisequimeplaîtassez.Seslèvresdoucesfrôlentlesmiennes,

quis’ouvrentspontanément,maisellel’ignoreets’écartebientropvite.OK,elleveutjouer.Attentionàtoi,tusaiscommentjesuis!C’esttoujourscommeçaavecCharlotte:ilfautqu’ellemènelejeu.Alorsjelalaissefaire,dumoinsc’estcequ’ellecroit.Jelalaissefairesachantpertinemmentqu’unefoisaulit,c’estmoiquireprendslecontrôle.—Alorscommeçaturentrescheztoi?Jeregardelagrossevalisesurlaquelleelles’assoit.Commentcetteaccrodushoppinga-t-elletoutfait

entrerdansunseulbagage?Sans rire, jene l’ai jamaisvuavec lesmêmes fringues.Ons’est souventéclatéàfairelesmagasinsensemble.C’estunebonneconseillère,maisc’estsurtoutunedemesseules

potesquinesefoutpasdemapassionpourlamode.—Oui,j’aiplusautantdeplaisiràvivreici.Jecroisquec’estlafindemonrêveaméricain.Enpuisil

fautavouerquedepuisqueLolaettoivousêtespartis,c’estpluspareil.—Danscecas,viensàL.A.avecnous!Onpourraitreprendrecequel’onfaisaitici…Devant mes intentions non dissimulées elle rigole en secouant énergiquement la tête. Dommage,

j’auraissincèrementaiméqu’ellevienne.Elleestsympaet,pourêtrefranc,c’estlameilleuresexfriendquej’aipuavoir.Sansrire,cettefilleaupieu,c’estunebombe,untsunami,unetornade!—Non,jecroisquej’aiaussilemaldupays.Çafaitplusd’unanquej’aipasrevumafamille.Ma

sœuraaccouchédepuisplusieursmoiset j’aipasencorepuvoirmanièce.Alorsnon,mêmepour tesbellesfessesjeneresteraipas!—Pourtantt’asjamaissuyrésister.Desflashsdesesdentssurlapeaudemonculetjemesenssoudainunpeutropàl’étroitdansmon

pantalon.Jesorslesclésdemapocheetlaprendsparlamainmais,unefoisdeplus,ellesecouelatête.Merde,c’estquoisondélire?—Quoi?Tuneveuxpasmonter?—Sûrementpas!Sij’accepte,tusaistrèsbiencommentçavasepasseretj’aipasenvied’arriveren

retardàlafêtedecesoir.J’aipasvuLoladepuisplusieurssemainesetjecompteprofiterd’elle…devousaumaximumavantdeposermonjolipetitpostérieurdansl’aviondemain.—Nonmaisturigoleslà!Tum’asditquesijevenaistechercher,j’auraisdroità…Elle se lèved’unbondetplaqueunemain surmabouche.Siellecroitm’empêcherdeparleraussi

facilement!Malanguelèchesapaume,luidéclenchantunrire.D’habitudejeprocured’autressensationsavecmalangue,faudraitquejeleluirappelle.—T’asbesoinquejeterappelletoutcequetum’aspromis?Nonparcequej’aijusteàsortirmon

portablepourterafraîchirlamémoire.J’aigardétoustessextos.—Jesaiscequejet’aidit,pervers!Maispasmaintenant,jeveuxd’abordvoirmacopine!—Maisellesaitmêmepasquetuviens.Onmontevitefait,tumeremerciesd’êtrevenutechercheret

elleauraàpeineletempsdevoirqu’onestenretard.J’avance lentement vers elle sans la lâcher du regard.Mon corps entre en contact avec le sien. Je

continued’avancerjusqu’àlabloquercomplètementcontrelemur.Laboucheouverte,sarespirationsefaitplussaccadée.Ehoui,t’asjamaissumerésister!D’undoigt,jefaissauterlesdeuxpremiersboutonsdesarobe.Sapoitrinesedévoilesousmesyeuxavantqu’elleneposesamainsurlamiennepourstoppermonélan.Merde,lapartierisqued’êtrepluscompliquéequeprévu.—Arrête,Ben,t’esentraindetefairedumalpourrien,j’aidit:pasmaintenant.Lavoixfébrile,lesyeuxembués,lecorpstremblant…çaluicoûtedem’arrêter.Elleenaautantenvie

quemoi. Je ne compte pasm’arrêter là.Mes lèvres sur les siennes, je l’embrasse sensuellement, endouceur.Nepaslabrusquer,luifaireoublier.Delapointedemalangue,jedessinelescontoursdesabouche,aspiresa lèvre, lamalmène.Quandellegémit, j’enprofiteetglissemalanguedanssabouchepourvenircaresserlasienne.C’estbon,ellelâcheprise.Mesdoigtsretrouventl’ouverturedesarobeetviennentcaresserladentelledesonsoutien-gorge.Nouveaugémissement.Jeraffermismapriseetpassesous le tissu.Sesmains remontentdoucementsurmespectorauxque jecontracte instinctivement. Ilesttempsdemontersielleneveutpassefairebaiseràlavuedetous.Jemimeuncoupdereinpourqu’elleserendecomptedemondésiretj’ailedroitàunnouveaugémissement.C’estbon,jepeuxcriervictoire!Sespoingss’agrippentàmachemise,lafroisse…avantdemerepousserfermement.Lesbrastendus,elle

gardemoncorpsloindusien.—Ben…Bordel,non!Commentluifairecomprendrequejemeursd’envied’êtreenelle.Plus,j’enaibesoin.

Meviderlatête,oublierlesmerdesduboulot,lafatigue,lapression,Zoé…J’enaimarredepenseràcette petite peste quimonopolisemonespacevital.Cette bouledenerfs, toujours enmouvement.Ellem’exaspère, j’ai besoin d’oublier sa présence. Je suis sans cesse sur son dos, la poussant à bout, latitillantconstamment.Àcroirequesonculàfairebanderunmortestuneraisondepluspourluipourrirlavie.Horsdequestionqu’ellem’excite.Monradarabeausemettreenmarcheàsescôtés,mafiertéprendtoujoursledessus.Zoéadécidédemedétesterdèsledébut,j’aimêmepaseuletempsdefaireunpasdanssaviequ’ellem’ajugésanssavoir.Elleveutduconnard,ellevaêtreservi!—D’accord…Allezviens.Dégoûté, jeme détache de son corps, récupère sa valise d’unemain, la traîne jusqu’àma voiture.

Putain…Laisserdesdossierssurlefeu,metaperplusieursheuresderouteettoutçapourquoi?Revenirlaqueueentrelesjambes,ouplutôtderrièrel’oreille!Ouais,jeressembleàunsalegosseàquionn’apascédémaisjem’entape.J’enavaisbesoinmerde!Charlotteneditrienmêmesijevoisbienqu’ellese retient de rire. Vas-y, marre-toi, ce soir tu vas crier. Je prends la route dans un silence de mort,ruminantencoredem’êtrefaitavoir.Résultat:Charlottefinitpars’endormir.Génial,enplusjefaisleretourensolo!

*

Arrivés devant chez moi, Charlotte ouvre enfin les yeux. Il était temps ! Ses bâillements nousaccompagnent jusqu’à laported’entrée tandisquemoi, enbongentleman, jeporteune foisdeplus savalise.Entroisheures,mamauvaisehumeuraeuletempsdesedissiper.Boireunverreavecmesamis,voilàcequimeferadubien.—Princesse,c’estmoi!J’entreetcommed’habitudesignalemaprésence.—Tuveuxquecesoitqui,Ducon,onestdanstonappart!—Commencepasàmelescasser,c’estpas lemoment.Pour info, ladernièrefoisquejesuisentré

sansprévenir, tacopineestpartieseplanquerdansunplacard.Ellesecroyaitseuleetnem’avaitpasentendu. Je l’ai retrouvé complètement flippée. Alors ouais, maintenant je m’annonce. Mais bienévidemment,ça,tunepeuxpaslesavoir!Zoé se décompose sousmes yeux, le teint livide en réalisant que Lola n’a pas encore entièrement

surmontéletraumatismedesonagressioncommeelleveutlefairecroire.Jess,aliasmonancienneamieet collègue, a laissé de lourdes séquelles sur ma princesse. Même si je savais que cette tarée étaitcomplètement mordue de Jay, je n’aurais jamais imaginé qu’elle soit capable de tuer Lola pour sedébarrasserdelaconcurrence.LahainequejeressenspourJess,jelareportesurZoéparlavirulencedemaréponse.Cettehistoirem’aaussilaissédesmarques,fautcroire.Jen’auraispasdû,jesais,maisj’aipasletempsderegretter.Charlottemepassesouslenezenmecollantungroscoupdecoudedanslescôtes,m’arrachantuncridedouleur.Onpeutpasdirequ’elleaitbeaucoupdeforcemaisjel’aipasvuvenir.Putainellem’abienlatté!—Maiscette salopen’estpasprèsde sortirde saprisonpourdétraqués, alorsonarrêtedeparler

d’elle,çaluidonnetropd’importance.Salut!TudoisêtreZoé!Sansluilaisserletempsdequoiquecesoit,CharlottesautesurZoé,laprenantaudépourvu.Ellesse

mettentàdiscutercommesiellesseconnaissaientdepuistoujours,etsurtoutcommesijen’étaispaslà.Je préfère les laisser seules pour aller prendre une douche avant que tout le monde arrive. Elles neréagissentmêmepasenmevoyantpartir,enfaitelless’enfichentroyalement!Unefoisdeplusmonegoenprenduncoup!Décidément,c’estvraimentunejournéedemerde.J’aiàpeineletempsdemeglissersouslejetquej’entendsdescrisaigusdignesd’adoshystériquesen

provenance du salon. Bon, faut croire que Lola est enfin arrivée ! Dire qu’on aurait eu le temps des’envoyerenl’airvitefaitsiCharlottem’avaitlaisséfaire.TroisFrançaisesàlamaison,jenesaispassil’appartvatenirlecoup!Jemelaveenquatrièmevitesseavantdemerendrecomptequej’aioubliédeprendredesvêtements

derechange.Re-merde.J’enfilemonboxeretcomptetraverserdiscrètementlesalonpourrejoindremachambre.SaufqueJaym’interpelle.—C’estcommeçaquetutepromènesquandmacopineestcheztoi?—Quoi,ellenes’enestjamaisplainte!JeregardeLolaetluidécocheunclind’œil,histoiredetitillerlajalousiedemonpote.Saconfiance

estencoreloind’êtretotale.Jaydenamisdanssonlitpresquetoutesnoscopines.Maintenantqu’ilestcasé, iladumalàavalerqueLolaetmoi,çanedépassepas l’amitié.D’accord,c’estuneamitié trèsbizarre,complexeetfusionnelleentrenous,presqueflippante,maisc’estuniquementde l’amitié.Jenesaispaspourquoijemesuisautantattachéàelle.JepensequelafaçondontJayl’atraitéeaudébutm’adonnéenviede laprotéger…Ilnerépondrien,comprenantque je lecherche,mais le regardqu’ilmelanceenditlong.—Ilrigole,moncœur,ilnelefaitplusdepuislongtemps!—Donct’esentraind’avouerqu’avantBensepromenaitàmoitiéàpoildevanttoi?JerigoleàmoitiédevoirErikentrerdanslapièceetaussidansmonjeu.Ilarrivesansfairedebruit

chez moi, mais quand c’est pour foutre la merde, il sait se faire entendre ! Jay ne cache plus sonénervement.Lolavientl’enlacerets’asseoirsursesgenouxmaisilgardesesyeuxbraquéssurmoietmefusilleduregard.J’aidéjàtroisballesdelogerdanslatête!Fautquejemetireetvitefait.Repli!Allerm’habillerrapidementetmefaireoublier.Jesensdéjàsesreproches,d’êtrelaraisonpourlaquelleLolarefuseencored’habiteraveclui.Ill’afaitsouffrircommeunfouiln’yapassilongtemps,maisc’estàcausedemoisielleapeurdes’engageraveclui.Nonmaissérieux?Je me rends compte seulement maintenant que Zoé et Charlotte sont clairement, et pas du tout

discrètement,entraindememater.Fierdemoncorpsvulenombred’heuresdesportqu’ilencaissedanslasemaine,jecontractemesmusclesafindefaireressortirencoreunpeuplusmesabdos.Charlottesepasselalanguesurleslèvresenpensantsûrementàtoutcequejevaisluifairecettenuit.Zoé…Disonségaleàelle-même.Elledétournelatêteenlevantlesyeuxauciel.J’aienviederireparcequej’aibienvuqu’ellebavaitsurmoncorps,etcen’estpaslapremièrefoisd’ailleurs.Commelesoirdesonarrivéeoùjel’aisurpriseàmedétaillercroyantquejedormais.Ouaist’asraison,profiteduspectacle,c’estlaseulechoseagréablequetuobtiendrasdemoi!Je regagnemachambre, enfileun jean et un tee-shirt avantde revenir dans le salonoùunverrede

whiskyavecglaçonsm’attenddéjà.Jem’installedanslecanapéetavalelapremièregorgéemaisaussilameilleure:cellequibrûletoutsursonpassageetprocurecettepetitesensationdeplénitude.Erik sepencheversmoi etmontrede la têtemanouvelle colocataire, toujours enpleinediscussion

aveclesfilles.—Canon!

—Grave!Maissurtouttrèscon!— Et c’est qui exactement ? Personne n’a fait les présentations mais tout le monde a l’air de la

connaître.EncoreuneFrançaisec’estsûr,maisd’oùellevient?—Bah…deFrance!(Jerisdeboncœurdevantsonairblasé.)TuconnaisLola,ellecroiseunchien

errantetelleveutlerameneràlamaison.Alorsunemeilleureamiequipleurequ’elles’ennuied’elle…Bref,j’auraispréférélechien!Instinctivementjetournelatêteverselleenledisantetsuissurprisdelavoirmeregarder.Lesfilles

discutenttoujourssansserendrecomptequeZoéestloindeleurconversation.Jeluiadressemonpetitsourirenarquoishistoiredel’énerverdavantage.Ellemefusilleduregardetpinceleslèvres.Bouh,j’enauraispresquepeur!Ellefinitparmefaireundoigt,commeàchaquefoisqu’ellenesaitpasquoidire…Petitejoueuse!Lesdiscussionsreprennentleurcours,etlesverressevidentlesunsaprèslesautres.Latêtequitourne

etlerirefacile,riendemieuxpourfinirunesemainedeboulot.JebloquesurJayquidévoredesyeuxsadulcinée,installéeplusloinavecsescopines,etjenepeuxm’empêcherderire.—Tutefousdemagueulelà?—Non…Enfinoui!Merde,regarde-toi,mec!Quandjerepenseàlafaçondonttuvivaisavant,jeme

disqueLolatetientdrôlementbienparlescouilles!—Mescouillesseportentbien,t’inquiète!Ett’espaslemieuxplacépourmeparlerdeça.Tuveux

quejeterafraîchisselamémoire?Nonparceque,avecBlue,çapuaitlaguimauve!J’ouvrelaboucheincapablededirequoiquecesoit.Jaydenrigolesansserendrecompteduputainde

poignard qu’il vient demeplanter dans le cœur.Ça fait des années que tout ça est fini et pourtant lesimplefaitd’évoquercenommeretournel’estomac.—Quiça?LolavientdenouveausecolleràJayquil’attrapeparleshanchespourl’asseoiràcalifourchonsurlui.—Bahsonex-fiancée!—QUOI?Lolameregarde,choquée,etc’estseulementmaintenantqueJaydenserendcomptedel’énormitédesa

connerie.S’ilendoutaitencore,çan’estpluslecas:non,jen’aijamaisparlédemonpasséavecLola.Ni avec personne d’ailleurs. C’est une époque de ma vie que je préférerais oublier mais c’est sanscomptersurmonmeilleuramiquicroitque«jeneveuxplusjamaisenparler»veutdire«oublionscettehistoirequelquesannéespourlaressortirlejouroùtut’yattendraslemoins».Touslesregardssonttournésversmoiet,àpartfinirmonverred’unetraiteenespérantytrouverla

mêmemorsurequ’àmapremièregorgée,jenesaispasquoifaired’autre.Foutumeilleuramiquiconnaîttoutemavie!—Toi?Toi,t’asétéfiancé?Lola me regarde les yeux ronds. Aucune moquerie ni amusement, seul l’étonnement se lit sur son

visage.Jelacomprends,jejouemonrôledeplayboydepuistellementd’annéesqu’elleadumalàcroireque je puisse avoir été amoureux. Tellement fou d’amour que j’étais prêt à renier ma famille pourl’épouser.Alors,oui,j’aidéjàétéamoureux,maissurtoutconetnaïf.—C’étaitdansuneautrevie.—Ouimais…—Non,Lola,c’estdel’histoireancienne.

Letontranchantaveclequeljeluirépondslasurprendautantquemoi.Jamaisjeneluiaiparlécommeça.Jemelèvepourattraperlabouteille,enprofitepourdéposerunbaisersurlefrontdemaprincesse.Jenevoulaispaslavexer,justeneplusenparler,c’esttout.Laconversationa jetéun froidet les regards sedétournentprécipitammentdemoi.Enfinc’est sans

compter sur la détermination de Lola qui me dévisage, essayant toujours de comprendre, et Jay quim’adressesilencieusementsesexcuses.Cemecn’apasdefiltreetj’enaisouventri,maisjamaisàmesdépends.C’est le frèreque lavienem’apasdonnéetons’est toujoursserré lescoudes.Jevoisbienqu’ilestmalàl’aisedesabourde,maisjesuistellementmauvaisquejen’aipasenviedeluipardonnertoutdesuite.Onverraçademain.—Bonsinonc’estpaspourchangerdesujet,oupeut-êtrequeouienfait,mais jevousinformeque

Lolaetmoiserontabsentsunesemaine.Mameilleureamiesedétourneenfindemoietseconcentresursonhomme.—Ett’annoncesçaàtoutlemondesansm’enparleravant?—Pour quoi faire ? Je ne te laisse pas le choix. Tu vas faire ta valise car, toi etmoi, demain on

décollepourlaFrance.JeveuxdécouvriravectoitoutcedontAndrewm’aparléettefairel’amourdanstoutesleschambresd’hôteloùnousséjournerons.Etpuis,s’ilnousrestedutempsjemedisaisque…Onpourraitpeut-êtreallervoirjoliemaman!Si elle n’était pas déjà sur lui, elle lui sauterait au cou tellement elle semble heureuse. Jayden lui

apprendquetoutestdéjàenordreetquesamèrelesattendimpatiemment.Commentnepasêtreheureuxpourelle,sachantàquelpointsamèreluimanque?Jaydenletourneàsafaçon,enparlantdeculoudesonfrèreAndrew,maisjesaisqu’ilfaittoutçapourelle.Ellenesaitpluscommentréagir:mélangederemerciements,depleurs,de joie sans jamaiscesserde l’embrasser.Etnous, commedescons,on lesregarde,attendris.—Auboulotsanstoi,jesuishabitué,maissansmonassistanteçavaêtreunepremière!Jaydenmeregardesérieusementavantd’esquisserunsourireencoin.Etmerde,jelesenspascecoup-

là.—T’esfou!Jenetelaissepassansassistante,tuesincapabledetedébrouillerseul!Tuvasmefaire

delamerdes’iln’yapersonnepourpasserderrièretoi!—Sympa,mercilaconfiance!Doncsij’aibiencomprisjerécupèreaussitavieilleassistante,enplus

degérertontaf?—Nonplus,tuvasmelatuer!Iltefautquelqu’unquin’apaspeurdetoioudetadragueàdeuxballes

etenquijepeuxavoirconfiance.—Danscecasvosvacancessontcompromises,t’aspasd’autreschoixquedemelaisserLola!—J’aid’autresprojetspourelle…Saremarqueluivautuneclaquederrièrelatête,maisLolan’arrivepasàretirersonputaindesourire

desonvisage.Jepourraismeretrouverseulouavecn’importequipourmeseconderauboulotqu’ellen’auraitaucunepitiépourmoi.Solidaireoui,maisjusqu’àuncertainpointapparemment!—Maisj’aitrouvésaremplaçante,tunedevraispasêtreperdu!Il se redresse fièrementensouriantdeplusbelleetpointedudoigtmachèrecolocatairequiécoute

d’une oreille distraite la conversation. En gros, elle en a absolument rien à foutre et semble faire lagueuleàcauseduprochaindépartdeLola.Finitlesourire,finiel’euphoriedueàl’alcool.Jaydenvientdemesaperlemoralendeuxsecondes.Enplusdedevoirlagéreràlamaison,jevaisaussidevoirlasupporterauboulot.C’esthorsdequestion!

—Jeteprésentetonassistanteenintérim!ZoéfinitparrecrachersabièreparlenezencomprenantqueJayparled’elle.Çaauraitpuêtredrôlesi

lanouvellenem’avaitpasplombélemoral.Desbullesquipétillentencoresursonmenton,ellesecouenerveusementlatête.—Horsdequestion!!!Nous répondonsd’une seule etmêmevoix sous le regard amusédes autres, aumoinsnous sommes

d’accordcettefois!—Zoé,ce taf, tuenasbesoinet tu le saisaussibienquemoi.Quantà toi,monpote…Je t’adore,

vieux,mais jenete laissepasauxcommandesdemaboîtesanspersonnepour teseconder.Tuesmonbrasdroitmaistuesaussibordéliqueettêteenl’airqu’unputaindemôme.J’emmènemafemmepourdesvacancesbienméritées,etvousvousdémerderezpournepasvousentretuer.Jenevaispaspouvoir lasupporterH24,c’est impossible…Maisleregardsuppliantquenousjette

Lolanousempêchededirequoiquecesoit.Elleabesoind’unpeudebonheuraprèstoutcequ’elleatraversé.Soupir.Rienàajouter.Jemeresserreunverreetleboisculsec.Demainjevaisavoirmalauxcheveux.Jevaismeretrouverseulavecmameilleureennemiechezmoietjevaisenplusdevoirmelafarcir au boulot. Autant dire quema semaine va être un enfer. Jay ne l’emportera pas au paradis. Jecomptebienluifairepayersestrahisonsdecesoirdèsquej’enaurail’occasion.Lasoirée reprenddoucement soncoursmais jen’y suisplus.Lanouvelleme resteen traversde la

gorge.Etcommesiçanesuffisaitpas,levisagedeBluemehante.Lesmêmesquestionsquejemeposaisdesannéesplustôtrefontsurface.J’enailetournis,àlalimitedelanausée,etl’alcooln’arienàvoiravecça.Lesriresdesautresmemontentàlatêteetjemelèveprécipitamment.Mesamisnesemblentpass’enapercevoir.Tantmieux,j’aibesoind’êtreseul.Jevaisjusquedanslasalledebainsetmepassedel’eaufraîchesurlevisage.Safaçondepapillonnerdesyeuxquandellevoulaitquelquechose.Ridicule,maiselleobtenait toutcequ’ellevoulaitaveccettemimique.Sonsourire,sesblaguespourriesquimefaisaientrire…Bordel,maispourquoi jepenseàça?Jedoisoubliercessouvenirsquireviennentmeboufferlecerveau.Aufinal,jemepasselatêteentièresousl’eauenespérantmeremettrelesidéesenplace,maisças’avèretotalement…inefficace!PutaindeJayden,jevaisletuer!Soudain,laportes’ouvreengrand,etZoé,quis’attendaitsûrementàêtreseule,manquedemerentrer

dedans.Envoulantm’éviter,elleaunmouvementdereculmaislesolmouilléparmafautelafaitglisser.Dansungeste instinctif, je la rattrapede justesse et soncorpsvient cogner contre lemien.Leparfumfloral de son shampoingme chatouille les narines – à la rose ilme semble.Nos yeux s’agrippent unmoment.J’ai l’impressiondemeretrouverdesmoisenarrière,àParis.Onmeditsouventque j’aidebeauxyeuxbleus,maislessienssontd’untranslucidehypnotisant.Trèsclairs,nuancésdepetitestachesvertes.Desyeuxmagnifiques.—Euh…Tupeuxmelâcher?Mes bras, qui encerclent toujours sa taille et la maintiennent fermement contre moi, refusent de la

lâcher.Lachaleurdesoncorpsembrase lemiencommelapremière foisqu’ons’estembrassés.C’esttoujoursunedrôledesensationquandelleestprèsdemoi,unmélangededésiretd’irritabilité.Ellesedégaged’elle-mêmevoyantquejetardeàlalibérer.Leregardmauvaisqu’ellem’adressemefaitsortirdemaréflexion.—T’asremarquéqu’Erikt’afaitdurentre-dedansunebonnepartiedelasoirée?Lesmotssortentdemabouchesanspasserparlacasecerveau,mesurprenantautantqu’elled’engager

laconversationpourlapremièrefois.Ellesereprendrapidement,metourneledospourallerselaverlesmains.

—Ilnemedraguepas,ils’intéresseàcequejeluiraconte,c’estdifférent.Toutlemonden’apassesattributsàlaplaceducerveau!—Jenepensepasavecmabitesic’estcequetuveuxdire,lapreuvejen’aijamaisriententéavectoi

!Sonregardcroiselemiendanslemiroiretsonsourcilrelevémefaitcomprendrequ’ellepenseàla

soirée à Paris. Cette fille est une contradiction à elle toute seule, c’est fascinant ! Elle a lamémoirecourte.Sij’aieulepremiergeste,àlafinellen’étaitpasloindem’arrachermonfute.Qu’ellearrêtedemelafaireàl’envers.—Etsijemerappellebien,cefameuxsoir,tunem’aspasrepoussé!T’étaisd’ailleursplutôtexcitée

pourunenanaquin’aimepaslesmecsdansmongenre!—J’aiétépriseaudépourvu,c’esttout.SiLolaetJaydenn’étaientpasarrivéstuauraisgoûtéàma

maindanstatronche!Jememarre.Ellecroitsérieusementauxconneriesqu’ellemesort?Ellepeutdirecequ’elleveutmais

soncorpsnementaitpas,elleenavaitenvie…Autantquemoi.J’aurailederniermot.— Eh bien, dans ce cas, le sujet est clos. Tu ne rentres pas dans mes critères mais si je t’avais

vraimentdragué,dis-toibienquetuauraisétéincapablederésister.Ellerigoleetsetourneversmoienmejetantlaservietteépongedanslatête.—Nonmaistut’entends?Moi,jen’arriveraispasàterésister?Tumeconnaisbienmal!Etsijene

rentre pas dans tes critères, crois-moi, demon coté, je neme rabaisserai pas à coucher avec unmeccommetoi!Ellesefoutdemoi,unepetitepiqûrederappels’impose.Horsdequestionqu’enplusdemepourrirla

vie,jelalaisselaminermonego.Jevaismefaireunplaisirderemettrelespendulesàl’heure.D’unpas rapide jem’avanceverselle, labloquantcontre lavasque.Mesbras seposentdechaque

côté de son corps, empêchant sa probable tentative de fuite car je me tiens trop près d’elle. J’ail’impressiondesentirlesbattementsdesoncœurtellementiltapeviteetfort.Qu’elleessaiedemefairecroire que c’est dû à l’énervement ! Sa respiration saccadée et ses pupilles dilatées par le désir latrahissent.—Etmoijetedisquetucraqueraisetfiniraisdansmonlitsijeledécidais.—Tunedevraispaslancerunpariquetuesincapabledegagner.Ellemefixed’unetoutautremanièreàprésent.J’aibeautoujoursliredudésirdanssesyeux,jevois

aussidel’assurance.Çatombebienparcequemoi,enl’état,j’enaiàrevendre.Jemepencheverssonoreilleetluisusurred’unevoixgrave:—Danscecas…quelejeucommence.Elleseraiditàcesmots,etj’aiàpeineletempsdemedétacherd’ellequeCharlotteentreàsontour

danslasalledebains.—Vousfoutezquoitouslesdeuxici?Erikvientdepartiretlesamoureuxsontalléssecoucher.Zoé profite de la présence de Charlotte pour s’éclipser et je ne peux m’empêcher de la regarder

disparaîtreenmedisantqu’ilyabienlongtempsquejen’aipaseuundéfidecettetailleàrelever.Jevaismefaireunplaisirdelafaireplier.—Jeprendsunedoucheetonsecouchenousaussi?Charlottemetiredemespenséesenfaisanttombersarobesousmesyeux.Sesdoucespromessesme

reviennentenmémoire.D’accord,Zoé,tuneperdsrienpourattendre,maiscesoirj’aid’autreschatsà

fouetter.

Chapitre5

Zoé

Lapirenuitdetouslestemps…pourmoi,celavasansdire,carlesautreshabitantsdelamaisons’ensontdonnésàcœurjoieunebonnepartiedelanuit.J’aicomprisrapidementetàmesdépensoùallaitdormirCharlotte.Sijemesuisposélaquestiondanslasoirée,lespremiersgémissementsprovenantdelachambred’àcôtém’ontdonnélaréponse.C’estdinguecequecettefillepeutêtreexpressive!J’aiviteétégênéeetsuispartiem’installersurlecanapé…PourfinirparsuivrelesébatsdeLolaetJay!Maispersonnen’apitiédemoi?Entendrema copine, j’ai déjà donné et j’en suis encore choquée, alors nonmerci. Jeme suis donc

retrouvéedenouveauàlacasedépart,dansmapetitechambre…Seule.Çamedonnel’impressiond’êtrepriseaupiège,d’êtreletémoingênantd’uneorgie.Etlà,j’aieuledroitàlatotalevenantdelachambred’à côté : les gémissements rauques de Ben, l’exaltation de Charlotte, le lit qui grince, jusqu’auxclaquementssourdsdeleursdeuxcorpsdéchaînés.C’estquoicesmursenpapiermâché?Lepiredanstoutçac’estquejesuissûrequ’illefaitexprès,ilnepeutpasenêtreautrement.Monsieurvoulaitquejel’entende.C’estjusteimpossibledefaireautantdebruit,etc’estencoremoinshumaind’yprendreautantde plaisir.Et puisCharlotte doit surjouer, elle simule, il n’y a pas d’autre explication.Bordel…J’encrèvedejalousie!Moiaussijeveuxunepartiedejambesenl’airorgasmique.Rienqu’unefois,merde!Sansêtreunefillefacile,jepeuxdirequebeaucoup,voiretropd’hommessontpassésdansmavie,etparlamêmeoccasiondansmonlit.Maisjamais,etjedisbienjamais,jen’aiprisdeplaisiraupointd’avoirunorgasme.Lecœurquipalpiteetquelquessuéesoui,maisl’explosiondesensations,jeneconnaispas.Sij’aicruaudébutqueçavenaitdemespartenaires,j’aidûmerendreàl’évidence.Leproblème,c’estmoi!C’estàcetinstantprécisquej’aidétestéceBencommejamais.Ilestentraindeprendresonpiedavec

cettefille,quejecommençaispourtantàapprécier,alorsqu’ilvient justedemelancerundéfipour lemoinsosé.Mais là, ilmeconfortedansmon idéedenepasme faire avoir. Il espèrevraimentque jevienneramperjusqu’àsachambrepourlesupplierdemesoulager?Nonmaisilrêve!Jamaisjenemeferaiavoirparsondéfiàdeuxballes:unleurreafindem’attirerdanssesfiletspourquejesatisfassesonegoetqu’ilabattesadernièrecarteenmerepoussant.Jevoistrèsclairdanssonjeu.Cethommeestpeut-êtrelatentationdudiablepourtoutefemmenormalementconstituéemaispaspourmoi.D’accord,ilestcanonmais,avecmoi, ilvase lagarderbienauchaud. Ilaperdud’avance :moncorpsne réagitpascomme celui de toutes les femmes, ni comme je le voudrais d’ailleurs.Alors oui, il se peut quemoncorpsfrémisseunpeuàsoncontactmaislerésultatseralemême.Jesuistotalementhermétiqueauplaisircharneletcen’estcertainementpasluiquichangeraladonne.J’airetournétoutemachambrepourmettrelamainsurmesécouteursetc’estaveclevolumeàm’en

faireexploserlestympansquejefinisparm’endormir.

*

Mevoilàdoncdepuisvingtminutesàessayerdecachermespochessouslesyeuxetmonteintblafard.MacolèreenversBennes’estpasatténuéedurantlanuitpuisquejemesuisréveilléeseule,fatiguéeetavecunsimplemotdeLolam’annonçantqu’ellen’avaitpasréussiàmeréveilleretqu’ilsavaientdûserésigneràpartir.J’aitraînélespiedsdanstoutl’appartementafindetrouverâmequivivemaisj’aidûmerendreàl’évidence:jesuiscomplètementseule.BenadûemmenerLolaetJayàl’aéroportetdéposerCharlotteparlamêmeoccasion,sansaurevoir…Rien!UnesemainesansLolaetjen’aidroitqu’àunephrased’encouragementgriffonnéeàlava-vitesurunboutdepapier.Unejournéedemerdecommenceforcémentparuntempspourrietlestrombesd’eauquisedéversent

danslesruesdeLosAngelesm’empêchentd’allermedéfouler.Pourtantmesmuscles,tendusàl’extrême,réclamentleurdosequotidiennedesport.Jeretournedoncdansmachambreetenfilelepremiershortquimetombesous lamainainsiqu’unebrassièrepourunepetiteséancedeyoga.Lefaitd’êtreseuleaaumoinsunavantage:pouvoiroccuperleséjourpourfairemesexercices.Montapisetunetélévisionavecprèsdetroiscentschaînesdevraientsuffireàfairemonbonheur.Quiaditqueleyogan’étaitpasphysique?Auboutd’uneheure,j’ailesmusclesquitremblent,dela

sueurquimedégoulinedansledos,maisjesuissurtoutvidéedetoutetension.Àquatrepattessurmontapis,jepenchemonbusteettendslesmainsleplusloinpossibleenavantpourfinirmonétirement.Doncsijerécapitule,jesuisàgenoux,lacroupeenl’air,lesjambesécartéesetc’estàcemomentprécisquelaporteclaquederrièremoi.—Wahou!C’estdeloinlemeilleuraccueilquetum’aiesjamaisfait!—Va…tefaire…Ben.Jesoufflelonguementencontinuantdepoussersurmesbraspuisremontedoucementpourreveniràla

position initiale.Ducoinde l’œil, jevoisBen, toujoursderrièremoiet lesyeux fixéssurmes fesses.Apparemment il pleut encore, car l’eau dégouline sur son jean usé et sur son sweat sombre.Avec sacapuchevisséesurlatête,seulssesiristurquoiseressortent.—Euh…Çava,jenetegênepas?—Ohnon,pasdesouci,continuejet’enprie.Ilmecontournelentementsansjamaismequitterduregardetvients’asseoirsurlecanapéenfacede

moi.Sesyeux s’arrondissentdavantageenapercevantmabrassière. Je suis fièredemoncorps et, lesregardsdeshommes, j’ysuishabituéemais jedétestequandonmedonnel’impressionden’êtrequ’unvulgairemorceaudeviande.Commeàcetinstant.Sonregardsurmoiachangédepuishier;ilchercheàmedéstabiliser.Ilrentredansuneséductionquin’enestpasune,justepourmettresamenaceàexécution.Vas-y,lancelejeu,jevaisprendreplaisiràtedécouragerdecontinuerlapartie.Jemerelèveetroulemontapis,toujoursinspectéeparBenquimedétaillemaintenantdelatêteauxpieds.Jesuisessoufflée,lecorpstrempédesueuretlevisagesûrementrougeàcausedel’effort,maisvusonpetitsourireildoitêtresatisfaitduspectaclequejeluioffre.—T’asfinidemematercommeça?Lafaçondonttumeregardesmedonneenviedetecreverles

yeuxavecdesépinglesànourrice.Jesuissérieuse…Arrête,jesupportepasça!Mon ton agressif le fait surtout rire, dévoilant une lignededents blanches, et il lève finalement les

mainsensignedereddition.Il retiresacapucheetquelquesmèchesbrunesviennent luichatouiller lestempesqu’ildégaged’unemain.Çafaitbizarredeseretrouverseuleaveclui,sanspersonnepourfairetamponousimplementpourlancerlesdiscussions.Onvadevoirsedébrouillercommedesgrands,entregensciviliséspendantunesemaine.Justelui,moi…etsescrisétouffésdejouissancedelaveillequimereviennententête.Bon,làc’estencoreplusbizarreetsurtoutbienplusgênant.—Enmêmetemps,situneveuxpastefairemater,faudraitéviterdetesaperaveclesfringuesd’une

gaminededouzeans!Tutrouvespasquec’esttroppetit?—C’estunetenuedesport!Jenefaispasundéfilénonplus!Etévitedebaverquandtuparlesde

petitefille…c’estvraimentmalsain!Il rigole franchement et penche la tête en me reluquant de plus belle. J’ai l’impression d’être nue

devantlui,alorsjeserremontapisdeyogafortcontremoi.—Saufquelà-dedans,tun’asriend’uneenfant…Ilnerigoleplusdutoutetjemesurprendsàcontemplersabouchepulpeusetandisqu’ils’humecteles

lèvresduboutdelalangue.Jel’aidéjàsurprisàfairecegeste,illefaitmachinalementsansserendrecompteàquelpointçapeutêtresexy.Ilselèvefinalementducanapéetmefrôled’assezprèspourquejesentesonparfumauxodeursboisées.Çaparcontre,c’étaitparfaitementcalculé!Autantilpeutêtresexyquandilfaitleschosesnaturellement,autantjeletrouveridiculequandilestdanslecontrôle.—Jesuistrempéjusqu’auxosaveccetteputaind’averse.J’aibesoind’unedouche.Ilmepassesouslenezetdisparaîtdanssachambresûrementpourprendredesaffairesderechange.Je

restelàunmoment,toujourscramponnéeàmontapis,àmedemandercequivientd’arriver.Onestrestésdanslamêmepièceplusdecinqminutessansquej’aieenviedel’étrangler,enfinpresquepas.BononestencoreloindecequeLolaattenddenousmaisjetrouvequec’estundébut.Delààl’apprécierjen’ycroisabsolumentpas,maispeut-êtrequ’unjouronarriveraàneplussedétester.Etpuissoudain,jemerendscomptequ’ilvientdemeparlerd’unedouchealorsquec’estsurtoutmoi

quienaibesoin.Prioritéàcellequivientdefairedusport!Jejetteletapisdeyogadansmachambreetfiledanslasalledebains,fermantsoigneusementlaporteavantdemedéshabiller.Jeluttepourretirerlabrassièrequi,sousl’effetde lasueur,mecollecommeunesecondepeauetquandjesuisenfinnue, lapoignéeremue.Ehouimonvieux,tuviensdetefairegrillerlaplaceenbeauté!—Putain,tufaischier,Zoé!—Oh,quandtudisaisquetuvoulaisprendreunedouche…Tuvoulaisdiretoutdesuite?Désolée,

j’avaispascompris!Je l’entends marmonner derrière la porte, qu’il continue d’essayer d’ouvrir. Je commence à faire

coulerl’eauetentameunepetitedanse,raviedeluiavoirmislesnerfs.—Jetedonnedeuxminutespoursortirdelàsinonjetejureque…—…quetudéfonceslaporte?— Je suis assez énervé pour le faire mais je suis pas con. En revanche je suis plutôt doué pour

crocheterlesserrures!—Jesuisdéjàsousladouche,tupeuxpasfaireça!—Jouepaslapesteavecmoi,tut’attaquesàplusfortquetoi.Turisquesdeleregretter!Je l’entendss’éloigneret je resteunmoment immobile,attendantdevoir s’il revientpourmettre sa

menaceàexécution.Jenel’encroispascapablemaisjepréfèrevérifieravantdemeglissersouslejet.Unebonneetlonguedouchechaudepourêtresûrequ’iln’aitdroitqu’àdel’eaufroide.C’estdingue,j’aitoujourscetteenviedel’emmerderencoreunpeu.Jenesuispasrassuréepourautantetnecessedejeterdescoupsd’œilfurtifsàlaportemaisj’airaison,iln’estpasassezcourageuxoufoupouroserrevenir.—Ohnon…Merde…Jeréaliseunpeutroptardquedansmonempressement,mesfringuessontrestéesdansmachambre.Je

cherchedésespérémentautourdemoicequejepourraisbienenfiler.Impossiblederemettremonshortnimêmemabrassièrequisontencoremouillésdemoneffort.Sansautrechoix,jeserreautantquepossible

laservietteautourdemoncorpsenmaudissantunefoisdeplusBen.Pourquoileshommessecontentent-ils de minuscules serviettes alors qu’il existe des draps de bain ? Sérieux, mes fesses sont à peinerecouvertes,etj’aibeautirersurletissu,rienn’yfait.Jesouffleunderniercoup,relèvelatêteetsorsdela salle de bains d’une démarche qui se veut confiante alors que, en moi, c’est la panique. J’ail’impressiond’êtrenue,bordel!Unsouffledesoulagementm’échappequandjevoisqueBenn’estpaslà,etjemeprécipitedansma

chambre.C’estbon,jesuissauvée!Jecommenceàdénouerlaserviettequimecomprimaitlapoitrinetellementelleétaitserréequandunsifflementderrièremondosmestoppedansmonélan.—C’estcon…Àvouloirmepasserdevantt’enasoubliéleplusimportant!JemeretournefurieusepourdécouvrirBennonchalammentadossécontrel’encadrementdemaporte,

lesbrascroisésetunsourirenarquoissurlevisage.Àlafaçondontilmeregarde, jedevineaisémentque,unefoisdeplus,ilchercheàmepousserdansmesretranchements.Maislepeudecalmequ’ilmerestedemaséancedeyogam’aideànepasplongertêtebaisséeetjedécide,aucontraire,deleprendreàsonproprejeu.—Saufsic’étaitprémédité.C’estvrai,peut-êtrequelebutétaitjustementdemepromeneràmoitié

nuedevanttoi…—Tucherchesàmechaufferlà?Ilsemarreetjem’avanced’unpaschaloupéverslui,glissantmespiedsnussurleparquet.—Possible…Jem’avanceencored’unpas, plongeantmon regarddans l’azurde sesyeux.Noscorps se touchent

presqueet je luicaresselespectorauxduboutdel’index.J’agrippelaboucledesaceintureet inclinemonvisage vers lui jusqu’à ce quemes lèvres frôlent les siennes. Son sourire disparaît, il se tend etsembleenfinserendrecomptedemamanœuvre.Jemedégageenrigolant.— Quoi ?Mais je ne fais que jouer selon tes règles, mon cher Ben. Ce n’est pas ma faute si tu

t’aperçois seulementmaintenant que la partie est loin d’être gagnée pour toi.Moi aussi je sais jouer,figure-toi!Jeluiadresseunsourireméprisantetfaisvolte-facepourm’éloignerrapidementdelui,raviedelui

avoir cloué lebec.Zoé :1-Ben :0.Que lapartiecommencechouchou ! J’ai àpeine le tempsdemeféliciterdemoncoupqu’ilm’attrapeettiremonpoignetm’obligeantàmeretourner.—Jemeréjouisd’avancequeturentresdanslejeu,mavictoiren’enseraqueplussavoureuse…Sesparolesmeurentdanssaboucheenmêmetempsquemaserviettetombeàmespieds.Songestesec

pour me forcer à lui faire face a fini de la détacher, lui dévoilant mon corps dans son plus simpleappareil.Ilmefautquelquessecondespourréagir,etjemebaisseprécipitammentenpoussantdespetitscrisridiculesjusqu’àcequetoutcequidevaitêtrecachésoitàl’abridesonregardlubrique.Laboucheentrouverte,ilcontinuedemeregardercommesij’étaistoujoursnue.—Tuvois!Qu’est-cequejedisais?Tut’offresdéjààmoi!Jesensquejevaisaimertevoirperdre!Dansungrognementsourdetdesinsultesquineviennentqu’enfrançais,jelepousseviolemmentd’une

main,l’autreétanttoujoursagrippéeàcettesaletédeminiserviette.Jenesaispassic’estlacolèrequimedonne la forcenécessaire,mais toujours est-il qu’il recule assezpourque je puisse lui claquer laporte de ma chambre au nez. Je l’entends rire encore un peu avant que ses pas ne s’éloignent. Bond’accord:1partout,balleaucentre.Jem’habillerapidementetdécidedeneplusquittermachambredelajournée,saufnécessitéabsolue.

Jechoisisderuminerseulemahonteetmacolère.Mêmepourmanger,jeneluifaispasl’honneurdema

présence.Jepréfèreencoreingurgiterlesbarresdecéréalescachéesdansmatabledechevetplutôtquedesubirunefoisdeplussesmoqueries.Etvulascènedumatin,jenedonnepascherdemapeau.Lajournéepasseàunevitessed’escargot,limiteauralenti,etaprèsavoirenvoyédesnouvellesàmes

amis,épiélaviedesautressurlesréseauxsociaux,épluchélesoffresd’emploidesenvirons,jen’aiplusrienàfaire.Lavieesttoujoursaussibellemaisbon…Jemefaischierdansmacageàlapin!Lebruitdela télévisionm’informe que Ben est toujours là. Évidemment il a compris que je l’évitais. S’il restecloîtré chez lui un samedi c’est uniquement pourm’emmerder ! Rassure-toi, tête de nœud, çamarcheparfaitement!Autant jesuispresséeque la journéese termine,autant jesuisanxieusedecommencer lasemaineà

venir.Zoédanslapeaudel’assistantepersonnelledeBen,quil’auraitcru?Pasmoientoutcas.Sijenemefaisaucunsoucipourletravail,j’appréhendeenrevanchedemeretrouversoussesordres.Ilvamepousseràbout,jelesaisd’avance.Leconnaissant,ilvajouerlesprolongationsaubureauavecsonjeustupide. Mais qu’il ne s’attende pas à avoir une docile et gentille assistante prête à satisfaire sesfantasmeslubriques.Jen’aipassignépourça!Cen’estqu’unesemaineaprèstout,etc’estpourrendreserviceàLola,alorsjevaisprendresurmoi.

Enplus,ceboulotpaiesuperbien,alorssiçapeutm’aideràdégagerplusvited’ici…tantmieux.Jerêved’avoirmonpropreappartement,deretrouvermatranquillitéet,surtout,deneplusvoirceconnardtouslesjours.Jeneme suis jamais couchée aussi tôt, surtoutun samedi soir. J’entendsdes rires et de lamusique

depuisunmoment.Apparemment,Bena invitédes amis, ça a l’aird’être la fêtede l’autre côtéde laporte.J’auraisaiméenprofiterpoursortirunpeudemachambremaismafiertém’enempêche.Etpuiscommesinerienfairedelajournéem’avaitfatigué,jeprendsplaisiràm’allongerdansmesdrapsfraisetparfumés.Soudain,justeavantdesombreretàforcedepenseràcemanqued’argentrécurrent,àcettevieàLosAngelesentouréedepersonnesfriquées,etàcemanqued’amourgrandissant,uneidéevientmepercuterdepleinfouet.Unsourireauxlèvres,jem’endorsenétantsûredem’êtretrouvéunemploisurmesure.Aprèstout,lerêveaméricainserapeut-êtreaussipourmoifinalement.

Chapitre6

Zoé

Unesemaine:unlundienenfer

Jeclaquelaportièreunpeutropfort,cequifaitgrognerBen.Ilneditrien,secontentantdemelancerunregardmeurtrier,etdémarrelavoiture.Coupd’œildiscretdanssadirection.JemedemandeàquellefacettedeBenjevaisavoirdroitaujourd’hui.Indifférencelaplustotale,çamevatrèsbien,maisjerestevigilante.Depuisl’histoiredeladouche(pournepasdiredelachutedemaserviette),c’estlapremièrefoisquel’onseretrouveensemble.Oui,jel’aidélibérémentévitéleresteduweek-end.Moncorpsnudevant son regard brûlant et ma récente implication dans son jeu sordide ont fait que je suis restéecloîtréedansmachambre.Heureusementpourmoi,ledimancheaétéplutôttranquillevuqu’ilestpartiendébutd’après-midipournerevenirquelesoir.Où,avecqui,pourquoi?Aucuneidéeetfranchementjen’enairienàfaire!Maiscesquelquesheuresdesolitudem’ontpermisdeprendreunebonnedouche,demangerautrechosequedesbarreschocolatéesetdesortirunpeudecesquatremurs.Jepenseaussiàmonidéederêveaméricainsurlaquellej’aibeaucoupbossé,passantuntempsfousurInternetàétudierlalégislationaméricaine.Jesuisrodée,maintenantjevaispouvoirattaquer.Bref,mevoilààprésentleculposésurlecuirdecettefantastiquevoiture,avecmonemmerdeurde

colocataireetdésormaisactuelsupérieurhiérarchique,àstresserpourcettepremièrejournéedetravail.—Zoé!—Hein?Quoi?J’arrêteuninstantdemerongerlesonglesetquitteduregardlesruesdeL.A.pourtournerlatêtevers

Benquivientdemesortirdemespensées.—JetedemandaispourquoituavaisquittétonboulotàParis?Lolam’aditquet’avaisuneplaceen

orlà-bas,alorsjemedemandepourquoituastoutabandonnépourvenirici.—Tulesaisdéjà,Lolamemanquait.—Et?Il me regarde du coin de l’œil, trop concentré sur la route pour me dévisager assez longtemps.

Commentsait-ilqu’ilyauneautreraison?EncomprenantqueLolanereviendraitpasenFrance,j’avaisdéjàprisladécisiondevenirlarejoindredèsquepossible.Seulement,jen’avaispasprévuqueceseraitaussitôt.J’avouequesijen’avaispaseuuncoupdepouce,jen’auraisjamaisquittémontravailaussifacilement. Je souffle bruyamment pour lui faire comprendre que cette discussion m’emmerde et meconcentredenouveausurlaroute.—Machefétaitunevieilleconneaigriequineconnaissaitrienàsonboulot.Sisonpaterneln’était

pasleprésidentdelaboîte,jamaisellen’auraitpuavoirceposte.—Ett’espartiepourça?EtlesFrançaiss’étonnentqueleurpaysvamal!—Maisnon…ellem’avirée.J’enaieumarre.J’aifiniparluisortirtextuellementcequejeviensde

tedire.Ilmeregarde,incrédule,avantd’éclaterderire.Jerepensealorsàlatêtedéconfitedemachefquand

jeluiaiditlefonddemapensée,etjefinisparmejoindreàBen,cequialedondemedéstresserunpeu.Jenesaispass’ilcherchaitàdétournermonattentionmaisc’estréussi,etjel’enremercie.Quand on arrive devant le bâtiment, je suis impressionnée par la beauté des lieux. C’est classe et

spacieux, on sent tout de suite que c’est une boîte qui pèse lourd. Les yeux exorbités et la bouchesûrement ouverte, je trottine difficilement, avecmes stilletos et ma jupe crayon, pourmemettre à lahauteurdeBenetlesuissilencieusementjusqu’aucinquièmeétage.Onvoittoutdesuitequ’ilestchezlui.

Ilestàl’aiseetunbrincondescendant,merappelantsafonctiondedirecteuradjointetderesponsabledupôlemarketing,qu’ilgère,d’aprèsLola,d’unemaindemaître.Ilfaitcommesijen’étaispaslàetsaluetoutlemondesursonpassage,sanssedonnerlapeinedefairelesprésentations.Chassezlenaturel, ilrevientaugalop.Connard!Entoutcasc’estclair,toutesonéquipelerespecte.Enfin…jemedemandesi,danslelot,iln’yauraitpasuneoudeuxnanasquirêveraientdesetaperleboss.JesuisBenetserrelesdentsenentendantlesmessesbassesderrièremondos,dugenre«c’estquicelle-là»,«tiensencoreunequivapasser sous lebureau»et j’enpasse.Àpeinecinqminutesdans les locauxet je suisdéjàcataloguée comme la protégée, la cible à abattre. Elles doivent se demander quelle relation nousentretenons.Siellessavaient!Si jeveuxtenir lasemaine, jevaisdevoiréviterd’êtrevueaveclui.Àmoilesbouchonsentaxis.—Tonbureauestici,lemienlà-bas.Ilmemontreletoutd’unvaguemouvementdebrasets’éclipsedanssonbureau,melaissantplantée

devantlemien.Jem’yinstalleetallumel’ordinateurquimedemandeunmotdepasse.Merde…Jetenteplusieurs essais, en vain, avant d’avoir une lumière. Je tape « princesse » et l’écran se déverrouilleaussitôt.Tropprévisiblelarouquine,mêmesijepensaisaudépartqueçaauraitunrapportavecJayden.Unephotos’afficheetjesourisenlareconnaissant.C’enestunedeBen,Jay,Lolaetmoipriselejourdesonanniversaire.Jefouilleunpeudanslesapplications,l’agendaetlesdossierssurlebureau…Maismaintenantjefaisquoi?Benmelâcheseuleicimaisjenesaisabsolumentpasquoifaire!Commes’ilavaitentendumonappeldedétresseintérieure,ilsortdesonbureaumaissansunregard

pourmoi. Je reste comme une conne,mal à l’aise et complètement paumée, le tout sous le regard dequelquescurieuxquicirculentdanslecouloirsansjamaisosers’arrêter.Benrevientcinqminutesplustarduncaféàlamainetjel’appelleavantqu’ilnes’enfermedenouveau.—Çatedérangeraitdem’expliquercequejedoisfaire?—J’auraispourtantpariéqueMissJe-sais-toutsauraitsedébrouillertouteseule!Faceàsonsourirenarquois,jelèvemonmajeurmaisleregretteaussitôtquandjelevoisrepartir.—Non!Attends,Ben,j’aibesoindetoi…S’ilteplaît.Ilrevientsursespasàpeinelesmotsprononcés,avecungrandsourire,etjecomprendsàcetinstant

qu’iln’attendaitqueça:quejelesupplie.C’estuneobsessiondevouloirmevoiràgenouxdevantlui?Salecon! Ilposeunefessesurmonbureauetmeregardeamusé toutensoufflantsursa tassedecaféchaud.S’ilpouvaitsebrûleravec,çacalmeraitl’arroganceaveclaquelleilmedévisage.Malgrétoutjeprendssurmoicarjesaisquesijel’envoiesurlesrosesmaintenant,jen’obtiendraipaslesinfosdontj’aibesoin.—Explique-moicomments’organiseletravailetcequejedoisfaire.S’ilattendencoreuneformuledepolitesseilpeutrepartirtoutdesuite:jetrouvequejemerabaisse

déjàassezcommeça!Mondieu,jesavaisquec’étaitunemauvaiseidéed’accepterdetravaillerpourlui.Tout çapour une fille qui n’amêmepas encoredonné signedeviedepuis qu’ellem’a laissé sonmeilleuramietsonboulot.Jelesdéteste,sonmecetelle!Je fixe l’écran sur lequel j’ai ouvert toutes les applications, attendant queBen se décide àm’aider

quand le téléphone se met à sonner. Un coup d’œil sur l’écran m’annonce que c’est l’accueil et jedécrochesansréfléchir.—Bureaude…Et là c’est le drame.Bordel j’ignore complètement comment il s’appelle. Je doute que ce soitBen

Duconcommejelesurnomme,pourtantçaluiiraitàmerveille.JenesaismêmepassiBenestsonvrai

prénomouundiminutif.Devantmondésarroileplustotal,ilsoupireavantdem’arracherlecombinédesmains.—BenjaminHarper,j’écoute.SontonprofessionnelmesortdemaléthargieetjenotesurunPost-itsonnomavantdel’oublier.Bon,

j’avoue,àcetinstantjemesensaffreusementridicule,maisçajelegardepourmoi.Aprèstout,s’ilavaitfait le nécessaire dès notre arrivée, je n’aurais pas eu ce problème. Ben répond par monosyllabesquelquesminutesàunecertaineBarbieetjedétourneleregardpourm’empêcherderire.Barbie?Sionchangeune lettreàBença faitKen! Ils iraientbienensemble,cesdeux-là. Il raccrochepeude tempsaprèsetfinitd’unetraitesoncafédevenufroidavantdeseconsacreràmoi.Pendant une heure il va m’étonner par son professionnalisme et surtout ses compétences. Je l’ai

toujours vu comme un play-boy à deux balles, une tête de nœud, mais sur son lieu de travail, il estcomplètement différent. Apprendre avec quelqu’un d’aussi passionné par son entreprise est vraimentstimulant et le poste de Lola est très diversifié. Je comprends à présent pourquoi il a besoin d’uneassistante.Travaillericidoitêtrepassionnantmaisunesemaineavecluic’estsuffisantpourmesnerfs.En parlant de nerfs, il est en train deme les mettre à rude épreuve. Il ne semble pas s’en rendre

compte,tropprisparsesexplications,maisplusletempspasseetplusilserapproche.Benqui,toutàl’heure,étaitderrièremonfauteuilàmedonnerlesdirectives,estàprésentcomplètementpenchésurmoi.Sonbrasfrôlemonépauleàchaquefoisqu’ilmemontrequelquechosesurl’écran.Saprésenceperturbemonattention:sonparfumvientmechatouillerlesnarinesetsonsoufflechaudcaresselapeaudemoncouqui s’électrise instantanément.Çame remet les idéesenplace. Il envahitmonespacevital etmoicomme,uneconne,jelelaissefaire.Quandjevoisducoindel’œilunepersonnequinousdévisage,jeme rends comptedenotre réelle proximité et jemebraque aussitôt.D’un coupd’épaule je le force àreprendreuneplaceconvenableetpivotesurlesroulettesdemonfauteuilpourluifaireface.—C’estbon,jecroisquej’arriveraiàmedébrouillermaintenant.J’aipratiquementtoutcompris,j’ai

mesnotesetaupirejedemanderaiauxautresassistantes.Ils’appuiesur lesaccoudoirsetsepencheversmoiavecsonéternelsourireencoin.Sonregardse

posesurmeslèvres,lessiennesdévientversmamâchoirejusqu’àsentirsonsoufflebrûlantsurmajoueetsavoixgravequimesusurre:—Commetuveux,maisjesuisdisposibesoin…Jefrémis.Ilmesurplombedetoutesahauteuretlebleuazurédesonregardm’empêchetouterepartie.

Encoredixsecondesàmefixerainsi,puisilseredressecomplètementetsedirigeverssonbureau,sansoublier deme décocher un clin d’œil au passage. Il m’a eue…Une fois de plus. Ses frôlements, saproximitéetsadouceur,toutçan’étaitquepoursonputaindejeu.Cemecaledondemefairepasserduchaud au froid en un claquement de doigts. Il laisse sa porte ouverte et un sourire se dessine sur sonvisageàmesurequelemiensedécompose.

*

Lapremière journée se termine, et j’aipassémon tempsdans lesnotesdeLola, sesdossierset sesmailspourcomprendredavantagecequel’onattenddemoiet jecroisàprésentavoirbiencernémonrôle.Lesseulesfoisoùjemesuislevéeontétépourallerluicherchersesputainsdecafés.Ilm’aprispoursabonnicheouquoi?Maisencoreunefoisjen’airienditetsuisrestéepolie(enfinàmonniveau)carjevoyaisbienqu’illefaisaitexprèspourmetester.Benpourradirecequ’ilveut,ilnepourrapasmereprochermonimplication.Duranttoutlerestedelajournée,saporteestrestéegrandeouverte,donnantdirectementsurmonbureau,etjesentaissanscessesonregardpesersurmoi.Jenesaispassic’estpour

mieuxmesurveilleroujustepourm’emmerdermaisjedétesteça.Jesaisquejesuisàlahauteurpourceposte,parcontreluisembleendouter.— C’est bon, le boulet, tout le monde est parti. T’as fait plus que ton temps pour cette première

journée,onyva.— Tu m’as traitée comme un chien toute la journée. Je me la suis fermée car je sais rester

professionnellemais,mepoussepasàbout.Majournéeestfinie,j’enaimaclaquedetesordresalorstum’oublies.—Jemedisaisaussi,c’étaittropbeaupourdurer.Bontucomptesdormirlàoùonpeutyaller?Jenedemandepasmonresteetrécupèremesaffairesvitefait,éreintéeparcettejournéedefolie,avant

delesuivrejusqu’àlavoiture.J’aiencorelatêtedanslesquelquescentainesdemailsquej’aidûtraiter,sanscompterlesappelsincessantsauxquelsj’airépondudumieuxquejepouvais.Bref,jesuisépuiséephysiquementmaisaussimoralement.IgnorerlesregardsdeBenm’ademandébeaucoupdeconcentrationetdeténacité.Jenevoulaispasluimontrerqueçameperturbait,iln’attendaitqueça.Leretoursefaitdansunsilenceolympien,seulslesgargouillisdemonventrequicriefaminesefont

entendre.Avectoutça,jen’aimêmepasprisletempsd’allermanger.Bon,j’avoue,jenesavaispasoùetavecquipassermonheurederepas,etcommeBennes’estpasdonnélapeinedemeprendresoussonaile(surprenant,n’est-cepas?),j’aipréféréresteràmaplace.Quand on arrive enfin à l’appart, je n’ai qu’une envie : décompresser. J’enfourne deux ou trois

madeleineshistoiredecalmermonestomacetfiledansmachambre.Cinqminutesplustard,jesuisdéjàen route pour le parc.Vêtue d’un legging noir et d’un tee-shirt ample,me voilà à présent à courir enpetitesfouléespouréchaufferendouceurmesmusclesencoretendus.Quandj’arriveàdestination,jesuissurprisedetrouverplusieursautresjoggeursetjem’insèreàmontourenaccélérantlacadence.Àmesurequemonrythmecardiaques’emballeetquemesmusclesmebrûlent,matêtesevidedetoutescesmerdesaccumuléesdanslajournée.Jemeperdsdanslechantdesoiseaux,lavégétationfleurie,cepetitculquisebalancedevantmoi…Quoi?Jeremetsmoncerveausur«on»quandjecomprendsquemespassontsynchroniséssurceuxduspécimendevantmoi.Monregards’estperdusursespetitesfessesmuscléesquise contractent de manière très sexy. Expertise du périmètre : un dos parfaitement sculpté, de largesépaules où des muscles se dessinent à travers un maillot trempé de sueur. Je ne sais pas à quoi ilressembledefacemaissoncôtépilemeconvientparfaitement!Aïe!!!Àtropmater,mabasketroulesurungroscaillouet jemanquedeperdre l’équilibre.Plusdepeurquedemalmaisdans l’action j’aidûmalencontreusementpousseruncridesurprise,commeàchaquefoisquej’aipeurd’ailleurs.Connexionétablie:monjoggeurauxbellesfessess’estretournéversmoitoutencontinuantdetrottinerenmarchearrière. Oh putain, jackpot ! Ce mec est un canon ! Le teint basané et des yeux presque noirs quim’auraientfaitrougirsicen’étaitpasdéjàfait.Etcesourire…Ohmondieu!Quepersonnenecraqueuneallumetteprèsdemoioujem’enflammedirect!Jeresteunmomentàledétailleravantdefinalementluifaireunsignedelamainluiindiquantquetoutvabien.Ilm’adresseunsourireresplendissantavantdeseretourneretdecontinuersacourse.Etmoi…Moijesuisentranse.Jesuisàdeuxdoigtsdetaperunsprintpourlerattraper.C’estpaspossible,Benm’acontaminéeavectoutessesprovocations.Mevoilàréduiteàl’étatdesuccube,àcroirequesonpetitjeumetravailleplusquejenel’auraispensé.Autantdirequ’aprèscepetitinterlude,j’aiétéincapabledereprendremacourse.J’avaisraison,venir

ici était une bonne idée pour penser à autre chose.C’est donc avec un sourire satisfait que je rejoinsl’appartement,quiestétonnammentsilencieux.J’aiàpeineletempsdefermerlaported’entréequ’elles’ouvresurunBentorsenuentraindes’épongerlefrontàl’aidedesontee-shirt.Commenteffacerlamoindretracedubellâtrequimefaisaitfantasmerilyaencoredeuxminutes?Seretrouverfaceàmoncolocataireàmoitiénuetbaignédesueur…Unlongéchangederegards’opèreetmalgrémoijeressens

uncertainmalaiseetdescrépitementsenvahirl’atmosphère.N’importequoi,viteretourne-toiavantqu’ilprofitedetonmomentd’égarement.Penseauculdetonjoggeurettrouvelemoyend’inverserlatendance!—Ilyaunautreendroitqueleparcpourallercourirprèsd’ici?—Ouais,sûrementmaismoijevaisdanslasalledesportausous-sol.Tudevraisveniràl’occasion,

onyesttranquille.Ilbalancesontee-shirtsursonépauleetmesyeuxsuiventmachinalementlemouvement,explorentla

musculaturesaillantedesontorse,jusqu’àflanchersurlaligneparfaitedesesabdos.Jesuishypnotiséeparunegouttedesueurquiglisselentementsursapeau,jusqu’àdisparaîtresousl’élastiquedesonboxer.Merdedepuiscombiendetempsjesuislààlemater?Ilmedisaitquoidéjà?Sonpetitsouriresuffisantmeremetvitelesidéesenplace.—Ilyaencoreunmessagecachélà-dedanspourmerefourguertonplanbaiseouonpeutvraimenty

fairedusport?—Unmessage caché ? Je t’explique : c’est un truc typiquement féminin de voir des sous-entendus

partout.Jeteparledesportuniquement.Sinonjet’auraisditquepourunebaise,çapeutêtresympaaussi.Maisbiensûr!Jeveuxbiencroirequejecommenceàdevenirparanoàm’imaginerquedanschacune

desesparolesilyadesallusionssexuellesmaisfautpasseleurrer:illefaitexprès.Enfinjecroisqueçamerassuredel’envisagerainsi…Mon téléphone met fin à mes réflexions quand la sonnerie spéciale Lola se fait entendre de ma

chambre. Excuse toute trouvée pourm’éloigner de lui. Je récupèremon téléphone sur le lit, là où jel’avaislaisséenpartant.—Salut,machérie!—T’étaisoù?Çafaituneheurequej’essaiedetejoindre.Surtonportable,surceluideBenetmême

auboulot…Injoignablenullepart!—Alorslàc’estlemondeàl’envers,t’espartiecommeunevoleusealorsquejedormaisetc’esttoi

quim’engueules?—BonOK, j’ai rien dit, c’est juste que j’étais inquiète, j’avais peur que vous ayez fini par vous

entretuer!Alorscettepremièrejournée?Je lui racontedans lesgrandes lignes enomettant lesbâtonsdans les rouesdeBenpourqu’ellene

s’inquiète pas davantage. Elle doit profiter de ce séjour pour se détendre, loin de nous et du boulot.Pourtantjelasensinquiète.Lolaversionmaman,leretour!—Etsinontum’expliquespourquoit’esessoufflée?Commej’arrivepasàjoindreBennonplus,je

commenceàmeposerdesquestions…Ellenefinitpassaphrase,melaissantlesoind’assimilercequ’ellesous-entend:luietmoientrain

de…J’enrigoletouteseule!Elleapeurquel’ons’étripeetl’instantd’aprèselleinsinuequ’onétaitentraindes’envoyerenl’air.—Mabiche,lejouroùilposeralamainsurmoi,c’estqu’iln’yauraplusqueluisurterre!Etencore,

faudraitmebanderlesyeuxpourrepeuplerlaplanète!Jevaismechercherunsodadanslefrigoetm’installesurunechaisedebar,enpicorantdanslagrappe

deraisins.Monappétitestrevenuetjeréfléchisdéjààcequejevaisbienpouvoirfaireàmangercesoir.Benréapparaît,ilsentbonlepropre.JenesaispasdepuiscombiendetempsjeparleavecLolamais

ilaeuletempsdeprendreunedouche,detondresabarbeetdesefairesonéternelbun.Bon,àbieny

réfléchir j’ai peut-être un peu exagéré. Ouais, si je devais sauver l’humanité, je pourrais écarter lescuissesdevantlui.Maiscommec’estpasd’actualité,fautquej’arrêtedeledévisagercommesic’étaitlecas. Ilne semblepas s’enêtre renducompteetva se servirunebièreavantde s’installer faceàmoi,curieuxdesavoircequesa«princesse»meraconte.—Aufaitt’étaisoùducoup?—Partiecourir.J’aiétédansleparcpasloindel’appart.—Ahbon,ilyaunparcàcôté?—Oui,tulesauraissitonculflasquen’étaitpasallergiqueàtouteslesactivitéssportives.—Hey,monculseportetrèsbien!J’entends la voix de Jay derrière qui le confirme et je comprends alors pourquoi elle parle

constamment en anglais maintenant : pour que son dieu du sexe puisse suivre nos conversations.Macopineestcomplètementdinguedecemec,c’estdésespérant.—Si tuveux, lasemaineprochainejeviendraiavectoi,histoirequetu tesentesmoinsseule.Enfin

justeunefoispourvoirhein,commetumel’assigentimentfaitcomprendre,lesportetmoi,çafaitdeux.—Netedonnepascettepeine,jenevoudraispasavoirtamortsurlaconscience!Etpuisjenesuis

passeulelà-bas,onestplusieursàaimercourir,figure-toi.J’aid’ailleursfaitlaconnaissanced’unmec,enfindisonsplutôtquejevaisbientôtfairesaconnaissance…JelanceunsourireàBen,maiscelui-cifaitlagrimaceetpartenemportantsabière.Jememarre!Oh

non,Ben,neparspasdéjà,c’estseulementmaintenantqueçadevientintéressant!Quoi,tunesupportespas laconcurrence?Jaydena l’air luiaussides’êtredésintéresséde laconversationcar jen’entendsplussesremarques.Onparleencoreunmomentjusqu’àcequel’appeldeladouchemefasseraccrocher.Jerécupèremesaffairesetfileavecplaisirmedébarrasserdecettepelliculedesueurquimerecouvrelapeau.Quandjesorsdelasalledebains,Benm’attenddanslesalonetmefaitsignedelerejoindresurle

canapé.Avantquejenecomprennepourquoi,ilmeglisseunefeuilleetunstylodanslamain.Euh…J’ailoupéuntruclà?—Onauraitdûcommencerparlàquandtuasemménagé.Carentantquecolocataires,onadesrègles

àrespecter.—Lolaaussiaeudroitàça?—Non.—Etpourquoimoi?—Parcequejustementtun’espasLola.J’encaissesansbroncher.Non,c’estvraiquejenesuispasLolaetjecomptebienleluimontrer!—D’accorddanscecas…Jeposelafeuillesur la tablebasseetécris toutcequimepassepar la tête.Voyantquejem’attelle

sérieusementàmesdevoirsdusoir,ilprendluiaussiunefeuilleetcommenceàsontouràécrire.Quinzeminutesplustard,ons’échangenoslistesderèglesdecolocation.Ilnevapasêtredéçuduvoyage,maisaprèstoutc’estluiquil’avoulu!Ilregardeuninstantmafeuille,rectoversos’ilvousplaît,etcommenceàlireàvoixhaute.—Baisserlalunettedestoilettes:non,t’esdansmonappartalorsjustementc’estàtoidepenseràla

relever!Sinonrangermonbordel,faireàmangeràtourderôle,nepasseparleravantlecafédumatin,nepastoucherauxaffairesdel’autre:pasdesouci.Fermerlabouchequandjemangesurtoutlematin

avec mes céréales, ramasser mes poils dans la douche et tous tes autres trucs farfelus, d’accord, jevalide.Ilrigole,avantdeposerlafeuille.—Parcontre:êtrediscretquandjeramèneunefille,excuse-moimaisçajenepeuxpaslecontrôler.—Bahvoyons,tupeuxjusteleurdired’arrêterdesimuleretletourestjoué!—Tupeuxpensercequetuveuxmaisaucunefemmenesimuleavecmoi.Cettefois-ci,c’estàmontourderigoler.—Comment tu peux le savoir ? Toutes les femmes simulent, eh oui,mon gars ! Et si tu veux tout

savoir…Jemepencheversluicommepourluimurmurerunsecret.—…lepèreNoëln’existepas!—T’asfinidefairetamaligne?Siunefemmeavaitdéjàsimulédansmonlit,jepeuxtejurerqueje

m’enseraisrenducompte!Maiscen’estpaslecas,onnefaitpassemblantavecmoi.J’aiuneinfopourtoi:nefaispasdetoncasunegénéralité!Touteslesnanasnesontpasobligéesdefeindrel’orgasme.Jesuispiquéeauvif,énervéeetvexéequ’ilsoitautantdanslevrai.Touteslesfemmessimulent!Bon

OK,peut-êtrepas tout le temps…Si jeprends l’exempledeLolaquiatteint leseptièmecielavecsonhomme,c’estl’exceptionquiconfirmelarègle.Onnepeutpasprendreduplaisiràchaquefois,si?C’estsurhumain!Le sourire satisfait de ce prétentieux me donne envie de hurler alors je vais le faire, mais à ma

manière. Je ferme lesyeux et je crie, geins, gémis,memords la lèvre sensuellement et finis par jouirbruyamment commeune chienne en chaleur. J’ai déjà regardé assezdepornospour savoir que je suisdanslevrai.Alorsoui,jesimuleavecmesmecs,maispourluijedonnetoutcequej’ai:—Humm,Ben…Tesmainssurmapeau…Ohoui, touche-moi!J’enpeuxplus,encore!Je lasens

bien,taqueue!Ohoui,quej’aimetaqueue!Vas-youi,commeça…Oh!Oh!OH!MONDIEU!!!Ohouiiiiiii!!!Hum!Han!Hann!Haaannn!C’est tout essoufflée et rouge que je rouvre les yeux et découvre Ben le regard ahuri, la bouche

entrouverte.Satisfactionmaximale:unebellebossesedessinesoussonshort.Merci!D’undoigtsouslementon,jeluifaisfermersonclapet.Oui,lesfemmessaventtrèsbienfairesemblant,maintenantilenalapreuve.—T’aspasl’aird’êtreenconditionpourqu’ondétailletalistecesoir,laisse-moil’étudieretonen

parledemain,d’accord?Pasderéponse,c’estétonnant…Jemelèveetprendsavecmoisalisteavantdem’engouffrerdansma

chambre.Jejetteunœilàsapremièreclause:encasd’absencedeLola,fairedeslasagnesaumoinsunefoisparsemaine.Maisc’estquoicetterevendicationpourrie?Envoilàunequejevalidemaisilnelesaurapasce soir, jen’aipas le temps !Aumieux il auradespâtescar là, j’ai tropà faire. Il fautquej’organisemonavenirici,etsijemedébrouillebien,jepourraipeut-êtremêmecommencermonnouveaujobdèslasemaineprochaine.

Chapitre7

Ben

Unesemaine:lemardidel’horreur

La tête dansmon bol de céréales, je regarde du coin de l’œil la fameuse liste. Les règles de vieversion Zoé que j’ai accrochées sur le frigo. Je les ai relues une dernière fois avant deme coucher.Sérieux,cette filleestcomplètementcinglée !Encoreaujourd’hui jeboguedessus :nettoyer lacuvettedeschiottesàlalingetteaprèschaquepassage.Jeneluidemandepasd’enfaireautantsurlalunettealorsqu’elleposecarrémentsonculdessus!Laportedesachambres’ouvreetjemanqued’avalerdetraverslorsqu’elleapparaîtdansunesimple

robenoireavecuneputaindefentesurlecôtéquiremontejusqu’àmi-cuisse.Merde,elleabeauvouloirfaire dans le classique, il y a toujours un truc qui fait qu’elle ne l’est pas ! C’est dans desmomentscommeçaquejeneregrettepasdeluiavoirfaitcroirequelajupeétaitderigueurpoursonposte.Jebaisserapidementlesyeuxetmeconcentresurmonbol.Règlenuméro1:Nepasl’emmerderdèsle

matin tant qu’elle n’a pas pris son café. OK, on va attendre un peu. Sans un mot ni un regard, elles’installesurletabouretenfacedemoi,jetteunsucredanssonmugettourneinlassablementsacuillèredansleliquidenoiretcorsé.Ellesemblecomplètementailleurs.Enfait,àvoirlescernessoussesyeux,jepensesurtoutqu’ellen’apasbeaucoupdormi.J’entireraispresquesatisfaction,surtoutaprèsm’avoirfiléunegauledudiablelaveilleausoirensimulantunorgasme.Putainquandj’yrepense,celle-là,onneme l’avait jamais faite ! Sans mêmem’avoir touché, elle a réussi à brancher ma queue sur le modeexcitation.Enplusdem’avoirfilédesdoutes:commeuncon,j’aipasséenrevuemesderniersplanscul.Etfranchement,j’aihésitéplusieursfoisàallerlaretrouverdanssachambrepourluiprouverqu’avecmoi,lesfillesaimentetenredemandent,maisc’étaitsignermadéfaiteprématurément:gameoverdirect,c’esthorsdequestion.Nonmaissérieux,pourquoijemesuisprislatête?!Clairement,c’estpascettenanaquivatoutremettreencause.Biensûrquemesconquêtesonttoujoursprisduplaisiretelleseralaprochaine!Esquissedesourire.Enrevanche,j’aitrouvéunjobsurmesurepourelle:doublagedefilmspornos.Jesuispersuadéqu’ellepourraitdécrocherunoscarduX!Jemetsunenouvellecuillèredecéréalesdansmaboucheetlarefermeaussitôtavantdelescroquer.Je

suisdégoûté,ellesenperdenttouteleursaveur.Ellerelèveenfinsesprunellestranslucidesversmoietmerenvoieunsourirecrispé.J’enenfourneencoreuneprenantsoinunefoisdeplusà limiter lebruit.Cettefoisellerigolefranchementettoutçasansavoirprisuneseulegorgéedesoncafé,autantdirequeçarelèvedumiracle!—Tusaisquetamaladieporteunnom?Ellerelèveunsourcilinterrogateurtoutenposantsonmug,laissantunetracerougelàoùseslèvresse

sontposées.Pourquoijebloquelà-dessus,moi?—Lefaitdenepassupporterlesbruitsdebouche:t’esmisophone!—Recherchetrèsintéressanteetsurtoutquiprouvequetun’asriend’autreàfoutre,maisjenelesuis

pas.Enfinoui,çamegênemaissurtoutavectoi.Jemedisaisqueçacompléteraitmaliste.—T’es en traindemedire que je n’arrivepas à savourermes céréales juste parceque tuvoulais

mettreleplusdechosespossiblesurtaputaindefeuille?—Euh…Ouais!C’esttoiquiasvoulufaireunelistealorstudoist’ytenir,d’autantplusquetul’as

déjàvalidée!Zoéoucommentsefaireavoirparunepesteenuneseuleleçon…J’enrevienspas,j’auraisdûmieux

négociersaliste.Sonsourirevictorieuxmedonneenviedeluijeteràlatronchelerestedemescéréalesàprésentramollies,histoiredelacalmervitefait.Elleposeunefeuillepliéeenquatresurlecomptoiret

laglisseversmoi.Jeladéplieetdécouvremaliste.Trèsrestreintecomparéeàlasienne,etraturéeunpeupartout.J’ycroispas…Elles’estmêmepermisedecorrigermesfautes!Jeserrelesdentsplutôtquedel’attaquertoutdesuiteetmeconcentresursesmodificationsquejelisàhautevoix.—Mefairedeslasagnesunefoisparsemaine.OK,tuvalides,maisseulementenl’absencedeLola.

Pasdesouci,enplusjenesaispascequevalentlestiennes.—Ellessontencoremeilleures.—Ouais,jedemandeàvoir.Bref…Virerlesfemmesdemonlit,tuvalidessansconcessions?Serais-

tujalouse?Ellelèvelesyeuxaucielavecunemineexaspérée.—Lolam’adéjàparlédevotrearrangement,jemeferaiunplaisirdesauvertespauvresvictimes!En

plusj’adorefairedesmisesenscène,j’aidéjàquelquesscénariosentête,jevaism’éclater!Jesourisfaceàsaremarque.Pourquoiçanem’étonnepas?Aumoinsjesaisquelarelèveestassurée

quand Lola sera chez Jay. En son absence, j’évitais d’en ramener de peur de ne pas réussir à m’endéfaire.Maintenant, je vais pouvoirme faire plaisir plus souvent, ce sontmes couilles qui vont êtreravies!—Laclause«pasd’hommechezmoi»n’estpasnégociablecommetuledemandes.C’estmonappart,

jeneveuxaucunmecici.Devantsonairseptique,jepréfèreclarifierlasituation.—Jesuissérieux,Zoé.Situveuxbaiser,tufaisçaailleurs,pasici.—Unefoisdeplus,Lolaadesdroitsquemoijen’aipas!—Lolasortavecmonmeilleurami,c’estpaspareil.J’aipaseuàendurerundéfilédemecsenrut

avecelle.—Attends,tuveuxdirequoi,là?Sonmugclaquesurlebaretsesyeuxmedéfientdecontinuersurceterrainapparemmentminé.Merde,

j’aiparlétropvite!Jenelaprendspaspourunefillefacile,jeneveuxpasl’entendreaupieuavecunmecc’esttout.—JedisjustequeJaydenestcommeunfrèrepourmoidoncjen’yaijamaisvraimentpensé.Toi,tes

mecsjenelesconnaispasetjeneveuxpasd’inconnudansmonappart.Elle semble satisfaite dema réponse et je souffle intérieurement de soulagement. Une guerre vient

d’être évitée de justesse !Ma liste atterrit sur le frigo à côté de la sienne, bien en évidence pour serappelernosobligations.Envoyantmesquatrepauvres règlescomparéesà sa feuille rectoverso, j’aicomme l’impressiondem’être fait complètement rouler. Je regarde ladernièrenoteet sourisquand jevoisqu’elleasimplementétébarrée.Jelatapoteduboutdudoigtetmeretourneversmacolocataireenrigolant.—Quantàladernièreclausequeturefuses,onverrabiensituarrivesàt’ytenir!—Tu peux le noter noir sur blanc ça ne changera rien.Ton jeu stupide est perdu d’avance : je ne

baiserai pas avec toi de mon plein gré. T’as l’air de me prendre pour une salope alors dis-toi que,justement,j’enaivupasserdesqueues.Maislatiennen’ariendeplusquelesautres,bienaucontraire.Puisqu’elleestsuspendueentrelesjambesd’unemmerdeurfini.Lepirec’estqu’ellea l’air sûred’elle !Plusellemerepousseetplus j’aienviede l’avoir.Ce jeu

commencedrôlementàmeplaire.Ellemebousculepourque je libère laplaceque j’aiconsciemmentréduiteentreelleetmoi,mettantfinàladiscussion.

*

Deuxheuresque je suisdansmonbureauet lavueque j’aid’icim’empêchedemeconcentrer troplongtempssurmontaf.Mesyeuxdévientsanscessesurseslonguesjambesquimefontdel’œil.Vuleregardqu’ellemelance,Zoédoitpenserquejelaissemaporteouverteuniquementpourlasurveiller.Ilyadeça,maisc’estsurtoutpourpouvoirlorgnersursesbellescuisses.Dèsqu’ellebougeunpeu,letissuremonteauniveaudelafentedesarobe,melaissantdécouvriràchaquefoisunpeuplusdepeau.Jenesaispassielleenaconscienceousielleestentraindejouer,maissoncroisédécroiséestsiérotiquequema queue risque d’imploser. J’ai l’impression de rejouer la scène deBasic Instinct ou d’être unvoyeurperverstandisqu’ellecontinuedebossersansserendrecomptedel’effetqu’ellepeutproduire.Ellen’apasvouluvenirauboulotavecmoicematin,soi-disantparcequelesfillesl’ontregardéede

travershierquandons’estpointéstouslesdeux.Franchement,jenepensaispasquec’étaitlegenredefilleàsesoucierde l’avisdesautres.Ellefaitsadureàcuiremais,enfindecompte,elleestcommetouteslesautres:fragile.J’ensuislimitedéçu,jelapensaisréellementdifférente.Bond’accord,j’enaibaisé plus d’une ici, mais elles savaient toutes à quoi s’en tenir alors je ne vois pas pourquoi ellesauraientprisZoéengrippe.Ah,lesfemmesentreelles,devraiesfuries!Aumoinsj’entireunavantage,jepeuxvenirenmotocommejelefaisd’habitude.Jebaisselatêtesurlemailauquelj’essaiederépondredepuisdixminutesquandunmouvementattire

monregard.Erikvientdes’installersurlefauteuilenfacedubureaudeZoéetilssemblentmaintenantenpleinediscussion.Jelesignore,meconcentresurcemailetrépondsàquelquesautresavantdereleverdenouveau la tête.Monpoteest toujoursà lamêmeplaceet ils rigolent tous lesdeux. Ildistraitmonassistantedepuisunbonmomentetnepassemêmepasmevoircommeillefaitrégulièrement.Jetendsl’oreillepouressayerd’écouterleurconversationmaisenvain.SeulleriredeZoéparvientjusqu’àmoi.Jebousde l’intérieur, ne sachantpasvraimentpourquoi.Voyantqu’il n’est toujourspasdisposé àmerejoindre,jemelève.—Ahsalut,Ben!Zoémedisaitjustementquetuneluiavaispasfaitfaireletourdelaboîtepourla

présenter.J’ailetempscetaprès-midi,jel’emmèneraiavecmoi.—Commetuveux,sit’asdutempsàperdrepourlapromener,c’esttoiquivois.—Jenesuispasunclébard,espècedetyran,jeleferaipendantmapausesiçategêneautant!Elleestrougedecolère,jedevinequ’auboulot,mesvannesl’amusentencoremoins.Jeluifaissigne

que ça ne me pose aucun problème. Après tout, c’est comme elle veut. Si se faire présenter à despersonnesdontelleneretiendramêmepaslenoml’amuse…—T’esprisecemidi?Zoéjetteuncoupd’œilausandwichqu’elleaprisavecelleavantdereportersonattentionsurEriket

deluiadresserunlargesourire.—Non,librecommel’air!—Super,danscecasjet’emmèneàlabrasserieoùceuxdelaboîteontl’habituded’allermanger,ça

pourraitt’êtreutilepourtefairedesamis.Sit’esprête,onpeutpartirmaintenant?Sansdemandersonreste,Zoéselèveetattrapesonsacàmainavantdemecontournerpourrejoindre

Erik,quis’estlui-mêmelevé.J’ail’aird’uncondeboutdevantsonbureauvide,etavantdepasserparlacasecerveau,mesmotssortentdemabouchesansmonaccord.—Super,jevoussuis,çafaitlongtempsquejen’yaipasmislespieds.Enuneenjambéejelesrejoinset,lesmainsdanslespochesj’avanceendirectiondel’ascenseur,sans

tenircompteduregardinsistantdemonpote.Ilvoulaitpeut-êtreseretrouverseulavecmonassistante…

Pasdebol!Lerepasestd’unennuimortel:toutelaconversationtourneautourdelaviedeZoé,l’enfancedeZoé,

les études deZoé, les passions deZoé…Erik a une tonnedequestions et elle s’y prête avecplaisir,heureused’êtrelecentredel’attention.Pitié,tirez-moiuneballequ’onenfinisse!EnvivantavecLola,j’aidéjàeuledroitàuncompte-rendudétaillé,alorsautantdirequej’enaiabsolumentrienàfoutre!Lescoudessurlatableetlementonposésurmesmainscroisées,jefaissemblantd’écoutertandisquemonespritrepartsurlesnombreusestâchesquim’attendentàmonbureau.Soudainmonregardsefixe,jevoisunepointede sauce sur le coindes lèvresdeZoé.Elle ne semblepas s’en apercevoir et continuedeparler.Jesourisdevantsoncôtéridiculemaisavantquejenemerendecomptedemongeste,monbrass’allonge dans sa direction et, demonpouce, je viens recueillir la goutte de sauce que je porte àmabouche.Cegestelasurprendetlafaçondontellemeregardeestplutôtperturbante.Bordel,pourquoij’aifaitça?—Je…Euh…Jevaisauxtoilettes,jereviens.Elle s’éclipse rapidement, faisant se retournerquelques regards sur sonpassage.LegrosHubertdu

servicejuridiqueenviendraitpresqueàbaver,c’estrépugnant!—Toi,tucouchesavecelle!—Hein?Non,biensûrquenon!—Maist’enasl’intention!—Maisnonenfin,jepeuxbaisern’importequi,pourquoijem’emmerderaisavecelle?Erik lèveun sourcil sceptique face àmon emportement soudain.Bond’accord, c’est unobjectif, je

diraimêmemonprincipalobjectif,maisiln’apasbesoindelesavoir.Cen’estpasdansmeshabitudesdeluiparlerdemesplanscul.Ilesttropromantiqueetfleurbleue,jepréfèredeloinenrigoleravecJay,aumoinsjesaisqu’ilmecomprend,lui.—Danscecas…Tun’asriencontrelefaitquejetentemachance?—Tufaiscequetuveux,mec,c’estpasmonproblème.Jedétournelatêtedevantsonsouriresatisfaitquialedondemeboufferettombesurlapetitenouvelle

dusixièmequimedévoredesyeux.Intéressant!Ellerougitvoyantqu’ellevientd’êtrepriseenflagmaissoutientpourtantmonregard.Commentelles’appelledéjà?Leclind’œilquejeluiadressefinitparluifairebaisserlatêteaumomentoùZoépassedevantellepournousrejoindre.Aprèsça,Eriksemontreplusentreprenantetladragueouvertementdevantmoi.Putain,jesuisdevenutransparentouquoi?Enfaitnon…Zoéme jettede rapidescoupsd’œil,unpeugênéepar lechangementdecomportementdemonpote.Ellen’apasl’airtrèsréceptivemaisacceptepourtantdemangeravecluilelendemain.Maisseuls,cette fois-ci.Message reçucinqsurcinq : jenesuispasconvié.C’estpascommesi j’avaisenviederetenterl’expérienceenmêmetemps!Jen’aipasdécrochéunmottoutlerestantdurepas,detoutefaçonj’avaisl’impressiond’êtredetrop.J’aiprofitéd’unappelsurmonportablepourmebarrerplustôt.

*

Quandellemerejointaubureaupresqueuneheureplustard,elletoqueàlaporte.Jel’aiferméemais,apparemment,ellenecomprendpasquej’aieumadosedeZoépourlerestantdelajournée.—T’asbesoindemoioùjepeuxprendredeuxminutespourallervisitermaintenant?—Vas-y,vat’amusersit’asriend’autreàfaire!Enmepenchant, jepeuxvoirErikquipatientegentimentderrièreelle. J’ai enviede luidonnerdes

tâches ingrates histoire qu’elle soit d’aussimauvaise humeurquemoimais j’oublie aussitôt l’idée. Jeveuxjustequ’ellesortedemonbureau.Ellecommenceàfermerlaporte,maisjemeraviseaussitôt.Ellenes’entirerapasaussifacilement.—Nonattends!Avantj’auraisbesoinquetuappellesShirleyduserviceinformatique(aliaslapetite

brunedelacafétériaquimefaisaitdel’œil,sonprénomm’estrevenud’unseulcoup)pourluiproposerunrencardcesoir,chezmoi.Touslesnumérossontdansl’Intranet,tun’aurasaucunsouciàletrouver.Àmademande,ellealégèrementtiquémaisapourtanthochélatêteavantderefermerlaporte.Sicette

demoiselle accepte mon invitation, ce dont je n’ai aucun doute, je vais avoir de quoi oublier lerapprochement entre cette peste etmon pote de toujours. J’ai comme l’impression que les Françaisescherchentàm’éloignerdemesmeilleursamis.

*

Sanslevouloir,Zoéetmoisortonsenmêmetempsdubâtimentmaisellerepartcommeelleestvenue,sontaxil’attendantdéjàdevant.Jem’installesurmamoto,démarreetaccélèred’uncouppourfairerugirlemoteur.J’adorecebruitsourd,l’odeurdel’essenceetlapousséed’adrénalinequim’envahit.J’arrivebienavantelle:l’avantagedelamotodanslesembouteillagesàcetteheuredepointe.Lorsqu’ellearriveenfin,jesuissurlepointd’allerdansmasalledesport.Vucommentellefiledanssachambre,jedevinequ’ellevaelle-mêmeallercourir.Chacunsafaçondedécompresseretsûrementchacunsesraisonsaussidevouloirlefaire.Jenesaispasvraimentqu’ellessontmesmotivationsréellesmaisjedonnetoutcequej’aipendantpresquetroisheures.C’estl’horlogeaccrochéeaumurquimefaitstoppermacoursesurmontapisetnonlesmusclesquimebrûlent.Jen’enpeuxplus,jesuislessivémaisj’enavaisbesoin.Jemesensmieuxdansmatêteetprêtàm’occuperdecettepetiteShirleyquinedevraitplustarderàarriver.Quandjereviensàl’appart,uneassiettedetagliatellesàlacarbonaram’attendsurlatable.Ellefait

desefforts,çafaitplaisir.Enfindecompte,onvapeut-êtrefinirpars’entendre!Jemangesurlepouceetavaleletoutencinqminuteschronoavantdepassersousladouche.Mesmusclessedétendentdoucementsouslejetd’eauchaudemaisjeneprendspasletempsd’enprofiter.J’aiunautremoyendemedétendre,etd’unemanièrebeaucoupplusagréable,quidoitdéjàêtreenroute.Jemeparfume,tiremescheveuxenarrièreenlesbloquantavecunserre-têteettaillemabarbe.Beaugosse?Perfectionniste?Tombeur?Sivousledites…Jesuisd’accord!Surcespenséespositives,jerejoinsmachambreenservietteetsuislimitedéçudenepasvoirZoé.Lafaçondontellem’épieducoindel’œilmefaittoujoursdélirer.J’aiàpeine le tempsdepasserun jeanetun tee-shirtque l’interphoneannonce l’arrivéedemon rencard. Jejubileintérieurementenpensantàcettepetitebruneauxbeauxyeuxvertsquimedraguaitouvertementcemidi.Le simple fait qu’elle ait acceptéedevenir chezmoi ce soir à ladernièreminute et sans réelleraisonmefaitdirequ’onvapasserunebonnesoirée!J’appuiesurleboutonsansprendrelapeinedevérifierdequiils’agit,avantdepasserlatêtedans

l’embrasuredelaportedeZoé.Dansunpyjamaquin’ariendesexy,elleestallongéesursonlitavecsonordinateurdevantelle.Cesderniersjours,elleestenpermanencescotchéeàlui.Jenesaispascequ’ellefabrique,maisçaluiprendtoutsontemps.—Monrencardestarrivé,tutesouviensdesconsignesoujetefaisunpetitrappel?—C’estbon…Ellenesedétournepasdesonécran, tropconcentréesursesdoigtsqui tapent frénétiquementsur le

clavier.Ellesouffleenmerépondant,signequejelafaisgravechiermaisaumoinsj’aimaréponse.—OK,bahbonnesoiréealors!Jefermesaportederrièremoi,soucieuxdeluiéviterlebruitetmedemandemêmesijevaisêtreassez

gentilpourlimiterlescrisdansmachambretoutàl’heure.Elleafaitdeseffortsdesoncôté,jedevraisenfaireautantmaislefaitdesavoirqu’ellem’entendenpleineactionàuncôtéexcitant.Troiscoupsdiscretsàlaportesuffisentàmesortirdemespenséesetj’avanceverscelle-cilesourire

auxlèvres.—C’estsurtoutàtoiqu’ilfautsouhaiterunebonnesoirée!Zoé crie depuis sa chambre et son ton paraît trop amical pour être sincère.D’un seul coup j’ai un

putaindepressentimentetj’ouvrelaporteavecappréhension.—Bonsoir,monsieurHarper!—Bonsoir…Shirley.Sijesuisétonné, jenelaisserienparaîtreetmêmesi j’aienviederefermerlaporteaussisecpour

courir me cacher, ma bonne éducation m’en empêche. Je laisse Shirley entrer et me préparepsychologiquementàsubircettesoiréedemerdequis’annonçaitpourtantexcellente.Lavengeanceestunplatquisemangefroid,Zoéval’apprendreàsesdépens.

Chapitre8

Zoé

Unesemaine:unmercrediquicommençaitsibien…

Leréveilaétédur,j’aibossétrèstarddanslanuitsurmonprojetmaisc’estsansaucunregret.Jepeuxofficiellementdirequejesuiscequel’onappelleunelovecoach,etjesuisplutôtfièredurésultat!Leblogquej’aicréédetoutepièceavecmespetitesmainsproposedésormaismesservicesàlagent

féminine. Oui je sais, c’est l’hôpital qui se fout de la charité quand on sait que, niveau relationsamoureuses, jesuis loind’êtreunmodèle.Parcontres’ilexisteuncoachingpourréussiràprendreduplaisiravecunhomme,jesuispreneuse!Etpuisquel’onvitàLosAngeles,oùl’apparence,leluxeetlesuperficielprônent,j’aiaussimisen

place ce que j’appelle le « Pigeon en costard ». Ilm’a demandé beaucoup de tempsmais il va fairefureur.Pourtoutescesfemmescupidesetvénalesquicherchentunhommericheàsemettresousladent.C’estdégueulasse?Sûrement.Mais jene faisque les rapprocher, si lepigeon se fait avoir, c’est sonproblème.Ethistoiredelesappâterunpeuplus,j’airécupéréunephotodeBensurlenet,lebonpartideL.A. Sa belle gueule va me servir pour une fois. Merci pour ton investissement dans mon projet,chouchou!Résultatdescourses,j’aideuxoptionsàproposer:

Vousvoussentezseule?Vousnecroyezplusenl’amour?

Vousêtespersuadéequepersonnenepeuts’intéresseràvous?N’hésitezpas,cetteformuleestfaitepourvous!

ou:Vousêtesambitieuseetnevoulezpasn’importequelhommedansvotrevie?

Besoind’aidepourflaireretramenerungrosgibier?Mesdames,jesuisàvotreservice!

Le site sera opérationnel dans la journée, une fois la dernière validation obtenue. Les tarifs sontattractifsetjeseraidispopourlespremièresséancesdèslafindesemaine,quandjeserailibéréedecetafd’assistantepersonnelledeMonsieurHarper-le-baiseur.Quandjepenseàlui,j’aiunesoudaineenviederire.Êtredebonnehumeurdèslematinestvraiment

rarissime, mais ma future entreprise et ma petite blague d’hier soir sont des euphorisants, une vraieboufféed’oxygèneencematinpluvieux.LaportedelachambredeBens’ouvreetjecachemonsourirederrièremonbol.Ilpassedevantmoi,levisageferméetlarageauventrepourallers’enfermerdanslasalle de bains.Quoi, il est énervé aprèsmoi ?Bon, il se peut que jeme sois légèrement trompée enprenantsonrendez-vous,maisc’étaitpresqueinvolontaire.Jenecomprendspas…J’aidûmemélangerles pinceaux entre la Shirley un peu psychopathe du service compta qui bave sur Ben dès qu’ils’approched’unpeutropprès,etcettemignonnepetiteShirleydouceetnaïveduserviceinformatique.D’accord j’avoue, j’étais tellementprisepar la créationdemonblogqu’il sepourrait que j’aie aussioubliédelavirerdesonlitcommelestipulenotre«contratdecolocation».Maiss’iln’envoulaitpas,fallaitpasseforcer!Nonmaissérieusement,ilcroyaitvraimentquej’allaisfairedansletéléphoneroseetprogrammerses

plansculsansriendire?Shirley,quantàelle,esttoutsourire.Elles’installeàcôtédemoietsonregardmelanceunetonnede

remerciements.—Jamaisjen’auraispenséqu’ils’intéressaitàmoi,mercidem’avoirappelée!—Maisjenefaisquesuivrelesdirectivesdemonpatron.—Etiln’yariend’autreentrevous?Non,parcequevousvivezensemblealors…—Patronpourencorequelquesjoursetcolocatairetemporaire.Ças’arrêtelà!—Tantmieuxalors,parcequej’espèrelerevoirbientôt.Nonmaist’imaginesmêmepaslanuitque

j’aipassée.Il…C’estàcemoment-làquejechoisisdeneplusl’écouterafindemeprotégerdeséventuellesimagesqui

pourraients’immiscerdansmatête:Bencomplètementnuluifaisantl’amour,ensueuret…Stop!!!Jelaregardecommesijem’intéressaisethochelatêtedetempsàautremaisjen’entendsquedesblablabladiscontinus.Ilfautdirequejesaisplusoumoinscequ’ils’estpassédanslachambrevoisine.Si,pourunefois,Benestrestésilencieux,onnepeutpasendireautantdesapartenaire.Elledevaitêtrebranchéesuraudiodescription:«tesfessesmedonnentenviedecroquerdedans»ouencore«jepeuxléchertesabdos?»mereviennentenmémoire.Sansrire,cettefilleexpliquaittoutcequ’ellevoulaisluifaire.Elleestdrôle,maissurtoutflippante!JecomprendspourquoiBenm’enveut,pourtantjen’arrivepasàavoirpitiédelui.Quandilrevientfraîchementdouché,sestraitssontdécrispésetmêmes’ilfuittoujoursmonregard,il

sembledemeilleurehumeur.Sansprendrele tempsd’avalersonpetitdéj, ilenfilesavestedonnant lesignaldudépartàShirleyquinesefaitpasprierpourlesuivre.—J’aibesoind’êtreautafdebonneheure.Jetedéposecheztoipourquetupuissestepréparerau

passage.—D’accord,commetuveux.Àbientôt,Zoé!Jeluifaisunbrefsignedelamain,sachantd’avancequejenelareverraipasdesitôt.Benouvrela

porteetsedécalepourlalaisserpasseravantdes’engouffreràsontourdanslecouloir,etcelatoujoursenm’ignorantroyalement.Jepeuxdirecequejeveuxdelui,maisc’estquelqu’undebien.CetteShirleyluisortparlestrousdenezetpourtantilresteaimableetgentlemanavecelle.J’enconnaisplusd’unquiauraitjouéauconnard,maisluinon…Merde,voilàquej’auraispresquedelasympathiepourcecrétinmaintenant.Attention,j’aibienditpresque!

*

Quandj’arriveaubureau,jesuissurprisedetrouversaportefermée.Commehieraprès-midi…Ilfautcroirequ’ilafinidemesurveiller.Jem’installeetj’aiàpeineletempsd’ouvrirmesapplicationsqueletéléphonesonnedéjà.Présaged’unelonguejournée!Quandjerelèvelatêtepourlapremièrefois,lamatinéeestdéjàpasséeetl’heuredurepasestmême

plutôtbienentamée.Benn’estpassortiuneseulefoisdesonbureau,àsedemanders’ilestvraimentlà.Je récupèremon sac et, avant d’aller rejoindre Erik comme prévu, je vais toquer à la porte demonpatron. N’ayant pas de réponse, j’ouvre la porte et le trouve derrière son grand bureau. Comme s’ilsentaitquec’étaitmoi,Bennedaignemêmepasleverlatête.Ilcontinueàlirejenesaisqueldocument.—Tunevaspasmanger?—Non.C’estlapremièrefoisdepuisplusieursjoursqu’ilsembleaussiremontécontremoietsij’enéprouve

delasatisfactiond’habitude,jedoisavouerqu’aujourd’huijemesensblessée.Jemerendsàl’évidence,

j’aipeut-êtreétéunpeu tropdureavec lui.Après tout, ilestpossiblequeLolagèrehabituellementcegenrederendez-vous.Iln’yvoyaitaucunmalenmedemandantdelefaireetmoi,commetoujours,jemesuisemportée.—J’yvais,tu…tuveuxquejeterapportequelquechose?Ilplongeenfinsonregarddanslemien;l’azurdesesirisaviréaugris.—Jen’aibesoinderien,surtoutvenantdetoi,Zoé.VamangeravecEriketnemefaispaschier.—Commetuvoudras.Jerefermesaporteetresteunmomentinterdite.Jemesuisfaitenvoyerboulerenbeautéetjen’airien

répliqué.Lesmotssontrestésbloquésdansmagorge,surpriseparsonagressivité.Toutcequejevois,c’estquejel’airéellementvexé.Jefinisparm’éloigneretjerejoinsErikquim’attenddéjàdanslehalldel’immeuble.—Bonjour,belleZoé!Prêteàallermanger?—Jemeursdefaim!Jeluiadresseunsourireenréponseausienetlesuisdanslarue,nesachantpasoùilm’emmène.On

flâneainsidansunsilencesereinjusqu’àunpetitrestaurantàl’angledelarue.C’estassezcosyetsurtouttrèsintimiste,cequimemetaussitôtmalàl’aise.Laserveusenousinstalleaufonddelapièce,unpeuàl’écartdesautres,etsubitement l’atmosphèrechange.J’ai l’impressiond’assisteràunpremierrencardsanssavoirréellementàquelmomentj’auraisdûcomprendrequec’enétaitun.Erikparledetoutetderiensansjamaisêtreentreprenant,maisleregardqu’ilposesurmoiveuttoutdire.J’essaiedenepasluientenirrigueuretfinalementjepasseunagréablemoment.—Mercibeaucouppourcemidi,jenepensaispasautantm’amuser!—Quoi,tuavaispeurdet’emmerder?Sympa!—J’aipasditça!Maist’essurprenant.C’estvrai,tufaispassemblantdet’intéresseràcequejedis.

T’escurieux…Tumeposesdesquestions…Unvraidialogue,quoi!—C’estsisurprenantqueçaqu’unmecaitdelaconversation?Je hausse les épaules, ne sachant trop quoi répondre. Ça me change surtout des semblants de

discussionsquejepeuxavoiravecsongrandcopain.D’ailleursilparledetoutlemondesaufdelui,etjenevaispasmettrelesujetsurletapis!Tandisqu’ilmeracontesarencontreavecLola,histoirequejeconnaisdéjàparmameilleureamie,je

ledétailleunpeuplus.Seslongscheveuxblondsattachésenqueue-de-chevaletsonteinthâléluidonnentunairdesurfeur.Ildoitassurémentplaireauxfillesavecsesépaulescarréesetsesgrandsyeuxnoisette.Pourtantjen’arrivepasàletrouverbeau,mignontoutauplus…Jemerendscomptequ’ilalescanineslégèrementenavantetquesesyeuxsonttropécartés.Quelquescentimètresenplusetjesuissûrequ’ilpourraitvoirsurlescôtéscommelespoissons.Tropfréquenterlamer,çadoittransformer!Jemepinceles lèvres pour m’empêcher de rire de mes conneries. Allez, Zoé, ressaisis-toi ! Bordel, voilà quemaintenantdes imagesmeviennent!J’essaiedemeconcentrersurcequ’ilmeracontemaisc’estplusfortquemoi,quandjedécèledesdéfautschezunepersonne,jenevoisplusqueçaensuite.Sérieux,c’esttoutmoi:jesuisenfaced’unmecloind’êtredégueuetpourtantjefaisunefixettesurderidiculespetitsdéfauts.Jelesaccentue,lesdéformeet,aufinal,jenevoisplusqueça.Forcémentcomparéàlui,Benestundieugrecavecsesyeuxturquoisebordésdegrandscilsnoirsquirendentsonregardhypnotisant.Etjeneparlepasdesabouchepulpeusenidesesdentsblanchesalignéesàlaperfection.C’estvrai,riendetraversoudemochechezlui.Absolumentrienàjeterchezcemec,sicen’esttoutl’intérieur.L’hommeparfaitdoitavoirlapersonnalitéd’ErikmaisdanslecorpsdeBen!Bordel,unefoisdeplusmespensées

dévientsurlui,alorsqu’ilexistemillefoismieux…Enfinjecrois.Tandisquejem’amuseàdresserlalistedetouslesbeauxmecscommeRyanGoslingouChanningTatum,unemains’agitantdevantmesyeuxvientmesortirdemespensées.—C’estunequestionquidemandetantderéflexion?Hein?Quoi?Merdeilm’ademandéquelquechose…Jeseraisbiententéededonneruneréponseau

pifcomme«oui»,«demain»ouencore«c’étaitdélicieux»,maisjemesuisdéjàtapélahonteavecmesréponsesauhasard.Onvaéviter.—Excuse-moi,j’étaisdansmespensées.EnparlantdeLola,jemedisaisjustementquejenel’avais

paseueautéléphonehier.Mensongesansenêtreunpuisquemacopinem’aeneffetzappéalorsqu’ellem’avaitpromisdeme

donnerdesnouvellestouslesjours.Encoreunefois,Jaydendoittropl’accaparer.—Jetedemandaissituaccepteraisdedîneravecmoiundecessoirs.Etmerde, nous y voilà. Ses joues légèrement rougies et son attitude qui se veut confiantemais qui

laissetransparaîtreunstresstotalmedonnentenviedeluidireoui.C’estunmecbien,tropbienpourmoietmesproblèmes.Etpuis,avecsescaninesenavant,jemedemandes’ilnefaitpaspartieduclanCullen.Peut-êtrequ’ilajusteenviedemesucerlesang!Pfff,n’importequoi!Réagis,Zoé,ilattendtaréponse!—Écoute,Erik,jet’appréciedeplusenplusetjesuissûrequel’onpourraitdevenirdebonsamis…

Maisjen’aiqueçaàteproposer,jesuisdésolée.Ils’affalesurledossierdesachaiseetbalaiemesproposd’unemain.Ilgardelesouriremaisjevois

bienquejeluiaifaitdelapeine.—T’enfaispas,Zoé,jedevaistentermachancemaisjesavaisquec’étaitperdud’avancepourmoi.

Dommage,tunesaispascequetuloupes!—Ettoi,tunesaispasàquoituéchappes!Nous rionsdeboncœur tous lesdeuxet,mêmes’ilnesedépartitpasdesabonnehumeuretdesa

gentillesse,jevoisqu’ilestdéçu.Lafindurepasetleretouraubureausedéroulentdanslajoie.Maislesriressestoppentrapidementquandjevoisquelaportedemonbossesttoujoursclose.Retouràlaréalité: j’ai faitunegrosseboulette.Jesavaisqueçaallait l’emmerderet lefairecriser,mais jen’avaispasprévuqueçametoucheraitautant.

*

17heures:Misàpartmebombarderdemailspourmebalancersesdirectives,Benn’apasbougédesonbureau.Apparemmentsonnouveaucredoestdem’ignorerlepluspossible.Jefinisparplierbagageetrentredirectementàl’appart.Ilestenvisioconférenceàcetteheure-ci,j’aidutempspourmoiavantqu’ilrevienneavecsatroncheàl’envers.J’ysuispeut-êtrealléeunpeufortcettefois…18heures:Maculpabilitétourneenronddansmatête,maisjel’évacueenfaisantmonjogging.Mes

écouteursvisséssurlesoreilles,lederniermorceaudeNekfeuétouffantcebrusquesursautdeconsciencequimepolluel’esprit.C’estvraimentdugrandn’importequoi!Pourquoijemeprendslatête?18h16:Missilesexyenapproche.Monbeaujoggeurcroisemonchemin,enm’adressantunsourire

renversant.Minceuneracine!Gardelesbillesenfacedestrousmagrande,cen’estpaslemomentdes’enracinerlepifdansunemottedeterre!Uncoupd’œilversmonathlète,ilrigolepuism’adresseunsignedelamain.Unpetitsalutmilitaireavantd’accéléreretdemelaisserdanssonsillage.Jemattesonculunedernièrefoisavantdefairedemi-touretderentrerdoucementchezmoi,enfinchezlui…Ouplutôtcheznous.

19h18:Fraîchementdouchée,jerejoinslacuisineoùtrônemonportable.Rien,pasunenouvelle,etBen n’est toujours pas là… Je suis vraiment stupide : comme s’il devaitme rendre des comptes ! Saréuniondoitdurerpluslongtempsqueprévu.Pointbarre!20heures : Jecommenceàmeposerdesquestions.Maisqu’est-cequ’il fout?Fautque j’arrêtede

regardermontéléphonesanscesse!Commeunedébile,jeculpabilisealorsqu’ildoitsûrementsoulagersafrustrationentrelescuissesd’unenana!20h27:Çayest,jesuisinquiète:ildevraitêtrelàdepuisunbonmomentmaintenant.S’ilavaiteuun

souci,ilm’auraitquandmêmeenvoyéunmessage,non?20h52:Jedevraispeut-êtreappelerLola?Non,çanesertàriendel’inquiéter!Quandilaurafinidebouderdanssoncoinilreviendra!Entoutcas,mesexcusessontprêtes,ellescuisentdanslefour.Qu’iln’attendepasplusdemoi,c’estdéjàunsacréeffortdemapart!21heures:Laported’entréeclaque.Merde,merde,merde,c’estlui!Bouge-toi,restepasplantéelà

commeuneconne!Jefaissemblantdem’intéresseràquelquechosesurmonportable.Ouais,surlecoup,j’aipastrouvémieux…Ducoindel’œil, je levoisétudierlatabledresséeetunpetitsourireencoinapparaîtsursonvisage. Ilnedit rien,nem’accordeaucuneattentionet filedanssachambre.J’attendsqu’ilaitrefermélaportepourreprendrel’assietteetlaremettrequelquesminutesaumicro-ondes.J’aiàpeineletempsdelareposeràsaplaceinitialequ’ilrevientenmodedécontracté:joggingencotongrisluitombantdélicieusementsurleshancheset…c’esttout!Autantilpeutêtresexydanssescostumessurmesure,autantlevoiràmoitiénualedondemefaireunje-ne-sais-quoiàchaquefois.—Cequetuvoisteplaît?Bordel,j’aidûresterunpeutroplongtempsàledétaillervul’airsatisfaitqu’ilaffiche.Pourtantj’ai

cruavoirdétournélesyeuxaussitôt.Unedemi-secondedetropfautcroire…— Jeme dis surtout que tu aimes vivre dangereusementmais apparemment tu n’as pas peur d’une

brûlureautroisièmedegré.Pfff,quellegourdequandjem’ymets!Ouic’estvrai,leslasagnespourraientsauterdel’assiette,venir

l’attaqueretlebrûlerautroisièmedegré…Jen’osemêmepasreleverlatêteversluiaprèsmaconnerie!—UnHarperneressentpasladouleur.Aumomentoùcesmotsfranchissentseslèvres,samâchoireseresserreimperceptiblementetsestraits

se crispent. Je devine que cette expression sortie toute seule lui laisse un goût amer en bouche. Il sereprendpourtantrapidement,s’assoitenfacedeseslasagnesetsansplusdecérémonies’emparedesescouverts.Jem’installe faceà lui,maiscommej’aidéjàmangé, jemecontented’uncafépour lui tenircompagnie.—Première clause de notre contrat de colocation :mes succulentes lasagnes ! Profite, très peu de

personnesyonteudroit.— Et elles sont encore là pour en parler ou t’utilises un ingrédient spécial genre…mort-aux-rats,

arsenic,cyanure?—Auxinfosj’aientendudirequedesgrainesdericinavaientétévoléesdansleslaboratoiresdela

CIA.Trèspeu,maisassezpourdécimerlamoitiédeL.A.,figure-toi!Uneenquêteestencoursmaisilsnepourrontjamaisrelierl’affaireàmoi!—Jecroisquetudevraisarrêterlatélé,LesExpertstemontentàlatête!Sabonnehumeurarrivecrescendoetjemesurprendsàluisourire.Pasd’excuse,pasdediscussionsur

cettejournée:onparle…sanssechamailler!—Jevaisboireuncoupaubard’enbastoutàl’heure…

Illaissesaphraseensuspensetmeregardebizarrement,commes’ils’interrogeaitintérieurementpoursavoir s’il m’en dit plus ou pas. Il mastique encore un petit moment l’énorme morceau qu’il vientd’enfourneralorsjemedisqu’ilcomptepeut-êtrem’inviteràmejoindreàlui.Jesuisdéjàentrainderéfléchir à cette supposition. C’est assez risqué, surtout quand on sait qu’on n’a jamais parlé aussilongtempsquecesoirsanss’étriper,maisj’aibienenviedetenterl’expérience.Benetmoicommedeuxamis…Curieusedesavoirsic’estenvisageable.Maisilneposepassaputaindequestionetjeluifaissignedepoursuivred’ungestedelamain.—Sijeramèneunemeuf,tusuivraslesrèglescettefois?Sanscommentaire.Etmoiquicommençaisàcroirequ’uneamitiéentreluietmoiétaitenvisageable…

Connerie ! Comment me remettre à ma place et me faire sentir encore plus idiote ? Je sais pas…DemandezàBend’ouvrirlabouche!Quandjepensequej’aipasséplusd’uneheureàluipréparersesputains de lasagnes pourmettre un terme à cette stupide querelle !Et lui, en grand égoïste et en grosconnard, profite de ce début de bonne entente pour remettre cette clause sur le tapis.Ce n’est pas uncontratnonplus!Jenemerappellepasavoirsignéquoiquecesoit.Pourtantj’opinedelatête,voyantqu’ilattenduneréponse.Jesuisvexéedem’êtrefaitdefaussesidées,c’estsurtoutpourçaquejesuismauvaise.Aprèstout,ilgèresaviecommeill’entend.Ilselèveetdéposesonassietteetsescouvertsdansl’évieravantd’allerdanslasalledebains.Bah

voyons,c’estconnu,çavasautertoutseuldanslelave-vaisselle!Etvoilà,ilm’aénervée,etlamoindreparoledéplacéedesapartvam’agacerdavantage.Lesimplefaitdel’entendresifflotertandisqu’ilsepréparemegonfle.Mestechniquesdeyoganemesontpasd’unegrandeutilité,carjepeineàretrouvermoncalme.Ilrevientetenfilesaveste,prêtàsortir.Jeleregardefaire,finalementpresséequ’ilsetire.Justeavantdefermerlaported’entrée,savoixparvientjusqu’àmoi.—Jepeuxvraimentcomptersurtoi,hein?—Jeserailàpourlavirer,rassure-toi!—Etcequis’estpasséhiernesereproduiraplus?Ilmecherchelà,non?—Non!Inspire,expire…Troptard.—Sit’envoulaispasdanstonlit,fallaitpaslabaiser!!!Je crie aumoment où la porte se referme. Je ne sais pas s’il a entendumais ça fait unbien foude

hurler.Uncrilibérateurquimevidedemesdernièrestensions.Ilnevautpaslapeinequejebousillemasoiréepourlui,àruminer,d’autantquej’aibienmieuxàfaire.Jeprendsmonordisouslebrasetparsm’installersurmonlit.Jesuisexcitéecommeunegamineeten

mêmetempsstresséeàmort.Etsipersonnen’avaitconsultémapage?Ilfautquejerelativise,jesaisqueçafaitàpeineunejournéequeleblogestenlignemaisj’attendstellementdecenouveautravail…C’esttoutcequej’aime:pasdepatron,lecontactaveclesgens,l’indépendanceetsurtoutuneopportunitédemefairedel’argentrapidementetd’avoirmonproprechezmoi.Lapaged’accueilsechargeenfinetjene vois rien…Absolument aucune visite ! J’essayais de ne pas trop y croire mais je suis de natureoptimistedoncjesuisforcémentunpeudéçue.Jenemelaissepasabattrepourautant, j’ai toujoursdûcompterquesurmoi-mêmealors j’aiapprisàmedébrouiller touteseule.Jepassedoncmasoiréesurdiversforumsenlienavecmonactivitépourfaireparlerunmaximumdemoi.Jesursautequandlaported’entréeclaqueetmerendscomptequej’aidûm’assoupir.J’essuielefilet

debave séchée au coindemabouche (ouais, je sais, c’est pas classe),me lève sansbruit et referme

discrètementmaportelaisséegrandeouverte.Àtêtereposée,j’aieuletempsderepenseràmonrôleetjecomptejouerlafanhystériquedevantl’undesmeilleurspartisdeLosAngeles.Iln’estpasdansletop100 et se trouve loin derrière Jayden,mais apparemment il serait sur la liste que toutes ces femmesvénales qui travaillent dans sa boîte semblent connaître sur le bout de leurs griffes manucurées. Jem’apprêteàmettremesécouteurspournepaslesentendre,surtoutquedesbruitsdebouchess’immiscentdéjàjusquedansmachambre,quanduneplaintedeBenvientfoutreenl’airtoutesmesbonnesrésolutionsleconcernant.—Jesuispastropenforme,àtouslescoupsc’estdûàlabouffeinfectedecesoir.Leconnard!J’hallucinetotalement.D’une,meslasagnesétaientdélicieuses,etdedeux,jevaispéter

lesdentsdececrétinafinde lui rappeler le tempsque j’aipasséencuisinepour lui faireplaisir.Cesparolesnem’étaientpasdestinéessinonillesauraitditesenpassantdevantmaporte.—Çavaalleroufautquejemetransformeeninfirmière?Bahvoyons,envoilàunequiperdpaslenord!—T’inquiète,mabelle,j’auraitoujoursassezdeforcepourm’occuperdetoi.Lesbruitsdesuccionreprennentdeplusbelle,melaissantungoûtamerdanslabouche.Jemetsdonc

mesécouteursetlancedelamusiquedoucepourmecalmermaisaufinalçaproduitl’effetinversesurmoncorps. Je tourneen ronddansmachambre,me rongeantnerveusement l’ongledupouce, attendantpatiemmentl’heuredevirersonbouletquanduneidéegermedoucementdansmatête.Aprèstout,cettefoisc’estmérité!Jedécideplutôtdesauvercettepauvrevictimedesmainsdesonbourreau.J’attendsencorequelquesminutesavecunsourirecarnassiersurlevisage,fièredemaprochainevacherie.Quandjejugeletempsnécessaireécoulé,j’ôteunécouteuretlessonsquej’entendsmefontpenserquec’estlemomentidéal.Prépare-toi,Ben,parcequejenecomptepast’épargner!Jepassedanslasalledebainspourme rafraîchir un peu et fouille dans ses placards à la recherche de quelque chose en particulier.Jackpot!Prêteàalleraffronterceprétentieux.Devant sa porte, je souffle un bon coup et entre en trombe, déjà dans le personnage que j’ai

confectionnésurmesurepourlasituation.Lebruitdelaportelesfaitréagir.Jesuisaussichoquéequ’eux.Jesavaiscequi sepassaitdanscettechambre,mais jenem’attendaispasà retrouver lademoiselleàquatrepatteslesfessesenl’airentraindesefaireculbuter(oui,iln’yapasd’autresmots)parunBenplutôt en forme ! Jeme reprends rapidement etm’agite dans tous les sens tandis quemon colocataires’affalesurlelitpourcachersonsexeérigé,m’offrantunevuepanoramiquesursesfesses…croquantes.Lapetitebruneestdéjàdescenduedulit,agenouilléederrièrecelui-cipourcachersanudité.—Putain,maisqu’est-cequec’estquecebordel?—Zoé,tune…Jelepointedudoigtetmacolèreenversluin’estpasfeinte, jebouslittéralementderageenversce

mecquis’amuseàbattrelechaudetlefroidavecmoidepuisunmoment.—Tagueule,toi!Tumefaistraverserlamoitiédelavilleàlarecherched’unepharmacieouverteà

uneheurepareille,justepourt’envoyerenl’air?Ettoutçaàunesemainedumariage?Tuesunmonstre!—Mariage?Lajeunefemmemeregarde,lesyeuxécarquillés,prêteàverserdeslarmesdehonte.Ehoui,tuesune

briseusedecouple…Enfin,enthéorie.JelatoiseavantdemetournerversBenquimeregarde,blasé,attendantsimplementquejefinissema

tirade.—JesupposequelaMSTquetum’asrefiléevientd’elleaussi?

—MST?Leperroquetsembleenétatdechocetserelèveàlavitessedel’éclair,sesvêtementssouslebras.

Ellesortencourantdelachambre.Etvoilà,leverderideau!JemetourneversBenetleregardeavecunsouriretriomphantpuismebaisseavecunelenteurexagéréepoursaluermonpublic.—Jevaistetuer!Jedétourneleregardquandilselèveprécipitamment,exposantsoncorpsentièrementnupourenfiler

sonboxer.—Cettefois,tul’ascherché,connard!Aufait…Tiens,pourtesaigreursd’estomac!Jelui jetteenpleinetêteletubequejetenaisfermemententremesdoigts,cequimevautunevague

d’insultes.Voyantqu’ilvireaurouge,jemeruehorsdesachambre,meprécipitejusqu’àlamienneetclaquema

portedansunbruitsourd.Jechercheàfermeràclémaismamaintouchelevide.Merdemaisoùestcetteclé?Beaucouptropvite,ilestdéjàlàettentedel’ouvrir.Jenesuispasenmesurederivalisercontreluimais l’adrénalinepulsedansmesveineset jemedéfendsplutôtbien.Resteà savoirpourcombiendetemps.—Putain,maist’espirequ’unegamine,sérieux!Meniquermoncoupjustepourunplat?Jeneprendspaslapeinedeluirépondre,tropconcentréeàpoussercontrelaportedetoutmonpoids.

Unelutteacharnées’estengagéemaisjesensqu’ilnepoussepasàfond.Mêmemauvaiscommeill’estactuellement, il a peur deme fairemal en ymettant toutes ses forces. Il comptem’avoir à l’usure etmalheureusementilvayparvenir.—T’esblondealorsjevaislerépéterunedernièrefois:tuviensuniquementquandj’aifini!Jevais

fairequoimaintenantavecunegaulepareille,hein?—T’asqu’àutilisertamain!Aumoinselle…Àparler j’enoubliedepousseret laportes’ouvreengrand,projetant lecorpsdemonadversaireà

moitiésurmoi.—…ellenes’enirapasencourant!C’estplusfortquemoi,ilfautquej’aielederniermot.Jenefaispaslamalignepourautant.Ilestprès,

tropprès.Tellement,quesonnezfrôlelemienetquejepeuxvoirsesyeuxchangerlégèrementdeteinte.—J’aitoutetonattentionlà?Alorsécoute-moibien:laprochainefoisquetumefaisuncoupcomme

ça,c’esttoiquejebaise.

Chapitre9

Ben

Mon regard planté dans le sien, je prends plaisir à voir son visage se décomposer. La boucheentrouverte,lesoufflecourtetlesyeuxronds,elleestenétatdechoc.Esquissedesourire.Parfait,elleacompris lemessage.Fini les conneries !Mepousser dansmes retranchements comme la dernière desgamines l’amuse?Moi,c’estde la fixercomme toutescesproiesqui finissentdansmon lit.Unevoiesansissue,lapropulsantdirectementdanslabrumedemesfantasmes.Unjusteéchangedefluidesetdeplaisirs,sansquecelanem’affecte.Jevoisdanssesyeuxqu’ellechercheàreprendreledessusmaiselleadumal.Elleapeur,etellearaison.D’unemainfébrilemaisferme,ellemerepousse.—Commesimettredeladistanceallaitsauvertoncul!T’asperduZoé.Tunelesaispasencoremais

lapartieestbientôtfinie.—Lâche-moi,Ben.Jen’aifaitqueterendrelamonnaiedetapièce.—Jeteparlepasdeça.Sij’aiétépatientjusque-là,c’estparcequetueslacopinedeLola.Maisça

netesauveraplus.Maintenantdis-toiquetuesseule,àmamerci,etjenevaisplustelâcher.—Jenetelaisseraipasfaire.Tunem’auraspas!—Sij’étaistoi,jen’enmettraispasmamainàcouper.Tulesaisaussibienquemoi.Sontempéramentdefeuetsahaineenversmoinemefaciliterontpaslatâche.Jevaisenchierpour

l’avoirmais,putain,jemettraiunpointd’honneuràlafairetomber,etdepréférencedansmonpieu.Pluselleluttecontremoi,contresondésir,etplusmavictoireserabandante.Elleneserendpascomptedel’effetqu’ellemefait.J’aiune triquedudiableà lasimple idéedeceque jecomptefaired’elle.ZoéreprésentelesaintGraal,letrophéeultime.Cejeuaprisdesproportionsquimedépassent:jelaveux,c’est tout.C’estunemission impossibleversionBen.Ma revancheabsolue, et j’aihâted’êtredéclarégrandvainqueur.

Zoé

Bordel,maisqu’ilarrêtedemeregarderdecettefaçon.Ilparaîttellementsûrdeluiquejecommenceàdouterdemoi,demesconvictions.Ils’avancenonchalamment,réduisantladistancequej’avaisréussiàmettreentrenous.Àchacundesespasenavant, jereculed’autant.Moncœurmanquedesefaire lamallequand jebute contre lemur. Je suis incapabled’esquisser lemoindremouvement alorsqu’il sepenchesurmoi,posantsesmainsdepartetd’autredemonvisage.—Àpartirdemaintenant,lejeucommenceréellement.Jeserailàoùtut’yattendraslemoins.Jevais

te travailleraucorps, imprégner tespensées, immiscer ledésirdans teschairs,devenir tonobsession.

Soissûred’unechose:jenetelaisseraiaucunrépit,Zoé.Jusqu’àcequelesmotssortentd’eux-mêmesdetabouche:J’aienviedetoi.Et,crois-moi,tumelesoffriras,tumesupplierasd’enfinir.Mesyeuxnedécrochentpasdeseslèvresquiannoncentmasentence,cettedoucetorturequ’ilcompte

m’infliger.Jen’arriveplusàréfléchiretencoremoinsàluirépondre.Soncorpssepressecontrelemien,sonérectionvenantconfirmersesdires.Bordel,j’aichaud,jemanqued’airetlapressiondesonsexemebrûlelapeau.Merde,reprends-toi,Zoé,tun’espasfaible!—Jeteprendraicontreunmur,parterre,dansmonlit,oupeut-êtremêmedansletien…Satêtedéviesurlecôtéetjesuissonregardversmonlit.J’imagineparfaitementcequel’onpourraity

faire ! J’avaledifficilementma salive.Son regardbrûlant seposedenouveau surmoi et il sepenchelentement. Je panique quand je vois ses lèvres tentantes se rapprocher des miennes. Bordel, il vam’embrasser!Qu’est-cequejefais?Jelelaissefaireoujelerepousse?Mondieu,ilm’acomplètementretournélecerveau!Jelefixe,incapablederéagir.Maraisonetmoncorps,mahaineetmondésirselivrentunelutteacharnée.Quandseslèvresfrôlentlesmiennes,jesensdéjàmaperte.—Tun’imaginespascombienj’aihâted’yêtre,desentirtapeaunuecontrelamienne,lachaleurde

tonsexe…Et jevois trèsbienque tusaisdequoi jeparle : tuencrèvesd’envie,Zoé,mêmesi tu t’yrefuses.Maisvas-y,rebelle-toi,repousse-moitantquetulepeux.Jevaisvousdompter,toiettafierté.Etbientôtc’estbrûlantededésirqueturamperasjusqu’àmoipourquejesoulagetafrustration.Cequejeferaiavecplaisir…maispascesoir.Un sourire se dessine sur son visage et il me libère de son emprise en se détachant demoi.Mes

poumons me brûlent, j’en ai oublié de respirer. Je l’entends rire alors qu’il sort de ma chambre enrefermant la porte derrière lui,me laissant seule, fébrile et complètement perdue. Jeme laisseglissercontre lemur, essayant de comprendre à quel moment ça a dérapé. Lamain sur le cœur, je tente dereprendreunsoufflerégulier.Maisqu’est-cequ’ilvientdesepasser?Ilneluiapasfalluplusdecinqminutespour inverser la tendanceet reprendre la situationenmain, etmoi, commeuneconne, j’ai ététotalement incapablede réagir. Jeneme feraiplusavoir, laprochaine fois je seraiprêteà l’affronter.Après la peur, le désir et l’envie, c’est la colère qui s’infiltre dans la moindre demes terminaisonsnerveuses.Jedétestecequ’ilfaitdemoi!

Chapitre10

Zoé

Unesemaine:lejeudidel’angoisse

Cettenuit,j’aicrudéfaillirsuiteàunevisitesurprisetandisquejedormais.Jenemerappellepasducommentnidupourquoimaisseul lerésultatest important :Bennudansmonlit,sonpoidspesantsurmoncorps,sonsexetenduàl’extrêmefrottantcontremonintimité.J’aiencorel’odeurdesonparfumetladouceurdesapeauenmémoire.Àaucunmoment,jen’aicherchéàlutter,àlerepousserouàluipéterlesdoigtspouravoiroséseglisserentremesdraps.Non,jel’ailaissémecaresser,memarquer,mepénétrer.Bordel, j’en suis encore toute retournée. Avec l’enfer queme fait vivre cemec…Nonmais sérieux,commentj’aifaitpourrêverdelui???Alorslesrêvesérotiquesjeconnais,maisautantdirequel’étatdans lequel jeme suis réveillée était unegrandepremière. J’aurais euunepousséede fièvrequemesdrapsn’auraientpasétéplustrempés.J’aieumonpremierorgasme…irréelpeut-être,maisjesuissûreque dans la réalité ça doit drôlement y ressembler. C’est dingue, même dans ma tête il arrive à sedémarquer, à s’immiscer là où on ne l’attend pas. Ben s’invite dans mes nuits et il ne s’agissaitabsolumentpasd’uncauchemar…Aprèslecoupqu’ilm’afaithiersoir,jesupposequedelointains(trèslointains)désirsrefoulésontréussiàfairesurface.Croisersonregardalorsquej’aiencoredumalàsortirdemonrêveseraitdangereux,surtoutquandon

saitqu’ilcomptejouerréellementàpartirdemaintenant.Parmesuredesécurité,jepréfèreattendrequ’ilparteaubureauavantdesortirdemachambre.Quandlaported’entréeclaque,jerespireungrandcoupetmedépêchepournepasarriverenretardautaf.Allez,quelajournéecommence!

9h30:Arrivéeenretard(fallaits’endouter).À peine devantmon poste, je suis dérangée par le téléphone.Un rapide coup d’œil à l’écran et je

soupiredéjà.Jelaissesonnerdelonguessecondesletempsd’ôtermaveste,d’allumermonordinateuretdeprendreletempsdem’asseoir.Jedécrochesansformulerlemessagehabituel,sansmêmeparleràvraidire.—T’asuneheurederetard,Zoé.Aucunpasse-droitetencoremoinspourtoi.Laponctualitéestune

règleimportanteici.—Danscecas,vire-moi!—Çateferaittropplaisir!Jepeuxsentirunsouriredanssavoix.Ilaraison,fautcroirequ’ilcommenceàmeconnaître.Mefaire

vireréviteraitd’êtredanssalignedemireàlongueurdejournéemaisrisqueraitfortdedéplaireàJay.—Tuferasuneheuredepluscesoiretçaferal’affaire.Silenceprolongé,jesuissurlepointderaccrocherquandilm’interpelledenouveau.—Quoiencore?—Depuisquandtun’osesplusmeregarder?Jet’aifaitsipeurqueça,hiersoir?Moi,peurdelui?Etpuisquoiencore!Bon…ouic’estpossible,peut-êtreunpeu…maisjepréfère

encorelécherlacuvettedeschiottesd’unbarcrasseuxplutôtquedeleluiavouer!Jetournelatêteetlefusilleduregard.Sonsourireencoinmeprouvequ’ilestsatisfaitquejel’affronte.Desimagesdemonrêve,desatêteentremesjambes,refontsurfaceetjedétournelesyeuxaussisec.Merde,Zoé,ressaisis-toi,c’estjusteunputainderêve!—Jevoulaissurtoutéviterdevoirtasale…

—Doucement,Zoé.Icijesuistonsupérieur,nel’oubliepas.Toujourscemêmesouriredanssavoix,jebousderage.L’attaqueestlameilleuredesdéfenses,c’est

commeçaqueçamarcheentreluietmoi.Maispasici.Leboulotc’estleboulot,ilaraison.Jememordsl’intérieurdesjouespournepasrépliquer.—C’estbon,monsieurHarper?Jepeuxtravaillermaintenant?—Tun’aspasidéedecequelemot«monsieur»danstaboucheprovoquedansmonfute.Situveux

êtreunebonneassistantedévouée,tupourrais…Je raccroche avant d’entendre ses paroles de dominant qui ne lui vont pas du tout. Je ne sais pas

commentilestaulit,maiscettenuit,entoutcas,iln’étaitpascommeça!Ilétaitmaîtredelasituationmais tantôtdouxet tantôtagressif…Bordel, je recommence!Unautreappelme tiredemarêverieouplutôtm’ensauve.Allez,c’estparti!

10h45:Vousavezreçuunmessage(enfin,unmail).

Arrêtedemordretalèvrequandtuteconcentressurunmail.Arrêtedemeprovoquerenmettanttapoitrineenavantàchaquefoisquetut’étires.

Arrêtedeglissertonstylodanstaboucheenréfléchissant.Arrêtedebougertonculsousmonnezdèsquetuquittestaplace.

Arrêtedemefairefantasmer.Querépondreàça?Jemetourneversluietluiadresseunlégersourire.C’estvrai,trèsjolisonpetit

mail!Avecuneextrêmelangueur,etsansjamaislequitterduregard,jem’avanceverslui.Bens’affaledanslefonddesonfauteuiletmeregardeavecunairamusé.Arrivéeauseuildesaporte,jeledéfieduregardsansmedépartirdemonsourireaguicheur.—Tupensaisvraimenttoutcequetuviensdemedire?Benseredressedenouveauetmegratifiedesonéternelsourireencoin.Lesavant-brasposéssurle

boisdesongrandbureau,ilmedétailleuninstantdelatêteauxpiedsavantdeplantersonregarddanslemien.—Chaquemot,mabelle!—Etmevoirainsitefaitfantasmeraulieudetravailler,c’estbiença?—N’importequelhommeseraitincapabledeseconcentreraveccequej’aisouslenez!J’enlèveraispresquelesyeuxauciel,tantilnecroitpaslui-mêmeàcequ’ilraconte.—Jepensequ’ilseraitplusjudicieuxquej’ymettedumienducoup…Jefaisunpasenavant,pénétrantdanssonantre.Benestsurprisetselèveàsontour,sanspourautant

réduireladistancequinoussépare.Ilcontournesimplementsonbureauetposeunefessesurcelui-ci.Lesbrascroiséssursontorse,l’œilrieur.—Ceseraitpasmaleneffet.—Danscecas,lemieuxàfairec’estdecommencerparfermertaporte!Lamainsurlapoignée,jerefermelaportesurluietsonrire.

11h30:Uncaféetçarepart(oupas).Je n’en peux déjà plus !De là où je suis, j’entends la sonnerie demon téléphonemais je feins le

contraire.Lâchez-moi!!!J’aibesoind’unepause,etmaintenant.J’insèreunepièceetsélectionne«cafécorsé».Legobelettombeetlebruitdelamachineàcafésedéclenchesuiviparlepetitpshhhhdusucre.Première dose de sucre depuis que je suis levée et j’en ai besoin si je ne veux pas faire une crised’hypoglycémie.Jemepenchepourrécupérermondûmais,horreur!latouilletten’estpaslà.Cen’estpaspossible,jesuismauditeaujourd’hui!Jemepencheunpeuplusetregardeparletrouoùelleauraitdûtomberquandjesensuneprésencederrièremoi.Unparfumquejecommenceàbienconnaîtresefaitsentir,etuncorpssepressecontrelemiendemanièreexagérée.—Tevoirpenchéecommeça,leculoffert,medonnetoutuntasd’idéessalaces.Samainfrôlemapeau,remontantdoucementlafentedemarobeauniveaudemacuisse.Jemerelève

précipitammentrenversantlamoitiédemoncafésurmesescarpins.Fuck!J’ignorelescrépitementsquesesdoigtsm’ontprocurésetletoisesévèrement.—Profite,t’aurasdroitqu’àça!—Saufquejeveuxbienplus…—Vousperdezvotretemps,monsieurHarper,jenesuispascommetoutescessecrétairesquidéfilent

dansvotrebureau.Ilesquisseunsourireetsepencheversmoi,sonsoufflevenantchatouillermonoreille.—Çam’exciteencoreplusquandturestesdanslerôledel’assistante.Ilsedétachedoucement,sajouecaressantlamienne.Bordel,maispourquoicesimplecontactmefait

autantd’effet?Ilsembleserendrecomptedemontroublecarjevoisunelueurdevictoirebrillerdansses yeux avant qu’il se détourne.Alors que je pense qu’il a enfin fini sonmanège, ilme fait face denouveau.—Oh…Et ne sois pas jalouse. Tu n’as rien à voir avec les autres femmes d’ici.Avec les autres

femmestoutcourtd’ailleurs.Sansme laisser le temps de riposter, il s’éloigne d’une démarche désinvolte, sûr de lui.Encore un

coup tordupour son stupide jeu. Je commenceàmedirequ’il faudrait peut-êtreque je finissepar luitomberdanslesbraspourquetoutças’arrêterapidement!

13heures:L’ascenseurdesémotions.Partiedans laprécipitationcematin, jen’aipaseu le tempsdepetit-déjeuner.Monventremebrûle

tellementilcriefamine.Pasdenouvellesd’Erik,j’ail’impressionquenotrerepasd’hierluiestrestéentraversdelagorgemalgrécequ’ilm’adit.Çaluipassera!Heureusement,j’airéussiàélargirmoncercledeconnaissancesici.Jenesuispaslabêtenoirepour

tout le monde. D’ailleurs c’est l’heure de manger et mes nouvelles copines m’attendent sûrement àl’accueil. Je laisse tout en plan, y compris le téléphone qui continue de sonner et m’engouffre dansl’ascenseur en saluant les quelques personnes présentes à l’intérieur. Je souffle pour la première foisdepuisquejesuisarrivéecematin.Entrelesappelsincessants,lesdemandesurgentes,etleharcèlementde Ben, je suis déjà sur les rotules. Les portes se ferment doucement lorsqu’une main se glisse inextremis,retardantledépart.Monpatronentreensaluantd’unsignedetêteetvient,évidemment,àcôtédemoi.Quatrièmeétage:ungroupedequatrehommesentrentàleurtour,obligeanttoutlemondeàseserrer.

Jeresteconcentréesurlesportespouréviterderegarderàcôtédemoi.Jepeuxsentirsesyeuxbraquésdansmadirection.Tumegonfles,Ben,oublie-moi!

Troisièmeétage:unhommeavecunénormecartondanslesmainsseprésente.S’ilhésiteuninstantdevant l’ascenseurdéjàbien rempli, il finit quandmêmepary entrer.Tout lemondebouge, fait de laplace.Benglissederrièremoietsecollecontrelaparoivitrée.Jemeraidisetn’oseplusfaireunseulmouvement.Sijebougeunminimum,jeletouche.Deuxièmeétage:deuxfemmesentraindejacasserforcentlepassage.J’aienviedepoussertoutesces

personnesetdesortir.L’hommedevantmoireculeetmanquedememarchersurlepiedmaisdeuxmainsme tirent sèchement en arrière.Mon cœur s’arrête de battre un instant avant de repartir à la vitessesupérieure.Sesdoigtss’enfoncentdanslachairdemeshanchesetlachaleurdesoncorpsm’enveloppe.Lenezenfouidansmescheveux,Benrespirelourdement,dessinantdespetitscercleslelongdemanuqueavecleboutdesonnez.Cesimplecontactsuffitàfaireréagirmoncorps.Traître!—Nevienspasmedirequetun’aimespasça…Sonmurmurecaressemajoue,hérissetousmespoilsd’unemanièreinattendue.Jedevraismedégager

ou luihurlerdessusmais lesgensautourdenousm’enempêchent. Il le sait et en joue, le salaud.Sesmains remontent doucement sur mes flancs, frôlant mes côtes pour s’arrêter juste en dessous de mapoitrine.Sespoucesdessinentlecontourdemonsoutien-gorge,etjepriepourqueladescentesoitplusrapide,oupluslente…jenesaispas,jenesaisplus.Maisqu’est-cequim’arrive,sérieux?Ilestfort,vraimentfort!C’estjusteunjeu,bonsang,jenesaismêmepascequ’ilattendréellementdemoi.Mais…ohbordel

dedieu!Jeregardeautourdenous,maistoutlemondealesyeuxbraquéssurlesportes,etpersonnenevoitcequisepasseaufonddel’ascenseur.Personneneperçoitmontroublequigranditàmesurequejesenssonérectionsedressercontremesfesses.J’aichaud…Jesuisentraindedevenirclaustrophobe!Sesmainsqui frôlent le renflementdemapoitrine, sonsoufflechaud, soncœurquibat frénétiquementcontremondos, labosseproéminentepoussant surmes fesses…Jevaisdéfaillir s’ilneme lâchepasmaintenant!Premierétage:çaremuedanslacabineetlegrouped’hommessort,libérantdelaplace.Jepourrais

m’éloignermaisjesuisincapabledefaireunpasenavant.—Tumecroismaintenantquandjetedisquemaqueuen’attendquetoi?Sesmots fouettentma libidoet jeserre lescuissesdevant ledésirqu’il réveille. Jepeuxsentir son

souriresurlapeaudemanuquequ’ilparsèmededouxbaisers.Ilasentimaréaction.Çaaledondemesortir dema torpeur et avant que le ding final ne retentisse,mon corps est déjà tendu vers la sortie.J’avoue,ilmefaitdel’effet–plusquejenel’auraisimaginé.Maisqu’ilarrêtedefairesonarrogant,jesuisaumaximumniveausensationsfortes.Jen’aijamaisressentiplusdeplaisir,etçaresteraainsi.Lesportess’ouvrentenfin.Jemedétacherapidementdeluietmefaufileentre lesgens.Sauvée!Je

repère mes copines et jette un rapide coup d’œil derrière mon épaule avant de les rejoindre. Ben,toujoursadosséàlacabine,lesmainscramponnéesàlabarre,restebloquésurmoi.Sonregardazurmetransperce,chercheàs’infiltrersousmacarapace.Ilaprisl’ascenseuruniquementpourêtreavecmoi.Sedoutait-ilqueça tourneraitdecette façon?Sonéternel sourireencoin s’étireavantque lesportes serefermentsurlui.D’accord,apparemmenttoutétaitcalculé.Jegrincedesdents.Attention,Zoé,ilestentraindeprendreledessus!

15h30:Réuniondangereuse(pourmapeau).—Tuvasdevoirprendreennotetoutcequ’ilsedirapourmefaireuncompte-rendu.—Merci,jesaisquandmêmecequejedoisfaire!

Ben souffle d’agacement devant mon air revêche. Le temps du repas m’a été bénéfique pour mereprendreenmain.Lesfillesavecquij’aimangém’yontgrandementaidéd’ailleurs.Jecroisquej’étaisavec le clan anti-Ben, les seules perspicaces de cette boîte. Il tire ma chaise et me fait signe dem’installer.Connarddegentleman!—Assieds-toilà,àcôtédemoi.Tunebougespas,tunedisrienettutecontentesd’écrire.J’aiunerépliquecinglanteauborddeslèvresmaisjen’aipasletempsdelaluisortirqueplusieurs

hommesencostardarrivent.Lesfournisseursprennentplaceautourdelagrandetableovaleetlaréunioncommencesanspréambule.C’esttendu,l’enjeuestimportantmaisBengèreetmèneladansed’unemaindemaître.Cemecaledondeforcerlerespectd’hommesayantledoubledesonâge.Ilconnaîtsonmétier,ses

produits,etsaitexactementcequ’ilattenddespersonnesiciprésentes.Sondiscoursestrodéetefficace.Demoncôté,jegriffonnedespagesentières,reportantleplusd’infospossible…Jusqu’àcequ’unemainchaude se pose surma cuisse. Je hoquette de surprise et lève rapidement les yeux vers l’assemblée.Certainsmaintiennent la têtebaissée,d’autres regardentBenquicontinuedeparlernormalement,maisaucunnesemblevoircequ’ilsepassesouslatable.Sesdoigtscourentsurlapeaudénudéedemongenouet remontent lentement jusqu’au tissu de ma jupe. Ils suivent le même parcours pour redescendre etcontinuentencoreetencore.Lesmienssontcramponnésàmonstylo,lapointeplantéedansmafeuille.Jesensmespoilssehérisser–est-cequ’illesentaussi?Pasuneseulefoissavoixousapostureneletrahit.Nivuniconnu!Jemedemandequelletêtejedois

avoir,moi!Samainremontedenouveau.J’attendsqu’elleentamelechemininversemaisellecontinuesaprogression,glissesousmajupe,caressel’intérieurdemacuisse.Quandjesenssesdoigtsfrôlerletissudemaculotte,jenetiensplusetpousseviolemmentmachaise.Legrincementsourdfaitdévierlestêtesversmoi,jemesensridicule,maisaumoinsçaaurapermisdemedétacherdestentaculesdeBen.Les processeurs et autres engins électroniques demandés, auxquels je ne connais absolument rien,

arriverontfinalemententempsetenquantitéprévus.C’esttoutcequej’arriveraiànoteràlasuitedecetépisode.

20heures:Unebonnedoucheetçarepart.Laréunionàpeinefinie, j’airécupérémesaffairesetsuispartiedanslafoulée.Aprèslecoupqu’il

vientdemefaire,sonheurederécup,ilpeutselamettreoùjepense!Pasd’appelnidetexto,jesupposequ’ilnes’estmêmepasaperçudemonabsence.Parcontre,j’aireçuunmailquiaeuledondemefairesourirepourlapremièrefoisdelajournée.Jelerelisencoreunefois,heureusedevoirquemonprojetprendunebonnetournure:

Bonjour,jem’appelleJuliaetj’ailavingtaine.

JesuistombéeunpeuparhasardsurvotrepublicitésurFacebooketjeseraisintéressée.Pourrais-jeavoirdesinformationssupplémentairessurvosprestations?

J’aiperdul’amourdemavie.J’aicrucomprendrequegrâceàvousjepourrais

mereconstruireetreprendreconfianceenmoipourêtreenfinheureuse.

Autantdireque je lui ai réponduavecempressement, luiproposantunpremiercontact téléphoniquequandelleseraitdisponible!Quand j’arriveà l’appart, je tourneen rond. J’ai l’esprit embruméetbizarrement je sensquepartir

courirnemecalmerapas.Grandepremièrepourmoi:jen’aipasenviedefairedesport!J’aienvied’unedouche,voilàcequidevraitmecalmer!Jeprendsdesaffairesetquandj’arrivedanslasalledebains,labaignoiremefaitdel’œil.Ohoui,

relaxationmaximum en vue ! Je tire le verrou et préparema séance de relaxation dans lesmoindresdétails : eaumoussante, leds et bain à remous enclenchés. Jem’y plonge avec plaisir et me détendspresqueinstantanément.Lesenceintesjusteau-dessusdemoirépondentàmademandeetlavoixdeJosefSalvatfinitparmefairepousserunsoupird’aise.Lepiedtotal!Lesyeuxfermés,jemelaissebercerparcesentimentdeplénitude.Lesminutess’égrènent,jesuisàlalimitedem’endormirdanslebain,ouplutôtdans cette minipiscine, quand je sens quelque chose me frôler la jambe. Lorsque j’ouvre un œil, jedécouvreBen,allongétranquillement…dansMONbain!Jesursaute,etuncrim’échappe.Jeglissecontrelesparoisdelabaignoireàvouloirensortirtropvite

etm’extirpetantbienquemalsansm’étalersurlecarrelage.Àl’extérieurdemonbain.Jesuisnueetexposéesoussonregardsatisfait.Àl’extérieurdeMONbain.

Bordel de merde ! Nouveau cri d’horreur. Je me cache autant que je peux avec mes bras, cherchantpartoutautourdemoidequoimecouvrir.LeriredeBenraisonnedanslapièceetilfinitparmetendrel’uniqueservietteprésente. Ilacaché lesautresouquoi?Jenecherchepasàm’enm’envelopper.Lagardant contre moi, je recule jusqu’à me plaquer contre le mur, aussi loin possible de lui. Je tented’ouvrirlaportecommeuneacharnée,envain.—Maist’esmalade,maparole?—J’auraispariéquelapremièrequestionauraitété:commentjesuisentré?Mais rien à foutre de comment il s’y est pris ! Je détourne mon regard de cette fichue porte qui

m’empêchedesortirquandjevoisducoindel’œiluncouteaurondqu’ilagitesousmonnez:saclé.—Lepenchepastropversmoi,MacGyver,oùtuvasyperdreunœil!Ilpartdansunéclatderireetpourlapremièrefoisjevoisunefossettesecreusersursajouedroite.

Soncorpsvibre,créantdepetitesvagues. Il se fout littéralementdemoietaprès l’enferqu’ilm’afaitvivre,jesuisàboutdepatience.—T’esvraimentunconnard!Dégaged’ici!—Avectoutlemalquejemesuisdonnépourentrerdansl’eausansmefairerepérer?—Ben,çanem’amusepas.Tuvas trop loin…ton jeuva trop loin.Tum’avaisprévenueet j’étais

préparée,maislàtudépasseslesbornes.Illèvelesyeuxaucieletsortdubain,semettantnudevantmoisansaucunegêne.J’auraisbienvoulu

détourner le regard mais c’est juste impossible. Ses pectoraux incroyablement dessinés, ses abdoscontractésdansl’effort,cemagnifiqueVquiprendformeaubasdesonventre,sa…Ohbordeldedieu!!!OK,làjedétourneleregard.Troptard,maisjelefaisquandmême.Jerepenseàsonexpression«ogivenucléaire»,etlàçaprendtoutsonsens.Monsieurestbienbâti.Trèsbienbâti.Ils’avanced’unpaslentetmesurépuiss’immobilisefaceàmoi,gardantunedistancedesécurité.Je

mecramponneàmaservietteetmeforceàsoutenirsonregardpouréviterdelebaissersursoncorpsnu.Unsourireencoinsedessinesurseslèvres,jedéglutispéniblement.Jusqu’oùest-ilprêtàaller?—Osemedire,làmaintenant,quetuneressensrien.Quetoutçanetefaitrien!

Je respire un grand coup, rassemblant toutes les ressources dont je peux encore faire preuve à cetinstant.—Absolumentrien.Tu.Ne.Me.Fais.Rien.Jenesaispascequ’illitdansmesyeuxmaissonexpressionchange.Sonsourires’effaceetilrestede

longuessecondesàmesonderduregard.Alorsqu’ilsepencheversmoi,jemeraidisimperceptiblement.Nemetouchepas,Ben,s’ilteplaît…Unefoisdeplusmaréactionnepassepasinaperçue.Samâchoireseresserretandisqu’iltendlebraspourdéverrouillerlaporte.—OK,danscecasjenet’emmerdepaspluslongtemps.Quand la porte claque, je reviens à moi. Ben viendrait-il de déclarer forfait ? Non, impossible.

J’expire péniblement l’air resté bloqué dansmes poumons et regarde les ravages que nous venons defairedanslasalledebains.Del’eaupartout,desflaquesénormesdevantlabaignoireetjusqu’àlaporteparlaquelleBenvientdesortir,lesfessesàl’air,etencoretoutmouillé…Allez,Zoé,netelaissepasdémontermaintenant.Nelelaissepast’avoir.Plusqu’unejournée.Demain,

Lolaseraderetourettoutrentreradansl’ordre.Benn’auraplusautantd’emprisesurtoi.Ouais,àforcedemeledire,jevaispeut-êtrefinirparycroire.Benn’ajamaisstipuléquesonjeudemerdeprendraitfinauretourdenotreamiemaisjeseraidéjàunpeumoinsexposée.Jeseraimoinstentéedecraquer.

Chapitre11

Ben

Unesemaine:dernierjouràdeux

Enfinvendredi!Jesouffledefatigueetmefrotteénergiquementlevisageentrelesmains.Fautquejemeremetted’aplombpourladernièrelignedroite.Jepassedesjournéesdefouentremontaf,celuideJay et les urgencesquime tombent sur la gueule.Ladernière ?Angy, la responsabledupôle relationclient,quidemandeunerupturedecontratpourseconsacreràsafamille.Commentdirenonàunemèredetroisjeunesenfantsquivientchialerdansmesbras?Ellenecomptepassesheuresetc’estlaraisonpourlaquelleelleexcelledanssonboulot.C’estaussipourçaquejecomprendssadécision.Àmonavis,Jaydenn’auraitpasétéaussicompréhensif,surtoutquelespleurslegonflent.Angyenadoncprofitéets’estdécidéeàvenirmevoir.Lundi,Jayreprendlesrênes,etmoimaplacedebrasdroit.IlsedémerderaaveclesRHpourluitrouveruneremplaçante.Chacunsamerdeaprèstout!Ilm’enalaisséenpartant,jeluiendonnequandilrentre.C’estunjusteretourdeschoses.Comme à chaque fois que je réfléchis ou que mon esprit s’égare, mes yeux se posent presque

machinalementsurlebureaud’enface.Zieutermonassistanteestdevenumonpasse-tempsfavori!Ouais,j’aidenouveaulaporteouvertepourl’avoirdansmonviseur.Ellenelesupportepasdavantage,maisjecroisqu’elleafinipars’yhabituer.Oualorsellefaitmieuxsemblant.Jerepenseànotrealtercationd’hier,àsonairsisûrd’elle,çam’aempêchédedormir.Sesparoles

tournentenboucledansmatête.Ilesttempsquej’avouemadéfaite.Gameover,Ben!Pfff,nonjenepeuxpas,jeneveuxpas!Pourlapremièrefoisdemaputaindevie,j’aidéballémonpaquetetmesuisprisunepancartedanslatronche.Jesavaisqu’ellenecéderaitpascommeça,maislàj’aidesdoutes.Plusellemerepousse,plusellem’attire.Cettenanam’obsède,meflinguelesneurones.Enrésumé:mefaitroyalementchier!Bien…Zoé,continuedetedissimulerderrièretonmasqued’indifférence,maisjenetelaisseraipasmassacrermonegounedeuxièmefois.Jem’humidifieleslèvrespuissourisenmatantlegalbedesesmagnifiquesjambescroisées.Ellese

frottelacuisse,tiresurlapointedesescheveux.Elleparaîtaussicrevéequemoi,auborddelarupture.Bref,exactementcommejelaveux.J’aipeut-êtreramé,maisc’esttoiaufinalquiseraspauméeunefoisquejet’auraieue.Demonbureau,j’interpelleZoé.Çafaitdesheuresquelescollèguesfontlaqueuedevantsonbureau

pourlasaluer.Enunesemaineici,ellearéussiàsefaireapprécierdelamajoritéd’entreeux.—Bordel,maisc’estquoitoutcecirquedepuistoutàl’heure?—Çava,Harper,leboulotseraquandmêmefait!Etvoilà,avecmoielleesttoujourssurladéfensive.Enfait,jecroisqu’ellemeréservesoncaractère

demerdecar,quandjelavoisaveclesautres,elleestcomplètementdifférente:rieuse,drôleetdouce.Ellefaitdubonboulot,trèsbonmême,maisjesuiscontentderetrouverLola.Lundi,jerécupèrema

princesseetnoshabitudes.Jenepensaispasm’attacherautantàcettenana,maislesimplefaitdepenseràellemefaitprendreconsciencequ’ellememanqueplusquejel’auraispensé.Direquej’aitentédeladraguer…C’estmieuxcommeça,onn’enseraitpaslàsinon.SiJaydenlesavait…Lolaneluiajamaisrien dit et je lui en serai toujours reconnaissant.On n’en a jamais reparlé tous les deux,mais je suispresquesûrqu’ellenemecroyaitpassérieuxdansmonapproche.Pourtantjevoulaisvraimentlamettredansmonlit,comprendrepourquoiJayétait tellementdifférentàsoncontact.Aujourd’huiellevitchezmoi :on ressembleàunvrai couple, labaiseenmoins.Etc’est encoremieux ! J’ai trouvéunepetitesœur…Putain,voilàquemaintenantjepensecommeunegonzesse.Ondiraquec’estl’effetLola!Laseulejouissancedecesderniersjoursc’estquandZoém’apresquesuppliédel’emmenerchercher

les amoureux à l’aéroport ce soir. Harcèlement qui s’est avéré inutile puisque Jayden m’avait déjàprévenuqu’ilsreviendraiententaxicarilsdoiventpasserchezluiavantdenousrejoindre.Jemetouchemachinalementlacuisse, làoùellem’afaitunebéquillequandelleacomprisquejemefoutaisd’elledepuisplusd’uneheure.Voilàquemaintenantelledevientviolente!Sij’enrigolaisaudébut,leputaindebleuquejemetapemefaitdéjàmoinsrire.Elleadelaforce,lagarce,j’aifaitsemblantdenepasavoirmalmais,bordel…jemorfleencore.Sajournéedetravailtoucheàsafin.Finilematagedesjambes,lestonnesdephotocopiesurgenteset

surtout inutiles que je lui donnais à faire pour l’emmerder. Fini tous les cafés que j’ingurgitais et quim’empêchaientdedormirjustepourlavoirallerjusqu’àlamachineetadmirersondéhanché.OK,jedoisavouerque,malgrémafaçonunpeurudedeleluimontrer,jemesuisquandmêmehabituéàelle.Quandelleveut,ellepeutêtreattachante…Ouplutôtattachiante.Faudrait peut-être lui faire un cadeaudedépart ?Unbonpatron la remercierait pour ses études de

marché,l’élaborationd’unplanmarketingbluffant,sagestiondelanouvellebrochurecommercialeetsamiseenplacedepartenariatsavecnosconcepteurs.Toutçaenàpeineunesemaine…Maismoijefaisquoi?Jeplonge la têtedansmonécran.Bordel, ilétaitmoinsuneavantqueShirley la follenecaptemon

regard!Finalementellessebarrenttouteslesdeuxprendreuncaféetjeprofitedecemomentdesolitudepourpasseruncoupdetéléphone.Voilàc’estfait,maintenantjepeuxm’yremettre!Jerelèvelesyeuxaumomentoùondéposeungrosbouquetdefleurssursonbureau.Zoéleregarde

ahurie,sanscomprendredequiilvientetsuitduregardlelivreurquirepartsansdireunmot.Soudainunlargesourirefendsonvisage.Esquissedesouriredemapart.Vas-y,mabelle,régale-toi!Elleselèveetsepenchesursonbureaupourattraperlapetitecarteglisséeentrelespivoinesblanchesetroses.Jen’yconnaisabsolumentrien,maislafleuristem’acertifiéquelespivoinesferaientleureffet.Jenesaispassic’estlebonchoixmaisentoutcaslalivraisonentrenteminutesaétérespectée.JeregardeZoédéplierlacarteetsonsourires’effacenet.Lemiens’élargit.Ellemeregardeuninstantetcommejem’enseraisdoutéellelèvesonmajeurbienhautenmefusillantduregard.Jenepeuxm’empêcherderireetdeluienvoyer un baiser, ce qui la fait rougir de colère. J’adore l’effet que je lui fais !Ohma belle, je nem’avouepasvaincuaussifacilement.Tuapprendrasquejesuisplutôtdugenrepersévérant!Alors oui, je l’ai remercié mais à ma manière bien évidemment. Si la fleuriste a bien pris mon

message,ildevraityavoirinscritsurlacarte:

Àmonassistantedévouée,quiexcelledanslapréparationducaféetlemaniementdelaphotocopieuse.Impatientdeconnaîtretesautrestalentscachés.

Cordialement,Tonmeilleurennemi

Elleabeaum’envouloir,iln’empêcheque,lorsqu’ellequitteenfinlebâtiment,c’estavecsonbouquetsouslebras.Unefoisdeplus,jesuisfierdemoi.Jeterminematâcheavantdeplierbagagemoiaussi.JaydenetLolanedevraientpastarderàatterriretjeveuxêtrelààleurarrivée.J’enfilemoncuir,attrapemoncasqueetcompteprofiterdeceweek-endbienmérité.

*

Quandj’arriveàl’appart,Zoés’estdéjàchangéeetcommenceàpréparerlerepas.Elleagardésonchemisierensoiemaisaretirélesderniersboutonspourfaireunnœud,dévoilantlapeaudesonventreferme. Elle a troqué sa jupe professionnelle pour une minijupe en Skaï noir et je dois avouer quel’ensembleest…intéressant.Bon,hyper-bandantj’avoue!—Tuveuxuncoupdemain?Merde,c’estmoiquiaiparlé?Ellesuspendsongeste,lecouteauenl’airethausseunsourcil,aussi

étonnée quemoi.Malgré nos règles pourtant bienmises en évidence sur le frigo, j’ai très peu fait àmangercettesemaine.JerevenaistroptarddutafetZoéavaitdéjàprislesdevants.—Euh…Tuvas savoir t’en sortir ?Nonparceque jene t’ai pasbeaucoupvuaux fourneauxcette

semaine,MonsieurLe-big-boss-qui-critique-mais-mange-quand-même-ma-cuisine.Ellenesedébrouillepasmaldutout,mêmesileslasagnesétaientdégueu.Mescritiquesn’étaientpas

fondées,maisilfallaitbienquejedisequelquechose,sinonlesrepassedéroulaientdansunsilencedemort.—T’asbesoind’aideouioumerde?—Ouais…Jevaispasm’ensortirsinon!Ellesoufflesurunemèchequiluichatouillaitlefrontetm’adresseunpetitsourirecontrit.Wahou,Zoé

souritetçam’estdirectementadressé!Jehausseunsourcilpuisretiremaveste,remontelesmanchesdemachemiseetrefaismonbunavantdem’installeràcôtéd’elle.Tousleslégumesdufrigosontétaléssurleplandetravailetdesépluchuressontéparpilléespartout,jusquesurleboutdeseschaussures.—Jefaisquoi?Ellemetendlegrandcouteauetj’esquisseunmouvementderecul.Ellem’enatellementfaitvoirque

je m’attends à tout maintenant. Elle lève les yeux au ciel et secoue la tête, dépitée par ma réactionexagérée,avantdeposerlecouteauàcôtédemoi.Quoi,Zoéavecuncouteaudanslesmainsetiln’yaquemoiquitrouveçadangereux?—Commenceparéplucherleslégumesdevanttoi,têtedenœud!Jememarre,cettefilleaunemanièrebienàelledemedemanderdel’aide!Alors,voyonsvoir…Pas

vraiment certain des gestes à effectuer, jem’exécute en faisant attention de couper les légumes de lamêmemanièrequelessiens.Noustravaillonscommeçaencoreunmoment,côteàcôtedansunsilenceabsolu.Auboutdecinqminutes,j’enaidéjàmarreetcecalmecommenceàdevenirpesant.J’attrapelatélécommandedelachaînehi-fietmetsenrouteledernierCD.BlurredLinesdeRobinThickeemplitlapièceetjereprendsmatâcheensifflotant.L’airentraînantsembledétendreZoé,signequ’ellen’étaitpasàl’aisenonplus.Quoi?Jesuisgentillà!Voilàquemaintenantellesedéhanchesurcettechanson,faisantremontersapetitejupe,cequidévoile

unpeuplusseslonguesjambes.Unsourireàpeinevisibleétirelecoindemeslèvres,etj’accompagnelechanteursanslaquitterduregard.ThewayyougrabmeMustwannagetnastyGoahead,getatme.(Lafaçonquetuasdem’attraperTudoisvouloirdevenirsauvageVas-y,prends-moi.)Alors que jusque-là elle dansait sur l’air, elle stoppe net ses mouvements pour mieux écouter les

paroles.—Jen’aipaschoisilachansonmaisjen’auraispastrouvémieux!—Tut’arrêtesjamais,toi,hein?Jedoisavoirunregardsalace,àlahauteurdesparoles,puisqu’ellelèvelesyeuxauciel,maisjepeux

entrevoirunpetitsourirequ’ellen’arrivepasàcacher.Avantqu’ellen’esquisselemoindresignederepli,jel’attrapeparlamainetlaforceàdanseravec

moi.Unejambeentrelessiennesetunemainaucreuxdesesreins,jel’entraînedansuncollé-serréenpleinmilieude lacuisinesurunechansonquiprône ladépravationsexuelle.Siellesemblehésiteraudébut,ellefinitparpasserlesbrasautourdemoncouensuivantlerythmequejeluiimpose.IfeelsoluckyYouwannahugmeWhatrhymeswithhugme?(JemesenssichanceuxTuveuxm’enlacerQu’est-cequirimeavec«m’enlacer»?)Toutdoucement, j’accentuemonmouvementdebassin,monmembrevenantcaresserunpeuplusson

intimité. Ses yeux se voilent légèrement et elle se laisse faire. J’aimême la sensation qu’elle répondtimidement àmesmouvements.Mais elle reprend rapidement ses esprits et chercheà s’éloigner. Je laserreunpeuplusfortpourl’enempêcher.Résultat:ellemerepoussefermementquandmamainglissesursesfesses.Merde,troptôt…oupeut-êtretroptard.—Jecroyaisavoirétéclairehiersoirentedisantnon.Tuasperdu,Ben.Hier,maintenant,demain:il

nesepasserajamaisrien.Etcen’estpasunbouquetdefleursquiferaladifférence.C’estfini.—C’étaitonnepeutplusclair,rassure-toi.Maispuisquec’estletempsdesconfidences,j’aiunaveuà

te faire : tues faible !Tu te rendscompteque tu risquesdeperdre,alors tu faismachinearrière.Tonregard,toncorps…Ilsparlentd’eux-mêmes.Jecommenceà laconnaître : en laprenantde front je saisque j’aiplusdechanced’obtenir l’effet

inverse.Àcetinstant,toutcequejeveuxc’estqu’elleneseretirepasdenotrejeualorsqueleschosescommencentseulementàavancer,dansmonsensenplus!—Tonassuranceestàmourirderire!D’accord…Tusaisquoi?Vuquetum’amuses,jevaistefaire

unefleur.Quelejeucontinue,c’esttoiquivasplier.Qu’est-cequejedisais?Tellementprévisible!Jeretienslesourirevictorieuxquimanquedefranchir

meslèvres.Jemerapproched’elle,nosnezsefrôlentetjereposemesmainssursesreinsenlaserrantcontremoi.—Chérie,çafaitlongtempsquej’aiplié,maisjeteremerciedemeconfirmerquetuenasenvie.Au

fond,ilsuffisaitdepasgrand-chosepourquetul’avoues.Jesenssoncorpssetendresousmesdoigtsquandelleréalisequ’ellevientdesefairemanipuleren

beauté.Commentlapousseràpoursuivrelejeupournepasperdrelafaceenuneseuleleçon!Elleouvrela bouche pour répondre mais la porte qui claque nous interrompt. Avant que l’on ait le temps des’écarter,JayetLolaentrentetnousjaugentuninstantàtourderôle.Lolaseconcentresurmoi,ledoigtpointédansmadirectionetleregardfurax.—BenjaminMatthewJosuahHarper!!!Qu’est-cequetufaisavecmacopine?—Rien!!!

Nousrépondonsd’uneseulevoixetnousséparonsbientropvite.Jenepeuxpasluidiremesintentionssinonellevamecouper lescouilles.Elleme l’aassez rabâché :«Pas toucheàmescopines,horsdequestionqu’ellescomplètenttontableaudechasse!»Autantdirequem’amuseravecsameilleureamienelaferaitpassauterdejoie!Elleabeauêtretoutepetite,quandelles’énerve,ellepeutêtrevraimentflippante.—Çava,onétaitjusteentraindedanser!Oh,machérie,jesuistellementcontentedetevoir!ZoécourtrejoindreLolaetluisautedessus,mettantrapidementfinàl’interrogatoire.Ellesouritetne

m’adresseplussonregarddetueuseàgage:sauvé!Jayden,quantàlui,mefixetoujoursavecsonsourireencoinquiveuttoutdire.C’estpasmonpotepourrien,ilmeconnaîttropbienpourselaisseravoir!Ils’avanceversmoietmedonneunepetiteaccoladeavantdemeclaquerl’arrièredelatête.—Àcroirequetunetienspasàlavie,monpote!Desmotschuchotésàmonoreillequimefontrire.Jen’aipasencoreeul’occasiond’enparleravec

Jay,mêmesijesaisqu’ilvatrouverçadrôleetmedired’enprofiter,jesaisaussiquejemesuislancédans un jeu dangereux. Je ne la déteste plus vraiment, cette peste. Une fois que je l’aurai baisée, onarriverapeut-êtreàdeveniramis,quisait?Baiserpourdeveniramis…Merde,onauratoutvu!Lolamesautedessus,meserre fortdesespetitsbras,etdeseffluvesdevanillemechatouillent les

narines.Bordel,mêmesonparfumm’avaitmanqué!—Ilétaittempsqueturentres,princesse.Ellem’adresseunsourireattendrissantquimefait littéralementfondreetmegratte labarbedubout

desdoigts.—Faudraitpenseràteraser,t’esmocheenhommedescavernes!Elle n’aimepas…Tout commemes cheveux, plus longs qu’à notre rencontre. Je frottemonmenton

contresesjouesquirougissent,déclenchantdesapartuneplaintenuancéederire.LesbraspossessifsdeJaydenm’enlèventcedrôledepandapourlecollercontrelui.Ilgrogneens’écartant,mettantfinànosretrouvailles.—Putain,arrêtedetoujourslatripoter,mec,sérieux,c’estgonflantàforce.—Quoi?T’esjalouxparcequej’enfaispasautantavectoi?Allez,monfrère…Vienslà!Jem’approchedelui,lesbrasgrandsouverts,sachantpertinemmentqu’ilvamerembarrer.Cemecest

l’emblèmedubadboymachopuérilanti-câlin…Saufavecsarouquinebienentendu!—Tufaisunpasdeplusetjetepètelesbras,frèreoupas!Éclat de rire général face à sa réaction ridicule, surtout quand il nous regarde tous un par un en

espérantnousintimider.Pourlecalmer,jeluiglisseunebièredanslamainetluiparleduboulotetdesmerdesdedernièreminutedontjen’aipaseuletempsdem’occuperavantsonretour.QuandZoérepassederrièreleplandetravailpourcontinuerlapréparationdudîner,jelarejoinsetreprendsmoncouteautout en continuant d’expliquer à Jay ce qu’il a loupé durant cette semaine. Zoém’adresse un sourirereconnaissant.Cetéchangen’échappepasànotremeilleureamie,quinousfixed’unedrôledemanièrejusqu’àcequequelquechosederrièrenousattiresonattention.—C’estquoicesfeuillesaccrochéessurlefrigo?JesuissonregardmaisZoéestlapremièreàréagir.EllelesfourredansuntiroiravantqueLolan’ait

euletempsdelirequoiquecesoit.— Pour éviter qu’on s’entretue, Ben a eu la fabuleuse idée de mettre en place des règles de vie

commune.D’ailleursj’aieul’honneurdesauverquelquessirènesendétresseéchouéesdanssonlit,enfin

quandj’ypensais!Ellem’adresseunclind’œilcompliceaccompagnéd’unsourireàfairefrémirmaqueue.Quandelle

chercheàmecharmer,jenemarchepas…jesaute!Sansmauvaisjeudemotsbiensûr.Jelèvelecouteaudanssadirectionensecouantdoucementlatête.—Nevapassurceterrain-là,traîtresse.D’ailleursonpeutenleverunerègledansmaliste.—C’estvrai,onpeutlarayer?Je devine tout de suite qu’elle pense àma dernière et plus importante règle. Comme si elle allait

sauversonculaussifacilement.—Ohqueoui,jeneveuxplusjamaisgoûterteslasagnes!Jememarrequand,derage,ellemeclaquesoncoudedanslescôtes.Lesmainsprises,ellenepeutpas

m’adressersonéternelmajeur.Ducoupj’ailedroitàunvulgairetiragedelanguepuéril.Jevaistedireoùjelavoudrais,moi,talangue!—Ehbien,ditesdonc,jesuissurlecul!J’avaispeurderetrouverl’appartàfeuetàsangmaisau

finaljevousretrouvecopainscommecochons.—C’est quoi cette expressionpourrie ?Mais sinonouais…onpeut dire qu’on a trouvéun terrain

d’entente.Zoéabienrésumélasituation.Çaabeauêtreencoreexplosifentrenousparfois,lejeunousaquand

mêmerapprochés.Lolasenichedanslesbrasdesonhommeetleregardqu’ilséchangentnemeplaîtpasdutout.Jaydensouritd’unefaçonquej’airarementvue,ceconestheureux!Çapuelamerde!—Çatombebienparcequej’aiunegrandenouvelleàvousannoncer.Bon…c’estassezsoudain,je

sais,mais…Enfinc’estquandmêmemûrementréfléchiet…—CequeLolaveutdirec’estqu’ellevouslaissel’appartpourvenirs’installerchezmoi!Jaydensouritfièrement,ilaenfinobtenucequ’illuiréclamedepuisplusieursmoismaintenant.Jene

l’aijamaisvuaussisereinetamoureux.Fuckl’amour,ilmepiquemaprincesse,là!—Non!!!Unefoisdeplus,Zoéetmoirépondonsenmêmetemps,etJaydenenperdsonsourire.—C’étaitpasunequestion.Vousfaiteschier,touslesdeux!Elleramassesesaffairesquisontrestées

ici,pointbarre.Pasdediscussion,nidenégociationpossible.—T’aspasl’airdecomprendre,Jay.Entreréussiràs’entendreunesemaineetvivrevraimenttousles

deuxensemble,ilyaunsacréfossé.—Chouchou,tusaisbienqueçanechangepasgrand-chosepuisquej’étaisdéjàchezJaylaplupartdu

temps,etjesuisdésoléededéménageralorsquetuviensàpeined’arriver,maZouille,maisj’aipromisàJayquevousn’arriveriezpasàmefairechangerd’avis.Jaydenseredressed’uncoup,manquantdefaire tomberLola,encoreappuyéecontre lui.Et là,sans

comprendrepourquoi,leJaydensévèreetdurrefaitsurface.Àcroirequetoutcetempsiln’étaitpassiloinfinalement.SesyeuxverttempêtesebraquentsurLolaetjemeretiensdememettredevantellepourlaprotéger. Je saisqu’ilne lui ferait jamaisdemalphysiquementmais sesmotspeuventparfois fairepire.—C’estlaseuleraisonpourlaquellet’estoujoursOKpourvenirvivreavecmoi?Parcequetume

l’aspromis?Sic’estuniquementpourmefaireplaisir,netedonnepaslapeinedefairetavalise,resteici!LacolèredeJayestpalpable.Lolaseredresseàsontouretl’enlaceenletenantfermement,sachant

qu’ilseraitcapabledelarepousser.—Oh non,mon cœur, j’avais déjà prisma décision avantmême que tume reposes la question…

devantmamère…pourmeforcerlamain!Jet’aimeetjeveuxêtreavectoi,toutletemps.Jaydens’apaiseaussitôt,commeuncaméquiauraiteusadose.Lolaluiaditexactementcequ’ilavait

besoind’entendre.Ilestheureuxàenjugerparsonsourireencoinetsesépaulesrelâchées.Illaserrecontreluietl’embrassefougueusement,commes’ilsétaientdéjàseuls.C’estmignon…Maisçadevientvitetrèsgênant.Zoéetmoireprenonsnotretâche,àsavoircouperleslégumesenfaisantattentiondebiengarderlatêtebaissée.—Faceàsonmec,onaperdud’avance.Faitchier!—T’assipeurqueçadeteretrouverseuleavecmoi?—Ouais…Peurdefinirpartetueretdecroupiràviedansunedevosprisons.—Displutôtquetucrainssurtoutdefairetombertaculotte!—Pfff,sijel’enlèvec’estuniquementpourt’étrangleravec!—C’estbizarresitamenacemedonneenvie?—Enviedequoi?Discrètement Jayden se poste devant nous. Merde, pas lui ! Les mains sous le menton, il semble

intéresséparnotreconversation.HeureusementLolaadisparu:unseulàmechambrer,c’estsuffisant!D’ailleursellen’estplusdanslapièce.J’espèrequ’ilsnesontpaspressésaupointqu’ellesoitdéjàentrainderamassersesaffaires.—Fautfêterça,jesorslesbouteilles!Jesuiscontentpourvousmonpote,ettusaisquec’estsincère,

maistumepiquesmaprincesse.—TaprincesseestavanttoutMAfemme.—Tuveuxtoujoursavoirlederniermot,hein?Zoéme pousse pour prendre les verres et, d’un signe de lamain,me fait comprendre de sortir la

bouteilledechampagnedufrigo.Avantquej’aieletempsderéagiràlafaçondontellemel’ademandé,j’aidéjàlabouteilledanslesmains.Bonnesmanièresàlacon!Onavaitprévudefêterleurretouretvoilàqu’ons’apprêteàtrinqueràl’inverse.Lolarevientenfinet

c’estavecunsourireforcéqueZoéetmoilevonsnosverres.C’estledébutdelafin:unefoisquej’aurairéussiàlamettredansmonlit,commentonvaréussirà

vivreensembletouslesdeux?

Chapitre12

Zoé

—Ohbordel, j’ai lespiedsencompoteetlacartebleuequiflambemais,bonsang,çafaitdubien,cettejournéefilles!On s’installe à la terrasse d’un café en soufflant d’aise, heureuses de pouvoir se poser après avoir

piétinédanstouslesmagasinsquis’offraientànous.—Sûr,c’estsuperquetuaiespuprendretajournéepourêtreavecmoi,Lola,maisnecherchepasà

meménager,jevaisbien.Ellelèveunsourcilcommesiellenecomprenaitpasoùjevoulaisenvenir.Noscafésarriventetje

n’aipasletempsdecherchermonporte-monnaiequ’elletendauserveurunbilletsortidenullepart.Çafaitbizarredevoirmarouquineavecdel’argent.Jel’aitoujoursconnusansunrond,àfairedescréditspour assouvir sapassionpour les chaussuresde luxe, alors la voir épanouie et à l’abri dubesoinmerassure. En même temps, pour avoir été dans sa peau pendant une semaine, je peux certifier que sagénéreusepaie est plus queméritée.Et encore, je n’ai pas fait le tour de tout ce qui lui incombe,mecantonnant uniquement au plus urgent. Si certaines mauvaises langues de sa boîte disent à qui aimel’entendrequ’elleestgrassementpayéeparcequ’ellecoucheaveclepatron,manifestementcescommèresnevoientpastoutcequeLolagèreauquotidien.Sestâchesvontau-delàdesesfonctions,ellepourraitêtrebienplusqu’uneassistante.—JesuisheureusequetutelancesavecJayden!TonMonsieurOrgasme-garantiestunmecbienetde

toute façon jenecomptepasm’éterniserà l’appart.Si tout sedéroulebienavecmonblog, jedevraisréussiràgagnermavied’icipeu.—Jaydent’aproposéderesterchezDavis&Co,pourquoituneveuxpas?MêmesiBennel’avouera

jamaisjesaisquetuasfaitdubonboulot.Enplus,laplaceserabientôtlibresij’arriveàrécupérerleposted’Angy!Jayn’estpasdumêmeavis, il trouvequec’est troptôtetquejesuistropgentillepourgérerlepôlerelationclientmaisjesuisconfiante.—Jecroissurtoutqu’ilvoulaitquetuprenneslaplacedesavieilleassistantemoustachue!Ettusais

quej’aidéjàdumalàvivreavecBenalorslesupporterenplusauboulot…Nonc’estau-dessusdemesforces!J’aieuunesemainepourletester!—Pourtantvousaviezl’airdemieuxvousentendre,non?—Oui…Non, enfin je sais pas. Je crois surtout que c’est parce qu’on savait tous les deux que tu

reviendraisfairetamponàlafindelasemaine.Iln’estpassidétestablequeça,c’estvrai,maisçarestedeloinlepireemmerdeurquejeconnaisseetjenecomprendstoujourspascommenttufaispourl’aimerautant.—D’aprèsJayden,t’esjalousedemarelationavecBen.—N’importequoi!

Biensûrque je suis jalouse, j’ai lahaine tellement ils sontprochesparfois.Lepirec’estquand ilsrigolentcommedesdératéssurdessujetsquim’échappent.—Commeluiestjalouxdemarelationavectoi!—Ahoui?Bon…Ilsepeutqueparfoisjelesoisunpeualors,maisjusteunpeu!Elleneditrienmaismeconnaîtassezpoursavoirquejenefaispasdanslademi-mesure.Avecmoi

c’esttoutourienalors,«unpeu»,autantdirequecen’estpasdansmonvocabulaire.Sonpetitsourireetsesyeuxbrillantssuffisentàmefaireriredemamauvaisefoi.—Tusaisque je t’aime,hein?Allez, raconte-moiplutôtoù tuenes avec ton sitepour femmesen

chaleuretenmanqued’amourquivatefairedevenirriche?—Tunecroispasenmonsite?—Bien sûr que oui ! Je rigole car c’est un projet pour lemoins originalmais je sais aussi que tu

réussistoutcequetuentreprends,alorsjenemefaisaucunsouci.Tuvastoutdéchirer,t’eslareinedugirlpower!On rigole toutes lesdeuxcar endisant ça je saisqu’ellepense aussi à cegrouped’anglaisesqui a

bercénotreenfance.Rienqued’ypenserj’aileurschansonsquimeviennententête.—Merci,GeriHalliwell,maintenantjevaisavoirWannabedanslatêtejusqu’àdemain!Bon,alors,

riche,jenepensepasmaismefaireunepetiterentréed’argent,pourquoipas?C’estlavilledesfoliesici alors jemedisquec’estpossible.D’ailleurs j’aimonpremier rendez-vousdemainavecplusieursfemmesenchaleurcommetudis.J’aitravaillécommeunemaladedessusetmaintenantqueleschosessemettentenplacej’aiuntracfou!—Zoé,chercheused’hommesfortunéspourfemmesintéressées!—L’idéede«Pigeonencostard»c’estuniquementparceque j’aivucomment les femmesdeLos

Angelespeuventêtre,etj’aieulenezfincarc’estlethèmequimarcheleplus.Cegenredefemmesmedégoûte, seulementc’est aussi cellesquivontme rapporter leplus.Moi, c’est surtoutaidercellesquin’ontplusconfianceenellesquimeplaît.J’airencontréassezdeconnardspoursavoirquelesfemmeslesplusfragilespeuventensortircassées.—J’ail’impressionquetufaisréférenceàmoiendisantça,j’ai…Saphraseresteensuspenslorsquelebruitassourdissantd’unemotosefaitentendre.Elles’arrêteau

feurougejusteenfacedenous,etl’hommequilachevaucheàlatêtetournéedansnotredirection.Jenesaispass’ilnousregardevraimentàcausedesavisièreteintéemaisentoutcas,nous,onnevoitquelui.Confortablementassissurunesportiveorangequisembletoutjustesortieduconcessionnaire,lemotardcontinuedenousregarder.Habillétoutencuir,plutôtgrand,etlesalaud…Ilal’airdrôlementbiengaulé!J’essaiederesterdignemaisjesuisàlalimitedemebaverdessus,bienquejesacheque,souvent,unefoislecasqueretiré,cesmecs-làsontmochesoudumoinsbienpluslaidsquecequ’onimaginait.Maislà, avec cettemoto rutilante et sa combi en cuir… jen’arrivepas à regarder autre part.Quand le feupasseauvert,ilnousadresseunbrefsignedelamainauqueljerépondssansréfléchir,avecsûrementunsourireniaisetlamâchoirequimanquedesedécrocherquandilpartenrouearrière.C’estassurémentunprétentieux,unpetitbranleurmais,bordel,j’ailessensenébullition!QuandjemeretourneversLola,toujoursaveclaboucheouverteetlamainenl’air,ellemeregarde

d’undrôled’air.—Décidémentjenetecomprendspas!—Quoi?Tusaisquejenerésistepasàunmotard.Mapetiteculotteestàlalimitedelacombustion

spontanéedèsquej’envoisun!

Ellesebouchelesoreilles,secouantlatêteetaffichantunedrôledegrimace.Làc’estmoiquinelasuisplus!—Nemeparlepasdel’étatdetaculotteetdeBendanslamêmephrase,s’ilteplaît!—Quoi?Non,Benn’apasunemotocommecelle-là.Pourl’avoirvueplusieursfois,jepeuxtedire

qu’elleestblanche!—Nonmabelle,c’étaitbienlui.Lablanche,ill’utilisepourallerauboulotcarelleestplusadaptée

auxruesdeL.A.,maisquandilsortdelaville,ilprendcelle-cicarelleestpluspuissante.Aujourd’huiilétaitenrendez-vousàl’extérieurdoncjesaiscequejedis.Zoé,tuviensdefantasmersurBen!Bordeldemerde,ilaréussiàmefairefantasmer…Encore!SilasituationfaitrireLola,demoncôté

jesuisencoreplussouslechocquandjemerendscomptequelespetitesboufféesdechaleurnesesontpasatténuéesendécouvrantl’identitédumotard.Jediraismêmequeçaaeul’effetinverse.Moncorpsestuntraître!— Allez viens, apparemment les gars ont fini leur journée, il est temps de les rejoindre. Ça fait

longtempsquej’aipaspasséunejournéeloindeJayetjedoisavouerqu’ilmemanque,monpetitcœurd’amour!Laguimauveoui,maisàpetitedose,làçaluisuintepartouslespores.Aumomentoùlemot«Jay»

estsortidesabouche,jel’avaisdéjàperdue.

*

Quandondébarqueàl’appart,Bennousadresselemêmesignedelamainqu’enmotounpeuplustôt,avecsonéternelsouriresatisfait.—Salut,mesdemoiselles!Ilabiencomprisquejenel’avaispasdutoutreconnusinonjenemeseraispasextasiéeautantdevant

lui,dumoinssachantqu’ilmevoyait.—Hahaha !Vas-y,marre-toi !Autant tedireque jeneme feraiplusavoir ! Jenesavaispasque

c’étaittoi!—Parcequeçaauraitvraimentchangéquelquechose?Attends,t’asquelquechoselà…Deson index, il se frotte lacommissuredes lèvres, et je l’imitemachinalementen frottant lemême

endroit.Nemeditespasquejemesuisbaladéedanslesruesavecunrestedebeignetauchocolatsurlafigure!—Quoi?J’aiquoi?Devantsonhilarité,jefrottedeplusenplusfort.Saletédedépendanceauchocolat!—C’est…Ahnon,autempspourmoi,c’estjusteunrestantdebave!—Salecon!Enmevoyantarriveràgrandspasverslui,Benpivoteetmetourneledos,protégeantsonvisagede

sesmains.Jeluiassènedescoupsdepoingdansl’épaule,pluspourmesoulagerquepourluifairemal.Commesijepouvaisluifairemaldetoutefaçon,cemecestfaitengranite!Plusjefrappe,plusilrit.Plusilrit,etplusjelefrappe.Cerclevicieuxdanslequelnoussommesplongésdepuisledébuttouslesdeux:plusjelefuisetplusils’accroche.—Stop!Çasuffitmaintenanttouslesdeux!Vousêtespiresquedesgamins!Je le lâche après un dernier coup et récupèremes sacs, abandonnés dans la précipitation, pour les

déposerdansmachambre.—C’estellequiacommencé!Unefoisdeplusjen’airientrouvédemieuxquedelevermonmajeur.Puériletpeuoriginal,j’enai

conscience,maiscommeLolanousl’asignalé,noussommesdeuxgrandsgamins.Le reste de la soirée se passe plus tranquillement, avec une pizza et une bouteille de vin que

j’élimineraidèsdemainmatinenfaisantungrosfooting.Jen’aijamaismangéaussigrasquedepuisquejevisici.Sijeneprendspasunminimumsoindemoi,jevaisfinirparressembleràunepaupiette.Maisenattendant,jeprofiteencoreunpeuetmesersunautreverredevinrouge.—Aufait,Zoé,tum’aspasditpourtonjoggeur…Çaavance?Onaeu toute la journéepourenparlermaisnon, il fautqu’elleattendeque l’onnesoitplusseules

pouryfaireallusion.LesmecssontengrandeconversationmaisBenmejetteuncoupd’œil.Rapidemaispasassezpourpasserinaperçu.Jemepencheversmacurieuseetparleàvoixbassepournepasattirerl’attention.Même s’il y aurait eu d’autresmoments plus propices à cette conversation, je suis quandmêmecontentequ’elles’yintéresse,surtoutparcequej’aiégalementavancésurcesujet.—Unsoirdelasemainedernièrequandjesuisarrivéeauparc, ilm’attendaitsagementassissurle

bancprèsdel’entrée.Onadiscutéunmomentetilm’ademandémonnuméro.—Tuleluiasdonné?—Àtonavis?Jecoursderrièreluidepuisplusieurssemaines!—Ouais,questionidiote!Ettuvaslevoir?— Je le vois tous les jours, Lola ! Mais si tu parles d’un rendez-vous, pour l’instant c’est pas

d’actualité.Maisons’envoiedespetitsmessagesdetempsàautre.—Génial,bientôtlessextosalors!Tumedirasquandleschosesévoluerontsurtout!AhmaLola,maisqu’est-cequejeferaissanstoi?Tacuriositéestaussiinsupportablequedrôle!—Comptesurmoi!Enplusmaintenantj’aibeaucoupplusdetempslibre!—Jeterappelleunedesrèglesdecetappart:pasdemecchezmoi!Etvoilà,j’enétaissûrequ’ilécoutaitd’uneoreille.IlvientdecouperJayavecquiilétaitengrande

conversationdepuistoutàl’heurepourmeprouverqu’ilfauttoujoursqu’ilsoitsurmondos.—Depuisquandt’asunerègleaussicon?Jeramènebienmonhommemoi!—Ahtuvois,mêmeLolatrouveçadébile!Etpuisdetoutefaçontupeuxdirecequetuveux,tun’es

paslàenjournéepourvenirvérifier!—Jetejurequesij’apprendsquet’asfaitentrerunmecchezmoije…Aïe!LegrosbrastatouédeJayestvenumesauverd’uneénièmemenaceenenvoyantuncoupdepoingdans

l’épauledemonemmerdeur.Bensetourneversluiensefrottantl’épaule,entremecsilsn’yvontpasdemainmorte.—T’esmaladeouquoi?—Putain,Ben,j’allaistedireuntrucimportantettoitutourneslatêtepourécouterdesdiscussionsde

meufs.—C’estbonjet’écoute…Detoutefaçonellesaittrèsbiencequil’attendsielleenfreintuneseulede

mesrègles.Euh…Non,enfaitonn’enajamaisparlé!Maissic’estencoreenlienavecsonpetitjeu,jenepréfère

mêmepaslesavoir!

—C’estàproposdetonpère.LevisagedeBensedécompose instantanément. Ilnefait jamaisallusionàsafamilleet j’aicomme

l’impressionquec’estunsujetsensible.MêmeJayal’airdeprendredesgantsalorsquecen’estpasdutoutsongenre.—Ilestvenuauboulotquandtuétaisenrendez-voustoutàl’heureetademandéàtevoir.Bensegratte labarbed’unair songeur, sedemandant sûrement la raisondecettevisite surprise. Je

n’arrive pas à regarder ailleurs, son visage passant par une palette d’émotions en un temps record :surprise,dégoût…haine.—Tuasappelélasécuritépourlefairedégager?—Arrête,tonpèren’estpasunhommequ’onpeutvirercommeça.J’aiétélevoiretluiaipromisde

tepasserlemessage.Ben se redresse aussi sec et lève la main devant Jayden pour le couper. Les sourcils froncés, il

dévisagegravementsonmeilleurami.—Jeneveuxpassavoir,çanem’intéressepas.—Jem’endoutaismaisc’estpeut-êtreimportant.Ilneseseraitpaspersonnellementdéplacésiçane

l’étaitpas.Lesmâchoirescrispées, lespoingsqu’ilserreetdesserrenerveusement,Bena l’aircomplètementà

cran.Bordel,maisc’estquisonpère?—Tonpèreestquelqu’und’important?Lola pose la question qui me brûle les lèvres mais que je n’osais pas poser de peur de me faire

envoyerbouler.MaisBenlaregardesansvraimentlavoir,ilsembleperdudanssespenséespendantquesonmeilleurpoterépondàsaplace.—Disonsqu’ils’assoitsurunbelhéritages’ilcontinueàtournerledosàsafamille.—Jesuissûrequechouchouàsesraisons.Enplus,niveauargent,iln’estpasàplaindre.—Mon cœur, tu ne réalises pas à quel point sa famille est fortunée. Les thunes de Ben sont une

broutillecomparéesàcellesdesesparents.Ilsfontpartiedesplusgrandesfortunesdecepays.Depuisletempsquet’eslà,t’asjamaisentenduparlerdelafamilleHarper?—C’estpasvrai!Lola semble sur le cul, apparemment sonmeilleur ami ne se dévoile pas beaucoup puisqu’elle ne

connaîtriendesafamilleoudesonpremieramour,Bluesijenemetrompe.LeregarddeBens’ancredans lemien et neme lâche plus. Il y a quelque chose de déstabilisant, d’insondable, unmélange decolèreetdeconfusion…Jaydencontinuededéblatérersurlesujetmaisjen’yprêteplusattention,tropfocalisée sur le malaise grandissant que je peux lire dans l’azur des yeux de Ben qui virent au bleutempête. Il les ferme, rompantnotrecontact.Laboucheentrouverte, il respire lourdementcommepourtenter de garder lamaîtrise de lui-même.Mais ses doigts cramponnés à la table blanchissent et d’unmouvementbrusque,sachaisevoleparterre.Benselèved’unbondettoiseJaydendetoutesahauteur.Ilesttendu,lespoingsserrés,etjenesaispass’ilseraitcapabled’envenirauxmains.Laméfiancedansleregarddesonmeilleuramimepousseàpenserquisi.—Jecroissurtoutque tuouvresunpeu trop tagueuleencemoment, Jay.J’ai toujours respecté tes

secrets,alorsapprendsàgarderlesmiens.—Jenepensaispasquec’étaitunsecretd’État, justeunsujet sensible.Allez,assieds-toi,mec,on

n’enparleplus.

—Nonmerci,c’estbon,j’aieumoncomptepourcesoir.Jevaisprendrel’air.Tandisqu’ilattrapesaveste,Lolalerattrapeavantqu’iln’atteignelaported’entrée.—Reste,Ben,onn’enparleplus,juré!Jen’aimepastesavoirdehorsquandt’esénervé.Dansungesteremplidetendresse,illuicaresselajoueetluiembrasselefront.—T’inquiètepaspourmoi.Et sans unmot de plus, il referme la porte derrière lui. Je ne sais pas ce qui s’est passé avec ses

parents,ouplusparticulièrementavecsonpère,maisunesimpledisputenelemettraitpasdanscetétat.SeulJaynesemblepasinquietetcontinuedepiocherdanssongâteauauchocolat.Nousrestonstouteslesdeuxfixéessurlui,abasourdies.C’estuncopainça?—Ilvabien,arrêtezdestresser.Ill’aditlui-même:ilestpartiprendrel’air.Traduction:ilestpartià

lachasse.Quandilaurabaisé,ilreviendratranquillement.—Jay!—Bébé,ilvafalloirquetuledescendesdesonpiédestal, tonchouchouestunmeccommetousles

autres!

Sondépartajetéunfroid,etlasoiréetournecourt.Lolan’apasvoulupartiravantleretourdeBen,

maisne levoyantpasrevenirelleadécidédedormirdanssonanciennechambre.Bienentendu,Jayarefusédepartir sanselle.Ducoup lesdeux tourtereauxsontpartis secoucher, encore fatiguésde leurvoyage.Enfin,çac’estl’excusedeJaypourlafairevenirdanslelit!Vulamanièredontillaregardait,jemedisquedormirn’estpasdanssesprojets,entoutcaspastoutdesuite.Etmoi,pourquoijen’arrivepasàallermecoucher?Commeuneidiote,jerestevisséesurlecanapéà

regardercettefichueporte.Iladûsepasserquelquechosedegravedanssafamillepourqu’ilréagisseainsi.Cen’estpasdanssontempéramentdes’emporteraussivite.Jesuisinquiète.Oui,jestressepourunmecquisefoutraitcomplètementdemesétatsd’âmesilasituationétaitinversée.Alorspourquoijerestelààl’attendre?C’estvraimentstupideetenplusjesuiscrevée!J’enaimaclaque,c’estbon,jevaismecoucher ! J’éteins la lumièreet la télé,m’aidantuniquementde la lumièrede la lunepouratteindre laporte.J’espèrequ’ilaprissescléscarjenecomptepaspasserlanuitaveclaporteouverte.Etlà,jenesais pas si c’est la fatigue oumon côté blonde,mais au lieu deme contenter de faire un tour de clé,j’ouvrecomplètementlaportepourvérifiersi,ouiounon,elleestfermée.Graveerreur!JedécouvreBen,lalangueprofondémentenfoncéedanslegosierd’uneblondequisemblefortement

apprécier, au vu de ses gémissements. Ses mains sont cachées sous la minuscule robe qu’elle porte,dévoilantaupassagelamoitiédesoncul.Cen’estpasunsimplebaiser,c’estàlalimitedel’obscène,etjesuispourtantloind’êtrequelqu’undefarouche.Moiquim’inquiétaispourlui,jeleretrouveaveccettefille,ouplutôtcecanonauxjambesinterminables.Bordel,ellefileraitdescomplexesàunmannequin!Unecolèrenoiremenaced’éclater,enversluiquiprenddubontempsalorsquejem’inquiétais,enverscettefillequejeneconnaismêmepasmaisquejedétestequandmême,etsurtoutenversmoiquiairéussiàm’attendrirsurlaviedececonnard.Jayavaitraison,iln’yavaitaucuneraisondestresserpourlui.Tellementprisdansleureffusion,ilsneserendentmêmepascomptequ’ilsnesontplusseulsetjesuis

àlalimitedem’enfoncerlestalonsdanslesoreillespourneplusentendreleursgémissements.Mavoixfermeetforterésonnedanslecouloir,lesfaisantsursauter:—Alorslà,jet’arrêtetoutdesuite,Lolaestcouchéeetmoijevaisenfaireautant.Situveuxtetaper

tapoule,libreàtoi,maisnecomptepassurmoipourlasortirdetonlit!Leschiottesden’importequelbarauraientfaitl’affairepourcegenredefille!

Moi, jalouse de son corps de déesse ?Noooon ! Lesmâchoires contractées,mon serial baiseur nelâchepassaproieduregard,m’ignorantdelonguessecondes.Aumomentoùjecommenceàcroirequ’iladécidédem’ignorerjusqu’aubout,ilsedétached’elleetsetourneversmoi,meflinguantsurplace.—Bordel,fauttoujoursquetularamènestroptôtoutroptard!Lafille,rougedehonte,oudecolèrepeut-être,letoiseenmepointantdudoigt.—Elleestentraindemefairepasserpourunesalopeet,toi,tudisrien?Benhausselesépaulesetsoupirelourdementdevantlananaquisedécomposeàvued’œildevantsa

réaction.—Tumedemandesvraimentde tedéfendre ?Tu semblaispourtant savoir ceque tuvoulais.C’est

justeunplancul,pasunerelationàduréeindéterminée!—Espècede…JenesaispassielleétaitàcourtdemotsousivoirBensoussonvraijourluiaquelquepeudéplu,

maistoujoursest-ilquelagiflemonumentalequ’elleluicolleesttellementjouissivepourmonegoquejelaisseéchapperunlégerrire.Lepoidsdelesavoirsurprisdisparaîtd’unseulcoup,etjerefermelaporteleplusdiscrètementpossible,lelaissantgérerlamerdedanslaquelleils’estmistoutseul.Oui,j’aibiendittoutseul!Je pensais qu’il allait prendre le temps de s’excuser ou du moins de s’expliquer avec elle, mais

deuxièmeerreurdemapart.Cettefois,jenevaispasm’ensortiraussifacilement.Jen’aipasletempsd’atteindre ma chambre, que la porte d’entrée claque et qu’une poigne ferme me pousse violemmentcontrelemur.Cegesteaussibrutalquesurprenantm’arracheunhoquetdesurprise.Desbrasseplaquentdepartetd’autredemoncorps,empêchantmafuite.Macolèrecommenceàmonter.Nonmaispourquiilseprend,cecon?S’ilcroitquejevaismelaisserfaire,ilsefourreledoigtdansl’œil.—Ben,arrêteçatoutdesuiteouje…—Ferme-la!Jedéglutis,lagorgesèche,complètementpriseaupiège.Quecesoitcontrecemuroufaceàsesiris

subitement sombres qui me perforent de toutes parts.Mon cœur s’affole dans unmélange de peur etd’excitation.Sabouche frôle lamienneet sonsoufflechaudse répercutedans toutesmes terminaisonsnerveuses. Ilme fait de l’effet, ilm’en a toujours fait, seulement j’étais trop concentrée surma haineenvers lui pourme l’avouer. Il reste ainsi plusieurs secondes,me laissant le temps de reprendremesesprits,delerepousser.Alorsquejeposemesmainssursespectorauxpourl’éloigner,ilenfermemespoignetsdanssesmainsetmelesbloqueau-dessusdelatête.Complètementàsamerci.Jenesaisplusquoipenserniquoifaire,surtoutquandilmeregardedecettefaçon:désir,colère,envie.Unmélangedetoutcequ’ilpeutéprouver,làtoutdesuite.Seulelalunenouséclairedesafaiblelueur,melaissantjusteentrevoirsesgrandsyeuxbleusquinecessentderegardermabouche.Lesilenceestpesant,électrique.Lesbattementsfrénétiquesdemoncœurdoivents’entendre,ilnepeutenêtreautrement.Quandilsemordlalèvre,jenerépondsplusderienetmoncorpssecambredelui-même,cherchant

davantagesoncontact.Sonregards’assombritetl’emprisedesesmainsseraffermitsurmapeaumaisjene senspas la douleur, je ne ressensque l’envie de ses lèvres surmoi. Il se penchedansune lenteurcontrôlée,mêlantsonsouffleaumien,etalorsque jecroisqu’ilvam’embrasser, ilvientmelécher lecreux derrière l’oreille. Sa langue trace le chemin de ma carotide, qui à cet instant est au bord del’explosion.Sesdoigtsmerelâchentetglissentlelongdemesbras,effleurantlacourbedemapoitrinepourvenirmepresserleshanches.Denouveaulibredemesmouvements,jeretirelenœudquiretientsescheveuxetyglissemesmains.Bordel, jesavaisqu’ilavait lescheveuxdoux!Mespoingssecrispentdanssatignassequandseslèvressefontpluspressantes.Ilsecantonneàélectrisermapeauàcoupde

morsurequ’ilapaiseaussitôtavecsalangue,descendantdemoncouàlanaissancedemesseins.Sansjamais aller plus loin. Ben sait parfaitement ce qu’il fait. Il me chauffe, cherche à faire monter lapression, à l’affût de la moindre réaction de ma part. Je prends sur moi pour ne pas lui donner sifacilementsatisfactionalorsquejecrèved’enviequ’ilm’embrasseàpleinebouche.Jefermelesyeux,cherchantl’airquirestebloquédansmespoumonsenfeu.J’aibaissémagarde,j’enaiconscience,maisjen’arriveplusàraisonner,surtoutquandilreprendsadescente.Majupeseretrousseetsefroissesoussonempressementàtouchermapeaunue.Duboutdesdoigts,ilredessinesensuellementlescontoursdemontanga.Àmesurequesontracés’approchedemonintimité,unevaguedechaleursepropageenmoi.Quand labarrièredu tissu saute etque ladouceurde sesdoigts se rapprochedangereusementdemonsexe,unemoiteurincontrôléeenimprègnel’étoffe.Bonsang,maisqu’est-cequ’ilmefait?Zoé,réagis!Arrête-leavantqu’ilnesoittroptard!Dumajeur,ilcaresselapeaudoucedemaféminité,provoquantdesfourmillementssursonsillon.Ma

respiration s’accélère malgré moi, je meurs d’envie qu’il me touche vraiment. Qu’il s’occupe plussérieusement de l’endroit qui brûle d’anticipation.Mon sexe palpite, comme si les battements demoncœur étaient directement reliés à lui. Frustration, c’est lemot quime correspond le plus à cet instanttellement j’enveuxplus.Puissoudain,c’estcommes’ilavaitentendumasuppliquesilencieuse.D’unelégèrepression,sondoigtglisseentremeslèvresetencaresselescontours.Jen’arriveplusàrespirer,jehappe difficilement des petites bouffées d’air, mon cerveau n’arrivant plus à faire son boulotcorrectement,tropfocalisésurcecorpsétrangerquiembraseleschairsdemonintimité.Bengrognedansmoncouensentantmamoiteurserépandresursondoigt.Àcetinstant,jenevoisplusquelui,nesensplusquesonodeur,neperçoisplusquecequ’ilmedonne,etbonsangcequec’estbon!—Putain,tuestellementmouillée!Nouveaugrognementdesapartpourcorroborersesdires :cequ’ildécouvredoit luiplaire.Etmoi

alors,onenparle?Jesuisauborddelacombustionspontanée!D’unelenteurexagérée, il titillemonclitoris,joueavecmabouledechairquigonfleetsedurcitdeplaisir.Matempératurecorporellegrimpeenflèche.Maiscommentilfaitça?Mesmainsquittentsescheveuxsansréellementtrouverunautrepointd’ancrage. Elles se baladent sur son dos, griffent ses abdos, caressent sa nuque… Un gémissementm’échappe quand il me mord le cou au moment même où il insère un doigt en moi. Il va et vient,s’enfonçantunpeuplusàchaquepassage.Légèrementcourbé,sondoigtappuiesurunezoneultrasensibleetmesjambessemettentinstantanémentàtrembler.Jem’accrochecommejepeuxàsesépaulescarréeset je sens à présent les battements de son cœur. Bordel, Ben est dans le même état que moi. Je necomprendspas,jenecomprendsplus…Pourquoijeressensautantdesensationsavecluialorsqu’ilm’aàpeinetouchée?Tousmesamantsréunisn’ontpasréussiàobtenircerésultat.Ilposesajouecontrelamienne,sabarbefrottantsurmapeaudéjàrougieparlefeuquimonteenmoi.—Sachequejenefaisjamaisdemenacesenl’air…Cesmots qu’il susurre àmonoreilleme font l’effet d’unuppercut.Tout ça n’est rien d’autre qu’un

putainde jeupour lui.Une façon,ouplutôt sa façon,demepunird’avoir fait fuir saproie. Jesuisunsecondchoix, fautedemieuxàsemettresous lamain. Jechercheà le repoussermaissoncorpsvients’écraser totalement sur lemien, son sexe bandé s’écrasant contrema cuisse.Avant que je ne puisseprotesterdavantage,Benenfouitunseconddoigtenmoim’arrachantuncrideplaisir.Ilnemequitteplusdu regard, l’azur de ses iris suspendu aux réactions qu’il provoque dans mon corps. La boucheentrouverte,lesoufflesaccadé,ilregardesanscesselamiennesansjamaiss’enapprocher.Ilenaenviemais,pourjenesaisquelleraison,refusedem’embrasser.J’éprouveuncruelmanquederapprochement.Jerêvedegoutteràseslèvres,desucersalangue.Commence alors une danse rythmée, endiablée à laquelle je suis incapable d’échapper. Ses doigts

fichésenmoietsonpoucequicontinuesadoucetorturesurmonclitorismefontperdrelaraison.Cefeuenmoireprendde l’ampleuretembrase toutsursonpassage.Bordel,maisqu’est-cequ’ilmefait?Àvingt-quatre ans, je vais avoirmon premier orgasme et ilme sera offert parmonmeilleur ennemi. Jel’attendsavecaviditéetdésespoir,melaissesubmergerpardesboufféesdechaleur.Jemanqued’air,mavuese troubleet jeneparlemêmepasdesbruitsridiculeset incontrôlablesquisortentdemabouche.Quandmes jambessontprisesdeviolents tremblementsetn’arriventplusàmesoutenir, jecomprendsquelepointdenon-retourestarrivé.Moncorpsestàlalimited’implosersoussesdoigts.Soudain,ungrincementdeporteàl’autreboutducouloirattirenotreattention.Quelqu’unmarcheàpas

feutrés.Nouveaubruitdeporte.L’undenosinvitésestsûrementalléauxtoilettes.D’ici,onnepeutpasnousvoirmaissicettepersonne,pouruneraisonoupouruneautre,décidedenepasretournersecoucheretvientparici,noussommesfoutus.—Ben…—Chuuuuut!Arrêt sur image : moi, les yeux exorbités, à réaliser subitement que le monde continue de tourner

contrairement à ce que je pensais depuis plusieursminutes.Ben, les doigts toujours enfoncés enmoi,continuant leurdouce torture,unsouriremalicieuxsedessinantsurses lèvres.L’adrénaline, lapeurdenousfairesurprendreaccroissentlessensationsetmesonglesseplantentdanssesépaulespournepasm’effondrer.Soudainlalumièreducouloirs’allume,nousfigeanttouslesdeux.LecorpsdeBens’écrasesurmoi,me fixant droit dans les yeux.Une furieuse envie de l’embrasserme consume de l’intérieur,pourtantjenebougepas,attendantuneréactiondesapart.—Bordel,mec,jesaisqu’onestcheztoi,maist’asunechambrepourça!Cachéeparlecorpsdemonbourreau,jenepensepasqueJaym’aitreconnue.Benchangebrusquement

d’attitude,devenantsoudaintropsérieux.L’intensitédesonregardmeretournel’estomac.Jenesaispascequ’ilsepassedanssatêteàcetinstant,maissesprunellessondantlesmiennesneprésagentriendebon.—Detoutefaçononavaitfini.Claquement de porte. De nouveau seuls. Ben retire lentement ses doigts, coupant net ces exquises

sensations.J’aienviedecrierauscandale.Non,nemelaissepascommeça!Ilsdisparaissentdanssabouche,illessuce,leregardpétillantdedésircommes’ilgoûtaitàlameilleurechosequisoit.Unlégersouriresatisfaits’étiresursonvisagepuis,m’embrassantleboutdunez,soncorpssedétachedumien.Etmoijeresteappuyéefébrilementcontrelemur.Sijebouge,jetombe!—Viensmaintenantmedirequetuneressensrien.C’était justeunavant-goût.C’estavecmaqueue

quejeteferaijouir!Sansunmot,ilm’abandonneaupasdemaporte,pantelanteetfrustrée.

Chapitre13

Zoé

Unesemainequejel’ailaisséglissersesdoigtsdansmaculotte,quej’aifailligoûteràunorgasme…Une semaine que je n’arrête pas d’y penser…Une semaine qu’il fait comme si rien ne s’était passé.Commesisonjeul’avaitfinalementlassé…Pourtantsadernièremenaceprésageunesuite,non?Jesuiscomplètementperdue.Onn’enapasreparléetj’espèrequeçaresteraainsi.Detoutefaçonpourdirequoi?Ilm’aridiculisée

etrabaisséeàl’étatdechienneenchaleurenmelaissantainsisurlepasdemaporte.Jecommenceàmedemander s’il avait vraiment l’intentiond’aller plus loin ou si le fait d’être interrompu lui a sauvé lamise.Bahvoyonsoui,amusons-nousavecZoé,histoiredeluirappelerquimènelejeu!Jerevoisencoresonsouriresatisfait!Siàcemoment-làjen’avaispasétéauborddel’évanouissement,jeluiauraisbienpétélesdents.Bordel,maispourquoijen’arrivepasàêtresoulagéequ’ilnesoitpasalléplusloin?Maconscience me rit au nez, me rappelant que tout ça est dû à un début d’orgasme retombé comme unsoufflet.L’alarme stridente demon téléphone retentit, m’indiquant qu’il est l’heure de quitter l’appart. Oui,

voilààquoij’ensuisréduitepourl’éviteraumaximum:sortiravantqu’ilnerevienneduboulot.Jefermemonordinateur,rangemonagendaquiseremplitdejourenjour.MissJuliam’adonnédesesnouvellesd’ailleurs.J’aireçuunautremaildesapart:

SalutZoé,encoremercipourtonaide.

C’estlapremièrefoisquej’osemefairecoachersurmavieintimeetjesuisraviequelecourantpassebienentrenous.J’aipasséunagréablemomententacompagnie.Vivementla

prochainefois!

Cettefilleestladouceurincarnée.Douceetgentille,illuimanquejusteuncoupdepoucepouroser

s’affirmer.Jesuistouchéequ’ellerevienneversmoi.Ellemeplaît!Bref, jepassemes journéesau téléphoneavec lesclientespourqui jesuisdispoH24,organisedes

soiréesdegroupeetcontinueàpromouvoirmonsite.Jevoisgrandetj’aidesidéespleinlatêtemaisjemanquecruellementdetemps.Monthème«Pigeonencostard»faitbeaucoupparleretj’ail’impressionquetouteslesfemmesvénalesdelavillesesontdonnélemotetaffluentunpeupluschaquejour.Ellessontprêtesàdépenserunbonpaquetdebilletspourmettrelamainsurunhommequidoubleraleurmise.Jetrouveçaaffligeantmaisc’estl’argentquimènelemondeetjecomptebienenprofiter,dumoinstantquecesharpies aurontbesoindemoi.Cequime fait rire c’est qu’ellesveulent toutesunmeccommecelui de la photo :Ben ! Il a fallu trouver la brillante idée de le faire bosser pourmoi pour que lespremièresdemandesarrivent.Ilfaitsonpetiteffet…Est-cequ’ilestaucourant?Nooooon!

Lerappelsonnequelquesminutesplustard,signequ’ilfautquejemebougeleculsijeneveuxpasmeretrouvernezànezavecEdwardauxmainsd’argent.Jemechangeàlahâteetenfilemesbasketspourmonfootingjournalier.Riendemieuxqu’unpeudesportaprèsunejournéeàm’userlesyeuxsurl’écranet àm’exploser les tympans au téléphone à cause des voix nasillardes demes clientes chéries. Cinqminutesplustard,jesuisdéjàdanslarueendirectionduparc.Monsourires’accroîtaufuretàmesureque j’approche de la grande barrière en fer forgé. Owen, mon beau joggeur, est encore en pleinéchauffement.Installédansl’herbe,iltravaillesesabdos.Jeralentis,profitantduspectaclequ’ilm’offre:lesmainscroiséessurlanuque,lesjambesrepliées.Jedétaillesesbellesplaquettesdechocolatquisedessinentsousl’effort.Échauffementsanstee-shirt,lerêvepourmesyeux!Quandj’arriveàsahauteur,jemepostedevantluietluiadressemonplusbeausourire.—Salut,beaugosse!—Bonjour,belleblonde!Jecommençaisàcroirequetuneviendraispasaujourd’hui!—Etloupercebeauspectacle?T’esmalade!Non…Jesaismefairedésirer!—T’aspasbesoindeçasiçapeutterassurer.Unsourireencoinetdesyeuxcharmeurs,Owenmedévoreduregard.Ilselève,s’essuielevisageet

remetsontee-shirt,dommage!Çafaitdeuxlonguessemainesdepuisquel’ons’estéchangénosnuméros,quel’onflirte,maisilnesemblepasdécidéàsauterlepas.Jenesaispass’ilestvraimentintéresséparmoiousipourluiaussic’estjusteunjeu,maisçan’avancepasentoutcas.J’ensuisàmedemandersilesAméricainsnesontpasencoreplusprudesquelesfemmes.Jen’aipascouchéavecunhommedepuisquejesuisicietjecommenceàressentirlemanque.Jenesuispasuneobsédéeniuneaccro,maisj’aidesbesoinsmoiaussi!C’estpaspourleplaisirquel’actemeprocurecarcen’estjamaisl’extase,maisbon, j’ai des pulsionsquandmême !Et puis il faut avouer qu’avec les sensationsque j’ai éprouvé lasemainedernièreavecBen,jemedemandesimonproblèmenevientpasdesedébloquerdelui-même.Si des doigts ont réussi àme faire autant d’effet, j’ose à peine imaginer ce que je pourrais ressentiravec…labête!AvecOwen,onsevoittouslesjours,ontranspireensemble,ons’essouffle,ontestenoslimites…mais

toujourssurlebitume.Jeveuxlamêmechosemaisdansunlit,bordel!Ouunmur,unemoquette,mêmeunetableferaitl’affaireaupointoùj’ensuis.Jeveuxdusexequoi!—Etsiaujourd’huionallaitplutôtprendreunverre?Jestoppenetmesétirementsetleregarde,interloquée.Merdej’aipenséàvoixhaute?—Euh…Ouisituveux,enfinjeveuxdireavecplaisir!Vucommentjeprendsplaisiràflirteraveclui,jenevoispascommentj’auraispurefuser.Jen’attends

que ça depuis des jours ! Passer à la vitesse supérieure et vérifier simon corps fonctionne à présentcorrectement. Quoi de mieux qu’un bel homme comme lui pour réaliser ce test ? L’image de Bens’immiscemalgrémoidansmatêtemaisjelachasseaussisec.Tandisquel’onsortduparc,letempssecouvreetlespremièresgouttescommencentàtomber.Avant

depouvoirréagir,c’estuneaversequinoustombesurlatête.Owenretiresaveste,dévoilantdesbicepstropgrospourpasserinaperçussoussontee-shirt,etnousabriteendessous.C’estdansdesriresnerveuxquel’onatteintunebrasserie…fermée.Maisquelgérantfermesoncommerceenfinde journéequandtoutlemondecommenceàsortir?Apparemmentquelqu’unquisavaitquelesruesallaientêtredésertesàcaused’untempsdemerde.Owen,lesbrastoujoursenl’air,noscorpsserréssouscetabridefortune,medétailled’undrôled’air.

C’estlafoliedanslarue,lesgenscourentdanstouslessens,pressésdesemettreausectandisquenousrestonsfigésenpleinmilieudutrottoirànousregarder.Sesirismaintenantsombresépousentlestraitsde

monvisage,s’enfoncentdanslesmiensavantdes’attardersurmeslèvres.Jedéglutis,etsamainseposesurmonbrasrecouvertdegouttelettesd’eau,propageantainsiunirrépressiblefrissonsurmapeau.— J’habite juste derrière. J’ai du café, des serviettes et accessoirement une douche si tu veux te

réchauffer.Partante?—D’accord.Quoidired’autrealorsquejem’imagineàquoiilpourraitressemblernudepuisqu’ils’estretourné

surmoi lapremière fois? Il retire saveste,nousexposantà lapluiequi sedéchaînesurnosvisages,avant dem’attraper par lamain et de semettre à courir. Il nementait pas, nous tournons dans la rueadjacenteetils’élancedanslepremierimmeuble.Sansmelâcherlamain,Owenm’emmènejusqu’àlaportedesonappartement.Tandisqu’ilinsèresaclé,ilnecessedemejeterdescoupsd’œilattentifs.—Vapascroirequec’étaitunpiège.Pourtedirelavérité,tueslapremièrequientreicidepuismon

divorce.Laportes’ouvreetilsedécalepourmelaisserpasser.Lescheveuxcollésauvisage,desgouttesd’eau

quidévalentmesjoues,mesbasketsquicouinent,j’entre.—Jecommenceàbienteconnaître,Owen.Dumoinsassezpoursavoirquetuesquelqu’undebien!—Jetrouvequetuasunehauteestimedemapersonne.Jepourraistrèsbient’avoirentraînéejusqu’à

chezmoipourtoutautrechosequ’unsimplecafé.Peut-êtrequecequej’aientêten’ariendegentil.—Owen,làtoutdesuite,jesuisloindevouloirquetusoisgentil…—Zoé,làtoutdesuite,jesuisloindevouloirêtregentil…Moncœurfaitunbondetmesnerfscrépitentd’impatience.Sespasdansmondosserapprochent.Je

prendspleinementconsciencedesaprésencelorsquesonsoufflecaresselecreuxdemanuqueetquesesmainss’approprientmeshanches,meplaquentàsontorse.Monsouffledevienterratique.—C’est-à-dire…?—Hum…Ehbien,pourcommencer…Àpeineletempsderéagirqu’ilmetournefaceàluietquesaboucheécraselamienne.Sonbaiserest

fermeetpossessifcommejelesaimeetquandsalanguedemandeaccès,jeleluioffreavecplaisir.Sesmainsagrippentfermementmeshanchesetmefontreculerdanslapiècequejen’aipaseuletempsdedécouvrir.Mesjambesbutentcontrequelquechoseetlaseconded’aprèsjesuisaffaléesurlecanapé.Ilsedétachedemoiet,sansmequitterdesyeux,commenceàsedéshabiller.Quandilretiresontee-shirt,mesyeuxseposentavecgourmandisesuruntatouagetribalquirecouvresonflanc.Jel’avaiszappétoutàl’heurecelui-là…J’adore!Cecôtémauvaisgarçonmeplongedansunétatd’excitation totaleetc’estsansuneoncedegrâceque jemedébarrasseàmon tourdemes fringues trempées.Nus tous lesdeux,nousnousdétaillonsuninstantavecenvie.Jevaisprendremonpied,jelesens!À genoux devantmoi, il se jette de nouveau surma bouche comme un affamé alors que sesmains

impatientescourentdéjàlelongdemoncorps.Seslèvresdescendentdoucementetviennenttitillermestétonsdurcis.Salanguejoue,memalmène,maislaseulechoseàlaquellejepensec’estàsescheveuxmouillésquimechatouillent.Merde,Zoé,c’esttonmoment,concentre-toi!Sesmainsglissentsousmescuisses,empoignentfermementmesfessespourmetireràlui.Salangue

traceunsillonmouilléjusquesurmonnombriloùilnes’attardepasetlorsquesonsoufflechauds’arrêtesurmon intimité, jemedemandesi sa langue feradavantagedemerveillessurmonclitoris,messeinsétantrestéssurleurfaimetsuruneputaindefrustration.Uncunnidèslapremièrefois?Jesuissurprisemaisaprèstoutpourquoipas,surtouts’ilestexpertenlamatière.Aupremiercoupdelangue,mesmainss’insinuentdans ses cheveuxpourqu’il ne s’arrêtepas. Il comprend lemessageet s’attelle à sa tâche

avecdévotion…Beaucouptropdedévotion!Sérieux,c’estlimiteducannibalismeàceniveau!Maisilmefaitquoi,là?Ilaspire,lècheavecunefrénésiequimefaitpenserqu’ilnedoitpasavoirmangéetj’aipeurqu’ilnefinisseparvouloirmegoberl’entrejambe.Quelqu’unluiadéjàditquelemot«moule»n’étaitqu’unemétaphore?Doucement,ilinsèreundoigt,puisdeuxetlesbougeenrythme.Jerelâchesatignassequejetenaisfermementetmelaissetombersurlecanapé,mordantmonpoingàpleinesdents.Mevoyantainsi,ilpoursuitsatorturebuccalesansmelâcherduregard.Jemordsunpeuplusfortmesdoigts,medemandantcombiende tempsjevaisgarder les tracesdedents.Non,moncoco, jene jouispas…C’estuniquementpouréviterderiredevantlascèneburlesquequetum’offres!Pourabrégersessouffrances,ouplutôtlesmiennes,jereplongeavecdéceptiondansmesvieilleshabitudes:lasimulation,dont je suis devenue la reine incontestable. Actrices porno et filles de joie ne m’arrivent pas à lacheville.Lapreuve, devantmes cris déchirés et rauques, son excitationmonted’un cran et, lesmainstremblantes,ilouvreuntiroirdumeubled’àcôtéetenextirpeunpréservatif.—J’aitellementenviedetoi…Ça,jelevois!Dommagequejenesoispasdanslemêmeétatd’esprit.Ladernièrechancerésidedans

son impressionnante érection.Allez,Zoé, rienn’est perdu ! Je lui souris tandis qu’ilm’allonge sur lecanapé avec délicatesse. Cette première fois depuis son divorce est importante pour lui, je le sens àtraverssonregard.Owenm’embrassetendrementetdansunelentepoussées’enfonceentièrementenmoi.Ses va-et-vient sont doux, il se délecte des sensations que ça lui procure tandis quemoi jeme poseseulementunequestioncritique:pourquoiest-ilséparédesafemme?Siçasetrouvec’estparcequ’ils’yprendcommeunmancheaulitetqu’elleenaeumarre…Bordel,j’aimisésurlemauvaischeval,çanepeutêtrequeça!Benm’amontréquejepouvaisjouir,doncleproblèmevientforcémentdelui!Jeneveuxpascroirequec’estencoremoil’handicapéedusexe.Jetournelatêteàlarecherched’unehorloge,j’ai l’impressionqueçafaituneheurequejesuis là, lespattesécartéesàmesentiroppresséeparsonpoids.Parceque,oui,c’estlaseulechosequejeressens.Dansundernierrâle,iljouitetjel’imitesansgrandmal,jouantmonrôleàlaperfection.J’aiapprisàfairesemblantquandj’aicomprisquelemanquederéactiondemapartvexaitmespartenairesetsoulevaitunetonnedequestionsauxquellesjen’avaispasenviederépondre.Ilresteallongésurmoi,mecouvrantdebaisersdanslecou,m’enfonçantunpeuplusdanslecanapé

alorsquejen’aiqu’uneenvie:mebarrer.Jesuisdéçue,ilmeplaisaitpourtantbeaucoup,cemec.Maisvoilà, comme à chaque fois, mon non-orgasme va de paire avec la durée de mes relations. Je suishabituée,j’enaifaitmondeuil.Jemecontented’unelongévitélimitée,puisquesansconnexionsexuelleunerelationnepeutpasmarcher.OwenvientdesignerlafindesonCDD.Quandilselèveenfin,jerécupèremesaffairesàlahâteetavantqu’iln’aitletempsdejetersacapote

àlapoubelle,jesuisdéjàprête.—Tut’envasdéjà?—Oui,jesuisdésoléemaisjetravaillecesoiret,sijenemedépêchepas,jevaisêtreenretard.Bon d’accord, je veux surtout fuir mais ce n’est qu’un demi-mensonge puisque j’ai réellement du

boulot ce soir.Mapremière réunionpour femmesbrisées. Je suis ravie et impatientede rencontrer legroupe.J’enaidéjàmarredecesfemmesvénalesquipètentplushautqueleurculetsontprêtesàsauter(etsefairesauter)surlepremiermilliardairevenu,aussimocheouvieuxsoit-il.Dupouce,jeluicaresselajoueavantdeplanterunbaisersurseslèvrespouratténuersadéception.—OK,onsevoitbientôtalors?—Biensûr…Jet’appelle!Jeclaquelaporteavantqu’ilnecomprennelesensdemesmots,parcequebienévidemmentc’estune

excusebidonqueleshommesserventsouventàleurscoupsd’unsoir.Jedevaisêtreunhommedansunevieantérieure.Lapluieacesséet jerentred’unpaspresséàl’appart.Unedoucherapideet jem’enfermedansma

chambreaveclamusiqueàfondtoutenmepréparant.Oublier leproblèmeOwenetmeconcentrersurmonfuturrendez-vous,voilàcequejedoisfaire.J’airéussiàéviterBenjusque-là,prionspourquej’aieletempsdesortiravantd’avoiràlecroiser,uneseuledéceptionàlafoissicen’estpastropdemander.La première impression est primordiale surtout dans mon métier, j’opte donc pour une petite jupe

crayon,unechemiseceinturéepourlecôtéprofessionneletlesstilletosnoirsquej’aipiquésàLolapourle côté glamour.Unedernière touche de parfumet je suis fin prête. Jeme regarde dans lemiroir unedernièrefois:maquillagenickel,coiffurevalidéeetfringuesadaptées.LeProfesseurMamourestprête!J’éteinsmaplaylistetsorsdemachambreentrombepourgrignoteruntrucvitefaitavantdepartirmaisj’aiunmouvementdereculquandjemanquedepercutermameilleureamiequisetientdevantmaporte.—Tum’asfaitpeur!Qu’est-cequetufouslà?Etcommentt’esentrée?—Bah,sympa,l’accueil!Elle tourne les talons et se dirige vers le frigo, où elle se sert tranquillement un soda avant de

s’installersurunechaisedubar.J’aiàpeineeuletempsdem’habitueràelledansl’appart,maislavoiraussiàl’aisedansceslieuxmerappellequ’elleyaquandmêmevécudenombreuxmois.—J’aitoujourslescléssurmontrousseau.NeledispasàBen,ilseraitcapabledemelesreprendre

justepourmerappelerqu’ilestvexéquejesoispartie.Jem’installeàcôtéd’elleaprèsavoirchopéunepommeaupassage.—Tunemangespas?C’estpassérieux,Zoé,surtoutpourunesportivecommetoi.—Oui,maman, je sais ! J’ai pas le temps deme faire la popote ce soir et commemon boulet de

colocatairenesaitpasfaireàmanger,jemecontenteraid’unepomme.Jecroquededanssoussesgrimaces.Ellenesupportepasquandjel’appelleainsimais,d’aussiloin

quejemesouvienne,ellem’atoujoursmaternée.«Non,Zoé,situtecouchestard,t’arriverasjamaisàteleverdemain…Attention,Zoé,si tuenvoiesdessignauxpareils, leshommesvont teprendrepourunefillefacile…Révisetescours,Zoé,situneveuxpasredoubler»,etj’enpasse!—Etjesupposequetuespartiefairetonsportsouslapluie?Voilà, qu’est-ce que je disais ! Elle va bientôt me dire que je vais tomber malade ! Cette fille

m’exaspère!Sijeveuxunemère,jen’aiqu’àretournerchez…lasienne.—Ouij’aifaitdusportmaispasauparc,situveuxtoutsavoir.Jel’aifaitàl’abridelapluieetdes

regards.—Hein?Jelèvelesyeuxaucieldevantsonexpression«moipascomprendrecequetoidire».—Owenm’afaitvisitersonappart…enfinsonsalontoutdumoins.Jemelèvepourallerjetermontrognondepommesoussonregardahuri.Elleselèved’unbondpour

merejoindre.Çayest,j’aiaiguisésacuriosité.C’estlimitemalsainchezelle,cetraitdecaractère.—Bahalors,raconte!Tu…C’étaitbien?J’ai envie de lui dire que son meilleur ami m’a fait plus d’effet avec juste deux doigts mais je

m’abstiens sinon je suis foutue. Les questions vont pleuvoir, elle va être excitée, énervée, fâchée,heureuse…bref, la tornadeLolavaentrerenactionet jen’aipasle temps…Etsurtoutpasl’enviedepartagercemoment.Jen’arrivedéjàpasàcomprendre,alorsmettredesmotsdessusestimpossible.

—C’était…constructif.Disonsqu’ildevaitsansdoutetesterunenouvellefaçondefairel’amour.—Oh,Zoé,arrêtedetournerautourdupotetdis-moi!Jeluifaisface,lesbrascroisés,unlongsoupirs’échappantdemeslèvresdevantsaténacité.Elleme

parlesanscessedesonmecquiluifiledesorgasmesàrépétitionetmoijesuisjustebonneàluirappelerqu’elleaunechanceinouïe.—J’aieuledroitàuncunnidepieuvreetaumissionnaired’unebaleine.Satisfaite?—Jenesaispassic’estparcequej’aieuunelonguejournéemaisjenecomprendsabsolumentrien!

Maisjecroisdevinerqueçan’apasétéconcluant?Ellem’adressesonregardspécial«mapauvre, jecompatis»avecsapetitemouerempliedepitié.

Commesij’avaisbesoindeçapourmesentirmieuxetrelativisercenouveléchec!—T’aspas trouvé lebon,c’est tout !Jesuispersuadéeque lemecqui te feragrimperauxrideaux

n’estpasloin.Tuvasfinirparletrouver,machérie!Commentluidirequeleseulquim’aitfaitentrevoircettepossibilitésetrouveêtresonmeilleurami,

celuiquiprendunmalinplaisiràmepousseràbout?Jecrèved’enviedemeconfieràelle,enparleràvoix haute me ferait du bien et ses conseils seraient les bienvenus… Mais c’est tout bonnementimpossible.Jeluipassesouslenezenévitantdelaregardercarellemeconnaîtparcœur.M’éloignerd’elle,voilàquivamepermettredegardercepetitsecretpluslongtemps.—Toi,tumecachesquelquechose!Merde!Ellemesuitjusqu’aucanapéoùjem’affalesanséléganceensoufflant.Assiseàcôtédemoi,

sesyeuxcherchantlesmiens,elleestàl’affûtdelamoindreinfo.—J’aifaitlaconnaissanced’unhommequi,jepense,pourraitleverlevoilesurmonproblème.Mais

avecluic’estpaspossible.—Pourquoi?Bordel,commentjevaism’ensortir?Lacuriositéestunvilaindéfaut,Aliceauxpaysdesmerveilles

enestl’exemple.Jesuissonlapinblanc!—Jepenseêtreunjeupour lui,unesortedetrophéequ’ilveutà toutprixremporter.Jesuisentrée

danssonjeuetjenesaispluscommentensortirindemne.—Fuis-le,c’estuncoupàcequetusouffres.Lesmecsdanssongenresonttrèsdangereux!Unrirejaunes’échappedemeslèvresdevantsaminesérieuse.Ellen’aeuquedeuxgrandeshistoires

d’amour.Lapremièreavecunhommequil’adétruitetlasecondeavecJay,avecquiellefileleparfaitamour.Çan’apastoujoursétérosemaisjamaisellen’aétédanscetteposition.Pourtant,ellemedonnequandmêmedesconseils.—Etqu’est-cequetuensais,Lola?Saufsitum’ascachéuneliaison,cedontjedoute,tun’asjamais

étédanscettesituation.—Nonc’est vrai,mais je saisquandmêmedequoi jeparle !Benest l’exemplemêmede ce type

d’homme.Tului lancesundéfi,n’importe lequel,et ilneserapassatisfait tantqu’iln’aurapasgagné.Pourluitouslescoupssontpermispouratteindresonbutalorsjesaiscommentsecomportentcesjoueurs!Jesourisdifficilementfaceàcetterévélation.Netrouvantrienàyredire,jemecontentedehocherla

tête.Tuasraison,Lola,saufquejenepeuxpasfuir,c’esttoiquim’asmisedanssesfilets.Ledouten’estplus possible, à ses yeux je suis uniquement attrayante par le défi que je représente.Au fonddemoi,j’espéraisluiplaireunminimum,maiscerapprochementétaitcalculé,ilnefaitrienparhasard.Ilneme

laissepasindifférenteetillesait,resteàsavoirsijesuisdetailleàrivaliseraveclui.—Pourenreveniràtonjoggeur…—Owen!—Oui,jemedisaisqueleproblèmevientpeut-êtredelui!—Ettufaisquoidetouslesautres?J’ensuispasàmonpremieressai,Lola!—Ehbien,peut-êtrequ’àchaquefoistutombessurlesmauvais?Oualorsilsavaienttousunepetite

bite!Ellemeregardeenhaussantlesépaules,avantd’enrire.Mêmesiellen’ycroitpas,çaaaumoinsle

méritedemedétendre.—Impossible,sit’avaisconnuRémi,tusauraisquelesgrossesnemefontpasplusd’effet!—Grosse…grosse…toutestrelatif!Elleétaitgenre…commeça?Lesdeuxindexenavant,ellelesécartejusqu’àindiquerunemesure.Jerigolequandjeréalisequ’on

estrepartisdanslescomparaisonsquel’onfaisaitadosàproposdenospremièresexpériences.—Ehbien,enfait,c’étaitplutôt…Commeça!Duboutdesdoigtsjepincesesindextoujourssuspendusdanslevidepourlesécarterdavantage.Je

n’aipaslecompasdansl’œilmaisj’aiplutôtbonnemémoire.Limiteunanacondaentrelescuisses,cemec,commentoublier?Laboucheprêteàsedécrocher,Lolapassedesarègleimaginaireàmoi.Lesyeuxexorbités,elledoit

sedemandercomment«toutça»apurentrer.Ehoui,lecorpshumainasesmystères,carmoinonplusjen’ycroyaispas!—Etavecunequeuecommeça,t’aspasréussiàprendreduplaisir?—Quoi?Nous sursautons toutes les deux devant Ben qui s’est matérialisé devant nos yeux. Que la honte

m’achève!Tuez-moiou,mieux,tuez-le,lui!Habilléd’unsimpleboxerblanc,uneservietteautourducouetlescheveuxencoremouillés,ilsortvraisemblablementdeladouche.Pendanttoutcetempsilétaitlà,l’enfoiré!Qu’a-t-ilentenduexactement?IlsebaissepourdéposerunbaisersurlajouedeLolaquiaviréaucramoisi.MacopineselèvedanstoussesétatsfaceauriredeBen.—Non,t’aspasentenduqueZoéétaitfrigide!Jemelèveàmontour,horsdemoi.—Maisc’estpasvrai,tais-toi!Lamaindevantlabouche,ellemeregardeavecdesyeuxexorbités.Troptard,traîtresse,t’asdéjàtout

dit.Sielleestrougedehonte,moijelesuistoutautant,maisdecolère.Ellen’imaginepasquellebombeellevientdelâcherdevantlui.Etunsecretdemoins…—Aucunefillen’estfrigide,princesse,etencoremoinstacopine.Jesenssonregardsurmoi,attendantuneréactiondemapartmaisjepréfèremeconcentrersurLola

quejenelâchepasduregard.Tunet’ensortiraspasaussifacilement,traîtresse!Endisantça,ilrepenseforcémentàlamêmechosequemoi.Dansungestemécanique,Lolaattrapeson

sacetsedirigeverslaporteenbafouillantdesexcuses.Laseconded’après,ellelaclaqueenmelaissantseuleavec lui.Son regardest toujoursbraquésurmoi,et il attendque je réagissemais jenesuispasd’humeur.Jen’aipasenvied’enparleretencoremoinsaveclui.Detoutefaçon,ilesttempsquej’aillerejoindremesclientes.

—Tuveuxquejetedise?—Non!Je l’ignore tandisque jepassedevant luipour récupérermon sac restédansmachambre.Seule, je

soufflenerveusementenespérantreprendreunecertainecontenanceavantderevenirdanslesalonoùjesuissûrequ’ilm’attend.J’aiàpeinefaitunpasquejeletrouveadosséaumuràm’attendre.—Jevaistedirequandmême,unavisdemect’aiderasûrement.Alorssoitcesmecsnesaventpas

manier leurqueue,soit leproblèmec’est toi.Et jepencheraisplutôtpour lasecondeoption.Faut leurdonnerenvie…situt’yprendsmal,pasétonnantqu’ilsnetedonnentpascequetuattends.Alorsquejecomptaisl’ignorer,jemeretourneverslui.Iln’apaschangédeplaceetmedévisageavec

ceregardtroublantquilecaractérise.—T’esentraind’insinuerquejenesaispasm’yprendreavecleshommes?—Jedisjustequ’ilfautsavoirdonnerpourrecevoir.—Etdonc,cequeje«donne»n’estpassuffisantpourquelemecenquestionmefassegrimperaux

rideaux?—C’esttoiquiviensdeledire!Ilhausselesépaulesavecdésinvolture,latêtepenchéeetcesourireencoinquej’aiaussitôtenviede

luifaireavaler.Appuyécontrelemur,cesmusclesparfaitementciseléssontmisenévidence.Mesyeuxtombentsursespectoraux,sesabdossibiendessinés,sansparlerdesaceintured’Adonisdontunepartieest cachée sous son boxer. Je fais tombermon sac àmes pieds,m’avance lentement vers lui, faisantclaquer mes talons au sol sans le quitter du regard pour me planter juste devant lui. Il se redressedoucement,anticipantsûrementmaripostemaisjen’enfaisrien.Dumoinspascommeill’imagine.Duboutdudoigt, je tracedespetits cercles sur son épaule.D’unhaussementde sourcil, je le fixe enmerapprochantunpeuplusdelui.Assezprèspoursentirsonsouffle,pourfrôlerseslèvres.Doucementmaissûrement,jedescendssursespectoraux,glissesursesabdosavantqu’ilneposesamainsurlamienne.Pasassezfermepourmestopper,pasassezsouplepourmedonnersonaccord.—Tufaisquoilà?—Jeteprouvequejesaisparfaitementcommentfaireplaisiràunhomme…Jeluirépondsdelamêmemanièrequelui,dansunmurmure.Meslèvrespuislapointedemalangue

effleurent sonoreillependantque,encoresoussonemprise, jemarquedemesongles ledessindesesabdos.Malgré son apparentedécontraction, lesmusclesde sonventre se crispent, et jeme réjouisdesaisir l’éclat d’excitation ornant ses prunelles turquoise. Sa prise sur mon poignet se resserredélicatement.—Nejouepasàçaavecmoi,Zoé,carilsepourraitqueçaseretournecontretoiet…Je ne lui laisse pas le temps de terminer sa phrase,me libère sansmal de samain et continuema

descentejusqu’àfrôlerlerenflementdesonentrejambe.Leboutdemesdoigtstourneautour,remontesursacuisse,sonaine,flirteavecl’élastiquedesonboxer.Sonsouriredisparaîtaufuretàmesurequemapaumeglissesurlecoton,qu’elleépouselescontoursdesondébutd’érection,pourfinirparleprendrefermement en main. Son regard est braqué sur moi alors que, à travers le tissu, je caresse son sexebrûlant. De plus en plus dur, il enfle dans ma paume, gonfle, autant quemon ego. Je déglutis enmeretenantd’écarquillerlesyeux.Bordel,sacréebête!Jesuisenpleineconfusion,jevaisjusqu’auboutdemonidéeouj’arrêteavantqueçanedégénère?

Ducoindel’œil,j’observelesouriredeBenrevenirmenarguer.Sûrementparceque,commeuneconne,jemesuisfigée,lamainsursaqueue!Ahnon,Ben,tunevaspast’entireraussifacilement:tuvasmele

fairepayer,pasdedoutelà-dessus,maishorsdequestionquejeperdelafaceunedeuxièmefois!D’unemainferme, j’appuiesurson torse jusqu’àcequesondossecolleaumur,plaquemoncorps

contre le sien, ma tête logée au creux de son cou. Je ne sais pas si c’est son pouls, le mien, ou laconjugaison des deux qui bat de façon désordonnée, mais je ne perçois plus que ça. Ces intensespulsations se répercutent jusqu’au tréfondsdemesentrailles alorsquemon index,puismonmajeur sefaufilentavecunelenteurmaîtriséesousl’élastique.Souscettezoneinterditequejem’étaispromisdenejamaisfranchir.Maislavengeanceestunplatquisemangefroidet,Ben,jecomptebienlebouffertoutcru!Mes doigts légèrement tremblants se referment sur sa verge et entament un lent va-et-vient qui lui

arracheunrâledeplaisir.Sapoitrinesesoulèvecontrelamienne,sesmainsosentdévalermachutedereins,enveloppermesfesses.OK,Ben,1partout!Quoique,demoncôté,jesuisàpeuprèspersuadéequesongesteestassociéàunréflexedeplaisiretnondedomination.Monpoingsecrispesurladouceurde sa peau, poursuit sa torture, tentant d’ignorer ces petites décharges crépitant jusqu’au bout demesdoigts.Jemeconcentresurlui,sursamanièredepressermeshanches.—Commeça,jem’yprendsbien?Ilravalesasaliveetjenepeuxquesouriremalgrécetteenvieobsédantequiinondemonbas-ventre.

Seslèvressurvolentmamâchoiretandisquesamainaccentueunpeulerythmedemonbras.—C’estunbondébut…—Eneffet.Siseulementtusavaiscequejesaisfaireavecmabouche…Je laisse roulersurma langue lessyllabesduderniermot. Justepoursavourer l’emprise indéniable

quej’aisurlui.Ils’humidifieleslèvresavantdemordrededans,defermerlespaupièresenrejetantsatête en arrière. La vision est sublime. Des images brûlantes s’implantent dansmon cerveau, et je lesrefouleaussitôt.Siseulementjepouvaismoiaussil’embrasser,mesouvenirdesongoût,justeunefois.Non,stop,çavatroploin:netelaissepasavoir,c’esttoiquimènesladanse!Emprisonnédansmatoile,sonbassinaccompagnechacundemesmouvementset l’unedesespaumesvientenveloppermanuque,merapprochantdelatentationdesabouche.Maintenant!Audacieuse, je coulisse une dernière fois avant de retirer lentement ma main en faisant claquer

l’élastiquesursonventre.Allez,Ben,dégustemapetitevengeance.Toinonplustunejouiraspascesoir!Ilredresselatête,lesyeuxencorefiévreuxetj’aienvied’yretourner,deluidonnercequ’ilattend.Delesoulager.Maisaulieudeça,jemeredresse,melibérantdelachaleurdesoncorpsetluiadresseunsourire (faussement peut-être) satisfait. Me détournant de son expression mi-amusée mi-fascinée, jereprendsmonsacavantdemedirigerverslaporte.J’entendsunrirenerveuxdansmondosetjel’imaginepassersesmainssursonvisage,sescheveux,en

comprenantcequ’ilvientdesepasser.—Bienjoué…Nonvraiment.Maistuneperdsrienpourattendre.Sansmeretourner,jeluiadresseunsignedelamainavantdefermerlaportederrièremoi.Unefois

seule,jem’effondrecontrelemurpourrecouvrermonsouffle.Jesuisenretard.Lesfillesdoiventdéjàcommenceràarriver,etj’auraisdûêtrelàpourlesaccueillir.

Pourtant,jeprendsquelquesminutespourmoi,pourmereprendre.Jenem’étaispasrenducompteàquelpointmoncœurbattaitvite.Jesoufflefortpourretrouverunpeud’aplomb,etc’estlatêtehaute,fièredemoncoup,quejem’envais.

Chapitre14

Ben

Je tourne commeunputainde lion en cage.Bordel, j’arrivepas àmecalmer !C’estmêmepire envoyantlesheuresquidéfilent.Jetireunedernièrelatteavantdejetermaclopeparlafenêtre.Soupir.3heuresdumat’etellen’est toujourspasrentrée.Jevoulaisattendrequ’ellereviennepourluirendrelamonnaie de sa pièce et me voilà àm’inquiéter. Un samedi soir à l’appart, seul comme un con.Monrépertoiretéléphoniqueestblindédeplansculquiauraientdequoim’occuperetsurtoutmesoulagervulatriquequejemetape,maisnon,jeveuxêtreautaquetquandlafurieferasonretour.J’aipassétoutelasoiréeàpenseràsamaindansmonboxer.Jeveuxplus,bienplus.Cetavant-goût

n’afaitqu’attisermonappétit.Jevenaisàpeinedesortirdeladoucheet,pourtant,j’aidûenreprendreune.Froide.Siçaachangéquelquechoseàmonétat?Absolumentrien!Mamaintenantfermementmonérectionquin’avaitpasdésenflé,j’aidûmesoulagermoi-même.Çan’afonctionnéquelorsquel’imagedeZoés’estimmiscéedansmatête.Vafalloirquej’analyseçaplustard.Merde,maisqu’est-cequ’ellefout?Jesuisclaqué,àboutdepatience.Alorspourquoij’arrivepasà

allermepieuter?Aprèstout,ellen’apasdecompteàmerendre.Qu’ellesedébrouilletouteseule,tiens!J’éteinsleslumièresetm’apprêteàabandonnerquandj’entendslaclédanslaserrure.Jepréparemon

accueil:brascroisésetregardnoir.Ellevamorfler.—Putaint’asvul’heurequ’ilest?—Chuuuut!Faispasdebruitsinontuvasréveillerlecasse-couilles!Elleparledemoi là ?Chaussures enmain, ellepose surmoiun regardvitreux enplaçantundoigt

devantsabouche.Elleclaquelaported’uncoupdetalonetgloussebêtement.—Oups…Troptard!Ouais,d’accord.—Maist’escomplètementsaoule,maparole!—Bahtusaiscommentçasepasse:unverre,puisunautre…aufinaljenesaismêmepluscombien

j’enaibu!Ellerigoled’unemanièrequejenereconnaispas.Sansretenue.Seschaussuresetsonsacvolentdans

l’entrée, le contenude cedernier s’éparpillant aupassage. J’enconnaisunequivamoins riredemainquandelleauradécuvé.—Tusaisquoi?Cesoirj’étaisavecdesfemmesenmanqued’amour.JesuisleurCupidon,jedoisles

aideràreprendreconfianceenellesetàtrouverl’amour!Elleéclatederire.Bordel,elleestvraimentdéfoncée.Çaenseraitpresquerisiblesi jen’étaispas

aussi remonté contre elle. J’ai passéma soirée à flipper alors qu’elle se saoulait la gueule. J’espèrequ’ellefiniralerestantdelanuitau-dessusdelacuvette!

—Ouais,et…?—Bahtulesauraisvues!Descoincéesduculencolsronds,desviergeseffarouchéesquin’osaient

mêmepasregarderendirectiondelagentmasculine.Ellesontpassél’heurelatêtebaisséesurleurfraiseàl’eau.Unmeccommetoietellessepissentdessus,lespauvres!Je laisse couler sa dernière remarque, pas sûr de vouloir savoir ce que ça veut dire. Sortant de sa

bouche,çanedoitsûrementpasêtreuncompliment.—Etdoncaufinalturentrestorchéed’unrendez-vousd’affaires!— Hein ? Noooon… J’ai bu après ! Je sais rester professionnelle quand même ! Mais dans ce

groupe…jemesuisfaitunecopine!Elle tapedesmains commeunehystérique, un large sourire scotché auvisage.Moi : blasé.Zoé en

modeado,nonmerci.Çalacalmedirectetellesoupiredevantmonattitude.—Tucomprendspas…J’aiqueLola iciet…bah,ellen’estpassouventdispopourmoi. Jene lui

reprocherien,elleestamoureuse…Maisavoirtrouvédanscegroupedecoincéesunefillegénialeavecquijem’entendsautop,çafaitdubien!Alorsoui,aprèsonestpartiestouteslesdeuxdanslebard’àcôtéetj’aiunpeuperdulanotiondutemps.Là,toutdesuite,situattendaisdemoiquejesoiscompréhensif,tut’esplantéedepersonne,Zoé!Des

heuresquemacolèremacère,mebouffedel’intérieur.Ellemarche,ouplutôttitubejusqu’aucanapéoùelles’affaleenrigolantdeplusbelle.—Rienàfoutre,Zoé!T’auraispurépondreàmonmessagequejepuisseallermecoucher!Bordelça

faitplusieursheuresquejesuislàcommeunconàt’attendre!—Quoitut’inquiétais…pourmoi?C’estsisurprenantqueça?Sérieux,ellenesortpaslesoir,dumoinspassansnous,alorsoui,ilyade

quoi s’imaginer toutes sortesde scénarios ! Jen’ai jamaispris le tempsde lui fairevisiter laville etencore moins les quelques quartiers à éviter. Elle vit chez moi, donc d’une certaine manière je suisresponsabled’elle,s’illuiarrivaitquoiquecesoitjen’osemêmepasimaginerlaréactiondeLola.Zoémedévisage,troubléeparmonénervement.Jereculed’unpas,surpris,quandjemerendscompte

que je me cache derrière l’excuse « Lola » alors que cette colère, cette crainte qu’il lui soit arrivéquelquechosemetouchepersonnellement.Àceconstat,unpicseplantedansmapoitrineetjecroiselesbrassurmontorseavecunedésinvolturecalculée.—Àtonavis?Primo,tutebarressansmedireoùtuvas,deuzio,tunerépondspasàmonputainde

message.Tout çapour te ramener enpleinenuit complètementbourrée !Tuconnaispas le coin et lesdangersd’ici,alorsnejouepaslesingénues,pasavecmoi!Ellelèvelesyeuxaucielensouriant.—T’esmignonquandtut’énerves…Jevaislatuer!—Réflexionfaite,j’auraispeut-êtredûprévenirLola.Ellegrimace,j’enétaissûr.Jefixesapetitemoueboudeuseenmeretenantderire.Avecsoncaractère

demerde,j’auraisplutôtpenséqu’elleauraitl’alcoolmauvais.Commequoicettefillearrivetoujoursàm’étonner.—Ohçava,chouchou,arrêtedemegronder!Gronder?Elleabienutilisélemot«gronder»?C’estunefesséequ’ellevarecevoirsiellen’arrête

pasderire!

—Hey,tusaisquedanschouchouilya«chou»?C’estvraiquet’eschou!Enfinjeveuxpasdirequetu ressembles à un chou, non parce que c’est tropmoche, ces trucs.Non, toi t’es chou !Mais pas lelégumehein…enfintucomprends!Nouveauxfousriresmaiscettefoisavecleslarmesauxcoinsdesyeuxettoutcequivaavec:rouge

écarlate et pliée endeux.Cette fille est complètementbarrée.Etpour le coup, je commenceà en rireaussi.Petiteflatterie,enfinsij’aibiencompris…Jesuisimpressionné!—Maintenantquejesaisquetuesenvie,enfinplusoumoins, jevaispouvoirallermecoucher.À

demain,l’alcoolo.Jem’apprêteàgagnermachambrequandunmiaulementmepousseàme retourner.Lesbras tendus

vers moi, ses doigts s’agitent sous mon nez. Qu’est-ce qu’elle me fait maintenant ? Bordel, je ne lareconnaispas,jenel’aijamaisvuerireautant.—Aide-moiàmerelever…j’yarrivepô…Jeresteuninstantàlaregarderdanscettepositiongrotesque.L’aideroulalaissersedémerder?Fait

chier,mabontémeperdra!Jel’attrapeparlespoignetsetlasoulèvemais,sanscomprendrecommentnipourquoi,elleperdl’équilibreetm’entraînedanssachute.Lesmainstoujoursfermementagrippéesàsespoignets,moncorpssurlesien,mabouchetropprèsdelasienne.Bordeldemerde.Pourlecoup,ellenerigoleplus,moinonplusd’ailleurs.Jedevraismerelever,m’écarteravantquemoncorpsneréagisseàcetteproximité,maissesyeuxquimetranspercentm’enempêchent.Jesuiscaptivéparsapoitrinequiselèvefrénétiquement,parcettelèvrequ’ellemord,parceregardquinelaissepasdedoute.Elleaenviedemoi.—Fais-moil’amour,Ben.Enfin !!! Putain c’est encore plus jouissif de l’entendre !Mabite vient de se prendre une décharge

électriquerienqu’aveccesquelquesmotsetmontredéjàsonaccord.Alorspourquoijerestelàcommeunabruti?Sûrementparcequ’ellen’estpasdanssonétatnormal.Jelaveuxelle, toutentière,pasunepâlecopiedésinhibéeparl’alcool.Silencepesant,lourd,électrisant.Silencequ’ellecomblepardesbruitsdebouche.Seslèvreschaudes

se posent sur mon cou, s’acharnent à me déstabiliser. Elles lèchent, aspirent ma peau, rongent maréflexion. Mes mâchoires se contractent, mon souffle se coupe tandis que je tente de récupérer mamaîtrise. Ses dents, sa langueme filent le frisson, et sa joue caressantma barbe naissante agacemonpouls.Etmerde!Uneputaind’impulsion,undésirurgentetj’encerclesespoignetsd’unemain,exploresescourbesde l’autre.Jedescends jusqu’àsacuisseque jesoulèvepourmieuxm’installercontresoncorpschaud.Bonsang,c’estencoremeilleurquecequej’avaisimaginé!Lesboutonsdesonchemisiersautentdanslafouléeluiarrachantuncridesurprise.Ehouais,mabelle:quandonmecherche,onmetrouve!Ladentelle noire de son soutifmet en valeur sa belle poitrine. Je la détaille un instant, savoure ce

moment.Mesdoigtsglissentsousladentelle,caressantsapeaudouce,libérantsespointesdéjàérigées.Lesgémissementsétouffésdansmoncouàchaquepincementégayentmonego.Satêtetombeenarrière,etleregardqu’elleposesurmoimecoupelesouffle.Bordel,qu’elleestbelle,cettenana!Maisellen’estpasconscientedecequ’elles’apprêteàfaire,demainellevas’enmordrelesdoigts.—Ben…—Zoé,tuterendscomptequetuvasperdre?—Àcetteheure-ci,j’enairienàfoutredetonjeu!BenHarper,jeteveuxlàetmaintenant!Soupir.Lesmainsremontéesdansunezonemoinsdangereuse,jen’arrivepasàmedétacherdecette

bouche pulpeuse. C’est un véritable appel à la luxure. Brouillard total dans ma tête. Profiter de lasituation?Jouerausalaud?—Zoé…Jepourraisêtren’importequiquetutelaisseraisbaiser.Jeveuxquetumeregardesbienen

face,quetuterendescomptedel’ampleurdetesmots.Enl’état, t’asjustetroppicoléetbesoinqu’ons’occupe de ton cas. Je ne serai pas cet homme. La prochaine fois, force moins sur la bouteille, çat’éviteradevouloirduculpourducul.Cequisepasseentrenous,c’estplusqueça…ettulesais.Jemerelèverapidementquandsonexpressionvireàl’orage.Merde,sonhumeurjoviales’estenvolée

!Jeluitendslamainpourl’aidermaisellelarepousseviolemment.OK,lavraieZoéestderetour.—T’esqu’unenfoiré!Tumeprendspourqui,unepute?OK…J’aiencoreperdul’occasiondemetaire.—Sic’étaitlecas,jetesauteraisettelaisseraisunbilletcommetoutbonclient.Nemélangepastout.

Encoremieux,n’interprètepasmesparoles.Tebaiser,çafaitunbailquej’auraispulefairemalgrécequetupeuxbienenpenser,làencore.Neconfondspasrespectetdédain.Demain,tumeremercieras.— Pas besoin d’attendre demain pour tes pseudo-remerciements ! Lis surmes lèvres : Dans. Tes.

Rêves!—Incroyable,t’escomplètementfolleenfait!Sijet’avaissautédessus,tunem’auraisriendit,etlà

je te repousse et tumepètes une crise ?Qu’est-ce qui se passe,Zoé, c’est ton ego froissé qui te faitdébiterdesconneries?—Jetedéteste!Autantsur ladéfensivequeblesséparsesproposqu’elledoit l’êtreelle-même, jeserre lespoings.

Cettescèneestuneputaindemascarade!—C’estpourtoiquejefaisça,Zoé.—Allezvousfairefoutre,toi,tonjeu,tonimbécillité…toutcequetureprésentes!Elleselèvedifficilementetpassedevantmoienfuyantmonregard.Elletitubejusqu’àsachambreet

claque la porte derrière elle, en prononçant des mots français incompréhensibles. Je soupire en meretenantd’écrasermonpoingcontre lemur.Cettenanaestnocivedans tous lessensdu terme,mais jereste persuadé qu’elleme remerciera. Pour le reste… il va vraiment falloir que l’on solutionne notreproblèmeavantdecramerl’appart!

*

Déjàmidi,sijenemebougepas,jevaisloupermaviréejetskiavecJayden.Effortsurhumainpourquittermonlit,aprèsunenuitdemerdeàcogiter.Zoésortdeladoucheetmelanceunregardnoirenmedécouvrantdanslecanapé,monbolàlamain.

Jeprendssurmoipour,malgrétout,testerlatempérature.—Pastroplagueuledebois?—Àtonavis,Einstein?Ettupeuxpasprendreducafécommetoutlemonde?Jet’entendaisbouffer

tescéréalesdepuislasalledebains!Ohputain,elleremetçaavecsamaladiebizarre.Zoé,nemechauffepasdèslematin,t’esclairement

pasenpositiondeforce!—T’asdécidéd’êtreconneencorelongtempsouc’estjustehistoiredemefairepayerpourhier?Jete

croyaisplusmalignequeça.

Nouvellefournéequejemangelaboucheouverte,pourl’emmerderencoreunpeuplus.—Quoi,hier?Ilnes’estabsolumentrienpasséetjeneveuxplusjamaisenentendreparler.Etelleespèrem’intimideravecsondoigtqu’ellepointedansmadirectionetsonregarddekilleuse?

Mes mains se rappellent encore la douceur de sa peau. Elle me croit déjà suffisamment sénile pouroccultercombienelleainsistépourquejelaprennesurcecanapé?—Commetuveux…Assumeoupas,cen’estpasmonproblème,etçanechangeraenriencequis’est

passé.Jeluioffremonplusbeausourirenarquoisetellesecrispedespiedsàlatête.Facile,tropfacile.Elle

s’apprêteàenremettreunecouchequandsontéléphonesonne.Elledécroche,parleparmonosyllabes,mefusilledu regardentredeux, et s’énervedenouveau.Quelquesmotsde français et elle raccroche, sonregardseplantantdanslemien.J’aicommel’impressionquecetteconversationmeconcerne…—C’étaitLola.Jedoismechanger.—Parceque…—Parcequetacopineveutquejevienneavecvous!Tiens,maintenantc’estmacopine?Àcetinstantjen’ensuisplustrèssûrpourtant.C’estcenséêtreune

journéedétenteetZoévalapourriravecsatroncheàl’envers.Super,essayonsdenousamusermalgréleboulet!—Génial!Riennepouvaitmefaireplusplaisir!—T’enessûr?Alorsdis-toiqu’ilssontdéjàenrouteetqu’onvadevoirlesrejoindretouslesdeux.—Jedétestecetterouquine!—Ehbien,pourunefois,onestd’accord!Uneheurederoutepourrejoindrenotreplagehabituelle.Pasunmot,pasunregard,pasmêmeungeste.

Zoéestmontéeàcôtédemoi,atournélatêteverslafenêtreetn’aplusbougé.Àpeinedixminutesquel’onestsurplacequ’elleseplaintànouveau.Quecettejournéesetermine,etvite!—JemonteavecLola!—Ohnonsûrementpas!Ouijesais,Zoé,çaneteplaîtpasmaisonn’aquedeuxjetsskietjenete

laissepaslaviedemafemme.T’estropénervéepourquejetelaconfie,prendsBenplutôt.Sympa.Mercimonpote.Zoé,lesbrascroisés,ledévisageméchamment.Avecsagueuled’angeetses

tatouagespartout, Jayn’estpashabituéàcequ’une femmenesoitpas intimidée,etencoremoinsàcequ’elleluitiennetête.—D’accord…maisc’estmoiquiconduisl’engin.Alorslàjememarre.Horsdequestionquejelaissemavieentresesmains.Jevaisdevoirmebattre

avecellepourpouvoirconduiremon jetski.Commesinosrelationsn’étaientpasdéjàasseztendues!Sesvêtementstombentparterre,sonmaillotdebainmefaitdel’œil,ouplutôtcequ’ildissimuleetletemps que je réagisse, elle est déjà installée sur la machine. Et merde, je suis foutu. Je tire sur lafermeturedemacombinaisonetm’installederrière.Autantenfinirauplusvite.—Euh…Chouchou,t’asquoidanslecou?Quoi?Jepasse lamaindansmoncousanssavoirquoichercher.Lolasepencheversmoi, lesyeux

rétrécis,etsecouelatête.—Sacrésuçon,letombeur.Ellenet’apasloupé,celle-là!C’estpeudeledire!L’imagedeZoémesuçantlecoumerevientaussitôt.Jesourisenmeforçantàne

pastournerlatêtedanssadirection.Jepeuxsentirsoncorpssetendre.—Ouais,hiersoirj’aieuaffaireàuneenragée…Soudainmoncorpsestprojetéversl’arrièrequandZoédémarrelejetskientrombe.Làjenerigole

plus,aupointd’enoublierlavannequejevoulaisajouter.J’aijusteletempsd’accrocherleshanchesdemacastratricepournepasrisquerdetomberàl’eau.Sijenefaispasgaffe,ellevamelesboufferavantmêmed’avoirpulesvider!—Maist’esfolleouquoi?—Laferme,jegère!Sit’espascontentt’asqu’àtejeteràl’eau!L’eau nous éclabousse le visage, les remous provoqués par le jet de Jayden qui nous a rejoint fait

sauterdavantagelenôtre.J’aibeauêtreamateurdesensationsfortes,bordel,jenesuispassuicidaire!Jesuisàdeuxdoigtsdemepisserdessus!—T’enasdéjàfaitaumoins?—J’aidéjàconduitunscooter,çacompte?Ohputain,cettenanaestunepsychopathe ! Je renforcemaprisesursa taille,meplaquecontreelle

commesimavie endépendait.Non, en fait,mavie endépend !Commeuncon, je ferme lesyeuxenimaginanttouteslesatrocitésquejevaisluifairesubirunefoissurlaterreferme.Mieux,jevaislanoyer!Zoé,tuvasmorfler!Lessecondesetlesminutesdéfilent,mesmusclessontcrispésàleurmaximumet,contretoutattente,monculesttoujoursinstallésurcebolidedelamort.J’ouvrelesyeux.J’ycroispas…cette emmerdeuse se débrouille plutôt bien.Son accélération dudébut a laissé place à une vitesse decroisière.Mes épaules puismon corps tout entier se relâchent, enmême temps quemon souffle. J’enprofite pour regarder le paysage, Jayden qui s’éclate en faisant des embardées à vive allure avec sarouquinecramponnéeàluicommeunsinge.PauvreLola,passûrqu’elleapprécietantqueçacettevirée.D’un seul coup notre engin tourne brusquement, nous éjectant dans l’eau. Le système de sécurités’enclenche et lemoteur se coupe.Quand je remonte à la surface, je suis aspergéd’eaupar une follefurieusequitentemaintenantdemenoyer.—C’estquoitonproblème?T’asfaillinoustuer!—Non,c’esttoiettesmainsbaladeuses!Quoi?Zoécontinued’essayerdemecouler.Lesdeuxmainssurmesépaules,elleappuiedetoutesses

forces.La garce, elle veut vraimentme tuer. J’agrippe ses hanches, elle se crispe etme relâche. J’enprofitepourlasouleveretlajeterplusloin.Soncridisparaîtdansl’océanavecelle.Letempsqu’elleremonteàlasurface,jesuisassissurlejetski.Àmaplace,devant.Ellemerejointenquelquesbrassesetresteunmomentàmelorgnerl’œilmauvais.MaisoùestpasséelaZoéd’hier?Jeluitendslamainpourl’aideràmonter.Bienentendu,ellerefuseets’obstineàvouloiryparvenirseule.—Neposeplusjamaistesmainssurmoi,laprochainefoisjetepètelesdoigts!J’essaiedenepas riremaisn’arrivepasàcachermonsourire. Ilyaquelquesheuresàpeine, elle

n’avaitpasdutoutlemêmediscours!Bordel, j’ai jamais vuune fille aussi butée.Elle s’y reprendplusieurs fois, et avecdifficulté,mais

arriveàs’asseoiràl’arrièreengardantunespaceentreelleetmoi.—Jeteproposejustemonaidepourmonter,Zoé!—Jeteparlepasdeçamaisdetesmainsquimecaressaientleventretoutàl’heure.—Quoi,quandje t’aipousséedansl’eau?T’étaisentraind’essayerdemecouleret j’auraisdûte

laisserfairepeut-être?

—T’es conou tu le fais exprès ? Je te parle de tes doigts qui faisaient despetits cercles surmonventre quand je conduisais ! Et tu… tes doigts descendaient, j’ai perdu les pédales et j’ai eu unmouvementbrusque,d’oùnotrechute.Sionafaillimourir,c’estàcausedetoi!Jemeretourneetplantemesirisdanslessiens.Moi,latoucherinconsciemment?Ceseraitbienune

première.—Jenesaisabsolumentpasdequoituparles.Sijet’aicaressée,c’estsansm’enrendrecompte.Mes

caressessontintentionnellesengénéral.Jenem’attardepasàcesconneriesinutilement.—Jem’enfousmaisnerecommenceplus,c’esttout.Ellesembleanxieused’uncoupettournelatêteverslacôtepourcloreladiscussion.Unsourireétire

lecoindemeslèvres.Intéressant,maisjesaisaussiêtregentleman.—Excuse-moi.Ellebraquesonregardsur lemien,unsourcil relevé.Apparemment,ellen’ycroitpasvraiment.Tu

m’étonnes!—Non,vraimentjesuisdésolé.Jen’avaispasconsciencedel’effetquejepouvaisavoirsurtoi!Au

moinsmaintenantjesuisfixé!—Vatefairefoutre,Ben!—J’ycomptebien,maisavectoi,chérie!Allezaccroche-toi,c’estparti!Démarragebrusque,etZoésecramponnefermementausiège,m’évitantainsisonlégendairemajeur.

C’est bien, ma belle, mais tu peux encore faire mieux. C’est à mon tour de m’amuser. Un bon coupd’accélérateur et, la secondequi suit, soncorps se colle aumien, ses tentacules s’enroulent autourdemoi.Ehbien,voilà,c’étaitpascompliqué!Sa poitrine contremondos, ses bras autour demonbuste et sa tête dansmon cou, j’avance à vive

allure. Le palpitant au bord des lèvres, l’adrénaline qui pulse dansmes veines, le vent fouettant nosvisages…Jeprendsunpieddemalade à provoquer les éléments.Mon jouet bien enmain, j’accélèreencore,faisdesembardéescontrôléesetdesbondsdanslesvagues.Mapetiteblondepoussedescrisetseserreunpeupluscontremoiàchaquefois.Jayattiremonattentionpardegrandsgestesetjestoppetout.—J’emmèneLolaàlacrique,vousfaitesquoi?Par-dessus mon épaule, je regarde Zoé pour avoir son avis. Et à la voir, je me marre. Les yeux

larmoyants,lesoufflecourtetlevisagetrempé,elledoitêtresoulagéed’enfinir.—Alors?Tuveuxallertebaigneràlacrique?—Non,oncontinue!Jemetourneunpeupluspourmieuxlavoiretjerisdeplusbelle.Sérieux,cettefilleestuneénigmeà

elletouteseule!Onvoitclairementqu’elleestauboutdesavieetpourtantellerefusepourjenesaisquelleraisondemettrefinàsoncalvaire.—T’essûredetoi?Unesoudainedéterminationenvahitsespupilles.Sescuissesseresserrentautourdesmiennes,sesbras

m’enlacentdenouveau fermementet ellepose sonmenton surmonépaule,prête ày retourner. Je suisbluffé!—Roule,jetedis…Enfinavancequoi!JenemefaispasprieretaprèsavoiravertiJayqu’onpassaitnotretour,jereparsdeplusbelle.T’en

asredemandé?Tuvasêtreservie!Àlapremièreembardée,jesenssesmusclessecrisperetsajouese

coller àmondos.À la suivante, elle garde la tête haute et affronte sa peur en lâchant un petit cri. Jem’amuse à la torturer ainsi encorede longuesminutes et finis par enoublier sa présence.Aubout deplusieursminutesàtenterdedompterlanature,jecroisentendreunrireàmonoreille.Aprèsunedemi-heure d’efforts, mes muscles me brûlent et je ralentis pour reprendre mon souffle quand un crid’excitation surpasse le bruit dumoteur.Un rapide coup d’œil derrièremoi suffit àme rebooster.Unsourire craquant illumine son visage et ses yeux brillent d’une lueur que je ne lui connaissais pas.Soudain, elle se décolle de l’assise,m’enveloppe d’un bras pour garder l’équilibre et brandit l’autrefièrement.—Encore!!!Sasoudainebonnehumeurmecontamine,etjeluisourisàmontour.Cettenanam’étonneunpeuplus

chaque jour. Je pensais qu’elle aurait peur, surtout que je ne l’ai pas ménagée, mais non… Elle enredemande!J’oubliemesmuscleséchauffésetreparsavecunputaindesourirescotchésurlatronche.Commentnepasappréciercesmomentssiraresoùelleetmoisommessurlamêmelongueurd’onde?Finalement,onpassel’après-miditouslesdeux,Zoérefusantdequitterl’engin.Labonneententeétait

tellequejel’ailaisséeremonterdevant.Mesconseilsontétéécoutéssansbroncheretmisenapplication.Attention,lafurieestencoursdedressage!Jememarre,siellem’entendait…

*

Unventfraiscommenceàselever,signequ’ilesttempsderentrer.Unedernièreaccélérationetlejetskiglissesurlesableavantdes’arrêter.Bordel,jesuissurlesrotules!Jedescendsetm’affalesurlesable encore chaud. Zoé s’étale à plat ventre, appuyée sur les bras, elle a les yeux qui brillent encontemplant l’océan. Elle n’a pas cessé de sourire depuis tout à l’heure et, à chaque fois que je laregarde,lemienrefaitsurface.—Bonsang,c’étaitgénial!Quandtuveux,Harper,onremetça!—T’asvu,jet’avaisditquetuprendraistonpiedavecmoi!Ellerigoleenlevantlesyeuxaucieletglissesamaindansmescheveuxpourdécollerunemèchede

mon front. Je ne bouge pas d’un pouce, surpris par ce geste qu’elle réalise d’une manière tellementnaturellequ’oncroiraitquenotrerelationatoujoursétéaussisimple.—Allezdebout,lesamoureuxsontderetour!J’entendslesvoixdeLolaetJayquiserapprochentmaisjerestebloquésurcettemainqu’ellepose

surmonbraspourserelever.Bordel,ils’estpasséquoienunaprès-midi?—J’enpeuxplus…Jesuisrestéecrispéetellementlongtempsquej’aimalpartout.Tum’astraînéede

forceici,Jay,jenesuispasprêteàl’oublier!J’aimalaucul,t’imaginesmêmepas!—T’inquiète,bébé,jevaism’enoccuper,moi,detoncul.Jesaiscommenttedétendre…—J’aisurtoutbesoind’unbonbainchaud!Lolaenfilesarobeengrimaçant.Samanièred’enfairetoujourstropesttordante.Ellesetourneverssa

copineetladévisageuninstant,gênée.—Ondevaitfinirlajournéeensemblemaisvraiment,j’enpeuxplus!Çatedérange,Zouille,sionse

voitplustard?Zouille?Lemotest tellementbizarreque j’essaiede leprononcerdansmatêtesansyparvenir.Ça

veutdirequoi,cetruc?Entoutcassa«zouille»quibâilleàs’endécrocherlamâchoireal’airplutôtrassurée.Bandedepetitesjoueuses!Quelquesheuresdansl’eauetonn’entireplusrien.

—Aucunsouci,jepensemefairelemêmeprogrammequetoi!—Quoi,fautaussiquejeviennem’occuperdetoncul?SiZoénerelèvepaslablague,maprincesseenrevancheestloind’enrire.Elleneditrienparcequ’il

s’agitdesacopinemaisentempsnormalelleauraitdéjàsortisesgriffes.Unregardencoinendirectiondesonhomme,unsourireforcéànotreattention,etellelepoussejusqu’àlavoiture.MonpoteadorevoirLolaenmodejalouse,alorsforcémentilenjouedèsqu’illepeut,pourtantildevraitsavoirqu’àchaquefoisçafinitmalpourlui.Jenecomptepluslenombredefoisoùellel’avirédel’appartàcausedeça!Jemedemandecommentçavasepasserlaprochainefois,vuqu’ellehabitechezluimaintenant…—Bon,tucomptesdormiriciouonpeutyaller?—Allezenroute,onaunbainàprendrenousaussi!Lafaçondontellemefusilleduregardm’apprendqu’ilestencoretroptôtpourenrire.Apparemment

lascènedelasalledebainsluiresteencoreentraversdelagorge.Pourtantc’estmoiquimesuisfaitrembarrercesoir-là!Décidément,lesFrançaisesn’ontpaslesensdehumour!—Jerigole,Zoé,jerigole!Elles’installesurlesiègepassagerettrifouillelastationderadioavantdes’arrêtersurlachansonde

Green Day. Ouais, bon choix ! Décidément, elle continue de m’étonner. Je fais vrombir le moteur,directioncheznous.—Tumelaisseraslaconduireunjour?Jeretirecequej’aidit.FinalementlesFrançaisespeuventêtretrèsdrôlesquandellesveulent!

Chapitre15

Zoé

—Avoue-le!Allez,Ben,avouequet’asflippé!Ilmeregardeamuséavecunhaussementdesourciletsegaresursaplacedeparking.Quaranteminutes

debagnoleàdébrieferetàrirecommedesconsetmonsieurneveuttoujourspaslâcherl’affaire!—Jevoistoujourspasdequoituparles,maistapersévéranceestdistrayante!— Curieux vu la manière dont tu t’es accroché à moi. Continue d’esquiver, les bleus que j’aurai

demainmedonnerontraison!Je lui balancemon sourire assuré et savoure l’éclatmalicieuxde son regard tandis qu’il se penche

dansmadirection.—Pourtantsijereprendstespropresmots,c’estbiendespetitscerclesquejetraçaissurtonventre

quinousontfaittomberàl’eau…Sasoudaineproximitémedéstabilise.Perduedansl’azurdesesprunelles,j’entrouvreleslèvres.Les

battementsdemoncœurs’affolenttandisquejeressensencoreleveloutédesontouchersurmapeau,lapointedesesdoigtsglissant jusqu’à l’élastiquedemonmaillot.Zoé, reprends-toibonsangou ilva tebouffer!—Tellementprévisibletaréponse!C’estdinguequeturefusesd’avouerquet’aseupeuralorsqu’au

finaljemedébrouillaisplutôtbien!Ben reste silencieux, imperturbable, il continue de me détailler durant de longues secondes, en

pianotantsurletableaudebord.Mapressionsanguineaugmente,etjepeineàsoutenirsonexamen.J’ail’impressiondecreveràpetitfeu!Unrictussedessinesurseslèvresalorsqu’ils’extirpedel’habitacle,embarquantmaraisonaupassage.C’étaitquoiça?Jelesuisàbonnedistance,d’unpaslent.Épuisée,vidée, je ne sais plus si je dois mon état à nos frasques dans l’eau ou à cette fichue attractionindéfinissable.Cemec essaie deme polluer la cervelle !Ben, tu auras beaume jouer ton numéro decharme,iln’empêchequetonegodemâlerefused’admettreque,nonseulementtuaseupeur,maisqu’enplusj’airéussiàconduiretonengindemalheur.Lesportesdel’ascenseurserefermentsurnous,Bens’adossenonchalammentcontrelaparoi,lesbras

croiséssursontorse.Ilnemequittepasdesyeuxetquandjem’imaginequ’ilnemerépondrapas,jemeconcentremalgrémoiplutôtsurlemouvementdeseslèvresquesursesparoles.—Tuasraison…Je le regarde bêtement, pas certaine d’avoir bien entendu. La cabine démarre, et les soubresauts

associésàmafatiguemefont tanguer.Maisd’unbrasilenvelopperapidementmesreinsetmeramènecontresontorse.Puisillogesonindexsousmonmentonpourmeforceràluifaireface.—Ouais,j’aiflippé…Maisc’estvraiquetut’esplutôtbiendémerdée.Jedétesteavoirtortmaispas

quand c’est justifié. Et puis… Je dois avouer que j’ai passé une excellente journée. Tu mérites mes

remerciementspournepasnousavoirtués!Lesportess’ouvrentànotreétageetsansqu’ilmelaissele tempsdecomprendresesparoles, ilme

soulèvesansdifficultéetmeplaquecontrelui.Alorsquemapoitrinesepressecontresontorse,quesonparfum,bientropenvoûtant,embaumemespoumons,j’ouvrelabouchepourprotestermaisilmecoupeaussitôt.—Jevoisbienquetuesfatiguéealorsprofiteettais-toipourunefois.Sciée,jelelaisseappuyerlesommetdematêtedanslecreuxdesoncou.Çaneveutriendire,çane

veutriendire.Necraquepas.Merde,pourquoiilmeplaît?Jecommenceàregretternosengueulades!Pourtant,jemeshootecommelapremièredesimbécilesàsonodeur,melaissebercerparchacundesesmouvementsfluidesenfermantlespaupières.Pathétique,Zoé!Subitement, jesensmonépaulepartirenarrièrealorsqu’il tentaitdese libérerunbras.J’ouvre les

yeuxenlâchantunpetitcri,maisilmerattrapesansgrandmal.—Zoé, si tune fais pasun effort onva avoir unproblème, accroche-toi si tuveuxpas finir sur le

carrelage.L’image,lalégèretédanssavoixm’arrachentungloussement.—J’enpeuxplus,jesuisàboutdeforce…Jepensaisqu’avectoutelamuscuquetufaistuauraispu

meporteràlaforced’unseulbiceps!Unrires’extirpedeseslèvrestandisqu’ildétaillemaposture,avachieentresesbras:jedoisavoir

l’aird’unebaleineéchouéesuruneplage.—C’estpasunequestiondeforce.Jen’aipasunbrasàrallonge.Tutecomportespeut-êtrecomme

unegossemaist’enaspaslataille.Jepeuxpastetenirlesjambesetledosd’unseulbras!Alorssoittudescends,soitturécupèreslesclésdanslapochedemonjean.Devantmapetitemoue,genrej’aipasenviedebouger,illèvelesyeuxaucielavantd’ajouter:—Ousinononpasselasoiréesurlepalier,auchoix.—OK…j’aicompris!Jetâtonnedanslevidejusqu’àtouchersonjeanetpalpersonculmaissonlégerraclementdegorgeme

stoppedansmonélan.—Jesavaisqueçaallaittemotiver,saufquetunecherchespasaubonendroit.Mescléssontdansla

pocheavant…Je le regarde en soufflant pourmontrermon agacement face à ce petit jeu etme contorsionne pour

trouversapocheavant.J’yglisselesdoigts,fouilleàl’aveuglelecotonpouréchouersursabraguette.Instinctivement,mapaumeserefermesurlapremièrechosequejesens.Ohbonsang!—Non, chérie, ça c’est àmoi…Si tu crois arriver à la faire entrer dans le troude la serrure, tes

espoirsvontêtredéçus!Honteuse, je dégagemamain et cherche à pincer le premier bout de chair qui atterrirait sousmes

onglespourfinalementtombersurletrousseauquejesorsvictorieusement.—T’esvraimentunprofiteur,sic’esttefairetripoterquit’excite,ilsuffisaitdedemanderaulieude

mefairelecoupdesclés!Amusé,ilmelanceunregardjoueur.—J’aiditquej’allaisprendresoindetoimaispasquej’allaistemâcherletravail.Ç’auraitététrop

facile, j’adoretevoirtedémener.T’eshyperconsciencieusequandtut’ymets!Allez,ouvrenouscetteputaindeportemaintenant…

Jemesuis faitavoirenbeauté !Pourquoi j’aienviede rireetnonde luiarrachersonservice troispièces?Zoé,tufilesunmauvaiscoton!Jemedégagedesonemprisepourlaformeetdéverrouillelaporte.—T’esvraimentqu’unobsédé!—Oh…Sipeu…Pourunefoisquet’étaissympa,j’aipréféréfermerlesyeuxettelaisserfaire!Incroyable!Jemelaissetomberleculenpremiersurlecanapéavantdem’affalerdetoutmonlong,

unejambependantdanslevide.—T’essérieuse?Àpeinequelquesheuresdejetett’escuite?Necroispasquejevaistefoutreaulit

et teborder,mêmepasenrêve!Lasoiréenefaitquecommencer.Unbainet tu tedébrouillespour terequinquer!Jelèveunpoucechancelantetsonrireaccompagnesespasendirectiondelasalledebains.Jenesais

pascequ’ilnousprévoit,maisçaaleméritedetitillermacuriosité.Benetmoi,enbonneententeplusd’unedemi-journée?Ilaraison,çasefête!Quelquesminutesplustard,delamusiqueenvahitl’appartementetungémissementfranchitleseuilde

meslèvresalorsquejeplongemoncorpstoutentierdansl’eaubienchaude,empliedemousse.Extaselaplus totale.Mince, iln’apas fait les chosesàmoitié ! Ilnememanqueraitplusqu’une…Ducoindel’œil,j’entrevoislaportes’ouvriretBenenfranchirleseuil.OK,j’aidelamoussejusqu’aucou,riennedépasse,maisfautpasabusernonplus!—Çadevientunevilainemaniecheztoidetepointerdanscettepiècesansyêtreinvité!C’estsympa

detapartdem’avoirfaitcoulerunbainmaisçanetedonnepasledroitd’alleretvenircommeça!Ilme gratifie d’un sourire en pointant sousmon nez une bouteille bien fraîche, l’air de vouloirme

narguer.Commentsait-ilquec’estlaseulechosequimanqueàmonbaindel’extase?—Jereparsdoncavectabière?—Hum…çapeutsenégocier…Son regard concentré surmon visage, il s’appuie contre le lavabo, s’enfile une gorgée de sa bière

aprèsavoirposélamiennesurlemeuble.—Jet’écoute,lesnégociationssontouvertes.Àquelpointtuassoif?J’arrivepasàlecroire,ilyadeuxsemainesencorejeluiauraiscoupélalangueavantdelaluifaire

bouffer,etlàjememarrecommeuneconnedansmoneausavonneuse.—Jesuisprêteàpompertouslesjusquisetrouverontsousmonnez!Effaré, il suspend son geste. Un sourire sadique aux lèvres, j’observe le contenu de sa bouteille

s’écoulersursontee-shirt,imbibersonjoggingavantqu’ilnesereprenne.—Maist’esfolle,çavapasdediredeschosespareilles!L’éclatsombredanssesprunellesazuréesmeconfirmequej’airéussià ledétournerdesonobjectif

initial. Ben : 0 - Zoé + bière = victoire écrasante ! Allez,maintenant, laisse-moi savourerma bière,looser!Jetendslamaindanssadirection,pourluisignifierdem’offrirmarécompense.—Jecroisquejel’aiméritée!Benacquiesceavecunairdiabolique.Merde,jelesenspas!Ilseredresseets’avancelentementvers

moi,emportantmabouteilleaveclui.—Sij’étaistoi,j’ouvriraislabouche!

Àpeine le tempsderéagirque, lesyeuxexorbités, impuissante, je l’observem’arroser.De labièrecoule entre mes lèvres, et son regard me brûle la peau alors que l’alcool dévale mon cou, jusqu’àatteindre le sommet de ma poitrine… dont une pointe durcit au contact frais du liquide. Je crie etm’étouffesouslepoidsdudébitqu’ilm’impose,détournelatête,lesbrasenavant,etilarrêteenfin.—Àlatienne.Savoixsubitementrauquem’arracheunfrisson.Jetousse,rigole,incapabledeluisortiruneréplique

biencinglante.—Tuneperdsrienpourattendre…!Un silence soudain nous aspire alors qu’ilme détaille. Semblant ne pasm’avoir entendue, ses iris

balaientmesépaulesnues,mabouchehumideavantdeseplanterdansmonregard.—OK.Vautmieuxquej’aillechercherdesmunitionsalors…—Desquoi?Ildécampesansmerépondre,etjemelaissecoulerdansl’eau.J’aibesoind’effacerlestracesdeses

frasquesetl’imageperturbantequis’estinfiltréedansmoncerveau.Benquimedévoredesyeux.Benquimesourit.Benquipasseunemaindanssescheveux.Benqui…J’expirebruyammentl’aircomprimédansmespoumonsetdepetitesbulless’échappentdemesnarines.Un bruit sourd me pousse à rejoindre la surface et j’ouvre les yeux. Mauvaise idée… je peux

désormais ajouter à ma liste : Ben qui ôte son tee-shirt ! Mais qu’est-ce qui lui prend ? Mes yeuxcheminentsursapeaulisse,sonventrefermeoùsedessinentdesabdosciseléstandisqueletissudésertelesommetdesontorseetlibèreàmavuesespectoraux.Relèvelesyeux,Zoé!—Mais…qu’est-cequetu…?Mais…voilàqu’ilretirelebasmaintenant!Vêtud’unsimpleboxerblanc,moulantprécisémentson

anatomie,ilattrapeunebouteillederhumposéedanssondosetinvestitlabaignoiresansmelaisserletempsdeprotester.Non,non,non!Jetentedem’écarterdumieuxquejepeux,toutencherchantcommentmedépêtrerdecettesituation.Mince,jesuisàpoilquandmême!Rienàfaire,horsdequestionquejevalidecettemascarade.Jemeredresserapidementmaisilmeretient,mereplongeantdansl’eau.C’estpasvrai,ilveutmetuerouquoi!Jecroiserapidementlesbrasautourdemapoitrineafindecacheraumieuxmanudité,cequimevautunhaussementdesourcildesapart.—C’estbonj’enaivud’autres!Décoince-toi,c’estpaspourunboutdeseinquejevaism’emballer!Sesprunellesbraquéessurchacunedemescourbes,ils’installeconfortablementetétendsesbrassur

lesrebordsdelabaignoireavecunsourireencoin.—Regarde,moiaussijesuisàmoitiéàpoiletj’enfaispasdestonnes!T’asjamaisfaitdetoplessou

quoi?L’intensitédanssonregardmeplongeenpleintrouble.J’ail’impressiond’êtredansunautremonde,

uneautredimension.Ilsepassequoilà,bordel?—Ben,àquoitujoues?—Çafait troisplombesquet’esdanslaflotte.D’une,jem’emmerde,etdedeux,j’aibesoindeme

rincer.Alorsautantjoindrel’utileàl’agréable,apérodanslebain!Unaqua-rhum,çatebranche?—Etc’esttout?—Pourquoi?Tuproposesunecontre-soirée?Allez,bois,çavatedétendre!Il poste le goulot sous mon nez et j’hésite quelques secondes avant de m’en emparer. Après tout

pourquoipas?Zoé,t’esadultealorsarrêtederéfléchiretprofite!T’asunbeauspécimendevanttoi,à

refoulertesenviestuvasvraimentfinirparpasserpourunecruche!Décidée, j’avale une gorgée quime brûle la trachée. La vache, ça décape !Aumêmemoment des

doigtseffleurentbrusquementmoncou,m’arrachantunsursaut.Legoulotdéviedemaboucheetunpeudeliquideambrécoulesurmapeau.Super,çadevientunehabitude!—Hey!Negâchepastouteslesmunitions!—Nonmaisqu’est-cequetutrafiques?—Rienmaisc’estquoicettemerdequetuportestoujoursautourducou?Mesdoigtsenlacentlependentifsuspenduàmoncoudepuistellementlongtempsquejen’yprêteplus

attention.Riend’extraordinaireetsûrementpasd’unegrandevaleur,maiscettepetiteétoilemeplaît.—C’estlecadeaud’unex-copain.—Valeursentimentale?Benditouplutôtcrachecettequestionavecuneespècededédaindanslavoix.Ilgardecepetitsourire

etsonairdécontractémaisjesavouresilencieusement.Monsieurestjaloux!—Nonabsolumentpas,jel’aimebienc’esttout.D’unhaussementd’épaules,ilm’indiquequetoutçaluiestégal.Maisbiensûr…J’aiapprisquetous

les hommes amis, amants, frères oumême collègues ont ce côté possessif,macho, sans forcément deraisonvalable.Çadoitêtredansleursgènes!J’avaleunenouvellegorgéequipasseaussidifficilementquelapremièreavantdeluitendrelabouteille.J’aiintérêtàyallerdoucementsijeneveuxpasquesonaqua-rhumfinisseenaqua-tarte.Trenteminutes plus tard, j’ai oubliémes bonnes résolutions.Entre la sublime vision de ce corps à

moitiénufaceàmoi,mesenviesrefouléesetlalégèretédel’instant,j’aieubesoind’unpeuplusd’alcoolpour supporter cette situation.Résultat, la bouteille s’est vidéedemoitié et il a fallu ajouter de l’eauchaude à deux reprises pour me maintenir dans mon bouillon. Merci, mon ami le rhum et ses effetscalmants!Aussidétenduequ’uneétoiledemer,jem’étends,chevauchelescuissesdeBenquitentedem’énerver.Continue,Ben, tune t’imaginespasàquelpoint jesuisanesthésiée!D’unevoixsortie toutdroitd’undessinanimé,ilm’imiteenjurantdefaçongrotesquemais,bordel,c’estjusteexcellent.—Tonimitationétaitnulle!D’abordj’aipascettevoixridiculeet,surtout,jamaistunem’entendras

direquejesuisunepétasse!J’assumebeaucoupdechosesmaisfautpasabuser.Nouvel éclatde riredemoncolocatairequand ilmevoitme renfrogner, lesbras croisés en faisant

semblantd’êtrevexée.En tempsnormal, surtoutvenantde lui, je l’auraisété,mais sonpoucemassantsubitementlaplantedemonpied,m’extorqueungémissementavantquejen’encomprennelasource.—Aufinal,tun’espassicompliquéequeçaàapprivoiser…Unregardenvoûtants’associeaurictusplaquésurseslèvres.Non,Ben…Nemecherchepas,neme

regardepascommeça…Monenduranceàterepousseradeslimitesetlàjesuisàboutdesouffle.—Tucroisvraiment?—Tuesbeaucoupmoinsimpressionnantequejelepensais.Il croise sesbrasderrière sanuque.Un rirenarquois s’échappedemagorge, semêlant auxbasses

cognantcontrelesmurs.Lesvoisinsvontpenserqu’ilyaencoreunesoiréeici!Non,c’estunetoutautresortedesurprise-partiequisedéroulecesoir!—C’esttapauvreimitationpourriequitepermetdemejugeraussifacilement?Tunemeconnaispas.

Sijelevoulais,jepourraisêtrecellequejeveux,quetuveux.Jemordslapulpedemondoigtenlefixantsansciller,ilhausseunsourcil.

—Jet’écoute.Qu’est-cequejeveuxd’aprèstoi?Enhardie par nos échanges, je m’extirpe de ma mousse, toute pudeur remisée au placard et je

m’approchelentement,mapoitrinenueenévidence.L’alcoolmedonnedesailes,jemesensforteetsûredemoi.—Tuattendsquejesoisunejeunefemmedocile,émerveilléepartesprouesses?Ounon…Peut-être

unefilleplusentreprenantequitedonneraitduplaisircommetun’enasjamaiséprouvé…Àtoidevoir!Maissouhaites-tuvraimentréitérerl’expérience?Monindexcourtsurlapeaudoucedesontorse,traceunsillonentresesabdosquisecontractent.Son

expressionchange,s’assombritprogressivementetavantqu’iln’attrapemonpoignet,jeluibalanceàlafigureunegicléed’eauenricanant.Siprévisible,cemec!Ilessuiesonvisaged’unemain,etmonsouriresefigelorsquesesprunellesécrasantesmeperforent.

D’instinct,jerecule,tentantdemereplaceràl’endroitquejen’auraisjamaisdûquitter,àsavoirl’autrebout de la baignoire. Mais il ne m’en laisse pas le temps. À mesure qu’il se redresse, mon souffles’amenuise.Sesdoigtssefaufilentalorssurmatailleetpressentmeshanches,empêchantmafuite.Lesbattementsdemoncœurcaléssurlerythmeenvoûtantdelamusique,jepeineàentrevoirlasuite.Ilmeplongetoutentièredansunbainforcéavantdem’enextirperetjel’arroseautantquejepeux,medébatsentoussant,maischaqueattaquem’estrendueauquintuple.L’eautangueentrenous,sedéversesurlesoletj’aisubitementchaud,jerigolesanspluspenseràmanudité.PuisBensourit.Undesesfameuxsourires,hypnotisant,intense…aussibrûlantquelaprofondeurde

sesirisàcetinstant.Lesmienss’imprègnentdesaplastique,dévorentchaquecourbedesoncorpssansdéfaut.Dieuqu’ilestbeau!Desgouttelettesglissentsursapeauetj’ensuisletracéjusqu’àlalisièredel’élastiquedesonboxerdevenutransparent.Ilestdanslemêmeétatquemoi:emplidedésir.Uneputaind’érectioncolleau tissuetune tachesombresedessine.Nemeditespasqu’ilaun tatouageà l’aine!Merde,çayestjeperdslatête!Jen’aijamaisétéaussipauméeetconscienteàlafoisdecequejevoulais.Cettecertitudevibredans

toutmoncorps,setransformeenunesortederageintérieure,unbesoinurgentd’abuserdelasituation.Mon rythme cardiaque s’emballe quand sa paume enlace ma nuque. Les murs vibrent, crachent unemusique assourdissante dont je n’entends plus qu’un son étouffé tellement je suis submergée parmessensations,parsonsoufflequidéviejusqu’àmonoreille.—Jenesavaispasqu’ilfallaitquejesoisàcepointprécis:c’esttoiquejeveux.—Alorsneperdsplusdetemps!Sa bouche se plaque directement sur lamienne enmême temps qu’il ramène sèchementmonbassin

contrelesien.Ungémissementsefaufileentremeslèvresaucontactdesonimpressionnanteérection,salangue s’y engouffre, me dévore. La violence de notre baiser n’a plus de sens, mis à part s’assurerqu’aucundenousdeuxneferamarchearrière.Jem’accrocheàlui,plantemesonglesdanssesomoplatesetsonpoingserefermesurlesommetdema

tête.Sesdentspénètrentmagorge,ilmemord,mesuce.Jegémis,lemarqued’autantplus,avecl’enviedeluiarracherlapeau.J’aiautantenviedeluiquedeluifairemal!Soudainsonbrasselogesousmesfesses,mesoulève,etmescuissesétreignentsataillecommesije

voulais l’étouffer. Mon souffle percute sa mâchoire alors qu’il écrase sans aucune douceur mon doscontre la céramique. L’acharnement de sa bouche revient me tyranniser, hérisse ma peau à coups demorsure. Jeme cambre comme je peux, tire violemment sur ses cheveux, c’est alors que nos regardsembraséssecroisentetquesamainremontejusqu’àmagorge.Jemanqued’air.—Jet’interdisdechangerd’avis!

Sapoigneseresserresubitement,j’entendsmoncœurcreverdeplaisirsousmapoitrine.—Commeçanoussommesdeux.Tuveuxquejetebaise,Zoé?Mespupillessedilatentdeplaisir,monsangpulseàm’enbrûlerlesveinesetjecriedesurprisequand

subitementlesmaillesdemoncolliercèdentetquemachaînependdanssonpoing.Il la lâchedanslebain.—Tun’asplusbesoindecettemerde!Seslèvress’emparentdenouveaubrutalementdesmiennes,m’extirpentdesflopéesdegémissements

enmêmetempsquesaqueuetenduesoussonboxerfrottecontremonsexe.Presséecontresontorse,toutpartenvrilledansmatêtealorsqu’ilenjambelabaignoire.Unbruitdeverrequisefracasseausol,etilétalemoncorpssurlasurfaceplanedumeubledulavabo.Mapoitrinesesoulèvefurieusementsouslepoidsdesonregardquis’abaisseauniveaudemescuissesouvertesmaintenantcaléessursesépaules.Perdue,unepaumeplaquéesurlemiroiràmadroite,jesubislamaîtrisedesalanguecaressantmafente,s’immisçantentremeslèvrespourmassermonclitoris.Mesfessessepressentenarrière,tentantdeluiéchapper,maissesmainsseplaquentvivementcontremescuisses.Jetrembleincapabledesaisircettetensiondemaladequitranspercemonbas-ventre.J’ail’impressiond’écloreouplutôtdemedésintégrer!C’estquoiça?Bonsang,ilfautqueças’arrête!Monrythmecardiaqueestentraindecreverleplafond.Ses prunelles braquées sur lesmiennes, ses lèvres remontent jusqu’àmon nombril,mes hanches se

soulèventcommepossédées.Jeleveux,jeleveux!Cetteobsessionrésonnedanstoutmonêtrecommejamaisauparavant.Çayest, jesuisdingue, je…Uncrideplaisir franchit leseuildemabouchealorsqu’il plonge un, puis deux doigts entre mes parois enflammées. Un sourire cruel fend son visage,décuplantcefeuintérieurquiprendpossessiondetoutmoncorps.—N’oubliepas,c’estavecmaqueuequejeteferaijouir.Lapièce semble tourner autourdemoi.Un tiroirqu’on tire, unbruitdeplastiquequ’ondéchire,un

irrépressible frisson courant surmapeau, et je gémis, totalement hantéepar ce besoinquime ravage.Jouir,lesentir,jouir,lesentir…Sesbrasencerclentmondos,m’attirentcontrecettebouchesensuelleetsauvagesurlaquellejelaisses’abattretoutemafrustration.Commesij’avaispeurquetoutcecinesoitqu’un rêve. Nos langues enlacées, mes muscles se crispent alors qu’il me pénètre centimètre aprèscentimètre. D’un coup sec, il s’enfonce entièrement, m’obligeant à absorber toutes ces nouvellessensations qu’ilm’inflige. J’en deviens folle,m’accroche à lui comme je peux. Son bassin s’active àm’en faire perdre la raison, puis s’arrête.Mon corps se retrouve subitement plaqué contre unmur.Àpeineletempsd’observerlaplanteducouloirrouleràterrequemespaupièressefermentsoussescoupsdereins.—J’aienviedetefairepayertoutescesfoisoùtum’asrendudingue!Jel’embrasse,legriffeenréponse.Mondossedécolledumur,unbruitdeporteétoufféparlamusique

résonne à mes oreilles. Aussitôt, mon corps encore mouillé rebondit sur un matelas, ses pupilless’enfoncentdanslesmiennes,melaissenthaletantetandisquejecontemplesabeautévirile.Jepeuxenfinvoirsontatouage:unesortedetribalauxlignesépaisses,courbées,masculines.Unsourireétirelecoindeseslèvres,etavantquejenecomprenne,ilencerclemeschevillesetmeretournesurleventreavecune facilité déconcertante.Le prolongement de son corps contre lemienme fait frissonner alors qu’ilmordillemanuque,laissantsalangueatténuercettedoucetorture.Souscetassaut,mesfessesondulentetfrottentcontresaqueuedure,brûlante.—Ben,j’aienviedetoi…Unemains’immisceentrelesdrapsetmonbuste,descendjusqu’àmonentrecuisseliquide,affaméede

lesentir.Mesyeuxsefermentspontanément,mabouches’entrouvre,àlarecherched’airtandisqueson

glandforcel’entrée.Laconjugaisondesescoupsdereinsetdelapointedesesdoigtsencerclantmonclitoris,précipitemoncorpsverslarupture.Soumiseàsabouche,sesdentsquis’attaquentàmonépaule,jefrémis,m’accrocheauxdrapssoussesrâles.Benm’envahit,etjemedéliteentresesbras,melaissetotalement submergée par cette montée en puissance, cette vague prête à m’engloutir. Des larmesd’impuissance tententde franchir labarrièredemescils, sonbassinpercutemes fesses, sa languemesuce,sonmajeurm’électrise…etjesombredansl’orgasme,metordssouslepoidsdesoncorps.Mesparoissecontractentautourdesonérectiondeplusenplusdure,s’enfonçantdansmonventreenmêmetempsqu’ilselibère.Étalésl’unàcôtédel’autre,jecontempleavecdélicesapoitrinesesouleversousl’effetduplaisirque

je lui ai procuré. Il retire la capote et la balance par terre. Il rigole et je l’accompagne alors qu’ilembrasselecreuxdemonoreille,pétritlachairdemeshanches.—Putain,Zoé…Benme jetteundernier coupd’œil avantde se redresser comme si j’étais unmirageouun trucdu

genre.Mes dents plantées dansma lèvre inférieure, j’épie son cul ferme etmusclé quand il quitte lachambreavantdem’alanguirparmilesdraps.UnebaiseetBenrèglemonsoi-disantproblème!Je.Suis.Normale!Mestalonstapentfrénétiquementlematelasd’excitationetjemeretiensdecriercommeuneidiotelorsquelamusiquedisparaîtbrusquement.—Celle-cionmel’avaitencorejamaisfaite…maispourquoipas!Hilare et nu, Benme regarde, accoudé au chambranle de la porte avec une bière à la main, qu’il

s’enfilerapidementaugoulot.Çayest,jesuismortifiée!—Ohnon…Merde,merde,merde!—Inutiledetemettredanstoustesétatspourunsimpleorgasme…Un sourire narquois se profile sur ses lèvres et j’ai déjà envie de le trucider.OK,monsieur a tout

comprisetseprenddéjàpourunsuper-héros!J’aienviedel’étoufferavecsacape!—Tais-toi!D’abordsilencieux,sonregardsuitlacourbedemesseins,lapointedesalanguehumidifiesabouche

etmoi,commeunegirouette,j’aidéjàchangéd’avis;jeveuxlebouffer!—Çatombebien,cettefois-cij’aienviedet’entendregémirmonnom.Monsoufflesecoupe.Benlaissetombersabièreàpeineentamée,quisevideparà-coups.Lebruitdu

verreroulantsurleparquets’incrustedansmestympanstandisquesonregardm’embraseetlentementilmerejoint.Duplatdesesmainsilm’effleure,mesurplombedesoncorpsalorsquejerêvedesongoûtdansmaboucheetqu’ilmetouche.Éblouieparcetteconnexionirréelle,jesuccombeàseslèvres,àleurdouceursurlapointedemesseins.Salanguem’échauffe,meravitdesgémissementsenmêmetempsquemeshanchespartentàsarencontre,maisd’unemainfermeetdouce,ilmeretientcontrelematelas.—Gémis,Zoé,maintenantquejesaisquetunevasplustedéfiler,jecompteprendretoutmontemps

pourtefairel’amour.Il se rassasiedemes lèvresen les suçotant, les léchantdansunedouceurcontrôlée. Jem’enflamme

soussescaresses,sesdoigtsredessinantlescontoursdemesflancs,dechacunedemescourbes.Sonsexeglisse contre lemien, électrisemes sens, alors que je reste perdue, enchaînée à cet azur troublant quisavourel’ensembledemesréactions…Ben,qu’es-tuentraindemefaire?Sans jamais rompre lecontactvisuel, il tend lebras, fouilledansson tiroiretporteà saboucheun

sachetbrillantqu’ildéchiredesesdents.J’ailecœurauborddel’explosiontantilbatfort,anticipantdéjàlamontéed’adrénaline.Ilsepencheetdéposeuntendrebaisersurmaboucheavantdesemettreà

genouxetdeglisserleboutdelatexsursonmembredéjàgonflédedésir.Commentcesimplegestepeut-ildeveniraussiérotiquelorsqu’ils’agitdelui?Soncorpschaudretrouvesaplacesurlemientandisqueseslèvrespossèdentdenouveaulesmiennes.

Sesmainsglissentsurmespointesqu’ilfaitroulerentredeuxdoigts,m’arrachantungémissement.Jelesens sourire, satisfait dema réponse tandis que sesmains reprennent leur ascension. Lentement, ellesremontentsurmesépaules,effleurentmesbraspourserefermersurmespoignetsetmeforceràlâcherprise. Sous le poids de son regard hypnotisant, je le laisse me dominer, faire de moi sa chose etabandonneladouceurdesescheveuxpourmeretrouverlesmainsemprisonnéesau-dessusdelatête.Saqueuemefrustre,faitmonterlapressionenglissantentremeslèvres,frottantmonintimitédéjàhumidesansjamaisenfranchirlesremparts.—Ben…Sourdàmessuppliques,ilprendplaisiràmetorturerenmerefusantcequemoncorpsréclame:lui,

entièrement, pleinement.Désespérée,mes jambes s’accrochent à seshanches essayantde l’attirer versmoimais il résiste. Jen’enpeuxplus, je tremble commeunecaméeenmanque…J’aibesoinde lui !Alors que je cherche à me défaire de son emprise, il glisse enfin son gland, m’arrachant un crid’impatience.Centimètreaprèscentimètre,ilm’emplit.Lasensationesttellementexquisequejepeineàgardermesyeuxouverts, cependant j’yparviens rienquepouradmirer l’expressiondeplaisir sur sonvisage.Lerâlequis’échappedeseslèvres,sapeauquifrissonneetlerythmeeffrénédesarespirationdécuplentmessensations.Sonnezfrôlelemien,ilembrasse,lèchemamâchoire.Sesattentionsassociéesàsescoupsdereins

langoureuxmefontfermerlesyeuxdeplaisir.Jeprendstoutcequ’ilmedonne,accueillechaquenouvellesensation. Quand je les rouvre, mon cœur pompe de manière désordonnée l’afflux de sang soudain.Happéeparl’éclatdesonregard,ilmecontempledetoutesahauteuretjesuccombeàsonintensité.Uneboufféede chaleurme submergeet je fonds sur ses lèvrespourunbaiserpassionné.Soudain, lebruitsourdd’uneportequiclaquenousstoppenet.Lesoufflecourt,unsilencedeplombnousenveloppe.Nousnousjaugeonsuninstant,pascertainsdesaprovenancejusqu’àcequ’unevoixtranspercelesmurs.—Ben,t’eslà?

Chapitre16

Zoé

À peine un baiser furtif sur la tempe et Ben a sauté dans un boxer pour rejoindre Lola avec un «t’inquiète,jegère».20heuresetmameilleureamiedébarqueenleréclamant,lui.Doncsijerécapitule,je me retrouve à poil dans son lit, royalement frustrée, avec en prime des envies sanguinaires quim’envahissent:1/TuerBenpouravoirprismaplaceauprèsdeLola.2/ÉtriperBenpourmeplanteraupiremomentetapriorisansaucunremords.3/ApprendreàLola,àcoupsdeceinturon,qu’ilfautfrapperavantd’entrer!Mince,reprends-toi,Zoé, t’es immonde, t’aspaseule tempsd’avoir tonorgasmealors tuenveuxà

tout lemonde ! Jeme filerais des gifles : je suis en train de faire une crise de jalousie alors que jel’entends pleurer de l’autre côté de la porte. Ma pauvre petite puce… Qu’est-ce que ton MonsieurOrgasme-garantiaencorefait?Cinqminutesplustard,sessanglotsm’arrachentlecœur.Bordel,c’estdansmesbrasqu’elledevrait

être!Jetendsl’oreillepouressayerdecomprendremaisellenesortquedesinjures.LavoixdouceetcalmedeBenchercheàl’apaiser.Direqu’ilyaquelquesminutescettemêmevoix,teintéededésir,mesusurraitdesobscénitésaucreuxdel’oreille…SiLolanenousavaitpasinterrompus,jegoûteraisencemomentmêmeàunnouvelorgasme!Auboutdequinzeminutes,desmotscomme«connard»,«voisin»et«liste»transpercentlemuret

jesuisincapabledecomprendrequoiquecesoit,bonsang!J’aibeaulesretournerdanstouslessens,jen’arrivepasàfairelelien.Jesuisunenouvellefoisfrustréemaispluspourlesmêmesraisons.L’ongledupoucey est déjà passé et j’attaque l’index.Seule consolation : ses pleurs ont cessé, c’est déjà ça.Avec un peu de chance, Ben va rapidement régler le problème et me rejoindre… Des promessessurgissent de ma mémoire : « Si t’es sage, je te ferai goûter aux merveilles de ma langue entre tescuisses…Quelquechosed’uniquedonttuterappellerastoutetavie.»J’ensuisencoretouteretournée.Jesuisencoretoutechambouléeàl’idéedecettedélicieuseperspective.Jefermelesyeuxetmemordilleleslèvrespournepassuccomberauximagesquicherchentàs’infiltrerdansmatête.Monself-controlestentraindeprendresesjambesàsoncou.Bientôtuneheure…Jecroisqu’onsefoutlittéralementdemagueule.Unéclatderireretentitetmefait

légèrementbouillirdel’intérieur.J’imagineBenluisortiruneconneriepourluichangerlesidées.Bravo,ça a l’air demarcher !Aumoins il y en a une qui a de la chance…Mon ironie etmoi commençonsdoucementàperdrepatience.Macopineabeauêtreauplusbas,j’aidumalàcompatir.DixminutesqueMadameritsanssavoirqu’endébarquantici,elleagâchécemomentparticulierquisepassaitentreBenetmoi.Toutcequejeretiens,c’estquejenel’aipasentenduuneseulefoisprononcermonnom.ÀcroirequeLolamecroittoujoursenFrance!Pfff,qu’ellevienneencoremedirequ’elleabesoindemoiici!Est-cequ’aumoinsj’auraisétéaucourantdesesdéboiressijen’avaispasétéenferméeici?J’enrage…

Ilsm’onttouslesdeuxzappée!Ben, quand tu vas revenir c’est la douche froide qui t’attend ! Bon sang, j’ai besoin de chocolat !

J’ouvreletiroirdesatabledechevetettombesurunpaquetdegâteaux…auchocolat,merci!

QuasimentuneheureetdemiequejepoireauteetjemedemandesiBensaitencorequej’existe.J’ai

abandonné l’idée de comprendre ce qui s’est passé entre les amoureux. Je n’entends plus que deschuchotements.Marredemebaladerenveloppéed’undrap,j’aifiniparfouillerdanssestiroirspourdégoterunboxer

etuntee-shirt.Pourm’éviterdepéterunplomb,jem’occupecommejepeux:j’airefaitlelit,classéleslivres par ordre alphabétique et rangé les chemises selon un code couleurs. Qu’il ne vienne pas seplaindre que j’ai touché à ses affaires, en cemoment il s’occupe bien desmiennes !Attention, je neconsidèrepasLolacommeunobjet,jemecomprends!Bonsang,jesuisentraindedisjonctertotallà!Maisqu’est-cequim’empêchedefranchircetteputaindeporte?

Presque deux heures et plus rien, juste un long silence de mort. 21 h 47, des chiffres rouges qui

m’accablentetmedonnentenviedem’arracherlescheveux.Leréveilestdevenumonpireennemi.Jeleregardesanscesse,leprendenmain,ledéteste.Lesminutess’égrainentavecunelenteuraffligeanteetjenesaisplusvraimentpourquelleraisonjedoisrestercachée.Àtournerainsienrondsurleparquet,jevaisfinirparl’user,maisjefaistoutdemêmeattentiondenepasfairedebruit.Bordelmaisqu’est-cequ’ilsfoutent?LolapleureetBenrapplique,maisetmoidanstoutça?Marredejouerlamorte,stop,çasuffit.N’ytenantplus, je tournelentement lapoignéeenretenantmonsouffle.Lapièceestplongéedansla

pénombreetuncalmeolympienyrègne.Maisoùsont-ilspassés?J’oseunpasen-dehorsdelachambreet un léger craquement sousmonpiedme fait sursauter.Mon cœur bat la chamade,mesyeuxbalaientrapidementlapièce.N’importequoi,jeneparticipepasauxHungerGamesnonplus!Zoé,reprends-toi,aupiretudevrasexpliqueràtameilleureamiepourquoitusorsdelachambredetoncolocataireavecsesfringuessur lecul!Fuck, jenesupporteraipasuninterrogatoiremaintenant,alorsqu’elleestvenueletirerdulit,demesbrasaupiredesmoments.Personne.Jerespiredenouveauetc’estsurlapointedespiedsquejefaisletourdel’appart.Sonsac

estencoresurlecanapé,signequ’elleesttoujourslà.En arrivant dans le couloir, je perçois une faible lueur filtrer sous la porte de la chambre deLola.

Trouvés!Jetendsl’oreillemaistoujoursaucunson.Etmaintenantjefaisquoi?Du bout des doigts, j’entrebâille doucement la porte et découvre des jambes enlacées sur le lit.

Focalisée sur le peu que je vois, je n’ose plus esquisser le moindre geste, pas sûre de vouloir endécouvrir plus. Mon cœur cogne un peu plus fort dans ma poitrine et une tonne d’images plusdésagréableslesunesquelesautress’insinuentdansmatête:leslèvresdeBensurmonamie,lesmainsde Lola caressant le torse de Ben…Reprends-toi, Zoé, la solitude t’a rendue parano ! Ben et Lola,BenolacommeJaydens’amuseà lesappeler,ontune relationassezparticulièremais fautpasabuser !Lolaestbientropamoureusedesonhommepourfaireuneaussigrossebêtise.Sij’hésitequelquessecondes,lacuriositémeronge,mepousseàsavoircequ’ilenest.D’unemain

moiteetfébrilesurlaporte,jel’ouvredavantage.Assezpourenvoirplus,pourenvoirtrop.Assezpourleregretteramèrement.L’hommequiaréussiàabattremesdéfenses,auquel jemesuisdonnéecorpsetâmeilyaquelques

heuresàpeine,dortpaisiblementdanslelitd’uneautre.J’aidécidédelâcherprise,desuccomberàcettepassiondévorantequimeconsumaitdepuistroplongtempspensantqu’ilenétaitdemêmepourlui.Jemerendscompteunpeutardquecesentimentn’estpaspartagé.Étendudetoutsonlongsurledos,latêteenfouiedanslescheveuxdeLolaetsesbrasreferméssurlecorpsdecelle-ci,Bensembletellementàl’aisequecettescène,quimeparaîtgrotesque,prouvequ’ellen’ariend’exceptionnelle.Combiendefoiscelaest-ilarrivé?Mameilleureamieestpresqueallongéesurlui,latêtenichéedanssoncouetunbrasserefermantsursesflancs.JegrincedesdentsenconstatantqueBenn’apasprislapeinedes’habillerdavantage.Àmoitiénuaveclafemmedesonpotedanslesbras…Iln’yaquemoiquitrouveçachoquant?Bordel,maisilsepassequoiici?Tremblante, je recule, l’esprit totalementembrouillé.Lavision troubleet lesyeuxdans levague, je

trébuche.Unequestion:qu’est-cequ’ilsepasseentreeux?Touts’obscurcitdansmatête.Jemarchesansm’enrendrecompteetm’affalesurmonlit…

Ben

J’aichaud,oppresséparlepoidsd’uncorpssurmoi.Lesyeuxencorefermés,jelaisselesimagesmerevenir.Esquissedesourire.Putainc’étaitdeloinlameilleurepartiedebaisedetouslestemps!Quandj’ai senti sondoute, sadifficultéàmaintenir sesbarrières, jen’aipashésitéuneseule seconde.Toutecetteputaindefrustrationquejegardaisenmois’estfaitlamallequandelleaenfinrendulesarmes.Jen’ai jamais ressenti un tel besoin, une telle urgence de posséder une femme. Il n’était pas questiond’amour, de tendresse ou de délicatesse. Juste d’assouvir cette passion quime prenait aux tripes.Maqueue n’avait qu’une envie : être enfouie au plus profond d’elle. Et pourtant après…Les choses ontcomplètementchangé.Si j’aiprisunpieddemaladeà labaiser sauvagement, lui faire l’amourpar lasuitem’a complètement retourné. Il y avait quelque chosedegrisant à la voir prendreduplaisir, à lasentirfrissonnersousmoncorps.Franchementjen’aipasdemotexcepté:extasesuprême!Ledésirquibrillait dans son regard, son corps qui réagissait aumoindre contact dema peau sur sa peaum’a faitouvrirlesyeux:l’avoirunefoisestloind’êtresuffisant.Jelaveux,pointbarre.L’interprétationviendraplustard.Enmerefaisantlefilm,mesmainsseremettentspontanémentenmouvement.Lanaissancedesesfesses,sesflancs,sonépaule…Mesdoigtss’arrêtentdanssescheveux.Quelquechosecloche:ilssonttroplongs!Mesyeuxs’ouvrentengrandsurunemassedecheveuxroux,monbrasretombeaussisec.Merde,Lola

!Toutelafindesoiréemerevientdanslatronche.Jetournelatêteversleréveilàcôtédemoi,maisilestdébranché.Merde,jesuismal!Àpartmonboxer,jen’airiend’autresurmoi.Ilestquelleheure,bonsang?JedétachelebrasdeLolaagrippéàmoicommedulierreetregardesursamontre:23heures.Bordeldemerde!J’aidûm’endormirsansm’enrendrecompte.Unrapidecalculetjesuisdéjàentraind’essayerdem’extirperdestentaculesdelafautive.Jedevaisuniquementl’aideràs’endormir…Sûrquematêteestdéjàmiseàprix.Troisheuresquej’aifaitfauxbonàZoépourvenirconsolermaprincesse.J’imaginedéjàlaséried’insultes,danssalanguematernelle,àlaquellejevaisavoirdroit.Franchement,siç’avaitétél’inverse,jenepensepasquej’auraisététendrenonplus.Sijerésumebien: j’ai laisséseuledansmonpieulafemmedemesfantasmeslejouroùelleaccepteenfindemelaisserlatoucher.Jem’occupe de sa meilleure amie en pleurs parce quemon pote a encoremerdé avec elle. Je me suisendormiaulieud’allerlarejoindreetdeluirefairel’amourcommej’encrevaisd’envie.Riend’autreàajouter?

Sérieux,Jayauraitpuattendredemainavantdeluifairesacrisedejalousieàlacon!Toutçapourunvoisinquiapparemments’inscritsurunelonguelistedemecsquidraguentLola.Ons’enfoutbordel!Franchementjenepensaispasenavoirpouraussilongtemps,ilsfontchiercesdeux-là,jen’avaispas

besoindeça.Surtoutpascesoir,jevoulaisjusteenprofiterunmaxavantqu’ellenemerejetteànouveau.Justeêtreavecelle.Enfinlibre.JelaisseLolaquihoquetteencored’avoirautantpleuréettraverselecouloiràlahâtemais

avecunecertainehantise:etsielleenavaiteumarredem’attendre?J’ouvrelaportedemachambreetjemestoppenetdansmonélan.Jefaisquelquespasàl’intérieur,mêmesic’estinutile.Zoén’yestplus.Jepasserageusementlesmainsdansmescheveuxàmedemandercommentjevaisfairepourrattraperlecoup.T’asgravemerdélà,monpote!Putain,mêmelelitaétéfait,commesiriennes’étaitpassé.Avecbeaucoupmoinsd’aplomb,j’avancejusqu’àlaportedesachambre.Lesilencerépondàmestroiscoups.—Zoé?Pasunbruit,pasuneinjure,pasuncraquementdelit.Laconnaissant,impossiblequ’elledorme.—Zoé,ouvre-moi.Fais-toiplaisiretinsulte-moiaulieudefairelagueule…Soupir.Elleadécidédemelefairepayerbiencommeilfaut.Onnepeutpassautercetteétapepour

quejeretrouvetoutdesuitelachaleurdesoncorps?Danstesrêves!LasimpliciténevapasdepaireavecZoé.Jefrappeunpeuplusfortsansplusderésultat.Bordel,elles’imaginequejevaislasupplier,c’estencoremalmeconnaître.—Jesuisdésolé,j’auraisdûrevenirplustôt!Allez,mabelle,ouvrecetteporte…sinonj’entreavec

ousanstonaccord.MenacerZoé?Jelèvelesyeuxaucieldevantmapitoyableapprochepourluiforcerlamain.Tantpis,

je n’irai pas plus loin dans les tentatives de séduction.De toute façon, elle a déjà compris que je nemenace jamaisen l’air. Je l’imaginedéjàpostéederrière laporte,brascroisés,àm’attendredepiedsfermes.Enfin,siellen’apasfermélaporteàclé!J’abatslamainsurlapoignée.Mesépauless’affaissentdesoulagement:ellenes’estpasenferméeà

double tour. J’ai peut-être une chance finalement. La chambre baigne dans le noir total et il me fautquelques secondes d’adaptation pour réussir à distinguer les choses uniquement avec la lumière ducouloir.—Maisc’estquoicedélire?J’allumeetfouille lapiècedesyeux.Vide.Unboxeretun tee-shirtàmoigisentsur leparquet.Une

montéed’adrénalinemeparcourtlacolonnevertébraleetjeretournedansmachambrecommesij’avaispulalouper.Non,nefaispasça,Zoé…Onn’enestpluslà!Jerécupèremontéléphonesurlacommodeetl’appelletandisquejemedirigeverslasalledebains.

Unesonnerie,deux,trois,quatre,répondeur.—Putain!Je raccroche nerveusement et recommence plusieurs fois. Les muscles contractés, la mâchoire

douloureusetellementjeserrelesdents.Aufinal,jepassetoutl’appartaupeignefinpuisjemerendsàl’évidence:Zoés’esttiréedecheznous.Ellemefuitunefoisdeplus.

Chapitre17

Zoé

—Situnerépondspas,jevaisfinirparlefaireàtaplace!Tropobnubiléepar lachorégraphiedemon téléphonesur la table, jenevoispas Julia revenirà sa

place.Àsavoix,jesorsdemacontemplationetglisseledoigtsurl’écranpourfairebasculerl’appelsurmaboîtevocale.Encore.Àchaquefois,c’estlemêmescénario: lesbattementsintensifsdemoncœurquis’emballeetlenomdeBenquis’affichesanssurprise.JelèvelesyeuxversJuliaquiparaîtamuséeparlasituation.Aumoins,ilyenaunequeçafaitrire!—Excuse-moi,c’estpastrèssympapourtoi,jevaisl’éteindre.—Non,çanemedérangepas.C’estjustequepourinsisterautant,jemedisquecedoitêtreurgent!Unrireamers’échappedemeslèvres.Uneurgence?Lablague!Àpartvouloirsefoutreouvertement

demoi, jenevoispas laquelle ! Je finismonverredevodka-pommed’uneseule traiteavantde fairesigneauserveurdemeremettrelamêmechose.—Non,t’inquiètepas,toutvabien.Siellenerelèvepas,jevoisbienqu’ellen’ycroitpasvraiment.Pourtant,ellemesouritgentimentet

acquiesce.—Bonalors fautque tum’expliques.Çavafaireuneheurequ’onest lààenquiller lesverreset je

commenceàavoirunpeuchaud.Vas-tuenfinmedirepourquoit’avaisbesoindemevoir?Elledétourneleregard,soudaingênée,trituresonverreuninstantavantdeleclaquersurlatableetde

meregarderd’unairdéterminé.—D’accord…Jet’aidéjàparlédemonex,tuterappelles?Ehbien,toutcequetum’asditatourné

unlongmomentdansmatête.Tuasraison,jenepeuxpasallerdel’avantsijecontinuedepenseràlui.Alorsj’aisuivitonconseilet…hierj’aidécidédeprendreleschosesenmain.Ilyacemecaubureau…Ons’entendbienetjesaisquejeluiplais,maisjusque-làj’aitoujoursrefusésesavances.Jenesaispascommentluifairecomprendrequej’aichangéd’avissanspasserpourunegourde!—Maisc’estsuperça!Enfinunebonnenouvelle!Ducouptuveuxsavoircommentleluidirequand

tuleverras,c’estça?—Oui, enfinnon.Rigolepasmais jeneme senspascapablede lui avouer en face, alors… jeme

disaisquejepourraisl’appelerici,avectoiàmescôtés?Jenepeuxm’empêcherderiredevantsoncôtéinnocentetpeusûrd’elle.Detoutesmesclientes,Julia

estvraimentcellequi sedémarque.Elleestbelle, attachante,gentille,drôle…Parfois jemedemandequelleaidejepourraisluiapporter.C’estd’ailleurspourçaque,decliente,elleestvitepasséeàcopine!—OK,donctuvassimplementl’appeler,luiproposerdevousvoiràl’extérieurduboulotetmoije

restelà,ensoutien.Tusaisquoiluidire?

Sontéléphoneenmain,ellehochelatête,soudainconcentréesurlediscoursqu’elleadûpréparer.Jeluiadresseunsourired’encouragementtandisqu’elleporteletéléphoneàsonoreille…Pourraccrocherprécipitammentetlelâchercommes’illuibrûlaitlesdoigts.—Bonsang…Jesuisuncasdésespéré!Paslapeinedechercherd’autresclientes,tuvasfairefortune

avecmoi!—N’importequoi,etpuist’esplusunecliente,justeunecopinequiabesoind’uncoupdepieddans

le cul pour avancer !T’asun sex appealdemalade et t’es lagentillesse incarnée, faut juste réussir àoubliercetexdemalheurquit’asflinguétoutetonassurance.Cemecestunconnardetneteméritaitpas.Quandtuaurascomprisça,t’aurasplusbesoindemoi.Àl’évocationdesonex,ellesecrispelégèrement.Jenesaispasexactementcequecethommeluia

fait mais elle devait sacrément l’aimer pour être encore fragilisée aujourd’hui. Inconsciemment, mespensées se tournent vers Ben et Lola. Est-ce que, elle aussi, a été trahie de la pire des manières ?D’accord,Benetmoineformionsmêmepasunsemblantdecouple,maisjem’étaisaccrochéeplusquejenelepensais.QuantàLola,jenesaisvraimentplusquoienpenser,jenelareconnaispas.Nousquipartagionstout…Combiendechosesm’a-t-elleencorecachées?Bonsang,ellemedéçoittellement!Merde,Zoé,arrêtedepenseràeux,t’eslàpouroublierdurantquelquesheures!—Etsipourcesoirtutecontentaisdeluienvoyerunmessage?Elleselaissetombercontreledossier,soulagéeetdétendue.—Ohoui,çajepeuxlefaire!Tandis que Julia est concentrée sur son téléphone, lemien semet de nouveau à vibrer. Je devrais

l’éteindre, pourtant j’en suis incapable. Je suis autant rassurée qu’énervée de voir la photo de Bens’afficher.Quands’est-ilrenducomptequej’étaispartie?Est-cequ’ilm’attendencore?Qu’est-cequ’ilsepasseentreluietmameilleureamie?Avantquej’aieletempsdeprotester,Julias’emparedemontéléphoneetsesyeuxsemettentàbriller

devantl’écran.—C’estpaslemecdetonsite?—Si…C’estlui.Sonregardprendune teinteplussombreets’attardesur laphoto,unpeu tropàmongoût.Ouais, je

sais…Ilfaitceteffet-lààtouteslesfemmes.Moiycompris,mêmesij’aitoujoursfaitensortedenepasleluimontrer.J’aichoisiunephotodeluitelquejel’aiconnu:sanssabarbedetroisjoursetaveclescheveuxpluscourts.Jeletrouvaisbeaucoupplussexyàl’époque,maispourjenesaisquelleraison,j’aichangéd’avisdepuis.Bordel,fautquej’arriveàmelesortirdelatête!—Etcomments’appelletonpetitami?—Ils’appelleBenmais…c’estpasmoncopain.Mavoixestsoudainementgrave.Maisqu’est-cequ’ilfoutceserveur?J’ailagorgetellementserrée

quej’aidumalàdéglutir.—D’accord,mais il s’est passéquelque chosepour qu’il te harcèle depuis tout à l’heure !Et tout

porteàcroirequeçasentlamerde.Jeplisselenezdevantcetteconstatation.Ellenepouvaitpastomberplusjuste.—T’inverseraispaslesrôleslà?C’esttoncasqu’onestcenséétudier,paslemien!—Oharrête,çachangeunpeu!Etpuis,jepeuxaussiêtrelàpourtoi.Bonjesuispaslamieuxplacée

pourdonnerdesconseilsmaisjesuistrèsdouéepourécouter.Lescopinesc’estfaitpourça,non?

Elle sepenchepar-dessus la table et prendmamaindans la sienne.Elleme regardeun instant, lesjoueslégèrementrosiesparl’alcooletunsourireamicals’étirantsursonjolivisage.—Je t’aimebien,Zoé, sincèrement.Etmescopines, je lesdéfendsbecetongles,alorsçame rend

tristequandjetevoisdanscetétatpourunmec.Jeleconnaispasmaisjepeuxtedirequ’ilneteméritepas!—T’esgénial,Ju!Sesparolesontledondemeréconforter.Ellearaison,jemeprendslatêtepourunhommequin’en

vautpaslapeine.J’aidelachanced’avoirrencontrécettefille.Çatombevraimentbien,siçasetrouvec’estlaseulepersonnequ’ilmeresteici…—Ouijesais…Dommagequ’enamourjenesoispaspareille!Unsoupiràfendrel’âmes’échappedesonpetitcorpsetelleselaisseretombersurledossierdesa

chaise, un vrai sketch à elle toute seule ! Sa petitemoue boudeusem’arrache un rire.Attends que jem’occupedetoi,mabelle,etonenreparlera!Montéléphonerefaitsadansediabolique,telleunepiqûrederappel.Commesij’avaisbesoindeça!

Je souffle un grand coup et appuie longtemps sur le bouton, la belle gueule de Ben disparaissantdéfinitivement.—C’estvrai,maiss’il fautque jeparledemavie, ilvamefalloirde l’aide !C’estpasdansmes

habitudesdemelivreretjesuiscomplètementperdueavectouslesrebondissementsdemajournée.Bref,j’aibesoind’unverre,dedeuxoupeut-êtremêmedeplus!Sonrirerésonnedanslebarbondé,entraînantlemienaupassage.Cettefilleestexactementcequ’il

manquaitàmavieici!Elleselèved’unbondetjelasuisduregardjusqu’aubar,commelaplupartdesmecsprésents.Ellemarche,droitecommeunIenprenantsoind’éviterlesregardsdeshommesqui,eux,nesegênentpaspourlamatersansdiscrétion.Elleneserendpascomptedesonpotentiel,c’estdingue!Àpeinetroisminutesplustard,ellesepointeavecdeuxshots.OK,letonestdonné!Aveccequej’ai

déjàbuendébutdesoirée,jesensquejevaismalfinirmoi!

*

—Etdonc…—Etdoncquoi?Jemesuistirée,j’allaispaslesborderetleurchanteruneberceusenonplus!J’ai

hésité à faireun scandale, à leur jeterun seaud’eau…Saufquec’estpasparcequ’onaeuunebaisephénoménalequej’aiunquelconquedroitsurlui!C’esttoncoupdefilquim’asauvée,jenesaispascequej’auraisfaitsinon…—Julia,grande sauveuse…Ouais, çameplaît !Par contre,pitié, t’es restéeun longmoment àme

parlerdesafaçondetefairel’amour,quec’esttonmeilleurcoupetj’enpassealors,s’ilteplaît,n’enrajoutepassinonjevaisfinirparsaignerdesoreilles!J’aidéjàtropd’imagesdanslatêteetjen’aimepasvraimentça!—Pourtant,moi,j’aibeaucoupaimé!Tropmême…—Zoé!!!Commentpasserdelacolèreàunéclatderireensipeudetemps?Çac’estl’effetJulia.Bon,peut-

êtrequel’alcoolm’aideaussimaisbonsang,cettefilleestabsolumentgéniale.Etlepirec’estqu’ellesemble sérieuse.Les sourcils froncéset lavoixgrave, ellemedéfiedecontinuer.Elle claqueun shotdevantmoietboitlesiend’unetraiteengrimaçant.Jel’imite,laliqueurmebrûlelatrachéeetm’emporte

unpeuplusdansunétatdebien-être.Ellefaitsigneaubarmandenousresservir…Bordel,jevaisêtremalade!Ellechercheàmesaouler?

Ah non, ça c’est déjà fait. À me faire tomber dans un coma éthylique peut-être… ou à profitersexuellementdemoi…N’importequoi!Etpourquoijemeparleàmoi-même?Zoé,arrête,tudeviensgravelà…Ouais,jesais!Ellemefileuncoupdepieddansletibia,mesortantparlamêmeoccasiond’unmonologueentremoi

etmoi.Jemeretiensderirepournepasvirercomplètementfolleetlaregardemefairedessignesdetêteendirectiondubar.—Quoi?Fautquej’aillechercherlesverres?Juju,jesuismêmepassûred’êtreencorecapablede

meleverlà!—Maisnon,regardecommentlebarmantedévoredesyeux…Jetourne la têteaumomentoùcelui-cimeregarde.Unsourirecraquantfendsonvisageavantdese

concentrersurleclientdevantlui.—Jecroissurtoutqu’ilsedemandecombiendeverresd’alcoolfortdeuxfillescommenouspeuvent

ingurgiteravantdevomir.Ilapeurdedevoirpasserlaserpillièreaprèsnotrepassage!—Ça fait uneheurequ’il tebouffedesyeuxderrière sonbar et, crois-moi, c’estpas la serpillière

qu’ilaenvied’avoirenmain!Tandis qu’il contourne les tables et avance dans notre direction, je le passe rapidement en revue :

blondinettypecalifornien,plusjeunequemoiassurément,sourireravageuretsûrdelui…Ouais,plutôtmignon.—C’estlemomentdememontrertestalents,coach!Lesyeuxexorbités,jemetourneversmanouvelleamiequichuchotecesmotsjusteavantquel’appât

arrive à notre niveau.Elle veut vraiment que je luimontre, làmaintenant, comment on fait ?Avec ungrammedanschaquebrasetsûrementunevoixunpeupâteuse,jedoisluidonneruncourssurlepouce?OK,jerelèveledéfi!Jeleregardeposerleplateausurlatableetattendsunsignedesapart.Sesyeuxs’attardentquelques

secondessurmapoitrineaumomentoùildéposemonverre.Bingo!—Merci…Beaucoupdemondecesoir,hein?Monamieetmoionteregardedepuistoutàl’heureet

tunousdonneschaud…àcourirdanstouslessens.Il suspend son geste et me regarde un instant sans répondre. Oui, c’est bien un sous-entendu ! Un

sourireencoinsedessinesurseslèvreset,lesyeuxrieurs,ilhochelatête.—C’estvraiquec’estlafoliecesoirmaisjecroisquej’aieudroitàlameilleuretable!Vousfêtez

quelquechoseenparticulier?Lesavant-brasposéssur le rebordde la table, iladresseunsourireàJuliaavantdeconcentrerson

attentionsurmapersonne.Plusdedoute,ilestpourmoi.—Absolumentrien,onnoienotresolitudedansl’alcool…Jedisaisjustementàmonamiequelebar

estremplid’hommesetqu’aucunnesembleintéresséparl’unedenous.Leconstatestplutôtdur!—Ça,c’estparcequevousn’entendezpastoutcequiseditaubar!Vousêtesl’attractiondelasoirée

depuisquevousêtesentrées.Sivousvoulezmonavis,jecroisquevousleurfaitespeur!Jeprendsunairfaussementdésabuséetboisunepetitegorgéedemonbreuvage.Jem’accrocheàson

regardetdoucementmalanguevientcaresserlapulpedemalèvreavantdemordrededans.Trèscliché,mais ce geste marche à tout les coups. Ses yeux chocolat prennent une teinte un peu plus noire et il

déglutitpéniblement.—Peur?C’estencorepirequecequejepensais!—Enfaitc’étaitplutôtuncompliment!Mesclientsnesontpashabituésàvoird’aussibellesfemmes

danslecoin.Etjepenseques’ilsentendaientcepetitaccentceseraitpire!Il se penche en avant, assez près pour que je puisse sentir l’odeur de son aftershave et plante ses

prunellesdanslesmiennes.—Vousêtesbientropdangereusespoureux!—Etnotreserveur,ilalegoûtdurisque?Un groupe de jeunes à côté l’interpelle. Il se redresse, récupère son plateau et leur fait signe de

patienter un instant. Son bloc-notes enmain, il griffonne quelque chose dessus avant deme tendre lepapier.—Monnuméro…Çatombebien,jesuisplutôtdugenreàaimerledanger.Appelle-moiquandtuveux,

mabelle.Surunclind’œil,ils’éloignejusqu’àlatabled’àcôté.JemetourneversJulia,latêteposéedanssa

paume,ellen’arienloupéduspectacle.—Tumevendsdurêvelà!Iltemangeaitdanslamain,c’estàpeines’ils’estrenducomptedema

présence.Enmêmetemps,ilneloupepasgrand-chose,lepauvre…—Arrête ou je vais vraiment te lemettre ton coupde pied au cul !Bon, ça c’est le rentre-dedans

versionsoft,parcequ’onn’estpasdeschiennesnonplus!Maisça,c’estquandtuvoisquelapartieestgagnéed’avance.Lebutestdel’ameneràcroirequec’estluiquialepouvoir.Etce…Jedéplielepapierpourvoirlenomdenotrecobayedelasoiréeavantdelechiffonner.—…Jude en a été le parfait exemple.C’estmoiqui orientais la conversationmais en lui laissant

croirequec’étaitlui.Questiond’ego…Jejettelaboulettedepapiersurlatabledevantlesyeuxexorbitésdemacopine.Ellelerécupèreetle

défroisseenjurantentresesdents.—Maisqu’est-cequetufais?—T’asl’occasiondepasserdubontemps,alorsparsolidaritéavectesclientesquiespèrentunjour

arriveràcerésultat,tuvaslegardersoigneusementetlerappeler!—Quoi?Noooon!C’étaitjustepourtemontrer!Cemecnem’intéressepas,iln’estpas…lui.Lesyeuxfermés,jelaisselesimagesdeBensebousculerdansmatête.Sesgestestendressurmapeau,

sa bouche, son regard fiévreux quand il était surmoi… J’arrivemême à sentir son odeur. Bordel demerde,fauttoujoursquej’enrevienneàlui.Àtâtons,jecherchemonverreduboutdesdoigtsetlefinisd’unetraite.Labrûlureeffacesongoûtdansmaboucheet,quandj’ouvrelesyeux,jedécouvremonamie,leslèvrespincéesetleregardfuribond.—Jem’inquiètepourtoi,Zoé,tuvasvraimentluidonnerunenouvellechancedetefaireencoreplus

mal?—Biensûrquenon…C’est fini toutça.De toutefaçon, ilaobtenucequ’ilattendaitdemoi, jene

l’intéressedéjàplus.Sesépauless’affaissentetsonsourireréapparaît.Avecbeaucoupdedifficulté,elleserelèveetattrape

sonsac.Cettepetitebrunecachebiensonjeu,elleauntempéramentdefeuenfait!Enamourelleapeut-êtredumal,maisenamitiéellesaittrèsbiens’yprendre.Çafaitdubiendesentirqu’elles’inquiètepourmoi.Ellemedonnelaforcedontj’avaisbesoinpouraffronterlasuite.Jemelèveàmontouretenfilema

veste.Ohbonsang…Çatourne!—Merci,grâceàtoijevaispouvoirrentrercheznouset…— Parce que vous vivez ensemble ? J’ai dû louper un épisode ! Je croyais que vous n’étiez pas

ensemble?Jemedébatsaveclabandoulièredemonsacquirefusedepasserau-dessusdematête.Maiscomment

çasemetcemachin?—Oh,c’estune longuehistoire!Jevischez luialors techniquement,oui,onvitensemble.Maisne

t’inquiètepas,iladûlâcherl’affairedepuislongtemps.Jevaisrentreretmecoucherdirect.—Ahd’accord!Mais…Enfinjeveuxdire…Etsitacopineesttoujourslà?Monbrassefigedanslesairsetunesoudainepaniquem’envahit.JepensaisuniquementàBenmaisle

problèmeestpluscompliqué.AffronterBen,jenesaisdéjàpassij’enseraiscapable,maislesaffrontertouslesdeux…Jelaregardeuninstant,interloquée.Unfrissondefrayeurmetraverseetjemelaisseretombersurla

chaise.Merde,non,jenepeuxpas!

Chapitre18

Ben

—C’estbon,j’aidonnélefeuvertpourlacommercialisationdeslunettesinteractiveshorsterritoireàl’instant.Putain,j’enrevienspas,Davis&Covaenvahirlaplanète!Lecombinécoincéentrel’oreilleet l’épaule, j’écouteJaydendéblatérerdepuiscinqbonnesminutes

surlesactionsmisesenplacedepuiscedébutdesemainealorsquej’essaiederépondreàcefoutumailen même temps. J’en ai rien à foutre de son récap, si ça m’intéressait j’aurais assisté aux réunionsd’information!Ilestsurexcité…Jedevraisl’êtreaussi.—Tum’écoutes,Ben?—Hein?Ouais,c’estbien,monpote.Silenceàl’autreboutdufil.J’enprofitepourvérifierleschiffresquej’annonceauclient.C’estceux

del’annéedernièrebordel!J’effacenerveusementetrecommence.—Etsinonj’auraisbesoindudossierHatcher.T’enesoù?DossierHatcher:étudehyperurgentequ’illuifallaitlimitelaveillepourlelendemain.J’aibosséen

continusurceputaindedossier,faitdesheuresdemaladeet ilprendlapoussièresursonbureau?Jegrincedesdents.—Ilestsurtonbureaudepuislasemainedernière,connard!—Maisc’estquoi tonproblème?Si t’esàcran,vacourir,vabaiser…Bref,défoule-toicommetu

veux,maisilfauttecalmer!Sérieux,mec,jenetereconnaispas!Sijesuisàcran?Ilsefoutdemoilà!J’aidûréconfortersacopine,userdetouslesstratagèmespour

luifaireoubliersacrise,resterprèsd’ellependantdesheureset louperuneputaindebaise…Toutçapourquoi?DesexcusesàdeuxballesetLolaluisautantdanslesbras!Tantmieux,affairerégléepoureux,maismoidanstoutça?—Monpote,c’estàcausede toisi toutpartenvrille !Toiet ta jalousie, j’enaimaclaque!Mon

appartc’estpasuneaubergeespagnole.T’asunenanagénialeamoureusedetoi,alorsouvrelesyeuxetfoutez-moilapaix!Jeraccroche,larageauventre.Ilsmefonttouschieràêtrederrièremoncul.Jem’enfermedansmon

bureau pour être tranquille et on arrive encore à venirme les briser. Je relis brièvementmonmail etm’apprêteàl’envoyerquanduncoupàmaportemestoppedansmonélan.Sansattendremonaccord,onouvrelaporteengrand.Lola, les traits tirés,faitsonapparition.Respire,Ben, taprincesseestaussiàcran.—T’aseudesesnouvelles?Toujours et encore cette question. Depuis qu’elle s’est rendu compte que sa meilleure pote avait

disparudelacirculation,Lolaestenmodepanique.Etbordel,jesuisdanslemêmeétatdenerfs.Troisjours.Troisputainsde joursqueZoés’estbarréesansexplication,sansmedonner lapossibilitéde la

rassurersurcequenousvenionsdepartager.C’étaitunesigrosseconneriepourelle?—Non,aucune.Comment lui direque j’ai joué au conavec sa copine ?Unmot et ellem’arrache les couilles !Un

problèmeàlafois.Pourl’instantleplusimportantestderetrouverlafugueuse,etsonsilenceradioestcarrément en train de me rendre malade. Je ne sais rien de ses activités, de ce qu’elle fait de sesjournées… Je ne connais pas grand-chose de sa vie finalement. Zoé n’est pas quelqu’un qui se livrefacilement, en tout cas pas àmoi !Elle s’est saoulée il n’y a pas longtemps avec une cliente, qui estdevenuesonamie,maisjenem’ysuispasintéressé.Résultat,onn’aaucunepiste!Lolas’affalesurlefauteuilenfacedemoiensefrottantlevisage.Letéléphonescotchéàlamainen

permanence et une tonnedequestions sans réponses.Çame faitmal d’être aussi impuissant face à satristesse.—J’avouequejenesuispastoujoursassezprésentepourZoémaisellemeconnaît,ellesaitqueje

feraisn’importequoipourelle…Bonsang,pourquoiellenemerépondpas?Non,ilyaforcémentuneraisonmaisj’arrivepasàmettreledoigtdessus.Elleenpinçaitpourunhommeladernièrefoismaisellenem’enapasreparlé.Bordel,jesuislapiredescopines!—Tuparlesdumecavecquiellecourt?Gardetonairdétaché…Nemontrepasquet’asenviedetoutdémonter…Respire,Ben!—Non,elleafaitallusionàuntype,uneespècedesalauddans…Sonregardrencontrebrusquementlemiencommesiellemevoyaitpourlapremièrefois.Àl’intérieur

c’estunvéritablecataclysme.Jesuissuspenduàseslèvrescommeunclébardentraindes’étranglerauboutdesalaisse.Elleveutdirequoi?C’estquicemec?—…tongenre!Silencetotal.Bordel, jevaisenprendrepourmongrade.LeregardnoirdeLolanedéviepasdesa

trajectoire,pasunbattementdecil,rien.Jelesoutiens,nelaissepastransparaîtrelestressquimonteenmoi.Sesépaulessedétendentetellefinitpars’affalersurledossierdufauteuilensoufflant.—Excuse-moi, je suis sur les nerfs ! J’avais imaginé que…C’est ridicule je saismais…Vous ne

pouvezpasvoussaqueralors…Bref,j’aicrucomprendrequ’elleaimaitbienunhomme,maisqu’ilétaitplutôtdugenre joueuralors jesaispas…C’estpeut-êtreàcausede lui,peut-êtrequ’elleafiniparsefaireavoiretelleavaitbesoindesechangerlesidées…Bonsang,jesuiscomplètementpaumée,çaneluiressemblepastoutça!AlorsZoém’aimebien?Àmoinsqued’autresluiaientproposéunjeumalsain,toutporteàcroireque

c’estdemoidontellesontparlé.Jeréprimelesourirequimenacedefranchirmeslèvresetmecontentedehocherlatêtecommeunpantin.Bordel,elleenpincepourmoi!Jenesaispasquoienpensermaisjedoisavouerquecettenouvellemeplaît.Beaucoup…Beaucouptrop.Çanem’avaitpasfaitçadepuis…DepuisBlue.Terrainminé,nevapasparlàBen!Soudain,letéléphonedeLolasonneetellesursauteaupointdelelâcher.Sejetantlimiteausol,elle

réponddanslaprécipitation.—Allô?…Salut,monchéri.Son regardvissé sur lemienperdde son intensité enune fractionde seconde.Soupir.Cen’estpas

encorepourcettefois…—Non,biensûrquenon…Tunemedérangesjamais,Evan.Attends,jevaisrejoindretononcleJay,il

vaêtrecontentdelesavoir.

Loladécampedemonbureau.Jecomprendsmieuxpourquoisacopinearéagicommeçamaintenant.Zoéestunesanguine,elledémarreauquartdetour.Avecelletoutestnoiroublanc,iln’yapasdejustemilieu.Sielleavraimentdessentimentspourmoi,commeLolal’alaisséentendre,alorselleaprismondépartcommeunrejet.Etcommeledernierdesabrutis,jemesuisendormiaulieud’allerlarejoindre.Mabarbecrissesouslefrottementnerveuxdemesongles.Marredecettefurieetdesontempérament

dechien!Jereportemonattentionsurmonécranetaumomentdevalidermonmail,jemerendscomptequeje

mesuis trompédedestinataire.Ras-le-bol, j’enaimaclaque.Jeréparemonerreur,balance lemailetéteinsmonécrandanslafoulée.Ilestàpeine14heures,etjen’arriveraiàrienaujourd’huiencore.Detoutefaçon,çafaittroisjoursquejenefaisquedelamerde.

*

UneheureàtournerdanslesruesdeL.A.enmotoaveclesnerfsàvif.Cettevillegrouilledemilliersd’habitants,etjesuisassezconpourimaginertombersurelleaucoind’unerue.Jenesaismêmepasoùchercher,parquoicommencer,maisjenesaispasquoifaired’autre.Siellerevientvivante,jejuredelatuerdemespropresmains!Quandj’arriveàl’appart,unsilencedemortm’accueille.Machinalementjevaisjusqu’àsachambre

oùrienn’abougé.Bordel,maisoùes-tu,Zoé?Encoreunevibrationdansmapoche.—Putain,lâche-moi,Lola,t’aurasdesnouvellesavantmoi!JegrogneenfaisantdéfilerlestroismessagesqueLolam’aenvoyésdepuisquej’aiquittélebureau.Je

prendssurmoipournepaslesenvoyerchier,elleetsonharcèlement,etmecontentedetaperlesmêmesmotsqueceuxque je lui ai répétés toute la journée :«Pasdenouvelles.»Lecul sur lecanapéet latélécommande dans la main, je fais défiler les chaînes sans réussir à me fixer. Sport, musique, film,politique…Esquissedesourire.C’estpaspossible,jesuismaudit!Pfff,jepréfèreencoreregarderunsoapoperaplutôtquedemetaperdemonpleingréleursériedebuveursdesang.Jelèvelebraspourzappermaisjesuspendsmongesteauclaquementdelaported’entrée.Mesmusclessecontractent,matensionmonted’uncran.Avantmêmedelavoir,jesaisquec’estelle.Jelesens.Jemelèveetquandmesyeuxseposentsurelle,unmélangedesentimentssebousculent:colère,soulagement,énervement…J’aiautantenviedelagiflerquedelabaiser.Stoppéenetdansl’entrée,ellesemblesurprisedemetrouverici.Ehoui,fautcroirequej’aieulenezfinsurcecoup-là!Lespoingsserrés,levisagecrispé,jelafixedurement.Elle estmorte !Aupremier pas que j’esquisse dans sa direction,Zoé sort de sa stupeur etdéguerpit dans sa chambre. Oh non, n’espère même pas t’en tirer aussi facilement ! Je la rejoins enquelquesenjambéesetpousseviolemmentlaporteavantqu’ellen’aitlapossibilitédelafermeràclé.Leclaquementsourdduboiscontrelacommodelafaitsursauter,luiarrachantuncridesurprise.—Tupeuxavoirpeur,jesuisd’unehumeurexécrable!T’étaisoù,putain?Ellerestesilencieuse,etj’enrage.Ledostourné,jelavoisjustesecouerdoucementlatête.Enclair:

jelafaischier!Safaçondem’ignorermerenvoiequelquessemainesenarrière,lorsqu’onsebattait,sepoussaitàboutdetouteslesmanièrespossibles.Unebouledefeugonfleetm’arrachetoutelatrachéeàmesurequ’elle remonte,provoquantungrognement sourd.Sonmajeurse lèveet jegrogneencoreplusfort,larageauborddeslèvres.—Zoé,merde,jeteparle!Autondemavoix,soncorpspivotebrusquementetunpetitrirecaustiques’échappedeseslèvres.Les

brascroisés,ellemedéfieduregard.—Alorsc’estcommeçaqueçasepasse:Monsieurparleetilfaudraitquej’écoute?Maisfous-moi

lapaix,Ben,j’aiaucuncompteàterendre!—Tuvischezmoialorssi,tumedoisdesexplications.Tutebarressansunmot,tucoupestontél…

Nonmaisqu’est-cequit’estpasséparlatête?—Commesiçaavaitréellementput’inquiéter!Nonmaisarrêtetonnuméro!—Monnuméro?Nonmaist’essérieuse?Çafaittroisjoursquetufaislamorte,bordel!!!Lagorgemebrûletellementjecriemais,bonsang,jen’arrivepasàmecontrôlerfaceàelle.Àlahâte,

ellefourredesfringuesdansunsac.—Tufaisquoi,là?Aucuneréponse.Ellem’ignorecomplètementetcontinuedebourrersonsacnerveusement.Ellen’est

pasrevenue.Ellecomptaitpasserencoupdeventpendantmonabsencepourprendrelenécessaireetserebarrercommeunefourbe.Cetteévidencemefaitpartirenvrille.Monpoings’abatviolemmentcontrelaportequicogneànouveaulacommode.—Maist’esqu’uneputaind’égoïste,enfait!Biensûrquej’étaisinquietetjeteparlemêmepasde

Lola!Ellelancecequ’elleadanslesmainssurlelitetsetournebrusquementversmoi,leregardpolaire.

Sesyeuxd’habitudesiclairs,limitetranslucides,meflinguentsurplace.—Maisoui,parlons-enjustementdeLola!Depuiscombiendetempstuprendstonmeilleuramipour

uncon?Jenecomprendspas;sacolèremepercutedepleinfouet.Abasourdi,j’aiunmouvementderecul.—Faispasl’innocentetvas-y…parle-moideLola!Raconte-moicequisepasseentrevous!—Maisqu’est-cequetumefais?Commentça,entreLolaetmoi?CequisepasseentreLolaetmoi…Onenestlàalors?Unsoupiretjemelaissetombersursonlit.

Marre de cette question, de toujours devoir me justifier… Fatigué par mon manque de sommeil àm’inquiéter justepourunecrisede jalousie à la con.Faceàmon silence,Zoé fourre toujoursplusdefringuesdanssonsac.—T’embêtepasàt’expliquer,tonsilencevauttouslesmots.Jevousaivustouslesdeuxenlacés,vous

medégoûtez.EtLola…Jenelareconnaispas.Ellen’auraitjamaisdûvenirici,c’étaitunegraveerreur.Elleestàdixmillelieuxdelavérité.Malgrétoutcequ’ilapudire,Jaydenaconfianceenmoi.C’està

causedesoncôtémachoetpossessifqu’ilaeudumalàdigérermarelationavecsanana.Jen’aijamaiseubesoindemelancerdansdegrandesexplications,ilmeconnaîtassezbienpourlireentreleslignes.Mais Zoé semble blessée. Je la connais assez pour savoir qu’elle ne se contentera pas de la versioncourte.Jeneluidoisabsolumentrienmaissijenemelivrepasunminimum,ellepartira.Lesavant-brasposéssurlescuisses,jeprendssurmoietmeconfiepourlapremièrefois.—Tacopineestlameilleurechosequimesoitarrivéedepuistroplongtemps…—Ohnonpitié!Tesexplicationsbateautupeuxtelesgarder!Bordel, mais pourquoi il a fallu que jem’attache à une chieuse pareille ? Jeme lève rapidement,

attrapesonsacd’unemainetlejetteàtraverslapiècepourattirersonattention.Gagné.Ellemefusilleduregardmais,aumoins,ellesetait.—Tuveuxdesréponsesalorsjevaist’endonner.Maistulabouclesettumelaissesparler.T’écoutes,

t’enpensescequetuveux,maisaprèslesujetestclos.D’accord?

Je n’aime pas particulièrement parler de çamais s’il faut en passer par là pour calmer Zoé, pourqu’ellereste,alorsjedoislefaire.Impassible,ellehochelatêteets’appuiesurlacommode,sonregardbraquésurmoi,attendantquejemelance.—Tum’assortiplusieursfoisquejen’aijamaismanquéderien,quejesuisnéavecunecuillèreen

argentdans labouche,mais tune saispas cequeça représente auquotidien. J’aipas eu ledroit à lapanoplie de la mère aimante et attentive et encore moins à celle d’un père disponible, juste à deuxconnardsquinepensaientqu’àeux.Toutcequilesintéressaitc’étaitquejerentrebiendansleurmoulepournepasentacherleurréputationetleurpetitevie.Maisl’enversdudécorn’avaitrienàvoiraveccequis’étalaitdanslesmagazines.J’aigrandiavecdesinconnus,desfantômes.Àcausedemonéducation,j’aiapprisàcachermesfaiblesses,ànepasm’encombrerdepersonnesquinet’apportentrien,àrefoulermessentiments.Zoé lève les yeux au ciel et souffle d’exaspération. Ma patience a des limites, repasser par ces

conneriesnem’amusepas.Ellecroitquec’estfacilepourmoi?—Putain,arrêtetoncirque,j’yarrive!D’unsignedelamainaccompagnéd’unsourirenarquois,ellemefaitsignedecontinuer.Jesuisàdeux

doigtsdechangerd’avisetdelâcherl’affaire.Jelafoudroieduregard,encoreuneréflexionetc’estmoiquil’aideàfairesavalise!Mamenacesilencieuseémise,jepoursuismonmonologuerasoir.—Àdix-septans,j’étaisàleurimage:unconnardarrogantetdestructeur.Bref,j’envoulaisàlaterre

entière.Saufquejesuistombésurpirequemoi:Jay.Ilvenaitdeperdresonpèreetpassaitsontempsàsebattre,uneaubainepourunpetitmerdeuxdansmongenre.J’avaisqu’uneseuleenvie,ledémolirouqu’ilmedémolisse.Ons’estbattuunnombreincalculabledefois,avecousansraison,jusqu’aujouroùilestvenumetirerd’unsaleplan.Bizarrementàpartirdecemoment-làonnes’estplusquittés.Andrew,son frère,m’a pris sous son aile et, putain… ça faisait du bien d’avoir une vraie famille ! Puis j’airencontréBlue…Elleetmoi,c’était…Bref,elleacontinuédefissurermacarapaceetjecommençaisàêtrebien,àêtreenfinmoi-même.Maismonpèreasentiqu’ilavaitmoinsd’emprisesurmoietafiniparfoutresonnezdansmavie…Perdudansmes souvenirs, jemetspeuàpeudesmots sur tout ceque je ressens, toutes ces choses

refouléessur lesquelles jenem’attarde jamais.Jusqu’àocculter laprésencedeZoé,sonregardplantédanslemien,avidedetouscesdétailsquejepréfèremaintenanttaire.—Bref,jemesuisprisunegrosseclaquedanslatronche.J’aiperduBlue,tiréuntraitsurmafamille

etjesuisrepartidansmestravers.Maconfiance,jenel’accordaisplusqu’àJay,leseulrescapédemonpassé.Dans lavie, j’aiapprisunechose : si tubaisses lagarde, tu te faisbouffer.SaufqueLolam’adémontrélecontraire.Elleadébarquédujouraulendemainavecsadouceuretsanaïveté.Legenredenanaquinecadreabsolumentpasavecdesgarscommenous!Jayluiafaitlamisèreetsansréfléchirj’aipréférémemettremonpoteàdospourlaprotéger.Jelapensaistropfragilepourtomberamoureused’untypecassécommelui…Etfinalementjemesuisroyalementplanté!Ilyacetrucchezellequifaitquetut’attachesvite.Tucroislacouver,ladéfendreetenfaitc’esttoutl’inverse.C’estellequitefaitdubien,qui t’aideà te reconstruire.Doncouais, je l’aime…J’aibesoind’elleautantqu’elleabesoindemoi,maispascommetulecrois.Lola,c’estmonangegardien,cellequiaréussiàfaireexplosermesderniersremparts.Ses doigts glissent dansmes cheveux,mais j’arrête son geste et garde sesmains dans lesmiennes.

L’éclat troublantdesesprunellesmerassure, jen’ydécèleaucunepitié, justedelacompréhension.Laréactiond’unepersonnequiacertainementvécudeschosessimilaires.Plus j’exploreson regard,plustoutmesembleévident.

—Ben,jecroisquel’onabeaucoupplusdepointscommunsqu’onauraitpulepenser.Ilsembleraitqu’onaitlemêmeange,touslesdeux,mais…Pourtoi,jeveuxbienlapartager.Sonlégersouriremepousseàvouloircreusercelienquinousunitetnouséchappeenmêmetemps.—Etselontoi,c’esttoutcequenouspartageons?—Nous?—Oui,tuastrèsbiencompris:qu’est-cequejesuispourtoi?Ma question la prend au dépourvu. Elle ouvre plusieurs fois la bouche mais aucun son n’en sort.

Merde,c’estbienunepremière…Pourunefoisquej’attendsvraimentuneréponse!Mesmainsremontentsursesbras,sesépaulesetserefermentsursanuque.Esquissedesourire.La

voiraussiperdue,troubléefaceàmoiaquelquechosedegrisant.Apparemmentjeluifaisdel’effet,maisva-t-elle finir par l’avouer ?Changement de tactique de sa part : un haussement d’épaules, un regardmutinetj’aienfacedemoiuneautrefacettedudiamantZoé.—Tucherchesàmeséduire,là?Sa voix n’est pas aussi assurée qu’elle le voudrait, elle doute. Putain, j’en aimarre desmontagnes

russes, du chaud froid. Je la désire à un point qu’elle n’imaginemême pas ! Cette nana je la veux !Commentrésisteretluifairepayersondépartalorsquelafaçondontellemeregardesuffitàmerendredingue?Jeresserremaprisepour la forceràserapprocherdemoi.Sesyeuxfiévreuxfontdesva-et-vient entre lesmiens etmabouche. Jeme rapprocheunpeuplus,monnez frôlant le sien, son soufflemaintenanthaché sebrisant surmes lèvres.Si ellemeveutvraiment, elledoitme lemontrer. Jeveuxqu’ellefasseledernierpasquinoussépare,qu’elleviennem’embrasser.Desdoigtsfraisglissentsousmontee-shirt,remontentsurmesabdos,déclenchantdesfourmillements

maisc’estleregardhypnotiquequ’ellem’adressequimeprendauxtripes.Desyeuxbrillantsd’undésirqu’elletentedecanaliseralorsquejevoudraisqu’ellelâcheprise.Cettesituationmerendaussimaladequetoimaisencoreuneffort,Zoé,prouve-moiquecequeLolam’aditcematinestvrai.Millimètreaprèsmillimètre,ellecomblecettefichuedistanceentrenous.Seshanchessecollentàmon

bassin,sesbrasencerclentmonbusteetseslèvresseposentenfinsurlesmiennes…Maisnebougentpas.Monsourirenarguesafrustration,sonbesoinquejecède.Maissitumeveux,embrasse-moiVRAIMENT!—T’attendsquoidemoi,Ben?À son tour de sourire pour se donner de la contenance. Colère, confession, désir et maintenant

amusement…J’enrigoleraiss’iln’yavaitpascette tensionsexuellequimevrille lecerveau.Quelquechoseachangéouestsurlepointdeseproduire.Jenesaisabsolumentpascequivaenémergermaisjen’aiqu’uneenvie:yêtredéjà.Montéléphonevibredansmapoche,sonnedanslevide,passetotalementinaperçu.Bordel,Zoé…Je

te laisse le contrôle alors arrête de réfléchir et embrasse-moi ! Mes doigts explorent ses cheveux,caressent les courbesde ses flancs, s’arriment à seshancheset s’incrustentdans la chair tendrede sapeau,lamarquent.Réagis,arrêtedejoueravecmesnerfs,defrôlermeslèvres:prends-les,putain!Encoremonportable.Jesuisàlalimitedelefracassercontrelemur.Sesonglesrougissentmondos,

la pointe de sa langue humidifie sa bouche, et lamienne au passage, etmon désir de la savourer esttellementobsédantquejesuisàdeuxdoigtsdecraquer.Dépêche-toi,Zoé,oujereprendslesrênes!Troisième relance. Si c’est Lola qui cherche encore à s’immiscer entre nous, elle rêve !Mais Zoé

s’écartelégèrement,unsourireencoin.—J’auraisdû répondreà tes appels au lieud’éteindremon téléphone.Si lapersonne insiste autant

c’estqueçadoitêtreurgent,tudevraisrépondre…Commentose-t-ellemedireçatoutencontinuantàdévorermaboucheduregard?J’enaiabsolument

rienàfoutredesautreslà.Mais,àsamanière,ellemefaitcomprendrequ’elleaeutortdefuiralorspourcettefoisjecapitule.Soupir.Encoreuneinterruptiondecegenreetjenerépondsplusderien:jeprendset jeme sers jusqu’à l’overdose.Comme si elle avait comprismon intention, samain glisse dansmapoche, caresse sciemment mon érection et en extirpe l’objet du crime. Son doigt glisse sur l’écran,décroche sansmême vérifier l’interlocuteur etme le tend avec un sourire faussement innocent. Petitegarce…Lola,tutombesvraimentmal…Saufqueladoucevoixquirésonneàmonoreillen’estpascelledema

princesse.Commejem’endoutais,ceputaind’appelmetfinànotrerapprochement.

Chapitre19

Zoé

«Oui,mabelle.»…«Tusaisbienquejenepeuxrienterefuser.»…«Bougepas,jeviensm’occuperdetoi.»…Nonmaisquelsalaud,cemec,commentj’aipumefaireavoirunenouvellefois?!Jehurleet tape frénétiquementdespieds,cherchantàsortir toutecette ragequimanquedemefaire

imploser.Lepirec’estquejesavaisquec’étaitunemauvaiseidée!J’auraisdûm’acheterdenouvellesaffairesoucontinuerdepiquercellesdeJuliaplutôtquederevenirici.Bordel,jevaisdevoirsquatterchezJujuencorecombiendetemps?Encorecombiendejournéesàletraiterdetouslesnomsavantqu’ilnesortedematête?Ilselivreàmoi,seconfiepourlapremièrefoissurunepartiedesonpassé,mefaisantmesentirassez

prochede lui, et la seconded’aprèsc’est ladouche froide !Tropaccaparéepar les sensationsdesesmainssurmoi,desabouchechaudeetdesonregardbrillant, jen’aipassudéceler lemomentoù ilarangé lacartede la sincérité.Maismerde,qu’est-cequinevapaschezmoi?Etpuiscettequestion :Qu’est-cequ’ilestpourmoi?Direquej’aifailliyrépondre!Etc’estLola,lanaïvedansl’histoire?—T’estropconne,mapauvreZoé!Jenesaispasquiétaitcettefilleautéléphoneavecunbesoinsiurgentqueçanepouvaitpasattendre,

maisjepeuxlaremercier.Etdirequ’ilaeuleculotdemedemanderdenepasbougerd’ici,qu’ilfaisaitauplusvite!Maisquel…—Connard!Jesorsmontéléphoneetl’allumepourlapremièrefoisdepuistroisjours.Objectifs:prévenirJuliade

monretardetdéguerpird’iciavantqueBennerevienne!Bonsang,c’estquoiçaencore?Monportableesten traindepéterunplomb! Ilclignote,sonneetvibredans tous lessens.Je regarde, incrédule, lenombre demessages vocaux et de textos qui n’en finit pas d’augmenter. Principalement deBen,maisaussibeaucoupdeLolaquej’aibêtementglissédanslemêmepanieret…lesclientesquej’aizappéespar lamêmeoccasion.Etmerde !Toutçaàcausedecetenfoirédepremière ! J’efface lessienssansmêmeenouvrirun, tapoteun rapidemessageàmacopinequidoit s’inquiéteret récupèremonsacdevoyage.Ilcroitsincèrementquejevaispatientersagementpendantqu’ils’envoieenl’airavecjenesaisquelle

greluche?Jevauxmieuxqueça,Ben,dommagequetunet’ensoispasencorerenducompte!Avectoic’estunpasenavant,deuxenarrière…Maislàc’estbon,j’aieumadose!Jenevaispastelaissermemanipulerselontesenvies.Aussibeauquecon,jel’aitoujoursdit!Macolèreannihiletouteslesémotionsqu’ilavaitréussiàréanimerenquelquesminutes.Mesfringues

s’entassent,mes effets personnels sont rassemblés,mon ordi est posé à coté.Ça va lui faire un drôled’effetàmonchercolocatairequandilvas’apercevoirquejenecomptepasrevenir.IlsedébrouillerapourtoutexpliqueràLolacar,moi,jemetire!Lesacsurledos,prêteàquitterl’appartetsonpropriétaire,j’observeavectoutdemêmeunepointe

dedouleur,deregretmachambreet lessouvenirsquiysont rattachésavantde tourner les talons.Unepagesetourne…Jesursautequandmontéléphonesemetàsonneraumomentoùjelerécupèresurlacommode.J’hésite

un instant avantdedécrochermaismon soudaindésir devengeance alimentema réflexion.Un souriresadiquesedessinesurmonvisageàmesurequ’une idéegerme.OK, jevaispartir,maispar lagrandeporte!

*

Ilest17heures tapantesquandl’interphonesonne.Pileà l’heure!Jeregardeunedernièrefoismonrefletavantd’allerouvrir :courterobenoiremoulantmoncorpsà laperfection,décolletéscandaleux,talonsaiguillesprovocants.Parfait!Jepatienteencorequelquesminutesavantquel’ontoqueàlaporte.Allez,c’estparti!Phase1delavengeanceversionZoé,enclenchée!—Salut!—Salut,tues…magnifique!JemedécalepourinviterOwenàentrermaisilrestesurlepasdelaporte,lesyeuxécarquillés,àme

détaillerdelatêteauxpieds.Merde,j’enaipeut-êtrefaitunpeutrop!Ungrandsouriresedessinesurseslèvreset,avantquejeneréagisse,ildéposeunlégerbaisersurlesmiennes.Sonétonnementdemevoir aussi peu vêtue laisse rapidement place à la stupéfaction lorsqu’il découvre les lieux, sifflantd’admiration.—Belappart,disdonc!—Oui,maisjesuissurlepointdedéménager.—Quoi?Pourquoi,ilestgénial!—Jesaismais…Ilestenvahiparlavermine.Uneespècetrèscoriace!—Oh…Jemeretiensderirequandjelevoisscruternerveusementautourdelui.Unmectoutenmusclesquia

peur d’une petite bête ! Bon, là en l’occurrence il a raison de s’inquiéter car je compte le jeterdélibérémentdanslagueuled’unloup…Owenréduitladistancequinoussépareetjemeretiensdenepasreculer.Sesmainsseposentsurmes

hanches,exercentunelégèrepressiontandisqu’ilessaiedecaptermonregard.D’unseulcoup,jenesuisplustrèssûredevouloirallerjusqu’auboutdemonplan.Jemesersdeluialorsquec’estquelqu’undebien…BonOK,jen’aipasassezd’empathiepourn’avoirquecetteexcuse.J’avouequejenesupportepasqu’ilmetouchedenouveau,qu’iltentedeposersesmainsàcertainsendroitsquil’ontàprésentenhorreur,qu’ilsalisselessouvenirsquemapeaugardedeBen…Bonsang,pourquoij’enreviensencoreàlui?C’estpourcetteraisonquejedoiscontinuer.Aprèscettesoirée,jeseraidébarrasséedecesdeuxhommes.—Jenetevoisplusausquareettunerépondspasàmesappels…Le souffle chaud d’Owen près de mon oreille m’arrache à mes états d’âme. Sa mâchoire frôle la

mienneetjedétournelégèrementlatêteavantqu’ilneréitèreunnouveaubaiser.—J’aipaseubeaucoupdetempsàmoicesdernierstemps.—Jediraiplutôtquetuprenaissoindem’éviter!Bingo,Sherlock,eneffetjenecomptaispasterevoirdesitôt!Jeplongemonregarddanslesienetlui

répondssansciller.—Ehbien,tupensaismal.Lapreuve…Tuesici,non?D’unhaussementd’épaules,ilclôtlaconversationmaisnemerelâchepaspourautant.Onvayvenir,

Owen…Maisquandmoi je l’auraidécidé!Jemedégagedesonemprised’unairdétaché,unsourirefacticeauxlèvres.—Tuveuxboirequelquechose?—Nonmerci,j’aiplusfaimquesoifàvraidire…Jedoisyvoiruneconnotationsexuelle?Jenerelèvepasetmedétournedeluipourmeservirunverre

d’eau.Jejetteunrapidecoupd’œilpar-dessusmonépauleet…Ouais,vuleregardqu’ilmelance,iln’ya pas l’ombre d’un doute ! Le liquide passe difficilement tantma gorge est serrée.Mais dans quellemerdejesuisencoreentraindemefourrer?Allez,Zoé,t’ascommencé,maintenanttuvasjusqu’aubout.Cen’estpassympapourOwen,ilferapartiedesdommagescollatéraux,maisBenabesoind’unebonneleçon.Lesimple faitd’imaginersa réaction,sonhumiliationdebeaumâle joueur faceàsonéchecmeredonneconfiance.Moiaussijesaisbluffer!JeposemonverreetmetournedenouveauversOwen,unsourireaiguisésurlevisage.—Ildoitbienêtrel’heuredemangerquelquepart…Viens!Phase2,enpréparation:dégoûtermonfuturex-colocdes’amuseravecmoiunebonnefoispourtoutes.Lamainque je tendsàOwen trouvevitepreneuseet ilmesuit sanshésitation jusqu’àmachambre.

D’unmouvementd’épaule,ilclaquelaportederrièrenousavantdemeprendredanssesbras.Sontorsecolléàmondos,ilembrasselabasedemanuque,déclenchantunfrissondésagréabletoutlelongdemacolonnevertébrale.—Tapeauesttellementdouce…Était douce !Non seulement ta toilette de chatm’irrite,mais en plus elle vient d’enlever toutmon

parfum!Respire,Zoé…Sesdoigtstracentdepetitscercles,caressentmesflancs,remontentdangereusementversmapoitrineet

instinctivement, jeposemesmainssur lessiennespourstopper leurprogression.Jenepeuxpas, jenepeuxpas !Laported’entréeclaqueet lebruitd’un trousseaudeclésque l’on jettesur la tablese faitentendre.Bordel,ilestrevenu…Biensûrqueoui,jepeux!Concentréàmelaver lecou,Owennefaitaucuncasdubruitdanslapièced’àcôtéetcontinueson

léchageintempestif.Àcontrecœur,j’inclinelatêtepourluidonnerplusd’accèsàmapeauetenlacenosdoigts,ondulantdubassinpourleforceràpasseràlavitessesupérieure,maisilsembledécidéàprendresontemps.OK,jeprendsleschosesenmains!J’avancedoucementjusqu’aulitavecmalimace,poseungenou sur lematelas etme cambre jusqu’à sentir son érection contremes fesses.Un grognement et ilraffermitsaprise,m’écrasantpresquelesdoigts.Bon,maintenantçasuffit!—Viens…Allonge-toi,àmontourdem’occuperdetoi…Meschuchotementssontvoilésd’excitationmaispaspourlesraisonsquemonpauvreappâts’imagine.

Owens’installe,ledoscontrelatêtedelit,lesyeuxbrillantsdedésiretunsouriredevainqueur.Attends,mon beau, la partie est loin d’être gagnée ! Je grimpe àmon tour, relevant légèrementma robe pourpouvoirlechevaucher.Voilàquemaintenantsonérectionpoussecontremonintimitéetquelespaumesdesesmains courent sur le renflement dema poitrine. Il se relève brusquement etm’embrasse à pleinebouche. Sa langue s’insinue entremes lèvres, caresse lamienne…La bilememonte à la gorge. Lespoingsserrésdanssescheveux,jefermelesyeuxetl’imagedeBenm’aideànepasmebarrerencourant.Attentionauretourdemanivellequivaterevenirenpleinetronche!

Qu’est-cequ’il foutd’ailleurs ?S’il faut l’aider àvenir jusqu’ici, il suffit dedemander ! Jegémis,respirefort,ondulesurunOwenunpeutroppassifàmongoût.Jecomptebiendonnerdutorrideànotrefutur invité. J’attrape les pans de sa chemise et les écarte d’un geste ferme, faisant voler les boutonsautourdenous.—Bonsang,Zoé…Tumetues!Latorturedelalangue,leretour!Latêtedansmapoitrine,Owenlèche,aspiremapeautandisqueje

montedequelquesoctaves.Laboucle de sa ceinture saute et sa braguette glisse rapidement sousmesdoigts pressés, provoquant une série de grognements de sa part. Je tends l’oreille mais discerneuniquementcebruitrépugnantdesuccion.Soudainj’entendslaportedufrigoclaqueret…Lesond’unecanettequel’ondécapsule?Bordel,maisbouge-toi,Ben!Jenecomptepaspasseràlacasserole,justetelefairecroire!Lalangued’Owentracelescontoursdemondécolletéetjerespiredifficilement.Ilestvraimenttrès

beau,cen’estpasunmauvaisgarsetcen’estpasnonpluslepirecoupdumonde,j’aitoujourstendanceàexagérer,maissoncontactmerépugnedeplusenplus.Jesature,cemanègedoits’arrêteretmaintenant!Phase3:enclencherlemodefurie.Mesmainss’agrippentaulit,lesphalangesblanchiestellementjeserrefort,etjecommenceàm’agiter

violemment,lebarreautapantcontrelemur.Lesprofondssoupirsquejepousseetlebruitmétalliquedulitquicognefontreleverlatêted’Owenquinesaitabsolumentpascommentréagirfaceàmonagitation.Les yeux exorbités, la bouche qui s’ouvre et se referme sans prononcer le moindre mot, il doit sedemander ce qui se passe. Malheureusement pour lui, je n’en ai pas encore fini. Rassure-toi, tu vasrapidement comprendre ! Je dois faire peur à voir, comme possédée, et le bruit des pas qui serapprochentm’empêchederassurerOwen.Enmodeamazone,jecontinuedelechevaucheretgémisdeplusenplusfort,aupointdedéclencherunéchodanslachambre.Sesmainssontrelevéescommesijepointaisunearmedanssadirection,etjecroisquejesuisentraindeluifairelaplusgrandepeurdesavie.Quandlaportes’ouvreenfin, je trembled’appréhension, lepalpitantauborddeslèvres.Lecorpssituésouslemienseraiditetjen’aipasletempsd’esquisserlemoindremouvementqu’unbrasentouremonbuste,mesoulèvebrutalementpourm’envoyervalsersurlematelas.—Putaindemerde,làtuvastroploin,jevaistetuer,Zoé!Heureuse que toute cette mascarade prenne fin, je ne trouve aucune réplique acerbemais un large

sourire fendmonvisage.La fureur dans le regard deBen efface le triomphedumien et une déchargeglacialeme traverse l’épinedorsale.Lesmuscles tendus à l’extrême, lespoings serrés et lamâchoirecontractée,Benestauborddel’explosion.Lesoufflecourt,ilrestebraquésurmoijusqu’àcequ’Owenattiresonattentionendescendantpromptementdulit.—Bordel,t’esquitoi?Benaboieplusqu’ilneparleetOwenhésiteàrépondre.Monjoggeurabeauêtremusclé,iln’enmène

paslarge.Fautdirequ’ilestcomplètementdéboussoléparleretournementdesituationetilyadequoi.J’aiassezabusédelui,jedoisluivenirenaide.Jedescendsàmontourdulit,mepositionnedevantluipour leprotéger touten tirantunpeusurmaroberetroussée.Cegesten’échappepasàBenquisuit lemouvementdemesmains.Si jenegardaispasunedistancede sécurité, jepourraisvoir des flammesjaillirdesesiris.Sonregardmebrûlepartoutoùilsepose.Mesjambesdénudées,mespiedschaussésdetalonsaiguillessurlesquelsjepeineàresterenéquilibre,mesfinesbretellesquiontglissésurmesépaules.Jelesremonterapidementetmesenssoudainhonteuse.Bonsang,maispourquoij’aifaitça?Unefoisdeplus,jen’aipasréfléchietmavengeanceseretournecontremoi.Ledégoûtquejepeuxlirechezluiestexactementlaréactionquej’attendais.Pourtantmaintenantquej’ysuis,jenelesupportepas.

Unebouleseformedansmagorge.Sij’étaisencorecapabledepleurer,jeseraisdéjàentraindelefaire.—Enfaitjeveuxpassavoirquitues.Juste…Casse-toidechezmoi.Maintenant.J’adresse à Owen un regard confus mais celui-ci me dévisage, comme s’il prenait pleinement

consciencedelasituation.—Tuvisici…Avectonmec?J’ycroispas!Maist’esqu’uneputainde…Avantmêmequesoninsulte,méritéed’ailleurs,nesortedesabouche,Benl’empoigneparlachemise

etlevireviolemmenthorsdelachambre.—Unmotdeplussurelle,etjetejurequejenemeretiensplus!Casse-toi!!!JesursauteaucrilourddemenacedeBen.Maintenantdosàmoi,ilfaitfrontàmonpauvreappât.Je

n’avaispaspenséàlatournurequeprendraientlesévénements,jevoulaisjustequ’ilmesurprennedanslesbrasd’unautre.Encoreuneerreur!Lamainsursonpantalondébraillé,Owennousfixeàtourderôlesurlepasdelaporte.Jenesaispas

quelletêtejedoisavoirmaisjenesaisplusquoifaireniquoidire.Toutçamedépasse,jeveuxjustemebarreretoublier…—Maisc’estavecplaisirquejemetiredecettemaisondefous!UndernierregardpourmoietOwentournelestalons.Enmoinsdecinqminutes,j’airéussiàattirerle

mépris de deux hommes. T’as fait fort sur ce coup-là, Zoé !D’accord c’était le but,mais jeme faisl’impressiond’êtreunemoinsque rien. Je récupèremon sac laissé aupieddu lit,mais jen’ai pas letempsdemettreunpieddehorsqu’unepoignese refermesurmonbrasetme tire sansménagementenarrière.—Aïe!!!Nonmaisçavapas?Lâche-moi!Jemedébatscommejepeuxmaisplusjem’agiteetplusilresserresonemprise,m’arrachantuncride

douleur. Il ne réagitmêmepas, la tête tournée vers la sortie qu’ilme refuse.Quand la porte d’entréeclaque,signequ’Owenestparti,ilmerelâcheenfin.—Maintenant,ànousdeux.Devant son regard furieux, jeme retiens de caressermon bras endolori. Au contraire, je relève le

mentonetlefusilleàmontourduregard.Ilesttempsd’assumer,jenecomptepasmelaisseravoirparsontonglacial.D’uncoupdepieddanslaporte,ilnousenferme.Merde,machambreestbientroppetitepourcontenirnosdeuxcorpsprêtsàexploser!—Quoi, tu vasme faire un scandale parce que j’ai désobéi à une de tes règles ?T’as le droit de

t’envoyerenl’airmaispasmoi?Ahnonpardon,j’ailedroit…Maispascheztoi,c’estça?Il secouedoucement la tête, commepourmedire«nemecherchepas»maismacolère revient au

grandgalopetjelalaisseéclater.—C’estquoitonproblème?Toncoupd’unsoirnet’apasdonnésatisfactionettucomptaissurmoi

pouryremédier?Ben fronce les sourcils etouvre labouchemais jene luidonnepas le tempsdeme servirunautre

mensonge,dem’endormirunefoisdeplusavecsesbellesparoles.—Tucroyaisvraimentquej’allaissagementt’attendreici?Àcourtdemots, je lui jettemonsacdans leventre leplusviolemmentpossible.Commes’ils’était

heurté à unmur en béton, il retombe aussi sec. Sans arracher à ce fichumec la moindre douleur, lemoindremouvementderecul, lamoindreréaction.Déterminé, ilenjambemonmissileetseposte justedevantmoi. Je déglutis péniblement et tente de garder une contenance. Pourtant je suis complètement

déstabiliséepar l’intensitédeses irisazur.À lamanièredont il se tient, jedevinequ’ilchercheàmesonder,àlireenmoi.Ilavanceencored’unpas,pénétrantmonpérimètredesécurité.Dosaumur,jen’aipasd’autrechoixquedeluifaireface.—Toi,t’asvraimentledondememettrehorsdemoi…Tun’imaginespasàquelpointtumegonfles

quandtut’ymets.J’aienviedete…Putain!Je sursaute quand son poing vient s’écraser à quelques centimètres de mon visage. Mon cœur

tambourine dans mes tempes et quand sa paume se pose sur mon cou, je sursaute une nouvelle fois,réalisant que, dans la peur, j’ai fermé lesyeux.Quand je les rouvre,Ben est si prochedemoique jepourraisrespirersonsoufflesilemienn’étaitpasbloquédansmagorge.—Làmaintenant,j’aiautantenviedetegiflerquedetebaiser.Savoixrauquem’arracheunfrissonetsesmotsmepétrifientsurplace.—Arrêted’essayerd’interpréterchacunedemesparoles,arrêtedechercheràmedisséquer!Tu te

croisforte?Tucroistoutsavoir?Maist’esfaible,Zoé!T’assumespasquituesetencoremoinscequeturessens…T’eslafemmelapluschiantequej’aijamaisrencontrée.C’estbon,jenesuispasàmonprocèsnonplus,j’enaiassezentendu.Lesmainsencorefébriles,jele

poussepourmelibérerdesonemprisemaisilraffermitsesdoigtsautourdemoncou,collantsoncorpscontrelemien.Lesyeuxécarquillésetlaboucheentrouverte,jerespiredifficilement.Lapressiondesamainsurmagorge,laproximitédesoncorpsmeperturbent.Jedevraisledétesteretsurtoutavoirpeurdelui à cet instant…Alors pourquoi ce n’est pas le cas ? Je reste impuissante tandis que sa bouche serapprochedelamienne,frôlantmeslèvres,mamâchoire.—Arrêtedevouloirmelafaireàl’envers:c’esttoiquiesentort.—Non,Zoé,c’esttoiquinecomprendsrien.Sesdoigtsglissentsurmapeau,sefaufilentsouslesbretellesquitombentsurmesépaulesetj’arrête

unenouvellefoisderespirer.Uneétincelleilluminesesirisquelquessecondes,etjecroisvoirunsourirenarquoissedessinersursonvisage.Bordel,ilsefoutencoredemoi!—Donctun’étaispaspartirejoindreunefemme?—Si.Marageremontecrescendoàmesurequesonputainderictusrevient.Jemedécolledumurmaisavant

d’avoirpuesquisser lemoindremouvement, ilmeplaquedenouveauviolemmentcontrecelui-ci.Sonsourireadisparuetsonregardmebrûle.D’unemain,ilmemaintientcontrelemurtandisque,del’autre,ilfaitcoulisserlafermeturedemarobe.Aprèsavoirmismonflancànu,ilglissesesdoigtssousletissu,électrisantmapeau.Bordel,réagis,Zoé!T’arrivaistrèsbienàluirésisteravant,qu’est-cequiachangé?Alorsque je sensmoncorps faiblir, jeme répètecesmotscommeunmantrapournepas le laisser

gagner:ilneteméritepas…Ilneteméritepas…Ilneteméritepas…Lesagrafesdemonsoutien-gorgesautentetl’instantd’aprèsjemeretrouveenculotte,larobesurles

chevilles.—Encoreettoujourstonputaindejeu,hein!Tuprendsunplaisirmalsainàmevoirperdrelatête,à

me prouver que tu es bien meilleur que moi. Tu as gagné, OK ? Alors fous-moi la paix et retournet’occuperdeta…Desonindex,ilécrasemeslèvrespourm’empêcherdefinirmaphrase.Uncoupdesangmemonteàla

tête,jenesupportepasqu’onmecoupelaparole,surtoutdecettemanière.Jedoisêtrerougedecolère,pourtantils’enmoquecomplètement.Sonregarddurplongédanslemien,ilnecillepas,mêmelorsquemesonglesseplantentdanssesavant-brasetrougissentsapeau.Jeveuxluifairemaletj’aiàpeinedroit

àungrognement.—Monjeu?Ilétaitfiniavantmêmedecommencer.Sesparolessontlagoutted’eauquifaitdéborderlevase.Lamanièrequ’ilademefairecomprendre

queçaaétésifacilepourluidemefairepliermemethorsdemoi.Instinctivement,j’ouvrelaboucheetmordssondoigt.Jeserrejusqu’àmesoulager,jusqu’àêtresûredelaissermesmarquessursapeau.Benémetuncrisourdetjelâcheprise.Sonregards’assombritenunefractiondesecondeet,avantquej’ai le tempsderéalisercequ’ilse

passe,seslèvresfondentsurlesmiennes.Unemainagrippéeàmescheveuxm’empêchededétournerlatêteetjesubissonassaut.Lesyeuxclosetlespoingsferméssurlespansdesachemise,jesuisstatufiéeetprendssurmoipournepasrépondreàcebaisersauvage.Sonautremaincheminejusqu’àmaculotte,biendécidéqu’ilestàm’endéposséder.Jeremue,m’agite

danstouslessenspourl’enempêchermaisjesuispriseaupiège.Soudainsesdoigtstranspercentlafinedentelle et tirent d’un coup sec.Ma plus belle culotte part en lambeaux et je gémismalgrémoi.Moncorpsentierfrissonnequanddesmotschuchotéscontremeslèvresmedisentenfincequej’attendais.—Iln’yaplusd’autresfemmesdepuislongtemps,saufquetuneveuxpaslevoir.Ces paroles arrivent trop tard, au mauvais moment et surtout dans de mauvaises circonstances.

J’aimeraislecroire,maisjen’yarriveplus.Pourtantquandseslèvressontdenouveausurlesmiennesjel’embrasseavecautantd’ardeuretd’énergiequelui.Salangues’immiscedansmabouche,maltraitelamienne,lasuceavecavidité.Nosdentss’entrechoquentsouslaviolencedecebaiserenflamméetmesgémissementsemplissentlapièce.Mesmainsglissentsoussachemise;jelegriffe,lecaresse,enfoncemesonglespartoutoùjelepeuxtandisquesamaindansmescheveuxtireunpeuplusfort,m’arrachantuncriplaintif.D’ungenou,ilécartemesjambesetsesdoigtss’insinuentsansdifficultédansmonintimité.UnrâleprofondfranchitleslèvresdeBenquandilserendcomptequejesuisdéjàprêtepourluietillesenfoncesansménagement.Seslèvresdescendentsurmoncou,maclavicule,alternantmorsuresetsuçons.Jesuisauborddel’explosionquandellesserefermentsurlapointeérigéedemonseinqu’ilmordille,passantleboutdesalanguesurlameurtrissurepouratténuerladouleur.Fébrile,mesdoigtsserefermentsurlaceinturedesonpantalon,àlaquellejem’accrocheensentantmonterunesensationdechaleurquejereconnais. Le va-et-vient soutenu de ses doigts, sa langue, ses dents, ses pupilles dilatées qui nemequittentpas…Jenetiensplusetunevagued’uneviolenceinouïedéferle,écrasanttoutsursonpassage.Lesparoisdemonsexesecontractentautourdesesdoigtsetjejouisbruyamment.—Jen’aiaucuneenvied’uneautrefemmequandjetevoisprendreautantdeplaisir…Lesyeux fiévreux, il sedélectedema jouissance.Sabouche reprendpossessionde lamienneavec

cettemêmeaviditéet,d’unmouvementbrusque,Benmeretourne.J’aijusteletempsdemettremesmainssurlemurpouramortirlechocqu’ilposedéjàunepaumeentremesomoplatespourmeforceràtenirlapose.Lebruitdelaboucledesaceinturesefaitentendre,unfroissementdetissu,ledéchirementd’unétuienplastique…Lesoufflecourtetlesmusclescrispés,j’attendsavecimpatiencelasuite.Untressaillementparcourtmonépinedorsalequandsesdoigtsfrôlentl’entréedemonsexepourguider

lesien,puisenuneprofondepoussée,ilm’emplittotalement.Unrâled’extaseremontedesagorgeetsonsoufflevientcaressermanuque.Sesdoigtss’arrimentfermementàmeshanches,jemecambredavantageet Ben ressort lentement avant de revenir brutalement. Bon sang que c’est bon !Mes fesses poussentcontrelui,àlarecherchedesoncontact.Iln’yapasdeplacepourladouceuroulatendresse.Benmepunitpourl’avoirdéfié,pourOwen,pourmafuite…Lescoupsdeboutoirqu’ilm’infligereflètenttoutelacolèrequ’ilressentpourmoi.Colèrequej’accueilleengémissant,entremblant,rassuréedesavoirquej’aipu le toucher.Jehalète,sescoupsdereinsmecoupent lesouffle.Subitementsesdentsseplantent

dansmoncou,m’arrachantundélicieuxfrisson,etjeperdspiedlorsqueseslèvresfrôlentmonoreille.—J’étais…avec…Ava.Toutmoncorpssecrisped’uncoup.Merde,c’estquicelle-là?Pourquoiilmeparled’ellemaintenant

?Sansquejem’yattende,jemeretrouvedenouveaufaceàlui,mondosbutecontrelemur.Sesmainspuissantesmesoulèventparlesfessesetm’aidentàm’accrocheràseshanches.Mesdoigtsretrouventladouceurdesescheveuxet je ferme lespoingsdedans, tirant fort. Jenecomprendspaspourquoi ilmeparledecetteAvamaisjeveuxleblesserautantqu’ilmeblesseenmentionnantcettefemme.Sescoupsde reins reprennent de plus belle, éraflant mon dos contre la surface froide et rugueuse. Son regardchercheàcaptermonattentionmaisjemeconcentresurlaporte,l’uniqueissuedontilm’arefusél’accès.Ilsefige,restesilencieuxuninstantàmeregarder.—Ava,c’estlabelle-sœurdeJay.Elleétaitàlaportedechezluiaveclesenfants,j’étaisjusteparti

luidonnermondoubledesclés.Soulagement.Honte.Remords.Ilaraison,pourquoifaut-ilquejemefassedesfilmsàchaquefois?Ce

mecm’attire trop, je cherche sans le vouloir une excuse pour le repousser. J’ai tellement peur d’êtredéçue…Voyantquejecontinuedel’ignorer,sesdoigtsempoignentmamâchoireetmeforcentàluifaireface.Lafureurdanssesyeuxaccentuelemalaisequigranditenmoi.J’ouvrelabouche,maisaucunsonn’ensortàpartunsoufflesaccadé.Sesdoigtsreprennentleurplacesousmesfessesetmemaintiennent.Dansunsilencepesant,Ben reculedequelquespas, se retourne,et jecriedesurpriseenm’enfonçantdanslematelas.Jemeredressesurlescoudesetl’observejeteràlahâtesachemiseetsonpantalonsurleparquet.Jevoudraisluidirequelquechose,calmerlasituationmaislebleutempêtedesesyeuxm’endissuade.Ilestàprésentnudevantmoi;sonimpressionnanteérection,emballéedanslelatex,aimantemonregardetéveillemonappétit.Ils’installeau-dessusdemoi,écartemesjambesavecautoritépoursefaire une place. Les bras tendus de chaque côté de ma tête, Ben se fiche en moi d’un coup sec. Jem’arrime à ses épaules, lève le bassin, allant à sa recherche en prenant son rythme. J’absorbe lessensationsaussiexquisesquedéroutantesetgardemonregardancrédanslesien.J’yvoissondésir,sacolèreetundébutdedoute.Sescoupsdereinssecalmentdoucementetsoncorpsseposesurlemien.Ilestchaud,ensueur,tremblant,etjepeuxsentirlesbattementsfrénétiquesdesoncœur.Àboutdesouffle,ils’arrêteetposesonfrontcontrelemien.J’hésiteuninstantet,d’unevoixtremblante,luidonneàmontourdesexplications.—Jenecomptaispascoucheraveclui.Jevoulaisjustetefaireréagir.Benenfouitsatêtedansmoncouetsonsoufflechaudmedonnelachairdepoule.—Jesais.Commentça,ilsait?Ildéposeundouxbaiserderrièremonoreille,encompletdécalageavecsafaçon

dememalmenerdepuistoutàl’heure,etrelèvelatête.Unebouleseformedansmagorgesousl’intensitédesonregard.—Tucroisquejen’aipasvuclairdanstonjeu?Jecommenceàbienteconnaître,Zoé.Maistul’as

laissét’embrasser,tetoucher,etc’estçaquimefoutenrogne.—Toutçac’esttafaute,Ben.Tupassestontempsàsoufflerlechaudetlefroid,àmechaufferpuisà

m’envoyerdessignescontradictoires.Tuasobtenucequetuvoulaisdemoialorsjenecomprendspaspourquoituestoujourslà…Qu’est-cequetuattendsdemoi?Paumée,jecaressedemesdoigtslesmusclestendusdesondos.Jeneveuxpasmedisputeraveclui,

justeleperceràjourettantpissijemeprendsuneclaque.Detoutefaçon,cettebaiseressembleplusàunrèglementdecomptes,àunaurevoir.Lesimplefaitd’ypensermepincelecœur,pourtantj’enavaisparfaitementconscienceenrevenantici.

—T’esvraimentconnequandtut’ymets.Ouvrelesyeux,bordel,ettuverrasqu’iln’yaquetoi!Lesyeuxécarquillés,jeledévisage,cherchantunefoisdeplusàsavoirs’iltentedem’endormir,mais

toutdanssafaçondemeregardermepousseàlecroire.—Toi,Zoé.Toietseulementtoi!Unstupidesourires’étiresurmonvisage.Jenesaispasencorequelleinterprétationdonneràcetaveu

maislesimplefaitdesavoirquecesdernierstempsilnevoitpersonned’autremesoulage.Ilsepencheetseslèvrescharnuesseposentavecdélicatessesurlesmiennes.Jepeuxsentirsonpropresourirecontrema bouche avant qu’il n’approfondisse son baiser, se délectant avec gourmandise de ma langue.Lentement,sensuellement,ilbougedenouveauenmoisansjamaisromprenotrelien.Centimètreparcentimètre,ilmecomble,m’envahit.Noscorpss’échauffent,secherchent,s’imbriquent

dansuneparfaiteosmose.Mesgémissementsmeurentdanssaboucheetsonregardpassionném’emportedoucementversl’orgasme.C’estcomplètementdifférentmaistoutaussigrisant.J’ailatêtequitourne,mavuesetroubleetmoncorpsentierestprisdesoubresauts.Jen’entendsplusrienàpartnosgémissementsmêlésetmonnomqu’ilrépèteinlassablementtandisqu’ilatteintlui-mêmelajouissance.Leslarmesauxcoinsdeyeux,lecœurquibatlachamade,jeréalisequeBenvientdem’offrirdeuxorgasmesd’affilée.Moiquipensaisqu’enavoirunseulétaitmissionimpossible…J’ensuisàmedemandersiau-delàdedeuxmoncœurtiendrait lecoup!Benresteplusieursminutesallongésurmoiavantdeseretireretderoulersurlematelas.Prisedanslacontemplationduplafond,jememordsl’intérieurdesjouespournepaslaisseréclater

majoie.Ceseraitmalvenuvulasituationdanslaquellenoussommes.Onenestoùexactementd’ailleurs?—Jen’aipasledroitàtadansedelajoiecettefois?Commentfait-ilpour toujours lireenmoi?Jesuissi transparentequeça?Je tournela têtedanssa

direction et lui rends son sourire.Détendu, le regard intense, les lèvres encore gonflées, et son corpsparfait…Dieuqu’ilestbeau!Maisaussitroparrogant!—Parcequetucroisquetul’asmérité?Bensetourneversmoietserelèvesurlecoude.Unsourirenarquoissedessine,creusantlafossette

sursajoue.Aprèslatempête,lamerd’huileetlecalme.J’aimecesdeuxfacettes,soncôtévirulentautantquesoncôtétaquin.—Deuxorgasmesquandmême!Sonsourires’effaceetsesyeuxs’assombrissentquandilajouteamèrement:—C’estpastonconnardquitelesauraitdonnés!—Ben,je…Ilbalaiemaphrased’unemainetselaisseretombersurlematelas.Ilexpirebruyammentensefrottant

levisage.Lascèneburlesquequejeluiaioffertesembleresterfigéesoussespaupières.—Oui,jesais,tun’allaispasbaiseraveclui!Silence.Dansmatête,touttourbillonne.Qu’est-cequivaressortirdetoutça?—Heureusementquejesaisquetum’aimesbien,çam’aideàpasserau-dessusdetapetitevengeance

!Sonéternelsouriredeflambeurrefaitsurface.Maiscommentfait-ilpourpasserd’uneémotionàune

autreenaussipeudetemps?Etonvamedirequel’astrologiec’estdelaconnerie?Regardez-moicegémeauxdanstoutesasplendeur!

—Jetedemandepardon?Jenemerappellepast’avoirdituntrucdecegenre!—Toinon,maisLolaoui.Sijereprendssesmots:tuenpincespourmoi!Jeme tournevivementvers lui, lesyeuxexorbités. Jen’ai jamaiseucegenredeconversationavec

LolaconcernantBen.Faceàmonairahuri,iléclatederireetmetireverslui.Matêteselogeaucreuxdesonbras.—Jen’aijamaisditça!—Ohsi,tul’asdit.Fallaitpasluiraconterquet’avaisrencontréundangereuxjoueur!Etmerde.Ouid’accord, je revoisparfaitement lascène.SaletédeLolaquinesait riengarderpour

elle.Va falloir que je filtre ce que je lui raconte si je ne veux pas que ça arrive aux oreilles de sonmeilleurami.—D’accord,j’assume,ilsepeutquejenetedétestepasautantquejelepensais…—Tum’aimesbien,dis-le!—Non!D’unmouvementbrusque,jemeretrouvesouslui.Sesdoigtsglissentsurmesflancsetmechatouillent.

Jemedébats,criesoussonassautetsesriressejoignentauxmiens.Àboutdesouffle,jelèvelesmainsensignededéfaite.—Arrête!OK,jet’aimebien!Seschatouillescessentaussitôtet,leregardtriomphant,ildéposeunbaisersurmonnez.—Ehbien,voilà,c’étaitpassidifficile!—Jet’aimebien…Maisj’aimaisbienmonchienaussi…Çanem’apasempêchéedelefairepiquer

quandçaaéténécessaire!Devantsonair incrédule, je luiassèneuneclaquesur la fesse,heureusede l’avoireu. Inutilede lui

direquejen’aijamaiseudechien!Ilsecouedangereusementlatête,unairrieuretlesdoigtsdenouveausurmesflancs,prêtàsevenger,quandlasonneriedemontéléphonesefaitentendre.Nous nous tournons tous les deux vers la source du bruit. Je me crispe quand je devine aisément

l’identité du trouble-fête : Julia. Après tout ce que j’ai pu lui balancer sur Ben ces derniers jours,commentexpliqueràmonamiequej’aiétéincapabledeluirésister?Ellequis’inquiètetellementpourmoi…Doucement jem’écarte prête à tendre le bras versmon portablemais samainme retient. Lesmusclescontractés,sonregardombrageuxmesonde,mecommuniquel’ampleurdesescraintes.—Neparspas.

Chapitre20

Ben

—Jenesaispascequimeretientdetebaffer!Lolaentredansmonbureausansfrapper,claquelaportederrièreelleetposesonculsurlefauteuilen

facedumienenmefoudroyantduregard.Petitescènequiserépètedepuiscematinetquinesemblepaslafatiguer…Ilestquandmême17heures!Soupir.Jelèvelesyeuxaucieletm’affalecontreledossierenlalaissantdéblatérer.Putain,ellepourraitaumoinschangerdedisque!—Je te l’aurais dit que ta copinevenait de faire songrand retour si t’avais pris la peinedevenir

quandj’aidépannéAva.—Maispuisquejetedisquej’étaisàl’autreboutdelavilleàsarecherche!Rougedecolère,Lola se lèveetpose sesmainsàplat en sepenchant au-dessusdubureau.Si elle

continue, elle va finir par passer par-dessus pour m’en coller une ! J’ai tout essayé : les excuses,l’indifférence,l’énervement,maisrienn’yfait.Ellerevientàlacharge…Encoreetencore.Jayn’estpasdécidéàm’aider,ilsefoutmêmeouvertementdemoialorsjeprendsmonmalenpatienceetattendsquemaprincessefinissesacrise.Sijel’avaisprévenueentempsetenheure,elleseseraitpointéechezmoiillico.Lavoilàmaraison!Calmer labêteavantqu’ellen’attaque. Je lève lesmainsensignede reddition.De toute façon,elle

peutcontinueràs’acharnersurmoi,riennepourraentachermabonnehumeur.—Excuse-moi,Lola,jesaisplusquoitedirepourtecalmer!Jememordslalanguepournepasajouterle«encore»quimanquedesortir.Sesépauless’affaissent

etelleretombesurlesiège.—T’auraispum’envoyerunmessageaumoins…Désolé,tropoccupéàlabaiser.—Jefaisaisensortequetapotenesefassepluslamalle,c’estpasçaleplusimportant?—Si…Biensûrquesi,maisj’étaistellementinquiète!Elleselèveetarpentelapièceenserongeantunongle.Bonsang,elleapasbientôtfinisoncirque?

Sespassestoppentdevantmoietelleposesonfessiersurmondossierencours.—T’esassisesurM.Vans!Lolabaisselesyeuxsurlesfeuillesqu’elleaelle-mêmerédigéesavantdemeregarder,l’œilrieur.—Ehbien,pourunefois,iln’apasl’airdes’enplaindre!MonportableannonceunnouveaumessageetjemeredresseprécipitammentavantqueLolanevoiele

destinataire.Depuiscematin,Zoéetmoisommespartisdansunnouveaujeu:exciterl’autreparsextos.Résultat j’aiunetriquepermanenteetdesphotosbandantespleinletéléphone!Faussejoie,c’est justeErikquim’envoieuneconnerie!

—Jel’aieueautél toutàl’heuremaiselleresteévasivesurlesraisonsdesondépart.Elleétait…bizarre!Tuensaisplus,toi?Jemeretiensdeluidemanderdequanddatesonappelquandjemerendscomptequeçafaitplusd’une

heurequemonderniermessageestrestésansréponse.Attends,commentça,elleétaitbizarre?—Tucroisvraimentquec’estàmoiqu’ellevaseconfier?Ellehausselesépaulesàmaremarqueetselève,emportantavecelleunefeuillevolantecolléeàson

cul.—Oups…Décidément,cecherM.Vansm’aimebienaujourd’hui!Ellereplacelafeuilledansledossieravantdesortir.Jeparcoursmesmessages:aucunnouveau.Vula

photo que je lui ai balancée, c’est plus que louche qu’elle ne réponde pas. Je l’appelle mais tombedirectementsursonrépondeur.Ladeuxièmetentativeesttoutaussiinfructueuse.Jetentedelajoindresurletéléphonedemaison,maisilsonnedanslevide.Bordel,maispourquoiellenedécrochepas?Jetiensuneheuredeplussansnouvelleetdécidedeplierbagages.SiZoés’esttiréeunenouvellefois,

je…Putainjesaispasmaisunechoseestsûre,elleestdanslamerde.—Àdemain.Sansunmotdeplus,jepassedevantlepostedeLolaendirectiondel’ascenseur.—Turentrescheztoi?—Nonjevaisfaireunepartiedescrabbleaveclespetitsvieuxdel’hospiced’àcôté!Lesyeuxronds,marouquinemedévisaged’unairincertain.Maisellemeconnaîtoupas?Jesouffleet

hochedoucementlatête.—Oui,Lola,jerentre.Elleselèved’unbond,unénormesourirescotchéauvisage,jettesonsacsursonépauleetmerejoint

endeuxenjambées.Etmerde,jelesenspascecoup-là!—Génial,jetesuis.Jeneresteraipasunejournéedeplussanslavoir.Sourireetacquiescer…Nepasmontrermonagacement…Bordel,cettejournéesebarrevraimenten

couilles!

*

J’aiunmomentd’appréhensionquandj’insèremaclédanslaserrure.Lolasurlestalons,j’entrechezmoi.Ilnemefautpaslongtempspourmerendrecomptequ’ellen’estpaslà.Lamâchoireserréepournepaspartirenvrilledevantsacopine,jevaisdroitdanssachambre.Videcommejem’yattendais.Putain,jesuisdéçu,énervéet…soulagéenuninstant:sonsacd’hieresttoujourslà.—Zoé?Lolal’appelleetfaitletourdespiècesalorsquejerestedanssachambreàessayerdecomprendrece

qu’ilenest. Jechercheun indice,n’importequoi,mais lamaniaquea tout rangédepuishiersoir.Ellen’estpaspartie,OK,maisoùest-elle?Soudainlaported’entréeclaqueetdespasserapprochent.Mesépauless’affaissentquandjelavois.Enshortetbrassière,dégoulinantedesueur,elles’avanceversmoid’unpashésitant.—Jenet’attendaispasaussitôt!Le souffle court et les joues rouges, elle s’épongeavec sa serviette. Je suis lemouvement, fixeune

gouttesursoncouquiserpentedoucementverssapoitrine.Desimagesdesoncorpshumideetglissant

mereviennentenmémoireetelleleseffaceenl’essuyant.—Tontéléphoneétaitéteint.Ellelèvelesyeuxensoupirantquandellecomprendoùjeveuxenvenir.—Paséteintmaisenmodeavion,pourécoutermamusique!Elleagite sonportabledevantmoiavecun sourireniaisque j’ai aussitôt enviede lui faire ravaler.

Menaçant,jem’avanced’unpas,elleenfaitautant.D’accord,elleveutjouer!J’aienviedelaprendrelà,maintenant.Deluifaireregretterdem’avoirinquiétépourrien.Noscorpssefrôlent,mamainremontesursonflanc,ellefixemeslèvres.—Zouille!ZoésefigeetajusteletempsdeseretourneravantqueLolaluitombedanslesbras.Marouquinela

serrefortetjelavoislutterpournepaslaissersortirseslarmes.Jeprendsunpeudedistanceettiresurlespansdemachemisepourcachermondébutd’érection.Commentellearriveàmefaireçaavecunsimpleregard?Lolarouvrelesyeux,beaucoupplusrassurée,etsedégagedesbrasdeZoéavantdeluiencollerunesurl’épaule.—Aïe,maist’esbargeouquoi?Tum’asfaitmal!—Est-cequetuasseulementconsciencedel’étatdenerfsdanslequelj’étais?Bordel,Zoé,nereste

plusjamaissansmedonnerdenouvelles!Jemeretiensderireetm’éloignequandLolaluiassèneunautrecoupdepoing.Siçapartenbagarre,

ilfautvitequejetrouvedelaboue!—Maisarrête,bonsang!Jesuisdésolée,OK?J’avaisbesoindeprendremesdistances…J’aipas

penséquetut’inquiéteraisautant!Alorslà,jememarre!Laphraseànepasdire!LolalèvedenouveaulamainetZoébutecontremoi

enreculant.J’aienviedelatoucher,depassermamainsursondosbrillantdesueur,maisjeveuxaussilavoirmorflerunpeu.Vas-y,Lola,achève-la!Jem’écarte, laissantplusdeplaceàmaprincesserebelleetmepostedansuncoinpourprofiterdu

spectacle.—Ohnon…J’étaisjustefolled’inquiétude!!!Jenedorsplusdepuistroisjours,j’airetournélaville

etj’aimêmefailliappelerlesflics!Maist’étaisoù,putain?Lola, mode enragé activé. Ses bras partent dans tous les sens et sa lèvre inférieure tremble

nerveusement.—Chezunecopine.—Quoi?Quellecopine?Jesuistaseulecopineici!D’oùjesuis,jepeuxvoirZoésetendre.Lecombatrisqued’êtreplusaniméfinalement.Quandladite

copineaappeléhier,Zoél’aprévenuequ’ellerestait.Jenesaispasquiestsapotemaisellesemblaitinquiète,aumoinsjesaisquependanttroisjourselleétaitentredebonnesmains.—Parcequeselontoijenesuispascapabledemefaired’autresamies?Mafuriesortentrombedesachambre, levisageferméet lamâchoireserrée.Lolalasuitet je leur

emboîtelepaspournepasenperdreunemiette.Merde,j’aiditmafurie?—Nonj’aipasditça,mais…—Maisquoi,Lola?C’estuneclienteavecquilecourantestbienpassé.Àforcedesevoir,desliens

sesontcréésetc’estdevenuunebonnecopine.Elleétaitlàquandj’enavaisbesoin.

Lesdeuxamies se fixent, se jaugent silencieusement.Ce seraà cellequi lâchera lapremière.C’estfinalementLolaquidétournela tête, leregardvoilé.C’estdégueulasse,Zoéjouesur lacordesensiblealorsquecen’estpasdutoutpourcetteraisonqu’ellen’estpasvenuevoirsameilleureamie.Vas-yZoé,dis-luipourquoitul’asignorée!Jeruminedansmoncoin,énervéàmontourparlatournurequeprennentleschoses.—T’esdure,là!Est-cequejepeuxaumoinssavoirlaraisondetafuiteoutuasaussiuntrucàme

reprocherlà-dessus?Zoéblanchitd’unseulcoupettenteuneœilladedemoncôtédansl’espoirquejeluivienneenaide.

L’espoirfaitvivre,mabelle!Appuyécontrelemur,lesbrascroisésetaffichantungrandsourire,jeluifaiscomprendrequesurcecoup-làelleestseule.—Je…J’avaisbesoindem’éloignerparceque…Disonsque…—C’estsiterriblequeça?Crachelemorceau,Zouille,c’estmoi!Lolaprendlesmainsdesacopineetlatireverslecanapéoùelless’installent.Zoésoupireunlong

momentensepinçantl’arrêtedunez,grommelantdesmotsenfrançais.Ellen’oserajamaisluienparler!—C’estàproposdecemecquiteplaît?—Oui,c’estça!Saréponsefuse,troprapidepourparaîtrenaturelle.Elledevaitvraimentgaléreràtrouveruneexcuse

bidon pour se jeter dans la gueule du loup aussi facilement.À voir son soulagement, pas difficile decomprendrequ’ellenevoiepasdequiLolaveutparler.Moioui…—Ilarecommencé,c’estça?Yeuxrondsetsilencetotal.Lolacontinuesursalancéepourmonplusgrandbonheur.—T’asfinipartefaireavoir?T’esentréedanssonjeuetlepièges’estrefermésurtoi?—Je…Quoi?—Cemecquit’attire…Tondangereuxjoueur!C’estàcemomentquejechoisisdememontrer.Jemeposeenfaced’elles,surlatablebasse.Figée,

Zoé reste focalisée sur sa copine mais je sais qu’elle me voit. Je jubile en observant son visage sedécomposer.Çayest,elleacompris!—Je…Ouienfinnon…C’estque…Enfin…Ellemefusilleduregardquandj’éclatederiremais,bordel,quec’estjouissifdelavoiraussigênée!

Lolaarriveàsecontenirmaissonœilrieurnevautpasmieux.—Jenepensaispasqu’iltefaisaitautantd’effet!D’habitudetuesplusloquacepourmeparlerdetes

conquêtes!Merdealors,j’enrevienspas!Etc’estquicemec?Zoé se lève d’un bond en secouant énergiquement la tête. Dommage, ça commençait seulement à

devenirintéressant…—Onenreparleplustard.Jenediraipasunmotdeplusdevantlui!Ellemepointedudoigt,énervée.Jememarred’autantplus.—Chouchoudégage!Macopineetmoidevonsparlerdechosessérieusesquineteregardentpas!J’ensuispassisûr,moi!—Onenparleraplustard,machérie.Maispourlemomentj’aisurtoutbesoind’unedouchecommetu

peuxlevoir!—Mais…

—Non,Lola, je teprometsqu’onenparlera,maispasmaintenant !Onpourraitsefaireunesoirée,rienquetouteslesdeux?Etjeteraconteraitout!Parcontre,plusunmotdevantcecurieuxquienadéjàtropentendu.C’estpastoiquivisavec,ilnevapasarrêterdemefairechieravecçamaintenant!—Voyonsj’airiendit,chèrecolocataire.Jenesaismêmepasquiestcetype!Jeluitiremonchapeau

s’ilaréussiàtedompter!—Personnenemedompte!Jesuisunelionne,sauvageetdangereuse.Unemantereligieusequibouffe

seshommesaprèsl’amour.Jemefaisuncollieravecleursbijouxdefamilled’accord?—Quoi,lesmiensaussi?Encoreassis,lescoudesposéssurmesgenoux,jelaregardeperdresacontenance.J’aitellementenvie

d’ellequejen’arrivepasàlecacher.Pluselles’énerveetplusçam’excite.Jenedevraispasavoiràretenirmespulsions.Jevoudraispouvoirlasoulever,laserrerentremesbrasetluirappelercommeelleaimequejeladomine.MaisilyaLola…Jenesaispasoùtoutecettehistoirevanousmeneralorscen’estpaslemomentdefairedevagues.—Etpourquoielleseserviraitdetescouillesencollier?Jesuiscenséeêtreaucourantd’autrechose

?Marouquinenoussouritàtourderôlemaisonvoittoutdesuitequ’elletentesurtoutdecacherunélan

decolère.Luidire?Ohnon!—Non,princesse, iln’yaabsolument rienà savoir.C’est tacopine,elle rêvedemoietdemes…

attributs!LesyeuxexorbitésdeLolaseplantentdansceuxdesacopine,attendantuneréponse.Jejubile.Vas-y,

mapuce,àtoideprendrelarelève.Mapuce?Maisqu’est-cequim’arrive,bordel?—Dansmesrêvesuniquement.Enfinnon,jevoulaisdiredansmescauchemars,mespirescauchemars

uniquement !Cemecm’exaspèreet tu le saisaussibienquemoialorsarrêted’imaginerdes trucsquipourraientmefilerdel’urticaire,s’ilteplaît,Lola!Elleyvaunpeufortmaisaumoinsçaaledondecalmernotrecopine.Sesépauless’affaissentetelle

selaissetombersur lecanapé.Ceseraitsidurqueçad’imaginersacopineavecmoi?Sontéléphonesonneet,vulesourireniaisqu’elleaffiche,çanepeutêtrequemonpote.Elles’éloigne,coupantcourtàsondébutdesuspicion.—Tuluidirasquejevaisprendremadouche?Jefaisvite.—T’oublieraspasdel’enlever!Alorsqu’elleétaitdéjàengagéedanslecouloir,elleseretourneversmoisanscomprendre.D’ungeste

circulaire,jetournel’indexdanssadirection.—Tonsupercollier…T’oublieraspasdeleretirer,çaseraitdommagedel’abîmer!Sonmajeurse lèveenmêmetempsquesesyeuxetelledisparaît.Dans laminutequisuit, j’entends

l’eaucouler.Putain,elleestàpoilet,commeuncon,jedoisresterlà!Lolaparle,gloussecommeunedinde,prendsontemps…Bordel,fautquej’arriveàlavirerd’ici!—TudirasàZoéque je l’appelledemain? Jepeuxpas rester, Jayabesoindemoipour…Euh…

Bref,jedoisrentrermaintenant,tuluidiras?J’imaginetrèsbiencequeJayveut,etj’espèrefairelamêmechose!Jeluifourresavesteetsonsac

danslesbrasetl’attendsdéjàlaporteouverte.—J’aimêmepaseuletempsdeluiposertoutesmesquestions!Rienàcarrer.Jet’adore,princesse,maistire-toi!Ellem’embrassesurlajoueetquandelleestenfin

partie,quejesuisprêtàrefermer,ellelancelaphrasedetrop:—Tucroisqu’elleaétérejoindresonbeaujoggeurpourcourir?Owen.Mesdoigts se resserrent sur lapoignéeàm’en faireblanchir lesphalanges.L’imagedeZoé

chevauchantcenazemereviententêtecommesic’étaithier.Bordel…C’étaithier!Ilsepassequoientreeux ? Elle est avec lui ? Etmoi alors, je suis juste bon à lui filer des orgasmes ? Le visage fermé,j’esquisseunrictusenespérantqueçapassepourunsourire.—Tuasraison,tropdequestionsensuspens.Àdemain,princesse.Jeprendssurmoipournepasclaquerlaporteetfoncedroitverslasalledebains.Ellenepeutpas

jouersurdeuxtableaux,pasavecmoi.M’amuseroui,partagernon!Lavitredeladoucheembuée,jedevinelecorpsdeZoéautravers.Sesmainssebaladentsursapeau,

l’eauchaudefumanteemportantlamousse.Cettevisionsublimealedondemecalmerunpeu.Appuyécontrelechambranledelaporte,jerestequelquesminutesàladétailleràsoninsu.—T’étaispartiecourir?Ausondemavoix,Zoésursauteetmanquedeglissersurlafaïencemouillée.D’ungestedelamain,

elleessuielacondensationsurlecarreaupourmeservirsonregardnoir.—Maisqu’est-cequetufouslà?Lolaestnaïvemaisjusqu’àuncertainpointseulement.Tetrouverici

entraindemereluquernevapasnousaider!—Elleestpartie.Alorst’étaisoù?Montonestsec,tranchant,traduisantparfaitementmonétatdenerfs.Ellesetourne,m’offrantunevue

sur son joli petit cul et commence à se laver les cheveux.De lamousse longe sa colonne vertébrale,dévalejusqu’àsesfesses.Jerongemonfreinenattendantsaréponsequitardeàvenir,melaissantungoûtamerdanslabouche.Laquestionest:pourquoi?Sansunmot ni un regardversmoi,Zoé sort de la douche et s’essuie grossièrement, puis repose la

serviette.Nueetencoreunpeumouillée,leregardpénétrantqu’ellemelancemedéstabilise.— Pose-moi directement la question qui te brûle les lèvres : est-ce que, oui ou non, j’étais partie

rejoindreOwen?Jesuissiprévisible?Unpetitsouriremoqueursedessinesursonvisage.Elleentourematailledeses

bras,soncorpschaudethumidesecolleaumientandisquemesmainserrentsurlapeaudoucedesesflancs.—J’étaisenbas,dans la sallede sportdont tum’asparlé.Tuavais raison,c’est tranquille là-bas.

Alorsend’autrestermes,non,jen’aipasrevuOwen.Etvulecoupquejeluiaifait,tun’aspasàenêtrejaloux,ilnerisqueplusdem’approcher!Jaloux?Vulesoulagementquesaréponsemeprocurealors,ouais,j’étaisrongéparlajalousie!Mes

mainsdescendentplusbasetempoignentfermementsesfesses.Jelapoussejusqu’àlacoincercontrelemur,àmamerci.Meslèvress’écrasentsurlessiennes,mesmainsremontentsursapoitrinetandisquemonsexeexerceunepressioncontreseschairsécartées.Zoégémitdansmabouche,lespointesdesesseinsdurcissentsousmesdoigtsetseshanchesremuentàlarecherchedemoncontact.C’estexactementcegenrederetrouvaillesque jem’imaginaisenmatantsessextos.Bordel,cequec’estbon…Jecroisquejen’arriveraijamaisàmerassasierdecettefemme.—J’aipenséàçatoutelajournée…Cetteaffirmationluidécrocheunsourire.C’estexactementceàquoielles’attendaitenm’envoyantdes

messages toute la journée. Comme si j’avais besoin de ça pour avoir envie d’elle ! Je m’écarte

légèrementpourpouvoirglisserunemainentresescuisses,caressesabouledechairquidurcitsouslapressiondemesassautsavantd’investirsonsexe.Sondésirserépandsurmesdoigtsetj’englissedeuxàl’intérieur avec une telle facilité…Putain, elleme tue ! Ses gémissements résonnent dans la salle debains,serépercutentàl’intérieurdematête.J’accélèrelacadence,courbelesdoigtspouratteindresonpointGetsesmusclessecontractentsurmoi.Leregardvoiléparl’orgasmeetlabouchetremblante,elleselaissesubmergerparsessensations.Àlavoirlà,aussibelle,jetrouveçacruelqu’ellen’aitjamaispuatteindreceplaisirplustôt.Maisbordel…Jenesupporteraipasdesavoirqu’unautreaitpulavoirainsi!Les jambes flageolantes, elle se laisse tomber sur le carrelage. À genoux face à moi, ses doigts

remontent surmescuisses, caressentmonérectiondouloureuse.Silencieusement, ses irisbleusplantésdans les miens, elle défait ma ceinture. La respiration saccadée, le cœur tapant fort contre ma cagethoracique,jen’enmènepaslargequandmesfringuestombentàmespieds.Zoésemordlalèvre,etsonregardjugeavecgourmandisemonsexepointantdroitverssonjolivisage.Samainl’empoigne,coulissedoucement et, quand sa bouche se rapproche, que son souffle chaud caresse mon gland, je déglutisdifficilement.Salanguelongemonmembreavantqu’ellenemeprenneenbouche.Sesjouessecreusentetsesongless’incrustentdansmesfesses.—Oh,Zoé…Putain,c’estbon…Mavoixsortdansunmurmureetmoncœurpompecommeunmalade.Jenecontrôleplusrien,surtout

quandlebleutranslucidedesesyeuxprendcetteteintededésirquejen’aijamaisvueauparavant.J’aidevant moi la plus belle des visions et je sens déjà la pression monter. Je n’arriverai pas à tenirlongtemps.Jelaforceàsereleveretlasoulève.Mabouchedévorelasienne,laremercie,l’idolâtre.Sesjambes croisées dansmon dos,ma queue s’humidifiant au contact de son sexe, je l’emmène d’un paspressédansmonlit.—Tuasméritéunnouvelorgasme,mabelle!

*

Allongésde toutnotre long sur le canapédevant jene saisquel filmqueZoéachoisi, je souris enentendantsarespirationlenteetprofonde.Ellemeclaqueunfilmmerdiqueets’endortdevant,nonmaisje rêve !Son téléphonevibre à côtéd’ellemais elle ne s’en rendpas compte. « Juju la diabolique»n’auraplusdenouvellespouraujourd’hui.Jenesaispasquiestcettecopinemaiselleprendunpeutropdeplace.Ellen’apasarrêtédeluienvoyerdesmessagestoutelasoirée.—Zoé…Allez,mabelle,vatecoucher!Unpetitgrognementteintédesommeilsefaitentendre.Jelasecoueunpeuplusfort.—Hummm…Jesuisbienlà…—Tonfilmétaittellementpourriquemêmelesacteursontfiniparsependre!Allez,aulit!Jemelèvepourlaforceràenfaireautant.Lanuisettefroisséeparmesdoigtsquin’ontpasarrêtédela

retrousser pour caresser sa peau, les yeux lourds de fatigue et les cheveux décoiffés, elle se lève ducanapé. Alors qu’elle commence déjà à se diriger vers sa chambre, elle revient sur ses pas etm’embrasse.Unsimplebaisersurlabouchemaisquiasonimportance.—Bonnenuit…Je lasenssoudaingênée, fuyantmonregard,elle retourned’unpas lentendirectiondesachambre.

Esquissedesourire.Jelaregardes’éloigneretj’entendsdelàlesquestionsquiluibouffentlecerveau.LaZoésisûred’elleadenouveaulaisséplaceàlafemmerempliededoutes.

—Nefermepastaporte.Sesépauless’affaissentetellemelanceunregardbrillantpar-dessussonépaule.Commesimaintenant

j’allaisgarderceputaindemurentrenous!—Ouvaplutôtdansmachambre,lelitestplusgrand.Jeterejoinsvite.J’éteinslatélé,leslumièresetquandj’arrivedansmachambrejemarqueunepause.Zoé,étenduesur

monlit,ledrapcouvrantàpeinesoncorps,elleestdéjàentraindeserendormir.Jepourraism’habitueràcettesituation…J’appuiesur l’interrupteur,nousplongeantdans lenoiretmeglissecontreelle.Sondosappuyécontremontorse,sesjambessemêlentauxmiennesetmonbrasserefermesurelle.Jemerendscomptequejesuisbien.Qu’elleestàsaplaceavecmoi.—Ben…Onestquoi,toietmoi?—Commentça?Silence.Jesenssesmusclessetendre.Jerelèvelatêtecommesijepouvaislavoirdanslapénombre,

déposeunbaisersursanuque.—Jepensaisquec’étaitclairpourtant.T’esàmoi,Zoé.Sonpetitcorpssedétendimperceptiblementdansmesbras.—Etpuisdetoutefaçon,iln’yaquemoiquisachetefairejouir!Àmesrires,ellemedécocheuncoupdecoudedanslesflancs.Çaveutdirequoi«enfoiré»enanglais

?—Jeneveuxpastefaireflipper,mabelle,maisjecroisquetoietmoi…onestensemble!Alorsquejen’attendaisplusaucuneréponse,unmurmurefranchitseslèvresaprèsdelonguesminutes

desilence:—Ettoi,çanetefaitpaspeur?Saquestionmeprendaudépourvu.Jen’yaipasvraimentréfléchietpourtantçameparaît tellement

évident!Sij’aipeur?Bizarrement,non.—Pasvraiment…Dorsmaintenant,jecomptet’épuiserunpeuplusdemain.Un dernier baiser sur son épaule et je resserre ma prise avant de poser de nouveau ma tête sur

l’oreiller. Zoé ne m’effraie pas, je suis même plutôt curieux de voir où ça va nous mener. Pour ladeuxièmefoisdemavie,jesuisencouple.J’espèreseulementquecettefoisjen’engarderaipasungoûtamerdanslabouche.

Chapitre21

Ben

—T’essaiesdemefairecomprendrequejevaisdevoirtrouverunenouvelleassistante?Jayseredressedanssonfauteuildeministreetcroiselesbras.L’airgrave,ilmejugecommesij’étais

n’importequi.—Arrête,monpote,t’estrophabituéàfairetremblertonpersonnelmaisavecmoi,çamarchepas!Ilselaisseaussitôtretombercontreledossier,menarguantavecsonsourireencoin.—Faispastongamin,Ben!Lolaméritemieuxqu’unvulgairepostedesecrétaire.Etpuistoutçac’est

ta faute : t’as laissépartirAngyetdepuiselles’estmisen têtede la remplacer.Lolasera lanouvelleresponsabledupôlerelationclient…Etjevaisenfinpouvoirrécupérermonlit.Ilmarmonneladernièrephrasepourlui.Etaprèsilvamedirequelaprincesseneletientpasparses

bijouxroyaux…Pfff,pathétique!—Tum’emmerdes,Jay…—Etdansquelque temps tume remercieras,mec.Pense à ta futureproie…Dis-toi que celle-là tu

pourraslabaiser!—Mais jem’en fous,bordel !Tusaisquoi,donne-moi tavieilleassistantepoilueetc’est réglé.À

défautdegarderLola, j’enauraiunecompétente !Et jenecomptepasme taper toutes les femmesquibossent là…Enfinçanem’intéresseplus.Cherchepasàvivremavieparprocurationparceque tuescasé!Silence.Lesyeuxplissés,lesdoigtsbattantlamesuresurlebureau,monpotemeregarded’undrôle

d’air.—Larumeurétaitdoncvraie,legrandBenHarperatirésarévérence?Quoi?Quellerumeur?—Depuisquandt’écouteslescommérages?Vas-ybalance,onditquoisurmoi?—Que la gent féminine de Davis & Co est frustrée depuis quelque temps. Alors vas-y crache le

morceau,qu’est-cequetumecaches?Monportablevibredansmapocheetjenel’écoutedéjàplus.

Zoé :Taplace est froide.Se réveiller seuledans le lit d’unmec…Onneme l’avait jamais faite

celle-là!D’habitudeavecmoi,onenredemande!

Lagarce,ellearriveàm’énerveràdistance.L’imaginerdans le litd’unautren’estpas lameilleure

vision que j’ai d’elle. Et comme je ne connais que son connard d’Owen, c’est à côté de lui que je

l’imagine.Jen’aipasletempsderépondreàsontexto,qu’unautrearrive.

Zoé:Maiscettefois,c’estmoiquiréclame!

Bordel,j’aicrééunmonstre!Unejouisseusecompulsiveetinsatiableetleconquejesuisapréféré

partirautafplutôtquederesteravecelle.J’aipristellementderetarddansmontravailquejesuispartiàl’aubepournepasrentrertroptardcesoir.UnraclementdegorgemesortdemespenséesetquandjevoisJayunpeutroppenché,essayantdelirepar-dessuslebureau,jeverrouillel’écranaussisec.—C’estqui?—Personne!Jeposeavecdésinvolturemontéléphone,quiglissesurleboisvernisdubureau.Resterdétaché.Ne

pasmontrerquejesuistroublé.Jayselève,contournelatableetposesonculdessus.Lesmainsdanslespoches,ilbraquesonregardsurmoi;jesensquejenevaispaséchapperàsoninterrogatoire.—Alors,commentelles’appelle?Bahvoyons,çam’auraitétonnéqu’ilnefassepaslelien!J’aienviedeleluidire,maisjelesconnais

trop,luietsafaçondetouttournerendérision.Jen’aipasenviequ’ilsaccagecequejesuisentraindevivreavecsesblaguesfoireuses.Unhaussementd’épaules,etjegardemonairblasé.—Nonvraiment,jenevoispasdequoituparles.—Jesaispascequ’elleabienpuécriremaisparcontrejen’aipasloupétonsourireàlacon.Ilya

unefemmelà-dessous,melafaispasàl’envers!Pourquoiturefusesdemediresonnom?Jelaconnais?Ohoui,tulaconnais!Fautquejemecassed’icisijeneveuxpasfairedebourde.Jefinismoncafé,

viselapoubelleetmelève.Lebrastendupourrécupérermontéléphone,jemarqueunarrêt,surprisparsavibration.Unnouveaumessage.C’estlàquejecommetsuneerreur:aulieudel’attraperdirectement,jejetteuncoupd’œilàJay.Cettehésitationluipermetdemedevanceretdes’ensaisir.—Zoé?T’essérieux?Ilpartdansunéclatderireetjeluiarrachemonportabledesmains,lefourrantdansmapoche,làoù

j’auraisdûlelaisser.—C’estbon,laramènepas!Jeluitourneledos,larageauventrequandjel’entendssefoutredemoi.J’ouvrelaporteetalorsque

j’aidéjàunpieddehors,Jaym’interpelle.—Promets-moid’attendrequejesoisdanslesparagesquandLolal’apprendra,jeveuxpaslouperça!Je neme donnemême pas la peine de lui répondre et regagne directementmon bureau. Bordel, je

regrettel’époqueoùmonpotefaisaitlagueuleàlongueurdejournée,aumoinsilmefoutaitlapaix!Jereprendsmaplacederrièremonordi,sorsmonportableetcommenceàtapermaréponseàZoé.Onvitensemble,onafaitl’amourplusieursfoisetmaintenantons’envoiedessextos…Onatoutfaitàl’envers!J’effacemonmessageetenrédigeunautre.

Moi:Réservetasoirée.Onsort.Zoé:Unrencard?Genrerestoettoutletralala?

Putain,Jayaraison,jesensquej’aiunsourireridiculescotchésurlatronche.

Moi:Ouais,ilesttempsdefaireleschosesdansl’ordreetçacommencecesoir.

Saréponsefuse.

Zoé:Impossible.Jedoisvoirmesclientes.

Je n’aime pas quand on fout mes plans en l’air. Et encore moins quand ça ne prête même pas à

discussion.Jelaissemontéléphoneprofessionnelsonnerletempsdeluirépondre.

Moi:Annule.

Lola, qui n’était pas à son poste, revient et intercepte la communication.Merci,ma belle, déjà une

chosederéglée.Monregardtombesurl’écrandemonportablequis’allumeetlesmotsquis’affichentmefontgrogner.

Zoé:Jerépète:IMPOSSIBLE.

Saletédecaractèreetdeclientesquinepeuventpassedébrouillersansleurcoach.Sérieux,c’estpas

grâceàcettesoiréequ’ellesvontd’unseulcoupsavoirseprendreenmain!OK,onvalajouerautrement!Jesorsd’unpasassuré,passedevantmafutureex-meilleureassistanteetretournevoirsonhomme.La

porteclaquederrièremoi.J’aiaussitôttoutesonattention.—Jeprendsmajournée.TuracontescequetuveuxàLolaetauxautres,moijemetire.Maintenant

que t’es au courant pourmanana, je vais plusmegêner.Disons que c’est à charge de revanche pourtouteslesfoisoùjet’aicouvert!Jesensquejel’aiperduencoursderoutevulamanièredontils’estlevé,meconsidèrantavecunair

ahuri.Ilgardelapausedelonguessecondesavantdesiffleretdetaperdanssesmains.Maispourquoiilapplaudit,cecon?—Jecroyaisjustequetutel’envoyais,pasquetusortaisavec!J’enrevienspas,BenjaminHarpera

unepetitecopine!Alorslàjememarre.—Ditlemecquin’aeuqu’uneseulevraierelationdanssavie!—Rienàvoir.J’avaispasd’avenir,jeprofitaisdumomentprésent.Toi,tuoubliais.C’est dur…Et chiant qu’ilme connaisse autant. J’avale la remarque avec difficulté. Je n’aime pas

parler d’elle. L’ombre de Blue plane au-dessus de moi depuis tellement d’années que j’ai fini parm’habituer,jusqu’àl’oublier.

Lamainsurlapoignée,j’hésiteunmomentàrépondremaisnetrouvantrienàajouter,jepréfèrecoupercourt.—Bref,pasunmotàlaprincessetantquejenesaispasoùjemetslespieds.Ildressesonindexdevantsabouchepourmefairecomprendrequ’ilnedirapasunmot.Dumoinspour

l’instant…J’ouvrelaporteetaumomentdelarefermer,Jayprendunevoixposéeetgrave,cequineluiestpasarrivédepuisledébutdenotreconversation.—Hey,Ben,jesuiscontentpourtoi.Ilétaittemps!Esquissedesourire.Fautque jemebarre,çavireaumélodramatiqueet jenesuispashabituéàça

venantdelui.Depuiscombiendetempsn’a-t-ilpasparléaussisérieusementendehorsdesdiscussionsdeboulot?J’envoiemonderniermessageetretourned’unpastranquillerécupérermesaffaires.Ilyalongtemps

quejen’aipasprisunejournéedecongé!

Zoé

Àpeineai-jemisunorteilhorsdulitquemonportables’affoledéjà.J’enaimarredecemachinquisonne sans arrêt, à croire quemes clientes pensent que je n’ai aucune vie sociale en dehors d’elles !D’accord,c’étaitlecasiln’yapassilongtemps,maisleschosesontviteévolué…Unsouriregoguenards’étiresurmeslèvresquandjerepenseàlafaçondontilm’afaitl’amourhieraprès-midi.Safougue,sapassion,sonféroceappétitm’ontfaitatteindrelenirvanaenuntempsrecord.Jecroisquejenepourraisplusmepasserdecesorgasmes…Deluiengénéral.Quelretournementdesituation!Nouvellesonnerie.Bonsang,jevaisfinirparl’éteindre,cetengindemalheur.C’estlaquellecettefois

: Abbie, la bégayeuse ? Carol qui jure comme une charretière ou Jane qui est au bord del’évanouissementquandellestressetrop?J’aiététropconfiante,certainessontdescausesperdues!Mesépaules s’affaissent de soulagement quand le nomde « Juju la diabolique » s’affiche. Faudrait que jepenseàchangercesurnomridicule!Jeluimanque…Unamourdecopine!Sevoir?OK,maisicialors,jenesorspasdanscettetenueetaveclatroncheencorechiffonnéedemagrassemat’.Quandl’interphoneretentit,j’aiàpeineeuletempsdemepréparer.Elleavubienpirependantnostroisjoursdecolocation,ellenedevraitpasm’entenirrigueur!—Coucou,toi!J’ouvregrandlaporteetlalaisseentrer.Crispée,lamainserréesurlalanièredesonsacàmain,elle

avancedoucementendécouvrantl’appart.—Tuessûrequeçanelegênepasquejeviennechezlui?—Évidemment,c’estchezmoiaussijeterappelle!Etpuistantquet’asrienquipendouilleentreles

jambes,t’asrienàcraindre!Lavoyanthésiter,jel’attrapeparlebrasetlatireàl’intérieurenladébarrassantdesonsac.Ledos

tenduetlesjambesraides,elleavancemalgrétoutjusqu’aucanapéoùjelaforceàs’asseoir.—Iln’estpaslà,détends-toi.Etpuisc’estpasn’importequelmec,c’estlemien,alorstun’asaucune

raisond’êtretimide.Un léger rictus gagne ses lèvres et je prends ça pour un sourire. C’est déjà ça ! C’est dingue, dès

qu’ellen’estpasdanssonélément,elleestmalàl’aise.C’esttouchantetagaçantenmêmetemps.—Alorsleschosessesontarrangéesfinalemententrevous?T’essûredetoi,ouplutôtdelui,cette

fois?—Oui,onverraoùçanousmènemais…Disonsquec’estunbondébut.Tuveuxboirequelquechose

?Unsoda,del’eau…uncognac?Simpleetuniquedénégationdelatête.Bon,jevaisdevoirsortirencorecombiendeconneriespourla

dérider?—Toutvabien,Julia?—Oui,biensûr!Jevoulaisjustesavoircommenttuallais.Tuparschercherdesaffairescheztoiet

puisplusrien…Silenceradio!Etdepuisj’aiquasimentpaseudenouvellesalorsjem’inquiétais,c’estnormal,non?J’avais déjà unemère poule avec Lola, voilà quemaintenant j’en ai une autre. Faudrait que je les

réunissecesdeux-là,ellesdevraientbiens’entendre!Jeluiprendslamainetlapresselégèrementdansla mienne. Savoir que je compte assez pour qu’elle s’inquiète me confirme qu’une belle amitié acommencé.—Jevaisbien…Mêmeplusquebien,alorsnetetracassepluspourmoi.Etpromis,jenetefaisplus

decoupcommeça!Un timide sourire tente de franchir ses lèvresmais elle résiste, ou se force àm’en faire un sans y

parvenirvraiment…Danstouslescas,j’airéussiàlatoucheretj’ensuisravie.Onprogresse!—Bon,alorsvousêtesofficiellementensembleducoup?—Ilparaît,oui,maispersonnen’estaucourant.Onadécidédegarderlesecretpourlemoment.C’est

toutneuf alors affolerLola est inutile.Etpuis franchement…C’est tellementplus excitantquandc’estcaché!Monportablevibreetlenomquis’afficheaffolemoncœur.D’ungesterapide,jedéverrouillel’écran.

Ben:Puisqu’unesoiréedecongéc’esttroptedemander,c’estmoiquivaisprendreleschosesen

main.Prépare-toiàpasserlajournéeavecmoi,j’arrive.

Ben quitte le travail en pleinmilieu de lamatinée juste pourmoi ? J’aimal aux joues à force de

sourire,fautcroirequel’idéedepassertouteunejournéeseuleavecluimefaitplusplaisirquejen’oseme l’avouer. Je ne prends pas la peine de lui répondre, le connaissant il est déjà en chemin. Je suispersuadéequ’ilaenvoyélemessagesurlaroute,histoired’êtresûrquejen’aipasletempsdemedéfiler!—Quandonparleduloup…Jevaisbientôtenvoirlaqueue!J’éclatede riredevant lagrimace et lesyeuxplissésdemonamiequi, cette fois, ne cachepas ses

sentiments.—Maisarrête,bonsang!Tusaisbienquejenesupportepasça!Jevaisencoremettredesheuresà

enlevercetteimagedetoidevantsa…Brefsij’aibiencompris,ilvaarriver?Ellese lèveetmachinalement j’enfaisautant.Quandellerécupèresonsacsur lebar, jecomprends

qu’ellenecomptepasresterpluslongtemps.—Oui,ilaprissajournéepourlapasseravecmoimaisreste,j’aimeraisbeaucoupteleprésenter.

Aumomentdesortir,Juliasetourneversmoietafficheunsourirecontrit.—Uneprochaine fois, promis. J’étais justepasséepourvoir si t’étais encorevivante avantd’aller

travailler.C’estchosefaite,maintenantilfautvraimentquejepartesijeneveuxpasarriverenretard.J’essaie deme libérer pour la réunionde ce soirmais c’est pas gagné. Je te tiens au courant dans lajournée.—Encore?Maispourquoitutedéfilesautant?—Mavieestcompliquée,queveux-tu!Fautquej’yaillesijeneveuxpasmefairevirer.Àplus,ma

belle!Pressée,elleneperdpasunesecondeets’engagedéjàdanslecouloirdel’immeublequandelleme

lancesadernièrephrase.D’unhaussementd’épaules,jerefermelaporte.Monregardeffrayétombesurlemiroirdansl’entrée.Desépisdanslescheveux,destracesdemaquillagedelaveilleetdesloquesenguisedefringues.Merde,jesuisdansunétatlamentable!Jecourspresquejusqu’àlasalledebainspourremédierauproblèmeavantqueBenarrive.Etsijenemetrompepas,ilmerestetrèspeudetemps!

*

Aprèsuncharmantrepasdansunebrasserieauborddel’eau,nousvoilàpiedsnus,jeansretrousséssurleschevilles,àmarchersurlesable.LosAngelesprendsoudaindesalluresromantiquesàsescôtés.Samainglissedansmapaumeetsesdoigtsenlacentlesmiens.Songesten’estpasnaturel,jesensqu’iln’estpasà l’aisedans sadémarcheetpourtant çame réjouit.Ducoinde l’œil, jevois son sourireencoins’étirerquandjeresserremesdoigtssurlui.Aprèstout,cecontactn’ariendechoquantdansuncouple.C’estmonpetitami,non?Mêmedansmatêtecemotrésonnebizarrement:Benestmon«petitami».Maconscienceéclatederiredevantceconstat.—Qu’est-cequetuas?T’esbiensilencieused’unseulcoup!MonautopsychanalyseestcoupéeparlavoixamuséedeBen.J’aidûavoiruneabsencedequelques

minutesvulafaçondontilmedétaille.—J’étaisentraindemedirequetonidéedecettejournéeàdeuxétaitauxantipodesdelamienne!Ils’arrêtenetetlesablecommencedéjààmebrûlerlavoûteplantaire.Lesoleilestàsonzénithence

début d’après-midi et on sent que l’été n’est pas loin.L’eau turquoise de l’océan en arrière-plan a lamêmeteintequesesyeux,quiàcetinstantmesondentintensément.Bondieu,qu’ilestbeau!—Ett’imaginaisquoipournousaujourd’hui?Vusonsourire,ilaparfaitementconsciencedecequej’avaisimaginépourcomblercesheures.Jele

forceàreprendrelamarche,nousavançonsverslerivageetjesuissurpriseparlafroideurdel’eau.Eneffet,nousnesommespasencoreenété!—Jen’avaispasd’idéepréciseentête…Maisunechoseestsûre,tuétaisbeaucoupmoinshabilléet

beaucoupplusensueur!Samainquittelamienneetsonbrasencerclemataille,merapprochantdelui.Sonrirerésonneàmes

oreilles et il secoue la tête commes’iln’en revenaitpas.Quoi,y a riend’étrangeet encoremoinsdedéplaisantlà-dedans!—LesFrançaisessontvraimentdespetitesdépravées!—Non,c’estjustequetoiettonacolyteavezprislespires!T’auraisdûyréfléchiràdeuxfoisavant

decommencertonstupidejeu!Samainappuiesurmachutedereinetjemeretrouvecolléecontresontorse.Mespiedsdansl’eau

fraîchen’empêchentpaslefeudemeconsumer.Lalueurdedésirquipassedanssonregardsuffitàfairebriller lemien,mais c’est sa voix rauque qui finit parme faire chavirer. Bordel, mais qu’est-ce quim’arrive?—Peut-être…Maissanscestupidejeu,commetudis,onenseraitoù,dis-moi?Aucune idée.Est-ce quenos engueulades continuelles, nos coups endouce etmes idées demeurtre

seraienttoujourslà?Vasavoir!Maisàlafaçondontilregardemeslèvresavecgourmandise,jemedisque c’est bien le cadet demes soucis. Lentement, faisant grimperma chaleur corporelle de quelquesdegrés, il se penche vers moi. Sa prise autour de mes reins se raffermit et sa bouche charnue serapproche.Jefaisdemême,désireusedegoûteràladouceurdesapeau.Maisjemanqueseslèvresetbrutalement,jepercutesonfrontdansunbruitsourd.Aïe!Jemeretournevivementetfusilleduregardleballonàmespiedsetungroupedegaminsunpeuplusloin.Bandede…—Nonmaisçavapas?Vouspouvezpasallerjouerailleurs?Unpetitrondouillardquinedoitpasavoirplusdeseptanssedémarquedesautresetmeregardeavec

sesjouesrougies.—Pardon,madame,onn’apasfaitexprèsdevousl’envoyerderrièrelatête!Jerécupèreleballonetplantenerveusementmesonglesdedans.Biensûrlecuirest tropépaispour

éclater.Jem’attendaisàquoi?Idiote!—J’espèrebien!Maintenantfilezjoueràlamarelle,vousferezmoinsdedégâts!LeballonquittemesmainsetBenm’embrasselefront,làoùjesensdéjàunebosseseformer.L’œil

rieur,ilseretientdesemoquerdemoi.—C’estpasgrave…T’asjamaisétégosse,toi?Sansmelaisserl’opportunitéderépondre,leballonsouslebras,ilcourtrejoindrelegrouped’enfants.

Lesourireauxlèvres,jel’observetaperquelquesballesaveceux.Auboutdecinqminutes,jefinisparm’asseoirdanslesable,remetsmeschaussuresetmeperdsdanslacontemplationdurefletdusoleilsurlamerd’huile.MavieàParismesembletellementloin…Deséclatsderirejuvénilesattirentmonregard.JesourismalgrémoienvoyantBenattraperungamin

et le soulever avec facilité pour lui piquer le ballon. Il slalome entre les autres enfants jusqu’auxbouteillesd’eaudresséesenguisedebutettire.Lemiochedanssesbrasestdressécommeuntrophéeettouslesenfantsseregroupentautourdelui.Ungrandsouriresurlevisage,lesyeuxpétillants,illeurtapedanslesmainsavantdevenirmerejoindreentrottinant.Ilagardésonsourireéblouissantetmoncœurfonddevantsajoie.Arrivéàmahauteur,ils’accroupitenfacedemoietdéposeunlégerbaisersurmeslèvres.Lesoufflecourtd’avoircouru,ilrigoleetselaissetomberàcôtédemoi.—T’asunetracerougesurlefront!Instinctivement,jepassemesdoigtsdessus.Merde,jevaisavoirbesoind’unebonnecouchedefond

de teint si je ne veux pas être ridicule ce soir !Allongé,Ben respire lourdement pour reprendre sonsouffle.Dusableluicolleàlapeauetquandils’essuielefront,ils’enmetpartoutsurlevisage.Maisquelidiot!Jemepencheversluiet,demesdoigts,caressesonfront,sesjoues,sabouchetentatricepourenenleverlesgrainsavantdel’embrassertendrement.Salanguecherchelamiennepourapprofondirlebaiseretd’unemain surmanuque, ilm’obligeàmecoller à lui.Mais sesnouveauxpetits copains lesifflentetl’acclamentpardesapplaudissements.Bon,d’accord,c’estnormal,cesontdesenfantsmaisducoupBens’écartedemoi,melaissantsurmafaim.—Tudoisbient’entendreavectesnouveauxamis…Vousavezlemêmeâgemental!Il s’assoitetmepince l’arrièrede lacuissem’arrachantunridiculecouinement.Lesmainsdans les

cheveuxpourremettrelesmècheséchappéesdesonserre-tête,ilregardesespotess’éloigner.—C’estdespetitsmerdeux…Ilssontcool!—T’esàl’aiseaveceux,t’asl’aird’apprécierlesenfants.—Ouais,c’estvrai,çafaitpartiedesobjectifsdemavie.J’espèrequ’unjourj’enauraiàmoi…Jehochelatête,impressionnéequ’unmecdesonâgepuisseéprouvercetyped’envie.—T’asvingt-sixans,t’asletempsdepenseràça!—J’aimelesgossesetjesaisquej’enauraiunjour.Jenetecachepasquejemesuistoujoursditque

je ferais mieux que mes parents. En même temps, ça sert à rien de se précipiter, parfois ça permetd’éviterdeserreursmonumentales.Les avant-bras sur les cuisses,Ben est loin demoi, les yeux perdus dans l’océan.Un silence nous

aspire.J’aisubitementunedrôled’impressionetpasforcémentdesplusrassurantes.—Àquoitupenses?Iltournevivementlatêteversmoietjeregretteaussitôtmaquestion.Sonregards’obscurcit.Ilselève

enmetendantlamainpourquej’enfasseautant.Ilenlacenosdoigtstandisquejecomprendsqu’ilnousemmèneloind’ici.Alorsquejepensequ’ilnemerépondrapas,savoixpercelesilencepesantquis’estinstallé.—Àmonex.Çaauraitpuarriveretjemedisqueçaauraitétélaplusgrosseerreurdemaviequand

onvoitcommentças’estterminé.La pointe de douleur qu’il cherche àme cacher a le don d’aiguiserma jalousie. Cette fille devait

drôlementcompterpourluipourqu’auboutdetantd’années,leurruptureluiresteencoreentraversdelagorge.Iln’enparlejamais,jenesaismêmepascequis’estréellementpassé,sicen’estquesonpèreajouéunrôledansleurséparation.—Tuenétaistrèsamoureux…Cen’estpasunequestion,justeunconstat.Jenem’attendspasàcequ’ilm’explique,d’autantquecette

Bluesembleêtreunsujettaboumais,unefoisdeplus,ilm’étonne.—C’étaitmonpremieramour,biensûrquej’enétaisamoureux.Ellereprésentaitmaportedesortie,

l’échappatoireàmafamilledetordus.Onavaitleprojetdesefiancerpeudetempsavantqu’elle…s’enaille.Fiancer ? Merde, j’avais totalement oublié cette histoire. Je croyais qu’il s’agissait d’un simple

premieramourmais,apparemment,jem’étaiscomplètementplantée.Jemesurprendsàserrerlesdents,écœurée et jalouse qu’une fille ait pu prendre autant de place dans son cœur. Je fous une pichenettementale àma petite voix intérieure quime souffle qu’il a eu une vie avantmoi. Seul un gros chagrind’amourpeutfairechangerunhomme.Lapreuve,ilestdevenucollectionneurdevaginsaprèsça!—Doncunjourellet’aquitté?—Non,ellenem’apasquitté.Elleaacceptél’argentqueluioffraitmonpèrepoursortirdemavieet

adisparudujouraulendemain.C’estmonpaternelquis’estfaitunplaisirdemel’apprendre.Jenel’aipascrusurlecoup,maisj’airapidementcomprisquec’étaitmoiquim’étaisplantésurtoutelaligne!Unecolèreamèreteintesavoixetjem’enveuxdel’avoiremmenésurceterrain.Ilselivreàmoiet

j’ensuisheureuse,maisc’estnotrepremièresortieentantquecoupleetjesuisentraindelagâcheravecmesquestions.Mamainseresserresurlasienneet,del’autre,jeluicaressel’avant-bras.Ilm’adresseunpetitsourirequandilcomprendmonintention.Ilsedétendetsedéridecommejel’espérais.Quandonarriveàsamoto,ilmetenduncasqueetenjambel’engin.Levrombissementsourdserépercutejusqu’à

mesentrailles.J’adorecebruit!Jeleregardemettresoncasque,sonblousondecuir.Toutennoir,seulssesyeuxazurressortentavantqu’ilnerabattesavisière.—Arrêtedemematercommeça,Zoé.Mefaispascroirequetun’aimespaslegenrebadboy!Jepasselapointedemalanguesurmeslèvrespourvérifierunechose…Non,c’estbon,jen’étaispas

entraindebaver.Lesmotardsmemettentdanstousmesétatsmaisjeneveuxpasluidonnercettejoie,surtoutquejedevineque,chezlui,c’estessentiellementunpiègeàfemmes.Jem’agrippeàluietenjambeà mon tour la moto. Les cuisses serrées autour des siennes, mon buste collé à son dos et les mainsfermementcroiséessursonventre,jesuisprête.—Tuparles!Surtoi,çafaitpluspanopliedeserialbaiseur!J’entendssonrireavantquelebruitassourdissantdumoteurprenneledessusetqueBens’engagedans

l’artère.Jesuissoulagéequenotrejournéefinissesurunetouchedelégèreté.Lesoleilprenduneteinterose,l’heureestdéjàbienavancée.Latêteposéesursonépaule,jelelaissemeraccompagneràl’appart.Jedoismepréparerpourmaréunionaveclesfilles.Jeregrettedéjàdenepasl’avoirécouté:j’auraisvouluquecettejournéenes’arrêtejamais.

Chapitre22

Zoé

Quelquesjoursplustard…

—Ondevraitfaireçaplussouvent!Lesouriredissimuléderrièreunénormehamburger,Lolamefixeuninstantavantdecroquerdedansà

pleinebouche.Ungémissementdeplénitudes’échappedeseslèvresetelleselaisseretombercontreledossierdelabanquette.EttoutçasansMonsieurOrgasme-garantidisdonc!—Quoi,mangeruntrucquidégueuledegras?Tutefouspeut-êtred’avoirleculflasquemaismoije

vaisdevoirtrimerdeuxfoisplussurletapisdecourse!—Monculflasqueetmoi,ont’emmerde,mavieille!Le regard noir, elle enfourne une nouvelle bouchée avant de le reposer nerveusement. Les joues

pleines,ellemastique longuement sans jamaismequitterdesyeux. J’adorema rouquine, surtoutquandellepensem’intimider.—Jeparlaisdeprendredutempsrienquetoietmoiensemainemaisjenesuisplussûredelevouloir

maintenant!Bon,sérieusement,onnesevoitplus:t’estoujoursavectesclientesouaveccettenouvellecopinemystère…Ellemefaitquoilà,unecrisedejalousie?C’estbienunepremière!J’aitoujoursaiméêtreentourée

etellenes’estjamaissentieendanger.C’estvrai:Lolac’estLolaetçanechangerajamais,mêmesijedoisavouerquej’apprécieénormémentJulia.Faceàsontrouble,jechercheunemanièredeluiexpliquerça sans tomber dans le mélodramatique. Pas envie de la voir pleurer au milieu du resto. En pleineréflexion, jecroqueàmontourdansmoncheeseburger.Bordel, ilest immonde!J’ai l’impressionquemesdentsbaignentdanslafriture!Lolarigoledevantmagrimace.Jelereposeetmecontentedepicorerdesfrites.—Excuse-moid’avoiruntravail,etquimarchebienquiplusest!Etcen’estpasmoiquiaiannulé

notresoiréefilles…Sit’écoutaismoinstoncopain,tuauraisrencontréJujucesoir-là,alorsnememetspastoutsurledos,s’ilteplaît!Ouais t’as raison, cache-toi derrière ton sandwich et fuis mon regard ! Lola reste silencieuse un

momentetjesavouremapetitevictoire.Vienspasmelafaireàl’envers!—Bref…Jesuiscontentequetuaieseul’idéedevenirmechercheraubureau.T’aseudelachance,

normalementjedevaisêtreenformationpourlajournée.Oh,çajelesaismachérie!C’estexactementpourcetteraisonquej’avaisprévudefaireunesurprise

àBen.Maisilafalluquejetecroisedanslescouloirsetquemesplanstombentàl’eau!T’asledonpourplombertousmesprojetsavectonmeilleurami…Commesituétaisaucourantdequelquechose…—Pourquoitumeregardescommeça?Jemeredressequandjemerendscomptequejelafixais,lessourcilsfroncésetlabouchepincée.Je

hausselesépaulesetreprendsunebonnepostureavantdechiperunenouvellefrite.—Jemedisaisjustequ’ilyaunmomentqu’onestlàetquepasuneseulefoistun’asmisJaysurle

tapis,t’esenprogrès!Rienàmeracontersurlui?Àl’évocationdesonamoureux,sesyeuxbrillentd’unetendrelueuretunlargesourires’étiresurses

lèvres.Commesiellen’attendaitqueça,unflotdeparolessortdesaboucheauqueljen’accordequ’uneattentiondistraite.Maquestionn’étaitpasanodineet j’aidéjàmaréponse :non, Jayn’apasvendu lamèche!JesuisenstressdepuisqueBenm’aditquesonmeilleurpoteétaitaucourantpournousdeuxmaisapparemmentilseraitdugenrefiable.Fautcroirequejen’aipasdesouciàmefaire…

—…maisbon,jenesuispaslàpourracontermavieaveclui.EtavecBen,çavasinon?Merde,alorsellesait?J’en lâche lafriteque je tenaisentremesdoigtsetécarquille lesyeux.Non

impossible,saréactionesttropmesurée,tropcalme.—QuoiBen?—Tunet’enplainsplus,satêteest toujoursaccrochéeàsoncorpset tunemefaispluspartdetes

projetsd’appart…J’endéduisqueçavamieux!Jeréprimelesourirequichercheàfranchirmeslèvresenmemordantlesjoues.Çavaplusquemieux

eneffet!Maisça,c’estmonjardinsecretettun’espasprêteàl’entendre.—Fautsavoir,Lola,tunesupportespasquejecritiquetonchouchoumaistut’inquiètesquandjenele

faispas!Tuveuxquejet’expliquecommenttonsupercopainm’abarbouilléedecrèmechantillyalorsquejevenaistoutjustedesortirdemadouche?—Non,c’estbonj’aicompris…Labonneentente,c’estpaspourdemain!Jelalaisse,dépitée,digérersesespérancestroprapidementavortées.Siellesavaitquej’étaisnueet

qu’ilsuivaitdesalanguelalignedechantillyquipartaitdemestétonsjusqu’àma…—Ilestimpossible,çanemarcherajamaiss’iln’ymetpasdusien!Hummmmnon,jenediraispasça.Quandilveut,ilsaitparfaitementdonnerdesapersonne!—Jetel’avaisditquec’étaitpeineperdue.Maisquisait,peut-êtrequ’unjourtesdeuxmeilleursamis

finirontpars’apprécier?—Quedieut’entende!Surtoutpas!Leschosesquisepassententreluietmoin’ontriendecatholiques!Justementquandon

parledelui…LenomdeBens’affichesurl’écrandemonportablequejegardetoujourssouslesyeuxpourletravail.Jelerécupèreetm’adosseàlachaise,mettantunpeudedistanceentreLolaetmoi.

Ben:J’aiencoretongoûtsurmalangue,lasensationdetabouchesurmaqueueetunetriquequi

refusedemequitterdepuiscematin…

Uneboufféedechaleurm’envahitsubitement,jesensmesjouess’échaufferausouvenirdenotrepetite

sessiondecematinavantqu’ilnepartetravailler.Plusieursjourssesontécoulésdepuisquedesmotsontétéposéssurnotrerelation.Nouspassonsnosnuitsdanslemêmelit,onrit,ons’amuse,onjoue…Sansqu’iln’aitréussiàmelefaireregretteruneseulefois.Inquisiteur, le regard de Lola pèse soudain surmoi. Je relève immédiatement la tête et rangemon

téléphonedansmavestesansprendrelapeinederépondreaumessage.Cen’estpaslemomentd’aiguiserlacuriositémaladivedemonamie.Celle-cis’apprêteàparlermaisjeluicoupel’herbesouslepied.—Etsinoncenouveauposte,çadonnequoi?Çadoittechangerlaviedeneplusêtresouslesordres

decetemmerdeur!Changementdesujetefficace.Sielleavaitdesquestionsàproposdemesjouesrosies,elleleszappe

aussitôtettapefrénétiquementdesmains,unelueurd’excitationdanslesyeux.Soulagée,jemeconcentresurelleetmefaisoublier.—J’adoraistravailleravecluimaisc’estsansregrets.L’équipeestgéniale,j’aimapropreassistante

ettuverraismonbureau!Cepostejel’aivoulu,maisjevaisdevoirfairemespreuves,quitteànepascomptermesheureset…

Elleregardesubitementsamontreetselèved’unbond.—Merde,jevaisêtreenretard!Ilfautabsolumentqu’ons’organiseunesoiréetousensemble,j’enai

marredetevoirencoupdevent.Elleenfilesavesteàlahâteetm’embrasserapidementsurlajoue.—Allezjefile,àplus,maZouille.Ellemeplantelà,devantmonassietteencorepleineetl’additionàpayer.MerciLola!Jerèglelanoteetprendsletempsderépondreàquelquesmailsavantdememettreenroute.Malgré

l’irruptiondeLoladansmonplan, jenem’avouepasvaincueetcomptebienrendreunepetitevisiteàBen!Unlégerstressmegagnelorsquejemeretrouveaupieddubâtiment.N’importequoi,Zoé,tunefais

que rendre une visite à ton petit ami secret ! Je souffle un grand coup et passe devant Barbie et sonsourirehypocrite.J’accélèrelacadenceavantquelablondeperoxydéenesedemandepourquoijesuisderetouretm’engouffredansl’ascenseurqui,parchance,arriveaumêmemoment.J’enprofitepourmerefaireunebeauté.Jepassemesmainsdansmescheveuxindisciplinésetmeremetsunetouchederougeàlèvres.L’angoissemesaisitquand jeréaliseque jenesaispasoùsesitue lenouveaubureaudeLola.Pourquoijen’aipaspenséàluidemandersielleavaitchangéd’étage?Mefairesurprendreunefoisdepluséveilleraitlessoupçons,etj’auraisintérêtàtrouverunebonneexcuse.Soudainlacabineralentitetlesportess’ouvrent.OK,opérationcommandoenclenchée.Jepasselatête

parl’ouverturepourvérifierquelavoieestlibre.Regardàgauche:personne.Àdroite:RAS.Jequittel’ascenseuràpasdeloup,àl’affûtdumoindremouvement.Appelez-moiBond,ZoéBond!Lamoquettecouvrelebruitdemestalonsaiguillesetj’avanceaussivitequemajupemoulantemelepermet.Jejettedescoupsd’œilfurtifsdanstouslessensetlesoulagementm’envahitquandj’approcheenfindubureaudeBen.Cibleverrouilléedroitdevant.Soudainuneporteclaqueetdeséclatsdevoixsefontentendre.Merde!Emportéeparl’adrénaline,jeneréfléchispas,sprintejusqu’àunpetitrenfoncementetmeplaquecontrelemur,lesoufflecourt.Finalement,lespass’éloignentetjepeuxenfinreprendremarespiration.C’est du grand n’importe quoi ! Tout ça pour voir Ben quelquesminutes. Lorsque je suis sûre d’êtreseule,jequittemacachetteetfoncedroitsurmonobjectif.Lebureaudesanouvelleassistanteestvide,c’estmonjourdechance.J’ouvrelaporteàlavoléeetlarefermeaussisec.Soulagée,jeposemonfrontsurleboisquelquessecondesetvidel’airdemespoumons.C’estbon,jesuissauvée!—Zoé?Qu’est-cequetufaisici?L’étonnementdanslavoixdeBenmefaitsourire.Tun’imaginesmêmepastouslesobstaclesquej’ai

dûaffronterpourparvenirjusqu’àtoi,moncoco.Jemeretourneetmonsouriresefaitlamalleenmêmetempsquemoncœur.Bordel, je suismaudite !Tranquillement installés autourdubureau,uncafé à lamain,Ben,LolaetJaym’observentcommeunebêtedefoire.Maispourquoijen’aipaspenséàluipasseruncoupdefilavantdedébarquercommeunefurie?—Bah,machérie,qu’est-cequetufaislà?J’aioubliéquelquechoseauresto?Lesyeuxécarquillés,jelesdévisageàtourderôlesansréussiràtrouverlemoindreraisonvalableà

maprésence.Jaydenvientàmarencontre,déposeunebisesurmajoueavantd’entourernonchalammentunbrasautourdemesépaulespourmeforceràavancerdansl’antre.Non…Laisse-moipartir!Unelueurétrangeanimesespupillesetquandsonrictusencoinsedessine,jesaisd’avancequ’ilnevapasm’aideràmesortirdecetteaffaire.—Maisnon,bébé,Zoésaittrèsbienquetuaschangédebureau…T’esvenuevoirBenalors?Silence.Sonregardancrédanslemien,Jayprendplaisiràfoutresamerde.Jen’osemêmepasjeterun

œilendirectiondemacopine.EncoremoinsversBen,quinem’estd’aucunsecours.—Alors,mabelle,tonex-patrontemanque?Tuveuxrevenirbosseravecnous?Unseulmotdeta

partetonteretrouveuneplace…N’est-cepasBen?Aprèsuneseconded’hésitation,Benacquiesce,pascertaindesavoiroùJayveutenvenir.—Enplus,iln’estpasenformeencemoment.Lolase lèveetdégage lebrasdeJay.Paspar jalousie,maiscarellesaitque jenesupportepas le

contactdesautressansqu’ilsysoientinvités.—Maisturacontesn’importequoi,ilestdesuperbonnehumeurencemoment!Jayseposesurl’arêtedubureaufaceàmoi,cachantBen,restédanssonfauteuil.Jambestendueset

brascroisés,iltapotesalèvredesonindexcommes’ilréfléchissait.—T’asraison,moncœur, ila toujoursunsourireniaissur la tronchecesderniers temps.Enfait je

croisqu’ilestsurtoutfatigué.—Tupeuxéviterdeparlerdemoicommesij’étaispaslà?Jenevoispassonvisage,maisjedevineaisémentsonexpressioncrispéeàl’intonationtranchantede

sa voix. Son pote ne se laisse pas démonter pour autant et continue sur sa lancée sans se soucier dugrognementdanssondos.—Àmonavis,maintenantquetun’espluslàpourlesurveiller,ildoits’endonneràcœurjoieavec

lessecrétaires.Çadoitêtreunbeaubordelici!Lola secoue la tête en signede réprobation, regardant par-dessus l’épaule de sonhommepour voir

Ben.Ecœurée,elleserassoitencroisantlesbras.Lessourcilsfroncés,elledoitseremémorerlesalléesetvenuesdanscebureauiln’yapasencoresilongtemps.—C’estfinitoutça,tulesais,alorsfermetagueuleJay!Non,Ben,neréagispas,tonpoten’attendqueçadenouspousseràlafaute!Jemimel’indifférencedevantsonregardscrutateuretlenarguemêmeavecunpetitsourire.Jesaisà

quoitujouesalorsn’espèrepasmevoirtomberdanslepiège.MalgrélesimagesdésagréablesdeBenavecsesconquêtesquicherchentàs’immiscerdansmatête,jeneferaipasceplaisiràJay.Latensionestpalpable,Lolatiresonamoureuxparlebrasetleforceàs’asseoirsurlefauteuilenfacedubureau,puisseposesursesgenouxavantdereportersonattentionsurmoi.—T’occupepasdecesdeuxabrutis,etdis-moiplutôtcequit’amèneici!Merde, encore cette satanée question à laquelle je n’ai toujours pas de réponse. Je lui fais signe

d’attendre et sors mon téléphone qui m’annonce unmessage pour gagner du temps. Julia. J’hésite unmomentmaisfinispardéverrouillerl’écran.Blablabla…Elleneviendrapasàlaréuniondedemain.Merde, c’est pas çaquivame sauver ! Je lui répondsbrièvement et relève la tête à contrecœurpourm’apercevoirqueLolacontinueàmesonder.Çanesentpasbon…Pasbondutout!—Je…J’étaisvenuedireàBenquemaréuniondecesoirétaitreportéeàdemainetquedoncilétait

toujoursdecorvéepourledîner.Ce n’est pas vraiment un mensonge.Ma rouquine semble satisfaite de ma réponse sachant qu’elle

veille à ce que les règles de notre colocation soient respectées pour ne pas avoir à gérer une énièmecrise.—Ettuasfaittoutcecheminpourluidireça?Unsimplemessageauraitsuffi,maisc’estvachement

délicatdetapart,Zoé.Àtaplace,Ben,jelaremercieraiscommeilsedoit!Maisilvasetaire!Unejoutevisuelles’instaureentrelesdeuxamis,levertémeraudesatisfaitcontre

l’azurnerveux.Lola,aumilieu,setend.Ellecomprendquequelquechoseluiéchappe.Jepeuxsentirlabombe s’amorcer, je ne veux pas être là quand elle va éclater. Je recule lentement de plusieurs pas.L’issuedesecoursestderrièremoi,resteplusqu’àmesauveravantl’explosion.—Bon,jevaisvouslaisserbosser…Vousdevezavoirpleindetrucsàfaire.Bref,àplustard!Les deux hommes continuent de se fixer effrontément, et c’est à celui qui lâchera le premier.Ne te

laissepasavoir,Ben!Lolasetourneversmoi,lesyeuxécarquillés,dépasséeparlesévénements.Elleme fait un rapide signe de main et se concentre de nouveau sur les deux hommes de sa vie avecinquiétude.Ellenesedoutepasquejefaispartiedel’équation,etj’espèrequeBenarriveraàsesortirdecemerdiertoutseul.Resterpluslongtempsseraittropdangereux,maisJaynevapasnouslâcher.Sansmoi,sesplanstombentàl’eau.Jeleurtourneledosetmedirigeverslasortie.Lamainsurlapoignée,j’entrouvrelaporteetentrevoitmaliberté.—Attends!JemeraidisàlavoixsourdedeBen.Tendue,incapabledelâcherlaporte,jetourneseulementlatête

verslui.Debout,sonregardimplacablebraquésurmoi,ilcontournesilencieusementlebureau.Affolée,jeconsulteJayden,unsourireglorieuxdéformantsonvisage.Lesalaud!Lola,elle,nelâchepasBenduregard.Seslèvressepincent,sondosseraidit,sesjouesrougissentquandsonmeilleuramis’arrêteàmahauteur. Le puzzle vient de semettre en place, elle a compris. Soudain, ses doigts glissent sousmonmenton et ilme force à lui faire face, à assumer àmon tour.Mamain lâche la poignée etmon corpsbasculeverslesien.Happéeparcetteattirance,j’enoublielaréactiondemonamie.L’hommeenfacedemoi ne bouge plus, me sonde, attend un accord de ma part. Son regard me brûle, j’y vois toute sadéterminationetmesdoutess’envolent.Délicatement,seslèvresseposentsurlesmiennes,s’affirment,imposentnotrerelationofficiellement.Lecœurquibatàcentàl’heure,jerépondsàsonbaiseretbientôtses bras encerclent ma taille, me rapprochent de lui. Ses lèvres se font plus pressantes, sa langues’immiscedansmaboucheetcaresselamienne.Mesmainss’accrochentàsaveste,àsoncou,glissentdanssescheveux.Sesdoigtss’incrustentdansmachair,sonodeurm’enivre.J’enoublieoùnoussommes,lespersonnesautour,lesraisonsdecebaiser.LessifflementsetlesapplaudissementsdeJayfontéclaternotrebulle.Benromptnotrelien.Lesyeux

brillantsetun léger sourire sur ses lèvresenflées, ilme laissedoucement reprendremesespritsavantd’affronterLola.Levoirsisûrdeluialorsquenotrerelationestencoretellementfragilemepousseàycroire.Ilestàmoi,jesuisàluietonnesecacheplus.Soncorpsquifaisaitrempartsedéportesurlecôté,nousexposantànotremeilleureamie.Debout,lespoingsserrésetlecorpstremblantd’énervement,ellefusilleduregardl’hommeàmescôtés.Bizarrement,toutesacolèresembleconcentréesurBen.Sij’ensuissoulagée?Oui!Semblantsortirdesatorpeur,elleavanceverslui,ledoigtmenaçant.—Espècedepetitmerdeux,commentas-tuosétoucheràmacopine?!D’ungesterapide,Benclaquelaportedesonbureaurestéeentrouvertepourétouffersescris.Ilouvre

labouchepoursejustifiermaisLolalaisseexplosersafureur.S’iln’avaitjamaisvusaprincessecommeça,ilvaapprendreàlaconnaître!—TubaisesavecquituveuxmaistunetouchespasàunseulcheveudeZoé!C’estpasunedetes

fillesquetusoulèvesetutilisescommeçatechante.Merde,Ben,jet’avaisinterditdel’approcher!Sapaumechaudeseglissedansmamainetmeramèneàlui.Cegesten’échappepasàLolaquifixe,

lesyeuxrouges,nosdoigtsentremêlés.Lepalpitantàsonmaximum,jelaisseBengérer,vuqu’ilsemblesavoircomments’yprendre.Moi,enl’état,j’arriveàpeineàtenirsurmesjambes.D’unevoixcalmeetposée,ilprofitedesonétonnementpourenplacerune.

—Princesse,tufaisfausseroutelà.Zoén’estpasunplancul.Jemeretiensderirequandonsaitcommenttoutçaacommencé.Non,c’estjusteunjeusexuelquia

dérapé !Lola lève lesyeuxvers luipuisversmoietattenduneconfirmationdemapart. Je lui souristendrementetposelesmotssurnotrerelation.—Benetmoi,onest…ensemble?!Çame fait bizarrede ledire àvoixhaute, jebute sur lemotqui rouledifficilement surma langue.

Machinalement, je me tourne vers Ben et son regard amusé me laisse penser que c’est aussiinvraisemblablepourluiqueçal’estpourmoi.—Ensemble?Genre,t’essonpetitami?Lavoixtropdanslesaigus,Lolapeineàycroire.Rassure-toi,j’ensuisencorelàégalementetpourtant

çafaitplusieursjoursquej’essaiedem’enpersuader!UnegrimacedéformelabouchedeBenàcetteexpression.Illâchemamainetinstalleunbrassurmesépaulesavantdedéposerunrapidebaisersurmatempe.—Disons que je suis son mec oui. Enfin on est en couple quoi, qu’est-ce que tu n’arrives pas à

comprendrelà-dedansLola?—Merdealors…Celle-làjenem’yattendaispas!Ellemefileunetapesurl’épauleetmedévisageuninstantdesesyeuxrétrécistellesdesmeurtrières,

comme si elle se souvenait soudainement d’une chose. Pourquoi c’est toujours moi qui ai droit à saviolence?—Tut’esbienfoutuedemoi!Ilyaàpeineuneheuretumedisaisàquelpointtuledétestais!T’avais

l’occasiondemeledire,pourquoitunel’aspasfait?Elleestsérieuseavecsaquestion?— Tu vois bien ta réaction disproportionnée, Lola. Pourquoi je me serais risquée à t’en parler ?

C’étaitnotrepetitsecretenattendantdesavoiroùnousallions.Tupeuxleconcevoir,non?Oncomptaitteledire,maispastoutdesuite…Lolafaitquelquespasenarrièreetselaissetombersurlefauteuil.Surtout,Ben,nemelâchepas,je

faismamalignemaisjen’enmènepaslarge.Tudesserrestaprise,jem’écroule.—Vousmeprenezaudépourvumaisj’auraispum’enapercevoiraussi!Çafaitlongtemps?Vousêtes

amoureux?Bensecrispe,sonpoucequimecaressaitl’épaules’arrêteaussitôt.Avantqu’ilneprononcedesmots

quipourraientmeblesser,jeprendslesdevants.—C’esttoutnouveau,etnonjenesuispasamoureuse,maisjel’appréciebeaucoup.LeregarddemarouquinesebraqueaussisecdansceluideBenquirestesilencieux.Ilsoupire,agacé

dedevoirsejustifiersurdeschosesquineregardentquenous.—Rangetesyeuxrevolver,jenecomptepasluifairedemal.Moiaussijel’aimebeaucoup,tafollede

copine!Un coup de coude bien placé dans les côtes et il ressert son étreinte en rigolant. L’atmosphère se

réchauffed’uncoup,autantquemoncœur.Ilm’aimebien!Lolanousobserveàtourderôleetunvraisourirefendsonvisage.Elleselèved’unbondetmeprenddanssesbras,avantd’enfairedemêmeavecBen.—Situtiensàtescouilles,vautmieuxpourtoiquetunefassespaslecon!LamenacedeLolalefaitrireunpeuplusetillaserrefortdanssesbras.Ilyaunetellecomplicité,un

telamourfraternelentreeuxquejenecomprendspascommentj’aipudouterdeleurrelation.Lajalousiepeutfairedesravages.Ellesedétacheetplantesonregarddanslesien,toutetraced’humouradisparu.—Jesuissérieuse.Chouchououpas,t’esunhommemortsitulafaissouffrir.—Jesais.Lecœurgonflé,labouleàlagorge,j’observeLolamenacersonmeilleuramipourmeprotéger.C’est

ma seule famille,mon unique amour jusque-là et elleme le rend bien.Comment j’ai fait pour douterd’elle?Lasonneriedemonalarmem’indiquequedansuneheurejedoisêtreàl’autreboutdelavillepourrencontrerunenouvellecliente.Jesaisdéjàquejeseraienretard.—Onenreparleplustardsituveux,maislàilfautvraimentquejeparte.Benme libèreetme faitunclind’œil enguised’au revoir. Je regrettedéjà ses lèvresmais je suis

soulagée.Ons’estdéjàtropdonnésenspectacle,mieuxvautyallerdoucement.Alorsquejesuissurlepointdepartir,jemetourneversceluiquiestàl’originedetoutecettemerdeetquiestrestéétrangementsilencieuxdepuis.—Aufait,Lola,tonhommeétaitaucourantdepuisplusieursjours!Ben ricane alors quema rouquine, le visage furibond, se tourne vers son amoureux et commence à

l’incendieravantmêmequej’airefermélaporte.Çac’estfait!Lesourireauxlèvres,lecœurléger,jequitte le bâtiment. C’était pas si terrible que ça finalement ! Je suis officiellement la petite amie deBenjaminHarperetcerisesurlegâteau:ilm’aimebeaucoup!

Chapitre23

Zoé

Aprèsunaprès-mididétenteàfairelesmagasins,jeregagnelabouchedemétroavecdessacspleinlesbras.MespenséessetournentversBen.Unesemainedepluss’estécouléedepuisqueluietmoisommesofficiellementensemble.Notrevieestchamboulée,Lolaestencoreunpeuenretrait,sceptiquequantànotrerelation,etjenepeuxpasluienvouloir.Onasimulénotrehainetroplongtemps.Ellen’apaseuletempsdevoir tourner leventets’estpris la rafaleenpleine tronche.Benetmoiétionsd’accordpourgarder çapournousmais c’était sans compter sur Jay. Il savait parfaitement comment faire réagir sonpote.Lesecretétaittroplourdàgarderouc’étaitjustepourleplaisir?Maisfinalementc’estunmalpourunbien,maintenantonestlibres,unvraicoupleauxyeuxdetous,et

lepirec’estqueçatient!Rienquepourça,jetrouvequeçamériteunepetitefête.Oui,c’estdécidé:cesoir,ZoéPerezsortlegrandjeu!

*

Jetrépignesurplace,àmi-cheminentrel’excitationetledoute.Commesisonretardétaitlesignequej’ai encore le temps de tout annuler et d’éviter la bourde du siècle. Les yeux écarquillés, je regardeautour de moi et c’est comme si j’observais ma mise en scène pour la première fois : les bougiesdispersées, lamusique douce en arrière-fond,moi quasiment nue…Aumieux ilme prendra pour unepsychopathe,aupireilvas’imaginerquejesuisfolleamoureuse,quejenevisquepourluioujenesaisquoi ! Parce que là, en l’état, ça ressemble plus à une demande en mariage qu’à une simple soiréeimprovisée.Bordel,j’aiencorefaitdansl’excès,ilvaflipperàcoupsûr!Chausséesurdouzecentimètresdetalonsaiguilles,jetrottineaussivitequepossiblejusqu’àlatable

dressée et ramasse à la hâte les pétalesde roseque j’avais déposésdessus. Je range le chandelier etrécupèrelesbougiesuneàune.J’aiàpeinesoufflésurladernièrequelaported’entrées’ouvreengrand.Laseconded’aprèslalumières’allumeetm’exploselesyeuxaupassage.Àmavue,Bensursaute.—T’eslà?Qu’est-cequetufoutaisdanslenoir?—Jenem’étaispasrenducomptequ’ilfaisaitsisombre,j’allaisallumerjustement!Larespirationhaletanted’avoircouruauxquatrecoinsdelapièce,lespoingsserréspourcacherles

pétalesquejen’aipaseuletempsdejeter,jechercheàparaîtrenaturelle.Toutvabien,ilnesepasserien!LesyeuxdeBencaressentmescourbesetilafficheunsourirediscretavantdesedétourner.Quoi,etc’esttout?Onpeutapercevoirmesgrainsdebeautétantlanuisetteesttransparenteetçaneprovoquemêmepaschezluiunfrancsourire?Iljettesescléssurlebaretsesertunebièreavantderevenirversmoietdeposerseslèvressurlesmiennes.Apparemmentjen’aipasledroitàunvraibisounonplus…C’estseulementàcemoment-làquejeremarquequ’ilalestraitstirésetleteintpâle.Ilsedégagedeluiunetensionpalpable.Jeluicaressetendrementlajoue,cequimevautundernierpetitbaiseravantqu’ilnes’éloigne.

—Est-cequetoutvabien?D’ungestemécaniqueildesserresacravateavantdepousserunlongsoupir.—Ouais,lajournéeaétédurec’esttout.Monpèreestencorepasséaujourd’hui.Sujetsensible.Samâchoiretressauteàlasimpleévocationdesonpère.—Tuluiaslaissél’occasiondes’expliquercettefois?—T’es sérieuse ? Jeneveuxplus avoir affaire à lui, tu le sais. Jevoismêmepaspourquoion en

parle.Benfinitsabièred’unetraiteetclaquelabouteillesurleplandetravail,lesnerfsàfleurdepeau.Je

larécupèreetlajetteàlapoubelle,medébarrassantparlamêmeoccasiondespétalesquimecollentauxmains. J’ai failli bousiller cette soirée avec ma folie des grandeurs, mais ce n’est pas non plus sonpaternelquivas’enchargeravecsessoudainsétatsd’âmeaprèstoutcequ’illuiafaitendurer!—T’asraison,c’estluidonnertropd’importance.Alorsjeteproposeuntruc…Mesdoigtscourentsursontorseet,d’ungestehabile,luiôtentsacravateavantd’ouvrirsespremiers

boutonsdechemise.Benmelaissefaire,maissamâchoirecontractéememontrequ’iln’estpasd’humeuràjouer.Lentement,mesmainsremontentlelongdesanuqueetlibèresescheveuxretenusenchignon.Ilfermelesyeuxtandisquejefourremesdoigtsdedansetlemasse.Ungrognementdeplaisirs’échappedeseslèvresetilbasculelatêteenarrièrepourprofiterpleinementdemescaressesdanssachevelure.—… Je vais te faire couler un bon bain chaud, t’apporter une autre bière et tu vas gentiment te

détendrependantquejefaisréchaufferlerepas.Sesmains seposent surmeshanches etme ramènentbrusquement à lui aumomentoù il baisse son

visageversmoi.Sonsouriredeplay-boyrefaitsurfacemêmesisesyeuxrestentvoilés.—Situveuxmedétendre,j’aiunautrescénarioàteproposer…Ettaboucheauraitlepremierrôle!Bahvoyons!Aumoinsilaretrouvésoncôtéobsédé,c’estdéjàça!—Memettreàgenouxdevanttoifaitaussipartieduprogramme,maisavantt’asbesoindeteviderla

tête.—Latête?Nonparceque,perso,jemedisquej’aisurtoutbesoindemeviderles…La main sur sa bouche, je l’empêche de sortir sa connerie. Lui qui respire la classe, sa réplique

douteuseneluicorrespondpas.ÀcroirequeJaydenafinipardéteindresurlui…Unrireétouffésefaitentendreetjelâchemaprisequandlapointedesalanguechatouillemapaume.

Unvraigamin!—Encoreunephrasedanslegenreetjerisqued’ymettrelesdentsalorsméfie-toi!L’imagedemesdentsrayantsacarrosserieluiprovoqueunevisiond’horreur.Unegrimacededouleur

sepeintsursonvisage.Jeprofitedesessecondesd’absencepourmedégagerdesesbrasetfiledanslasalledebains.Quandjereviensquelquesminutesplustard,Benn’apasbougéd’unpouce,àpartqu’ilauneautrebière entre lesmains.Appuyécontre lebar, perdudans sespensées, il neme remarquequelorsquej’arriveàsahauteur.Letristesourirequ’ilm’adressemefendlecœur.Jenesaispasàquoiilpensait,mais je comptebien faire réapparaître leBendrôle, chiant et attachant que j’ai l’habitudedevoir.—Jeteramènedel’alcoolfortouuneaqua-bièreserasuffisante?Unelueurdemalicetraversesesprunellesàl’évocationdecettesoiréeparticulièreoùilaorganiséun

apéroimprovisédanslabaignoire.Lapremièrefoisoùilm’afaitl’amour,oùilm’adonnémonpremierorgasme.

—Jesavaisqueleconceptt’avaitplu!Onprendunbaintouslesdeux?—L’idéeesttentantemaisnon,pascettefois.Jedoisfinirdeprépareràmanger.Ouplutôtdéballerlesbarquettesd’aluetlesmettreaufour,maisçajemegardebiendeleluidire.Du

coin de l’œil il détaille la cuisine : propre et bien rangée. Avant qu’il ne se fasse ses propresconclusions, je luiattrape lesmainset le forceàse relever.Sonregardancrédans lemien, ilmesuitsilencieusementjusqu’àlasalledebains.—Leshommesprennentdesdouches.Lesbaignoires,c’estpourlesgonzesses.—Bahvoyons,etsit’enasunecheztoic’estjustepourladécoalors?Maiscommejecommenceàte

connaître,jet’aipréparéunbainmasculin,viril:sansmousse,niselsdebainouboulesparfumées.Etdansledoute,j’aipasmislafonctionspa!—Je.Ne.Prends.Pas.De.Bain.Dumoins,passeul.C’estuneinvitationdirectemaislefaitdepenserqu’ilaitpuenprendreunavecuneautrefemmeme

déplaîtfortement.Cetappart,c’estsagarçonnière.Mieuxvautnepasimaginertouslesendroitsoùiladûbaiser,aurisquedesalirmespropressouvenirs.Jedéfaislesderniersboutonsdesachemiseetlalaissetomberausolavantdem’attaqueràsonpantalon.JedébouclesaceintureetdescendslafermetureÉclairquandsesdoigtsremontentdoucementletissudemanuisetteetcaresselegalbedemesfesses.Sapeauchaudesurlamiennem’électrise,accélèremonrythmecardiaque.—Alorstumerejoins?Savoixsoudainementrauque,empreintededésir,m’émoustilleetm’intimidecommeàchaquefois.Ce

n’estpasdansmeshabitudes,c’est le seulmecquiproduitceteffet surmoi.Moi,Zoé, j’arriveàêtreintimidéeetjenedonnepascherdemapeauvulamanièredontilmeregarde.Unecanineplantéedanssalèvre,ilattendmaréponse.Horsdequestionquejeluiservederepasalorsqu’ilétaiténervéilyapeu!—Pascettefois!Priseaupiègedesonregardenvoûtant,jesecouelentementlatêteetbaisselesyeuxavantdefléchir.

L’ombred’unsouriretentateurourleseslèvresetsesdoigtscontinuentleurascensionaupointquejen’aiplus de tissu en dessous de la poitrine. Une petite tape sur lesmains pour lui signifier d’arrêter sonnuméro.—Tsstsstss,restetranquille!Sonrirerésonnedanslapièce.Jem’accroupisetdélaceseschaussuresavantdelesluiretirer.Jen’ai

jamaisfaitçapourunhomme,jen’aimepasmaterner.Maisaveclui,toutestsensuel,sexy.Jeglissemesdoigtssousl’élastiquedesonboxer,découvrel’encrenoiresursonaineetfaistombersonpantalondanslafoulée.—J’aimetevoirdanscetteposition…Unsouriretaquinetlesyeuxbrillants,Benmeregardedetoutesahauteur.Jedéposeunpetitbaisersur

lapeaudoucedesonsexeàmoitiédurcietmerelèveprécipitamment.D’uneclaquesurlafesse,jeluifaissignederentrerdansl’eau.—Tuescruelle,jesauraim’ensouvenirtoutàl’heure!Je lève lesyeuxauciel :commes’ilavaitbesoindecetteexcuse! Ilprendunmalinplaisirà faire

monterlapressionjusqu’àm’entendrelesupplier!Jemedélectedelavueimprenablesursonjoliculmuscléquipénètredansl’eau,avantdetournerlestalonsetdemedirigerverslacuisine.Leplataufour,jemeprendsunebièredanslefrigoetrécupèrelasiennelaisséesurlebaravantdele

rejoindre.Étendudetoutsonlong,latêteposéesurlerebordetlesyeuxfermés,ilsembleêtredétendu.

Commequoij’avaisraison!Lestracesdemoussesursontorsemefontcomprendrequ’ils’estdéjàlavé.J’enlève mes escarpins et m’assois en face de lui sur le rebord. Les pieds dans l’eau chaude, jel’éclaboussepourl’obligeràouvrirlesyeuxavantdeluitendresabouteille.—Merci,t’eslameilleure!—Justepourunebière?Jevaisavoirdroitàquoiquandtuvassavoircequetumanges?—Àmaspécialité!Jenesaispasàquoiilfaitallusion,cemecestunespécialitéàluitoutseul.Uneformulecinqétoiles

pourunmenuorgasmique!Lesbrasétendusdechaquecôtédelabaignoire,ilmedétailledelatêteauxpiedssansretenue.Sonregardmebrûlepartoutoùilsepose.—Aufait,jenetel’aipasditenarrivanttoutàl’heure,maistuesmagnifiquedanscettetenue.—T’aurasmisdutempsàledire,maismerci!Pasd’adjectifcommebandante,appétissante,alléchanteouexcitante.Magnifique.Jesuismagnifique.

Àcetinstant,jenemesuisjamaissentieaussifemme,aussisexy.Pourtantj’aitoujoursétésûredemoietdemesatoutsphysiques.—Sérieux,delàjepeuxvoirtestétonsquipointent!Desnuisettescommeçatupeuxenmettretous

lesjours!D’accord,autempspourmoi,j’aiparlétropvite.Monpiedselèvecommeunressortetluiaspergele

visage,effaçantsonœillubriquesansparvenirnéanmoinsàluienlevercesourireblancdeblancqu’ilmesertàtouteslessauces.Craquant.Irrésistible.Énervant.—Bonalors,onmangequoi,femme?Merde,voilàquemaintenant il passe enmodehommedescavernes.Àmon froncementde sourcils,

Bensaitqu’ilestsurunterrainglissant.T’astoutàfaitcomprismoncoco,laféministeenmoiestentraindefairedesbonds.Ilseredressepourmieuxmefaireface.Sesmainstrouventmonpiedetmassentmavoûteplantaire,m’arrachantungémissementdesoulagementaprèsdesheuresàpiétineravecsesfichustalonsaiguilles.Quandjelevoissemoquerdoucementdemoi,l’enviedeluifaireravalersonsouriresefaitsentir.Tantpissiçaentachemafiertéaupassage.—Jet’aifaitdeslasagnes.Sesmainssestoppentnetetàsontourilfroncelessourcils.Voilà,jememarre.—Moiquipensaisquetum’aimais!Silencegênant,pesant.Ilécarquillelesyeuxenréalisantlaportéedesesparolesetdébiterapidement

lasuitepourserattraper.— Enfin je veux dire que tu m’aimais bien ! Tes lasagnes sont dégueu, j’ai frôlé l’indigestion la

dernièrefois!Impossibledem’énerver.Àvraidirejeprêteàpeineattentionàcesmots,lespremiersétantencoreen

trainde tourner enboucledansma tête. Je sais parfaitementqu’il a parlé tropvite, qu’il ne croit pasréellementquejesuistombéeamoureusedelui.Maismoi,j’enpensequoi?Sipenseràluiàlongueurdejournée,avoirlecœurquibatplusvitequandjelevoisouavoirdespapillonsdansleventredèsqu’ilposeseslèvressurlesmiennesc’estêtreamoureuse…Bordel,jesuisentraindetomberamoureusedeBen!Jesensmesjouesrougiretmemordslalangueàm’enfairemalpourmeforceràréagir.Ondiraitunecarpe,Zoé,disoufaisquelquechose,n’importequoi,maisbouge!Montre-luiquetun’aspasfaitcasdesabourde!—Aucun autre effet depuis ? Faudrait que je pense à augmenter les gouttes d’arsenic dans ton vin

alors.Sesépauless’affaissentsensiblementetunlégersourireéclairesonvisage.Maisoui,rassure-toi, je

n’airienentendu.Jesuisblonde,n’oubliepas,jen’aidoncabsolumentriencompris!—Garce,jecroyaisquelegoûtbizarrevenaitdetonvinfrançais.—Jedevraisenmettredanslabière,çamarcheraitmieux!Surce,jevaisallervérifierlacuissondes

lasagnes…dutraiteur!Jecroisentendreun«merci,mondieu»maislebruitdel’eauquandjesorscouvresesmurmures.Au

momentoùjem’apprêteàfranchirlaporte,savoixcettefois-cisefaitclairemententendre.—Tantquetuyes,femme,vadoncmechercherdesfringues!Jemeretourneaussisecetlefusilleduregard.Leschaussuresdanslesmains,jelemenaceenpointant

lestalonsdanssadirection.—Encoreunephrasedanscegenreetteshabitsj’enfaisdestorchons.Rangetoncôtémacho,j’enai

assezeupourcesoir.Faisattention, turégresses tellementviteque tuvasfinir lasoiréeenhommedeCro-Magnon!Alorsquejefermelaportedelasalledebains,jel’entendsgrognercommeunhommepréhistorique

avantd’enrire.Maisquelidiot!Lesourireauxlèvres,jevérifieleplatavantd’allerdanssachambre.Jeretournesestiroirsàlarecherchedequelquechosederidicule,n’importequoi,maiscemecatropdeclassepourgarderunseulvêtementtaché,déforméoudécoloré.Agenouillée,j’ouvrelederniertiroirdesacommode.Jetombesurunjoggingencoton,d’unbleuchinéquimerappellelacouleurdesesyeux.Àdéfautdelevoirridicule,j’aurailasatisfactiondebaverdevantlaperfection.Jetirelepantalondufonddutiroir,etunobjetsefracasseparterreparlamêmeoccasion.Jetourne

rapidement la têtevers laportemais lebruitsourdsur leplanchernesemblepasêtreparvenujusqu’àBen.Curieuse,monregardrevientversl’objet:uncadre.Qu’est-cequ’ilfoutaitlà?Jeleramasseetmesdoigtseffleurentsescontours.Merde,jel’aiabîmé!Jeleretournepourvoirl’étenduedesdégâtsmaislafissureduverre est le cadetdemes soucis.Mesyeux scrutent laphotoencadrée, les sourires remplisd’amour qui font saignermon cœur en un instant.Le souffle coupé, les doigts tremblants, je découvreavechorreurlepremieramourdeBen.Iln’yapasdeplacepourledoute.ÀlavisiondeBenetdecettefille,monmondes’effondre.Unriresansjoies’échappedemeslèvres,mesdoigtsquiseserrentfissurentunpeuplusleverre.Laconnexionentresesdeuxêtresesttellementfortequejecomprendspourquoiiln’a pas réussi à l’oublier. Le souvenir de Blue gardé caché pendant tant d’années en est la preuve.Maintenantque lavéritém’exploseenpleine face, jemedemandecomment j’ai faitpournepasm’enrendrecompte.Maispourquoiilafalluquecesoitelle?Quellessontmesarmesfaceàelle?Moncœurestdanslemêmeétatqueleverre:fenduendeux.Unjour,lepassénousrattraperaet,moi,jedeviendraiquoi?—Maisqu’est-cequetufous?Jesursauteàsavoixdansmondosetmelèveprécipitamment.Réalisantquemesdoigtssonttoujours

fermementcramponnésaucadre,jepassemonbrasderrièremondosàlarecherchedelacommodeet,d’unemainfébrile,jeposel’objetaussidiscrètementquepossible,tandisquedel’autre,jeluitendssonjogging.Ill’attraped’ungestemécaniqueetlejettesurlelitsansyprêterattention.Levisagegrave,ilposesamainsurmonfrontcommesijecouvaisquelquechose.—Zoé,t’estouteblanche…Çavapas?Jenesuispasmalade.Enfinsi,jecrèvedejalousie,decolèreetdetrouillemaislà,tunepeuxplus

rienpourmoi.Monregardrencontrelesienetlefuitquandjerevoiscevisaged’unevingtained’années

quidévoraitdesyeuxceluid’uneautre.Reprends-toi,Zoé!—Siçava.Jecherchaisuneconnerieàtefaireportermaislagravuredemodequetuesn’ariende

pourridanssesplacards.Il rigoledoucementetmeprenddanssesbras. Il sentbon le fraiset sapeauencorehumidemefait

frissonner.Àmoinsqueçaprovienned’autrechose…J’aibeaumedirequec’estdel’histoireancienne,jenepeuxm’empêcherdepenserquemontempsavecluiestcompté.Lecompteàreboursestenclenchéetjeneveuxpasattendreladernièreminutepourleperdre.Jedoismeprotéger,jemesuissuffisammentmiseendangeraveclui.Posantmesmainssursontorsepourlerepousser,ilnebougepas,tenducommeunarc.Jem’écarte,chercheàcaptersonregardmaisilestfixésurquelquechosederrièremoi.Bordeldemerde… Le cadre. Me bousculant presque, il attrape rageusement l’objet en bois et le jette dans lepremiertiroirouvertsansunregardsurlaphoto.—Depuisquandtutepermetsdefouillerdansmesaffaires?Le ton tranchant de sa voix me fait sortir de ma torpeur. Je me redresse et affronte ses yeux aux

couleursdel’orage.Ilesténervé?Etmoialors,jedevraisréagircomment?—Jetel’aidit,jecherchaisdesaffaires.Jenesavaispasquelefonddetontiroircachaituntrésor!

C’estBlue,c’estça?—Pourquoitumeposeslaquestionsituasdéjàlaréponse?Toussesgestesetsesmotsnesontquehargne.—Etjesuisquoi,moi,unplacebo?Unvulgairesubstitutpourcomblercevide?Siparlerd’ellete

faitencoremal,c’estque tuas toujoursdessentimentsmalgré ta rancœur,malgréceque tuveux fairecroire.Jenemebattraipascontreelle,Ben!Alorsquejechercheàsortirdesachambre,ilm’attrapeparlepoignetetjemeretrouvedenouveau

contresontorse.—Tunepeuxpastebattrecontreunfantôme.Bluefaitpartiedemonpasséettoituesmonprésent.Ne

fuispasàcaused’elle.Jen’ai jamaisétéaussibienetc’estentièrementgrâceàtoi…Zoé,tucomptespourmoi.Sesparoles,l’intensitédesonregard,ladouceurdesesdoigtssurmesjouesarriventuntantsoitpeuà

mecalmer.Jetentedem’yraccrocher.Fermantlesyeux,jemelaisseallercontresoncorpschaudetcalemon rythme cardiaque effréné sur le sien. Ses doigts caressent mes cheveux, mon dos, mes bras,m’apaisent.Maisquandilsdeviennentplusosés,qu’ilsdescendentsurmeshanchesetflattentlescourbesdemesfesses,jemetends.Benn’estpasdupe.Sonsoufflechaudcontremonoreille,ilmurmuresesmotsquisortentcommeunesupplique.Jelesreçoiscommeuncoupdepoing,memettantcomplètementK.-O.—Situsavaisàquelpointj’aibesoindetoi…Nemerepoussepas,Zoé.Sesmainspassent labarrièredu fin tissudemanuisette, remontent lentement surmes flancs, etme

forcentàleverlesbraspourmelaretirer.Jelelaissefaire,impuissante,incapabledelerepoussermaisquandmesyeuxpercutent l’azurdes siens, je suishypnotiséepar ledésir que je lis dans sespupillesdilatées.Unebouleseformedansmagorgetandisqueseslèvresembrassentavecgourmandisel’arêtedemamâchoire,moncou,maclavicule…Jegémismalgrémoiquanddesesdoigtsilpincelapointedemestétons.Moncorps répondà ses attentes,mes seins s’alourdissentdeplaisir etmonentrejambepalpited’impatience.Maisdansmatête,c’est legrosfoutoir.Lui,elle…Eux.Leur images’incrustesousmespaupièresetdénaturel’instant.Est-cequ’ill’aimetoujours?Jesuisquoipourlui?Est-cequej’aiunechancefaceàelle?J’aienviedelecroire,d’oublierpourmelaisserallerdanssesbras,maismaraisonmehurledememéfier.Bonsang,jen’yarriveraipas,j’ail’impressiond’étouffer.Ilfautquejem’isole,

que je détourne son attention.D’une voix étranglée, obstruée par cette douleur latente, cette putain deboulequim’empêchederespirer,jesorslapremièrechosequimetraversel’esprit.—C’estl’heuredemanger.Leslasagnesdoiventêtreprêtes.Bennesemblepasm’entendreoudumoinsn’yprêtepasattention.Ilmeconduitdoucementversson

lit.Mesjambesbutentcontrelerebordetl’instantd’aprèsjemeretrouveallongée,soncorpsrecouvrantlemien.—Sûrement.Maislà,c’esttoiquejeveuxmanger.Ses lèvres fondent surmoi,mehappent et jemeperdsdans leur chaleur.Nos langues se cherchent,

s’emmêlent,secaressent.Ladouceurdesoncontact,desabouche,desesmainsquim’idolâtrentabaissemes barrières.Mes doigts parcourent son corps, cherchant déjà àmémoriser chaque parcelle de peauavantdenepluspouvoirletoucher.Demainestunautrejour,enattendant,ilestencoreàmoi.

Chapitre24

Ben

Aucune journée de taf ne m’a jamais paru aussi longue, et cette fois impossible d’échapper auxréunionsniauxrendez-vousprogrammésdepuisdeslustres.Jeprendssurmoi.Jebous.J’enrage.Unairinébranlablefichésurmatronchefaceàtoutescestêtesdeconsencostard-cravate,jeprésidelaréunionenl’absencedeJay.Ladernière.Ilvaêtre20heuresetjen’aiqu’uneenvie:foutrelecamp.Leportableposéàcôtédemoi,jeregardel’écrannoir.Encore.Monindexglissedessuspourledéverrouiller.Rien.Cette furie cherche à me rendre fou en évitant mes appels, en laissant mes messages sans réponse.Apparemmentellem’enveutencorepourhier.Cettephotoestcachéedansmon tiroirdepuis tellementlongtempsquej’aifiniparlazapper.D’accord,jen’aipeut-êtrepasréagidelameilleurefaçonquandjel’ai vue sur la commode,mais je nem’y attendais pas. Je nem’attendais pas à revoir sonvisage.Cesouvenirdenousdeuxm’aprisdecourt.Zoéaledonderemuerlamerde,meposantrégulièrementdesquestionssurBlue,surmonpassé.Toutesceschosesque j’ai refouléesdansuncoindematêteenmecoupantdetoutesrelationsdecouple.Merde,elleneserendmêmepascomptequec’estellequiaréussiàmefairepassercecap!Lacolèreetl’amourquej’aipuéprouverpourBluemeparaissentbienloindepuisqueZoéestentréedansmavie.Pourquoineveut-ellepascomprendrequetoutçaestderrièremoi?Qu’ilyalongtempsquejenem’étaispassentiaussibien?—MonsieurHarper?Àmonnom,jerelèvelatête,unedizainedepairesd’yeuxbraquéssurmapersonne.Silencieux,jeles

regardeàtourderôle,cherchantàsavoircequ’ilsattendentdemoi.Bonsang,voilàquemaintenantjemeridiculisedevantmesconfrèresàcausedecesconneriesquimebouffentlecerveau.Monassistanteéteintlerétroprojecteuretposesesnotessurlatableavantdeseconcentrersurmoi.—J’aifinilaprésentation.Avez-vousquelquechoseàajouter?C’estbon,j’entrevoisenfinlaportedesortie.Jemelèveetl’assembléem’imite.Ouais,lesgars,vous

aussivousenavezpleinleculàcequejevois.—C’estbonpourcesoir,ilesttard.Merci,messieurs,jevousrecontactebientôt.Jefermemonordinateur,fourremonportabledansmapocheetdécampeavantqu’ilsneviennenttous

meserrerlamain.Ilestgrandtempsderentreretdecomprendrelesraisonsdesonsilence.

*

Quandj’arriveàl’appartetquejeletrouveplongédanslenoir,unputaindepressentimentmonteenmoi. Elle n’a quandmême pas osé se barrer… Pas encore une fois ! J’investis les lieux, lancemoncasquedemotosurlecanapéetdéfaismonblousonavecrage.Cesilencealedondemefairemonterenpression.Jevaism’enprendrepleinlatêteparLolamaisilfautquejel’appelle,j’aibesoindesavoirsiellesaitoùestZoé.Leportabledanslamain,jesuspendsmongestequandj’entendsdessonsétouffésvenantdesachambre.Delalumièrepassesouslaporte:elleestlà.Sansréfléchirjefoncedroitdevant

etouvrelebattantquicognecontrelemurdesachambre.Zoésursauteavantdefroncerlessourcilsetdemefairesignequejesuisfou.Macolèremonteencored’uncran.Lesmâchoirescrispées,j’essaiedemecontenir.Peineperduequandellemetourneledospourreprendresaconversationtéléphonique.Putainelledépasselesbornes!Siellemecherche,ellevametrouver!Avant qu’elle ne s’éloigne un peu plus, je lui arrache le téléphone des mains et coupe la

communication. Zoé se retourne brusquement vers moi et écarquille les yeux en me voyant jeter sonportablesurlelit.—Nonmaist’espasbien,j’étaisavecunecliente!—ÇaauraitpuêtrelepapeoulePrésidentquej’enauraisrieneuàfoutre!J’aipassélajournéeà

essayerdetejoindre,unputaindemessagec’étaittroptedemander?J’ail’impressionderevoirlaZoédudébutquandellesoufflebruyamment.Clairement:jel’emmerde.

Bordelmaisilsepassequoilà?Aupremiermouvementpourrécupérersonportablejelachopeparlebrasetlaforceàmefaireface.Àmoncontact,ellesecrispeetsesprunellesglacéesmetranspercent.Jelarelâcheaussisec,paumé.—Çavatoujoursêtrecommeçaavectoi?Aupremiertrucquitegênetuvasterenfermer?Jenevais

pasmebattrepournousdeux,Zoé.Explique-toiaulieudemefuir!Enunefractiondeseconde,lafureurquittesesyeuxetellesedétourne,commesielleabandonnaitla

partie. Sa réaction me prend aux tripes parce que, cette fois, si elle part, elle me quitte. Les mainscroiséesderrièremanuque,jelaregardes’asseoirsurleborddulitetseperdredanslacontemplationduplafond.Unsilencepesants’installeet j’ai l’impressionqu’elleestdéjàloin.Çanedevraitpasmetoucherautant,cettehistoireétaitàpeinecommencée…—Cettephotom’abeaucoupplusretournéequej’aibienvoululemontrer.C’esttonpremieramour,et

Blue…Elle se tait brusquement quand jem’agenouille devant elle. Son regard plonge dans lemien etma

colèresefaitlamalledevantsoninquiétude.—Zoé…Nelaissepastapeurnouséloigner.Tuveuxqu’onparledeBlue?OK,onvalefairemais,

je te préviens, on ne reviendra plus dessus ensuite. Si ça peut te rassurer, vas-y. Pose-moi toutes lesquestionsquitetravaillentetj’yrépondraientoutehonnêteté.Sonhésitationàposerdesmotssursescraintesmerendd’autantplusnerveux.Jen’imaginaispasà

quelpointmonexpouvaitavoiruneemprisesurnotrerelation.Çamerenddingue.Zoépinceleslèvresetinspirelonguement.—Àquelpointl’as-tuaimée?Jefroncelessourcilsenhumidifiantmeslèvres.—Entoutesincérité,jen’aipasdepointdecomparaison.Toutcequejepeuxtedirec’estquej’étais

jeuneetqu’ellem’obsédait.Alorsoui,j’étaisfoud’ellecommen’importequeladoquiapprendàaimerpourlapremièrefois.Maistusaistrèsbiencommentças’estterminé,avecl’interventiondemonpère.Entreelleetmoi,çaajusteétéunfeudepaille.Puissant,maisviteéteint.—OK…Maissiunjourtutombaisdessusparhasard,ilsepasseraitquoi?Moijedeviendraisquoi?L’espace d’une seconde, sa question parvient àmedéstabiliser.On arrive au cœur du problème, et

j’étaisàdixmille lieuxd’imagineràquelpoint son inquiétudepouvait la ronger,commentunesimplephotoapulafairebasculerdansledoute.Jecontractelesmâchoiresenprenantletempsdemesurerlaportée de ce qu’elle me demande. Elle veut que je pense à Blue, que je sois sincère… Inspirantlentement, je laisse lesbribesdemonpassé investirma tête.Des rires,desbaisers,noséchanges,ma

jeunesse…Non.Toutçac’estfini.J’aiévolué,jesuisunhommeconscientdecequ’ilveut,etdecequ’ilneveutplus.Jeremballemesfantasmesd’adoenlissantdemonpoucelabouchepincéedecettefemme,faceàmoi,pleined’appréhension.—Oublie tes craintes, çane changerait absolument rien.Neconfondspas tout,Zoé, tunepeuxpas

comparermonamourd’adolescentàcequel’onpartagemaintenant.Elleaétéimportantepourmoi,c’estvrai,mais çan’a rienàvoir avecmesattentesd’aujourd’hui. J’ai tourné lapage, et c’estgrâce à toi.Oublielepassé,concentrons-nousplutôtsurcequinousarrive,nelalaissepass’immiscerentrenous.Sespupilless’agitentenmeregardantetjen’aiqu’uneenvie:finirdelarassurer,luiprouverquec’est

ellequiestimportanteàmesyeux.J’approchemeslèvresdessiennesmaissoudainementellereculesonvisageenmeretenantparlesépaules.Saréactionmefaitl’effetd’unuppercutenpleindansl’estomac.—Avanttoutechose,unedernièrequestion:est-cequ’ellesavaitfaireleslasagnes?Son air mutin vient me narguer, m’arrache un soupir de soulagement avant de ricaner. Un sourire

séducteurauxlèvres,jemepencheverselle,empoignesescheveuxquejetiredoucementpourdégagersagorge.Monsoufflesurvolelecreuxdesonoreilleavantdelamordiller.—Divinementbonnes…Malanguetracedessillonssurlapeaudesoncou,remontejusqu’àsamâchoire.Ellegémitenserrant

lespoings,jepoursuissurmalancée.—Fondantes,généreuses…Je laisse glissermamain sur son chemisier, défais les premiers boutons et enveloppe son sein, le

caressetandisquej’aspiresalèvreinférieure.Elles’agite,râle,entreplaisiretindignation.Ellemefoutuncoupàl’épauleetjem’écarteenmemarrant.—Stop,c’estbon,j’aicompris!Jevaism’inscrireàuncourss’illefaut!Unrictusapparaîtsurmeslèvres.—Quoiencore?—Qu’est-cequ’ons’enfoutdeseslasagnes?Jenelesaijamaisgoûtées!Zoésemordillelalèvrepourretenirsonrire.—Jetedéteste.Notre complicité retrouvée, je pose ma main sur sa joue, la caresse de mon pouce en savourant

l’intensitédanssonregard.Sesyeuxfixentmeslèvres,sonindexendessinelescontoursetjefondssurlessiennescommeunaffamé,uncaméenmanquependanttouteunejournée.Parcequec’estcequesuis:unaccroàlameilleuredesdroguesquisoitmaissûrementaussilaplusdangereuse.Lenirvanamaisavecle risqued’unedescenteenbad tripqui causeramaperte.Parcequenotrehistoiren’estpeut-êtrepasfaitepourdurer.C’estsûrementunepassadepluslonguequelesautres,maisjen’aipasenviequeçaseterminemaintenant.Paspourunephotoàlacon.

Chapitre25

Zoé

UnesemainequelenomdeBluen’apasfranchimeslèvresmêmesij’aiencoreunetonnedequestionsàsonsujet.J’aifaitsemblantdecroireBenaudébut,maisjecommenceréellementàpenserquesonexpourraitnepasêtreunobstacle finalement.D’unecertainemanière, il aconfesséavoirdes sentimentspour moi en affirmant qu’il l’oubliait à mes côtés. Le souvenir de ses mots, la douceur de sa voixm’avouantsonattirancemefontencorevibrer…Alorsj’aibeaumedirequelepassén’estpassiloin,moiaussijeveuxcroireennous.Arrêtederessassertoutça,Zoé!Pourl’instantcen’estnisurlepassénisurleprésentqu’ilfautte

concentrer.Tupréparestonaveniralorssors-toiBendelatêteetpasseenmodeprofessionnel.Jepousselaportedusalondethéetmestalonsclaquentsurlesoltandisquej’entre,cherchantdéjà

mon rendez-vous du regard. Pause détente dans ce genre d’endroit, pas vraimentmon truc,mais bon,j’imaginequeçadoitplaire.Uneparune,jedétaillelespersonnesprésentesàlarecherchedemacliente.Quandj’arrivedevantladernièretable,jetendslamain,unlargesourireauxlèvres.—Bonjour,vousdevezêtreAshleyBrown?Étonnée,elleclignedesyeuxavantdemeserrerlamainetdem’inviteràm’asseoiràsatable.—Comment saviez-vous que c’étaitmoi ? Il y a plusieurs femmes seules ici et pourtant vous êtes

venuedirectementversmoi.Jetirelachaiseetmeglisseenfaced’elleavecassurance,avantdeluiconfirmerquejesuislafemme

qu’elleattendait.—Disonsquejeconnaismonmétier.Connerie.Jesuisentraind’apprendreetmetrompeencoresouvent.Seulement,jefoncetêtebaisséeet

c’estmadéterminationquel’onprendpourduprofessionnalisme.Pourtant,cettefois,j’étaissûredemoncoup.Lafemmeenfacedemoiestleportraittypedetoutescelles,vénales,quifontappelàmesservicespourmaformule«Pigeonencostard».Sonsacgriffé, sonairhautainet fier, sa tenueminutieusementétudiée…Elleaimeleluxeetsesdentslongueslapoussentàvouloirdavantagequecequecesmoyenslimitésluipermettent.—Votrenom ressort régulièrementdans les conversations avecmesamies et jedoisdirequevous

m’intriguez.Alorsj’aidécidédemejeteràl’eau!Vostarifssontattractifsetpuisjen’airienàperdre!Parcontre,jesuiscurieusedeconnaîtrevotremanièredetravailler:jemedemandecommentvousfaitespourtrouvertousceshommesfriquésetnouslescollerentrelespattes…Devantmonairblasé,elleperddoucementdesacontenanceetlaissesaphraseensuspens.Savision

deschosesmerépugnedeplusenplusetjepeineàlecacher.Lesmainscroiséessurlatable,unrictusdéformemabouche.—Jenefaisriendetoutça.Jesuislàpourvousaideràétudierceshommes,àlesappâter,àchoisir

lesquels sont susceptiblesde correspondre àvos attentes.Mais c’est à vousdeprendre les choses enmain.Jenesuispasuneagencematrimoniale.—Non…Biensûrquenon,maisjeveuxêtresûredurésultat.L’hommesurvotresite,jepeuxenavoir

uncommelui?Mon sourire disparaît, jememords la langue pour ne pas lui sortir ce que je crève d’envie de lui

répondre.Cen’estpaslapremièrefoisquel’imagedeBenmeramènedesclientes.Siaudébutjeprenaisçapourunepetitevengeancepersonnelleenverslescrassesqu’ilmefaisaitsubir,maintenantçam’irriteauplusaupoint.Cetteidéetoutdroitsortiedematêtequejeprenaispourleconceptdusièclemeparaîtpeut-êtreexagéréeaujourd’hui…J’aidépassélesbornes,jenemereconnaispasdanscettedémarche.Sicertainspuissantsdecemondeméritentdesharpiesdanslegenredelablondeenfacedemoi,tousnesont pas à mettre dans le même panier. Ben ne mérite pas une de ces femmes, ni mon manque deconsidération.Apprendreàleconnaîtrem’afaitouvrirlesyeuxsurmonabsencedediscernement.Monjugementarriveavecuntrainderetard,maispourl’instantj’aiuneclienteenfacedemoiquiattend.—Toutdépenddevous,Ashley.Jevousdonnelescartes.Jesuisvotreatout,maisàvousdesavoir

jouer.Nevousattendezpasàcequejevouslivreuncatalogueavecunesélectiond’hommes.—Doncsijesuisvosconseils,jepourraismedégoterunjeunehéritier?Sansmelaisserletempsderépondre,elleécartecettepossibilitéd’unreversdemain.—Ohvoussavez,aprèstout,unvieuxpeutaussibienfairel’affaire.Àdéfautd’êtrebeau,jel’aurai

moinslongtempsdanslesjambes.Allez,sortezcecontrat,jesuispresséedetravailleravecvous!Etvoilà,unenouvellecliente.Unedeplusquejevaisdétester.Àcetinstant,jemejurequec’estla

dernière. «Pigeonen costard»vientde tirer sa révérence.Tantpis si je loupe l’opportunitéde fairedécoller mon chiffre d’affaires, je n’en peux plus de toutes ces arrivistes. Je lui serre la main pourconclurenotredeal,unrictusfacticefichésurlevisage.Connasse.

Chapitre26

Ben

—Jevaisfinirobèsesitucontinuesàt’occuperdesrepas!Zoédéfait ses chaussures etme rejoint sur le canapé.Elle s’étendde tout son long, piochedans le

saladierposésurmesgenouxavantdesenicheraucreuxdemonépaule.Unsoupird’aises’échappedesoncorpsfrêle.Cesoir,c’étaitmontourdefaireàmanger,j’aichoisil’optionplateau-repasdevantlatélé.Ellenetravaillepas,çadevientexceptionnelcesdernierstemps.Elleesttoutàmoietjenevoulaispasperdremontempsàfaireàbouffer.Aulieudeça,onaprisunaquapéro–labaignoireestdevenuemonendroitpréféréaprèsmonlit–etmaintenantc’estboldecrakersdevantunfilm.Etensuite…—Rassure-toi,j’aiprévuunepetiteséancedesportjusteaprès.—Lecontrairem’auraitétonné!Elle rigole et tape sur ma main qui descendait sur sa poitrine avant de lancer le film. C’est une

Françaisequimefaitdécouvrirundesmeilleurs filmscomiquesaméricains,d’aprèselle…Cesoir jeregarde Very Bad Trip mais les sourires de Zoé, ses yeux brillants, sa façon de glousser à chaquerépliquedébilem’empêchentd’enriremoiaussi.Jesuisplusfixésurelle,surseslèvresquidévorentlesbiscuitsapéroquesurlesimages.C’estplusdivertissantetsurtoutbeaucoupplusstimulant.Uncrakerss’échappedesesdoigtsettombedanssondécolleté.Avantqu’elleneréagisse,jepenchelatête,plongeentresesseinsetrécupèrelegâteauavecmesdents.Lapointedemalangueremontedanssoncou,surl’arêtedesamâchoire,puissursonlobed’oreillequej’aspireetmordille.Ungémissementfranchitseslèvresetellemelesoffreensetournantversmoi.Salangues’enrouleautourdelamiennetandisquesesmains s’engouffrent dans mes cheveux qu’elle tire doucement. L’instant d’après, elle a complètementoubliésonfilmetmechevauche,unejambedechaquecôtédemonbassin.Bordel,cettefemmealedondemerendrefou.Littéralement.Elleesttellementréceptiveàmesdésirsquematensionmonteenflècheàchaquefois.Mesmainssursesflancs,jesuislemouvementdesonva-et-vient.Monérectiondevientvitedouloureuse,compresséedanscefute,guidéeparcettefurieuseenviedelaposséder.Lesoiroùelleadécouvertcettephoto,j’aisentiqu’ellen’étaitpasentièrementavecmoi.Luifairel’amour,luimontrerque je suis à elle s’est avéré beaucoup plus difficile que prévu. Le fait qu’elle ne jouisse pas est unindicateurpourmoi.Horsdequestionderevivreça!C’étaitilyadeuxsemaines.Cettehistoiresemblederrièrenousmais,depuis,lafairejouirestdevenuunenécessité,uneobsession.J’aibesoindesavoirqu’elleestbienavecmoi.—Danslachambre…Toutdesuite!Incapabledemedétacherd’elle,jecontinuedebaisersabouche,mesbraspassentsoussescuisseset

jeluiempoignefermementlesfesses.Sontéléphonesonne,seslèvresm’échappent.Ellesepenche,prêteàdécrocher.—Attends,çadoitêtreleboulot!J’interceptesonpoignetetlaramèneàmoi.

—Situdécroches,peuimportelanana,jetejurequec’estellequejebaiseetpastoi!Sesyeuxs’assombrissentetellesejettesurmeslèvres.Sesongless’incrustentdansmesépaules,me

marquent. Jeme lève, Zoé agrippée àmoi, et avance en direction de la chambre la plus proche : lamienne.Lesbrasautourdemoncou,ellemedévore,mesuce,memordlalangue.Sesjambesencerclentmonbusteetellecontinuedesefrottercontremoi.Lasonneriedesonportablecesseenfin,quandlemienprendlerelais.Maisfoutez-nouslapaix!—Ben…Touche-moi,jepeuxplusattendre!Sesmurmures se répercutentdirectdansmonentrejambeetmoncœurpompecommeunmalade. Je

m’arrêtenetetl’assoisprécipitammentsurlatable.Sesdoigtss’agitentdéjààdéboutonnermachemise,quitombeparterre,avantdes’attaqueràmaceinture.Sontéléphonerecommenceàsonner.Jemeretiensdenepaslejetercontrelemur.—Touche-moi,touche-moi!Lesyeuxfiévreux,elleestàlalimitedemesupplieretjenerésisteplusàluidonnercequ’elleattend

demoi.D’uncoupsecjeretroussesajupe,luiécartelesjambesetm’yengouffre.Mesdoigtss’insinuententresescuisseschaudes,lacaressentàtraverssaculottedéjàtoutemouillée.Bordel!—Tuveuxquoi,Zoé?Monmajeurglissesousletissu,s’imprègnedesamoiteuretfrôlesonclitoris.Ellegémit,seshanches

ondulentsurleboisàlarecherchedemoncontact.Sonfrontcontrelemien,ellepeineàrespirer.—Tesmains,talangue,toi…Jeveuxtoutdetoi!Mondoigtlapénètre,lalibèredesonattenteetjefondssursabouche,étouffantsoncridedélivrance.

Elles’agrippeàmaceintureàmoitiédéfaite,incapabledesoutenirlerythmequejeluiimposeàprésent.Attentifàsonplaisir, jemeretiensdeplongerenelle.Lasonneriedemonportablerésonnecommeunécholointain,maisjen’entendsplusrienàpartsonsouffleerratique.Satêteserenverseversl’arrière,jelèche la peau de son cou, mouille le tissu de son chemisier en mordillant ses tétons qui pointent autravers.Concentrésursaboucheentrouverte,sursesgémissements,sursestalonsquiattirentmesfessesvers elle, je continuema torture en attendant lemoment où elle va basculer. Ses chairs se contractentautourdemesdoigtsetjemeredressepourcapterdanssonregardlajouissancelasubmerger.Lamainsursanuque,jelaforceàserelever.Jeveuxlavoir.—Bébé,regarde-moi.Ses yeux s’ancrent dans les miens, ses pupilles se dilatent et… la porte s’ouvre en grand. Un cri

stridentnous fait sursauteret, instinctivement,mesbrasse refermentsurZoé. Je ladécollede la tablepourlacacherderrièremoi.—Bonsang, j’arrivaispasàvous imaginerensemble, jecroisque là jesuisservie !Vousêtesdes

sauvages…Jenemangeraiplusjamaissurcettetable!LolasecachederrièresesmainsetJay,mortderire,neperdpasunemietteduspectacle.Zoédans

mondosmarmonne jene saisquoi et remetde l’ordredans ses fringues tandisque jemecontentederesserrer ma ceinture. Mon érection s’est fait la malle et ma frustration me bouffe les entrailles. Ilsn’avaientpasledroitdedébarquer…Pasmaintenant!—Vousnepouvezpasvenirchezmoisansprévenir,merde!Ilesttard,qu’est-cequevousfoutezici?Lolaretiresesmainsdesonvisageetcroiselesbras.SalangueclaquesursonpalaistandisqueJay

s’avancedanslapièceetposesesfessesauborddelatable.Àl’endroitmêmeoùj’allaisprendreZoés’ilsnes’étaientpaspointés.Unsourirenarquoissefichesursonvisage,ilestcontentdesoncoup.—J’aiessayédevousprévenir, figure-toi.Jaydenpeut te ledire, j’aiappelé jenesaiscombiende

foissurvosdeuxtéléphonespendantqu’onétaitsurlaroute!J’avaisunesupernouvellequejevoulaispartageravecvous…Enfinquenousvoulionspartager…Bref, jenepouvaispasattendrealorsonestvenus…Maisjepensaispasvoustrouvercommeça.Enmêmetemps,j’aipasvraimentréfléchi…C’estvraiquevousvivezensemble.Etquevousêtesensembleaussimais…Je secoue la tête de lassitude.Lola enmode panique qui balance dixmots à la seconde, j’ai assez

donné!Jaylacouvedesyeuxavecunsourireàlacon.L’amouravraimentfaitdesravagessurmonpote!—C’estbon,Lola,respire!Maintenantquetueslà,raconte-nousl’objetdevotrevisite.Aupirecette

interruptionsurpriseneteferaperdrequeledoubledemesclés.Et,s’ilteplaît,ouvrelesyeux,onn’estpasàpoil!Elle cligne des paupières quelques secondes, nous étudie, sa copine et moi, à tour de rôle et un

immensesourirefendsonvisagetandisquedeslarmespointentauxcoinsdesesyeux.Jaylarejointetlaprendcontrelui,caressantsonbraspourlacalmer.Jestressequandsonmentoncommenceàtrembleretque lespremières larmesdévalent ses joues.Qu’est-cequi lui arrive, elle sourit ouellepleure ?Zoéprendlesdevantsetlesessuiedureversdelamain.—Qu’est-cequ’ilsepassemachérie?—Non,je…jesuis…Jeme raidis quand elle éclate en sanglots, incapable de prononcer unmot de plus. Je suis perdu,

cependant jevois Jaycontinuerde sourire. Jene l’ai jamaisvuaussi fier.Braquésurmonpote, jenecomprendsrienàcequisepassequandsoudainmafuriepousseuncrihystérique.Lesdeuxcopinessemettentàsautersurplace,elless’étreignent,s’embrassentetcrientdenouveau.C’estquoileursdélires,jepigequedallelà!Maprincessesedégageetmesauteaucou.Levisagestriédelarmes,incapabledeprononcerlemoindremot,elleagitesamainsousmonnez.Jel’attrapeetlafixeuninstantavantdemetournerversmonpote.—Putain,nemeditespasque…—SI!Onvasemarier!Lolamecriedanslesoreilles,etcettephrasecommenceàtournerenboucledansmatête.Ellerepart

danslesbrasdesonhommeetl’embrassetendrement.Bonsang,cepetitboutdefemmen’apasfinidechanger nos vies ! D’un pas, Zoé me rejoint, et sa main chaude se glisse dans la mienne. Ses yeuxs’ancrentdanslesmiens.Silencieusement,ellemefaitpartagersajoie,sontrouble,avantdereportersonattention sur l’étreinte des futurs mariés. Je reste un instant à la regarder, à essayer de décoder sonémotion.Subitement,jedonneraischerpoursavoircequ’ellepense.

Chapitre27

Zoé

J’ajustemacoiffure,glisselespiedsdansmesescarpinsvernisetregardeunedernièrefoismonrefletdans lemiroir.Sous lesnéonsde la salledebains,mesyeuxbrillentd’une lueurquine laissepasdeplaceaudoute.C’estpresqueécritsurmonfrontquejeviensdem’envoyerenl’air!Lesbrasdansledos,jemecontorsionnepourfermermarobe.Avecdifficulté,jeremontelezipàmi-

cheminmaismesdoigtspeinentàallerplushaut.—Unmecpossessift’interdiraitdesortirdanscettetenue.Ceboutdetissuestscandaleusementtrop

court,mapuce.J’adore!Unsourireilluminemeslèvresenentendantcesurnomridicule.Pourquoia-t-ilfalluquejeluiavoue

quejetrouveabsurdeslesmièvreriesdecegenre?Jeleregardepar-dessusmonépaule,adossécontrelechambranledelaporte,encoreàmoitiénu,àselécherleslèvresavecgourmandise.—Aulieuderesterplantélà,viensplutôtm’aider.J’arrivepasàremontercettefichuefermeture.Un rire s’échappede ses lèvresquand ilmevoitm’agiterdans tous les senspour réussir à la faire

monterdecinqmalheureuxcentimètres. Il se redresse, sepositionnederrièremoi etplante son regarddanslemienfaceaumiroir.—OK,laisse-moim’occuperdeça,poussin,jesuisl’hommedelasituation!Sanssedépartirdesonsourire,Benposesonindexà lanaissancedemanuque,suit le tracédema

colonnevertébralepourdescendrejusqu’aumilieudemondos.Cesimpleeffleurementsuffitàrecouvrirmapeaudechairdepoule.Sansromprelecontactvisuel,ilposeseslèvresdansmoncou,ydéposeunchapelet de baisers, lèche mon lobe d’oreille, mordille ma peau. Sa main dans mon dos trouve lafermetureetluifaitsuivrelecheminensensinverse.—Ben,t’escensélaremonter…Saboucheexploremondos,sesdoigtsglissentdansl’ouverturequ’ilsontélargiepourvenirréchauffer

lapeaudemonventre.Quandilfrôlel’élastiquedemonstring,mesmusclessecontractentetmonsoufflesecoupe.Jefaisuneffortsurhumainpournepasmelaisserdistraireouplutôtpourmereprendre.—Ben,fermecetterobe.Jevaisêtreenretard.Jesaiscequetucherchesàfaireetçanemarcherapas

!Comment ne pas comprendre que ça l’embête que je travaille ce soir quand il use de tous les

stratagèmespourmegarderici?Monbeaubrunsoupireets’exécuteàcontrecœuravantdemeprendredans ses bras. Sonodeurme chatouille les narines : unmélange de son parfum, de sueur, de sexe. Jelaissetombermatêtecontresonépauleetprofitedemesdernièresminutesaveclui.Onesttellementpristouslesdeuxencemomentqueparfoisonnefaitquesecroiser.—Turevienstard?—Jenesaispasmaisjeterejoinsleplusvitepossiblejusteaprès.Ettoitufaisquoicesoir?

D’unfroncementdesourcils,ilréfléchitaudéroulementdesasoirée.Undernierbaisersurlatempeetilmelibèredesonétreinte.Lachaleurdesoncorpsmemanqueaussitôt.—Aucuneidée.Mananasetiredraguerdanslesbarsalorsjesupposequejevaisenfaireautantde

moncôté.Onverralequeldesdeuxaleplusdesuccès!Etmaintenant ilattisemajalousie!J’ignoredélibérémentsaremarqueetmepencheversmonreflet

pour appliquer une dernière touche de gloss. Je peux sentir le regard deBen surmes fesses avant desentirsesmainsseposerdessus.—Quoique,aveclatenuequetuportes,j’aidusouciàmefaire!Jemeretournepourluifaireface.Mesbrasserefermentautourdesoncouetmesdoigtsjouentavec

unemèchedesescheveux.Jesaisqu’ilaconfianceenmoi, jeneluiai jamaisdonnéuneseuleraisond’endouter.Leshommesmeparaissent trop fades et sans intérêt à côté de lui et, surtout, il s’arrangetoujours pour me faire l’amour juste avant de sortir de façon à ce que je flotte sur la vague post-orgasmiquepourlerestedelasoirée.— Je les pousse à prendre confiance en elles,moi j’observe uniquement. Le bar n’est pas loin de

l’appartetjerentreaussitôtaprès.Çatevacommeça?—Non,resteavecmoi.Sesmainsseposentsurmeshanches,meramènentunpeuplusprèsdeluietjem’enivredesonodeur.

Jenepeuxpasmepermettrederefuserdutravail.Jesecouelatêtenégativement,incapabledeluidire«non»unefoisdeplus.Bensaitquedeschangementssontencoursdansmonactivitémaisilnemeposepaslamoindrequestion.Cetravailc’estmonunivers,monjardinsecret,etillerespecte.Jenepensaispasquece revirementadministratifposeraitdesproblèmes.Ducoup,enattendantd’avoir l’accorddesupprimer«Pigeonencostard»,jemecontentederefusercegenredeclientèle.—Ceweek-end,neprendsaucun rendez-vous. Je teveuxpourmoi tout seul.On laisseLolaet son

foutumariage,leboulot,lestéléphonesetonsebarre.Justetoietmoi.Lamétéoannoncedubeautemps,alorsonpourraitalleràKinstonpoursurfer,t’enpensesquoi?Unlargesourirefendmonvisageetmoncœurbatunpeuplusfortàsesmots.Unweek-endrienque

touslesdeux,commen’importequelcouple!Unefoisdeplus,Benasafaçondemeprouverquenotrehistoirecomptepourlui.—Quejevaisavoirbesoind’unnouveaubikinietd’unbonprofcarj’aijamaismisunpiedsurune

planche!—Encoreunechoseàtefairedécouvrir?Jevaisfinirpartedemanderdem’appelermaître!Nonmaisjerêve!Jelèvelesyeuxaucieletsecouedoucementlatêtedevantsonmanquedemodestie.

Bon d’accord, jusqu’à présent il est le seul àm’avoir fait connaître l’orgasme,mais j’aurais fini partomber surunautreprodusexe.Non?L’alarmedemonportable sedéclenche,annonçantmondépartimminentetemportantlesriresdeBen.Monbeaubrundéposeunbaiserchastesurleboutdemonnezavantdemerelâcher,résigné.Moiaussijevoudraistellementrester…—Àtoutàl’heure,maîtreYoda!Jequittelasalledebains,récupèremonsacàmainet,alorsquejecommenceàsortirdel’appart,Ben

m’interpelle.—Passeunebonnesoiréeetlaisseladragueàtesclientes.—SeulsceuxquipeuventtedétrôneraurontdroitàmonattentionJe crois apercevoir une étrange lueur éclairer ses prunelles tandis qu’il s’approchedemoi,mais il

baisseleregardtroprapidementpourquej’ensoissûre.—Tesclésétaientrestéesàcôtédulavabo.Sesdoigtsglissentdansmonsacpourydéposerletrousseaudeclésetd’ungesterapide,ilplaquesa

main derrièrema nuque avant de fondre surmes lèvres. Sa langue s’y engouffre à la recherche de lamienne.Surprise, jelelaisseprendrepossessiondemabouche,étalantmonglossaupassage.Lamainsursontorse,mesyeuxsefermentetjeluirendssonbaiseravecautantdepassionquelui.Lesbattementsdemon cœur s’accélèrent,mon corps se colle au sien etmes lèvres, voraces, en demandedavantage.MaisBens’écartesubitement,melaissantchancelanteetencoresurmafaim.Lamainsurlapoignée,ilouvregrandlaporteet,d’unsourire,mesignifiequejepeuxpartir.—Tune trouveraspasmieuxquemoi, lapin, tu le sais,maisvas-y, j’aihâted’écouter toncompte-

rendu!La porte se referme sur son sourire satisfait, fier de son coup. Jemets quelques secondes avant de

réalisercequivientdesepasser.Unrireétouffés’échappedemeslèvresetjetournelestalons.Toi,moncoco,tunet’entireraspascommeça!

*

—Bon,lesfilles,vousavezbienenmémoiretoutesmesrecommandations?Mesquatreclientesautourdelatablehochentlatêteavecdétermination.Aprèsuneheuredethéorie,

onenarriveàlapratique.Enquelquessemaines,ellesontréussiàprendreconfianceenellesetjesuisfièredemonpetitgroupe.Cesnanassontgénialesetj’aientièrementconfianceenelles.—Alors,mesdames,c’estl’heuredepasseràl’action!—Attends,Julianevientpascesoir?Jeregardemachinalementmonportable,maisjemerappellesoudainsonmessagem’annonçantqu’elle

avaitunempêchement.Commesouvent j’aienviededire!Ellen’estpasuneclientecommelesautresalorsellealedroitàuntraitementdefaveur.Juliaestlaseuleàs’incrusterdanstouslespetitsgroupes,cequifaitquetouteslesfilleslaconnaissentetl’apprécientd’ailleurs.—Elleavaitunimprévualorsnecomptezpassurellepourvousmotiver.Vousyarrivereztrèsbien

toutesseules,rassurez-vous.Discrètement,jescrutelasalledesyeuxàlarecherchedenoscobayesdusoir.Allerversunhomme

n’est déjà pas chose facile, alors draguer celui qui vous plaît demande de l’entraînement. J’élimined’office lesgroupesnombreuxoubruyants.J’enrepèredéjàdeux,dans la tranched’âgerequise,àunetablenonloin.Jecontinuemoninspectionendirectiondubarquandunesilhouetteattiremonattention.Jenevoispassonvisagemais je lereconnaissanshésiter,mêmededos.Accoudéauzinc,unverreà lamain,Bendiscutetranquillementavecleserveur.Maisqu’est-cequ’ilfoutlà?Ilestvenumesurveiller?Commenta-t-ilsuoùjemetrouvais?Jereste

fixée sur lui, enattendantdecapter sonattention.Pourtant,pasuneseule fois, ilne se tournedansmadirection.Quandjelevoisrireaveclebarman,jemerendscomptequ’ilsseconnaissent.Quoideplusnormalquandjechoisis lebar leplusprèsdechez lui?Maconscienceéclatederire :sonmondenetournepas autourde toi, idiote ! Jem’apprête à le rejoindrequandune autre idéemevient.Uneplusperverse,plusjoueuse…Plusmoi.—Jen,j’aichoisitacible.Jennifer,soitlaplusmignonnedesquatreavecsesgrandsyeuxgrisetsatailledeguêpe,finitsonverre

culsecavantdereportersonattentionsurmoi.T’asraison,mabelle,donne-toiducouragecarilvat’en

falloir!D’unsignedetête,jeluiindiquelebeaumâlequisefaitservirunautreverre.—Lebrundedosavecuneespècedechignon,c’estletien.Elleleregardeuninstantetsouffleunboncoupavantdeselever.—J’acceptelamission,chef.LesfillesrigolentetnoussuivonsdesyeuxlajolieJenquiavanced’unpashésitantverslebar.Après

underniercoupd’œildansnotredirection,elles’installesurletabouretàcôtédeBen.J’aiunmomentd’appréhensionquand je réaliseque je la jettedans lesbrasde l’hommequi représentemonsite. Il achangédepuislaphoto:sescheveuxremontésenchignonetcettebarbedeplusieursjoursluimodifientlevisage.Ilesttoujoursaussibeaumaislerapprochementestplusdifficileàfaire.Ànotretable,lesilenceesttotal,cartoutenotreattentionestconcentréesurlapremièredugroupeàse

jeteràl’eau.J’aicomprisqu’enfaisantl’expérienceàplusieursetdansuneambiancebonneenfant,lesfillessontmoinscrispéeset leprennentpluscommeun jeu.Après tout,cen’estquede l’entraînementjusqu’àcequ’ellesaientassezconfianceenellespourlefaireseule.Ben tourne la tête dans sa direction et elle lui adresse un sourire. Ça y est, c’est parti, le premier

contactestétabli!Lestressmontequandilrépondàsonsourire.Personnenesemblefairelelien,mesépauless’affaissentdesoulagement.Jenengagelaconversationavecfacilité. Ilse tourneverselle, luirépondavecsonéternelsourireblancdeblanc.Bordel,maispourquoij’aifaitça?Qu’est-cequ’illuiracontepourqu’elle rieautant?J’expliqueauxfilles lespointspositifs,cherche lesnégatifsmais toutsemble très bien se passer. Mes clientes à côté de moi jubilent tandis que je me ratatine dans monfauteuil. Jeme raidisquandellepose samain sur sonbras.Çanedurequ’unedemi-seconde, juste letemps nécessaire pour lui montrer qu’elle est intéressée. Bon sang, c’est une trop bonne élève, elleappliquemesconseilsàlalettre.J’enrage,toutsepassebien…Tropbien.Jeserrelesdents,incapabledecontinuermonargumentationauprèsdesfilles.Soudain,Jendescenddutabouretetrevientversnousenfaisantsignequec’estfoutu.J’arriveàpeineàcachermonsourire.—As-tuvuversquel spécimen tum’asenvoyée?Nonmais sérieux, lemecestunebombe,c’était

perdud’avance!Jenniferreprendsaplaceets’adossesursachaised’unairdépité.Lesfilleslarassurentaussitôtetla

félicitentdes’êtrebiendébrouillée.Cequej’approuve.—Nonj’aiéchouédansmamission!Vouslevoyezdedosmaisdeprès…Cetypeestmagnifiqueet

supersympaenplus…Enfinbref,totalementhorsdeportée!—Personnen’estinaccessible,ilfautsavoirs’adapteràlasituationetàl’hommequiestenfacede

soi.Elleestsceptique,toutcommelerestedelatablée.Leurenthousiasmeretombecommeunsoufflé,etje

décidedepasseràlasuite.Lesdéssontpipésmaisjesuislaseuleàlesavoir.Ellesontbesoind’uneleçon, et moi j’ai envie de le retrouver, alors autant joindre l’utile à l’agréable. Je me lève etl’incompréhensionsepeintsurleursvisages.—Exceptionnellementjevaisyaller,maisuniquementpourvousprouverquetoutestfaisablequand

on a confiance en soi et que l’on sait comment s’y prendre.Mesdames, prenez des notes, car c’est lapremièreetladernièrefois!Jequittelatablesousleursencouragementspourallerlerejoindre.Çamegênedelesduperainsimais

lasituationest troptentantepournepasenprofiter.Tandisquejem’installe, lebarmanmeregardeducoindel’œilavecunlégersourire.—Tuasdusuccèscesoir,monpote!

Bendévisagesonamiavantdecomprendreetsetourneversmoi,unsouriresurlevisageavantmêmedemeregarder.Pfff,dragueurdansl’âme!—Quoi,ilyatantdeconcurrencequeça?L’étonnementdemedécouvrirpassé,Benserrelamainquejeluitendsetdéposeundouxbaisersur

mesphalanges.Simesclientesnepeuventpasm’entendre,ellesnedoiventpaslouperunemiettedelascènequejeleuroffre.Ilouvrelabouchepourrépliquermaissonamiledevance.—Jeneveuxpastefairedefaussejoie,majolie,maist’eslacinquièmeàtentertachance.Cemeca

delamerdedanslesyeuxdepuisunmoment.L’hommepose le torchonqu’il tenaitentre lesmainsets’accoudeaubar, rapprochantsonvisagedu

mien.Instinctivementjereculeetjetteuncoupd’œilàBenquiparaîtamuséparlasituation.D’accord,soncopainvientdemeconfirmerqu’ilyabieneuundéfilédefemmessurcetabouretetçanem’amusepas.—Tuneloupesrienc’estuncon,surtoutaveclesfemmesd’ailleurs.Ilyatellementmieuxpourtoi…

Lebarmanparexemple!Jeteserreunverre,majolie?Devantletonamusédesoncopain,parlantdesafaçondesecomporteravecsescoupsd’unsoir,Ben

perdsonsourireetposesamainsurmacuisse,commepourmerameneràlui.—Serre-luiunverredevinblancetarrêtetoutdesuitetonbaratin,jetevoisvenir,Jeff.C’estpasta

jolie,etelleestavecmoi.LedénomméJeffseredresseetmeregardeavecintérêt.Ilnedoitpasêtrehabituéàentendrecesmots-

là de la part deBen et se demande encore comment interpréter ce « elle est avecmoi » qui ne veutabsolumentriendire.Jetendslamainau-dessusdubaretprononcelesmotsqueBenadumalàdire.—Bonsoir,Jeff.JesuisZoé,lapetiteamieducon!Ilmeserre lamainenpouffantderire,mais jemedemandecequi l’amuse leplus :marepartieou

notrecouple.—Toi,tudoisêtreunsacrélotpouravoirréussiàluipasserlacordeaucou!Bencasé…Merde,t’as

faitmasoirée,là!Ehbienj’aimaréponse!J’imaginequejemetrouvedanslerepairedeBen,lelieudeprédilectionoù

il venait chasser il y a encore quelques semaines. Une bouffée de colère m’envahit tandis que Jeffs’éloigneenrigolant.Lapressionsurmacuissesefaitplusinsistanteetjelèvelesyeuxsurunevagueazurdanslaquellejemenoie.Commentenvouloiràcesfemmesquionttentéleurchancealorsquemoi-mêmej’enauraisfaitautantsinotrerencontrecatastrophiqueavaitétédifférente?—Tutravaillesencore?—Oui,jesuisaveclesquatrefillesaufonddelapièce,àdroite.Discrètement,Bentournelatêtepourregarderdansladirectionquejeluiindiqueetrevientversmoi

avecunsourireamusé.—Doncsijecomprendsbien,cetteJenniferestuneclienteetc’étaituntest?Jeff dépose mon verre devant moi et repart aussitôt, à la demande d’un consommateur plus loin.

J’acquiescedelatêteavantd’enboireunegorgée.—Maisc’étaituntestpourelle…oupourmoi?Mayday!Mayday!Moncerveaudéclencheunesonneried’alarmeettousmessenssefigent.J’avale

une deuxième puis une troisième gorgée dans la foulée. Le liquide frais aux notes fruitées engourditlégèrementmalangueetmefaitgagnerdutempsmaisvulamanièredontilmeregarde,ilconnaîtdéjàla

réponse.—Unpeudesdeuxjesuppose.Ettoialors,qu’est-cequetufaisici,toutseul?Iln’estpasdupedemonintentiondenoyerlepoissonenchangeantsivitedesujetmaisilnerelève

pasetsecontentedemesourire.Unsourireencoin,amuséplusqu’énervé.—Erikdevaitmerejoindremaisj’ail’impressionquejeviensdemefaireposerunlapin.Ducoupma

soiréevaêtrelongue.Tuvasretourneravectesclientesetmoi…Jesupposequejevaisdevoirespérerqu’uneautrefemmeviennetrompermonennuienattendantquemananadécidedes’occuperdemoi!Lecoudesurlezinc,latêtesurmonpoing,jel’écoutedébitersesplaintesavecattention.—Sijecomprendsbien,jesuiscenséem’apitoyersurtonpauvresortalorsquetum’asabandonnée

toutunweek-endpourtoncircuitmotoiln’yapassilongtemps?—T’étaisavecLolaalorsneparlepasd’abandon,surtoutque t’étaisbiencontentede l’avoir juste

pour toi.Cette virée était prévue depuis plusieursmois et, simamémoire est bonne, j’ai sume fairepardonnercommeilsedoit.Ilhumidifieseslèvres,gonfléesdedésiràlasimpleévocationdecesouvenir.Sesdoigtspassentsous

marobe,caressentmapeaunueet réduisant ladistance jusque-là raisonnable.Mamainsursonavant-bras, je le pousse légèrement sachant que les filles ne loupent pas une miette de notre échange. Ladouceurdesapeaumechauffe,desbribesd’imagesdecettenuitderetrouvaillesmereviennentaussitôtetsonregardm’envoûte.Ilsepencheversmoi,frôlemajouedeseslèvresetsonsouffleprèsdemonoreillem’électrise.—Rentre avecmoi,maintenant.Et les imagesque tu as en tête seront unepâle copie de ceque je

comptefairedetoicesoir.Cette douce promesse combinée à sa voix plus rauque a le don deme liquéfier sur place. Je serre

instinctivementlescuissespourcalmercedésirquivientselogerentremesjambes,tentedegardermonairdéterminépournepaslelaisserm’avoir.—Jenepeuxpas,lesfillescomptentsurmoi.Ma réponse est fébrile, sort dans unmurmure à peine audible.Niveau crédibilité on repassera ! Je

crèved’enviede toutquitter et de le suivre.Samainglisse et vientmasser lapeau finederrièremongenou.Marespirationsesaccade,moncœurs’affole.Bonsang,depuisquandcettezoneest-elleérogène?—Cetteoffreprendfindansdeuxminuteslapin,avecousanstoi:jerentre.Maintenantàtoidesavoir

cequetuveux.Bientropvite,ils’écartedemoietprendvolontairementdeladistance,meprivantdesonodeur,de

sontoucher.Seulssesyeuxfiévreuxmaintiennentlaflammequiembrasechaqueparcelledemoncorps.Commentluirésisterquandilmedévoreduregarddecettefaçon?Devantmonsilence, ildétournelatête,selèveetdéposedesbilletssurlebarpourréglerlanote.Benesttrèsdouépourmemettredanstousmesétatsmaislapatiencen’estpassonfort.Safiertél’empêcherad’insisteretsijeneréagispasmaintenant,ilvavraimentpartir.Sansmoi.Jemelèveàmontour,monchoixestdéjàfait.—Laisse-moidireaurevoirauxfilles,j’arrive.Ilneditrien,restestatiquemaislesourireencoinqu’ilarborenem’échappepas.Commesisonoffre

pouvaitse refuser !Les jambescotonneuses, je rejoinsmesclientes.Leurssouriressontcontagieux,etquandj’arriveàlatablej’aidescrampesauxjoues.Pourlecôtéprofessionnelonrepasseraaussi!—Alors?

Lesmainssurledossierd’unechaise,jemecramponnepourmemaintenirsurmestalons.Auboutdecombien de temps, les avances de cemec ne provoquent plus demini-crises cardiaques ? Je ne vaisjamaistenirsurladurée,moncœurvafinirparlâcher!—Alors…Vousallezm’envouloirsij’écourtenotreréunion?Ellesparlenttoutesenmêmetempsmaisjecroisentendrequerefuserlesavancesd’unhommecomme

luiseraituncrimecontrel’humanité.Rienqueça…HeureusementqueBenn’estpaslàpourlesentendre!—Jevouslaissefinirentrevousmaisavecundéfi:obtenirchacuneunnumérodetéléphoneavantde

rentrer.J’attendsdevosnouvellesdèsdemainpourledébriefing!Elles se ratatinent sur leur siège en marmonnant leur accord. Seule Paola, la doyenne avec ses

cinquanteprintemps,sembleencoremotivée.—Dites-vous que si je n’avais pas confiance en vous, je ne vous laisserais pas seules. Vous êtes

prêtes,toutessansexception.Jecomptesurvousdemain,mesdames!Mesclientesseregardentà tourderôleet leurbonnehumeurrevient.C’estpourcetteraisonquele

travailengroupemarchemieux,elless’entraidentetsepoussentàavancer.Aprèsundernieraurevoir,jetourne les talons pour rejoindre Ben. Quand j’arrive à sa hauteur, il me tend la main et son sourirem’apaiseaussitôt.Sij’étaismalàl’aiseàl’idéedelaissermesclientes,ilvientdefaires’envolermesderniersdoutes.—Erikestenroute,jel’aiprévenuques’ilsedémerdaitbien,ilneperdraitpassasoirée.Maisqueje

nel’attendaispas…quej’avaisd’autresprojetsbeaucoupplusexcitantsquedepasserlasoiréeaveclui.Lalueurperversequitraversesespupillesmefaitpoufferderire.Unsourirecraquants’étiresurson

visageetilnousguideverslasortie.Jelesuisàgrandesenjambées,soudainpresséed’êtreseuleaveclui.Brutalement, jemestoppeavantdepasserlesportes.Danstoutecetteagitation,j’enaioubliémonsacsurledossierdemachaise.—Attends,fautquejerécupèremonsac!Ilestrestéàlatabledesfilles.Aupremiermouvementquej’esquisse,sesdoigtsseresserrentsurlesmienset ilmetireenarrière.

J’aijusteletempsdemettremamainsursontorseavantdem’échouerdessus.D’extérieur,onpourraitcroireàundébutdedanseimprovisée.—Interdictiond’yretourner.Bougepas!Benmelâchelamainets’éloigne.Soncôtégentleman?Absolumentpas!Vuladémarchedésinvolte

avec laquelle ilpasseentre les tables, ilcherche justeàse faire remarquerunedernière foisavantdepartir.Jelèvelesyeuxaucielquandjelevoispresquesepavanerdevantmesclientes.Lesyeuxbrillantsetlesjouesrougies,ellesledévorentduregard.Lapointedejalousiequejepeuxéprouverestétoufféeparunecouchedefiertébienmolletonnée.Cemeccanonestàmoi…Rienqu’àmoi!Jesoupirequandjelevoissepencheretdiscutertranquillementaveclegroupe.Desriresrésonnentjusqu’ici.DugrandBendanstoutesasplendeur!Lachaleurdelapièce,accentuéeparl’alcoolquicouledansmesveines,medonne chaud et je choisis de l’attendre dehors.Avecunpeude chance, ça le fera revenir plus vite…Enfins’ilserendcomptedemonabsence!J’ouvrelesgrandesportesetunefoissurletrottoir,respireàpleinspoumonsl’airfraisdecedébutdesoirée.Lesyeuxfermés,sûrementunsourireidiotsurlevisage,j’écoute le bruit de la ville, des voitures, des rires étouffés provenant du bar… Je neme suis jamaissentieaussiheureuse.Lebeaubrunquisefaitattendreyestincontestablementpourquelquechosemaisj’aimemavieici.JecomprendsmieuxLolaàprésent.—Zoé!

Jemecrispeetouvreprécipitammentlesyeux,cherchantlavoixquim’interpelle.Juliacourt,slalomeentrelespassantssurletrottoiretarrivejusqu’àmoiàboutdesouffle.—Mais…Tunedevaispasêtrelà!Mon ton est sec, je suis surprise qu’elle soit venue. Les mains sur les genoux, elle respire

difficilement.Son regards’ancredans lemienet jevois l’incompréhensionsedessinerdanssesyeux.Ellemedévisageuninstantavantderire,paslemoinsdumondeoffenséeparmonapparenceglaciale.—Bah,sympal’accueil!J’arriveàmelibéreretc’estcommeçaquetuleprends?Qu’est-cequetu

fais,tut’enallais?Sijepars?Quelleréponseseraitlaplusappropriée?Oui?Non?Lesportesderrièremois’ouvrentetavantmêmedelevoirjesaisquec’estlui.Moncœurcessede

battre quand sa main se pose sur mes reins. Instinctivement je récupère mon sac qu’il me tend etmémoriselafaçondontseslèvress’ourlentquandilmesourittendrement.Jenesaispluscommentréagir,enmoic’estlefoutoirleplustotal.Jesensleventtourner,unoragesurlepointd’éclatersansparveniràtrouverlemoyendem’ensortir indemne.Lesmainsmoites, lecœurauborddeslèvres, jenesaispascommentmetirerdecemauvaispas.Commentluiexpliquerqu’elleetmoinousnousconnaissons?Jesavaisquec’étaitunemauvaiseidéeetpourtantjenevoyaispascommentfaireautrement.Toujours

penchée,lesoufflecourt,Julianeserendpascomptequesonarrivéemetuntermeàladélicieusefindesoiréequis’annonçait,metuntermeàtout.—Prêteàrentrercheznous,chaton?Jen’arriveplusàrespirer, lechatonestentraindesenoyercommeunanimalquel’onplongedans

l’eaupours’endébarrasser.SeulementBenn’apasencoreconsciencedelamainquimeplongedansleseau.Quand Julia se relèveetque leurs regards se croisent, lamainchaudequime soutenait retombeaussitôt.Unsilencenousenveloppe,lourd,asphyxiant,pesant.Jelesregardeàtourderôle,spectatriced’une scène que jeme suismaintes fois imaginée, sans jamais oser aller jusqu’au bout. Julia trembled’appréhension, sûrement entre la peur du rejet et l’excitation dumoment.Quant àBen, il est tendu àl’extrême,levisagevidédetoutsonsang.Blanccommeunlinge,ilexaminelapersonneenfacedeluiavantdereportersonattentionsurmoi.L’expressiondesesyeuxatotalementchangé.Jen’yvoisplusquedelacolère,delarancœuraussi,etdudégoût.—Vousvousconnaissez?J’avale difficilementma salive, en réalisant déjà qu’ilm’associe à elle. Ilme regarde de lamême

manière, comme si je ne valais pasmieux qu’elle. J’aimerais pouvoirme jeter dans ses bras pour lerassurer,luisignifierquetoutcequel’onavécuaunsenspourmoimaissaposturetellementfroidemecloueausol.MapeurserenforcelorsqueJulias’immisceentrenous.—Salut,Ben.Lamâchoiredemonbeaubrun–sijepeuxencorel’appelerainsi–tressauteenentendantsonprénom

maisilrestebraquésurmoi.Jenesaispasquoidireouquoifaire,monregardresteplongédanslesien,essayantdeluifairecomprendretoutelaprofondeurdemessentiments.—Ben,je…D’ungestedelamain,ilcoupenetJuliaetfermelesyeuxcommepoursereprendre.Cettesituationle

déstabiliseetjenesaispascommentfairepourl’aider.—Jeneveuxrienentendre.Pasunmotdeplus!—J’avaismesraisons,ilfautquejet’explique…

—Non!Sa têtepivotebrusquementvers Julia et sondébutd’excusesmeurt dans sabouche.Les larmes aux

yeux,elleserendcomptequeleursretrouvaillesnesepassentpasaussibienqu’ellel’avaitimaginé.Unhoquets’échappedeseslèvreset,d’unemaintremblantequ’elleposesursabouche,elletented’étoufferunsanglot.L’expressiondeBens’adoucitmaissesmusclestendusprouventqu’ilsecontient.—Tesexplicationsarriventavecquelquesannéesderetard,Blue.Ellesnem’intéressentplus.UnelarmeroulesurlajouedeJulia,ouplutôtdeBlue,maiselleaunregarddéterminé,pasprêteà

s’arrêteraupremierrejet.Elleesquisseunpasverslui,Benrecule.Lesmainsenavant,désireusedeletoucher,elleouvreetrefermelabouche.Seulunsanglotensort.Jedevraisêtreattristéemaisj’aiarrêtéd’éprouverlemoindresentimentpourelledepuislesoiroùj’ai trouvésaphotodansletiroir.Depuis,c’estunvidesansfond,legoûtamerdelatrahisonquim’anime.Jelaprenaispouruneamie,maisj’étaisjuste lemoyen idéal pour qu’elle puisse se rapprocher de lui. Silencieusement,Ben recule encore dequelquespasavantdetournerlestalonsetdepartir.Sansunmotdeplus,sansmêmeunregardpourmoi.Ilfautquejelerattrape,quejeluidiseàquelpointjesuisdésolée.Jen’auraispasdûluicacherquejelaconnaissaismalgrémoi,maismapeurdetoutluiavoueralorsquenotrerelationvenaitàpeinededébuterm’apousséeausilence.Maintenantilesttroptardcar,pourBen,mêmeunmensongeparomissionestunetraîtrise.Quandjemedétourneàmontour,unemainsurmonbrasm’enempêche.Elleatentésachance,qu’elle

negâchepaslamienne.Jemedéfaisdesonemprisebrutalementetluifaisface.—Nemetouchepas!—Tusavais,n’est-cepas?Tusavaisquij’étais?Larespirationsaccadée,laragemenaçantd’exploser,jelafusilleduregard.—Pourquoitunem’asriendit,pourquoituascontinuéàjouerlacartedel’amitiésituconnaissais

mesintentions?Cettevoixmielleuse,ceregarddouxet inquiet,cetairnaïf…Toutenellemerebutedésormais.Les

poingsserréssurlalanièredemonsac,jemefaisviolencepournepasluisauteràlagorge.Toutecettemascarade devait être bien rodée dès la première fois qu’elle m’a contactée. Seulement, elle nes’attendait pas à être confrontée à lui ce soir.Que devait-il se passer normalement ?Dequelle façoncomptait-ellenousséparer?— Tu sais ce qu’on dit, non ? Sois proche de tes amis et encore plus de tes ennemis. Tu serais

simplement venueme voir, tout aurait été différent !Mais non, tu as choisi dem’utiliser, deme fairecroire qu’il n’en valait pas la peine. Quand je repense à toutes tesmises en garde, tous tes sermonsbidon…T’asfaillim’avoirbordel!Quoiqu’ilarrive,jeneveuxplusjamaisterevoir.Jeluitourneledosetcommenceàm’éloignerquandelletentedem’amadouerànouveau.—J’aipeut-êtremalagiavec toimais jenesavaispluscomment faire. Il fautque tusachesque je

t’appréciebeaucoupetçamefaisaitmaldet’infligerça.Unrireamersortdemabouchedevantcettepiètretentative.Safaçondesevictimiseratoujourseule

dondem’énerver.Avantmêmedesavoirquielleétait.Jem’arrêtenetet,sansmeretourner,luisorsavecundégoûtnoncontenu:—Tafaussecompassionnem’atteintpas,Julia.Vaservirtamerdeàquelqu’und’autre.Sansluilaisseruneautrechancedemefaireperdremontemps,j’allongelepasetmemetsàcourir

quandj’arriveaucoindelarue.Lefeuauxjoues,lapeurauventre,jecoursaussivitequejepeuxpourlerejoindre.Bonsang…Jeneveuxpasleperdre!L’ascenseurestd’unelenteureffroyable,jetrépigne

surplace,incapabledemecalmer.Jedoislevoir,luiparler…Jeveuxretrouverlachaleurdesesbras,legoûtdeses lèvres,sonregardemplitde tendresse…Jeveuxqu’ilme laisseunechancede l’aimer.Quandj’arriveenfindevantlaporte,j’aiunmomentd’appréhension.J’entredoucementetleretrouveàtourner en rond dans le salon. Les mains dans les cheveux, le regard baissé, il arpente la piècerageusement.Jeposemonsacsurlatableetm’avanceversluimaissafaçondemefusillerduregardmeretourneetmedissuaded’avancerplus.—Tulesavais,n’est-cepas?Sa voix est grave, empreinte d’une colère que je ne lui connais pas. Un rictus mauvais barre son

visage.—Laissetomber,tonsilenceparlepourtoi.Jenesaismêmepaspourquoijechercheàmerassurer.

Vas-yqu’onsemarre,çaduredepuisquandcetteaffaire?Jedéglutis.—Depuisquejesuistombéesurlaphoto.—Pourquoi jenesuispassurpris !Doncdepuisdessemaines!Et t’attendaisquoipourme ledire

bordel?—J’avaismesraisonset…Un rire nerveux s’échappe de ses lèvres,m’arrachant un frisson. Il secoue la tête lentement et une

grimacedéformesestraitsremplisdedégoût.—Arrête,Zoé,j’ail’impressiond’entendretagrandecopine!—Cen’estpasmacopine…Enfinçanel’estplusdepuisquej’aicomprisqu’ellememanipulaitpour

serapprocherdetoi.Ben,ilfautmecroire,j’aivoulutelediremais…j’aieupeur.—Maispeurdequoi,bordel?Tuveuxsavoircequejemesuisimaginéquandjet’aivuavecelle?

Quevousmepreniezpourleroidescons!—Maisnon,bonsang,j’auraisdûtelediremaisc’étaitplusfortquemoiparceque,malgrécequetu

peuxendire,jesaiscequ’ellereprésentepourtoi!Jenesaispascomment je trouvelaforcedehurleraussifortquelui.Tremblante, lesnerfsàvif, je

soutiensdumieuxquejepeuxsonregardcorrosif.Lepoingdevantlabouchepours’empêcherdecrierencoreunfois,ilsedétourneets’assoitsurlatablebasse.Sesmainsfourragentnerveusementsatignasse,frottentsonvisagetendu,tombentsursesgenoux.—Ben,s’ilteplaît,parle-moi,nelalaissepastoutpourrirentrenous!Unlourdsoupird’agacements’expulsedesespoumonsetsesyeuxseperdentsurlavueofferteparla

baievitrée.D’unpashésitant,jemedécideàlerejoindre.S’ilsentmaprésence,iln’enfaitpascasetcontinuedefixerlecielétoilé.—Tuterendscompteàquelpointtuesridicule,Zoé?Tutesensmenacéeparunputaindefantômede

monpassé.Tonmanquedeconfianceremetencausepasmaldechoses.Etlepiredanstoutçac’estqueje t’en veux à un point que tu n’imaginesmême pas. Je ne supporte pas lemensonge et là c’est toutsimplementunetrahison.Jamaisjenet’enauraiscrucapable.Son ton calme et détaché exacerbema crainte de vivremes derniers instants avec lui,me tord les

boyaux à un point tel que je ressens le goût acide de la bile sur ma langue. Ben fait ressortir mesmeilleurscommemespiressentiments.Jesuisperdue,effrayée;unbesoinviscéraldeletouchermecomprimelapoitrine.Deboutfaceàlui,

j’osepasserunemaindanssescheveux. Il se laisse fairemais,à lamanièredont il se tend, jedevine

qu’ilseretientdesedégager.Nemerepoussepas,Ben!—T’astoujourspascomprisquej’aidessentimentspourtoi?Etc’estàcaused’euxquejen’airien

dit.Je…jeneveuxpasteperdre,Ben.Larespirationlourde,ilfermelesyeux.Jevoudraisluidirequejesuistombéeamoureusedelui,que

j’angoisseàm’enrendremaladedepuisquejesaisquesonpremieramourarefaitsurface,maislapeurdurejetm’empêchedetoutluiavouer.Aprèsd’interminablessecondesdesilence,illèveenfinlesyeuxversmoietjerespiredenouveauenvoyantquetoutetracedecolèreadisparudesonregard.—Onferaitmieuxd’allersecoucher.Ilesttroptardpourcontinuercetteconversation.Jen’espéraispasqu’ilm’avoueàsontoursessentiments,maisjem’attendaisencoremoinsàlevoir

clore le sujet de cette manière. J’ai encore tant de choses à lui dire, à lui expliquer pour lui fairecomprendremesagissements.Jem’écartequandilselèveetluiemboîtelepas.Iln’apeut-êtrepastortaprèstout.Unebonnenuitdesommeilpourraitpermettred’avoirunevisionplusclairedelasituation.Quandonarrivedevantsachambre,ilsetourneversmoi.Lamainsurlechambranledelaporte,ilmebloquelepassage.—Pascesoir,Zoé.J’aibesoind’êtreseul.Sansmelaisserl’occasiondeplacerlemoindremot,ilbaisselesyeuxpourneplusêtreconfrontéàla

détressedesmiensetmefermelaporteaunez.Interdite,jeresteuninstantdevantlachambredontilmerefusel’accès.Cettemêmechambreoùjem’endorsdanssesbrasdepuisdessemaines.Désorientée,jerejoins lamienneetm’allongesur lesdrapsfroids.Recroquevilléeenpositionfœtale,sansprendre lapeined’enlevermesescarpins,jerestefixéesurlalumièrerougeduréveil.Lesminutess’égrainentàunelenteur infinie. Je ne pense à rien, je suis remplie de vide.Un trou béant, voilà à quoi je ressemble.Bordel,jesuislamentable,surtoutquandonsaitquetoutestmafaute.Jevoudraislerejoindre,leserrerdansmesbrasetluidireàquelpointjesuisdésolée,maislepeudefiertéqu’ilmerestem’enempêche.Jenesaispasdepuiscombiendetempsjesuislà,maisj’ail’impressionquelerestantdemanuitva

êtredumêmeacabit.Soudain,lesilencesebriseavecleclaquementdelaported’entrée.Unebouleseformedansmagorge:ilestparti.J’aimeraispouvoirmelaisseraller,pleurer,maisj’ensuisincapable.Jeresteainsi,àattendresonretourjusqu’àcequemespaupièressefermentsansm’enrendrecompte.

Chapitre28

Zoé

Réveilléeensursautenpleinmilieudelanuit,jefoncedroitdanssachambre.Laporteestentrouverte,jesaisdéjàcequejevaisytrouver:duvide.J’allumelalumièreetconstatequesonlitn’amêmepasétédéfait.Ils’estenfermédanssachambrependantdesheuressansessayerdesecoucher.Monestomacseserreenl’imaginantfulminer,tournerenrondetmedétesterunpeuplusàchaqueminutequipassait.Non,non,non !Unemontéede stressmegagneet jecours récupérermon téléphone, levisseàmonoreilletandisque je reviens surmespas. Je tombe sur saboîtevocale, raccroche et réessaie aussitôt.Mêmerésultat. Putain, réponds-moi ! Je respire un grand coup pour me calmer et attends la fin del’enregistrement.—Ben,c’estmoi…Jesaisquetuesencolèremais,s’ilteplaît,dis-moiquetuvasbien.Jeneperdspasunesecondeetretentemachance.Envain.Pourquoin’est-ilpasencorerentré?Ets’il

étaitpartilarejoindre?Non,impossible,pasaprèscequ’ilm’aditsurellehier.Unebouled’émotionseformedansmagorge,jememaudis.Çamebouffedel’intérieurdesavoirquec’estenpartieàcausedemoi qu’il est dans cet état. Je réitère nerveusement la même action, le portable à l’oreille, mais lestonalitéss’enchaînenttoujoursetsonmessagederépondeurprendlerelais.—Ben, je…Appelle-moi,envoie-moiunmessagesi tupréfères,maisneme laissepasm’inquiéter

inutilement.Siseulementilm’avaitlaisséunechancedeluiexpliquer,del’aideràcomprendre…Savoixrésonne

danslecombinéetlebipmeprévientquec’estàmontourdeparler.Jeravaleunsanglot,resteenlignesans rien dire. Les mots dans ma tête refusent de franchir la barrière de mes lèvres. Ce silence esthorribleàsupporteretpourtantjesuisincapablederaccrocher,decoupercemincelienentreluietmoi.J’appuiedenouveausurl’interrupteuretavancedanslenoir.Jeconnaiscettechambreparcœurmais

défairelacouetteetm’yglissersansluimefaitunedrôledesensation.Sanssesbrasquim’encerclent,sontorsecontremondos,sonsoufflesurmanuque…jenesuispasàmaplacedanssonlit.Désemparée,jedéverrouilledupoucel’écrandemonportableetappuiesurlatouchederappel.Jesaisqu’ilnemerépondrapasmaisj’aibesoind’entendresavoix.Àpeinedeuxsonneriesetjebasculedirectementsurlaboîtevocale.Ilmerejette.Moncœurseserredansmapoitrine,jepeineàtrouverdel’air.Saréactionestdémesurée, je ne comprends pas. Il me bloque l’accès à notre chambre, me fuit, et maintenant ilm’ignore…Unepeureffroyablemegagnecaroui,jel’avoue,j’aipeurdesouffriretjen’oseimaginercequivasuivres’ilnerentrepas.Ladouleurpeut-elleêtrepirequemaintenant?Unesensationdefroids’insinueenmoietsepropagedanstoutesmesterminaisonsnerveuses.Tellementfroidqueçafinitpardevenir brûlant. Je n’ai jamais été amoureuse comme ça. Comment gère-t-on ce genre d’émotions ?Paniquée,jem’allongedesoncôtédulitetplongelatêtedanssonoreiller.Sonodeurm’apaise,m’aideàcalmer les tourments qui vrillent mon esprit et je finis par me rendormir, mes doigts cramponnés autéléphone.Unelumièreviveperceàtraversmespaupièreset,doucement,j’ouvrelesyeux.Lejourselèveetil

n’estpasrevenu,jelesensenmoicommeuneévidence.Monportable?Pasd’appel.Pasdemessage.Toujoursrien.Jeregardepar lafenêtresansrienvoir.J’essaiederéfléchirmaismonespritestembrumé.J’espère

que tout va s’arranger sans vraiment y croire. J’ai perdu la notion du temps. Jeme lève comme uneautomate,détaillemesvêtements froissésde laveilleetévitemon refletdans lemiroirenme rendantdanslacuisine.Tandisquelecafécoule,jeregardeautourdemoietj’éprouveunesoudaineenviedenettoyer,ranger,

aspirer.Comme si le foutoir dansma tête s’étaitmatérialisé devantmesyeux.Les bras croisés sur lapoitrine, je tourne surmoi-même et détaillemon environnement, agressée par ce que je vois.Aucuneissue,sicen’estdebriquer,frottertoutcequim’entoure.Jemejettesurlepremierchiffonquimetombesouslamainetmemetsenaction.Deuxheuresplus tard, l’appart estnickelmais jenevaispasmieux.C’estmême tout le contraire :

bientôt10heuresettoujoursaucunsignedeviedeBen.Jevaispéterunplomb!Jesorsmonportabledelapochearrièredemon jean. Je tentedeme raisonner,denepas l’étouffer avecunénièmeappelquiresterade toute façon sans réponse.Ma fierté,mapeur freinent cette envie,malgré cebesoinpresqueviscéral d’entendre sa voix. S’il devait me rejeter de nouveau j’aurais trop peur de ma réaction, desouffrir un peu plus. Je sursaute et mon cœur bat de nouveau quand mon téléphone m’avertit d’unmessage.Enfin!Lesdoigts tremblants,pressants, jedéverrouille l’écran.Ladéceptiondoitse liresurmonvisage:Lola…Cen’estqueLola.

Benbrilleparsonabsenceaubureau,j’espèrequeçavautlecoup!Cettefoisc’étaitcadeaumais

ne comptez pas sur moi pour le couvrir la prochaine fois. Passez une bonne journée, bisous leschouchous.

Bordel,maisoùest-cequ’ilest?Ildécouche,neseprésentepasautravailetaprioriLolan’estau

courantderien.Jevaispéteruncâbleàresterainsidansl’ignorance!Fautquejem’occupesijeneveuxpas disjoncter. J’attrape mon ordinateur, le pose sur le bar et me ronge un ongle en attendant qu’ils’allume.Leportableposéàcôtédemoimefaitdel’œilmaisjerésiste.J’ouvremesmails,faisletourdemonsitesansvraimentyprêterattentionquandmonregard tombesur laphotodeBen.CettemêmephotoquiafaitrevenirJulia,enfinBlue,dansnosvies.Putain,maispourquoij’aifaitça?J’auraisdûladégagerdèsledépart,ledireàBenauraitpeut-êtretoutchangé…Dansquelétatd’espritva-t-ilêtreàsonretour?Est-cequeJuliaaréussisoncoup?A-t-ilcompris

quejen’avaisrienàvoiravecelle?Tropdequestions–toujourslesmêmes–sebousculentdansmatête. Je n’arrive plus à réfléchir correctement, et plus le temps passe, plus je sens un poids quim’oppresse la poitrine. Jeme sensmal, toutmon corps est tendu comme un arc et j’ai besoin d’unedouche…Oui,voilàquidevraitm’aideràmecalmer!Jerécupèredesaffairespropres,monportableaucasoùilsedécideàdonnersignedevieetfiledanslasalledebains.L’eauchaudedétendmesmuscles,j’ail’impressiondemieuxrespirer.Jemelaverapidementetquandjem’enveloppedansuneserviette,jecroisentendreunbruit.Lessensenalerte,jemefige.—Ben?Pasderéponse.Un trousseaudeclésque l’on jettesur laconsolede l’entrée,desbruitsdepasqui

résonnent.Portesquiclaquent,bruitscristallinsdeverres.Merde,qu’est-cequ’ilfout?Jem’habilleàlahâte,l’humiditédemapeaunem’aidepas,maisj’enfiletantbienquemalmonjeanet

montopavantdesortirprécipitamment.Quandjeledécouvredanslacuisine,jemarqueuntempsd’arrêt.

Ilestlà,danssesfringuesdelaveille,lestraitstirésetdescernesviolacéssouslesyeux.Lanuitsembleavoirétéaussidésastreusepourluiquepourmoi.—Tuétaisoù?Jem’inquiétais,tunepeuxpaspartirenpleinenuitsansdonnerlamoindrenouvelle!Lesoulagementde le revoirestdecourteduréequandsesyeuxseposent surmoi.Froids.Distants.

Toutesaposturerévèlequ’ilest tendu,horsdelui,etqu’ilsecontient.Ilavaleunegorgéedelabièrequ’iltientdanssamainsansdéviersonregardpolairedumien.Jen’osepasbouger,piégéeparsesirisazur,essayantdedéchiffrersonattitudeglaciale.—Ettoi,t’avaisledroitdemeprendrepouruncon,demementir?Tucroisqu’onestquittes,ducoup

?Letimbredesavoixestcalme,beaucouptropcalmeàmongoûtetjen’aimepasça.J’aiunmauvais

pressentiment.Pourtant jem’approched’unpashésitant, contourne le bar etm’y appuiepourme tenirfaceàlui.—Jene t’aipasmenti,etencoremoinsprispouruncon.Comprends-moi,bordel, je laconsidérais

commeune copine et, du jour au lendemain, j’apprends queMA Julia estTABlue ! Je ne savais pascommentréagir,alorsjemesuisditquelegarderpourmoietvoircequ’elleattendaitétaitlameilleuresolution.J’aimerdé,j’enaiconscience,maistoutsepassaittellementbienentrenous…Jenevoulaispasrisquerdetoutperdreàcaused’elle.Sespaupières seplissent, son regardqui jusque-là était videde toute expressionprendune étrange

lueur.L’azurdesesirisplongésdanslesmiensmesonde,chercheàvoirau-delàdemonâme.Jelelaisses’yengouffrerpourqu’ilcomprenneàquelpointjesuisdésolée.Jesuistombéeamoureusedetoi,nemelaissepas!Jeveuxqu’illecomprenne,qu’illedevinecarjesuisincapabledeleluiavouer.L’amourquej’aipuéprouverdanslepassén’estriencomparéàceluiquimeronge,medévore,s’immiscedanschaquepartiedemoncorps.Jenemesuisjamaissentieaussivivante,vibranteetmoi-mêmequedepuisqu’ilestentrédansmavie.D’unpas,ilserapprochedemoi.Samainseposesurmonvisageetcaressedupouceleslignesdema

bouche,recourbemalèvreinférieureencontemplantsilencieusementsongeste.Lachaleurdesapeau,cecontacttantattendu,m’apaiseinstantanément.—Doncçayest,t’asdécidédejouerfranc-jeu?OK,plusaucunmensongeentrenous.Jesecouepositivementlatête,unlégersourireétirelecoindemeslèvresenpensantquelatempête

s’éloigne,emportantavecelle touscesnon-ditsetces secretsquiont faillibrisernotrecoupleencoretropfragile.Maismonapaisementestdecourteduréeetmondébutd’euphoriedisparaîtaussisecquandje vois son visage se déformer dans unemoue de dégoût. Samain retombe contre son flanc, et il sedétourne.Jesuispaumée,complètementperdue!Ilsepassequoilà?Bordel,ilnemecroittoujourspas,jedoisencoreleluiexpliquer.—Maisjetejurequequandj’aivuJulialapremièrefois…—Commentellet’atrouvée?Surpriseparsontonsec,jemeréfugiedanslemutisme.Lacolèredissimuléedanssavoixmeprendau

dépourvu.—Jereformule:commentenserapprochantdetoia-t-ellesuqu’ellepourraitm’atteindre?Çac’estàcausedemonsiteetdecetteputainde…Monsangseglace,jetournelatêtedanslamême

directionqueBen.Monordinateur restégrandouvertaffichesaphotoavec la légende«Lepigeonencostard,lasolutionpourbaguerlerichedevotrechoix».Jememordsl’intérieurdesjouesàm’enfairemal.Non…pasça!Jemedécompose,lesmotss’étouffentdansmagorge,jesuisauborddel’apoplexie.

Ilrefermel’écrand’ungestelourdet,quandsesprunellesglacialespercutentlesmiennes,jecomprendsqu’ilaeutoutleloisirdedécouvrirmonsite,decomprendrequej’aiutilisésonimageavantquejenesortedelasalledebains.Aupremierpasquej’esquissedanssadirection,ilreculed’autant.Ilplaceunemaindevant luipourmaintenirunedistancede sécurité entrenouset, de l’autre, il jette sabièredansl’évier.Leverresefracasse,etdel’écumeserépandunpeupartout.—Plusdemensonge,hein?Putainjusqu’àquandtucomptaismeprendrepouruncon?—Attends,laisse-moit’expliquer!C’estpartid’uneconneriequandonn’étaitpasencoreensemble

et…—Putain,maisferme-la!Monflotdeparolesmeurtdansmabouche,ahuriequ’ilosemeparlercommeça.Ilmecontourne,va

danslesalon,récupèreunebouteilledewhisky,s’ensertunverreavantdeleviderculsec.Lespoingsserrés,lerougememonteauxjouesetjelerejoins.Safaçondemeparlermesidère,rallumemesbasinstincts,etmafiertéexplose.—Jet’interdisdemeparlercommeça.OK,tuesénervé,déçu,choquéetjepeuxlecomprendre,mais

ilyadeslimites!Sansunmot,levisagefigéparlesnerfs,ilsesertunautreverre.Jerestedebout,droitecommeunI.

Sonregardtranchantseposedenouveausurmoi,jefaisuneffortsurhumainpournepasmontrerquesonattitudemedéstabilise.Sanssedépartirdecetteexpressionhaineuse,ilsortdesonmutisme.—Etlestiennesdelimites,onenparle?Nonparcequeteservirdemonimagepourterenflouerles

pochesçavaloinquandmême!C’estçaquejesuispourtoi?Uneputaindepompeàfricpourtonlovebusiness?Etc’estquoimadatedepéremption?Unan?Deuxans?Combiendetempsavantquejenesoisplussuffisammentattractifpourqu’onresteensemble?Blueaprislesthunesdemonpèreets’esttiréemaisj’avouequet’asmislabarretrèshaut.Tuespirequ’elle,t’asfaittoutçaderrièremondos!Jedoisdirequejenel’avaispasvuvenircelle-là,alorsbravo,tuasréussitoncoup!Il claque le verre sur la table et applaudit, un rictus amer collé sur le visage. Complètement

estomaquée, je ne trouve rien à répliquer. Tout se retourne contremoi, et je n’ai aucunmot pourmadéfense.Jecomprendssoncheminementdepenséemêmesitoutestfaux.L’alcoolqu’ilingurgiteaggravemasentence.Iladéjàsignémonarrêtdemort.—Aufinal,c’esttoilagrandegagnantedujeu,t’asréussiàmebaiserenbeauté.Jet’aipeut-êtreeue

dansmonlitmaistuasfaitdemoidelachairfraîche.Lepigeonencostardquejesuisaétéprisàsonproprepiège…Putain,j’enrevienspasdem’êtrefaitavoiràcepoint!T’asaucunesensibilité,t’esjustebonneàbouffer lesmecs.T’espasunenana, t’es justeuneespècedemante religieusequidévoresesmecsaprèsl’amour.Quoi?Ilnepeutpaspenserça.Pasaprèstoutcequenousavonspartagé.—J’ai toujours été sincère avec toi, dumoinsdepuisque l’on est ensemble.Tun’as jamais étéun

pigeonpourmoi,nedispasdebêtises, tumeconnaissuffisammentpoursavoirquetoutçan’estqu’unmalentendu,c’estdesconneries,Ben.—Tupeuxdirecequetuveux,Zoé,toutseretournecontretoi.Jenesaispluscequejedoiscroire,ce

quiétaitvraioupasentrenous,cequetumecachesd’autre…T’asplusaucunecrédibilitéàmesyeux.Jen’aiplusconfiance…J’ail’impressiondemeprendreunegifle,aller-retour.Jevacille,meretiensaudossierd’unechaise

pour ne pas tomber. Je prie intérieurement pour qu’il se rende compte que tout est faussé. Je vaismeréveiller,cen’estpaspossible,jesuisenpleincauchemar!

Sonverredenouveaurempli,illeremuemécaniquement,m’observeavantdesel’enfilerd’unetraite.Jefermelesyeuxetinspirelentement,tentedemeraisonner.Ilnepensepasunmotdecequ’ildit.C’estl’alcoolquiparle,paslui.Cen’estpasleBenquejeconnais.Jeprendstoutelamesuredesasouffrancemaisj’espèrequ’ilserendracomptedesonerreur.Ilestdéçu,vexé,sonamourpropreenaprisuncoup,etilluifautdutempspourassimilertouteslesinfosdecesdernièresvingt-quatreheures.Perdue,jenesaisplussijedoisencoretenterdem’expliquer.C’estimpossiblequeçasetermineainsi.C’esttellementconet en completdécalageavecmoiqu’il nepeutpas croireque jeme suismise avec lui justepourl’argent,quejeluiaimentiausujetdeBluejustepourlegarderprèsdemoi.Jen’enairienàfoutredesonargent,ildevraitlesavoir!Muré dans son silence, il continue de boire en prenant soin de ne jamais faiblir l’intensité de son

regardsurmoi.Jerestelà,postéedevantluiàattendrequelapressionretombe,qu’ilréalisequetoutecettesordidehistoireaététroploin.Saufque…—Pournotrebienàtouslesdeux,lemieuxseraitquetupartesd’ici.Jemefige,passûredecomprendre,ouplutôtdevouloircomprendrecequ’ilmedit.—Quoi?—C’estpasassezclair?Barre-toidechezmoi!Son haussement de tonme sort dema torpeur et son regard haineuxme cloue sur place.Une boule

douloureuseseformedansmagorgeet,sansquejem’yattende,unelarmecoulesurmajoue.Jel’essuierageusement, ravalant les autres qui menacent de franchir la barrière de mes cils. Ma fierté reprendrapidementledessusetjelepoussedesdeuxmainspourrejoindremachambre.Laporteclaquederrièremoi,jesuisprisedeviolentstremblements…Jen’aipaspleurédepuismessixans,quandmamèrem’adéposéeàlaDDASSsansseretourner,etjenevaispaslefaireaujourd’hui.J’aivécul’enferplusd’unefoisdansmavieetjemesuistoujoursrelevée.Jemesuisendurciesansjamaisverserlamoindrelarme.Et pour une peine de cœur, je serais prête à pleurer ? Hors de question ! Il a peut-être réussi àm’atteindre,àabaissermesdéfensesmaisjerefusequ’unhommequimeviredesaviesuruncoupdetête,sansmêmechercheràcomprendremesactions,aitdroitàmespleurs.Mesaffairess’entassentàlahâtedansmesvalisespuis,sansunregarddanssadirection,jemedirige

verslaported’entrée.Lamainsurlapoignée,j’ouvrelaportemaism’immobilisesurleseuil.Non,jenepeuxpaspartircommeça!Jelaissemesvalisesdanslecouloiretretournedansl’antred’unpasdécidé.Ben est dos àmoi, regardant par la baie vitrée, sûrement pour éviter demevoir partir. Tu as raisonfinalement,tunemeconnaispassitucroisquejevaispartirsansunmot!Tonattitudeaattisémarage,sijemesuislaisséefairejusqu’àprésent,attends-toiàygoûteravantquejeparte.—T’astropbuetjesaisquetunem’écouterasprobablementpas,maisjevaisquandmêmetedirele

fonddemapensée : j’ai cru à notre histoire, sincèrement et de toutmon cœur.Est-ce que jeme suisfoutue de toi ? Est-ce que j’en avais après ton argent ? Franchement je n’ai même plus envie dem’expliquer.Aufonddetoituconnaisdéjàlesréponses.Maist’estropbornépourteposerlesbonnesquestions.Lesmusclestendusdesondosm’indiquentqu’ilm’aparfaitemententendue,malgrétoutilcontinuede

semurerdanssonsilence,d’attendrequelatempêteZoépasse.J’enprofitepourcontinuer,guidéepasmacolèreetmarancœur.—Tusaisquelesttonproblème?Tuveuxmemettretoutsurledosparcequec’estplusfacilepour

toi.T’esqu’unlâchequin’assumepaslefaitderevoirsonex.Çat’abienpluschambouléquetuneveuxl’avouer.TapetiteBluet’aretournélecerveauetcettehistoiretombeàpiquepourtedébarrasserdemoi!

Àcesmots, ilse retourneetmefait face. Ilposesonverresur la tablesansmelâcherduregardetavanced’unpasmenaçantversmoi.Sasoudaineproximitémeperturbe,autantque la fureurqui se litdanssesyeux.Sonsoufflealcoolisésebrisesurmeslèvresetlefroncementdesessourcilsprouvequ’ilesthorsdelui.Mesjambesreculentd’elles-mêmes,tandisqu’ilcontinued’avancer.—Neconfondspastout,c’estàcausedetoisionenestlà.Etmets-toidanslatêtequej’enairienà

foutredeBlue…commej’enairienàfoutredetoi.Jetombedesnues,lecœurauborddeslèvres.Mesjambessefigentcommeprisesdansunechapede

plomb.Uncoupdepoignard aurait eu lemêmeeffet que sesmots. Je n’ai jamais été aussi blessée ethumiliée de toutema vie.Quandmes talons résonnent dans un écho sourd, je comprends que ses pasm’ontamenéejusqu’aucouloir.Ilm’adéjàsortidechezlui,desavie.Maissijepensaisqu’ilnepouvaitpasmefaireplusdemal,c’étaitsanscomptersurBenetsonenvied’enfinir,d’appuyerlàoùçafaitmal.—Ons’estamusésunmomentmais,aufinal,combiendetempsçaauraittenu?Regarde-toi,Zoé,t’es

aussifrigideducœurqueducul!J’ail’impressiond’éclaterenmillemorceaux,jenelereconnaispas.J’ouvreplusieursfoislabouche

puislareferme,incapablederépliquer.Jenesaispass’illepensevraimentous’ilchercheuniquementàmefairemal,mais iln’yaplusde retourenarrièrepossible.Plusaprèsça.Sonregardancrédans lemien,j’observelaporteserabattresurmoi.Ilneveutplusdemoi,c’estfini.Jesuistombéeamoureuse,puisjesuistombéetoutcourt.

Chapitre29

Ben

Metirerenpleinmilieud’uneréunion,jenel’avaisencorejamaisfait;envoyerchierJaydendevantles collègues quand il s’y oppose, non plus. Les poings serrés, je rejoins à grandes enjambées monbureau.Besoindem’isoleravantderéellementpéterunplomb.—Quepersonnenemedérange.Ducoindel’œil,jevoismasecrétairesursauteràmontontranchant.—Bien,monsieurHarper.Sansunremerciementniquoiquecesoit,jeluipassesouslenezetm’enfermedansmonbureau.Les

nerfsàfleurdepeau, je tireuneclopedemonpaquetet l’allume.Moiquinefumaispresqueplus,mevoilààclopern’importeoù,n’importequand.C’estlaseulechosequiarriveàmedétendrecestemps-ci,quimepermetd’évacuertoutescesmerdesquicherchentàmepolluerlecerveau.LeregardtendudeJaydurant la réunionn’a fait qu’alimenterma rancœur,mon envie de tout plaquer.Encoreune chosedontj’auraisdûmedouter:ilestaucourantbiensûr.Maisenquoiçaleregarde!Mavie,meschoix,c’estpas compliqué bordel ! Je veux qu’onme foute la paix ! La nicotine s’infiltre dansmes poumons etj’expirel’airlentement,desanneauxdefuméeseformentavantdedisparaître.SiZoémevoyait,ellemediraitquel’arsenicqu’ilyadanscestubesestplusnocifqueseslasagnes.Unsourirecyniques’étiresurmeslèvres.Commesisonavispouvaitm’intéresser!Mon portable vibre et je l’extirpe de ma poche. Je le regarde jusqu’à ce que la boîte vocale se

déclenche et avale le énième message qui ira rejoindre tous les autres. Tellement prévisible ! C’estencore elle. Blue. J’imagine qu’elle veut toujours me voir, mais je ne me sens pas concerné. Sesexplicationsj’enavaisbesoinilyacinqans,ladatelimiteestdépassée.Zoéavaitaumoinsraisonsurunpoint:revoirBluearéveillétoutuntasd’émotionschezmoi…Àcommencerparlarancœur.Inutiledesedemandercommentelleapuavoirmonnuméro.Riennesertd’allerchercherbienloin…

Unecollaborationentremesdeuxexest loind’être ridiculequandonypense.Jesuis le roidescons,ellesm’ontbienbaisélagueule!J’écraserageusementmaclopeet,surlepointd’engrilleruneautre,jestoppemongeste.Unbrusque

raffutdanslecouloiraffolemonassistanteetm’interpelle.—Non,vousnepouvezpasentrer,M.Harperademandéàn’êtredérangésousaucunprétexte!—Nevousenfaitespas,Abigail,çavaêtretrèsrapide!Une colère dans la voix à peine dissimulée, des pas précipités se rapprochant dangereusement. Je

contractelesmâchoiresd’avance.Çacontinue…putain,c’estpaslemoment!Laportedemonbureaus’ouvreàlavolée,claquebrutalementcontrelemur.Unregardassassinbraquésurmoi,Lolas’engouffre,dévore mon espace vital. Le visage rouge, déformé par la hargne, elle m’envoie toute sa haine à latronche.Pasdedoute,c’estpourmoi!

Faisgaffe,Lola,mechauffepaslà-dessus,jerisquedevitem’enflammer.Monassistantemeregarde,totalementpaniquée,nesachantcommentréagirfaceàl’ouraganrouxqui

foncedroitsurmoi.—Toi,j’auraisdûtecouperlescouillesdèsquetuasposétessalespattessurelle!T’asdelachance

que j’aiencoreunminimumdeconsidérationpour toimalgré toutceque tu luias fait subirparcequesinont’auraisdéjàgoûtéàmongenoubienplacé!Ledoigtaccusateurpointésurmoi,jesensqu’ellenecomptepass’arrêterlà.—C’estbon,Abigail,jem’encharge.Vouspouvezprendreunepause.Hâtivement,jemelèveetfermelaporte.Paslapeinequequelqu’unassisteàça.Lolamefixedansun

silencedeplomb,lesbrascroisés,lesonglesincrustésdanssapeaublanche.Jenel’aijamaisvuedanscetétat.Tentantdeconserverlamaîtrisedemoi-même,jemepincel’arêtedunezetrespirelentement.—Sit’esvenuepourmeparlerdetacopine,tuperdstontemps.Directionmonfauteuiloùjemelaissetomber,jebraqueunregardincisifsurmarouquine,psalmodiant

jenesaisquellesinsultesenfrançais.Lesraresfoisoùelleparledanssalanguenatale,c’estquandelleestremontée.Maislàc’estuneuphémisme:elleesthorsd’elle.Sielleveutjoueràçaonvaêtredeux,saufquejesuistellementàcranquejerisquedelablesserelleaussi.J’ouvrelabouchepourenplacerune,aumilieudesatiradeàlaquellejecomprendsquedalle,maisellenem’enlaissepasl’occasionetcommenceàmedonnerdescoupsdepoingsurlebras.—Tu. Es. Un. Véritable. Connard. Dire que je t’ai cru quand tum’as affirmé qu’avec elle c’était

différent!Pourquoi?Pourquoituluiasfaitdumal?Mapatiencemiseàrudeépreuves’estdéjàfaitlamalle.Brusquement,jeluiattrapelespoignetspour

qu’ellecessedemefrapperet,menaçant,jemedépliedetoutemahauteur.—J’espèrepourtoiquet’asconsciencequetudépasseslesbornes.C’estmoiquimefaispigeonneret

tuprendssadéfense?C’estquoiledélire,vousvousêtestoutesdonnélemotouquoi?Uneétrangeimpressionmetireunrirenerveux.—Enfaitj’auraisdûm’yattendre.Siçasetrouvet’étaismêmeaucourantdepuisledébut.Monregardenfoncédanslesien,elleécarquillelesyeuxavantdesedébattrepourquejelarelâche.

L’espaced’uneseconde,jeperdspiedetinstinctivementjeresserremaprise,latireàmoi.Moncœurbatà tout rompre face à cette éventualité.Après tout ce que l’on a vécu, tout ce qu’ellem’a apporté, laconfiance que je lui ai donnée, je prie pour me planter. Étant sa meilleure amie, est-elle dans laconfidencedecetraquenard?Merde,soitjesuisentraindevirerparano,soitjemesuisfaitavoirenbeauté.—Commentoses-tupenserça?Jamais jenet’auraisfaitunechosepareille!EtZoés’enmordles

doigts,tunepeuxpaslalaissercommeça.Ben,faisquelquechosemais…—Non.Àl’évocationdesonprénom,jem’écartedeLola,lanuquetendue,etdeslarmesdefrustrationroulent

sursesjoues.Voilàpourquoionnevoulaitpasquenotrerelationsoitdévoilée,maintenantnosamisontleculotdes’immiscerdansnotrehistoire.Uncrirageursortdesagorgeetd’ungestebrusque,ellebalaietoutcequisetrouvesurmonbureau.Dossiers,lampe,téléphone.Touts’écraseàmespieds.—Tu l’asviréedechez toi, traitéecommeunemoinsquerienetpourtantelle refuseque jeprenne

partipourl’und’entrevous.Çafaitdeuxjoursqu’elleestenferméechezmoi,quejeresteavecelleaulieudevenir travailler.Deuxputainsdejoursquejedois lui tirer lesversdunezpoursavoircequ’il

s’estpasséparcequ’elleneveutmêmeplusentendretonprénom!Onnageenpleindélire là!JeneretiensplusmacolèreetexplosequandjeréalisequeZoésefait

passerpourlavictime.—Unconseil,situtiensneserait-cequ’unpeuànotreamitié,surveilletesparoles.Moij’ail’esprit

tranquille.Alorsoccupe-toiplutôtdetonmariage!—Tun’aspasledroitdemedireça!Ouvrelesyeux,bordel!Tulaprendspourqui?Pourinfo,elle

m’a raconté pour ton ex et pour la photo. OK, elle a ses torts mais, contrairement à toi, moi je l’aiécoutée. As-tu seulement essayé de la comprendre ? Oumieux, toi qui as l’esprit si tranquille, tu asforcémentpenséauxconséquencesdetesactes!Quejesuisbête,biensûrquenontun’yaspaspensé,sinontunel’auraispasfoutueàLAPORTE!Jeserrelesdents.C’estbonj’aieumadose.—Jecroisqu’ons’esttoutditsipourtoipardonnerestfacilequandons’estfaitprendrepouruncon.

Retournevoirtacopine,remballetesleçonsdemoraleavantquelasituationn’empire.M’engueuleravectoinefaitpaspartiedemonprogramme.Montonestfroid,sansappel.JeveuxjustequeLoladégage,qu’ellerejoigneZoé,lapauvrevictime

detoutecettehistoire.Aulieudeça,ellearpentelapiècecommeunefollefurieuse.—Maleçondemorale?Maleçondemorale!T’asvraimentdécidédetoutfoutreenl’air,t’esqu’un

putaind’égoïste,unimbécile,maismoijeneveuxpaslaperdre.Sa voix se brise sur ces derniersmots et d’un revers demain, elle essuie ses jouesmouillées. La

perdre?Subitementtirédemahaineetdemarancœur,sesparolesmepercutent.Largué, je tented’endémêler le sens, le regard braqué sur la tristesse de Lola. Je voudrais la prendre dans mes bras, laconsolercommej’ysuishabituémaisjeneveuxpasqu’ellecroiequejecapitule.Jerespirelentementpourmecalmeretlarejoinsmais,sansquejem’yattendre,ellemerepousse.—J’aipasréussiàlaretenirettoutçac’estàcausedetoi,alorstuvasteprendreparlamainetmela

ramener!Sonregardhaineuxestdenouveaufichédanslemien.Jesature,cettemascaradeaassezduré.—Telaramenerd’où?Tumefatigues,Lola!Sérieusementjesuisàboutdepatience.Jemeretiensde

tevirerd’ici.—Elles’enva,ellerepartenFrancepartafaute!Sonaviondécolledansdeuxheures.Jetepréviens,

Benjamin,t’asplutôtintérêtàtesortirlesdoigtsduculetàlarécupérersinontupeuxfaireunecroixsurnotreamitié.Sijedoischoisirentrevousdeux,c’estelle.Ceseratoujourselle!Saremarquemeblesseplusqu’ellenel’imaginemêmesijemedoutaisdéjàdecettepossibilité.Mais

ce qui m’écœure le plus, c’est que Zoé puisse encore peser sur moi, sur mes sentiments. Fuir, c’esttellementprévisibledesapart!Jeserreetdesserrelespoings,nesachantpascommentréagirfaceàcedépartprécipité.MaislesinterrogationsquejelisdanslesyeuxdeLolafontressortirmafierté.—Bonvent!Nousfairecohabiterétaitunemauvaiseidée,tulesavais,alorsnevienspasteplaindre

maintenant.—Décidémenttunecomprendsrien…Elleestamoureusedetoi,abruti!Jeresteinterditquelquessecondes,fixantLolasansréagir.—Deuxheures,Ben.Faislebonchoix.Lolasedétourneetquittelapièceaussivitequ’elleyestentrée,mejetantundernierregardlourdde

menaces. Jeme laisse tomber dans le fauteuil,me tirant les cheveuxpourme faire réagir.Lamise en

scènedeLolam’aépuisé,commesij’avaisbesoindeçaencemoment!—Putain!Monpoingcogneviolemmentsurlebureau,faisanttomberlesderniersstylosquiavaientéchappéàla

bourrasqueLola.Ellem’ai-me.Nouveaumensongeoupremièrevérité?Jesuistellementremontéquejenesaismêmepascequeje

préfèreàcet instant.C’estdesconneries !Etpourtantcesdeuxpetitsmots lourdsdesens tournentenboucledansma tête.Monrythmecardiaques’accélère.Commeun foutuautomatisme, je récupèremonportablequigîtsurlesol,hésiteentrelefracassercontrelemuretaccéderàcebesoinridiculedesavoir.Çamebouffe.Ellem’aime.Ledoigtsurl’écran,jesecouelentementlatête,dérape.Lapressionmonteàmesure que les tonalités s’enchaînent. Forcément, elle ne me répondra pas ! Je ferme les yeux, merecentre.C’estmieuxainsi…LadétressedeLolamepercute la tronche, je suis largué.Soupir. Pourelle…J’envoieunmessageàZoé.Moi:T’enaspasmarredefuir?Arrêtedetevictimiseretreste.PourLola.Je fixe l’écran. Pas de réponse. Rien d’étonnant. Elle a mérité tout mon mépris après tous les

mensonges qu’elle m’a servis mais je ne souhaitais pas pour autant qu’elle s’en aille. Comme uneimpressiondedéjà-vu,leremaked’unfilmpourri.UnescènemerdiqueoùJaydenatellementfaitsouffrirLolaqu’elleachoisidequitterlepays.Souriresarcastique.JesuisJay.Zoé:Vatefairefoutre,j’aiaucuncompteàterendre!Biensûr…Jem’attendaisàquoi?Mesmâchoiresseserrent,mesdoigtssecrispentsurlacoquedu

téléphone.J’aifaitensortequ’ellemedéteste,jedevraisêtresatisfait.Alorspourquoicen’estpaslecas?Toutçac’estàcausedeLolaetdecequ’ellen’auraitjamaisdûm’avouer.Ledoutemesaisitànouveauetmetordlestripes,m’obsède.J’aibesoindesavoir!S’ilexisteuneinfimepossibilitépourquetoutenotrehistoiren’aitpasétébâtiequesurdesmensonges,jesuisprêtàlasaisir.Moi:Unequestion,aprèslibreàtoidefairecequetuveux.Maiscettefois,jeveuxlaVÉRITÉ.Es-

tuamoureusedemoi?Lesyeux rivés surmesmots, je regrette aussitôt de les avoir envoyés.Nonmais franchement, c’est

quoi cette question à la con ? Soupir. Dans le genre plus gland, tu meurs ! Prêt à balancer monSmartphone,ilvibredansmamain.Zoé:Quandonestaussifrigideduculqueducœur,onnepeutpastomberamoureuse.Bordel!Elleretournemesmotscontremoietdevinantcequ’elleapuéprouver,jeperçoispeuàpeu

combienj’aipulablesser.Déstabilisé,mespoucess’activentàluirédigeruneréponse.Moi:Mesparolesontdépassémapensée, tusais trèsbienquejen’enpensaispasunmot!Bon

sang,Zoé,réponds-moi,es-tutombéeamoureusedemoi?Une,deux,troisminutes.Mesdoigtstapentfrénétiquementlamesuresurlebureau,leregardvissésur

l’écrandemonportable.Rien.Quedalle.Nada.Auboutdedixminutes,jenetiensplusetluienvoieunderniermessage.Moi:C’esttoilalâche.Situpars,necomptepassurmoipourvenirtechercher.Larageauventre,jepoussemontéléphoneloindemoi.Ellenerépondraplus,sonfichucaractèrea

toujoursledessus.J’enlèvemonserre-têteetmemasselecuirchevelu.J’ailecerveauenvrac…—Tellementfaciledesebarrer,putain!Mespoingsseserrentdansmescheveux,jetireàm’enfairemal.Etmaintenantjefaisquoi?Mesyeux

fontdesva-et-viententremonordinateuretmonportable.Travailleretoublier?Connaîtrelavérité?Zoé…Pourquoij’enrevienstoujoursàelle?Peut-êtreparcequelepoignardqu’ellem’aplantédansledosesttoujoursfichéenmoi,ouquel’odeur

desonparfumsurmonoreillerm’empêchedel’oublier…ouparcequelafaçondontjel’aidégagéedechezmoimelaisseungoûtamerenbouche.Impossible.Jemelèvebrusquement,arpentelapièce,lesmainstoujoursfourréesdansmatignasse.Je

doisfaireunchoix,maisvite.Luifairedumalautantqu’ellem’enafait…Maisladétressequej’ailuedans ses yeux quand je lui ai balancé toutes ces horreurs reste ancrée sous mes paupières. Je peuxentendrelatrotteusedemamontremenarguer,merappelerqueletempsestcompté.Jenedevraismêmepasm’ensoucier,maisc’estplus fortquemoi…Commentelleva? Jecroisque j’aiété trop loin, jem’enveux.Marage,mafrustration,toutsechevauchedansmatête.—Etpuismerde!Jerécupèremonportable,mesclésdevoitureetfoncedroitdevant.Incapablederesterenplacepour

attendre l’ascenseur, je dévale les escaliers. Jeme retiens de courirmême si je n’ai plus de temps àperdre.Lecompteàreboursacommencé.Jedoislastopper.Dansunedernièretentative,jeluilaisseunmessagevocalsursonrépondeur.—Zoé,neprendspasceputaind’avion.Tunepeuxpaspartirsansqu’onseparle.J’ouvre laportière, jette le téléphonesur lesiègepassageretdémarre.Lemoteurrugit, jem’engage

dans l’artère,mesdoigtssecrispentsur levolantet j’écrasemonpiedsur l’accélérateur.Moinsd’uneheurepourtraverserlavillebondée,latrouver,lafairechangerd’avis.—Avance,connard!Jeklaxonne,hurlecontretouscescrétinsquisesontpassélemotpourmeralentir.J’éteinslamusique,

meconcentresurlafiledevoituresquejedoubleuneparune,roulantbeaucouptropviteetpourtantpasassez.Bordel, je suismalbarré ! Jeme range justeà temps, avantque le feunepasseau rouge.Monregardbraquédessus,jeperdspatience,mesdoigtspianotentnerveusementsurlecuirduvolant.Quandla couleurvire enfin auvert,mespneus crissent sur lebitume, jeprendsunegrosse accélération, faissortirleschevauxdemonV8etavalel’asphalte.Àl’intersection,jemedéportebrutalementsurladroiteen direction de l’aéroport. Attends-moi, Zoé, j’y suis presque ! La route est encore moins fluide. Jeslalomeàgauche,àdroite,poussecertainsvéhiculesàsedécaler.Lesyeuxplissés, je regarde leplusloinpossiblepourappréhenderlesobstacles.L’aéroportestlà,justedevantmoi.Soudainmonportablesonne,mesortantdematranse.C’estelle!Jetendslebraspourattrapermontéléphonemaisiln’estplusàsaplace.Avectouteslesembardées,iladûtomber.Lesyeuxrivéssurlaroute,jemepenche,chercheàtâtonssurlesol.Lavoituredevantmoipilebrusquementetinstinctivement,jeviresurlavoied’àcôté.Lesoufflecoupé,lesdeuxmainssurlevolant,jetentederedresserlesrouesmaisunvéhiculearriveenface et je donne un autre coup de volant pour l’éviter. Cette fois je perds le contrôle. Le poteau serapprochedangereusementdemoisansquejepuisseréagir,macaissedérapeet je lepercutedepleinfouet.Lesbrastendus,jefermelesyeux,impuissant.Unbruitdetôlesfroissées,unchoc,lesairbagsquisedéploient,puisplusrien.Lecœurauborddeslèvres,jerelâchel’airbloquédansmespoumons,expirebruyamment.Lesilence

soudainme fait rouvrir lesyeux.Lebâtiment est juste en facedemoi, à cinqcentsmètresàpeine. Jetremble,j’aimalàlatête.Quandjemefrottelevisage,destracesdesangtachentmesdoigts.L’impactadûêtreviolent.JeviensderuinermaPorschemaisc’estletempsécouléquimefaitpartirenvrille.Plusquedixminutes!J’arrachemaceinture,m’extraisdel’épavepliée.Monpoulsbatcommeundératé,la

terretanguemaisjefonce,portéparl’adrénalinequipulsedansmesveines.Lesyeuxfixéssurlesportescoulissantes, je tape le sprintdemavie.Allez,plusquequelquesmètres ! J’ai le soufflecourtetdesgouttesdesueurmélangéesausangquicoulentsurmonvisagequandj’arriveenfindanslehall.Jedoisavoirl’aird’unfou.Lespassantss’écartentetsecramponnentàleursvalisesenmedévisageant.Rienàfoutre.Leregardenl’air,jecherchesurlespanneauxd’affichagelevolpourParis.Jelerepèrequandilpasse au rouge : hall 4, porteE–départ imminent. Je regarde autourdemoi, vois ce sasdontonmerefuseral’accèssanscarted’embarquement.Trouveunesolution,Harper,t’aspasfaittoutçapourrien!Uncoupd’œilvers l’accueil et je respire enfin. Je cours, bouscule lesgensdans la filed’attente etarrivedevantlecomptoir.Desreprochesfusentderrièremondosmaisjenem’ensouciepasetdégainedéjàmacartebleuedevantl’hôtesseavantqu’ellenepuisseréagir.—Unbilletpourunembarquementimmédiataudépartduhall4,s’ilvousplaît.PourParisaumeilleur

descas!Perplexe, elleme fixe comme si j’étais un taré échappé de l’asile. Je prends surmoi, tente deme

maîtriser.OK,monapparencen’inspirepasconfiance,mademandeparticulièreencoremoins.— Écoutez, je sais très bien ce que je fais. Je comprends que vous puissiez me prendre pour un

malade,etquevoussoyezprêteàappelerlasécurité,mais…Merde!Onperddutemps!Je…Jeveuxjusteunbillet,passerlesasetretrouverlananaquejesuisàdeuxdoigtsdeperdre.Jemecontrefousduprix,dufric,j’enai!Ellefroncelessourcils,samainquiglissaitnerveusementverslecombinéserétracted’uncoup.—Vousêtesprêtàacheterunbilletjustepourtraverser!Sérieusement?Monregardfichédanslesien,jeluitransmetstoutemadétermination.—C’estexactementcequej’aidit.Peuimporteladestination.Expédiez-moienChinesiçapeutvous

faireplaisir,faites-moipayerdeuxplaces,unepremière,unebusiness…J’en.N’ai.Rien.À.Foutre!Jevousdemandejustedeprendrecettecarte,dedébiterlemontantdevotrechoix,etd’éditermonbillet.Unsourireintriguésedessinesursonvisage.—Vousdevezvraimentl’aimer…Encore cesmots quimepercutent la tronche sans que je puisse en interpréter le sens.Tout ça peut

attendre,pourlemomentilfautjustequejelavoie,avantqu’autourdemoitoutsefracasse.Lamaindel’hôtessemetendenfinlesésame.—Parisavaitl’airdevousplaire.Vousavezuneplacesurlevoldecesoirmêmesijesupposeque

vousnousaurezquittéd’icilà.Prisd’uneprofondegratitude, jemepencheau-dessusducomptoir, regardesonbadgeet l’embrasse

surlajoue.—Linda,vousvenezdemesauverlavie!Sansplusattendre,jezigzagueparmilafoule,passel’enregistrementenuntempsrecordetfoncevers

leportiquedesécurité.Monsangpulsedansmesartères,cognedansmestempes.Soudainunesilhouettefamilière attiremon attention.Une blonde coupée à la garçonne tire une valise. Elle est de dosmaiscommentnepaslareconnaître?Monrythmecardiaques’emballeetjeneréfléchisplus.Leregardfixésurcettenana,pourqui jesuisprêtàmefoutredans lamerde jusqu’aucou, jedépasse tout lemonde,reprends ma course. Elle continue son chemin sans savoir que je suis là, se dirige vers le posted’embarquement.Ellevapartir.Merde!Jefranchisleportique.Desbipsrésonnent,onmerepousse.—Voschaussures,votreceinture!

Laferme!—Zoé!Mon cri résonne dans la salle. Lamasse devantmoim’empêche de passer.Des regards curieux se

tournentversmoi,lesienresteconcentréailleurs.Allez,Zoé,regarde-moi,jesaisquej’aidéconné,mais,s’ilteplaît,regarde-moi.—Monsieur,dernieravertissementaprèsvousserezforcédemesuivre.Jevousdemandedereculer,

d’enlevertoutobjetmétalliqueenvotrepossessionetdeleoulesdéposersurletapis.Nosregardssepercutent,jeserrelesdents.—Écoute,jeveuxjustepasseretparleràlananaquetuvoislà-bas,avantqu’ilnesoittroptard.C’est

tout ce que je demande ! Après si tu me prends toujours pour un putain de terroriste, promis, je telaisseraimetripoterautantquetuveux.—Ehbien,faislaqueuecommetoutlemondeetjeviendraitetripoterquandtontourviendra.Respire,Ben.Calme-toi,c’estpaslemoment.—Zoé!!!J’arrêtedemedébattrequandenfinelle se tourne,que sesyeux seposentenfin surmoi.Moncœur

flanche,jevoissonvisagesedéformerenuneminededégoûtavantqu’ellenedisparaisseparuneporte.Retourné,paumé, je recule.Cette femme…cen’étaitpasZoé.Comment j’aipu laconfondreavecuneautre?Maissurtoutsicen’estpaselle,oùestlavraieZoé?Retouràlacasedépart.Chaussures,ceinture,portablesurletapisetjepasseleportique.Desmains

courent surmes flancs,partentdansmespoches, cherchent jene saisquelle arme.Alorsque JESUIScetteputaindebombeprêteàexploser!—Bonvoyage!Sourirehypocritedel’autreenfoirédeG.I.Joe.Monpoingmedémange,maisjetrace.Hall4.PorteE.

Jejurequejen’aipasfaittoutçapourrien,quejevaislaretrouver,c’estpaspossibleautrement.—ZoéPerez…J’auraisbesoindesavoirsiZoéPerezaembarquésurlevolpourParis,s’ilvousplaît

!L’hôtesse relève la tête de son écran et esquisse un mouvement de recul. Ses yeux s’attardent un

momentsurmonvisage,machemiserougiepar lesangavantdesereprendreetd’affichersonmasqueprofessionnel.—Jesuisdésolée,monsieur,maiscegenred’informationestconfidentiel, jenesuispashabilitéeà

vousfourniruntelrenseignement.—Trèsbien…Danscecaspouvez-vousmediresitouslespassagerssontmontés?Jerespirelentementpournepasmontrermonétatdenerfsetluiadresseunsourireblancdeblancpour

l’amadouer.Unpoilagacée,ellemerépond:—Non,ilyaeudeuxdésistementsdedernièreminute.EtcommentjefaispoursavoirsiZoéfaitpartiedel’und’eux?—Danscecaséchangezmonbilletpourquejepuissemonterdanscetavion.Jeposemacarted’embarquementprévuepourcesoirsursoncomptoiravecmonpassgrandvoyageur,

lesésamequiouvretouteslesportesici.Àpeineuncoupd’œilsurcequejeluiprésentequ’ellebalaiemademandeenmelesrendant.— Monsieur, je suis désolée mais je viens de clôturer le vol et j’ai annulé les deux dernières

personnes.Ilvafalloirpatienterjusqu’auprochain.Bordeljevaisdégoupillersiellen’ymetpasdusien.Mamaintapelourdementsurlesdocumentsque

jepoussedenouveauverselle.Harper,t’asplusrienàperdre,tenteletoutpourletout.Jemepencheverselle,fixesonprénomsursoninsigneetplongemonregarddanslesien.—OK,Karen, jemedoute quemes problèmesperso ne vous intéressent pas et quem’aider est le

cadetdevossoucis,maisfaites-moiunefaveur,laissez-moiprendrecevol.J’aiavecmoiunbilletpourleprochaindoncjesuisobligatoirementsurvotrelisted’attente.Vousdevezpouvoirfairequelquechosepourmoi, vous êtesma dernière chance… Il y a une femmedans cet appareil que je dois à tout prixrejoindre.Impassible,ellemeregarde.Mespupilless’agitent,cherchentàcaptersaréflexion.Unevibrationdans

mapochedétournemonattentionetjepriepourquecesoitZoéquiaitchangéd’avis.Jefourremamaindansmonjeanetenextraismonportable.Blue.Encore.Çam’étonnaitaussiquelachancetourneaussirapidementenmafaveur.Faceàmoi,l’hôtessesoupire,pinceleslèvres,réfléchitsilencieusementavantd’afficheruninfimesourire.— Je vais le faire pour vous. Je ne sais pas pourquoimais vousm’inspirez l’envie de vous aider.

J’ouvre le vol, je vous préviens, vous avez cinq minutes. Allez voir ma collègue au comptoir pouréchangervotrebillet,jevousattends.Soulagement total, j’ai enfin réussi. Deuxième vibration dansmamain. Troublé par le contenu qui

s’afficheàmoitié,jeglissemonpoucesansréfléchirsurl’écranquisedéverrouille.Jedeviensblême.Uncoupaucœur,desmotsquimepercutent,mebrisentendeux.—Monsieur?Jerelève lentement lesyeuxvers l’hôtesse,perçoisdavantageses lèvresbougerque jen’entendssa

voix.Monbilletdansunemain,letéléphonedansl’autre,elleattendjenesaisquoidemoi.—Vousvouleztoujoursprendrecevol?

Àsuivre…

Chapitre1

Il était sept heures lorsque j’arrivai dans la zone industrielle du port de Seattle, ce matin-là.L’embarcadèrefourmillaitd’hommesenuniformes,etdedockersquiobéissaientàleursinstructionspourdéplacerd’énormescontainers,allantetvenantentrelesnaviresetlequai.LePercivalLowellm’apparutenfin,amarréaudernierappontement.Encoreplusimpressionnantque

je l’avais imaginé. Ses quarante mille tonnes d’acier s’élevaient à travers la brume et rendaient lesvaisseauxalentourridicules,lesreléguanttousaustatutd’embarcationsdeplaisance.Lequartier-maîtredesecondeclasse,quiconduisaitlajeepdanslaquellej’avaisembarquéàl’entrée

de la zone sécurisée du port, me mena au plus près du monstrueux navire, jusqu’à la passerelle quipermettait d’y accéder. Tandis qu’il déchargeait mes deux énormes sacs et ma valise, j’observais lemastodonte,bouchebée.J’avais vingt-six ans, et j’étais jeune lieutenant, ingénieure en météorologie pour la Navy. Mon

homologue sur le navire avait chuté d’une des échelles du porte-avions qui reliaient les coursives dubâtimententreelles.Sonaccidents’étaitsoldéparuntraumatismecrânienetunedoublefracturedutibiaetdupéroné.Messupérieursdelabasenavaled’Everettavaientpenséàmoipourleremplaceraupiedlevé.Les

primes offertes auxmilitairesmobilisés enmer étaient conséquentes. J’aimais changer d’air, j’aimaisl’océan,alorsj’avaisaccepté.Aujourd’hui,j’intégraislasectionchargéed’établirlesdossiersmétéonécessairesaubondéroulement

delamissionencours.Monaventure allait durer troismois, et contempler lePercivalLowell« en chair et en os »me fit

l’effetd’unedouchefroide.Aupieddelapasserelle,unhommeentreilliskakiet tee-shirtnoiràmancheslonguesm’adressaun

signedemainhésitant.Jehochailatêtepourluiconfirmerquej’étaiscellequ’ilattendaitetmedirigeaiversluiavectoutmonbarda.Nousnoussaluâmesselonlesrègles.— Bonjour, lieutenant, je suis le maître principal Andrew Ganipy. On m’a chargé de vous

accompagneràbordetdevousinstaller.Lescheveuxpresqueblondplatinedececolosseétaient taillés trèscourts, etenduitsdegelqui les

rendaitbrillantssouslespremiersrayonsdusoleil.— Laissez tomber l’étiquette ! Je suis encore en civil et c’est moi qui suis épatée par tout ça !

répondis-jeendésignantlenavirederrièrelui.Etenriantsouscape…—Vousmesuivez,lieutenant?—Ai-jelechoix?Amuséparmacandeur, ilm’adressaunsourireséducteur,quiallaitbienau-delàde lacourtoisiede

rigueurpourunpremiercontact.Celamerenditméfiante.J’avais tout à prouver à chaque fois que je mettais les pieds sur une nouvelle base, et devais

régulièrementcomposeraveclespréjugésetlesréactionsmachistesdecertains.Celafinissaitparpasseraufildessemaines.Letempsdemettreleschosesauclairetdem’imposer,toutenévitantdecastrerlesrécalcitrants.J’étaisunegrandebrunetteauxyeuxbleufoncétirantsurlegrislesjoursdepluie, jeune,pas tropmal fichue et libre d’esprit ; on me proposait parfois davantage qu’un café.Mais je ne melaissaisjamaisallerdanslesbras,parfoistrèsmusclés–etsouventtentants–,decesmessieurs.Plusaprèsm’êtresérieusementbrûlélesailes,unefois.Ganipyempoignamesdeuxsacs,memontrantainsiqu’illessoulevaitavecunefacilitédéconcertante.

Sceptiqueetréservée,jegardaimavaliseetlesuivaidanslenavire,oùlavisitecommença.Jecraignaispar-dessustoutsouffrirduconfinementdeslieux,maismonsupérieuràEverettm’avaitassuréquel’onsefaisait vite à cette promiscuité. Tout en ajoutant que vivre dans un espace exigu n’avait rien d’unesinécure…Jeconstataiavecsoulagementquelescoursivesetcouloirsn’étaientpasaussiétroitsquejelepensais. Les pièces et les cabines que nous dépassions non plus. Il y faisait frais, le système deventilationproduisaitunronronnementsourdetrégulier.Nouscroisâmesunedizained’hommes.Certainsm’observaient avec insistanceavantdedaignerme

saluer,lesautresm’ignoraientoufilaientlelongdescoursives.—Voicilepontprincipal,ditenfinGanipyquandnousarrivâmesenhautd’ungrandescalier.Dansla

deuxièmegalerie, vous trouverez la sallede contrôle et, tout au fond, lequartierdespilotes avecunesalledeconférencesoùsetiennentlesbriefings.Jerelevaidesindicesautourdemoiettentaidemesouvenirdequellemanièrenousétionsparvenus

jusque-là,sansmefaired’illusions…Noustraversâmesd’autrescouloirs,empruntâmesplusieursescaliers.Lesnomsdesdifférenteszones

se bousculaient dans ma tête et, malgré mes efforts, j’étais sûre de me perdre lorsqu’il s’agirait decheminer seule.Nousarrivâmesenfindansunegrandepièce,au sommetdubâtiment.Lesmursétaiententièrementvitrés,offrantunevuepanoramiquesurlepontd’envol.Cettefois-ci, leslieuxmesemblèrentplusfamiliers.Unedizained’ordinateursaffichaientdescartes

entroisdimensionsetdessériesdetableauxdedonnées.Unepoignéed’hommesétaitconcentréesurdesreprésentationsducieletdesflotsétaléessurdegrandestables.Nousétionsparvenusdanslasalledetravailoùjeprendraismesordresdeuxheuresplustard:àla

météo,monrepairedurantlestroisprochainsmois.—LieutenantAlexiSnow,voicilelieutenantJermaineRios,annonçasolennellementGanipy.Unhommeàlapeaumateetauxcheveuxnoirdejaissetournaversnous.Quelquesmèchesrebelles

affleuraientàlabasedesesoreilles.Jeluitendislamain.—LieutenantRios…—Pitié!Nousallonsresterenfermésdesheuresdanscebocal,onlafaitcourte!JesuisJerry.—Etmoi,Alexi.Ilhaussaunsourcil.SeprénommerAlexietêtreunefilleétaitunechose,s’appelerSnowetbosserdanslamétéoenétait

uneautre…Jem’attendaistoujoursaupirequantauxsobriquetsridiculesdontonm’affublait.—Salut,Alexi.On se retrouve dans deux heures, quand le capitaineVanAllen sera remonté. Sans

remettreenquestiontescompétences,ilyauntasdeprocéduresàingéreretquisontspécifiquesàcequenousfaisonsici.End’autrestermes:ilyadupainsurlaplanche,finit-ilpardireenriant.

Le ton de sa voix n’appelait aucune hésitation et sa poignée demain était franche ; je l’appréciaiimmédiatement.—Jenevienspasenvacances.Jemetiensprêteàtoutapprendre.—Alorsnousallonsnousentendre,répondit-il,satisfait.Nousprîmesvitecongédu lieutenantRios,descendîmesànouveauunescalier,pouren remonterun

autre,etarrivâmessurlepontd’envol;lecœurdesopérationsmenéessurlePercival,l’immenseplate-formed’oùdécollaientetatterissaientleschasseursTroisF/A-18SuperHornet étaientalignéslelongdubastingage.Deshommess’activaientautourde

l’und’euxpourledirigerversl’ascenseuràcielouvertquilemèneraitjusqu’auhangar.Jenemanquairienduspectacle, toutensuivantGanipyqui longeaitunepiste.Aupiedde lagrandetourdecontrôle,deuxhommess’intéressaientauxmarquagessurlesol.—LecapitaineVanAllenn’estpasdanslecoin?lesapostrophalemaîtreprincipal.Celui qui nous prêta attention était presque aussi grand quemoi, et plus jeune.D’origine asiatique,

commeentémoignaientsesyeuxbridéscouleurnoisette.Leregardcurieux,puismalicieuxqu’ilposasurmoimelaissapenserqu’iln’étaitpastimideniréservépourautant.Jusqu’àcequ’ilaperçoivelesgalonssurmonépaule…— Lieutenant Snow, voici le quartier-maître de seconde classe Pierce. Le lieutenant Snow va

remplacerTilmoreletempsdesaconvalescence.Décontenancé,ledénomméPiercemesaluacommeleprotocolel’exigeait.Jebrisaicettesolennitéen

luitendantmamain.—AlexiSnow.Ilsourit,rassuré,maissurtoutenchantéparcechangementdeton.—JesuisKenneth.Bienvenuesurnotrecroisière,répondit-ilenmefaisantunclind’œil.Lesfestivitéscommençaient.—EtVanAllen?s’impatientaGanipyagité.Quelqu’unl’avu?—Comment veux-tu que je le sache, et qu’est-ce que ça peutme foutre ? Je ne suis pas sous ses

ordres,réponditPierceenhaussantlesépaules.Jenesuismêmepascertainqu’ilsoitrentréaubercail.Ganipygrommelaunnomd’oiseau,avantd’avancer.—Àbientôt,lieutenantSnow!lançalejeunehommetandisquejerattrapaismonguide.Bredouillespourlasecondefois.Ganipynousconduisitverslegigantesqueascenseurquicontenaitl’undesHornetaperçusurlepont,et

nousdescendîmesversl’antredesmécaniciens.—Jevaisvousprésenterauxpilotes,lança-t-ilendésespoirdecause.Les seigneurs et princes du navire. Bonne idée : je devais rencontrer ceux à qui j’exposerai

quotidiennementl’étatduciel; leursmanœuvresdépendraientengrandepartiedesbulletinsmétéoquej’établiraiavecmonéquipe.Nous traversâmes une partie du hangar, jusqu’à nous arrêter devant un groupe d’hommes qui

s’affairaientautourd’unautrechasseur.Desmécaniciens,casquessurlesoreilles,s’agitaientautourdesréacteursdel’aéronef,tandisquedeux

hommes–despilotes,àenjugerparleurscombinaisonsbeiges–lesobservaientattentivement.Lebruitassourdissantdégagépar lepuissantappareilme transperça les tympans.Ganipy leur fit signedefaire

1

unepause.Levrombissements’atténua.—Les lieutenants de vaisseauEgor Sachs et TimothyPeyton.Le lieutenant juniorAlexi Snow, qui

prendlaplacedeTilmore,meprésentat-ilauxhommesquis’étaienttournésversnous.Ilseurentàpeineletempsdemesaluerqu’unevoixclaironnantes’élevaau-dessusdenous.—Qu’est-cequel’état-majornousenvoie,Ganipy?Unhommeportantlamêmecombinaisonquelesdeuxautresémergeaducockpit.Ilnepritpaslapeine

dedescendrejusqu’aubasdel’échelleetbonditsurlesol.Sonvisages’illuminalorsqu’ilrelevalatête.— Le capitaine Theodore Drake, lieutenant de vaisseau et numéro deux de l’escadron des Silver

Dragons,annonçaGanipyavecmoinsd’enthousiasme.Grand,brun,baraqué,degrandsetbeauxyeuxvertspétillantsdemalice: j’ignoraisquelesdragons

pouvaientêtreaussisexy…L’autre dragon, cousu sur l’écusson de sa combinaison, paraissait tout droit sorti d’une estampe

japonaiseetmefixaitdesesyeuxmenaçants.—LieutenantAlexiSnow,doubluredeTilmore,continuaGanipy.JetiquaisurlemotdoublureetserrailamainqueDrakemetendit.—Drake!lança-t-il,enjoué.Pourvousservir.—Snow!Pourfairelapluieetlebeautemps.Ilritjoyeusement.Avantd’apercevoirlechargementquejetraînaisd’unétageàl’autredepuisplusd’unquartd’heure.Il

fronçalessourcils.—Besoind’aide?—Jedevraispouvoirsurvivrecinqminutesdeplus…JemetournaiversGanipy.— Van Allen est introuvable et nous avons suffisamment tourné : si vous me conduisiez à mes

quartiers,maintenant?—J’yvenais,Alexi,répondit-il,l’airagacé.Agacé,vraiment?Jenemesouvenaispasnonplusl’avoirautoriséàm’appelerparmonprénom.Aumomentderepartir,Drakesepenchaversmoietchuchotasurletondelaconfidence:—Voustombezàpic.J’aitoujoursrêvéqu’unefemmenousfasselapluieetlebeautemps…Leboute-en-traindeservice.Jen’allaispasm’ennuyer.—Vousvoilàexaucé,Drake.Maisméfiez-vousquandmême…Onditquelesfemmesportentmalheur

àbord,ilsepeutquelamétéodeviennemoinsclémentedésormais.Sesyeuxbrillèrentderoublardise.—Alors,ilmetardequenousappareillions,lieutenant.Unclind’œil,puisilreculaetjepusm’éloigner.Nousrepartîmesdanslesprofondeursdunavireàtraverslesinterminablesgaleries.—Ponttrois?demandai-jeaumaîtreprincipalquandils’arrêtadevantuneporte.—Pontdeux,lieutenantSnow.Couloirsix.Lacrèchedesofficiers.Perdu…

Mon erreur parut l’amuser. Il poussa encore une porte, nous avançâmes dans une aile à l’écart desautresdortoirs.— Le commandant tient à votre tranquillité. Vous partagerez les quartiers de deux autres femmes,

officierscommevous.Chacunesacabine,maislasalledebainsestcommune.Ildésignaunepremièreporteavantdes’arrêterbrusquementdevantuneautre.Jeletrouvaibeaucoup

moinsprofessionnelquand il l’ouvrit pourm’inviter àpénétrerdans lapetitepièce. Je ledépassai enignorantsonsourireencoinetsonregardperçant.Une couchette aux draps immaculés, un bureauminuscule et une chaise. Rien d’original,mais cela

suffirait.Je laissai tombermonbagagesur lesol.Ganipyposamesdeuxvalisesavecplusdedélicatesse.Je

m’assissurlematelasetsoufflai.Était-ceunebonnechosedenousavoir logé lesunesàcôtédesautres?ÀEverett, j’avais tentéde

collaboreravecdeuxfemmesofficiantdansmonunité,àunand’intervalle.Jen’étaispasfutéequandonsefrottaitàmoid’unpeutropprès;lespimbêchess’étaientdécouragéesavantmoietavaientdemandéàintégreruneautreéquipe,melaissantseulmaîtreàbordparminoscollèguesmasculins.—J’espèrequevousvousplairezavecnous,lieutenantSnow.—Jel’espèreaussi,soupirai-je,songeuse.— Nous appareillons dans trois heures. Cela vous laisse le temps de faire connaissance avec

l’équipage, et d’explorer les lieux.Même si je doute qu’il soit possible de faire le tour complet dubâtimentensipeudetemps.Jemerembrunisdavantage.—Jecroisqu’unbonmoismeseranécessaire…—Sivous avezbesoindequelque chose,n’hésitezpas : je serai dans les entrepôtsqui jouxtent le

hangar.Sontonétaitdoucereux,ilnemequittaitpasdesyeux.Lessiens,d’unbleunuitsingulier,étincelaient

danslapénombredelacabine.Tropzélépourêtrehonnête,ceGanipy.Sesmanièresnemeplaisaientpas.Lorsqu’illouchasansdiscrétionsurmamaingauche,jefinisparlefusillerduregard.—Merci,quartier-maîtreGanipy.—C’estmaîtreprincip…—Jemedébrouilleraisansvous,lerembarrai-jepourmettreleschosesauclair.Ilbougonnadeuxmotsenguisedesalutetquittalachambre.Jem’écroulaisurlelit,évaluantaupassagel’étatdumatelas,etfislebilandecettepremièreheure.Mes homologues semblaient plutôt avenants. Rios allait enrichir mon domaine de compétences. Je

verraisvolerlesmeilleurspilotesdupays.Celaauraitpuêtrepire.Il neme restait plus qu’à rencontrer mes voisines de chambre. Et mon supérieur, le capitaine Van

Allen,quej’avaispresquefiniparoublier.C’étaitdebonaugurequeseshommesparaissentsidétendus.L’introspection s’arrêta là et je me résignai à déballer mes affaires : les uniformes, les vêtements

réglementaires,matenuedecérémonie.Lepetitplacardétaitjusteassezgrandpourlescontenir.Encherchantmeschaussuresdansunautre sac, je retrouvaimes sous-vêtements, écrasésentredeux

livres:desculottesnoiresetblanchesencoton,assortiesàdessoutien-gorgeaussiconfortables.Lepeu

dedentellesquejepossédaisétaitrestéàterre,aveclesouvenirdemesderniersamants.Jelespoussaiaufonddelavaliseenattendantdeleurfaireunemeilleureplace.Devantlemiroirplaquéderrièrelaporte, jeredressailecoldemacombinaison–d’unbleumarine

pastrophideux,pourunefois–,emprisonnaimescheveuxdansunchignonserré,avantd’appliquerunenoisettedebeurredekaritésurmeslèvres;jerentreraisdanslesbonnesgrâcesdecesmessieurssanspasserpouruneallumeuse.Enfin,jesaisisunevesteetquittaimacabine,àladécouvertedemonnouveauterraindejeu.J’erraiuneheureetdemiedanscelabyrinthe.Jesympathisaiaveclescuistotsqui,magouailleetmon

sensdelarepartieaidant,enprofitèrentpourmemontreroùl’équipageplanquaitlesbouteillesd’alcoolàl’insu–relatif–desgradés.Puisjebusuncaféencompagniedelachefderangchargéedegarantirunservice impeccable auprès des officiers qui déjeunaient au mess. Je ne lui promis pas de revenirsouvent…Enquittantlazonedévolueàremonterlemoraldestroupes,jeconsultaiundesplansplacardéssurle

muretrepéraimaprochainedestination:lesbureauxdelamétéo.L’étroitessedecesboyauxauxparoisd’acierm’oppressaitenmêmetempsqu’ellemedonnaitchaud.

Lavestequej’avaisemportéem’embarrassaitdéjà:ilmefallaitregagnermacabineavantderetournersurlespontssupérieurs.Jetournailongtempssurlepontdeuxavantderepérerlesdortoirs,puisnotreespaceprivé.Jefronçailessourcils:lesasnem’avaitpasparuaussigrandlapremièrefois.Parcequeleplafonnier

étaitéteint,etlecouloirplussombre?Jemedirigeaiverslaportedemacabine.Jeposailamainsurlapoignée,ouvrisfranchement,etme

figeai…Bordeldemerde.Ilyavaitdevantmoiunhomme.Unhomme.Nu.Etqui…quisortaitdeladouche,bonsang!Le dos tourné, il frottait ses cheveux humides dans une serviette. Deminuscules gouttelettes d’eau

roulaientsursesépaules largesethâlées,sursesbicepsetsursondospourvudemuscles longilignes.Ellesdégoulinaientaussisurl’arrondidesesfessesfoutrementbiengalbées.Unemerveil…Non!Unecatastrophe!Surpris parmon arrivée fracassante, il se retourna brusquement et je fus foudroyée par l’éclat bleu

acierdesesyeuxenamande.Frappéeparlabeautédesonvisageauxlignesanguleuses:despommettessaillantes,unnezcourtetdroit,auxquelsdeslèvrespleinesconféraientnéanmoinsuneétrangedouceur.Sabouches’ouvritetle«qu’est-cequevousfoutezlà?»qu’ilaboyamefitsursauter.Paralysée, je continuai à fixer les obliques de ses abdominaux descendant bas, très bas… jusqu’au

saintdessaints.Merde,alors…Latempératuregrimpadedixdegrés.Peut-êtremêmedevingt.Et…etaprès?—Dégagez,bordeldemerde!finit-ilparhurlerenprécipitantsaservietteautourdeseshanches.

Etsursonsexe…C’estàcemoment-làquejeréussisenfinàclaquerlaporte.Lecœurbattantlachamade,jecourusdroitdevantmoi,dévalailepremierescalieretm’arrêtaifaceà

denouvellesrangéesdechambres.J’avançaidanslecouloiretreconnus,cettefois,mesquartiers,puismachambre.Jeposaimavestesurlelit,essouffléeparmacourse,troublée–etmortifiée…Jen’euspas le tempsdemelamenterdavantage : ilnefallaitplus tarder !J’attrapaimonpaquetde

cigarettes–fumercaracolaitdésormaisentêtedemespriorités–,etfilai.Jetournailongtempsetatterris,parhasard,danslasalledesmachines.Unmatelotproposadem’aider,

jelesuivisjusqu’aupontprincipal.Unautredutmeconduirejusquedevantlaportedesbureaux…J’étais terriblementen retard, terriblementnerveuse.Celanepouvaitpasêtrepirequemapremière

déconvenueauxétagesinférieurs?Jefrappaipuisentrai.Réflexionfaite,çal’était,pire…Apocalyptiquemême.J’ignorai tous les regards curieux et fixai, terrorisée, l’homme penché au-dessus de la plus grande

table,aucentredelapièce,lesmainsappuyéesdechaquecôtéd’unegrandecarte.Lui.Plushabillé,moinsencolère.Unemèchedesescheveuxauxrefletsdoréstombasursonfront.—LieutenantSnow,vousvoilàenfin!s’exclama-t-ilenseredressant.Unsourirenarquoiséclairasonvisage.JerryRiossetenaitàsescôtésetmelançaitdesregardsinquiets.Jefixaibêtementlafeuilledechêne

doréecousuesurlacombinaisondel’angeblondenpriantpourquelesols’ouvreàmespieds.Cette cabine isolée, confortable, était occupée par un haut gradé. Un capitaine de corvette. Mon

supérieur.Ilavaitfalluquejetombesurlui.Moi.Jemeredressai,cramoisie,etlesaluaicommeilconvenait.—Repos,lieutenant.Jedécelaiunbrindemoqueriedanssavoix,etrestaiimpassible.Dumoins,essayai-je…JerryRiosseraclalagorge.— J’expliquai au capitaineVanAllen que le vent d’ouest risquait d’être plus fort que ce que nous

avionsprévuaupetitmatin.Nousallonsêtresecoués.Lecapitaineenquestionnemequittaitpasdesyeux.Ilmetoisad’unregardsévèrequimefitfrémir.—Laissonscet aspectdecôté,Rios. Jecroisque le lieutenantSnowa suffisammentété…secouée

aujourd’hui,railla-t-il.D’accord,jel’avaismérité.Le lieutenant Rios hocha la tête avant de s’éloigner vers un bureau voisin. Il y ramassa un tas de

feuillespuisrevintauxcôtésdeVanAllenquimefitsigned’approcher.Jememaudisderougir–despommettesàlaracinedescheveux…Jeme plaçai prudemment à sa droite. VanAllen se retourna aumêmemoment vers un homme qui

l’interpellait,avantderevenirànosaffairesenfrôlant–délibérément?–mahanche.

—Nousallonsavoirbesoindevoscompétences,Snow,lança-t-ilavecinsolence.Quelquechosemeditquevousexcellezdansl’analysedenomenclaturedesplansdebâtiment.J’oseespérerqu’ilenestdemêmepourlescartesmaritimes.Jelefixai,interdite.Apocalyptique.C’estcommeçaquemonaventuresurl’USSPercivalLowellcommença.Danslaconfusiondessenset

l’impuissance.Danslapromessedelendemainshouleux.

Notes1. Le McDonnell Douglas F/A-18 Hornet est un avion de combat multi-rôle américain, initialementdestinéàêtreembarquéàborddeporte-avionsdel’USNavy.

Chapitre2

Lorsquearrival’heurededéjeuner,jedirigeaiJerry,peuhabituéàfrayeraveclesautresmembresdel’équipage,versleréfectoireprincipal.Nousfîmesunpremierbilandecetteépouvantablematinée.—TuavaisdéjàeuaffaireàVanAllen?mequestionna-t-ilenengloutissantuneboulettedeviande.Il

avaitl’airencolèreavantmêmequetutepointes!Non, jen’avaispaseu leprivilègedecroisercebelenfoiréauparavant,etm’enserais souvenuesi

celaavaitétélecas!Laséancedetravailavaitétéàlahauteurdecequej’avaiscraint.Monnouveausupérieurn’avaiteu

decessedereprendreetcritiquermesinterventions.Jetournaimafourchettedansuneassiettedespaghettispeuappétissants,dansunsenspuisdansl’autre,

hésitantàparler.Jerrymescrutaitdesesgrandsyeuxnoirs,l’airbienveillant.J’avaisbesoind’unalliédanslatourde

contrôle, ou je ne tiendrais pas trois mois, aussi je décidai d’être franche dès le début de notrecollaboration.—Jel’aisurprisdanssachambre.Jebusunegorgéed’eaufraîcheavantdeluilivrerl’informationprincipale.—Nu.Ilmanquades’étouffer.—Tuasquoi?—Nem’obligepasà le répéter.C’estdéjàbienassezpéniblecommeça…gémis-jeenfermant les

yeux.—Mais,enfin,commentas-tu…Etàpoilenplus?finit-ilpars’exclamer.—Quiça,àpoil?demandaTheodoreDrakequiarrivaitprèsdenous.Hilare,iltiralachaiseprochedemoipours’installer.Sonplateautombaavecfracassurlatable.—MissMétéoadéjàdeschosesàcacher?clama-t-ilensetournantversmoi.MissMétéo…Drakeavaitannoncélacouleurdanslehangar.—VanAllenl’apriseengrippe,réponditJerryàmaplace.Jeleremerciaid’unregardassassin.—Et tuas l’intentionde tedéshabillerpourqu’il te foute lapaix?demandaDrake, labouchedéjà

pleine. C’est à cause de sa gueule d’amour, non ? Elles tombent toutes pour sa putain de gueuled’amour…Mauvaisplan.Cemecestdéterminéetincorruptible.—Jeconfirme,renchéritJerry.J’ajoutequ’ilestmarié.OK.Etalors?—Cen’étaitpaslesujet!rétorquai-jepourlesarrêter.—Mariéàunejolieblondesnobinarde,ajoutaDrakeavantdeporteràseslèvresunecanettedesoda

noirmétallisé.Etçanedatepasd’hier!Jeledévisageai,curieuse.—Tuleconnaispersonnellement?—Pasplusqueça.J’aifaitmesclassesdanslemêmecentredeformationquelui.Ilpilotaitdansla

divisionsupérieure.VanAllenvolait.Cegarsvolait…—Snow!KennethPierce, le jeunehommeque j’avais croisé sur le pontd’envol, venait denous rejoindre. Il

posaunemainsurmonépauleens’asseyantàmagauche.J’étaiscernée.Jemeredressaibrusquementetbondisàcôtédelatable.Lestroishommesmeregardèrent,perplexes.Lesgars,vousêtesdéjàtrèsenvahissantspourunepremièrejournée!—Jevoudraisfumer,m’exclamai-jeenbrandissantmonpaquetdecigarettes.Ilsparurentaussitôtrassurés.—Surlapasserelledupontquatre,réponditJerry.Elleestréservéeauxofficiers.Jen’osaipasluidemanderoùfumaitlecommundesmortelsetmecontentaidesoninformation.—Situsuislecouloirhuitjusqu’aubout,tuarriverasàuneportequimèneàl’extérieur.Encoreunecoursed’orientation…—Etlà,oùonest?demandai-je,navrée.—Pontcinq.Évidemment…—Merci,Jerry.—Snow,netefrottepastropàVanAllen!melançaDrakeavantquejem’éloigne.Onvolecetaprès-

midi.Ilvaêtred’unehumeurdechiensituleprovoques.Leprovoquer?Est-ceque,àunmomentouunautre,celaavaitétélecas?Quantàmefrotteràlui,je

nepréféraismêmepasypenser…Pont quatre. Couloir huit. Je fumerais ma cigarette à la saint-glinglin. Pourtant, à ma plus grande

surprise,jeparvinslà-bassansdifficulté.Lanicotine–plusquelafaim–justifiaitdonclesmoyens.L’entracte fut salvateur. Je tirai de grandes bouffées sur ma cigarette, tandis que l’air marin me

chatouillait les narines.Une brise légère fit voler lesmèches de cheveux que je n’avais pas réussi àcoincerdansmonchignon.Nousavionsquittéleport,sansquejefassemesadieuxàlacôte.Jereverrailaterrefermedansdeux

semaines,etpasn’importelaquelle:nousferionsescaleàHawaï.J’avaisencoretantàapprendre,etàapprivoiserd’ici-là–àcommencerparVanAllen…Rios l’avait décrit comme un parangon de vertu, loin du cliché qui collait à la peau desmilitaires

mobilisésenmer–etdontj’étaislaparfaitereprésentante…Raisondepluspourrentrerdanslerang,etaccomplirmamissionsansfairedevagues.—LieutenantSnow?ÀconditionaussiqueVanAllenetmoinenousretrouvionsplusdansdessituationscompromettantes…Jeserrailesdentsetmeretournailentement.

—Ilmesemblequevousêtestoujourssousmesordres,commença-t-ilavecsarcasme.—Jedéjeunais!—Maissousmesordres,insista-t-il.Uneautrespécificitédelavieàbordd’unporte-avions?m’interrogeai-je,déroutée.—Notremoded’organisationdiffèreunpeudecequevousavezconnuàterre.Tantquejenevousai

pasexplicitementrenvoyéedansvotrecabine,vousnedevezenaucuncasfumer,boireouvousadonneràjenesaisquelleautreactivitésurlenavire.Jefronçailessourcilstandisquelesangbattaitàmestempes.—Jeplaisante,Snow!s’exclama-t-il,avecunsourirediabolique.Enfoiré.Je fus étonnéede levoir allumerune cigarette. Il prit place à côtédemoi, les coudesposés sur la

rambarde,unpiedsurlebastingage.Ilmefixaitdesonregardpâletandisquejeveillaisàsoufflermafuméelàoùiln’étaitpas.—Vousvousêtesengagéeilyalongtemps,Snow?La réponse était dans le dossier qui relataitmes états de service—Quatre ans, lui répondis-je en

fixantunpointimaginairedansleseauxgrises.Avait-ildécidédefairelapaix?—Etvous?Monaudaceneparutpasl’offenser.Ilsourit,jemelaissaiattendrir.—Unedizained’années.Bientroplongtemps…S’ilavait suivi lecursusnormaldepilotedechasseembarquée, réaliséquelques faitsd’armes–et

tenantcomptedesonavancementactuel–,ildevaitavoirtrenteetquelquesannées.—Vousavezsuvousfaireuneplacedansnotrebelleinstitution,reprit-ilnonsansironie.Bravo!Jepestai.—Onm’afaitconfiance,etjesuislà,capitaine.—Etavecunsensdelarepartiecommelevôtre,çanedoitpasêtrefaciletouslesjours.Quiprovoquaitl’autre,là?Jetiraiplusfortsurmacigarette.Imperturbable,ilportalasienneàseslèvres.Ilm’observaittoujours,sesyeuxcouleurdeglacepétillaientd’amusement.—J’espèrequenotrecollaborationserafructueuse,Lex.Ilyavait euAlex,Lexi, surtoutLexLuthordurantmonadolescence.Pireencore, en référenceàma

peaulaiteuseetàmescheveuxébène,onavaitmêmeosémesurnommerSnowWhite!—C’estAlexi!Ilm’éblouitd’unsourireradieuxavantdeseredresser.— Je sais… Briefing à quatorze heures, sur le pont principal. Vous y assisterez avec Rios, pour

comprendredequellemanièrenousvivonssurlePercival.Etilmeplantalà…Peut-êtrequelasituationméritaitd’êtreréévaluée?VanAllenn’étaitfinalementpascetimmondeconnardcanon,prétentieuxetarrogant,maisunconnard

canontoutcourt.Jefiniraisparm’yfaire.Une demi-heure plus tard, j’entrai dans la salle de réunion, l’esprit plus léger. Pas longtemps

cependant…Les regards insistants et railleurs des hommes de l’unité pesèrent lourd surmes épauleslorsquejetraversailapiècepourrejoindreJerryquiterminaitd’écrirequelqueslignessurunrapport.—Alors,cettepausecigarette?demanda-t-ilsansleverlatête.Jesourisintérieurement.—Pasmal…Notreéchangefutinterrompuparl’arrivéedeVanAllen,suivideDrakeetdesautrespilotesentenue.

Combinaison,pantalon,gantsàlamainoudansleurspoches, ilneleurmanquaitplusqueleurgiletdesauvetageetleurcasque.Celamerappeladelointainssouvenirs.—Toutlemondeestlà?Jerryacquiesça.—Jecroisqu’onpeutcommencer,capitaine.VanAllenprit lerapportqueluitenditJerryetseplaçaderrièremoi.Jefussurprisederespirerles

effluvesd’unparfumsophistiqué.—Bonjouràtousceuxquejen’aipascroiséscematin,commença-t-il.Jevousprésenteofficiellement

lelieutenantjuniorAlexiSnow,chargéederemplacerlelieutenantTilmoredurantletempsquedurerasaconvalescence.Onmesaluachaleureusement tandisque jegagnaiunedeschaisesencore libresautourde lagrande

table, lerougeauxjoues.J’avaisbeaunepasavoirfroidauxyeux, jen’endemeuraispasmoinsmalàl’aiselorsqu’ils’agissaitdemeproduiredevantunpluslargepublic.—Jevousdemanded’être indulgents, carSnown’avraisemblablementpas l’habitudede travailler

avecefficacitéetrapidité.Aussi,jevoustransmetsledossierétabliparlelieutenantRiosetsonéquipe,termina-t-ilenfaisantpasseruneliassededocumentsàl’hommeassisleplusprèsdelui.Enfoiré!Etdirequ’ilavaitosémejouerlacartedelabienveillance,pourensuitemetrahiraussilâchement!Jelefusillaiduregard.— Même configuration qu’hier après-midi, à quelques éléments près, poursuivit-il en m’ignorant

royalement.Ventdesud-sud-ouestàdeuxcentcinquantedegrés.Vitessedetrentenœuds.Notezcependantquelavisibilitéhorizontaleestinférieureàneufmillemètres.VanAllencontinualebriefingd’unevoixclaireetautoritaire.Ilavaittoutel’attentiondesonauditoire.

Cethommeétaitunchefné.Avecbeaucouptropdecharismeàmongoût.Lorsqu’ilcédalaparoleàDrake,ilmejetaunregardsévère.Jefulminaietcelaleravit.La session se prolongea dans la douleur quand Van Allen fit encore deux fois mention de mon

incompétence.Lorsquenousnousséparâmes,j’avaislespoingsengourdisàforcedelesavoircrispés.—C’étaittafête!ditJerrylorsqueledernierpilotequittalapièce.Mafête?Montriomphe,oui…—Maisc’estfinipouraujourd’hui,reprit-il,moinsembarrassé.Tuveuxlesvoirdécoller?

Décoller?Évidemment!Onm’avaitracontéàquelpointc’étaitimpressionnant.J’enavaisuneidéetrèsprécisedepuislaterreferme,maiscequiallaits’enchaînersousmesyeuxseraitincomparable!Nous entrâmes dans la salle de travail contiguë à la nôtre. Elle bénéficiait d’une vue panoramique

étenduesurlepontd’envol.Jem’installaiavecJerry,devantlavitre.Lesofficierschargésdedonnerauxpilotes l’autorisationdedécolleretd’atterrirétaientéquipésde

casquesetdemicros,etcommençaientdéjààcommuniqueravecleshommessurlepontd’envol.Ons’agitaitencontrebas.Leshommess’affairaientautourdesHornet.J’aperçuslecapitaineVanAllen

quifinissaitdesanglersongiletdesauvetageaupiedd’undesappareils.Leventdulargemalmenaitsatignassedorée.Ilgravit rapidement lesbarreauxde l’échelle, s’installadans lecockpit, soncasqueà lamain,puis

échangeaquelquesmotsaveclemécanicienrestéprèsdutraind’atterrissage.Enfin,ilmitsoncasqueetfermal’habitacledel’avion.Illefitroulerjusqu’àsonpointdedépart.Le ballet des hommes sur le pont continua de se dérouler avec rapidité et précision. Ces derniers

arrimèrentletrainavantdel’aéronefàlacatapulte.—Ilvaatteindrecenttrentenœudsenmoinsdedeuxsecondes.Autanttedirequeçadécoiffe!Jemepromisdelevérifierauretourducapitaine…—Ilsfontçatouslesjours?demandai-je,impressionnée.—Quasiment.Cesontlesmeilleurs,tusais.Oui,jesavais.J’imaginais ces hommes, enfermés désormais devant le tableau de bord de leurs chasseurs, brûlant

d’impatience,perfusésd’adrénaline.Cesprocéduresd’avant-décollagemerenvoyèrentàdeschosesquej’avaistouchéesdudoigt,jadis.Six Hornet décollèrent les uns après les autres, dans un vacarme assourdissant et à une vitesse

prodigieuse, avant de déchirer le ciel et de disparaître.Vol en patrouille, simulations d’attaque et delargagedemissiles,figureslibres,l’escadronneménageapassesefforts.J’étaisfascinée.—Allô,laterre?Alexi!m’apostrophaJerry,amusé.Toutvabien?Jesecouailatête.—Lafatigue,l’airdularge,çafaitbeaucouppourunpremierjour.—Ouvrelesyeux,ilsreviennent,répondit-il,l’airmoqueur.Unpremierchasseurtouchalepont,attrapantaumêmemomentlecâbletenduautraversdespistes.Il

s’arrêtaviolemmentà l’extrémitéde lapistepuiss’enécartaaussitôt tandisqu’unautreapprochait.Lapartitionétaitorchestréeàlasecondeprès.Tousrevinrentsansencombreenmoinsdedixminutes.Lescockpitss’ouvrirentetlafourmilièredetechniciensetdemécanosseprécipitasurlesengins.Drakes’éloignaavec lesautres,endirectiondesportesquimenaientauxponts inférieurs.Jeguettai

VanAllenquelquesminutesdeplus,sansobtenirsatisfaction.L’heureétaitmaintenantaudébriefing.Silesmanœuvresprécédentesneressemblaientenrienàceque

jeconnaissais,ildemeuraitquandmêmedesfondamentaux.Jerryetmoiregagnâmesnosquartiers.Noustravaillâmeslongtempsetjequittailepontprincipalvers

dix-neuf heures, éreintée. Mon binôme était drôle, et très calé dans son domaine. Cela allait êtreconfortabled’évolueràsescôtés.Jeprouveraisà tousceuxquej’allaiscôtoyerquej’étais loind’être

unenovice,encoremoinsuneincapable.—Unremontant?meproposaJerrycommenouspassionsàproximitédescuisines.—Jenedispasnon!Jerrymeplaisaitdeplusenplus...Ilouvritlaportedesréservesetj’aperçusunefemmeaufonddelapièce,juchéesuruncontainer.Jerry

blêmit.—Toutcomptefait,j’aiunappelurgentàpasser,bredouilla-t-ilàmi-voix.Ilreculaendirectionducouloir,puisdisparutaussitôt.Quelétaitleproblème?Cettefille?—Tueslanouvelle!Notrevoisinedepalier!s’exclamacettedernièreenmevoyantapprocher.Elle descendit de sonperchoir pourme tendre samain.Ellemedépassait d’aumoinsune tête.Ses

cheveux cuivrés, aux reflets presque rouges, étaient raides comme des baguettes de tambour etretombaientenunélégantcarréplongeantquimettaitsonvisageémaciéenvaleur.—Jesuis le lieutenantAprilDonovan,undesdeuxmédecinsofficiantàbord, seprésenta-t-elleen

penchantsoncorpslongiligneversmoi.—LieutenantAlexiSnow,pourlamétéo.—Forcément !s’exclama-t-elle.Comments’estpassée tapremière journée?Jeveuxdire,avec les

autres.Ellesemblaitcurieuseetjenecomprispastrèsbienpourquoi.—AvecVanAllen,surtout!ajouta-t-ellemalicieusement.Ah,ça…—Pourfairecourt…—C’estunconnard,n’est-cepas?mecoupa-t-elle.Jehochailatête,ravie.—Etc’estunmisogynedepremière!—C’estcequej’aicrucomprendre…—MêmeZoran’arriveàrienaveclui!Quiça?—Jeparlebeaucoup…—Oui!—C’est lewhisky. Je ne tiens pas l’alcool.C’est bon à savoir si tu veux connaître les secrets de

l’équipage!Horreur,cettefillemefaisaitdéjàmalaucrâne!Elles’interrompit,songeuse.Cenefutquepourmieuxrepartir:—Tun’aspasrencontréZora?Elle

dirigel’unitédesMarineCorpsembarquéesurlePercival.LechefdesMarineCorpsétaitunefille.Chouette!—Elleleurenfaitbaver,c’estformidable!Moi,jelesréparequandilssonttropcassés.Inutiledete

direqueceboulotaparfoisdescôtéstrèssympas!—Etl’éthiquedanstoutça?

—Restéeàterre,aveclestrucssérieuxetlescasseroles.—Lescartesmaritimesetlessatellites,c’estmoinsamusant,expliquai-jeàmontour.Maisjepense

êtretombéesurunboncoéquipier.—Quiça?Jerryétaittroubléparcettejeunefemmequiignoraitjusqu’àsonexistence.Qu’avait-ilfichutousces

mois?—JerryRios.Lelieutenantm’endevaitune,surcecoup-là.Manouvelleamiehaussalesépaules.—Jevoisdequiils’agit.Ilestsympaetdiscret.Maisiln’yenaqu’unicisurquitupourrastoujours

compter.Drake?—Parcequ’ilestbienveillant,bienqu’ilsoitencoreplusautoritairequelesautres,poursuivit-elle.Et

parcequ’enplusilestcharmant!—J’élimineVanAllen,pourlecôtébienveillant!Etc’est…?—Lecommandant!Rienqueça!—Ilestpasséàl’infirmeriehiersoirpour…—L’infirmerie?l’arrêtai-je.Pontsept?Ellefutdéçuequejenel’interrogepasdavantage.Cesmessieursétaientpartoutsurlenavire,jusqu’à

devenirl’objetdenosconversationsquandnousnousretranchions.Ilfallaitdécrocher!—Non,Pontsix.Pourquoi?—Jetestemesconnaissances.Ilfautquejemefamiliariseavecleslieux,j’aitendanceàmeperdre

dèsquejecirculedanslescoursives.Etàmeretrouverlàoùilnelefaudraitpas,danslesmomentslesplusinopportuns.—Tun’aspaseudroitàunevisiteguidée?demanda-t-elle.—Ganipys’enestchargéàmonarrivée,maisçan’apasététrèsloin.Celaavaitsurtoutétépénible.Aprilfitunegrimacelorsquejeprononçailenomdumaîtreprincipal.—Ilyaunproblèmeaveccegars?—C’estuntordu,expliqua-t-elle.Commetantd’autresici.Celan’enfaisaitqu’undeplus.Je me souvins qu’elle avait évoqué le commandant du navire peu avant que je l’interrompe. Un

dénomméFord,d’aprèsmonordredemission.—Jen’aipaseul’occasiondemeprésenteraucommandant.Aprilfronçalessourcilsavantdepoursuivre.—Ilesttrèsoccupéencemoment.Ilgèredesproblèmesdepersonnel,etdematériel.Netardepas

trop,quandmême:ilestprévenant,aimable,maistrèssusceptible.Unhommecaractérieldeplusàbord,un.

—Onleboitceverre?s’impatientaenfinApril.Qu’est-cequetuprends?—Ungin,çaexisteici?— Il y a tout ce dont tu peux rêver, plaisanta-t-elle en se penchant sur le carton qui contenait les

bouteilles.Autrebonnenouvelle!Quandnous en terminâmes, la nuit était presque tombée. Je redoutai lemomentoù les coursivesdu

Percivalvireraientaurouge.Avantderegagnermacabine,jefisundétourparlepontquatrepourgrillerunedernièrecigarette.Lepointd’orguedemajournée.Ilfaisaitdouxàl’extérieur,etjereprislamêmeplacequ’auparavant.Lejourmouraitdansundernier

rayondesoleilorangé.Cefutpropiceàdenouvellesintrospections.Jerry,April.J’espéraisqueZoraseraitaussid’unecompagnieagréable.Jepriségalementlafermedécisiondetoutmettreenœuvrepourmontreràmonsupérieurquij’étais

réellement.Àsavoir,unebattantetrèsconcernéeparsesprérogatives.Uneporteclaquaderrièremoi.—LieutenantSnow!Onnevientpass’encanaillerdansmesquartiers?J’étais maudite. Il suffisait que je pense à Van Allen pour qu’il se matérialise à proximité. Je me

retournailentemententâchantdecontrôlermarespiration.La journée avait été longue pour lui aussi. Les traits de son visage étaient tirés et ses cheveux

pointaient dans tous les sens. Sa combinaison était négligemment ouverte jusqu’au bas de sa gorge etlaissaitapparaîtreunmorceaudetissuencotongris.Untee-shirt?Undébardeur?Mon imagination s’enflamma, attiséepar les imagesde la scène à laquelle j’avais assistée lematin

même.—Snow?répéta-t-il.—Vousattendiezvraimentuneréponse,capitaine?Ilfronçalessourcilspuisallumasacigarette.—Oui,lâcha-t-ilaprèsavoiraspiréunepremièretaffe.—Jesuisdéterminéeàvousprouverquejeconnaismonboulot,capitaine.Quoiquevouspensiez.—Jen’aipasremisenquestionvoscompétences,Snow.Seulementvotrecapacitéd’adaptationàun

nouvelenvironnement.— Dois-je vous rappeler que vous avez souligné, devant l’équipe au grand complet, à quel point

j’étais nulle… Ça ne fait pas vingt-quatre heures que je suis là ! m’insurgeai-je Le sang battaitfurieusementdansmestempes,àtelpointquejecommençaisàyvoirtrouble.—Onsecalme,Snow,gronda-t-il.N’oubliezpasàquivousvousadressez.—C’esttellementfaciled’avancercetargument…marmonnai-je.—Jevousdemandepardon?Voilàquejel’avaisfichuenrogne.—Vousaveztrèsbienentendu…— Je n’ai pas l’habitude qu’on me contredise, lieutenant. Sachez-le. Soyez sûre que je ne vous

laisseraipasmeparlersurceton,lieutenant!Ilfallaitcreverl’abcès.Jemelançai,quitteàêtreridicule.—Encequiconcernel’épisodedecematin…Jen’aijamaiseuunbonsensdel’orientation.Jesuis

désolée…—Vousêtestoutepardonnée,seradoucit-ilenesquissantunsourire.—Jenepeuxpasm’empêcherdepenserque cela a influé sur lamanièredont vousm’avez traitée

aujourd’hui.—J’aisufairelapartdeschoses,énonça-t-ilavecsérieux.Pasmoi,malheureusement.—Vousetmoinesommespaspartissurdebonnesbases,Snow.Sachezquejen’aimepasqu’onme

contredise.Unmaniaqueducontrôle.Formidable…Ilpritlezipdesacombinaisonetl’abaissajusqu’àsonnombril.—Qu’est-cequevousfaites?paniquai-je.—Jememetsàl’aise,dit-iltranquillementIl s’approcha et je fus forcée de reculer.Mon dos heurta la rambarde. Jem’immobilisai, tétanisée.

Lorsqu’ilfuttoutprès,ilposasesmainsdepartetd’autredemoncorps,etmeretintprisonnièrecontrelabarred’acier.Sesyeuxdeglacemepoignardèrent.Unparangondevertu?Jen’ycroyaispasuneseconde.Jemordismalanguejusqu’ausangenpriantpourqu’iln’approchepasplus.—Snow,jecroisquec’estcommeçaquejevouspréfère,dit-ilplusbas.Muette,etdocile.S’ilfaut

quejemedéshabilledetempsentempspouryarriver,çanemeposerapasdeproblème.Il ne bougea pas d’un pouce.Mon embarras était tel que je finis par baisser les yeux pour ne pas

m’humilierdavantage.Satisfait,ilreculad’unpaset,sansmelâcherdesyeux,mecongédia.—Votrecigaretteestterminée.Nousavonsduboulotdemainmatin.Regagnezvotrecabine.Jeluilançaiunregardmeurtrier,qu’ilaccueillitavecunsourirenarquois,puispassaidevantluipour

regagnerl’intérieurdunavireplusencolèrequejamais.Maispasseulement…Cequiétaitbienpire.