cours d'eau et ponts

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service d'tudes techniques des routes et autoroutesjuillet 2007

Guide technique

Cours deau et ponts

Guide technique

Cours deau et ponts

collection les outils

Document dit par le Stra dans la collection "les outils". Cette collection regroupe les guides, logiciels, supports pdagogiques, catalogues, donnes documentaires et annuaires.

Ce guide technique a t ralis par 6 groupes de travail (un pour chaque partie) constitus par des reprsentants : du ministre de lcologie et du Dveloppement durable (Medd), du Rseau Scientifique et Technique du ministre de lquipement (Rst) : Cetmef (Centres dtudes Techniques Maritimes et Fluviales), Cete (Centres dtudes techniques de lquipement), Stra (service dtudes techniques des routes et autoroutes).

Lharmonisation et la mise en forme ont t assures par Caroline Picot (Stra). Son contenu a fait lobjet dune enqute de validation auprs de lensemble des rdacteurs ainsi que des reprsentants du Rst, des Services Navigation et de la matrise duvre en Directions Dpartementales de lquipement.

Composition des groupes de travail :

Partie 1 Eric Delahaye (Cete Nord-Picardie) Gilles Lacoste (Stra) Pierrick Esnault (Stra)

Remerciements pour leur large contribution : Manuel Le Moine (Dde de lEure) Yvon Meuric (Stra) Pierre Corfdir (Cete de lEst) Fabien Renaudin (Cete de lEst)Visuels titres parties - crdit photos : G. Forquet (Stra) ; L. Mignaux (Medd).

Partie David Goutx (Cete Normandie-Centre, Laboratoire de Blois) Patrick Chass (Cete Mditerrane)

Partie 3 Jean Able (Medd) Jean-Claude Jouanneau (Cete Normandie-Centre, Laboratoire de Blois) Jos-Luis Delgado (Cete Mditerrane) Jacques Hurtevent (Cete Mditerrane) Gilbert Haun (Stra)

Partie 4 Christophe Charrier (Cete de Lyon) Josiane Seguier (Cete Mditerrane) Damien Legleye (Cete de Lyon, Laboratoire de Clermont-Ferrand) Marc Gigleux (Cete de lEst)

Partie 5 Stphanie Poligot-Pitsch (Cetmef ) David Goutx (Cete Normandie-Centre, Laboratoire de Blois)

Partie 6 Andr Antoine (Cete du Sud-Ouest) Pierrick Esnault (Stra)

Cours deau et ponts

SommaireIntroduction Partie 1 - Gnralits1.1 - Notions fondamentales sur les cours deau 1. - Incidences des ponts sur les cours deau 1.3 - Incidence des amnagements des cours deau sur les ponts 1.4 - Cas particuliers des cours deau navigables 1.5 - Dmarche pour la conduite dune tude hydraulique

5 78 11 1 1 13

Partie - Hydraulique et ponts.1 - Notions dhydrologie . - Notions dhydraulique .3 - Incidences des ponts sur les coulements liquides .4 - Risques hydrauliques encourus par les ouvrages

1516 1 31 38

Partie 3 - Morphodynamique et ponts3.1 - Notions de morphodynamique 3. - Incidences des ponts sur la morphodynamique 3.3 - Protection des ouvrages contre lrosion

4344 55 6

Partie 4 - cosystmes aquatiques et ponts4.1 - Notions gnrales dhydrocologie 4. - Perturbations apportes par les ponts aux cosystmes aquatiques

6768 75

Partie 5 - Navigation fluviale et ponts5.1 - Notions sur la navigation 5. - Incidence du pont sur la navigation 5.3 - Incidence de la navigation sur la conception des ponts 5.4 - Signalisation 5.5 - Exemples

8384 91 91 97 98

Partie 6 - Prise en compte du cours deau, du projet lexploitation6.1 - Rglementation et recommandations pour la prise en compte du cours deau dans ltude dun ouvrage dart 6. - Mthodologie de ltude hydrologique 6.3 - Avant projet routier tude prliminaire douvrage dart (phase 1)

99100 108 111

3

6.4 - Avant-projet douvrage dart (phase ) 6.5 - Projet dtaill (phase 3) 6.6 - Donnes ncessaires une tude hydraulique 6.7 - Chantier 6.8 - Exploitation 6.9 - Interlocuteurs

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AnnexesAnnexe 3.1 - tude de cas - Protection dun pont contre les risques daffouillement et de contournement Le Logone Moundou Annexe 3. - Dtail pour le dimensionnement des protections en enrochement Annexe 3.3 - Les protections transversales - Les pis Annexe 3.4 - Estimation des risques daffouillement en pied des appuis dun pont (par la formule de H.N.C. Breusers et Al.) Annexe 3.5 - RN 94 - Projet de dviation dEmbrun (05) - Ouvrage de franchissement de la Durance - tude morphodynamique (000-005) Annexe 5.1 - Calcul des protections dues aux jets dhlice Annexe 5. - Note de calcul des protections des appuis provisoires du viaduc de Richemond Rfrences bibliographiques Glossaire des termes techniques

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Cours deau et ponts

IntroductionDe tout temps et de plus en plus frquemment, de fortes pluies de courte dure ou des pisodes pluvieux pouvant durer plusieurs jours entranent des dsordres considrables pour les populations et les infrastructures. Les plus mdiatises sont les inondations provoques par les rivires ou torrents des rgions mditerranennes dont les vitesses de monte en crue varient de quelques dizaines de minutes plusieurs heures. Ces phnomnes mtorologiques ont galement dautres consquences, aussi dramatiques, comme les coules de boue ou les instabilits de pentes. De nombreux facteurs contribuent lampleur des phnomnes et des dgts, dont beaucoup sont imputables lurbanisation du lit majeur des cours deau. Les ouvrages dart sont particulirement concerns par ces phnomnes et peuvent subir de graves dsordres, notamment en raison daffouillements importants pouvant conduire la ruine des ouvrages. La simple prsence dun ouvrage et de ses remblais daccs dans le lit dune rivire est susceptible daggraver les consquences de ces phnomnes. En effet, lobstacle au libre coulement des eaux quils constituent peut amplifier la monte des eaux et linondation de zones en amont. Mme en dehors de ces circonstances exceptionnelles, louvrage peut par sa seule prsence perturber lcosystme gnral dune valle en modifiant les paramtres physiques lis lcoulement des eaux et en gnrant un risque de pollution du site. La rglementation mise en place ces dernires annes prend en compte lensemble de ces facteurs. Face aux risques lis aux crues, des Plans de Protection contre les Risques dInondation sont prescrits dans toutes les zones sensibles. Face aux risques sur lenvironnement, la loi sur leau (loi n 92-3 du 3 janvier 1992) rglemente galement toute modification provisoire ou dfinitive des conditions hydrauliques des cours deau. La rglementation ne suffit pas elle seule viter de nouvelles catastrophes cologiques, encore faut-il quelle soit bien comprise et correctement applique. Par ailleurs, dans le souci de prserver la ressource en eau et les milieux aquatiques, et de ne pas mettre

en pril la stabilit de louvrage, ou des ouvrages provisoires ncessaires sa construction, le projeteur doit prendre en compte, ds la phase amont des tudes, lensemble des donnes et contraintes lies au cours deau. Or, dans bien des cas, on constate que les tudes dimpact sur le cours deau sont engages trop tardivement par rapport aux tudes gnrales de louvrage et que les tudes hydrauliques et environnementales sont inconsistantes voire oublies. Cette mauvaise pratique peut au mieux conduire la remise en cause du projet, et au pire au choix dune solution inapproprie. On peut noter galement que des tudes hydrauliques mme insuffisantes, sont rarement remises en cause lors de lexcution de louvrage. Ce guide a t labor pour rpondre lensemble de ces problmatiques. Il sadresse la fois aux matres duvre et matres douvrage, ainsi quaux concepteurs douvrages dart ; il a pour vocation les assister dans la conception des ouvrages de franchissement de cours deau et de leurs ouvrages annexes, tels que les remblais daccs. Son but est daider la comprhension des cours deau et de leurs hydrosystmes, de prsenter lensemble des volets sur lesquels linterfrence entre louvrage et le milieu naturel est prendre en considration, avec rciprocit possible des impacts. Ce guide ne traite pas des buses et petits rtablissements hydrauliques, ni des ponts-canal. Les diffrents volets concernent lhydraulique, la morphodynamique, lhydrocologie et la navigation fluviale. Ce guide prsente les dmarches conduire, des tudes amont jusqu lexploitation de louvrage. Il aide notamment prendre en considration, ds le dmarrage des tudes, lintgration harmonieuse de louvrage dans la nature, piloter les tudes dimpact et conduire le projet. Il ne vise pas reprendre ni remplacer lensemble des ouvrages spcialiss sur les divers champs quil aborde : il fournit pour cela une bibliographie toffe, vers laquelle le lecteur dsireux dapprofondir son approche pourra se tourner. Il ne dveloppe pas notamment les diverses mthodes de calcul, pour certaines exprimentales, pour dautres statistiques et plurielles, dont leur applicabilit peut dpendre fortement du contexte, mais incite le matre duvre recourir des spcialistes pour les mettre en uvre. Si ce guide permet, minima, de clarifier les ides du lecteur et de lui faciliter le dialogue sur le projet avec les experts et les citoyens, il aura atteint son but.

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Cours deau et ponts

Partie 1

Gnralits

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notions gnrales 1.1 - Notions fondamentales sur les cours deauLobjectif de ce chapitre est de rappeler quelques gnralits sur les cours deau. Il constitue une introduction aux chapitres suivants qui traitent chacun dun volet plus spcifique.

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InterceptionEn fait, toutes les eaux prcipites sur le bassin versant ne contribuent pas au dbit global lexutoire, en dehors des transferts inter-bassin anthropiques ou souterrains qui peuvent galement intervenir. Une fraction souvent consquente est intercepte, avant datteindre le sol, par la couverture vgtale : feuillage, tronc. Avant davoir gliss jusquau sol, cette eau peut parfois tre intgralement consomme par lvapotranspiration vgtale. Dans le cas contraire, elle arrivera au sol avec un temps de retard important. Les eaux qui arrivent au sol commencent gnralement par imbiber le sol et sinfiltrer dans les vides quil comporte au moment du dbut de lvnement pluvieux. Lors dpisodes de pluies intenses, en mme temps quune fraction de leau arrivant au sol imbibe ce support poreux, le reste commence dj ruisseler. Lors dpisodes pluvieux plus modestes, en fonction de la porosit initiale des sols, leau peut ne commencer ruisseler quaprs imbibition totale de la couche superficielle de sol.

Nuages (goutelettes deau) Pluie Neige Pluie GlacierRiv i re

Vapeur deau Vapeur deau

Torrent Lac

coulements souterrainsPendant toute la dure de lpisode pluvieux, leau qui sinfiltre dans le sol commence une lente migration vers les aquifres superficiels voire profonds, et suivant leurs inclinaisons, transite vers les rsurgences pizomtriques (sources, rivires, etc). Ces coulements souterrains dbouchent gnralement lexutoire longtemps aprs les eaux ruisseles, si bien quils ne sont pas perdus en tant que tels dans le cycle de leau, mais contribuent soutenir les eaux moyennes ou dtiage plutt que les crues de rivire (bien que dans le cas de crues trs lentes et de nappes de coteaux puissantes, comme dans la valle de la Somme, on puisse voir les coulements souterrains contribuer largement la crue).

Eau

Oc a

n

Partie 1 - Figure 1 : le cycle de leau Source : J. L. Delgado (Cete Mditerrane)

Cours d'eauCours deau est un terme gnral dsignant tous les chenaux superficiels ou souterrains, prsentant un lit permanent et de caractre naturel lorigine, et un dbit suffisant, une majeure partie de lanne en fonction des donnes climatiques et hydrologiques locales (un canal ou un foss artificiel nest pas un cours deau).

RuissellementLeau qui atteint le sol sans sy infiltrer dvale les pentes superficielles dans la direction du plus fort gradient altimtrique. Ltat de surface du sol joue un grand rle dans la vitesse de son coulement, en complment de lincidence directe de la pente : lisse et rgulier (route bitume, sol plat, caniveau en bton, etc), il permet des ruissellements rapides, tandis que rugueux ou irrgulier (hautes herbes, sillons dans un champ, systmes forestiers, etc), il freine le ruissellement des eaux. Lensemble des lieux gographiques parcourus par une goutte deau tombe en un point donn jusqu lexutoire est le chemin hydraulique. En fonction de la longueur du chemin hydraulique et de la vitesse de ruissellement induite par ltat du sol

Bassin versantUn bassin versant est lensemble des lieux gographiques qui, arross par une pluie (ou neige), contribuent par le rseau hydrographique de surface au dbit global restitu un point dexutoire donn. Deux bassins versants adjacents sont spars par une ligne de partage des eaux, sauf lexutoire si lun dbouche dans lautre. Par coulements souterrains, des changes inter bassins versants peuvent ventuellement se produire.

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Cours deau et ponts

notions gnralestout au long de ce chemin, chaque goutte tombe sur le bassin versant met un certain temps pour atteindre lexutoire. Dans un bassin versant homogne, le plus long chemin hydraulique dtermine le lieu qui contribuera en dernier au dbit global lexutoire pour un vnement pluvieux donn. Toute pluie dune dure infrieure au temps ncessaire la goutte deau pour parcourir ce plus long chemin hydraulique ne mobilisera en consquence, vu de lexutoire, quune fraction du bassin versant total. Ce temps de rfrence est le temps de concentration.

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Rgimes hydrologiquesEn dehors des pisodes pluvieux, le lit du cours deau ne draine que les coulements souterrains du bassin versant. Le rgime hydrologique du cours deau est alors moyen (ou eaux moyennes ) jusqu ce que le drainage ait puis le principal des aquifres superficiels. Le dbit dcrot ainsi lentement et le rgime hydrologique est l tiage (ou basses eaux ), plus ou moins svre selon que cette situation de drainage sans recharge pluvieuse perdure. La dcroissance du dbit ltiage suit gnralement une loi de Galton. Lorsque la pluie recharge les aquifres et ruisselle sur le bassin versant, le dbit du cours deau crot en consquence au-del du rgime moyen. On parle alors de crue ou de hautes eaux . Cette crue peut ou non dborder, selon la capacit hydraulique du lit du cours deau et lintensit de la crue. Gnralement, les crues annuelles voire bisannuelles ne dbordent pas dun lit naturel. Un lit endigu peut mme contenir des crues plus fortes et plus rares, condition que les digues en supportent les contraintes hydrodynamiques. En fonction de lintensit des pluies, de la rapidit de rponse du bassin versant, de la concomitance de contributions daffluents, les crues peuvent tre trs soudaines : lhydrogramme est celui dun volume coul assez modeste mais concentr sur un dbit de pointe trs lev. On parle alors de crue clair (dont lexemple le plus tristement clbre est la crue cvenole). Lorsque la crue est une lente monte en puissance du dbit (plusieurs jours de monte de crue), lhydrogramme est celui dun grand volume coul sous un dbit de pointe plus modeste. On parle alors de crue lente .

Intensit, dure et frquence des pluiesCe temps est dterminant dans lanalyse de la production de dbit lexutoire dun bassin versant, car les pluies sont caractrises par trois notions clefs : lintensit horaire (en millimtres par heure), la dure (en heures) et la frquence (ou priode de retour). Le dbit lexutoire tant, un instant donn, la somme des contributions ruisseles par les points du bassin versant distants de lexutoire dune longueur de chemin hydraulique telle que les eaux ont eu le temps darriver lexutoire linstant considr, le dbit de pointe attendu lexutoire sera dautant plus fort que lintensit de pluie la plus forte se maintient sur lensemble du bassin pendant une dure suprieure ou gale au temps de concentration. Autrement dit, pour prvoir un dbit de pointe de priode de retour donne lexutoire, il faut considrer une pluie de mme priode de retour de dure au moins gale au temps de concentration. Les courbes dintensit-durefrquence des pluies permettent de choisir la bonne pluie de projet pour calculer le dbit lexutoire.

Hydrographie dun bassin versantOn peut considrer quun cours deau est le talweg qui draine le bassin versant qui lui est associ. Le lit quil a entaill avec le temps peut tre en eau en permanence ou par intermittence. Il constitue une succession de points dexutoire de bassins versants recueillant les eaux ruisseles soit directement (on parle alors de bassin versant propre), soit par lentremise daffluents qui drainent les sous-bassins versants. Pour distinguer le degr de drainage dun cours deau donn dans un vaste bassin versant, on parle d ordre de cours deau : le cours deau qui draine la totalit du bassin (et qui se jette la mer) est dordre 1, par exemple, les affluents qui se jettent directement dans ce fleuve sont dordre 2, etc. On peut galement partir des sources, affectes de lordre 1, et augmenter lordre lorsque deux affluents de mme ordre confluent. Ce nest pas ici le lieu dvoquer de telles mthodes, mais il faut avoir conscience du fait que les confluences additionnent les eaux de bassins versants dont la contribution peut tre sensiblement htrogne.

Morphologie fluvialeLe lit du cours deau dsigne en gnral son lit mineur ou son lit principal, cest--dire, le lit dtiage gnralement augment des berges. Ce lit peut contenir jusquaux crues annuelles ou bisannuelles en ltat naturel, parfois beaucoup plus lorsque recalibrages et endiguements ont lourdement artificialis le cours deau. Cest une zone humide, dans laquelle les variations hydrologiques conduisent un tagement de la flore aquatique entre les espces supportant bien limmersion et celles tolrant des submersions moins frquentes. Cette biodiversit floristique peut saccompagner dune biodiversit faunistique pour peu que le fond et les berges du cours deau prsentent, dans un transect aussi bien que dans la continuit longitudinale, des facis propices, cest--dire varis : zones rapides et propres, zones lentes, mandres, anfractuosits, vgtation, zones de chasse, zones de fraie, etc. Les amnagements hydrauliques qui ont transform une grande majorit des cours deau

Gnralits

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notions gnralesfranais depuis le douzime sicle (moulins eau, lavoirs, assainissements urbains, navigation fluviale, hydrolectricit, etc) peuvent avoir banalis les facis morphologiques et produit des formes fluviales artificielles (biefs, drivations, chutes, etc). A moins que lanthropisation nait gagn les berges du cours deau, on peut distinguer en rive du cours deau une zone capable daccueillir les eaux de faibles dbordements, de priode de retour comprise entre 2 et 5 ans environ. Cette zone humide prsente les signes biologiques dune forte connexion avec le milieu aquatique et constitue une transition entre milieu terrestre et milieu aquatique aux proprits trs intressantes. En particulier, leur rle dpuration physico-chimique des eaux ruisseles par le bassin versant propre ne fait plus aucun doute. Mais ces zones peuvent remplir dautres fonctions biologiques en fonction de leur degr de connectivit : par exemple, elles peuvent constituer des zones de fraie brochet lorsquelles sont submerges de quelques dcimtres deau en hautes eaux. On parle gnralement de lit moyen. Enfin, le lit majeur dsigne le reste de la valle submerge lors des plus fortes crues. Lorsque la valle est fortement anthropise, le lit moyen peut avoir compltement disparu pour ne laisser apparent quun lit majeur. Il sagit dun milieu spcifiquement terrestre dlimit par les coteaux des terrasses basses du Wrm entailles par les plaines alluviales de lHolocne (il y a environ 10 000 ans).

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Cours deau et ponts

les incidences 1. - Incidences des ponts sur les cours deauLe franchissement des cours deau par les voies de transports terrestres a longtemps constitu un enjeu conomique et stratgique de premier ordre autant quun dfi technique majeur, aujourdhui passablement banalis par le recours gnralis aux techniques de constructions en bton et aux constructions mtalliques. Cette facilitation relative de la construction des ponts a pu conduire une relative sous-estimation des incidences des ponts sur les cours deau et aux moyens (et intrts) de les rduire. Les ponts ont pourtant des incidences notables, tant sur le lit mineur que sur le lit majeur du cours deau franchi. Par lemprise de ses piles et de ses cules dans le lit mineur, louvrage rduit la surface disponible pour lcoulement. Ce dbouch hydraulique du pont rduit par rapport la capacit hydraulique du cours deau induit une gne lcoulement en amont et une acclration des vitesses au droit de louvrage. Ces effets peuvent devenir trs sensibles en priode de crue si les remblais daccs au pont barrent le chemin aux coulements dbordants du lit majeur. Ceuxci sont alors contraints de passer dans le dbouch hydraulique du pont qui concentre des coulements qui, en son absence, seraient passs ailleurs. Ce report de dbit entre le lit majeur et le lit mineur accentue les effets voqus pour le dbouch hydraulique rduit du pont. La gne aux coulements en amont du pont se traduit gnralement par un exhaussement de la ligne deau et une aggravation des risques dinondation. Bien quelle puisse parfois apparatre trs modeste (de lordre de quelques centimtres, par exemple) aux yeux du concepteur de pont, cette aggravation, qui peut tre vite, peut tre fortement prjudiciable et nest pas tolre par la loi. Il appartient donc au concepteur dassurer son projet une totale innocuit quant au risque dinondation. Dans certains cas, louvrage peut tre conu pour jouer un rle de ralentissement dynamique. Il rgule alors le dbit comme le ferait un barrage et prserve les zones situes en aval. Il sagit douvrages particuliers qui ne sont pas traits dans ce guide. Lacclration des vitesses dans louvrage et lagitation des eaux dans la zone de tranquillisation en aval immdiat de louvrage accroissent localement la capacit rosive des coulements du cours deau et dsquilibrent ponctuellement le transport solide.

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Cela peut se traduire par des risques daffouillement au pied de louvrage (avec terme dchaussement des fondations) et un dcapage des sdiments sur une certaine longueur qui constitue une discontinuit morphologique ventuellement problmatique pour une partie de la faune aquatique. Plus globalement, la traverse dune valle alluviale par une infrastructure routire franchissant le cours deau peut perturber la morphodynamique gnrale du cours deau. Ainsi, mme si le dbouch hydraulique du pont est conu pour minimiser les incidences sur les coulements liquides, la perturbation des rpartitions de dbits entre bras multiples (le cas chant) peut conduire au comblement par envasement dun bras coup ou partiellement obstru, lappauvrissement du milieu aquatique, la concentration de la contribution sdimentaire dans des zones fragilises provoquant rosions rgressives et ventuellement coupures de mandres, etc. La morphologie fluviale observe sur le terrain correspond une combinaison de diffrents facteurs la fois naturels et dorigine humaine (amnagements divers). Les formes ne sont pas toujours celles que lon attend a priori. La morphologie fluctue en fonction de son environnement : les combinaisons des diffrents facteurs prcits, de plusieurs ouvrages ou darrives daffluents interfrent les uns avec les autres et conduisent lenvironnement sadapter. En exemple, un pont sur un radier accentue laffouillement qui se gnralise laval (cas du pont de Tours). La prsence des piles et leffet de passes contribuent galement modifier la morphologie naturelle en amplifiant des formes drosion, lies la prsence dun obstacle dans le lit mineur. Un autre exemple de combinaison trs souvent observable : la prsence dun barrage situ dans une courbe influence directement la morphologie de ce secteur. En accentuant le phnomne, la courbe permet de propager lnergie dissipe par la chute deau du barrage beaucoup plus laval Les figures drosion se trouvent amplifies (rosion de la rive concave accentue, dplacement acclr des mandres) et surtout propages. Outre ces perturbations sur lhydraulique et la morphodynamique, la construction dun pont audessus ou proximit dun cours deau ncessite souvent la ralisation de travaux dans son lit, ce qui peut induire, en phase de construction comme en phase de service, la fois des modifications des cosystmes aquatiques par la modification physique du milieu naturel et laltration de la qualit des eaux

Gnralits

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les incidences 1.3 - Incidence des amnagements des cours deau sur les pontsDe mme que la prsence dun pont peut avoir sur le cours deau quil enjambe de graves consquences, le cours deau peut crer des dommages louvrage. A titre dexemple, un mauvais amnagement peut crer un tat de dsquilibre du cours deau qui, pour un dbit donn, natteint plus un rgime uniforme, ce qui entrane une instabilit des berges et du lit et peut provoquer des affouillements de fondations. Mais ce nest pas tout, en cas de crues, les lments solides charris par le cours deau peuvent engendrer des chocs sur les appuis, voire le tablier. Et il est mme arriv dans certains cas que louvrage soit emport suite une crue. Des actions humaines sur un cours deau peuvent aussi avoir des consquences sur les ponts en service telles que : le curage du lit du cours deau ou l'extraction de matriaux, le creusement de chenaux daccs un port, la suppression des mandres, l'amnagement des berges, les endiguements, la cration de terre-pleins et de remblaiement dans le lit majeur ou mineur, la construction ou l'utilisation illicite de barrages, les amnagements fonciers en amont avec drainage et canaux,

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les prlvements deau dans la rivire avec diminution de son dbit, l'absence dentretien des rives, la pollution du cours deau. Ces lments sont dvelopps dans le fascicule 20 Zone dinfluence - Accs - Abords de lItseoa (Instruction Technique pour la Surveillance et lEntretien des Ouvrages dArt).

1.4 - Cas particuliers des cours deau navigablesLa ralisation dun pont au-dessus dun cours deau navigable ou dun canal ncessite de prendre en considration les donnes et contraintes lies aux passages de bateaux. Le chapitre 5 concerne les voies navigables intrieures vocation commerciale ou touristique, mais donne des indications pour les voies parcourues par les engins nautiques de loisirs non motoriss (canos, kayaks). Pour les embouchures de fleuves et les estuaires, les caractristiques de la navigation sont trs diffrentes, et il sagira de se rapprocher des ports bordant ces estuaires afin de connatre leur trafic et leurs contraintes spcifiques, tant en phase dfinitive quen phase chantier. Aprs une partie consacre la prsentation de notions sur la navigation fluviale, sont rsumes les influences dun pont sur celle-ci. Puis une partie dtaille les contraintes dues la navigation sur la conception, le dimensionnement, la ralisation et lentretien dun pont enjambant une voie navigable. Ces contraintes sont relativement fortes, et il est important de les connatre et de les prendre en compte ds la conception de la voie porte elle-mme, quand il sagit de la cration ou dune modification importante de celle-ci. En effet, une modification du trac en plan peut dplacer la position du pont par rapport la voie navigable et ainsi rduire considrablement les contraintes sur le pont, et donc son cot. Dans le cas dune modification ou dune rhabilitation du pont, ladaptation aux contraintes de navigation peut, dans des cas extrmes, conduire abandonner cette solution au profit dune reconstruction complte. Les contraintes sont lies en premier lieu aux gabarits de navigation : en fonction de la voie concerne, des prescriptions sont donnes par la circulaire ministrielle (quipement) n 76-38 modifie par la circulaire n 95-86. Ces gabarits ont une forte influence la fois sur limplantation des appuis, le choix de la structure et le mode dexcution de louvrage.

Partie 1 - Photo 2 : effondrement du pont de Tours (1978)Source : R. Lozelli, P. Fitou, G. Proust (la Nouvelle Rpublique)

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Cours deau et ponts

les incidencesLes mouvements deau provoqus par les passages des bateaux sont un autre facteur prendre en compte, ainsi que les phnomnes de mare. Ils sajoutent au courant naturel de la rivire, ou, pour le cas des canaux, sont parfois les seuls prendre en compte. Cela influe sur les forces hydrodynamiques prises en compte pour le dimensionnement, et surtout sur les conceptions des protections contre les affouillements (berges et piles). Les effor ts les plus impor tants qui peuvent ventuellement modifier la conception de louvrage, ainsi que son mode de construction, sont les chocs accidentels de bateaux contre les piles et les cules, et les appuis provisoires. Le Bael 91 rvis 99 (Fascicule 62 Titre I Section I - Rgles techniques de conception et de calcul des ouvrages en bton arm suivant la mthode des tats limites) donne des valeurs defforts quasi-statiques quivalents des chocs de bateaux fluviaux sur une pile de pont en rivire. La partie 1-7 de lEurocode 1, encore provisoire, donne des valeurs defforts quasi-statiques quivalents des collisions de navires maritimes et fluviaux sur un obstacle rigide, ainsi que des mthodes pour dterminer les nergies de tels chocs, utiles pour le dimensionnement des protections. Enfin les dernires parties du chapitre prsentent la signalisation appliquer sur les ponts, et quelques exemples illustrant certaines des considrations thoriques dcrites auparavant.

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louvrage, et de dterminer lensemble des donnes ncessaires la conception et au dimensionnement de louvrage et des amnagements connexes. La premire phase de cette tude doit tre mene en amont pour analyser ltat initial de manire dfinir le programme de louvrage. Il peut tre avantageux de passer le contrat dtudes au titre de la loi sur leau auprs dun groupement de deux bureaux dtudes : lun spcialis en hydraulique et lautre en science de lenvironnement. Par ailleurs, il importe dassocier le plus en amont possible le service charg de la police des eaux (Direction Dpartementale de lEquipement, Service de la Navigation, Direction Dpartementale de lAgriculture et de la Fort) de faon intgrer ds le dbut des rflexions les contraintes essentielles relatives la spcificit du site. Il convient de procder une seconde phase de ltude hydraulique et environnementale, au stade de ltude prliminaire de louvrage dart (niveau Avant-Projet Sommaire routier) o plusieurs solutions pourront tre envisages concernant limplantation et le positionnement du pont et de ses appuis, son ouverture hydraulique (importance des remblais), ainsi que les amnagements spcifiques. Cette seconde phase doit permettre de disposer des lments suffisants pour mener lenqute pralable la Dclaration dUtilit Publique (Dup) de louvrage ou de linfrastructure. La troisime phase de ltude hydraulique et environnementale, au stade de ltude de projet de louvrage dart (niveau Projet routier), doit permettre de prciser le dimensionnement de louvrage, ainsi que de lensemble des amnagements de protection de louvrage (dispositifs de protection des appuis par exemple) et du cours deau (dispositifs de protection du lit et des berges par exemple). Elle doit galement dfinir les mesures de protection des cosystmes aquatiques et de la qualit de la ressource en eau. Elle contribue par ailleurs la constitution du document des incidences de lamnagement, pralable lautorisation de travaux, en respect de la loi sur leau. Dans le volet hydraulique, limportance et la complexit des tudes sont naturellement lies celles de linteraction entre le cours deau et le pont. A cet gard, on peut tablir une distinction entre les grands ouvrages dart, permettant le franchissement de rivires ou fleuves, aux grands bassins versants (> 100 km), qui ncessitent des tudes importantes, voire complexes, confies des bureaux dtudes spcialiss, et les ouvrages dart courants, situs plus frquemment dans de petits bassins versants ( 100 km), dont les tudes sont plus sommaires.

1.5 - Dmarche pour la conduite dune tude hydrauliqueLa loi sur leau du 3 janvier 1992 et ses dcrets dapplication (n 93.742 et n 93.743 du 29 mars 1993) imposent une procdure administrative pralable pour tout travail dans le lit dun cours deau ou en zone inondable. La demande initiant cette procdure comprend obligatoirement un document indiquant les incidences de la ralisation de lamnagement sur la ressource en eau, le milieu aquatique, lcoulement, le niveau et la qualit des eaux ; ce mme document prcise, sil y a lieu, les mesures compensatoires envisages (art. 2 et 29 du dcret n 93.742). Dans ces conditions, il convient de mener une tude couvrant la fois le volet quantitatif (tude hydraulique) et le volet qualitatif (tude environnementale). Cette tude a galement pour objectif dapprhender limpact du cours deau sur

Gnralits

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les incidencesEn tout tat de cause, quelle que soit la taille de louvrage, il importe au stade des tudes amont de sentourer des conseils de spcialistes dans les domaines de lhydraulique et de la science de lenvironnement, de manire tablir une analyse de ltat existant, dapprhender lensemble des donnes et contraintes du site, et de bien orienter et dfinir la nature et la consistance des phases ultrieures de ces tudes. Ces tudes spcifiques sarticulent autour des tudes structurelles et architecturales de louvrage dart. Le guide pour la commande et le pilotage des tudes douvrages dart de novembre 1997, ralis et publi par le Stra, traite notamment de lorganisation et de la coordination de lensemble de ces tudes.

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notions gnrales .1 - Notions dhydrologie.1.1 - Rappels gnraux sur lhydrologie des cours deauDfinition de lhydrologieLhydrologie est la science qui traite de loccurrence, de la distribution et de la circulation de leau tout au long de son cycle, ainsi que de ses proprits chimiques et physiques et de ses interrelations avec le milieu et les tres vivants. Elle repose essentiellement sur les sciences statistiques et sur des modles conceptuels de transferts hydriques.

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Des informations prcieuses sur lvolution dune formation pluvieuse peuvent tre obtenues laide des radars mtorologiques couvrant le territoire national, mais elles intressent plus lannonce de crue que le concepteur de projet de pont. Coupl aux pluviomtres, le radar permet toutefois une connaissance amliore de la rpartition de ces pluies pour conduire les tudes de dbits. Des oprateurs statistiques permettent de dduire de ces mesures pluviographiques des relations intensitdure de pluie pour une frquence donne.

Paramtres caractristiques du bassin versantUn bassin versant est dabord caractris a minima par laire dinterception des pluies. En fait, bien que des considrations hydrogologiques puissent parfois interfrer, il sagit de la surface cartographique de lespace dlimit, partir de lexutoire retenu pour effectuer le calcul, par les lignes de partage des eaux. Cette aire est dsigne par A, en kilomtres carrs. Sagissant de ruissellement, une caractristique essentielle du bassin versant est le temps de concentration, cest--dire le temps que met la goutte deau tombant au sol sur la partie du bassin versant la plus loigne de lexutoire pour rejoindre celuici. Ce temps est gnralement exprim en minutes (mn). Il dpend de la longueur du plus long chemin hydraulique parcourir (L, exprime en mtres) et de la vitesse avec laquelle lcoulement dvale ce chemin (V, exprime en mtres par seconde), laquelle dpend troitement de la pente motrice P (exprime en mtres par mtres) le long de ce cheminement. Lorsque le plus long chemin hydraulique parcourir vers lexutoire passe par plusieurs tronons homognes en pente, le temps de concentration est la somme des temps mis pour dvaler chacun des tronons conscutifs. La vitesse est alors estime en fonction de la pente et du degr daccident des surfaces traverses (fort, prairie, surface impermabilise, etc.). Des formules exprimentales tablissant la valeur du temps de concentration. La plus connue est la formule de Kirpich :

Paramtres hydrologiques mesursLes pluies sont un bon point de dpart dans lexamen du droulement du cycle de leau quand on sintresse aux rivires. Elles rsultent des interactions en altitude des masses dair charges en eau vapore et sont caractrises par plusieurs quantits : la hauteur P de pluie (sous-entendu, tombe au sol), exprime en millimtres de pluie tombs sur un mtre carr de surface, ou encore, ce qui est quivalent, en litre par mtre carr ; lintensit I, exprime en millimtres de pluie par unit de temps (gnralement la minute ou lheure) ; la dure D, gnralement exprime en minutes ; la frquence F ou probabilit de non-dpassement ou encore priode de retour T. Ainsi, pour une probabilit de non-dpassement (ou priode de retour) donne, on peut considrer (au moins) deux pluies quiprobables, lune dune dure moins longue que lautre, mais avec une intensit de pluie plus forte que lautre, et vice versa. A contrario, il est absurde de parler dune intensit de pluie de priode de retour donne, sans prciser quelle est la dure de cette intensit. Pour une priode de retour donne, lintensit de pluie est une fonction dcroissante de la dure de la pluie tombant avec cette intensit. Les caractristiques de base des pluies sont mesures laide de pluviographes qui mesurent a minima les hauteurs de pluie interceptes par une surface de rfrence dentonnement vers le rcipient mesureur ou encore, dans des versions un peu plus labores, mesurent le temps ncessaire au basculement dun auget talonn ou le nombre de basculements dauget talonn dans un temps fix (laps de temps, gnralement de 6 minutes(1)).(1) Ce qui permet davoir une apprciation quasi directe de lintensit en mm/h, par multiplication par un facteur 10 de la valeur lue en 6 minutes

[quation 1 - Temps de concentration, formule de Kirpich]

pour les bassins versants dune taille infrieure 1 km. Lintensit tant une fonction dcroissante du temps et le dbit de pointe nintervenant a priori que lorsque lensemble du bassin versant a contribu au ruissellement (t tc), on considre gnralement

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notions gnrales(pour calculer le dbit rsultant lexutoire) que le dbit de pointe est proportionnel lintensit calcule pour une dure gale au temps de concentration du bassin versant. Cette hypothse na rien dvident. En particulier, si on se situe dans un modle de ruissellement de type surfaces contributives , la notion de temps de concentration na pas de sens. Enfin, la troisime caractristique fondamentale du bassin versant est le coefficient de ruissellement instantan (not C, adimensionnel). Ce coefficient traduit la fraction deau incidente qui ruisselle, et donc, celle qui demeure pour quelque temps dans le sol et ses accidents. Il dpend de la couverture vgtale, de la morphologie du sol, de la pente, du matriau de surface de sol et mme de la saison.

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Modles de ruissellementRuissellement hortonien On parle de ruissellement hortonien lorsquon assiste une saturation progressive et homogne de lensemble des sols lchelle du bassin versant. Les crues seront gnres par un ruissellement de surface se produisant sur lensemble du bassin versant, lorsque lintensit des pluies dpasse la capacit dinfiltration des sols. La capacit dinfiltration est elle-mme dfinie par une fonction dcroissante de la dure (f(t) en mm/h) ; cette capacit dinfiltration variant dune capacit maximale (f0, mm/h) une vitesse limite dinfiltration (fc, mm/ h), correspondant au sol satur, sous la forme dune fonction exponentielle dcroissante.

Partie 2 - Figure 1 : bassin versant intercept par la route sur la commune de Verdigny (18) Source : extrait du rapport de recherche Lcpc(Laboratoire Central des Ponts et Chausses) - 310105 / Fiche n11F023.3

Ainsi dans ce type de modle, le coefficient de ruissellement, non constant, devient une fonction du temps : chaque pas de temps il correspond au rapport entre le volume non infiltr et le volume total prcipit lors de lvnement (le ruissellement ne dbutant que lorsque lintensit est suprieure la capacit dinfiltration du sol) :

Cest ce modle de pertes qui est utilis dans plusieurs logiciels de dimensionnement de rseaux dassainissement eaux pluviales(2). OPS (Organisations Pelliculaires Superficielles) Lorsquil nexiste pas dcran vgtal pour intercepter lnergie cintique, limpact des gouttes de pluie provoque un tassement de la surface du sol, un clatement des agrgats et une redistribution des particules en surface conduisant la fermeture(2) En particulier PAPYRUS, dvelopp par le Ministre de lquipement. On trouvera des valeurs de fo et fc (mm/h) dans Encyclopdie de lhydrologie urbaine et de lassainissement , sous la direction de B. Chocat (Tec et Doc, 1997).

Partie 2 - Figure 2 : diagramme de classification des textures renseign en classe de sensibilit la battance Source : lrosion des solsdans les rgions de grande culture : aspects amnagements - A. V. Auzet - Cereg - 1990

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notions gnralesprogressive des pores et limpermabilisation de la surface du sol. Sur la crote structurale ainsi constitue, le ruissellement diffus commence se produire, entranant des particules de sol dans les micro-dpressions de la topographie, dans lesquelles elles se dposent en couches stratifies reposant en discordance sur la couche prcdente, et renforant encore limpermabilisation du sol. () Lors de loccurrence de telles Ops, ce nest plus la conductivit intrinsque du sol qui constitue la limite dinfiltration, mais bien celle de la couche de surface. Or cette permabilit de la couche de surface varie trs rapidement, en relation avec lvolution de ltat de surface. (3) La formation de ces Ops et laptitude correspondante des sols gnrer un ruissellement va dpendre : du taux de couverture du sol. Ainsi, indpendamment de la nature du sol, labsence ou non dune couverture et le type de vgtation sont les premiers paramtres qui interviennent au niveau de la potentialit dun sol dvelopper des Ops ; de la nature du sol en place et en particulier des formations superficielles. Certains sols par leur texture mme sont ainsi aptes dvelopper des Ops ; on parle alors de sols battants. Une bonne indication de la fragilit des sols par rapport la battance est sa teneur en argiles et limons, et la mesure frquemment propose est celle du rapport limon/argile. Le diagramme de classification des textures (pdologie, cf. Partie 2 - Figure 2) peut ainsi tre renseign en classes de sensibilit la battance ; du stade de dveloppement des Ops et de lhistoire du sol . Ce nest pas la seule intensit de laverse gnratrice du ruissellement qui conditionne ltat de surface du sol ; celle-ci rsulte entre autres de son histoire rcente et est notamment fonction de lintensit des pluies rcentes ayant prcd lvnement et ayant modifi la surface du sol. De mme, pour un vnement donn, la rponse globale dun sol une pluie aux caractristiques gnrales quivalentes (mme hauteur totale, mmes intensits moyenne et maximale) va dpendre de lordre de successions des intensits. Ruissellement partir des sols saturs : les aires contributives satures Dans certaines conditions gologiques, topographiques et gomorphologiques, la nappe peut tre proche de la surface, et ltat de la rserve hydrologique se marquer directement dans le paysage sous la forme de zones humides dont lextension est variable. Aussi sur ces bassins versants, le ruissellement est produit par la totalit de la pluie tombant sur une zone impermable(3) De leau qui tombe leau qui scoule. Processus de transferts lchelle des versants du bassin versant. Hydrologie continentale, Partie III. Claude Cosandey, Mark Robinson - Armand Colin - 2000.

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ou sature, dont ltendue varie avec le niveau moyen de la nappe phratique, et qui compose ce quon appelle les aires contributives satures : ce nest plus une partie des prcipitations sur toute la surface du bassin, comme dans la thorie de Horton, mais toute la prcipitation sur une partie du bassin qui gnre le ruissellement. Il convient aussi de souligner la variabilit spatiale des aires contributives satures lors dun vnement pluvieux : on assiste une extension des surfaces satures vers lamont. On a aussi montr que les aires contributives satures, si elles se situent le plus souvent au niveau des talwegs, peuvent aussi apparatre sur certaines parties du bassin versant. Jordan (1992) tudiant la formation des crues frquentes sur le petit bassin versant de la Haute Mentue (Suisse), observe que les nappes temporaires qui, lorsque les pluies sont faibles, ne se forment que sur une partie du bassin, qui correspond aux zones faibles pentes. Ces nappes sont lorigine du ruissellement par saturation dans les zones trs locales daffleurement de la nappe. La haute densit du rseau de drainage (naturel ou anthropique) constitue probablement des lments dacclration du transfert. Jordan conclut de ses diffrentes observations que bien que la topographie soit un lment important pour la prdiction des zones satures, dautres facteurs ont certainement une importance quivalente (4). Chacun de ces ensembles de processus (ruissellement hortonien / organisations pelliculaires de surface / aires contributives satures) induit un type de fonctionnement diffrent du systme bassin versant , et donc un poids trs diffrent des facteurs directement ou indirectement responsables des crues (intensit des pluies, hauteur totale des prcipitations, tat des rserves hydriques et hydrologiques). Il convient aussi dexaminer comment ces diffrentes formes de ruissellement sorganisent lchelle dun bassin versant, leur combinaison induisant le fonctionnement global du bassin.

Transformation des pluies en dbits - formules empiriquesLorsquune pluie tombe au sol, elle suit de nombreux cheminements avant datteindre lexutoire du bassin versant. Une fraction non ngligeable est intercepte par la couverture vgtale et natteint le sol quaprs un dlai de ruissellement le long des ramifications vgtales si tant est quelle ne soit pas finalement consomme par lvapotranspiration. La fraction qui atteint directement le sol chemine travers les accidents du terrain dans le sens de la plus grande() De leau qui tombe leau qui scoule. Processus de transferts lchelle des versants du bassin versant, Hydrologie continentale, Partie III. Claude Cosandey, Mark Robinson - Armand Colin.

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notions gnralespente si possible, convergeant vers lexutoire du bassin. Il existe plusieurs formules permettant destimer le dbit (gnralement dcennal) un exutoire donn (en ce qui nous concerne : le lieu du projet qui intercepte le bassin versant) partir des caractristiques du bassin versant et de la pluie. La plus simple est la mthode rationnelle, qui permet destimer le dbit dcennal en m3/s pour un bassin de taille infrieure 100 km :

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Transformation des pluies en dbits - modles conceptuelsAu-del des formules empiriques, un certain nombre de modles conceptuels ont t mis au point pour rendre compte des mcanismes de transformation des pluies en dbits. Ces modles mriteraient un dveloppement spcifique qui na pas sa place dans le prsent guide, mais pour plus dinformation sur une telle tude hydrologique, le lecteur pourra lire le tome 1 - hydrologie du guide mthodologique pour le pilotage des tudes hydrauliques, paratre sous le double timbre du ministre de l'quipement (Direction Gnrale Urbanisme Habitat Construction) et du ministre de l'cologie et du Dveloppement durable (Direction de la Prvention des Pollutions et des Risques), pilot par le Cetmef (Centre d'tudes Maritimes et Fluviales) et le Cemagref.

[Partie 2 - quation 2 - Dbit dcennal estim par la formule rationnelle]

o : C est le coefficient de ruissellement, I 10 est lintensit de pluie dcennale (en mm/h) et A est laire du bassin versant (en km). Lintensit de pluie dcennale est calcule en supposant que le dbit dcennal maximum est gnr par la pluie dont la dure est gale au temps de concentration du bassin versant, cest--dire, qui mobilise toutes les surfaces potentiellement contributrices au ruissellement avec lintensit de pluie maximale pour la frquence dcennale. En effet, lintensit de la pluie, pour une priode de retour donne, tant une fonction dcroissante de la dure de cette pluie, le dbit dcennal (maximum) lexutoire dun bassin versant est gnr par la pluie la plus intense, et donc, la plus courte, pour autant quelle mobilise toute la surface du bassin versant. La dure de pluie qui, pour une priode de retour donne, fournit le maximum de dbit lexutoire, est donc le temps minimal partir duquel tout le bassin versant est productif, et donc, le temps de concentration. Pour les bassins de 10 2 000 km, le Cemagref (Institut de recherche pour lingnierie de lagriculture et de lenvironnement) a labor une mthode appele CruPDix :

.1. - Dfinition et choix des crues de dimensionnement de louvragePriode de retourLa notion de priode de retour est indissociable de lanalyse de risque hydrologique et pourtant, elle rserve quelques mauvaises surprises qui la manipule sans prcaution (technique comme oratoire). La priode de retour est linverse de la frquence de nondpassement dune valeur de dbit, volume total ou encore hauteur deau considre comme rfrence. Elle correspond une apprciation de la dure moyenne de rptition de lvnement ou encore, une probabilit annuelle doccurrence. Ainsi, une crue de priode de retour T a, chaque anne, une chance sur T de se produire. Loccurrence dune telle crue lanne N ne change en rien la probabilit (qui reste donc de 1/T) de retrouver cette mme intensit de crue lanne N+1. Ainsi, il est faux de dire que la crue de priode de retour T arrive une fois tous les T ans, sauf le considrer en moyenne, ce qui induit le profane en erreur. Cependant, bien sr, la probabilit de rencontrer plus dune fois la crue de priode de retour T durant T annes est infrieure la probabilit de ne la rencontrer quune fois.

[Partie 2 - quation 3 - Formule de CruePDix]

o R est un coefficient rgional et P10 est la pluie dcennale (mm). Les dbits de frquence infrieure celle doccurrence dcennale se dduisent du dbit dcennal ainsi calcul en considrant : Q25 = 1,2.Q10 Q50 = 1,5.Q10 Q100 = 2,0.Q10

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notions gnralesAinsi, une valeur de rfrence de dbit de priode de retour T0 = 100 ans a : 10 % de chances dtre dpasse dans les 10 prochaines annes, 18 % dans les 20 prochaines annes, 40 % dans les 50 prochaines annes, 65 % dans les 100 prochaines annes, 87 % dans les 200 prochaines annes, etc.

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des eaux (confluence au sens large, en crue) des deux affluents : le dsquilibre induit par le remblai peut alors tre plus prgnant pour une crue forte sur lune des rivires et modeste sur lautre. La concomitance dvnements hydrologiques ne donne pas systmatiquement lieu un vnement de probabilit plus faible que celle des deux vnements qui lont gnr. Lindpendance statistique des crues de lun et lautre affluent conditionne directement la prise en compte dune probabilit rsultante comme le produit des probabilits des vnements spars qui lui ont donn naissance ou comme la fusion de ces probabilits. Ainsi, si les crues des deux affluents sont totalement indpendantes, une crue dcennale sur lun naura quune chance sur cent de rencontrer une crue dcennale sur lautre affluent exactement la confluence, soit une crue rsultante centennale. Inversement, si les crues sont totalement lies (vnements climatiques et cintiques de crue), la crue rsultante ne sera que dcennale.

Partie 2 - Figure 3 : probabilit de dpassement dune crue de rfrence Source : D. Goutx (Cete Normandie-Centre - Lrpc Blois)

Crues de conception du projetLe projet doit tre conu pour navoir aucun impact sensible sur la crue de plein bord, afin de ne pas provoquer de dbordement prmatur du fait de sa seule prsence. Il doit galement limiter ses impacts hydrauliques des valeurs admissibles pour la crue de rfrence du risque dinondation, savoir, les Phec (Plus Hautes Eaux Connues) si la valeur du dbit correspond une priode de retour au moins centennale ou, dfaut, la crue centennale.

Crues significativesLa varit des incidences du pont sur les coulements de rivire saccompagne dune varit presque quivalente de situations hydrologiques de projet pour lesquelles le projet doit tre conu. On peut ainsi considrer : la crue de plein bord (de priode de retour de 1 5 ans en gnral, selon le degr dartificialisation du cours deau), pour laquelle les obstacles en lit mineur gnrent limpact maximal, tout exhaussement de la ligne deau se traduisant directement par une aggravation du risque dinondation ; la crue moyenne (de priode de retour 10 30 ans), susceptible de survenir pendant le chantier : - la crue forte (de priode de retour 50 ans environ), pour laquelle le pont ne doit subir aucun dommage ; - la crue rare (de priode de retour 100 ans environ), pour laquelle le pont ne doit provoquer aucune gne sensible alentours ; - la crue exceptionnelle (de priode de retour 200 500 ans), pour laquelle le pont doit limiter la gne alentours en cas de dysfonctionnement. A cette liste, il faut ajouter toutes les combinaisons possibles avec un affluent dimportance quivalente au cours deau franchi par le projet de pont. La concomitance de crues dampleur quivalente sur le cours principal et sur laffluent nest pas ncessairement la combinaison la plus pnalisante, notamment quand le remblai daccs du projet coupe la zone de mlange

Crues de vrification du projetLe projet doit tre conu pour ne pas aggraver le risque dinondation par sa prsence ou sa dfaillance possible lors des crues exceptionnelles dpassant les crues de conception du projet. Une valeur de dbit de pointe correspondant une priode de retour comprise entre 200 et 500 ans, en fonction de la sensibilit des enjeux environnants, pourra tre retenue.

Crues de chantierLe chantier de construction obstrue gnralement plus le cours deau que le projet lui-mme, et doit tre conu de manire satisfaire aux exigences de bonne gestion du risque dinondations. Il est admis que les chantiers dans le lit des cours deau doivent minimiser autant que faire se peut limpact hydraulique pour toutes les crues de priode de retour infrieure ou gale 10 ans par anne de dure du chantier, et devenir

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notions gnralestransparents(5) (cest--dire, sans impact sensible) pour des crues plus fortes. La dtermination des conditions hydrologiques de conception et de vrification des ouvrages ne se limite pas ncessairement un simple traitement statistique des donnes des stations hydromtriques voisines. Le concepteur doit toujours avoir en tte le fait que les infrastructures qui perturbent les coulements en lit mineur ou en lit majeur, ainsi que les amnagements hydrauliques spcifiquement ddis la matrise des coulements, sont susceptibles davoir une incidence sur lhydrologie au droit du projet, incidence dont ne rendra pas forcment compte une station hydromtrique. Ainsi, lorsque la zone du projet se trouve sous linfluence du marnage dun cours deau voisin, de la mare ou encore des manuvres dun barrage mobile de rgulation des niveaux deau, en aval (en rgime fluvial) ou en amont (en rgime torrentiel), le concepteur devra prendre garde au fait que la situation hydrologique la plus contraignante ne sera certainement pas une situation dhydrologie libre, mais une situation combinant une hydrologie de lamont assez forte et une hydrologie de laval donnant des niveaux deau plutt bas.

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calcule dans le lit majeur sans suivre ncessairement les ventuels mandres du cours deau. Dans une section en travers donne, on appelle miroir linterface entre leau et lair. La largeur au miroir est la distance entre les deux limites dextrmit du miroir. Note B, elle sexprime en mtres (m). Dans les rivires chenalises, on appelle plafond la largeur horizontale du fond (le plat fond) lorsquelle existe.B

S p

Partie 2 - Figure : rayon hydrauliqueSource : D. Goutx (Cete Normandie-Centre - Lrpc Blois)

Notion de rayon hydrauliqueLa surface deau comprise dans le plan de coupe de la section en travers, est la surface mouille, note S et exprime en mtres carrs (m). Elle est borne en limite suprieure par linterface entre leau et lair (le miroir), mais aussi par une courbe dinterface entre leau et le lit, dont la longueur curviligne est appele primtre mouill, not p et exprim en mtres (m). Enfin, on dfinit le rayon hydraulique comme tant le rapport de la surface mouille par le primtre mouill, not Rh, exprim en mtres (m) (cf. Partie 2 - Figure 4). Cette quantit retranscrit peu ou prou linfluence de linterface eau - lit sur la capacit dcoulement de la section, cest--dire que pour une surface donne, plus le rayon hydraulique est important, plus linterface eau - lit est rduite ou encore, plus la frontire de la section dcoulement est de nature air plutt que lit . Le frottement de leau sur lair tant moindre que celui de leau sur le lit, la section mouille est le sige de laction motrice de lcoulement tandis que le primtre mouill est la zone o sexerce laction de ralentissement par frottement, et donc, que le rayon hydraulique traduit, pour une gomtrie donne, le rapport de force entre action motrice et ralentissement.

. - Notions dhydraulique..1 - coulements surface libre et en chargeCaractrisations gomtriquesOn oriente lcoulement dune rivire de lamont vers laval et on se positionne souvent le long du cours deau laide du Point Kilomtrique (PK). La pente du cours deau joue un rle prpondrant dans la nature des coulements, car cest par elle que laction de la pesanteur se transforme en force motrice du fluide. Exprime en mtres par mtre (m/m) et souvent note i ou I, elle se calcule en divisant la dnivele altimtrique entre les points du fond de deux sections distinctes de rivire, par la distance horizontale qui les spare. Elle est souvent donne en valeur absolue, bien que localement, pour un tronon de rivire donn, le point bas de lamont puisse tre plus bas que le point bas de laval. La pente de la rivire peut tre diffrente de la pente de la valle, qui est(5) Cette notion et lexigence de transparence hydraulique qui lui est corollaire sont prcises au paragraphe 2.3.3.

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notions gnralesGrandeurs hydrauliquesPour une section dcoulement S donne, on dfinit le dbit comme tant le volume de liquide coul travers la surface S de cette section pendant lunit de temps. Il est not Q, et sexprime en m3/s. Si V(M) dsigne la composante normale la section considre en un point M de celle-ci, on a :

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et, pour lnergie cintique, lie aux forces

dinertie. Pour un coulement surface libre, la pression dans le liquide tant considre comme hydrostatique, et lcoulement ne dcrivant pas une courbe prononce, on peut tablir la charge hydraulique de toute une section dcoulement partir de la somme des charges des points la constituant :

On dfinit la vitesse moyenne de lcoulement, note V et exprime en mtre par seconde (m/s), le rapport du dbit par la section normale dcoulement. Le niveau deau, not Z et exprim en mtres (m), est compt dans un systme de rfrence altimtrique(6). La hauteur deau, note h et exprime en mtres (m), est compte partir du fond de la rivire en un endroit donn. Lorsque le fond est irrgulier, on estime que la hauteur moyenne hmoy est le rapport de la section mouille S par la largeur au miroir B.

[Partie 2 - quation 5 - Charge hydraulique dans une section]

o

est le coefficient, dit de

Charge hydrauliqueLe niveau deau nest que lune des composantes dune grandeur caractristique plus pertinente de lnergie du cours deau : la charge hydraulique, galement appele charge de Bernoulli, note H, exprime en mtres (m). En un point M donn de la trajectoire dune molcule de fluide, cette quantit a pour expression :

Boussinescq, qui traduit lhtrognit des vitesses dans la section en travers. Usuellement, ce nombre varie entre 1 et 1,15. Dans la pratique, il est rare de considrer b 1, mais certains modles de simulation permettent au modlisateur de fixer une valeur de ce paramtre diffrente de 1.Les perturbations induites par une infrastructure de transport traversant une valle inondable sont gnralement rapportes la charge hydraulique dans la section concerne, et appeles pertes de charge singulires. Les rpercussions de ces pertes de charge singulires portent la fois sur la hauteur deau et sur la vitesse dcoulement, mais dans des proportions et des directions qui dpendent troitement du rgime dcoulement du cours deau.

[Partie 2 - quation - Charge hydraulique en un point]

Rgime dcoulementOn classe les cours deau et leurs coulements en deux catgories dhydraulique : ceux du rgime fluvial et ceux du rgime torrentiel. Pour une charge hydraulique H donne, deux couples (Z, V) peuvent convenir : (Zf, Vf ) et (Zt, Vt). Le rgime fluvial se caractrise par une vitesse faible et une hauteur deau importante, tandis que le rgime torrentiel se caractrise par une vitesse importante et une hauteur deau faible : Zf > Zt et Vf < Vt La pente dtermine le rgime qui stablit en un endroit donn pour une charge hydraulique donne, mais le critre didentification du rgime repose sur le nombre de Froude :

Z est la cote absolue ou le niveau deau, exprime en mtres (m). P est la surpression, exprime en Pascals (Pa), au-dessus de la pression atmosphrique. est la masse volumique de leau (1 000 kg/m3). g est lacclration de la pesanteur (9,81 m/s). V est la vitesse, exprime en mtres par seconde (m/s). Lun des intrts de cette charge hydraulique est dintgrer les contributions des trois facteurs dnergie mcanique hydraulique que sont : Z, pour lnergie potentielle, lie aux forces de volume ; , pour lnergie de pression, lie aux forces de pression ;

[Partie 2 - quation 6 - Nombre de Froude](6) Le systme altimtrique de rfrence est actuellement celui du Nivellement Gnral de la France de lIGN fix en 1969, en abrg : NGF IGN 69. De nombreuses donnes sont toutefois encore connues dans des systmes altimtriques antrieurs : NGF ortho , Bourdaloue , Lallemand . Les carts entre ces rfrentiels peuvent tre de plusieurs dcimtres.

Le rgime fluvial est caractris par F < 1 tandis que le rgime torrentiel est caractris par F > 1.

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notions gnralesLa principale consquence de cette distinction pour la conception des amnagements de rivire est que, selon le rgime, les obstacles et autres perturbations ponctuelles de lcoulement vont avoir des rpercussions plutt vers lamont en rgime fluvial, et plutt vers laval en rgime torrentiel. On caractrise le rgime critique, pour lequel le nombre de Froude est gal 1, qui marque la sparation entre rgime fluvial et rgime torrentiel, par la hauteur critique hc. En rgime fluvial, la hauteur deau est suprieure la hauteur critique. En rgime torrentiel, la hauteur deau est infrieure la hauteur critique. La hauteur critique dpend uniquement de la gomtrie du profil en travers et du dbit considr.

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Ce paramtre est gnralement talonn partir de couples (Q, Z) connus au droit de la section de calcul si on dispose de telles donnes. Entre deux lieux dtalonnage, la rugosit est soit prise gale la rugosit de la section talonne la plus proche en aval, soit interpole entre les rugosits des sections talonnes encadrant la section du calcul. Lorsque, comme cest le cas dans la majorit des calculs, les rugosits des lits mineur et majeur sont distingues, un premier couple (Q,Z) pour une situation de faible dbordement sert talonner la rugosit de lit mineur, et un deuxime couple (Q,Z) pour une situation de large dbordement sert talonner la rugosit de lit majeur.

RugositLe thorme de Bernoulli nonce que la charge hydraulique entre deux sections conscutives se conserve, aux pertes de charge rgulires par frottement prs. On dfinit la perte de charge linaire, note j et exprime en mtre par mtre (m/m), comme tant la pente de la ligne de charge hydraulique :

Pertes de charge singuliresLorsque les caractristiques gomtriques du lit varient, cela provoque une perturbation des trajectoires des particules de fluide. Les veines liquides tendent pouser les formes gomtriques contre lesquelles elles glissent, la couche limite prs. Mais lorsque la vitesse des particules de fluide est trop importante par rapport langularit de lobstacle, les veines liquides se dcollent localement de lobstacle puis se rabattent vers la position quelles auraient d occuper en labsence de lobstacle, quelque distance plus en aval. Dans la zone comprise entre ce point de dcollement, le retour la trajectoire non-perturbe et lobstacle, leau amorce un mouvement de recirculation qui ralimente le point de dcollement de la veine liquide, si bien quil en rsulte une dissipation localise de charge hydraulique. Ce phnomne est dsign sous lappellation de perte de charge singulire.

[Partie 2 - quation 7 - Perte de charge]

Ces pertes de charge rgulires rsultent de linteraction entre le lit rugueux et le fluide qui gnre une couche limite fortement turbulente. Elles sont estimes laide de la formule de Strickler (qui tablit une relation entre la vitesse moyenne, le rayon hydraulique et la pente en rgime uniforme) :[Partie 2 - quation 8 - Perte de charge linaire par frottement de Strickler]

Le coefficient de Strickler K traduit linverse de la rugosit du primtre mouill du lit. Il prend usuellement des valeurs comprises entre 25 et 45 en lit mineur, et entre 5 et 15 en lit majeur. Le coefficient de Manning n est tout simplement linverse du coefficient de Strickler K. Il est galement courant de considrer le coefficient de rugosit de Chzy C qui est li K par la relation : C = K.Rh1/6[Partie 2 - quation 9 - Relation entre K et C] Le concepteur de projet a rarement recours lui-mme la formule de Strickler ou de Chzy, mais la note hydraulique qui sera produite son intention comprendra ncessairement une modlisation de la rugosit selon lune de ces formules. Le concepteur pourra alors apprcier la pertinence des coefficients de rugosit proposs par lhydraulicien en se reportant aux tables des valeurs usuelles.

Partie 2 - Figure 5 : schma des lignes de courant dans le lit mineur perturb par un franchissement, et visualisation des tourbillons gnrs dans le sillage de la pile Source : D. Goutx (Cete Normandie-Centre- Lrpc Blois)

Hydraulique et ponts

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notions gnralesLes pertes de charge singulires sont estimes laide dune formulation dite de Borda directement emprunte lhydraulique des coulements en charge :

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Cx = 2,0

Cx = 1,6

Cx = 1,2

Cette formule trs simple combine les facteurs reprsentatifs de la gomtrie (et notamment de son hydrodynamisme) dans un paramtre adimensionnel qui, multipli par la fraction dnergie cintique lie la survitesse des veines liquides au droit de lobstacle, fournit une valuation de la charge hydraulique totale perdue dans la section entire o se trouve lobstacle. Le pendant de cette dissipation dnergie subie par lcoulement est, pour lobstacle, lexistence dune force de trane qui est estime laide dune formulation classique en mcanique des fluides :

Cx = 1,0

Cx = 0,3Partie 2 - Figure 6 : illustration de quelques formes gomtriquesSource : D. Goutx (Cete Normandie-Centre - Lrpc Blois)

[Partie 2 - quation 10 - Force de trane]

o est la masse volumique, V la vitesse de lcoulement au droit de lobstacle, A le matre-couple de lobstacle selon la direction de lcoulement, et C x le coefficient de pntration dans leau (ou coefficient de trane).

Forme de lobstacle Circulaire En cigare avec des faces amont et aval en demi-cercle Elliptique (rapport grand axe / petit axe de 2/1) Elliptique (rapport grand axe / petit axe de 4/1) Elliptique (rapport grand axe / petit axe de 8/1) Carr Triangulaire (dangle laxe dcoulement 30) Triangulaire (dangle laxe dcoulement 60) Triangulaire (dangle laxe dcoulement 90) Triangulaire (dangle laxe dcoulement 120)

Coefficient de trane 1,20 1,33 0,60 0,32 0,29 2,00 1,00 1,39 1,60 1,72

Partie 2 - Tableau 1 : coefficients de trane de quelques formes usuelles

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Cours deau et ponts

notions gnralesEnfin, il faut signaler que cette zone de tourbillons (dautant plus violents que la vitesse est forte) est trs active dun point de vue de son potentiel drosion. Ce mouvement tourbillonnaire priodique (7) de lcoulement local exerce sur le lit une contrainte de cisaillement sensible et continue qui peut gnrer dimportants affouillements jusqu ce que se soit forme une zone tampon (fosse daffouillement) de dissipation des tourbillons (cf. partie 3, point 3.2). La dlimitation de la zone dans laquelle se dveloppent les tourbillons est assez difficile, car le phnomne relve de lhydraulique tridimensionnelle. Une formule permet dapprocher de manire paramtrique la longueur maximale de dveloppement des tourbillons :

))

[Partie 2 - quation 11 - Longueur de dveloppement de grands tourbillons](8)

o C est le coefficient de rugosit de Chzy, h est la hauteur deau moyenne et g lacclration de la pesanteur. Selon la configuration gomtrique locale, le dveloppement des tourbillons peut tre contrari par un obstacle physique qui confine les tourbillons dans un espace restreint, augmentant encore la capacit drosion du phnomne.

Partie 2 - Figure 7 : lignes de courant et champs de pressions dans le sillage dune pile rondeSource : extrait du site Internet http://joas.free.fr/studies/karman/vonkarma.htm

(7) appele alle de tourbillons de Von Karman (8) daprs Rock Manual, section .3

LPile n1 Pile n2

Partie 2 - Figure 8 : modlisation 2D des coulements dans le sillage des piles du pont de Chaumont sur Loire en crue centennale Source : K. Leroy, D. Goutx (CeteNormandie-Centre - Lrpc Blois)

Partie 2 - Figure 9 : modlisation 2D dun coulement tourbillonnaire entre deux piles de pont Source : D. Goutx (CeteNormandie-Centre - Lrpc Blois)

Hydraulique et ponts

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notions gnralesCourbes de remousEn dehors de toute perturbation, lcoulement tend adopter les valeurs des variables dtat dun coulement uniforme quivalent cet endroit, caractris par la gomtrie locale et notamment, la pente locale. La hauteur deau de lcoulement uniforme quivalent vers laquelle tend lcoulement rel graduellement vari est appele hauteur deau normale , hn. La gne dun obstacle sur lcoulement se traduit en ralit, pour un cours deau surface libre, par une rpartition spatiale de la perte de charge singulire en amont et en aval de lobstacle qui la gnre. carte de son niveau normal, la ligne deau tend retrouver celui-ci moyennant des courbes de raccordement quon appelle courbes de remous . Autrement dit, pour une hauteur deau h scartant de la hauteur normale hn, on connat la courbe dattnuation de la quantit h - hn vers lamont ou vers laval de la perturbation, selon le rgime. A titre dillustration, en lit simple, lquation de ces variations scrit :

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Les courbes de remous ci-dessous montrent quen rgime fluvial local, partir dune hauteur h donne, on tend toujours lamont vers une valeur dtermine hn ou hc : il suffit de connatre la hauteur dans une section donne pour dterminer la hauteur dans les sections situes en amont. Et de fait, une perturbation de lcoulement (telle quun pont) un endroit donn na de rpercutions quen amont de celui-ci. A linverse, en rgime torrentiel local, partir dune hauteur h donne, on tend vers une valeur connue hn ou hc... vers laval : il suffit de connatre la hauteur deau dans une section donne pour dterminer la hauteur deau dans les sections situes en aval. Une perturbation (telle quun pont) apporte lcoulement naura de rpercussions quen aval de celui-ci. Pour ces raisons, on dit que le rgime fluvial est contrl par laval, tandis que le rgime torrentiel est contrl par lamont.

[Partie 2 - quation 12 - Courbes de remous]

o i est la pente du fond, j est la pente de la ligne de charge, F est le nombre de Froude.

hn J < Jc hc J > Jc hc hn

Source : D. Goutx (Cete Normandie-Centre - Lrpc Blois)

Partie 2 - Figure 10 : rgime fluvial normal (hn > hc )

Partie 2 - Figure 11 : rgime torrentiel normal (hn < hc )Source : D. Goutx (Cete Normandie-Centre - Lrpc Blois)

Rgime fluvial local (h > hc) vers lamont, h tend retrouver hN vers laval, si h > h n, la ligne deau tend vers lhorizontale et si hn > h > hc, h tend vers hc Rgime torrentiel local (h < hc) vers lamont, h tend vers zro vers laval, h tend vers hc

Rgime fluvial local (h > hc) vers lamont, h tend vers hc vers laval, la ligne deau tend vers lhorizontale Rgime torrentiel local (h < hc) vers lamont, si h > hn, h tend vers hc et si h < hn, h tend vers zro vers laval, h tend vers hn

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Cours deau et ponts

notions gnralesAttnuation du remousLa perte de charge singulire lie un ouvrage est maximale (h - hnmax) proximit immdiate de lobstacle quil reprsente. Mais cette valeur ne suffit pas apprcier correctement limpact hydraulique de cet ouvrage : il faut connatre la valeur de lexhaussement provoqu par louvrage dans toute sa zone de remous, cest--dire, dans toute la zone o la prsence de lobstacle se traduit par un cartement de la ligne deau par rapport lhydraulique de ltat avant amnagement. En premire approche, on peut calculer la longueur damortissement du remous. Cette longueur L est telle que la quantith - hn est infrieure une certaine tolrance (note ) une distance L de lobstacle gnrant le remous. Lorsque des caractristiques de pente moyenne (i), hauteur moyenne (hmoy) et de nombre de Froude (F) moyen sont connues sur un tronon homogne de cours deau, et en faisant lhypothse que le seul lit mineur supporte toute la perte de charge et lamortissement du remous rsultant, la formule suivante(9) permet de calculer la longueur damortissement du remous :

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Partie 2 - Figure 12 : illustration de la longueur damortissement du remous Source : D. Goutx (Cete Normandie-Centre - Lrpc Blois)

hmoy peut, pour faciliter le calcul, tre assimile hn. Si on considre : alors : le remous rsiduel la distance L = L 0 est gal 37 % du remous maximal (h - hnmax) ; le remous rsiduel la distance L = 2,3.L0 est gal 10 % du remous maximal (h - hnmax) ; le remous rsiduel la distance L = 4,6.L0 est gal 1 % du remous maximal (h - hnmax).

Remous (cm)11 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 0 10 000 20 000 30 000 40 000 50 000 60 000 70 000 80 000 90 000

Remous (cm)11 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1 0 0 500 1 000 1 500 2 000 2 500 3 000 3 500

Distance en amont (m)Partie 2 - Figure 13 : exemple damortissement paramtrique dun remous maximal de 10 cm sur un cours deau de pente 1 pour dix mille, de hauteur deau moyenne de 6 m pour un nombre de Froude de 0,016 (la zone de rsidu de remous infrieure 1 cm est grise pour mmoire) Source : D. Goutx (Cete Normandie-Centre - Lrpc Blois)

Distance en amont (m)Partie 2 - Figure 1 : exemple damortissement paramtrique dun remous maximal de 10 cm sur un cours deau de pente 1 pour mille, de hauteur deau moyenne de 3 m pour un nombre de Froude de 0,13 (la zone de rsidu de remous infrieure 1 cm est grise pour mmoire) Source : D. Goutx (Cete Normandie-Centre - Lrpc Blois)

(9) Nicollet, G., and Uan, M. (1979). Ecoulements permanents surface libre en lits composs La Houille Blanche (1), 21-30.

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notions gnrales.. - Complexit des coulements rels dun cours deauEn ralit, lcoulement ne rpond pas toujours aux hypothses filaires. Plusieurs facteurs sont susceptibles de perturber les caractristiques locales spatialises des coulements. Ces facteurs doivent tre anticips correctement par le concepteur de pont pour minimiser la gne occasionne par son projet.

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naturelles et les obstacles naturels et artificiels qui parsment le lit majeur. Selon lampleur du dbordement, les mmes obstacles peuvent voir leur influence varier sensiblement. Lorsque le dbordement nest que de lordre de quelques dcimtres, la moindre route en lger remblai, le moindre massif de ronces denses, le moindre champ de bls levs peuvent constituer un obstacle quasiment infranchissable par lcoulement en lit majeur ces endroits. Cela se traduira par une vitesse moyenne nulle ou quasi-nulle. Mais de fait, une telle obstruction locale se traduira par un report des coulements ici contraris vers les quelques zones de lit majeur o lcoulement est possible ou favoris, comme par exemple une rue parallle lcoulement, un chemin forestier entretenu au milieu dun massif densment bois. Ces exemples montrent galement quel point la saison pour laquelle lhydraulique est tudie peut avoir une forte incidence lorsque le lit majeur est majoritairement consacr lagriculture. Si un champ de bls levs peut constituer un obstacle srieux au passage des eaux, le mme champ en hiver, fig par une gele svre, devient une zone prfrentielle dcoulement. De mme, il est vident quavec lamplification du dbordement, des obstacles trs contraignants peuvent tre vaincus et voir leur influence sur les coulements fortement amoindrie. Ainsi, des bls finissent par se coucher lorsquils sont submergs par plusieurs mtres deau, les petits remblais sont surverss, etc. Or, il est vident que, pour une crue de trs fort dbit maximal, le lit majeur passe successivement par des tats de rugosit "apparente" correspondant celle de faibles dbordements contraris par le moindre obstacle, puis celle de dbordement moyen trouvant son passage dans les obstacles les moins durs, puis de dbordement majeur faisant fi de la plupart des obstacles submergs, avant damorcer la dcrue.Les configurations de projet doivent donc considrer ltat gnral des facteurs concourrant la rugosit hydraulique.

Zone de cisaillement la frontire entre lit mineur et lit majeurEn premier lieu, les coulements en lit mineur sont plus rapides que les coulements dans le lit majeur, car la rugosit du lit mineur, frquemment en eau, est moindre que celle du lit majeur, occasionnellement ou rarement en eau et moins adapt au passage de leau. On peut ainsi considrer sparment un coulement dans le lit mineur et deux coulements de lit majeur de part et dautre du lit mineur, relis par une zone de transition turbulente o les coulements sont fortement cisaills. On considre communment que cette zone de transition dans le lit majeur prsente une largeur gale 1/5me de la largeur du lit mineur, et que la vitesse moyenne y passe linairement de la valeur du lit mineur la valeur du lit majeur. La situation relle est toutefois complique par le fait que la vitesse moyenne dcoulement en lit majeur est gnralement une vue de lesprit, une valeur moyenne ne rendant pas compte des fortes htrognits de vitesses dcoulements dans chaque lit majeur.Le concepteur veillera donc ne pas perturber la zone de cisaillement, et donc, enjamber non-seulement le lit mineur tel quil est peru ltiage ou sur les cartes, mais aussi les 20 % de surlargeur supplmentaire de part et dautre, sauf considrer que des lments topographiques structurants empchent la formation de cette zone latrale.

Htrognit des rugosits et des coulements en lit majeurLe lit majeur nest par dfinition pas une zone faonne par lcoulement pour une optimisation des cheminements hydrauliques comme peut ltre le lit mineur. Cest plutt une zone dont la topographie est assez faiblement accidente, et dont loccupation du sol et les amnagements anthropiques saffranchissent totalement ou presque des caractristiques topographiques lchelle de variations qui intresse lhydraulique, cest--dire, de lordre du dcimtre au mtre. Ainsi, lorsque les eaux dun cours deau dbordent et spandent dans le champ dexpansion, elles doivent littralement trouver un chemin travers les opportunits topographiques

Topologie des coulements en lit majeurLa rugosit locale apparente quun obstacle peut opposer aux coulements en lit majeur ne suffit pas apprhender correctement les coulements dbordants dans la situation non encore amnage. Il ne suffit pas une zone locale dtre de faible rugosit pour entraner un coulement de vitesse sensible. Encore faut-il que les coulements trouvent leur chemin travers le lit majeur pour atteindre cette zone, et quils puissent en sortir. Lanalyse des cheminements de leau travers le lit majeur permet dtablir une topologie hydraulique du lit majeur.

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Cours deau et ponts

notions gnralesLes diffrentes composantes de lespace occup par la crue maximale dun cours deau peuvent tre le sige dcoulements de caractristiques trs diffrentes : coulements prfrentiels : dans le lit mineur et dans les zones de cheminement prfrentiel le long de talwegs, rus longitudinaux ou encore bras fossiles du cours deau en lit majeur, les coulements ont tendance prendre de la vitesse et entraner autour deux les veines liquides plus lentes ; la dimension caractristique de ces coulements est la section mouille active dans un profil en travers de lcoulement et la connectivit effective tant lamont qu laval du cheminement ; zones dexpansion des crues : dans le lit majeur, ltalement des eaux de dbordement vitesse faible mais non-nulle puise naturellement le dbit de pointe des crues ; la dimension caractristique de ces coulements est la surface de laminage ; zones de stockage deau : dans certaines zones du lit majeur encadres dobstacles longitudinaux et transversaux formant des coins deau, les eaux de dbordement sont piges et ne peuvent ressortir (par le mme endroit que le point dentre) que lorsque le niveau de crue diminue ; la dimension caractristique de ces coulements est le volume retenu sous une cote donne.

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difficilement que le lit est large ; la pente moyenne, et surtout, la vitesse moyenne des coulements en lit mineur, ou tout autre indice rsultant dune constatation in situ, afin didentifier le rgime normal du cours deau (fluvial ou torrentiel) ; la mobilit relative du lit (cf. Partie 3, point 3.2.2) ; les enjeux situs en amont du projet (en rgime fluvial) ou en aval du projet (en rgime torrentiel) qui sont susceptibles de subir des aggravations du risque dinondation du fait du projet. Lors du dossier dAvant-Projet, limportant, pour le concepteur, est de dterminer les ouvertures hydrauliques prvoir dune part sur le lit mineur, et dautre part, dans le lit majeur (ouvrages de dcharge). Gnralement, la mise en uvre des mthodes classiques (abaques de Bradley ou de Rehbock ou lun de leurs nombreux avatars) suffit pour disposer dune ide convenable de la largeur totale des ouvrages de dcharge prvoir. Le morcellement de cette largeur totale doit tre prvu pour adapter les ouvertures aux cheminements secondaires identifis dans le lit majeur en priode de crue. Ces calculs ncessitent de connatre, au droit de la zone de projet, en plus des paramtres dtermins au moment de ltude de trac : la hauteur deau en lit mineur ( laide dun calcul hydraulique) pour la ou les crues de projet et donc, pour les dbits correspondants ( laide dun calcul hydrologique) ; ainsi quune ide paramtrique de la rpartition des eaux entre lit mineur et lit majeur en fonction de lenvironnement et de laccessibilit hydraulique des abords du projet ; le nombre et le type de piles envisages (rondes, carres, groupes par deux, trois ou plus, etc.). En phase de conception dfinitive du projet, le matre duvre doit finaliser les ouvrages hydrauliques pour maximiser leurs chances de remplir durablement la fonction qui leur sera assigne, et pour ce faire, il lui faudra dfinir plus prcisment, au droit du projet : le type douverture hydraulique et surtout, de revtement de la surface de contact entre leau et louvrage ; le type dcoulement dans louvrage, et surtout, les ventuelles transitions entre rgimes fluvial, critique et torrentiel ; le type de raccordement entre la section de louvrage et la surface du remblai (voile bton en ailes 45, etc.), dans un souci conjoint daccompagnement de la veine liquide pour rduire la perte de charge lentre ou la sortie de louvrage et de minimisation du risque drosion la jonction entre louvrage en dur et le remblai vulnrable ;

..3 - Conduite des calculs (donnes ncessaires, calage dun modle)Lobjet de ce paragraphe nest pas de donner toutes les clefs de ralisation dune tude hydraulique en bonne et due forme. Pour lire en dtail la mthodologie recommande en vue de la dtermination des caractristiques hydrologiques et hydrauliques pertinentes, pralablement aux choix de conception dun pont notamment, le lecteur se reportera au guide mthodologique pour le pilotage des tudes hydrauliques, paratre sous le double timbre du ministre de lquipement (Dguhc) et du ministre de lcologie et du Dveloppement durable (Dppr), sous la direction technique du Cetmef et du Cemagref. Il est toutefois possible de dcomposer sommairement les tudes mener pour la dtermination des quantits hydrauliques-clefs dans la dcision du concepteur. Au stade des tudes de trac, il importe que le concepteur identifie les cheminements prfrentiels et la topologie gnrale des coulements de la valle franchir, afin de retenir le trac qui perturbe a priori le moins possible les coulements du cours deau. Il sagira donc pour lui didentifier : la largeur du lit moyen, occup par les crues moyennes ; la largeur du lit majeur, dans lequel la transparence hydraulique devra tre assure, etc, et ce dautant plus

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notions gnrales le type de traitement du sol dans les ouvrages de dcharge ; et ce, afin damliorer la prcision des estimations des pertes de charge singulires engendres par chaque ouvrage de dcharge, mais galement, vrifier la bonne rpartition des coulements provenant de lamont dans les divers ouvrages de dcharge, laide dune analyse fine des coulements. Celle-ci peut se raliser soit laide dun modle numrique 1D permettant de diffrencier les tubes de courant desservant les divers ouvrages, soit laide dun modle 2D si la complexit de la topologie des coulements ou encore, le biais de linfrastructure routire en travers de la valle inondable, le justifient. Enfin, le matre duvre devra produire une tude dimpact en bonne et due forme, dans laquelle il devra notamment dmontrer linnocuit relative de linfrastructure pour la crue de rfrence et pour la crue de chantier notamment, en fonction des options de conception dcoulant des prcdentes analyses.

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les incidences .3 - Incidences des ponts sur les coulements liquides.3.1 - Modification du rgime dcoulementPar la perte de charge que sa prsence introduit dans un coulement fluvial normal, un pont peut provoquer un changement de rgime. Par la modification ventuellement consquente des caractristiques gomtriques locales et laugmentation directe de la hauteur critique dans les sections dcoulement o il empite, un pont peut provoquer un rgime torrentiel local dans un rgime fluvial normal. Dans la figure de gauche, le niveau deau au droit de linfrastructure reste suprieur la cote du rgime critique (h c), si bien que lcoulement, quoique acclr au passage de lobstacle, demeure en rgime fluvial. Dans la figure de droite, le profil en long de la ligne deau franchit la ligne du rgime critique, si bien que lcoulement passe successivement, de lamont vers laval, par un rgime fluvial, le rgime critique, un

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rgime torrentiel, avant de retrouver un rgime fluvial. Cette dernire transition est violente et saccompagne dun phnomne spcifique de dissipation dnergie hydraulique appel ressaut . La formation dun ressaut hydraulique aux abords dun ouvrage fait peser un risque substantiel sur la prennit de louvrage, car son action rosive est trs puissante. Le concepteur douvrage doit rechercher la suppression de ce phnomne par tous les moyens. Dans un lit de cours deau bien rgulier (cest--dire, vraisemblablement artificialis), le risque de ressaut hydraulique peut tre apprci simplement par comparaison entre la hauteur critique(10) (hc) au droit de louvrage et la hauteur normale hn laval immdiat de louvrage. Mais ds lors que le lit du cours deau nest pas de forme rectangulaire ou trapzodale, le concepteur doit examiner le risque de passage local en rgime torrentiel, et donc, de formation dun ressaut, pour chaque tranche verticale de la section transversale lcoulement en lit mineur pour laquelle la notion de hauteur deau moyenne a un sens physique (cf. Partie 2 - Figure 15 et Partie 2 - Figure 16).

Partie 2 - Figure 15 : transition de rgime fluvial rgime fluvial via un remous dacclration au droit de louvrageSource : D. Goutx (Cete Normandie-Centre - Lrpc Blois)

Partie 2 - Figure 16 : transition dun rgime fluvial un rgime fluvial via un rgime torrentiel et un ressaut au droit de louvrageSource : D. Goutx (Cete Normandie-Centre - Lrpc Blois)

(10) On rappelle que la hauteur critique est celle pour laquelle le nombre de Froude est gal 1.

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les incidencesh1 h2 Rh2 Rh4 Rh5 h3 h4 h5 h6 h7 h8 h9 Rh74

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Partie 2 - Figure 17 : segmentation dune section en travers par tubes de courant Source : D. Goutx (Cete Normandie-Centre - Lrpc Blois)

Ces ouvertures ont une capacit dvacuation de dbit sous un niveau deau donn qui est moindre que la capacit naturelle du profil en travers avant amnagement, si bien que les reports de dbits dont le cheminement est contrari en lit majeur ne peuvent scouler travers les ouvertures disponibles quau prix de pertes de charge qui sapparentent, en ter