cor bac blancdissertation.doc

10
Dissertation s’appuyant sur un dossier documentaire Il est demandé au candidat : de répondre à la question posée par le sujet ; de construire une argumentation à partir d'une problématique qu'il devra élaborer ; de mobiliser des connaissances et des informations pertinentes pour traiter le sujet, notamment celles figurant dans le dossier ; de rédiger en utilisant le vocabulaire économique et social spécifique et approprié à la question, en organisant le développement sous la forme d'un plan cohérent qui ménage l'équilibre des parties Il sera tenu compte, dans la notation, de la clarté de l'expression et du soin apporté à la présentation. SUJET Ce sujet comporte quatre documents Dans quelle mesure la baisse du coût du travail permet-elle de réduire le chômage ? DOCUMENT 1 La solution retenue depuis 1993 a été celle de l’extension des exonérations (1) de cotisations sociales. Il existe 54 dispositifs pour un coût total de 32 milliards (par an). [ …] Les entreprises bénéficient d’une réduction de cotisations sociales sur les bas salaires, de 26 points de pourcentage des cotisations employeurs pour les travailleurs au salaire minimum, qui décroît linéairement jusqu’à 1,6 fois le SMIC (2) . Ceci réduit de 18,6 % le coût du salaire minimum. De plus, les travailleurs au salaire minimum perçoivent une prime pour l’emploi (de 7,7 % du salaire au maximum) pour creuser l’écart entre le salaire minimum et le RSA (3) . Le coût des allègements de cotisations sociales était de l’ordre de 21,4 milliards d’euros en 2011. Source : « Compétitivité, le choc illusoire... Faut-il réformer le financement de la protection sociale ?», STERDYNIAK Henri, Note de l’OFCE, 2012. (1) Exonération : suppression. (2) SMIC : salaire minimum interprofessionnel de croissance. (3) RSA : revenu de solidarité active. DOCUMENT 2 : A: B:

Upload: mme-et-mr-lafon

Post on 13-Jul-2016

182 views

Category:

Documents


0 download

TRANSCRIPT

Dissertation s’appuyant sur un dossier documentaire

Il est demandé au candidat :

de répondre à la question posée par le sujet ; de construire une argumentation à partir d'une problématique qu'il devra élaborer ; de mobiliser des connaissances et des informations pertinentes pour traiter le sujet, notamment celles figurant dans le

dossier ; de rédiger en utilisant le vocabulaire économique et social spécifique et approprié à la question, en organisant le

développement sous la forme d'un plan cohérent qui ménage l'équilibre des parties

Il sera tenu compte, dans la notation, de la clarté de l'expression et du soin apporté à la présentation.

SUJET

Ce sujet comporte quatre documents

Dans quelle mesure la baisse du coût du travail permet-elle de réduire le chômage ?

DOCUMENT 1 La solution retenue depuis 1993 a été celle de l’extension des exonérations (1) de cotisations sociales. Il existe 54 dispositifs pour un coût total de 32 milliards (par an). [ …] Les entreprises bénéficient d’une réduction de cotisations sociales sur les bas salaires, de 26 points de pourcentage des cotisations employeurs pour les travailleurs au salaire minimum, qui décroît linéairement jusqu’à 1,6 fois le SMIC(2). Ceci réduit de 18,6 % le coût du salaire minimum. De plus, les travailleurs au salaire minimum perçoivent une prime pour l’emploi (de 7,7 % du salaire au maximum) pour creuser l’écart entre le salaire minimum et le RSA(3). Le coût des allègements de cotisations sociales était de l’ordre de 21,4 milliards d’euros en 2011.

Source : « Compétitivité, le choc illusoire... Faut-il réformer le financement de la protection sociale ?», STERDYNIAK Henri, Note de l’OFCE, 2012.

(1) Exonération : suppression. (2) SMIC : salaire minimum interprofessionnel de croissance. (3) RSA : revenu de solidarité active.

DOCUMENT 2 :A : B :

Remarques : pour le document B : ga signifie taux de croissance annuel du salaire mensuel de base L’échelle du taux de chômage est inversée c’est-à-dire que plus le taux de chômage augmente, plus la courbe descend

DOCUMENT 3

DOCUMENT 4

Évolution des dépenses de consommation en volume et du pouvoir d'achat du revenu disponible brut(1)

en France entre 2006 et 2012 (en %)

2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012Dépense de consommation des ménages (en volume)

2,2 2,3 0,3 0,1 1,5 0,5 -0,4

Pouvoir d'achat du revenu disponible brut(2).

2,5 3,0 0,4 1,2 0,9 0,7 -0,9

Source : « La consommation des ménages en berne en 2012 », INSEE Première, juin 2013.

(1) Le revenu disponible brut est le revenu à la disposition des ménages pour la consommation et l'épargne. |(2) L'évolution du pouvoir d'achat du revenu disponible brut rapporte l'évolution du revenu disponible brut à celle du prix des dépenses de consommation finale des ménages.

CorrectionDans quelle mesure la baisse du coût du travail permet-elle de réduire le chômage ?

AttentesCompréhension du sujet : Consignes

Dans quelle mesure : jusqu’à quel point ? à quelles conditions ?Permet-elle : assure-t-elle

Problématique Reformulation du sujet

La réduction du coût du travail assurerait-elle une baisse du chômage et un retour au plein emploi ?

Problématique plus aboutie

La mondialisation qui entraîne une concurrence de plus en plus forte entre les pays oblige-t-elle à réduire les salaires et limiter la protection sociale pour créer des emplois ?

Malgré la mondialisation qui impose des contraintes aux PDEM, une baisse du coût du travail et une réduction de la protection sociale sont-elles les solutions miracles pour créer des emplois ?

Mobilisation des connaissances Définitions : coût du travail / chômage

personnelles Théories : analyse néo-classique, keynésienne, théories néo-keynésiennes (salaire d’efficience)

Lecture des documents

Doc 1 - Pourcentage- Coefficient multiplicateur

Doc 2 - Indice- Distinction salaire nominal/réel- Comparer l’évolution du salaire, de la productivité et du taux

de chômageDoc 3 - Inégalités de salaire à l’intérieur d’un pays

- Comparaison des salaires et de leurs évolutions Doc 4 - Taux de variation

- Corrélation entre évolution du pouvoir d’achat et évolution de la consommation

Calculs Doc 1 Doc 2 Taux de variation ou coefficient multiplicateur pour comparer les

évolutions des différentes variablesDoc 3 Ecarts de salaire entre paysDoc 4 Coefficient multiplicateur pour comparer les rythmes de croissance

Organisation de la réponse I. En théorie, une influence en théorie positive de la baisse du coût du travail sur le chômage

II. Mais des effets pervers peuvent apparaître

OuI – Lors des 30 Glorieuses, un coût du travail élevé était une condition nécessaire et suffisante pour réduire le chômageII – Mais le contexte a changé. La concurrence accrue entre pays impose une baisse du coût du travail

Hors-sujet - Traiter uniquement du salaire et non du coût du travail- Parler de la LPE

Jeudi 31 mars, de nombreuses organisations syndicales de salariés mais aussi d’étudiants ont lancé un mot d’ordre de grève pour s’opposer à la loi El Khomri. Même si celle loi a subi de nombreuses transformations, elle comporte aujourd’hui plusieurs volets : le barème des indemnités prud’homales serait seulement indicatif, un licenciement économique plus facile, un champ laissé aux décisions unilatérales des chefs de petites et moyennes entreprises. Les syndicats de salariés considèrent que cette loi entraînerait une dégradation des conditions de travail et de salaire, car le poids des patrons serait plus important. Cette loi est donc accusée de mettre en application les principes néo-classiques de la gestion du travail. En effet, les libéraux considèrent que l’intervention de l’Etat, tant au niveau de la quantité de travail (législation sur les contrats de travail) que sur le coût du travail, c’est-à-dire salaire plus charges sociales, est néfaste et contre-productive : au lieu d’améliorer le sort des plus fragiles, elle le détériore.Or, une des spécificités de la France est d’avoir un taux de chômage très élevé, supérieur à ses voisins, comme l’Allemagne. De même, des politiques d’inspiration néo-classiques ont été mises en place en Espagne et en Italie, et les premiers résultats positifs sur le chômage apparaissent.Quelle politique doit alors mener la France pour résoudre le chômage massif, c’est-à-dire réduire le nombre de personnes actives recherchant activement un emploi ? Doit-elle mener des politiques de baisse du coût du travail, c’est-à-dire diminuer les salaires et les charges sociales ? Ou bien faut-il stabiliser encore les revenus du travail et de transfert ?Certes, des politiques d’allégement du coût du travail peuvent avoir un effet positif sur l’emploi car elles augmentent la rentabilité des entreprises, mais elles peuvent aussi créer des effets pervers, car le coût du travail assure aussi des revenus directs et indirects.

III. Une influence en théorie positive de la baisse du coût du travail sur le chômage

La baisse du coût du travail devrait, selon les libéraux, assurer une baisse du taux de chômage. Pour cela, il va falloir jouer sur le niveau du salaire, sa rigidité et le montant des charges sociales.

A. Le coût du travail   seul déterminant du chômage selon les néo-classiques

La France est un des pays riches où le coût du travail est le plus élevé : en 2015, le coût du travail est 1.5 fois supérieur que le coût du travail en Espagne (doc 3). Or, selon les néo-classiques, la demande de travail des entreprises est uniquement fonction du coût du travail. Ce postulat est justifié par la loi de Say, qui indique que l’offre crée sa propre demande et l’amène à son niveau. On peut alors poser comme hypothèse que les entreprises n’éprouvent jamais de difficultés à écouler la totalité de leur production, pourvu qu’elles la vendent au prix d’équilibre, qui leur est imposé par le marché. Elles ne se soucient donc pas de l’écoulement de leur production.Ainsi, avant d’embaucher, les entreprises opèrent une analyse marginaliste basée sur un calcul coût-bénéfice  : elles comparent ce que leur coûte un salarié supplémentaire (salaire plus charges) à ce qu’il rapporte (la productivité marginale) .Tant que la productivité marginale est supérieure au coût, l’entreprise embauche. La productivité détermine donc le salaire d’après les libéraux. Or, avec les réglementations sur le coût du travail, l’entreprise ne peut plus adapter le coût du travailleur à sa productivité. Seront alors pénalisés les moins qualifiés, les jeunes sans expérience, les moins performants dont le niveau de productivité est inférieur à ce coût du travail : une partie de la main d’œuvre reste inemployée parce qu’elle ne peut s’offrir aux conditions d’exercice d’une production rentable. Un chômage de masse touchant les moins diplômés va donc se développer. C’est ce que l’on remarque en France : entre 1998 et 2016, le salaire réel, c’est-à-dire déflaté de l’inflation a augmenté de 20%, alors que la productivité marginale n’a augmenté que de 15%. Embaucher n’est donc pas rentable  : entre 2002 et 2006, le taux de chômage a augmenté de 2 points, passant de 8 à 10% (doc 2). Entre 1998 et 2002, la croissance du salaire nominal a été multipliée par 3 (le taux de variation est passé de 1% en 98 à 3% en 2002), le taux de chômage est aussi passé de 8 à 10%.La France est donc dans une situation de chômage classique : l’offre de biens étant inférieure à la demande de biens, les entreprises pourraient produire plus sans éprouver de problèmes de débouchés, mais elles ne le font pas, car cette production supplémentaire ne serait pas rentable. Les salaires étant trop élevés, les entreprises préfèrent réduire leur production, licencier afin de ne pas subir une chute de leur profit trop importante. On voit bien que le déséquilibre résulte de la rigidité des salaires et que la politique à mener afin de le résorber est de diminuer le salaire, afin d’accroître la rentabilité des entreprises, de les inciter à produire plus, donc à embaucher.

B. La solution   : des politiques d’allégement du coût du travail

La solution est alors de réduire le coût du travail. Celle-ci doit alors porter sur les deux composantes du coût du travail : le salaire et les charges sociales.

1. Réduire les rigidités du salaire

Alléger le coût du travail signifie avant tout flexibiliser le salaire. En effet, en Europe, notamment en France, le salaire minimum n’est pas fixé par la loi de l’offre et de la demande, mais est fixé arbitrairement par l’Etat, indépendamment de la situation sur le marché du travail. Or, dès que l’Etat intervient en créant un salaire minimum, comme le salaire ne peut plus baisser, les déséquilibres sur le marché de travail ne sont plus transitoires, mais deviennent durables.Pour réduire le chômage il faut alors supprimer cette rigidité, ce qui permet alors au salaire de joue son rôle de régulation entre l’offre et la demande de travail . En effet, selon les néo-classiques, si le marché du travail est en concurrence pure et parfaite, la loi de l’offre et de la demande résoudra tous les déséquilibres. En période de chômage quand l’offre de travail est supérieure à la demande, le salaire va baisser. Ainsi, une partie des offreurs de travail vont renoncer et quitter le marché du travail : les individus opèrent un calcul coût-bénéfice et comparent ce qu’ils gagnent en travaillant (le salaire) avec ce qu’ils perdent (la désutilité marginale du travail, c’est-à-dire la perte de loisirs). Ils augmenteront leur quantité de travail tant que la désutilité marginale sera inférieure au salaire. Si le salaire diminue, travailler devient moins intéressant et ils réduisent donc leur offre de travail. Les entreprises, quant à elles, vont accroître leur demande de travail, puisque la réduction du coût du travail leur permet d’embaucher des individus jusque- là non rentables, à productivité faible. On remarque , en effet, une corrélation forte entre niveau du salaire minimum et état du marché du travail (doc 2). Les Etats-Unis ont un niveau de salaire minimum très faible : le salaire minimum représente 39% du salaire minimum en 98, 37% en 2014 et le taux de chômage est très faible ; en Allemagne, un salaire minimum interbranche n’a été créé

qu’en 2015 et on est au plein emploi. En revanche, en France, le salaire minimum est élevé : 55% du salaire médian en 98 et augmente de plus en plus : 62% en 201. Le taux de chômage est aussi très élevé : plus de 10% en 2014 (doc 3).

2. Réduire les charges sociales

Dans un pays comme la France, le salaire est une composante du coût du travail, mais ce n’est qu’une partie  : il faut aussi tenir compte des charges sociales qui pèsent sur les entreprises et qui servent à financer les prestations sociales.Mener une politique d’allégement des charges sociales aura alors une influence positive sur le niveau de chômage.Un effet direct d’abord, puisque le coût du travail va automatiquement baisser. Un effet indirect ensuite, en incitant les chômeurs à reprendre un emploi. En effet, ces charges sociales servent à financer des prestations chômage. Le calcul rationnel des demandeurs d’emploi change, car l’inactivité a maintenant une rémunération. La comparaison de l’emploi et du chômage donne lieu à une analyse différente : certes l’emploi apporte un revenu du travail, mais le chômage génère un revenu de transfert. Surtout, l’emploi crée une désutilité, alors que l’inactivité crée du loisir et permet de choisir son emploi. Selon Stigler le chômeur est un acteur rationnel qui compare les coûts et les avantages de l’emploi salarié et de l’absence de travail. Le chômeur va donc réaliser un arbitrage c’est-à-dire qu’il va opérer le calcul d’un « salaire de réservation » c’est-à-dire un salaire en -dessus duquel le choix de l’activité salarié sera réalisé car le chômeur fait un gain (le salaire de réservation est supérieur à l’allocation chômage. Donc tant que le salarié ne trouvera pas d’emploi au salaire correspondant il sera dans une logique de « job search ». Des trappes à l’inactivité se créent alors.C’est ce qui a été fait en France depuis 1993 : «  l’extension des exonérations de cotisations sociales. De plus, les travailleurs au salaire minimum perçoivent une prime pour l’emploi (de 7,7 % du salaire au maximum) pour creuser l’écart entre le salaire minimum et le RSA. » (doc 1)

Dans ces conditions, alléger le coût du travail permet à la fois d’inciter les chômeurs à prendre un emploi et de favoriser la création de ces emplois par les entreprises, puisque ceux-ci sont rentables. Alléger le coût du travail permettrait donc de restaurer la compétitivité-prix et donc d’accroître les parts de marché.

IV. Mais des effets pervers peuvent apparaître

Or, les données pour la France remettent en cause cette corrélation entre baisse du coût du travail et baisse du taux de chômage.

A. Constat   : une remise en cause de la corrélation baisse du coût du travail- baisse du taux de chômage

On remarque que plus le salaire nominal augmente lentement, plus le taux de chômage augmente (doc 2).Entre 1990et 1994, la croissance du salaire nominal a été divisée par 5 ( le taux de variation est passé de 5% en 90 à 1% en 1994), le taux de chômage a augmenté et est passé de 8 à 10%. La situation est identique entre 2010 et 2014 : la croissance du salaire passe de 4 à 2% et le taux de chômage augmente de 2 points. On serait donc dans une période de chômage keynésien. L’origine du déséquilibre se trouve sur le marché des biens : les entreprises pourraient produire plus ; cette production serait rentable (les salaires n’étant pas trop élevés par rapport à la productivité), mais elles ne le font pas car elles sont contraintes par des débouchés insuffisants sur le marché des biens. Dans ce contexte, une politique néo-classique de réduction des salaires, n’aurait aucun effet bénéfique. Au contraire, cela risquerait d’aggraver la situation en diminuant la consommation des ménages et la motivation des salariés.

B. Explications   : les effets pervers d’une baisse du coût du travail sur le chômage

1. Les limites microéconomiques d’une politique d’allégement du coût du travail

a) Une critique de la relation de causalité salaire/productivité

En effet, contrairement à ce qu’affirment les auteurs libéraux, la hausse du salaire minimum a un effet positif sur la productivité au travail. On retrouve ici les arguments de la théorie du salaire d’efficience. Comme l’information est

imparfaite, l’entreprise ne connaît pas la productivité du salarié. Le salarié a intérêt à proposer un salaire de réservation élevé , signe de ses qualités et compétences. En proposant un salaire élevé, l’entreprise peut alors sélectionner les meilleurs candidats.Le versement de salaire supérieur à celui du marché présente un autre avantage : il permet de conserver une main-d’œuvre qualifiée (dont la qualification a été obtenue dans le cadre de l’entreprise) qui est donc productive. Ainsi, un haut niveau de rémunération relatif (qui permet à l’entreprise d’attirer et de conserver une main-d’œuvre à fort capital humain) est donc plus que compensé par les coûts de mobilité de la main-d’œuvre supportés par l’entreprise en cas de départ de ses salariés les plus productifs.Enfin, la théorie du don/contre-don  montre que, comme le salarié a l’impression d’être bien traité par l’entreprise, en reconnaissance il fait des efforts et est donc productif

b) Les effets négatifs d’une baisse des salaires

Dans ces conditions, mettre en œuvre une politique d’allégement du coût du travail peut générer des effets pervers sur le taux de chômage.En effet, la baisse du salaire peut générer une baisse de la productivité encore plus forte. Or, pour prendre en compte le coût réel de la main-d'œuvre, il faut tenir compte du coût du travail, mais aussi de l'évolution de la productivité et de la valeur ajoutée des produits. Ce n'est que lorsque la productivité d'un salarié augmente moins vite que son coût que la compétitivité d'un pays s'érode. .Si la productivité baisse plus vite que le coût du travail, l’entreprise fait moins de profits, puisque la création de richesses augmente moins rapidement que ses dépenses. Ainsi, entre 2008 et 2010, le taux de chômage augmente, alors que le salaire reste stable, tout simplement car la productivité diminue.

2. Les limites macroéconomiques d’une politique d’allégement du coût du travail

A ces raisons micro-économiques s’ajoutent des raisons macro-économiques : le coût du travail génère des revenus.

a) Le travail est aussi une source de revenus

En effet, le coût du travail génère deux revenus. Le premier est un revenu direct  : le revenu du travail. Le second est un revenu de transfert : les prestations sociales financées par les charges sociales. L’existence de ces revenus de transfert permet aux individus de consommer davantage et d’épargner moins, car ils savent qu’en cas de chômage, ils continueront à toucher un revenu.

b) L’analyse keynésienne met en en évidence le rôle de la demande effective sur l’emploi

Or, dans la logique keynésienne, la stabilité des revenus est essentielle. En effet, les entreprises, avant d’embaucher regardent certes le niveau du coût du travail, mais ce n’est pas le seul élément de décision. En effet Keynes remet en cause la loi de Say : tout produit ne trouve pas obligatoirement de débouchés du fait de la thésaurisation. Les entreprises vont fixer alors leur demande de travail en fonction de la demande effective, c’est-à-dire de la demande solvable anticipée par les entreprises. Celle-ci dépend de 2 variables : le montant qu’on s’attend à voir la communauté consacrer à l’investissement nouveau, et celui que l’on s’attend à voir la communauté dépenser pour la consommation. Selon Keynes, la consommation est une fonction croissante du revenu (plus le revenu augmente, plus le niveau de consommation sera élevé), mais elle augmente de moins en moins rapidement avec le revenu : c’est la loi psychologique fondamentale.On remarque que plus le pouvoir d’achat des ménages augmente, plus les dépenses de consommation augmentent (doc 4).En 2006, le pouvoir d’achat a augmenté de 2.5% , les dépenses de consommation ont augmenté de 2.2%. En 2012, le pouvoir d’achat a baissé de 0.9%, les dépenses de consommation de 0.4%.

c) Les effets pervers d’une politique visant à alléger le coût du travail

Dans ces conditions, alléger le coût du travail conduit à réduire les revenus, donc à baisser la demande effective et à réduire la production. Les entreprises ne voient donc pas l’intérêt d’embaucher, puisqu’elle n’arrive même pas à écouler leurs stocks avec leurs salariés. Alléger le coût du travail aboutirait à aggraver encore le déséquilibre, puisque la demande effective baisserait encore. La baisse de la demande serait d’autant plus forte si tous les pays menaient des politiques

d’allégement du coût du travail : aucun pays ne gagnerait en compétitivité-prix, mais tous perdraient en réduction généralisée de la demande.

Des politiques d’allégement du coût du travail auraient certes un impact sur le chômage classique mais entraînerait une augmentation du chômage keynésien très limité. En effet, ces politiques généreraient aussi des effets négatifs, car elles décourageraient les efforts individuels et réduiraient la demande effective, base essentielle de la demande de travail.

La solution envisageable serait alors de stabiliser le coût du travail. Mais cette stratégie ne serait possible que si tous les pays de la zone euro adoptaient la même stratégie et évitaient de jouer le rôle du passager clandestin. En effet, ces dernières années, la concurrence entre les pays européens les a poussés à adopter des comportements non coopératifs pour améliorer leur situation et exporter leur chômage. Des exemples récents ont mis en évidence ces stratégies : l’exil fiscal de Gérard Depardieu vers la Belgique ou la fiscalité est moindre ; la menace de la Grande-Bretagne de quitter l’Union Européenne, car elle considère y perdre plus qu’elle n’y gagne.