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Contribution à la sauvegarde des biens culturels de l’Internet

Étude de la communauté virtuelle YTMND et de ses productions

Mémoire de fin d’études Lily Bühring

Diplôme National Supérieur d’Expression Plastique.Option Art. Mention Conservation-Restauration.École Supérieure d’Art d’Avignon. Session 2012

Direction de recherche : Lionel BroyeMéthodologie de la recherche : Jean-Pierre Cometti

Coordination des projets : Marc MaireAccompagnement de la rédaction : Sylvie Nayral

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Remerciements

Je remercie :

Mon directeur de recherche, Lionel Broye, pour ses idées, ses conseils et son aide.

Les membres des communautés virtuelles YTMND, 4chan.org et Encyclo-pediadramatica.com (.ch / .se) qui m’ont inspiré, apporté des informations et avec qui j’ai eu des échanges enrichissants, notamment : SanguineRose, Vaucous, Anonymous ID: tOeUpeTU et ID: vJjTq8Bm, Bupo, Trololo et les nombreux internautes dont je ne citerai pas tous les pseudonymes.

Martha Wilson et Michael Katchen, grâce à qui j’ai pu développer mes connaissances en informatique.

Ceux qui m’ont apporté leur aide et leurs encouragements tout au long de mes études, notamment Claire Turquin-Silhouette, Jeannine Perez, Xavier Bermond et Sarah. Et mes camarades de promotion.

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SOMMAIRE

Introduction 9

Partie 1. YMTND : Étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle 13

Histoire de YTMND 15Le YTMND : Un objet numérique en réseau 18

Qu’est-ce qu’un objet numérique ? 18 Description du YTMND 20Les fonctions et dimensions du YTMND 26L’identité du YTMND 32

Une communauté virtuelle en réseau : YTMND.com 35Qu’est-ce qu’une communauté virtuelle ? 36L’environnement 38Le but 40Le lieu 41La plateforme 42La population 43

Les créateurs de contenu web 43Interactions : le mème 48

Le modèle économique 52

Partie 2. YTMND : la valeur des objets, les dangers et les solutions de pérennisation 55

Les valeurs de l’objet YTMND 57Les valeur identitaires 58La valeur artistique 61La valeur historique 63

Les dangers : obsolescence, problèmes légaux et disparition 65Les dangers qui guettent l’objet numérique 65Les dangers qui guettent la communauté virtuelle 67

Différents procédés de pérennisation : archivage, préservation, sauvegarde, et restauration 72

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L’archivage numérique 74La préservation numérique 78La sauvegarde du patrimoine immatériel 80La restauration en réseau ? 84

Partie 3. Présentation d’un projet d’archivage et sauvegarde en réseau 89

Introduction 91La construction et l’organisation du site : 93

Le Wiki 93Le choix de logiciel 93L’organisation sémantique du Wiki 96Comment créer un article 100

Conclusion : La sauvegarde du patrimoine culturel de l’Internet à travers une approche collaborative 103

Bibliographie 106

Annexes 115

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Avant propos

Mes pratiques personnelles en informatique m’ont amené, dès ma première année d’études à l’ESAA, à m’intéresser au Net Art et à la culture de l’In-ternet. J’ai commencé alors à m’impliquer progressivement dans diverses communautés virtuelles, telles que 4chan.org et encylopediadramatica.com et à participer à leurs actions et créations collectives. En parallèle, la création d’un laboratoire de recherches1, m’a permis d’aborder la conserva-tion-restauration d’œuvres dites « technologiques », l’archivage numérique, et les bases de données. J’ai pu mettre toutes ces recherches en pratique lors d’un stage à Franklin Furnace Archive, Inc. – une archive numérique de performances artistiques, où j’ai archivé des performances et développé des bases de données adaptées à la conservation d’œuvres dites de « médias va-riables »2. Ce projet de fin d’études est né de ces différentes expériences.

Note aux lecteursLe présent texte contient de nombreux hyperliens, qui apparaîtront en rouge. Une version numérique du mémoire accompagne la version papier et permette d’accéder directement aux sites web mentionnés dans le texte.

1. Créé par Lionel Broye en 2008, le Laboratoire de Médias Variables est un atelier de recherche autour des œuvres de « variables médias » (œuvres « technologiques », « médiatiques », « numériques », etc.) http://as1.esa-avignon.org/2. http://variablemedia.net/pdf/Permanence.pdf

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Introduction

Les règles et les pratiques associées à la notion de conservation-restaura-tion ont été élaborées, au départ, pour répondre aux besoins du patrimoine culturel artistique, qui valorise principalement les dimensions artistiques et historiques de l’œuvre d’art3. Aujourd’hui, le rôle du conservateur-res-taurateur s’est élargi pour accommoder « tous les biens culturels, quels que soient leur propriétaire, leur époque ou leur valeur ».4

Dans son article « Patrimoine(s) et Conservation-Restauration(s) », le conservateur Roland May explique que les notions de conservation-restau-ration et de patrimoine n’ont pas été créées à la même époque et ont, par la suite, connu des évolutions différentes. La définition de ce qui constitue le « patrimoine culturel », s’est élargi, allant des œuvres d’art contemporain aux objets scientifiques et aux pratiques culturelles immatérielles. Les rai-sons de cet élargissement, selon lui, sont : 1) la reconnaissance de nouveaux types de patrimoine où les valeurs sont « étrangères, à l’esthétisme et aux critères propres à l’histoire de l’art »,2) des nouvelles méthodes de transmission du patrimoine, qui peuvent être autre que « matérielles » et peuvent avoir lieu en dehors du « cercle des initiés ».5 Aujourd’hui, le conservateur-restaurateur peut être confronté à des types de patrimoines culturels variés, qui sont nés selon différents paradigmes culturels et historiques et qui suscitent de nouvelles valeurs. Des formes de patrimoine émergeantes peuvent nécessiter des démarches expérimentales, ainsi que l’élaboration de nouvelles techniques de conservation-restauration adaptées.

3. Théorie de la Restauration, César Brandi, 19634. « Ces principes (de conservation-restauration) contribuent à la sauvegarde de tous les biens culturels, quels que soient leur propriétaire, leur époque ou leur valeur même s’ils sont à l’état de fragments. » « Le rôle fondamental du Conservateur-Restaurateur est de préserver les biens culturels au bénéfice des générations présentes et futures. » - Confédération Européenne des Organisations de Conservation-Restauration (E.C.C.O.) http://fotosferefrance.chez.com/Deontologia/ecco.html 5. Roland May, « Patrimoine(s) et Conservation-Restauration(s) », CeROArt [En ligne], 4 | 2009, mis en ligne le 14 octobre 2009, consulté le 04 mars 2012. URL : http://ceroart.revu

es.org/1235
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Ce projet de recherche est une tentative d’aborder un patrimoine culturel « en devenir ». Le mémoire relate la rencontre avec un nouveau type de patrimoine potentiel, la tentative de comprendre ses dimensions matériel-les, immatérielles, et ses valeurs ; enfin, la recherche d’outils théoriques et matériels permettant d’élaborer une méthode de sauvegarde qui lui soit adaptée.

Problématique

L’Internet est non seulement un dépôt grandissant de la mémoire des sociétés humaines, mais il génère aussi une mémoire qui lui est propre. Nous pouvons conceptualiser l’Internet comme un monde6, avec ses sites et destinations, ses sociétés et communautés qui produisent des objets, coutumes, langages et idées – le tout formant une culture et un patrimoine considérable. Le patrimoine culturel de l’Internet que l’on considère ici, trouve ses racines dans des communautés en réseau, ou « communautés virtuelles » 7 créatives, qui s’organisent autour de dispositifs technologiques, qui dépendent de processus dynamiques de communication, d’appropriation et de partage, et évoluent en symbiose avec leur milieu. Les productions de ces communautés possèdent souvent une valeur historique, car ils nous renseignent sur les différentes époques historiques et technologiques de l’Internet. Leur valeur sociale est également primordiale, car ils fabriquent et renforcent l’identité de ces communautés et illustrent leur diversité. Ces réalisations peuvent également posséder une valeur esthétique et/ou artis-tique, le concept de « création collective » (employant communautés et ré-seaux sociaux) étant employé par la nouvelle génération d’artistes du Net. L’Internet est un monde, mais sans gouvernement ni institution « officielle » qui impose des politiques de sauvegarde de son patrimoine. Pourtant, l’existence d’un « patrimoine numérique » est reconnue par l’UNESCO.8

6. Law And Borders – The Rise of Law in Cyberspace, 1996, David G. Post et David R. Johnson.7. Voir la définition d’une « communauté virtuelle », p. 8. « Concept de Patrimoine numérique », UNESCO, URL : http://www.unesco.org/new/fr/com-munication-and-information/access-to-knowledge/preservation-of-documentary-heritage/digital-heritage/concept-of-digital-heritage/

lilybuhring
Texte tapé à la machine
lilybuhring
Texte tapé à la machine
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9. L’idée de « cyber-archéologie » date déjà de 199. Voir: http://jcmc.indiana.edu/vol3/issue3/jones.html et Excavating Second Life, Cyber-Archaeologies, Heritage and Virtual Communities, Rodney Harrison, http://mcu.sagepub.com/content/1

Dans certains domaines, notamment celui de l’archéologie, nous trouvons l’idée de l’excavation et de la préservation d’« artefacts » numériques pro-venant de communautés virtuelles disparues.9 En revanche, les initiatives de conservation-restauration et de sauvegarde du patrimoine provenant de communautés virtuelles encore « vivantes » sont peu nombreuses. La rapidité avec laquelle l’environnement technique et social de l’Inter-net évolue, fait que son patrimoine est particulièrement fragile, sujet à la disparition, et nécessite que l’on réfléchisse d’ores et déjà à sa sauvegarde. Mais comment sauvegarder le patrimoine dans un monde où les notions de matérialité, de propriété, d’auteur, et de valeur, se trouvent bouleversées ?

J’ai choisi d’affronter cette problématique face à un cas paradigmatique : le « YTMND » (You’re the Man Now Dog). Un YTMND est un type d’objet numérique, créé pour être accessible dans le contexte de l’Internet. Il s’agit d’un site Internet minimaliste, d’une seule page web, associant image(s), son(s), et texte(s). Le YTMND est devenu une forme de création collective, ludique, et artistique, qui est aujourd’hui inséparable de la com-munauté virtuelle du site YTMND.com. À travers cette communauté et ses productions numériques, je tenterai de comprendre la « matérialité » du numérique, la structure matérielle et conceptuelle des objets numériques, leurs valeurs historique et artistique, et leurs fonctions sociale et identitaire au sein des communautés virtuelles. Cette étude me permettra par la suite d’envisager l’élaboration d’un projet expérimental de documentation et de sauvegarde, adapté au monde de l’Internet.

Plan du mémoire

Dans la première partie, j’analyserai un type d’« objet numérique » en ré-seau, le YTMND, puis la communauté virtuelle qui le produit. Je tenterai de répondre aux questions suivantes :

Introduction

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Qu’est-ce qu’un « objet numérique » en réseau et y a t-il une « maté-rialité » numérique ? Quelles valeurs et fonctions possèdent ces objets numériques, et quel serait leur intérêt pour les générations futures ? Quels sont les liens entre les objets et les communautés virtuelles qui les produisent ?

Dans la deuxième partie, j’explorerai des méthodes de sauvegarde et de conservation adaptées à ce patrimoine :

Quelles sont les problématiques de préservation liées à l’environnement de l’Internet ? Avec quels outils théoriques et matériels pourrons nous aborder la sauvegarde du patrimoine en question ? Existe-il un désir de pérennisation au sein des communautés virtuelles ? Si oui, existe t-il des formes singulières de « conservation-restauration » établies par ces com-munautés ? Que peut apporter la technologie numérique et le réseau, en termes de préservation, de documentation et d’archivage ?

Dans la troisième partie, j’exposerai un projet de documentation, d’ar-chivage et de sauvegarde en réseau qui sera l’aboutissement de toutes mes recherches.

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Étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

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Histoire de YTMND 15Le YTMND : Un objet numérique en réseau 18

Qu’est-ce qu’un objet numérique ? 18Description du YTMND 20Les fonctions et dimensions du YTMND 26L’ identité du YTMND 32

Une communauté virtuelle en réseau : YTMND.com 35Qu’est-ce qu’une communauté virtuelle ? 36L’environnement 38Le but 40Le lieu 41La plateforme 42La population 43

Les créateurs de contenu web 43Interactions : le mème 48

Le modèle économique 52

Image : logo de ytmnd.com

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10. « Un nom de domaine est constitué d’une suite de caractères (de A à Z, de 0 à 9 et le tiret) corres-pondant au nom d’une société, d’une marque, d’une association, d’un particulier, etc. ; et d’un suffixe appelé aussi TLD (.fr, .de, .ca, .jp, .net, .com, etc.). » http://www.domainesinfo.fr/definition/2/nom-de-domaine.php11. L’art ASCII consiste à réaliser des images uniquement à l’aide des lettres et caractères spéciaux contenus dans le code ASCII. http://fr.wikipedia.org/wiki/Art_ASCII 12. Cette liste n’existe plus, mais on peut accéder à une archive avec le Wayback Machine ici : http://web.archive.org/web/20050306071851/www.yourethemannowdog.com/contrib/13. http://www.etoy.com/projects/toywar/

L’histoire du YTMND

En 2001, un jeune internaute, Max Goldberg, visionne une bande an-nonce pour le film « Finding Forrester », dans laquelle le comédien Sean Connery prononce la phrase absurde : « you’re the man now dog » (vous êtes l’homme maintenant, chien). Goldberg achète le nom de domaine Internet10 yourethemannowdog.com, et dans l’attente de le revendre, il l’associe à une page web, consistant en la phrase « you’re the man now dog dot com » écrite en art ASCII.11 Quelques mois plus tard, il transformera la page en sa version actuelle, avec une photographie de Sean Connery, « you’re the man now dog » écrit en texte, et une bande son dans laquelle la voix de Connery répète la phrase en boucle.

Dans les années qui suivent la création de yourethemannowdog.com, le site inspire un genre de création populaire. D’autres internautes reprennent la formule « site d’une seule page associant image, son, et texte », afin de créer leurs propres parodies de films et d’évènements de l’actualité. Max Goldberg commence à créer des « miroirs » (copies exactes) de ces sites et à rassembler leurs adresses URL dans une liste12, alors accessible sur you-rethemannowdog.com. En 2003, l’acteur et réalisateur, Justin Diamond, attaque Max Goldberg en justice dans l’espoir de récupérer les droits du nom de domaine justindia-mond.com. M. Goldberg avait acheté ce domaine presque en même temps que yourethemannowdog.com, et y avait installé un site de parodie. Après une bataille en justice (qui rappelle celle menée par le collectif d’artistes d’etoy.com en 199913) Goldberg gagne le droit de conserver le nom de son

YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

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14. http://www.prweb.com/releases/2004/04/prweb118385.htm15. Considéré comme l’évolution naturelle du web actuel, le web 2.0 est un concept d’utilisation d’internet qui a pour but de valoriser l’utilisateur et ses relations avec les autres.Actuellement, il est encore très difficile de définir clairement ce que sera le web 2.0. Les partisans donnent leur avis un par un en considérant internet comme une intelligence collective où chaque internaute fait partie d’un réseau social. Plus clairement, le web 2.0 mettrait en scène l’internaute en lui donnant la possibilité d’interagir et de s’identifier à une communauté. Quelques exemples de mutations:

site en 2004. C’est la première fois dans l’histoire de l’Internet « qu’une cé-lébrité perd une dispute de nom de domaine contre un site non-commercial et parodique ».14 Dans son communiqué à la presse, Goldberg revendique justindiamond.com comme étant une parodie, et « de l’art pour l’art ». Il se revendique également comme « artiste en ligne » et fait référence à son autre site parodique yourethemannowdog.com qu’il qualifie de « cyber installation ».

En 2004, le nombre de sites créés dans le style yourethemannowdog.com n’avait cessé d’augmenter, et le répertoire de liens vers les autres YTMNDs devient trop grand. Goldberg profite alors de la publicité générée par la bataille en justice pour lancer « YTMND.com », un site qui permet aux internautes de créer et d’héberger leurs propres sites « uni-page » (http://ytmnd.com/). Il revendique ce nouveau site comme étant un dispositif créé « dans le but de promouvoir la créativité de ses utilisateurs ». YTMND devient alors une communauté.

Entre 2004 et 2007, la communauté de YTMND.com connaît sa plus grande croissance, et donne naissance à de nombreux phénomènes « viraux » qui se propagent dans tout l’Internet. Les membres de YTMND.com communiquent à travers des forums hébergés sur le site YTMND.com et des « chatrooms » IRC. Ils participent à l’organisation de grandes actions collectives en réseau, telle que l’invasion de Habbo Hotel en 2006 (organisé avec d’autres communautés comme 4chan.org et somethingawful.com). In-cidemment, c’est entre ces années que le web 2.015 est né, avec la révolution des réseaux sociaux (comme Facebook, qui est lancé seulement deux mois

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

plus tôt que YTMND), des sites qui facilitent le partage et la diffusion de créations d’amateurs (tel que youtube.com, créé un an après YTMND, en 2005) et la prolifération du concept de « mème Internet ».16 C’est probable-ment en partie à cause de l’apparition de YouTube – qui a donné naissance à des formes de création similaires à celle de YTMND – que le phénomène YTMND est lentement en déclin depuis 2008, avec une baisse de visiteurs et de productions chaque année.

(L’histoire de YTMND est résumé dans un YTMND créé par powerchordpunk. URL : http://ytmnd-history.ytmnd.com/)

(15) Web 1.0 --> Web 2.0sites perso --> blogspages vues --> coût au clicpublication --> participationsystème de gestion de contenu --> wikisrigidité du contenu --> syndication de contenuSource: http://www.dicodunet.com/definitions/internet/web-2.0.htm 16. Un mème Internet est une phrase / image / vidéo, etc., qui se propage tel un virus sur Internet. Pour la définition complète, voir p. 48

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Contribution à la sauvegarde des biens culturels de l ’Internet

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17. Verbeeck, Muriel. L’œuvre du temps. Réflexion sur la conservation et la restauration d’objets d’art. Images re-vues - histoire, anthropologie et théorie de l’art. 2012-04-15. URL: http://imagesrevues.revues.org/13918. M. Verbeeck emploi la définition du terme objet d’art provenant de L’École de Vienne: « se ca-ractérise par son caractère de produit (artificium, qui fait intervenir l’ars, c’est-à-dire la technique). » Pour elle, objet d’art est interchangeable avec le terme d’artefact.19. La définition provient du dictionnaire de l’Académie Française20. http://www.le-dictionnaire.com/definition.php?mot=objet

Le YTMND : Un objet numérique en réseau

Qu’est-ce qu’un objet numérique ?Quel terme pourrait-on employer pour décrire un YTMND ? Lorsque nous analysons des œuvres d’art comme des tableaux, nous employons souvent le mot « objet » pour les désigner, car, comme écrit Muriel Verbeeck17, avant d’acquérir le statut « d’œuvre d’art », l’œuvre est un « objet d’art ».18 Le mot objet peut être défini comme le « produit d’une activité humaine » (c’est la définition retenue par Verbeeck); comme une chose matérielle : « Ce qui s’offre à la perception. Tout ce qui affecte les sens et, en particulier, tout ce qui s’offre à la vue, au toucher. Chose, réalité matérielle, destinée à un usage précis »19; comme le « but d’une action, d’un effort, d’un désir, d’une volonté ».20 « Objet » suggère donc « matérialité », « produit » et « but ». Dans ce texte, nous emploierons ce mot lorsque nous ferons référence aux YTMNDs individuels (comme yourethemannowdog.com), car nous pourrons les considérer comme étant les buts de la communauté qui les fabrique.

La matérialité numériqueLa philosophie classique sépare le monde conceptuel et matériel. La défi-nition d’un objet renvoie donc à une matérialité qui peut être abordée par les sens, notamment le toucher – ce qui n’est, bien sûr, pas possible avec un objet numérique. Mais les objets numériques n’appartiennent pas non plus au domaine conceptuel, car ils sont sujets à des règles, tout comme les objets matériels. Des études récentes tentent de définir la matérialité du numérique, et proposent une conception intéressante de ce que peut être un « objet numérique » :

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

Les projets de préservation et d’archivage de documents numériques dé-finissent souvent l’objet numérique par quatre éléments : le contenu, les métadonnées, les relations avec d’autres objets, et le comportement.

Le chercheur en science informatique et culture, Yuk Hui, propose que l’objet numérique soit un ensemble de « données et de métadonnées », défini uniquement par ses relations, plutôt que par ses propriétés intrinsèques.21

Paul M. Leonardi a une idée similaire : la matérialité d’un « artefact nu-mérique » sera définie par ses interactions avec l’environnement, par l’usage que l’on peut en faire.22

Dans la programmation « orienté objet », on définit également un objet par ses comportements23 et donc par les types d’interactions qu’il peut entretenir avec d’autres objets. « Un objet qui n’interagit avec rien, n’existe effectivement pas ». Un objet numérique contiendra des « données » (infor-mations) internes, qui « génèreront » ses comportements. La valeur de ces données internes est ce qui permet de différencier les objets. Par exemple, deux objets numériques de type « document Word » contiendront des textes différents. Dans la programmation, lorsque nous voudrons définir un type d’objet, nous créerons une « classe ». « Une classe est une description abstraite d’un ensemble d’objets ».24 Elle définit un jeu de propriétés (comportements, attributs, etc.) partagées par un certain nombre d’objets.

Dans les prochaines parties, nous traiterons le YTMND comme un objet numérique. Nous commencerons par décrire une instance spécifique de cet objet, puis nous tenterons de décrire les comportements et les fonctions communs à une classe d’objets que nous appellerons les « YTMNDs ».

21. Interview with Yuk Hui on Digital Objects, http://theoryculturesociety.blogspot.fr/2011/02/interview-with-yuk-hui-on-digital.html 22. Leonardi, Paul. « Digital materiality? How artifacts without matter, matter » First Monday [Online], Volume 15 Number 6 (5 June 2010) 23. « A class is an abstract description of a set of objects » http://cnx.org/content/m11708/latest/ 24. ibid.

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Contribution à la sauvegarde des biens culturels de l ’Internet

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Description du YTMND

Yourethemannowdog.com

Le premier YTMND, intitulé yourethemannowdog.com, consiste en une seule page web, sur laquelle, en arrière-plan, une photographie de l’acteur écossais Sean Connery est reproduite en 21 carreaux. En premier plan une phrase, « you’re the man now dog », est écrite en grandes lettres avec une typographie « zoom ». Un son est répété en boucle : c’est cette même phrase « you’re the man now dog » dite par la voix de Sean Connery. L’ex-trait sonore provient du film, « Finding Forrester », qui est sorti en 2001. L’ensemble (texte-image-son) donne l’impression que l’acteur est figé dans une boucle, l’obligeant à répéter la phrase absurde à l’infini. Au premier regard, le site semble être une parodie, une critique des phrases toutes fai-tes sortant du cinéma, ou bien un hommage à un morceau insignifiant de culture populaire. (Fig 1.)

Fig 1. Titre : You’re the man now dog, Auteur : Max, URL : http://www.yourethemannowdog.com

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

YTMND au pluriel

Dans le coin supérieur gauche de yourethemannowdog.com, on constate un lien qui nous mène vers un autre site web, appelé YTMND.com. Il s’agit d’une plateforme dédiée à la création et à l’exposition en masse de ce qui semble être une forme de création populaire. Tout le monde peut, en principe, s’inscrire sur YTMND.com, et fabriquer son propre site uni-page. Un dispositif existe pour aider l’utilisateur avec la partie technique de la création : il rassemble les médias (images, sons, textes) apportés par celui-ci, et les publient avec le nom de domaine qu’il aura choisi. L’utilisateur peut apporter ses propres médias ou bien utiliser les « ressources » (images et sons) du site YTMND.com. Chaque nouvelle ressource apportée par l’utilisateur se voit attribuer une clé d’identification, et est stockée dans la base de données de YTMND.com. Ce système permet à une ressource d’être réutilisée dans la création d’autres YTMNDs – ce qui économise de l’espace sur le serveur YTMND.com et permet de suivre l’utilisation d’une même image ou son dans le temps.Le contenu d’un site YTMND peut varier, mais un YTMND « classique » doit suivre une règle de base – règle qu’un membre de YTMND.com, « inkdrinker » a résumée dans un YTMND intitulé souvenez-vous de vos principes de base : « Picture. Sound. Text. A singular focus, not a faggy short film. » (http://picturesoundtext.ytmnd.com/). L’idée est donc d’ex-primer une idée « singulière » et non une narration. Sur le site YTMND.com, une distinction est faite entre les sites « classiques » qui reprennent la formule originale « picture, sound text », et les autres – qui sont néanmoins considérés comme étant des YTMNDs, et qui peuvent être tout autant appréciés par la communauté.

Exemples de YTMNDs du style « classique » :

Fig 2. Jesus + Jurassic parc = « Raptor Jesus », un personnage que nous retrouvons souvent dans la mythologie de l’Internet.

Fig 3. Un YTMND commémorant une phrase du film Pulp Fiction.

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Contribution à la sauvegarde des biens culturels de l ’Internet

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Fig 2. Titre : Raptor Jesus saves a lamb..., Auteur : fearcondom, URL : http://raptorlamb.ytmnd.com/

Fig 3. Titre : (nsfw) ENGLISH MOTHER FUCKER DO YOU SPEAK IT, Auteur : Wraith, URL : http://english.ytmnd.com/

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

Exemples de YTMNDs non-classiques :

Fig 4. Un rare YTMND « interactif » où le regardeur est incité à interagir avec le YTMND en modifiant la taille de la fenêtre de son navigateur.

Fig 5. Avec ce YTMND, on explique la crise économique avec le jeu de Tetris.

Les YTMNDs ne sont pas toujours des objets isolés. Souvent, ils pren-nent tout leur sens par leur position au sein d’un ensemble plus large de YTMNDs, qui sont tous accessibles dans le même lieu (le même serveur et nom de domaine principal). Un YTMND peut ainsi devenir un compo-sant au sein d’une narration collective, appellée « fad » par la communauté YTMND. Un fad est essentiellement un phénomène viral ou un mème au sein de la communauté YTMND. Un exemple de fad est « Lindsay Lohan doesn’t change facial expressions ». Le phénomène a commencé avec un YTMND qui a mis en évidence le fait que la comédienne Lindsay Lohan faisait toujours la même expression dans ses photographies.

Fig 6. Titre: Lindsay Lohan doesn’t change facial expressions, Auteur; Spli-ceVW, 2005. URL : http://lohanfacial.ytmnd.com/

Fig 7. Titre: Lindsay Lohan Changes Facial Expressions a Lot, Auteur: jims-mith, URL : http://ptkfgslohan.ytmnd.com/

Fig 8. Titre: Lindsay Lohan’s Bra Doesn’t Change Faces!, Auteur: somnambu-lated, URL : http://lohanbra.ytmnd.com/

Fig 9. Titre: Zombie Lohan, Auteur: State-of-mind, URL : http://zombie-lohan.ytmnd.com/

Fig 10. Titre: Batman doesn’t change facial expressions (ualuealuealeuale remix), Auteur: pokejabba, URL : http://batmanfacial.ytmnd.com/

Fig 11. Titre: LEGOs don’t change facial expressions, Auteur: RussianDog, URL : http://legoface.ytmnd.com/

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Fig 4. Titre: Escape (resizable), Auteur: kekko, URL : http://exitsign.ytmnd.com/

Fig 5. Titre: Gaming the Economy, Auteur : varbose, URL : http://debtris.ytmnd.com/

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

Fig 6. Fig 7.

Fig 8. Fig 9.

Fig 10. Fig 11.

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Les fonctions et dimensions du YTMND

Le YTMND en tant que support des valeurs d’une communauté

Sur la page d’accueil de YTMND.com, on peut accéder à tous les sites de type YTMND créés par les membres de la communauté (ils se comptent en centaines de milliers). Les sujets traités par les YTMNDs illustrent les valeurs et les préoccupations de la communauté virtuelle qui les produit. Un grand nombre de YTMNDs font référence au cinéma et la télévision, car avec cette forme de création, les membres de la communauté démo-cratisent les images et objets de consommation provenant des structures médiatiques rigides. Ensemble ils les bricolent et les remixent pour créer de nouvelles narrations. YTMND.com baigne dans la parodie, la satire et l’autodérision ; il décompose la culture populaire pour extraire ce qu’elle a de plus absurde et insensé. L’artiste Guthrie Lonergan le formule bien dans son article sur YTMND : « YTMND est un projet d’une sophistication insensée. Il comprend que l’Internet transforme la culture en de petits mor-ceaux de merde. Il représente l’échec de l’utopie démocratique de l’Internet et du Web 2.0 – et il en est conscient et même fier.25 En même temps, le YTMND est souvent employé comme une forme d’expression libre et démocratique, exprimant des idées politiques et critiquant les événements de l’actualité.

Le YTMND en tant qu’objet social et support de communica-tion

Par leur position au sein d’un site web et d’une communauté, les YTMNDs peuvent également devenir des objets sociaux, avec lesquels les membres de la communauté communiquent entre eux (dans les forums et commentaires) et avec le reste de l’Internet.

25. Picture. Sound. Text, article écrit par l’artiste Guthrie Lonergan pour exposition #22 de la galerie And/Or, en 2009

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

Un YTMND peut être utilisé par son auteur pour communiquer un mes-sage précis. Par exemple, dans un YTMND intitulé « I created Lindsay Lohan doesn’t change facial expressions » (http://lohanoriginal.ytmnd.com/), le créateur SpliceVW prouve à la communauté YTMND que c’est lui qui a créé ce fameux YTMND. Il fait aussi référence à une bataille avec le site ebaumsworld.com, qui lui aurait « volé » sa création.

Cette forme de communication visuelle est particulière à l’Internet. Les « habitants » du net se construisent petit à petit un vocabulaire visuel, dont la signification est partagée par les communautés auxquelles ils appartien-nent. Au lieu de communiquer avec des mots, l’internaute s’exprimera en collant une image, ou un lien vers une image dans sa communication. Par exemple, le YTMND « (nsfw) ENGLISH MOTHER FUCKER DO YOU SPEAK IT » (Fig 3.) commémore une phrase culte du film Pulp Fiction. Mais il peut également être utilisé par les membres de YTMND dans leurs forums, pour signaler à un internaute le fait qu’il fait trop de fautes de grammaire. Une image-concept peut devenir tellement ancrée dans le langage d’une communauté, qu’au lieu de poster l’image elle-même, l’internaute tapera le simple titre du fichier numérique (ex : « umad.jpg ») et tout le monde saura à quelle image il fait référence.

La dimension esthétique et artistique du YTMND

Un YTMND est l’association idéale entre l’art du Web 1.0 et du web 2.0. Un YTMND classique réunit l’esthétique « crue » et minimaliste de l’an-cien Internet et l’esthétique participative de l’Internet actuel :

« Cette forme d’art - des vidéos type Philip Glass - était alors limitée aux galeries d’avant-gardes, et parfois commandée avec des bourses conséquentes, provenant du “National Endowment for the Arts”. Mais il s’agissait là d’œuvres sérieuses

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et faites pour dire Quelque Chose. La pièce de Connery était juste pour rigoler. »

(Traduit de l ’anglais)26

Le YTMND est un « single serving site ».27 Ce genre de site existait déjà dans le web 1.0 :

Fig 12. 1994: http://www.purple.com/purple.html Le premier site uni-page connu, consistant en une seul couleur.

Fig 13. 1995: http://wwwdotcom.com/ « la dernière page de l’Internet ».

Fig 14. 1997: http://tired.com/ Un site qui pose une seule question : « êtes-vous fatigué ? »

Le YTMND illustre une forme de création collective et sociale qui est née avec le Web 2.0. L’internaute devient un membre actif au sein d’une com-munauté qui se forme autour de la production d’un type d’objet. Comme dans beaucoup de systèmes de création collective en réseau, dans YTMND, l’accent n’est pas mis sur le créateur, mais sur le contenu – les objets produits par la communauté. Max Goldberg : « j’ai toujours pensé que YTMND devrait se focaliser plus sur le contenu qui est produit, que sur les utilisateurs qui produisent le contenu » (traduit de l’anglais)28

26. « This kind of art form - a sort of Philip Glass-like video fugue - previously had been limited to avant-garde galleries and sometimes paid for with shockingly large grants from the National En-dowment for the Arts. Of course, those were serious and meant to make A Point. The Connery bit was just for fun. » -- A Home For Quick Hits, Frank Ahrens, Washington Post 2006, http://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/article/2006/07/29/AR2006072900041.html27. Le terme « single serving site » est inventé par Jason Kottke en 2008 pour décrire un genre de site web consistant en une seule page.28. « I’ve always felt that YTMND should focus more on the content being produced than the users that produce the content itself. » - Max Goldberg dans un commentaire sur le site ytmnd.com

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

Fig 12.

Fig 13.

Fig 14.

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29. Benjamin, Walter. L’oeuvre D’art à L’époque De Sa Reproductibilité Technique : Version De 1939. Gallimard, 2008.

Exemples de types d’objets numériques créés par des communautés vir-tuelles du web 2.0 :

• Les YouTube Poop Videos : Même s’il existe des communautés dédiées à cette forme de création, la définition exacte d’un YouTube Poop Video reste inconnue. Une des communautés YPV : http://youchew.net/• Les Recuts : il s’agit de remixer des bandes annonces de films afin de créer un nouveau film imaginaire, différent de l’original. (exemple: http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=sfout_rgPSA Une des communautés dédiées à la création de Recuts: http://www.the-trailermash.com/10-things-i-hate-about-commandments-comedy/) • Dump.fm : une communauté dédiée à la communication en images, à la création, au remixage et à la propagation d’images. Le site est créé par l’artiste Ryder Ripps. URL : http://www.dump.fm

De la reproductibilité au remixageL’esthétique de création collective est la suite naturelle de l’esthétique née avec les médias de masse que Walter Benjamin a théorisé dans son ouvrage « L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique ». W. Benjamin explique que les techniques modernes de reproduction dé-truisent « l’aura » de l’œuvre d’art unique. Son concept « d’aura » est lié à « l’authenticité » et à « l’unicité » de l’œuvre :

« L’authenticité d’une chose intègre tout ce qu’elle comporte de transmissi-ble de par son origine, sa durée matérielle comme son témoignage histori-que. Ce témoignage, reposant sur la matérialité, se voit remis en question par la reproduction, d’où toute matérialité s’est retirée. » 29

Annexe 1 : Historique de la création en réseau

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

30. Pouivet, Roger. L’œuvre D’art à L’âge De Sa Mondialisation : Un Essai D’ontologie De L’art De Masse. La Lettre volée, 2003.31. Yves Michaud : L’art à L’état Gazeux. Hachette Littérature, 2004.32. Nous verrons ce profil dans la prochaine partie, p. 43

Les œuvres d’art qui sont faites pour être reproductibles (comme les films), peuvent se manifester en même temps dans de multiples lieux, les rendant plus « accessibles » à un public plus divers. Cette nouvelle accessibilité donne naissance à des formes d’art « populaires » – que Roger Pouivet nomme « l’art de la masse ». Selon « l’ontologie » de R. Pouivet : « X est une œuvre de l’art de masse si et seulement si : (1) X est une œuvre d’art à instances multiples ou à types ; (2) X est produit et diffusé par une technologie de masse ; (3) Par ses formes narratives, les sentiments qu’elle appelle et même son contenu, X est accessible au moindre effort, virtuellement au premier contact, pour le plus grand nombre, et même pour un public qui n’a reçu aucune (ou quasiment aucune) formation. »30

Au lieu de l’esthétique de « contemplation et de recueil sur soi » que vit le spectateur devant une œuvre d’art « classique » comme un tableau, l’esthé-tique de l’œuvre de masse, selon Michaud, est liée à la « consommation collective » de celle-ci.31 Mais si les deux premières conditions de l’ontologie de R. Pouivet sont satisfaites par l’art collectif de l’Internet, la dernière ne s’y applique pas. R. Pouivet écrit que : « L’art de masse s’adresse à un public indifférencié et mondial, justement sans caractéristique sociale définie, à n’importe qui. Le critère de réussite d’une œuvre d’art de masse, est de parvenir à ‘transcender’ l’appartenance à des groupes sociaux. » L’étude approfondie des communautés virtuelles comme YTMND nous permet de constater que ces dernières possèdent une culture très caractéristique : elles ont des traditions, rituels, langages, et mythologies qui sont difficilement saisis par un néophyte. Les membres de ces communautés ont également un profil socioculturel bien défini.32 Là où une œuvre d’art de masse est créée pour la masse, une œuvre d’art collectif est créée par la masse – ce qui implique une certaine connaissance de la technologie, et une pratique de l’Internet qui n’est pas, (ou pas encore) ordinaire.

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Cette transformation du consommateur passif en créateur actif est liée à la transformation de la reproduction analogique en reproduction numérique : l’objet reproductible devienne l’objet remixable. La reproductibilité d’un objet devient possible lorsqu’on peut séparer l’information de la matière et la transposer sur de nouveaux supports matériels. Dans un système « ana-logique », l’information n’est réellement séparable de la matière que dans la matrice (film, matrice de vinyle, etc.). Une fois manifestée dans un support matériel, l’information devient inséparable de celui-ci. La matrice est donc un « système » qui produit des « objets » : les copies ou tirages. Avec la reproduction numérique, l’objet et le système se confondent ; le support est à la fois la matrice et la manifestation de l’information ; l’objet numérique peut désormais se reproduire à partir de lui-même. Lorsque le spectateur est confronté à l’objet numérique, il peut le reproduire à l’infini, intervenir sur sa forme, et le bricoler. C’est la première étape qui a mené à une nouvelle esthétique. La deuxième est la création des réseaux de communication, qui permet au public non seulement de consommer les médias, mais aussi de diffuser leurs créations en dehors des structures de communication hiérarchisées. L’esthétique de la « consommation collective » devient donc l’esthétique de la « création collective ».

L’identité du YTMND

Nous avons vu qu’un YTMND individuel appartient à un type, ou classe d’objet, qu’on appel le YTMND. Après la description que nous venons d’en faire, quels semblent être les propriétés communes à cette classe d’objets ?

1) Leur localisation générale : Ils sont accessibles sur Internet2) Leur localisation spécifique : Ils sont « hébergés » dans le serveur YTMND.com3) Leur format général : Ils consistent en une seule page web 4) Leur format spécifique : Ils sont composés de médias numériques ayant les formats suivants : image(s), son(s), texte(s)

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

Il est certain que si nous rencontrons un objet numérique ayant les pro-priétés ci-dessus, il s’agit d’un YTMND. La question se pose alors : un objet ayant seulement certains des comportements cité en haut, peut il être considéré comme appartenant à la classe d’objets YTMND ? D’après notre étude du YTMND, nous pouvons extraire des règles sui-vantes :

• Nousavonsvuqu’ilexistedesYTMNDs«nonclassiques»,maisqui sont tout de même considérés comme étant des YTMNDs, parce qu’ils ont étés créés dans le cadre du site YTMND.com. Ceci nous permet de dire qu’un objet ayant la caractéristique 3 (« une seule page web ») mais qui n’a pas la caractéristique 4 (« image, son, texte ») peut néanmoins appartenir à la classe YTMND, s’il a la caractéristique 2 (« hébergé sur le site YTMND.com »). • Nousavonsvuque,mêmeavantlacréationdusiteYTMND.com,des internautes créaient des objets qu’eux-mêmes et Max Goldberg considé-raient comme étant des YTMNDs, et qui étaient alors rassemblés dans une liste. Nous pouvons donc dire qu’un objet ayant les caractéristiques 3 (« une seule page web ») et 4 (« image, son, texte »), mais qui n’est pas hébergé dans le site YTMND.com, sera tout de même considéré comme appartenant à la classe d’objets YTMND.Dans la description de l’objet YTMND, je n’ai pas décrit le code informa-tique constitutif d’un YTMND, car il est évident que l’identité d’un objet YTMND ne se situe pas à ce niveau. Le code qui permet de réunir les dif-férents médias dans une page HTML a changé de nombreuses fois depuis la création de YTMND.com. Tant que l’objet suit les règles ci-dessus, ses données techniques internes peuvent varier.

Nous avons constaté qu’il est possible d’aborder les objets YTMND à différents niveaux, selon leurs significations et fonctions : D’abord comme des objets numériques individuels, dont certains auront plus de valeur en eux-mêmes que d’autres, selon leur composition et histoire. Ensuite, nous pouvons considérer certains YTMNDs comme appartenant à des ensembles. Ces YTMNDs auront plus de valeur ensemble que si nous les

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abordons séparément. Nous pouvons également considérer certains des YTMNDs comme étant des transmetteurs d’informations au sein d’une communauté virtuelle, et comme des véhicules des pratiques et valeurs de cette communauté. Nous pouvons donc diviser la classe générale d’objets « YTMND » en sous-catégories, selon leurs fonctions et leurs interactions avec les autres YTMNDs et/ou avec la communauté (Fig 15.).

Fig 15.

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

33. LE GALLOU Francis, BOUCHON-MEUNIER Bernadette, Systémique, Théorie et Appli-cations, 1992

Une communaute virtuelle en reseau : YTMND.com

Dans cette partie, nous tenterons de définir ce qu’est une communauté virtuelle. Nous essayerons ensuite de comprendre la structure conceptuelle et matérielle de la communauté qui produit les YTMNDs.

Terminologie L’objet YTMND est produit par, et interagit avec une communauté vir-tuelle à travers le site Internet YTMND.com. Le mot « objet » ne s’applique pas à la dimension dynamique du site YTMND.com, que nous étudierons dans cette partie. L’ensemble site / communauté est quelque chose qui produit, un « dispositif » de création. Nous emploierons le mot « système » pour désigner cet ensemble, en se référant à la définition qui provient de la systémique : « Un système est un ensemble, formant une unité cohérente et autonome d’objets réels ou conceptuels (éléments matériels, individus, ac-tions, ...) organisé en fonction d’un but (ou d’un ensemble de buts, objectifs, finalités, projets, ...) au moyen d’un jeu de relations (interactions mutuelles, interactions dynamiques...), le tout immergé dans un environnement. »33

Dans la programmation, c’est le système informatique qui décide comment les objets numériques interagissent. Nous avons vu précédemment que la matérialité d’un objet numérique dépend de ses comportements / interac-tions avec d’autres objets. C’est donc le système qui défini l’objet. C’est toute l’infrastructure visible et invisible, et l’ensemble des processus dynamiques qui assure l’existence de ces objets numériques dans le présent.Dans les prochaines parties, nous déconstruirons la communauté virtuelle YTMND – que l’on peut assimiler à un type de système vivant. (An-nexe 2)

Annexe 2 : Les différents types de systèmes

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34. The Computer as a Communication Device. J. C. R. Licklider and Robert W. Taylor, 196835. Rheingold, Howard. The Virtual Community: Homesteading on the Electronic Frontier. 2nd Revised ed. MIT Press, 2000.

Nous tenterons de comprendre la structure et le fonctionnement de cette communauté ainsi que les mécanismes qu’elle emploie pour produire du contenu numérique.

Qu’est-ce qu’une « communauté virtuelle » ?

Une communauté virtuelle est essentiellement une communauté qui :

1) est fondée sur un intérêt commun, plutôt que sur un lieu géographique commun, et 2) dépend d’un certain niveau de technologie.

• En1968,J.C.R.LicklideretRobertW.Taylor,introduisentlanotion de « communauté en ligne » qui consistera en des « membres géo-graphiquement séparés, parfois regroupés dans de petits groupes, parfois travaillant en individus. Il ne s’agira pas de communautés formées autour d’une localisation commune, mais autour d’un intérêt commun. »34

• SelonHowardRheingold,unecommunautévirtuelleconsisteen:« des regroupements socioculturels qui émergent du réseau lorsqu’un nom-bre suffisant d’individus participent à ces discussions publiques pendant assez de temps en y mettant suffisamment de cœur pour que des réseaux de relations humaines se tissent au sein du cyberespace »35

« Les membres des communautés virtuelles font appel à des mots inscrits sur les écrans pour échanger des plaisanteries ; débattre ; participer à des digressions philosophiques ; faire des affaires ; échanger des informations ; se soutenir moralement ; faire ensemble des projets [...] ; tomber amoureux ou flirter ; se faire des ami(e)s ; les perdre ; jouer [...]. Les membres des communautés virtuelles font sur le Réseau tout ce qu’on fait « en vrai » ; il y a juste le corps physique qu’on laisse derrière soi. »35

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

36. A virtual community is defined herein as an aggregation of individuals or business partners who interact around a shared interest, where the interaction is at least partially supported and/or mediated by technology and guided by some protocols or norms. » A Typology of Virtual Communities : A Multi-Disciplinary Foundation for Future Research, Constance Elise Porter, University of Notre Dame, 2004.

• ConstanceElisePorterdéfinitune«communautévirtuelle»comme : « un ensemble d’individus ou de partenaires d’affaires qui in-teragissent autour d’un intérêt partagé, où l’interaction est au moins en partie soutenue et/ou se fait par le biais de la technologie et est guidé par des protocoles ou des normes » (Traduit de l’anglais).36 Dans cet ouvrage, Porter fait une typologie des communautés en réseau. Les attributs d’une communauté virtuelle selon Porter sont :

1) Le but : le contenu de l’interaction, les centres d’intérêts partagés par les membres de la communauté.2) Le lieu : l’étendue du soutien technologique, et si le lieu de l’inte-raction est entièrement ou partiellement virtuel, central ou décentralisé. 3) La plateforme : l’infrastructure communicationnelle. Si la commu-nication est synchrone ou asynchrone. 4) La population et les motifs d’interaction entre membres : les mo-dèles d’interaction et la force des liens sociaux (forts, faibles, etc.)5) Le modèle économique : ce qu’apporte l’interaction, si la commu-nauté génère des bénéfices économiques ou pas.

Une communauté aura une structure différente selon qu’elle est fondée par des individus ou par une entreprise. Elle peut également être fondée par des individus, mais employer des plateformes commerciales pour communiquer, par exemple, les communautés qui ont pour but la création de montages vidéos, emploieraient YouTube en tant que plateforme. Nous verrons ultérieurement que les caractéristiques d’une communauté auront une incidence sur sa survie, et sur la survie de ses productions.

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L’environnement : le réseau d’Internet

Définitions

« L’histoire du réseau est toujours liée à une double référence : l ’orga-nisme et la technique, les deux fonctionnant à la fois. C’est pourquoi le concept s’élabore avec et contre les images du corps et de la techni-que. »37

Le mot « réseau » provient du Grec et signifie « filets ». « Cette image (du réseau) est toujours utilisée en référence au maillage, c’est-à-dire au tissu. »38

Afin de comprendre l’infrastructure du réseau informatique, on peut imaginer un réseau « matériel » comme un réseau de transport par exemple. Mais le réseau informatique se différencie d’un réseau matériel par le fait que son infrastructure matérielle est invisible. Il n’existe pas de « voies » visibles qui connectent les individus, les voies se dessinent par les échanges et les communications entre internautes et sites. Le dessin du réseau entier se crée en temps réel. Les circuits de l’information qui existent entre individus et sites sont changeants, ils se redéfinissent constamment. On assimile souvent la structure du réseau au « rhizome »39 : elle est faite de nœuds (in-dividus, communautés, sites) qui, en principe, peuvent établir des liens avec n’importe quel autre nœud dans le réseau.

37. ARNOLD Michael, The concept of community and the character of networks, The Journal of Community Informatics, Vol 3, No 2 (2007)38. PARROCHIA Daniel, Penser les Réseaux, 200139. DELEUZE Gilles et GUATTARI Félix, Capitalisme et Schizophrénie 2. Mille Plateaux, 1980

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

Manuel Castells écrit que « les réseaux détruisent le contrôle étatique sur la société et sur l’économie. Ce qui est fini, dans l’étape actuelle, c’est l‘État souverain, national ».40 L’infrastructure de l’Internet permet une commu-nication rapide, non-hiérarchique et décentralisée entre internautes – ce qui amène à la formation spontanée de communautés, de projets collectifs et de toutes sortes de collaborations complexes, comme YTMND. Il permet également aux informations de se propager plus vite et plus loin sur le net qu’un virus ne se propagera dans la « vraie vie ».

Daniel Parrochia résume bien la complexité du réseau dans son livre « Pen-ser les réseaux »38 : « Aujourd’hui le concept de réseau est devenu une sorte de passe-partout idéologique, parce qu’il recouvre tous niveaux mêlés de significations : dans son être-là, il est une structure composée d’éléments en interaction, dans sa dynamique, il est une structure d’interconnexion instable et transitoire, et dans son rapport à un système complexe, il est une structure cachée dont la dynamique est censée expliquer le fonctionnement du système visible. Grâce au réseau, tout est lien, transition et passage, jusqu’à confondre les niveaux qu’il relie : qu’il s’agisse de l’interaction entre éléments, de l’engendrement d’une structure par une autre ou encore du fonctionnement d’une systèm complexe. »Tout système en réseau est intimement lié à l’infrastructure et à l’évolution du réseau lui-même. Le réseau n’est pas seulement un environnement ex-terne à YTMND, mais en tant que milieu et médium, il est un processus actif qui conditionne la structure de YTMND et son évolution dans le temps.Le réseau lui-même influe sur tous les sites, les communautés et projets qui s’y trouvent. Un système comme YTMND est constamment soumis aux aléas de son milieu. Tel un organisme vivant, il est obligé d’évoluer avec ce dernier ou subir l’extinction. Comme la plupart des créations et projets en réseau, YTMND a suivi une courbe de croissance puis de décroissance, liée aux évolutions de cet environnement.

40. CASTELLS Manuel, dialogue avec Jacques Attali dans le Journal Libération, 1998

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Le but de la communauté YTMND

Une communauté virtuelle se forme autour d’un but ou intérêt commun. Celui de la communauté YTMND est la production et l’exposition d’un certain type d’objets numériques. Pour qu’une communauté virtuelle se forme, il faut que plusieurs internautes aient un intérêt commun, se ren-contrent et se trouvent ou se créent un espace commun.

La communauté YTMND s’est formée petit à petit par un processus évolutif. Après la création du premier site YTMND, quelques internautes dispersés reprenaient la formule YTMND et créaient des projets individuels. L’idée se propageait à travers le réseau et les internautes employaient les systèmes de communication en place (courriel, forums, blogs, etc.) pour échanger autour de ce phénomène. Lorsque Max Goldberg prend conscience de ces faits, il crée la première liste de liens vers d’autres YTMNDs. Cela constitue une sorte d’archive, un « nœud » qui lie des sites éparpillés, rendant visible le fait que plusieurs internautes partageaient le même but. La conséquence est la création « officielle » d’un espace commun, à travers le site YTMND.com. Le site devient alors un lieu « central » qui lie créateurs et créations, et permet de définir les règles et buts de la nouvelle communauté. Pourtant, au départ, YTMND.com est censé être un simple dispositif technique, créé pour faciliter la création et l’hébergement de YTMNDs. M. Goldberg dit ne pas se douter que YTMND.com allait devenir éga-lement un lieu « d’exposition » et une « destination virtuelle », puis une communauté : « Lorsque j’ai créé YTMND, je n’avais même pas envisagé une commu-nauté. Je ne pensais jamais que YTMND allait devenir un « portail » ; je pensais que les gens viendraient ici pour créer un YTMND, pour ensuite l’envoyer à leurs amis ou le poster dans des forums. Je ne pensais pas que les gens allaient visiter YTMND pour voir du nouveau contenu. Je ne m’attendais pas à ce que cela devienne une destination, au lieu d’un simple hébergement de quelques créations que les gens verraient en passant.

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

Évidemment cette supposition, comme beaucoup d’autres que j’ai faite pendant la création du site, était très loin de la réalité. »41 (Traduit de l’an-glais)

Le lieu de la communauté YTMND

Le lieu d’une communauté virtuelle peut être centralisé ou décentralisé, entièrement ou partiellement virtuel. Le lieu de YTMND est entièrement virtuel et centralisé car l’infrastructure communicationnelle, le dispositif technique qui permet de créer les YTMNDs et les YTMNDs eux-mêmes sont accessibles par un seul et même site et les données sont stockées sur le même serveur. D’autres systèmes de création plus actuels (comme les vidéos « Recuts ») ont souvent des lieux plus décentralisés où le schéma est le suivant : il exis-tera plusieurs sites où les internautes peuvent envoyer et « exposer » leurs productions et parfois un dispositif technique qui facilite la création (tel que Memegenerator42) ; les créateurs utiliseront le plus souvent des réseaux sociaux déjà existants (comme des groupes Facebook) pour communiquer.

Une communauté virtuelle peut également avoir un lieu central puis des « pôles » excentrés qui s’installeront dans d’autres lieux publics de l’Internet. Parfois, la communauté installera des « colonies » dans des lieux appartenant à d’autres communautés, ou bien elle organisera des invasions de territoires hostiles. La communauté de 4chan par exemple, aura des pôles dans des territoires « neutres », comme Facebook et Reddit, des colonies dans des communautés avec une culture plus spécifique, comme Second Life, et elle organisera des invasions de territoires « hostiles », comme Habbo Hotel43.

41. Extrait d’une communiqué posté par Mac Goldberg sur le site YTMND.com 42. Memegenerator est un dispositif permettant de rapidement associer du texte à une image choisie par l’utilisateur. Comme son nom indique, il est essentiellement utilisé pour « générer » des mèmes internet. 43. En 2006, les membres de plusieurs communautés Internet, dont YTMND, organisent une in-vasion virtuelle d’un jeu en réseau appelé Habbo Hotel. Ils habillent tous leurs avatars de la même façon et bloquent l’entrée de la piscine virtuelle. L’action est devenue une tradition qui a lieu toutes les années à la même date.

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La plateforme : YTMND.com

La qualité et la vitesse avec laquelle les membres d’une communauté vir-tuelle communiquent et interagissent dépendent de la plateforme, ou de l’infrastructure de communication employée par celle-ci. YTMND pos-sède sa propre plateforme qui permet une collaboration non-hiérarchique autour de la production de YTMNDs.Comme de nombreuses communautés virtuelles, YTMND emploie une infrastructure qui ressemble au cerveau humain dans les types de commu-nication qu’elle permet et dans le traitement de sa mémoire. Cette infrastructure nécessite les trois composantes suivantes :

• Ilfautunendroitoùlesmembrespeuventconverserentempsréel,de manière synchronique. Cela leur permet d’échanger leurs idées récentes et de résoudre des conflits, etc. Cette fonction est habituellement remplie par un « chatroom ». C’est dans le chatroom que les échanges entre la com-munauté et son environnement sont étudiés, filtrés, et intégrés ou rejetés par elle. Le chatroom fonctionne comme la mémoire d’apprentissage ou la mémoire dynamique du cerveau humain.

• Ilfautunendroitoùlesmembrespeuventéchangerdemanièreasynchrone, dans une durée un peu plus prolongée. Ceci leur donne le temps d’interagir de façon plus réfléchie car les discussions ne disparaîtront pas aussi rapidement que dans le chatroom. Cette fonction est remplie par le forum.Le forum fonctionne comme la mémoire à court-terme du cerveau : dans le forum, les informations sont partagées puis triées, analysées et ensuite oubliées ou bien conservées dans la mémoire à long terme. Dans YTMND, il existait deux types de forums. Les premiers partageaient le nom de do-maine de YTMND.com (http://forums.ytmnd.com/) et étaient faits pour des discussions plus modérées autour de la création de YTMNDs. Ils sont aujourd’hui fermés. Les deuxièmes étaient faits pour des discussions plus variées et moins contrôlées. Ils sont toujours ouverts et accessibles ici : http://www.rubycalaber.com/forums/ (Le logiciel employé est vbulletin).

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• Ilfautunendroitoùlesproductionsdelacommunautépeuventêtre stockées et consultées à tout moment par les membres. Cette fonc-tion est souvent remplie soit par une simple archive du forum (organisée selon sujets, dates etc. de manière à pouvoir être mieux conservée) soit par un Wiki collaboratif. La fonction de l’archive ou du Wiki est similaire à celle de la mémoire long-terme du cerveau. Il conserve la mémoire la plus importante pour l’organisme. Le Wiki est plus intéressant que la simple archive dans le sens où cette mémoire est associative et peut évoluer, comme la mémoire du cerveau. Aujourd’hui il existe plusieurs centaines de milliers de sites YTMND. Le rassemblement d’une grande partie des YTMND dans un même site permet de garder une trace de ce type de création. Le site fonctionne donc comme une sorte d’archive où tous les sites créés par les membres de la communauté YTMND sont conservés et peuvent être consultés aisément. Sur YTMND.com on peut aussi accéder à un wiki qui est édité de manière collaborative par les membres de la communauté. Le Wiki documente la culture de la communauté YTMND, les YTMNDs et « fads » historiques. (Le logiciel employé est Mediawiki).

La population de YTMND

Les « créateurs de contenu web »

« Pendant que j’explore un territoire très similaire dans ma propre créa-tion, les créateurs de la plupart de YTMNDs ne se considéreront jamais comme des ‘artistes’ et ne voudraient pas êtres considérés comme tels… Je n’arrive pas à savoir si j’aime ou hais le fait que le titre le plus juste qu’on puisse leur donner sonne tellement inoffensif et antiseptique : ‘producteurs de contenu web’ »44

44. Picture. Sound. Text, Guthrie Lonergan, pour l’exposition #22 de la galerie And/Or, 2009

Annexe 3 : De la communication à la collaboration

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45. « If I’ve come to any sort of realization, it’s clear that a huge percentage of the YTMND population is virtually useless for coming up with original content that’s worth looking at. A sad realization, but I think many will agree that it’s accurate. This is always going to be an issue on any site where the focus is user-created content. It just comes down to simple numbers; most people aren’t going to be very good at being funny or creative. » Max Goldberg, dans une communiqué sur le site ytmnd.com, en 2007

L’Internet regorge de ces « producteurs de contenu » qui donnent de leur temps en participant à tous types de projets imaginables. Ces internautes sont des composants essentiels des systèmes comme YTMND. Ceux qui participent à des projets ludiques, sans but utilitaire, ont déjà une certaine pratique de l’Internet qui leur permet de connaître et de trouver un intérêt dans ce type d’activité. Pourtant, tous les membres de la com-munauté YTMND ne sont pas des composants utiles ou avantageux au système. Max Goldberg le dit lui-même dans un message à la communauté YTMND : « Si je me suis rendu compte d’une chose, c’est qu’un énorme pourcentage de la population YTMND est pratiquement incapable de produire du contenu original qui vaut la peine d’être vu. C’est une constatation triste, mais je pense que beaucoup de gens seraient d’accord sur le fait que c’est vrai. Ce problème sera présent sur n’importe quel site où le contenu est généré par l’utilisateur. Cela revient à de simples statistiques : la majorité des gens ne sont pas doués pour l’humour et la créativité. »45

Comme pour tout site où le contenu est généré par les utilisateurs, on peut diviser ces derniers en plusieurs catégories :

• Ceuxquiontbiensaisilesrèglesetprincipesdecréationetcontri-buent du contenu de qualité.• Ceuxquiontcomprislesprincipesmaisn’ontpaslesconnaissancestechniques, ou l’imagination nécessaire, pour créer du contenu intéres-sant. Ou bien, ceux qui s’intéressent plus à la quantité de leurs productions qu’à leur qualité. • Ceuxquin’ontpascomprisleprincipeouquil’utiliseàdesfinsquine sont pas celles de la communauté en générale (ex: pour faire de la pub, pour faire de la propagande raciste, sexiste, etc.).• Les«Trolls»:ceuxquirejoignentlacommunautédanslebutdenuire et de provoquer des conflits.

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• Les«Lurkers»:ceuxquiadhèrentàlacommunautésansrienproduire.

L’équilibre d’un système ouvert est toujours délicat et « au bord du chaos ». Il suffit de très peu pour qu’il s’autodétruise de l’intérieur. Comme dans des sociétés humaines, il a fallu que la communauté YTMND trouve un sys-tème de gouvernance juste, qui parvienne à un équilibre entre un contrôle rigide et « liberticide » qui découragerait la création, et l’extrême liberté d’expression - ce qui amènerait inévitablement au conflit et ferait baisser la qualité des productions. Le profil des visiteurs du site YTMND.com selon Alexa Demographics, nous donne une idée du profil socioculturel du membre YTMND typique. (Fig 16.) Ce profil est assez similaire à celui des utilisateurs du site 4chan.org (image), ce qui n’est pas étonnant puisque les intérêts de ces deux com-munautés sont assez proches. (Fig 17.)

L’internaute et le jeuSur le net, l’individu construit son identité par ses activités et par le choix des communautés auxquelles il appartient. L’Internet lui ouvre la possibilité de s’inventer plusieurs identités et de leur donner une existence. Mais le fait de se séparer de son identité « réelle » et de se construire des identités numé-riques parallèles implique déjà une certaine connaissance du réseau qui n’est pas qu’utilitaire. Les producteurs de contenu web sont des « indigènes » du réseau. Ils font plus que de consulter leur Facebook ou d’envoyer des emails. Ils habitent le net, ils investissent de leur temps dans une sorte de double vie, leurs activités et relations sociales en ligne ont souvent autant ou plus d’importance pour eux que celles qu’ils ont dans « la vraie vie ». Les actions de l’internaute ont moins de conséquence en réseau que dans sa vraie vie – au moins en apparence – ce qui lui donne une certaine impres-sion de liberté et lui permet de « jouer » sa vie (ou ses vies) dans un univers parallèle. Il acquiert une nouvelle liberté – une autonomie d’expression loin de son autocensure et de la censure liée à la morale et aux bonnes mœurs de la société. Des communautés comme YTMND.com deviennent des sortes de « terrains de jeux », avec ou sans thème particulier. Dans son ouvrage,

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Fig 16. Profil de l’internaute qui visite YTMND.com

Fig 17. Profil de l’internaute qui visite 4chan.org

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« Homo-ludens, Essai sur la fonction sociale du jeu »46, Johan Huizinga propose que le jeu soit ce qui précède et donne naissance à la culture. Il définit les caractéristiques du jeu ainsi : « 1. Le jeu est libre, le jeu est la liberté ; 2. Le jeu est distinct de la vie “or-dinaire”, à la fois dans sa localisation et sa durée ; 3. Le jeu crée de l’ordre, est l’ordre. Le jeu demande l’ordre absolu et suprême ; 4. Le jeu n’est lié à aucun intérêt matériel et nul profit ne peut en être tiré. » Cette perspective nous donne une lecture supplémentaire des systèmes comme YTMND et d’autres œuvres d’art interactives en réseau. Plus une œuvre d’art dépend de la participation du public, plus elle doit attirer et engager ce dernier. Les œuvres d’art interactives peuvent être assimilées à des jeux - des jeux qui produisent une forme d’art. Leur nature interactive conditionne leur forme et leur contenu.

Dans un entretien avec TECHNE, l’artiste Internet Mark Napier explique comment la nature interactive du réseau a influencé la structure même de ses œuvres : « Lorsque je commençais à m’impliquer dans la technologie … je crois que la nature du web est tellement public, que ma façon de penser l’art se mo-difiait, même avant que je puisse m’en rendre compte. Je commençais à voir l’art comme quelque chose de beaucoup plus publique – ce qui ne veut pas dire ‘faire quelque chose qui plait au plus grand nombre’, mais plutôt, ‘faire quelque chose de plus accessible, qui engage plus de monde’. Et je crois que l’interactivité requiert presque que l’on engage les gens, parce que si vous ne le faites pas, ils ne sauront peut-être même pas que quelque chose est interactif. Alors, lorsque vous voulez faire une pièce interactive, vous voulez que les gens jouent. Cela demande une nouvelle forme de dialogue avec le public, sinon vous risquez de les perdre et la pièce ne sera plus interactive. » (Traduit de l’anglais)47

46. Homo Ludens - Essai sur la fonction sociale du jeu, 1938, Johan Huizinga47. « When I got involved in technology, I think the nature of the web is so public, that my thinking about art shifted, even before I realized it. I started looking at art as a much more public piece, which doesn’t mean making it pleasing for a lot of people, but it means making something that’s

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La longévité d’une œuvre d’art interactive ou d’une communauté virtuelle (qui sont tous les deux des formes de systèmes) dépend donc en partie de sa capacité à retenir l’intérêt de ses « créateurs-composants ». Pour durer dans le temps, le système doit rester toujours « d’actualité » ou doit être capable de se renouveler. Pour augmenter la qualité des productions d’une communauté virtuelle, l’infrastructure du site web qui héberge la communauté joue un rôle es-sentiel. Par exemple, les systèmes de votes et de classifications qui font remonter les meilleurs YTMNDs dans les recherches ou qui les exposent sur la page d’accueil du site font du renforcement positif et montrent aux nouveaux utilisateurs l’exemple à suivre.

Les interactions : le mème

La présence de forums dans une communauté virtuelle aide à créer des liens « forts » entre membres car ils deviennent des espaces publics où les internautes tissent des liens et construisent leurs identités et réputations.

Le processus du mèmeUn des processus constitutifs de la communauté virtuelle YTMND est celui qui donne naissance à des « mèmes ». La communauté YTMND est née d’un mème et elle a gagné sa place dans l’histoire de l’Internet par le nombre de mèmes qu’elle a produit depuis sa création. Dans l’étude de l’objet YTMND nous avons vu que celui-ci peut être le support d’une idée qui est transmise d’internaute en internaute au sein de la communauté. Ce processus de transmission et d’appropriation est essentiel à la création collective en réseau.

(47) more accesible, that’s more engaging for more people. And I think the element of interactivity almost requires that you engage people, because if you don’t, they might not even be aware that something is interactive. So when you make an interactive piece, you want people to play, and that requires a different kind of dialogue with your audience, otherwise you lose them and it’s no longer an interactive piece. » -- Video interview with artist Mark Napier as part of the TECHNE program at the University of Colorado. Interview by Kristine Feeks. http://archive.org/details/TECHNEAr-tistInterviewMarkNapier

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

Le concept de mème, inventé par le scientifique Richard Dawkins en 1976,48 est celui d’un « objet » social (une idée, une phrase, une image, une pratique) qui sera le support de multiples significations et symboles culturels. On peut voir le concept du mème comme une version simplifiée du concept de « signe » dans la sémiotique.49 L’intérêt du mème est de traiter le signe comme un organisme vivant dont le but est la survie par la reproduction. Le comportement des mêmes ressemblera à celui des gènes : ils se propagent par imitation, mutent, et même se reproduisent, se servant des êtres humains comme « hôtes ». L’évolution du mème ressemble à la sélection naturelle Darwinienne. Un objet peut être initialement produit par une personne, mais les valeurs qu’il possède, son sens et son identité, seront fabriqués par une collectivité éparpillée et changeante.

Les caractéristiques du mème• Unmèmen’estpasunesimplereprésentationdequelquechosemaisc’est la chose elle-même devenue idée qui se propage tel un virus à travers les esprits, s’adaptant à des environnements changeants, se renouvelant et se variant à chaque nouvelle rencontre. Lorsque un mème est transmis d’une personne à une autre, son information n’est pas « copiée », mais « tra-duite ».• Lemèmeesttoujoursendevenir,quelquepartentrecequ’ilétaitet ce qu’il sera. Il se déploie de l’intérieur. Son évolution n’est pas décidée d’avance par un concept transcendant, mais dans le présent, par les rencon-tres imprévisibles entre lui et son environnement, par imitation et remixage. Sa trajectoire dans le temps est donc imprévisible.• L’identitédumèmerésidedanssonétatprésent.Onpeutdiffici-lement parler d’« original » lorsqu’il s’agit de mèmes. On peut être tenté de lier l’identité du mème à son début, à une manifestation « originelle », à la première image de la série. Mais l’identité se trouve réellement dans son principe actif qui le fait évoluer dans le présent.

48. The Selfish Gene, Richard Dawkins, 1976; second edition 198949. Selon les théories sémiologiques basées sur les idées de F. de Saussure (Cours de linguistique gé-nérale, 1913), le signe est composé de signifiant (la partie sensible qui « contient » le signe) et signifié (le « contenu » ou la représentation mentale véhiculé par le signifiant).

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50. Définition du Wikipedia : Mème Internet : http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A8me_internet

Sur Internet, le concept de mème est particulièrement apprécié car la rapidité avec laquelle les internautes communiquent entre eux permet de constater la naissance et l’évolution de mèmes en temps réel. Il existe de nombreuses communautés dédiées à la création, la propagation et la do-cumentation de mèmes. YTMND était une des premières et plus grandes machines à mèmes qui s’appropriait, remâchait, remixait et recrachait les images et sons provenant de l’actualité et de la culture populaire. Même si au départ le principe d’un mème n’est pas explicite, les internautes arrivent à le saisir et à l’employer dans la création. Dans un mème Internet, il y a toujours une partie fixe et une partie variable. C’est la partie fixe qui

Définition

« Dans sa forme la plus basique, un mème internet est une idée toute simple propagée à travers le web. Cette idée peut prendre la forme d’un hyperlien, d’une vidéo, d’un site internet, d’un hashtag (mot clé, « tag » précédé par le symbole dièse #), ou même simplement une phrase ou un mot. Ce mème peut être propagé à l ’aide de plusieurs personnes par le biais de réseaux sociaux, de blogs, de messageries instantanées, d’actualités et autres services internet.Un mème internet peut rester le même ou changer au fur et à mesure du temps, par chance ou à l ’aide d’un commentaire, d’imitations ou d’une parodie. Les mèmes internet peuvent évoluer et très vite se répandre sur internet, souvent atteignant une popularité mondiale et disparaissant quelques jours après avoir été publiés. Ils sont répandus organiquement, volontairement, et par pair-à-pair, plutôt de manières prédéterminées et automatiques. »50

(Fig 18, 19)

Le mème Internet

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

Fig 18. « La Joconde » : Un mème du monde de l’art

Fig 19. « Advice animals » : Un mème sur Internet

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reste inchangée lors de la mutation. Elle nous permet d’identifier le mème ou de classifier plusieurs variations comme appartenant au même mème. Une bifurcation du mème se produit lorsque les parties fixes ou variables changent ou s’inversent. On dira alors que ces mèmes appartiennent à la même « famille ». C’est également possible d’avoir ce qu’on appelle des « sous-espèces » de mème. Par exemple, un mème qui est né dans le site YTMND.com est une sous-espece, appartenant au mème « parent » YTMND. Un bon exemple est la phrase « I believe you forgot Poland » de George Bush qui a inspiré la création de centaines de YTMNDs, et qui s’est propagé dans le reste de l’Internet. (Exemples : http://forgotpoland.ytmnd.com/ créé par Stevesbored et http://forgotpol.ytmnd.com/ créé par zachbg).Les mèmes Internet peuvent exister uniquement sur le réseau ou bien ils peuvent infiltrer la « vraie vie » à travers des actions. Il existe, par exemple, de nombreux concepts ludiques et artistiques qui se propagent à travers le net, donnant lieu à des réalisations dans la vie « réelle ». Ces réalisations reviennent sur le net sous forme de photographies qui vont être partagées sur de nombreux sites et qui vont inspirer de nouvelles réalisations... et le cycle continuera, faisant évoluer le mème. (Fig 20.)

Le modèle économique de YTMND

YTMND est une communauté fondée par un individu, à but non lucratif, car il génère juste assez de revenus pour assurer sa propre existence. Comme de nombreux sites Internet, YTMND.com vit essentiellement grâce à la publicité et la vente de produits dérivés (T-shirts, badges, etc.) dans la bouti-que du site. Le nombre de visites extérieures, le nombre de membres et donc de productions qui amènent des visites, participent directement à la survie de la communauté. YTMND se finance également grâce à un système qui permet aux membres de « sponsoriser » leurs YTMNDs préférés : ils peuvent faire une donation pour que ces derniers restent un certain temps sur la page d’accueil de YTMND.com.

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YTMND : étude d’un objet numérique et d’une communauté virtuelle

Bilan

Comme de nombreux systèmes de création en réseau, YTMND est un ensemble complexe d’objets numériques et de processus dynamiques au sein d’une communauté virtuelle qui évolue dans le temps. Les YTMNDs ont différentes relations et fonctions au sein de ce système vivant – ce qui leur donnent différentes valeurs pour la communauté qui les fabriquent. Dans la prochaine partie, nous verrons comment la communauté conserve ses productions, comment communauté et objets évoluent dans le temps, et les dangers qui les menacent.

Fig 20. La propagation d’un mème. L’exemple du mème « Planking » http://www.planking.me/

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La valeur des YTMNDs, les dangers et les solutions de pérennisation

Les valeurs de l’objet YTMND 57La valeur identitaire 58La valeur artistique 61La valeur historique 63

Les dangers : obsolescence, problèmes légaux et disparition 65Les dangers qui guettent l’objet numérique 65Les dangers qui guettent la communauté virtuelle 67

Différents procédés de pérennisation : archivage, préservation, sauvegarde, et restauration 72

L’archivage numérique 74La préservation numérique 78La sauvegarde du patrimoine immatériel 60La restauration en réseau ? 84

2

Image : logo de ytmnd.com

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51. http://www.unesco.org/new/fr/communication-and-information/access-to-knowledge/preserva-tion-of-documentary-heritage/digital-heritage/concept-of-digital-heritage/

La valeur des YTMNDs, les dangers et les solutions de pérennisation

« En utilisant des ordinateurs et des outils connexes, les hommes créent et partagent des ressources numériques - informations, expressions créatrices, idées et connaissances codées pour le traitement informatique - auxquelles ils attachent de la valeur et qu’ils veulent partager avec d’autres dans le temps autant que dans l ’espace. Cela prouve qu’il existe un patrimoine numérique. C’est un patrimoine constitué de nombreuses parties qui partagent de nombreuses caractéristiques communes et qui est exposé à de nombreuses menaces communes. » - L’UNESCO à propos du « patrimoine numérique51

Dans cette partie, nous tenterons de relever les différentes valeurs que l’on prête aux objets numériques de type YTMND. Quelle est l’importance de ces objets pour la communauté YTMND ? Comment la communauté ap-préhende-elle la conservation de ses productions ? Nous aborderons ensuite les menaces les plus courantes qui guettent les communautés virtuelles et les objets numériques en réseau. Finalement, nous explorerons différents concepts et méthodes qui sont déjà ou qui peuvent être utilisés pour docu-menter, préserver et sauvegarder le patrimoine numérique. Les valeurs de l’objet YTMND

Qu’est-ce qui constitue le cœur ou « l’essence » de YTMND ? Le YTMND originel (yourethemannowdog.com), ou le principe « picture sound text » ? Le dispositif (site web + communauté) qui génère des YTMNDs, ou les YTMNDs individuels qui sont produits par ce dispositif ? Il me semble qu’il n’y ait pas de réponse unique car tout dépend de l’échelle à laquelle nous choisissons d’examiner cette chose. La question de l’échelle d’obser-

YTMND : la valeur du patrimoine, les dangers et les solutions de pérennisation

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vation est importante, surtout lorsqu’un bien culturel est reconnu par une institution (ce qui n’est peut-être pas encore le cas pour YTMND mais qui pourra le devenir dans le futur).Nous avons vu précédemment que, selon l’échelle à laquelle on considère les YTMNDs, on leur prêtera des valeurs différentes. Par exemple, si dans un projet hypothétique de conservation, je considère un YTMND en tant qu’objet individuel, je valoriserai probablement plus sa dimension artistique et esthétique et je pourrai choisir de le conserver séparément de son contexte en réseau. Si, au contraire, je considère qu’un YTMND n’a de sens qu’au sein d’un ensemble dynamique de YTMNDs, en lien avec une communauté virtuelle, alors je valoriserai plutôt sa dimension sociale et fonctionnelle et je veillerai à ce que le système vivant puisse continuer à exister.

La valeur identitaire du YTMND

Toute communauté en réseau tient à conserver le contenu qu’elle produit car c’est à travers lui que les membres de la communauté s’identifient et transmettent leurs pratiques culturelles. Même les communautés virtuelles comme 4chan.org – dont une des caractéristiques principales est la rapidité et le caractère éphémère des interactions entre utilisateurs – ont des systèmes de sélection et de sauvegarde pour leurs productions. Sur 4chan.org, les fils de discussion et de partage d’images durent en moyenne quelques minutes. Mais si suffisamment d’utilisateurs estiment qu’un fil possède de la valeur, ils peuvent voter de le conserver dans leur archive : http://4chanarchive.org/. Dans ce cas, l’archivage des objets produits par la communauté (les fils de discussion) est un processus collectif et sélectif.

Certains YTMNDs semblent posséder une valeur identitaire pour les membres de la communauté qui les produisent. Nous pouvons constater cette valeur lorsque des vols ont lieu. La communauté prend conscience alors du fait que ses pratiques et objets lui appartiennent et font partie de son identité. Parce que ces objets sont partagés librement avec le reste de l’Internet et même dupliqués, diffusés et remixés par d’autres communautés, nous pouvons être tentés de croire qu’ils n’ont pas grande valeur pour la

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communauté ou l’individu qui les créent, ou que la notion « d’appartenance » n’existe pas. La réalité est que l’idée de la propriété et du vol existe bel et bien mais, comme pour d’autres concepts, l’Internet a transformée sa défi-nition. Sur Internet, on peut copier la majorité des objets numériques que l’on rencontre sans permission, on peut les partager sans limites et même se les approprier en les remixant mais on ne peut pas s’attribuer le mérite de les avoir créés sans provoquer la colère de leurs créateurs originels. On ne vole donc pas l’objet, mais en se l’attribuant on vole une partie de son identité qui est liée à la communauté qui l’a créé et à laquelle il appartient.

Un exemple est le YTMND « Lindsay Lohan Never Changes Facial Expressions ». Lorsque ce YTMND est transformé en GIF52 et exposé dans une autre communauté, eBaumsworld.com, avec le filigrane de cette dernière, une véritable guerre éclate entre les deux communautés.53 Le sentiment de la communauté YTMND est bien illustré dans cet YTMND intitulé « eBaum visits YTMND art gallery », par Tarantulas : http://ebaumartgallery.ytmnd.com/.54 Ici eBaum’s World est représentée comme un voleur dans un musée. Les YTMNDs sont des tableaux accrochés sur le mur. Au lieu de voler les tableaux, eBaum est en train d’accrocher ses propres cartels sous les tableaux. (Fig 21.)

Si la majorité du temps les communautés virtuelles encouragent le partage de leurs objets, parfois le contexte dans lequel le partage a lieu provoque des conflits du même type que celui qui s’est produit avec eBaum’s World. Lorsqu’une autre communauté aux valeurs trop différentes s’empare des objets, cette appropriation peut être ressentie comme un vol et un viol de l’identité et de l’authenticité de l’objet – presque comme si on employait un objet sacré à des fins profanes. Ainsi, lorsqu’en 2010 la communauté de

52. GIF est un format d’image numérique qui permet de lier plusieurs images afin de créer une animation.53. Les « guerres » entre communautés sont le plus souvent faites par le biais d’attaques par « dénie de service » (ddos), « spamming », et « trolling ».54. Ce YTMND a repris un YTMND plus ancien qui a représenté YTMND comme un musée d’art contemporain. L’auteur : Davedevil16, URL : http://artgallery.ytmnd.com/

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Fig 21.

Fig 22. Extrait d’une affiche déclarant la guerre à Tumblr. Ce type d’affiche est souvent utilisé pour organiser des manifestations et actions collectives.

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55. Tumblr.com est une plateforme qui permet de créer de blogs « à thème ». Il est également devenu une communauté soudée. 56. Exposition YTMND, And/Or : http://www.andorgallery.com/shows/22.html

4chan.org « déclare la guerre » à Tumblr.com,55 on entendait souvent les revendications suivantes : « Ces “hipsters” volent constamment les mèmes de 4chan.org et se les at-tribuent ». (Fig 22) « Tumblr est fait de jeunes filles de 16 ans qui viennent de découvrir l’Internet ». Autrement dit, les membres de Tumblr n’ont pas la même identité, le même profil social, les mêmes intérêts et culture que ceux qui fréquentent 4chan et les communautés similaires, et ils essayent de s’approprier les mèmes de 4chan sans comprendre leur signification et utilisation. Ces réactions nous confirment le fait que le type de création qui a lieu dans ces communautés est collectif mais pas réellement populaire car il manifeste une forte volonté de rester dans la marge. Si le patrimoine culturel d’une communauté sert à rassembler ses membres et à renforcer son identité, il sert également à exclure ceux qui n’en font pas partie. Le temps donc qu’un mème atteigne Facebook, puis la « vie réelle », il est souvent déjà considéré comme « mort » par les communautés qui l’ont fabriqué. C’est peut-être pour ces raisons, entre autres, que YTMND se protègent autant du monde de l’art…

La valeur artistique du YTMND

« C’est amusant que YTMND ne veuille rien avoir à voir avec l ’Art, mais il ne peut pas vraiment être défini comme autre chose que de l ’art. » - Guthrie Lonergan56

Le YTMND, comme de nombreux sites, objets et systèmes en réseau, se situent aux limites du monde de l’art. Il est clair que certains YTMNDs ont une valeur artistique reconnue par quelques artistes du net et des galeries d’art qui s’intéressent à la création en réseau :

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57. Rene Abynthe, Artist Profile, 2011, Rhizome.org : http://rhizome.org/editorial/2011/dec/8/artist-profile-rene-abythe/ 58. Ceci Moss, Dogs in Space, 2009, Rhizome.org : http://rhizome.org/editorial/2009/apr/6/dogs-in-space/ 59. Le playlist : http://www.andorgallery.com/shows/ytmnd_playlist.html

YTMND est souvent mentionné sur le site web de Rhizome – une insti-tution « dédiée à la création, l’exposition, la préservation et la critique de pratiques artistiques émergeantes qui engage la technologie. » (Traduit de l’anglais)

• L’artisteReneAbythe,dansunentretienavecRhizome,parledeson utilisation de YTMND.com en tant que son « exutoire et sa motivation principale de création ».57

• RhizomefaitencoreréférenceàYTMNDdansl’article«DogsinSpace ».58

• EnMars2009,YTMNDaétéexposédanslagalerieAnd/Or.56

Un certain nombre de YTMNDs ont été sélectionnés par Paul Slocum et l’artiste Luthrie Gonagan et exposés sur des écrans au sein de la galerie. Une « playlist » de ces YTMNDs a été créée et mise à disposition sur le site Internet de la galerie.59 Il est intéressant de noter que, étant donné que YTMND n’est pas clairement revendiqué comme étant de l’art et que la communauté et son fondateur, Max Goldberg, préfère éviter toute défini-tion, la galerie And/Or s’est librement appropriée la plateforme YTMND et son contenu pour l’exposition. Cette appropriation ne semble avoir gêné personne – les YTMNDs exposés étant, bien sûr, attribués à leurs auteurs. Toutefois, connaissant la volonté qu’ont les communautés comme YTMND de rester dans l’ombre, il nous semble qu’une appropriation plus large de YTMND par le monde de l’art, sera probablement rejetée par la commu-nauté et / ou aura des résultats néfastes – allant jusqu’à l’exode d’un grand nombre de membres de YTMND vers des terrains de création vierges.

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60. http://wiki.ytmnd.com/YTMND_Easter_Eggs#Wayback_Machine61. http://www.archive.org/web/web.php

La valeur historique

Les YTMNDs peuvent posséder une valeur historique car ils témoignent d’une certaine époque technologique de l’Internet et des pratiques sociales et techniques de création qui lui sont associées. Un objet YTMND peut également être créé à des fins documentaires, afin de conserver et de com-mémorer des évènements qui ont une signification pour la communauté, telles les batailles en justice ou les actions collectives organisées par elle (comme l’invasion de Habbo Hotel et les conflits avec la Scientologie).

En parcourant les YTMNDs j’ai croisée deux sites YTMND intéressants, qui ont étés créés par un utilisateur de YTMND.com, Locke5, après avoir consulté le « Wayback Machine » : http://haylookacontest.ytmnd.com/ et http://max2004.ytmnd.com/ (Description : « Vote 5 for nostalgia. (al-though its not really nostalgia for me since I never heard of this site untill 2006) »

Dans ces sites, Locke5 montre une capture d’écran du YTMND.com en 2004, qu’il commente avec du son. Dans le Wiki de YTMND on appelle ce type de YTMND, un YTMND « nostalgique ». Il peut montrer des anciens évènements du site YTMND.com ou bien des anciennes versions de YTMNDs existants. Le wiki nous envoie également vers le « Wayback Machine », pour que les utilisateurs puissent consulter l’histoire du site, « puisque il change constamment ».60 Le Wayback Machine appartient à « The Internet Archive »61, un projet ambitieux qui tente d’archiver tous les sites accessibles sur Internet. Avec le Wayback Machine, il est possible de « remonter le temps » pour visionner un site Internet dans un moment donné de son histoire. Internet Archive utilise des logiciels « robots » pour récupérer régulièrement des données sur tous les sites web qui leur soit accessibles – ce qui leur permet de créer des « copies » statiques de ces sites. Avec le Wayback Machine, on peut donc voir des versions « figées » d’un site à différents moments de son histoire.

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L’archive peut donc être employée par une communauté pour conserver sa propre histoire. La sauvegarde de la mémoire historique de la communauté YTMND est donc un processus important fait de manière collective par la communauté. L’histoire et la culture de la communauté sont discutées dans des forums et documentées avec beaucoup de soin dans des Wikis – qui sont des encyclo-pédies éditées collectivement par des membres d’une communauté.

Bilan

« Nous vivons à une époque cruciale dans l ’évolution de nouvelles cultu-res que nous ne pouvons pas ignorer. Des populations et des économies fascinantes sont en train de se développer, avec des nouveaux registres de langages de nouveaux médiums d’expression artistique, de nouvelles traditions et mythologies et de nouvelles façons de voir et d’habiter le monde. » (Traduit de l ’Anglais)62

Les pratiques et valeurs des communautés comme YTMND sont suffi-samment définies et importantes pour ses membres que de plus en plus ces derniers sont prêts à les défendre – et même parfois à les imposer – sur Internet et sur la société « réelle ». De l’invasion d’Habbo Hotel en 2006, aux attaques contre le projet de loi SOPA en 201263, les communautés qui partagent des valeurs similaires à YTMND (comme 4chan, Somethin-gawful, encyclopediadramatica, etc.) influencent de manière croissante le futur de l’Internet et de la société plus largement.

62. « These are important times in the evolution of new cultures, which we cannot afford to ignore—they are developing fascinating populations and economies, along with new registers of language, new media of artistic expression, new traditions, heroes, and mythologies, and new ways of seeing and engaging with the world. » - The Digital Polis, Nicholas Carson Miller, http://sportlinguist.com/2011/01/12/guest-post-the-digital-polis-nicholas-carson-miller/ 63. SOPA (Stop Online Piracy Act) était une loi proposée à la Chambre des Représentants aux États Unis pour lutter contre le piratage et protéger les industries culturelles. Pour plus d’informations : http://www.laquadrature.net/fr/sopa

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Les dangers : obsolescence, problèmes légaux et dispa-rition

Les dangers qui guettent les objets numériques

Les YTMNDs sont sujets aux mêmes dangers qui guettent les matériaux numériques de manière générale. Les deux menaces les plus courantes sont :

• L’obsolescencematérielleetlaperted’accessibilité:Lorsque l’objet numérique est dépassé par son environnement technique, on ne peut plus accéder à son contenu. Les objets numériques qui circulent sur Internet sont plus ou moins complexes et peuvent nécessiter un envi-ronnement technique plus ou moins ordinaire. Une simple image en format JPEG a plus de chance de traverser le temps qu’un site web qui fait appel à un ensemble plus large de données techniques. Le contenu produit par la communauté YTMND est un objet numérique composite qui est plus complexe qu’une simple image ou vidéo. En tant que site web, un YTMND nécessite un nom de domaine et une adresse fixe où il peut être consulté. Il est donc entièrement dépendant de la plateforme qui l’héberge. Si cette dernière n’est pas régulièrement mise à jour, les YTMNDs ne seront un jour plus accessibles. La constitution d’un YTMND est tout de même relative-ment simple par rapport à d’autres sites web, il peut donc être facilement reconstitué à partir des médias d’origine (les images et les sons). La perte d’accessibilité peut également être causée par la « non-neutralité » de certains appareils informatiques. Cela arrive lorsque les appareils qui permettent d’accéder à l’Internet imposent des règles non-standardisées sur le contenu visionné. Ces appareils peuvent dicter si oui ou non un site Internet peut être visionné, et comment.

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Fig 23. Par exemple, de nombreux YTMNDs nécessitent une synchroni-sation entre un son et une image animée (le GIF). Dans un commentaire sur YTMND.com, Max Goldberg explique comment, au lieu d’utiliser les paramètres de temps définis par le créateur du GIF, l’iPad imposera ses propres paramètres. De plus, il ne laissera pas le son jouer automatique-ment. Cela détruit la synchronisation et donc « l’intégrité » de nombreux YTMNDs lorsqu’ils sont visionnés sur l’iPad.

• Lesproblèmeslégaux,souventliésauxdroitsd’auteurs:Le contenu numérique « remixé » est particulièrement sujet à des pro-blématiques liées aux droits d’auteur. Par exemple, en 2005, l’église de la Scientologie menace d’attaquer YTMND.com en justice pour atteinte aux droits d’auteur si une série de YTMNDs parodiant la scientologie n’est pas supprimée.Encore en 2007, l’entreprise de jeux vidéo Sega menace YTMND.com avec d’un procès si ce dernier ne supprime pas une série de YTMNDs parodi-ques, mettant en scène le personnage animé « Sonic ». Les deux incidents sont sans suite pour YTMND mais d’autres types de créations en réseau n’ont pas autant de chance.

Lorsque une communauté héberge ses créations dans le serveur d’un site externe et commercial, comme YouTube, un grand nombre d’objets dispa-raissent régulièrement. Cela est souvent le cas avec les « YouTube Poop Vi-déos », par exemple. Même les objets qui ont un statut artistique bien défini ne sont pas hors de danger. Ainsi YouTube a récemment supprimé une vidéo de l’artiste Petra Cortright pour infraction à la réglementation du site.64

64. Petra Cortright est un artiste Internet connue pour son utilisation de réseaux sociaux, notamment YouTube, en tant que médium. La vidéo supprimé par YouTube est conservé par Rhizome et accessible sur leur site web : http://rhizome.org/artbase/artwork/53474/

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Les dangers qui guettent la communauté virtuelle Nous avons vu que c’est avant tout la communauté virtuelle qui conserve son propre patrimoine. La survie des objets numériques dépend souvent de la survie de la communauté qui les a produits. Quelles sont les menaces les plus courantes qui guettent les communautés en réseau ?

Une communauté virtuelle peut se dégrader lentement, par entropie, pour plusieurs raisons :

• Changementsdansl’environnement:Si un système n’évolue plus assez vite, il peut être dépassé par son environ-nement social et/ou technique. L’apparition de nouvelles plateformes de création et de nouvelles communautés peut provoquer une lente disparition de communautés plus anciennes, ou une migration d’anciennes formes de création vers de nouvelles. C’est ce qui semble se produire actuellement avec

Fig 23. Max Goldberg parle des mises à jours de YTMND.com par rapport à l’HTML 5 et les problèmes de compatibilité avec l’iPad.

YTMND : la valeur du patrimoine, les dangers et les solutions de pérennisation

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YTMND.com. YTMND est créé avant YouTube et dans la même année que Facebook. Il y avait alors moins de plateformes en concurrence avec lui pour les ressources de l’environnement (notamment, les internautes). Aujourd’hui YouTube est un dispositif utilisé pour exposer des créations similaires à YTMND et les internautes communiquent via Facebook ou d’autres réseaux sociaux.

• Changementsinternes:Si l’équilibre interne du système n’est pas maintenu, celui-ci perd petit à petit ses membres, et par la même l’énergie qui l’alimente. Les disputes en-tre membres (les « flame wars »), un trop grand nombre de membres nocifs, des modifications apportés à l’infrastructure du site, peuvent provoquer un exode des membres de la communauté. Lorsque le système perd trop de membres actifs, il risque la disparition complète. (Fig 24.) Le système vivant peut également subir des catastrophes qui mènent à sa disparition soudaine :

• Lecréateurdel’infrastructuredusystème,lesiteweb,peutsup-primer ce dernier pour une raison quelconque (manque de financements, raisons personnelles, etc.). YTMND.com a failli subir ce sort au tout début de son existence, en 2004. La disparition de YTMND.com a été évitée par l’intervention de l’entreprise d’hébergement Reflected.net (qui était « fan » de YTMNDs), qui a proposé à Max Goldberg d’héberger gratuitement son site, jusqu’à ce que ce dernier puisse avoir suffisamment d’utilisateurs pour s’autofinancer à travers les publicités.

• Lesitepeutêtresuppriméparlegouvernementpourdesraisonslégales (activités illégales, problèmes de droit d’auteur, etc.).

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La communauté virtuelle face à la disparition

Qu’arrive-il lorsque la communauté subit une catastrophe ? Lors de ces recherches, il s’est produit deux évènements majeurs où des sites importants ont disparu de manière inattendue. Ces incidents m’ont permis de constater la vitesse avec laquelle un système vivant peut disparaître et les conséquen-ces de cette disparition. Tant qu’une communauté en réseau continue à exis-ter sans menace de disparition, ses membres n’ont que rarement conscience de la valeur de leurs pratiques et productions. Ces catastrophes semblent provoquer une prise de conscience de cette valeur et amènent à la création de projets d’archivage et / ou de sauvegarde.

1) La disparition de Geocities :Cet événement récent nous a montré la fragilité des plateformes où le contenu est généré par l’utilisateur, mais où l’infrastructure et les données des utilisateurs sont dans les mains d’un individu ou entreprise. En 2009, Yahoo décide de supprimer sa plateforme Geocities. Créé en 1994 par David Bohnett et John Rezner et acheté par l’entreprise Yahoo en 1999, Geocities était un des premiers et un des plus grands services gratuits d’hébergement et de création de sites web. Il est devenu un lieu

YTMND : la valeur du patrimoine, les dangers et les solutions de pérennisation

Fig 24. Une table de « Google Trends », montrant l’intérêt décroissant des inter-nautes pour YTMND dans les moteurs de recherche.

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65. La page d’accueil de Geocities, annonçant sa fermeture: http://geocities.yahoo.com/index.php66. Internet Atrocity ! GeoCities’ Demise Erases Web history, Dan Fletcher, 2009 : http://www.time.com/time/business/article/0,8599,1936645,00.html .

foisonnant de créativité où les premiers internautes expérimentaient un nouvel environnement. Deux jours après que Yahoo annonce la fermeture de la plateforme, des milliers de sites individuels sont mis hors-ligne, sans la possibilité de récupérer les données.65

Cet événement provoque un sentiment de colère dans l’Internet, certains allant jusqu’à comparer les actions de Yahoo à celles des Talibans qui ont détruit les Bouddhas de Bamiyan.66 En même temps, de nouveaux projets d’archivage se créent pour récupérer les données de quelques milliards de sites. Des artistes créent des expositions virtuelles reprenant des éléments de Geocities, comme http://www.textfiles.com/underconstruction/, une expo-sition par Jason Scott, « historien du net » et fondateur du projet d’archivage « archiveteam.org ». Il s’agit d’exposer un des objets de ce qu’il considère comme « art populaire » et qui risquent se perdre avec Geocities. La suppression de Geocities crée une prise de conscience de la valeur et de la fragilité des biens culturels de l’Internet et des responsabilités qu’ont les propriétaires de plateformes envers les utilisateurs qui génèrent du contenu, et envers l’humanité. Jason Scott résume ces sentiments dans un entretien avec Time : « Lorsque des entreprises contrôlent vos données, ils n’ont pas seulement une responsabilité envers vous, mais envers toute l’humanité. Actuellement nous produisons du contenu à une vitesse incroyable. A long terme, la décision de ce qu’il faut conserver et ce qu’il faut jeter ne doit pas être prise dans les salles de conseil des entreprises. »66 La question de « qui doit prendre ces décisions » se pose. Une solution pro-posée par Jason Scott est d’obliger les plateformes qui ferment à envoyer les données à une entreprise tierce, qui les gardera pendant un certain temps. Les utilisateurs de la plateforme disparue pourront récupérer leurs données personnelles s’ils le souhaitent, pour un prix minimal.

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2) L’exemple de Encylopediadramatica.com :

Les plateformes amateurs peuvent être aussi fragiles, si ce n’est pas plus, que celles qui sont gérées par des entreprises. En Avril 2011, j’ai assisté en direct à la destruction d’une des plateformes que je consultais dans mes recherches : encyclopediadramatica.com. Conçue initialement comme une parodie de Wikipedia, Encyclopedia Dramatica (ED) est devenue une ressource importante sur la sous-culture du réseau, ainsi que sur dif-férentes activités et projets de la communauté d’Anonymous. Le style de l’encyclopédie est satirique, cru, et politiquement incorrect — à l’image de ce qu’elle documente. Comme avec Wikipedia, le contenu de Encyclopedia Dramatica est créé par de nombreux internautes. Le 16-04-11, la fondatrice du wiki, Sherrod Degrippo, supprime tout le contenu du site encyclopediadramatica.com et redirige le nom de domaine vers un autre site, appelé ohinternet.com. Elle remplace l’ancien wiki avec une version appauvrie et censurée d’ED. Ce choix s’est effectué pour des raisons personnelles et financières, le contenu cru de ED décourageant l’investissement des sociétés de publicité. Face à la colère des nombreux internautes qui ont créés des milliers d’articles du wiki, Sherrod défend le fait que le projet lui appartient entièrement. Quelques jours après la disparition d’ED, un miroir du site apparaît avec le nom de domaine en-cyclopediadramatica.ch. N’ayant pas d’accès à l’encyclopédie supprimée, quelques internautes ont restauré le site à partir d’une archive (peut-être tirée de l’Internet Archive). Débute alors un grand projet de restauration de centaines de photos manquantes et de liens cassés (les robots qui archivent ne peuvent pas toujours accéder à toutes les parties d’un site). Aujourd’hui, malgré les attaques en justice de la part de Sherrod Degrippo, la version 2.0 d’ED, utilisant le nom de domaine « encyclopediadramatica.se », est actuellement en ligne, de nouveaux articles sont régulièrement ajoutés au wiki, et la majorité de ses lecteurs ont suivi la migration. Même s’il existe une hiérarchie dans les fonctions des membres de la communauté, il n’y a pas une entité spécifique qui contrôle un système vivant – pas même son fondateur ou son propriétaire. Si celui-ci nuit à la survie du système, le système peut très bien l’éjecter et se réadapter.

YTMND : la valeur du patrimoine, les dangers et les solutions de pérennisation

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Différents procédés de pérennisation : archivage, préser-vation, sauvegarde, et restauration en réseau

Dans la partie précédente, nous avons vu les différents dangers qui guettent les communautés en réseau et comment ces communautés réagissent à ces dangers. Parfois des catastrophes détruisent le système vivant, et parfois ils servent à le renforcer et amènent à une prise de conscience de la valeur de ses pratiques de création et de ses objets. Nous avons également vu des exemples de sauvegarde de communautés en réseau et les différentes utilisations de l’archive. Dans cette partie, nous analyserons les concepts d’« archivage », de « préservation », de « sauvegarde » et de « restauration » dans le contexte du numérique et de l’Internet. Nous verrons ensuite quelles démarches pourront s’appliquer le mieux à YTMND.

Lorsqu’ils sont utilisés dans le domaine du numérique, les termes que nous emploierons se référent le plus souvent aux processus qui sont appliqués aux documents numériques. Ils se distinguent les uns des autres principalement par leurs buts.Voici les définitions couramment employées dans le domaine de la gestion documentaire. :

• Lestockage:Lestockages’apparenteauxactions,outilsetmétho-des permettant d’entreposer des contenus électroniques et servant de base au traitement ultérieur des contenus.

• L’archivage:L’archivagedecontenusélectroniquesestl’ensembledes actions, outils et méthodes mis en œuvre pour réunir, identifier, sélec-tionner, classer et conserver des contenus électroniques, sur un support sé-curisé, dans le but de les exploiter et de les rendre accessibles dans le temps. Le contenu archivé est considéré comme figé et ne peut donc être modifié. La durée de l’archivage est fonction de la valeur du contenu et porte le plus souvent sur du moyen ou long terme.

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67. On parle de « destruction » car la conservation numérique peut impliquer le fait de sélectionner ce qui sera gardé et de détruire le reste, afin de libérer de l’espace sur un serveur / disque dur, etc.68. Ces définitions sont réunies dans le blog http://gestiondocumentaire.over-blog.com/69. Par exemple, une archive complète de YTMND, nous montrera une copie figée du site principal, des forums, des YTMNDs hébergés sur le serveur de YTMND.com.

• Laconservation:Laconservationestl’ensembledesmoyensmisenœuvre pour stocker, sécuriser, pérenniser, restituer, tracer, transférer, voire détruire67, les contenus électroniques archivés.

• Lasauvegarde:Lasauvegardeestl’ensembledesactions,outilsetméthodes destinés à dupliquer des contenus électroniques d’origine dans un but sécuritaire pour éviter leur perte en cas de dysfonctionnement du dispositif sur lequel ils sont enregistrés. Le contenu sauvegardé n’est pas considéré comme figé et peut donc être modifié ou remplacé. La durée de la sauvegarde est fonction de sa périodicité et porte le plus souvent sur du court terme.68

On peut donc dire que les YTMNDs individuels, en tant que « docu-ments numériques » hébergés sur le site YTMND.com, sont « stockés » par le site – car ils peuvent être supprimés et modifiés par leurs créateurs. YTMND.com, n’est donc techniquement pas une archive, mais plutôt une base de données. Une archive du site YTMND.com s’apparentera à une copie figée du site sur laquelle on ne pourra plus intervenir. Il est plus difficile de trouver un vocabulaire pour parler du système vivant (la communauté virtuelle) plus large. On peut utiliser le verbe « archiver » pour décrire le processus de création d’une copie « figée » du système à un moment donné69 et on peut parler de la « conservation » ou « préservation » d’une archive. Mais quel mot employer pour parler de l’action qui consiste à essayer de garder un système dynamique « en vie » ? Dans la définition ci-dessus, le terme « sauvegarde » décrit un processus où on enregistre des données de façon temporaire, sans pour autant les « figer ». Il s’avère que ce terme est également employé dans des documents de l’UNESCO, lorsqu’ils traitent du patrimoine « immatériel » ou « vivant ».

YTMND : la valeur du patrimoine, les dangers et les solutions de pérennisation

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70. Michaud, Yves. L’art à L’état Gazeux. Hachette Littérature, 2004

L’archivage numérique

« Archiver, c’est trier pour garder l ’essentiel qui fait sens et pourra à nou-veau faire sens quand on en aura besoin. »70

Qu’est-ce l’archivage numérique ?

Lorsque nous souhaitons conserver une trace historique d’une communauté virtuelle et des objets qu’elle produit, la première solution qui s’offre à nous sera de constituer une archive de son site web. L’archivage de sites web et d’artefacts numériques qui circulent en réseau est une pratique qui peut être utile à toutes les étapes d’un projet de sauvegarde du patrimoine culturel en réseau.

L’archivage sur Internet comprend généralement la collecte d’objets numé-riques (cela implique souvent la création de copies), le tri entre les objets qui vont être conservés ou pas et leur stockage et mise en relation au travers d’un système de gestion, telle une base de données. Un type d’archive qu’on rencontre souvent sur Internet est celui du site web : il s’apparent à une copie de tous les objets numériques qui composent un site à un moment donné, où les relations originelles entre objets seront gardées. L’archive pourra être plus ou moins dynamique selon le type de contenu qu’elle contienne et selon sa finalité. Elle peut conserver une seule copie d’un objet numérique à un moment donné ou bien elle peut conser-ver des « captures » régulières d’un objet lorsque celui-ci évolue dans le temps. Les plateformes dynamiques du web 2.0., par exemple, sont des systèmes qui évoluent rapidement avec les apports de leurs utilisateurs. Pour conserver une trace de l’évolution du système, l’archivage doit être faite régulièrement.

Lorsqu’un système évolue constamment, un moyen efficace pour conserver le mémoire de ses états passés est de faire de l’archivage un processus inhé-rent au système. Un artiste qui explore ce sujet est Gregory Chatonsky. Lors

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d’une discussion avec lui, il m’a parlé de sa pièce « Capture », où l’archivage est un processus intrinsèque de l’œuvre : « les artistes doivent de plus en plus jouer le rôle d’archiviste de leurs propres projets. Ce qui n’était pas le cas avant, mais les artistes doivent de plus en plus intégrer cette dimension. Donc l’hypothèse là, c’est plutôt de faire que l’archive fasse partie du projet à part entière, d’abord pour que ça soit plus rigolo à faire et que ce ne soit pas un simple listing. »

La finalité de l’archive

Nous avons vu que l’archive peut être employée par une communauté vir-tuelle afin de conserver une trace de sa propre histoire et les objets qu’elle a produite. Elle peut également être la trace figée d’une plateforme défunte (Geocities) et comme dans l’exemple de Encyclopedia Dramatica, elle peut même être utilisée pour la « restaurer ». L’archivage numérique n’est pas seulement fait dans le but de conserver des sites et documents numériques pour l’utilisation d’une communauté mais aussi pour les rendre accessibles aux artistes et historiens du futur. Une archive peut permettre aux créateurs du présent de réinterpréter et d’employer les artefacts du passé dans leurs créations contemporaines.Dans le livre « L’Art à l’Etat Gazeux », Yves Marchand déplore le faite que l’archive matérielle devienne souvent un grand dépôt d’objets où « tout se vaut ». A cause d’une indexation rigide qui n’évolue pas, l’archive « fait de la réappréciation ou de la relecture de pures fictions ». L’archive ne fait donc que « répéter les conditions du présent et de son obsolescence. »70 Contrairement à l’archive « matérielle », l’archive numérique peut plus faci-lement avoir une structure souple, permettant la réorganisation de ses don-nées ; de nombreux types d’indexations peuvent coexister, permettant à de nouvelles relations d’émerger. Le réseau d’Internet peut donner à l’archive numérique une grande visibilité et accessibilité, assurant que ses données

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Annexe 4 : Discussion avec Gregory Chatonsky

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ne resteront pas cachées dans une réserve, mais peuvent être consultées et employées dans la création actuelle.Un exemple intéressant de l’utilisation d’une archive et celui de l’archive « textfiles.org ». L’historien Jason Scott a collectionné et archivé des milliers « d’artefacts » de l’ancien Internet qui révèlent des pratiques collectives de création et des formes d’art spécifiques à l’environnement technologique de l’époque.71 Cette ressource intéressante mais difficilement abordable pour ceux qui n’ont pas connu cette ère de l’Internet a inspiré la création d’un « jeu d’archéologie »72 qui « émule »73 l’ancien Internet : non seulement la technologie de l’époque mais également l’élément humain. Le joueur peut donc avoir l’impression de naviguer dans différents systèmes vivants qui ont disparu. La majorité des fichiers, des conversations et des personnages qui forment le jeu proviennent de l’archive de Jason Scott.

Comment Archiver ?

L’archivage peut être effectué selon les méthodes suivantes :

• L’archivagepeutêtresystématique• L’archivagepeutêtresélectifou«curatoriel»On peut comparer la différence entre les deux méthodes en utilisant l’exem-ple de Geocities, cité précédemment. Le projet d’Archiveteam.org utilise l’archivage systématique pour copier les quelques centaines de milliers de sites web hébergés par la plateforme Geocities. On peut télécharger cette archive sur leur site : http://archiveteam.org.L’artiste Ryder Ripps utilise l’archivage curatoriel pour collectionner et ex-poser uniquement les sites Geocites qui ont pour lui une valeur esthétique. Ces deux démarches peuvent être complémentaires. On peut tout archiver au départ, puis ne sélectionner que certains objets pour une conservation à

71. L’archive est accessible sur le site textfiles.org72. Le jeu http://telehack.com/ a été créé par un programmateur anonyme73. « En informatique, l’émulation consiste à substituer un élément de matériel informatique – tel un terminal informatique, un ordinateur ou une console de jeux – par un logiciel. » - http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89mulation

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74. Le projet d’archivage numérique le plus connu est celui du « Library of Congress ».75. http://www.digitalpreservation.gov/personalarchiving/

long terme. Ou bien, on peut tout conserver pour des raisons historiques, et choisir d’exposer seulement une petite partie de l’archive. Si la création d’une archive d’un site web est légale, sa diffusion ne l’est pas toujours. Par exemple, l’Internet Archive est obligé de supprimer les archives d’un site sur demande du propriétaire de celui-ci. Si le propriétaire d’un site ne veut pas que des robots puissent relever les données de celui-ci, il peut créer un document les obligeant de le contourner. L’archivage numérique est pratiqué par de nombreuses grandes institu-tions – surtout par les bibliothèques nationales de divers pays74 qui ont éta-blis des protocoles de préservation, des outils et des normes internationales, en lien avec l’UNESCO. De plus en plus, ces institutions mettent leurs ressources et outils à disposition du public, afin d’encourager l’archivage à l’échelle personnelle.75 Elles demandent également aux internautes de leur adresser les données qu’ils auront amassées sur un certain sujet, afin qu’elles puissent constituer des collections nourries par le public. (Fig 25.)En ce qui concerne YTMND, nous pouvons l’ajouter à la liste de sites à archiver de Archiveteam.org. (J’ai contacté Jason Scott dans ce but.)

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Fig 25. Un projet collaborative de l’Internet Archive pour archiver de clips pro-venant de jeux vidéo. URL : http://archive.org/details/gamevideos

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La préservation numérique

Une archive numérique est une collection organisée d’objets numériques. En tant que telle, elle est sujette aux dangers de l’obsolescence et à la perte d’accessibilité aux données qui en résulte. Un projet d’archivage se doit donc de prendre en compte la conservation de l’archive et des données numériques qu’elle contient. Cela implique la mise à jour continuelle de l’environnement numérique de l’archive, la migration des données vers de nouveaux supports...

Comment « préserver » le patrimoine numérique ?

La « préservation numérique » est une approche de conservation définie par l’UNESCO (en partenariat avec de grandes bibliothèques comme le « Library of Congress ») qui vise le « patrimoine numérique », plus parti-culièrement le patrimoine numérique documentaire. Son but principal est d’assurer l’accessibilité aux matériaux numériques dans le temps.Les stratégies générales de préservation proposées par l’UNESCO sont les suivantes. Cette approche valorise l’intégrité et l’identité matérielle des documents numériques :

• travailleraveclesproducteurs(créateursetdiffuseurs)afind’ap-pliquer des normes qui prolongeront la vie effective des moyens d’accès disponibles et réduire la gamme des problèmes inconnus à gérer ;

• admettrequ’iln’estpasproductifd’essayerdetoutpréserveretsélectionner le matériau à préserver ; • mettrelematériauenlieusûr;

• contrôlerlematériau,enutilisantdesmétadonnéesstructuréesetune autre documentation, pour faciliter l’accès et soutenir tout processus de préservation ;

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76. Le concept de Préservation numérique de l’UNESCO : http://www.unesco.org/new/fr/com-munication-and-information/access-to-knowledge/preservation-of-documentary-heritage/digital-heritage/concept-of-digital-preservation/

• protégerl’intégritéetl’identitédesdonnées;

• choisirdesmoyensappropriésdefournitured’accèsencasdechan-gement technologique ;

• gérerlesprogrammesdepréservationpourqu’ilsatteignentleursobjectifs dans des conditions qui soient compétitives, opportunes, globales, dynamiques et responsables.76

Dans le cas de la communauté YTMND, nous pouvons archiver et docu-menter le site YTMND.com, afin de garder une trace de la plateforme et de ses productions. L’idéale sera de préserver cette archive pour la rendre accessible le jour où la plateforme YTMND disparaîtra. Si nous créons une archive du site YTMND.com, nous veillerons donc à ce que les données soient stockées dans un lieu sûr, que des « backups » soient faits, et que toutes les copies de l’archive soient identifiées. Si nous conservons une archive composée d’artéfacts numériques, nous veillerons à ce que ces objets soient identifiés et organisés et nous définirons leurs propriétés en employant un vocabulaire normalisé, tel que le Dublin Core. Toutes ces opérations faciliteront l’accès aux informations dans le futur ainsi que leur compréhension.

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77. http://www.unesco.org/culture/ich/index.php?lg=fr&pg=00002

La « sauvegarde » du patrimoine immatériel

Lorsque les objets numériques qui nous intéressent sont des composants dynamiques au sein d’une communauté virtuelle, est-il possible d’envisager un projet de « sauvegarde » qui prendra en compte leurs valeurs et fonctions sociales ? Peut-on considérer le « patrimoine numérique » non seulement du point de vue de l’objet numérique, mais également d’un point de vue qui englobera les pratiques « immatérielles » de la communauté virtuelle ?Un concept que nous pouvons explorer est celui du « sauvegarde du patri-moine vivant ou immatériel », élaboré par l’UNESCO.

Qu’est-ce que le « patrimoine immatériel » ?

Le patrimoine immatériel, selon la charte de l’UNESCO, se défini ainsi :

« Le patrimoine culturel immatériel, ou patrimoine vivant, comprend les pratiques et expressions, ainsi que les connaissances, savoir-faire et valeurs qui leur sont associés, que les communautés et les groupes reconnais-sent comme faisant partie de leur patrimoine culturel. »

« Ce patrimoine est transmis de génération en génération, essentiellement oralement. Il est recréé en permanence en réponse aux changements dans l’environnement social et culturel. Il procure aux individus, aux groupes et aux communautés un sentiment d’identité et de continuité et constitue un gage de développement durable. »77

Nous avons vu qu’une communauté virtuelle est un système social : un en-semble d’individus organisés en fonction d’un but. Avec YTMND, ce but est la production d’un certain type d’objets. La création et le partage de ces objets soude la communauté et renforce son identité.

Dans sa charte sur la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, l’UNESCO parle principalement de la transmission orale de ce patrimoine.

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Toutefois il est important de noter que l’immatérialité pure n’existe pas car l’information a toujours besoin d’un support « matériel » pour l’héberger. Dans le cas d’une tradition oral, ce véhicule est le cerveau, mais l’informa-tion peut également être transmise par des objets (objets de culte, costumes, objets artisanaux, etc.). Sur Internet, la communication est médiatisée par des dispositifs technologiques et par des « objets de communication » nu-mériques. Nous ne pouvons donc pas parler de transmission de pratiques immatérielles sans prendre en compte les objets qui les transmettent. Avec l’étude du mème, nous avons constaté la fonction communicationnelle de nombreux objets numériques qui circulent dans l’Internet : c’est à travers eux que les valeurs de la communauté sont transmises et leur création, par-tage, remixage, et sauvegarde, procurent aux membres des communautés qui les produisent, « un sentiment d’identité et de continuité ».

« Le patrimoine culturel immatériel ne peut être patrimoine que lorsqu’il est reconnu comme tel par les communautés, groupes et individus qui le créent, l ’entretiennent et le transmettent ; sans leur avis, personne ne peut décider à leur place si une expression ou pratique donnée fait partie de leur patri-moine. »77

Nous avons constaté que la communauté YTMND donne beaucoup d’im-portance au contenu qu’elle produit, à ses pratiques de création, et à sa propre histoire – ce qui nous laisse croire qu’elle considère ces pratiques et productions comme un patrimoine. Mais tant que cette communauté et / ou ses productions ne sont pas réellement menacés de disparition, la recon-naissance de leur patrimoine n’est pas encore clairement formulée.

Comment sauvegarder le patrimoine immatériel d’une communauté virtuelle ?

Serait-il possible d’appliquer à YTMND les méthodes prescrites par l’UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine vivant ? Quelles sont ces méthodes ?

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« […] l’un des moyens les plus efficaces de réaliser la sauvegarde durable du patrimoine culturel immatériel serait de veiller à ce que ceux qui l’in-carnent continuent de développer leurs connaissances et leurs savoir-faire et de les transmettre aux générations qui les suivent. »

« La Convention insiste davantage sur la transmission, ou communication, du patrimoine de génération en génération que sur la production de ma-nifestations concrètes telles que les danses, les chants, les instruments de musique ou l’artisanat. Dans une large mesure donc, toute mesure de sau-vegarde s’inscrit dans la perspective du renforcement et de la consolidation des conditions diverses et variées, matérielles et immatérielles, qui sont nécessaires à l’évolution et l’interprétation continues du patrimoine culturel immatériel, ainsi qu’à sa transmission aux générations à venir. »

« On entend par sauvegarde du patrimoine culturel immatériel : Les mesures visant à assurer la viabilité du patrimoine culturel im-matériel, y compris l’identification, la documentation, la recherche, la préservation, la protection, la promotion, la mise en valeur, la transmis-sion, essentiellement par l’éducation formelle et non formelle, ainsi que la revitalisation des différents aspects de ce patrimoine (article 2.3) »

Pour résumer, les méthodes de sauvegarde sont :1. Le renforcement des conditions de création et des pratiques qui sont déjà en place, afin d’assurer leur transmission de génération en géné-ration.2. La reconnaissance, l’étude, la documentation et la valorisation du patrimoine vivant. Comment « renforcer et consolider » les conditions qui assureront la trans-mission des pratiques de la communauté YTMND ? Le patrimoine de YTMND est le produit d’une collaboration entre de nom-breux internautes. Toutefois, cette communauté est un système de création centralisé qui, pour le moment, dépend de l’infrastructure d’un site web. En plus de sa valeur historique, on peut dire que le site YTMND.com joue un rôle important de consolidateur. Telle que la communauté est actuellement

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constituée, le rôle principal de sauvegarde revient principalement au pro-priétaire du site, Max Goldberg, et aux administrateurs qu’il a sélectionné pour gérer le site. Ils jouent le rôle de « gouvernement » pour la communauté et en tant que tel, doivent assurer la survie de la communauté à travers la préservation des objets produits par elle, par la documentation et la création d’évènements (ex: des concours de création) qui éveillent l’intérêt pour les YTMNDs et également par la valorisation de ses « créateurs de contenu » les plus engagés et productifs.

Pour survivre dans le temps, la communauté virtuelle a besoin de nouveaux membres pour remplacer ceux qui partent et pour lui apporter de l’éner-gie et de nouvelles ressources. Il est possible d’imaginer la création d’un projet de sauvegarde qui interviendra directement dans la communauté YTMND afin de trouver des nouvelles générations d’utilisateurs, de créer des YTMNDs de qualité et de diffuser et exposer les YTMNDs dans d’autres lieux de l’Internet. Un tel projet nécessitera pourtant beaucoup de précautions pour les raisons suivantes :• Tropdenouveauxmembrespourraprovoquerdesconflitsauseinde la communauté.• Desinterventionsextérieuresrisquentdeperturberl’équilibredela communauté et être perçues par elle comme une agression.Il serait peut-être plus juste de créer un projet qui participera de manière plus indirecte à la sauvegarde du patrimoine de communautés virtuelles. Nous pouvons imaginer, par exemple, la création d’un organisme qui suivrait l’évolution des plateformes et serait en mesure de proposer des solutions le jour où celles-ci seraient en danger de disparition, si une vo-lonté de sauvegarde existe. Par exemple, l’organisme pourra offrir un lieu d’hébergement pour des communautés qui auront perdu leur infrastructure et / ou qui ont besoin d’un espace excentré pour organiser leurs opérations. Il pourra également intervenir auprès de plateformes qui ferment afin de préserver les données de ses utilisateurs.

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La restauration en réseau ?

Pour le moment, les questions se rapportant à la restauration de YTMND restent hypothétiques mais nous pouvons déjà commencer à y réfléchir en nous basant sur les exemples dont nous disposons.

Peut-on restaurer un objet numérique ?Un objet numérique sans liens particuliers circulant sur Internet est un ar-téfact historique que l’on peut conserver, ou, dans certains cas, reconstituer, mais pas réellement restaurer, parce que l’objet numérique ne se dégrade pas ; il est basé sur des zéros et des uns : soit il existe, soit il n’existe pas ou plus. Un objet peut pourtant exister mais ne plus être accessible : il peut de-venir « obsolète » car il sera dépassé par son environnement technologique. Tout comme on ne vole pas l’objet mais plutôt son contexte qui influe sur son identité, on ne restaure pas l’objet mais plutôt le contexte qui le rend accessible. Nous pouvons « restaurer » cette accessibilité, soit en le plaçant dans son environnement « originel » (ou dans une simulation de cet envi-ronnement), soit en « migrant » ses données internes, son information, sur un nouveau support qui soit compatible avec l’environnement actuel. Cette approche est théorisée par Jon Ipolitto qui a défini ces différents procé-dures de stockage, migration, émulation, et recréation pour les « médias variables ».78

Peut-on restaurer une communauté virtuelle ?Si nous abordons l’objet numérique sous l’angle du patrimoine immatériel, nous considérerons que celui-ci n’a pas de valeur en lui-même mais que par ce qu’il doit transmettre au sein d’une communauté. Dans ce cas, les ques-tions de restauration s’appliqueraient à la communauté virtuelle entière.Peut-on donc « restaurer » une communauté disparue ?

78. Le concept des médias variables repose sur une théorie de l’œuvre d’art qui propose que l’identité et la valeur de certaines œuvres se trouve dans leur dimension « informatique » – ce qui permet à l’œuvre d’être « séparée » de sa matière et « transposée » de support en support dans un but de conser-vation. URL : http://variablemedia.net/

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Avec l’exemple de l’Encyclopedia Dramatica cité précédemment, nous avons vu une des rares instances où une communauté virtuelle a été « res-taurée ». À partir d’une archive numérique du site web de la communauté, l’infrastructure disparue a pu être reconstruite et la population originale a migrée vers la nouvelle structure. Qu’est-ce qui nous permet de dire que le nouveau site (encyclopediadra-matic.ch) possède la même identité que l’ancien (encyclopediadramatica.com) ? Ni le nom de domaine, ni le créateur (Sherrod Degrippo) de l’infras-tructure ne sont les mêmes. Mais si une communauté virtuelle est définie essentiellement par ses buts (les intérêts partagés entre internautes), et par ses pratiques, alors son identité ne dépendra pas d’une personne ou d’un lieu en particulier. Néanmoins, la restauration d’Encyclopedia Dramatica aurait été difficilement envisageable si les deux éléments suivants n’avaient pas coexistés :• Ilrestaitdesmembresdelacommunautédisparuequiétaientfami-liers avec ses pratiques. La chaîne de transmission des valeurs et pratiques de celle-ci est donc restée ininterrompue.• Lesarticlesetimagesduwikiconstituaientlebutdelacommu-nauté et transmettaient également ses pratiques et valeurs. Si une archive du site n’avait pas été créée, la majorité de ces objets numériques auraient disparue à jamais, et avec eux, la raison d’être de la communauté ainsi que son histoire.Finalement, dans le cas d’Encyclopedia Dramatica, le cœur de la commu-nauté n’a pas disparu, il suffisait donc de combler des lacunes, notamment la plateforme et quelques images perdues pour que le système reprenne vie.

Si, dans le futur, la plateforme de la communauté YTMND est menacée de disparition et qu’une demande de sauvegarde apparait, deux solutions s’offriront alors à la communauté :• SisesmembresconsidèrentquelespratiquesdecréationdeYTMND sont inséparables de l’infrastructure de YTMND.com, alors ils peuvent envisager un projet de restauration pour ce dernier. Dans ce cas, il faudrait que suffisamment de membres de la communauté s’intéressent à la continuité de celle-ci.

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79. Définition du dictionnaire Larousse.

• SilesmembresdeYTMNDconsidèrentquelavaleurdeYTMNDne réside pas dans l’infrastructure « originelle » de YTMND.com mais uniquement dans le type de création qu’il génère, alors ils peuvent en-visager la création d’autres plateformes qui continueront à produire des YTMNDs. Nous avons vu que les communautés les plus résistantes sont celles qui ont une infrastructure décentralisée. Une catastrophe peut amener à l’éclatement de l’infrastructure de la communauté et par la même, à une distribution plus étendue du pouvoir décisionnaire.

Etant donné qu’une communauté virtuelle est une sorte de système vivant, il est peut-être plus juste de voir la « restauration » comme une « réadap-tation », définie comme : « Adaptation d’une espèce vivante à un nouveau milieu, d’où provenaient toutefois ses ancêtres ; Reprise progressive de l’activité après une maladie ou une blessure. »79 Comme pour la sauvegarde, la volonté de se reconstituer ou se réadapter doit provenir de l’intérieur de la communauté.

Résumé des différentes méthodes de pérennisation et conclu-sions

L’archivage, la conservation et la sauvegarde sont des solutions qui peuvent être employées séparément ou ensemble lors d’un éventuel projet de péren-nisation du patrimoine de l’Internet. Selon l’échelle d’un projet de conservation et la nature du patrimoine qui nous intéresse, nous mettrons l’accent plutôt sur l’archivage d’objets nu-mériques et sur leur préservation, ou bien sur la sauvegarde des pratiques vivantes de la communauté virtuelle. La documentation et l’archivage sont probablement les solutions les plus réalistes à mettre en œuvre pour sauvegarder une communauté virtuelle. Il s’agit non seulement d’un moyen de garder une trace historique du patri-moine de celle-ci, mais c’est également un moyen non-intrusif de participer à sa sauvegarde. Un système qui étudie et documente les pratiques d’une

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communauté aura l’effet de valoriser cette dernière, faisant de la publicité et lui amenant de nouveaux membres sans perturber son équilibre. L’archive peut également aider une communauté à se restaurer et à combler des éven-tuelles lacunes dans son infrastructure. Un projet de sauvegarde qui interviendra directement dans une commu-nauté virtuelle est peut-être la solution la plus complexe à mettre en œuvre. Sa faisabilité dépend de la communauté en question, car elle doit être réa-lisée avec la participation de ses membres.

Dans cette étude nous avons recherché les outils auxquels nous pouvons faire appel lors d’un projet hypothétique de conservation, de sauvegarde ou de restauration du patrimoine culturel de l’Internet. Mais une question essentielle se pose toujours : à qui revient la mission de conserver et de sauvegarder ce patrimoine ? Cela restera t-elle une activité autonome faite par des communautés indépendantes, ou bien se créera t-il de nouvelles institutions « officielles » entièrement dédiées à ce travail ? Nous avons pu constater que, sur le net, la création, l’archivage, la docu-mentation, la préservation et la restauration du patrimoine culturel devien-nent de plus en plus des actions collectives. Selon l’historien et sociologue Raphael Samuel « l’histoire » devient « une activité de masse » et « la conservation [...] devient un des grands mouvements sociaux et esthétiques de notre époque ».80 Sur Internet cette tendance est amplifiée. Son modèle de communication non-hiérarchique facilite une production indépendante et autonomisé du patrimoine et redéfinit les pratiques habituelles de conservation. Les ins-titutions qui s’investissent dans le monde de l’Internet trouvent souvent un bon équilibre entre deux systèmes de production et de sauvegarde du patrimoine : le modèle « top-down » et le modèle « bottom-up ». Dans les grandes bibliothèques et les archives nationales comme le Library of Congress et les organismes indépendants comme l’Internet Archive, une partie des taches de collectionner, de documenter et de suivre des objets numériques dans le temps est désormais déléguée au public. Les institutions

YTMND : la valeur du patrimoine, les dangers et les solutions de pérennisation

80. Samuel, R., Theatres of Memory: Past and Present in Popular Culture, London and New York, Verso. 1994

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du patrimoine peuvent donc agir comme des rassembleurs où les informa-tions apportées par le public seront structurées, conservées et diffusées. Un champ qui a besoin d’être développé est celui de création de nouvelles plateformes et outils qui faciliteront l’archivage et la préservation collective à des échelles différentes et par différents acteurs.

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Un outil de documentation et de sauvegarde pour le patrimoine culturel de l’Internet

Introduction 89La construction et l’organisation du site : 91

Le Wiki : 91Le choix de logiciel 91L’organisation sémantique du Wiki 94Comment créer un article 98

Conclusion : La sauvegarde du patrimoine culturel de l’Internet à travers une approche collaborative 101

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Un outil de documentation et de sauvegarde pour le patrimoine culturel de l’Internet

Mes recherches autour des différentes solutions de pérennisation du patri-moine de l’Internet m’ont amenées à conceptualiser un outil de documen-tation et de sauvegarde qui pourra s’appliquer au patrimoine plus large de l’Internet. Le concept et la mise en œuvre de ce projet seront détaillés dans cette dernière partie.

Introduction

Dans le monde « ordinaire », c’est toute la machine patrimoniale qui valorise les biens culturels. Tout travail de documentation historique, de conserva-tion, de restauration et d’exposition du patrimoine lui donne de la valeur. Un grand nombre de biens collectifs de l’Internet ne sont pas encore recon-nus par les institutions officielles. Sur le Net, ce sont souvent les amateurs et les organismes indépendants qui font ce travail. J’ai donc élaboré un projet expérimental dont le but global est de contribuer à la sauvegarde d’un patrimoine en devenir, en créant un système qui parti-cipera à « l’identification, la documentation, la recherche, la préservation, la protection, la promotion, la mise en valeur, la transmission », de celui-ci, en s’appuyant sur les concepts d’archivage, de préservation et de sauvegarde exposés précédemment.Les objets numériques en réseau évoluent dans un environnement colla-boratif, dans des espaces publics virtuels. Un patrimoine créé par la masse peut être également conservé, documenté et sauvegardé par la masse. L’idée est donc de créer un site Internet autour duquel une communauté virtuelle d’amateurs qui s’intéressent au patrimoine de l’Internet et à sa sauvegarde pourra se former. Le site sera accessible à toute personne souhaitant parti-ciper au projet. Ceux qui connaissent le sujet pourront participer librement, et ceux qui sont étrangers au sujet auront, à travers le site, la possibilité d’acquérir les connaissances nécessaires pour pouvoir participer.

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L’action principale de cette communauté sera la création et le maintien d’une ressource, sous la forme d’un wiki. Ce wiki sera facile à consulter, accessible à tout le monde, évolutif, et il fonctionnera également comme une base de données, pouvant être lu et interrogé par une machine. À travers ce wiki, il sera possible de suivre et de documenter l’évolution de systèmes vivants et de biens culturels en réseau et de les mettre en relation. Cet outil sera également particulièrement adapté aux œuvres du Net Art, Street Art, performances ou autres types d’œuvre d’art complexes, éphé-mères, interactives et / ou collaboratives.

Recherches autour de différents projets de documentation colla-borative en réseau

Afin de construire un projet concret qui soit adapté à ce concept, j’ai étudié d’autres projets de documentation et de conservation collaborative plus ou moins institutionnels, qui possédaient des éléments intéressants qui ont influencé la proposition finale. J’ai commencé par analyser le Variable Media Questionnaire. C’est un outil de documentation des œuvres d’art de « média variables » créé pour les institutions culturelles. Ensuite j’ai étudié Know Your Meme, un projet innovant de documentation des mèmes et d’autres phénomènes viraux du Net, construit dans un but commercial. Avec Know Your Meme, l’ouver-ture à la collaboration se situe quelque part entre le VMQ et Encyclopedia Dramatica – le dernier projet que j’ai étudié. Il s’agit d’un wiki et d’une communauté créée par et pour les amateurs de la culture « troll », une res-source qui a eu un rôle important dans la création de la culture Internet. (Pour un résumé de ces recherches, consulter l’annexe).

Annexe 5 : recherches autour de différents projets de documenta-tion en réseau

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La construction et l’organisation du site

Buts

• Êtreuneressourcesurlacréationenréseau,faciled’accèsetouverteau public• DocumenterlacréationsurInternet:communautés,objetsnumé-riques, évènements, œuvres d’art, etc. Conserver des informations générales et techniques sur ces éléments.• Suivreetdocumenterl’évolutiondesobjetsnumériquesetdescom-munautés virtuelles dans le temps, au travers des articles capables d’évoluer dans le temps.• Êtreunlieuderencontreentrecréateurs,participants,spectateurs,amateurs... • Unlieuoùpeuvents’organiserdesprojetsdeconservation-restau-ration et de sauvegarde en réseau et où peuvent s’organiser également de nouveaux projets de création.

Le Wiki

L’idée d’un Wiki collaboratif en réseau m’a intéressée par son efficacité, la simplicité de sa création et de son entretien, sa stabilité dans le temps et son ouverture à la participation d’un grand nombre de personnes. Le Wiki est un outil collaboratif permettant la rédaction d’articles autour d’un sujet choisi, par un nombre limité ou illimité de personnes. Il est également évo-lutif : il sera possible d’ajouter de nouveaux composants à son infrastructure, de nouvelles informations, associations et liens à ses articles. L’évolution est visible : nous pourrons consulter les états antérieurs des articles.

Le choix du logiciel

Il existe plusieurs logiciels pour créer des Wikis, le plus répandu étant celui employé par Wikipedia : MediaWiki. J’ai choisi ce logiciel pour les raisons suivantes :

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• Ilesttrèsadaptable.Soncodeestopensource,ilpeutdoncêtreadapté à tous types de besoins.• Ilexistedenombreusesextensionspermettantd’adapterleWikiàdes besoins spécifiques.• C’estunlogiciel«démocratique»quiestdéjàtrèsutiliséetbiendocumenté. Il existe une grande communauté de développeurs travaillant sur MediaWiki. Cela assure sa mise à jour constante, la réparation d’erreurs et sa durabilité dans le temps • L’emploietlasyntaxedeMediaWikisontaussirelativementfacilesà apprendre.Le défaut principal du Wiki est que, contrairement à une base de données (voir définition à gauche), les informations que l’on y entrent ne sont pas exploitables. Ils possèdent une signification uniquement pour l’humain et pas pour la machine. Cela veut dire que l’on ne peut pas mettre les données en relation pour découvrir de nouveaux sens, ni les partager facilement avec d’autres bases de données en réseaux. En cherchant des solutions à ce problème, j’ai découvert « Semantic Me-diaWiki » (le MediaWiki Sémantique).81

Semantic MediaWiki et le Web SémantiqueSemantic MediaWiki (SMW) est une extension à MediaWiki, permettant d’utiliser son Wiki comme une sorte de base de données d’objets (text box). SMW est une prolongation d’un projet mondial qui a pour but de rendre le web entièrement sémantique. Au lieu du web « classique » qui est constitué de textes connectés via des hyperliens, le web sémantique sera constitué d’objets en relation, dont la nature de la relation est définie et comprise à la fois par les machines et par les humains. Le résultat sera une augmentation du sens de tout le contenu du web. Dans le cas de notre Wiki, la « sémantisation » signifie qu’il sera désor-mais possible de mettre en relation les données du Wiki, les interroger, les importer et les exporter dans des langages « normalisées », notamment le XML (voir définition à gauche).

81. http://semantic-mediawiki.org/

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82. Source : http://tecfa.unige.ch/staf/staf-h/tassini/staf2x/Heidi/last_bd.htm83. Source : Wikipedia.fr

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DéfinitionsLes bases de données « Définition : Une base de données (BD) est un ensemble de données mémo-risées sur des supports accessibles par un ordinateur pour satisfaire simulta-nément plusieurs utilisateurs de façon sélective et en temps très court. Elles constituent le cœur du système d’information. Il existe 4 types de bases de données : 1. BD Hiérarchiques : les plus anciennes fondées sur une modélisation arbo-rescente des données. 2. BD Relationnelles : organisation des données sous forme de tables et exploi-tation à l ’aide d’un langage déclaratif (ex: Oracle, mySQL, Access). 3. BD Déductives : organisation de données sous forme de table et exploitation à l ’aide d’un langage logique. 4. BD Objets : organisation des données sous forme d’instances de classes hiérarchisées qui possèdent leurs propres méthodes d’exploitation. »82

Le XML« Extensible Markup Language (français : « langage extensible de balisage ») est un langage informatique de balisage générique. Il sert essentiellement à stocker/transférer des données de type texte Unicode structurées en champs arborescents. Ce langage est qualifié d’extensible car il permet à l ’utilisateur de définir les balises des éléments. L’utilisateur peut multiplier les espaces de nommage des balises et emprunter les définitions d’autres utilisateurs »83 Un des intérêts du langage XML est qu’il est lisible à la fois par la machine et par l’homme. Il existe des protocoles de nomenclature et de hiérarchie des balises appelés « Schémas ». Ces différents schémas XML facilitent la communication standardisée entre les institutions qui emploient fréquemment des types de bases de données différentes. Ils leur permettent également de partager leurs collections dans les réserves numériques en ligne, le but final étant une meilleure visibilité des collections pour faciliter la recherche.

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SMW est un logiciel Open Source qui est développé par une communauté de volontaires. Il bénéficie d’une bonne documentation et de nombreuses extensions qui lui donne des fonctionnalités intéressantes pour notre pro-jet.

L’organisation sémantique du Wiki

La transformation de notre Wiki en base de données, nous oblige à concep-tualiser et à créer une structure sémantique par laquelle les articles (objets) du Wiki seront organisés et mis en relation. Puisque SMW fonctionne comme une base de données d’objets, je me suis basée sur l’étude ontolo-gique de l’objet numérique et de la communauté virtuelle que j’ai effectuée précédemment, lors de mon étude de YTMND.

La structure ontologique du wiki

Dans notre étude de YTMND, nous avons employé quelques notions de la programmation orientée-objet. Nous avons vu que :

• Unensembledepropriétés(relations,comportements,etc.)peutêtre utilisé pour décrire un type d’objet numérique.• Unensembledepropriétésutiliséspourdécrireplusieursobjetsformera une classe. • Unobjetpeutappartenirsimultanémentàdenombreusesclasses.• Deuxobjetsquipartagentlesmêmespropriétésetdontlesproprié-tés possèdent les mêmes valeurs sont considérés comme identiques

Avec Semantic MediaWiki, nous pouvons structurer nos informations de la même manière :• UnecatégoriedeMediaWikicorrespondraàunensembledepro-priétés qui défini une « classe » d’objets. Les grandes catégories du wiki seront associées chacune à un formulaire sémantique (voir ci-dessous).• Unarticleoupageduwikicorrespondraàunobjetparticulier,autrement dit, à une « instance » d’une classe d’objets.

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• UnepropriétédansMediaWikidécritsoitunattributd’unobjet,soit une relation entre deux objets. L’extension la plus importante liée à SMW que j’ai installée est Semantic Forms (formulaires sémantiques). Elle permet l’annotation sémantique du wiki à travers des formulaires qui sont simple d’utilisation. Un « formu-laire sémantique » contiendra toutes les propriétés relatives à un article, ce qui permet de séparer l’annotation sémantique de la rédaction du texte de l’article. Au lieu d’apprendre la syntaxe des annotations sémantiques et de les insérer au hasard dans le texte de l’article qu’ils écrivent, les rédacteurs pourront simplement remplir des formulaires définis à l’avance, contenant tous les champs à renseigner.

Un article du wiki évoluera dans le temps, avec les modifications et ajouts des utilisateurs. Il est possible pourtant de voir l’historique intégrale de l’article et donc de voir ses états passés. Il est également possible de créer des liens vers des versions de référence. Les « versions » d’un objet corres-pondront donc à des versions de référence de l’article wiki.

Les catégories et propriétés sémantiques du Wiki

Certaines propriétés seront utilisées par toutes les classes (catégories) d’ob-jets, et donc par tous les formulaires du Wiki, même si nous leurs donnerons des appellations différentes. Ceci nous permettra de mettre tous les catégo-ries ensemble lors d’une recherche (par exemple, nous pouvons rechercher toutes les articles du Wiki qui traitent d’un certain sujet, qu’il s’agisse d’ob-jets, de communautés ou d’individus). D’autres propriétés appartiendront uniquement à certaines catégories et ne seront donc présentes que dans les formulaires associés à ces catégories. Les propriétés que j’ai choisies sont basées sur le standard Dublin Core84 et les termes que l’utilisateur entrera dans la base de données proviendront, autant que possible, des différentes listes de taxonomie existantes (je mettrai bien sûr ces listes à disposition des rédacteurs).

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84. La traduction française des éléments Dublin Core utilisés dans le wiki peuvent être trouvées ici : http://www-rocq.inria.fr/~vercoust/METADATA/DC-fr.1.1.html

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J’ai décidé de n’utiliser pour le moment que trois grandes catégories pour les formulaires : communautés, objets et individus. Chaque catégorie du wiki pourra, bien sûr, posséder des sous-catégories, par exemple, la catégorie « individus » pourrait avoir comme sous-catégorie : artiste, groupe d’artistes, etc.

Annexe 6 : Liste des propriétés sémantiques du Collaborative Art Wiki

Les requêtes sémantiques

Semantic Mediawiki nous permet d’interroger la base de données, pour faire ressortir l’information qui est dans notre wiki.

Par exemple, la requête : #ask: [[Type::Image, Son, Texte]] . Si on l’in-sère dans la page d’un objet, elle nous sortira les titres de toutes les pages du wiki où la propriété « Type » de leur formulaire possède la valeur « Image, Son et Texte ».Une requête plus complexe : #ask: [[Catégorie:Objets]] [[Type::Image, Son, Texte]] [[Localisation::YTMND.com]] nous sortira une liste de toutes les pages du wiki de la catégorie « objets » où le type de média est « Image, Son, et Texte » et où la localisation est « YTMND.com ». Autre-ment dit, cette requête nous donnera une liste de tous les YTMNDs qui ont une page dans le wiki.

Une requête peut également être utilisée pour créer ce que SMW appelle une page « concept ». Un concept est une sorte de « catégorie dynamique » qui créera des classes d’objets à partir des valeurs de leurs propriétés. En dehors de nos trois catégories générales qui seront chacune associée à un formulaire sémantique, les autres catégories et sous-catégories se créeront selon les valeurs des propriétés. Par exemple, avec le formulaire « objet »,

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85. Verbeeck, Muriel

nous pourrons décrire une image, un mème, ou même une performance. Nous pouvons ensuite créer un concept appelé « mème », performance, etc., en créant une requête avec les propriétés qui nous intéressent.

Exemples de concepts créés à partir de requêtes :

MEMES Un mème est une classe (concept ou catégorie) d’objets où :• Lapropriété«Type»alavaleur«mème»• Pourunmèmespécifique,lapropriété«Relation:EstBaséSur»possède la même valeur que de nombreux autre objets. Cette propriété peut décrire une relation avec la page principale d’une sous-catégorie de mème.

EVENNEMENTSUn évènement est une classe (concept ou catégorie) d’objets où :• Lapropriété«Type»possèdelavaleur«événement»• Lesvaleursdespropriétés«Datededébut/création»et«Datedefin / dissolution » sont précisées, et la propriété « couverture » est un unité de temps.

ŒUVRES D’ARTUne œuvre d’art est une classe (concept ou catégorie) d’objets où :• Lapropriété«Type»d’unobjet,événement,mème,etc.auralavaleur « œuvre d’art ».Selon mon modèle sémantique, l’attribut « œuvre d’art » est une propriété comme une autre, qui vient se rajouter à un objet.85

D

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Annexe 7. Schèma de l’organisation de Collaborative Art Wiki avec l’éxemple de YTMND

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La création d’un article Wiki

Pour créer un article complet, les rédacteurs du wiki passeront par ces trois étapes :

1. La création de l’article avec l’aide d’un formulaire sémantique. Chaque type d’article (ressource, objet, communauté, etc.) sera associé à un type de formulaire.

L’utilisateur peut choisir d’ajouter un nouvel article / objet au Wiki en cliquant sur un bouton dans le menu de droite. Il sélectionnera ensuite le type de formulaire qui correspond à l’objet qu’il souhaité ajouter (individu, objet, communauté, etc.). Fig 26.

En remplissant le formulaire, le rédacteur fournit des informations essen-tielles qui entreront dans la base de données. Ces informations peuvent, par la suite, être exportées en langage XML, comparées et utilisées en tant que critères de recherche, etc. Elles donneront également aux lecteurs du wiki une vue d’ensemble des informations principales de l’article. Fig 27.

2. La rédaction de la partie texte de l’article et la création de liens vers d’autres articles. Fig 28.

3. L’ajout de ressources / médias (images, vidéos, etc.) associé à l’ar-ticle.

Avec MediaWiki, chaque article est associé à une page de « discussion » où les rédacteurs peuvent échanger autour de la rédaction et résoudre des conflits. Nous pouvons également installer une extension à MediaWiki qui permet à un système de commentaires d’exister, peut-être même en lien avec des réseaux sociaux, comme Facebook. On peut également envisager la création de forums sur le site, qui seront des lieux de discussions et de rencontres entre les membres de la communauté.

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Fig 27.

Fig 26.

Fig 28.

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Ce qui reste à faire...

Le projet de création d’un outil de documentation et de sauvegarde col-laboratif est, pour le moment, encore dans la phase expérimentale. Une fois la partie technique du projet complétée, il sera nécessaire de réfléchir à la partie sociale. Lorsqu’on crée une plateforme, il est difficile de prévoir l’évolution de la future communauté : quel profil d’utilisateur attirera t-elle ? Trouverons-nous suffisamment de membres qui partageront les mêmes intérêts que nous ? Il est également nécessaire de réfléchir à la préservation du Collaborative Art Wiki dans le temps. Pour le moment le coût de l’hébergement est très faible car le site est à peine utilisé. Mais si son utilisation devait être plus conséquente dans le futur, j’envisage la création d’une association pour suivre le projet et assurer que le site reste en ligne.

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ConclusionLa sauvegarde du patrimoine culturel de l’Internet à travers une approche collaborative

« De plus en plus, les particuliers, les organisations et les communautés uti-lisent les technologies numériques pour documenter et exprimer ce à quoi ils attachent de la valeur et ce qu’ils veulent transmettre aux générations futures. Ont émergé de nouvelles formes de communication et d’expression qui n’exis-taient pas auparavant. L’Internet est un vaste exemple de ce phénomène. » - l ’UNESCO à propos du patrimoine numérique

Avec notre étude de la communauté YTMND et de ses productions, nous avons analysé la nature matérielle d’un type d’objet numérique sur Internet et ses fonctions au sein d’une communauté virtuelle. Nous avons pu observer les mécanismes de production de ces objets et constater les valeurs qu’ils possèdent. Leur valeur sociale renforce l’identité et les liens entre les membres de la communauté. Leurs dimensions historiques et esthétiques font que certains historiens et artistes du web commencent à reconnaître ces objets comme constituant un patrimoine.

Ces observations nous ont amené à nous interroger sur l’approche de conservation la plus adaptée pour ce type d’objet numérique. Les objets YTMND possèdent des caractéristiques singulières. Sur le plan matériel, ils sont sujets aux mêmes menaces que les objets numériques de manière générale, notamment celles de l’obsolescence et de la perte d’accessibilité. De plus, de nombreux YTMNDs fonctionnent comme des « mèmes » : leur identité est dynamique et instable car elle réside dans un processus continuel de réappropriation et de remixage par les membres d’une communauté. Par cela, ces objets peuvent également être assimilés à un « patrimoine vivant ou immatériel ». L’archivage numérique semble être une solution particulièrement adaptée à la nature matérielle et immatérielle des objets étudiés. C’est une pratique

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qui peut regrouper un ensemble de processus : la collecte, la sélection et la documentation des objets, ainsi que leur organisation, leur conservation et leur diffusion. L’archive en réseau peut devenir un système vivant qui évolue en parallèle aux communautés virtuelles, documentant les objets, les pratiques et les environnements de l’Internet en temps réel. En rendant ses données accessibles en permanence, elle permet aux créateurs de former de nouveaux agencements et de nouvelles relations entre les objets, de se les réapproprier et de les remixer. Ainsi, l’archive ne gardera pas uniquement des copies et des traces « figées » de ceux-ci, elle pourra également contri-buer à l’évolution continuelle de leur sens et participer donc indirectement à la sauvegarde de leur dimension immatérielle.

Mais à qui revient le rôle de conserver le patrimoine culturel sur Internet ? De plus en plus, la conservation du patrimoine devient un processus collectif.86 Dans le monde de l’Internet, ce travail est effectué par différents acteurs : les créateurs de contenu,87 les historiens et les amateurs de la culture Internet88 et divers organismes officiels,89 commerciaux,90 ou indépendants.91 De plus, l’infrastructure de l’Internet permet la communication à une échelle et à une vitesse sans précédent. Par cela, elle facilite une approche collective et collaborative de sauvegarde de son patrimoine. Cette vision nous a amenée à explorer le champ de la création d’outils qui faciliteront la collaboration entre ces acteurs. Nous avons retenu le Wiki sémantique car c’est un outil qui réunit tous les éléments que nous recher-chons pour un projet d’archivage collaboratif. Il est par définition ouvert à la participation et à la collaboration. Il permet de montrer l’évolution des objets dynamiques dans le temps et il est lui-même évolutif. Ainsi, de nou-velles extensions sont développées qui permettent d’adapter le Wiki à des utilisations spécifiques. De plus, la nature « open source » du logiciel permet son développement et sa préservation dans le temps. L’extension sémantique

86. Samuel, Raphael87. Ex : Les membres de YTMND88. Ex : ArchiveTeam.org89. Ex : The Library of Congress90. Ex : Knowyourmeme.org91. Ex : The Internet Archive

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permet de mettre en relation les données du Wiki et de les partager avec d’autres bases de données au travers des langages standardisés.

Le projet du « Collaborative Art Wiki » est encore à ses débuts et nécessitera une réflexion plus développée sur son organisation sémantique et sur la création de la communauté (comment attirer des utilisateurs, comment gérer efficacement les contributions...). Il serait également intéressant de construire des partenariats avec d’autres projets existants. À travers ces recherches, j’ai pu déjà repérer un certain nombre d’organismes, d’institutions et d’acteurs qui partagent mon intérêt pour la sauvegarde du patrimoine numérique et / ou qui développent des outils de conservation et de documentation adaptés à l’Internet. J’ai pu ainsi prendre contact avec Jason Scott et m’inscrire dans le projet ArchiveTeam.org avec lequel j’espère collaborer dans le futur.

Le Wiki sémantique collaboratif pourra également devenir le sujet d’un futur projet de recherche car il me semble qu’il pourrait être expérimenté pour d’autres types de patrimoine qui sont de nature dynamique, éphémère ou évolutif – par exemple pour documenter des performances artistiques ou les œuvres du Net Art.

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LISTE DES IMAGES ET LEUR PROVENENCE :

Fig 1. Source : capture d’écran du site http://www.yourethemannowdog.comFig 2. Source : capture d’écran du site http://raptorlamb.ytmnd.com/Fig 3. Source : capture d’écran du site http://english.ytmnd.com/Fig 4. Source : capture d’écran du site http://exitsign.ytmnd.com/Fig 5. Source : capture d’écran du site http://debtris.ytmnd.com/Fig 6. Source : capture d’écran du site http://lohanfacial.ytmnd.com/Fig 7. Source : capture d’écran du site http://ptkfgslohan.ytmnd.com/Fig 8. Source : capture d’écran du site http://lohanbra.ytmnd.com/Fig 9. Source : capture d’écran du site http://zombielohan.ytmnd.com/Fig 10. Source : capture d’écran du site http://batmanfacial.ytmnd.com/Fig 11. Source : capture d’écran du site http://legoface.ytmnd.com/Fig 12. Source : capture d’écran du site http://www.purple.com/purple.htmlFig 13. Source : capture d’écran du site http://wwwdotcom.com/Fig 14. Source : capture d’écran du site http://tired.com/ Fig 16. Source : Alexa Demographics

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Fig 17. Source : Alexa DemographicsFig 18 et 19. Collectées par Google imagesFig 21. Source : capture d’écran du site http://ebaumartgallery.ytmnd.com/Fig 22. Affiche trouvé sur 4chan.org.Fig 23. Source : Capture d’écran d’un commentaire sur le site YTMND.comFig 24. Source : Google TrendsFig 25. Source : capture d’écran du site http://archive.org/details/gamevi-deosFig 26 - 28. Source : Capture d’écran du site http://collaborative-art.net

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ANNEXES

Annexe 1. Historique de la création en réseau

Annexe 2. Les différents types de systèmes

Annexe 3. Infrastructures de communication : de la participation à la collaboration.

Annexe 4. Discussion avec Gregory Chatonsky

Annexe 5. Recherches autour de différents projets de documentation en réseau.

Annexe 6. Liste des propriétés de Collaborative Art Wiki

Annexe 7. Schèma de l’organisation de Collaborative Art Wiki avec l’éxemple de YTMND

Annexe 8. Liste des extensions ajoutées au Collaborative Art Wiki

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Annexe 1 : Historique de la création en ré-seauDepuis la création du réseaux informatique, les artistes l’ont habité et em-ployé comme un espace de rencontre, de partage et de création. Avant même de créer des œuvres visuelles, ou des objets numériques, les artistes explo-raient le réseau pour les nouvelles possibilités d’interactions qu’ils créaient. Depuis ses débuts, la création en réseau était donc basée sur une esthétique liée aux relations et à la communication : une esthétique d’interaction et d’exploration d’un environnement partagé.L’œuvre d’art en réseau possède généralement une dimension conceptuelle, et une dimension interactive, dans la lignée des « happenings » et des œu-vres d’art cinétiques.« L’art en réseau n’est pas né avec l’ordinateur. Dès la fin des années soixan-te-dix, des artistes commencent à s’intéresser aux techniques de communi-cation et à la participation du spectateur. Ils utilisent tout naturellement les réseaux numériques pour prolonger des propositions déjà largement expéri-mentées et les renouveler. Le mode de communication de tous vers tous rend évidemment la participation du public considérablement plus large.»1

Usenet

Ce mode de communication (tous vers tous) est né avec Usenet – l’ancêtre de l’Internet actuel. Inventé en 1979, Usenet est un système de discussion distribué employant un réseau de serveurs auquel des ordinateurs personnels se connectent à l’aide d’un logiciel « client ». De son ordinateur personnel, l’individu pourrait accéder à des « groupes de discussion » en se connectant à un des serveurs du réseau. Il pourrait par la suite, ajouter son propre contenu à la discussion – contenu qui était envoyé à tous les serveurs du réseau, et était accessible par tous les ordinateurs connectés à ces serveurs.

Fig 1 - 3. Trois protocoles de communication en réseau 1. Couchot, Edmond, and Norbert Hillaire. L’art Numérique. Flammarion, 2005.

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Annexes

Fig 3. Un système décentralisé tel que Usenet, ou le protocole de chat IRC

Fig 2. Un système centralisé de type site web

Fig 1. Un système de communication privé entre deux individus

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L’Usenet était un des premiers systèmes permettant à un grand nombre de personnes de communiquer de manière non-hiérarchique autour de sujets divers. Étant donné que Usenet est décentralisé, et qu’il n’existe donc pas de site central auquel tous les ordinateurs se connectent, le contenu et l’espace de communication sont fusionnés : le groupe de discussion est à la fois le lieu, l’acte, et le contenu de la communication. Usenet a donné naissance aux premiers phénomènes « viraux » : des mots d’argot et des concepts qui sont toujours vivants sur l’Internet, tels que le « flaming » et le « trolling ». L’environnement textuel de Usenet donne lieu à des formes de création par-ticulières, comme l’art ASCII et la « cascade » . On ne parle pas souvent des artistes du Usenet car leur « art » consistait surtout en une façon de commu-niquer et en des actions se rapprochant de la performance. Il faut attendre la création de l’Internet pour que la création en ASCII soit reconnue comme une forme d’art (avec les œuvres ASCII de l’artiste Vuk Cosic).

Si l’utilisation de Usenet est devenue moindre après la création du « World Wide Web », il continue à être employé aujourd’hui. L’environnement éphé-mère de Usenet fait qu’il existe actuellement très peu de documentation des évènements et créations du réseau Usenet.

Le « Usenet Performance Artists » était un groupe de « trolls » qui a par-ticipé aux Meow Wars - une série de guerres entre internautes qui a failli détruire le réseau d’Usenet. Leurs armes étaient, entre autres, l’art ascii, le « flaming », et les « cascades ».3

2. Usenet était un système de communication par texte. Il n’était donc pas possible de partager des images.3. Chaîne de lettres (par courrier électronique)sur un réseau (en partie. l’Internet, évidemment) dans laquelle chacun ajoute une ligne au texte et fait passer. - http://www.sospc-en-ligne.com/lexique-definition-1344.html

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La naissance du « net.art »

Le World Wide Web, créé aux débuts des années 90, permettait de publier ses documents en langage HTML et de relier ces publications entre elles, créant des « hypertextes ». Ce système permet aux artistes, non seulement de communiquer entre eux, mais d’afficher leurs publications de façon plus stable - de créer un « site d’Internet ». Les systèmes de communication similaires à Usenet sont pourtant encore utilisés par les premières com-munautés ouvertement artistiques tel que rhizome.org. Les systèmes les plus employés étaient la liste de courrier électronique et le « Bulletin Board System » (BBS) qui permettaient aux artistes d’échanger autour du contenu fabriqué par, et distribué entre eux. Le BBS donne naissance à des collec-tives qui inventaient des genres de création particuliers : ils exploraient le dessous des logiciels, détournaient des langages informatiques et des sys-tèmes d’exploitation (ex: le ANSI art et musique, les « crack screens »). La plupart de ces pratiques ont disparue avec les logiciels qu’ils employaient, devenus obsolètes. Il reste néanmoins des traces, notamment la collection de Jason Scott, accessible sur le site textfiles.com.

En parallèle de ce monde de l’art indépendant et marginal, le Net Art commence à être reconnu dans le monde de l’art contemporain. On raconte que le terme « Net.art » fut trouvé par hasard par l’artiste Slovaque Vuk Cosic dans un courriel brouillé qu’il a reçu en 1995. Le terme, devenu vi-rale par la suite, était surtout employé pour décrire une façon artistique de communiquer, d’habiter, et d’interroger le réseau. Le premier « art » sur le Net ne concernait pas la production d’objets ; il s’agissait plutôt de créer des communautés artistiques, où l’accent était mis sur les processus de commu-nication et les interactions dans l’environnement « virtuel » du réseau. Les « objets » que ces artistes créaient ensuite (tel que des sites web et « objets numériques » interactifs) étaient souvent un moyen d’explorer la structure et les limites du réseau ainsi que les nouvelles questions qu’ils soulevaient : questions souvent liées à l’identité de l’artiste (ex : Mouchette, Fig 4.) et à l’autonomie de l’œuvre programmée et interactive. Les « net artistes » avaient un goût pour l’art participatif, engagé et subversif (Fig 5.), pour la

Annexes

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Fig 4.

L’identité autonome : Mou-chette (http://mouchette.org/indexf.html) est une artiste « virtuelle », sans corps, qui a « presque 13 ans » depuis 1996. Sa « vraie » identité est gardée secrète jusqu’en 2010. Mou-chette encourageait également les visiteurs de son site à utiliser son nom et son identité pour créer leurs propres sites.

Fig 5.

La subversion : King’s Cross Phone In, 1994, de Heath Bun-ting. H. Bunting met en ligne les numéros de plusieurs cabines téléphoniques dans le cartier de King’s Cross à Londres. Il encourage tout le monde à les appeler à un jour précis. Ici le réseau est exploré comme un système démocratique de communication, permettant l’organisation d’actes subver-sifs. Employant le réseau, H. Bunting organise de nouveaux espaces de communication dans le monde «réel».

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fabrication d’identités parallèles et l’anonymat. L’identité de chacun n’était plus contrainte à son corps physique. Les idéaux des artistes (comme la plus grande partie des premiers utilisateurs du net), étaient la communication démocratique, le libre partage le l’information et la neutralité des espaces partagés. Le réseau était perçu comme un espace de liberté en dehors des circuits fermés du monde de l’art.

L’art du Web 2.0

« L’œuvre [du réseau], qui devient alors, dans quelques cas plutôt rares, le produit d’une multitude de coauteurs interfacés, peut s’actualiser sur chaque écran, au même instant, et être modifiée par chacun. Certains artistes ou théoriciens vont même jusqu’à soutenir l’idée d’une disparition totale de l’auteur (et des coauteurs) au profit d’une espèce de génération spontanée dont nul n’aurait pris l’initiative, à la manière de la Bible ou des grands récits antiques [...], fruits présumés d’une écriture collective. »

Avec le Web 2.0 est née une forme de création collective et sociale, bien qu’il y existe encore très peu de critiques et d’historiens d’art qui s’y prêtent attention. Dans les œuvres du net art 2.0, l’internaute devient un composant actif au sein d’un système dynamique qui produit de l’art. L’interactivité, déjà présent dans un grand nombre d’œuvres du Web 1.0, devient de plus en plus libre et ouverte.

(Fig 6-7)

Annexes

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Fig 6. Une forme de création collective : Le «CAPTCHArt» appartient à un genre particulier de web comics (bandes dessinées) circulant sur Internet. Ces web comics sont le plus souvent dessiné avec Microsoft Paint ou Adobe Photoshop, et suivent certaines règles de base. Il s’agit de créer une BD à partir d’un CAPTCHA4 (qui apparaît dans le dernier panneau de la BD). Un CAPT-CHArt peut jouer sur la prononciation des mots, sur l’absurdité qui émerge de la juxtaposition des deux mots ou même sur la typographie visuelle du Captcha.

4. Un Captcha est une forme de test de Turing permettant de différencier de manière automatisée un utilisateur humain d’un ordinateur. Ce test est utilisé sur Internet dans les formulaires pour se prémunir contre les soumissions automatisées et intensives réalisées par des robots malveillants. - http://www.techno-science.net/?onglet=glossaire&definition=3902

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Annexes

Fig 7. Une action collective en réseau : En 2006, les membres de plusieurs communautés Internet, dont YTMND, organisent une invasion virtuelle d’un jeu en réseau appelé Habbo Hotel. Ils habillent tous leurs avatars de la même façon, bloquent l’entrée de la piscine virtuelle et forment des swastikas avec les corps de leurs avatars. Depuis, l’action a lieu toutes les années à la même date.

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5. Ackoff, Russell L. Systems Thinking for Curious Managers: With 40 New Management F-Laws. Triarchy Press, 2010.

Annexe 2 : Les différents types de systèmes

En continuant avec des notions empruntées de la systémique, il nous est possible de distinguer entre différents types de systèmes. Le professeur et théoricien, Rusell L. Ackoff, défini quatre types de systèmes5 : mécanique, biologique ou animé, social, et écologique. C’est les trois premiers qui concernent notre étude.• Lesystèmemécanique:c’estletypedesystèmeleplussimplecaril est très peu ouvert aux influences de son environnement, et requiert un environnement stable. L’interaction entre ses composants est linéaire et causale. Il est donc possible de décomposer le système en parties, et son évolution dans le temps est prévisible. • Lesystèmebiologiqueestunsystèmevivantavecunbutoufonctionqui lui est propre. Les parties du système n’ont pas de « choix » mais ils sont dirigés par un cerveau. Le cerveau du système choisit et contrôle l’évolution du système entier. Le système biologique est ouvert à son environnement car sa survie dépend de ses échanges avec l’extérieur. On dit que ce type de système est « auto-organisé » - ce qui veut dire ses composants internes ne sont pas fixes, mais peuvent changer ou se réaligner pour permettre au système d’évoluer avec son environnement. L’identité d’un système vivant reste intacte malgré les changements de ses composants.• Unsystèmesocialestégalementunsystèmevivant,avecunbutqui lui est propre. Il est formé par un ensemble de sous-systèmes et il est généralement contenu dans un autre système social plus large. Le système social est formé de sujets conscients ayant chacun leur propre volonté. Ces sujets sont en dialogue récursif les uns avec les autres et avec leur environ-nement. Afin de comprendre la différence entre les systèmes biologiques et socioculturels, une illustration est souvent employée : le système biologique est comparé à une voiture conduit par un conducteur, et un système socio-culturel à un cheval et son cavalier. Dans le premier exemple, l’action du système entier est décidée par le conducteur. Dans le deuxième cas, l’action

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du système est le résultat d’un « dialogue » entre le cheval et son cavalier. On comprend alors que les propriétés du système entier émergent des in-teractions entre toutes ses parties constitutives. L’évolution de ce type de système est imprévisible, car même si il nous est possible d’y appliquer des lois de la probabilité. Un système social peut, bien sûr, être composé de plusieurs sous-systèmes qui peuvent être de type biologique et mécanique.

Annexes

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Annexe 3. Infrastructures de communica-tion : de la participation à la collaborationOn défini un système vivant par sa capacité à contenir, à communiquer et à reproduire de l’information, et par sa capacité à générer la valeur et la signification de ce dernier.La qualité et la vitesse avec laquelle les composants d’un système commu-niquent et interagissent, dépendent de l’infrastructure de communication qui est en place. L’infrastructure la plus simple permet la communication à sens unique, et le plus complexe permet une réelle collaboration entre de nombreux individus. Toute collaboration est d’abord basée sur de la communication, que nous pouvons définir comme « le partage d’information entre individus ». L’in-vention de systèmes de communication à distance a permis d’augmenter et d’étendre le nombre de communications possibles entre individus. Le système le plus simple permet une communication entre deux individus (ex : le téléphone), tandis que les réseaux comme l’Internet permettent une communication de plusieurs vers plusieurs (Image). Une collaboration est un type d’interaction complexe. Pour qu’une collaboration ait lieu, il faut un projet et un ou plusieurs but(s) commun(s) aux individus/participants. Il faut que ces participants aient la possibilité de « participer » à un projet commun afin d’atteindre ces buts. Il faut également qu’une ou plusieurs règles de collaboration soient définies afin d’avoir une entente générale entre participants. Pourtant le but et les règles d’une collaboration peuvent être flous, le niveau de participation plus ou moins restreint. Dans ce chapitre, j’analyserai les différents niveaux d’interactions qui peuvent exister dans un système - allant du plus simple au plus complexe. J’illustrerai ces modèles avec des exemples d’œuvres d’art interactives.

Le feedback

La première étape vers une collaboration est la possibilité de « feedback » (rétroaction).

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6. « Feedback is a method of controlling a system by reinserting into it the results of its past perfor-mance », Weiner, Norbert. Human Use of Human Beings: Cybernetics and Society. Avon, 1986. (p. 61)

A ce niveau on ne peut pas encore parler de « collaboration » car il n’y a pas de but défini, et les interactions sont encore très limitées. Nous parlerons donc plutôt de simple rétroaction. A ce stade, le producteur est toujours bien distinct du récepteur. Ce dernier n’a pas le pouvoir de modifier directement le système global, mais il peut participer à une certaine échelle en donnant ses réactions. Ses contributions peuvent tout de même faire évoluer le sys-tème global, mais indirectement.L’inventeur de la cybernétique, Norbert Wiener a écrit : « Le feedback est une méthode permettant de contrôler un système en lui réintroduisant les résultats de ses performances passées »6 Ainsi, le système utilise les résultats de ses expériences passées, afin de contrôler ses performances futures.Un exemple de ce type de participation est l’introduction d’un « courrier de lecteur » dans des journaux ou des magazines, permettant aux récepteurs de l’information de donner leur avis. Ces avis petit à petit font évoluer le diffuseur de l’information.L’ouverture au feedback est le premier pas pris par les grandes institutions médiatiques afin de s’adapter au paradigme du réseau. Si cette ouverture existait avant l’Internet, ce dernier la fait grandir en donnant la possibilité à tout le monde de donner son avis, sans sélection préalable de la part de l’institution. La création de forums sur Internet par des journaux et chaines télévisés permet au public de communiquer avec l’institution et directement entre eux sans intermédiaire. Cette évolution est déjà conséquente, mais elle n’est qu’un premier pas vers la création de l’information venant entiè-rement « d’en bas » - comme les bloggeurs qui créent de l’information sans la contrainte de passer par une institution hiérarchique.Nombreux sont les artistes qui, même avant le Net, exploraient l’interaction entre individus et tentaient de créer de la participation avec le spectateur – une boucle de communication entre émetteur et récepteur. En 1972, Fred Forest, le fondateur de l’Art de la Communication tente une expérience ar-tistique. Il convainque le journal Le Monde d’offrir un espace vide dans une

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édition du journal – l’espace du lecteur. Ainsi, au lieu d’être un passif récep-teur de l’information, ce dernier avait l’illusion de participer en introduisant ce qu’il voulait dans cette espace. F. Forest incitait le lecteur d’arracher la page et de le lui envoyer. De par cet acte, F. Forest tente de transformer un processus de communication à sens unique en une interaction à deux sens. Il s’empare du journal pour créer son propre processus de communication avec le lecteur, en lui donnant le pouvoir de créer sa propre information, de l’introduire dans le journal, et de diffuser son travail en le renvoyant à l’artiste. En transformant l’acte passif de lire en un projet artistique dont le lecteur est complice, F. Forest amène l’interaction vers la collaboration.

La collaboration hiérarchique (le modèle arborescent)8

7. Schéma : ARNOLD Michael, The concept of community and the character of networks, The Journal of Community Informatics, Vol 3, No 2 (2007)

Lorsque les individus acquièrent la capa-cité d’agir de manière proactive au lieu de simplement réactive, et lorsque il existe un projet commun, nous pouvons commencer à appeler cela une collaboration. Le premier niveau de collaboration est la collaboration hiérarchique. Dans ce schéma, ceux qui sont « en bas de l’échelle » peuvent agir directement sur le projet commun, mais ils seront limités dans leur capacité de modifier le projet global car chaque contribution doit passer par la hiérarchie avant d’être validée. Souvent ils vont participer en suivant une ou plusieurs instructions simples provenant du haut de la structure. (Fig 8.)

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Fig 8. Net.flag, une œuvre créé par Mark Napier en 2002. Les internautes peu-vent modifier le drapeau dans un cadre limité, en utilisant des formes, couleurs et symboles établis à l’avance par le programme. URL : http://netflag.guggen-heim.org/netflag/

La collaboration non-hiérarchique (modèle rhizomique)

Avec ce type de collaboration, tous les participants peuvent, en principe, participer de manière égalitaire. Ceci n’empêche pas une éventuelle hiérarchie de se former, basée sur la méritocratie. Ceux qui contribuent le plus de temps ou apportent le plus de moyens au projet ont naturellement un plus grand pouvoir sur l’évolution gé-

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8. http://wikipedia.org/9. http://www.opensource.org/

nérale du projet. La collaboration non-hiérarchique peut aussi être ouverte à un nombre limité ou illimité de participants. Souvent les règles de la col-laboration sont élaborées à l’avance, ainsi que le but du projet et les règles de participation. Ce type de collaboration peut également être centralisé (les contributions étant collectionnées et gérées dans un lieu central – un site web par exemple), ou décentralisés. La décentralisation du projet collabora-tif ouvre une plus grande possibilité d’évolution et de mutation. L’Internet lui-même est le meilleur exemple d’un tel système, sa structure décentralisée le rend adaptable aux changements et également aux catastrophes.

L’exemple le plus connu de projet de collaboration non-hiérarchique est Wikipedia.8 Wikipedia est la plus grande encyclopédie du monde, que tout le monde peut, en principe, éditer, agrandir et améliorer. Aujourd’hui des millions d’heures de travail ont étés données à Wikipedia par des vo-lontaires partout dans le monde. Lorsque nous disons que « tout le monde peut participer », cela ne veut pas dire que n’importe qui peut participer. C’est le cas avec beaucoup de projets collaboratifs ouverts : la participation demande certaines connaissances chez l’internaute ou au moins la capacité à les acquérir. L’Open Source Initiative9 est un exemple de collaboration non-hiérarchique et décentralisée. Il s’agit de milliers d’internautes qui participent à la créa-tion de logiciels gratuits en donnant leur code à la communauté ou en dé-boguant le code de logiciels créés par d’autres membres. La décentralisation de ce projet veut dire qu’au lieu de regrouper les logiciels dans un endroit et une version, il peut exister plusieurs versions d’un même logiciel avec des localisations différentes (contrairement à Wikipedia par exemple, où il existe à tout moment une seule version « officielle » de chaque article). Ces versions peuvent évoluer différemment, créer de nouveaux branchements et muter selon les besoins et envies des participants.

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Annexe 4. Extraits d’une discussion avec Gregory Cha-tonsky via Skype.

J’ai pu discuter avec Gregory Chatonsky via Skype le 06-10-10. Il a répondu aux questions que j’avais à propos de l’art numérique, sa conservation et sa restauration. Il m’a également expliqué son projet « Capture », où l’archivage est un processus intèrne de l’œuvre.Voici quelques extraits de la conversation au sujet de l’archivage numérique.

...........

(Gregory Chatonsky) Actuellement je travail sur un projet qui me tient à cœur. C’est l’un des gros projets que je fait en ce moment qui a un lien avec l’Internet, qui s’appelle Capture. Capture c’est un groupe de Rock générative. Ce sont des performances - un concert d’une durée minimale de 12 heures - où on fait au moment même de la performance, l’archive de la performance. Cela veut dire qu’on a une personne qui va photographier, écrire et faire la mise en page d’un livre. Ce livre on va le mettre directement le lendemain matin sur Lulu et on va le rendre disponible sur Amazon. Le projet, c’est que l’archive ne soit pas en dehors du projet, c’est en même temps. Ça se passe en même temps et c’est un objet constitutif du projet. Donc moi je suis vraiment plus dans une logique de dire que l’archivage des projets numériques est plus compliqué quand il est fait après-coup. Il est même quasi impossible. Sincèrement, il faut peut-être modérer cet avis, mais sur Internet j’ai l’impression que quand on fait l’archivage après, c’est trop tard...

(moi) et peut-être moins intéressante aussi...

Oui, et on a déjà tout perdu donc s’il faut tout recréer c’est plus compliqué. Le fait d’archiver les projets prend beaucoup de temps et en plus, les artistes doivent de plus en plus jouer le rôle d’archiviste de leurs propres projets. Ce qui n’était pas le cas avant, mais les artistes doivent de plus en plus intégrer cette dimension. Donc l’hypothèse là, c’est plutôt de faire que l’archive fasse partie du projet à part entière, d’abord pour que ça soit plus rigolo à faire et que ce ne soit pas un simple listing.

C’est très intéressant comme idée. Si j’ai bien compris, la music est également généré à travers un algorithme ?

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Oui c’est la musique qui est générée automatiquement, ainsi que la voix chan-tée.

...et est-ce que tout cela est archivé automatiquement?

Oui tout est archivé et on est vraiment très systématique avec ça. On avait fait un premier prototype au musée d’art contemporain à Montréal et là le prochain truc, c’est en Juin à Paris par-ce qu’on a reçu des subventions pour mener à bien ce projet.

Et est-ce que tout cela est visible quelque part ?

Tout ça sera visible à partir de Juin. Et par exemple en termes d’archivage, l’une des techniques qu’on a utilisée avec humour, c’était que tous les éléments que l’on archive : images, sons... parce qu’il n’ya pas que la musique qui est générée, tout est générée. Donc tous les titres des fichiers vont toujours être des adresses IP version 6 - la nouvelle version des adresses IP. Étant donné que Capture produit de manière infinie les choses, alors on ne va pas donner un titre sémantique à nos objets. On leur donnera un titre uniquement en IP en fin de compte. Donc, Capture c’est vraiment un projet qui essai, entre autres, de troubler un peu les limites entre les processus de production et les processus d’archivage et de conservation.

Et est-ce qu’il y a une durée limite pour ce projet ?

Alors, on ne sais pas pendant combien de temps on va le faire, mais on risque de le faire pendant au minimum 3 ans puisque on va peut-être lancer un programme de recherche universitaire sur ce projet. D’ailleurs on voudrait intégrer les gens qui travail sur l’archive...

Pour trouver des méthodes...?

Oui pour trouver des méthodes et aussi pour que l’on ne soit plus dans le monde dans lequel on vivait auparavant ou il y avait des autorités distincts et séparés…

Vous voudrez brouiller les frontières entre l’art, l’archivage, la conservation...

…oui, essayer qu’il n’y ait plus de séparations entre ces différents composants du monde de l’art.

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Je pense à une autre chose que je voulais vous demander. Est-ce que cela existe déjà, un de système d’archivage collaborative, mais par le public, où on donne la responsabilité de conserver et archiver au public - comme des Wikis, mais pour des œuvres d’art ?

Ouais alors je ne crois pas qu’il y ait de projet aujourd’hui...d’ailleurs c’est une bonne question, est-ce qu’il y a de projets contributifs pour des œuvres d’art sur Internet par le public ? Par contre, il y a Fluxus Map par exemple, qui permet de faire des copies d’écran - le public peut faire des copies d’écran. Mais ce n’est pas destiné seulement au monde de l’art, c’est destiné à l’Internet en générale. C’est une manière d’archiver l’Internet. Et c’est vrai que finalement les modèles d’archi-vage des œuvres d’art sur Internet ressemblent à s’y méprendre aux modèles d’ar-chivage d’Internet. Soit ils sont centralisés comme archive.org avec leur système d’archive où l’on peut remonter dans le temps pour les sites, ou bien ils emploient un modèle contributif. Et effectivement pour le modèle contributif, la question se pose : quel serait la motivation du public à faire ça ? Et la question sera : quels outils d’archivage ? Mais effectivement ça sera une vraie question.

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ANNEXE 5. Recherches autour de différents projets de documentation en réseau

1) Le VMQ

Le Variable Media Questionnaire (VMQ ) est un exemple d’innovation et de collaboration entre institutions culturelles, artistes et volontaires.C’est un outil de conservation conçu par Jon Ippolito, et développé par Still Water et Forging the Future. Cette initiative est une des premières à développer une réflexion autour d’une conservation adaptée au nouveau paradigme dans lequel l’œuvre d’art « fonctionne » comme un système plutôt qu’un objet. La réflexion propose une solution aux problématiques inhérentes aux œuvres technologiques : problématiques liées à l’évolution constante des supports de l’information (ex: CDs, cassettes, logiciels, etc.). Elle propose également un moyen de conserver les œuvres complexes et « variables » comme des installations ou performances qui peuvent êtres modifiées selon l’environnement d’exposition.Le concept principal du VMQ est donc de conserver des données détaillées sur le concept et matérialité de l’œuvre, au lieu de conserver l’objet physique lui-même. Cette démarche permet à l’œuvre d’être « transposée » sur de nouveaux supports quand les anciens deviendront obsolètes. À travers un « questionnaire », le VMQ conserve des informations essentielles sur la variabilité de la matérialité et les possibilités d’évolution des œuvres dans le temps.L’outil lui-même est une base de données en ligne accessible à toute per-sonne souhaitant s’inscrire. Sa structure est ouverte et adaptable à un grand nombre d’œuvres. La base de données est « ouverte » dans le sens où sa structure peut évoluer : il est possible de rajouter de nouvelles parties et de nouveaux composants selon la forme de l’œuvre qu’on souhaite rajouter.

Dans le cadre de ces recherches, j’ai pu tester la base de données du VMQ avec l’aide de Jon Ippolito, qui m’a accompagné pour ajouter une œuvre de Net Art : « A Propos de Nancy Crater » de David Vincent – une œuvre

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provenant du FRAC PACA et qui était à l’ESAA afin d’y être étudiée. C’était la première œuvre de Net Art à être ajouté dans le VMQ. Il fallait donc rajouter de nouveaux composants à la Base de données. Grâce à sa structure adaptable, cette tâche fut relativement simple.

Comment alimenter le VMQAprès avoir demandé d’ouvrir un compte sur le site du VMQ , vous pouvez l’alimenter en suivant ces étapes :

1. Ajoute actionnaire. Ici on ajoute les noms de tout ceux qui ont quelque chose à voir avec l’œuvre : l’artiste, des assistants, l’interviewer, collectif d’artistes, ou institution/musée.Les champs qu’il faut remplir sont : nom, prénom, date de naissance, etc.

2. Ajoute une œuvreChamps : titre, date de création, informations générales sur l’œuvre

3. Ajoute composants de l’œuvre : Ici il s’agit de donner autant d’infor-mations que possible sur la structure matérielle de l’œuvre et sur son « concept ».Les composants que nous pouvons ajouter sont :a) Source : « le contenu d’une œuvre. Ceci est normalement une chose particulière et unique ; un logiciel, une vidéo, ou même une ambiance ou concept à représenter. »b) Matériel : « Un composant générique nécessaire afin de compléter les éléments sources d’une œuvre. Par exemple, un écran télévision, une socle. Les matériels sont fongibles, mais ils devront dans certains cas, remplir certains critères. »c) Environnement : « L’environnement dans lequel une œuvre est exposée ; une vitrine, un réseau, etc. » Sous cette catégorie, nous avons constaté qu’il manquait l’environnement de l’ordinateur personnel pour les œuvres du Net Art. Ippolito a donc rajouté une nouvelle environnement au VMQ afin d’accommoder les œuvres du Net Art.

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d) Interaction : « L’interaction prévue entre l’œuvre et les consommateurs, ex : toucher, manipulation, regard passif, etc.Certains composants sont dépendants sur d’autres (ex : le software est tou-jours dépendant sur le hardware). Le VMQ assure que vous n’oubliez pas d’ajouter des composants qui sont groupés.

4. Ajoute entretien. Une fois les composants ajoutés, il faut si possible créer un « entretien » avec l’artiste, afin de préciser comment l’œuvre doit être vue, quelle importance a chaque composant, lesquels peuvent être modifiés sans enlever la valeur de l’œuvre, quelles sont les limites des changements qu’il peut y avoir, etc.Lorsque vous créez un nouvel entretien, le VMQ vous demande de pré-ciser l’autorité que vous avez de faire un entretien. Même si vous n’avez pas d’autorité sur l’œuvre (vous n’êtes pas l’artiste ou le propriétaire), vous pouvez tout de même répondre à un entretien.Vous répondez à des questions sur l’œuvre et sur le futur de chacun des composants que vous avez ajoutés.Toutes ces informations peuvent être complétées dans n’importe quel ordre et modifiées antérieurement.Le nombre d’entretiens que vous pouvez ajouter est illimité. Plus il y a de points de vues et de réponses, mieux c’est. Vous avez le choix de faire d’autres entretiens plus tard, mais vous devez préciser si vos réponses d’une date antérieure sont à prendre plus ou moins en compte que vos réponses les plus récentes.

Le MétaserveurLe VMQ donne la possibilité de lier ces données à ceux qui sont présentes dans les bases de données locales de différentes institutions. Ces dernières peuvent télécharger une application qui lie leur BD au VMQ. L’application cherchera les donnés dans leur collection et montrera dans le VMQ si la même œuvre est présente dans les deux BD. Ainsi, si une œuvre existe en deux instances différentes dans deux institutions différentes, le VMQ fera automatiquement le lien entre les deux. N’importe quel musée qui possède

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une base de données pourra en principe demander à télécharger un plu-gin qui connectera leur base de données au VMQ.

L’accèsLe VMQ est une solution intéressante pour la conservation collaborative d’œuvres de nouveaux médias – surtout lorsqu’il sera accessible à tout le monde. Un spectateur qui a vu une œuvre ou assisté à une performance, pourra ajouter des informations sur elle. Il pourra même ajouter un entre-tien et répondre aux questions à propos de futures versions de l’œuvre. Il précisera tout simplement qu’il n’a pas d’autorité officielle pour prendre ces décisions. L’idée est que même l’information venant d’une source « non officielle » est mieux que pas d’information du tout. Plusieurs entretiens de spectateurs « non officiels » qui coïncident, peuvent montrer d’une manière assez fiable quel était l’état d’une œuvre à une certaine époque.La seule chose que nous pouvons reprocher à cet outil, c’est le fait qu’il n’est pas consultable sans inscription. L’ouverture d’un compte n’est pas automatique, il faut faire une demande de permission. Et sans compte, il est impossible de simplement consulter les œuvres déjà ajoutés au VMQ.

2) Encyclopedia Dramatica

Sur Internet, il existe plusieurs projets de documentation de la culture spé-cifique au réseau. Un des plus connus est« Encyclopedia Dramatica » (l’En-cyclopédie du drame). Conçu initialement comme une imitation satirique de Wikipedia, Encyclopedia Dramatica (ED) est devenu une ressource importante d’informations sur la sous-culture du réseau, ainsi que sur des différentes activités et projets de la communauté d’Anonymous.Tout comme Wikipedia, Encyclopedia Dramatica est éditée de manière collaborative. Cette encyclopédie est le meilleur moyen pour comprendre la culture du Net, sans avoir besoin de s’y impliquer. Le style de l’encyclopédie est satirique, cru, et politiquement incorrect — à l’image de ce qu’elle do-cumente. Mais elle ne fait pas que documenter. Avec ses forums et son IRC chat, Encyclopedia Dramatica participe également parfois à la coordination de certains projets de la communauté d’Anonymous.

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Encyclopedia Dramatica est un exemple intéressant de collaboration autour d’un projet de documentation. ED est en principe ouvert aux contributions venant des internautes qui s’intéressent au sujet du site. Comme c’est le cas dans la plupart des communautés d’Internet, avant de contribuer aux productions ou au projet central de la communauté, il faut passer du temps à « lurker » et à se familiariser avec le style et les codes de celle-ci.Les nouveaux collaborateurs de l’Encyclopedia Dramatica sont souvent passés par une phase « lecteur » avant de décider de s’inscrire et de contri-buer au site. Cette phase sert à familiariser l’internaute avec l’argot et la construction des articles.L’internaute va ensuite commencer à participer à une petite échelle, en corrigeant les fautes d’orthographe, ou en rajoutant des phrases, ou bien des médias, aux articles du wiki. Les contributeurs peuvent ensuite ten-ter de créer un article entier. Il existe un grand nombre de pages sur ED expliquant les processus et protocoles de création d’un “bon” article. Les nouveaux contributeurs sont également encouragés à communiquer avec certains “sysops” (administrateurs), qui peuvent les aider et répondre à leurs questions. Cette communication peut avoir lieu à travers sa page personnelle (une page personnelle est automatiquement générée quand quelqu’un se crée en compte sur le wiki), ou bien dans les forums ou IRC (chat) associés au wiki.Selon la qualité et l’intérêt de l’article, les administrateurs vont décider de le garder, le supprimer, ou le classer sous la catégorie des articles ayant du potentiel, mais ayant besoin d’être travaillé. Une fois l’article lancé, d’autres contributeurs peuvent l’éditer, rajouter des parties, médias, etc. Finalement, un article considéré comme « fini » peut être « fermé » par un administrateur afin de le protéger de futures modifications, ou laissé ouvert, afin de pouvoir évoluer dans le temps.Les forums de cette communauté sont accessibles depuis la page principale du wiki. Ces forums sont des lieux de rencontre et de discussion, non seule-ment à propos du wiki, mais également à propos des différents événements et sujets auxquels s’intéresse la communauté. Les discussions plus directes entres membres de la communauté ont lieu dans les chats IRC d’ED.

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nce

Dat

e de fi

n : (

date

)

Dat

e de fi

n / d

issol

utio

n.D

ate d

e diss

olut

ion

Dat

e de fi

nD

ate d

e déc

ès

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141

Type

: (c

hain

e de

car

actè

-re

s, en

trée

s mul

tiple

s)D

écrit

de m

aniè

re g

énér

ale l

a cla

sse

à la

quel

le a

ppar

tient

l’él

émen

t. E

st

le m

ême,

ou

simila

ire p

our t

ous l

es

élém

ents

de l

a mêm

e cla

sse.

Les

ter-

mes

choi

sis p

euve

nt êt

re st

anda

rds e

t pr

oven

ir de

: ht

tp://

dubl

inco

re.o

rg/d

ocum

ents

/dc

mi-t

ype-

voca

bula

ry/

Type

Type

Fonc

tion

Form

at :

(text

e, en

trée

s mul

tiple

s)« T

ypiq

uem

ent,

Form

at p

eut i

nclu

re

le m

edia

ou

les

dim

ensi

ons

de la

re

ssou

rce.

For

mat

peu

t êtr

e ut

ilisé

po

ur p

réci

ser l

e lo

gici

el, l

e m

atér

iel

ou a

utre

équ

ipem

ent

néce

ssai

re

pour

affi

cher

ou

faire

fonc

tionn

er la

re

ssou

rce.

Exe

mpl

es d

e di

men

sions

in

clue

nt la

taill

e et

la d

urée

. Il e

st

reco

mm

andé

de

choi

sir la

val

eur d

u fo

rmat

dan

s une

list

e de v

ocab

ulai

re

cont

rôlé

(par

exem

ple,

la li

ste d

es ty

-pe

s de m

edia

défi

nis s

ur In

tern

et) »

Form

atFo

rmat

Form

at

Form

at : L

ieu

:(te

xte,

entr

ées m

ultip

les)

Fo

rmat

: Li

eu :

L’ét

endu

e de

l’em

ploi

de

la

tech

nolo

gie.

Ex

: « e

ntiè

re-

men

t vir

tuel

le »

« p

artie

lle-

men

t virt

uelle

».

----

----

Annexes

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Contribution à la sauvegarde des biens culturels de l ’Internet

142

Form

at : P

late

form

e :(te

xte,

entr

ées m

ultip

les)

Form

at :

Plat

efor

me :

Mod

èle t

echn

ique

de co

mm

u-ni

catio

n. E

x : co

mm

unic

atio

n sy

nchr

one,

asy

nchr

one,

ou

les

deux

. Pré

cise

r si e

lle e

st

com

mer

cial

ou

non

com

-m

erci

al.

----

----

Form

at : P

opul

atio

n :

(text

e, en

trée

s mul

tiple

s)Fo

rmat

: Po

pula

tion

:

Mod

èle

d’in

tera

ctio

n en

tre

mem

bres

de

la c

omm

unau

té.

Déc

rit s

i le

grou

pe e

st p

lus

ou m

oins

gra

nd e

t si l

es li

ens

soci

aux

sont

plu

s ou

moi

ns

fort

s.

----

----

Form

at :

Mod

èle

de p

ro-

fit :

(text

e, en

trée

s mul

tiple

s)

Form

at :

Mod

èle d

e pro

fit :

Déc

rit si

la c

omm

unau

té g

é-nè

re u

ne v

aleu

r éco

nom

ique

vi

sible

ou

pas.

----

----

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143

Form

at : M

édiu

m :

(cha

ine

de c

arac

tère

s,

entr

ées m

ultip

les)

----

Form

at :

Méd

ium

:

« La

mat

éria

lisat

ion

phy-

siqu

e ou

dig

itale

de

la

ress

ourc

e. F

orm

at p

eut

être

util

isé p

our p

réci

ser

le lo

gici

el, l

e m

atér

iel o

u au

tre

équi

pem

ent n

éces

-sa

ire p

our a

ffich

er o

u fa

ire

fonc

tionn

er la

ress

ourc

e.

» Pa

r exe

mpl

e, s

i le

type

de

con

tenu

est

« I

mag

e »,

le fo

rmat

peu

t êt

re «

JP

EG

».

----

Form

at : D

imen

sion

s :(te

xte,

entr

ées m

ultip

les)

----

Form

at :

Dim

ensio

ns :

Préc

ise le

s dim

ensio

ns d

u fo

rmat

.

Annexes

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Contribution à la sauvegarde des biens culturels de l ’Internet

144

Iden

tifia

nt :

(cha

îne

de

cara

ctèr

es, e

ntré

es m

ul-

tiple

s)

« U

ne r

éfér

ence

non

am

bigu

ë à

la

ress

ourc

e da

ns u

n co

ntex

te d

onné

. Il

est

rec

omm

andé

d’id

enti

fier

la

ress

ourc

e pa

r une

cha

îne

de c

arac

-tè

res,

ou u

n no

mbr

e co

nfor

me

à un

sy

stèm

e for

mel

d’id

entifi

catio

n. »

Loc

alisa

tion

L’U

RL

de la

com

mun

auté

ou

adre

sse p

hysiq

ue

Iden

tifian

t :

Le

lien

vers

l’en

droi

t où

l’on

peut

tro

uver

l’ob

jet.

Peu

t êt

re le

UR

L, o

u un

d’in

vent

aire

, si

l’obj

et f

ait

part

ie d

’une

co

llect

ion.

Adr

esse

: (U

RL

, en

trée

s m

ulti

-pl

es)

Adr

esse

, ou

site

web

de

l’ind

i-vi

du

Nat

iona

lité

: (ch

aîne

de

cara

ctèr

es, e

ntré

es m

ul-

tiple

s)

----

----

Nat

iona

lité :

La,

ou

le

s,

natio

nalit

é(s)

de

l’ind

ivid

u.

Sour

ce :

(tex

te, e

ntré

es

mul

tiple

s)«

Une

réf

éren

ce à

une

res

sour

ce

à pa

rtir

de

laqu

elle

la r

esso

urce

ac

tuel

le a

été

dér

ivée

. La

ress

ourc

e ac

tuel

le p

eut a

voir

été

dériv

ée d

’une

au

tre

ress

ourc

e so

urce

, en

tota

lité

ou e

n pa

rtie

. Il e

st r

ecom

man

de r

éfér

ence

r ce

tte

sour

ce p

ar u

ne

chaî

ne d

e ca

ract

ère

ou u

n no

mbr

e co

nfor

me

à un

sys

tèm

e fo

rmel

d’

iden

tifica

tion.

»

Sour

ceSo

urce

----

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145

Lan

gue :

(cha

îne d

e car

ac-

tère

s, en

trée

s mul

tiple

s)

« La

lang

ue d

u co

nten

u in

telle

ctue

l de

la re

ssou

rce.

»La

ngue

des

inte

ract

ions

Lang

ue d

e la m

ajorit

é des

in-

tera

ctio

ns –

souv

ent l

a lan

gue

de l’

infr

astr

uctu

re

Lang

ueLa

ngue

Cou

vert

ure :

(tex

te, c

haîn

e de

cara

ctèr

es)

« La

port

ée o

u la

cou

vert

ure

spat

io-

tem

pore

lle d

e la

res

sour

ce. I

nclu

t ty

piqu

emen

t une

pos

ition

géo

gra-

phiq

ue, u

ne p

ério

de d

e te

mps

, ou

une j

urid

ictio

n. »

Cou

vert

ure

Cou

vert

ure

----

Dro

its : (

text

e) «

Info

rmat

ion

sur l

es d

roits

sur e

t au

suje

t de

la re

ssou

rce.

Typ

ique

men

t, un

élém

ent D

roits

cont

iend

ra u

n ét

at

du d

roit

à gé

rer u

ne re

ssou

rce,

ou

la

réfé

renc

e à

un s

ervi

ce fo

urni

ssan

t ce

tte

info

rmat

ion.

Ces

dro

its s

ou-

vent

couv

rent

les d

roits

de

prop

riété

in

telle

ctue

lle (

IPR

), C

opyr

ight

, et

div

ers

droi

ts d

e pr

opri

été.

Si

l’élé

men

t Dro

its e

st a

bsen

t, au

cune

hy

poth

èse n

e peu

t êtr

e fai

te su

r l’ét

at

de c

es d

roits

, ou

de to

ut a

utre

, par

ra

ppor

t à la

ress

ourc

e. »

Dro

itsD

roits

----

Annexes

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Contribution à la sauvegarde des biens culturels de l ’Internet

146

Con

tact

: (ch

aîne

de c

arac

-tè

res,

entr

ées m

ultip

les)

Cou

rrie

l offi

ciel

ou

pers

onne

lC

onta

ct--

--

Em

ail

Rel

atio

ns : «

Une

réfé

renc

e à u

ne au

tre r

esso

urce

qui

a un

rapp

ort a

vec c

ette

ress

ourc

e. »

Les

rela

tions

sont

touj

ours

des

lien

s ver

s une

autr

e pag

e du

wik

i.

Rel

atio

n : E

st c

réé

par

(pag

e)

Le

nom

de

la p

age

wik

i d’u

n in

di-

vidu

. A r

empl

ir qu

e si

le c

réat

eur

poss

ède

ou d

oit p

ossé

der,

une

page

da

ns le

wik

i.

Rel

atio

n : E

st fo

ndé p

arR

elat

ion

: Est

créé

par

----

Rel

atio

n : C

ontr

ibut

eur

: (pa

ge)

Ent

rez

le n

om d

e la

pag

e de

l’in

-di

vidu

ou

de la

com

mun

auté

qui

a

cont

ribué

à la

cré

atio

n de

la r

es-

sour

ce.

Rel

atio

n : C

ontr

ibut

eur :

Rel

atio

n : C

ontr

ibut

eur :

----

Rel

atio

n : A

Con

trib

uéA

: (p

age)

L’in

divi

du o

u la

com

mun

auté

a

cont

ribué

à la

cré

atio

n d’

un o

bjet

ou

com

mun

auté

qui

pos

sède

une

pag

e da

ns le

wik

i.

Rel

atio

n : A

Con

trib

uéA

----

Rel

atio

n

: A

Con

trib

uéA

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147

Rel

atio

n : A

Part

icip

éA :

(pag

e, en

trée

s mul

tiple

s)L’

indi

vidu

ou

la c

omm

unau

té a

pa

rtic

ipé

à un

évè

nem

ent o

u co

m-

mun

auté

qui

pos

sède

une

pag

e da

ns

le w

iki.

Rel

atio

n : A

Part

icip

éA :

----

Rel

atio

n : A

Par-

ticip

éA

Rel

atio

n : E

stP

arti

eDe

: (pa

ge)

La

ress

ourc

e fa

it pa

rtie

d’u

n ob

jet,

évén

emen

t, ou

com

mun

auté

plu

s la

rge.

Rel

atio

n : E

stPa

rtie

De

Rel

atio

n : E

stPa

rtie

De

Rel

atio

n : E

st-

Part

ieD

e

Rel

atio

n : E

stC

ompo

séD

e : (

page

) La

ress

ourc

e co

ntie

nt d

’autr

es c

om-

mun

auté

s, ob

jets

, ind

ivid

us, e

tc.,

plus

pet

its.

Rel

atio

n : E

stC

ompo

séD

eR

elat

ion

: Est

Com

po-

séD

eR

elat

ion

: Est

-C

ompo

séD

e

Rel

atio

n : A

Ver

sion

: (p

age,

entr

ées m

ultip

les)

L

a re

ssou

rce

poss

ède

des

vers

ions

. M

ettr

e un

lien

ver

s la

page

de

l’ob-

jet,

com

mun

auté

, etc

., qu

i est

une

ve

rsio

n de

cette

ress

ourc

e. P

our ê

tre

des «

vers

ions

» le

s res

sour

ces d

oive

nt

avoi

r le m

ême c

réat

eur.

Rel

atio

n : A

Vers

ion

Rel

atio

n : A

Vers

ion

----

Rel

atio

n : E

stVe

rsio

nDe :

(p

age,

entr

ées m

ultip

les)

L

ien

vers

la p

age

de l’

obje

t, co

m-

mun

auté

, etc

., «

orig

inal

» o

u de

fére

nce.

Pou

r êtr

e de

s « v

ersio

ns »

le

s res

sour

ces d

oive

nt a

voir

le m

ême

créa

teur

.

Rel

atio

n : E

stVer

sionD

eR

elat

ion

: EstV

ersio

nDe

----

Annexes

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Contribution à la sauvegarde des biens culturels de l ’Internet

148

Rel

atio

n : E

stB

aséS

ur :

(pag

e, en

trée

s mul

tiple

s)

La

ress

ourc

e s’i

nspi

re d

’un

autr

e ob

jet, c

omm

unau

té, m

ème,

etc.

Lien

ve

rs la

pag

e d’

un a

utre

obj

et o

u ve

rs

un ca

tégo

rie d

e mèm

e

Rel

atio

n : E

stBa

séSu

r :R

elat

ion

: Est

Basé

Sur :

Rel

atio

n : E

s-tI

nspi

réPa

r :

Rel

atio

n : E

stL

aBas

eDe

: (p

age,

entr

ées m

ultip

les)

L

a re

ssou

rce

a in

spir

é la

cré

atio

n d’

autr

es re

ssou

rces

.

R

elat

ion

: Est

LaBa

seD

e :R

elat

ion

: Est

LaB

aseD

e :

Rel

atio

n :

A

Insp

iré :

Rel

atio

n : E

stU

nF

or-

mat

De

: (pa

ge, e

ntré

es

mul

tiple

s)

« U

tilisé

lors

qu’il

exi

ste

diffé

rent

s fo

rmat

s d’

un o

bjet

aya

nt le

mêm

e co

nten

u in

telle

ctue

l, et

il n

’est p

as

clai

r leq

uel p

récè

de l’

autr

e. »

----

Rel

atio

n : E

stU

nFor

-m

atD

e :--

--

Rel

atio

n : R

éfér

ence

: (p

age,

entr

ées m

ultip

les)

L

a re

ssou

rce

fait

réfé

renc

e à,

ou

cite

un

autr

e ob

jet,

com

mun

auté

ou

indi

vidu

qui

pos

sède

une

pag

e da

ns

le w

iki.

Rel

atio

n : R

éfér

ence

: R

elat

ion

: Réf

éren

ce :

Rel

atio

n : R

éfé-

renc

e :

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149

Rel

atio

n : E

stR

éfér

en-

ciéP

ar :

(pag

e, e

ntré

es

mul

tiple

s)

La re

ssou

rce

est r

éfér

enci

ée p

ar u

ne

autr

e res

sour

ce av

ec u

ne p

age d

ans l

e w

iki.

Rel

atio

n : E

stR

éfér

enci

é-Pa

r :R

elat

ion

: Est

Réf

éren

-ci

éPar

:R

elat

ion

: Es-

tRéf

éren

ciéP

ar :

Prop

riét

és d

e l’A

rtic

le : M

étad

onné

es re

lativ

es à

l’art

icle

Wik

i

Wik

i : R

elat

ion

: Rem

-pl

ace :

(pag

e)

Lien

vers

la ve

rsio

n an

térie

ure d

e cet

ar

ticle

. W

iki :

Rel

atio

n : R

empl

ace :

Wik

i : R

elat

ion

: Rem

-pl

ace :

Wik

i : R

elat

ion

: R

empl

ace :

Wik

i : R

elat

ion

: Est

Rem

-pl

acéP

ar : (

page

) L

ien

vers

la v

ersio

n ac

tuel

le d

e ce

t ar

ticle

.W

iki :

Rel

atio

n : E

stR

em-

plac

éPar

: W

iki :

Rel

atio

n : E

s-tR

empl

acéP

ar :

Wik

i : R

elat

ion

: E

stR

empl

acé-

Par :

Wik

i : I

mag

e re

prés

enta

-tiv

e : (u

ploa

dabl

e)

Télé

vers

er u

ne im

age d

e l’ob

jet p

our

la p

age w

iki.

Wik

i : I

mag

e re

prés

enta

-tiv

e :W

iki :

Im

age

repr

ésen

-ta

tive :

Wik

i : Im

age r

e-pr

ésen

tativ

e :

Wik

i :

Pag

e cr

éé

par

:

(val

eur

par

faut

,def

ault

=cur

rent

us

er)

Nom

de

l’uti

lisat

eur

qui a

cré

é la

pa

ge

Wik

i : P

age c

réé p

ar :

Wik

i : P

age c

réé p

ar :

Wik

i : P

age c

réé

par :

Annexes

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Annexe 8. Liste des extensions ajoutées au Collaborative Art Wiki

Produit version

MediaWiki 1.18.2PHP 5.3.10 (cgi-fcgi)MySQL 5.0.51a-24+lenny5-log

Extensions installées

Semantic Compound Queries (Version 0.3.1) Une fonction du parseur qui affiche plusieurs requêtes sémantiques en même temps, Yaron Koren

Semantic Drilldown (Version 1.1) Une interface d’exercice pour la navigation au travers de semantic data, Yaron Koren et David Loomer

Semantic Forms (Version 2.4.2) Formulaires pour ajouter ou mo-difier des données sémantiques, Yaron Koren, Stephan Gambke et autres

Semantic Forms Inputs (Version 0.6) Types d’entrées additionnelles pour Formulaires sémantiques, Stephan Gambke et autres

Semantic Internal Objects (Version 0.6.8) Réglage des objets inter-nes dans Semantic MediaWiki, Yaron Koren

Semantic MediaWiki (Version 1.7.1) Rendre le wiki plus accessible - pour les machines et les humains (documentation en ligne), Markus Krötzsch, Denny Vrandecic and Jeroen De Dauw. Maintained by AIFB Karlsruhe.

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Contribution à la sauvegarde des biens culturels de l ’Internet

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Pages spéciales

Collection (Version 1.4) Permet de créer des livres, PediaPress GmbH et Siebrand MazelandData Transfer (Version 0.3.9) Permet l’import et l’export de données contenues dans des appels de modèles, Yaron Koren

Nuke (Version 1.1) Donne la possibilité aux administrateurs de sup-primer en masse des pages, Brion Vibber

Greffons de l’analyseur syntaxique

Cite Ajoute les balises <ref[ name=»id»]> et <references/> pour les cita-tions. Ævar Arnfjörð Bjarmason

External Data (Version 1.3.6) Permet de récupérer des données structu-rées à partir d’URL externes, de bases de données et d’autres sources, Yaron Koren, Michael Dale et David Macdonald

Widgets (Version 0.9.2) (r80102) Permet aux administrateurs du wiki d’ajouter des widgets (gadgets logiciels) au wiki en modifiant des pages dans l’espace de noms Widget. Les widgets proposés par la communauté sont disponibles sur MediaWikiWidgets.org, Sergey Chernyshev

Divers

ConfirmEdit (Version 1.0) Offre des techniques CAPTCHA pour pré-téger contre le spam et la découverte des mots de passe par essais multiples, Brion Vibber et autres

FancyBoxThumbs (Version 1.0.1) Displays thumbnailed images in a Mac-style «lightbox» that floats overtop of web page. A simple and fancy lightbox alternative, Jason Gill

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Validator (Version 0.4.13) Le validateur fournit aux autres extensions un moyen simple de valider les paramètres des fonctions de l’analyseur syntaxique et des extensions de balises, de définir des valeurs par défaut et de générer des messages d’erreur Jeroen De Dauw

WikiEditor (Version 0.3.0) Fournit un interface de modification de wikitexte extensible et plusieurs fonctionnalités. Trevor Parscal, Roan Kattouw, Nimish Gautam et Adam Miller

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